28

Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

  • Upload
    others

  • View
    4

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN
Page 2: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

Pour paraître prochainement :

Sous le patronage du « Masque »

Sœur Angèle et les seigneurs du jour.

Sœur Angèle et les disciples de saint Hubert.

Sœur Angèle et les roses de Noël.

Par Henri CATALAN

Déjà parus : Le cas de Sœur Angèle.

Sœur Angèle et les fantômes de Chambord.

Sœur Angèle et ceux de la mouise.

Page 3: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

LE MASQUE Collection de romans d'aventures

créée et dirigée par ALBERT PIGASSE

UN MORT ABUSIF IGOR ALEX ET PIERRE CASTELET ENQUÊTENT

Page 4: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

DU MÊME AUTEUR

aux éditions de la Nouvelle Revue Française :

Romans :

LE CANJUERS (Epuisé) LA CORDÉE (Epuisé) LA HAUTE NEIGE, (Nouvelle édition)

Romans policiers : Série M. Allou, juge d'instruction

LA MAISON QUI TUE (Epuisé) LA FUITE DES MORTS (Epuisé) LE LOUP DU GRAND-ABOY (Epuisé) LE PIÈGE AUX DIAMANTS (Epuisé) LE FANTOME DE MIDI (Epuisé) LA BÊTE HURLANTE (Epuisé) L'ARMOIRE AUX POISONS (Epuiséj LE COLLIER DE SANG (Epuisé) LE CRI DES MOUETTES (Epuisé) LE DOUBLE ALIBI (Epuisé) MASQUES NOIRS (Epuisé) A TRAVERS LES MURAILLES (Epuisé)

Collection Le Scarabée d'Or :

LES VERRES NOIRS

Aux éditions Jules Tallandier :

LA BÊTE HURLANTE (Nouvelle édition)

Page 5: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

UN MORT ABUSIF PAR

NOËL VINDRY

PARIS LIBRAIRIE DES CHAMPS-ÉLYSÉES

2 BIS, RUE DE MARIGNAN, 2 BIS

Page 6: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

Copyright by LIBRAIRIE DES CHAMPS-ALVSÉES, 1953. Tous droits de traduction, reproduction, adaptation, représentation

réservés pour tous pays, y compris l'U. R. S. S. Dépôt légal : 3 trimestre 1953, N° 253.

Page 7: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

CHAPITRE PREMIER

Je devais, ce samedi, recevoir directement les clients, et leur tenir moi-même, s'ils étaient nouveaux, le petit discours maison, emploi de Delphine où je me sens un peu ridicule; il est toujours délicat de prononcer son propre panégyrique, même et surtout si l'on y croit.

Mais Delphine, ma secrétaire, était partie soigner sa tante, pauvre vieille femme qui tombe malade tous les week-ends de printemps, quand il fait beau; d'ailleurs, avec beaucoup de correction, elle se rétablit le lundi matin dès la première heure.

Il me fallait donc aussi, aucun de mes hommes n'y étant bien habile, répondre au téléphone, ce matin directement branché dans mon bureau. Et déjà il avait sonné une dizaine de fois pour pas grand-chose, quand il m'apporta une voix masculine et qui semblait émue.

— M. Igor Alex, s'il vous plaît? — Il vous écoute avec attention. — Pouvez-vous venir tout de suite? Vous ne me

connaissez pas, mais... C'était un client nouveau, je devais y aller du discours

maison, mais c'est moins gênant au téléphone. Donc, j'interrompis :

Page 8: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

— Auparavant, monsieur, je dois attirer votre atten- tion sur trois points...

— Vous le ferez ici! Venez vite! C'est urgent! — Non, il importe que je le fasse avant de me

déranger, vous allez comprendre. Ce sera rapide, du moins si vous me laissez parler. Primo, je suis le détec- tive le plus cher de France et sans doute d'Europe.

— Tant pis pour moi, ce qui m'arrive est encore plus grave.

— Bon, parfait. Secundo, je ne m'occupe ni d'enquêtes pour divorces, ni de renseignements pour mariage; ne m'appelez donc que s'il s'agit d'un cas très important.

— Il y a un mort dans le fauteuil en face du mien. — Un mort intéressant? — Il fait de son mieux; il porte ostensiblement un

poignard dans la poitrine. — Bon, parfait. — C'est un point de vue... — Excusez-moi; en style parlementaire, mes paroles

ont un peu dépassé ma pensée. D'un geste machinal, je regardai l'heure à mon poi-

gnet, bien qu'il y ait une pendulette sur la table, c'est un réflexe chaque fois qu'on me parle de crime. Dix heures quatre. Je repris, sans hâte ni lenteur :

— Enfin, tertio, veuillez noter que je respecte toujours scrupuleusement le secret professionnel, mais je n'aide personne à cacher ce que je juge coupable; et je préfère alors laisser tomber l'affaire. Donc, si c'est vous qui avez tué ce pauvre diable, raccrochez ou parlons d'autre chose.

— Non, ce n'est pas moi. — Vous en êtes bien sûr? — Autant qu'on peut l'être d'une chose humaine. — Bon, parfait. — D'accord cette fois, répondit l'inconnu. Donc,

Page 9: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

venez vite, nous vous attendons, le mort et moi, avec impatience.

La voix cherchait à plaisanter un peu, mais son angoisse demeurait perceptible; cela se comprenait, il n'est jamais agréable de téléphoner en face d'un cadavre, même s'il n'a pas l'air d'écouter; mon client voulait pourtant sembler désinvolte; pour me tromper? pour se rassurer? Je répondis sur le même ton :

— Je viens, à une dernière condition... — Je vous en prie, ne tardez pas davantage. — C'est une condition indispensable, je vous assure.

Il me faut votre nom et votre adresse. — Oh! oui, pardon! Je suis tellement... (Il allait dire

« affolé », mais il s'arrêta à temps.) Rue de la Pépinière, numéro 25 bis. Au troisième, vous verrez la plaque : « Louis Gauthier, conseil juridique, contentieux. » La porte sera entrouverte, entrez le plus silencieusement possible; puis poussez, sans frapper, la deuxième porte à droite dans le vestibule.

— Entendu; c'est à côté; j'arrive dans quelques minutes.

Je confiai la garde du bureau à l'un de mes auxiliaires, et, sans manteau ni chapeau, je dévalai deux par deux les marches d'escalier; non que je fusse zélé à ce point, mais c'est un excellent exercice d'assouplissement et d'équilibre.

Un samedi de printemps, il ne fallait pas non plus compter sur mon chauffeur, il soigne également sa tante. (Tous mes employés ont en cette saison l'esprit de famille très développé.) Mais je pus rapidement trouver un taxi et j'arrivai à dix heures douze devant la maison; un immeuble d'affaires, très convenable.

Négligeant l'ascenseur, je grimpai les marches trois par trois; c'est une excellente préparation à la lutte

Page 10: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

qui va s'engager; lutte féroce, non point contre l'assassin, qui généralement ne vous a pas attendu, mais contre l'adversaire n° 1, le client : même s'il est innocent, il cherche toujours à vous cacher quelque chose et il faut lui arracher les vérités au tire-bouchon; le mort, bien qu'il mente aussi quelquefois, se montre en général plus sincère.

Troisième étage, voici la plaque : Louis Gauthier, conseil juridique, contentieux, rédaction d'actes. En outre, un écriteau imprimé pend à la poignée : Fermé le samedi. Heureuse rencontre; les clients pourraient se sentir gênés aujourd'hui.

Je me glissai dans le vestibule, refermai la porte sans bruit. D'un coup d'œil professionnel, j'appréciai, non les indices, mais l'état des lieux. J'étais accoutumé à un plus grand luxe dans ma clientèle; mais je sais qu'il ne faut pas juger d'après l'apparence, surtout les locaux commerciaux; celui-ci, après tout, clair, très net, très correct, élégant même, suffisait à légitimer de bons espoirs d'honoraires.

Et j'ouvris la deuxième porte à droite.

Tout de suite je vis la victime. Assis dans un grand fauteuil de cuir, l'homme semblait

dormir; la tête, inclinée sur la poitrine, ne laissait voir que des cheveux taillés en brosse.

Je m'avançai, tâtai la main, les muscles du cou. Il était mort depuis une heure environ; je murmurai :

— Bon, parfait. Je voulais seulement exprimer que, de ce côté du

moins, on tenait une certitude. Oui, bien mort. Mais comme il paraissait calme! et si correct dans ses vête- ments sombres, que le manche d'ivoire du poignard, plaqué sur la poitrine, choquait comme une inconve- nance.

Page 11: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

Je me tournai vers le vivant — aussi vivant, lui, qu'on peut l'être. Bien plus grand, plus gros, plus large que moi; mais vingt ans de plus; avec une figure épanouie sous les abondants cheveux gris, une bouche très fine qui cherchait à sourire, un regard vif qui voulait se rassurer. Pas du tout l'aspect d'un assassin, du moins d'un assassin de théâtre; il aurait bien mieux joué les victimes, mais je m'abstins d'exprimer cette critique.

— Eh bien, m'écriai-je avec cordialité, vous avez choisi un singulier compagnon pour le week-end?

— Ce n'est pas moi qui l'ai choisi, dit-il piteusement, c'est lui qui s'est imposé. Je l'ai trouvé en entrant, qui m'attendait.

— Et vous n'arrivez plus à vous en débarrasser? Téléphonez donc à la police, elle se fera un plaisir de vous venir en aide. Mais peut-être est-ce déjà fait? Non? Depuis combien de temps avez-vous découvert cet ori- ginal client?

Il eut une infime hésitation; et je bondis — morale- ment si j'ose dire — pour barrer la route au mensonge qui allait jaillir :

— Quelqu'un vous a peut-être vu arriver? Il battit des paupières, deux ou trois fois, se reprit et avoua : — Oui, j'ai parlé au concierge. Et à la dactylo. — La dactylo? Je croyais votre bureau fermé aujour- d'hui? — Il vient quand même une dactylo pour achever

les copies urgentes. — Bon, et il était quelle heure? — Dix heures moins dix, à peu près. — Et vous m'avez appelé seulement à dix heures

deux... oui, j'ai regardé ma montre à dix heures quatre.

Page 12: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

Je laissai peser un moment de silence; et soudain, comme une inspiration, la réponse jaillit :

— Je cherchais votre numéro, monsieur Alex; j'étais un peu nerveux et ne le trouvais pas; je cherchais à « Igor »...

Sans en avoir trop l'air, mes yeux, déjà, avaient inspecté la pièce; un beau mobilier moderne, point luxueux comme le mien, mais très suffisant et de très bon goût. Une petite peinture de Braque me rendait le client sympathique; mais ce n'était pas elle que je contemplais en ce moment, c'était un bloc-notes, posé sur la lourde table claire; je le voyais à l'envers, mais lisais quand même couramment; il se trouvait encore au feuillet de la veille; et vers le bas, je voyais mon nom et mon numéro de téléphone, suivis de quelques lignes sans intérêt.

Donc, c'était dès hier soir que mon client se préparait à m'appeler...

Il avait suivi mon regard. — Je vous conseille, dis-je, de prévoir pour la police

une autre explication de votre lenteur. Le visage prit une expression si gênée qu'il me fit

pitié, et j'ajoutai ce commentaire : — Vous comprenez, monsieur Gauthier, la police est

très jalouse; elle déteste qu'on prévienne avant elle la concurrence privée; alors ne lui dites pas que vous m'avez attendu pour l'appeler... Racontez autre chose; que vous n'êtes pas entré tout de suite dans cette pièce, que vous vous êtes arrêté d'abord dans un autre bureau. C'est possible?

— Oui... — Bon, parfait. Sinon, ils se demanderaient ce que

vous avez fait pendant ces douze minutes, sans compter les huit qui viennent de s'écouler depuis mon arrivée. Douze minutes... c'est long, savez-vous, surtout avec un

Page 13: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

client comme celui-ci, qui n'avait plus besoin de telle- ment de conseils juridiques.

Et mon regard, maintenant, se fixait sur le foyer de la cheminée, où je voyais un petit tas noir de papiers brûlés... Les cendres en avaient été si soigneusement émiettées, que les services techniques eux-mêmes n'y pourraient rien reconnaître.

Mon pauvre client semblait de plus en plus ennuyé; non point tant, peut-être, par mes remarques, exprimées ou muettes; mais par la préfiguration qu'il y voyait de celles de la police, qui seraient plus brutalement for- mulées.

— Allons, dis-je, vous feriez bien de leur téléphoner le plus vite possible. Auparavant, si vous voulez, exposez- moi rapidement ce que vous attendez de moi. Y a-t-il quelque chose qui vous gêne, outre l'obstination de ce visiteur?

Et Gauthier murmura en réponse : — Oui. C'est le poignard. Cela paraissait de l'humour noir, car enfin, de nous

trois, ce n'était certainement pas mon client qui avait le plus à se plaindre du poignard... Mais je n'osai pas lui en faire la remarque, car maintenant il ne plaisantait plus du tout et sa peur enfin s'étalait en pleine lumière. Je demandai :

— Que lui reprochez-vous donc, personnellement, à ce poignard?

— De m'appartenir... Oui, en effet, c'était gênant; il y a des objets, comme

cela, qu'il vaut mieux ne pas prêter à la légère; j'en convins et j'ajoutai : — Où se trouvait-il normalement?

— Là, sur ma table; il me servait de coupe-papier. Sur la table, en effet, se trouvait un gros livre de

droit, à moitié coupé.

Page 14: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

— Je lisais encore hier soir, m'expliqua Gauthier, le souffle court. Et comme la femme de ménage ne vient pas le samedi, rien n'a été essuyé... alors, vous comprenez, mes empreintes digitales doivent s'y trouver, en long, en large et en travers.

En effet, je l'avais observé tout de suite; sur l'ivoire poli du manche, des empreintes s'étalaient comme pour une démonstration de médecine légale...

— Si ce n'est que cela, dis-je, vous pouvez vous rassurer, du moins si vous n'êtes pas l'assassin? Mais vous en sentez-vous bien sûr?

Il essaya encore de sourire : — Il me semble, dit-il, que si c'était moi je le

saurais. On ne peut quand même pas être distrait à ce point.

— Bon, parfait. Alors ne craignez rien. Les empreintes du coupable, là où il a saisi l'arme, ont recouvert les vôtres; et elles vous innocentent.

— Mais s'il portait des gants? — Alors vous êtes moins innocenté, mais quand même

vous n'êtes pas accusé. Les gants, à leur façon, laissent des traces. Vous savez de quoi sont constituées les empreintes digitales? C'est une série de minuscules gout- telettes de sueur, en très léger relief; un gant, un mouchoir, si l'on serre fort, les écrase; je ne sais pas si vous avez l'habitude, mais je vous assure qu'il faut serrer à bloc pour poignarder quelqu'un! En outre, l'arme glisse toujours un peu dans la main gantée, ne serait-ce que d'un centième de millimètre, et les traces précédentes se trouvent étalées comme une encre mal séchée.

— Nous pourrions nous en assurer? — Ah! non, cela n'est visible qu'en macrophota-

graphie. Mais alors, comme le nez sur la figure; oui, je vous le garantis formellement : si quelqu'un d'autre a serré le manche de l'arme, avec un mouchoir ou un

Page 15: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

gant, vos traces antérieures, même restées très lisibles, ne vous accusent pas; elles sont abîmées, déformées. Donc, maintenant, si vous n'éprouvez pas d'autre inquié- tude, je vous conseille vivement d'appeler Police-Secours; c'est le 17.

Il me parut un peu rasséréné. En tout cas, ce fut d'une main ferme qu'il décrocha le combiné; et sa voix annonça ce qui clochait ici, avec la même assurance qu'il devait montrer pour les questions de loyer ou d'impôts.

— Très bien, dis-je quand il eut terminé. Nous en avons maintenant pour un quart d'heure; ce n'est pas une équipe de secours qu'on va vous envoyer, mais des techniciens avec médecin en tête; il faut le temps de les réunir. La question est de savoir si je reste ou si je m'en vais.

— Pourquoi partiriez-vous? Je lui exposai, d'un ton aussi modeste qu'il m'était

possible, que ma présence ne passerait pas inaperçue et que les journaux en parleraient. Cela ne risquait-il pas de le gêner?

— Mais non, s'écria-t-il; au contraire... — Au contraire? J'avais, en appuyant, répété l'étrange formule et il

passa la langue sur ses lèvres d'un air embarrassé. Puis, après cet instant de silence, il se jeta dans une explication confuse :

— Mieux vaut qu'on sache... que je suis protégé. — Quel danger courez-vous donc? Il s'affolait un peu : — Aucun! mais quand même... cet homme qu'on a

tué ici... mieux vaut qu'on vous sache derrière moi. Je le regardai de biais, en souriant. — Au fait, monsieur Gauthier, suis-je bien derriète vous?

Page 16: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

Il comprit aussitôt l'allusion; ouvrant un tiroir, il en tira un carnet de chèques.

— Je pense que nous nous entendrons, dit-il, en s'asseyant à son bureau.

— Un instant, répliquai-je. Il est bien spécifié que je vous assisterai contre toute attaque injuste, contre tout danger où vous seriez uniquement la victime. Sommes-nous bien d'accord? Je dois ajouter que mon point de vue n'est pas toujours celui du Code pénal et que je reste libre de mes jugements.

— Nous sommes d'accord, dit-il simplement en dévis- sant le capuchon de son stylo. Asseyez-vous.

Tandis qu'il écrivait, je m'étendis dans un large fau- teuil de cuir sombre. Le mort, dans un autre fauteuil tout semblable, se trouvait en face de moi, à quelques mètres, et je pouvais l'observer tranquillement.

Un homme de cinquante à soixante ans, plutôt maigre. Le poignard, par sa position, indiquait un coup frappé de haut en bas, ce qui était normal : l'agresseur debout, la victime assise. Le coup était porté très obliquement, le manche sur toute sa longueur touchant presque le corps; et de gauche à droite (par rapport au spectateur, si j'ose dire), ce qui révélait un gaucher. Le coup était certainement arrivé en plein cœur. Je remarquai la jolie garde plate, en or ciselé, plaquée de côté contre le gilet.

Et rien de tout cela ne semblait avoir ému la victime, qui souriait presque dans sa pose abandonnée! Frappée dans son sommeil? Non, les yeux restaient ouverts. Le pauvre homme paraissait, de l'aventure, beaucoup moins surpris que moi, beaucoup moins troublé que Gauthier; il semblait avoir dit merci au meurtrier, ce qui est une politesse rare.

— Voici le chèque, dit Gauthier. Est-ce que cela pourra aller, sous réserve de graves complications?

Page 17: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

Je regardai. Cela n'allait même que trop bien. La somme était beaucoup trop forte pour le service jusqu'ici demandé (et pour que je le dise il faut que ce soit vrai). Néanmoins je ne protestai pas (il ne faut quand même pas exiger l'impossible), mais je me sentis méfiant... Le trop beau chèque dessinait, si j'ose dire, un présent lumineux sur un fond d'avenir sombre...

De nouveau, mon client s'essayait au ton dégagé. Il disait :

— Et maintenant, monsieur Alex, il ne vous reste plus qu'à écouter le peu que je sais dans cette étrange histoire.

— Je le ferai bientôt, répliquai-je, puisque vous l'exposerez dans quelques minutes à l'inspecteur qui dirigera l'équipe. Je ne veux pas vous obliger à répéter.

J'avais parlé avec un rien de sécheresse, car un soupçon me venait. Louis Gauthier, pensais-je, voulait d'abord essayer sur moi un récit qu'il sentait mal rodé. Il espérait que je lui en signalerais les invraisemblances.

Mais cela, non. Ce n'est pas mon métier. Je l'avais loyalement prévenu : je le défendrais contre toute attaque injustifiée, mais non pas contre une enquête honnêtement conduite. Mon rôle n'a jamais été de protéger les coupables; je veux dire ceux qu'en cons- cience je juge tels, car je suis parfois bien plus indulgent et parfois bien plus sévère que la justice officielle.

Gauthier était-il coupable? Du meurtre ou d'autre chose?

Dans mon ignorance actuelle, je devais d'abord laisser opérer la police.

Je pouvais cependant lui donner un conseil, parce que c'était là quelque chose qui me concernait; mon client ne devait point pâtir de s'être adressé à moi.

— Dites-leur, repris-je, que vous les avez prévenus les premiers; vous m'avez téléphoné juste après et je

Page 18: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

viens d'arriver. S'ils vous demandent pourquoi vous m'avez appelé, répondez que ce fut une inspiration irréfléchie...

— Oui, c'est entendu. Mais je voudrais quand même vous expliquer...

De nouveau, je coupai : — Non; moins j'en saurai, mieux cela ira pour le naturel de notre attitude. Et comme il allait insister, je repris plus nettement : — Si vous voulez me demander ce qu'il vaut mieux

dire ou taire, ce n'est pas mon métier de vous répondre. Et si c'est là le service que vous désiriez, reprenez votre chèque et quittons-nous bons amis.

Déjà je tirais le papier de ma poche. — Non, non! s'écria Gauthier. Pas du tout! Vous avez

raison... D'ailleurs je compte bien dire la vérité. Pourquoi ne la dirais-je pas? Mais les voici, je crois?

On entendait, dans le lointain, la sirène sur deux notes des cars de police, point tragique, mais brutale... Elle se rapprocha très vite et se tut sous nos fenêtres.

Page 19: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

CHAPITRE II

Mon client redevenait nerveux, ce qui se remarque particulièrement chez les hommes un peu lourds; il ne savait plus que faire de ses mains, comme si tous ses embarras lui venaient d'elles.

— Mettez donc votre bloc-notes à la page d'aujour- d'hui, lui conseillai-je.

Il obéit aussitôt et, gêné, me tendit la feuille arrachée, où mon nom s'étalait prématurément. Je la regardai avant de la fourrer dans ma poche : aucun rendez-vous n'y figurait pour ce matin; et la page d'aujourd'hui, je le vis d'un coup d'œil, restait vierge. La victime était donc venue mourir ici sans permission ni préavis?

La sonnette retentit plus tôt que nous ne l'attendions et Gauthier bondit de son siège comme s'il explosait.

Il courut vers le couloir, et j'entrevis la dactylo qui allait ouvrir; une petite blonde très gentille; je souhaitai de tout mon coeur qu'elle ne fût pas l'assassin. Déjà son patron, la prenant aux épaules, la faisait pirouetter dans l'autre sens :

— Je m'en charge, reprenez vite votre travail, ne vous occupez de rien.

Elle disparut; Gauthier ouvrit la porte du palier, et le défilé commença.

Page 20: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

En tête venait un vieux médecin; nous nous étions rencontrés parfois, il me fit un petit sourire, tout petit, car il ne s'occupait guère des vivants. Suivait cet échalas d'inspecteur Birottin, qui me reconnut sans plaisir.

Pour bien imaginer les sentiments de la police offi- cielle à l'égard de la police privée, il faut évoquer, selon son degré de culture, les relations de Rome et de Çarthage, ou celle des chiens et des chats.

Nos buts sont différents et souvent opposés; l'une cherche un coupable, l'autre protège un client; je fais passer les intérêts de la victime avant ceux de la société et ils ne coïncident pas toujours; car la victime peut désirer (pour raison pécuniaire ou morale) que le cou- pable répare, mais ne soit pas pris; et je juge, ma foi, que cela regarde la victime avant tout. Mais les officiels pensent autrement, ils veulent, eux, aboutir à une arres- tation, même si la victime en subit un tort supplé- mentaire.

Cependant, la police m'accorde, dans ma profession, une place particulière; le fait que je n'ai jamais agi contre l'enquête officielle les désarme, mais les irrite aussi : mon innocence leur semble une farce, presque un outrage à magistrat... Et puis, ce qui complique encore, on sait dans la maison que le commissaire Castelet est mon ami d'enfance.

Tout cela, afin d'expliquer que si l'inspecteur princi- pal Birottin me montra les dents, c'était dans un essai de sourire, imité du mieux qu'il pouvait. Venaient der- rière lui d'autres seigneurs de moindre importance, les uns avec uniforme, les autres sans, quelques-uns portant des objets divers, et d'autres ne portant rien. Ils atten- daient leur tour d'entrée en scène. Le médecin s'avança vers son mort avec empressement, tout sourire, comme s'il retrouvait un membre d'une vieille famille amie. Et

Page 21: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

il lui parla aussitôt avec beaucoup de cordialité, hochant sa barbe blanche.

— Alors, que vous arrive-t-il? On vous a tué? Mais c'est très ennuyeux, ça.

— Bah! dis-je, la première fois surtout. Mais le docteur, spécialiste des morts, ne causait guère

avec les vivants; sans me répondre, il poursuivit son étrange entretien.

— Et sommes-nous bien mort, au moins? Oui, c'est parfait. Et depuis combien de temps? Il faut me le dire. Une heure et demie au moins, deux heures au plus. (Heureusement le docteur fournissait aussi les réponses.) Oui, c'est bien ce que je pensais. De quelle façon? Oh! cela ne se voit que trop, mon pauvre ami, inutile de me répondre. Ce n'est pas notre faute, nous ne pouvions guère survivre avec cet outil dans le cœur.

— Combien de coups de poignard? interrogea Birottin. — Oh! un seul. De cette qualité, nous n'avions pas

à en exiger davantage. N'est-ce pas? c'était bien suffisant pour mourir?

— Demandez-lui donc aussi, grommela Birottin, pourquoi il ne s'est pas défendu.

— Et pourquoi ne nous sommes-nous pas défendus? interrogea patiemment le docteur. Eh bien! oui, parce que nous n'avons pas vu venir le coup; on nous a frappé par-derrière.

Je faillis pousser un cri. Etais-je stupide de n'y avoir pas pensé! L'assassin n'était pas un gaucher venu de face, mais un simple droitier placé derrière! L'angle du poignard (le manche touchait presque le corps sur toute sa longueur), s'expliquait bien mieux ainsi.

Mon erreur de diagnostic bénéficiait quand même de circonstances atténuantes : il n'était pas normal de cir- culer derrière ce fauteuil, placé près du mur; il fallait

Page 22: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

que le meurtrier fût venu là ostensiblement, au vu et au su de la victime, et que celle-ci ne se fût pas inquié- tée de cette étrange manœuvre.

— Il est donc mort sur le coup? demanda l'inspec- teur. Il n'a pas eu, semble-t-il, un seul geste ni pour se protéger, ni pour s'enfuir.

— Sommes-nous mort sur le coup? demanda le doc- teur avec bonté. Non, n'est-ce pas? Les blessures au cœur ne provoquent presque jamais la mort instanta- née, il ne faut pas être trop pressé; on doit laisser à l'hémorragie le temps d'agir, n'est-ce pas; c'est elle seule qui amène le décès. Au bout de combien de temps? Cela, monsieur l'Inspecteur, dépend de la place exacte du coup; certains blessés ont survécu des heures, on a même pu les opérer; mais ce n'est pas notre cas. D'après la quantité de sang répandu, je serai bien généreux en nous accordant huit minutes; trop géné- reux; quatre à six minutes doivent nous suffire pour être tout à fait mort.

— C'est plus qu'il ne lui en fallait pour un geste de défense ou de fuite! affirma Birottin.

Mais le bon docteur considérait comme un devoir de défendre son mort.

— Eh non! eh non! ne nous blâmez pas si vite! Nous sommes, tout de suite, sous le coup, tombé en syncope; à l'instant même. Nous n'avons pas du tout profité de ces six minutes de grâce.

— En somme, il ne s'est pas vu mourir? — Non, pas du tout, et cela vaut mieux; ce n'est

pas un spectacle bien agréable. — C'est étrange, insista l'inspecteur, qu'il n'ait pas

eu ne fût-ce qu'un sursaut... — Oh! il a pu l'avoir, c'est même très probable, et

puis il est retombé évanoui dans la même position; le cas est fréquent.

Page 23: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

— Le suicide est exclus, n'est-ce pas? — Oh! absolument exclus! la position de l'arme ne

l'aurait permis d'aucune façon, on n'aurait point de force pour l'enfoncer sous cet angle, le manche contre les côtes, même à deux mains.

C'était l'évidence même. — Je voulais vous le faire officiellement confirmer,

reprit Birottin, puisque c'est votre métier. Et dites-moi, docteur, le coup a-t-il porté avec une grande violence? Non, je voulais dire : nécessitait-il une grande force physique?

— Pas nécessairement. Il y fallait surtout beaucoup de décision, de fermeté, d'audace. Plutôt des qualités morales, vous voyez?

— Non... grogna Birottin, qui me vit sourire. — Mais aussi, de la vivacité, beaucoup d'adresse, et

je dirai presque... oui... un peu d'habitude. J'intervins pour la première fois : — Qui donc, docteur, s'adonnerait sans inconvénient

pratique à de si mauvaises habitudes? L'échalas laissa tomber sur moi un regard pesant,

mais le bon docteur objecta avec patience : — Détrompez-vous, monsieur, on rencontre des

maniaques en toutes spécialités. Il y a une quinzaine d'années, — vous n'exerciez pas encore, l'inspecteur et vous, — huit personnes en un an furent poignardées exactement de la même façon, par-derrière. C'était dans la rue et la nuit, mais à part ce détail, la technique était rigoureusement la même, très caractérisée par sa finesse et sa précision; du travail de chirurgien, si j'ose dire, que mes confrères m'excusent... L'assassin s'était exercé longuement sur un mannequin.

— On le connaît donc? s'écria l'inspecteur plein d'espoir.

Page 24: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

— Mais oui. Il s'appelle Paulo le Roux; un petit bonhomme tout en nerfs... — On l'a arrêté? — Et même guillotiné. — Ah... alors tant pis... murmura Birottin très déçu. — Vous auriez voulu, dis-je, qu'il se fût échappé,

pour pouvoir le reprendre? Ainsi repeuple-t-on les chasses avec du gibier à abattre.

Non, je ne serai jamais l'ami de ce bon Birottin, je l'ai compris à son regard.

— Eh bien! reprit le docteur, pouvons-nous encore vous être utiles à quelque chose? ou nous permettez- vous de partir tous les deux pour l'Institut médico- légal? Il me semble que notre rôle ici est terminé, nous ne servons plus à rien ni l'un ni l'autre.

— Un instant, dit l'inspecteur. Nous devons prendre nos photographies.

Et aussitôt, une partie de l'escorte entra en action. On entendit des déclics sous les éclairs de magnésium.

— Quelques « macro » du poignard avant qu'on le retire, ordonna ensuite l'inspecteur.

Aussitôt un des photographes placa sur pied un appareil, y adjoignit une petite chambre noire, précé- dée elle-même d'un objectif, qu'il approcha jusqu'à vingt centimètres de l'objet; il en obtiendrait ainsi les empreintes digitales grossies quatre fois. Ces empreintes, un autre auxiliaire s'en était occupé pen- dant ce temps, les saupoudrant de minium pulvérulent qui les rendait beaucoup plus visibles. Sur la poignée incurvée, renflée aux deux extrémités, les traces, abon- dantes, se détachaient maintenant en rouge.

Les macrophotos terminées, Birottin retira le poi- gnard de la plaie, en le tenant par les bords de la garde, trop minces pour qu'une empreinte utile y pût être relevée.

Page 25: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

Il le plaça debout, la lame, plate et assez large, fixée sur un support approprié; on prit de nouvelles photo- graphies dans tous les sens et sous tous les angles. Après quoi, l'objet fut placé dans une boîte spéciale, où des supports ingénieux l'immobilisèrent presque sans contacts.

Pendant qu'on achevait ce travail, l'inspecteur avait commencé de vider les poches du mort. Elles ne livrèrent que ce qu'on peut trouver sur tout Français moyen. Seul le portefeuille retint l'attention de Birot- tin, il en vérifia soigneusement le contenu; et avec une telle attention, que je pus m'approcher, regarder par- dessus son bras, sans qu'il s'en aperçût.

Il y trouva des billets de banque, en quantité nor- male.

— Le mort avait de quoi vivre, grogna-t-il. Il en retira ensuite quelques papiers sans intérêt,

mais qui présentaient cette particularité, qu'aucun n'in- diquait de nom ni d'adresse.

Il chercha ensuite, sur le costume, les marques de tailleur, et n'en trouva pas. Il grommela qu'il verrait mieux à l'Institut médico-légal, mais que d'ores et déjà, ce mort lui paraissait prendre de bien minutieuses précautions pour demeurer anonyme; Birottin semblait lui en vouloir un peu, il le traitait déjà plus en suspect qu'en victime. La police déteste l'anonymat; rien ne l'apaise comme une pièce d'identité, si vague soit-elle.

Il ne remarqua pas, dans l'âtre, le petit paquet de cendres noires... Ce n'était pas à moi de le lui indiquer.

Enfin, si inquiétante que lui parût la victime, il fal- lait bien qu'il la laissât partir. Mais il la suivit d'un œil soupçonneux sur la civière qui l'emportait. Et puis la méfiance quand même le domina et d'un ordre bref il interrompit la manœuvre. S'adressant pour la pre-

Page 26: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

mière fois à Gauthier, mon client, il lui demanda avec sévérité — comme s'il lui reprochait de mauvaises fré- quentations :

— Comment était-il entré ici? — C'est mon employée, Mlle Ninon, qui lui a

ouvert, quand il est arrivé ce matin vers neuf heures. — Mlle Ninon... répéta l'inspecteur en un grogne- ment. — Mais il était alors vivant, précisai-je comme pour

excuser la jeune fille. Birottin me lança un regard noir, puis, en quatre

enjambées, il atteignit le bureau de la jeune dactylo. — Mademoiselle Ninon, pouvez-vous venir un

instant? Elle obéit, sans curiosité apparente; elle devait écou-

ter à la porte depuis assez longtemps pour que le mort ne la surprît pas.

Il ne l'effraya pas non plus. La blonde et frêle jeune fille s'approcha sans frémir de la civière; une fois de plus, j'admirai combien peut être stimulant, chez n'im- porte qui, le désir de jouer son petit rôle dans une affaire criminelle.

Birottin lui demanda, bourru : — Reconnaissez-vous l'individu que vous avez intro-

duit ce matin? Déjà la victime, à cause de son anonymat, n'était

plus qu'un « individu »... Je frappai cordialement sur l'épaule de l'inspecteur : — Craignez-vous donc que je vous l'aie changé? lui

demandai-je en souriant. — Vous en seriez bien capable, grogna-t-il. Je méritais cette colère, car au fond sa précaution

semblait sage. On pouvait admettre que le client de Mlle Ninon, rejoint par un nouvel arrivant, l'avait tué et mis à sa place dans le fauteuil A vrai dire, dans

Page 27: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

ACHEVÉ D'IMPRIMER LE 20 AOUT 1953 PAR BRODARD ET TAUPIN PARIS - COULOMMIERS

N° 9238

Page 28: Pour paraître prochainement : Par Henri CATALAN

Participant d’une démarche de transmission de fictions ou de savoirs rendus difficiles d’accès par le temps, cette édition numérique redonne vie à une œuvre existant jusqu’alors uniquement

sur un support imprimé, conformément à la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012 relative à l’exploitation des Livres Indisponibles du XXe siècle.

Cette édition numérique a été réalisée à partir d’un support physique parfois ancien conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

Elle peut donc reproduire, au-delà du texte lui-même, des éléments propres à l’exemplaire qui a servi à la numérisation.

Cette édition numérique a été fabriquée par la société FeniXX au format PDF.

La couverture reproduit celle du livre original conservé au sein des collections de la Bibliothèque nationale de France, notamment au titre du dépôt légal.

*

La société FeniXX diffuse cette édition numérique en accord avec l’éditeur du livre original, qui dispose d’une licence exclusive confiée par la Sofia ‒ Société Française des Intérêts des Auteurs de l’Écrit ‒

dans le cadre de la loi n° 2012-287 du 1er mars 2012.