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DIRECTION RÉGIONALE DES AFFAIRES CULTURELLES B R E T A G N E SERVICE RÉGIONAL DE L'ARCHEOLOGIE LA MOTTE SALOMON PLELAN-Le-GRAND 1993 Rapport de diagnostic archéôlogiq CONSEIL GENERAL D'ILLE ET VILAINI Laurent BEUCHET Stéphanie HURTTN A.F.A.N. 992/a

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DIRECTION RÉGIONALE DES AFFAIRES CULTURELLES

B R E T A G N E

SERVICE RÉGIONAL DE L'ARCHEOLOGIE

L A M O T T E S A L O M O N

P L E L A N - L e - G R A N D

1993

R a p p o r t de d i a g n o s t i c a r c h é ô l o g i q

C O N S E I L G E N E R A L

D ' I L L E E T V I L A I N I

Laurent BEUCHET

Stéphanie HURTTN

A . F . A . N . 992/a

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P H O T O C O U V E R T U R E M . G A U T H I E R

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7"J„/ l x m k e ? d e ^ H q l g r p s /

FIG. I : Carte I.G.N. n° 1119 Ouest

G U E R •

Echelle : 1/25 OOOè

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I . P R E S E N T A T I O N G E N E R A L E D U S I T E E T D U C O N T E X T E H I S T O R I Q U E

(D'après N. Cozic)

La "Motte Salomon" est située sur la commune de Plélan-le-Grand, à proximité du hameau "Le Gué", au fond de la vallée peu encaissée du ruisseau du "Pas du Houx".

Elle se présente sous la forme d'une plateforme d'un diamètre d'une soixantaine de mètres à la base et d'une cinquantaine de mètres au sommet, pour une hauteur de deux à trois mètres au dessus du pré environnant. Un fossé bien marqué, large d'une dizaine de mètres, sépare à l'est la plateforme de la pente du terrain naturel.

Cette plateforme est traditionellement attribuée au roi Salomon de Bretagne, fils de Rivallon, comte de Poher, et neveu du roi Nominoë, qui accède au trône en 857. Son règne est caractérisé par un renforcement de l'intégrité du royaume, par la conquête du Cotentin et d'une partie du Maine, ainsi que par la lutte contre les Normands. Salomon meurt assassiné en 874 et devient très tôt légendaire, puis un véritable saint populaire.

La Borderie mentionne, sans les situer, plusieurs résidences de Salomon dans la partie est de Brécilien. Nombre de ces établissements restent aujourd'hui hypothétiques. Seule la fondation d'un monastère à Maxent, offert en 860 comme replis aux moines de Redon face aux Normands, est attestée clairement.

La confusion vient du fait que les paroisses actuelles de Maxent et Tréffendel étaient à cette époque rattachées à celle de Plélan. Maxent en sera séparée au Xlè s., Tréffendel seulement en 1584.

Il reste cependant certain que le territoire de Plélan est, durant le Haut Moyen-Age sous l'autorité directe du roi comme bien du fisc. La mention d'une résidence seigneuriale (d'un représentant local du pouvoir sans doute) apparaît même clairement en 863 dans une mention du cartulaire de Redon. Rien n'indique cependant que cette résidence corresponde au site du Gué.

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En fait, la première mention possible d'une seigneurie châtelaine à Plélan ne date que de 1101, placée sous la dépendance de celle de Lohéac. Elle s'étend sur les communes actuelles de Plélan, Maxent et Tréffendel, et à aucun moment le siège de la Seigneurie n'est mentionné.

Cependant, les seules mentions d'une motte dans les textes plus récents (à partir du XVè s.) sont toujours associées au village du Gué (appelé "ville du Gué"), où s'exerce la justice, et où se tiennent le marché hebdomadaire et les deux foires annuelles.

De nombreuses sources situent les dépendances du château à l'est de la motte, entre celle-ci et le village "des Châteaux", sur une superficie de 3 ha environ, ceinte d'un fossé. Un étang est également mentionné. Bien qu'il ne soit pas situé explicitement, il est probable qu'il s'étendait au sud de la plateforme.

Plusieurs textes indiquent clairement que le site était abandonné avant la fin du XlVè s., telle cette mention de grands et vieux chênes présents tant sur la motte que dans les fossés en 1419. Le cadastre de 1827 fait apparaître la motte séparée en deux parcelles égales par un talus d'axe nord-sud. L'une de ces parcelles est occupée par un jardin, l'autre par un verger. Quant à l'ancienne basse-cour, elle est dévolue dès le XVIIè s. aux foires annuelles.

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I I . C A D R E D E L ' I N T E R V E N T I O N

Le site et les terrains environnant ont été achetés fin 1990 par la municipalité de Plélan-le-Grand en vue d'une mise en valeur. Le diagnostic archéologique présenté ici s'inscrit dans le cadre des études préalables à cette opération de valorisation.

L'étude historique préalable à la mise en valeur de la "Motte Salomon" a été divisée en deux opérations distinctes:

- Une étude d'archivé a été réalisée au mois de février 1993 par Nicolas COZIC, dans le but de définir le cadre historique général du site, ainsi que de repérer les divers fonds utilisables pour une étude plus approfondie et, dans la mesure du possible, d'apporter des éléments susceptibles d'orienter l'opération de terrain (chronologie, réaménagements modernes, etc.).

- Une opération de sondages archéologiques, confiée à Laurent BEUCHET (responsable de l'opération) et Stéphanie HURTIN (archéologue qualifiée), ayant pour but de définir la nature et la chronologie exacte du site, ainsi qu'évaluer son état de conservation, s'est déroulée du 1er avril au 15 juin 1993. Elle a pu être menée à bien grâce au concours bénévole de Jeanine BALAIS, Corinne BOURGES, Nicolas COZIC, Arnaud DESFONDS, Maurice HOUEIX, et Guy LARCHER, que nous tenons à remercier vivement ici.

La gestion des deux opération a été confiée à l'Association pour les Fouilles Archéologiques Nationales, sous la responsabilité scientifique du Conservateur Régional de l'Archéologie de Bretagne.

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I I I . P R O B L E M A T I Q U E E T M E T H O D O L O G I E D E L ' E T U D E

DI. 1. Relevé topographique

Préalablement à la réalisation des sondages proprement dit, un relevé topographique précis du site et de ses abords immédiats a été effectué au tachéomètre optique. Le traitement informatique des données (application Excel sur Mac Intosch) a été réalisé au Service Régional de l'Archéologie des Pays de la Loire grâce au concours de Didier LEGOUESTRE, technicien (fig. m).

Une equidistance de 0,50 m a été retenue pour les secteurs présentant une déclivité bien marquée (escarpe et fossés). Un relevé plus précis a été effectué sur la plateforme sommitale (equidistance 0,10 m), où les cotes ont été mesurées tous les 2,5 m. Le but de ce relevé micro-topographique était de détecter d'éventuels indices de structures, difficilement détectables à l'oeil en raison de la couverture herbeuses du terrain, et d'orienter le choix de l'implantation des sondages. Ce relevé a permis de mettre en évidence une très légère levée de terre sur tout le périmètre de la plateforme.

I I I .2. Implantation des sondages

Six sondages ont été réalisés au total (fig. IV):

- Trois décapages d'environ 30 m2 chacun ont été implantés sur la périphérie de la plateforme, dans le but de définir la nature et la fonction de la levée de terre détectée par la micro-topographie, ainsi que de repérer d'éventuels bâtiments adossés à cet hypothétique talus.

- Deux tranchées ont été implantées sur un même axe (orienté grossièrement d'est en ouest), décalées l'une par rapport à l'autre et se chevauchant, afin de permettre une

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FIG. I l l : Plan topographique du site

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étude de part en part de la plateforme, mais sans rompre totalement la stratigraphie éventuellement conservée. Une de ces tranchées a été poursuivie sur l'escarpe et dans le fossé est afin d'étudier la douve et son comblement, en connexion avec la plateforme. Il n'a malheureusement pas été possible de réaliser une section complète du fossé, tant en raison de la présence d'arbres que de l'humidité importante du sol.

- Une troisième tranchée (secteur VI) a été ouverte ultérieurement, au sud de la plateforme, sur l'emplacement présumé de l'ancien étang, afin d'en définir la nature du comblement.

m.3. Méthodologie

Ces différents sondages ont été réalisés à l'aide d'un tracto-pelle muni d'un godet sans dent, d'une largeur de 1,40 m. Seuls les niveaux supérieurs (terre végétale et semelle de labours) ont été enlevés mécaniquement. Après nettoyage des niveaux ainsi décapés, certains secteurs ont fait l'objet d'une fouille ponctuelle, afin de mieux définir certaines structures, et recueillir les éléments permettant la datation des niveaux archéologiques rencontrés.

Dans tous les cas, notre soucis à été de préserver au maximum les informations in situ, de manière à entraver le moins possible la compréhension du site lors d'une éventuelle fouille future.

Cependant, il n'était pas concevable, du fait du but même de l'étude, de n'aborder que les niveaux superficiels sans reconnaître d'éventuelles occupations antérieures ainsi que l'amplitude de la stratigraphie conservée.

Aussi, deux sondages plus profonds ont été réalisés, l'un manuellement dans le secteur IV, l'autre mécaniquement dans le secteur III. Leur implantation a été définie en fonction de la nature des niveaux supérieurs mis au jour (absence de niveau structuré).

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IV. R E S U L T A T S

rV . l . Secteurs I, II et V

Les secteurs I et V n'ont livré aucune structure ni niveau archéologiques. Immédiatement sous la terre végétale sont apparus les remblais de constitution de la motte.

Le secteur II a livré les vestiges très perturbés d'une construction légère (fig. V et VI). Ce bâtiment, large d'environ 2 m (pour une longueur non déterminée) est constitué à l'est d'une paroi de poteaux de bois, matérialisée par une série de traces brunes plus ou moins distinctes (U.S. 2017 à 2020). Celles-ci ont seulement été mises en évidences mais n'ont pas été fouillées. Il n'est donc pas possible de définir s'il s'agit de l'empreinte des poteaux ou de leur fosse d'installation.

Les parois nord et ouest sont matérialisées par des empierrements de petit calibre (larges de 0,30 à 0,40 m) conservés sur une faible longueur. Nous les interprétons comme de possibles traces de solins ou d'une préparation antérieure à la pose d'une poutre sablière basse (U.S. 2011 et 2015). Les restes d'un sol ou niveau d'occupation sont partiellement conservés dans la partie nord du bâtiment (U.S. 2004). L'ensemble de ces vestiges est installé sur un niveau homogène d'argile jaune compacte.

Un nord du bâtiment, une succession de remblais de terre argileuse a été fouillée (U.S. 2001 à 2003, non figurées sur le plan). Ces remblais semblaient limités au sud par l'aménagement 2011. Contemporains du bâtiment, ils ont livré un abondant matériel céramique, dont la plus grande partie est attribuable, tant par les formes que par les pâtes, aux productions des XHIè et XlVè s. des ateliers de Chartres-de-Bretagne (céramiques à pâte blanche, fine, parfois recouverte d'une glaçure au plomb de couleur verte plus ou moins homogène - fig. XX n° 1 à 3) auxquelles s'ajoutent quelques fragments de céramique à pâte rouge, d'aspect sableux, caractérisée par la présence de spicules d'épongés. Cette dernière production est attribuables aux ateliers de Saint-Jean-la-Poterie (près de Redon - fig. XX n° 4). Cette série de remblais recouvrait au nord un empierrement, mêlé à une terre argileuse (U.S. 2016 partiellement démontée). Il s'agit probablement des vestiges d'un ancien talus situé à l'aplomb de la rupture de pente.

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FIG. V : Plan general secteur I I

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FIG. VI : Secteur I I , vue générale depuis l'est

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Signalons que l'ensemble du secteur a subi d'importantes perturbations dues à l'arrachage d'arbres, telle la fosse en forme de croissant comblée par un blocage de pierres (U.S. 2009).

IV.2. Secteur HI

Le secteur III a fait l'objet de deux décapages mécaniques successifs. Dans un premier temps, seule la terre arable a été enlevée. Le seul niveau organisé qui soit apparu à ce stade consistait en un empierrement, lié à une terre argileuse jaune, situé à l'extrémité ouest du sondage (U.S. 3001 - fig VII et VIII). Le reste de la tranchée n'a livré qu'une succession de remblais, mêlés d'une quantité plus ou moins importante de petits blocs de grès.

Une partie de ces remblais a été évacuée mécaniquement, dans la moitié est du secteur. Ce second décapage a mis au jour un niveau d'occupation matérialisé par des poches peu profondes de terre grise, cendreuse à charbonneuse (U.S. 3010, 3011, 3012), reposant sur une fine couche argileuse (U.S. 3014).

Un sondage profond à été réalisé à l'extrémité ouest du secteur. Il a mis en évidence, sous un sol d'argile jaune, homogène et compacte (U.S. 3015), une série de remblais présentant un pendage général d'est en ouest (regroupés sous un numéro d'U.S. unique 3017).

Ce sondage, profond d'environ 2,70 m, n'a pas permis de reconnaître le sol naturel, en raison de la présence d'un remblai de blocs de grès de fort calibre.

Le secteur III n'a livré que peu de mobilier archéologique (céramique essentiellement, ainsi que quelques scories éparses dans les remblais supérieurs). L'ensemble du mobilier céramique présente les mêmes caractéristiques que celui recueilli dans le secteur II. Il provient très probablement des mêmes ateliers (fig. XX, n° 5).

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FIG. VII : Plan et coupes secteur I I I

10 15 20m

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TV. 3.3. Le fossé

L'extrémité est du secteur IV a permis l'étude du comblement du fossé est. Malheureusement, en raison de la présence d'arbres, une section complète n'a pu en être effectuée. De même, le fond du fossé, hors d'atteinte de l'engin, n'a pu être reconnu. Sa profondeur peut cependant être restituée, si l'on considère que le bord du fossé forme une pente régulière.

Le comblement de la douve est en grande partie constitué d'un sédiment brun/gris, d'origine organique (envasement naturel - U.S. 4056 - fig. XV). Un niveau plan, très brun, homogène, en marque le sommet (U.S. 4055). En revanche, les niveaux supérieurs du comblement montrent un pendage d'ouest en est (U.S. 4050 à 4054). D'une composition proche des remblais de constitution du tertre, ils proviennent probablement d'un arasement de celui-ci. Le niveau 4055 de formation très organique, pourrait alors correspondre à la décomposition de végétaux, piégés sous les remblais liés à la destruction ou à l'abandon du site.

V. Le secteur VI

L'implantation du secteur VI devait permettre de définir si l'étang mentionné dans les textes occupait l'actuel pré au sud de la plateforme, et, le cas échéant, de définir la nature de son comblement.

A l'extrémité nord du sondage, le fossé de la motte a été mis au jour. De même que pour le secteur IV, son profil complet n'a pu être déterminé, en raison de la présence d'un ruisseau. L'instabilité du terrain nous a également empêché de définir sa profondeur (2 m minimum - fig. XVI).

Seul son bord sud a pu être reconnu. Celui-ci consiste en un aménagement de blocs de grès, posés sans liant (U.S. 6007 - fig XVII). Au sud, cette maçonnerie de pierre sèche repose sur une série de remblais argileux (U.S. 6009 à 6014), inorganisés, eux même postérieurs à un mur (U.S. 6017 - fig XVIII). Cette construction, constituée de blocs de grès liés à l'argile, est orientée perpendiculairement à la tranchée (N-O/S-E). Aucun matériel n'a été recueilli dans le secteur.

Signalons également la présence d'un fossé de profil en U (U.S. 6016) de même orientation que le mur 6017, dont le comblement homogène est formé d'un limon gris.

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FIG. XVI : Plan et coupes secteur VI

10 15m

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Comme dans le secteur IV, le comblement de la douve est en majeure partie constitué d'un sédiment brun organique (U.S. 6008). Les comblements supérieurs sont composés d'une alternance de remblais argileux ocre et gris ((U.S. 6001 à 6006). Ils ne présentent aucun pendage significatif. Leur articulation avec la plateforme n'a malheureusement pu être étudiée, ce qui complique d'autant leur interprétation. Une formation naturelle ne peut être exclue à priori. Ici aussi, les niveaux gris, très homogènes 6001, 6003, 6005 peuvent être dus à une fluctuation de la hauteur de la nappe dans ces terrains humides.

i l

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V . C O N C L U S I O N

L'opération de diagnostic n'a livré que bien peu d'éléments permettant avec certitude une interprétation et une datation de ce site. Seule l'occupation de la plateforme par un artisanat métallurgique aux XlIIè - XlVè siècles est attestée. Cette occupation semble aussi bien regrouper des structures artisanales (foyers, bas fourneaux, rejets) que des habitats (bâtiment, céramiques cullinaire), le tout enclos par un talus (reconnu dans les secteurs II, III et IV).

Cependant, une simple occupation artisanale ne peut avoir motivé la mise en oeuvre d'une fortification (levée de terre et fossés profonds) telle que celle qui nous intéresse. Cet artisanat est-il intégré à un ensemble fortifié du type "maison-forte" ? Nous ne le pensons pas, en raison de l'absence de vestiges maçonnés importants, caractéristiques de ce genre de résidence seigneuriale en Bretagne telles celles de "La Saudrais" en Bain-de-Bretagne ou de "Sainte-Geneviève" en Inzinzac-Lochrist.

L'hypothèse d'une fortification circulaire du Haut Moyen-Age, remblayée puis réoccupée, qui était l'une de nos hypothèses de départ, ne nous semble pas plus pertinente. L'absence de vestiges de cette période dans les sondages profonds secteur (III notamment) le démontre.

De fait, seule la présence d'une motte castrale reste cohérente. La topographie, l'environnement et plusieurs éléments livrés par l'étude documentaire plaident en effet en la faveur d'une fortification de bois, construite sur un tertre (probablement plus élevé qu'aujourd'hui), entouré d'un fossé. La fondation de cette seigneurie châtelaine, exerçant le droit de haute et basse justice, pourrait remonter au Xlè siècle.

La présence, à l'est de la motte, d'une vaste basse cour caractéristique, ceinte de talus et fossés, souvent mentionnée dans les sources médiévales et post-médiévales, appuie cette hypothèse. Enfin, le développement d'une bourgade, au pied de la forteresse, sur un axe de passage fréquenté, ou se tiennent le marché hebdomadaire et deux foires annuelles, sont autant d'arguments supplémentaires.

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Reste qu'à part la plateforme elle-même, aucun vestige d'une occupation antérieure au XlIIè siècle n'a été mise au jour dans les sondages. Cette absence s'explique tout à fait dans le cas où toute la partie supérieure de la motte, et donc les niveaux d'occupation, a été arasée.

Cependant, plusieurs points restent sans explication. Bon nombre de mottes cástrales ont subi un arasement, soit par volonté de démilitarisation, soit postérieurement à leur abandon par emprunt de matériaux. Quand elles n'ont pas totalement disparu du paysage, ces mottes se présentent sous la forme d'un tertre très arrondi, plus ou moins élevé, qui a pu les faire assimiler à des tumulus funéraires. La forme, encore bien marquée aujour'hui de la "Motte Salomon" pourrait s'expliquer par la volonté de garder bien visible, quoi qu'impropre à une utilisation militaire, une plateforme, symbole du pouvoir seigneurial.

Le diamètre important de la plateforme laisse supposer une hauteur originelle de la motte de l'ordre du double de celle d'aujourd'hui. Les terres issues du démantèlement de la motte n'ont pas servi au comblement des fossés, les sondages IV et VI ayant montré leur comblement en grande partie d'origine naturelle. Il est possible qu'elles aient servi à remblayer le pré au sud de la plateforme, qui ne semble pas avoir été occupé totalement par l'étang mentionné dans les textes, comme l'atteste la présence du mur 6017, antérieur au remblaiement. Autre aménagement postérieur à ces remblais, l'empierrement du bord sud du fossé peut s'expliquer par le besoin de préserver un passage au ruisseau qui y coule encore de nos jours.

Si l'interprétation de la plateforme du "Gué de Plélan" comme vestige d'une motte cástrale est la plus probable, des éléments de réponse supplémentaires devraient être apportés par l'analyse et la datation dendrochronologique du bois prélevé dans le fossé est (secteur IV). Enfin, des sondages ponctuels dans la basse cour présumée devraient également apporter des renseignements sur la chronologie (et donc sur la nature) de l'occupation de ce site.

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FIG. XIX : Profils de la motte (état actuel) et restitution des fossés

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IV.3. Secteur IV

Le secteur IV est incontestablement celui qui a livré le plus de vestiges. Il peut être divisé en trois parties distinctes (fig. X).

IV.3.1. L'occupation métallurgique

Dans la moitié ouest a été mise en évidence, immédiatement sous la terre arable, une occupation dense, liée à une activité métallurgique. Sur une grande partie de ce secteur, un niveau d'occupation, constitué d'une terre cendreuse contenant de nombreuses scories a été dégagé (U.S. 4012). Il recouvre partiellement des concentrations importantes de déchets de métallurgie (scories "cordées" et "bullées" - U.S. 4019 et 4021).

Une structure grossièrement circulaire a également été mise en évidence (Str. 2 - fig. XI). D'un diamètre intérieur de 1,10 m, elle est constituée d'un empierrement périphérique non maçonné. L'espace délimité par cet empierrement est constitué d'une terre brun/rouge, riche en charbons de bois, contenant de nombreux blocs d'argile rubéfiée, parfois vitrifiée. Bien que cette structure n'ait été que très superficiellement dégagée, il est possible de l'identifier comme vestige d'un bas fourneau.

A l'ouest de la structure II, un autre foyer a été dégagé. D'un diamètre d'environ 0,60 m, il est délimité par des plaquettes de grès posées de chant, dont certaines se sont effondrées (fig. XII). En raison de sa faible taille et de l'absence d'un culot de scories, généralement caractéristique, son interprétation comme bas fourneau ne nous semble pas pertinente. Sa fonction reste donc indéterminée.

Ce foyer est aménagé dans des remblais dus à la destruction d'une maçonnerie, dont des vestiges, très arasés, ont été reconnus (U.S. 4047). Large au maximum de 0,40 m et orienté approximativement est/ouest, elle est constituée de petits blocs de grès liés avec une argile blanche. Aucun niveau d'occupation pouvant être associé à cette structure n'a été observé.

Un sondage mécanique pratiqué à l'extrémité est du secteur IV a par ailleur mis en évidence une stratification importante, résultat de nombreux réaménagements de cette zone.

Deux fosses carrées (aproximativement 1 X 1 m - U.S. 4035 et 4031, cette dernière n'apparaissant pas sur le plan) profondes d'une vingtaine de centimètres, traces caractéristiques de plantations d'arbres fruitiers (vraissemblablement des pommiers) nous ont permis d'observer les niveaux inférieurs, à la manière de sondages pilotes. Suite à cet examen,

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FIG. X : Plans et coupes secteur IV

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FIG. XII : Structure I, vue depuis le nord

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il semble que l'ensemble des installations métallurgiques soit construit sur un épais remblai d'argile jaune (U.S. 4033).

Ce secteur d'occupation métallurgique est délimité à l'ouest par un cailloutis de schiste bleu (U.S. 4010), lié à un empierrement de schiste pourpre très arasé (U.S. 4009). Ce dernier, très limité, forme une bande large au maximum de 0,80 m, orientée grossièrement nord/sud. Le schiste pourpre étant fréquemment employé dans la région comme matériau de construction, nous interprétons ces structures comme les vestiges d'un sollin et d'un radier de sol associés (fig. XIII).

Hormis les très nombreuses scories, le matériel livré par le secteur d'activité métallurgique est peu nombreux. Il provient exclusivement du radier de sol 4010 et du niveau d'occupation 4012. Il forme un lot homogène, composé de céramiques à pâte blanche identiques à celles recueillies dans les autres secteurs,.

IV. 3.2. Constitution de la plateforme

A l'ouest du sollin 4009, une succession de remblais est apparue immédiatement sous la terre végétale (U.S. 4004, 4008 et 4030). Les seules structures repérées consistent en un alignement de blocs de grès, situé à la rupture de pente (U.S. 4002), ainsi qu'une trace brune circulaire, identifiée comme l'empreinte d'un poteau (U.S. 4001 - fig XIV).

Comme dans le secteur III, un sondage profond a été effectué (manuellement cette fois). Celui-ci, d'une profondeur d'environ 1 m., a mis en évidence l'articulation des remblais 4004 et 4008, ainsi que leur pendage d'est en ouest. Une interstratification a également été observée dans le remblai 4008, suivant le pendage décrit précédemment. Cette interstratification est formée d'une alternance d'argile homogène jaune et de limon gris, moins épais. Ce limon correspond vraisemblablement à des dépôts plus organiques (sorte de colluvionnement) se formant entre différentes phases d'apports de remblais d'une même nature géologique (donc non différenciable à l'oeil).

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FIG. XIV : Empierrement 4002 et trou de poteau 4001, vue depuis le nord

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LA MOTTE SALOMON PLELAN-LE-GRAND

(IHe-et-VHaine) 35 223 001 AH

RECHERCHE DOCUMENTAI RE SUR L E CONTEXTE HISTORIQUE DU SITE

Nicolas COZIC

Rennes: Service Régional de l'Archéologie de Bretagne

1993

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LA MOTTE SALOMON PLELAN-LE-GRAND

(Dle-et-Vilaine) 35 223 001 AH

RECHERCHE DOCUMENTAIRE SUR L E CONTEXTE HISTORIQUE DU SITE

Nicolas COZIC

Rennes: Service Régional de l'Archéologie de Bretagne

1993

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INTRODUCTION

Cette étude documentaire s'inscrit dans le cadre d'un projet de mise en valeur du site de la

"Motte Salomon" à Plélan-Le-Grand (Ille-et-Vilaine). Ce projet est cofinancé par le Conseil Général

d'Ille-et-Vilaine et la Direction Régionale des Affaires Culturelles de Bretagne, avec la collaboration de

l'Office du Tourisme du Pays de Brocéliande et de la commune de Plélan-Le-Grand dans laquelle se

situe cette "motte".

Ce rapport est issu de recherches archivistiques et bibliographiques menées pendant un mois

(février 1993). Il est à mettre en relation avec les résultats des sondages archéologiques qui ont été

réalisés sur ce site (mai 1993). En amont, ce rapport a pour objectif de donner quelques grandes lignes

historiques et topographiques afin de faciliter les sondages sur le terrain. En aval, il peut permettre

d'analyser et d'interpréter les résultats de ces fouilles archéologiques.

Cette double démarche, historique et archéologique, s'est révélée nécessaire de par la complexité

du site.

Ce site "La Motte Salomon" se tient à 100 mètres au nord du village du Gué et à 1 kilomètre à

l'ouest de la ville de Plélan-Le-Grand. Il est constitué d'une plate-forme d'environ 60 mètres de diamètre

à la base et s'élève de 2,20 mètres au-dessus de fossés bordés de prairies marécageuses au nord et au

sud, du ruisseau du Pas-Du-Houx à l'ouest et à l'est de la "butte des Châteaux".

Ce site fortifié est attribué, par la tradition et, à sa suite par les historiens du XIXème et XXème

siècles, au roi Salomon qui régna sur le royaume de Bretagne de 857 à 874 Une telle tradition, si elle

doit être prise en compte, ne peut servir de garant. Les quelques historiens qui se sont intéressés à cette

motte l'ont tous qualifiée, les uns à la suite des autres, de "Motte du roi Salomon" Ils n'apportent

malheureusement pas de preuve et se réfèrent uniquement à l'appellation traditionnelle.

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1. LES SOURCES DOCUMENTAIRES

Une recherche documentaire s'imposait pour éclaircir le flou historique entourant le site du Gué-

Plélan. L'objet premier de ce rapport est d'appréhender la nature, la fonction et la datation

approximative de cet ensemble fortifié. Mais, à cette fonction classique d'une étude historique, vient

s'adjoindre un autre impératif qu'impliquent les sondages archéologiques et la mise en valeur de cette

ancienne fortification : l'étude documentaire se doit en effet de discerner précisément les aménagements

successifs et les modifications que ce site a connus inévitablement au cours des siècles.

Ces deux objectifs nécessitent une recherche exhaustive dans une documentation variée et

hétérogène. Tout type de document a été mis à profit : comptes de seigneuries du XVème siècle,

chartes du IXème siècle, aveux de la terre et châtellenie de Plélan du XVème au XVTIIème siècle, plans

anciens et modernes etc. Il a fallu consulter aussi bien le cartulaire de l'abbaye de Redon (manuscrit qui

compile les chartes et les titres primitifs de cette abbaye avant le Xlème siècle) que les documents

cadastraux (matrices et plans du XTXème et du XXème siècles).

Cette recherche "tous azimuts" s'est révélée d'autant plus nécessaire que cette étude s'est heurtée

à un obstacle majeur, la rareté des archives concernant cette "Motte Salomon" Cette carence de la

documentation mérite quelques explications.

On peut tout d'abord noter l'absence de texte faisant foi de l'appellation traditionnelle de "Motte

du roi Salomon". Cette lacune est logique pour une donnée hypothétique qui relève du Haut Moyen-

Age, période très mal documentée en Bretagne.

Une source qui, si elle avait pu être consultée, se serait à l'évidence révélée fructueuse nous a

fait également défaut : les archives de la châtellenie de Plélan. En effet, au Bas Moyen-Age et jusqu'à la

Révolution, le Gué-Plélan constituait le siège d'une seigneurie, la châtellenie de Plélan, la motte, la

forteresse originelle Comme toute seigneurie, elle avait des titres, une juridiction et une administration

propre qui généraient toutes sortes d'actes.

Cette châtellenie a connu maints avatars au cours des siècles; en effet, elle a été possédée par de

nombreuses familles, soit par voie d'héritage soit par simple achat (Bellevue, 1912, pp. 160-162). Ces

fréquentes mutations ont certainement engendré une dispersion et une perte des titres.

Durant les Guerres de la Ligue (fin XVIème), "les papiers et les titres qui existaient encore au

Gué de Plélan furent transportés au château de Comper" (Bellevue, 1912, p. 160). En 1629, l'acte de

vente de la seigneurie de Plélan à la marquise de Mortemart stipule que "seront délivrez a ladite dame

et marquise de Mortemart dedans un mois tous adveuz lettres et les pappiers et enseignements

concernant ladite terre et châtellenie de Plélan sans audcune réserves" (AN.: 1 AP 1991) Depuis,

on ne sait ce qu'est devenu le fonds d'archives S'il est resté au château de Comper qui faisait partie au

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XVIIIème siècle du patrimoine des seigneurs de Plélan, sa disparition aurait un motif connu. Au tout

début de la Révolution, le 27 janvier 1790, une bande de paysans envahît ce château et "y mit le feu; les

archives furent brûlées" (Bellevue, 1912, p. 167).

Tout n'a cependant pas disparu. D'une part, en 1839, le baron du Taya, dans son ouvrage sur la

forêt de Brocéliande, laisse entendre qu'il existe un fonds d'archives sur Plélan qu'il n'a pu consulter :

"les archives des propriétaires (de la forêt de Paimpont) ne m'ont pas été ouvertes, ni celles de Plélan"

(baron du Taya, 1838, p.2).

D'autre part, si cette étude n'a pu découvrir un fonds cohérent - qui est peut-être en la

possession de personnes privées -, des documents épars issus de cette châtellenie sont encore existants

et consultables. Ces pièces sont conservées aux Archives Départementales d'Ille-et-Vilaine. Quelques

titres et papiers de cette juridiction de la châtellenie de Plélan figurent dans la série B "Cours et

Juridiction avant 1790". D'autres documents sont présents dans ces mêmes Archives après avoir subi

un cheminement complexe.

Le Marquis de lTistourbeillon, érudit local de la fin du XTXème siècle, a ainsi découvert

miraculeusement, "chez un libraire parisien, de très anciens comptes des revenus de la forêt de

Brocéliande et de la châtellenie de Plélan" (LTistourbeillon, 1893, p.121). Ces 7 cahiers manuscrits,

dont le plus ancien est de 1419, sont désormais conservés dans le fonds "Arthur de La Borderie" ; ce

grand historien de la Bretagne (fin XIXème) avait dû, comme à son habitude, les "réquisitionner" et les

placer dans ses archives personnelles (ADIV: 1F.1546). De même, des textes relatant le projet de

transfert du marché et des foires du Gué au bourg de Plélan-Le-Grand (fin XVTTfème) ont été achetés

par les Archives Départementales d'Ule-et-Vilaine en 1990 à un libraire de Dinan.

Cette châtellenie ayant été détenue par plusieurs familles, ces possessions successives et

temporaires ont laissé quelques traces écrites dans les archives de ces différentes familles. Celles de La

Trémoille, famille qui ne posséda cette seigneurie que pendant à peine une trentaine d'années (1605-

1630), renferment ainsi quelques mémoires et notices intéressantes (notamment, AN: 1AP. Chartrier de

Thouars).

Aux Archives Départementales de Loire-Atlantique sont conservés les aveux faits par les

différents châtelains de Plélan au seigneur dont ils relevaient, à savoir le duc de Bretagne puis le roi de

France. Ces déclarations, la première datant de 1494, énoncent assez exhaustivement la consistance de

la seigneurie, les droits et les privilèges qui s'y attachent.

Pour la période post-révolutionnaire, les plans cadastraux (anciens et modernes) et les

documents annexes (matrices cadastrales) permettent d'envisager une topographie historique. Les plans

cadastraux de 1827 constituent la première représentation cartographique du secteur concerné.

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La documentation s'avère, en fait, bien peu abondante. Il n'est pas exclu, et il est même probable,

que d'autres textes existent. Ainsi, dans le cadre limité de cette étude, il n'a pas été possible d'explorer

certaines voies sans doute fructueuses (archives notariales, archives détenues par des particuliers).

Quelques ouvrages ont été aussi mis à profit. Il n'existe pas d'étude historique exhaustive et

récente sur le sujet mais simplement quelques notices, la plupart du XIXème siècle. Elles font état de la

tradition ("château du roi Salomon") qu'elles accréditent et tentent de justifier. Leur intérêt réside donc

dans cet affermissement et enracinement de la tradition ; c'est principalement dans ce cadre qu'elles sont

prises en compte. Des ouvrages généraux sur l'Histoire de la Bretagne et des monographies sur la

région de Plélan-le-Grand apportent des informations précieuses, notamment pour le Haut Moyen-Age,

dans la mesure où les archives sont quasiment inexistantes pour cette période

Au terme de ces recherches, trois perspectives d'étude peuvent être dégagées. On peut tout

d'abord s'interroger sur la valeur de la tradition ; autrement dit, quel est le lien véritable entre cette

motte et le roi de Bretagne Salomon ? La documentation lacunaire permet simplement une esquisse

historique de la châtellenie et du village du Gué. Elle est cependant nécessaire pour appréhender

l'origine et le destin de la motte. Enfin, le site de cette fortification fera l'objet d'une topographie

historique qui tentera principalement de reporter les informations écrites (celles du XVème au XIXème

siècle) sur le plan cadastral de 1827.

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2. LA MOTTE SALOMON, HISTOIRE ET TRADITION

L'appellation traditionnelle "Motte Salomon" fait attribuer cette ancienne fortification au roi de

Bretagne Salomon (857-874). Elle lui confère de ce fait un caractère précieux et original. Dans ce type

de tradition, il s'avère souvent très difficile de faire la part de la réalité historique et de la pure légende.

Il faut donc reprendre l'ensemble des éléments pour tenter de discerner les raisons de l'émergence, à

travers le temps, d'une telle tradition et, par conséquent, sa crédibilité.

2.1 L E ROI SALOMON. HISTODIE ET LEGENDE

Ce prince breton du IXème siècle n'a pas été qu'un simple chef politique. Son règne assez

glorieux l'a fait rentrer dans la légende; bien plus, il est devenu au fil des siècles un saint populaire, objet

d'un culte particulier.

2.1.1 Salomon : le roi historique:

Son règne fut, avant que les invasions normandes ne plongent la Bretagne dans le chaos et

l'anarchie, assez brillant. Deux historiens du XLXème siècle, A. De La Borderie dans son Histoire de

Bretagne et Dom Plaine dans sa notice "Saint Salomon, roi et martyr" '(La Borderie A. De, 1899, t.II,

pp.518-519; Dom Plaine, 1895), relatent les nombreuses péripéties qui le ponctuèrent. On se contentera

d'en donner les grandes lignes.

Il accéda au trône en 857 en assassinant le successeur légitime. Habile politique mais n'hésitant

pas à guerroyer s'il le fallait, Salomon sut conserver l'autonomie et l'intégrité du royaume breton. Bien

plus, au terme de combats et de traités, il en agrandit le territoire. Il réussit à endiguer l'assaut des

Normands par quelques victoires éclatantes. Il traitait d'égal à égal avec le roi de France Charles le

Chauve qui lui reconnaissait pleinement sa dignité royale. En 874, une faction rivale, après l'avoir

pourchassé du monastère de St-Maxent jusqu'au Léon, le fit périr près d'une église qui s'appellerait de

ce fait la Martyre et, en breton, "Mener Salaun" (le martyr de Salomon) (La Borderie A. De, 1899,

t II, p. 115).

Mais ce n'est pas tant le roi historique qui nous intéresse que la dimension légendaire de

Salomon.

2.1.2 Salomon : le roi légendaire et le saint

Salomon eut donc à son époque une réelle aura politique, militaire et religieuse. Par la suite, vint

se greffer la légende. A. de La Borderie résume et illustre parfaitement ce phénomène: "La mort du roi

Salomon..., après un règne plein de gloire et de succès politiques, qui porta au plus haut point la

puissance et la fortune de la Bretagne, mit au front du roi une céleste auréole. Au lendemain de sa

mort, les Bretons saluèrent en lui un saint et un martyr, et son culte fleurit toujours en Bretagne" (La

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Borderie A. De, 1899, t.II, p. 116). Ce panégyrique n'est qu'un exemple tardif du respect et du culte qui

se sont manifestés à l'égard de ce roi.

Sa gloire fut telle que des chansons de geste françaises du Xlème et Xllème siècles évoquent

son souvenir. De La Borderie, dans un chapitre intitulé "La légende de Salomon de Bretagne", cite ainsi

"la chanson des Saisnes", transcrite par Jean Bodel d'Arras au Xllème siècle. Elle met aux prises

Salomon avec Charlemagne, derrière lequel se profile, en réalité, le personnage de Charles le Chauve

(De La Borderie, 1899, t.II, p.l 17).

En Bretagne, une légende de Salomon a été rédigée, sans doute, avant le début du Xlème siècle

(Dom Morice, Preuves I, col. 102). Des extraits figurent dans la "Chronicon Briocensa" ; inséré dans les

Vies des Saints , ce récit s'intitule "Legenda Sancti Salmonis Régis et Martyris". Cette légende illustre

et justifie la grandeur et la sainteté du roi. Elle relate longuement sa fin tragique qui fait de lui un

martyr.

Salomon ne fut pas canonisé comme l'affirme P. Levot (Levot P., 1857, p.831), c'est "l'opinion

populaire" qui le plaça au nombre des saints.

Ce "saint" va faire l'objet d'une dévotion particulière. A. de La Borderie relate quelques

manifestations de ce culte : "jusqu'à la Révolution, une des paroisses de Vannes était dédiée à Saint

Salomon; au XlVème siècle, Charles de Blois lui édifia une chapelle dans la cathédrale de Rennes.

L'église de La Martyre, qui est encore sous son patronage, possède un reliquaire du XVème siècle

contenant les reliques de Saint Salomon " (La Borderie A. De, 1899, t.II, p. 116).

Salomon n'est donc pas un prince breton ordinaire. Son règne et sa vie ont été magnifiés et

même transposés dans le domaine de la légende, processus courant pour un personnage relevant d'une

époque aussi reculée. Mais, plus qu'un autre, plus que Nominoé par exemple, son souvenir, comme roi

et comme saint, est resté profondément ancré dans la conscience populaire bretonne, et, bien plus, dans

des lieux comme cette église de La Martyre. Mais si sa mémoire a perduré au cours des siècles, la

réalité historique n'en a pas moins subi quelques transformations. Ainsi au XVTIIème siècle, à ce

Salomon historique, se sont substitués trois rois bretons portant ce même nom de Salomon; le premier

aurait régné au Vème siècle et le véritable Salomon prit le nom de Salomon III (La Borderie A De,

1899, t.II, p. 116).

En fait, tout élément se rapportant à ce roi doit être considéré avec une extrême prudence.

Cette méfiance doit être de mise pour la Motte Salomon.

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2.2.LES P R E T E N D U E S F O N D A T I O N S RELIGD2USES D E S A L O M O N A PLÉLAN L E

G R A N D

Ce roi de Bretagne, les documents l'attestent, a eu une relation privilégiée avec la région où est

situé Plélan-Le-Grand, appelée alors le Poutrocouët "pays au-delà des bois", qui avait pour centre la

forêt de Paimpont. A. de La Borderie a répertorié les résidences de Salomon dans le Cartulaire de

Redon. Il estime qu'elles sont principalement situées "dans la partie est de Brécélien (Brocéliande)

appelée dès lors le Poutrécouët"(La Borderie A. De, 1899, t.II, p. 167). La fréquentation de cette

région par ce roi pieux s'est aussi traduite par la fondation d'établissements religieux. Selon certains

historiens, Salomon en aurait ainsi fondé trois à Plélan-le-Grand. Or, il s'avère que ces prétendues

fondations ne sont prouvées par aucun texte historique.

Ainsi le monastère de St-Sauveur ou de Salomon tel qu'il est désigné dans le Cartulaire de

Redon, créé par Salomon vers 860, a été faussement situé dans l'actuelle paroisse de Plélan-le-Grand.

Une charte du Cartulaire de l'abbaye de Redon de 869 relate dans le détail la fondation de cet

établissement religieux (Courson A. De, 1863, charte n°241). Les moines de l'abbaye de Redon,

menacés par les incursions normandes, voulurent trouver un lieu plus sûr et sollicitèrent Salomon. Ce

dernier leur concéda ,vers 860, l'emplacement d'une de ses résidences situé dans la paroisse de Plélan,

pour construire un monastère de repli :

"in monasterio meo quod est in plèbe lan, ubi ego ante meam aulam habui" (dans mon monastère qui

est dans la paroisse de lan, où auparavant j'avais ma résidence).

En réalité, le "monastère de Salomon" n'est pas situé à Plélan-le-Grand, mais à Maxent, paroisse

limitrophe. Salomon avait fait don des reliques d'un saint poitevin, St Maxent, qui donna son nom à

l'abbaye. Ce monastère, où Salomon et sa femme sont censés avoir été enterrés, donna naissance à un

petit centre, l'actuel bourg de Maxent ; la paroisse de Maxent se détacha de la paroisse mère de Plélan,

avant le début du Xlîème siècle (Dom Plaine,1895, pp. 607-608; Chédeville A , 1987, p.291). La

situation, "inplèbe lan", figurant dans les chartes est à l'origine d'une erreur de localisation commise par

les historiens. Guillotin de Corson, chanoine du XLXème siècle spécialiste d'histoire religieuse de la

Bretagne, constate que cette erreur date au moins du XVIème siècle et qu'elle a été véhiculée jusqu'au

XLXème siècle. On a souvent confondu Maxent avec Plélan. D'Argenté (historien du XVIème siècle),

transportant à Plélan ce qui appartient à Saint Maxent, a dit que Salomon avait été inhumé à Plélan et

tout le monde l'a répété jusqu'à Ogée (Corson G. De, 1880, t.II, p. 163).

Les autres fondations religieuses attribuées à Salomon sont pour le moins hypothétiques. Si l'on

en croit Dom Plaine et l'abbé Oresve (Dom Plaine, 1895, p.608; ADIV: 1J.30 ; notes de voyages de

l'abbé Oresve, érudit local), ce roi serait à l'origine de l'église paroissiale de Plélan-Le-Grand. Vers 870,

il aurait bâti un prieuré ou un nouveau monastère, dans "son parc du château du Gué-Plélari\ qui lui

aurait servi d'oratoire : "cet oratoire fut selon toutes les apparences, changé, après la mort de Salomon

en église paroissiale connue sous le nom de Plélan et donnée aux moines de St Me laine de Rennes".

De tous ces faits, ces historiens n'apportent aucune preuve et la vérité semble être toute autre. Les

textes ne font de cette église qu'un ancien prieuré dépendant de l'abbaye St Melaine (BMR: Cartulaire

de Saint-Melaine; charte n°169).

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Il en est de même d'une chapelle, connue sous le nom de "Trécouët" et qui est censée avoir été

construite par Salomon, et lui avoir servi d'oratoire (Marteville A., 1853, p.284). Cette chapelle de

Trécouët, est en réalité située au village de Trécouët; ses fondateurs sont les barons de Lohéac (Corson

G. De, t. 1880, t.V, p.473).

Il semble que cette confiision sur l'influence réelle de Salomon à Plélan-le-Grand ne fut pas

simplement le fait des historiens mais que ces derniers s'inspirèrent fortement de la tradition locale. Ces

historiens relient ces fondations religieuses à la motte du Gué qu'ils attribuent à Salomon. On peut se

demander si cette attribution n'est pas tout aussi arbitraire et erronée.

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2.3 LA MOTTE DU ROI SALOMON. DE LA TRADITION A L' HISTOIRE

2.3.1. Tradition

Cette motte est actuellement connue sous l'appellation de "Motte de Salomon". Il est difficile de

cerner l'origine d'une telle tradition qui, par essence, est orale et ne figure par écrit que très tardivement.

Tous les historiens, voyageurs et érudit locaux la désignent expressément ainsi au XIXème

siècle. A. de La Borderie rapporte qu'on appelle traditionnellement cette vieille fortification "Le

Château de Salomon" (La Borderie A. De, 1899, t. II, p 108). Cette tradition semble fortement

implantée dans le village du Gué, au milieu du XIXème siècle. Un historien de cette époque, A.

Marteville, l'indique dans une courte notice consacrée à ce site : "Salomon bâtit un château dans

l'endroit que l'on nomme aujourd'hui le Gué-de-Plélan II fut appelé le château de Trecelin ou de

Brecélien etc.. La tradition de tous ces faits est encore bien conservée parmi les habitants du Gué-de-

Plélan" (Marteville A.,1853, p. 284)..

Au XVIIIème siècle, Ogée, dans son Dictionnaire Historique de la Bretagne, relate la fondation

du monastère de St Maxent qu'il situe à tort à Plélan-le-Grand, mais passe totalement sous silence la

motte. Cassini, géomètre-topographe qui leva des plans détaillés de l'ensemble du royaume de France,

indique l'existence d'un site fortifié au Gué et le désigne, "à tort" selon A de La Borderie, "Les

Châteaux" (cf. Annexe n° 4, La Borderie A. De, 1899, p 108).

Or, en ce même siècle, l'appellation traditionnelle avait d'ores et déjà cours. Dans une supplique

adressée au Parlement de Bretagne en 1780 par les propriétaires de la forêt de Paimpont, une première

mention indique que "le Gué se fait un mérite assez plaisant d'être voisin de l'emplacement où fut, dit-

on, un château appartenant aux ducs de Bretagne". Une seconde supplique, émanant d'une singulière

institution, "la République du Thèlin", réunissant l'ensemble des vassaux du fief du Thélin dont étaient

membres les habitants du Gué, est encore plus explicite. Elle indique que le lieu où se tenaient les foires

du Gué, lieu situé à proximité de la motte, s'appelle "les communs du Château du Roy Salomon"

(ADIV 1J.576).

Il s'agit là de la plus ancienne mention découverte par cette étude. Les aveux de la châtellenie de

Plélan (fin XVème - fin XVIIème), s'ils évoquent cette motte, ne comportent aucune référence de cette

appellation.

Cette désignation, la motte de Salomon, est donc typiquement une tradition populaire. Elle

devait être véhiculée par les habitants du Gué, bien avant le XVIIIème siècle, siècle où l'on trouve

simplement sa première trace écrite.

2.3.2. De la tradition à l'histoire

Ce qui n'était qu'une tradition va devenir au XIXème siècle une vérité par et pour les historiens.

Pour les premiers d'entre eux, Baron du Taya, Oresve ou Marteville (première moitié du

XIXème siècle), elle est présentée comme une certitude: "La foret de Paimpont touche le Gué de

Plélan, où l'on voit encore l'emplacement du Château de Salomon" ; ou encore : "Le Gué est

remarquable par le château que le roi Salomon y avait" (Baron Du Taya, 1839, p.8 ; ADIV: ld.30).

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i l

Mais, de même qu'ils n'apportent aucune preuve des prétendues fondations d'une chapelle ou d'un

monastère à proximité de la motte, fondations qu'ils amalgament d'ailleurs au château, en en faisant des

oratoires de la résidence du roi Salomon, cette affirmation ne repose sur aucun texte faisant foi. Ils ont

tout simplement fait leur la croyance populaire.

Par la suite, les historiens de la fin XIXème et du début XXème, tout en réfutant les allégations

de leurs prédécesseurs sur les fondations religieuses de Salomon, accréditent cependant cette tradition.

Ils se montrent certes plus circonspects en la mentionnant en tant que telle (cf. La Borderie : "on

appelle traditionnellement Motte Salomon...", ou Banéat : "une grande esplanade en terre appelée

Motte ou Château de Salomon"). Mais ils tentent de justifier cette tradition. Le roi Salomon aurait

construit son château au Gué parce qu'il avait cédé sa première résidence de Maxent aux moines de

Redon vers 860. C'est ainsi que le conçoit A. de La Borderie : "Salomon donna le château (de Maxent)

à Convoion pour y établir un monastère ; mais il tint à garder une résidence dans le voisinage pour ne

pas s'éloigner du tombeau de sa femme Wembrit ; il alla s'établir un peu à l'Ouest de l'église de Plélan

et toujours en cette paroisse. Au village du Gué-de-Plélan, l'on voit encore une de ces buttes de terre

artificielles. On appelle traditionnellement cette vieille fortification le Château de Salomon" (La

Borderie A. De, 1899, t.II, p. 108).

Cette hypothèse est séduisante et fondée sur un raisonnement logique qui prend en compte une

tradition fortement enracinée. Malheureusement, aucun texte ne vient l'étayer ; elle n'est donc qu'une

pure spéculation.

2.3.3 La valeur d'une telle tradition

L'existence de cette tradition au Gué de Plélan n'a rien d'étonnant. Au XIXème siècle, on trouve

de multiples traces de ce roi dans la conscience populaire locale, outre celles de la motte du Gué ou des

chapelles et oratoires prétendument fondées par lui. P. Banéat rapporte ainsi qu'on "trouve à 3 km 700

de la ville de Plélan-le-Grand, au sud de la route de Maxent et à l'extrémité du bois de Maxent, une

enceinte circulaire que la tradition fait remonter au règne de Salomon"; de même, l'ancien manoir du

Trécouet aurait été bâti sur "l'une des résidences du roi Salomon" (Banéat P., 1927, tHI , p. 108). Plus

près du Gué et en relation directe avec la motte, une tradition similaire existait à Plaisance, petit village

situé de l'autre côté du ruisseau du Pas du Houx, dans la paroisse de Paimpont . "A 300 mètres sud-

ouest du Gué, un village a conservé le nom de Plaisance. L'on nous dit que Salomon passait pour y

avoir eu des dépendances ou jardins complétant les agréments de sa résidence le château du Gué. A la

Ruisselaye, plus rapprochée vers l'Ouest, voilà trente ou quarante ans peut-être, une profonde

excavation se serait soudainement produite dans une étable, entraînant enfouissement de bétail. On

négligea de rechercher les causes réelles de cet affaissement du sol, mais la croyance vaguement

répandue d'un souterrain reliant Plaisance au Château, et se prolongeant selon la direction du Plélan

moderne, s'accrédita d'autant" (AubréeE., 1908, p.180)".

C'est donc avec beaucoup de circonspection qu'il faut considérer l'appellation de "Motte du roi

Salomon". En effet, les exemples précédents indiquent que la conscience collective des habitants de

Plélan-le-Grand attribuait toute curiosité, tout site ancien et énigmatique, au roi Salomon. De plus,

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l'irifluence de la toute proche forêt de Brocéliande, avec son lot de mythes et de légendes, ne doit pas

être négligée.

Par une simple étude documentaire et bibliographique, il est impossible de statuer formellement

sur la question. Avec cette désignation traditionnelle, nous sommes résolument dans le domaine de la

croyance et non dans celui de la connaissance. Cependant, nombre d'éléments incitent à penser qu'elle

n'est pas qu'une tradition sans réel fondement, qu'une pure légende née dans une région, terrain propice

à une telle apparition.

Une autre perspective doit être envisagée. Des documents attestent que ce site fut au Bas

Moyen-Age occupé par un château qui constituait le centre d'une seigneurie particulière, la châtelleme

de Plélan.

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3. ESQUISSE D'UNE HISTOIRE DU GUE-PLELAN ET DE LA MOTTE

Après l'examen de cette tradition bien énigmatique, il est bien sûr utile de revenir dans le

domaine des réalités avérées. Les carences des archives et les lacunes bibliographiques ne permettent

qu'une esquisse bien imprécise de l'histoire de la région concernée et de la bourgade du Gué.

3.1. PLELAN-LE-GRAND AU HAUT MOYEN-AGE

Il semble tout d'abord nécessaire d'évoquer l'origine de la paroisse de Plélan-Le-Grand. Aucune

voie romaine d'importance n'y passait ; dans l'étude de P. Banéat sur les voies romaines du département

d'Ille-et-Vilaine (Banéat, 1927), cette commune n'est pas mentionnée. En fait, la forêt de Paimpont

occupait une bien plus vaste zone au Haut Moyen-Age qu'actuellement. Dans une étude sur l'espace

forestier de la région de Redon au IXème siècle, N.Y. Tonnerre a établi une carte représentant les

ensembles forestiers et les fronts des essarteurs (Des Mégalithes aux Cathédrales, 1983, p. 181 ; et

annexe n° 2 ). Selon cette carte, le territoire de Plélan-le-Grand serait encore recouvert par la foret dite

de Plélan ; mais ce massif forestier serait déjà soumis aux défrichements de la colonisation bretonne.

La paroisse de Plélan est mentionnée pour la première fois en 843, sous le nom de Vicaria

Pluilan et en 863, sous l'appellation Plebs lan (La Borderie A. De, 1899, t II, p 173; Corson G. De,

1880, t.V, p. 470) La vicaria est une division du comté (Plélan faisant partie du comté de Rennes)

confiée a des agents subalternes du comte Cuant au plebs ou plu, en zone bretonnante ; c'est

l'appellation de la subdivision territoriale d'un pagus d'une étendue analogue à celle de nos paroisses

actuelles (La Borderie A. De. 1899, t. II, p. 173) Plélan constitue d'ailleurs l'un des exemples le plus

oriental et la frontière de l'expansion de la colonisation bretonne.

Le territoire de Plebs-lan- comprenait alors non seulement l'actuelle commune de Plélan-le-

Grand mais aussi Maxent qui s'émancipa de Plélan avant 1122 et Treffendel qui ne fut érigé en trêve

qu'en 1584 (Corson G. De. 1880, t. V, p. 470).

Pour A. Chedeville, la signification de Plebs-lan- n'est pas celle qui a été communément

acceptée, à savoir paroisse du monastère, mais paroisse du domaine ; le substantif breton lan,

correspondant au latin villa, voudrait dire "sol, terre, domaine" (Chedeville, 1984, p. 219 et 327) Le

nom de cette paroisse retracerait ainsi son origine : "le territoire de Plélan-le-Grand fut constitué aux

dépens de la forêt de Paimpont où Salomon de Bretagne avait une résidence qu'il donna aux moines

de Redon, le domaine de Plélan étant un bien du fisc ; (avec) le massif boisé de Paimpont, l'ensemble,

terrain de chasse et étang, devait bénéficier du statut particulier du droit de la forêt que protégeait le

ban royal". Si ce n'est la résidence de Maxent donnée à l'abbaye de Redon en 860, il n'y a aucune

mention de l'existence d'un autre séjour royal dans le Plélan de l'époque Par contre, d'autres types

d'implantations sont mentionnées dans le Cartulaire de Redon. Quoique le territoire de cette paroisse fût

en grande partie boisé au IXème siècle, il y avait d'ores et déjà des sites habités et des terres cultivées.

Salomon qui en tant que roi possédait Plélan, fit don en 866 de deux rann- à l'abbaye de

Redon, tous deux situés dans ce domaine royal (le rann Iamedan et le rann Inislowen-) (Courson A De,

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1863, chartes n° 49, p 39) Le rann est une unité d'exploitation rurale occupée par un nombre variable

de personnes.

Ce même Cartulaire mentionne, en 863, le don fait par ce même prince du Tigrann Lis

Jarnuuocon (Courson A. De, 1863, p. 60) Le préfixe breton tig ajouté à rann veut dire maison; le

tigrann est un rann d'une importance spéciale, caractérisé par de notables constructions (La Borderie A.

De, 1899, t II, p. 207-208). De plus, le mot breton lis signifie, comme aula, cour, et désigne la

résidence d'un homme (en l'occurrence Jarnuuocon-) investi d'un pouvoir de commandement. Il

existait donc, dans le Plélan du IXème siècle, une résidence seigneuriale d'une certaine importance, sans

doute celle du représentant local de la puissance publique.

A la fin du IXème et au début du Xème siècle, les Normands durent ravager le territoire de

Plélan-le-Grand et ruiner en particulier le prieuré St-Pierre que possédait l'abbaye St- Melaine de

Rennes, au bourg actuel de Plélan. C'est du moins ce que laisse entrevoir une charte de 1122 (Corson

G. Ue, 1880, t.n, p.72; BMR: Cartulaire de St-Melaine, charte n° 169). Elle relate la restitution de ce

prieuré -qui est à l'origine de l'église paroissiale- à cette abbaye. Ce prieuré avait été abandonné à la

suite de combats: "eclesiam Sancti Pétri de Ploilan quant diu antiquius habuerant sed pro guerria et

vestitate aliquantis per demiserant" : (les moines de St-Melaine) avaient possédé l'église St-Pierre de

Plélan depuis fort longtemps; ils l'avaient abandonnée à cause de la guerre et du ravage". Comme les

Normands ne sont pas nommément désignés comme responsables de cette ruine, un doute subsiste;

peut-être est-ce à d'autres combats qu'est imputable la ruine de cette église ? L'hypothèse la plus

probable reste cependant les Normands.

Après la mort de Salomon (877), qui provoqua une querelle d'héritage entre ses meurtriers, et

jusqu'en 936, année de la pacification de la Bretagne par Alain Barbetorte, ce royaume fut en proie à

l'anarchie et au chaos dont les Normands furent les principaux instigateurs et bénéficiaires. A la fin du

Xème siècle, une nouvelle ère s'ouvre pour la Bretagne, et notamment pour Plélan, l'époque féodale.

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3.2 LA CHATELLENIE DU GUE-PLELAN

Si nous étions pour la période précédente dans le domaine de la spéculation plus ou moins

gratuite en ce qui concerne le Gué-Plélan et son hypothétique château, pour le Bas Moyen-Age, nos

connaissances sont avérées. Encore faut-il noter qu'en raison de la disparition du fonds d'archives

propre à cette seigneurie, bien des mystères subsistent quant à l'origine et à la consistance exacte de

cette châtellenie. Il faut, pour percer les ténèbres de l'époque féodale, glaner ici et là quelques bribes

d'informations et s'appuyer sur la documentation plus fournie des siècles postérieurs (du XVème au

XVIIIème)

3.2.1. L'origine de la châtellenie de Plélan

La bourgade du Gué était le siège de cette châtellenie et la motte, la forteresse originelle. La

déclaration de cette seigneurie, faite en 1629 à l'occasion de la vente de cette terre, est très explicite : "la

terre seigneurie et châtellenie de Plélan en la province de Bretagne, consistent en partye du bourg dict

le bourg du Gué de Plélan, et un emplacement et vieux vestiges de douves et cours de chasteau et

toulte justice haute, moyenne et basse...etc". • (AN: 1AP.1991). Dans un autre acte de cette vente,

figure cette remarque : la chastellanie de Plelan est une des antiennes de la province de Bretagne.

Que Plélan soit une châtellenie d'ancienneté, c'est à dire remontant aux premiers temps du

morcellement féodal du territoire breton, cela est fortement probable, mais ses origines n'en sont pas

moins floues.

On assiste, au cours du Xlème et du Xllème siècle , à une dissolution du pouvoir public, dans

une Bretagne qui n'est plus un royaume, mais un duché. Les familles les plus entreprenantes de

l'aristocratie ont accaparé un certain nombre de pouvoirs régaliens, notamment le droit de construire un

château. La forme la plus courante est la motte cástrale; c'est une élévation artificielle de terre plus ou

moins haute sur laquelle est construit un donjon . Elle est entourée de douves et dispose souvent d'une

basse-cour, protégée elle-aussi par une palissade et des fossés.

Autour des châteaux, se sont crées de nouvelles unités territoriales, les seigneuries châtelaines.

Au sein de celles-ci, un seigneur exerce une autorité presque totale sur les hommes qui en dépendent

(pouvoir militaire, basse et haute justice, prérogatives économiques) (Chédeville A., 1987, p. 113 et

suivantes).

La châtellenie de Plélan présente une difficulté d'étude spécifique. On ne trouve dans les textes

du Xlème et du Xllème siècle aucune mention explicite de son existence.

Pour Guillotin de Corson, après la dévastation du Poutrocoët par les Normands, le territoire de

Plélan fut intégré à la baronnie de Lohéac, dont l'existence est attestée dès le Xlème siècle (Corson G.

De, 1895, p. 105). De même, le Marquis de Bellevue lie l'origine et le destin de la châtellenie de Plélan à

celle de Lohéac. Le premier seigneur de Lohéac, Judicael, qui apparaît dans les textes en 1070, est

censé, selon cet auteur, être aussi "le seigneur de Plélan" (Bellevue, 1912, p. 147). Mais, il ne donne

pas ses sources et cette étude n'a pas découvert une référence qui attribuerait la possession directe de

Plélan aux Lohéac dès le Xlème siècle.

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Au contraire, une brève mention permet d'envisager l'existence d'une seigneurie distincte de celle

de Lohéac, quoiqu'étroitement associée à elle. Dans une charte de 1101, un certain "Tretcandus de

Plebelan" figure comme septième témoin, immédiatement à la suite des différents représentants de la

famille de Lohéac (Courson A. De, 1863, chartes n°367, p.321). Sa présence dans cet acte et sa place,

comme témoin et signataire, impliquent que ce familier des Lohéac est un personnage important ; il

s'agit peut-être d'un châtelain de Plélan.

Mais, cette association, un patronyme et un lieu de résidence, est ambiguë, comme le note Y.

Tonnerre : "dans la seconde moitié du XJème siècle, il devient courant dans les actes défaire suivre le

nom des signataires par le lieu de leur résidence", sans que ces hommes soient obligatoirement des

seigneurs de ce lieu ; ils peuvent être des représentants locaux du pouvoir souverain, ayant la garde d'un

château, ou des gestionnaires du domaine (Chédeville A., 1987, p. 158).

Même si des doutes subsistent, il semble bien qu'une châtellenie et à fortiori un château existent

au Xlème siècle à Plélan. Elle doit rapidement (si ce n'est dès l'origine) être intégrée à la baronnie de

Lohéac qui avait une toute autre dimension. Le sort de la châtellenie de Plélan et de la forteresse du

Gué est donc lié à celui de la seigneurie de Lohéac. Mais, l'histoire de cette baronnie de Lohéac reste à

faire. En se référant à quelques textes et notices y ayant trait (Dom Morice, 1724, Preuves I et II ;

Bellevue 1912), on peut simplement affirmer que ces barons de Lohéac furent mêlés aux querelles

intestines et aux conflits de plus grande ampleur pour le contrôle du duché, du Xlème au début du

XTflème siècle. Les Lohéac et plus encore les Montfort prirent une part active dans ces conflits

(Chédeville, 1987, p. 37 et suivantes ) . Ainsi, en 1196, les Anglais, lors d'une expédition mise sur pied

par Richard Coeur de Lion, assiégèrent et s'emparèrent de la place forte de Montfort ; la reprise de cette

forteresse par les Français se traduisit par sa destruction (Bellevue, 1912, p.236). Cet épisode ne

constitue qu'un exemple parmi tant d'autres. Il est certain que le château du Gué a subi les aléas de ces

luttes qui consistaient en de longues chevauchées dévastatrices, ponctuées par des sièges et des prises

de places fortes. Après une longue période d'accalmie (milieu XHIème s.), la Guerre de Succession

(1361-1364) vint de nouveau plonger la Bretagne dans les affres de la Guerre. La région de Lohéac et

de Montfort fut, comme la quasi totalité du territoire breton, le théâtre de durs combats, au cours

desquels le dernier baron de Lohéac, Raoul IV, trouva la mort (1351 ) (Bellevue, 1912, p.237-239). En

1353, le mariage de l'héritière de cette baronnie avec Raoul de Montfort entraîna le déclin de Lohéac,

du moins sur le plan militaire. Si le château du Gué était encore existant, il dut subir le même sort.

En 1394, et sans doute depuis bien longtemps, la châtellenie de Plélan n'a plus l'importance

politique et militaire. Dans une déclaration lapidaire de cette seigneurie faite à l'occasion d'un partage, le

château n'est pas mentionné. La châtellenie n'est plus qu'un ressort particulier pour l'exercice de la

justice et pour la perception des redevances et des droits féodaux : "les dicts Sieur et Dame de Montfort

et Lohéac ont baille à Marguerite tout ce qulils avoient et pouvoient avoir ès paroisses de Plélan et

Macent, tant en rente par deniers, avoines, bleds et gelines, corvées, moulins, estangs, juridictions,

seigneuries et obéissances... et générallement tout ce que a accoustumé à estre levé et traicté par le

chastelain et receveur de Plélan et Macent" (Dom Morice, Preuves II, col. 424).

Par la suite, cette châtellenie connaîtra maints changements de propriétaire ; ce seront tour à

tour les Vendôme, les Laval, les Coligny, les La Trémoille, les Rochechouart de Mortemart et,

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finalement au XVIIIème, les Montigny. Louis-François de Montigny sera le dernier seigneur de Plélan

(Bellevue, 1912, pp. 157-162).

3.2.2. Géographie féodale et histoire

Comme la baronnie de Lohéac, la châtellenie de Plélan relevait directement du duc de Bretagne,

sous le domaine de Rennes. Ceci n'a rien d'étonnant dans la mesure où Plélan faisait à l'origine partie du

domaine royal de Bretagne.

Cette seigneurie s'étend sur un petit territoire. Elle ne recouvre pas toute la commune de Plélan-

le-Grand, d'autres juridictions y ayant cours, comme celle de l'abbaye de St-Melaine au bourg de Plélan

(Corson G. De, 1880, t.V, p.471). Par contre, elle comprend les paroisses de Treffendel et de Maxent.

Il est de coutume dans les textes de l'appeler "la chastellainnie de plélan et macent" (ADIV

1F. 1546). Car, il ne s'agit pas de deux seigneuries associées, mais bien d'un même et seul ressort féodal

: "Ensuilt autres rentes et debvoirs que audit seigneur appartiennent par cause de sa seigneurie et

chastelaynie de Plélan en la paroisse de Macent" (ADLA: B.2151).

Ceci constitue peut-être un indice de l'ancienneté de cette châtellenie de Plélan. Cette seigneurie

qui s'étend dans la paroisse de Maxent a du être constituée avant que cette dernière ne soit distraite du

territoire originel du Plebs Lan, c'est à dire, selon A. Chédeville, bien avant 1122 (Chédeville A., 1984,

p.291).

Une autre particularité de la géographie féodale doit être notée. La seigneurie de Plélan était

bordée à l'ouest, par la châtellenie de Brécilien. Cette dernière, qui dépendait de la baronnie de

Montfort, s'étendait sur une grande partie de la forêt de Paimpont. Son siège était aussi situé dans cette

bourgade, plus précisément dans la partie qui relève de cette seigneurie, le Gué en Paimpont. Certes, il

n'y a pas comme au Gué en Plélan un château mais c'est tout de même là que s'exerçait la justice. En

1653, le comte de Montfort vend le tout "des forests de Brécelien et de Lohéac avecq le droit de fief et

juridiction dans lesdits bois et forests, leur délaissant à cette fin l'auditoire luy appartenant au Gué de

Plélan" (AN: 1AP 1916) Il en est déjà ainsi aux XVIème siècle; en 1560, six condamnés à mort " par la

court et Juridiction de Brecellien ont esté ammenez pour estre exécutez au Gué de Plélan"

(L'Estourbeillon, 1893, p 131).

Le siège primitif de la seigneurie de Brécilien est sans doute assis au Gué, dans la portion qui en

dépend. Le Gué comprend donc deux parties séparées par le ruisseau, appelé "le pas des houssatz" (le

Pas Du Houx). La plus grande, dite le "haut du Gué", est celle qui dépend de la châtellenie de Plélan;

l'autre, dite "le bas du Gué", est située à Paimpont : "la juridiction et chastellenie de Brecellien

s'extendant sur le bas du Gué de Plélan en ce quy est dépendant de Brecellien" (ADIV: 1F 1546).

Des procès verbaux ont été dressés pour délimiter cette châtellenie de Brécilien Ils ont toujours

pour point de départ cette bourgade du Gué, plus précisément une fontaine située près d'une chapelle

dédiée à Saint-Julien: "la dite forest de Brecellien commence par un endroit au Gué Plélan à une

fontaine nommée la fontaine de Saint Julien près une chapelle fondée de Sainct Jullien" (AN: 1AP

1916).

Ces quelques remarques tendent à prouver le rôle clef que jouait aussi le Gué-Plélan pour la

châtellenie de Brécilien, tant au niveau administratif et judiciaire qu'au niveau symbolique. C'est un

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nouvel indice pour accréditer l'ancienneté et l'importance du Gué dès les premiers temps de l'époque

féodale.

Une autre particularité de la géographie vient corroborer cette ancienneté.

La châtellenie de Plélan comprend trois subdivisions territoriales, trois fiefs. Le Gué, au

XVIIème siècle, était situé dans "le fief de la Flescherie" qui était associé au fief du Thélin : "le fief du

Tellaint vault en deniers 57 livres 16 solzy compris le fief de la Flescherie qui vault 4 livres 4 sous

dans lequel fief de la Flescherie est l'emplacement dudit château du Gué" (AN: 1AP. 1911).

Ce fief de la Flescherie a une surface très réduite (200 journaux, soit 1 km2); il ne doit recouvrir

que la bourgade du Gué et ses proches environs (ADLA: B.2151). En 1419, il portait une autre

appellation, à savoir "veille court" (ADIV: 1F.1546). Cette "veille court" se rapporte à l'évidence à la

motte du Gué, mais il est difficile d'apprécier quelle est la réalité historique évoquée. Cette expression

semble indiquer que la motte remonte au début de l'époque féodale, voire même avant. Au Haut

Moyen-Age, les résidences des princes et des seigneurs ("aula" en latin, "lis" ou "les" en breton) étaient

désignées par le terme de "cour" (cf. ante p. 14).

Cet examen de la géographie féodale tend à indiquer le caractère original et originel du Gué-

Plélan, l'ancienneté de la seigneurie et, parallèlement, celle de la forteresse.

3.2.3. La consistance de la châtellenie de Plélan

Le château n'est pas qu'un simple ouvrage militaire; il manifeste et concrétise la domination du

seigneur châtelain sur la campagne environnante. Résidence du seigneur et de ses familiers, il est

l'expression du pouvoir banal (droit de commander et de juger) qui implique différentes prérogatives.

L'ensemble des droits et prérogatives de la châtellenie de Plelan s'exerce au Gué, "à l'ombre" du

château.

La châtellenie de Plélan a droit de basse, moyenne et haute justice. Cette juridiction ainsi que

celles des petites seigneuries annexes et surtout celle de Brécilien s'exercent au Gué (Bellevue, 1912,

p. 159). La concentration de toutes ces juridictions dans cette bourgade a été opérée par les barons de

Montfort au XlVème siècle, époque à laquelle ils héritèrent de la châtellenie de Plélan qu'ils associèrent

à celle de Brécilien.

Un mémoire du XVIIIème siècle nous renseigne sur "l'exercice commun de la Justice de Plélan

et Brécillien" : "pendant que les deux seigneuries estoient en même main, elles n'avoient qu'un même

auditoire, une même prison avec chambre du conseil et un même poteau de justice ; le poteau de

justice étoit, comme il l'est à présent, placé sur la partie du Gué qui relève de Plélan; l'auditoire et la

prison étoient et sont encore sur la partie relevant de Brécilien. Plélan n'a ni prison particulière ni

auditoire particulier" (ADIV: 1 J.576).

Ce poteau de Justice se situe sur la petite place centrale du Gué : "le pilori est placé au centre

du Gué" (ADIV: 1 J.576). Quant à l'auditoire et à la prison, du moins les édifices de l'Epoque Moderne,

le cadastre de 1827 en garde la trace; la maison du Gué en Paimpont s'appelle "la Prison" (cf. annexe n°

5 ; plan cadastral de 1827, n°235). A l'origine, avant le regroupement des deux châtellenies, la

seigneurie de Plélan devait avoir ses propres auditoire et prison.

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Une autre prérogative du ban est le pouvoir économique qui trouve, dans cette bourgade,

plusieurs types de concrétisation.

Des taxes sur le passage des marchandises y étaient perçues. On trouve trace de ces devoirs dès

1419 : "le debvoir de coustume et trespas du Gué Plélan et les sentes de Jocelin et Mérignac est

affermé 6 livres 6 sous" (ADIV: 1F. 1546).

Les deux moulins à eau qui fonctionnent au Gué en 1827 doivent être modernes. Il n'y a pas en

effet d'indices probants qui dénotent l'existence de tels édifices au Moyen-Age.

Par contre, un marché hebdomadaire et deux foires annuelles sont attestés dès le XVème siècle:

"le marché est fait et est par chacun jour de samedi au gué de Plélan Auquel lieu y a deux foires

franches par chacun an avant le jour Sainct Yves et le jour de la commèmoracion des deffunctz"

(ADLA: B.215-).

Ce marché et ces deux foires existait assurément bien avant le XVème siècle. Au XVIIIème

siècle, les habitants du Gué disent ainsi que "l'origine du marché se perd dans la nuit des siècles"

(ADIV: 1J.576).

A. Chédeville note que les foires, en particulier, sont difficiles à dater (Chédeville A., 1987,

p. 3 88). Cependant, beaucoup sont nées à l'époque féodale, les possesseurs du ban ayant toute latitude

pour établir une foire et un marché et dynamiser ainsi le nouveau centre, près de leur château.

La châtellenie de Plélan se présente donc, du seul point de vue de ses prérogatives, comme une

seigneurie classique de l'époque féodale. Les différents privilèges économiques et juridictionnels qui s'y

attachent doivent être à l'origine du Gué ou du moins de son essor.

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3.3 L E G U E - P L E L A N , UN C E N T R E U R B A I N A V O R T E ?

Les fonctions et les attributions essentielles de cette châtellenie sont donc réunies au sein de

cette bourgade : le château seigneurial, la cour de la juridiction de Plélan, la perception des devoirs de

passage, les foires et le marché. Bien sûr, il n'est pas exclu que, comme dans bien d'autres cas, le siège

de cette châtellenie n'ait pas été créé ex-nihilio et qu'un centre préexistât au Haut Moyen-Age.

Le site du Gué correspond aux critères d'implantation des châteaux et des nouveaux centres de 1'

époque féodale. Ils apparaissent le long des voies de communication, de préférence à un carrefour,

surtout quand il s'agit de "la rencontre de la route terrestre avec un cours d'eau" (Chédeville A , 1987,

p 388). Le Gué, son nom même l'indique, constitue un point de passage obligé pour la route dite du

"Vieux Bourg".

Au XVème siècle, un pont en bois est mentionné (ADIV: 1F 1546). C'est de toute évidence bien

avant que le franchissement du ruisseau du Pas du Houx par un pont s'était substitué au simple gué. En

comparant les plans cadastraux ancien et moderne (cf. annexe n°5) on s'aperçoit que l'ancien pont était

un peu plus en aval que celui qui existe actuellement.

Le château du Gué contrôlait l'accès à ce pont et aussi les différentes routes qui y menaient. Il

est difficile d'apprécier l'ancienneté et l'importance de "la route du vieux bourg" ; cette appellation doit

être postérieure à l'époque où l'agglomération actuelle de Plélan prit le pas sur le Gué. Peut-être est-ce

un chemin antique traversant la forêt de Brécilien ? Vers le nord-ouest, elle conduit à l'abbaye de

Paimpont qui ne fut fondée qu'à la fin du Xllème, mais qui était précédemment un ancien prieuré

dépendant du monastère de St-Méen . Vers le Sud, cette route traverse celle de Rennes à Lorient, un

peu au sud de la ville de Plélan-Le-Grand. Ce tronçon semble se diriger vers la Départementale 59 qui

conduit à Guer, qui était au Moyen-Age un centre assez important.

Un plan de Bretagne du début XVÏÏIème (cf. annexe n° 3) dresse un état contemporain et passé

du réseau routier de cette province. La route de Rennes à Ploërmel et à Lorient qui traverse la ville de

Plélan-Le-Grand est qualifiée de "Grand chemin neuf. Elle a remplacé le "Vieux Grand chemin" qui

passe par Montfort (l'actuelle D. 59); ce dernier a un tracé plus occidental et semble plutôt passer par le

Gué. Quant à "la route du vieux-bourg" menant à St-Méen, elle est qualifiée de "chemin de traverse".

A l'origine, le Gué constituait donc peut-être un carrefour routier d'une certaine importance.

Le choix de ce site s'explique aussi par la proximité de la forêt de Paimpont. Aux Xl-XIIème

siècles, elle devait s'étendre plus à l'est qu'actuellement, c'est à dire avoisiner le Gué.

A l'époque médiévale, la forêt est une grande pourvoyeuse de richesses: bois de chauffages, bois

d'oeuvre, pacage pour le bétail, etc. La forêt de Paimpont renfermait une autre richesse, le minerai de

fer qui est exploité dès cette époque. Des forges appartenant à la châtellenie de Brécilien sont attestées

dès 1419 (ADIV: IF. 1546).

Ces produits, entre autre, étaient commercialisés au Gué lors des foires et des marchés. Une

mention révèle l'importance du marché du Gué au XVIIIème siècle : "il se tient au Gué un marché plus

considérable que tous ceux des environs" (ADIV: 1J.576). Ces foires et marchés ont du dynamiser ce

nouveau centre dès son origine.

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Par contre, le Gué ne semble avoir eu guère d'importance religieuse. La chapelle de Saint-Julien,

attestée en 1682, est encore existante bien que sécularisée (ADLA: B.1955; cf. annexe n° 5). jouxtant le

pont franchissant le Pas Du Houx, l'édifice moderne qui a remplacé la chapelle primitive a une bien

modeste apparence. Etait-ce à l'origine l'oratoire du château ou encore une chapelle protégeant le

passage du cours d'eau ou bien le marché, ce type de lieu étant bien souvent sacralisé ? Aucun élément

ne permet de trancher.

Tous ces facteurs - présence d'un château, siège de châtellenie, carrefour routier, relative

abondance et richesse des ressources naturelles - sont autant d'éléments qui conditionnent la réussite de

l'implantation d'un nouveau centre au Xl-XIIème siècles. Le Gué répond bien au schéma classique de

naissance et de développement d'un bourg castrai.

Par la suite, ce chef-lieu va conserver une certaine importance jusqu'à la Révolution et ce,

malgré la disparition précoce du château.

Il est cependant évident que l'abandon du château, abandon qui est attesté au XVème siècle et

date au moins du XlVème peut expliquer l'essor limité du Gué. Ses habitants ne bénéficient plus de la

protection du château ni de son rôle d'attraction sociale et économique. Mais, la motte et la forteresse

abandonnées et plus ou moins détruites demeurent encore visibles et utiles. Ces vestiges jouent un rôle

symbolique; concrétisant et manifestant le pouvoir du seigneur de Plélan, ils contribuent à maintenir le

Gué dans sa fonction de siège de châtellenie. Lorsqu'au XVTIIème siècle, on projette de transférer les

foires et marché du Gué à la ville de Plélan-le-Grand, la présence des vestiges est un argument utilisé

pour combattre le projet: "le Gué se fait un mérite assez plaisant d'être voisin de l'emplacement ou fut,

dit-on, un château appartenant aux ducs de Bretagne" (ADIV: 1J.576). Cette fonction symbolique

peut expliquer une conservation du site (une motte et des douves bien apparentes) qui manifeste

clairement son rôle ancien de forteresse.

La stagnation de ce chef-lieu est non moins certaine. Quoi qu'en disent des textes du XVHIème

siècle qui lui confèrent le titre de ville (ADIV: 1J.576), il ne dépassera jamais le niveau de simple

bourgade rurale.

Jusqu'à la Révolution, le Gué va vivoter grâce à une double vocation, autres vestiges de son

statut ancien de bourg castrai. Lieu d'échanges commerciaux ayant une relative importance au niveau

local, il continue de bénéficier de sa fonction de siège de seigneurie, notamment au plan juridictionnel.

L'exercice de la justice (celle de Plélan et, à partir du XlVème siècle, celle de Brécilien) amène de

nombreux profits. Ainsi, aux XVIIème et XVIIIème siècles, de nombreux notaires officiers de justice

résident au Gué (ADIV: 4b.35 1).

Progressivement, la ville de Plélan-Le-Grand, où passe à partir du XVIIème siècle la grande

route royale de Rennes à Lorient, va supplanter le Gué. Cette bourgade périclite définitivement au début

du XIXème siècle quand les activités commerciales et juridictionnelles sont transférées dans le centre

actuel.

L'aspect quelque peu énigmatique que ce village du Gué peut avoir au premier abord résulte

donc de son rôle et de sa richesse passés ; ils y ont laissé leurs empreintes, à la fois dans la topographie,

quoique des réaménagements aient gommé une partie de son visage ancien, et dans quelques unes de

ses demeures.

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Le Gué présente toutes les caractéristiques d'un centre né à l'époque féodale, au pied d'un

château où résidait le châtelain de Plélan. Mais, les références traditionnelles à une résidence fortifiée

ayant appartenue aux "ducs de Bretagne" ou plus exactement au "roi Salomon" semblent infirmer cette

hypothèse. L'étude détaillée du site permet-elle de trancher la question ?

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4. UNE BREVE TOPOGRAPHIE HISTORIQUE DU SITE FORTIFIE

La carence de la documentation ne permet en effet qu'une étude très succincte de cette ancienne

fortification. De plus, lorsqu'elle apparaît pour la première fois dans les textes au XVème siècle, elle

n'est déjà plus qu'un vestige.

Cependant, les quelques documents la concernant apportent des informations précieuses qu'il est

possible, dans une certaine mesure, de transposer sur le plan cadastral de 1827.

4.1. UNE ESQUISSE DU SITE FORTIFIE ORIGINEL

La première description de ce château figure dans un aveu de la châtellenie de Plélan de 1494 ;

"une motte anxienne en laquelle y avoit autreffoiz chasteau et forteresse siise et située entre le bourg

de Plélan et le gué dudit lieu de Plélan comme elle se poursuilt/ o les douves et fossez cernans celle

motte et aultre terre environ/ le tout couvert de boays anxienJ contenant par fans environ auit

journeaulx de terre" (ADLA: B 2151).

L'aveu de 1505 est quasi identique si ce n'est qu'il indique une superficie différente pour

l'ensemble du site fortifié : "le tout couvert de boais anxien contenant par fans quatre journeaulx".

Celui de 1541 est plus détaillé : "une mote et emplacement de vieulx et ancien chastel près de laquelle

mote est située la bourgade du Gué de Plélan/ laquelle mote est pour le présent couverte de vieulx et

grans chesnes/ et comme elle se poursuilt/ ensemble ses douffves faussez terres frostes au joignant

dicelle esqaelles y a emplassement de vieulx logeix/ contenant par fans environ 4 journaulx de terre/

joignant d'une part le ruysseau descendant de brexelien audit gué et bourgade de Plélan et d'aultres

aux hebergemens des maisons du marché du gué dudit Plélan " (ADLA: B 2151 ).

4.1.1. Consistance et étendue du site fortifié du Gué

Le site fortifié ne comprend donc pas seulement la motte, où était assise la forteresse, mais aussi

un vaste périmètre fortifié, cerné lui aussi de fossés, autrement dit une basse-cour Cette basse-cour pose

plusieurs problèmes.

Contrairement à la motte, elle n'est plus visible actuellement. De plus, les aveux lui attribuent des

superficies différentes, de 4 à 8 journaux (y compris la motte et ses douves). Son emplacement peut

cependant être retrouvé En effet, c'est sur les communs du château du roi Salomon que furent

transférées les foires, sans doute au XVIIème siècle : "les foires se sont tenues au Gué même où se tient

le marché, d'où elles furent transférées aux chataux, à cause de la petitesse du gué" (ADIV: 1J 576).

La butte, située au nord de la motte et la dominant (107 mètres), est appelée "Les Châteaux" (cf.

annexe n° 5 ). Si la signification de ce pluriel "Les Châteaux" est ambiguë, il est clair, par contre, que la

basse cour s'étendait jusqu'au sommet de cette butte, seule éminence naturelle des proches environs.

Le champ de foire apparaît clairement sur le plan cadastral de 1827. La vaste étendue vague

(n°10) "le champ de foire du Gué", contient 1 hectare 77 ares (cf. annexe n°5). En lui ajoutant la

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superficie occupée par la motte et les douves attenantes (n°6,7,8,9,5,4,3), à savoir 65 ares, on obtient 2

h 42 a.

Le cadastre de 1827 indique que l'arpent métrique (ancienne mesure équivalant à l'hectare) vaut

2 journaux 5 cordes, mesure locale (ADIV: 3AP 5449). Les aveux du XVème et XVIème siècles

donnent deux chiffres différents pour la superficie de cette "court de chasteau", comme elle était

appelée au XVIIème siècle ( AN: 1AP 1991), à savoir 4 et 8 journaux, c'est à dire 2 et 4 hectares.

Il semble qu'il faille plutôt retenir cette dernière valeur puisqu'en 1695, le champ de foire,

occupait, à lui seul "7 à 8 journaux" (ADLA: B 2151) . De plus, dès le début du XIXème siècle, des

portions du champ de foire (au moins 30 ares) avaient été usurpées par les propriétaires riverains,

notamment au nord-est et sud-ouest du "pâtis des châteaux" (ADIV: 3 U2). Les "prés du champ de

foire" (n° 1 et 2; 47 ares) et "le pré de la pompe" (n°51; 30 ares) devaient à l'évidence faire partie de

cette basse-cour, ainsi que d'ailleurs les parties septentrionales des propriétés n°13,15 et 16.

Quoiqu'il en soit, il convient d'ajouter aux 2 h 42 a au moins 1 hectare; on se retrouve donc avec

une motte et une basse-cour dont la superficie avoisine ces "8 journaux" évoqués par certains aveux.

Originellement, le "pourprins (l'ensemble du site fortifié clos et délimité par une enceinte) du

château" recouvrait d'ailleurs une plus grande étendue.

L'aveu de 1541 comporte une mention sur ce sujet : "Plus les héritiers de Jullien Coupel

Thomas Guyot et Andrée Coupel sa femme etc.. doibvent par chacun an aux termes de noel et

d'aougst le nombre de trante sept souk de rente o l'obéissance a cause des héritaiges quilz tiennent au

gué de Plélan/ que aultreffoiz estoint du pourprins du chasteau et places des estangs de ladite

seigneurie duditPlélan"(ADLA: B.2151).

Ce surcroît de rente que doivent verser certains habitants du gué figure déjà dans le compte de la

châtellenie de Plélan de 1419, mais sans que soit précisée son assise (ADIV: 1F.1546).

Avant 1419, des terrains dépendant du château et, notamment, la zone occupée antérieurement

par un étang ont été concédés à des particuliers.

Cet étang, la topographie du site permet de le supposer, devait s'étendre sur la majeure partie de

l'espace compris entre le pont du Gué et la motte et s'étendre plus en amont de façon à entourer la

motte.

Le fait que ces dépendances ont été concédées à cinq personnes payant une rente modique (5

sous et moins) permet de supposer que ces nouveaux terrains sont de petite dimension. Ils ont sans

doute accru l'arrière des propriétés déjà existantes du côté nord de la route du vieux-bourg. Par contre,

deux tenanciers versent respectivement 14 et 10 sous. Leur bien doit être d'une plus grande importance;

il s'agit peut-être des parcelles n° 16,15,13 ou même 11 et 12 (cf.annexe n° 5).

Enfin, il faut se demander si ce système défensif ne comprenait pas un autre élément.

Entre le bourg de Plélan-Le-Grand et le Gué, un lieu est communément appelé "Les Mottes". En

1827, il n'est qu'une lande appelée aussi "Les Mottes" (n°132), appartenant, tout comme la place du

château, aux procurateurs du Thélin (cf. annexe n° 5 ). Au XVIIIème siècle, ce lieu est ainsi décrit: "...

ledit marché seroit fort mal placé sur les mottes. Ce terrain très étroit n'est qu'un chemin inégal,

montueux, bordé de précipices du côté du Gué, et ne présente qu'un fonds de terre glaise qui n'a

aucune consistance" (ADIV: 1J.576).

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Ce toponyme et cette étendue vague, remplie de terre glaise, sont autant d'indices qui permettent

de conjecturer l'existence d'un poste avancé du château du Gué, protégeant l'accès par la route du

Vieux-Bourg. Ce type de dispositif est attesté pour d'autres sites fortifiés de la période féodale.

4.1.2. Description sommaire du site fortifié:

Le site fortifié de l'époque féodale comprenait donc plusieurs éléments.

La motte constituait l'assise de la forteresse. Aucun détail ne nous est fourni sur sa nature. En se

référant à d'autres exemples, on peut supposer qu'elle consistait en un donjon qui devait être en bois, à

l'origine, et peut-être remplacé par un édifice en pierre aux XH-XHIème siècles. Ce donjon devait être

défendu par une palissade ou par un rempart, sur le pourtour de la motte.

Cette motte était entourée par des douves et par une retenue d'eau artificielle, obtenue, sans

doute, par l'établissement d'un barrage sur le ruisseau du Pas du Houx. Ces fossés et étang renforçaient

le potentiel défensif de la forteresse.

L'accès à la motte devait se faire par le coté nord-est, seul endroit où le terrain s'élève nettement

en direction de la butte des "Châteaux", permettant l'établissement d'un pont jeté au-dessus de douves

moins larges qu'ailleurs.

Au nord et à l'est se trouvait la basse-cour, défendue par des fossés et sans doute par une

enceinte. D'une étendue approximative de trois hectares, elle devait s'étendre, au sud, parallèlement à la

route du Vieux-Bourg et au chemin qui conduit au lieu-dit "le Chêne Vert" ; à l'est, au niveau des

parcelles n°13, 12 et 11 (on peut d'ailleurs se demander si les appellations le "Pont Sac" et "le Pont

l'Eau" (cf. annexe n° 5) ne renvoient pas à la topographie de cette basse-cour, ces parcelles ayant peut-

être été établies sur d'anciens accès); au nord, jusqu'à la butte des Châteaux et le long du chemin menant

au moulin de la Ruisselée. Le ruisseau du Pas du Houx, en tant que fossé naturel et étang, constituait la

limite occidentale de cet enclos fortifié et aussi celle de la Châtellenie de Plélan.

Cette basse-cour qui servait de champ de foire est ainsi décrite au XVTIIème siècle : "la place

des Châteaux ne présente qu'une surface inégale, et si escarpée d'un côté, que les charettes et les

chevaux ne peuvent la franchir" (ADIV: 1J 576) . Un "ancien fossé appelé le chemin couvert" existait

encore au XIXème siècle, au sud de ce champ de foire (ADIV: 3 U2).Une des suppliques de 1780

stipule qu'avant le transfert des foires en ce lieu, des édifices y existaient: "la place des châteaux où se

sont tenues les foires depuis que ce lieu a cessé d'être couvert de bâtiments" (ADIV: 1J 576). Cette

curieuse mention renferme assurément une part de vérité . En effet, en 1541, des "emplassements de

vieulx logis" sont explicitement signalés à cet endroit (ADLA: B 2151) . Cette basse-cour comprenait

donc des dépendances du château, peut-être même des édifices conséquents, comme la résidence

habituelle du seigneur de Plélan.

Le site fortifié du Gué-Plélan répond donc au modèle classique de la forteresse de la période

féodale, si l'on excepte bien sûr la forme atypique de la motte elle-même. Il existe d'ailleurs une

similitude avec le château de la baronnie de Lohéac dont était membre la châtellenie de Plélan . Ce

château de Lohéac comprenait quatre mottes entourées par une vaste étendue d'eau et une basse-cour ;

sur l'une de ces mottes s'élevait la forteresse principale (Bellevue, 1912, p. 145-146).

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4.2 HYPOTHESES SUR L'ABANDON DU CHATEAU DU GUE

En 1494, ce château n'est déjà plus qu'un souvenir: "une motte amienne en laquelle y avoit

autreffoiz chasteau et forteresse". La valeur de cet autreffoiz est problématique ; au Moyen-Age, cet

adverbe de temps peut renvoyer tout aussi bien à une période relativement proche (20 ou 30 ans) qu'à

une période reculée. Des éléments permettent cependant d'estimer approximativement la date de

l'abandon du château.

D'une part, l'évocation du château de Lohéac dans un aveu de 1494 est semblable à celle du

château du Gué faite la même année : "Les vieilles mottes anciennes esquelles autrefois y avoit

chasteau et forteresse, siises au lac de Lohéac, contenant environ deux journaux de terre y compris les

vieilles douves, compris la basse-cour en laquelle autrefois y avoit un monastère de religieux ..."

(Guillotin de Corson, 1395, p. 193).

Or, il semble que ce château de Lohéac ait été victime de la Guerre de Succession (1341-1367) ;

c'est du moins l'avis du Marquis de Bellevue : "le château de Lohéac fut détruit pendant les guerres du

XlVème siècle" (Bellevue, 1912, p. 146). L'existence de cette forteresse est attestée depuis la fin du

Xlème jusqu'au XTIIème siècle (Dom Morice, 1740, Preuves I et II). Durant la Guerre de Succession

(1361-1364), le seigneur de Lohéac périt et la baronnie entra dans le patrimoine des Montfort (cf. ante

p. 16). Le château a pu souffrir des combats et être abandonné à cette époque; une place fortifiée prise

d'assaut subissait souvent la vengeance destructrice des assaillants. Cet abandon peut être aussi la

conséquence du regroupement des différentes seigneuries de la région dans les mains du seul seigneur

de Montfort. En ce milieu du XlVème siècle, on privilégie résolument les grandes forteresses et les

remparts urbains, les petites fortifications, déclassées et dépassées par les progrès de la poliorcétique

(art d'assiéger une place forte), étant abandonnées. Il se peut donc que le baron de Montfort ait, pour

des raisons d'efficacité, délaissé purement et simplement le château de Lohéac.

Le château du Gué, dont le destin était lié à celui de la baronnie de Lohéac, a peut-être connu un

sort similaire.

D'autres éléments corroborent un abandon datant de la seconde moitié du XlVème siècle. En

1494, la motte et la basse-cour sont recouverts de "boays anxien", qui s'avèrent être, l'aveu de 1541 le

précise, des "vieulx et grans chesnes" (ADLA: B.2151). Ces chênes anciens ont, au moins, 100 à 150

ans d'âge ; ce laps de temps, nécessaire à la maturation et même au vieillissement de ces arbres, nous

ramène donc au moins au début du XVème siècle ou olutôt à la fin du XTVème.

D'autre part, l'afféagement (concession à perpétuité d'un terrain moyennant le paiement d'une

rente) de certaines dépendances du château et notamment de la zone antérieurement occupée par un

étang est datable. Le compte de la châtellenie de Plélan de 1419 qui évoque implicitement cet

afféagement (cf. ante p. 24) comporte cette mention : "... les hoirs Perrin Prodome a cause d'une

baillée aultreffoiz lour faitte 3 soulz..etc... ". Cette mention permet d'affirmer que cet afféagement a été

effectué simplement quelques années avant cette date de 1419 (moins d'une cinquantaine d'années)

puisque les preneurs sont toujours en vie. Cette mutation doit avoir eu lieu entre 1370 et 1400-1410.

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Ces deux types de mises à profit de l'ancien site fortifié, réalisées à la fin XlVème-début XVème

(motte et basse-cour plantées d'arbres; afféagements de terrain dépendant du château), semblent

indiquer que son abandon date du XTVème, sans aucun doute, du deuxième tiers de ce siècle .

Enfin, en 1541, des "emplassements de vieulx logis" sont encore visibles, preuve que l'abandon

du site est ancien mais ne relève tout de même pas d'une époque très reculée, comme le Haut Moyen-

Age (ADLA: B.2151). Cette approche pour tenter de cerner la date de la fin de l'existence du château du Gué en tant

que site militaire et résidentiel ne reste bien sûr qu'une hypothèse, née de la conjonction de plusieurs

indices plus ou moins probants.

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4.3 LES AMENAGEMENTS DU SITE FORTEFIE DU XVème au XXème SffiCLE

Aucun document n'indique la façon dont s'est produit l'abandon de ce château. Est-ce une simple

désertion motivée par le fait que cet ouvrage fortifié aurait été jugé caduque n'aurait plus aucun intérêt

militaire au XlVème siècle ? Mais cet abandon a pu revêtir une forme plus brutale. Il se peut que ce

château ait été victime des combats et purement et simplement détruit. Il a peut-être été volontairement

arasé par ses possesseurs, ne présentant plus d'intérêt stratégique, le site aurait ainsi été démilitarisé.

Quoiqu'il en soit, au début du XVème, certaines de ses dépendances ont d'ores et déjà été

afféagées, la retenue d'eau qui le protégeait vidée. Le reste du site est planté de chênes ; ces chênes sont

encore sur pied en 1541; des vestiges d'édifices sont visibles au milieu de ces arbres.

Au XVIIème siècle, l'occupation du site va radicalement changer. En 1629, les arbres ne sont

plus mentionnés; en revanche, sont encore apparents les "emplacement (et les) vieux vestiges de douves

et courts de chasteau" (AN: 1AP. 1991). Ce site est encore, à cette date, en la possession du seigneur de

Plélan.

L'aveu de 1695 indique des changements notables (ADLA: B.2151). "L'ancien emplacement du

chasteau des seigneurs de Plélan est à présent afféagè a noble homme Pierre Guiomast, sieur des

Chesnais a devoir d'un chapon de rente apprécié 10 soulz". Le texte ne précise pas l'usage que fait ce

petit aristocrate de la motte.

La basse-cour, distraite de la motte, est désormais dévolue aux deux foires annuelles, qui se

tenaient auparavant au centre du Gué : "une grande place près ledit emplacement (de la motte) dans

laquelle se tiennent a présent les foires de la consistance de 7à8 journaux". Cette nouvelle destinée a

dû impliquer des modifications du terrain. Pour permettre l'accès des charrettes et des chevaux à cette

place des Châteaux et la bonne tenue des transactions, il est probable que ce terrain ait été réaménagé

(comblement des douves et fossés; tracé de nouveaux chemins ?).

Le plan cadastral de 1827 et les documents annexes (matrices cadastrales) permettent

d'apprécier les modifications intervenues depuis cette fin XVIIème (cf. annexe n°5 ).

La motte est divisée en deux parcelles d'égale superficie, suivant un axe nord-sud (n°7 et 8). Les

fossés sont eux-aussi divisés en plusieurs unités parcellaires (n° 6, 9, 5, 4, 3). La partie orientale de la

motte et des douves (terre et pré) appartient à un certain François Mocudé ; la partie occidentale est la

propriété de Charles Marie Allaire. Cet homme, qui exerce la profession de tanneur, réside dans une

maison construite à l'extrémité septentrionale des "douves"; cette maison sera démolie en 1871 (ADIV:

3AP.1993); elle n'a laissé aucune trace visible. Toutes ces parcelles, prés, terres et maison ont gardé le

souvenir de leur ancienne occupation: toutes, même paradoxalement la motte, portent le nom de

"douves". Par contre, on ne trouve nulle mention, dans ces documents cadastraux, de l'appellation

traditionnelle de "Motte Salomon".

Tout au long du début XIXème, le champ de foire du Gué est progressivement accaparé par les

propriétaires voisins (AIV: 3.U2): " Sébastien Salmon avait enclos à l'angle nord-est du pâtis des

châteaux et réunis à la pièce n°6 du plan, savoir de 1807 à 1822, 12 ares 50 centiares, et de juin 1822

à 1849 8 ares. Charles Marie Allaire, tanneur, demeurant aux douves en Plélan, a enclos une partie

du Pâtis des Châteaux, au sud-ouest, depuis 1822, 7 ares". Comme les foires ont été transférées au

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bourg de Plélan-Le-Grand, avant 1836, le champ de foire a été loti au milieu du XIXème siècle. Le plan

cadastral actuel permet de retracer cette opération. Cinq nouvelles parcelles ont été créées (n°24,25, 26,

27 et 418) ; la parcelle n° 23 englobe désormais une portion du champ de foire, ainsi que la parcelle n°

13; deux nouveaux chemins isolent la parcelle n° 25.

Cette motte dite "de Salomon" a, comme il a été précédemment dit, intrigué nombre d'historiens,

au XIXème et XXème siècle. L'un d'entre-eux, E. Aubrée, a d'ailleurs rédigé un rapport précis et

détaillé sur ce site, en 1908 (Aubrée E., 1908, p. 177-180). "La motte dite de Salomon présente une

circonférence régulière, en cône tronqué, dont le sommet mesure 54 mètres de diamètre et la base 58

au maximum, soit 170 et 182 mètres de développement à la partie supérieure et à l'évasement".

Construite exclusivement, à l'apparence, en terre, elle s'élève de 2m 20 centimètres environ au-dessus

des douves, primitivement plus profondes, qui la ceignent." "A l'est, la douve mesure llm50

centimètres de largeur et borde un chemin ouvert du Gué à la ferme du château, chemin qui fut très

postérieurement créé, semble-t-il, le marais traversé par le ruisseau, issu des Glyorels et du Pas du

Houx et qui se dégorge dans le bief du moulin du Gué, devant, au temps de l'érection de la Motte,

s'étendre de ce côté, ainsi qu'à l'Ouest et au Midi. " "Actuellement de la Motte au ruisseau, l'on compte

18 mètres de douve à l'Ouest et 24 cm sud; mais, primitivement la douve, plus profonde toutefois,

faisait certainement corps avec le marais ou étang sur une largeur de 80 à 100 mètres, occupés par le

bief du moulin et des prés marais excrus d'alluvions." "Du côté Nord, la Motte se reliait

vraisemblablement à un chemin conduisant au château usuel, par un pont de bois facile à intercepter,

jeté sur la douve de 12m 50 de largeur. " "A l'endroit où, suivant notre hypothèse, aboutissait du côté

de la terre ferme le pont mobile, le terrain se relève brusquement et est au départ de niveau avec la

Motte. " "Celle-ci plane sur toute son étendue supérieure, est divisée de l'Est à l'Ouest en deux

parcelles de superficie égale par un talus de 60 centimètres, crête de chênes et de hêtres. La partie

sud, en nature de champ, est très légèrement plus basse que la partie nord, et a été nécessairement

modifiée lors de l'établissement du talus. Elle est de tous côtés entourée d'arbres de moins d'un siècle

et plantée de pommiers. La parcelle nord, aussi plantée de pommiers, est en nature de jardin rural et

n'est pas cernée d'arbres. "

Depuis 1908, seules des petites modification sont intervenues. Les deux parcelles de la motte

ont été regroupées et le talus arasé; des pommiers, il ne reste plus que deux exemplaires. Les douves ont

fait l'objet d'un tel regroupement; la majeure partie constitue la parcelle N° 22; la partie sud-ouest a été

unie au pré de la Pompe (n° 20).

Il est difficile d'apprécier l'impact véritable des différentes occupations du site sur les vestiges

archéologiques.

La basse-cour a vraisemblablement été profondément remaniée lors de l'établissement du champ

de foire et, par la suite, lors de son lotissement en terres cultivables.

On peut se demander si la forme originale qu'a actuellement la motte, à savoir une esplanade de

terre haute d'à peine 2m20, n'est pas le fruit d'un arasement. Cet arasement aurait été effectué, soit

brutalement, soit volontairement, dès le Moyen-Age. Il serait peut-être aussi le résultat d'une volonté de

mise en culture de cette motte et des douves. Pour tirer profit de cette élévation de terre, les particuliers

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qui, à partir du XVIIème siècle, la possédèrent, ont pu enlever la partie supérieure. De tels arasements

ne sont pas inconnus. Cependant, si cette motte avait subi une telle opération, il faut noter qu'elle aurait

été effectuée avec un grand soin et d'une façon originale. Ce site ne porte en effet aucune trace de ce

genre de travail. De plus, le maintien de cette plate-forme de terre, haute de 2m20 et parfaitement plane,

et des douves environnantes semblerait, dans un tel cas, très curieux.

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C O N C L U S I O N

La première hypothèse envisagée par cette étude a été la prise en compte de l'appellation

traditionnelle de "Motte Salomon".

Les éléments en faveur de cette hypothèse sont peu nombreux et sujets à caution. Cette

appellation traditionnelle n'est guère étonnante dans une région où le souvenir de ce roi est resté ancré

tout au long des siècles. La forme atypique de l'élévation de terre, qui, en l'état, ne peut être assimilée à

une motte castrale, constitue un autre argument en faveur de cette hypothèse. La mention curieuse de

"vieille court", expression désignant l'ensemble du site, permet de conjecturer l'existence d'une résidence

seigneuriale au Haut Moyen-Age.

Si cette hypothèse s'avérait véritable, cette ancienne fortification constituerait un exemple unique

de résidence royale bretonne du Haut Moyen-Age, cette plate-forme de terre, un stade intermédiaire

entre l'enceinte fortifiée du Haut Moyen-Age et la motte castrale.

Des éléments plus certains et plus avérés accréditent une simple forteresse de l'époque féodale.

Les textes attestent que le Gué constituait le siège de la châtellenie de Plélan, la motte du Gué et sa

basse-cour, le château primitif. Nombre d'éléments (prérogatives économiques et juridictionnelles; essor

du Gué et forme pris par ce développement) incitent à faire du Gué un bourg castrai. La population s'y

serait implantée de façon à bénéficier des richesses (avantages) dispensées par le seigneur de Plélan, de

la présence des foires et marchés et de la protection offerte par le château. De même que le choix du

lieu d'implantation correspond aux critères de l'époque, de même, le site fortifié présente l'aspect

classique des forteresses de cette époque: une motte entourée d'un étang, disposant d'un vaste périmètre

fortifié où s'étendent les dépendances, avec peut-être des protections avancées. La forme originale de la

motte serait due à un arasement éventuel, survenu au Moyen-Age, lors de son abandon, ou,

postérieurement, lors de sa mise en valeur.

Il reste à se demander si une recherche archivistique plus poussée permettrait de dépasser ce

stade des hypothèses, en apportant des données nouvelles et plus certaines.

Pour ce qui est des archives de la châtellenie de Plélan, un simple voeu peut être formulé, à

savoir que, loin d'avoir disparu dans un incendie, en 1790, elles seraient en la possession de particuliers.

En ce cas, leur découverte et leur mise à profit demeurent bien hypothétique. D'autres voies sont plus

certaines. Dans le cadre limité de cette étude, il n'a pas été possible d'exploiter les archives notariales ni

celles du Parlement de Bretagne ; ces dernières doivent, par exemple, renfermer des pièces ayant trait au

transfert du marché et des foires du Gué, au XVIIIème siècle. Ce type de documents offrirait

assurément la possibilité d'affiner considérablement l'approche topographique de l'ensemble du site

fortifié.

Quoiqu'il en soit, ce rapport étant conçu comme une étude préalable aux sondages

archéologiques, il faut espérer que ceux-ci apporteront des éléments décisifs pour trancher la question,

pour déterminer la période historique que nous a légué cette bien singulière "motte du Gué-Plélan".

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B I B L I O G R A P H I E

HISTOIRE DE BRETAGNE

Chédeville (A), et Guillotel (H.), La Bretagne des Saints et des Rois V-Xème siècle ; Rennes; 1984

Chédeville (A.) et Tonnerre (Y.), La Bretagne féodale. Xl-XIIIème siècle; Rennes; 1987

La Borderie (A. De), Histoire de Bretagne ; t.II et t.III; Rennes; 1899

Histoire de la Bretagne des origines à nos jours: Des mégalithes aux Cathédrales ; Skol Vreizh, 1983

MONOGRAPHIES ET ETUDES SPECIFIQUES

Aubrée (E.), La motte du roi Salomon au Gué Plélan, BMSAIV, t XXXVIII, 1908, p. 177-180

Banéat (P.), Le département d'Ille-et-Vilaine, t .III, Rennes; 1927

Baron du Taya, Brocéliande ses chevaliers et quelques légende, Rennes, 1839

Bellamy (F.), La forêt de Brocéliande, Rennes, 1896

Belllevue (Le marquis de), Paimpont. la forêt druidique- la forêt enchantée-la forêt historique,

Rennes; 1912

Duval(M.), Foires et marchés en Bretagne à travers les siècles, Rennes ; 1982

Guillotin de Corson, Fouillé historique de l'archevêché de Rennes, t.II et V; Rennes; 1880-1886

Guillotin de Corson, Les grandes seigneuries de Haute Bretagne, BMSAIV, t.XXTV, 1895, pp. 105-

110

Guillotin de Corson, Les grandes seigneuries de Haute Bretagne, comprises dans le département d'Ille-

et-Vilaine, Revue de Bretagne, Vendée, Anjou,. 1895

L'Estourbeillon (marquis de), Les revenus de la forêt de Brocéliande aux XVème et XVIème siècles .

BSPM, 1893, pp. 121-133

Levot (P.), Biographie bretonne, t. II, Paris, 1857

Ogée Marteville (A.), Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne par Ogée .

Nouvelle édition revue et corrigée par Marteville, Rennes, 1853

Orain (A.), Géographie pittoresque du département d'Ille-et-Vi laine. Rennes, 1882.

Plaine (DOM), Saint Salomon, roi et martyr, Revue historique de l'Ouest, 1895; p.507-537 et p.602-

636.

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SOURCES IMPRIMEES :

1. Courson (A. de), Le Cartulaire de l'abbaye de Redon en Bretagne, Paris, 1863

2. Dom Morice, Preuves I et II

SOURCES MANUSCRITES :

Archives départementales d'Ille-et-Vilaine :

Série B: Cours et juridictions avant 1790

4b.3543 à 3553, Juridiction de la châtellenie de Plélan(XVIIIème siècle)

Série 2E, familles

2E1.195: comté de Montfort. Châtellenie de Plélan

2Em. 173: de Montfort ; de Laval

Série 1F (copies et documents originaux du fonds A. De La Borderie):

1F.1544: seigneurie de Montfort. Titres généraux

1F.1546: Comptes et pièces comptables.

Forêt de Brécilien ; châtellenies de Brécilien et Plélan (1419-1708)

Série 1J: Fonds privés

1 J _ 30: Etudes historiques de l'Abbé Oresve sur Montfort et sa région (1835)

1J. 576: "Projet de construction par le Chevalier de Montigny, seigneur de Plélan d'une halle et d'une

prison et auditoire . Projet de transfert des foires et marchés du Gué et du Thélin en Plélan (Achat Davy

à Dinan; provient de la famille de Montigny)

Série 3P: cadastre

3P . 1993 : Etat de sections des propriétés ( Plélan-Le-Grand ) . 1827-1914

3P .1995-1998 : Matrice des propriétés foncières 1827

Série la: Biens nationaux:

1Q.391: Vente des biens nationaux (district de Montfort; biens de seconde origine): la chapelle du Gué;

fihxvni.

Série 3U: Tribunaux (XlX-XXème siècle)

3U.2: Tribunal de Montfort. Partage des communs (Plélan; communs du Thélin; 1847-1849)

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Archives départementales de Loire-Atlantique:

Série B: Sénéchaussée de Ploërmel:

B. 1955: Aveu de la seigneurie et forêt de Brecelien (1541)

Sénéchaussée de Rennes:

B.2151: Aveux-Paroisse de Plélan. 1494-1776

B.2212: Papier terrier de la barre royale de Rennes : la duchesse de Mortemart pour la châtellenie de

Plélan Ifo64 . 1678-1696

Archives Nationales:

Série AP : Archives privées

1 AP : Chartrier de Thouars

1AP.1914 : Inventaire des titres du comté de Montfort

1 AP. 19151 : Déclaration et dénombrement du comté de Montfort. 1682

1AP.1991 : Comté de Montfort/ Plélan. XVème-XIXème siècle

300AP.I : Archives de la maison de France:

300AP.1.1880(1-2) : Domaine de Paimpont-XLXème siècle

Série T:

T. 1051 : Papiers de Jean de Bretagne, duc de la Trémoille

T. 1051.19 : Aveux, déclaration, titres de propriétés intéressant la terre de Montfort (1502-XVIIIème)

T. 1051.20: Comptes des revenus de Montfort de 1659 à 1711

T. 1051.21: Actes de ventes, dénombrement, transactions concernant diverses dépendances des terres de

Vitré et de Montfort (1436-1767)

PLANS:

Archives Nationales : NN. 182.1 à 60: Plans de Bretagne(XVTème-XVIIIème siècle)

300AP.I.1880 : Plan géométrique et topographique du domaine de Paimpont par Beauchet, ingénieur-

géomètre. 1867 (Echelle 1/20000; forêts avec coupes, villages, landes, chemins, 0,7311,05 m)

Document non consulté car soumis à l'autorisation du Comte de Paris.

Archives départementales d'Ule-et-Vilaine. Plans cadastraux

3P.5438 : Paimpont (1823) 56 feuilles (éch. 1/2500)

3P.5449 : Plélan-le-Grand (1827) 23

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Carte de Cassini; Province de Bretagne, n°129 (milieu du XVIIIème). Original: Bibliothèque Municipale

de Rennes n°12491 Reproduction: I.G.N.

Abréviations :

S I : Sources Imprimées

Biblio : Bibliographie

ADIV : Archives Départementales d'IUe-et-Vilaine

ADLA : Archives Départementales de Loire-Atlantique

AN : Archives Nationales

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ANNEXE No 1 :

Carte I.G.N., n° 1119 ouest; GUER Echel le : 1/25.000 X

If; B '<M' . dSI Coq . . £

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ANNEXE N° 2:

Carte des forêts de la région de Redon (in Chédeville A., 1984, p. 181)

N.Y. TONNERRE, Enquêtes et Documents, Nantes, 1975.

(cf. Bi iu . in .pHf i ) .

ANNEXE No 3

Extrait d'une carte des routes de Bretagne (début XVÏÏIème siècle)

AN: NN. 182/60

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I I I

ANNEXE No 4

Carte Cassini (milieu du XVTIIème siècle), Bretagne, n°129

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