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SOMMES-NOUS NUMÉRICABLES ?Pour ceux qui ont le cerveau lent, une seule solution : se faire greffer un deu-xième cerveau… numérique. Tous les savoirs du monde se téléchargent en quelques secondes. L’option appren-tissage (si l’on peut dire) des langues en fournit douze d’un coup. D’autres options comme la télépathie ou la télé-kinésie permettent d’étoffer ses compé-tences. Évidemment, elles ont un prix et sont plutôt réservées aux élites. Tout ce beau nouveau monde numérique, qui contrôle les sens et les saveurs, fonctionne grâce au Data Brain Center. Les “augmentés” vivent dans des villes protégées. Dans le reste du monde, les “gens de la forêt” se débrouillent. Dans cet univers carcéro-numérique, victime d’un piratage informatique, Constant se retrouve dans la forêt. Re-cueilli par Hazel, il cherche à retrouver son identité et l’usage de ses facultés humaines. Zep, plus connu pour la BD Titeuf, aborde ici un thème haute-ment plus sérieux. Une belle réflexion sur le transhumanisme et ses perspec-tives pour les capacités cognitives hu-maines. À méditer. (St.G.)

ZEP, Ce que nous sommes, BD, Paris, Éditions Rue de Sèvre, 2022. Prix : 20€. Via L’appel :19€.

L’IMPOSSIBLE RÉCITTout se passe au bord de la mer en Bretagne, dans le huis clos de la mai-son d’un peintre serbe disparu, Jero Militsic. C’est là que vivent ses deux filles, Jelena et Véra, sœurs jumelles encombrées par ses tableaux étranges. Véra renoue avec Pierre, le narrateur devenu critique d’art qu’elle a connu dans sa jeunesse. Tout naturellement, elle lui demande d’écrire un essai sur l’œuvre de son père pour tenter de la décrypter.

Mais c’est Jelena et son « regard bleu profond posé comme une indigna-tion » qui donne le point de départ de « l’entrée en lumière » de l’impossible récit. Celui de la descente au plus profond du mystère de cette fille à la mémoire étouffée, ce lieu à explorer pour qu’elle puisse enfin éclairer ce moment de sa vie, au cœur de l’effroi et du désordre d’un choc inouï, où les mots lui ont fait défaut pour toujours.

C’est ce lieu qu’explore François Em-manuel avec comme viatique pour le lecteur la tentative de définir ce que peut être un récit possible. « Dans le récit, écrit-il, on commence quelque part, on donne un ordre aux événe-ments, on ramasse dans les mots ce fil de la vie que chaque nuit le som-meil disperse et qui se retrouve intact chaque matin. » Pour que ce texte puisse advenir, il s’agit de tenter de regarder en face ses blessures, les élu-cider et oser affronter le côté sombre de sa nuit. Mais comment continuer à vivre quand le « fil de la vie » s’est brisé dans l’indicible et que ce ré-cit s’avère dès lors impossible. Se confier à un écrivain ? Déchiffrer les œuvres d’art et leurs mystères ? Re-nouer avec sa source intérieure ? Se retrouver soi ? C’est ce qu’interroge ce livre avec délicatesse et profondeur dans le murmure d’un style superbe où chaque mot compte. (C.M.)

François EMMANUEL Raconter la nuit, Paris, Seuil, 2022. Prix : 19€. Via L’appel : - 5% = 18,05€.

UNE MYSTÉRIEUSE SONATE

C’est en défaisant la doublure d'un étui à violoncelle qu’un ébéniste dé-couvre une partition très ancienne. S’agit-il d’une sonate inédite de Do-menico Scarlatti, à qui les musicolo-gues en attribuent 555 ? Le luthier as-socié et voisin d’atelier de l’ébéniste penche pour cette hypothèse extraor-dinaire, qu’appuie aussi une célèbre claveciniste. Mais, le lendemain de la découverte, la partition disparaît. Cinq personnes, l’ébéniste, le luthier, la claveciniste, un musicologue et un riche collectionneur, dont la vie est liée d’une manière ou d’une autre à l'œuvre de Scarlatti, se mettent en quête du manuscrit.

L’auteure leur donne la parole à la première personne, faisant découvrir les motivations, la personnalité et les erreurs de chacun. Au cours de l’en-quête, un passé peu glorieux affleure. En filigrane, une mystérieuse per-sonne commente les événements. Son identité va éclater à la fin de ce récit aussi palpitant que minutieusement construit. (Ch.B.)

Hélène GESTERN, 555, Paris, Arléa, 2022. Prix : 22€. Via L’appel : - 5% = 20,90€.

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Des livres moins chers à L'appel

L’ APPEL Le magazine chrétien de l’actu qui fait sens

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À L’ÉCOUTE DE L’INOUÏC’est à Caroline Lamarche, « mémoria-liste fantasque », que revient de relater l’accompagnement de sa mère âgée, « lui consacrer sa juste place », et libé-rer la part secrète qu’elle doit aussi à son père, cet absent si présent dans ce récit. Tout commence par un rêve qui parle du « désir de se retrouver » pour se remé-morer les dernières fois et « les renon-cements qui peuvent être la conscience de la plénitude de la vie passée, ces tré-sors qu’on jette quotidiennement dans le puits du temps ». Suivant l’injonction de la mère : « pas de larmes », juste les traces du passé « présent singulier où le banal devient extraordinaire ». Ten-dresse, humour, profondeur et superbe écriture au rendez-vous. (C.M.)

Caroline LAMARCHE, La fin des abeilles, Pa-ris, Gallimard, 2022. Prix : 18€. Via L’appel : - 5% = 17,10€

CHOISIR DE VIVRETrois femmes se rencontrent à la fa-veur d’un séjour de deux d’entre elles dans une maison de convalescence. Chacune traverse des moments de grande souffrance : la perte d’un en-fant, une maladie grave, un épuise-ment professionnel et familial. Plutôt que de rester chacune dans leur quant à soi, elles font chacune un bout de chemin vers une forme de guérison. À l’évidence, la réalisation de soi, on ne la doit pas aux bonnes étoiles, mais aux gestes de solidarité donnés et re-çus au quotidien. Ce roman à l’écri-ture légère est une ode à la sororité, cette attention particulière et auda-cieuse que les femmes peuvent avoir les unes pour les autres. (Ch.B.)

Carène PONTE, Et que quelqu’un vous tende la main, Paris, Fleuve, 2022. Prix :17,90€. Via L’appel : - 5% = 17,01€.

MAROC INTIMEJohannes V., expert de l’ONU au Ma-roc, a été sauvagement assassiné. Qui a commandité ce crime ? Les engage-ments du Hollandais en faveur de la di-versité, des migrants ou ses plaidoyers pour les réparations en faveur des déte-nus politiques incarcérés sous le régime précédent en ont irrité plus d’un. Un diplomate belge envoyé sur place afin d’enquêter discrètement sur ce meurtre entame un étrange périple humain et amoureux, de Casablanca à Tanger, des cercles les plus réactionnaires aux asso-ciations les plus progressistes. L’auteur, ex-diplomate au Maroc et en Tunisie, dresse un portrait attachant, lyrique, ac-tuel et très documenté de la vie cultu-relle et politique marocaine. (D.C.)

Daniel SOIL, Agdez, dernière page, Bruxelles, M.E.O., 2022. Prix : 15€. Via L’appel : - 5% = 14,25€.

LUTTE DE POUVOIRSUne reine est retrouvée morte dans les douves du château, au pied de son balcon. Suicide ou crime ? S’il y a suicide, suivant la loi de l’Église, c’est toute la lignée royale qui va-cille puisqu’aucun des fils de cette reine ne pourra désormais devenir roi. S’il s’agit d’un crime, il n’a pu être perpétré que par quelqu’un de très proche de la famille royale. L’enquête est confiée au cardinal de la chapelle royale avec des moyens où la confes-sion remplace les caméras de surveil-lance pour le plus grand service du sabre et du goupillon. L’histoire uni-verselle d’une incompatible lutte de pouvoirs qui se lit comme un thriller passionnant. (C.M.)

Lluis LLACH, Échec au destin, Arles, Actes Sud, 2022. Prix : 22.50€. Via L’appel : - 5% = 21,38€.

ENQUÊTE POLICIÈREUne jeune femme est retrouvée as-sassinée de quatre coups de couteau. Bientôt sont retrouvées une deu-xième, puis une troisième victime. Elles ont la trentaine, sont blondes et plutôt petites et frêles. Et toutes sont assassinées sur le territoire couvert par le commissariat de l’enquêteur pa-risien. La tension monte et aucun élé-ment ne permet de faire le lien entre ces meurtres. Les rebondissements conduiront à une issue inattendue, et cela permettra de suivre le chemi-nement intérieur d’un inspecteur qui peine à nouer des relations affectives durables et qui a tendance à noyer ses soucis dans l’alcool. (J.G.)

Anne DHOQUOIS, Le chat qui ne pou-vait pas tourner, Paris, Les Arènes/Equinox, 2022. Prix : 14€. Via L’appel : - 5% = 13,30€.

TRANCHE D’EXISTENCELa vie quotidienne peut se raconter comme une fiction. Si les écrivains pratiquent cela depuis longtemps, le passage de cette forme littéraire à la bande dessinée est récent, et s’inscrit dans la foulée des romans graphiques. Maëlle Reat (21 ans) réalise ici son premier ouvrage du genre, dont elle assure tant le dessin que l’histoire : celle d’une jeune femme passant un entretien d’embauche dont chaque étape lui rappelle un épisode de son enfance. Une belle plongée dans l’adolescence et la naissance d’une identité féminine qui se cherche. Un des premiers titres de cette collection au nom choisi de Virages graphiques. (F.A.)

Maëlle REAT, Comme une grande, Pa-ris, Virages Graphiques (Payot & Rivages), 2022. Prix : 17€. Via L’appel : – 5% = 16,15€.

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CÔTOYER LES VICTIMES DE GUERRE

Sarajevo sous les bombes

Gérald HAYOIS

Alors que la guerre fait rage en Ukraine, coïncidence surprenante, l’écrivain Jean-Luc Outers vient de publier Hôtel de guerre. Il

y décrit par le détail et avec sensibilité le vécu des habitants de Sarajevo pendant la guerre qui a ravagé l’ex-Yougoslavie il y a près de trente ans. Une évidence saute aux yeux : ce que la population civile ukrai-nienne restée sur place subit aujourd’hui, ils l’ont vécu de manière très proche.

ENGAGEMENT HUMANITAIRE

L’auteur a séjourné là-bas une semaine en 1994 à l’invitation de Reporters sans frontières pendant le siège de la ville. Il y était dans le cadre d’une opération de sen-sibilisation et de communication appelée « Chaque jour pour Sarajevo ». Il lui était demandé de témoigner librement, en écri-vain et non comme journaliste, de ce qu’il voyait, percevait, comprenait dans un écrit littéraire qui a paru ensuite dans une douzaine de journaux européens. Il devait aussi réaliser une courte séquence télé-visuelle pour ARTE et la BBC. D’au

tres

écrivains ont participé aussi à cet engage-ment à d’autres moments.

Dans ce livre, l’auteur revient sur cette dé-terminante expérience de vie. Il mélange habilement les écrits d’alors, les notes prises au vol et retravaillées et puis les nouvelles impressions à son retour vingt-cinq ans plus tard, en 2019. Sarajevo a alors retrouvé une vie qui reprend vaille que vaille mais les séquelles de la guerre y sont toujours présentes. Les civils tentent de se reconstruire mais avec des blessures physiques et morales souvent irrémé-diables. Les moments vécus là-bas auront touché aussi au cœur l’auteur suite à sa rencontre avec une femme médecin anes-thésiste italienne présente à l’hôpital de Sarajevo. Cette rencontre et cette proxi-mité les rapprocheront intensément à la mesure des émotions ressenties au contact des blessés : « Quand la vie ne tient qu’à un fil, on s’accroche de toutes ses forces à ce qui en confère un sens. »

LEÇONS D’HISTOIRE

Sobrement, humblement, l’écrivain dé-crit dans le détail ce qu’il a vu sur place : l’arrivée en cargo militaire dans l’aéroport

dévasté, la panique de découvrir les im-meubles calcinés ou défigurés par les im-pacts d’obus, le séjour à l’hôtel Holiday Inn qui reste ouvert, même si certaines chambres sont détruites et les commodi-tés réduites ou inexistantes. Il enregistre des témoignages : « Avant la guerre, les relations humaines entre Serbes, Croates, Musulmans étaient correctes. Les diri-geants ont réussi le tour de force de nous dresser les uns contre les autres jusqu’à nous haïr, nous qui vivions jusque-là en harmonie. »

Il observe les arbres tronçonnés pour en faire du bois de chauffage, l’absence d’éclairage public, l’odeur de brulé, la vie de débrouille. Il décrit sa visite de l’hôpital où l’on soigne à la hâte les blessés et où naissent aussi les enfants dont on entend le premier cri de vie. Anna, l’anesthésiste constate : « Une guerre, cela s’embrase. Au bout d’un temps, il devient impossible d’éteindre l’incendie qui s’est propagé comme une haine tenace au plus profond des êtres. » Jean-Luc Outers s’interroge aussi sur ce nationalisme forcené qui mène à la guerre. Viendrait-il des humilia-tions répétées de l’histoire ?

Il rappelle quelques chiffres éloquents. Pour la seule ville de Sarajevo qui comp-tait trois cent mille habitants, on a dé-nombré à la fin du conflit quatorze mille morts, dont cinq mille cinq cents civils et cinquante mille blessés, sans compter les pertes matérielles, trois mille cinq cents bâtiments détruits. « Tel est le bilan de cette guerre dont les chiffres ne sont pas près d’effacer la souffrance, le deuil, le ressentiment, le désespoir. Les bombarde-ments sur les villes ont été la bande sonore du XXe siècle. » Il note : « La définition de la guerre, c’est quand les échanges de tirs ont pris la place des mots. » Criante actualité. ■

Jean-Luc OUTERS, Hôtel de guerre, Paris, Gallimard, 2022. Prix : 18€. Via L’appel - 5% = 17,10€.

L’écrivain belge Jean-Luc Outers était présent dans la capitale bosniaque assiégée par les forces serbes en 1994. Il y est revenu vingt-cinq ans plus tard. Il raconte ce qu’il y a vécu dans Hôtel de guerre.

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UNE ALIÉNATION DE L’AUTRE

Les zoos humains en BD

Cathy VERDONCK

D’onyx et de bronze pré-sente les points de vue de personnes très dif-férentes. Dans le récit d’ouverture, un natu-

raliste anglais raconte, dans une lettre adressée à sa femme, sa recherche du chainon manquant entre l’homme et l’animal chez les Niams-Niams, tribu d’hommes à queue de singe. Après une longue traversée en bateau, il dé-barque en Gambie où il est confronté aux conditions de vie difficiles : cha-leur, moustiques, dormant dans une case « si rudimentaire que je crus d’abord à une étable à cochons, mais il n’en était rien. Je me couchais à même la terre sur une sorte de tapis de pailles ». Les Africains sont appelés « sauvages ». Après un long périple, il retournera bredouille en Angleterre.

DES BÊTES DE SCÈNEEn Louisiane, en 1859, vendue par sa maitresse à un dénommé Eliott King, Scylia devient une esclave de cirque. Chaque soir, elle est montrée en spec-

tacle, vêtue très légèrement, pour jouer le rôle « d’une femme sauvage, venue d’une contrée lointaine et dan-gereuse d’Afrique, elle serait folle et elle serait cannibale ». Surnommée la « négresse la plus sauvage de Loui-siane », elle est tenue en laisse comme un chien par King qui fait claquer un fouet. À la fin du spectacle, elle doit manger un morceau de viande crue. Le public écarquille les yeux et veut la toucher, peu habitué à cette époque de voir une personne de couleur noire.

À Paris, en 1882, des Kalinas, ethnie amérindienne des Caraïbes alors in-connue, sont exposés dans un jardin d’acclimatation et font l’objet d’une étude anthropologique. Leur habitat est reconstitué, mais, non habitués au climat, livrés à l’ennui et à la faim, rongés par la honte des regards des visiteurs qui les dévorent des yeux, ils meurent les uns après les autres. La petite fille de la tribu témoigne : « Parfois, je ferme les yeux et j’essaie de faire apparaître la forêt en moi… J’ai peur, moi aussi, de ne plus la re-

voir et de mourir ici, dans cette ville inconnue qu’ils appellent Paris. »

UN JEU DE COULEURSQuelques années plus tard, en 1900, à Paris, deux jeunes filles africaines, Mawu et Lisa, se produisent dans un cabaret appelé L’enfer. Légèrement vêtues, elles montent sur scène en on-doyant et en jonglant avec quelques bananes. Équipées d’armes en car-ton, elles miment une bataille face aux blancs colonisateurs, et doivent surtout montrer qu’elles sont facile-ment battues par la force coloniale. Le public applaudit. « Les hommes se repaissent de la vue de notre chair, car les épouses qui les accompagnent sont corsetées jusqu’au menton. » Elles sont exploitées par des individus sans scrupule, photographiées et affi-chées publiquement à leur insu.

Enfin, en 1941, une famille est dépor-tée dans un camp de concentration faute de savoir « prouver la pureté de ses origines ». Toutes ces histoires tragiques mettent en lumière le passé colonial, finalement encore peu connu actuellement. Pourtant, c’est dans ce passé trouble que le racisme actuel puise ses origines.

Le lecteur suit le fil de ces différentes histoires comme s’il était au cinéma. Certains dessins sont des gros plans sur les traits, les expressions des per-sonnages permettant une proximité avec leur vécu et la réalité tragique des zoos humains. Parfois, c’est sim-plement la silhouette des protago-nistes qui est représentée, comme en ombres chinoises. Le dessinateur joue alors sur le contraste des couleurs, noires, ocre, blanches.

Sybille TITEUX de la CROIX (scénario) et Amazing AMEZIANE (illustrations), D'onyx et de bronze, Histoires de zoos humains, Monaco, Le Rocher, 2022. Prix : 20€. Via L’appel - 5% = 19€.

Le dessin stylisé et fin d’Amazing Ameziane fait D’onyx et de bronze un magnifique roman graphique. Les cinq récits fictifs écrits par Sybille Titeux de la Croix racontent la réalité des zoos humains à la fin du XIXe siècle et au début du XXe, en Louisiane et en Europe.

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AU SEUIL DE L’IRRÉVERSIBLEAURORE

Pour que rien ne soit perdu

Christian MERVEILLE

Il est des livres comme des refuges où le lecteur se retrouve à l’in-time de lui-même. C’est là qu’il peut trouver les mots nécessaires pour exprimer l’indicible lorsque

celui-ci s’invite au hasard de la vie. Et quoi de plus indicible que la présence muette qui s’expérimente lorsqu’il est donné de se tenir « sans statut ni grade, par le seul miracle de la pulsation obs-tinée de son être », aux côtés d’une personne aussi proche qu’une grand-mère ? En l’accompagnant dans sa tra-versée du grand âge vers son entrée en dépendance et jusqu’à l’acceptation de son départ. Une expérience de vie que beaucoup sont appelés à connaître avec des sentiments divers, des digues qui se rompent et des ressentis enfouis qui re-font surface.

TENDRESSE INÉPUISABLE

Isabelle Michiels offre le récit de ce cheminement à travers des lettres écrites à sa grand-mère « à l’encre du cœur ». « Le “tu” s’est rapidement imposé, explique-t-elle. Quand on dit “tu”, on se situe d’emblée dans la re-lation et je voulais inviter le lecteur à y

entrer dans une identification plus natu-relle. L’usage de la troisième personne du singulier aurait mis trop de distance. Le “tu” est vraiment le pronom de la passion et de la tendresse. »

Au fil des pages, la vieille dame est nommée de diverses manières, de « ma bellissima » à « ma chérie », en passant par « ma tourterelle ». Comme si l’au-teure de ces lettres craignait d’omettre une des facettes de sa personnalité. « C’est vrai que je la nomme de trente façons différentes. Allant même jusqu’à l’appeler tendrement “ma ratatinée”. Pour moi, il y a quelque chose dans l’affection et la tendresse qui est iné-puisable. Irraisonnable aussi parfois quand on chuchote plein de mots doux dans les moments de profonde intimi-té. »

Cette longue lettre se déroule en douze temps dans un camaïeu de bleus. Du bleu des yeux de la grand-mère, bleu du ciel, à celui de la vague qui emporte vers le grand large. « Il est très présent dans mon livre. Cette couleur s’est invi-tée partout et, à postériori, a permis de structurer le récit dans un dégradé de

bleus qui nomment chaque partie et lui donne une tonalité particulière. »

PURE PRÉSENCE

La dernière vague se présente comme un témoignage précieux de ces mo-ments secrets de « pure présence », quand chacun « se conjugue à l’éternel présent ». Ce moment où « l’attente bannit la crainte », où il suffit « d’ac-cueillir-recueillir, ne plus vouloir anti-ciper ou prévenir », où « la beauté de la vie s’élève, muette tel un encens ». Instant de tendresse pure entre une per-sonne « assignée à résidence », « ga-gnée par l’essentiel », et une petite fille que près de cinquante ans séparent et qui, prise dans le tourbillon du quoti-dien, mène une « vie pleine à ras bord qui se craquelle et se fendille ».

Bien plus qu’un “carnet de voyage”, ce récit est une œuvre d’écrivain. « Je n’osais pas l’écrire, je ressentais tout cela comme trop intime, confie Isabelle Michiels. C’est le point d’embouchure entre le singulier et l’universel qui per-met de partager ce récit que j’avais en moi. Il me fallait aussi le rendre dense à travers un certain minimalisme indis-pensable. »

C’est donc par un texte épuré, lumi-neux, que sont captés les moments furtifs, les gestes simples et forts, les re-gards qui en disent long, les silences qui résonnent plus profondément que les mots. Tout y est raconté dans la grande simplicité que la poésie autorise quand elle vient au secours des mots. Tant à travers les images qui « élargissent les chenaux intérieurs » que les symboles qui tissent le plus intime de chacun à l’universel qui fait notre humanité par-tagée. Sans oublier le recours au spiri-tuel qui ouvre à « l’entrebâillement des mondes » là où chacun « n’est plus que lumière ». ■

Isabelle MICHIELS La dernière vague, Neuf-château, Éditions Weyrich, 2021. Prix : 10€. Via L’appel : - 5% = 9,5€.

Dans La dernière vague, la Belge Isabelle Michiels invite son lecteur à prendre conscience de la valeur précieuse des instants de vraie présence auprès d’un être cher.

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CINQ SIÈCLESD’HISTOIRE

Une passionnante saga

Michel LEGROS

Le 24 mai 1453, le sultan Mehmet II, après un siège de plusieurs mois, lance ses troupes ottomanes à l’assaut de Constantinople, dernière

capitale de l’Empire romain d’Orient. À la fin du jour, cinq mille hommes, femmes et enfants ont été massacrés et quinze mille capturés pour être vendus comme esclaves. L’Occident n’avait pas répondu aux appels au secours pres-sants des Byzantins. Le pape, les rois de France, d’Espagne, d’Angleterre et de Hongrie étaient restés sourds et indiffé-rents au massacre annoncé de milliers de chrétiens d’Orient.

FRÈRES SÉPARÉS

Dans cet assaut, Constantin Dionous et son frère Nicolas, accompagné de son épouse enceinte, parviennent à fuir vers le port afin de tenter de passer la Corne d’Or. Hélas, le bateau ne peut embarquer tout le monde, séparant les deux frères. Constantin choisit de se di-riger vers Antioche, tandis que Nicolas prend la route de la Russie orthodoxe. « Que Dieu et la Vierge du salut vous protègent tous deux, lance le premier.

Nous nous reverrons. Peut être pas toi et moi, pas même nos enfants. Mais un jour, j’en suis certain, les Dionous se-ront réunis. »

Ce siège donne l’occasion à Catherine Hermary-Vieille, autrice de très nom-breux romans historiques, de construire une éblouissante saga s’étalant sur cinq siècles. La plupart des archives histo-riques relatant les avatars des chrétiens d’Orient ont disparu. Mais la roman-cière a eu la chance qu’un ami égyptien lui transmette la tradition orale de sa famille autour de laquelle elle a brodé. « Depuis très longtemps, bien qu’ha-bitant les États-Unis, raconte-t-elle, je me suis fort impliquée vis-à-vis des chrétiens d’Orient, principalement au Liban. J’ai eu d’ailleurs la chance d’y adopter une fillette. »

MILLE ET UNE PÉRIPÉTIES

Cela donne un roman à deux volets en-chevêtrés au fil de l’Histoire. S’il est bien sûr évident qu’à sa dernière page, les arrière-arrière-arrière-petits-enfants Dionous se retrouveront, d’ici là, les deux familles connaitront mille et une

péripéties, la petite histoire rencontrant la grande, celle de la Russie comme celle du Moyen-Orient. En fin de vo-lume, une généalogie des deux branches familiales permet de suivre les protago-nistes au fil de leurs tribulations.

Dans son sac de voyage, Nicolas a, en hâte, jeté les plus belles icônes ainsi que la vierge miraculeuse qui ont toujours protégé la famille. Depuis des généra-tions, les Dionous - apanage des seuls hommes - écrivent les plus belles icônes de Constantinople. Ainsi que l’explique l’autrice, grande amatrice d’icônes russes, « on ne peint pas une icône, on l’écrit. Les icônes racontent des his-toires. J’en possède une très ancienne qui figure dans un endroit très particu-lier de mon logement. Une bougie brûle devant elle en permanence ».

COMME AUJOURD'HUIEn parallèle, Les exilés de Byzance ra-conte l’histoire des Dionous d’Orient qui deviennent propriétaires terriens. « Dans ces régions, cependant, au-cun chrétien ne se sentait à l’abri de brusques et violentes attaques à leur encontre, remarque Catherine Herma-ry-Vieille. Cela n’empêchera pourtant pas mes personnages de faire de bonnes affaires, investissant dans plusieurs pays du Moyen-Orient, comme la Sy-rie, le Maroc, la Palestine ou l’Égypte. L’arrivée des Anglais dans ces régions y a particulièrement contribué. »

En refermant ce livre, on ne peut s’em-pêcher de faire des liens avec les nom-breuses migrations qui s’invitent dans les bulletins d’informations quotidiens. « Cette traversée des deux grandes na-tions que j’essaie de décrire dans mon roman permettra, je l’espère, de dé-couvrir une part de vérité du sort des chrétiens d’Orient », conclut la roman-cière. ■

Catherine HERMANY-VIEILLE, Les Exilés de Byzance. Paris, Albin Michel, 2021. Prix : 22¤. Via L’appel : - 5% = 20,90¤.

Dans Les exilés de Byzance, Catherine Hermary-Vieille retrace, depuis la chute de Constantinople en 1453, l’histoire de deux branches d’une même famille respectivement établies en Russie et en Orient.

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LES BILLETS DE JACQUESDe 1948 à 1951, le père de Jacky Ickx, lui aussi prénommé Jacques, a quasi quotidiennement signé un pe-tit billet intitulé Tout autour de nous dans le journal Les Sports, à l’époque pas encore absorbé par la DH. Jour-naliste indépendant, spécialisé notam-ment dans les sports moteurs (ce qui était rare à l’époque), Jacques Ickx avait lui-même été coureur motocy-cliste dans les années trente. Au-delà d’une chronique sportive, ses billets révèlent l’humanisme et la grande gé-nérosité avec lesquels il regardait le monde. Ses enfants en ont sélectionné une partie, qui paraissent ici pertinem-ment illustrés de clichés d’époque. Un bel album à feuilleter. (F.A.)

Pascal et Jacky ICKX, Jacques Ickx tout au-tour de nous, éditions Mols, Wavre, 2021. Prix : 29,90€. Via L’appel : – 5% = 28,41€.

LES ABYSSES RÉVÉLÉSMais qu’y a-t-il au fond des mers ? Comment est-il possible qu’une vie s’y soit développée ? À quoi res-semble-t-elle ? Quand on est jeune, on se pose souvent ce type de ques-tions auxquelles les adultes ne savent que répondre. Cet album grand format tombe alors plus qu’à point. Il em-mène sa lectrice ou son lecteur à bord d’un navire scientifique parti explorer les abysses, à plus de 11000 mètres de profondeur. Les découvertes y sont incroyables, accompagnées d’expli-cations et, surtout, très précisément et magnifiquement illustrées. Quant au texte, rédigé par un biologiste marin, il met la science au niveau d’un jeune lectorat. (F.A.)

Annika SIEMS et Wolfgang DREYER, Sous l’océan, Paris, Delachaux et Niestlé, 2021. Prix : 20€. Via L’appel : - 5% = 19€.

LES TRUCS DE MAMYCela ressemble à un vieux carnet re-trouvé dans un grenier, et dans lequel une aïeule éloignée aurait consigné les “trucs et ficelles” grâce auxquels elle fabriquait remèdes, cosmétiques, produits de ménage ou d’hygiène cor-porelle. Des secrets de famille qu’on aurait simplement remis au goût du jour en fonction de l’évolution des connaissances, et qui permettraient de se passer de bien de ces produits que des multinationales essaient de vendre à tout prix. L’auteure, herba-liste et spécialisée en plantes médici-nales, propose ici cinquante recettes à base de plantes et d’agents naturels. (F.A.)

Valérie CATALA, Grimoire moderne, 50 re-cettes naturelles, Jouvence, Saint-Julien-en-Ge-nevoix, 2021. Prix : 22,90. Via L’appel : -5% = 21,76€.

RÉVÉLATRICE SEMOISSuivre le fil de la Semois, de sa source à Arlon à son écoulement dans la Meuse, c’est entrer dans l’histoire d’un territoire encore sauvage, et bien plus immense qu’on ne le pense. Cette splendide rivière est un véritable ré-vélateur de ce que sont la Lorraine, la Gaume et l’Ardenne, que l’auteur fait découvrir pas à pas en plus de 300 pages, au terme d’un énorme travail de recherche documentaire. Il y mêle l’histoire, l’anecdote et de très nom-breux documents illustrés (photos d’aujourd’hui et d’hier, tableaux, des-sins…). En 2000, la première édition de cet ouvrage avait été primée par le Parlement de la Fédération Wallo-nie-Bruxelles. (F.A.)

Dominique BILLION, Mémoire de Semois, Neufchâteau, Weyrich, 2021. Prix : 35€. Via L’appel : - 5% = 33,25€.

RECETTES NÉO-PAYSANNESDe la ferme à la bouche : c’est un peu ce qui se cache derrière ce volume ori-ginal qui mêle découverte du monde agricole actuel et recettes inspirées par les animaux qu’on y élève. On se dit même que ces agriculteurs au-raient eux-mêmes pu y présenter leurs plats favoris, en fonction des meil-leurs produits issus de leurs exploita-tions. Mais cela eût peut-être manqué de diversité… et d’attrait. Dès lors, à côté de cette découverte de 50 belles personnalités, rédigée par le critique gastronomique Éric Boschman, ce sont trois personnages connus de la télévision qui confient 50 recettes de leur cœur. (F.A.)

Sandrine DANS, Julien LAPRAILLE, Gérald WATHELET et Éric BOSCHMAN, De la terre à l’assiette, Bruxelles, Racine, 2021. Prix : 25€. Via L’appel : - 5% = 23,75€.

FASCINANT VAN EYCKEn 2020 s’est tenue à Gand la plus grande exposition des œuvres de Van Eyck jamais connue. Elle clôturait la restauration de L’Agneau mystique et entendait mettre au jour la “révolution optique” dont ce peintre est l’auteur. Ce très imposant ouvrage est la ver-sion française du livre qui accompa-gnait l’exposition. Il marie des textes sur l’artiste, rédigés par cinq spécia-listes évoquant le contexte de son travail et l’étude de ses innovations, avec de très nombreuses illustrations pleine page extraites des tableaux. En en isolant les détails les plus fins, celles-ci sont réellement fascinantes. Un livre bijou aux images quasiment hypnotiques. (F.A.)

COLLECTIF, Van Eyck, une révolution op-tique, Paris, Flammarion, 2021. Prix : 75€. Via L’appel : - 5% = 71,25€.

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QUAND LA NATURE…Il y a des paysages grandioses qui frappent si fort le regard qu’on les conserve longtemps en mémoire, sans se rendre compte qu’ils ont été forgés par la Nature. Or c’est elle qui, depuis la nuit des temps, les malaxe, les tord, les soulève, les plie ou les écrase. Elle leur confère ainsi la forme sublime qu’ils revêtent aujourd’hui. Parcou-rant la France, l’auteur a cliché les plissements, failles et autres cratères que la Nature y a laissés, ainsi que les traces des tempêtes, ou les tornades. Une belle collection d’images et de paysages, qui s’étalent souvent sur deux pages, et qui rappellent la force de Nature. (F.A.)

Georges FETERMAN, Les forces de la nature en France, Paris, Delachaux et Niestlé, 2021. Prix : 29,90€. Via L’appel : - 5% = 28,41€.

DES NUÉES D’OISEAUXC’est un rituel saisonnier. Deux fois par an, les voilà qui, par centaines, se déplacent vers le sud, pour en revenir quelques mois plus tard. Un voyage de plusieurs milliers de kilomètres parfois, que les oiseaux accomplissent depuis la nuit des temps. Mais pour-quoi ne font-ils pas tous pareil dé-placement ? Comment réussissent-ils cette transhumance ? À l’aide de cartes, mais surtout de très belles pho-tos, ce grand livre fait pénétrer dans le secret de la migration. Il est rédi-gé par un spécialiste, qui observe le phénomène depuis quarante-cinq ans. Il comblera qui aime observer les oi-seaux et souhaiterait en connaître plus à leur égard. (F.A.)

Marc DUQUET, Migrations, Paris, Delachaux et Niestlé, 2021. Prix : 29,90€. Via L’appel : - 5% = 28,41€.

LA CUISINE DE CHRISTIANE ET DÉDÉE1990 : deux grands-mères bien belges rassemblent pour leurs 24 petits-en-fants le savoir culinaire appris de leur père. Cela deviendra un livre de re-cettes, puis deux. Des succès souvent réédités (200 000 exemplaires au total) qui inciteront un des petit-fils de Chris-tiane à concevoir enfin une version “in-tégrale”, que voici. Elle étale sur 450 pages tous les secrets d’une cuisine classique et familiale. De 30 potages à plus de 200 desserts en passant par les sauces, les entrées, les viandes et les volailles. Pas d’illustrations, souvent trop alléchantes pour être réelles. Mais du texte, du vrai, du concret. Tous aux fourneaux ! (F.A.)CHRISTIANE ET DÉDÉE, La cuisine à quatre mains – L’intégrale - Bruxelles, Mardaga, 2021. Prix : 34,90€ . Via L’appel :-5% = 33,16€.

TABLE CHAMPENOISEVitrail de langoustines, foie gras en pierre saline de sarrasin, cuir de champignons rosés… Le chef étoilé champenois Philippe Mille propose dans cet ouvrage seize recettes origi-nales inspirées par seize matières clés de la Champagne, allant de la craie à l’or, en passant par les pigments ou la mosaïque. Elles sont pratiquées par autant d’artisans de la région, ayant chacune inspiré le chef pour une rai-son personnelle et en accord mets avec un des grands champagnes de ce terroir. Au-delà des recettes, les magnifiques photos de cet ouvrage en font réellement un très beau livre grand format. (F.A.)

Philippe MILLE, L’âme de la Champagne, ar-tisans d’art et haute gastronomie, Paris, Albin Michel, 2021. Prix : 49,25€. Via L’appel : - 5% = 46,79€.

VOYAGES EN PHOTOS« 165 jours, 165 lieux, 1650 photos », annonce le sous-titre de ce beau-livre qui reprend les posts quotidiennement publiés entre novembre 2020 et avril 2021 sur facebook par Benoît Feron sous le titre Traveling in confinement. À cette occasion, l’artiste belge a pris conscience « de la puissance de la photo comme vecteur de communi-cation et de partage et comme outil d’éveil de la conscience ». Les somp-tueuses photos, d’une grande diversi-té, proviennent de quasiment tous les pays de la planète, représentant tantôt des humains, tantôt des paysages. Elles sont accompagnées d’un bref texte qui les commente et les met en perspective. (M.P.)

Benoît FERON, Voyages, Bruxelles, Prisme Éditions, 2021. Prix : 49,50€. Via L’appel :- 5% = 47,03€.

ÉPOPÉE GALLO-ROMAINEÀ deux kilomètres du centre de Ro-chefort se trouve un lieu peu com-mun, qui s’est développé autour de la découverte d’une villa gallo-romaine vieille de 2000 ans. Fouillé dès le XIXe siècle, le site a fini par mettre au jour les vestiges d’une grande exploita-tion agricole, s’étendant sur quatorze hectares. Lorsqu’on a décidé d’ouvrir le lieu au public, est née l’idée d’en faire un archéoparc aux visées à la fois scientifiques et de vulgarisation. Ce livre mène en même temps à la dé-couverte de la villa et du domaine qui l’anime aujourd’hui. Largement illus-tré, il décline simultanément le passé et le présent de Malagne. (F.A.)

COLLECTIF, Malagne la Gallo-romaine, Neufchâteau, Weyrich, 2021. Prix : 29€. Via L’appel : - 5% = 27,55€.

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UNE ABBAYE FLORISSANTEÀ l’occasion du 900e anniversaire de la fondation de l’abbaye de Floreffe, voici un superbe ouvrage collectif ma-JQL¿TXHPHQW�LOOXVWUp�VXU�O¶KLVWRLUH�GH�ce lieu séculaire qui abrite aujourd’hui une école secondaire. Il met en évi-dence le patrimoine architectural et artistique, dont les stalles baroques sont parmi les plus belles d’Europe. Il raconte aussi l’histoire humaine à travers les générations de religieux et ensuite d’élèves qui s’y sont succédé. Et, du chœur des chanoines aux chan-teurs du festival Esperanzah !, c’est toujours la même voix humaine qui résonne en ses murs. (J.Ba.)

Jean-François PACCO (sous dir.), )ORUHৼH��1HXI� VLqFOHV� G¶KLVWRLUH, Namur, Les éditions namuroises, 2021. Prix = 35€. Via L’appel : - 5% = 33,25€.

UN JOYAU BAROQUE Ce livre de 670 pages joliment illus-tré apporte un nouveau regard sur O¶pJOLVH� 6DLQW�/RXS� pGL¿pH� j� 1DPXU�par les jésuites à partir de 1661. Aux bâtisseurs, corps de métiers et artistes, elle doit l'impressionnante voûte, le patrimoine mobilier, les retables d'au-tels en marbre, statues, tableaux, etc. Sont aussi décrits les projets éducatifs et sociaux menés par les religieux, la SUpFpGHQWH�pJOLVH��OpGL¿FH�EDURTXH�HQ�tant qu'église paroissiale aux rénova-tions successives. Certaines person-nalités sont présentées, comme Dom Minsart, curé et fondateur des Sœurs de Sainte-Marie. (J.Bd.)

Thérèse CORTEMBOS et Marie-Christine CLAES, De Saint-Ignace à Saint-Loup.1621-��4XDWUH� VLqFOHV� GXQ� MR\DX� EDURTXH� j�Namur. Namur, Éditions de la Société archéo-logique de Namur, 2021. Prix = 50€ - pas de remise sur ce titre.

SAINES TARTESLes aliments à index glycémique élevé font monter le taux de sucre dans le sang. Ils peuvent entraîner une hausse du poids et des risques de diabète. Alors, surtout en période de fêtes, il vaut parfois mieux pri-vilégier les index glycémiques bas. Sans pour autant faire régime. Bon nombre d’aliments de ce type sont des fruits et des légumes, qu’on peut avec modération PpODQJHU�j�GHV�IURPDJHV�D¿Q�GH�UpDOLVHU�des recettes pleines de saveur. Un bon moyen d’y parvenir est de concocter des quiches, tourtes ou tartes. Ce que propose ce manuel de recettes, qui recourt aussi à des farines et des sucres bas en glycémie. Ces 67 occasions de préparer une pâte ou un plat équilibré ne sont pas un cadeau à réserver aux cuisinières… (F.A.)

Léa DELMAS, Jeanne BALTEAU, Quiches, tourtes et tartes à index glycémique bas, Saint-Ju-lien-en-Genevoix, Jouvence, 2021. Prix = 15,90€. Via L’appel : - 5% = 15,11€.

MATRILINÉAIRESIl fallait sans doute, dans ce monde qui s’efforce de rendre sa place à la femme, qu’un livre se penche sur ce qui, dans cet univers patriarcal, paraît à peine pensable : des “sociétés de femmes”. Des territoires où certains pouvoirs clés ne sont pas aux mains des mâles, que ce soit dans la gestion des richesses, des cérémonies, des arbitrages, ou de la destinée. Depuis 2008, cette photographe parcourt le monde à la recherche de ces sociétés “matrifocales” ou “matrilocales”. Elle en a fréquenté dix, de l’île d’Oues-sant au bout de la Chine, sur presque chaque continent. Au-delà de su-perbes photos, une vraie découverte d’un autre art de vivre. (F.A.)

Nadia FERROUKHI, Les matriarches, Paris, Albin Michel, 2021. Prix = 35,15€. Via L’ap-pel : - 5% = 33,19€.

ORVAL EN PHOTOSL’abbaye d’Orval est un lieu de si-lence et de beauté offert à tout qui dé-sire faire retraite pour se recentrer et donner sens à sa vie. Un endroit pour « mettre son cœur au large ». La pho-tographe Cécile Bolly a pour objectif de se laisser « regarder par tout ce qui rend vivant » et offre des images qui sont traces de présence. Frère Bernard Joseph, habité par la Parole, passeur de poètes et animateur de sessions de ressourcement spirituel à l’aide de la poésie, propose, pour chaque cliché, des envols possibles, des ouvertures vers le mystère caché au-delà des ap-parences. (C.M.)

Bernard Joseph SAMAIN Cécile BOLLY, Or-val, Regard d’enfance, Neufchâteau, Weyrich, 2021. Prix = 24€. Via L’appel : - 5% = 22,80€.

L’ART POUR MÉDITEREntrer dans une démarche de médi-tations à partir d’œuvres d’art : sous forme de livre, l’approche est nouvelle et originale. L’auteure de cet ouvrage PDJQL¿TXHPHQW� LOOXVWUp� D� VpMRXUQp��ans dans un monastère bouddhiste, dont 3 de retraite. Elle prend son lec-teur par la main pour le faire pénétrer dans ce qu’elle appelle « un guide de méditation illustré » inspiré de la pleine conscience. À travers 100 œuvres, tant classiques que contem-poraines, elle commente sa démarche et les rencontres de l’esprit qu’elles inspirent. Un voyage thématique que chacun peut s’approprier, complété de cinq méditations audio guidées. (F.A.)

Soizic MICHELOT, Méditer à travers l’art, Paris, Albin Michel, 2021. Prix = 30,05€. Via L’appel : - 5% = 28,55€.

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UNE ANNÉE AU JARDINCet agenda à la reliure en spirale qui le rend facilement manipulable est agrémenté de rubriques sur différents thèmes liés au jardin, comme les mo-des de conservation des légumes d’été pour l’hiver, les arbustes ornemen-taux, le jardin aromatique ou encore la santé au jardin. Il conseille les bonnes positions à adopter par le jardinier pour éviter le mal de dos et autres dé-sagréments. Agréablement illustré, il propose aussi un dicton pour chaque mois et un conseil quotidien : les jours pour semer, planter ou récolter tel légume ou telle plante. Pratique et instructif pour les jardiniers aguerris comme pour les débutants. (J.G.)

Violaine MARCHAL et Audrey MOU-REAUX, L’agenda jardin, Neufchâteau, Wey-rich, 2021. Prix = 20€. Via L’appel : - 5% = 19€.

HISTOIRE DU FAUX SOIR« Peau de l’URSS vendue trop tôt, toujours disponible chez A. Hitler, %OLW]NULHJVDOOpH�� %HUFKWHVJDGHQ. » Cette petite annonce moqueuse paraît dans le faux Soir vendu à la barbe de l’Occupant allemand les 9 et 10 no-vembre 1943, à Bruxelles et en Wallo-nie, à la place du Soir volé, ou “embo-ché”. Cet audacieux acte de résistance est raconté par le scénariste Denis Lapière et le spécialiste BD du Soir, Daniel Couvreur, dans cet album qui revient sur sa minutieuse préparation HW� VXU� OHV� GLI¿FXOWpV� DX[TXHOOHV� RQW�fait face ses acteurs, dont certains ont péri en déportation. Son fac-similé est vendu avec l’album. (M.P.)

Denis LAPIÈRE, Daniel COUVREUR et Christian DURIEUX, Le faux Soir, Paris, Fu-turopolis, 2021. Prix = 19€. Via L’appel : - 5% = 18,05€.

COMFORT FOOD NATUREAh, les jours froids et pluvieux où l’on ressent le besoin de nourrir son corps de quelque chose de solide, de doux et de bon ! Une naturopathe connue sur les réseaux sociaux, ex-cheffe de restaurant, propose sa solution : de la comfort food qui rassure. Pour cela, il VXI¿W�GH�FKRLVLU� OHV�ERQV�LQJUpGLHQWV��de mélanger des éléments inattendus, ou de revisiter des recettes classiques. Pour concocter des tartinades ou des plats salés, des barres de dessert non industrielles, ou des gaufres, cookies ou sablés alternatifs. Le livre suggère aussi des boissons douces pour soi-rées cocooning. (F.A.)

NAIMA de Miam_oh_Miam, 60 recettes ré-confortantes de votre naturopathe, Saint-Ju-lien-en-Genevoix, Jouvence, 2021. Prix = 15,90€. Via L’appel : - 5% = 15,11€.

LE PATRIMOINE À PIEDDans ce guide clair et pratique, Na-thalie Demain entraîne le randonneur sur les sentiers du Brabant wallon. Le parcours de chaque promenade est indiqué sur une carte, téléchargeable sur internet et balisé par les indica-tions de l’auteure pour que personne ne se perde. Chaque itinéraire est prétexte à découvrir le patrimoine de cette région, son histoire et ses beau-tés naturelles. Les notices explicatives et les photos en couleur permettent au promeneur de ne pas passer à côté de l’essentiel. (J.Ba.)

Nathalie DEMAIN, Promenades en Brabant ZDOORQ��LWLQpUDLUHV�HQ�ERXFOH�DX�¿O�GH�O¶KLV-toire et du patrimoine, Bruxelles, Racines, 2021. Prix = 19,95€. Via L’appel : - 5% = 18,96€.

LA MARCHE D’UN SAPIENS« Deux traces laissées par des Sa-piens à d’autres Sapiens. » Tête de pont du roman graphique documen-taire (Les ignorants, Rural !), l’auteur BD Étienne Davodeau a relié à pied, en juin 2019, la grotte de Pech Merle, dans le Lot, et ses peintures rupestres vieilles de 29000 ans, et la commune de Bure, dans la Meuse, où doivent être enfouis des déchets nucléaires. Cet album noir et blanc de 200 pages, intelligent et profond, qui donne à voir de vastes paysages sauvages, est jalonné de rencontres avec des spécia-listes (paléontologue, physicien, agro-nome, restauratrice d’œuvres d’art, etc.) qui lui confèrent un supplément d’âme et de contenu. (M.P.)

Étienne DAVODEAU, Le droit du sol, Paris, Futuropolis, 2021. Prix = 25€. Via L’appel : - 5% = 23,75€

DANS SON “PRÉ CARRÉ”Léonard de Vinci disait déjà : « Va prendre des leçons dans la nature, c’est là qu’est notre futur ! » Fort de cette maxime, Samuel Rebulard, agronome et naturaliste, prend le lec-teur par la main autour d’un carré de terre et montre comment l’observer et découvrir, de jour comme de nuit au cours des quatre saisons, les mille et une richesses que peut révéler la na-ture en ouvrant bien les yeux. On par-court ainsi, avec de multiples images splendides, le réseau dense de tout ce qu’offre “Dame Nature”. Un merveil-leux ouvrage riche en découvertes et leçons de choses bienvenues en ces temps de crise climatique. (M.L.)

Samuel REBULARD, Dans un pré carré de terre, Paris, L’iconoclaste. 2021. Prix = 24,90€. Via L’appel : - 5% = 23,66€.

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ÉLOGE DE L’UTOPIE

Don Quichotte aujourd’hui

Gérald HAYOIS

Qui lit encore aujourd’hui Don Quichotte ? On a beau savoir que c’est un monument de l’histoire de la littérature, peu

l’ont fait. On se rappelle qu’il s’agit des aventures d’un chevalier errant HW� GH� VRQ� ¿GqOH� FRPSDJQRQ� 6DQFKR�Pança combattant les injustices et ve-nant au secours des opprimés. Et que ce gentilhomme suscite les railleries pour ses maladresses. On se souvient de l’épisode où, en apercevant des moulins à vent, l’hidalgo imagine qu’il s’agit d’une armée de géants à combattre. Mais il y a bien plus à rete-nir de ce chef-d’œuvre.

AUTRE REGARD

D’origine espagnole et catalane, Prix Goncourt 2014 pour Pas pleurer, Ly-die Salvayre admire ce roman et sur-tout ses deux héros. En quinze cha-pitres bien enlevés, sorte de missives à l’adresse de Cervantès ou des lecteurs d’aujourd’hui, elle met en exergue les facettes intéressantes du carac-tère du chevalier. Pas question de se contenter de railler ses maladresses !

Non, soutient-elle ardemment, Don Quichotte n’est pas un fou cocasse, mais un utopiste, un idéaliste qui veut changer le monde. Et des gens comme lui, on en a besoin aujourd’hui. Il se FDVVH�SHXW�rWUH� OD�¿JXUH�GDQV�VHV�HQ-treprises, mais il essaye, il agit. Rêver debout, titre choisi pour ce livre, voi-là ce que Quichotte fait de sa vie, et c’est digne d’éloges. Face à un monde où le mal, l’injustice, les souffrances, la violence sont omniprésents, l’écri-vaine insiste. II faut impérativement imaginer un autre monde, passer à l’action, même si le résultat est incer-tain. Tenter d’atteindre l’inaccessible étoile, comme le chantait Jacques Brel dans /¶KRPPH�GH�OD�0DQFKD�

UN ROMAN POUR

AUJOURD’HUI

Bouillonnante d’indignation face au monde de 2021 où la planète va à vau-l’eau, où le système économique favorise outrageusement les puis-sants, Lydie Salvayre trouve en Don 4XLFKRWWH� OD� ¿JXUH� LQVSLUDQWH�� ,O� HVW�un anarchiste qui chamboule l’ordre temporel. D’une superbe écriture in-

candescente, elle écrit ainsi : « Par-tout où il passe, un grand vent se VRXOqYH��,O�ERXVFXOH��LO�LQWHUURJH��PR-ELOLVH� OHV� DৼHFWV�� GpVWDELOLVH� OHV� URX-tines, ravive les soifs, crée des appels G¶DLU�ª� On pourrait même voir en lui XQH� ¿JXUH� FKULVWLTXH� �� ©� Quichotte vomit la tiédeur, prend toujours la dé-fense des faibles, évoque sans cesse XQ� UR\DXPH� LGpDO� TXL� QH� VHPEOH� SDV�GH�FH�PRQGH��VH�PRQWUH�LQ¿QLPHQW�ERQ�VRXV�GHV�GHKRUV�UXJXHX[� »

Si le personnage est fougueux, indi-gné, l’autrice l’est tout autant. Pleine GH�YHUYH��VDQV�¿RULWXUHV��JRXDLOOHXVH��elle emporte le lecteur avec convic-tion dans ces envolées enthousiastes et ses indignations. Pas de mièvrerie ni de phrases pour faire joli. Admi-ration pour le chevalier errant, mais aussi constat qui est une leçon : Qui-chotte échoue dans ses entreprises SDUFH� TX¶LO� YHXW� OD� ¿Q� VDQV� GLVSRVHU�des moyens. Un combat aussi ambi-tieux ne peut jamais se gagner seul.

Chapitre après chapitre, un éclairage nouveau de l’œuvre est proposé. Plongée dans l’histoire de l’Espagne du XVIe siècle où la royauté, les puissants, l’Église font preuve d’une violence et d’une intolérance inouïes à l’égard de tous les déviants. Perti-nente mise en évidence de l’amitié comme indispensables réconfort et soutien dans la vie. Entre Don Qui-chotte et Sancho Pança, le lien est indéfectible malgré leurs différences. L’un est excessif, candide, l’autre me-suré, plein de bons sens, sceptique, même s’il est ébloui par le panache de son hidalgo. N’est-on pas tous un peu, selon les circonstances, l’un de ces deux personnages ? se demande Lydie Salvayre. Qui termine son livre par un éloge émouvant de tous les Don Qui-chotte d’aujourd’hui, les anonymes, pleins de courage et qui peut-être un MRXU�OLJXHURQW�OHXU�DUGHXU��Ŷ

Lydie SALVAYRE, Rêver debout, Paris, Seuil, 2021. Prix : 18€. Via L’appel : - 5% = 17,10€.

La romancière Lydie

Salvayre a relu le

célèbre Don Quichotte

de Cervantès et en

propose une portait

actualisé. Hommage

pour l’engagement

radical, le courage, la

générosité.

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