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Obésités et troubles du comportement alimentaire Dr Gérard APFELDORFER Janvier 2015, Paris Ne pas reproduire sans l’autorisation de l’auteur

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Obésités et troubles du comportement alimentaire

Dr Gérard APFELDORFER

Janvier 2015, Paris

Ne pas reproduire sans l’autorisation de l’auteur

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Obésités, boulimies : approches cognitivo-comportementales. Gérard Apfeldorfer, 2015

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ANOREXIA NERVOSA (Diagnostic and Statistical Manuel, DSM-V, 2013) A. Refus de maintenir un poids égal ou supérieur au poids minimum compte tenu de l’âge et de la taille. B. Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros, même avec un poids anormalement bas. C. La forme et le poids du corps sont perçus de façon anormale, le jugement porté sur soi-même est indûment in-

fluencé par la forme et le poids du corps, ou il existe un déni des conséquences du bas poids corporel. D. Chez les femmes pubères, aménorrhée, c’est-à-dire absence de règles durant au moins 3 cycles consécutifs. On distingue 2 types d’Anorexia nervosa : Type boulimies/vomissements : la personne présente des hyperphagies incontrôlées accompagnés de comporte-

ments compensatoires pour prévenir une prise de poids, tels des vomissements provoqués, des prises abusives de laxatifs ou de diurétiques.

Type restrictif : la personne ne présente ni épisodes d’hyperphagies incontrôlées, ni comportements compensa-toires pour prévenir la prise de poids.

BULIMIA NERVOSA (Diagnostic and Statistical Manuel, DSM V, 2013) A. Épisodes récurrents d’hyperphagie incontrôlée. Un épisode d’hyperphagie incontrôlée consiste en : 1. prises

alimentaires, dans un temps court inférieur à 2 heures, d’une quantité de nourriture largement supérieure à celle que la plupart des personnes mangeraient dans le même temps et dans les mêmes circonstances. 2. Une impression de ne pas avoir le contrôle des quantités ingérées ou la possibilité de s’arrêter.

B. Le sujet met en œuvre des comportements compensatoires visant à éviter la prise de poids (vomissements pro-voqués, prises de laxatifs ou de diurétiques, jeûnes, exercice excessif).

C. Les épisodes d’hyperphagie incontrôlée et les comportements compensatoires pour prévenir une prise de poids ont eu lieu en moyenne 2 fois par semaine durant au moins 3 mois.

D. Le jugement porté sur soi-même est indûment influencé par la forme et le poids du corps. E. Le trouble ne survient pas au cours d’une anorexie mentale.

HYPERPHAGIE BOULIMIQUE (« Binge eating disorder », DSM-V, 2013) A. Épisodes récurrents de crises de boulimies (« binge eating »). Une crise de boulimie répond aux 2 caractéris-

tiques suivantes : 1) Absorption, en une courte période de temps (moins de 2 heures), d’une quantité de nourriture dépassant

notablement ce que la plupart des personnes mangent dans le même temps et dans les mêmes circonstances. 2) Sentiment de perte de contrôle sur le comportement alimentaire pendant la crise (par exemple, sentiment

de ne pas pouvoir s’arrêter de manger ou de ne pas pouvoir contrôler ce qu’on mange ou la quantité de ce qu’on mange).

B. Durant les crises de boulimie, au moins trois des critères suivants d’absence de contrôle sont présents : 1) Prise alimentaire nettement plus rapide que la normale. 2) L’individu mange jusqu’à l’apparition de sensations de distension abdominale inconfortable. 3) Absorption de grandes quantités d’aliments sans sensation physique de faim. 4) Prises alimentaires solitaires afin de cacher aux autres les quantités ingérées. 5) Sensations de dégoût de soi, de dépression, ou de grande culpabilité après avoir mangé. C. Le comportement boulimique est source d’une souffrance marquée. D. Le comportement boulimique survient en moyenne au moins 2 fois par semaine sur une période de 6 mois. E. Le comportement boulimique n’est pas associé à des comportements compensatoires inappropriés (par

exemple vomissements, prise de laxatifs, exercice physique intensif), ne survient pas au cours d’une Anorexie men-tale (Anorexia nervosa) ou d’une Boulimie (Bulimia nervosa).

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L’APPROCHE COGNITIVO-COMPORTEMENTALE Dans les prises en charge de l’obésité avec Hyperphagie boulimique et de la

Bulimia nervosa, la tenue du carnet alimentaire et la thérapie cognitive sont uti-lisées dans tous les cas. Dans l’obésité, on insiste généralement plus sur les tech-niques de contrôle du stimulus, tandis que dans la Bulimia nervosa, on met plus en avant la prise régulière de trois repas par jour, les comportements alternatifs incompatibles avec la boulimie-vomissement et l’exposition à la prise d’aliments anxiogènes. Dans l’anorexie mentale, il est essentiel de débuter par un travail sur l’acceptation de la graisse corporelle. Quel choix de valeurs la personne fait-elle pour la suite de son existence ? Pour vivre selon ces valeurs, un corps plus normal est nécessaire, et il faut le deuil du contrôle conscient de son poids et de ses formes corporelles. Un travail sur la restriction cognitive est nécessaire dans la majorité des cas. En fait, les différentes techniques doivent être adaptées, de préférence sur un mode individuel, au patient pris en charge.

1) CE QUE VEUT DIRE MANGER NORMALEMENT Mais avant de passer en revue les méthodes de soins des troubles du compor-

tement alimentaire, encore faut-il définir ce qu’on entend par « comportement alimentaire normal ».

Les prises alimentaires sont en grande partie gérées à un niveau inconscient par des processus de régulation neuropsychophysiologiques. L’acte alimentaire est l’objet de contrôles à de multiples niveaux, permettant des régulations per-formantes, grossièrement à l’échelle de la semaine :

a) Niveau physiologique quantitatif : l’écoute et le respect des sensations alimentaires (faim, volume, rassasiement global) permettent de contrô-ler les apports énergétiques. On mange alors idéalement quand on a une faim modérée, on cesse de manger lors de sensations de rassasie-ment modérées. Les émotions, telles la culpabilité de consommer cer-tains aliments « interdits », l’anxiété de grossir, ou toutes autres émo-tions suffisamment intenses empêchent la perception des sensations de faim et de rassasiement.

b) Niveau physiologique qualitatif : l’écoute et le respect des appétences spécifiques permet de contrôler les apports en nutriments et micronu-triments. Le plaisir anticipé dépend de l’état nutritionnel et des condi-tionnements alimentaires.

c) Niveau affectif et relationnel : c’est à partir de l’acte alimentaire, qui leur sert d’étayage, que se développent les premières relations affec-tives. Manger sur un mode convivial est un aspect indispensable des liens sociaux. L’empathie qui naît du partage facilite la régulation ali-mentaire : voyant l’autre manger ce que nous mangeons, nous sommes ramenés à nos sensations alimentaires. Des repas socialisés et ritualisés pris dans un cadre rassurant et agréable, en disposant d’un temps suffi-sant, facilitent un comportement alimentaire contrôlé par les centres nerveux concernés.

d) Niveau cognitif : on mange en fonction de valeurs culturelles, reli-gieuses, scientifiques, qui déterminent les aliments comestibles, les modes de préparation, les lieux et horaires, les manières de table. On

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ingère des aliments sensés, porteurs d’histoires et de symboles. Plus prosaïquement, les prises alimentaires sont partiellement gérées à un niveau cognitif conscient : on « garde une place pour le dessert », on « fait honneur » à un banquet.

e) Niveau émotionnel : manger des aliments réconfortants peut servir au contrôle des émotions et stresses. Lorsqu’on est en restriction cognitive, on ne trouve pas ce réconfort et on continue donc à manger sans pou-voir s’arrêter.

Le contrôle inconscient des comportements alimentaires s’apparente à un per-

pétuel bricolage de l’organisme visant à satisfaire en priorité les besoins les plus urgents à un moment donné : besoins énergétiques, besoins en nutriments et micronutriments, faim de représentations, faim des autres, ou protection contre les stresses et certains états émotionnels vécus comme insupportables. Les com-portements alimentaires excessifs, en plus et en moins, sont régulés lors des prises alimentaires ultérieures par les mécanismes de corrélation post-prandiale et d'ajustement calorique. Lorsque certains besoins l’emportent constamment sur les autres, l’alimentation cesse d’être correctement régulée.

Ce dont il est question, avec les personnes souffrant de troubles du compor-tement alimentaire et de problèmes pondéraux, c’est rétablir une alimentation régulée, qui s’oppose tout autant à une alimentation anarchique qu’à une ali-mentation rigidifiée sur des bases cognitives. Ou encore, on peut opposer une alimentation réflexive (où il convient de « réfléchir » consciemment et suivre des règles) à une alimentation intuitive (fondée sur l’écoute des sensations et émo-tions).

2) LA PRISE EN CHARGE

a) L’analyse fonctionnelle C’est un temps fondamental de la prise en charge. Doivent particulièrement

être pris en considération : le statut pondéral des parents, l’histoire pondérale et les différentes méthodes précédemment essayées, le comportement alimentaire, ses variations, le degré de restriction alimentaire (voir “carnet alimentaire”), l’estime de soi, les préoccupations concernant le poids et les formes corporelles, les niveaux d’anxiété, de dépression, d’affirmation de soi dans le champ alimen-taire et en dehors, les conflits de pouvoir, ce que le sujet attend du traitement et du thérapeute.

L’analyse fonctionnelle se pratique lors d’entretiens semi-structurés (analyse fonctionnelle SECCA et Analyse fonctionnelle de Fontaine et Ylieff) ou à l’aide de grilles d’entretiens structurés. De nombreux questionnaires spécifiques sont proposés aujourd’hui. Citons à titre d’exemples : le DEBQ (Dutch Eating Behviour Questionnaire), explorant la restriction, l’émotivité, l’externalité ; le « Eating Disorder Examination » de Fairburn et Cooper, qui explore la restric-tion alimentaire, les préoccupations concernant la nourriture, les formes corpo-relles et le poids ; le test d’habitudes alimentaires (EAT) et l’inventaire des dé-sordres alimentaires de Garner et Garfinkel (EDI). Divers questionnaires plus généraux d’auto-évaluation (par exemple : échelles d’affirmation de soi de Ra-thus, de dépression de Hamilton ou de Beck), des tests de personnalité peuvent être aussi utilisés.

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b) La définition des objectifs du traitement.

Les objectifs du traitement doivent être définis préalablement avec le patient. Dans le cas de la boulimie, il est préférable de proposer une diminution im-

portante des boulimies-vomissements et non une éradication totale, donc d’aborder d’emblée les attitudes dichotomiques du patient (voir “thérapies co-gnitives”).

Dans le cas de l’obésité, trois axes sont à considérer : 1) les troubles du com-portement alimentaire et la restriction cognitive ; 2) Les désordres émotionnels, où l’individu répond par un comportement alimentaire à un problème non ali-mentaire ; 3) le rejet du corps et la stigmatisation sociale du corps gros (voir schémas). L’analyse fonctionnelle devra permettre de déterminer l’axe ou les axes qui seront abordés en priorité pour un patient donné.

Il est en effet parfois judicieux de ne pas aborder les troubles du comporte-ment alimentaire en premier lieu, mais d’axer le travail tout d’abord sur le corps et la stigmatisation, ou sur les difficultés émotionnelles.

Dans les cas de surcharge pondérale, il est souhaitable de rappeler au patient que le thérapeute n’est pas un amaigrisseur, que les objectifs qu’on propose sont d’ordre comportemental, émotionnel et cognitif, que la perte de poids survien-dra de surcroît, éventuellement. Lorsqu’on n’encourage pas la restriction cogni-tive, la perte de poids ne peut en effet avoir lieu que lorsque des progrès suffi-sants auront été obtenus.

Dans tous les cas, l’objectif proposé est l’écoute et le respect des sensations alimentaires, la levée des obstacles qui l’empêchent. Manger en fonction de ses sensations alimentaires permet la stabilisation du poids au poids d'équilibre ou set-point. La remise en question d’un poids idéal est un point généralement trop douloureux pour qu’il puisse être abordé d’entrée de jeu.

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c) Les aspects relationnels de la prise en charge Il convient bien évidemment d’instaurer d’emblée une alliance thérapeutique,

où thérapeute et consultant travaillent conjointement au même but. Le théra-peute formule des hypothèses, propose des exercices qui sont discutés, que le patient doit s’approprier. Il est en permanence invité à s’observer, faire ses propres expériences, en tirer les conséquences.

Ceci est d’autant plus important ici que la plupart des personnes en difficulté avec leur poids et leur comportement alimentaire placent le lieu de contrôle (LOC) de leur vie, de leur alimentation, de leur poids, à l’extérieur d’eux-mêmes. Ils se vivent sans volonté propre et sont tentés de faire appel à la volonté d’une personne extérieure. Ainsi, ils pensent qu’eux-mêmes ne peuvent avoir de contrôle sur leurs ingesta et demandent à un médecin ou à un gourou de les « faire maigrir ». Puis, se sentant contrôlés de l’extérieur, ils luttent ensuite contre ce contrôle.

APPROCHE TRIAXIALE Trois axes seront à considérer : la restriction cognitive, les problèmes émo-

tionnels, l’acceptation de soi sans honte et sans crainte de stigmatisation. Selon les personnes, ces axes revêtiront plus ou moins d’importance. L’analyse fonc-tionnelle permettra de déterminer une stratégie, un ordre de priorités dans les objectifs du traitement, qui seront discutés avec le patient afin de dégager un contrat thérapeutique.

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a) Approche éducationnelle Toute approche cognitivo-comportementale comporte des aspects informatifs.

Ils portent généralement sur la nutrition, les mécanismes biologiques de la régu-lation pondérale et les causes de l’obésité, les effets de l’exercice physique, les effets biologiques et psychologiques de la restriction alimentaire, des hyperpha-gies, des vomissements, des prises de laxatifs et diurétiques. Il est donc souhai-table que le thérapeute ait une formation minimale en nutrition et en physiolo-gie.

L’explicitation des mécanismes cognitifs et émotionnels entretenant les hy-perphagies incontrôlées, des aspects psychosociaux contribuant à entretenir un désir irrationnel de minceur sont considérés comme faisant partie intégrante de l’approche cognitive (voir “thérapie cognitive”).

En ce qui concerne l’obésité, l’abord proposé ici est différent de celui habituel-lement utilisé par nombre de médecins somaticiens et nutritionnistes, et même par de nombreux comportementalistes : dès lors qu’on décide de prendre en considération le syndrome de restriction cognitive, des consignes diététiques comme surveiller les apports caloriques, diminuer les graisses consommées, avoir un apport équilibré en glucides et protéines, consommer des aliments riches en fibres, ne peuvent plus être considérés autrement que comme des ren-forçateurs de la restriction.

L’apport éducationnel va alors porter sur les mécanismes physiologiques ré-gulateurs de la prise alimentaire : la faim, le rassasiement, les appétences spéci-fiques en fonction de l’état nutritionnel sont des sensations qui doivent guider naturellement les prises alimentaires. Pour que cela soit possible, il convient de recréer ou de créer les conditions matérielles et psychoémotionnelles, néces-saires à l’écoute de ses besoins psychophysiologiques.

Il convient de reconsidérer avec le patient les croyances concernant les ali-ments à haute densité calorique : ce sont des aliments à fort pouvoir nourrissant, qui permettent de satisfaire son appétit avec peu. On les consomme donc avec toute l’attention qu’ils méritent, en veillant à l’apparition du rassasiement senso-riel spécifique (Voir “thérapie cognitive”.)

Le travail sur la restriction cognitive permet habituellement de désamorcer l’attirance exagérée pour ce type d’aliment, ainsi que de reconsidérer les croyances concernant les aliments « diététiquement corrects ». Une alimentation équilibrée sur le plan nutritionnel s’établit alors souvent spontanément, ou bien sur les conseils du thérapeute.

b) Self-monitoring : le carnet alimentaire

Le patient répond aux questions quoi, quand, où, comment. Outre noter ce qui est mangé, il peut aussi noter ce qu’il a eu envie de manger, sans l’avoir mangé.

En fait, selon les cas, l’accent peut être mis sur : • La prise de conscience des sensations de faim et de satiété. Il s’agit d’identifier et

de réhabiliter ces sensations internes. • La prise de conscience des réactions émotionnelles : vide interne, angoisses de sé-

paration, anxiété, confusion, tristesse et dépression, colère, culpabilité, honte, joie. L’« ennui » : le sujet mange alors lorsqu’il se retrouve seul et inoccupé. Ce terme vague recouvre sans doute un fléchissement de la perception de soi, ou

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l’émergence de cognitions accompagnées d’émotions douloureuses. Il s’agira de reconnaître ces états émotionnels, de les différencier des sensations de faim.

• La prise de conscience de l’influence de l’environnement : influences de la vue, de l’odeur, de la présence de nourritures appétentes ; prises alimentaires à table, dans le placard, réfrigérateur, en faisant la cuisine, en donnant à manger aux enfants. Ces facteurs tirent leur puissance de l’état de restriction cognitive.

• La prise de conscience de l’influence des facteurs relationnels : difficulté à refuser les aliments offerts, à s’affirmer. Alimentation compulsive par provocation et défi, dans le cadre d’un conflit de pouvoir.

• La rythmicité des prises alimentaires : lorsque l’alimentation est déstructurée depuis plusieurs années (personnes boulimiques), il s’agit d’insister avant toute chose sur le rétablissement d’une alimentation civilisée et socialisée, prise à ho-raires normaux, avec des aliments cuisinés.

On voit que les techniques de self-monitoring débordent largement du simple

contrôle diététique. Les péripéties du carnet alimentaire (notes différées, absence de notation, refus de noter) permettent d’aborder les aspects cognitifs (opposi-tion restriction/excès, raisonnable/déraisonnable, bonne/mauvaise, diabolisa-tion des sucres et graisses, jeux de transgression) ainsi que la relation théra-peute-patient (fétichisation, instauration d’une relation de pouvoir).

La tenue d’un carnet alimentaire permet de centrer l’attention du patient sur les facteurs d’environnement, relationnels et émotionnels qui commandent les prises alimentaires, plutôt que sur le poids ; il permet aussi d’aborder les at-tentes du patient face à son thérapeute : la perfection de sa tenue peut par exemple être le signal d’une fétichisation du thérapeute ; le refus de le tenir peut à l’inverse prévenir qu’on entre dans une phase où le thérapeute est vécu par le patient comme une menace.

Où et quand ?

Quoi et combien ?

F/R envie Pourquoi ?

12 h, chez moi, seule 18 h 30 Avec Stéphane 23 h Equipe 01 h Equipe 02 h, avec Lulu

Café, sucrettes 3 tartines fromage à tartiner 1 tr. Jambon Tomates, sauce huile paraffine 1/4 poulet sans la peau 1 salade frisée au citron 2 tr. Pain 1 yaourt 3 abricots 1 pain aux raisins Des chocolats, je ne sais plus combien

Biscuits Petit Ecolier, 6 ou 7

2/5 2/5 0/8 Pas envie

2/ ? Très envie

???

C’est mon petit-déjeuner et mon déjeuner en même temps. C’est le vrai repas de la journée. Si je ne mange pas avant de partir au travail, je ne me sens pas bien. C’est Antoinette qui a apporté les pains aux raisins. Je ne peux pas refuser, elle est très gentille. La boîte de chocolats a été offerte par la famille d’un malade. Lulu ne va pas bien, je discute avec elle.

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c) Le travail sur la restriction cognitive Nous ne décrirons pas ici la clinique de la restriction cognitive, mais seule-

ment la façon de la prendre en charge. C’est à partir du carnet alimentaire qu’on peut déterminer avec le patient les

aliments anxiogènes ou culpabilisants, dits aliments tabou. Ces aliments peuvent être totalement évités, ou bien consommés lors de boulimies, ou encore con-sommés apparemment normalement, mais avec un sentiment de culpabilité. On en dressera une liste détaillée, sur laquelle on demandera de noter, non pas « chocolat », mais « Milka Suchard aux noisettes ». Les aliments concernés sont habituellement : chocolats, bonbons, biscuits, gâteaux, viennoiseries, fromages, charcuteries, plats en sauce, céréales, féculents, certains fruits et légumes.

On demande aussi au patient de dresser la liste de ses aliments obligatoires, qu’il se croit obligé de consommer pour éviter la culpabilité. Il s’agit le plus sou-vent des fruits et légumes crus ou cuits sans apport de graisse ou de sucre, des aliments allégés. Ou bien il se croit obligé de faire des « repas équilibrés ». Rap-pelons à cette occasion que si l’alimentation doit être équilibrée dans son en-semble, les repas n’ont pas besoin de l’être.

Il s’agit tout d’abord de réorganiser les prises alimentaires. Un temps suffisant est nécessaire, le lieu doit être adéquat, il s’agit aussi de privilégier la conviviali-té. Avant de commencer à manger, un temps de détente est nécessaire, et on peut proposer de pratiquer éventuellement quelques minutes de relaxation. En-fin, une consommation attentive permet seule de repérer les sensations et les émotions alimentaires.

Exercices sur les sensations alimentaires : 1) Exercice d’observation de la faim : suppression du petit-déjeuner, at-

tente des sensations de faim, puis observation de leur évolution. Lors-qu’on le décide, collation, puis attente à nouveau des sensations de faim.

2) Expérience des différents niveaux de faim. La petite faim: sauter le pe-tit-déjeuner, attendre les premières manifestations de la faim, puis man-ger. Attendre à nouveau les manifestations d’une petite faim. Moyenne faim: retarder l’heure du déjeuner, puis retarder l’heure du dîner. Grande faim: supprimer petit-déjeuner et déjeuner, attendre jusqu'au milieu de l’après-midi pour prendre un repas ou une collation. A chaque fois, noter la plus ou moins grande vitesse d’ingestion, la capa-cité à porter attention au goût des aliments, le plaisir à manger, la percep-tion du rassasiement, le respect du rassasiement. Déterminer le meilleur moment pour manger: la faim idéale.

3) Dégustation : On put commencer par un aliment standard, puis passer à un aliment tabou, choisi par le consultant. Vue / odeur / texture / sons / saveurs / arômes / sensations trigéminales / goût de gras. Jetage de l’excès (exercice de séparation et de deuil).

4) Remplacement du repas par un aliment tabou, à forte densité énergé-tique, en quantité plafonnée. La quantité maximale à consommer est dé-terminée pour chacun. Habituellement environ 500 Kcal (déjeuner moyen = 750 Kcal). Pendant 4 jours consécutifs, remplacer le déjeuner habituel

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par un aliment à forte densité énergétique. Manger dans les conditions d’une dégustation : attentivement, au calme, en solo, sans autre activité, avec des couverts si l’aliment le permet. Arrêter de manger dès qu’on est rassasié de l’aliment choisi, c'est-à-dire quand le plaisir gustatif fléchit, avant le dégoût. On peut être rassa-sié de l’aliment choisi, mais avoir encore faim. 2) Attendre au minimum une heure, puis prendre une collation de son choix, en cas de faim seulement. Il est important de conserver à l’esprit la possibilité de cette collation de l’après-midi afin de ne pas craindre d’avoir faim et ne pas manger excessivement au déjeuner par peur d’une faim future. Au dîner, manger librement en fonction de la faim et de la sa-tiété. Se peser le premier et le dernier jour.

5) Remplacement d’un repas par un aliment tabou, à forte densité énergé-tique, en ajustant la consommation à ses besoins. Prévoir, chaque jour, une quantité de l’aliment tabou supérieure à la quantité maximum qu’on est susceptible de consommer durant la journée. Supprimer le déjeuner habituel, consommer l'aliment-tabou en pleine conscience, jusqu’au ras-sasiement gustatif. Si on a faim dans l'après-midi, consommer le même aliment. En fin de journée, jeter ce qui n'a pas été consommé. Au dîner, manger librement en fonction de la faim et de la satiété. Se peser le pre-mier et le dernier jour

d) Abord des problèmes émotionnels par la thérapie cognitive

Les mécanismes cognitifs qui maintiennent les troubles du comportement alimentaire sont à expliciter au patient : il existe une chaîne de causalité avec rétroactions entre faible estime de soi, préoccupations corporelles excessives, restrictions alimentaires, hyperphagies incontrôlées et vomissements provoqués.

Basse estime de soi

Préoccupations concernant le poids et les formes corporelles

Restriction alimentaire

Hyperphagies incontrôlées

Vomissements provoqués

Mécanismes cognitifs du maintien des boulimies (Fairburn, Marcus, Wilson, 1993)

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D’une façon générale, on demande au patient de repérer : 1. les situations ; 2. les états émotionnels ; 3. les pensées automatiques (préconscientes) précédant, accompagnant ou succédant aux excès alimentaires. Les distorsions cognitives sont analysées. Des cognitions alternatives sont recherchées. Dans un second temps de la thérapie, les événements cognitifs sont mis en relation avec des dis-torsions des schémas cognitifs profonds (inconscients) et des distorsions des processus cognitifs (dichotomie, inférence arbitraire, abstraction sélective, sur-généralisation, minimisation et maximisation, personnalisation).

Dans une première étape, on passe en revue les diverses croyances irration-nelles concernant la nourriture et le poids. Par exemple, beaucoup perçoivent mal la relation existant entre les prises alimentaires et les variations de poids, pensent que l’on peut grossir sans manger, sous le coup de contrariétés et d’émotions fortes, par exemple, ou bien maigrir en mangeant de grosses quanti-tés de nourriture, si cette nourriture est une « bonne nourriture ». Ils dichotomi-sent les aliments, les distinguent selon des critères moraux et non pas selon des critères simplement diététiques : certains aliments, tels les sucres et les graisses, ou encore les viandes, sont ainsi diabolisés tandis que d’autres, tels les fruits et légumes frais, les laitages, sont portés aux nues, parés de toutes les vertus.

Cette division entre aliments purs et impurs, angéliques et diaboliques est re-mise en question. Le sujet est encouragé à consommer les aliments qu’il s’interdit habituellement, dans des quantités déterminées par ses sensations alimentaires. Le thérapeute demande parallèlement de repérer et de noter le dis-cours intérieur que le patient se tient à cette occasion. Il s’agit le plus souvent de craintes paniques de grossir ainsi que de pensées de dévalorisation liées à l’idée de faute et de péché.

Une seconde étape consiste, à partir de situations concrètes, à passer en revue le discours intérieur et les raisonnements que se tient le sujet et qui favorisent directement ou indirectement la prise alimentaire. Quels raisonnements le sujet élabore-t-il afin de s’autoriser à manger? Met-il en avant le gaspillage s’il ne fi-nissait pas sa portion, voire le plat? Pense-t-il que les autres convives s’offusqueraient s’il ne faisait pas honneur au repas ? Croit-il que s’il ne mange pas, il ne pourra pas se concentrer sur son travail, ou bien qu’il ressentira des symptômes physiques insupportables? Se dit-il que tout désagrément donne droit à une compensation alimentaire consolatrice ou qu’inversement tout suc-cès doit se fêter par un plaisir alimentaire ? Estime-t-il que son hyperphagie est due à une névrose profondément enracinée, contre laquelle il est vain de lutter, ou bien qu’il est un « mangeur compulsif », un toxicomane de la nourriture, qui ne peut, par définition, avoir aucun contrôle sur ce qu’il mange ?

Diverses alternatives cognitives à ces discours intérieurs sont élaborées : le su-jet peut par exemple se dire qu’il n’acceptera pas de se faire manipuler, directe-ment ou indirectement. Il ne mangera plus malgré lui, n’acceptera plus d’être le jouet d’un environnement et de proches tentateurs. Il mangera en fonction de ses sensations alimentaires.

Il est fréquent, tant chez les sujets boulimiques que chez les hyperphages prandiaux, que le

comportement alimentaire ne cesse de basculer entre deux pôles, l’un très restrictif, l’autre très excessif. Dans le pôle restrictif, le sujet se vit comme sage, raisonnable, sérieux, dans le droit chemin. Mais le moindre écart suffit à le faire basculer. Il tombe alors dans l’excès et se vit comme débauché, en proie à de vils instincts qu’il convient de satisfaire avant que la culpabilité ne fasse basculer le comportement dans l’autre sens. Cette culpabilité d’avoir cédé à la tentation

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peut elle aussi entretenir le comportement hyperphage. Elle s’accompagne d’un discours inté-rieur auto-dévalorisant et dramatisant : puisqu’on s’est avili en mangeant, « on ne vaut rien » et on ne parviendra « jamais » à mincir. La prise alimentaire, dans ces conditions, est vécue comme un moyen de se complaire dans le vice et se teinte de masochisme.

L’analyse de ces différents mécanismes cognitifs permet au sujet de prendre

conscience de sa façon négativiste d’interpréter les événements. Bien souvent, il tire des conclusions sans preuve, généralise à partir d’un événement ponctuel, se centre sur des détails séparés de leur contexte, minimise les événements positifs, maximise les événements négatifs. Le résultat est une dramatisation de l’existence, une exigence irréaliste vis-à-vis de soi-même, une recherche d’un contrôle de tous les instants, un mode de pensée dichotomique dont les maîtres-mots sont toujours/jamais, bon/mauvais, permis/interdit.

Les préoccupations excessives concernant le poids et les formes corporelles sont un facteur d’entretien des troubles du comportement alimentaire. De nom-breux thérapeutes abordent ces aspects en incitant leurs patients à prendre cons-cience de la pression sociale qu’elle subissent et des contradictions de cette de-mande sociale.

EVÉNEMENT EMOTION DIALOGUE INTERIEUR

Lever, petit déjeuner Courses supermarché 11 h, je fais un gâteau 12 h, déjeuner léger : 1 tr. Jambon, 1 orange Cinéma toute seule. « Pédale douce », c’est Charlotte qui me l’a conseillé.

Rien Contrariété Rien Je ne vais jamais au cinéma. Roger ne veut pas. Très nerveuse.

Je fais des courses pour mon mari et enfants et petits enfants. C’est pour eux que j’achète toutes ces choses, mais c’est moi qui les mange. Je ne m’en sortirai jamais. Je ne peux tout de même pas ne plus faire de gâteau. Je ne me dis rien. Je ne suis pas intéressante. Je me demande ce que je fais là toute seule. Drôle de film. J’ai l’impression que tout le monde me regarde. Je voudrais sortir, mais j’ai payé et il faut que je regarde jusqu’au bout. Si je sortais en plein milieu, tout le monde me regarderait.

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De nombreuses raisons, d’ordre biologique et psychologique, font que le corps de la plupart

d’entre nous ne peut satisfaire aux exigences de minceur actuelles. De plus, parallèlement à ces exigences de minceur, il est demandé d’être un bon maître ou une bonne maîtresse de maison, un joyeux convive, de faire honneur aux plats proposés. Ces contradictions sont particulière-ment flagrantes dans les médias, qui font tout à la fois la promotion de la bonne chère, de nom-breux en-cas sucrés ou salés, et proposent parallèlement un corps idéal hors de portée pour la plupart. Il est demandé à la femme moderne d’être en même temps mère nourricière et super-woman sexy. En fait, deux modèles comportementaux opposés sont proposés et satisfaire à tous deux relève de la quadrature du cercle. Est-il véritablement nécessaire de tenter de se conformer à l’un ou l’autre de ces modèles sociaux, ou bien vaut-il mieux développer un itinéraire plus personnel, plus aisément compatible avec sa biologie et sa psychologie propres ? Concrètement, il s’agit pour les sujets hyperphages et boulimiques de prendre conscience du besoin exacerbé de conformité sociale qui les habite, de trouver leur poids d’équilibre (set-point) et de l’accepter. Un travail sur l’acceptation de soi est donc une étape essentielle de la plupart des prises en charge.

QUELQUES PENSÉES AUTOMATIQUES NÉGATIVES PROPRES AUX OBÈSES ET AUX BOULIMIQUES

• Je ne dois pas gaspiller la nourriture. • Je ne peux pas refuser un plat que l'on m'offre. • Une grosse contrariété me donne droit à une compensation. • Après la première bouchée de nourriture interdite, il m'est impossible de m'arrêter de manger

et il ne me reste plus qu'à continuer. • Maintenant que j'ai recommencé à manger, mon régime est fichu et il ne me reste plus qu'à con-

tinuer. • Si je prends un kilo, je continuerai à grossir jusqu'à ce que je devienne obèse. • Seul le vomissement peut me permettre de contrôler mon poids. • Les aliments « grossissants », tels les sucreries ou les corps gras, font automatiquement grossir

quelle que soit la quantité mangée. • Les bonbons et gâteaux sont des nourritures mauvaises. Si j'en mange, je suis mauvais(e). Si je

suis mauvais(e), grossir est ma juste punition. • Les gens minces et beaux sont heureux et réussissent en tout ; les gens gros sont des ratés. • Mon apparence et mon poids témoignent de ma valeur. • Je suis gros ; personne ne peut m’aimer ; autant rester seul dans mon coin. • Ma capacité à me restreindre sur le plan alimentaire est la mesure du contrôle que j’exerce sur la

vie et ma destinée. • Si je perds juste 5 kg, ma vie en sera transformée. • Ma vie commencera vraiment lorsque j'aurai atteint le poids que je me suis fixé.

La prévention des rechutes fait partie de l’approche cognitive : une vision di-

chotomique des rechutes les favorise (un écart signifie que j’ai rechuté, donc je m’autorise à rechuter effectivement) ; le patient doit prendre conscience que des hyperphagies ponctuelles ne sont pas « anormales », qu’elles peuvent être gé-rées sans difficulté. Lorsque des problèmes surviennent qui réactivent les hy-perphagies, ceux-ci doivent être identifiés et pris en compte, les techniques qui ont servi à les maîtriser doivent être remises à l’honneur (carnet alimentaire, 3 à

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5 repas planifiés par jour, gestion de l’emploi du temps, comportements alterna-tifs, etc.)

e) ) Abord des problèmes émotionnels par les stratégies d’ajustement

Dans cette approche, les prises alimentaires incontrôlées sont vues comme des comportements d’évitement de problèmes que l’individu ne parvient pas à sur-monter. La difficulté alimentaire se substitue aux autres difficultés de la vie et permet de les oblitérer temporairement. Cette incapacité conduit en outre le su-jet à se dévaloriser et à se déprimer. Le thérapeute va donc aider le sujet à déve-lopper des stratégies d’ajustement (coping process) pour affronter le monde et le stress, afin que la fuite dans l’hyperphagie ne soit plus nécessaire.

• Les techniques de relaxation ou de centrage sur une image mentale ou une lita-nie sont le plus souvent proposées dans cet esprit : lorsque l’impulsion alimen-taire se fait sentir, la relaxation, des exercices respiratoires, la visualisation de certaines images mentales mémorisées, une récitation mentale doivent per-mettre d’affronter l’angoisse sans recours à la boulimie.

• L’affirmation de soi. On peut proposer une démarche d’affirmation de soi dans le domaine alimentaire. Bien des sujets TCA ont des difficultés à résister à des pressions plus ou moins amicales les poussant à manger.

1) Significations du don alimentaire du point de vue social ; le refus acceptable. 2) Refuser une sucrerie, refuser de se servir d’un plat ou d’en reprendre par la méthode du “disque rayé”. 3) Repérage des jeux sociaux pervers poussant à manger. 4) Annonce à l’entourage que l'on modi-fie son comportement alimentaire et sollicitation d’un soutien.

Lorsqu’on aura mis en évidence une sensibilité particulière aux pressions so-ciales afin de rendre son corps conforme au modèle corporel en vigueur, cette problématique pourra être abordée, soit à l’aide des techniques d’affirmation de soi, ou encore à l’aide des modèles de thérapie cognitive.

Lorsque c’est le conjoint ou un membre de la famille qui fait pression pour que la personne mange, ou, à l’inverse, pour qu’elle maigrisse, ou encore pour qu’elle cesse d’avoir des boulimies, il s’agit alors de conflits de pouvoir. Les pressions exercées ont souvent des effets paradoxaux et conduisent le plus sou-vent à manger davantage. S’affirmer, dans de tels cas, peut consister à élaborer diverses réponses et stratégies à utiliser avec les personnes soi-disant bien inten-tionnées. Là encore, on peut faire appel aux techniques d’affirmation de soi ou à celles de thérapie cognitive, ou encore à une association des deux.

Enfin, il est fréquent que des difficultés relationnelles quotidiennes, conju-gales, familiales ou professionnelles entraînent une déstabilisation de l’individu, conduisant à des prises alimentaires. L’affirmation de soi peut alors se révéler une approche intéressante.

f) Les thérapies émotionnelles

L’abord direct des troubles émotionnels constitue la « 3ème vague » des théra-pies cognitivo-comportementales.

On peut comprendre les excès alimentaires comme étant causés par une into-lérance aux émotions. Certaines émotions et cognitions sont perçues comme in-tolérables, et les conduites d’évitement émotionnel ne font que générer d’autres émotions douloureuses secondaires (Modèle de Barlow).

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Ou bien, on peut parler d’alexithymie, c'est-à-dire de difficulté à ressentir et exprimer ses émotions. Manger est alors vu comme un passage à l’acte.

Ou encore, on recherche un trouble dissociatif, consistant en un détachement de la réalité présente, une déconnection des sensations internes et des émotions, un centrage sur le monde extérieur ou l’intellect. Les troubles dissociatifs sont considérés comme dus à des situations traumatisantes de l’enfance (maltrai-tance, abus sexuels…)

Les thérapies émotionnelles de la 3ème vague mettent l’accent sur l’identi-fication et l’acceptation des émotions.

Dans les addictions comportementales, on vise tout particulièrement un meil-leure tolérance émotionnelle, face aux événements, aux ruminations, auto-commentaires, pensées automatiques, aux perceptions corporelles, à la honte du corps, aux rappels de mémoire de souvenirs douloureux.

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On fait l’économie des efforts d’évitement émotionnel: comportements addic-

tifs, efforts distractifs, mobilisation de l’attention, persistance du problème ori-ginel.

On obtient un rétablissement naturel de l’humeur. Techniques d’acceptation émotionnelle: MBSR (Mindfulness Behavior Stress Reduction) Jon Kabat-Zinn, 1982, 1990 MBCT (Mindfulness Behavior Cognitive Therapy) Zindel Segal, Mark Wil-

liams, John Teasdale, 2002 DBT (Dialectical Behavior Therapy) Marsha Linehan, 1993 ACT (Acceptance and commitment therapy) Steven Hayes, 1999

f) Travail sur l’évitement phobique du corps et la stigmatisation L’obèse, mais aussi le boulimique mince ou l’anorexique, sont fâchés avec leur

corps. Les causes en sont la stigmatisation de l’obésité, en particulier par les pa-rents, mais aussi par le corps social dans son ensemble. Il peut aussi s’agir d’événements d’histoire personnelle (atteintes à l’intégrité corporelle dans l’enfance ou l’adolescence tels que viols ou attouchements incestueux).

La stigmatisation se définit comme le rejet et la disgrâce qui sont associés à ce qui est vu comme une déformation physique (l’obésité, des formes corporelles hors-normes) et une aberration comportementale (troubles du comportement alimentaire) (voir W. Cahnman, 1968).

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Erwing Goffman, (Stigmate, 1975) définit la stigmatisation en 4 points : 1) La-bellisation («anormal», «déviant») ; 2) Réduction à l’étiquette ; 3) Justification de discrimination et d’exclusion ; 4) Le stigmatisé se construit alors en fonction de ces rejets en développant une dépréciation personnelle altérant l’image de soi et légitimant ces jugements négatifs.

Le corps médical est vu par les sociologues comme un « grand stigmatisa-teur » (JP Poulain. In Basdevant A. Guy-Grand B. Médecine de l’obésité, Flammarion, Paris, 2004, p 17-25).

Il convient de distinguer la culpabilité et la honte. L’obèse est coupable de ne pas respecter les normes sociales. La culpabilité est engendrée par le non respect de normes intériorisées. Elle est avouable et peut être expiée (privations alimen-taires, exercice physique, cures…)

L’obèse est aussi honteux d’être gros ; boulimiques et anorexiques, en proie à une obésité imaginaire, le sont aussi. La honte est engendrée par le jugement des autres. Elle est inavouable et inexpiable : elle doit être niée ou dissimulée. La honte atteint l’individu dans son identité : atteinte de la persona, le personnage social qui nous représente à nos yeux et aux yeux des autres ; sentiment d’illégitimité, de déchéance privée ou publique ; inhibition, paralysie de la pen-sée ; dévalorisation de toute réussite, remise en question des investissements psychiques narcissiques, sexuels ou d’attachement. La honte suscite chez les autres: pitié, compassion, gêne, mépris.

L’approche cognitive permet un travail sur la stigmatisation. Il s’agit : 1) de re-

connaître la stigmatisation, la honte qu’elle engendre, ses effets destructeurs ; 2) de passer en revue les croyances irrationnelles sur le corps parfait, l’apparence parfaite, la santé parfaite ; 3) d’apprendre à décoder les messages socioculturels faisant la promotion de la perfection corporelle.

On demande au patient d’apporter des photographies de membres de sa fa-mille (parents et grands-parents, frères et sœurs, cousins, tantes et oncles) et d’établir des comparaisons entre leur physique et le sien, afin de réinscrire ce corps dans une perspective génétique et historique.

On demande au patient de noter les discours d’auto-dévalorisation (« Je suis laid, gros, je ne vaux rien » ; « Ce corps traduit mon manque de volonté » ; « Ja-mais mon corps ne pourra devenir tel que je le souhaite ») et les discours con-cernant les relations sociales (« Personne ne peut aimer quelqu’un ayant ce corps » ; « quelqu’un qui m’aime avec ce corps n’est pas aimable » = syndrome de Groucho Marx).

On pourra, à partir de là, utiliser la thérapie cognitive de Beck ou l’approche par la pleine conscience.

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L’entraînement aux habiletés sociales est un temps indispensable pour diminuer

l’évitement phobique des situations sociales et accepter le regard des autres : Exemple de hiérarchie d’une phobie sociale due aux formes corporelles : — Soins de toilette, ou massages, sauna, ou hammam — Gym douce, yoga, expression corporelle, ou danse — Regarder et commenter des photos ou films de soi, aux différents âges — Marcher dans la rue (posture, maintien, respect de soi) — Prendre transports en commun, piscines, plages — Acheter des vêtements et s’affirmer face aux vendeurs — Manger en public des aliments diététiquement incorrects — Expliquer son travail thérapeutique à un de ses proches — Expliquer son travail thérapeutique à son médecin, à un collègue — Manger des aliments diététiquement incorrects avec ses proches — Discuter avec ses proches: « et si je ne maigris pas?… » L’exercice physique, qui a souvent une valeur aversive, ne doit être réintro-

duit que graduellement, en commençant par des éléments simples : marche à pied, montée d’escalier.

Et l’anorexique mentale ? Concernant l’anorexie mentale, les approches classiques ont toujours utilisé

une approche pragmatique : ainsi Lasègue, en 1873, préconise la séparation d’avec la famille comme moyen thérapeutique.

Lorsque la vie du patient est en danger, l’objectif pondéral n’est pas négocié, mais présenté au patient comme une nécessité imposée par la réalité biologique. Un contrat de poids est proposé. Notons aussi qu’un travail sur les sensations alimentaires de faim et de rassasiement ne peut pas être entrepris lorsque le poids est trop bas, les sensations étant alors faussées.

Certains continuent à utiliser une procédure opérante: durant l’hospitalisation, l’octroi d’avantages divers (objets à disposition, visites de parents, élargissement de la liberté consentie au patient) aux progrès dans la normalisation alimentaire et pondérale. Peuvent être encouragés selon une procédure opérante: la prise de poids, la diminution des comportements d’évitement de reprise de poids (exer-cice physique intensif…), la réintroduction d’aliments exclus, à des moments et dans des quantités prédéfinies.

Les éléments essentiels de la thérapie sont : • Le travail sur la lipophobie et l’acceptation du poids, des formes corpo-

relles ; • Le travail sur le comportement alimentaire : rétablir une alimentation

socialisée, travailler sur la restriction cognitive, travailler à diminuer les boulimies ou en prévenir l’apparition ;

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• La réduction des facteurs de stress, des éléments dépressifs ; • L’abord des problèmes relationnels et familiaux.

L’approche cognitive apparaît comme un moyen privilégié d’instaurer une al-

liance thérapeutique. Dans cette perspective, il n’est pas demandé au patient de se soumettre aux avis judicieux d’un expert, mais plutôt de participer à une re-cherche consistant à découvrir comment ses croyances et ses comportements influent sur son expérience personnelle. On ne lui demande pas de renoncer à ses croyances, ou de les considérer comme irrationnelles, mais d’en examiner la signification et les conséquences qui en résultent.

Par exemple, on peut demander au patient de faire la liste des avantages et in-convénients de son anorexie. Le thérapeute peut insister sur les différents avan-tages qui seront perdus si le patient reprend du poids, et sur le fait que ce der-nier doit obtenir certaines compensations en échange de la perte de ces avan-tages. Par ailleurs, les symptômes dont se plaint habituellement le patient, tels les troubles de la concentration et de la mémoire, les tendances dépressives, l’obsession de la nourriture, sont rattachées à la restriction alimentaire et à un poids trop bas, le thérapeute rappelant un principe de réalité : il n’est pas pos-sible d’éliminer ces inconvénients de façon sélective, et leur disparition passe par la remise en question de l’idéal de minceur du patient.

Selon une procédure désormais bien codifiée, dérivée de l’approche de Aaron T. Beck et de ses condisciples, on passe en revue les différentes croyances du patient concernant la nourriture, le poids et les formes corporelles. La validité de celles-ci, leurs conséquences pratiques sont pointées ; les erreurs logiques, telles l’attention sélective ou le raisonnement dichotomique sont discutés. Le patient est classiquement encouragé à : 1. repérer ses distorsions cognitives ; 2. recher-cher des cognitions alternatives ; 3. examiner les implications de ses cognitions. Certains auteurs ajoutent, pour les anorexiques, une quatrième question, « est-il adapté d’agir en fonction de mes croyances ? » cette question ayant pour but de dispenser de convaincre le patient que ses croyances sont erronées.

L’approche cognitive s’élargit au fur et à mesure à des thèmes plus généraux, tels que les éléments sur lesquels reposent l’estime de soi, les relations avec la famille ou les amis, les relations amoureuses. On pointe les erreurs logiques, les buts inatteignables et les conséquences de tels objectifs. L’accent est mis sur la recherche de situations ayant valeur de renforcements positifs, le développe-ment de stratégies nouvelles.

On considère habituellement qu’un tel mode de psychothérapie nécessite de une à deux années de traitement. Dire qu’il existe peu d’études contrôlées éva-luant l’efficacité de ces approches est un euphémisme.

La pleine conscience et la thérapie ACT semblent prometteuses : les exercices

tels que le body-scan permettent de recentrer la personne sur ses sensations cor-porelles plutôt que sur un corps vu comme un objet esthétique. Les nuisances des pensées automatiques concernant le poids et les formes corporelles, la lutte contre les désirs alimentaires, sont pointées : elles mobilisent la personne autour de ces problèmes, l’empêchant de se consacrer à quoi que ce soit d’autre. La per-sonne souhaite-t-elle passer toute son énergie et le reste de sa vie à contrôler son alimentation et son poids, ou bien d’autres directions de vie (valeurs) lui parais-

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sent-elles plus importantes ? Que peut-elle accepter afin d’aller dans le sens de ses valeurs ?

Citons encore l’approche paradoxale de Gorgio Nardone et al. qui distingue : — L’anorexie mentale sacrificielle : la malade, en devenant un symptôme familial, de-

vient le centre d’intérêt. Il s’agit d’une stratégie pour reconstituer une unité fami-liale défaillante. Stratégie thérapeutique : le sacrifice doit être verbalisé et officiali-sé, dans le cadre d’une thérapie familiale ou d’une thérapie individuelle.

— L’anorexie mentale abstinente : le problème majeur est celui d’une hypersensibilité, d’une incapacité à contrôler les émotions. Chaque événement est dramatisé et constitue une atteinte à l’estime de soi. En fixant son attention sur la privation de nourriture et le poids, l’anorexique minore notablement ses émotions et sensa-tions ; elle fait une brillante démonstration de volonté, renforçant l’estime de soi. Stratégie thérapeutique : la valeur de protection de la stratégie anorexique est à développer avec la patiente (métaphore de l’armure) ; on l’encourage à dévelop-per de nouvelles stratégies encore plus courageuses et valorisantes, par exemple dans le domaine des relations sociales.

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QUELQUES LECTURES…

- Apfeldorfer Gérard. Mangez en paix ! Odile Jacob, 2008 - Apfeldorfer Gérard, Jean-Philippe Zermati. Dictature des régimes : attention ! Odile

Jacob, 2006 - Apfeldorfer Gérard. Je mange donc je suis. Surpoids et troubles du comportement

alimentaire. Éditions Payot, 1991, 2002. - Apfeldorfer Gérard. Anorexie, boulimie, obésité. Flammarion Ed. Paris, 1995, 2007 - Apfeldorfer Gérard. Maigrir, c’est dans la tête. Odile Jacob Ed. Paris, 1997 - Brownell K. D. and Fairburn C. G. Editors. Eating Disorders and Obesity. Guilford

Press, NY, 1995 - Chapelot Didier, Louis-Sylvestre Jeanine. Les comportements alimentaires.

Tec&Doc editions, 2004. - Chozen Bays Jan. Manger en pleine conscience. Arènes éditions, 2013 - Fairburn C. G., Wilson G.T. Binge Eating, nature, assessment and treatment. Guil-

ford Press, NY, 1993 - Garner D.M. & Garfinkel P. E. (Eds). Handbook of Psychotherapy for Anorexia

Nervosa and Bulimia. 1984, NY - Mirabel-Sarron Christine. Bien manger. Bayard Editions, Paris, 1999. - Nardone Giorgio, Verbitz Tiziana, Milanese Roberta. Manger beaucoup, à la folie,

pas du tout. Seuil, 2004. - Perroud A. Savoir traiter la boulimie avec les TCC. Retz, 2010 - Perroud A. Faire face à l'anorexie : Une démarche efficace pour guérir. Retz, 2009. - Zermati J.P. Maigrir sans régime. Editions Odile Jacob, Paris, 2002. - Jean-Philippe Zermati, Gérard Apfeldorfer, Bernard Waysfeld. Traiter l'obésité et le

surpoids. Odile Jacob, 2010