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16 | La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale n° 329 - avril-mai-juin 2012 DOSSIER THÉMATIQUE Syndrome d’apnées du sommeil Les orthèses d’avancée mandibulaire dans le traitement du SAOS de l’adulte Mandibular advancement device as a therapy in obstructive sleep apnea I. Prime* * Chirurgien-dentiste, Argentan ; chargée d’enseignement, diplôme universitaire des troubles fonction- nels oro-faciaux, université René- Descartes, Paris. L es orthèses d’avancée mandibulaire (OAM) sont, dans l’ensemble, une application à la médecine du sommeil des appareils orthopédiques utilisés chez les enfants pour stimuler le potentiel de crois- sance de la mandibule et, ainsi, donner notamment du volume à la “boîte à langue”. Les OAM ont investi le domaine du syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAOS) dans les années 1980. En 1999, l’Agence nationale d’accréditation et d’éva- luation en santé (ANAES), puis, en 2006, la Haute Autorité de santé (HAS), ont produit des documents sur l’évaluation de la chirurgie dans le SAOS (1) et sur la pose d’un appareillage en propulsion mandi- bulaire (2). Le premier inclut dans ses recomman- dations “les orthèses d’avancement mandibulaire, qui semblent efficaces chez certains patients mais pour lesquelles le recul est encore limité” pour le traitement du SAOS et du syndrome de haute résis- tance des voies aériennes supérieures. La ventilation par pression positive continue (PPC) est le traitement de référence. Le deuxième, considérant le service attendu suffisant, rend cette fois un avis positif pour l’inscription de l’appareillage en propulsion mandi- bulaire à la liste des actes prévus à l’article L. 162-1-7 et le place dans la stratégie thérapeutique, avec les indications “en première intention pour les SAOS légers voire modérés sans somnolence diurne”, et “en deuxième intention pour les SAOS sévères et modérés symptomatiques quand le patient ne supporte pas la PPC (encombrement, bruit, claustrophobie, voyages, raisons sociales)”. Une actualisation du Service d’évaluation des actes professionnels de la HAS a été publiée en décembre 2009 (3). Deux orthèses y figurent, avec les références des études spéci- fiques s’y rapportant. La Commission d’évaluation des produits et des prestations recommande que le renouvellement des conditions d’inscription de ces orthèses soit conditionné non seulement à leur efficacité confirmée sur la pathologie (symptômes, qualité de vie et paramètres polygraphiques) et à leur tolérance, mais aussi à l’observance à long terme. Les arrêtés du Journal Officiel (4-6) autorisent l’inscription à la Nomenclature des produits et des prestations remboursables des orthèses ORM ® des laboratoires Narval puis Resmed (figure 1) et l’AMO ® (OrthoSom) [figure 2]. La prise en charge est assurée pour le traitement du SAOS sévère, en deuxième intention, après refus ou intolérance d’un traitement par PPC. Une polygraphie ventilatoire ou une polysomnographie devra confirmer l’effi- cacité de l’orthèse. Un suivi rigoureux (pathologie et appareil manducateur) est requis. Le renouvel- lement ne sera autorisé que si l’OAM est efficace et si le suivi odontologique est assuré. À l’heure actuelle, une troisième orthèse est susceptible d’être remboursée pour les mêmes indications (7) : l’OAM Tali SAS (Tali). D’autres orthèses rejoindront ces trois-là, après acceptation de la HAS sur la base d’études. Elles seront remboursables, mais sans doute encore dans l’indication précitée, et dans cette seule indication.

Les orthèses d’avancée mandibulaire dans le traitement du ... · de l’anatomie et de la dynamique du pharynx, elle permet d’apprécier le dégagement des voies aériennes

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16 | La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 329 - avril-mai-juin 2012

DOSSIER THÉMATIQUESyndrome d’apnées du sommeil

Les orthèses d’avancée mandibulaire dans le traitement du SAOS de l’adulteMandibular advancement device as a therapy in obstructive sleep apnea

I. Prime*

* Chirurgien-dentiste, Argentan ; chargée d’enseignement, diplôme universitaire des troubles fonction-nels oro-faciaux, université René-Descartes, Paris.

Les orthèses d’avancée mandibulaire (OAM) sont, dans l’ensemble, une application à la médecine du sommeil des appareils orthopédiques utilisés

chez les enfants pour stimuler le potentiel de crois-sance de la mandibule et, ainsi, donner notamment du volume à la “boîte à langue”. Les OAM ont investi le domaine du syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAOS) dans les années 1980. En 1999, l’Agence nationale d’accréditation et d’éva-luation en santé (ANAES), puis, en 2006, la Haute Autorité de santé (HAS), ont produit des documents sur l’évaluation de la chirurgie dans le SAOS (1) et sur la pose d’un appareillage en propulsion mandi-bulaire (2). Le premier inclut dans ses recomman-dations “les orthèses d’avancement mandibulaire, qui semblent efficaces chez certains patients mais pour lesquelles le recul est encore limité” pour le traitement du SAOS et du syndrome de haute résis-tance des voies aériennes supérieures. La ventilation par pression positive continue (PPC) est le traitement de référence. Le deuxième, considérant le service attendu suffisant, rend cette fois un avis positif pour l’inscription de l’appareillage en propulsion mandi-bulaire à la liste des actes prévus à l’article L. 162-1-7 et le place dans la stratégie thérapeutique, avec les indications “en première intention pour les SAOS légers voire modérés sans somnolence diurne”, et “en deuxième intention pour les SAOS sévères et modérés symptomatiques quand le patient ne supporte pas la PPC (encombrement, bruit, claustrophobie, voyages,

raisons sociales)”. Une actualisation du Service d’évaluation des actes professionnels de la HAS a été publiée en décembre 2009 (3). Deux orthèses y figurent, avec les références des études spéci-fiques s’y rapportant. La Commission d’évaluation des produits et des prestations recommande que le renouvellement des conditions d’inscription de ces orthèses soit conditionné non seulement à leur efficacité confirmée sur la pathologie (symptômes, qualité de vie et paramètres polygraphiques) et à leur tolérance, mais aussi à l’observance à long terme. Les arrêtés du Journal Officiel (4-6) autorisent l’inscription à la Nomenclature des produits et des prestations remboursables des orthèses ORM® des laboratoires Narval puis Resmed (figure 1) et l’AMO® (OrthoSom) [figure 2]. La prise en charge est assurée pour le traitement du SAOS sévère, en deuxième intention, après refus ou intolérance d’un traitement par PPC. Une polygraphie ventilatoire ou une polysomnographie devra confirmer l’effi-cacité de l’orthèse. Un suivi rigoureux (pathologie et appareil manducateur) est requis. Le renouvel-lement ne sera autorisé que si l’OAM est efficace et si le suivi odontologique est assuré. À l’heure actuelle, une troisième orthèse est susceptible d’être remboursée pour les mêmes indications (7) : l’OAM Tali SAS (Tali). D’autres orthèses rejoindront ces trois-là, après acceptation de la HAS sur la base d’études. Elles seront remboursables, mais sans doute encore dans l’indication précitée, et dans cette seule indication.

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Figure 1. Orthèse d’avancée mandibulaire ORM® des laboratoires Narval.

Figure 2. Orthèse d’avancée mandibulaire AMO® (OrthoSom).

La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 329 - avril-mai-juin 2012 | 17

Points forts

Les OAM n’ont pas été inscrites comme rembour-sables dans les SAOS légers à modérés.

Efficacité des orthèses

Le mode d’action des OAM est biomécanique. Elles avancent la mandibule, et tractent alors directement et indirectement la langue et le voile. L’os hyoïde remonte. Les résultats d’une étude récente sur l’effet de l’avancement mandibulaire sur les voies aériennes supérieures (VAS) de 69 patients, en utilisant l’ima-gerie par résonance magnétique (8), sont en faveur d’un accroissement du calibre des VAS, préférentiel-

lement au niveau du vélopharynx, médié par une augmentation des dimensions latérales. Lui sont associés d’autres facteurs tels un déplacement des infiltrats graisseux parapharyngés et un reposi-tionnement antérieur de la base de la langue. Quoi qu’il en soit, la filière pharyngée s’élargit bien au niveau vélopharyngé et oropharyngé. L’efficacité des OAM a été étudiée versus placebo et PPC, entre elles ou versus d’autres traitements. Les difficultés de lisibilité de ces études résident essentiellement dans la diversité des dispositifs utilisés et dans les critères d’efficacité en matière d’index d’apnées-hypopnées (IAH). L’efficacité est partielle si l’IAH diminue de moitié – avec parfois la notion d’un seuil de 20/h de sommeil –, ou totale si l’IAH est ≤ 5. La revue Cochrane de 2009 portant sur les dispositifs oraux dans les apnées obstructives du sommeil (9) fait état de 17 essais contrôlés incluant 831 partici-pants avec des niveaux de sévérité de SAOS variés. Leurs résultats ? L’efficacité des OAM sur les indices des troubles ventilatoires obstructifs nocturnes est moindre que celle de la PPC, mais certains patients la lui préfèrent toutefois. Les résultats portent aussi sur la somnolence diurne (subjective). Les études retenues dans les recommandations pour la pratique clinique du SAOS de l’adulte (10) montrent une efficacité sur la somnolence diurne excessive, évaluée par le score d’Epworth, les événements respiratoires anormaux, la SaO2, la fragmentation du sommeil, la qualité de vie – bien que les données soient complexes à interpréter – et la pression artérielle systémique, bien que ces résultats soient “à confirmer car parfois divergents”. Et, bien sûr, les OAM agissent sur les ronflements.

Prédictivité de l’efficacité

L’efficacité est statistiquement meilleure chez les patients de sexe féminin, plutôt plus jeunes ou plus minces, qui ont un SAOS faible à modéré, positionnel (11), mais l’analyse montre des résultats discordants selon les études (10). Au sein d’une revue de 2011, M. Marklund et al. (11) rapportent que les facteurs morpho-logiques analysés sur les céphalométries ne sont pas systématiquement prédictifs. Cependant, une

» L’efficacité des orthèses d’avancée mandibulaire est reconnue. » Il est difficile de prédire jusqu’à quel point elles seront efficaces. » La réalisation d’une orthèse d’avancée mandibulaire peut être contre-indiquée. » La réalisation de l’orthèse d’avancée mandibulaire se fait pas à pas. » La communication interdisciplinaire est indispensable.

Mots-clésSyndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeilOrthèse d’avancée mandibulaireAppareil manducateurCollaborationSuivi

Highlights » Mandibular advancement

devices are known to be effec-tive.

» Prediction of treatment success level is difficult.

» A potential treatment by a mandibular advancement device can be ruled out.

» A treatment by a mandibular advancement device is a step by step process.

» Interdisciplinarity is essen-tial.

KeywordsObstructive sleep apnea

Mandibular advancement device

Manducatory apparatus

Cooperation

Follow-up

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DOSSIER THÉMATIQUESyndrome d’apnées du sommeil

Les orthèses d’avancée mandibulaire dans le traitement du SAOS de l’adulte

classe II squelettique avec rétrusion mandibulaire, de surcroît associée à une rétrusion maxillaire, avec un contenu pharyngé non hypertrophique, peut rendre plus confiant quant à une bonne efficacité de l’orthèse. Une nasofibroscopie peut aussi aider à poser une indication de traitement par orthèse, en évaluant les cavités nasales, le rhinopharynx, l’oropharynx et le pharyngolarynx. Cet examen figure d’ailleurs en recommandation (grade B) dans les Recomman-dations pour la pratique clinique (RPC) du SAOS de l’adulte (12). L’item “Fibroscopie” est également consigné dans la fiche “Examen clinique ORL et troubles du sommeil” émanant du groupe Sommeil de la Société française d’ORL (13). Outre l’évaluation de l’anatomie et de la dynamique du pharynx, elle permet d’apprécier le dégagement des voies aériennes du patient en propulsion mandibulaire, ajoutant un élément prédictif.

Examen du patient

Anamnèse

Elle dégage les contre-indications générales à l’OAM (patients très pusillanimes ou ayant des problèmes psychologiques sévères, épileptiques non équilibrés, avec réflexes nauséeux impor-tants, croissance non terminée) [14] et informe sur l’existence d’algies et de dysfonctionnements de l’appareil manducateur (ADAM) ainsi que sur la présence de bruxisme d’éveil et/ou de sommeil. Cela peut contre-indiquer transitoirement l’OAM ou avoir des répercussions sur la prise en charge. Les facteurs potentiellement aggravants seront recherchés. Les symptômes sont à type de douleurs des muscles masticateurs, spontanées ou lors de la fonction – arthralgies des articulations temporo-mandibulaires (ATM), arthrosonies et épisodes de blocages articulaires –, mais aussi d’otalgies et de céphalées temporales “en étau” peu calmées par les médicaments. L’association du bruxisme et du SAOS est fréquente (15). Le recours à un examen spécialisé chez un odontologiste est parfois utile à ce stade.

Examen ORL

Classique, l ’examen ORL suit l ’anamnèse. Il comprend l’évaluation des capacités de venti-lation nasale, ainsi que l’examen du volume et

de la posture de la langue. L’analyse des rapports occlusaux (sagittaux – par la classification d’Angle –, verticaux – infra- ou supraclusies –, frontaux ou transversaux tels que les articulés inversés) peut être heureusement complétée par une téléradiographie de profil du crâne complet et éventuellement de face. La téléradiographie de profil permettra d’apprécier les positions relatives du maxillaire et de la mandibule par rapport à la base du crâne, les hauteurs faciales antérieure et postérieure, mais aussi la situation relative des tissus mous entre eux et par rapport aux structures osseuses, la projection sagittale des VAS, les inclinaisons des incisives et les autres aides à l’analyse de la situation clinique du patient. Il est souhaitable de procéder à une analyse céphalométrique. Une analyse de Delaire pourra confirmer des impressions visuelles de l’architecture craniofaciale. L’examen clinique locorégional de faisabilité de l’OAM répertorie les éléments à l’origine de contre-indications transitoires ou définitives (tableau). Il est systématiquement accompagné de la lecture de la radiographie panoramique dentaire du patient. Celle-ci donne une idée générale de l’état dentaire et des états osseux, basal et alvéolaire. Elle sera complétée, le cas échéant, par des clichés rétro-alvéolaires (intrabuccaux).

Examen exobuccal

Il comprend l’observation de la symétrie, du volume facial (hypertrophie des muscles masséters) et de la posture mandibulaire. Il intègre la palpation des ATM, bouche fermée et bouche ouverte, ainsi que celle des muscles masticateurs, sus-hyoïdiens et sterno-cléido-mastoïdiens. Sont évaluées ensuite l’amplitude d’ouverture buccale et sa cinéma-tique, puis celles des déplacements latéraux et en propulsion de la mandibule en s’assurant qu’elles ne sont pas douloureuses. Les bruits articulaires sont notés le cas échéant. Une radiographie complémen-taire des ATM, bouche fermée et bouche ouverte, peut être demandée si nécessaire.

Examen endobuccal

Les tissus mous sont inspectés à la recherche de blessures, de lésions dermatologiques et de gingivite. Les parodontopathies peuvent être partielles ou généralisées. Le volume du tartre et/ ou de la plaque dentaire sont appréciés, et l’hygiène buccodentaire

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La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 329 - avril-mai-juin 2012 | 19

DOSSIER THÉMATIQUE

évaluée et discutée avec le patient. L’examen des dents s’attache à évaluer le nombre et l’empla-cement des dents résiduelles par arcade, leur position unitaire, leur état carieux actuel, leur mobilité et leur capacité à contribuer à une bonne rétention de l’orthèse. Des glissements interden-taires (occlusion dynamique) sont demandés au patient en latéralité et en propulsion à la recherche d’obstacles, tels qu’une égression dentaire face à un secteur édenté qui interférera avec la propulsion. Le différentiel entre l’occlusion d’intercuspidation maximale (celle du patient à qui l’on demande de fermer ses dents) et l’occlusion lorsque les condyles mandibulaires effectuent des rotations pures dans leurs fosses mandibulaires est évalué. L’empla-cement des médianes interincisives centrales est ensuite noté, en occlusion dentaire, au repos ainsi qu’en propulsion. La propulsion maximale active (PMA) est quantifiée ; il s’agit de l’addition, ou de la soustraction du surplomb (distance entre les bords libres des incisives centrales maxillaire et mandibulaire) à la quantité de propulsion active du patient mesurée entre les faces externes des incisives centrales maxillaires.

Information éclairée du patient

Elle intègre le mode d’action des OAM, l’incertitude sur l’importance de leur efficacité, les effets indési-rables, les soins à prévoir, le déroulement de la prise

en charge et le suivi régulier à respecter (trouble et appareil manducateur).

Choix de l’orthèse

Le choix de l’orthèse incombe en toute logique au praticien qui fait l’examen de faisabilité de l’OAM. Il se fera notamment en fonction de la sévérité de la pathologie et de la présence ou non d’un bruxisme. Si des études, encore peu nombreuses et menées sur de petits effectifs (16, 17), orientent vers une possible disparition du bruxisme de sommeil lors du port d’OAM, à l’heure actuelle, le bruxisme est plutôt, en pratique, pourvoyeur d’éventuels problèmes (altération des systèmes de liaison, inconfort muscu-loarticulaire, etc.). De façon générale, le choix se fera entre des orthèses monobloc ou biblocs (en retenue/traction ou en poussée/propulsion), à bielles métalliques ou en plastique. Elles pourront éventuellement comporter une enveloppe linguale. Le praticien qui réalise l’orthèse en est le maître d’œuvre. La discussion en amont entre le spécialiste du sommeil et le praticien formé au sommeil et à l’appareil mandu-cateur est donc souhaitable. Les OAM peuvent être universelles (elles sont remplies d’un matériau mou et effectuées sans empreintes et peut-être sans contrôle d’un praticien !) ou sur mesure, industrielles ou non. Elles se doivent d’être rétentives et le plus confortables possible. Dans son dossier “SAOS et

Tableau. Contre-indications à un traitement par orthèse d’avancée mandibulaire.

Contre-indications transitoires✓ Soins dentaires ou parodontaux

✓ Implants

✓ Prothèses conjointes ou adjointes à faire réaliser ou à refaire, notamment pour augmenter la rétention de l’OAM

✓ Apprentissage et contrôle de l’hygiène buccodentaire

✓ ADAM s’il est en cours d’évolution

✓ Gestion des interférences en propulsion (prothèses sur dents égressées ou coronoplasties)

Contre-indications définitives✓ Supports dentaires (moins de 8 à 10 dents par arcade, dents de mauvaise qualité intrinsèque) ou qualité des tissus de soutien

insuffisants

✓ Parodontopathies générales (14)

✓ Ankylose articulaire non prise en charge

✓ Capacité de propulsion mandibulaire insuffisante (< 6 mm)➙ Certaines de ces contre-indications seront modulables dans le cas d’une orthèse monobloc

Contre-indications transitoires ou définitives✓ Capacité de propulsion mandibulaire insuffisante, notamment dans certains cas d’ADAM non traités

✓ Arthrose des ATM

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DOSSIER THÉMATIQUESyndrome d’apnées du sommeil

Les orthèses d’avancée mandibulaire dans le traitement du SAOS de l’adulte

ronflement”, l’Association dentaire française émet des critères indispensables (14), dont une titration possible et le “sur-mesure” en matériau thermo-plastique dur pour les orthèses à port prolongé et régulier. L’orthèse sur mesure est également recommandée, “pour le confort du patient et l’amé-lioration de l’observance” dans les RPC du SAOS de l’adulte (10), ainsi qu’une avancée mandibulaire progressive (titration).

Formalités administratives

Demande à la Caisse d’assurance maladie en cas de prise en charge possible et devis. La prestation du praticien ne figure pas dans la nomenclature.

Orthèse d’avancée mandibulaireRéalisation de l’orthèse

La réalisation de l’orthèse commence par les empreintes, avec des matériaux alginates ou élasto-mères, en fonction notamment du délai de coulée. Les empreintes et les modèles (en plâtre extra dur) sont vérifiés, puis une cire d’occlusion interarcades en avancée est enregistrée. Le cas échéant, les modèles sont montés en articulateur. Une variante consiste à adresser les empreintes au laboratoire choisi avec la cire et la fiche détaillée. Lors de la pose, les gouttières sont essayées une à une et retouchées si nécessaire ; les retouches portent sur l’équilibration des gouttières en occlusion statique et dans les mouvements autorisés par le dispositif.

Titration de l’orthèse

L’orthèse peut être posée en position neutre ou à un pourcentage de la PMA. L’avancée de confort, donnée par le patient, et les capacités de propulsion auront guidé le choix. Ensuite, l’avancée se fera millimètre par millimètre, en espaçant les séances de 1 à 2 semaines, voire plus si nécessaire. Ce qui importe est le rapport entre l’efficacité et la tolérance. Il faut aussi savoir résister aux patients trop pressés. Dans l’idéal, on s’aidera de question-naires standardisés sur les symptômes du SAOS, sur la tolérance (effets indésirables du port de l’orthèse), ceux-ci étant cotés en échelle visuelle analogique ou numérique par le patient, et sur la compliance

(heures/nuit). À chaque avancée, il est impératif de contrôler l’équilibration de l’orthèse (points ou plans de glissement). Une fois les résultats atteints (amélioration des symptômes/tolérance), un enregis-trement polygraphique sera diligenté pour vérifier son efficacité. Il doit être comparé, et donc être comparable, aux résultats de l’enregistrement de départ. La titration est plus délicate en cas d’utili-sation alternée de l’OAM et de la PPC.

Accompagnement du patient

L’attention à porter aux symptômes émergents est très importante, en particulier chez les patients qui ont un bruxisme ou une sensibilité aux ADAM. Pour pallier certains effets indésirables précoces (douleurs muscu-laires ou articulaires), le temps du port de l’OAM peut être aménagé. Des exercices peuvent également être prescrits et des modifications de l’avancée, asymé-triques le cas échéant, peuvent être envisagées.

Effets indésirables

Ils ne sont pas prévisibles pour un patient donné. Les effets immédiats sont de l’ordre de l’inconfort (appareil lui-même, hypersalivation ou sécheresse buccale), de la gêne et des douleurs dentaires, musculaire et articulaire, ou de blessures. Bien qu’ils puissent être déterminants sur la compliance et générer des abandons de traitement, il est le plus souvent possible de les pallier grâce à une écoute et un suivi attentifs du patient. Les effets délétères plus tardifs portent sur l’occlusion. Ils peuvent être irréversibles. On retiendra principa-lement l’évolution occlusale vers un surplomb et un recouvrement incisifs diminués, voire des béances occlusales antérieures ou latérales qui peuvent, dans certains cas, motiver l’arrêt du traitement. La thérapeutique devra alors être rediscutée entre le spécialiste du sommeil et les intervenants. L’analyse de la littérature (10) oriente vers des populations plus exposées : individus en classe I d’Angle (normo-clusion), au surplomb incisif initial important, en occlusion de classe III d’Angle.

Documents

Ils doivent être conservés : les clichés, les moulages de départ, les cires si possible, et la fiche de labo ratoire.

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La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 329 - avril-mai-juin 2012 | 21

DOSSIER THÉMATIQUE

Suivi

Après s’organise le suivi odontologique du patient, parallèlement au suivi du SAOS. Un bilan de l’appareil manducateur est prévu, au minimum tous les 6 mois. L’anamnèse et les questionnaires de données subjec-tives apporteront les éléments nécessaires sur la qualité de vie, la tolérance habituelle et la compliance. Les documents de départ seront consultés (modèles, radiographies et analyses) et réitérés si besoin. En cas de baisse d’efficacité sur les symptômes, d’autres facteurs seront recherchés, car certains patients en viennent à oublier leur orthèse tant ils la supportent bien… et prennent du poids ou se remettent à fumer. Avant d’envisager une nouvelle avancée, mieux vaut

demander au patient de contrôler son poids. Le suivi odontologique est couplé avec le suivi du SAOS par le spécialiste du sommeil.

Conclusion

L’intégration d’une OAM à la prise en charge du SAOS nécessite une collaboration et une communication entre les spécialistes du sommeil, les médecins ORL et les praticiens de l’appareil manducateur formés au sommeil. Elle peut s’organiser à chaque étape pour cerner au mieux les éléments prédictifs et favoriser la compliance mais aussi rediscuter la stratégie théra-peutique si nécessaire. ■

RHINO-CONJONCTIVITES ALLERGIQUES

URTICAIRE

contre les symptômes de l’Allergie

DÉNOMINATION DU MÉDICAMENT : BILASKA 20 mg, comprimé. COMPOSITIONQUALITATIVE ET QUANTITATIVE : Bilastine 20,00 mg. FORME PHARMACEUTIQUE* :Comprimé. DONNEES CLINIQUES* : Indications thérapeutiques : Traitement symptomatiquede la rhino-conjonctivite allergique (saisonnière et perannuelle) et de l’urticaire. Posologie etmode d’administration* : Contre-indications : Hypersensibilité à la substance active (bilastine)ou à l’un des excipients. Mises en garde spéciales et précautions d’emploi* : Interactionsavec d’autres médicaments et autres formes d’interactions* : Grossesse et allaitement* :Fertilité*. Grossesse* : Par mesure de précaution, il est recommandé de ne pas utiliser BILASKA20 mg, comprimé au cours de la grossesse. Allaitement* : Effets sur l’aptitude à conduiredes véhicules et à utiliser des machines* : Effets indésirables* : Surdosage* : PROPRIETESPHARMACOLOGIQUES : Propriétés pharmacodynamiques*. Classe pharmacothéra-peutique : AUTRES ANTIHISTAMINIQUES POUR USAGE SYSTEMIQUE, code ATC : R06AX29.Propriétés pharmacocinétiques*. Données de sécurité préclinique*. DONNEES PHARMA-CEUTIQUES : Liste des excipients*. Durée de conservation : 5 ans. Précautionsparticulières de conservation*. Nature et contenu de l’emballage extérieur*. Précautionsparticulières d’élimination et de manipulation*. TITULAIRE DE L’AUTORISATION DE MISESUR LE MARCHE : MENARINI INTERNATIONAL OPERATIONS LUXEMBOURG S.A. 1 avenue dela Gare 1611 Luxembourg LUXEMBOURG. EXPLOITANT DE L’AUTORISATION DE MISE SURLE MARCHÉ : A. MENARINI FARMACEUTICA INTERNAZIONALE SRL Via Sette Santi n° 1 FirenzeITALIE. NUMERO(S) D’AUTORISATION DE MISE SUR LE MARCHE : 499 135-8 ou 34009 499135 8 9 : 10 comprimés sous plaquettes thermoformées (MVC/Aluminium/PVAC). 499 137-0ou 34009 499 137 0 1 : 30 comprimés sous plaquettes thermoformées (MVC/Aluminium/PVAC).DATE DE PREMIERE AUTORISATION/DE RENOUVELLEMENT DE L’AUTORISATION : 01 avril2011. DATE DE MISE A JOUR DU TEXTE : 01 avril 2011 V2P.CONDITIONS DE PRESCRIPTION ET DE DELIVRANCE : Liste II. Remb.Séc. Soc. 30 % Coll. PRIX : Boîtes de 10 : 3,05 €. Boîtes de 30 : 7,50 €.

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TRAITEMENT SYMPTOMATIQUE DE LA RHINO-CONJONCTIVITE ALLERGIQUE (SAISONNIÈRE ET PERANNUELLE) ET DE L’URTICAIRE

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Retrouvez l’intégralité des références bibliographiques sur www.edimark.fr

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22 | La Lettre d’ORL et de chirurgie cervico-faciale • n° 329 - avril-mai-juin 2012

Les orthèses d’avancée mandibulaire dans le traitement du SAOS de l’adulte

DOSSIER THÉMATIQUESyndrome d’apnées du sommeil

1. Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES). Évaluation clinique et économique de la chirurgie dans le traitement du syndrome des apnées obstructives du sommeil. Service de l’évaluation technologique. Service de l’évaluation économique. Mars 1999. 2. Haute Autorité de santé. Pose d’un appareillage en propulsion mandibulaire. Juillet 2006 (consultable sur le site www.has-santé.fr).3. Haute Autorité de santé. Pose d’un appareillage en propulsion mandibulaire. Actualisation d’avis sur les actes. Décembre 2009 (consultable sur le site www.has-santé.fr).4. Arrêté du 28 octobre 2008 relatif à l’inscription de l’orthèse d’avancée mandibulaire ORM des laboratoires Narval SA au chapitre 4 du titre II de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l’article L.165-1 du Code de la Sécurité sociale.5. Arrêté du 23 décembre 2009 relatif à l’inscription de l’orthèse d’avancée mandibulaire AMO de la société Orthosom SA au chapitre 4 du titre II de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l’article L.165-1 du Code de la Sécurité sociale.6. Arrêté du 11 octobre 2010 relatif au changement de distri-buteur et au changement de dénomination de l’orthèse

d’avancée mandibulaire des laboratoires Narval inscrite au chapitre 4 du titre II de la liste des produits et presta-tions remboursables prévue à l’article L.165-1 du Code de la Sécurité sociale.7. Arrêté du 3 août 2010 relatif à l’inscription de l’orthèse d’avancée mandibulaire Tali de la société Tali SAS au chapitre 4 du titre II de la liste des produits et prestations remboursables prévue à l’article L.165-1 du Code de la Sécurité sociale.8. Chan AS, Sutherland K, Schwab RJ et al. The effect of mandibular advancement on upper airway structure in obstructive sleep apnoea. Thorax 2010;65:726-32.9. Lim J, Lasserson TJ, Fleetham J, Wright JJ. Oral appliances for obstructive sleep apnoea. Cochrane Database Syst Rev 2003;(4):CD004435.10. Fleury B, Cohen-Levy J, Lacassagne L et al. Traitement du SAOS par orthèse d’avancée mandibulaire. Recommanda-tions pour la pratique clinique (RPC) du syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAOS) de l’adulte. Rev Mal Respir 2010;27(suppl. 3):S146-56.11. Marklund M, Verbraecken J, Randerath W. Non-CPAP therapies in obstructive sleep apnoea mandibular advance-ment device therapy. Eur Respir J 2012;39:1241-7.

12. Dauvilliers Y, Arnulf I, d’Ortho MP et al. Quelle évaluation préthérapeutique d’un patient avec SAOS nouvellement diagnostiqué ? Recommandations pour la pratique clinique (RPC) du syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAOS) de l’adulte. Rev mal Respir 2010;27(suppl. 3): S124-36.13. www.sforl.org14. SAOS et ronflement : du dépistage à l’orthèse d’avancée mandibulaire. Dossiers de l’Association dentaire française, 2009. 15. Ohayon MM, Li KK, Guilleminault C. Risk factors for sleep bruxism in the general population. Chest 2001; 119:53-61.16. Landry ML, Rompré PH, Manzini C, Guitard F, de Grandmont P, Lavigne GJ. Reduction of sleep bruxism using a mandibular advancement device: an experi-mental controlled study. Int J Prosthodont 2006;19: 549-56.17. Landry-Schönbeck A, de Grandmont P, Rompré PH, Lavigne GJ. Effect of an adjustable mandibular advancement appliance on sleep bruxism: a crossover sleep laboratory study. Int J Prosthodont 2009;22:251-9.

Références bibliographiques (suite de la p. 22)