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paramètres Les enjeux éthiques de la limite des ressources en santé Les Presses de l’Université de Montréal Sous la direction de Jocelyne Saint-Arnaud, Béatrice Godard et Jean-Christophe Bélisle Pipon

Les enjeux éthiques de la limite des ressources en santé · une contribution importante aux débats en cours et deviendra une référence pour tous ceux qui, individus et groupes,

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Dans ce livre, des chercheurs, des administrateurs, des déci-deurs et des professionnels de la santé se penchent sur les

problèmes de justice distributive engendrés par le manque de ressources dans le système de santé au Québec. Listes d’attente, pénurie de personnel et coûts élevés des médicaments menacent l’équité du système et l’égalité d’accès aux soins. De grands enjeux se dessinent, dont le plus important consiste à assurer l’équilibre entre les besoins de la population, les moyens et les techniques accessibles pour y répondre et les objectifs sociaux. Devant la nécessité d’une réforme en profondeur du système public et pour en assurer la pérennité et l’efficacité, les auteurs dressent l’état des lieux et proposent des pistes de solution.

Ayant pour but de favoriser l’interdisciplinarité, ce livre est une contribution importante aux débats en cours et deviendra une référence pour tous ceux qui, individus et groupes, cherchent à améliorer la situation.

Les directeurs

Jocelyne Saint-Arnaud est professeure associée au Département de

médecine sociale et préventive de l’École de santé publique de l’Université

de Montréal et chercheure associée au Centre de recherche en éthique.

Béatrice Godard est professeure titulaire au Département de médecine

sociale et préventive de l’Université de Montréal et directrice du Réseau de

recherche en santé des populations du Québec.

Jean-Christophe Bélisle Pipon est étudiant au doctorat aux programmes

de bioéthique à l’Université de Montréal.

29,95 $ • 27 eIllustrations : © Samer Ghanem/appleuzr/ iStockophoto.com

Disponible en version numériquewww.pum.umontreal.ca

isbn 978-2-7606-3487-9

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Les enjeux éthiques de la limite des ressources

en santé

Les Presses de l’Université de Montréal

Sous la direction de

Jocelyne Saint-Arnaud, Béatrice Godard et Jean-Christophe Bélisle Pipon

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Sous la direction de Jocelyne Saint-Arnaud, Béatrice Godard et

Jean-Christophe Bélisle Pipon

les enjeux éthiques de la limite des ressources

en santé

Les Presses de l’Université de Montréal

Mise en page : Chantal Poisson – Recto Verso Graphisme

Catalogage avant publication de Bibliothèque et Archives nationales du Québec et Bibliothèque et Archives Canada

Vedette principale au titre :Les enjeux éthiques de la limite des ressources en santé(Paramètres)Comprend des références bibliographiques.

ISBN 978-2-7606-3487-9

1. Services de santé — Accessibilité — Québec (Province). 2. Services de santé — Réforme — Québec (Province). 3. Médecine sociale — Québec (Province). I. Saint-Arnaud, Jocelyne, 1947-. II.  Godard, Béatrice. 1960-. III. Bélisle Pipon, Jean-Christophe, 1986-. IV. Collection : Paramètres.

RA395.C3E54 2016 362.109714 C2015-941586-1

Dépôt légal : 1er trimestre 2016Bibliothèque et Archives nationales du Québec© Les Presses de l’Université de Montréal, 2016

ISBN (papier) 978-2-7606-3487-9 ISBN (PDF) 978-2-7606-3488-6ISBN (ePub) 978-2-7606-3489-3

Les Presses de l’Université de Montréal remercient de leur soutien financier le Conseil des arts du Canada et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec (SODEC).

imprimé au canada

Nous reconnaissons l’appui financier du gouvernement du Canada. We acknowledge the financial support of the Government of Canada.

Pour nourrir le débat sur l’équité en santéCe tableau peint à l’huile par Jocelyne Saint-Arnaud représente les dépenses en santé et les iniquités qu’elles produisent. Ainsi la rémunération des médecins — représentée par le caducée au centre (qui rappelle aussi le signe du dollar) —, les coûts de pharmacie — représentés par le mortier servant à la préparation des médicaments — et la construction d’édifices neufs pèsent plus lourd dans les dépenses de santé que les soins dispensés au patient (lit vide) qui devient un numéro de dossier (en bordure gauche). Le stéthoscope placé sur le mortier représente l’in-fluence des pharmaceutiques sur la prestation de soins. Les seringues, à chaque extrémité du fléau, représentent la profession infirmière dont le poids est déterminé par ce qui se trouve dans les plateaux de la balance. La porte fermée symbolise la difficulté d’accès aux soins. Enfin, les noms d’hôpitaux qui ont fait l’histoire du Québec disparaissent au profit de nouvelles structures (en fond de toile) et des Centres intégrés universitaires de santé et services sociaux (CIUSSS).

Remerciements

Nous remercions les nombreuses institutions, les groupes et organisations qui, par leur financement et leur soutien, ont permis la réalisation du colloque et de cet ouvrage :

• Institut de recherche en santé du Canada (IRSC)• Université de Montréal (plus spécifiquement, le vice-rectorat aux

études, le vice-rectorat à la recherche, à la création et à l’innovation, la Faculté de médecine et le Département de médecine sociale et préventive)

• Réseau de recherche en santé des populations du Québec (RRSPQ)• Groupe de recherche Omics-Ethics• Axe éthique et santé des populations du RRSPQ• Groupe de recherche en éthique et reproduction• Institut de recherche en santé publique de l’Université de Montréal

(IRSPUM)• Centre de recherche du Centre hospitalier de l’Université de Montréal

(CRCHUM)• Centre de recherche en éthique (CRÉ)• Association étudiante de bioéthique de l’Université de Montréal

(AÉBiUM)

Nous tenons également à souligner la contribution des membres du comité scientifique : Jean-Christophe Bélisle Pipon, Damien Contandrio-poulos, Béatrice Godard, Jocelyne Saint-Arnaud et Bryn Williams-Jones.

8 t les enjeux éthiques de la limite des ressources en santé

Nous souhaitons remercier tout spécialement madame Pascale Koenig, coordonnatrice du colloque, sans qui la réalisation de cet événement et de cet ouvrage n’aurait pas été possible.

Nos remerciements vont aussi aux personnes qui ont assumé la tâche de modérateur durant les sessions de présentations dont : Marianne Dion-Labrie, Marie-Chantal Fortin, Isabelle Ganache, Mona Gupta et Bryn Williams-Jones.

Nous voudrions souligner l’important travail des graphistes, Louis-Charles Dufresne et Maxime Lévesque, à qui l’on doit, notamment, la conception du logo qui figurait sur les affiches annonçant le colloque.

Nous remercions également trois assistants de recherche, Tierry Morel-Laforce, William Néron et Amadou Boubou Kouyaté qui ont travaillé à la préparation du manuscrit.

Nous remercions les nombreux étudiants bénévoles qui ont aussi contribué à la réussite du colloque : Alexandre Bolduc, Stéphanie Côté, Victoria Doudenkova, Dimitri Dubé Marquis, Charles Dupras, Anne Hudon, Caroline Jennis, Maude Laliberté, Charles Marsan, Catherine Vigneault et Nathalie Voarino.

Avant-propos

Ce livre regroupe des textes décrivant les problèmes éthiques en santé à différents échelons décisionnels, des textes présentant des analyses théo-riques inspirées d’écrits ou de la pratique, des textes discutant de résultats d’études empiriques, et d’autres, enfin, proposant des solutions. Cet ouvrage est issu du Colloque des Programmes de bioéthique qui a eu lieu à l’Université de Montréal, les 14 et 15 novembre 2013. Intitulé Enjeux éthiques liés à la limite des ressources et à ses impacts sur le système de santé, il avait un triple objectif : 1) réunir une diversité de conférenciers (praticiens, gestionnaires, décideurs et chercheurs) dans le but de décrire et d’analyser les problèmes d’éthique liés à la limite des ressources dans le domaine de la santé ; 2) diffuser des résultats d’études empiriques et théo-riques et susciter les échanges interdisciplinaires ; 3) éclairer les différents acteurs, à tous les niveaux décisionnels, sur ces questions, dans le but de susciter de nouvelles initiatives en termes de recherches et d’interventions. Ont été réunis des conférenciers qui ont accepté de partager leur expertise et leurs expériences, ainsi que ceux qui ont répondu à un appel à contribu-tion1. Certains d’entre eux ont accepté de soumettre un texte en vue de la publication du présent ouvrage.

Chaque auteur a abordé le sujet de la limite des ressources dans le domaine de la santé en fonction de sa discipline, de ses fonctions, de ses

1. La liste complète des conférenciers et des présentateurs peut être trouvée sur le site du colloque : http://www.bioethique.umontreal.ca/colloque/colloque-annuel-2013- presentation/

10 t les enjeux éthiques de la limite des ressources en santé

expériences ou de ses recherches. Certains des textes constituent des intro-ductions à des problèmes éthiques spécifiques et complexes, d’autres poussent plus loin la réflexion éthique au point parfois de remettre en ques-tion les fondements mêmes du système de santé canadien. Deux de ces ques-tionnements traversent différents textes : Comment restreindre les coûts du système, tout en assurant son efficience ? Doit-on remettre en cause l’option étatique du système de santé pour faire une place plus grande au privé ? Pour souligner brièvement l’apport et la complémentarité des textes réunis dans ce livre, voici un bref aperçu de leur contribution aux objectifs pour-suivis et des enjeux éthiques en cause.

La première partie regroupe des textes portant sur l’accès aux soins de santé. Jocelyne Saint-Arnaud présente la problématique de la limite des ressources en santé au Québec et des enjeux éthiques qui en découlent. Elle définit d’abord ce qu’est un système de santé équitable puis montre comment les listes d’attente, la pénurie de personnel et les coûts élevés des médicaments menacent l’équité du système de santé et l’égalité d’accès aux soins. Ryoa Chung s’intéresse à la signification du principe de justice chez John Rawls, Norman Daniels et Ronald Dworkin, trois philosophes contemporains qui se sont penchés sur la justice distributive. L’étude de ces philosophes montre qu’au nom de la justice sociale, un système de santé publique de base se justifie autour du principe d’un accès égal pour tous. Se pose alors la question de la pertinence d’un système privé parallèle. Michel Perreault, Érica Rios de Carvalho et Fernando Cupertino de Barros exami-nent le système de santé brésilien et mettent en évidence les conséquences éthiques du recours aux services privés de santé en tant que complément d’un système public de soins. Ils notent l’iniquité engendrée par ce système pour les moins nantis privés d’accès aux soins.

Deux articles montrent ensuite des résultats d’études empiriques liés à la limite des ressources en santé, dans deux domaines qui ne sont habituelle-ment pas mis en évidence dans les écrits : les services d’ergothérapie et les services de prévention auprès des jeunes. Dans un premier temps, Annie Carrier et Mélanie Levasseur présentent les résultats préliminaires d’une étude qualitative de type ethnographique qui concernent l’accès aux services d’ergothérapie. Ces résultats montrent notamment que, dans un contexte de ressources limitées, des critères subjectifs sont appliqués pour définir qui

avant-propos t 11

aura accès aux services et que la réponse aux besoins des patients n’est pas adéquate, puisqu’elle n’est souvent que partielle et ne survient qu’après des délais d’attente trop longs. Dans un deuxième temps, Geneviève McCready s’intéresse à l’accès aux soins pour les jeunes de 15 à 24 ans qui constituent 12,4 % de la population québécoise. Elle note la difficulté pour ce groupe de trouver, en temps opportun, des services adaptés à leur tranche d’âge dans leur environnement, principalement en milieu scolaire. Elle déplore aussi l’absence de programmes de prévention qui pourraient réduire la demande de services futurs, dans le domaine de la santé mentale, des maladies infec-tieuses et de la planification de la grossesse.

Dans la deuxième partie, les textes portent sur les enjeux éthiques liés à la limite des ressources sous l’angle de la médecine. Dominique Beaulieu répond à la question « Les médecins sont-ils les gardiens du système de santé ? » à la lumière de son expérience de médecin de famille. Elle décrit la limite des ressources à partir de situations cliniques, cerne les questions éthiques soulevées et propose certaines orientations. En matière de respon-sabilité médicale, Fernand Turcotte considère le surdiagnostic comme le symptôme de la faillite éthique qui marque la médecine occidentale. Ce problème rend le médecin incapable de répondre adéquatement aux besoins des patients. Marjolaine Frenette, Jocelyne Saint-Arnaud et Karim Serri exami nent l’impact de l’utilisation des niveaux d’interventions médi-cales (NIM) sur les pratiques de fin de vie en milieu hospitalier. L’utilisation des formulaires de NIM favoriserait le respect des volontés de la personne dans les traitements de fin de vie, réduirait l’acharnement thérapeutique, ainsi que les dépenses liées à ces pratiques. Pour Pavel Hamet, nous sommes à l’aube d’une révolution en santé amenée par la médecine personnalisée. Cette innovation, ayant pour but de développer des médicaments adaptés génétiquement à chacun, rendrait les traitements beaucoup plus efficaces. Toutefois, elle représente des coûts élevés et soulève des enjeux éthiques liés à la confidentialité et à la protection de l’individu.

La troisième partie porte sur les choix de société qui doivent être faits, ainsi que sur la gestion des enjeux organisationnels. On y trouve des textes qui explorent les liens entre les soins, les organisations et les politiques en rapport avec la limite des ressources en santé. France Gagnon examine l’accès aux services de santé sous l’angle des politiques publiques et étudie

12 t les enjeux éthiques de la limite des ressources en santé

les enjeux éthiques liés aux choix d’intérêt public. De son point de vue, le plus grand défi à surmonter pour notre système de santé consiste à trouver un équilibre entre les besoins de la population, les moyens et techniques disponibles et les objectifs sociaux. Yolaine Rioux et Lise Lamothe s’inté-ressent aux responsabilités qui incombent aux centres de santé et de services sociaux ou aux nouveaux centres intégrés de santé et de services sociaux qui doivent viser à la fois à améliorer la santé et à répondre aux besoins de la population de leur territoire. Dans ces organisations, deux systèmes de gouvernance s’entrecroisent, celui des gestionnaires qui contrôlent les ressources financières allouées et celui des experts, les professionnels de la santé, qui évaluent les besoins des bénéficiaires. La limite des ressources exacerbe les tensions entre ces deux systèmes et selon les auteures, la popu-lation devrait participer aux prises de décisions organisationnelles, de façon à favoriser un processus collégial. Ghislaine Cleret de Langavant présente le contexte dans lequel le commissaire à la santé et au bien-être évalue le système de santé à partir d’indicateurs de performance et de consultations citoyennes, selon différentes approches et méthodes. Pour elle, l’allocation des res sources dans le domaine de la santé doit tenir compte du point de vue citoyen. En cela, elle rejoint la conclusion des auteures précédentes.

Enfin, la dernière partie regroupe des textes qui présentent des solutions. André-Pierre Contandriopoulos considère qu’en l’absence de profondes transformations, l’avenir du système de santé est compromis par la limite des ressources. La solution dépasse le simple remaniement technique et doit passer par l’amélioration de l’accès à des soins de proximité. Joanne Castonguay aborde la question de l’augmentation des coûts de la santé dans la perspective d’une analyse économique. Pour améliorer l’accès aux soins médicaux, sans augmenter les dépenses, il faut favoriser la recherche et le développement, évaluer les nouvelles technologies en fonction de leur effi-cience, de manière à faire des choix éclairés quant à celles qui seront rete-nues dans la pratique clinique. Lise Denis se préoccupe du financement du système de santé selon un point de vue de gestionnaire. Cinq solutions combinées résoudraient le problème : le financement en fonction de l’épi-sode de soin, la qualité et la performance, y compris en matière de rémuné-ration médicale, l’introduction de la gestion médico-administrative et finalement, la poursuite des efforts d’optimisation.

avant-propos t 13

Dans toutes ces études, on peut retenir plusieurs constantes : la préémi-nence de la limite des ressources comme obstacle à des services équitables en santé, la nécessité d’une réforme en profondeur du système de santé, l’importance de la concertation dans les choix qui doivent être faits, notam-ment en matière de technologies (y compris les médicaments), et finale-ment la nécessité d’agir sur plusieurs plans en assurant une cohésion entre les acteurs et les décideurs, de façon à garantir la pérennité et l’efficience du système public de santé.

L’ouvrage souligne pour finir la remise du prix Excellence en bioéthique 2013 à monsieur David J. Roy pour sa contribution exceptionnelle au déve-loppement de la bioéthique au Québec. À cet effet, la professeure Béatrice Godard signe un texte qui fait l’éloge du récipiendaire, auquel fait suite son discours de remerciement.

Nous souhaitons que cet ouvrage puisse servir d’outil de référence pour les professeurs, les professionnels de la santé, les étudiants, les chercheurs et pour toute personne qui s’intéresse à la question complexe des enjeux éthiques liés à l’allocation des ressources en santé. Nous sommes convaincus que ce livre représente une contribution importante au débat et apporte une diver-sité de points de vue et de perspectives sur la question, permettant ainsi d’alimenter la réflexion et de proposer des pistes de solutions.

Jocelyne Saint-ArnaudBéatrice Godard

Jean-Christophe Bélisle Pipon

S E C T I O N 1

Fondements et limites

CHAPITRE 1

La justice sociale et les limites des ressources en santé

Jocelyne Saint-Arnaud

La limite des ressources dans le domaine de la santé constitue une préoc-cupation constante des systèmes de santé à travers le monde. La question soulève des enjeux éthiques de justice sociale. En effet, le système de santé devrait garantir un accès aux services de santé pour tous, peu importe le revenu ou le statut social. La Loi canadienne sur la santé et ses cinq prin-cipes généraux (gestion publique de l’assurance maladie, intégralité des services, universalité, transférabilité entre les provinces et accessibilité aux soins) assurent une égalité formelle d’accès aux soins médicaux, mais la question de l’accès à des soins adéquats en temps opportun se pose avec acuité1. La gestion des systèmes de santé est laissée à chacune des provinces qui peuvent favoriser ou non un accès réel aux soins de santé.

Plusieurs facteurs expliquent la limite des ressources en santé. L’énumé-ration qui suit n’est pas exhaustive : baisse des paiements de transferts en provenance du gouvernement fédéral2, diminution des crédits accordés à la

1. J. Saint-Arnaud, « Le système de santé québécois et l’accès aux soins », Éthique publique, vol. 5, no 1, 2003, p. 112-120.

2. Les paiements de transferts en provenance du gouvernement fédéral qui défrayait 45 % des soins de santé durant les années 1977-1978 et 34 % en 1994 (A. Maoni, « Les normes centrales et les politiques de santé », Le système de santé québécois. Un modèle en transformation, C. Bégin, P. Bergevin, P. Gerlier-Forest et V. Lemieux (dir.), Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 1999, p. 53-76) se situeront plutôt en moyenne à 18,6 % dans les 20 prochaines années, selon un calcul basé sur

18 t les enjeux éthiques de la limite des ressources en santé

santé au Québec3, augmentation des attentes de la population4, augmentation des coûts suscités par les nouvelles techniques diagnostiques, chirurgicales et thérapeutiques5, coût accru des nouveaux médicaments6, augmentation des dépistages et des traitements préventifs, comme le test de PSA pour le dépistage du cancer de la prostate pour des hommes asymptomatiques7,

le PIB et instauré par le gouvernement conservateur de Stephen Harper (« Le trans-fert canadien en santé aux provinces : la fin d’une époque ? », Radio-Canada, jeudi 19 janvier 2012). Selon C. Bégin (op. cit., p. 356), « le retrait progressif du fédéral du financement des services de santé contribue à l’érosion subtile des normes qui ont guidé jusqu’ici le développement du système de santé au Canada et au Québec, notamment celle de la transférabilité des services et de la gestion publique ».

3. À partir de 1995-1996, les crédits consacrés à la santé ont diminué. C’est le domaine qui contribue le plus à la réduction des dépenses (op. cit., p.  22). Lire aussi de Vincent Lemieux, « Les politiques publiques et les alliances d’acteurs », dans Le système de santé au Québec. Organisations, acteurs et enjeux, p.  119-143) ; A. Letourny et A. Valette, « Le contexte français et québécois », dans L’hôpital en restructuration. Regards croisés sur la France et le Québec, D. Contandriopoulos, A.-P. Contandriopoulos, J.-L. Denis et A. Valette (dir.), Montréal, Presses de l’Uni-versité de Montréal, 2005, p. 18-32.

4. Selon Steve Morgan (« Les déterminants des dépenses en médicaments sur ordon-nance », Le privé dans la santé. Les discours et les faits, F. Béland, A.-P. Contandrio-poulos, A. Quesnel-Vallée et L. Roberge (dir.), Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2008, p. 96-123), la génération des baby-boomers vieillit et manifeste des attentes accrues. Sous l’influence des droits reconnus, les demandes des patients et de leur famille entraînent un élargissement des critères médicaux. Au début des années 2000, il n’existait pratiquement aucun critère d’exclusion à la dialyse au Québec. À ce sujet, lire : J. Saint-Arnaud, « Enjeux éthiques et juridiques liés aux critères médicaux de sélection des candidats à l’hémodialyse en milieux hospita-liers », Éthique médicale, bioéthique et normativités, C. Hervé, B. M. Knoppers, P. A. Molinari et G. Moutel (dir.), Paris, Dalloz, 2003, p. 83-104.

5. D. Arweiler et A.-P.  Contandriopoulos, « Le financement du système de santé québécois : dynamique et enjeux », dans Le système sociosanitaire au Québec. Gouvernance, régulation et participation, M.-J. Fleury, M. Tremblay, H. Nguyen et L. Bordeleau (dir.), Montréal, Gaëtan Morin et Chenelière Éducation, 2007, p. 79-97.

6. À ce sujet, lire S. Morgan, op. cit. Selon lui, les nouveaux médicaments sont beau-coup plus coûteux que les anciens, sans être plus efficaces. Lire aussi D. Reinharz, L. Rousseau et S. Rheault, « La place du médicament dans le système de santé du Québec », dans Le système de santé québécois. Un modèle en transformation, 1999, p. 149-167.

7. Lire P. Lehoux et R. Baptista, « Évaluation des technologies de la santé au Québec : Bilan et défis », dans Le système de santé au Québec, 2003, p. 450-458. À propos du PSA, les auteurs concluent : « il s’agit d’un test qui ne génère pas des bénéfices suffi-sants pour que soit mis en place un programme systématique de dépistage, et l’effi-cacité limitée et les effets secondaires importants du traitement chirurgical du

la justice sociale et les limites des ressources en santé t 19

hausse du nombre de personnes âgées grâce à une augmentation de l’espé-rance de vie à la naissance8, etc.

Depuis des années, le gouvernement québécois présente principalement deux stratégies pour faire face au problème de la limite des ressources : 1) une restructuration et une meilleure gestion du réseau public de santé ; une « rationalisation » des ressources, souvent synonyme de rationnement : « faire plus avec moins » constitue le mot d’ordre du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) depuis des décennies ; 2) l’injection de fonds de manière sporadique, notamment pour régler l’engorgement dans les urgences9 ou attirer du personnel médical en régions éloignées, l’octroi aux médecins de famille de forfaits pour la prise en charge des patients et la coordination des services10, la distribution de primes à la performance dans les milieux hospitaliers, ou encore des investissements dans des programmes spécifiques pour diminuer les listes d’attente, comme dans les chirurgies de la hanche, du genou ou de l’œil. Ces stratégies n’ont pas apporté les résultats attendus dans l’accès aux services pour l’ensemble de la population, notam-ment aux services de première ligne11. La réforme Barrette actuellement en

cancer de la prostate militent en faveur d’une veille prudente et non d’un dépistage précoce » (p. 455).

8. A. Lecocq et M. Joanis (« Au-delà des incertitudes : pouvoir gris, obésité et autres dimensions incertaines de l’impact budgétaire sur le vieillissement », Le vieillisse-ment de la population et les politiques publiques : enjeux d’ici et d’ailleurs, p. 63-83) citant Sanz et Vélasquez (2007, p.  928) considèrent que « le vieillissement des populations est responsable de la croissance des dépenses gouvernementales en raison de son effet sur l’assistance sociale et la santé ». Cette position doit être nuancée ; d’autres facteurs seraient plus déterminants : l’augmentation du coût des médicaments, des technologies de pointe et des pratiques médicales (Arweiler et Contandriopoulos, op. cit., p. 82).

9. Lire à ce sujet l’article de V. Lemieux, op. cit. 10. L’entente signée entre la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec et le

ministre de la Santé François Legault en 2002 mettait en place ces mesures qui impliquaient une hausse de 18 % de la rémunération des médecins (L. Demers, « La profession médicale et l’État », Le système de santé au Québec. Organisations, acteurs et enjeux, p. 262-295).

11. À cet égard, les CLSC n’ont pas rempli leur mission principale qui était de devenir la porte d’entrée du système. Les urgences hospitalières sont encore à ce jour la porte d’entrée aux traitements de première ligne. Selon J.-F. Levesque, D. Roberge et R. Pineault (« La première ligne de soins : un témoin distant des réformes insti-tutionnelles et hospitalières au Québec ? », dans Le système sociosanitaire au Québec, p. 63-78), les réformes n’ont pas touché la première ligne parce qu’elles n’ont porté que sur le réseau public de soins, sans toucher les cliniques privées.

20 t les enjeux éthiques de la limite des ressources en santé

cours mise sur une recentralisation du pouvoir au MSSS, sur un regroupe-ment régional au sein des CISSS (centres intégrés de santé et de services sociaux) et CIUSSS12 (centres intégrés universitaires de santé et de services sociaux) et sur l’imposition de quotas aux médecins généralistes pour qu’ils suivent un plus grand nombre de patients.

Le but de cette introduction consiste : 1) à définir en quoi consiste un système de santé équitable comme application du principe de justice sociale ; 2) à montrer à l’aide de certains indicateurs comment notre système de santé, aux prises avec la limite des ressources, ne peut apporter une réponse adéquate aux besoins de l’ensemble de la population québécoise et donc qu’il ne remplit pas une des conditions essentielles à un système de santé équitable ; 3) à mettre en évidence certains impacts des politiques gouvernementales sur les pratiques en santé.

L’équité dans le domaine de la santé

Dans une perspective égalitaire, l’équité dans le domaine de la santé est respectée si les deux conditions suivantes sont remplies : 1) une égalité d’accès aux soins ; 2) une réponse adéquate aux besoins de santé. Considé-rons d’abord la première condition. Le principe d’égalité des droits dans le domaine de la santé est interprété en fonction de l’égalité d’accès à des soins de santé, selon Daniels13. Il ne s’agit pas ici d’un droit à la santé, dont la réalisation serait hautement utopique, mais d’abord d’un accès à des soins de santé, quels que soient le revenu, le rang social, l’appartenance culturelle, ou tout autre critère non pertinent au regard de l’amélioration ou du maintien du bien-être individuel et collectif. Il s’agit là d’une exigence du principe de justice formelle qui stipule que les êtres d’une même caté-gorie essentielle doivent être traités de la même façon, la catégorie essen-

12. Ces nouveaux regroupements remplacent les 95 CSSS (centres de santé et de services sociaux) et 4 RUIS (réseaux universitaires intégrés de santé) créés lors de la réforme précédente, qui opéraient une décentralisation.

13. Selon Norman Daniels (« Is there a right to health care and, if so, what does it encompass ? », Contemporary issues in bioethics, T. L. Beauchamp et L. Walters (dir.), Belmont, Thomson Wadsworth, 2008, p. 568), l’égalité des droits dans le domaine de la santé est le pendant de l’égalité des chances dans le domaine de l’éducation.

Le journalisme radiophoniqueDominique Payette et Anne-Marie Brunelle

Justice et démocratieChristian Nadeau

K-OLe leadership partagé

Édith Luc

Lexicologie et sémantique lexicale – Notions fondamentales

Alain Polguère

Méthodes de planification en transportYves Nobert, Roch Ouellet et Régis Parent

Les meurtriers sexuels – Analyse comparative et nouvelles perspectives

Jean Proulx, Maurice Cusson, Eric Beauregard et Alexandre Nicole

Le modèle ludique – Le jeu, l’enfant avec déficience physique et l’ergothérapie

Francine Ferland

Musique et modernité en FranceS. Caron, F. de Médicis et M. Duchesneau (dir.)

P-QLe paysage humanisé au Québec – Nouveau statut, nouveau paradigme

Gérald Domon (dir.)

Paysages en perspectiveP. Poullaouec-Gonidec, G. Domon et S. Paquette (dir.)

La pénologie – Réflexions juridiques et criminologiques autour de la peine

Marion Vacheret, Estibaliz Jimenez (dir.)

Le phénomène des gangs de rues – Théories, évaluations, interventions

Jean-Pierre Guay, Chantale Fredette (dir.)

La politique comparée – Fondements, enjeux et approches théoriques

Mamoudou Gazibo et Jane Jenson

Politique internationale et défense au Canada et au Québec

Kim R. Nossal, Stéphane Roussel et Stéphane Paquin

Pour comprendre le nationalisme au Québec et ailleurs

Denis Monière

Pourquoi enseigner la musique ? Propos sur l’éducation musicale à la lumière de l’histoire, de la philosophie et de l’esthétique

Claude Dauphin

Préparer la relève – Neuf études de cas sur l’entreprise au Québec

Louise Saint-Cyr et Francine Richer

Prévention des toxicomanies – Aspects théoriques et méthodologiques

Pierre Brisson

Les problèmes organisationnels – Formulation et résolution

Yves-C. Gagnon

La psychocriminologie – Apports psychanalytiques et applications cliniques

Dianne Casoni et Louis Brunet

La psychologie de l’adolescence Michel Claes et Lyda Lannegrand-Willems (dir.)

La psychologie environnementaleJean Morval

Publicités à la carte – Pour un choix stratégique des médias publicitaires

Jacques Dorion et Jean Dumas

Les Québécois aux urnes – Les partis, les médias et les citoyens en campagne

Éric Bélanger, Frédérick Bastien et François Gélineau (dir.)

Questions de criminologieJ. Poupart, D. Lafortune et S. Tanner (dir.)

Questions d’urbanisme Gérard Beaudet, Jean-Philippe Meloche et Franck Scherrer (dir.)

R-SLa radio à l’ère de la convergence

En collaboration avec la Chaîne culturelle de Radio-Canada

Raisonnement et pensée critique – Introduction à la logique informelle

Martin Montminy

La réadaptation de l’adolescent antisocial – Un programme cognitivo-émotivo- comportemental

Marc Le Blanc, Pierrette Trudeau Le Blanc

Le régime monétaire canadien – Institutions, théories et politiques

Bernard Élie

La religion dans la sphère publiqueSolange Lefebvre (dir.)

La réussite éducative des élèves issus de l’immigration. Dix ans d’interventions et de recherche au Québec

Marie Mc Andrew et le GRIÉS

Savoir entreprendre – Douze modèles de réussite. Études de cas

Louis Jacques Filion

Séduire par les mots – Pour des communications publiques efficaces

Jean Dumas

La sociocriminologieStéphane Leman-Langlois

Statistiques – Concepts et applicationsRobert R. Haccoun et Denis Cousineau

T-ZTéléréalité – Quand la réalité est un mensonge

Luc Dupont

Les temps du paysageP. Poullaouec-Gonidec, S. Paquette et G. Domon (dir.)

La terminologie : principes et techniquesMarie-Claude L’Homme

Théories de la politique étrangère américaine – Auteurs, concepts et approches

Charles-Philippe David (dir.)

Traité de criminologie empiriqueM. Le Blanc et M. Cusson (dir.)

L’univers social des adolescentsMichel Claes

Violences au travail – Diagnostic et prévention

F. Courcy, A. Savoie et L. Brunet (dir.)

Les visages de la police – Pratiques et perceptions

Jean-Paul Brodeur

La vision et l’environnement de travailBenoît Frenette