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Anno XXIII n. 6- dicembre 2007 - Sped. a. p. - art. 2 - comma 20/c, Legge 662/96 - Filiale di Asti - Organo ufficiale del Centro Librario Sodalitium - Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA (TO) Tel. +39.0161.839.335 - Fax +39.0161.839.334 - IN CASO DI MANCATO RECAPITO, RINVIARE ALLUFFICIO C.R.P. ASTI PER RESTITUZIONE AL MITTENTE CHE SI IMPEGNA A CORRISPONDERE LA RELATIVA TARIFFA N° 60 Numér Numér o Spécial o Spécial pour les cent ans de l’encyclique “Pascendi” pour les cent ans de l’encyclique “Pascendi” Les Catholiques Les Catholiques Intransigeants Intransigeants Tassa Riscossa - Taxe Perçue. ASTI CPO

Les Catholiques Intransigeants - Sodalitium

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Page 1: Les Catholiques Intransigeants - Sodalitium

Anno XXIII n. 6- dicembre 2007 - Sped. a. p. - art. 2 - comma 20/c, Legge 662/96 - Filiale di Asti - Organo ufficiale del Centro Librario Sodalitium -Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA (TO) Tel. +39.0161.839.335 - Fax +39.0161.839.334 - IINN CCAASSOO DDII MMAANNCCAATTOO RREECCAAPPIITTOO,, RRIINNVVIIAARREE

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NumérNuméro Spécialo Spécialpour les cent ans de l’encyclique “Pascendi”pour les cent ans de l’encyclique “Pascendi”

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ÉÉddiittoorriiaallÉÉddiittoorriiaallChers lecteurs, c’est en 1983 que pa-

raissait pour la première fois Sodali-tium. Combien de revues sont nées

pour disparaître peu après, spécialementlorsque les moyens manquent cruellement,ce qui est le cas pour nous ! Et pourtant,après toutes ces années nous pouvons direque Sodalitium dure encore, même s’il n’apas le mérite de la régularité. Jamais niquotidien ni hebdomadaire, voilà bienlongtemps qu’il n’est plus ni mensuel ni bi-mestriel.

Cette particularité de notre revue (peuimporte qu’elle soit voulue ou forcée) nelui permet pas de suivre les événements quise succèdent sans discontinuer ; elle donnecependant au bulletin la possibilité d’ap-profondir des sujets que la chronique nouscontraindrait autrement à laisser de côté :bulletin de formation, donc, et pas seule-ment d’information. Certains lecteurs nousreprochent de nous occuper souvent d’his-toire, bien qu’il s’agisse d’histoire de l’Égli-se. C’est qu’ils ne comprennent pas quedans notre histoire se trouve souvent, sinontoujours, l’explication du présent et l’an-nonce du futur.

Ce numéro de Sodalitium est un numérospécial, monothématique, qui pourra doncpassionner les uns et ennuyer les autres.Nous nous excusons auprès de ces derniers,et les invitons à attendre avec patience unautre numéro. En l’année du centenaire del’encyclique contre le modernisme, Pascendidominici gregis (8 septembre 1907), le pré-sent numéro est dédié au mouvement catho-lique. Autrement dit, nous voulons rendrehommage à qui nous a précédés dans lecombat (de plume plus que d’épée) contreceux que Mgr Benigni (et saint Pie X) appe-laient les “ennemis internes et externes” del’Église, et en faveur du Règne (Règne so-cial compris) du Christ-Roi.

Antonio Socci rappelait récemment quela tâche de l’Église consiste plus à sanctifierqu’à civiliser. Nous pouvons souscrire, àcondition de ne pas opposer sanctification etcivilisation. La fin de l’Église est bien sûréminemment spirituelle et surnaturelle :gloire de Dieu, salut et sanctification desâmes. Mais, d’une part, cette fin sera plus fa-cilement atteinte par le plus grand nombre sila société temporelle favorise l’action salva-trice de l’Église et, d’autre part, l’Évangélisa-tion par l’Église ne peut pas ne pas mener àla naissance d’une civilisation chrétienne,d’une Chrétienté qui tout en n’étant pas sansdéfauts ici-bas, s’efforce cependant de recon-

“Sodalitium” Periodicon° 60, Anno XXIII n. 6 2007

Editore Centro Librario Sodalitium

Loc. Carbignano, 36. 10020 VERRUA SAVOIA TOTel.: 0161.839335 Fax: 0161.839334 - CCP 36390334

INTERNET: www.sodalitium.it - email: [email protected] -

Direttore Responsabile don Francesco RicossaAutorizz. Tribunale di Ivrea n. 116 del 24-2-84

Stampa: - Ages Torino. Le présent numéro

a été achevé de rédiger le 6/11/2007

Ai sensi della Legge 675/96 sulla tutela dei dati personali, i datiforniti dai sottoscrittori degli abbonamenti verranno trattati informa cartacea ed automatizzata e saranno utilizzati esclusiva-mento per invio del giornale oggetto di abbonamento o di altrenostre testate come copie saggio e non verranno comunicate asoggetti terzi. Il conferimento dei dati è facoltativo ed è possibileesercitare i diritti di cui all’articolo 13 facendone richiesta alresponsabile trattamento dati: Centro Librario Sodalitium.

En couverture : portraits des principaux protago-nistes, ecclésiastiques et laïcs, du mouvementcatholique

Éditorial p. 2Programme du Sodalitium Pianum p. 7Album de famille du mouvement catholique en Italie (1870-1914) p. 9Les catholiques intégraux en France p. 27Fede e ragione p. 35Vie de l’Institut en images p. 45

✍✍ Sommaire

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naître à tous les niveaux de la société laroyauté de Jésus-Christ. “Il fut un temps –enseigne Léon XIII dans son encyclique Im-mortale Dei – où la philosophie de l’Évangilegouvernait les États. À cette époque, l’influen-ce de la sagesse chrétienne et sa divine vertupénétraient les lois, les institutions, les mœursdes peuples, tous les rangs et tous les rapportsde la société civile. Alors la religion instituéepar Jésus-Christ, solidement établie dans ledegré de dignité qui lui est dû, était partoutflorissante, grâce à la faveur des princes et àla protection légitime des magistrats. Alors lesacerdoce et l’empire étaient liés entre eux parune heureuse concorde et l’amical échange debons offices. Organisée de la sorte, la sociétécivile donna des fruits supérieurs à toute at-tente, dont la mémoire subsiste et subsisteraconsignée qu’elle est dans d’innombrablesdocuments que nul artifice des adversaires nepourra corrompre ou obscurcir”. Dans ‘No-tre charge apostolique’, saint Pie X écrivait :“Non, vénérables Frères - il faut le rappelerénergiquement dans ces temps d’anarchie so-ciale et intellectuelle, où chacun se pose endocteur et législateur - on ne bâtira pas la citéautrement que Dieu ne l’a bâtie ; on n’édifie-ra pas la société, si l’Église n’en jette les baseset ne dirige les travaux ; non, la civilisationn’est plus à inventer ni la cité nouvelle à bâtirdans les nuées. Elle a été, elle est ; c’est la ci-vilisation chrétienne, c’est la cité catholique. Ilne s’agit que de l’instaurer et la restaurer sanscesse sur ses fondements naturels et divinscontre les attaques toujours renaissantes del’utopie malsaine, de la révolte et de l’impiété :Omnia instaurare in Christo”. Le chef-d’œu-vre de Mgr Benigni (fondateur du Sodali-tium Pianum), Histoire sociale de l’Église(Vallardi, Milan, VII Vol., 1906-1933)illustre cette influence sociale de l’Église desa naissance jusqu’à la fin du Moyen Âge endes pages que tout militant catholiquedevrait avoir lues.

Nous ne pouvons pas, en ces quelquespages, nous arrêter sur ces temps glorieuxqui ont vu l’arbre de l’Église croître et se ra-mifier jusqu’à son apogée au XIIIème siècle,ni même esquisser la lutte que l’Église elle-même entreprit dès le XIVème siècle contredes ennemis toujours plus aguerris qui, endétruisant la société chrétienne, comptaientet comptent toujours (consciemment ounon) mener les âmes à la perdition. Dans cenuméro et en hommage à saint Pie X, nous

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nous bornerons à évoquer quelques-uns deses contemporains qui ont défendu la véritéà visage découvert.

Les brèves notices biographiques rédi-gées par l’abbé Carandino pour nos lec-teurs – afin de les inciter à approfondir lesujet – sont donc limitées : quant au temps,à cette période qui couvre à peu près lespontificats de Pie IX, Léon XIII, et saintPie X ; et quant au lieu, surtout à ce pays,l’Italie, que la divine Providence a vouluecomme siège du Vicaire du Christ et de sonÉglise, et qui a subi cependant, précisémenten cette période, cette violente attaquecommencée avec le soi-disant risorgimentoitalien. Risorgimento qui fut au contraireanti-italien parce qu’anti-catholique etpoint de départ de ce processus de déchris-tianisation ou d’apostasie de ce pays quidure encore aujourd’hui.

Il ne s’agit donc pas seulement d’his-toire, d’une histoire plus ou moins poussié-reuse ; le combat d’aujourd’hui n’est en ef-fet que la poursuite de celui d’hier.

Dans cette situation, deux générationsde catholiques se levèrent pour défendrel’Église. Autour de Pie IX et de Léon XIII,les “catholiques catholiques” furent dits“intransigeants” en Italie, “ultramontains”en France. “Catholiques, catholiques”, dis-je, car ils étaient seulement et uniquementcatholiques : ni catholiques libéraux, ni ca-

La châsse contenant le corps de saint Pie X vénérée surl’autel papal à Saint-Pierre à l’occasion de sa

canonisation (30 mai 1954)

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tholiques démocrates, ni catholiques socia-listes, ni catholiques nationalistes. Lorsqueles constitutions ou les législations desÉtats devinrent laïques (autrement ditathées de fait), lorsque la brèche de PortaPia et la prise de Rome eurent détruit ledernier État vraiment catholique qui étaitaussi l’État catholique par excellence, lescatholiques se trouvèrent dans une situa-tion inédite. Ce n’était plus la croix mais laFranc-Maçonnerie qui triomphait, et le mi-litant catholique était par le fait mêmeconsidéré par l’État comme subversif, etce, non seulement dans les pays infidèlesou protestants, mais aussi dans les pays quipouvaient se vanter de posséder une tradi-tion catholique bimillénaire, et une popula-tion quasi intégralement catholique.

Il faut le dire et le rappeler : qui est-cequi réorganisa le mouvement catholique,qui donna naissance à l’action catholique,qui fonda et diffusa la presse catholique,les banques populaires et une myriaded’œuvres sociales ? Ce ne furent pas lescatholiques libéraux, ni les catholiques dé-mocrates, ni les catholiques modérés ettransigeants ; ce furent par contre les véri-tables catholiques intransigeants, les catho-liques du Syllabus, les adversaires résolusde la révolution : c’est-à-dire ceux qui au-jourd’hui sont totalement exclus et mis enmarge du mouvement qui se dit (ou sedisait) catholique.

Deux périodes seront donc examinées.La première va plus ou moins de 1864 avecla publication du Syllabus, ou “somme desprincipales erreurs de notre temps”, jus-qu’à la fin du pontificat de Léon XIII(1903). C’est l’époque de l’intransigeanceet de la “Question romaine”, de la lutte del’Église contre l’État libéral bien vite domi-né par la Franc-Maçonnerie. La dernièreproposition condamnée par le Syllabusprésente – a contrario – le programme deces catholiques : “Le Pontife Romain NEpeut et NE doit PAS se réconcilier ettransiger avec le progrès, le libéralisme et lacivilisation moderne”. Tel est le résumé duprogramme intransigeant. Le 17 septembre1867, à Bologne, naissait l’œuvre de MarioFani et Giovanni Acquaderni, la “Societàdella Gioventù Cattolica Italiana” (GCI)[Société de la Jeunesse Catholique Italien-ne] avec pour devise “preghiera, azione, sa-crificio” [prière, action, sacrifice]. La date

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de la fondation n’est pas un hasard : c’estcelle de l’anniversaire de la bataille de Cas-telfidardo, où, en 1860, près de Lorette, lestroupes pontificales affrontèrent les trou-pes italiennes ; ce fut une défaite, il estvrai, mais aussi le début de cette “croisade”qui vit des volontaires du monde entier (et,in primis, des Français et des Italiens) pren-dre les armes pour l’Église et le Pape. Ungrand nombre d’entre eux (comme Fani, ci-té plus haut ou, en 1870, Sacchetti) serontparmi les protagonistes du premier mouve-ment catholique. C’est la Gioventù Cattoli-ca Italiana qui, en 1874, après la chute deRome, organisa à Venise le premierCongresso Cattolico Italiano. Bien vite,sous la conduite de Paganuzzi, se constituaune véritable Opera dei Congressi [Œuvredes Congrès] qui fut de 1874 à 1904 l’âmedu Catholicisme intransigeant. Un catholi-cisme qui, contrairement aux temps de laRestauration, ne pouvait compter sur l’ap-pui des gouvernements (pas même dequelques-uns), mais qui avait l’avantage,sur les catholiques de la Restauration affai-blis par le fidéisme “traditionaliste”, de laredécouverte voulue par Léon XIII, de laphilosophie et de la théologie de saint Tho-mas d’Aquin. C’est Léon XIII toujours quipointa le doigt sur l’ennemi : le Judaïsmeet la Franc-Maçonnerie, et qui, aux Socia-lisme et Communisme naissants (déjàcondamnés dès leur naissance par Pie IXen 1849) opposa – toujours dans la ligne desaint Thomas – les principes sociaux catho-liques. Au Congrès de Milan de l’année1897, Mgr Jacopo Scotton put exposer,dans le rapport sur la situation de l’Œuvre,qu’en un an seulement, avaient été fondés1 830 nouveaux Comités paroissiaux, 310sections de jeunes, 160 nouvelles caisses ru-

Paolo Prodi, frère de Romano, et Gustavo Raffi, grandmaître de la Franc-Maçonnerie

Page 5: Les Catholiques Intransigeants - Sodalitium

rales, 223 nouvelles Sociétés ouvrières, 33périodiques et 16 cercles universitaires : unvéritable “contre-état” catholique qui nepouvait pas être sans préoccuper la minori-té maçonnique au gouvernement. Larévolte de Milan en 1898 fournit au Gou-vernement (encouragé par les catholiques“libéraux” et transigeants) le prétexte pourimpliquer le mouvement catholique dans larépression antisocialiste. Mais ce ne sontpas les répressions judiciaire et policièrequi mirent fin à la période de l’intransi-geance catholique ; c’est l’apparition ausein même du mouvement d’une déviationappliquant dans le domaine politique et so-cial la mentalité qui devait chercher bientôtà détruire l’orthodoxie religieuse elle-mê-me avec le modernisme. Le modernisme –cloaque de toutes les hérésies – voulait etveut encore aujourd’hui réformer le catho-licisme et la foi en les conciliant avec lemonde et la philosophie moderne subjecti-viste : “de nos jours – disaient-ils – le ca-tholicisme ne pourra être d’accord avec lavraie science s’il ne se transforme pas en unchristianisme adogmatique, c’est-à-dire enun protestantisme latitudinaire et libéral”.Ce n’était donc plus seulement la sociététemporelle que les catholiques avaient àdéfendre, mais la société spirituelle elle-

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même. L’encyclique Pascendi (1907) et ledécret Lamentabili seront le nouveau Syl-labus, le nouveau guide de ces catholiquesintégralement tels, et qualifiés pour cela duterme méprisant d’“intégristes”. On ne doitpas cependant considérer, comme certainsl’ont fait, que les catholiques intégraux ontdéjà battu en retraite par rapport à la géné-ration précédente, ces catholiques se désin-téressant du règne social du Christ pour selimiter (se limiter!) à la défense du Dogme.Le démenti se trouve déjà dans le pro-gramme du Sodalitium Pianum que le lec-teur trouvera dans ce numéro. Ce sont lesmêmes hommes qui luttèrent à l’époque del’intransigeance, et, au siècle suivant, dé-fendirent l’intégrité de la foi : nous trouve-rons alors côte à côte des représentants des“anciens” (Paganuzzi, Sacchetti, et surtoutles Scotton) et des “jeunes” (Medolago Al-bani, de Töth, Benigni), d’abord divisés parune sensibilité différente, mais désormaisunis contre le modernisme. Le modernismereligieux, certainement, mais aussi le Mo-dernisme social de l’abbé Murri (qui dansle célèbre discours de Saint-Marin uniradéfense du Modernisme religieux etdéfense de sa démocratie chrétienne) qui,en 1904, amena saint Pie X à supprimerl’Œuvre des Congrès dont le président,Grosoli, était alors un sympathisant del’abbé Murri. Le programme des catho-liques intégraux, et le nôtre encore au-jourd’hui, était celui du dernier Saint Pa-pe : “tout restaurer dans le Christ”. À ceprogramme s’opposa en 1919 le Partito Po-polare naissant (PPI), parti des héritiers del’abbé Murri (entre-temps excommunié ettombé dans l’apostasie). Le parti de l’abbéSturzo rassemblait catholiques libéraux etcatholiques socialistes ou démocrates (lesdeux âmes du parti qui se retrouverontdans la Démocratie Chrétienne avec DeGasperi et Dosseti) mais pas de “catho-liques catholiques”, autrement dit de ca-tholiques intégraux et intransigeants (latentative de catholiciser le Partito Popolareavec l’aile “droite” échoua dans les années20) : le “dogme” des popolari et des démo-crates-chrétiens était l’aconfessionalisme :le parti des catholiques ne pouvait ni êtreni se dire confessionnel, c’est-à-dire catho-lique ! Le Fascisme et le Concordat de1929 balayèrent – pour ainsi dire – tant lespopolari que le souvenir de la “Question

Le prêtre apostat Romolo Murri, père de la “Démocratie Chrétienne”

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romaine”. L’année 1929 vit aussi la cessa-tion des publications de la revue qui avaitmaintenu les positions catholiques intégra-les de Mgr Benigni et de l’abbé de Töth,Fede e Ragione [Foi et Raison] dont le pro-gramme est publié ci-après. Avec l’après-guerre, on eut sur le siège de Pierre un Pa-pe, Pie XII, qui canonisa en un certain sensle catholicisme intégral en canonisant saintPie X (1954), canonisation fortement vou-lue malgré l’objection du soutien justementapporté par ce Pape à l’“intégrisme” et auSodalitium Pianum (lire la défense de l’ac-tion antimoderniste de saint Pie X et du So-dalitium par la Congrégation des Rites, ré-cemment réimprimée en italien par notreCentre libraire et publiée en français parles éditions du Courrier de Rome) ; maison vit aussi le mouvement catholique entreles mains de la Démocratie Chrétiennecondamnée à travers l’abbé Murri et, enFrance à travers Marc Sangnier et le“Sillon”. C’est à elle que nous devons, enItalie, le refus d’insérer dans la Constitu-tion le nom de Dieu et l’indissolubilité dumariage (1948) ; à elle que nous devonsl’acceptation de la souveraineté populaire ;à elle que nous devons, sous De Gasperi,l’alliance avec les laïcistes et, sous Moro,l’alliance avec la gauche; à elle encore quenous devons les lois sur le divorce et l’avor-tement, toutes signées par des présidents,des chefs du gouvernement et des ministresdémocrates-chrétiens, et de nos jours leprojet de loi sur les DICO [équivalent ita-lien du PACS] promu par les représentantsdu “monde catholique” comme Prodi etBindi… Avec la déclaration Dignitatis hu-manæ personæ (1965) définie par JosephRatzinger lui-même comme une sorted’anti-Syllabus, Vatican II a accepté lesprincipes de liberté de religion, de culte etde conscience qui nient radicalement laroyauté du Christ. Comment s’étonneralors de voir un représentant important dumonde catholique, le professeur Paolo Pro-di, frère de l’actuel président du Conseilitalien, faire l’éloge du rôle de la Secte dansune relation envoyée le 16 septembre 2006(cf. Hiram, revue du G.O.I. [Grand Orientd’Italie], n° 4/2006) au congrès sur “Laquestion laïque dans l’Italie d’aujourd’hui”réuni [l’an passé] par le Grand Maître duGrand Orient d’Italie, Gustavo Raffi, àl’occasion de l’Équinoxe de septembre, et

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Romano Prodi lui-même, chef du gouver-nement, revendiquer la laïcité et approuverla séparation absolue de l’Église et del’État défendue en son temps par le prési-dent Kennedy (La Stampa, 11 et 13 mai2007). Ce sont des faits emblématiques. Latrahison de l’apostat Murri s’est réaliséeparfaitement jusque dans ses ultimes consé-quences !

Ce numéro de Sodalitium veut renouve-ler le programme de saint Pie X : tout res-taurer dans le Christ.

Aux lecteurs catholiques de notre revuenous voulions rappeler le glorieux passéafin qu’ils s’emploient, aujourd’hui, à re-prendre la bannière du Christ-Roi et nondes bannières ambiguës qui ne nous appar-tiennent pas.

Pour les jeunes de l’Action catholiqueou des mouvements, comme on dit, nésaprès le Concile, ces pages pourraient êtreun moyen de redécouvrir leurs véritablesorigines et prendre conscience du fait quel’actuel mouvement catholique est passé àl’ennemi.

Aux jeunes qui se croient en révoltecontre le monde moderne, mais suivent desmaîtres issus en réalité des Loges maçon-niques qui ont fait ce monde moderne,peut-être parce que de l’Église et du catho-licisme ils ne voient que des contrefaçons etdes ruines, nous proposons ces pages pourqu’ils découvrent dans la Tradition catho-lique la seule et unique vraie Tradition.

À nous, rédacteurs de Sodalitium, re-vient la satisfaction d’avoir rendu hommageà saint Pie X et à ceux qui se sont battus àses côtés pour le Christ-Roi, pour son Égliseet pour la Chrétienté, conscients qu’il nes’agit pas de batailles d’un passé poussié-reux, mais d’un combat à mener encore au-jourd’hui avec nos pauvres moyens, certes,mais aussi avec l’aide de Dieu. Nous, nousn’avons pas changé de drapeau !

Exurge Domine, et judica causam tuam !

Page 7: Les Catholiques Intransigeants - Sodalitium

Programme duSodalitium Pianum

Nous publions le programme du SodalitiumPianum, approuvé et encouragé par le Saint-

Siège (Rescrits Autographes de S. S. Pie X, du 5juillet 1911 et du 8 juillet 1912 ; Lettre de la S.Congrégation Consistoriale, du 25 février 1913).

1 - Nous sommes des Catholiques-Ro-mains intégraux. Comme ce mot l’indique,le Catholique-Romain intégral accepte in-tégralement la doctrine, la discipline, les di-rections du Saint-Siège et toutes leursconséquences légitimes pour l’individu etpour la société. Il est « papiste », clérical,antimoderniste, antilibéral, antisectaire.Donc il est intégralement contre-révolu-tionnaire, parce qu’il est l’adversaire nonseulement de la Révolution jacobine et duradicalisme sectaire, mais également du li-béralisme religieux et social. Il reste abso-lument entendu qu’en disant « Catholique-Romain intégral » on n’entend point modi-fier d’une façon quelconque le titre authen-tique et glorieux de « Catholique-Ro-main ». Le mot « intégral » signifie seule-ment « intégralement Catholique-Ro-main », c’est-à-dire pleinement et simple-ment Catholique-Romain sans les additionsou les restrictions correspondant (même endehors de l’intention de ceux qui les em-ploient) tant aux expressions de « catho-lique libéral », « catholique social » et detoute autre semblable, qu’au fait de ceuxqui tendent à restreindre en théorie ou enpratique l’application des droits de l’Égliseet des devoirs du catholique dans la vie reli-gieuse et sociale.

2 - Nous luttons pour le principe et pourle fait de l’Autorité, de la Tradition, de l’Or-dre religieux et social dans le sens catholiquede ces mots et dans ses déductions logiques.

3 - Nous considérons comme des plaiesdans le corps humain de l’Église, l’esprit etle fait du libéralisme et du démocratismesoi-disant catholiques, aussi bien que dumodernisme intellectuel et pratique, radicalou modéré, avec leurs conséquences.

4 - Dans le cas pratique de la disciplinecatholique, nous vénérons et suivons les

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Évêques placés par le Saint-Esprit pourgouverner l’Église de Dieu sous la directionet le contrôle du Vicaire de Jésus-Christ,avec lequel nous voulons être toujours,avant et malgré tout.

5 - La nature de l’Église catholique nousenseigne, et son histoire nous le confirme,que le Saint-Siège est le centre vital du ca-tholicisme ; pour cela même, à un certainpoint de vue et surtout à raison de certainescirconstances, l’attitude momentanée duSaint-Siège est aussi la résultante de la si-tuation religieuse et sociale. Ainsi nouscomprenons pleinement que Rome puissequelquefois se taire et attendre, à cause dela situation elle-même, telle qu’elle se pré-sente à ce moment-là. En de tels cas nousnous garderons bien d’en prendre prétextepour rester inactifs devant les dommages etles dangers de la situation. Dès que, danschaque cas, nous avons compris et contrôléd’une façon sûre la réalité des choses, nousagissons de la meilleure manière possiblepour parer à ces dommages et à ces dan-gers, toujours et partout selon la volonté etle désir du Pape.

6 - Dans notre observation et dans notreaction nous nous plaçons surtout au point devue « catholique », c’est-à-dire universel, -soit dans le temps, à travers les différents

Documents

Mgr Umberto Benigni, fondateur du Sodalitium Pianum

Page 8: Les Catholiques Intransigeants - Sodalitium

moments historiques, - soit dans l’espace, àtravers tous les pays. Nous savons que, dansles contingences momentanées et locales, ily a toujours, au moins dans le fond, la lutteséculaire et cosmopolite entre les deux gran-des forces organiques : d’un côté l’uniqueÉglise de Dieu, Catholique-Romaine, del’autre côté les adversaires du dehors et dudedans. Ceux du dehors (les sectes judéo-maçonniques et leurs alliés directs) sontdans les mains du pouvoir central de la Secte; ceux du dedans (modernistes, démo-libé-raux, etc.) lui servent d’instrument conscientou inconscient d’infiltration et de décompo-sition parmi les catholiques.

7 - Nous combattons la Secte du dedanset du dehors, toujours et partout, sous tou-tes ses formes, par tous les moyens honnê-tes et opportuns. Dans les personnes dessectaires du dedans et du dehors et de leurscomplices, nous combattons seulement laréalisation concrète de la Secte, de sa vie,de son action, de ses plans. Cela, nous en-tendons le faire sans rancune envers nosfrères égarés, comme aussi sans aucune fai-blesse et sans aucune équivoque, commeun bon soldat traite sur le champ de ba-taille tous ceux qui combattent sous le dra-peau ennemi, leurs aides et leurs complices.

8 - Nous sommes pleinement :contre toute tentative d’amoindrir, de

rendre secondaires, de dissimuler systéma-tiquement les revendications papales pourla “Question Romaine”, d’écarter l’influen-ce sociale de la Papauté, de faire dominerle laïcisme ;

pour la revendication inlassable de la“Question Romaine” selon les droits et lesdirections du Saint-Siège, et pour un effortcontinuel en vue de ramener, le plus possi-ble, la vie sociale sous l’influence légitimeet bienfaisante de la Papauté et, en général,de l’Église catholique ;

9 - contre l’interconfessionalisme, le neu-tralisme et le minimalisme religieux dansl’organisation et l’action sociales, dans l’en-seignement, aussi bien que dans toute activi-té de l’homme individuel et de l’homme col-lectif, laquelle relève de la vraie morale,donc de la vraie religion, donc de l’Église ;

pour la confessionalité dans tous les casprévus dans l’alinéa précédent ; et si, dansdes cas exceptionnels et transitoires, leSaint-Siège tolère des réunions interconfes-sionnelles, pour une application conscien-

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cieuse et contrôlée de cette tolérance ex-ceptionnelle, et pour sa durée et son exten-sion le plus possible restreintes, selon lesintentions du Saint-Siège ;

10 - contre le syndicalisme ouvertementou implicitement « areligieux », neutre,amoral, qui amène fatalement la lutte anti-chrétienne des classes selon la loi brutaledu plus fort ; contre le démocratisme,même quand il s’appelle chrétien, mais tou-jours plus ou moins empoisonné des idéeset des faits démagogiques ; contre le libé-ralisme, même quand il s’appelle économi-co-social, qui pousse par son individualismeà la désagrégation sociale ;

- pour l’harmonie chrétienne des classesentre elles, aussi bien qu’entre l’individu, laclasse et la société entière ; pour l’organi-sation corporative de la société chrétienne,selon les principes et les traditions de justi-ce et de charité sociale, enseignés et vécuspar l’Église et le monde catholique pendantde longs siècles, et qui par conséquent sontparfaitement adaptables à toute époque età toute société vraiment civilisées ;

11 - contre le nationalisme païen, qui faitpendant au syndicalisme areligieux, l’unconsidérant les nations comme l’autre lesclasses, c’est-à-dire des collectivités dontchacune peut et doit pousser moralementses intérêts propres, complètement en de-hors et à l’encontre de ceux des autres, selonla loi brutale dont nous venons de parler ; eten même temps contre l’antimilitarisme et lepacifisme utopiste, exploités par la Sectedans le but d’affaiblir et d’endormir la socié-té sous le cauchemar judéo-maçonnique ;

pour le patriotisme sain et moral, pa-triotisme chrétien dont l’histoire de l’Églisecatholique nous a donné toujours desexemples splendides ;

12 - contre le féminisme qui exagère etdénature les droits et les devoirs de la fem-me, en les mettant au-dehors de la loi chré-tienne ; contre la coéducation des sexes ;contre l’initiation sexuelle de la jeunesse ;

pour l’amélioration des conditions ma-térielles et morales de la femme, de la jeu-nesse, de la famille, selon la doctrine et latradition catholiques ;

13 - contre la doctrine et contre le faitprofondément antichrétiens de la sépara-tion entre l’Église et l’État, aussi bienqu’entre la Religion et la civilisation, lascience, la littérature, l’art ;

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pour l’union loyale et cordiale de la civi-lisation, de la science, de la littérature, del’art aussi bien que de l’État avec la Reli-gion et donc avec l’Église ;

14 - contre l’enseignement philoso-phique, dogmatique et biblique « moderni-sé » qui, même quand il n’est pas tout à faitmoderniste, est tout au moins rendu pareilà un enseignement archéologique ou anato-mique, comme s’il ne s’agissait pas d’unedoctrine immortelle et vivificatrice que toutle clergé, sans exception, doit apprendresurtout pour son ministère sacerdotal ;

pour l’enseignement ecclésiastiqueinspiré et guidé par la glorieuse tradition dela Scolastique, des Saints Docteurs del’Église et des meilleurs théologiens dutemps de la Contre-Réforme, avec toutesles aides sérieuses de la méthode et de ladocumentation scientifiques ;

15 - contre le faux mysticisme à tendan-ces individualistes et illuministes ;

pour la vie spirituelle intense et profon-de, selon l’enseignement doctrinal et pra-tique des saints auteurs et des mystiquesloués par l’Église ;

16 - en général contre l’exploitation duclergé et de l’Action catholique par toutparti politique ou social ; et en particuliercontre l’engouement « social », qu’on veutinoculer au clergé et à l’Action catholiquesous prétexte de « sortir de la sacristie »pour n’y entrer que trop rarement, ou encachette, ou tout au moins avec l’espritabsorbé par le reste ;

pour le maintien de l’action ecclésias-tique et respectivement de l’Action catho-lique dans son ensemble sur le terrain ou-vertement religieux, avant tout, et sans en-gouements « sociaux » ou semblables,pour le restant ;

17 - contre la manie ou la faiblesse detant de catholiques de vouloir paraître« conscients et évolués, vraiment de leurtemps », et « bons enfants » en face del’ennemi brutal ou hypocrite mais toujoursimplacable, - tout prêts à étaler leur tolé-rance, à rougir, sinon à médire, des actes dejuste rigueur accomplis par l’Église ou pourelle, - tout prêts à un optimisme systéma-tique envers les pièges de l’adversaire, etréservant leurs méfiances et leurs duretéspour les Catholiques-Romains intégraux ;

pour une attitude juste et convenable,mais toujours franche, énergique et inlas-

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sable vis-à-vis de l’ennemi, de ses violen-ces, de ses ruses ;

18 - contre tout ce qui est opposé à ladoctrine, à la tradition, à la discipline, ausentiment du Catholicisme intégralementRomain ;

pour tout ce qui leur est conforme.

Album de familledu mouvement catholique en

Italie (1870-1914)

Nous présentons aux lecteurs l’albumde famille du mouvement catholiqueen Italie, avec les profils biogra-

phiques et les photos de ses principaux pro-tagonistes. C’est à travers eux qu’en ce cen-tenaire de l’encyclique Pascendi, nous vou-lons rendre hommage à tous les catholiquesqui, en Italie et dans le monde, défendirentavec zèle la Foi et les droits de l’Église.Pour la compilation de ces notices voiciquelles ont été les principales sources : lesrubriques de l’Enciclopedia Cattolica ;Émile Poulat, Intégrisme et catholicisme in-tégral (Casterman, 1969) ; Marco Inverniz-zi, I cattolici contro l’unità d’Italia ? [Lescatholiques contre l’unité de l’Italie ?](Piemme, 2002).

Les Papes

Les catholiques intransigeants (durant lespontificats de Pie IX et de Léon XIII),

et intégraux (sous saint Pie X) se caractéri-saient par l’adhésion complète au magistèreet aux directives des Papes. La tâche entre-prise était double : défendre l’orthodoxiecatholique et réaliser toute une série d’œu-vres (quotidiens, revues, écoles, cercles uni-versitaires, coopératives, caisses rurales, so-ciétés de secours mutuel, etc.) capables desauvegarder la vie chrétienne des catho-liques dans une société désormais déchris-tianisée. Le mouvement catholique fut doncl’un des fruits de l’enseignement et du gou-vernement des trois Papes qui se succédè-rent sur le Trône de Pierre en ces années-là.

Le triptyque des Papes de cette époquecommence avec Giovanni Maria MastaiFerretti, né à Senigallia le 13 mai 1792 etélu Pape le 16 juin 1846 sous le nom de Pie

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IX. C’est durant l’époque tourmentée de larévolution italienne que régna Pie IX ; ré-volution inspirée par la Franc-Maçonnerieinternationale qui, avec l’occupation deRome, mettait fin au pouvoir temporel desPapes et instaurait un État fortement anti-clérical. Dans sa première encyclique Quipluribus (9/11/1846), Pie IX réitérait lescondamnations, faites par ses prédéces-seurs, des erreurs de l’époque (naturalisme,rationalisme, etc.) et des sectes secrètes. Cesont précisément ces sentences pontificalesrépétées qui animèrent l’action des catho-liques. La diffusion des erreurs du libéra-lisme poussa Pie IX à promulguer le8/12/1864 l’encyclique Quanta cura à la-quelle était jointe une liste de 80 proposi-tions déjà condamnées (Syllabus). Lesconstitutions dogmatiques du Concile Vati-can I, Dei Filius du 24/4/1870 et Pastoræternus du 18/7/1870, réaffirmaient la véri-té relative à la Foi catholique et à l’Églisedu Christ. Après la brèche de Porta Pia,avec l’encyclique Respicientes ea omnia(1/11/1870), il protesta contre la prise deRome et considéra le Siège Apostoliquecomme prisonnier de fait. Avec l’ency-clique Ubi nos (1871), il condamna la “loides Garanties” proposée par le gouverne-

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ment italien : c’est ainsi que s’ouvrit la“Question romaine”, qui détermina l’af-frontement entre temporalistes intran-sigeants et conciliatioristes, liés par contreau catholicisme libéral. Par un Bref du2/5/1868 (Dum filii Belial), Pie IX approu-vait la “Società della Gioventù Cattolicaitaliana” [Société de la jeunesse catholiqueitalienne], précurseur des organisations dumouvement catholique et à plusieurs repri-ses il bénit et encouragea l’Œuvre desCongrès. À l’adresse des GCI [GiovanniCattolici italiani] [Jeunes catholiques ita-liens], Pie IX le 29/1/1877 promulguait le“non expedit”, c’est-à-dire l’interdiction àtous les catholiques italiens de participeraux élections politiques. Le 7 février 1878,Pie IX mourait, au terme du plus long pon-tificat de l’histoire après celui de saintPierre. Les générations de catholiques quifurent formées par son magistère ne pou-vaient avoir de doute : l’ennemi à combat-tre était la nouvelle religion laïque profes-sée par les États nés des révolutions.

Le 20/2/1878, avec l’élection papale ducardinal Gioacchino Pecci, né le 2/3/1810 àCarpineto Romano, se concluait le concla-ve. Le nouveau Pape choisit le nom deLéon XIII. Avec sa première encyclique,Inscrutabili Dei concilio (21/4/1878), il re-prenait les protestations contre la spoliationde l’Église et le refus de la “loi des Garan-ties”, et durant tout son pontificat, il main-tint ferme le “non expedit” de Pie IX (ency-clique Etsi nos du 15/2/1882). Le magistèrede Léon XIII contre les erreurs moderneset la Maçonnerie fut monumental : ency-clique Diuturnum illud (29/6/1881) sur lesocialisme, le communisme et le nihilisme ;Humanum genus (20/4/1884) sur la Franc-Maçonnerie ; Immortale Dei (1/11/1885)sur la constitution chrétienne des États ;Libertas præstantissimum (20/6/1888) sur leconcept de liberté ; lettre aux Évêques ita-liens Inimica Vis (8/12/1892) encore sur lasecte maçonnique. Pour l’organisation dumouvement catholique, Léon XIII renou-vela l’approbation de l’Œuvre des Congrès.Il veilla en outre à l’orthodoxie du clergé :après l’apparition des premiers foyers demodernisme dans les séminaires, il promul-gua l’encyclique Æterni Patris (4/8/1879)qui désignait en saint Thomas le maître dela philosophie et de la théologie catholique.Suivit l’encyclique Providentissimus Deus

Le Pape Pie IX

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(18/11/1893) qui prenait position contrel’exégèse moderne. En outre, à la date du14/12/1887, le Saint-Office promulgua le dé-cret Post obitum qui condamnait 40 propo-sitions de l’abbé Antonio Rosmini-Serbatidont la pensée trouvait un terrain fertiledans les rangs du clergé libéral et concilia-riste. Mais les actes les plus importants pourle destin du mouvement catholique furentl’encyclique Rerum novarum (15/5/1891) etl’encyclique Graves de Communi(18/1/1901). Rerum novarum “sur la condi-tion des ouvriers” constitua, selon l’avis dePie XI, “la Grande charte sur laquelle doitreposer toute l’activité chrétienne dans le do-maine social”. C’était la réponse catholiqueaux maux dus à la révolution industrielle etaux dangers de la propagande socialiste au-près des classes ouvrières. Léon XIII mani-festait le jugement de l’Église sur le droit dela propriété privée, sur le rapport entrepourvoyeurs de travail et travailleurs, surles limites de l’intervention de l’État dans lasociété. Il montrait que la solution desconflits sociaux doit venir d’organisationsprofessionnelles libres et chrétiennes, sur lemodèle des corporations médiévales (à nepas confondre avec celles de l’État vouluesensuite par le Fascisme). Le mouvement ca-tholique se chargea d’actualiser le pro-gramme pontifical et organisa la série d’in-itiatives sociales dont nous avons déjà par-lé. Deux ans plus tard, avec l’encycliqueGraves de Communi, “charte de l’action descatholiques” (saint Pie X), Léon XIII reve-nait sur la question sociale et sur l’actionque devaient mener les catholiques. Ilcondamnait le “socialisme chrétien” et ac-ceptait le terme de “démocratie chrétien-ne”, mais uniquement dans un contexte so-cial et non politique : “Mais il serait

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condamnable de donner un sens politiqueau terme de démocratie chrétienne (…) il nefaut l’employer qu’en lui ôtant tout sens po-litique, et en ne lui attachant aucune autre si-gnification que celle d’une bienfaisante ac-tion chrétienne parmi le peuple”. Il rappelaitque l’Église est indifférente aux diversesformes de gouvernement et que par “démo-cratie chrétienne” on devait entendre uneaction populaire chrétienne basée sur ledroit naturel et sur les préceptes des Évan-giles. Il ne fallait pas confondre cette actionde l’Église au milieu du peuple avec le faitde vouloir faire de la “démocratie chrétien-ne” une faction politique considérant la dé-mocratie comme unique forme de gouver-nement légitime. Les démocrates-chrétiensde l’abbé Romolo Murri interprétèrent lesparoles de Léon XIII comme un encoura-gement, faisant dire au Pape le contraire dece qu’il avait dit. À l’intérieur de la direc-tion de l’Œuvre des Congrès les dissensionsallaient s’accentuant et l’augmentation dunombre des partisans de Murri fut un élé-ment de déstabilisation qui s’avéra fatal àl’Œuvre elle-même.

Léon XIII mourut le 20/7/1903 et c’estPie X qui lui succéda. Giuseppe Sarto né àRiese, dans la Marche trévisane le 2/6/1835,fut élu Pape le 4/8/1903. Si le magistère dePie IX et de Léon XIII avait été consacré àdéfendre la société contre la diffusion desprincipes erronés, saint Pie X dut affronterl’ennemi qui avait désormais pénétré l’Égli-se même. En effet, en à peine plus d’un siè-cle, les erreurs issues des cercles illuministeset des loges s’étaient répandues d’abordparmi les élites de la société, puis ellesavaient abattu les États catholiques et ins-tauré les États laïques antichrétiens, et enfins’étaient insinuées “dans les viscères mêmesde l’Église” (Pascendi). L’enseignement desaint Pie X fut donc consacré principale-ment à dénoncer et à combattre l’ennemiinterne de l’Église, le modernisme. Dans sapremière encyclique, E Supremi(4/10/1903), il rappelait les maux de l’épo-que et indiquait la solution : “Instaurareomnia in Christo”, paroles de saint Paulqu’il choisit pour devise de son pontificat.La composante intransigeante du mouve-ment catholique accueillit avec enthousias-me le programme de saint Pie X. Mais lacroissance constante des démocrates-chré-tiens de Murri à l’intérieur de l’Œuvre des

Le Pape Léon XIII

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Congrès et les incompréhensions désormaisirrémédiables entre les dirigeants de l’orga-nisation poussèrent le Pape à décréter ladissolution de l’Œuvre (6/7/1904), pour enconserver uniquement la section économi-co-sociale. Le 11/6/1905, avec l’encyclique Ilfermo proposito, saint Pie X voulut donneraux catholiques des consignes précises pourréorganiser, dans la pleine fidélité à l’Église,l’“action catholique” dans la société. L’abbéRomolo Murri et ses partisans contestèrentâprement le programme du Pape : le pèrede la démocratie chrétienne italienne futalors décrété suspens a divinis, puis excom-munié. La pensée de saint Pie X se manifes-ta à nouveau dans la lettre Notre chargeapostolique (5/8/1910), par laquelle ilcondamnait le modernisme social du“Sillon” de Marc Sangnier. À propos desdémocrates-chrétiens le Pape écrivait : “leSillon ne satisfait l’Église ni par son action nipar sa doctrine”. Dès 1907 et par une sériede documents, saint Pie X avait condamnél’aspect le plus grave du mal pénétré dansl’Église : le modernisme doctrinal. Toutd’abord fut promulgué le décret Lamentabi-li (3/7/1907), puis l’encyclique Pascendi Do-

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minici Gregis (8/9/1907), le Motu proprioPræstantia scripturæ (18/11/1907) et le Motuproprio Sacrorum antistitum (1/9/1910) parlequel fut institué le serment antimodernisteque Paul VI abolit après Vatican II. Dans cedernier document, saint Pie X écrivait à pro-pos des modernistes que : “Nous n’avonsplus à lutter, comme au début, avec des so-phistes avançant couverts de peaux de brebis,mais avec des ennemis déclarés et cruels, en-nemis du dedans qui, ayant fait un pacteavec les pires adversaires de l’Église, se pro-posent la destruction de la Foi. Nous parlonsde ces hommes qui, chaque jour, s’élèventaudacieusement contre la sagesse qui nousvient du ciel : ils s’arrogent le droit de la ré-former, comme si elle était corrompue ; ilsprétendent la renouveler, comme si le tempsl’avait rendue hors d’usage ; ils veulent enaugmenter le développement et l’adapter auxcaprices, aux progrès et aux commodités dusiècle, comme si elle était opposée non pas àla légèreté de quelques-uns, mais au bien mê-me de la société ”. Les catholiques intégrauxcomprirent l’analyse lucide de saint Pie X ets’organisèrent contre les “adversaires du de-hors et du dedans” de l’Église : “ceux dudehors (les sectes judéo-maçonniques et leursalliés directs) sont dans les mains du pouvoircentral de la Secte ; ceux du dedans (moder-nistes, démo-libéraux catholiques) lui serventd’instrument conscient ou inconscient d’infil-tration et de décomposition parmi les catho-liques” (extrait du programme du Sodali-tium Pianum).

Les cardinaux

Dans ce paragraphe nous devrions citerles noms des nombreux cardinaux qui servi-rent fidèlement l’Église durant la périodeque nous sommes en train d’examiner, àcommencer par le cardinal Giacomo Anto-nelli (1806-1876), Secrétaire d’État et figu-re prépondérante du règne de Pie IX. Nousnous limiterons cependant aux cardinauxindiqués par deux documents relatifs aupontificat de saint Pie X. Dans une noteconfidentielle de 1913, rédigée en prévisiondu futur conclave qui devait suivre la mortde saint Pie X (conclave qui se tint durantl’été 1914), Mgr Benigni donnait les nomsdes cardinaux qu’il considérait comme lesplus proches de l’action antimoderniste duPape de Riese. Parmi eux figuraient deux

Le Pape saint Pie X, grand adversaire des modernisteset protecteur des catholiques intégraux

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cardinaux qui reçurent le chapeau cardina-lice des mains de Léon XIII, et qui repré-sentaient donc la continuité entre les deuxpontificats : Vives y Tuto et Gennari. Y fi-guraient également les noms de cinq autrescardinaux créés par Pie X lui-même auconsistoire du 27 novembre 1911 : De Lai(dont nous parlerons par la suite), Du-billard, Nagl, Pompilj, Van Rossum.

Le cardinal José Calasanz Vives y Tuto(1854-1913), capucin, né à Llevaneras (dio-cèse de Barcelone) le 25 février 1854 étaitentré chez les Capucins de la province deGuatemala en 1869 ; suite à la Révolution,il fut exilé, et dut compléter ses études àSanta Clara en Californie. Envoyé en Fran-ce, il y fut ordonné prêtre en 1887. Appelé àRome par Léon XIII, auquel il était très fi-dèle, il devint consulteur du Saint-Office(1887) et cardinal (1899). En 1908 il futnommé par le Pape Sarto Préfet de laCongrégation des religieux. Confesseur desaint Pie X, c’est à lui qu’on attribue la par-tie morale de l’encyclique Pascendi. Le car-dinal Casimiro Gennari, (1839-1914), deMaratea, est le fondateur (1876) de la revueIl monitore ecclesiastico. Évêque de Conver-sano (1881), consulteur du Saint-Office(1895), il fut créé cardinal au consistoire du15 avril 1901. En 1908 saint Pie X le nommaPréfet de la S. C. du Concile. Auteur denombreux écrits de caractère canonique, li-turgique et moral, le cardinal Gennari pro-mut avec saint Pie X la codification du droitcanonique et le décret sur la communion desenfants. Le cardinal François-Virgile Du-billard (1845-1914), de Soye en Franche-Comté, fut nommé par saint Pie X en 1907

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archevêque de Chambéry, en Savoie, et parla suite directeur général de la Ligue ProPontifice et Ecclesia. Le cardinal Franz Xa-vier Nagl (1855-1913), viennois, reçut du Pa-pe la charge d’archevêque de Vienne ; il futaussi conseiller de l’Empereur François-Jo-seph. Le cardinal Basilio Pompilj (1858-1931), de Spolète, fut d’abord Vicaire géné-ral de Rome, puis membre du Saint-Office.Le cardinal Willem Van Rossum (1854-1932), rédemptoriste hollandais, fut appelépar saint Pie X à la tête de la Commissionbiblique pontificale, puis il fut nommé parBenoît XV Préfet de la S. Congrégationpour la Propagande de la Foi.

Le Père Antonelli, postulateur de lacause de canonisation de saint Pie X, signa-lait également, dans la Disquisitio, parmi lescardinaux les plus proches du SodalitiumPianum, outre Vives y Tuto et Van Rossum,les cardinaux Gotti et Sevin. Le cardinal Gi-rolamo Maria Gotti (1834-1916), né à Gêneset baptisé sous le nom d’Antoine, reçut celuide Girolamo Maria dell’Immacolata à sonentrée chez les Carmes déchaux (1850).Théologien de son ordre au Concile VaticanI, il fut Maître général des Carmes. Préfet dela S. C. de Propaganda Fide, il fut un autreélément de conjonction entre Léon XIII(qui le créa cardinal en 1895) et le pontificatde saint Pie X. Le cardinal Hector-IrénéeSevin (1852-1916) était originaire de Belley ;saint Pie X le nomma archevêque de Lyonen 1912, puis le créa cardinal au consistoiredu 25 mai 1914 (son nom ne figure pas dansla liste de Mgr Benigni rédigée avant ceconsistoire). Dans les documents du procès,le Père Antonelli, donnait également lesnoms de deux cardinaux qui peuvent êtreconsidérés comme les plus représentatifs dece paragraphe dédié au Sacré Collège : les

Le cardinal José Ca-lasanz Vives y Tuto

(ci-dessus) et le cardi-nal Willem Van Ros-

sum (ci-contre)

Le cardinal GirolamoMaria Gotti

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cardinaux De Lai (déjà cité par Mgr Beni-gni) et Boggiani.

Le cardinal Gaetano De Lai, né à Malo,près de Vicence, le 26 juillet 1853, avait faitses études au Séminaire romain avantd’être ordonné prêtre le 16 avril 1876. Il futappelé dès lors à travailler à la S. Congré-gation du Concile ; quelques mois aprèsson élection au Siège de Pierre (1903), saintPie X le nommait pro-secrétaire d’abord,puis Préfet de cette même CongrégationConsistoriale et au consistoire du 16 dé-cembre 1903, il le créait cardinal diacre. Lecardinal De Lai demeuré Préfet de la S.Congrégation du Concile jusqu’en 1928, futpar conséquent au service de trois Ponti-fes : saint Pie X, Benoît XV et Pie XI. Il futaussi membre de la commission pour la ré-daction du Code de Droit Canon. Il reçut laconsécration épiscopale des mains du Papele 17 décembre 1911 à la chapelle Sixtine. Ilmourut le 24 octobre 1928 à l’âge de 75 anset fut enseveli au Verano à Rome. En 1929son corps fut transféré à Malo, sa ville nata-le, et inhumé dans l’ancienne paroisse deSanta Libera. Ce fut l’homme fort du ponti-ficat de saint Pie X, qu’il suivit avec convic-tion et dévouement dans le combat contrel’hérésie moderniste et ses partisans libé-raux. Aussi le précieux travail que faisaientles catholiques intégraux au service duSaint-Siège ne lui échappait-il pas :voyons-en quelques exemples. Dans unelettre à Mgr Andrea Scotton pris comme ci-ble par les libéraux à cause de ses écrits, lecardinal De Lai précisait que “même le zèlea ses défauts. Mais sans les approuver, on nepeut supprimer ou ne pas reconnaître le

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mérite du zèle et de l’action laborieuse pourla défense vigilante de la vérité et de la justi-ce. Soyez donc tranquille et poursuivez vot-re chemin avec force et courage” (Disquisi-tio, lettre du cardinal De Lai à Mgr AndreaScotton du 12/3/1911). Le cardinal Ferrari,archevêque de Milan, qui se distingua poursa condescendance vis-à-vis des modernis-tes (son action fut récompensée post-mor-tem, par Jean-Paul II qui le “béatifia” en1987) était avec le cardinal Maffi à la têtede la presse catholique libérale (ledit Trustde la “presse de pénétration”). Les tentati-ves de Ferrari pour censurer les journauxantimodernistes se brisèrent contre la réso-lution du cardinal De Lai qui le réprimandaainsi : “il vaut toujours mieux excéder unpeu à combattre le mal, que se taire et le lais-ser augmenter” (Disquisitio, lettre du cardi-nal De Lai au cardinal Ferrari du 9/1/1911).De Lai se prodigua particulièrement pourle Sodalitium Pianum (SP), l’expression laplus incisive de l’œuvre de Mgr Benigni.Grâce au cardinal De Lai, le SP obtint trois“Brefs” de saint Pie X, signe tangible del’approbation du travail de Benigni par lePape. Après la mort du Pontife, le change-ment de circonstances s’avéra fatal au SP,allant jusqu’à la dissolution décidée parMgr Benigni (22/8/1914). De Lai n’aban-donna pas l’ami de tant de combats et, enaoût 1915, il favorisa la reconstitution duSP avant sa dissolution définitive, écrivant :“j’ai confiance que cette association ainsi ré-tablie ne manquera pas d’être bénie par leSeigneur, puisqu’elle a sa gloire pour fin”(Disquisitio, lettre du cardinal De Lai àMgr Benigni du 5/8/1915). Nous pouvonsaffirmer que jusqu’à ce jour les historienscatholiques n’ont pas su (ou voulu savoir ?)dresser un tableau adéquat du rôle qu’eutle cardinal De Lai durant le pontificat desaint Pie X, rôle des plus incisifs par rap-port même à celui du pourtant fidèle cardi-nal Raffaele Merry del Val (1865-1930), Se-crétaire d’État du Pape Sarto.

Nous terminerons le chapitre “cardinali-ce” avec le cardinal Tommaso Pio Boggiani,né le 19 janvier 1863 à Bosco Marengo (Ales-sandria), village natal de saint Pie V. Boggia-ni fut très dévoué à la figure de son illustreconcitoyen, dont il suivit les traces en entrantau couvent dominicain de Bosco. Les nomsdes saint patrons qu’il choisit au moment dese consacrer dans l’Ordre des frères prê-

Le cardinalGaetano De Lai

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cheurs expriment son amour ardent pourl’orthodoxie catholique : saint Thomasd’Aquin, le grand théologien, et saint Pie V,le grand inquisiteur et Pape tridentin. Aprèsses études aux couvents dominicains de Chie-ri (Turin) et de Graz, en Styrie, il reçutdiverses charges : missionnaire à Constanti-nople, supérieur des dominicains de Raguse,professeur à la faculté de Philosophie deGraz, curé de Santa Maria di Castello à Gê-nes, puis professeur au séminaire diocésainde la cité ligurienne. Saint Pie X le nommaVisiteur apostolique dans vingt-trois diocèsesdu nord de l’Italie, parmi lesquels Milan, Bo-logne et Vérone, avec pour mandat le dé-mantèlement des foyers de modernisme.Dans les diocèses romagnoles, où s’étaient in-sinués un grand nombre de partisans des nou-velles doctrines, la visite inquisitoriale futparticulièrement pénible. En cette circons-tance l’action de Boggiani fut en partie ren-due vaine du fait d’un autre cardinal, Dome-nico Svampa (1851-1907), archevêque de Bo-logne et ancien évêque de Forli, qui faisaitpreuve d’une indulgence aussi obstinée qu’in-sensée envers les prêtres ayant embrassé lesidées modernistes. En 1908, le père Boggianifut nommé par saint Pie X évêque d’Adria (ily fut accueilli à coups de pierres) avant d’êtreappelé à la S. C. Consistoriale. Benoît XV lecréa cardinal. En 1919 le cardinal Boggianiétait promu archevêque de Gênes, mais ildonnera sa démission deux ans après sa no-mination à cause d’une forte opposition desdirigeants du Parti populaire qui apportèrentainsi la démonstration non seulement de leur

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aconfessionalisme mais aussi de leur anticléri-calisme. Le parti de l’abbé Sturzo ne pardon-na pas à Boggiani la lettre pastorale de 1920,L’azione cattolica e il Partito Popolare Italia-no [L’action catholique et le Parti populaireitalien] dans laquelle le cardinal dénonçait leserreurs et omissions relevées dans le pro-gramme du PPI, interdisait aux fidèles deprendre une part active à la vie du parti etinterdisait aux associations catholiques demettre des locaux à la disposition du PPIpour les réunions. Les catholiques intégrauxne manquèrent pas de soutenir le cardinalBoggiani : Mgr Benigni publia un dossier surla direction génoise du parti de l’abbé Sturzoet de l’abbé de Töth, à l’occasion du 50ème an-niversaire de la profession religieuse du frèreTommaso Pio, il écrivit en se référant auxdeux années liguriennes orageuses de ce der-nier, qu’“il en est peu parmi les évêques quilaissèrent en un temps si bref, une telle massede documents aussi remplis de sagesse et d’ex-périence” (Fede e Ragione du 22-29/9/1929).En 1927 Pie XI le choisissait comme légat pa-pal au Congrès eucharistique de Bologne eten 1935 il le nommait Chancelier de la SainteÉglise romaine, charge qu’il conserva jusqu’àsa mort survenue à Rome le 26 février 1942.Son corps repose dans l’église paroissiale deBosco Marengo, petite localité où Boggianifit édifier un monument en l’honneur de saintPie V, monument inauguré en 1936.

Les évêques

La liste des évêques qui mériteraient defigurer dans notre “album de famille” estabsolument impossible à dresser. Il faudraitnommer par exemple tous les prélats qui,après l’unité de l’Italie, subirent les vexa-tions du gouvernement anticlérical, la pri-son, l’exil (comme beaucoup d’évêques desdiocèses de l’ex-royaume bourbon oucomme Mgr Fransoni, archevêque de Tu-rin, qui mourut en exil à Lyon) ou bien fu-rent empêchés de prendre possession deleur siège épiscopal. Ou encore les nom-breux évêques qui, durant la répression de1898, subirent des vexations de la part del’État et la dissolution de nombreuses orga-nisations catholiques existant dans leur dio-cèse. Comme pour les cardinaux, nous nouscontenterons de nommer quelques prélatsliés à l’action antimoderniste du SodalitiumPianum durant le pontificat de saint Pie X

Le cardinal Tommaso Pio Boggiani

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et indiqués par le Père Antonelli dans laDisquisitio.

Nous nous réfèrerons aux évêques sui-vants : Mgr Alfonso Archi (1864-1938), néà Faenza, consacré en 1901 (Comacchio),évêque de Côme de 1905 à 1925, puis ar-chevêque de Césène de 1927 jusqu’à samort ; Mgr Giovanni Volpi (1860-1931),évêque d’Arezzo de 1904 à 1919 ; MgrJacques Monastès (1856-1915), évêque deDijon de 1911 à 1915 ; Mgr Armand Saba-del (1850-1914), capucin sous le nom de Piede Langogne, évêque titulaire de Corinthe(1911), docte consulteur de diversesCongrégations de la Curie romaine ; MgrCaron, archevêque émérite de Gênes ;Mgr André Gilbert (1849-1914), évêque duMans (1894-1898) puis conseiller à laConsistoriale.

Du fait de sa sainteté, Mgr Volpi, auquelle prêtre Angelo Tafi a dédié une biographieimposante (Il servo di Dio Mons. GiovanniVolpi, Arezzo, 1981), mérite une note parti-culière. Don Orione écrivait de lui : “MgrVolpi recevra de la bonté du Seigneur nonseulement la couronne des Confesseurs, maisaussi celle des Martyrs”. Sa vie peut se diviseren trois périodes : d’abord à Lucques de sanaissance à 1904 ; puis à Arezzo de 1905 à1919 ; enfin à Rome de 1919 à 1931, date desa mort. Dans la première période, Volpi, or-donné en 1882, se distingue par la ferveur desa vie spirituelle, ainsi qu’en tant que confes-seur de sainte Gemma Galgani et de la bien-heureuse Elena Guerra, mais aussi comme

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fondateur et bienfaiteur de l’école du soirgratuite Matteo Civitali placée sous la direc-tion du Comte Cesare Sardi. En 1897, LéonXIII le nomme évêque auxiliaire de Lucques(l’archevêque étant malade) : pour LéonXIII Mgr Volpi était “l’un des plus saintsévêques italiens, si cher à notre cœur”, et mê-me, sans aucun doute “Votre Saint deLucques”. Il fut inscrit à la Ligue antimaçon-nique (1899) et à l’Œuvre des Congrès(1878), dans laquelle il soutint la ligne de Pa-ganuzzi, au point de conseiller à saint Pie Xde dissoudre l’Œuvre (ce qui fut fait) désor-mais infestée – à travers Grosoli – par les dé-mocrates-chrétiens de l’abbé Murri. SaintPie X le nomma évêque d’Arezzo, et de tousles évêques d’Italie c’est lui qui se montra leplus fidèle à mettre en pratique les directivesantimodernistes et anti-murriennes du Ponti-fe, purgeant le diocèse et le séminaire duclergé immoral ou moderniste. L’année 1914signa le début de ses douleurs avec la mortde saint Pie X et le déclenchement de laguerre. Fidèle aux directives de Benoît XVcontre “l’inutile massacre” et les exaltationspatriotardes, il fut accusé par la maçonnerielocale d’être “favorable à l’Autriche” (ilconnaissait l’Impératrice Zita depuisl’époque de Lucques). Après la guerre il ac-cueillit dans son diocèse l’abbé GiovanniBoccardo (1877-1956), prêtre du Sodalitium,ancien directeur de la Liguria del Popolo, etlui confia la direction spirituelle du sémi-naire. Mgr Moretti, prêtre d’Arezzo, devenuévêque de Terni, puissant à Rome, le diffa-ma auprès du nouveau Pape, qui nomma unVisiteur apostolique, l’abbé Lolli (1917).Treize chefs d’accusation furent portés cont-re Mgr Volpi (le septième étant : “lutte aveu-gle contre le libéralisme et le modernisme”) ;parmi les délateurs se trouvaient de nomb-reux prêtres immoraux que l’Évêque avaittenté de corriger. En 1919, Mgr Volpi, sansdonner sa démission, fut destitué de son dio-cèse. Il passa le reste de sa vie à Rome, dansle silence et la prière, heureux de faire la vo-lonté de Dieu et du Pape. En 1941, son pro-cès de canonisation fut ouvert ; ce sont lesPères dominicains qui en sont les postula-teurs. Mgr Giovanni Fossà, ami de Mgr Vol-pi, fut évêque durant les mêmes années quelui dans le diocèse de Fiesole voisin de celuid’Arezzo. Vénitien (né à Gambarella en1853), il avait été choisi comme évêque deFiesole par saint Pie X en 1909. De 1919 à

Mgr Giovanni Volpi, évêque d’Arezzo

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1929, il défendit la revue Fede e Ragione del’abbé Paolo de Töth, dont il partageait plei-nement les idées, contre toutes les attaques,puis, faisant preuve d’un grand courage, il luidonna l’hospitalité dans son diocèse. Le cou-rageux prélat mourut le 17 décembre 1932.

Les prêtres

Presque tous les prêtres qui se distinguè-rent dans les rangs du mouvement catho-lique furent également de valeureux journa-listes, car pour défendre la sainte Église, ilsemployèrent la plume avec la même véhé-mence que les Zouaves pontificaux avaientemployé les armes. Nous en avons choisiquelques-uns : l’abbé Margotti, l’abbé Al-bertario, Mgr Balan, les frères Scotton, MgrBenigni, l’abbé Cavallanti, l’abbé de Töth.

L’abbé Giacomo Margotti né à Sanremoen 1823, fonda, durant les mouvements de1847, avec Mgr Luigi Moreno, l’évêqued’Ivrea, avec le théologien Gugliemo Audi-sio (plus modéré que Margotti) et le mar-quis Gustavo Benso di Cavour, frère de Ca-millo, L’Armonia della Religione con la Ci-viltà [L’harmonie entre la religion et la Civili-sation], qui défendait la nature catholiquede l’État et dénonçait les erreurs libérales,contrecarrant le juridictionalisme laïciste etantipapal typique du gouvernement piémon-tais de l’époque. Les articles de la revue pro-voquèrent les foudres des sectes secrètes etl’abbé Giacomo Margotti fut agressé et gra-vement blessé. Il fut aussi arrêté pour ou-trage aux institutions. En 1859, Cavour, sonennemi et grand admirateur tout à la fois,supprima le journal. Par la suite l’abbé Gia-como en reprit la publication jusqu’en dé-cembre 1863 date à laquelle il le quitta, surle conseil de Pie IX, pour s’établir à Floren-ce, où il fonda L’Unità Cattolica, qu’il diri-gea avec toujours la même vigueur ; à la di-rection de L’Unità Cattolica lui succéda l’ab-bé de Töth, puis l’abbé Cavallanti. Après le20 septembre 1870, le journal sortit bordé denoir jusqu’à la signature du Concordat de1929. Margotti, père de la fameuse expres-sion “ni élus, ni électeurs” (le non expedit dePie IX) est aussi l’auteur d’un ouvrage re-marquable en six volumes, Memorie per lastoria dei nostri tempi [Mémoires pourl’histoire de notre temps], que les sectairesfirent ensuite disparaître des bibliothèques.Il mourut à Turin en 1887.

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L’abbé Davide Albertario (1846-1902)est une autre très grande figure de prêtre etd’écrivain. Natif de Filighera (Pavie), selonl’Enciclopedia Cattolica “il fut durant unetrentaine d’années, après 1870, le journalistele plus brillant et efficace au service de lacause catholique en Italie”. Diplômé enthéologie à l’Université grégorienne deRome en 1869, il fut ordonné prêtre à Milanet commença immédiatement à collaborerau quotidien L’Osservatore Cattolico, fondéen 1864 par Mgr Marinoni et l’abbé Vittadi-ni. Dans les colonnes du journal qu’il diri-gea à partir de 1873, il mena de nombreuxcombats tant contre le libéralisme d’Étatque contre les thèses rosminiennes et les

L’abbé GiacomoMargotti, direc-teur de L’Armo-nia à Turin et deL’Unità Cattolica

L’abbé DavideAlbertario,directeur de

L’OsservatoreCattolico à Milan

Les prêtres Intransig

eants

Les frères Scotton,éditeurs de

La Riscossa

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positions conciliatoristes du clergé libéral.L’abbé Albertario eut à se défendre des du-res attaques de Mgr Nazari di Calabiana, ar-chevêque de Milan, proche de la cour de lamaison de Savoie qui prétendait arrêter lapublication de L’Osservatore Cattolico. PieIX intervint plusieurs fois personnellementpour sauver le journaliste intransigeant etson journal. Le clergé libéral dirigea d’au-tres attaques contre l’abbé Albertario quiprovoquèrent de nombreux procès, parmilesquels le fameux “procès du café” : accu-sé d’avoir violé le jeûne eucharistique, l’ab-bé Albertario fut d’abord jugé coupable parle tribunal de la Curie milanaise puis recon-nu innocent et enfin absous en appel par laS. Congrégation consistoriale, mais il dutpasser deux années en exil forcé loin de sondiocèse. Un autre de ses procès fut aussi cé-lèbre : celui qui lui fut intenté par l’abbéStoppani, disciple de Rosmini, qui dénonçaAlbertario pour diffamation et parvintmême à s’adresser au tribunal civil au lieudu tribunal ecclésiastique ; l’abbé DavideAlbertario fut condamné à des amendestrès lourdes. En 1898, suite aux émeutes deMilan, il ne fut pas épargné par la violenterépression du gouvernement qui décima lesstructures du mouvement catholique (enmême temps que les structures socialistes).Les catholiques libéraux exacerbèrent lesaccusations du gouvernement anticlérical :on intenta un procès à l’abbé qui futcondamné à trois ans de prison : il en pur-gea deux à Finalborgo. En mai 1899, l’abbéAlbertario sortait de prison, l’âme fièremais débilité physiquement et moralement.Cette expérience douloureuse avait accru sagrande popularité parmi les forces les plusjeunes du catholicisme militant. Entre-temps, Filippo Meda en étant devenu le di-

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recteur, L’Osservatore Cattolico abandon-nait ses positions intransigeantes pour glis-ser vers les positions démocrates-chrétien-nes. Après une vie consacrée à se battre àvisage découvert contre les ennemis décla-rés de l’Église et les cinquièmes colonnesconciliaristes, Albertario mourait en 1902 àCarenno (Bergame). Giuseppe Pecora, sonbiographe, écrivit de lui : “à l’heure des gra-ves tentations, il a enseigné aux catholiquesla cohérence jusqu’au sacrifice, la nécessitéde la défense par la contre-attaque et par-dessus tout la fidélité à la Chaire de Pierremême lorsqu’elle condamne et châtie”.

Mgr Pietro Balan, né à Este (Padoue)en 1840 et mort à Pragatto (Bologne) en1893, type de prêtre polyédrique, était trèsapprécié de l’abbé Paolo de Töth. C’est entant que journaliste, militant de l’Œuvredes Congrès et surtout historien qu’il servitl’Église, l’Italie catholique et la Papauté ro-maine. Comme journaliste, il fonda, dirigeaou collabora aux Letture Cattoliche de Sac-chetti, à La libertà Cattolica, à l’Unità Cat-tolica de l’abbé Margotti, au Difensore etau Diritto Cattolico de Modène, à l’Aurorade Rome. En tant qu’historien c’est lui quimit en relief la grande œuvre de la Papautédans l’histoire de l’Italie. Il a laissé d’in-nombrables écrits (entre autres sur lesgrands Papes Grégoire VII et GrégoireIX), parmi lesquels La Storia d’Italia, sonprincipal ouvrage. Dans les Congrès catho-liques, il apporta sa contribution d’illustrehistorien, démolissant (historiographique-ment s’entend) les monuments érigés par lelaïcisme maçonnique à Giordano Bruno età Paolo Sarpi, à l’encontre de l’Église.

Nous en venons maintenant aux trois frè-res Scotton ; Jacopo, Andrea et Gottardo(Jacopo et Andrea doivent leur titre de pré-lat à Pie IX, Gottardo à Léon XIII). Originai-res de Bassano (Vicence), tous trois prêtreset journalistes, grands polémistes, ils menè-rent depuis Breganze (toujours dans le Vi-centin) et durant plus de trente ans des com-bats parfois même sensationnels pour défen-dre le Saint-Siège. L’œuvre la plus significati-ve des Scotton est liée à l’hebdomadaire LaRiscossa per la Chiesa e per la patria, l’unedes plus importantes publications antilibéra-les et antimodernistes entre le 17 août 1890et le 8 janvier 1916, publication voulue parLéon XIII qui en choisit lui-même le titre. Siles partisans de Murri allèrent jusqu’à parler

Un numéro deL’OsservatoreCattolico de

l’abbéAlbertario

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d’“hérésie de Breganze” (L. TEDESCHI,L’antimodernismo in Italia), le cardinal DeLai précisait que “l’orientation de ‘La Riscos-sa’ est bonne” et que “le Saint-Père l’a ap-prouvée et l’approuve” (Disquisitio). En syn-tonie avec le Saint-Siège, partirent des colon-nes de La Riscossa quelques-unes des plusimportantes campagnes contre modernisteset partisans de Murri. Mgr Benigni, avec le-quel les Scotton étaient très liés, les surnom-ma le “trio de La Riscossa”. Mgr JacopoScotton (1834-1909), ordonné prêtre en 1857,devint un prédicateur célèbre ; il était appelédans de nombreux diocèses pour prêcher lecarême et les exercices spirituels. C’est ainsiqu’avec son frère Andrea, il devint ami etcollaborateur de saint Jean Bosco et de MgrSarto, futur saint Pie X. À partir de la nais-sance de La Riscossa, en 1890, il se consacraau journalisme. Mgr Andrea Scotton (1838-1915), ordonné en 1860, nommé professeurde religion au Lycée de Vicence en 1863, futélu archiprêtre à Breganze en 1881. Ses frèress’étabirent aussi à Breganze, qui devint rapi-dement le “modèle de paroisse gérée par lecatholicisme intransigeant” (M. INVERNIZZI).Toute la municipalité fut investie dans l’ac-tion sociale des Scotton, et le jugement bien-veillant que l’on trouve sur le site Internet dela mairie est significatif (“les Scotton prirenthabilement parti pour les citoyens pauvres…et les classes moyennes… C’est un “modèle”qui fut construit ici… exemple illustrant l’ac-tion produite par l’encyclique Rerum Nova-rum… en 1879 déjà les écoles locales comp-taient parmi les meilleures… en ces années deforte crise agraire, il y avait une importanteémigration contre laquelle œuvrèrent forte-

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ment les Scotton”), ainsi que le fait qu’en1987 encore, on ait ressenti le besoin de dé-dier l’institut agricole de Breganze à l’abbéAndrea Scotton. On doit à ce dernier unequarantaine de publications parmi lesquellesquatre livres d’Apologétique. Mgr GottardoScotton (1845-1916), encore séminariste, me-nait déjà la défense de la doctrine catholiqued’Unam Sanctam de Boniface VIII contre unprofesseur anti-romain ; la dispute publiquequi s’en était suivie avait fait beaucoup debruit. Ordonné prêtre en 1869, lui aussi jour-naliste et orateur mordant, il se prodiguacomme ses frères pour l’Œuvre des Congrès,en pleine syntonie avec la direction Paganuz-zi-Sacchetti, au point que La Riscossa devintl’organe officieux de l’Œuvre. L’abbé Gottar-do Scotton fut chargé de promouvoir l’orga-nisation de l’Œuvre des Congrès dans le Sudoù le mouvement catholique n’était pas biendéveloppé. Jusqu’en 1891 le seul comité dio-césain constitué dans le Sud était en effet ce-lui de Cosenza fondé par Mgr Camillo Sor-gente. Au terme de sa tâche dans les diocèsesméridionaux (avec de bons résultats à Notoet à Agrigente, grâce aux frères Blandini,évêques des deux diocèses), l’évêque de Co-senza le gratifia du titre de chanoine honorai-re de sa cathédrale. Mgr Gottardo Scotton arédigé une œuvre importante en neuf volu-mes, Il Vangelo studiato minutamente dal par-roco e spiegato al popolo [L’Évangile étudiédans le détail par le curé et expliqué au peu-ple], recueil de doctes homélies, expressiond’une vaste culture exégétique, et riches dupoint de vue apologétique. L’abbé Gottardofut plusieurs fois arrêté sur ordre du gouver-nement pour son activité catholique, mais leplus douloureux pour lui ce furent les accusa-tions mesquines dont après la mort de saintPie X furent victimes les frères Scotton et LaRiscossa de la part de l’évêque de Vicence,qui avait par contre fait l’éloge du modernisteFogazzaro. C’est le prêtre Mgr Giovanni Me-nara, membre du Sodalitium Pianum, qui futle premier biographe des trois frères (I fratelliScotton, Firenze, 1925). Un livre sur eux a étéécrit plus récemment par Giovanni Azzolin(Gli Scotton. Prediche, battaglie, imboscate,Vicenza, 1998).

Monseigneur Umberto Benigni, catho-lique intégral s’il en fut, était né à Pérouseen 1862 ; il fut ordonné prêtre en 1884 etcommença immédiatement à collaborer àquelques journaux catholiques locaux. En

Le premiernuméro de La

Riscossa (1890)

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1892, après la promulgation de l’encycliqueRerum novarum, il fonde avec l’abbé Cer-ruti, promoteur des Caisses rurales, la pre-mière revue catholique sociale italienne, laRassegna Sociale et devient rédacteur enchef de l’Eco d’Italia de Gênes. En 1895 ils’établit à Rome où dix années durant ils’occupe d’histoire ecclésiastique, d’aborden tant qu’attaché à la Bibliothèque vati-cane puis en tant que professeur au Sémi-naire romain. De 1900 à 1903 il est aussi di-recteur du quotidien intransigeant La Vocedella Verità. À partir de 1902, il s’occupe dela publication de la Miscellanea di storia ecultura ecclesiastica, premier périodiqueitalien consacré à l’histoire ecclésiastiquequi paraîtra jusqu’en 1907. Il est possibleque les études publiées dans la Miscellaneaaient été à la base de sa monumentale Sto-ria della Chiesa, en sept volumes, quis’interrompt malheureusement au MoyenÂge. C’est en 1904, après l’élection de PieX, que s’ouvrent pour lui les portes dessommets de la Curie vaticane : il devienten effet Sous-Secrétaire des Affaires ecclé-siastiques extraordinaires, devant donc as-sumer la cinquième charge par ordre d’im-portance à l’intérieur de la Secrétaireried’État. C’est au génie de Benigni que l’ondoit la salle de presse vaticane. Pour inciterles quotidiens laïques (“indépendants”) às’occuper correctement des événements ec-clésiastiques, Benigni eut l’idée de se ga-gner les bonnes grâces d’une partie desjournalistes, (nommés aujourd’hui “vatica-nistes”), en les réunissant quotidiennement(c’est la “salle de presse”) et en leur four-nissant des informations complètes (et bienorientées) qui étaient publiées le lende-main dans tous les journaux. La stratégies’avéra efficace pour préparer le terrain

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dans la presse laïque en vue de la publica-tion de l’encyclique Pascendi et pour neu-traliser, du moins en partie, les ultérieurescampagnes de dénigrement de la factionmoderniste. C’est ainsi que naquit l’agencede presse Corrispondenza di Roma (le n° 1parut le 23/5/1907 et le n° 1282, le dernier,le 31/12/1912), qui eut très vite une éditionfrançaise, Correspondance de Rome (à par-tir d’octobre 1907). Le bulletin “ni officielni officieux”, reflétait les orientations de laSecrétairerie d’État et ne tarda pas à susci-ter de grandes polémiques dans les milieuxcatholiques et les milieux politiques, entreautres les dures réactions du gouvernementmaçonnique de la IIIème République françai-se. De 1910 à 1912, un hebdomadaire delangue française, les Cahiers contemporainsreprenait les articles les plus importants dela Corrispondenza. En 1912, quelques moisavant la clôture de la Corrispondenza, MgrBenigni ouvrait une seconde agence d’in-formations, l’A.I.R. (“Agenzia Internazio-nale Roma”), avec le bulletin quotidien Ro-me et le monde et l’hebdomadaire QuaderniRomani qui paraissait aussi en français. Lesremarquables qualités organisatrices deMgr Benigni donnèrent aussi naissance àd’autre organes de presse tels que le Borro-meus, pour les membres romains du SP, etle Paulus, à l’intention de ses amis journa-listes. À l’étranger, le SP disposait dequelques publications comme La Vigie enFrance, la Correspondance catholique enBelgique, la Mys Katolycka en Pologne. Enoutre, Benigni était en étroite collaborationavec d’autres revues antimodernistes indé-pendantes du SP telles que La Riscossa desfrères Scotton et La Critique du Libéra-lisme de l’abbé Barbier en France. Pour seconsacrer davantage et plus librement àl’œuvre entreprise, l’abbé Benigni avaitquitté sa charge aux Affaires ecclésias-tiques où lui avait succédé Eugenio Pacelli,futur Pie XII qui, dans le procès pour lacanonisation de Pie X, demeurera indiffé-rent aux pressions de ceux qui dépeignaientBenigni comme l’âme damnée du Pape Sar-to afin d’empêcher que le Pontife ne soitmis sur les autels. En 1911, saint Pie X créepour l’abbé Umberto, une huitième chargede Protonotaire apostolique participant, leplus élevé des titres de prélat, dont le nom-bre était jusqu’alors limité à sept. Ce titreprestigieux fit comprendre au nouveau

Mgr Umberto Benigni

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monseigneur deux choses : d’abord que luiétait barrée la voix à une éventuelle etfuture nomination épiscopale, mais aussiqu’il était encouragé par le Pape à poursui-vre la route entreprise. Dès 1909 Benigniavait quitté l’appartement du Vatican etouvert, Via del Corso, la “Casa san Pietro”[Maison Saint-Pierre], siège de ses activités.C’est là que naquit le Sodalitium Pianumdont il a été longuement question dans lapremière partie de ce numéro. Après la dis-solution définitive du SP le 25/11/1921, MgrBenigni, malgré son amertume, sut trouverla force d’âme pour continuer le combatpour l’intégralité de la Foi. En 1923 il re-lançait l’A.I.R. sous le nom d’Agenzia Urbs,qui poursuivit ses activités jusqu’en 1928,avec la publication du bulletin hebdoma-daire Veritas, puis du mensuel Romana. En1928 il fondait l’Intesa Romana per la Dife-sa sociale (I.R.D.S.), avec pour devise “Re-ligion, Patrie, Famille”. C’est la phasefascisante de la vie de Mgr Benigni : certai-nement la moins originale et la moins re-présentative : Benigni tentait d’utiliser leFascisme en un sens antidémocrate-chré-tien tout comme le régime se servait de laReligion comme instrument. Calomnié etpersécuté par ses ennemis, Mgr Benignipassa les dernières années de sa vie dans lapauvreté la plus absolue. Dans la Disquisi-tio, le père Saubat, un des témoins au pro-cès de canonisation et intime collaborateurde Benigni, assura que Mgr Benigni,quoique n’ayant pas charge d’âmes, célé-brait quotidiennement la Messe et seconfessait chaque semaine à l’église de SanCarlo al Corso auprès d’un père de la Mer-ci. Mgr Benigni s’éteignit à Rome le 27 fé-vrier 1934, “abandonné et méprisé par leclergé”. À ses funérailles assistaient “7 ou 8sénateurs, de 12 à 15 députés, une légion dejournalistes et même 12 gendarmes en granduniforme”, mais seulement deux prêtres :le père Saubat et le père Jeoffroid. Unecinquantaine d’années plus tard, la penséeet l’œuvre de Mgr Benigni devenaient lepoint de référence de notre revue Sodali-tium (fondée en 1983).

Alessandro Cavallanti (1879-1983) estun autre de ces prêtres à la plume acerbe.Natif de Crema, il fut ordonné prêtre en1902 et nommé vicaire à Capralba. Il com-mença à écrire pour les revues diocésaineset ses articles attirèrent l’attention de l’abbé

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de Töth qui le prit avec lui à la rédaction del’Unità Cattolica à Florence. En 1906, un anavant l’encyclique Pascendi, il publiait unessai Modernismo e modernisti, auquel suc-cédèrent de nombreux autres opuscules decritique antimoderniste. En juillet 1909, ilsuccédait à l’abbé de Töth à la direction dujournal florentin, au milieu de nombreusespolémiques liées entre autres au problèmecomplexe de la propriété du journal. En ef-fet, saint Pie X l’avait racheté aux héritiersMargotti pour le céder ensuite à quatreévêques de Toscane (de Florence, Sienne,Pise et Lucques) ; par la suite, il nommal’évêque de Florence unique superviseur.Au sein de l’épiscopat toscan, le cardinalMaffi, archevêque de Pise (ami du cardinalFerrari et responsable avec lui du “trust”)se distingua dans ses critiques contre l’abbéCavallanti, tandis que l’évêque d’Arezzo,Mgr Volpi, exaltait la “fermeté de ses princi-pes”. En plusieurs occasions saint Pie X eutdes paroles d’éloge pour l’Unità Cattolicadirigée par l’abbé Cavallanti, et son juge-ment était partagé par les cardinaux De Laiet Gennari. Le Pape Sarto avait à cœur dedéfendre un journal ayant un grand rôledans l’action antimoderniste, même s’iln’appréciait pas certaines attaques trop per-sonnelles faites par le directeur, mais impu-tables aussi à son jeune âge. L’abbé Caval-lanti restera à la direction de l’Unità Cattoli-ca jusqu’en 1917, date à laquelle il devaitmourir dans un accident de chemin de fer àl’âge de 38 ans seulement.

Le dernier prêtre de ce chapitre est l’ab-bé Paolo de Töth, le plus jeune du clergé in-tégral mentionné dans cette brève liste. Né àUdine le 5 mars 1881 dans une famille d’ori-gine hongroise, il fut baptisé le jour même etreçut les prénoms de Francesco FerdinandoPaolo. Pour signer les articles de sa longuecarrière journalistique il n’utilisait que celuide Paolo. En 1889 il entrait au noviciat desCarmes déchaux à Venise où il demeuraquatre ans sous le nom de frère Tommaso.Toute sa vie il conservera l’amour de la spiri-tualité de cet Ordre. Il poursuivit ses étudesdans un institut salésien dans le diocèsed’Udine, jusqu’à ce que, à sa demande, il ob-tienne de l’évêque d’Udine la permission dese transférer au Collège Lucarini, toujourssalésien, à Trevi dans le diocèse de Spolète.C’est Alessandro Muzzi de Montefalco, di-recteur de plusieurs périodiques, qui, frappé

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par les capacités du tout jeune de Töth, fut àl’origine de ce transfert. Ensemble, ils conçu-rent la transformation d’une vieille publica-tion de spiritualité, Splendore montefalchese,en un journal plus porté sur l’actualité reli-gieuse, Armonie della Fede, qui débuta sespublications le 25/1/1906. Entre-temps, le8/9/1906, l’abbé Paolo était ordonné prêtrepar l’archevêque de Spolète. Grâce à l’ensei-gnement du père Guido Mattiussi, l’amourde la philosophie et de la théologie thomistescontrecarrées par le modernisme, croissaiten lui. Armonie della Fede, dont l’abbé deTöth fut le directeur jusqu’en 1914, fut l’undes journaux les plus combatifs des catho-liques intégraux. Imprimé par la suite à Sien-ne, sous la protection de Mgr Bufalini, il pas-sa ensuite à Florence en 1907, puis à Fiesole.En 1908 saint Pie X appelait l’abbé de deTöth à la direction de l’important quotidienL’Unità Cattolica. Le tempérament volca-nique de l’abbé de Töth provoquera des inci-dents diplomatiques qui contraignirent lePape Sarto à le destituer de sa charge en1909. L’abbé de Töth, malgré l’incompré-hension [entre eux], demeura toujours trèsdévot de saint Pie X et poursuivit ses com-bats journalistiques selon le magistère duPape vénitien. Sous le pontificat de BenoîtXV, alors que d’autres journaux intran-sigeants changeaient leur ligne éditoriale defaçon irréparable, l’abbé Paolo conçut et di-rigea une nouvelle revue, Fede e Ragione.C’est le 25/1/1919 que sortit le premier nu-méro de ce mensuel qui, dix ans durant, futl’expression du catholicisme intégral avec lapublication d’importantes études philoso-

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phiques et théologiques. FeR s’intéressaitaussi de près à la question judéo-maçon-nique et c’est dans cette revue que furent pu-bliés pour la première fois en Italie lesProtocoles des Sages de Sion. Ennemi achar-né du PPI de l’abbé Sturzo, la revue n’épar-gna pas non plus ses dures critiques au Fas-cisme qu’elle qualifiait, à cause de ses ori-gines jacobines, d’“organisation typiquementmaçonnique”. L’attitude vis-à-vis du régimechangea avec le Concordat, mais cela ne sau-va pas FeR qui dut cesser soudainement sespublications en 1929. À la Secrétaireried’État, présidée par le cardinal Gasparri, ilne manquait pas non plus de gens qui sou-haitaient la fermeture de Fede e Ragione,dernière voix du journalisme intransigeant.L’abbé Paolo fut alors nommé curé de saintMartino di Maiano, petite localité dans lacampagne de Fiesole, où il demeura de 1929à 1965. Il a laissé divers manuscrits sur l’his-toire du mouvement catholique. Le 25 dé-cembre 1965, à la clôture du Concile VaticanII, il expirait à Maiano. C’est ainsi que mou-rait le dernier représentant du catholicismeintégral, après une vie consacrée à combattreles erreurs du Modernisme. Sous ses yeux fa-tigués et tristes, 60 ans après la promulgationde l’encyclique Pascendi de saint Pie X, leserreurs condamnées par l’encyclique avaientréussi à conquérir l’Église à son sommet.

Les laïcs

Ils sont très nombreux à s’être engagésdans la défense de la Religion catholiqueen harmonie avec les dispositions indiquéespar les Papes et les évêques. C’est la démo-cratie chrétienne, combattue d’abord parles intransigeants puis par les catholiquesintégraux, qui diffusa dans le mouvementcatholique l’esprit de rébellion et dedésobéissance à la hiérarchie et au clergéen général, esprit qui de nos jours est large-ment (et insidieusement) présent dans lesmilieux du soi-disant traditionalisme catho-lique. Du reste, là n’est pas l’unique diver-gence existant entre le catholicisme intégralet l’actuel traditionalisme.

Le 20 septembre représenta pourl’Église un élément déterminant et, parmiles tout premiers personnages qui se distin-guèrent dans le mouvement catholique,nous trouvons justement de nombreuxanciens combattants de l’armée de Pie IX.

L’abbé Paolo de Töth

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Après la brève mais épique parenthèse pas-sée au service du Ministère des Arméespontificales, ils se refusèrent à faire partiede l’armée royale italienne et s’engagèrentsoit comme journalistes soit comme diri-geants de nombreuses publications et asso-ciations catholiques. Parmi les nombreuxcombattants qui, pour la défense de l’Église,passèrent des armes de tir à celles de la plu-me, et de la vie militaire à la vie militantepolitique et sociale, il faut signaler Anton-maria Bonetti (1849-1896). Bonetti était unétudiant de Bologne exhubérant qui laissales études universitaires pour s’enrôler dansles rangs de l’armée pontificale. Après le 20septembre, comme tant de ses compagnons,il dédaigna la proposition qui lui fut faite des’enrôler dans l’armée qu’il avait combattueet devint ainsi un écrivain et journaliste fé-cond ; il nous a laissé un grand nombre detextes en défense du pouvoir temporel et enréfutation des lourdes accusations portéespar le parti du Risorgimento contre les mili-taires de Pie IX. Entre-temps les anciens del’armée pontificale avaient constitué la “So-cietà Romana dei reduci delle battaglie in di-fesa del Papato” et fondé un hebdomadaire,La Fedeltà.

En juin 1871, toujours à Rome, fut cons-tituée la “Società primaria romana per gliinteressi cattolici” présidée par le prince Ma-rio Chigi. L’association romaine recueillitplus de 27 000 signatures en hommage auPontife en réponse au grotesque plébiscitedu 2 octobre 1870 qui avait ratifié l’union deRome à l’Italie (dans certaines sections les“oui” dépassaient les 100 % des voix !).L’association basait son action sur la “Ques-

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tion romaine”, la revendication temporalisteet sur la polémique contre les brecciaioli(terme péjoratif inventé par les partisans duPape pour désigner les usurpateurs de la Ci-té Sainte) et les conciliatoristes, autrementdit les catholiques désirant la conciliationentre le Pape et l’État anticlérical et franc-maçon. Dans ce but l’association se servitdes colonnes du quotidien La Voce della Ve-rità, né quelques semaines auparavant, le 8avril 1871 sur l’initiative du prince Lancello-ti, du père jésuite Carlo Maria Curci (par lasuite transfuge) et de Mgr Francesco Nardi.En 1879 La Voce della Verità fusionnait avecIl Messagero, journal de Florence, perdantsa ligne temporaliste, qu’il retrouva ensuiteau début des années 1890 lorsque GiuseppeSacchetti en devint le directeur. La revuesuspendit ses publications le 31 août 1904,quelques semaines après la dissolution del’OdC [Œuvre des Congrès] (28 juillet 1904).

Bien avant la brèche de Porta Pia, en1867, le comte Giovanni Battista Acquader-ni di Quaderna (1839-1922), de Castel SanPietro (Bologne) avait fondé, avec son amil’avocat Giambattista Casoni, la “Societàdella Gioventù Cattolica Italiana”. La GCI,qui avait comme devise “Prière, Action, Sa-crifice”, était née sur les traces de la “Societàcattolica per la libertà della Chiesa in Italia”,qui s’était dissoute l’année précédente. Ac-quaderni fut élu Président du Comité pro-moteur du premier Congrès catholique ita-lien (1874) puis premier Président de l’Œu-vre des Congrès de 1874 à 1878. Il quittera laprésidence suite à des divergences avec lesautres dirigeants sur la structure à donner àl’OdC et sur le rapport entre elle et la GCIprééxistante, pour ce qui regardait l’enca-drement du mouvement de jeunesse del’OdC. C’est Acquaderni qui conçut les Pic-cole Letture Cattoliche (1861-1866), et il futl’un des fondateurs de L’Avvenire d’Italia(1896), à l’origine du quotidien Avvenire. Enjuin 1902, avec Cesare Algranati (1863-1925), nouveau directeur d’origine juive quisignait sous le pseudonyme de Roccod’Adria, le périodique devint philomurrienet philomoderniste. Après avoir quittél’OdC, Acquaderni se consacra aux œuvressociales et fonda à Bologne et dans le Mu-gello de nombreuses institutions parmi les-quelles le Credito Romagnolo et la SocietàCattolica di Assicurazione. Le comte bolo-nais sera aussi Président de l’Œuvre du Sé-

Antonmaria Bonetti,auteur du livre « IlVolontario di Pio

IX » (réédité par leC.L.S. en 2007)

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pulcre de Pie IX, commission spéciale quirecueillait les offrandes de centaines de dio-cèses, de congrégations religieuses, de fa-milles nobles et de municipalités pour érigerla tombe du dernier Pape-Roi dans la cryptede la Basilique San Lorenzo al Verano.

L’avocat Giambattista Casoni (1830-1919), de famille bolonaise comme son amiAcquaderni, fut un autre pionnier du mou-vement catholique. Il se distingua particu-lièrement dans le journalisme, au pointd’être choisi en 1890 par le Pape Léon XIIIpour diriger L’Osservatore Romano. Lenom de Casoni est lié à de nombreux titres,tous caractérisés par la brièveté de leur pa-rution du fait des suppressions continuellesexigées par le régime anticlérical qui ne to-lérait pas la presse temporaliste : L’Osser-vatore bolognese (1858-1859), L’eco delleRomagne, Le Piccole Letture Cattoliche dé-jà citées et fondées par Acquaderni, Il pa-triota cattolico de Bologne (1864-1866), LaRivista Felsinea transformée par la suite enAraldo (1875-1878). Les nombreuses publi-cations intransigeantes sont le témoignagede la vivacité culturelle qui animait le mou-vement catholique. Casoni, très sensible àla formation d’une classe dirigeante papa-line, avait fondé le “Circolo dei Filo-dicologi” qui s’adressait aux jeunes avocatsainsi que l’Accademia di San Tommasod’Aquino, creuset de personnalités catho-liques. Il prit part à l’OcD dès le premiercongrès en 1874, et en fut le dirigeant jus-qu’en 1889. Comme nous l’avons dit, Caso-ni couronna son service au Saint-Siègecomme directeur de L’Osservatore Roma-no, charge qu’il conserva de 1890 à 1901.

Après deux bolonais, notre “album defamille” nous présente deux vénitiens, Pa-ganuzzi et Sacchetti. L’avocat GiovanniBattista Paganuzzi (1841-1923), natif deVenise, tertiaire dominicain, commença àmiliter, comme tant d’autres dirigeants ca-tholiques, dans les rangs de la “Società cat-tolica italiana per la difesa della libertà dellaChiesa in Italia”. En 1868 il fut élu prési-dent du cercle vénitien de la GCI et en1871 il fut parmi les organisateurs du pre-mier congrès catholique organisé pourcommémorer la victoire de Lépante,congrès qui se tint ensuite à Venise en1874. C’est ce congrès qui détermina lanaissance de l’Œuvre des Congrès dont Pa-ganuzzi fut président de 1889 à 1902. Sa

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présidence tendit à unir, organiser et orien-ter le mouvement catholique, et en certainscas, il suscita quelques perplexités chezceux qui avaient une vision moins centrali-sée de l’OdC, comme Acquaderni. La dis-sension entre la présidence de l’OdC et ladirection de la GCI aigrit les esprits. Pourplanifier le remarquable élan organisateurqu’il sut donner à l’OdC, Panuzzi instituaun Conseil directif, avec séance hebdoma-daire à Padoue ou à Venise, ce qui lui valutd’être accusé de venetizzare l’Œuvre. Maisces divergences sur la méthode ne minaienten rien la communion d’intention quant àla substance de la ligne intransigeante à sui-vre. De toute autre portée fut la dissensionavec Romolo Murri et ses partisans (le Pa-triarche Sarto lui-même, futur Pie X, écri-vait en août 1902 une lettre en faveur de ladéfense de Paganuzzi restée mémorable),dissension dont les conséquences détermi-nèrent même la dissolution de l’OdC en1904 par saint Pie X, lorsque désormais lespénétrations démocrates-chrétiennes à l’in-térieur de l’association en avaient compro-mis l’orthodoxie. Paganuzzi donna sa dé-mission de la présidence en 1902 ; c’est lecomte Grosoli, fils de l’israélite convertiForli qui lui succéda. Paganuzzi en fut affli-gé comme il est compréhensible, mais ilcontinua à suivre l’action catholiqued’abord au sein de l’Union populaire puisau sein du Partito Popolare, constituantl’“aile droite” qui s’opposait à l’aconfessio-nalité du parti voulue par l’abbé Sturzo. Aucours de sa brillante carrière au barreau ileut à défendre l’abbé Albertario dans le fa-meux procès faisant suite à la dénonciationde l’abbé Stoppani, rosminien et conciliato-riste. Paganuzzi mourait en 1923, assisté del’abbé Luigi Orione.

Giuseppe Sacchetti (1845-1906), de Pa-doue, fut un journaliste et polémiste effi-cace, qui mit toujours la “Question romai-ne” au centre de ses combats. Encore étu-diant, il commença à écrire dans les colon-nes des Piccole letture cattoliche, puis danscelles du Veneto cattolico de l’abbé Beren-go. En 1870, à l’âge de 25 ans, alors qu’ilétait président du cercle de la GCI de Pa-doue, il fit son testament et s’enrôla dansl’armée pontificale ; il participa à l’ultimedéfense de Rome. De retour à laprésidence de la GCI de Padoue, il préférase consacrer entièrement au journalisme. Il

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dirigea de nombreux périodiques vénitiensavant d’être appelé à la direction de la Le-ga Lombarda de Milan (1886-1888, avant ladérive conciliatoriste du journal), de LaVoce della verità de Rome et de l’UnitàCattolica de Florence, fondée, nous l’avonsvu, par l’abbé Margotti à Turin. Pour lescatholiques libéraux de Toscane, Sacchettiétait trop “papiste”, aussi contribuèrent-ilsà affaiblir la publication que Sacchetti diri-gea cependant jusqu’à sa mort survenuesoudainement en octobre 1906. Sacchettipartageait la ligne de Paganuzzi dans la di-rection de l’OdC et contraria de toutes sesforces les idées des partisans de Murri. Ilassista sans enthousiasme aux accords élec-toraux entre les catholiques sociaux deGiuseppe Toniolo et les modérés, accordsqui menèrent, quelques années après samort, au Pacte Gentoloni de 1913. Une bio-graphie de Sacchetti a été écrite par G. DEROSA : Giuseppe Sacchetti e la pietà veneta,Studium, 1968.

Déplaçons-nous en Lombardie pour par-ler du comte Stanislao Medolago Albani(1851-1921). Né à Bergame, à 17 ans il deve-nait déjà président du cercle de la GCI. Sonengagement dans le mouvement catholiquel’amena à combattre à visage découvert le Li-béralisme et en particulier les catholiquescontaminés par les erreurs libérales. Cettephrase de Medolago Albani rapportée parInvernizzi est significative : “Pie IX a dit dene pas craindre la ‘Commune’, mais de crain-dre par contre le Libéralisme camouflé en ca-tholique, qui est en même temps hypocrisie,opportunisme, peur la plus vile et qui revient àune négation pratique de la Foi”. Face àl’avancée des socialistes, il s’occupa de la“question sociale” et institua à Bergame leCircolo Operaio San Giuseppe qui compterajusqu’à 1 500 associés. En 1882 il fut élumembre du Comité général permanent del’OdC, et en 1884 président de la sectiond’Économie sociale chrétienne. Ami de Giu-seppe Toniolo, tous deux favoriseront la nais-sance de coopératives, de caisses rurales, desociétés de secours mutuel pour défendre lesouvriers et les paysans catholiques des er-reurs des libéraux et des socialistes. Par la sui-te, au sein de l’OdC, il sera en désaccord avecla ligne de Paganuzzi, tout en partageant ce-pendant le refus des positions démocrates-chrétiennes de Murri. Lorsque l’OdC, phago-cytée désormais par les partisans de Murri,

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fut dissoute par Pie X, la section économico-sociale de Medolago Albani fut la seule à sur-vivre, pour devenir par la suite l’Unione Eco-nomico-Sociale. Plus tard le comte berga-masque se retira de la direction et fonda danssa ville la Scuola Sociale (l’École Sociale),dont Benoît XV fit l’Istituto Pontificio diScienze Sociali. Prévoyant, il avertit Romedes dangereuses tendances modernistes dujeune secrétaire de l’évêque de Bergame, uncertain Angelo Giuseppe Roncalli… il eutpour biographe et ami l’abbé Paolo de Töth.

Dans le Sud, l’OdC ne parvint pas às’enraciner de façon capillaire comme dansles diocèses septentrionaux et ceux de l’ex-État Pontifical, car de nombreux catho-

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liques préférèrent militer dans les organisa-tions légitimistes. En 1897, l’année de sonexpansion maximale, le comité diocésainn’était présent que dans 53 diocèses sur 112et les comités paroissiaux dans 206 parois-ses sur 3 613. L’un des quelques rares diri-geants notables du mouvement catholiquedans le Sud fut le baron Luigi de Matteis(1850-1934). Né d’une famille aristocra-tique napolitaine, il se forma dans les rangsdu légitimisme. En 1896 fut fondée la Fede-razione Universitari Cattolici Italiani (FU-CI) ; de Matteis en fut nommé président etle resta jusqu’en 1900. Après le VIème

Congrès catholique qui se déroula à Naplesen 1883, il devint un personnage de pointede l’OdC. Grâce à lui le mouvement catho-lique donna naissance en Campanie à lapremière société ouvrière et à la première

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banque. Il collabora également avec MgrBenigni en adhérant au SP. À l’exemple deson ami Paganuzzi et des autres intran-sigeants, il adhéra pour quelque temps àl’aile droite du PPI, pour soutenir ensuiteles éléments les plus réactionnaires dumouvement fasciste.

Je terminerai cette brève revue par lecomte Filippo Sassoli de Bianchi (1871-1938). Né à Bologne, fils du marquisAchille Sassoli-Tomba, il fut de ceux qui fi-rent de la cité felsine le centre propulseurdu mouvement catholique. Filippo Sassolide Bianchi fut formé à l’école thomiste del’abbé Lorenzelli, créé par la suite cardinalpar saint Pie X en 1910. Il se distingua dansle Circolo Universitario Cattolico de Bolo-gne et, après la dissolution de l’OdC, iladhéra à l’Unione Popolare créée par saintPie X pour continuer l’action du mouve-ment catholique. Comme Paganuzzi, iladhéra au Partito Popolare Italiano avecl’espoir de le transformer de l’intérieur ; ildevint même le guide de l’aile droite duPPI. L’action de Sassoli dans le parti démo-crate-chrétien se révélera infructueuse eten 1923 il quittera le PPI, un parti que sesfondateurs (comme aussi les héritiers del’après-guerre) avaient voulu d’“inspirationchrétienne” mais pas catholique. Sassolis’occupa avec une particulière attention desquestions sociales et dans le Mugello où safamille avait des propriétés, il fonda la Le-ga cattolica mugelliana, qui alla jusqu’àcompter 7 000 associés. Une profonde ami-tié liait Sassoli à l’abbé Paolo de Töth aveclequel il partageait l’amour du thomismeet, en 1919, lorsque l’abbé de Töth fonderaFede e Ragione, il sera parmi les premierscollaborateurs et bienfaiteurs de la revue.Durant toute la décennie 1919-1929, Sassolifut toujours présent dans les questions lesplus importantes débattues par la revue,comme en témoigna de Töth lui-mêmedans l’ouvrage qu’il écrivit en souvenir deson ami de toujours, Filippo Sassoli de Bi-anchi (1958). Dans son livre Le questionidell’oggi, sont rassemblés les articles lesplus intéressants de Sassoli publiés dansl’Unità cattolica et FeR. Il mourut en 1938 àl’âge de 67 ans.

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FilippoSassoli deBianchi

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Conclusion

La vie de tous ces fils de l’Église peut serésumer dans le dernier point du program-me du SP : “Contre tout ce qui est opposé àla doctrine, à la tradition, à la discipline, ausentiment du Catholicisme intégralement ro-main ; pour tout ce qui leur est conforme”.

La “Prière fraternelle” du SodalitiumPianum, composée par Mgr Umberto Beni-gni, nous permet de réunir en un uniquesouvenir tous les soldats du catholicisme in-tégral et, avec une profonde et filiale grati-tude pour l’exemple qu’il surent donner, deprier pour le repos de leur âme : “Jésus-Christ, Notre-Seigneur et Rédempteur,nous Vous en supplions, veuillez, pour letriomphe de Votre Sainte Cause contre sesennemis et faux amis, regrouper ses fidèlesqui, dispersés à travers le monde, mènent lebon combat afin qu’ils se connaissent ets’accordent en esprit et dans les œuvres.Daignez leur fournir dans ce but lesmoyens matériels et moraux nécessaires etopportuns. Nous Vous en prions, veuillezen outre être toujours au milieu d’eux, se-lon Votre divine promesse, les bénissantdans la vie et dans la mort. Ainsi soit-il”.

Les catholiques intégraux en France

L’édition française de Sodalitium apresque toujours été la traduction de

l’édition italienne, et ce dès le départ. Cenuméro de notre revue fait, de plus, unelarge part aux figures et à l’histoire du ca-tholicisme italien. Que fallait-il faire? Nousavons pensé qu’aussi bien pour nos lecteursd’outre-monts que pour les lecteurs ita-liens, il pourrait être utile, curieux et inté-ressant de suivre les vicissitudes des catho-liques intransigeants et intégraux en Italie,pays où la Divine Providence a placé lesiège de Pierre. Ce n’est pas pour rien queles bons catholiques français du XIXème

siècle étaient qualifiés d’“ultramontains”.Cependant, pour cette édition française,

nous avons voulu ajouter quelques noticesbiographiques sur les principaux représen-tants de l’école catholique intégrale enFrance. Nous avons limité le champ de

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notre étude, omettant les grandes figures ducatholicisme français du XIXème siècle bienconnues de tous, telles – entre autres – quecelles du Cardinal Pie, de Mgr de Ségur, deDom Guéranger ou de Louis Veuillot, pourprésenter par contre des personnages moinsconnus (du moins pour quelques-uns d’en-tre eux), protagonistes du pontificat de saintPie X. Parmi les notices précédentes figu-rent déjà certains cardinaux et évêquesfrançais ; dans cet appendice nous parleronsde quelques prêtres et laïcs.

C’est sur les membres du SodalitiumPianum (S.P.) que s’est porté notre choix,et, en dehors de cette association, sur deuxdes plus fameux protagonistes du catholi-cisme intégral, l’abbé Barbier et Mgr De-lassus. Ici aussi il ne s’agit que de brèvesnotices biographiques tirées pour une bon-ne part de l’œuvre d’ÉMILE POULAT sur leS.P., Intégrisme et catholicisme intégral(Casterman, 1969) : ces notices ne sont pasexhaustives sur le sujet mais invitent plutôtle lecteur à l’approfondir.

Les membres du Sodalitium Pianum

Le Sodalitium Pianum (1909/1911-1921)est plus connu en France sous son nom co-dé de Sapinière. C’est un prélat italien, MgrBenigni qui en eut l’idée. Le S.P. avait sonsiège à Rome. Mgr Benigni suivait cepen-dant avec une grande attention les ques-tions françaises (et trouva en AristideBriand un ennemi implacable) au point quela principale revue “externe” du Soda-litium, La Corrispondenza romana (fondéele 23 mai 1907) eut très rapidement uneédition française qui finit par se substituertotalement à l’italienne sous le titre de Cor-respondance de Rome (2 octobre 1909 - 31décembre 1912), auxquels succédèrent lesBulletins de l’A.I.R. [Agence InternationaleRoma], quotidiens (Rome et le monde) eten outre, à compter du 5 janvier 1913, heb-domadaires (Les Cahiers romains).

On ne connaît pas avec certitude le nom-bre des adhérents au Sodalitium qui en avaitdans huit pays différents. Sur environ 38identifiés, il y en a bien 15 ou 16 qui sont desFrançais, prêtres, religieux et laïcs. Voyons laliste (que nous imaginons non exhaustive, lesadhérents ayant été une centaine) qu’endonne Mgr Benigni lui-même dans une lettre

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à la S. C. du Concile du 16 novembre 1921.Après avoir mentionné la sympathie enversle S.P. du cardinal Sevin et des évêques Mo-nastès, Sabadel et Gilbert, Mgr Benigni citecomme adhérents français au S.P. les PèresSaubat (secrétaire du S.P.) et Maignen(membre de la Diète), les Pères rédemptoris-tes George, Castelain, Herbaux et Dupuis,les Pères Rollin et Hello, l’abbé Boulin et,parmi les laïcs, M. Rocafort de Paris, leComte et la Comtesse de Calan de Rennes,les Demoiselles Lucien-Brun (appartenant àla famille de l’avocat royaliste Lucien Brun,1822-1877, sénateur inamovible) et Rollin deLyon et M. Merlier d’Amiens, auxquels ilfaut peut-être ajouter Alfred Simon de Paris.Deux autres religieux étaient aussi très pro-ches de Benigni et du S.P. : le Père Salvien etle Père Jeoffroid.

On remarque, d’abord, la prédominancede deux congrégations religieuses, celle desRédemptoristes et celle des Frères de Saint-Vincent-de-Paul. C’est aux Rédemptoristesqu’appartenait entre autres le cardinal VanRossum, considéré par Mgr Benigni commeun ami et protecteur du S.P. ; peut-être celacontribue-t-il à expliquer la présence dequatre religieux de l’ordre fondé par saintAlphonse, dont trois originaires de l’actueldiocèse de Lille, très fécond en catholiquesintégraux. «Alphonse George (1844-1932),recteur de la maison de Paris de 1901 à1902, prédicateur infatigable et très appré-cié, pionnier du renouveau des missions pa-roissiales (Sauvons la France par les mis-sions paroissiales, Paris, 1907) (…) Il futune personnalité marquante à qui les arche-vêques de Paris, du cardinal Amette au car-

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dinal Verdier, témoignèrent leur confiance,ainsi que Benoît XV et Pie XI». «DésiréCastelain (1863-1934), supérieur provincialde 1900 à 1912, puis recteur de Valkenburg(Hollande), fixé dans le nord de la Francedepuis 1919». «Édouard Herbaux (1861-1933), maître des novices de 1895 à 1904 etde 1919 à 1930. Il a laissé, en 3 volumes, unRecueil de méditations à l’usage des Ré-demptoristes (1932)». «Émile Dupuis (1865-1935) partagea sa carrière missionnaireentre Lille et Boulogne, tantôt recteur tan-tôt simple religieux». Dans sa notice nécro-logique, on lit à son sujet : «Il aimait à prê-cher les vérités terribles parce qu’il lesconsidérait comme essentiellement conver-tissantes… Profondément pénétré desdroits de Dieu, c’étaient eux qu’il voulaitfaire valoir. Et tout son désir visait à refaireun ordre social chrétien… Aux chrétiens ca-pables de le comprendre, il prêchait volon-tiers les droits de l’amour de Dieu… La pa-role des papes, des supérieurs, était pour luisacrée : c’était la parole de Dieu. Hommede grande foi, il l’était et il le laissait voir»(POULAT, Intégrisme…, p. 591).

La présence, par ailleurs, de nombreuxreligieux des Frères de Saint-Vincent s’ex-plique par l’influence du Père CharlesMaignen (1858-1937), membre de la Diètedu S.P. L’origine des Frères de Saint-Vin-cent-de-Paul remonte aux Conférences decharité, association charitable de laïcs ca-tholiques, fondée en 1833 à Paris par Em-manuel Bailly (et non par Frédéric Oza-nam, comme on dit couramment). Placéedepuis 1835 sous le patronage de saint Vin-cent-de-Paul, la société se destine à la pra-tique des bonnes œuvres et à la diffusion dela foi. Parmi les premiers membres desConférences figure Jean-Léon Le Prévost,qui fonda précisément en 1845, à Paris, lesFrères de Saint-Vincent dans le but deveiller au bien spirituel et professionnel desouvriers. Au fondateur se joignit le FrèreMaurice Maignen (1822-1890), fils d’un gar-de du corps du roi Charles X, maître et amid’Albert de Mun et de La Tour du Pin, fon-dateur des Cercles catholiques ouvriers etoncle de Charles qui fut leur biographe àtous deux (de J.-L. Le Prévost et de M.Maignen, s’entend). Charles Maignen «re-joignit son oncle dans la Congrégation etfut envoyé au séminaire français de Rome,où il acquit la haute confiance du supérieur,

Le Père CharlesMaignen

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le Père Eschbach. Ordonné prêtre en 1884il fut le premier aumônier de l’Action Ca-tholique de la Jeunesse Française, dont ildéplorera plus tard l’évolution. Directeurdu cercle catholique de Montparnasse, il futrelevé de sa fonction… pour avoir publi-quement soutenu Drumont… Suivent alors,à la maison généralice de Vaugirard, à Pa-ris… dix années sans fonction précise… oc-cupées, par la presse (La Vérité, puis La Vé-rité Française, née de l’hostilité au Rallie-ment) et par le livre, à combattre les cou-rants novateurs : contre l’américanisme, LePère Hecker est-il un saint ? (1898), intéres-sant à comparer avec la lettre de Léon XIIIau cardinal Gibbons (1899) [Lettre par la-quelle Léon XIII condamne l’américanis-me] ; contre le démocratisme, Nationalisme,Catholicisme, Révolution (1901) ; contre lePère Maumus (…), La Souveraineté du peu-ple est une hérésie (1902) ; contre le moder-nisme, Nouveau Catholicisme et NouveauClergé (1902). En 1904, il est à Rome pro-cureur général de sa congrégation» (POU-LAT, p. 274) «qui avait exercé une influenceconsidérable sur les débuts du mouvementcatholique social en France. Longtemps ré-putée comme une citadelle de l’antilibéra-lisme, elle n’avait pu échapper aux divisionsqui travaillaient le catholicisme : “Nulle fa-mille religieuse, il faut l’avouer, n’était plusexposée que la nôtre, par la nature mêmede ses œuvres, de ses relations avec le mon-

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de ouvrier, de son recrutement qui se faiten grande partie dans la classe populairedes villes, à subir l’influence des idées révo-lutionnaires et des nouveautés doctrinalesqui en proviennent” (CH. MAIGNEN, Vie deJean-Léon Le Prévost, p. 524)» (POULAT, p.420). Aussi, en janvier 1907, le cardinal Ri-chard était-il chargé par Rome de faire uneenquête. Celui-ci la confia à son coadjuteur,Mgr Amette, ami du Père Anizan, premierassistant du supérieur général, le Père Le-clerc. C’est ainsi que l’enquête eut l’effet in-verse de celui désiré par Rome, le PèreAnizan s’opposant à son supérieur et au Pè-re Maignen. Le Père Leclerc une fois décé-dé, en août 1907, le Père Anizan, «qui avaitreçu l’empreinte de Dupanloup», fut élu su-périeur des Frères de Saint-Vincent, et lePère Maignen fut envoyé à la maison mèrede Tournai. L’élection représentait «le tri-omphe des modernes sur la tradition.» Maisles choses n’en finirent pas là. Au prin-temps 1913, le Père Jules Saubat (qui, com-me le Père Maignen était du S.P.!) reçut deRome la mission de visiter toutes les mai-sons de l’Institut. Son rapport sur le supé-riorat du Père Anizan fut négatif, ce pourquoi la congrégation des religieux, en jan-vier 1914, émit un décret, en confiant la no-tification et l’exécution au Père Saubat : lesupérieur général était destitué, les élec-tions suspendues, le Saint-Siège devaitpourvoir directement à la nomination auxhautes charges. «Près d’un tiers des 250 reli-gieux (en France, les deux tiers) demandè-rent à être sécularisés : Pie X le leur accor-da sans grâce et on parla de rébellion. Avecplusieurs d’entre eux et l’accord de BenoîtXV, le Père Anizan fondera en 1918 unenouvelle congrégation, les Fils de la Chari-té» (POULAT, p. 421). «À l’heure du plusgrave péril – commente au contraire le car-dinal Billot – le grand pape Pie X est inter-venu : il a sauvé l’Institut». Le dernier ou-vrage du Père Maignen fut La Doctrine so-ciale de l’Église d’après les encycliques(1933). À la suite du Père Maignen, deuxautres pères appartinrent aussi au S.P. : lesPères Rollin et Hello. Charles Rollin (1880-1942), «après divers ministères» fut «secré-taire général en 1925 et, en 1931, assistantgénéral de sa congrégation», tandis qu’Hen-ri Hello (1859-1941), neveu d’Ernest Helloet du Père Émile Hello, de la même congré-gation, tous deux plus connus, fut «assistant

Le cardinal Hector-Irénée Sevin, archevêque de Lyon

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général de 1899 à 1904, en retrait sous le su-périorat du Père Anizan, maître des novicesde 1914 à 1936. Il a laissé plusieurs brochu-res, dont Les Libertés modernes d’après lesencycliques (1900), Le Syllabus au XXème

siècle (1906), La Franc-maçonnerie et l’ou-vrier (1909), et un livre de Conseils pour ladirection des œuvres de jeunesse» (POULAT,pp. 591-592). Enfin, pour conclure le chapi-tre sur les Frères de Saint-Vincent, rappe-lons le Père Henri Jeoffroid (1880-1961), leseul ecclésiastique, avec le Père Saubat, quise soit rendu aux funérailles de Mgr Beni-gni bien que n’ayant (peut-être) pas appar-tenu au S.P., et témoin, comme le Père Sau-bat, au procès de canonisation de saint PieX (Disquisitio, p. 43 ; éd. française, Publica-tions du Courrier de Rome, p. 77). «HenriJeoffroid est né à Dunkerque en 1880, aînéde huit enfants au sein d’une famille trèschrétienne. Entré à 19 ans au noviciat desFrères de Saint-Vincent-de-Paul, il est en-voyé ensuite à Rome, au Scolasticat de saCongrégation. Ordonné prêtre en 1906, ilcommence une longue carrière romaine,entrecoupée par la guerre et quatre ansd’apostolat à Lille. En 1922, il rentre à Ro-me, mais cette fois comme professeur au-près du R.P. Charles Maignen. Le PèreJeoffroid est un éducateur et un homme deterrain, fervent défenseur du patronagequ’il connaît depuis son enfance. Il retrouvel’œuvre à Rome pendant ses études, puisdevient le premier aumônier des Prati diCastello, célèbre patronage romain. Le jeu-ne prêtre assume cette charge pendant septans, et y exerce une grande influence. Doc-trinalement, le P. Jeoffroid est un théolo-gien solide formé à l’école du cardinalBillot, un thomiste fervent, un passionnéd’histoire de l’Église, un adversaire acharnédu libéralisme. Il est digne héritier de l’éco-le antilibérale et contre-révolutionnaire,celle des Mgrs Pie, Freppel, Ségur, des dé-cennies précédentes. C’est un fils fidèle deQuanta Cura, du Syllabus, de Pascendi. Ilest décrit comme un catholique antilibéralantimoderniste comme le souligne son bio-graphe [le théologien Ernest Mura, de sacongrégation] : “(Il) resta en éveil sur tou-tes les déviations dont notre temps n’estque trop fécond. Bien conscient que la véri-té divine c’est Dieu même, et que protégerles âmes contre les infiltrations des multi-ples erreurs de notre temps c’était sauve-

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garder leur vie surnaturelle, il n’admettaitaucune compromission avec les formes lesplus variées du libéralisme et du modernis-me. Lui si bon par nature se montrait intrai-table pour l’erreur, persuadé que la premiè-re charité à pratiquer consiste à défendreles âmes contre l’empoisonnement de l’er-reur. ‘La corruption des mœurs, disait-il ensubstance, est un mal guérissable, mais laperversion de l’intelligence est humaine-ment sans remède, parce qu’elle supprimela racine même de tout bien qui est laconnaissance du vrai.’”» (CHRISTOPHE CA-RICHON, Un scoutisme catholique est-il pos-sible? L’affaire Jeoffroid-Sevin (1924), Pu-blications de l’Université de Montpellier 3,2003, pp. 108-109). Le Père Jeoffroid estconnu pour son mémoire sur le scoutismeet l’affaire qui s’ensuivit (entre 1922 et1924) du fait de sa dénonciation, bien docu-mentée, des influences de la Théosophiesur le mouvement scout de Baden-Powel,fondé en 1907, il y a juste un siècle. Trèsbien documenté, le P. Jeoffroid écrit (endeux versions) un mémorial intitulé ‘Lescoutisme catholique et la théosophie’ et ilen fait part, entre autres, à l’évêque deCambrai, Mgr Chollet, au cardinal Billot,qui alerte le Pape, au cardinal Van Rossum,à Mgr Benigni, qui le transmet à l’abbéBoulin pour qu’il s’en serve dans un articlede la RISS (PIERRE COLMET, Le procès duscoutisme, RISS, n. 19, 13 mai 1924). Pie XIétait surtout frappé du danger d’intercon-fessionalisme que représentait le mouve-ment. Le père du scoutisme catholique, lejésuite Sevin [ne pas confondre avec le car-dinal Sevin], ne réussit à sauver son œuvrede la condamnation qu’en admettant lesdangers dénoncés et en faisant “amendehonorable” (cf. son ouvrage Les leçons denotre séjour à Rome), quitte ensuite à ou-blier rapidement ses promesses, lorsqu’en1925, le scoutisme catholique sera bénit parle Pape. La suite des événements démontresuffisamment qui avait raison…

Quant au Père Jules Saubat (1867-1949), c’est aux Prêtres du Sacré-Cœur deBétharram qu’il appartenait ; il en était leProcurateur général à Rome ; avec saintPie X et le Père Maignen, il collabora, com-me nous l’avons vu, à sauver les Frères deSaint-Vincent de la dérive philo-moder-niste. Le cardinal Vives avait présenté lePère Saubat à Mgr Benigni en le proposant

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comme Secrétaire de la Diète du S.P. etdonc comme son étroit collaborateur ; et,témoignant au procès de canonisation desaint Pie X, le Père Saubat fit un vrai pané-gyrique de Mgr Benigni (Disquisitio, pp. 25ss ; éd. fr. pp. 67-76). «Consulteur de laCongrégation des religieux du Sacré-Cœurde Jésus de Bétharram, secrétaire de laDiète du S.P., [il] avait été chargé par leSaint-Siège de la visite apostolique de troiscongrégations françaises : le Bon-Sauveurde Caen (dont sera nommé supérieur unmembre du S.P., le P. Alphonse George),les Franciscaines de Villeurbanne, et sur-tout les Frères de Saint-Vincent-de-Paul»,nous l’avons vu (POULAT, op. cit.). Legrand mérite de saint Pie X, qui se servitaussi pour cette œuvre du S.P., consista jus-tement dans le fait qu’il ne lutta pas contrele modernisme et l’hérésie seulement dansl’abstrait, dans des documents qui seraientdemeurés lettre morte, mais concrètement,cherchant à éloigner des postes de respon-sabilité les personnes sur lesquelles il nepouvait compter. Il semble qu’en 1914,après les Frères de Saint-Vincent-de-Paul,saint Pie X ait eu l’intention d’intervenir defaçon bien plus délicate et sensationnellejusque dans la Compagnie de Jésus, en des-tituant le général (élu à vie, comme onsait), le Père Wernz, pour le remplacer parle Père Mattiussi. La mort quasimentcontemporaine du Père Wernz et de saintPie X rendit vain ce projet de réformer lesjésuites et (en ce qui concerne la mort desaint Pie X), d’extirper définitivement lemodernisme «du sein et des entraillesmêmes de l’Église».

Parmi les membres du S.P. on remarquela pénurie de prêtres séculiers. Cependantle seul nom que nous ayons, celui de l’abbé

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Paul Boulin (1875-1933), est celui du princi-pal représentant du S.P. en France (les Pè-res Saubat et Maignen ayant vécu à Rome)et l’ami intime de Mgr Benigni jusqu’en1929 (c’est leur jugement sur le Concordaten Italie qui les divisera). É. Poulat a faitjustice de nombreuses calomnies et faussesinformations qui, paresse ou malhonnêtetéintellectuelle, courent sur l’abbé Boulin (cf.Intégrisme…, p. 73, n. 18). «Prêtre du diocè-se de Troyes en 1898, curé de Faux-Ville-cerf (…), directeur de division à l’ÉcoleBossuet (Paris, octobre 1902), curé dansl’Oise au début de 1906, rédacteur à L’Uni-vers [jadis le journal de Veuillot] à Paris,novembre 1908, où il signe Roger Duguet,et dont il devient secrétaire général en mars1912 lors de son rachat par un groupe mo-narchiste» tendance Action Française. «Il seplie mal à la nouvelle orientation et reçoitson congé en novembre» (POULAT, pp. 70,343-345). À cette époque l’abbé Boulin faitdéjà partie du Sodalitium Pianum, et peutdonc collaborer à la revue catholique inté-grale contrôlée par le S.P., La Vigie(5/12/1912-6/8/1914) dont “Roger Duguet”est secrétaire général. Saint Pie X encoura-ge la revue de sa bénédiction apostolique(26 mars 1913) mais le cardinal archevêquede Paris, Amette, ne partage pas les vues duPape et pour faire éloigner l’abbé de Paris,siège de La Vigie, il le fait rappeler dansson diocèse d’origine où il est nommé curéde Saint-Pouange (155 habitants !). «Dès ladéclaration de guerre une perquisition estordonnée à son domicile et il est muté duservice auxiliaire à l’armé active. Démobili-sé en 1919, il est nommé professeur au col-lège diocésain de Troyes. La mort du cardi-nal Amette (août 1920) lui permet de reve-nir à Paris : il lance en 1921 une revue bi-mensuelle, L’Actualité catholique, bientôtsuspendue d’ordre du Saint-Siège» (p. 72),malgré la protection du cardinal arche-vêque de Paris, Dubois (p. 43), suite à lacampagne contre le Sodalitium Pianum me-née en France et à Rome par les jésuites etle Père Mourret, et qui aboutit à la dissolu-tion définitive de l’association le 8 décemb-re 1921. Dans ce que nous pourrions appe-ler un excès de légitime défense, l’abbéBoulin publie alors sous le pseudonyme d’I.de Récalde une série de brochures antijé-suites dont une seulement fut mise à l’Indexen 1923. Entre-temps, de 1922 à 1929, il est

Le Père Jules Saubat (à droite) avec Mgr Umberto Benigni

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le rédacteur principal de la Revue Interna-tionale des sociétés secrètes de Mgr Jouin,où il signe souvent Pierre Colmet, revueplusieurs fois encouragée aussi par BenoîtXV et par le secrétaire d’État, le cardinalGasparri, qui avaient pourtant demandé ladissolution du S.P. Opposé, comme nousl’avons vu, aux accords du Latran, en juin1929 il se retire à Moussey (Aube), où jus-qu’à sa mort, survenue en juillet 1933, ilcontinuera d’écrire (par exemple dans lesCahiers antijudéo-maçonniques). Durant salongue carrière de curé et de journaliste ca-tholique, l’abbé Boulin a écrit aussi denombreux romans catholiques. JacquesPloncard d’Assac raconte avoir connu à Pa-ris Mgr Benigni et l’abbé Boulin ; aussidans son Église occupée, consacrera-t-il unchapitre entier au Sodalitium Pianum.

Parmi les laïcs, outre le bienfaiteurAlfred Simon (1866-1946), deux noms mé-ritent d’être mentionnés : Rocafort etMerlier. Jacques Rocafort (1860-1939), «néet mort à Perpignan, agrégé et docteur èslettres, professeur de lycée, depuis 1899 àParis où il se trouva bientôt au cœur desluttes politico-religieuses (racontées dansses livres Mes campagnes catholiques 1900-1910, 1910 ; Autour des directions de Pie X.Un épisode personnel, 1912 ; Les Résistan-ces à la politique religieuse de Pie X, 1920).(…) Après avoir milité à la Ligue de la Pa-trie Française, aux côtés de J. Lemaître etF. Coppée, il passa à l’Action libérale popu-laire de J. Piou qui, en mars 1907, lui confiaune mission à Rome ; il en revint conquispar Pie X et Benigni. Collaborateur del’Univers et de La Correspondance deRome, membre du Sodalitium Pianum jus-qu’en 1911, il fera désormais campagne enFrance pour les ‘directives pontificales’, sesuscitant de puissantes animosités dont lapresse se fait l’organe ou l’écho, de mêmeque la Chambre des députés (débat du 14janvier 1910). Cette évolution [du catholi-cisme libéral au catholicisme intégral,n.d.r.] lui fut souvent reprochée» (POULAT,p. 592; à la p. 593, il explique quelques-unsdes motifs qui éloignèrent Rocafort du S.P.en 1911). Henri Merlier (1869-1952), fut,toute sa vie, un journaliste catholique et unpolémiste redoutable. Il fut «secrétaire derédaction à la Chronique picarde, rédacteurà La Riposte d’Amiens [sa ville natale] de1904 à 1910, directeur du Journal d’Albert

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(1905-1913) et rédacteur en chef de La Pi-cardie (1911-1912), directeur de La Vigie(1912-1914)», le périodique parisien des ca-tholiques intégraux français lié au S.P., «duNouveau Publicateur de la Vendée (1917-1922), de La Libre Vendée (1922-1924), duCourrier de la Manche de Saint-Lô et deL’Opinion de la Manche d’Avranches(1925-1932). Il revient alors dans la régionparisienne à la demande d’Alfred Simonpour s’occuper de la collection Vérités(1927-1939, 61 numéros) dont les rédac-teurs signent Luc-Verus», collection à la-quelle collabore également l’abbé Boulin.Durant sa période militante au S.P. (etmême auparavant), Merlier se disait etétait exclusivement catholique («Toutes lesformes de gouvernement m’indiffèrent lesunes autant que les autres (…) Je suis uncatholique endurci, un clérical si vous pré-férez, mais c’est tout, et je suis très heureuxde n’être que cela») et ce n’est qu’ensuite, àpartir de 1922, qu’il adhéra à l’Action Fran-çaise, comme Mgr Benigni adhéra au ré-gime fasciste. C’est le signe d’une défaite :celle du catholicisme intégral qui ne trouveplus, dans le mouvement catholique occupépar les démocrates-chrétiens, l’espace quilui était dû. Pourtant, «c’est de votre côtéqu’est la dernière réserve, la dernière res-source, la dernière chance de salut», luiécrira le cardinal Billot le 11 mars 1924.

Mgr Benigni a toujours nié l’apparte-nance au S.P. du Père Salvien, alors que lesennemis du S.P. sont certains de cette ap-partenance ; ce qui est sûr, c’est que, si le P.Salvien n’en fut pas membre, il fut bienplus qu’un ami du Sodalitium, et mérite unecourte notice biographique. «Charles Mi-glietti (1873-1934), en religion le Père Sal-vien, assomptionniste, né à Marseille d’unpère italien», fut ordonné prêtre en 1899.Selon la vocation de sa congrégation, iljoua un rôle de premier plan dans les mi-lieux du journalisme et de la presse catho-lique : «attaché à la Maison de la BonnePresse de 1896 à 1923, il s’y occupa de plu-sieurs revues, particulièrement de la Chro-nique de la presse (1900-1914), qui ‘résumeles journaux’, des Questions actuelles (1887-1914), qui les ‘complète’, de L’action catho-lique (1899-1914), et de la Revue d’organi-sation et de défense religieuse (1906-1914).Il utilisait pour ses articles plusieurs signa-tures : Ricard (du nom de sa mère), Ch. P.

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« L’Unità Cattolica », journal édité à Turin sous la direction de l’abbé Giacomo Margotti. Ce numéro du 20septembre 1870 sortit bordé de noir pour marquer la perte du pouvoir temporel des Papes suite à la brèche

de Porta Pia. Plusieurs journaux intransigeants seront bordés de noir jusqu’au concordat de 1929

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et Rod. (initiales de deux de ses revues)…Après la guerre, il fut le fondateur et, de1919 à 1923, le premier rédacteur en chefde la Documentation catholique, née de lafusion des quatres revues précédentes. (…)Il mit une puissance de travail exception-nelle au service d’une information religieu-se qu’il voulait précise et documentée, maisaussi d’un intransigeantisme catholiquedont il ne dévia jamais. Son goût pour lesactivités discrètes rejoignait celui de Beni-gni (…) et trouvait un emploi dans son Bol-lettino : dossier de presse qu’il servait à lasecrétairerie d’État (…). Un autre pontifi-cat jugera opportun de lui imposer unestricte retraite» (POULAT, pp. 286-287). Lesennemis du S.P. qui diffusèrent le dossierdu Père Mourret en 1921 tentèrent d’en-traîner le Père Salvien dans la ruine du S.P.même, mais sans y parvenir immédiate-mente car le Père Salvien pouvait comptersur l’appui des cardinaux de Paris et deLyon, Dubois et Maurin. Mais peu après lePère Salvien fut sacrifié durant les pourpar-lers entre le Vatican et le gouvernementfrançais à propos des “associations diocé-saines” (les ‘associations cultuelles’condamnées par saint Pie X à l’occasion dela séparation de l’Église et de l’État enFrance, furent reconnues sous le nom d’as-sociations diocésaines et avec des change-ments importants par Pie XI grâce au car-dinal Gasparri, secrétaire d’État). Dans cecontexte, «le Père Salvien était un hommeprécieux pour sa compétence, discuté pour

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son intransigeance (…). Le nonce utilisaitses services, le gouvernement surveillait sacorrespondance ; le Saint-Siège voulaitaboutir : s’irritant de son opposition, il dé-cida de l’envoyer hors d’Europe. Le PèreSalvien réussit à rester, mais finalement,d’ordre du Pape, il dut quitter Paris le 28février 1923 pour Sanremo (Italie), puispeu après pour le Tessin, à Locarno(Suisse), où il passa dix ans. Frappé d’hémi-plégie, il fut ramené à Lorgues (Var), où ilmourut le 26 octobre 1934 et fut inhumé»(POULAT, pp. 575-576). «Vous avez rendu àM. Merlier et à La Vigie trop de servicespour que je les oublie» lui écrira l’abbéBoulin le 23 mars 1919 ; si le P. Salvienn’était pas – et il ne le fut pas – du S.P., ilen partagea cependant les idéaux, les com-bats, et la défaite humaine.

Hors du S.P. : Mgr Delassus et l’abbéBarbier

Ils n’appartinrent jamais au S.P., maiseurent des relations amicales avec Mgr Be-nigni et d’autres personnages importants duS.P., étant eux-mêmes en France les princi-paux représentants du “catholicisme inté-gral”. Nous voulons parler de Mgr Delassuset de l’abbé Barbier, dont les œuvres princi-pales sont, encore de nos jours, rééditées.«Henri Delassus (1836-1921), ordonnéprêtre en 1862, nommé à Lille en 1874 cha-pelain de N.-D. de la Treille et en mêmetemps directeur de la Semaine religieuse deCambrai dont il acquit la propriété, et dontil fit un des bastions de la lutte contre le li-béralisme, le modernisme et toutes les for-mes de ‘la conspiration antichrétienne dansle monde’ [autrement dit le judaïsme, lafranc-maçonnerie, l’occultisme etc, n.d.r.](…). Chanoine honoraire en 1882, prélatdomestique en 1904, protonotaire aposto-lique en 1911. En 1913, à la division du dio-cèse de Cambrai, il fut rattaché au nouveaudiocèse de Lille et nommé doyen du Chapi-tre. Ses principaux ouvrages : L’América-nisme et la Conjuration anti-chrétienne(1899) ; Le Problème de l’heure présente :antagonisme de deux civilisations (1904, 2vol.) ; L’Encyclique Pascendi et la Démocra-tie (1908) ; La Conjuration anti-chrétienne :le temple maçonnique voulant s’élever sur lesruines de l’Église catholique (1910, 3 vol.) ;La Démocratie chrétienne : parti et école vus

Mgr Henri Delassus

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FEDE E RAGIONE[FOI ET RAISON]

Nous publions ci-dessous l’éditorial du pre-mier numéro (décembre 1919) du journal

“Fede e Ragione” de l’abbé de Töth dans le-quel est illustré son programme catholique in-tégral. Pour plus d’informations sur l’abbé deTöth, on peut consulter l’article des pages 21-22 de ce même numéro.

«...ephemeridum integre catholicarum»Pie X, bref au P. Chiaudano.

«integram servare Fidem»Benoît XV encycl. “Ad beatissimi”.

Ces paroles des deux Souverains Ponti-fes, que nous avons prises pour devise

de notre périodique, en indiquent claire-ment à la fois la nature et la fin.

C’EST POUR DÉFENDRE L’INTÉ-GRITÉ DE LA DOCTRINE CATHO-LIQUE ET DANS LE BUT PRÉCISQUE CETTE MÊME DOCTRINE RE-DEVIENNE ET SOIT FAITE LA NOR-ME SUPRÊME DE TOUTES LES MA-NIFESTATIONS DE LA PENSÉE ETDE LA VIE DES CATHOLIQUES,QUE SORT CETTE REVUE.

Personne ne pourra nous le nier : demultiples et délétères erreurs polluent,

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L’abbé Emmanuel

Barbier

du diocèse de Cambrai (1911) ; L’Esprit fa-milial dans la maison, dans la Cité et dansl’État (1911) ; La Mission posthume de labienheureuse Jeanne d’Arc et le règne socialde N.S.J.C. (1914). “L’étude et la défenseacharnée de la vérité furent la grande pas-sion de sa vie, et son courage ne connut pasune heure de défaillance” (Semaine religieu-se de Lille, 1922, p. 505)» (POULAT, p. 259).Sur Mgr Delassus on peut lire l’ouvrage deLOUIS MEDLER, Mgr Delassus (1836-1921).Face à la conjuration antichrétienne, un maî-tre contre-révolutionnaire, Éd. du Sel de laTerre, Avrillé, 2ème éd. mai 2005.

«Emmanuel Barbier (1851-1924), né àPoitiers, jésuite, fils et frère de magistratsdémissionnaires en 1880 [car ils refusent leslois anticatholiques de la III

èmerépublique,

n.d.a.], recteur à Paris en 1887 de l’externatSaint-Ignace (rue de Madrid) et fondateurde l’externat Saint-Louis de Gonzague, rec-teur en 1895 du collège de Poitiers, auquelil donna une vive impulsion jusqu’à la loi de1901 (…), aumônier général de l’A.C.J.F.en 1902. Il se fait incardiner en 1905 au dio-cèse de Poitiers : il avait obtenu de quitterla Compagnie en raison d’un conflitd’orientation qui va l’engager désormaisdans la bataille d’idée et une intense pro-duction littéraire, dont la substance a passédans son Histoire du catholicisme libéral etdu catholicisme social en France, du Conciledu Vatican à l’avènement de Benoît XV(1870-1914), Bordeaux, 1924, 5 vol. et ta-bles» (POULAT, p. 76). Nombreux sont lescombats que «la personnalité la plus mar-quante de l’intégrisme en France» a menésdepuis les pages de sa revue parisienne, LaCritique du libéralisme (revue bimestrielle,parue du 15 octobre 1908 au mois d’août1914, pour un total de 140 numéros), qui,avec La Semaine Religieuse de Cambrai deMgr Delassus sont les deux seules “publica-tions amies” françaises recommandées parle S.P. En 1908 – sous saint Pie X, donc –deux livres de l’abbé Barbier contre le Ral-liement furent mis à l’Index ; ce malgréquoi le même saint Pie X ne manqua jamaisde manifester au prêtre français son estime,de lui accorder son soutien et son aide : «Ànotre très cher fils Emmanuel Barbier,Prêtre – lui écrivait le Souverain Pontife le3 mai 1912 – en le félicitant de tout cœurd’avoir très bien mérité de la cause catho-lique, en priant Dieu de lui accorder en ré-

compense toute prospérité et toutes faveurs,Nous accordons très affectueusement en té-moignage de Notre bienveillance la bénédic-tion apostolique».

Sur l’abbé Barbier, on peut lire MAURICEBRILLAUD-YVES CHIRON, L’abbé EmmanuelBarbier (1851-1925), éd. Clovis, 2005.

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chez un grand nombre, la pureté de lacroyance chrétienne et, en conséquence,l’activité des catholiques, en tant que sim-ples individus et en tant qu’associés aussibien dans le domaine économique et socialque dans le domaine politique, est impré-gnée de principes qui sont l’émanation di-recte du libéralisme et du naturalisme.

Telle est, pour prendre un exemple, lathéorie, aujourd’hui en vogue, de la sépara-tion de la Foi de tout ce qui est action –aconfessionalisme – , théorie à cause de la-quelle l’activité des catholiques s’est beau-coup éloignée des règles et des normes,dont seule une action véritablement catho-lique tire et reçoit ce qui la différencie detoutes les autres et de ce qui fait sa vraiephysionomie.

Sur ce fait ont influé aussi beaucoup lescirconstances de la période déplorable dontnous venons de sortir.

La guerre ne fit en effet que précipiter lemal déjà en chemin et affaiblir, hélas, tou-jours davantage le travail de résistance descatholiques ; on ne peut pas dire commentet quand les ennemis de la vérité et de la Foisurent tirer profit de ces circonstances poursemer, en toute tranquillité, à pleines mains,la zizanie dans le champ du père de famille.

Combien et à quel point a servi à la pé-nétration du mal, de l’erreur dans notrecamp, la prétendue union sacrée, parrespect de laquelle les catholiques se laissè-rent aller à mettre de côté toute préoccupa-tion des problèmes religieux, qui sont et se-ront toujours les problèmes fondamentaux,suprêmes de la vie humaine, pour ne prêterattention toutes ces dernières annéesqu’aux intérêts matériels de la patrie !

Il est vrai que des tentatives ont été etsont faites pour conserver à la société le pa-trimoine divin que l’on doit au christia-nisme, et pour la défendre de sombrer dansl’ultime apostasie ; mais la démangeaisonde s’opposer au mal par les armes de demi-mesures ; la fausse persuasion que, pour serendre les adversaires favorables, il conve-nait d’en accepter les principes, adaptant ladoctrine catholique à des replis qu’elle nesupporte pas, et à des opportunismes qui fi-nissent presque toujours par la défigurer etla corrompre ; - la tendance à humaniser, ànaturaliser le surnaturel et la Foi, tout celafait que les efforts des catholiques demeu-rent stériles et sans fruit.

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Et qui plus est, ils servent à renforcer, dumoins indirectement, le travail délétère desadversaires, qui voient les catholiques apla-nir eux-mêmes la voie à la pénétration dansnotre camp de leurs maximes erronées.

Par conséquent, si les catholiques veu-lent réellement opposer une digue au malqui se répand, à l’onde qui tenterait de sub-merger dans l’abîme toutes nos œuvres,s’ils veulent sauver la Foi, cette Foi qui estl’unique et infaillible lumière dans l’ascen-sion vers le vrai et le bien de l’homme, entant que simple individu, et de la société, ilfaut ouvrir les yeux, revenir sur nos pas.

Ouvrir les yeux, c’est-à-dire, com-prendre le devoir que nous avons tous depenser juste, exactement, de raisonnernotre action afin d’éliminer et d’excluretoute erreur des principes de cette action.

Tel est le premier et le plus fondamentaldes devoirs d’un catholique. Il faut com-prendre combien est sot, criminel même,un certain pragmatisme déraisonnable dontse contente une multitude infinie des nôtresqui vivent sans penser, qui n’agissent quepar instinct, par habitude, par un sentimen-talisme purement aveugle, sans une lumièreintellectuelle pour les diriger, en un motsans intelligence, sans vision de ce quiconvient pour être catholique, sans volonté.

Nous en sommes arrivés en effet au-jourd’hui au point de trouver des catho-liques qui vont jusqu’à oser mêmeconfondre cette démence qu’ils font leur,avec la Foi ! Comme si ce n’était pas vrai-ment la Foi qui, au nom de la raison, nousoblige à avoir comme principes d’action, detoutes nos actions des “convictions” fermeset absolues, c’est-à-dire une connaissancecertaine, définitive, raisonnée de ses vérités“immuables”, et non de simples “opinions”fluctuantes, relatives, indécises et incer-taines comme la pensée des hommes.

Et ce, pas seulement pour ce qui regardela vérité révélée, c’est-à-dire le dogme pro-posé et enseigné par l’Église, mais égalementce qui a un rapport et une relation avec lesdomaines rationnel et philosophique, et, parconséquent, politique et social.

Même sur ce terrain, c’est-à-dire mêmeen ce qui regarde des matières philoso-phiques, politiques et sociales, la Foi catho-lique, en parfaite harmonie avec les don-nées les plus vraies et les plus certaines dela raison, de la nature, de la science, interdit

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aux “catholiques” certaines opinions qui nepeuvent logiquement s’accorder avec elle.

À l’opposé, cette même Foi nous oblige,nous catholiques, à considérer commevraies ; à professer intérieurement et exté-rieurement ; à incorporer, pour ainsi dire,dans notre vie publique et privée ; à adoptercomme principes d’action, certaines doctri-nes et certaines convictions philosophiques,historiques, politiques, sociales bien déter-minées, seules compatibles avec elle.

Mais qui le croirait ?... C’est justementcela qu’un nombre infini de catholiques necomprennent pas et ignorent aujourd’huithéoriquement, et, pire encore, pratique-ment, allant même – et c’est le comble – jus-qu’à le rejeter positivement en faveur del’infatuation pestiférée de ce libéralisme, quiau sein même des catholiques, est devenudésormais la règle suprême du croire, penseret opérer, et qui se réduit en pratique à met-tre la raison au-dessus de la Foi et l’individuet la nature à la place et au lieu de Dieu.

Tous les maux, tous les dommages surlesquels pleure aujourd’hui notre sociétésont dus à ce renversement, et il n’y auraaucun remède tant que l’homme, recon-naissant l’ordre et la fin de sa création, nereviendra pas à l’amour de cette Foi quiseule aurait pu sauver sa raison desténèbres et de la confusion de l’erreur, etau désir de ce surnaturel, sans lequel la viehumaine demeure sans but et toute mani-festation de la vie, tant dans le domaine de

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la pensée que dans celui de l’action, de-meure privée du principe animateur et vivi-ficateur le plus vrai et profond.

De même en effet, que, sans la lumièresupérieure de la Foi, la lumière du pauvreintellect humain est fatalement condamnéeà s’obscurcir, de même, la vie humaine unefois enlevée à sa fin surnaturelle, la seulepour laquelle elle fut créée, chute nécessai-rement, se corrompt, se bestialise.

L’histoire entière en est une preuvecontinuelle.

C’est pour cette raison que, désireuxnous aussi d’apporter notre modeste contri-bution à l’œuvre de restauration spirituelleet morale de notre société, restauration quine pourra se faire jusqu’à ce que, commel’inculquent les deux Souverains Pontifesnommés en tête du présent article,retrouvent leur place parmi les hommes lesprincipes de la Foi, les principes chrétiensdans toute leur intégrité, et désireux égale-ment que le titre de notre périodique signi-fiât le plus clairement possible son inten-tion et sa fin, nous l’avons nommé “Fede eRagione”.

Cependant il ne faut pas croire que lapréférence et la prééminence que nous don-nons à la Foi au-dessus de la Raison, doiventnous rendre moins respectueux vis-à-vis dela Raison elle-même et de ses droits.

Catholiques, nous savons parfaitementtout le respect que la Foi veut que nousayons envers la Raison à l’examen de la-quelle non seulement elle permet mais com-mande que soient passées ces mêmes véritéssublimes qu’elle enseigne, heureuse, bienheureuse que les motifs de leur crédibilitésoient déclarés et proclamés par la raison.

Nous serons donc toujours très attentifsà ce que, dans toutes les diverses questionsque nous entreprendrons d’étudier etd’examiner, l’élément rationnel intègre etcomplète, si nous pouvons nous exprimerainsi, l’élément supérieur et l’affirmationde la foi, en sorte que, la lumière de l’unese projetant sur l’autre, soit révélé le lienmagnifique qui unit la raison à la Foi, la na-ture au surnaturel, l’homme à Dieu, ensorte d’autre part que se manifeste la sotti-se sacrilège de ceux qui tendent à distin-guer l’un de l’autre ces mêmes objets, nonmoins dans l’ordre théorique, ou de lacroyance pure, que dans l’ordre pratique,comme si l’action et la vie pouvaient être

Le premier numéro de « Fede e Ragione », décembre1919 (archives Giantulli-Vannoni, Verrua Savoia)

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indépendamment d’une pensée et d’uneidée, ou plutôt, n’aient pas à être l’incarna-tion et l’actuation d’une pensée et d’uneidée.

Ayant illustré et expliqué le titre denotre périodique et restant à concrétiser leprogramme que, par lui et en lui, nous en-tendons suivre, en relation avec le but gé-néral déclaré ci-dessus, nous affirmons :

Nous sommes, en premier lieu, purementet intégralement catholiques en ce sens quenous reconnaissons le plein droit de la doc-trine, de la discipline et des directives del’Église non seulement sur l’individu et dansles questions strictement religieuses, maisaussi sur la société, et au regard de toutequestion mixte ou telle qu’elle touche mêmeindirectement la Foi et la morale.

C’est pourquoi, comme il est clair, nouslutterons pour le principe de l’autorité, dela tradition, et de l’ordre religieux et socialdans le sens catholique de ces mots et dansses déductions logiques sous la conduite su-prême du Siège apostolique et de ses su-bordonnés, les évêques, institués parl’Esprit pour gouverner l’Église de Dieu.

Nous serons par conséquent adversairesdéclarés et irréconciliables, tant sur le ter-rain religieux que sur le terrain politico-so-cial, de toute forme de libéralisme, commecelui qui refuse de reconnaître les droitssouverains de Dieu, du Christ et de l’Églisesur la vie des individus et de la société,d’une part, et de l’autre, se refuse à rejeterle principe révolutionnaire et maçonniquedu droit public de l’athéisme, dont, selon laparole du Très Éminent Cardinal Andrieu,archevêque de Bordeaux, il est “le compliceet le fidèle allié”.

Dans cette revue et avec l’aide de Dieu,seront mises à nu toute la fausseté desmaximes et toute l’hypocrisie des équi-voques du libéralisme. Maximes commecelles-ci par exemple : – Il faut accepter lesfaits accomplis – Il ne faut pas s’opposer àl’opinion [commune] – Se mettre à revendi-quer directement et explicitement les droitsde Dieu est chose vaine, temps perdu –Toutes les opinions sincères sont respecta-bles – Il faut éviter attentivement tout ce quipeut être cause de division – etc., etc.

Paroles équivoques telles que : – Évolu-tion nécessaire – Démocratie – Liberté deconscience – Souveraineté et empire del’opinion publique – et ainsi de suite.

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Par ailleurs dans notre observation,dans notre critique tout autant que dansnotre action, nous jugerons et nous nous ef-forcerons de juger en partant toujours d’unpoint de vue “catholique”, c’est-à-dire d’unpoint de vue “universel” tant dans le tempsque dans l’espace.

Il faut en effet rappeler que sous les di-verses contingences momentanées et lo-cales, demeure toujours, au fond du moins,la lutte séculaire et cosmopolite entre lesdeux grandes forces qui se partagent lemonde : la cité de Dieu, autrement ditl’Église catholique, apostolique, romained’un côté et, de l’autre, l’ensemble de sesadversaires tant externes, c’est-à-dire ceuxqui se déclarent loyalement et franchementanticatholiques et antireligieux, qu’internes,autrement dit les faux amis de l’Église et dela religion.

Les ennemis externes – judaïsme, franc-maçonnerie, socialisme et sectes affiliéesformant en opposition avec la cité de Dieula cité du monde – sont entre les mains dupouvoir central hostile à l’Église ; les enne-mis internes, par contre – modernistes, dé-mocrates, libéraux etc, – servent aux pre-miers d’instrument plus ou moins conscientd’infiltration, de pénétration et de décom-position dans notre camp.

C’est bien clair : nous combattrons lasecte et ses complices et alliés internes etexternes, toujours, partout et de toutes nosforces, démasquant leurs buts et leurs in-tentions.

Il y a des catholiques qui, entendant par-ler de franc-maçonnerie, haussent les épau-les et rient comme s’il y avait là puérilité. Ilsne pensent pas que la secte maçonnique estl’incarnation de l’anticatholicisme et de lacontre-église et que son pouvoir étend soninfluence néfaste à travers le monde entieret dans tous les rameaux de la société.

On ne le croit pas, mais c’est vrai : lasecte maçonnique étend partout ses tenta-cules et a partout ses émissaires, conscientset inconscients peu importe, qui la serventavec fidélité et zèle, qui lui servent de pontet de chemin pour s’introduire même là oùon ne l’imaginerait pas, je veux dire jusquedans le sanctuaire.

Ayant l’or des Juifs à sa disposition, lasecte se prépare maintenant à des bataillesdécisives contre l’Église, partout, mais spé-cialement ici en Italie : c’est pourquoi

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notre périodique ne se lassera jamais delancer son cri d’alarme et de ralliement.

Et il faut espérer qu’il sera entendu deceux qui aiment sincèrement la religion etl’Église et qu’ils se rallieront.

Ensuite, nous lutterons ouvertement, in-lassablement pour la solution de la ques-tion romaine, considérée tant sous sonaspect religieux que sous son aspect poli-tique ; pour la revendication aussi desdroits civils du Souverain Pontife et contretoute tentative d’où qu’elle puisse venir, dediminuer et même seulement de dissimulerces droits, sacrés entre tous au cœur de toutfidèle, de tout vrai catholique, comme ceuxqui impliquent la liberté elle-même del’exercice des magistère et ministère suprê-mes du Pontife romain dans le monde.

Il est temps enfin que toute sa libertésoit restituée, de fait et pas seulement enparoles, au Pape, Vicaire du Christ, Maîtrede la Vérité, Gardien de la morale et Ven-geur de la Justice sur la terre. Il ne doit su-bir aucune coarctation dans son ministère :il doit aussi apparaître extérieurement cequ’il est réellement : roi, prince de l’huma-nité chrétienne.

À la défense des droits du PontificatRomain nous conjuguerons nos effortscontre toute tentative sectaire tendant à di-minuer l’influence politico-sociale de la Pa-pauté et en général de l’Église sur la sociétéet dans les états.

Pour ce faire nous ferons une guerresans quartier au laïcisme sous toutes sesformes et, en premier, au laïcisme intellec-tuel ou doctrinaire, à ce système quis’efforce d’ignorer Dieu et de L’exclure dumonde par prétérition, c’est-à-dire sousprétexte que la raison pure non seulementne peut arriver à connaître Dieu, mais nepeut pas non plus savoir si un Dieu existe.

Nous nous efforcerons de démontrer aucontraire que non seulement la raison par-vient très bien à la démonstration de l’exis-tence d’un Dieu réel, personnel, créateurde toutes choses et fin dernière de l’uni-vers, l’homme y compris, mais que ce prin-cipe, dans le même temps vérité de raisonet de Foi, est la véritable clef de tous lesproblèmes qui agitent l’humanité.

Nous aimons répéter les magnifiques pa-roles d’un grand apologiste français actuelle-ment en vie : “Dieu ! voilà l’unique réponseà toutes les questions vitales de l’heure”.

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Si les catholiques parvenaient enfin à sepersuader de cette vérité, c’est-à-dire del’absolue nécessité de ramener toutes cho-ses à Dieu, quel gaspillage de forceépargné ! combien de victoires remportées !

C’est en effet le concept, l’estime dusurnaturel, comme nous disions plus haut,qui fait le plus défaut aujourd’hui aux ca-tholiques et aux chrétiens, sinon théorique-ment, du moins pratiquement, et c’est cedéfaut de surnaturel, ce défaut de Dieu quirend leur action exsangue et stérile, l’abais-sant au niveau d’une quelconque activitéhumaine, alors que les catholiques, selonl’expression forte de l’immortel et saint PieX, devraient former en ce monde l’armée,le parti de Dieu : “partes faventium Deo”.

Les principes et les doctrines se dévelop-pant et se réalisant nécessairement dansl’action, il est clair qu’immédiatement aprèsle laïcisme doctrinal, nous devronsconcentrer nos efforts contre le laïcismemoral, démontrant qu’il ne peut et ne pour-ra jamais y avoir aucune morale ni aucunevertu, autorité, liberté, en un mot aucunevraie vie morale tant dans l’individu quedans la société sans la reconnaissance, lerespect, la crainte, l’amour d’un Dieu réel,créateur et fin dernière de toutes choses, etsans l’observance entière et absolue de laloi divine, c’est-à-dire du Décalogue, uniqueloi de moralité, qui fut perfectionnée par lesÉvangiles et promulguée par l’Église.

Enlevez le Décalogue, et aucune doc-trine morale ne sera plus possible ; or, sansdoctrine morale il n’y a et ne peut plus yavoir aucune pratique morale logique, tantgénérale qu’habituelle. Une fois enlevés leDécalogue et Dieu, la pratique morale seraquelque chose d’exceptionnel, ou, mieux,une morale illogique et illusoire ; ce quidoit aboutir nécessairement à la négationde toute morale tant dans les individus quedans la société.

Une fois démontré le sacrilège que re-présente le laïcisme intellectuel ou doctri-naire et la contradiction, l’absurdité du laï-cisme moral, de ladite morale laïque, on enviendra aux diverses manifestations de lavie et aux diverses institutions de la socié-té ; il faudra alors viser en premier lieu lelaïcisme scolaire, autrement dit l’écolelaïque, combattant contre le monopole sco-laire de l’état et pour le principe de la liber-té de l’école et de l’enseignement, qui est le

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plus sacré des droits de la conscience et dela pensée d’une nation chrétienne.

Il faut insister et faire comprendre en ef-fet que, tout en accordant à l’état chrétien ledroit de veiller sur l’école et le devoir de nepas permettre que ça et là surgissent et pul-lulent à volonté des écoles sans que ceux quiles fondent, les dirigent et y enseignent aientaucune responsabilité vis-à-vis de l’état le-quel, outre l’obligation de ne pas être athéeet ignare comme un âne, a même l’obligationprécise envers les nations chrétiennes d’êtrelui-même chrétien, à l’état en soi n’incombeaucune fonction éducative ; que le rôled’éduquer revient aux parents des éduqués,lesquels sont en droit de prétendre quel’éducation que leurs enfants recevront àl’école, corresponde à leurs vœux, à leursconvictions religieuses, traditions et aspira-tions ; qu’ils ont le droit de vouloir que laconscience et la morale de leurs enfantssoient protégées et renforcées par l’ensei-gnement qui leur sera imparti ; ce qui chezles chrétiens ne pourra être obtenu qu’aumoyen de l’école chrétienne confessionnelle.

Du laïcisme scolaire, la lutte s’étendra àcelui que nous nous plaisons à appeler laï-cisme d’état, qui est non seulement la plusmonstrueuse des folies, mais aussi la plusmonstrueuse des injustices et des tyrannies,le sacrilège le plus horrible dont notre so-ciété se soit souillée et rendue coupable.

En effet, le laïcisme d’état, camouflé sousles formes de la séparation de l’Église et del’État, de ladite neutralité de l’état face auxproblèmes religieux et à la religion, n’est au-tre que la proclamation officielle de l’athéis-me, la négation solennelle, publique et so-ciale non seulement de telle ou telle formereligieuse donnée, mais carrément de la Di-vinité, la négation pure et simple de Dieu,contre lequel le dieu-état élève ses autels.

Il y a des catholiques qui, dans la théo-rie de la séparation de l’Église et de l’État,ne voient aucun mal, aucun danger, etmême se faisant l’écho de l’hypocrisie libé-rale, disent que l’Église ne pourrait qu’y ga-gner ; mais ces gens-là se font des illusions.

Si, bien que commettant la grave erreurde se séparer de l’Église, l’état se rappelaitle devoir que le droit naturel, pas supprimémais élevé au moyen des institutions surna-turelles de l’Église, lui impose de recon-naître Dieu et de l’honorer et le faire hono-rer de ses sujets, le principe de la sépara-

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tion de l’Église et de l’État pourrait encorepasser. Mais le sens dans lequel elle est en-tendue ne signifie rien d’autre que la néga-tion non seulement de l’Église, mais de tou-te religion, de tout culte, même naturel ; cen’est autre que le refus de l’État de recon-naître Dieu, ce n’est qu’athéisme.

Et le concept d’état neutre, si cher au li-béralisme qui cherche par ce moyen à sedéfendre d’être taxé d’athéisme, revient aumême. Les deux concepts se rejoignent ets’unissent.

Il est clair et évident en effet que l’état,en se déclarant athée et sans religion, parlà-même cesse d’être neutre. Tant il est vraiqu’un franc-maçon de haut grade, définis-sant le concept de laïcisme intégral d’état,disait : “Le laïcisme intégral d’état est l’ap-plication pure et simple de la libre pensée àla vie collective de la société”.

C’est pourquoi, les catholiques qui veu-lent être fidèles et cohérents avec leurs prin-cipes ne doivent pas demander ni se conten-ter de demander que l’état respecte la liber-té de l’Église, acceptant du moins implicite-ment le principe de la neutralité de l’étatainsi que celui de la séparation de l’Église etde l’État ; ils doivent prétendre et s’efforcerde faire en sorte que l’état reconnaissel’Église non comme une quelconque institu-tion, mais comme une institution divine, quilui est supérieure, comme l’unique vraie reli-gion, devant laquelle il doit encore s’inclineret à laquelle il doit obéir.

Il faut que les catholiques fassent com-prendre aux masses que l’état ne peut pas,n’a pas le droit d’être laïque ou areligieux,de même qu’il ne peut, ne doit pas être amo-ral, indifférent à la famille, à la patrie etqu’au contraire, au milieu de nations chré-tiennes pour lesquelles le christianismeconstitue et représente non seulementl’unité de pensée sur les problèmes suprê-mes de la vie, mais aussi celle de la morale,il a l’imprescriptible devoir d’être chrétien,c’est-à-dire de s’inspirer des mêmes prin-cipes que ses gouvernés.

À l’opposé, le libéralisme, qui obscurcitet aveugle l’esprit de tant de catholiques,veut et ne peut pas ne pas vouloir tout lecontraire.

Le libéralisme est parfaitement logiquelorsqu’il refuse de tolérer une doctrine quitend à restreindre la liberté humaine aunom d’un principe et d’un droit supérieur à

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cette même liberté, ce que fait la doctrinecatholique.

En effet, seul le catholicisme affirme etose affirmer que la loi humaine doit res-treindre la liberté publique au nom de la loimorale, qui est, au fond, la loi de Dieu. Etc’est là la raison pour laquelle le libéra-lisme ne peut tolérer le catholicisme ou,mieux, la concrétisation du catholicisme,l’Église : il s’agit d’une impossibilité méta-physique. Mais ne voulant pas avoir l’air derefuser carrément Dieu et sa loi, le libéra-lisme met en avant les biens que la sépara-tion de l’Église, c’est-à-dire de la religion,et de l’État procure à la société et à la reli-gion elle-même ; séparation qui, mettant,en pratique, la Religion et l’Église à la dis-crétion de l’état, donne à ce dernier l’op-portunité de l’opprimer et de la persécuterde mille façons, jusqu’à l’exclure complète-ment de la vie des peuples.

C’est pour cela que les catholiques nedoivent pas demander la liberté du catholi-cisme au nom du principe générique de li-berté pour tout et pour tous ; mais ils doi-vent démontrer – et nous le démontrerons –que la liberté ne peut être si l’état nerespecte pas et ne fait pas respecter les doc-trines et les institutions nécessaires à la so-ciété et ne restreint pas la liberté des doc-trines contraires.

De même que la liberté patriotique res-treint nécessairement la liberté anti-patrio-tique, la liberté morale et religieuse doitrestreindre la liberté anti-morale et anti-re-ligieuse.

Il est temps que les catholiques, les vraiscatholiques, qui veulent sauver la société etl’Italie, se mettent tous d’accord et s’unis-sent sur ce terrain solide et clair du bon senset cessent d’être les alliés de ce libéralismepolitico-religieux qui les exploite, tout en seriant de leur naïveté et de leur faiblesse.

Dans un second temps les catholiquesdoivent démontrer que l’état est tenu depratiquer, de professer, de protéger la vraiereligion ; chose qui peut être faite sans quesoit entamée aucune liberté, individuelle ousociale, digne de ce nom.

Enfin il faut montrer que l’état ne peutêtre laïque sans devenir le pire des tyrans etsans légitimer toutes les plus tristes révoltes.

Voilà ce que les catholiques doivent dire,répéter, clamer continuellement sans peur,ce que nous, dans cette revue, nous dirons et

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crierons, voilà pourquoi l’étude des relationsentre Église et état sera l’un de nos sujetsd’étude les plus suivis, afin de ressusciter leconcept trop oublié selon lequel l’Église estau-dessus de l’état et l’état doit prendre d’el-le les normes morales en vue d’un heureuxgouvernement de la nation et de la société.

Mais le laïcisme d’état – il faut le rappe-ler – plus qu’un principe, est aussi la consé-quence d’un autre principe des plus fatals :le laïcisme démocratique.

Vous voulez savoir quelle est la base dela terrible équivoque contenue dans la pa-role magique, démocratie ?

Eh bien la voici.Il est une vérité essentielle de bon sens,

de raison et de foi autant dans l’ordre socialque dans l’ordre politique : c’est que la vo-lonté et la loi de Dieu (Décalogue et Évan-giles promulgués par l’Église) sont au-des-sus de la volonté tant particulière que géné-rale des hommes. La loi ne peut donc être,comme on le prétend aujourd’hui, l’expres-sion de la volonté générale ; au contraire,pour avoir force d’obligation, elle doit êtreconforme à la loi de Dieu.

Au contraire, le principe essentiel et leconcept substantiel de la démocratie mo-derne est que la volonté populaire, autre-ment dit la volonté du plus grand nombre(hier corps électoral ou nation, demain,peut-être, prolétariat universel), constitueet le droit et la loi qui dépendent d’elle.

Cela semble incroyable, mais c’est vrai !Nonobstant la condamnation explicite decette théorie par le Syllabus (Proposition 60),il ne manque pas de catholiques pour la sou-tenir, du moins en partie, encore aujourd’hui,et s’obstiner à ne voir dans la démocratiequ’une forme de gouvernement, et non unedoctrine philosophique et sociale et parconséquent religieuse, ou mieux areligieuse,et donc par nécessité absolue antireligieuse.

Le démocratisme moderne est une doc-trine qui, chez les adversaires du Christ etde l’Église et dans leurs intentions, doit,dans le droit public, substituer à la loi éter-nelle, à la loi morale, à la loi de Dieu, à lavolonté de Dieu, la volonté générale, c’est-à-dire la volonté de l’homme et du nombre.Une telle démocratie née de l’égocentrismelibéral de la Réforme, est donc irrémédia-blement laïque.

C’est pourquoi aucun catholique, aucunhomme de bon sens ne peut se dire démo-

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crate sans avoir d’abord démontré de quellemanière il christianise sa démocratie. Maishélas, il ne s’en est pas encore trouvé unseul qui le sache faire et, sans vouloir êtreprophète, il ne s’en trouvera pas.

Que dire alors de ceux qui – nous par-lons de notre camp – vont inculquant desprincipes comme celui-ci : - Vous êtes libresd’avoir l’opinion politique qu’il vous plaît.

Cette liberté pourrait être permise sitoutes les opinions politiques étaient égale-ment honnêtes dans le sens philosophiquedu terme et également compatibles avec ladoctrine politique du catholicisme.

Mais c’est tout le contraire.Allez savoir, de grâce, combien de ca-

tholiques connaissent l’essentiel au moinsde la doctrine politique du catholicisme etse préoccupent d’y conformer leurs opi-nions ?… Hélas celles-ci ne sont la plupartdu temps que le résultat de l’ignorance, del’oubli, d’erreurs : démocratisme, libéralis-me, socialisme et demi-socialisme, positivis-me agnostique, voilà les doctrines, les prin-cipes à l’origine des opinions politiques detant et tant de catholiques.

Mais comment de telles doctrines pour-raient-elles s’accorder avec l’ensemble dela doctrine catholique ?

Une équivoque non moins désastreuseconsiste à dire et soutenir cette chose quel’on entend souvent : -L’Église est et doitêtre au dehors et au-dessus de tous les partis-.

Ce qui, encore une fois, serait et pour-rait être vrai si tous les partis étaient égale-ment honnêtes, toujours dans le sens philo-sophique du terme, et également respec-tueux du droit naturel et du droit chrétien.

En fait et en pratique, ici aussi, et mêmespécialement ici, c’est tout l’inverse.

Dans les faits, dans la réalité, ici cheznous, en Italie comme ailleurs, il n’y a pasdes partis, il n’y a que des doctrines, etmême deux doctrines seulement : la doctri-ne catholique (1) et son contraire laïque ; ladoctrine des droits de Dieu et celle des droitsde l’homme ; la doctrine de l’Église et cellede la contre-église, que cette doctrine senomme maçonnique, socialiste ou anar-chique, peu importe ; la doctrine de 1789 etla doctrine des Évangiles, du Christ, deDieu.

Quelle conciliation peut-on concevoirentre des doctrines si opposées ?…

Certainement aucune !

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Ce pour quoi, les catholiques, mettant àl’écart tout ce qui concourt à diminuer ou àasservir la doctrine catholique au principe dumonde, doivent se rassembler pour faire ensorte que celle-ci triomphe et que se forme le“parti de Dieu”, parti de la véritable démo-cratie, entendue dans le sens de l’Église.

C’est dans ce très noble but, sur la basedes divers points ci-dessus mentionnés quetravaillera notre périodique.

Il luttera également contre le laïcismesocial ou socialisme en faveur de l’harmo-nie chrétienne des diverses classes socialesentre elles, selon les principes et les tradi-tions de justice et de charité enseignés etvécus par l’Église, et contre ces autres pro-duits de l’esprit laïque que sont l’aconfes-sionalisme et l’interconfessionalisme, afinqu’à l’action catholique soit intégralementconservée de fait, partout, en tout et tou-jours, sa pureté.

La lutte contre le laïcisme social estmultiple, et nous voulons la développerdans les points suivants :

1° “Il faut combattre l’erreur perfide dusocialisme, erreur née de la démocratielaïque, doctrine essentiellement maçon-nique dans son origine et aboutissant, dansses conclusions, à la révolution et au bol-chevisme ;

2° Il faut combattre les semi-socialismeet modernisme social, professés, hélas !,

Frontispice du supplément de F&R n° 31 du 27 mars1921 (archives Giantulli-Vannoni, Verrua Savoia)

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par un nombre non indifférent de catho-liques ignorants, aveugles et obstinés ;

3° Il faut à toute force et avec le plusgrand soin inculquer le respect du septièmecommandement de la loi de Dieu, fonde-ment de la société ;

le droit absolu et immuable de la pro-priété personnelle, corporative, nationale,cherchant, vis-à-vis de ce droit comme debeaucoup d’autres points qui lui sont appa-rentés, à nous pénétrer des enseignementspontificaux, surtout de ceux contenus dansles documents immortels de Léon XIII etdans la lettre Apostolici muneris du saintPape, Pie X, les résumant tous. –

4° Il faut que les catholiques, se faisantl’écho de ces deux Pontifes affirment haute-ment à la face des ennemis de la société,francs-maçons et socialistes, les faits immua-bles suivants, fixés par la nature, voulus parDieu, auteur des individus et de la société :

- a) l’inégalité du bien-être matériel desindividus; - b) la distinction des diversesclasses sociales ; - c) le droit absolu à l’inté-gralité de l’héritage familial ; - d) le respectdes lois économiques naturelles, outrageu-sement méconnues par le socialisme nonmoins que par l’état moderne athée et mé-créant ; - e) la distinction nette et adéquateentre les devoirs de stricte justice et ceuxde la charité de la part des patrons et desouvriers ; - f) l’obligation, le devoir impres-criptible pour les ouvriers de respecter lecontrat de travail, pourvu qu’il soit honnêteet honnêtement rétribué.

5° Il faut dénoncer, au nom de la doc-trine catholique, le délit, la folie, l’impiétédes rêves de coalition économique et socia-le et toute forme d’organisation profession-nelle aboutissant au socialisme, ainsi quetout syndicalisme neutre ou amoral, commecelui qui conduit fatalement à la lutte anti-chrétienne des classes entre elles.

Comme nous l’avons mentionné, notrerevue engagera aussi le combat contrel’aconfessionalisme et l’interconfessionalis-me si à la mode aujourd’hui dans le campde l’action catholique et qui conduisentinévitablement au laïcisme pur et simple.

Le caractère distinctif de l’action des ca-tholiques, dans toutes les branches de leuractivité, doit être le principe catholique,doit être Dieu.

Car, taire Dieu, ignorer Dieu, se passerde Dieu n’est pas seulement, pour nous

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catholiques et pour employer le terme sco-lastique, une négation, une simple lacune,mais une privation, c’est-à-dire l’absence, lemanque d’une Réalité nécessaire et, enl’espèce, de l’unique Réalité, sans laquelleil ne reste que le néant à la lettre, en tousordres et en toutes choses.

C’est ici qu’apparaît et se montre toutel’impiété et tout le dommage et le dangerde la philosophie agnostique, autrement ditde la philosophie laïque, ce qui est tout un ;- c’est ici que se révèle toute la nocivité dulibéralisme, même de celui qui se camouflesous des apparences catholiques, quiaccepte et consent de taire Dieu, de l’igno-rer, de le cacher, dans ses programmesgrandiloquants de vie politique et sociale.

Taire Dieu – il faut le rappeler – c’estnier Dieu, et l’action à base laïque, à formelaïque sous prétexte d’éliminer et d’éviter cequi peut être cause de division – église, reli-gion, Dieu – finit par éliminer et nier Dieu.

Y a-t-il impiété plus sacrilège et mons-trueuse ?… Dieu ne divise pas, au contraire,il est l’unique lien et anneau de conjonctiondes esprits et des âmes, l’unique lien social.

Par conséquent, pour un catholique,faire partie de toute œuvre sociale, patrio-tique, politique, économique à base laïqueou sans Dieu, dans laquelle les droits deDieu ne sont pas clairement exprimés et af-firmés, c’est ni plus ni moins une apostasie.

Et c’est en même temps une stupidité.La raison – c’est du moins ce que l’on

dit – pour laquelle tant de catholiquess’obstinent, dans leur action publique, so-ciale ou politique, à mettre en sourdine, lesdroits de Dieu, de la religion, de l’Église,est de pouvoir ainsi mieux pénétrer le campdes adversaires.

Nous, au contraire, nous disons quec’est là une illusion, rien d’autre.

Que le seul et unique instrument de pé-nétration possédé par le catholicisme pourconvertir les incrédules est justement,d’une part, cette base naturelle et ration-nelle de notre doctrine, laquelle constitueladite théologie naturelle, et d’autre part,pour ce qui est de nos adversaires, cegerme inné de religion qui se trouve dansl’esprit et la conscience de toute créaturehumaine, cette lumière qui, selon la parolede l’Évangile “illumine tout homme quivient en ce monde”, cet instinct qui porte etélève toutes les créatures vers Dieu, “té-

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moignage, comme disait Tertullien, d’uneâme naturellement chrétienne”.

Or le laïcisme, l’aconfessionalisme etl’interconfessionalisme éliminant, d’une ma-nière plus ou moins explicite, Dieu, la Foi enLui, et l’Église de la base et du fondementde toutes les actions possibles entre catho-liques et acatholiques ou non croyants, sup-prime précisément en nous l’instrument dela pénétration active et dans les adversairesl’organisme passif de la pénétrabilité.

Or – il faut se le rappeler et nous le ré-pétons intentionnellement – c’est là que ré-side tout le plan infernal du laïcisme ; c’estlà aussi que réside toute la lamentable illu-sion du libéralisme “complice et allié trèsfidèle de l’athéisme”.

Au lieu de pénétrer le camp adverse, cesont fatalement les catholiques prétenduslibéraux qui sont pénétrés, absorbant tout levenin des erreurs et des principes de leursennemis.

Le laïcisme en effet n’est rien d’autreque le libéralisme franc, logique, cynique.Et le libéralisme catholique, ce libéralismequi, par peur, par faiblesse, méconnaît lesurnaturel, supprime dans son action toutcaractère de confessionalité, se met àl’écart de Dieu, est un laïcisme incohérent,illogique, mensonger.

Le libéralisme catholique, qui peu à peudevient aconfessionalisme, interconfessiona-lisme, syndicalisme neutre, modernisme so-cial et parfois aussi semi-socialisme et fauxdémocratisme, est l’inverse du pragmatisme.Le pragmatisme est l’erreur de ceux quidisent : – je ne sais ni ne peux savoir s’il y aun Dieu, une vérité absolue, une loi divine,

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qu’il faut respecter ; mais il faut agir commesi Dieu existait ; - le catholique libéral, àl’opposé, confesse que Dieu existe, maisdans la pratique, dans le droit publique,dans la vie il accepte et consent à œuvrercomme si Dieu n’existait pas.

Telle est l’extrême conséquence, à la-quelle, hélas, arrivent un certain nombre decatholiques et qui fait que l’action catho-lique ne se distingue en rien de celle deleurs adversaires et des ennemis de Dieu, etconcourt même malheureusement à lui ser-vir de marchepied et de soutien.

En effet de même que nos adversairesne craignent rien plus que nos affirmationsnettes et tranchantes, rien ne les fait plusjubiler que cette faiblesse qui nous fait ca-cher notre caractère et fait de nous leursserviteurs et leurs esclaves, abaissant ennous la sainteté des principes et de la doc-trine divine que nous professons.

Telles sont les plus graves et principalesquestions sur lesquelles porteront notre ré-flexion et notre travail dans cette revue :cependant nous nous occuperons aussi dupatriotisme et du féminisme. À l’encontrede ce nationalisme païen auquel le conceptde patrie est uni aujourd’hui, et qui fait par-faitement pendant au syndicalisme areli-gieux, le nationalisme païen considérant lesnations de la même façon que le syndicalis-me religieux considère les classes sociales,c’est-à-dire comme des collectivités, chacu-ne de ces collectivités pouvant et devantmême défendre ses propres intérêts et com-battre en excluant et allant au besoin à l’en-contre les intérêts des autres, nous défen-drons le vrai concept et le véritable amourde la patrie ; de même, à l’encontre de ceféminisme, qui tend à dénaturer la femme,la menant dans des champs d’action et decombat qui ne sont pas les siens, nous illus-trerons l’action de la femme tant par rap-port à la vie de famille qu’à la société.

La critique bibliographique, faite avecles critères les plus sérieux et impartiaux,ainsi que diverses notes scientifiques, auservice tant du clergé que des associés laïcs,complèteront le travail de notre pério-dique.

Et voilà exposé notre programme.Nous avons voulu l’exposer amplement,

point par point, notre intention n’étant passeulement de développer un programmepurement théorique ou philosophique,

Les armes du Papesaint Pie X

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mais, comme l’auront compris les lecteurs,un véritable programme d’action.

Foi et Raison ne sort pas seulementpour rappeler et réaffirmer ce que, sur di-vers points mentionnés, enseigne et imposel’ensemble de la doctrine catholique, ladoctrine de l’Église, mais pour être encoreune centre de rassemblement de tous lescatholiques, prêtres et laïcs, qui veulents’unir à nous pour opposer une action fran-che et courageuse à l’invasion des principesnéfastes du libéralisme, du naturalisme, dulaïcisme qui menacent de ruiner toutes nosactivités.

Nous souhaitons que notre appel trouveun large consensus et un large écho parminos frères catholiques qui comprennent,comme nous, la gravité de l’heure, et souhai-tent cette restauration chrétienne qui seule,pourra donner la paix à notre société.

Alors au travail !Lors du lancement du premier numéro

de la revue “Comunismo”, organe du socia-lisme léniniste ou anarchiste d’Italie, sondirecteur pouvait se vanter du fait que lesmoyens pour débuter sa publication luiavaient été fournis par les compagnons dugouvernement des “Soviets” russes.

L’affirmation contient peut-être desexagérations ; mais tout le monde connaîtle zèle avec lequel les ennemis de la vérité,les socialistes en l’espèce, soutiennent leurpresse pour la divulgation de leurs idées.

Aux catholiques il en incombe autant et,disons-le aussi une fois, nous espérons quetous ceux auxquels parviendra le présentfascicule nous enverront, jointe à leurpropre adhésion, celle de quelque ami, afinque soit atteint le plus rapidement possiblele nombre d’associés permettant de faireface aux frais du périodique et de lancerl’œuvre de propagande et d’action dont ildoit être l’organe et le porte-voix.

LA DIRECTION

1) Par doctrine de l’Église nous entendons la doc-trine des Évangiles, telle qu’elle a été proclamée parl’Église dans ses Conciles et par les Pontifes Romainsdans leurs multiples documents ; telle qu’elle est ex-pliquée et commentée dans les œuvres des Pères etdes Docteurs ecclésiastiques, surtout de saint Thomasd’Aquin.

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Le 25 avril à Verrua Savoia, s’est dérouléela cérémonie de prise d’habit de la secon-

de sœur de l’Institut Mater Boni Consilii quia pris le nom de sœur Gemma. Nombreuxétaient les fidèles et le clergé présents àl’émouvante cérémonie. La nouvelle maison,dédiée à Marie Auxiliatrice, a ouvert ses por-tes pour accueillir nos religieuses. Enfin,notre défunt chien Pluto a un successeur…qui assurera la garde de la maison : une ma-gnifique chienne beige appelée Birba…

La deuxième religieuse de l’Institut M.B.C.

Vie de l’Institut en images

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Ordres sacrés au séminaire

Le 26 avril, en la fête de Notre-Da-me du Bon Conseil, notre patron-

ne, Mgr Geert Stuyver a conféré lesordres de la tonsure et du sous-diaco-nat à nos séminaristes. La visite denos confrères argentins et américainsa été très appréciée (photo à droite).

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IVème édition du pèlerinage Osimo-Lorette

Samedi 19 mai et dimanche 20mai, plus de 120 pèlerins se sont

rassemblés à Osimo pour rallier à pied la basiliquede Lorette. Ce furent deux jours intenses de ferven-tes prières et de recueillement où tous furent com-blés des grâces de la Mère de Dieu. Cette annéeparticipait même un groupe d’enfants conduits parnos religieuses.

Pèlerinage Notre-Dame-de-l’Osier

En mai, quelle joie de gravir les pentes sur les pas deNotre-Dame-de-l’Osier. Au milieu de nombreux en-fants et de quatre prêtres, les chants et les prières sesont faits plus pressants en ces temps d’apostasie. Mer-ci à Notre-Dame et aux religieuses du Christ-Roi !

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Conférences

Le 17 mars, une conférence publique àTrente a été organisée par le “comitato

San Simonino”, nouvellement constitué,pour demander larestitution des re-liques et la restau-ration du culte dusaint. L’abbé Ri-cossa y est inter-venu pour com-menter “Pasquedi sangue”, le “li-vre censuré” deAriel Toaff. À no-ter que la presselocale s’y est largement intéressée.

Nooss ccoonnfféérreenncceess àà PPaarriiss eenn 22000077 : alorsque l’Institut fêtera bientôt ses deux

ans de ministère à Paris, ces conférencesdeviennent des rendez-vous traditionnels.Les abbés Murro et J. Le Gal ont parlé enmars sur l’infaillibilité pontificale, l’abbéRicossa en octobre pour souligner l’anti-thèse entre l’œuvre de saint Pie X et l’ac-tion actuelle de Benoît XVI. Ces conféren-

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ces parisiennes mobilisent un nombre tou-jours plus grand de fidèles pour faire enten-dre une voix intégralement catholique dansl’Église, et parmi les traditionalistes en par-ticulier ! D’ailleurs les enregistrements CDde ces conférences sont en vente dans cenuméro : une idée de cadeau pour Noël…

La nouvelle chapelle de Lyon

Depuiscet

été, nos fi-dèles deLyon ontla joied’assisteraux officesdans unnouveau local, à quelquesmètres du quai Saint-Vincent… là-même,où, il y a 40 ans, d’autres prêtres ont com-mencé la résistance aux changementsconciliaires. Le 21 octobre dernier, l’inau-guration de cette nouvelle chapelle a ras-semblé tous nos fidèles de la région. Du-rant cette belle journée, et en présence del’abbé Ricossa et de Mère Marie-Moniquede la Maison St-Joseph, chacun a pu affer-mir sa piété et sa doctrine, le tout dans unesprit d’une amitié toute catholique :Grand-Messe, repas, conférence de l’abbéMurro, chapelet et Salut du Très Saint-Sa-crement. Deo Gratias, et merci à tous nosbienfaiteurs que nous n’oublierons jamaisdans nos prières à l’autel !

Le martyr du petit St Simonde Trente

Conférence à Trente

Conférence à Paris

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CENTRES DE MESSES

CCOOMMMMEENNTT NNOOUUSS AAIIDDEERR

• LIBELLER À: ASSOCIATION MATER BONI CONSILII - 350 route de Mouchy - 58400 RAVEAU (France).

• VIREMENT BANCAIRE: Compte LCL Le Crédit Lyonnais (Références Internationales): IIBBAANN:: FR523000 2075 3100 0007 9074 U78 BBIICC: CRL YFRPP

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RÉSIDENCES DES PRETRES DE L’INSTITUTITALIE: Verrua Savoia (TO). Maison-Mère. Isti-

tuto Mater Boni Consilii - Località Carbignano,36. Ste Messe: en semaine à 7h30, le dimanche à18h. Tél.: +39.0161.83.93.35 Fax :+39.0161.83.93.34 - E-mail : [email protected]

San Martino dei Mulini (RN). Casa San Pio X.Abbé Ugo Carandino - Via Sarzana 86.Pour toute information, Tél (et Fax) +39.0541.75.89.61. E-mail : [email protected].

ARGENTINE: Rosario. Casa San José - AbbéSergio Casas-Silva, Iguazú 649 bis, C. P. 2000 -Rosario (Santa Fe). Tous les dimanches, SteMesse à 10h. E-mail : [email protected]

BELGIQUE: Dendermonde. Mgr Geert Stuyver:Kapel O.L.V. van Goede Raad, (chapelle N.-D.du Bon Conseil) Koning Albertstraat 146 - 9200Sint-Gillis Dendermonde: Ste Messe le diman-che à 9h30. Tél. (et Fax): (+32) (0) 52.38.07.78.

FRANCE: 350 route de Mouchy Raveau 58400.Pour toute information, tél. au 03.86.70.11.14.

AUTRES CENTRES DE MESSESFRANCE

Annecy: 11 avenue de la Mavéria. Tél.:09.53.16.39.01. Ste Messe le 2ème et 4ème dimanchedu mois à 10 h. Confessions à 9h.

Cannes: Chapelle N.-D. des Victoires. 4 rue Felle-gara. Tél.: 04.93.46.78.54. Ste Messe le 2ème et 4ème

dimanche du mois à 18h.Lille: Ste Messe le 1er et 3ème dimanche du mois à

17h. Confessions à 16h30. Pour toute infor-mation: Mgr Geert Stuyver en Belgique.

Lyon: Chapelle N.-D. du Bon Conseil. 11 rue Pa-reille. Tél.: 06.70.45.77.28. Ste Messe le 2ème et4ème dimanche du mois à 17h. Confessions àpartir de 16h30.

Paris:: 17 rue Bleue, 75009 (code 65B09, au fondde la cour à gauche, 2° étage). Ste Messe le 1er

et 3ème dimanche du mois à 10h30. Confessionsà 9h45. Autres dates possibles. Pour toute in-formation: 06.78.37.81.43.

ITALIEChieti Scalo: Oratorio del Preziosissimo Sangue, via

Colonnetta 148. Le 2ème dim. à 18h30, le 4ème dim. à 10h30.

Ferrare: Chiesa S. Luigi, Via Pacchenia 47 Al-barea. Ste Messe tous les dimanches à 17h30.Le 3ème dimanche du mois à 11h30.

Loro Ciuffenna (Arezzo): Fattoria del Colom-baio, str. dei 7 ponti. Ste Messe le 1er diman-che du mois à 17h30.

Maranello (Modène): Villa Senni. Strada per Fo-gliano. Ste Messe tous les dimanches à 11h, saufle 3ème dimanche du mois à 9h.

Milan: Oratorio San Ambrogio. Via Vivarini 3.Ste Messe tous les dimanches et fêtes à 11h.

Padoue: le 2ème dimanche du mois à 18h.Rimini: Oratorio San Gregorio Magno, via Mo-

lini 8: le 1er et 2ème dimanche Messe à 11h, le3ème et 4ème dimanche du mois à18h30.

Rome: Oratorio San Gregorio VII. Via Pietrodella Valle, 13/b: Messe le 1er, 3ème, 5ème dim. à11h.

Rovereto (Trente): Messe le 1er, 3ème, et 5ème di-manche du mois à 18h.

Turin: Oratorio del Sacro Cuore, via Thesauro3/D. Dimanches: Messe chantée à 9h. Messebasse à 11h15. Tous les premiers vendredis dumois: Messe à 18h15.

Valmadrera (Lecco): via Concordia, 21. Ste Messele 2ème et 4ème dimanche du mois.

Varèse - Modugno (BA) - Potenza: se renseignerà Verrua Savoia. Tél.: +39.0161.83.93.35

Confessions une demi-heure avant les messes.Pour toute information, téléphoner à Verrua

Savoia ou à San Martino dei Mulini.

EENN CCAASS DDEE NNOONN--LLIIVVRRAAIISSOONN,,VVEEUUIILLLLEEZZ RREENNVVOOYYEERR ÀÀ LL’’EEXXPPÉÉ--DDIITTEEUURR QQUUII SS’’EENNGGAAGGEE ÀÀ PPAAYYEERR LLEERREETTOOUURR ÀÀ LL’’EENNVVOOYYEEUURR:: AASSTTII CC..PP..OO

SSOODDAALLIITTIIUUMM PPEERRIIOODDIICCOO

Loc. Carbignano, 36.I - 10020 VERRUA SAVOIA (TO)Tél. +39. 0161.839.335 - Fax +39. 0161.839.334

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