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La preuve en droit pénal des affaires
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Les cahiers d’Avocap
Juillet 2015
Les cahiers d’Avocap – 1ère édition
Chaire de la Fondation pour le Droit Continental Casablanca (Maroc) – Janvier 2015
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Introduction :
Depuis les lois n° 93-‐ 2 du 4 Janvier 1993, n°93-‐1013 du 24 Août 1993, n° 2000-‐516 du 15 Juin 2000, n° 2002-‐307 du 4 Mars 2002, n° 2002-‐1138 du 9 Septembre 2002, n° 2011-‐392 du 14 Avril 2011, n°2014-‐535 du 27 Mai 2014, dont certains emportent transposition de directives européennes, davantage de droits ont été alloués à chacune des parties à un procès pénal, pour leur conférer un rôle actif dans l’apport et l’analyse d’éléments de preuves.
La caractéristique du système probatoire pénal français, résultant du principe de présomption d’innocence, principe ayant valeur constitutionnelle, est d’être un système inquisitoire : celui qui accuse doit apporter la preuve de ce qu’il allègue.
Ce système, sous l’influence de la Convention Européenne des Droits de l‘Homme et la jurisprudence de la CEDH, a évolué, en intégrant des procédés s’inspirant de pratiques anglo-‐saxonnes, dont le système probatoire est accusatoire.
Les arrêts, les évolutions législatives et les mentalités tendent aujourd’hui vers une égalité des armes, même dans une procédure portant atteinte à l’ordre public.
Davantage de droits ont été alloués :
-‐ au stade de l’enquête, avec l’intervention de l’avocat à l’audition et en garde à vue et l’accès à certains procès-‐verbaux du dossier ;
-‐ au stade de la mise en examen, qui peut souffrir d’une contestation par la personne poursuivie;
-‐ au stade de l’instruction : chacune des parties, partie civile ou mise en examen, peut faire des demandes d’actes, d’expertise, formuler des questions dans le cadre de missions d’expertise et solliciter l’accomplissement d’actes d’instruction complémentaire, utiles à la manifestation de la vérité;
-‐ avant l’audience : chacune des parties peut demander, surtout quand une procédure vient sur citation directe, des mesures d’instruction à la juridiction de jugement appelée à statuer, des actes qu’elles estiment nécessaires à la manifestation de la vérité, mesures qui
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peuvent être ordonnées, après avis du Parquet, par le Président de la juridiction, avant l’audience (article 388-‐5 du C.P.P.) ;
-‐ lors de l’audience : chacune des parties peut demander un supplément d’information, par référence à l’article 463 du C.P.P.
Le constat d’une telle évolution : le travail de l’avocat pénaliste est plus important, celui-‐ci intervient en amont, la durée des procédures est plus longue et l’ampleur des dossiers plus importante.
L’introduction du contradictoire dans le droit probatoire pénal français est intervenu parallèlement au développement du contentieux correctionnel qualifié de pénal des affaires et à l’entrée en vigueur du Nouveau Code Pénal.
Dans les années 1990, de nombreuses affaires telles que CARIGNON, BOTTON, ELF ont défrayé les chroniques : pour la première fois, des hommes en col blanc ont été placé en détention provisoire pour des faits liés à la vie des affaires.
Le Droit Pénal des Affaires (DPA) ne fait l’objet d’aucune définition légale.
Le DPA intègre des dispositions du Droit Pénal Spécial, mentionnées en annexe du Code Pénal et des infractions mentionnées dans le Code Pénal Général.
Les infractions, qui s’inscrivent dans le DPA, relèvent soit du Droit Pénal Commercial, soit du Droit Pénal de la Concurrence, soit du Droit de la Consommation et de la Bourse, soit du Droit Commercial ( ex. banqueroute).
Ces infractions peuvent résulter plus communément d’actes d’abus de biens sociaux, d’escroquerie, d’abus de confiance, de corruptions, faux, etc…
La première particularité du DPA est de viser des infractions commises dans le cadre de la vie d’une entreprise, des infractions qui sont sous-‐tendues par des considérations économiques et de profit.
Le délinquant, personne morale ou personne physique, société ou dirigeant, est un professionnel généralement avisé, accompagné ou assisté de conseils.
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La seconde particularité du DPA est la complexité des faits, leur opacité et le secret qui entoure la commission de faits répréhensibles dans le cadre de la vie économique.
Certes les Commissaires aux Comptes ont pour obligation, en vertu de l’article L 823-‐12 du Code de Commerce, de révéler au Procureur de la République tout fait délictueux dont ils auraient connaissance dans l’accomplissement de leur mission, mais cette seule déclaration ne porte que sur l’existence de soupçons et est insuffisante à elle-‐seule pour établir la moindre infraction en DPA.
Alors que le courant législatif en France tend depuis 1986 et surtout depuis le Rapport COULON de 2008 à une franche dépénalisation de la vie des affaires au profit de sanctions autres (administratives ou transactionnelles) et que le contentieux répressif en DPA ne représente que 5 % des affaires jugées, certaines procédures s’inscrivant dans le DPA, qualifiées de politico-‐financières, sont assorties d’un fort écho médiatique.
Ces vingt dernières années, une instrumentalisation du DPA a pu être constatée, instrumentalisation soit à des fins de déstabilisation politique, soit à des fins de règlements de comptes entre partenaires, associés, contractants.
La troisième particularité du DPA est que ces faits, assortis du secret des affaires, sont souvent révélés par des parties, par des sociétés ou des particuliers, lesquels peuvent jouer un rôle actif, à l’instar d’un Procureur de la République, dans l’initiative d’introduction de procédures répressives et dans l’apport d’éléments probants de faits répréhensibles allégués, soit au soutien d’une plainte simple, soit d’une plainte avec constitution de partie civile, soit d’une citation, soit d’une dénonciation.
La quatrième particularité du DPA est, compte tenu du cadre dans lequel s’inscrivent ces infractions et suivant le principe de primauté du droit communautaire sur le droit interne, de pouvoir contester le support légal de poursuites répressives, sur le fondement d’une éventuelle violation, par le Droit français, du droit du Traité Européen, ex. libre circulation de marchandises, de capitaux, de services etc…
La cinquième particularité du DPA est de constater que la criminalité, même en col blanc, profite de la perméabilité croissante des frontières,
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résultant de la mondialisation, exploite des nouveaux moyens de communication et les nouvelles technologies, afin de commettre des infractions sur une grande échelle et en blanchir le produit.
Certaines formes de criminalité sont dirigées précisément contre les intérêts mêmes de l’Union Européenne, infractions qualifiées d’euro-‐crimes. Ex : la fraude contre les intérêts financiers de l’Union etc…
D’autres infractions, en raison de la multiplicité des lieux d’intervention ou de commission, revêtent la qualification d’infractions transnationales.
L’internationalisation de la criminalité en DPA impose de nouveaux moyens de recherches de la preuve, de nouveaux outils et davantage de coopération avec des états étrangers et notamment les états membres de l’Union Européenne.
*
La preuve se définit comme « ce qui persuade l’esprit d’une vérité », c’est un élément de conviction grâce auquel l’existence d’un droit ou d’un fait se trouve établie.
La preuve consiste en « la démonstration de l’existence d’un fait, dans les formes admises par la loi ».
La preuve doit tenter d’emporter la conviction du juge, convaincre.
Le droit de la preuve a pour finalité une démonstration.
Le droit de la preuve a pour objet l’instrument, le mode de preuve, ex : le témoignage, l’indice, le document, l’aveu etc…
Suivant le cadre dans lequel s’inscrit ce droit de la preuve, les modes de preuve diffèrent.
Le droit français de la procédure pénale offre un panel de modes de preuve, un panel d’instruments, plus large que le panel de modes de preuve en droit civil.
La recherche de la vérité judiciaire est l’objectif majeur d’un procès pénal.
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La question de l’origine et de la valeur de la preuve est importante et ne peut être dissociée des impératifs d’efficacité et de célérité de la justice, contrainte de statuer dans un délai raisonnable, avec des moyens, dont le budget est, chaque année, réduit.
Le droit processuel français, qui se prévaut du respect du principe de présomption d’innocence tant qu’une personne incriminée n’est pas définitivement condamnée, a pour conséquence l’exigence de preuves des faits et de l’intention constitutive de l’infraction alléguée sur l’accusation.
En matière pénale, la preuve consiste à démontrer l’existence d’un fait, juridiquement répréhensible et son imputation à une personne déterminée, avec l’intention malveillante de celle-‐ci.
Le régime de la preuve est identique à tous les stades de la procédure pénale : en amont ou en aval, cette identité de la preuve relève de la théorie de l’unité de la preuve.
Ce qui est perçu comme un élément de preuve au stade de l’enquête doit pouvoir être perçu comme tel, par le juge d’instruction ou par les juges, au stade de l’audience correctionnelle.
Cette théorie d’unité de la preuve s’impose d’autant que la procédure pénale française repose sur un système inquisitoire, qu’il incombe à la partie poursuivante, soit le Ministère Public, soit une partie privée, d’apporter la preuve des faits répréhensibles allégués.
La partie civile, le Ministère Public, le Juge d’instruction jouent un rôle actif dans la recherche de la vérité judiciaire.
Plus récemment, la personne mise en examen, qui subit cette procédure, peut aussi jouer ce rôle actif.
Même si le vocable est différent, en fonction de divers stades de la procédure d’investigation, les poursuites doivent être fondées sur des faits et ces fondements sont qualifiés différemment suivant le stade de la procédure pénale:
-‐ Au stade d’une audition libre de témoin suspecté (article 61-‐1 du C.P.P.) « quand il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction… »
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-‐ Au stade de la garde à vue (article 62-‐2 du C.P.P.) « quand il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction… »
-‐ Au stade de l’audition de témoin (article 105 du C.P.P.) « les personnes à l’encontre desquelles existe des indices graves et concordants d’avoir participé aux faits dont le juge d’instruction est saisi ne peuvent être entendues comme témoins… »
-‐ Au stade de la mise en examen (article 80-‐1 du C.P.P.) « quand existent des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu’elles aient pu participer comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi… »
-‐ Au stade de l’ordonnance de renvoi du Juge d’Instruction (article 176 à 179 du C.P.P.) « s’il existe des charges constitutives d’infraction, dont il détermine la qualification juridique… »
-‐ Au stade du juge répressif (article 427 du C.P.P.) « Hors les cas où la loi en dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et le juge décide d’après son intime conviction. Le juge ne peut fonder sa décision que sur des preuves qui lui sont apportées au cours des débats et contradictoirement discutées devant lui… »
Le langage juridique a son importance en ce qu’il doit, par sa précision, maintenir intacte la présomption d’innocence, par l’usage du terme désignant exactement l’état de maturation des éléments de preuve.
La preuve ne peut être définitivement constituée que par le fait de la décision du juge qui se prononce selon une intime conviction motivée (articles 353, 427 et 536 du C.P.P.).
En matière pénale, le contrôle de la Cour de Cassation porte, selon les articles 591 et 593 du C.P.P. exclusivement sur les cas de violation de la loi ou la motivation des décisions, assorties ou non de motifs insuffisants, la Cour de Cassation n’exerce aucun pouvoir sur la preuve des faits, dont les éléments relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond, de première instance ou d’appel.
La preuve en droit pénal des affaires a pour support, des instruments, des modes de preuve distincts de ceux utilisés en droit pénal général.
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Les relevés de traces papillaires, les expertises balistiques, les autopsies, l’odorologie, les relevés salivaires ou d’ADN, la toxicologie, ne sont pas utilisés dans le Droit Pénal des Affaires.
Les sciences criminalistiques ou Forensic peuvent être employées lors d’écoutes téléphoniques, des analyses graphologiques peuvent aussi intervenir à la suite de saisies de documents, ou l’audio-‐analyse pour apprécier l’identification de voix.
Les supports de preuve en Droit Pénal des Affaires sont divers et sont bien différents de ceux utilisés en matière criminelle.
Les fraudes à la carte de paiement et sur internet sont actuellement en grande expansion : il est question de cyber-‐crimes à échelle internationale et de blanchiment.
La complexité dont les dossiers en DPA sont assortis, a motivé la création, par la loi du 9 Mars 2004, de Juridictions InterRégionales Spécialisées en matière économique et financière (JIRS), par la création d’équipe d’enquête et d’instruction, en huit lieux en France (Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux, Lille, Renne, Nancy, Fort de France).
La loi n°2013-‐1117 du 6 Décembre 2013, intégrée sous l’article 706 du C.P.P. , a conféré au JIRS des règles de compétence et d’intervention dérogatoire du droit commun.
Dans les affaires d’une grande complexité, ayant trait à la grande délinquance organisée, en raison du nombre des intervenants et des ressorts géographiques sur lesquelles elles s’étendent, la compétence territoriale d’un tribunal peut être étendue à plusieurs cours d’appel pour l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement des délits et une équipe de plusieurs magistrats peut être désignée pour co-‐travailler sur ces dossiers.
Le Parquet de PARIS, le juge d’instruction et le tribunal correctionnel de PARIS exercent, suivant les articles 705 et suivants du C.P.P., une compétence concurrente, pour les affaires de corruption, d’atteinte à la probité, d’escroquerie à la TVA complexes, et de fraude fiscale, à raison du nombre des auteurs, des victimes et des ressorts géographiques et une compétence nationale exclusive en matière boursière.
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La complexification du DPA, la spécialisation croissante des magistrats en charge de ces dossiers, l’influence des nouvelles techniques, la technicité croissante de moyens de preuve, la nécessaire recherche de preuves à l’étranger, toutes ces évolutions imposent une réflexion sur l’évolution de la preuve en droit pénal d’une part et une confrontation de cette évolution à cette aspiration, d’origine européenne, d’égalité des armes des parties, dans une procédure pénale, d’autre part.
La durée de la garde à vue peut être dérogatoire, en cas d’infraction d’escroquerie en bande organisée, depuis la loi du 27 Mai 2014, entrée en vigueur le 2 Juin 2014.
Selon l’article 62-‐2 du C.P.P., la garde à vue doit être l’unique moyen de parvenir notamment à certaines investigations et la garde à vue s’inscrit dans les opérations de recherches de preuve.
Sa durée est généralement de 24 heures renouvelable une fois (article 63 du C.P.P.).
L’article 706-‐73-‐8 bis intègre le délit d’escroquerie en bande organisée, lequel renvoie à l’article 706-‐88 du C.P.P., pour la durée de la garde à vue, qui peut exceptionnellement être renouvelée deux fois 24 heures, soit 96 heures au total, lorsque les faits ont porté atteinte à la dignité, à la sécurité ou à la vie des personnes.
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La preuve, en Droit Pénal des Affaires, sera abordée en deux parties :
-‐ Une description du système probatoire français en droit pénal; -‐ Les nouveautés liées à l’internationalisation et aux nouvelles technologies;
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I – LE SYSTEME PROBATOIRE FRANÇAIS EN DROIT PENAL DES AFFAIRES:
I-A : La charge de la preuve :
Le principe :
Le Droit français de la Procédure Pénale repose le principe de la présomption d’innocence.
Ce principe est énoncé dans les articles suivants :
-‐ Article 9 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 : « Tout prévenu est présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable… »
-‐ Article 11 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme : -‐ Article 6 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme : « Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie… »
-‐ Article 3 de la déclaration préalable du C.P.P. : « Toute personne suspectée ou poursuivie est présumée innocente, tant que sa culpabilité n’a pas été établie… »
-‐ Article 9-‐1 du Code Civil : « Chacun a droit au respect de la présomption d’innocence… »
Ce principe général a pour conséquence directe de faire peser la charge de la preuve de tout fait répréhensible sur l’accusation.
La valeur constitutionnelle de ce principe a été rappelée par le Conseil Constitutionnel, dans de nombreux arrêt.
Toutefois, ce principe n’est pas absolu.
Les aménagements :
Une application de ce principe de la charge de la preuve pesant exclusivement sur l’accusateur rendrait difficile la caractérisation de certaines infractions.
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Le droit pénal, surtout le DPA, admet par exception, soit des renversements ponctuels de la charge de la preuve, soit un allègement, en facilitant l’admission de la preuve de tel ou tel élément caractérisant l’infraction.
La technique du renversement de la charge de la preuve répond de constatations pratiques selon lesquelles le caractère fugace de la commission d’infractions ou la disparition rapide des traces rendrait difficile, voire impossible l’apport de la preuve par l’accusation.
Ce constat a conduit le législateur et dans une moindre mesure la jurisprudence, à aménager des présomptions qui tendent à tenir pour avérée, la constitution d’un des trois éléments constitutifs d’une infraction pénale, pour transférer sur la personne mise en cause, la charge de la preuve.
Le Conseil Constitutionnel a jugé ce procédé, qualifié de présomption de culpabilité, conforme à la constitution et nullement constitutif d’une atteinte à la présomption d’innocence :
« Les infractions peuvent être établies, notamment en matière contraventionnelle, dès lors qu’elles ne revêtent pas un caractère irréfragable, qu’est assuré le respect des droits de la défense et que les faits induisent raisonnablement la vraisemblance de l’imputabilité.. » ( Cons. Constit. 16 Juin 1999, Décision n°99-‐411 DC).
La Cour Européenne des Droits de l’Homme a admis ces procédés en commandant aux Etats de « les enserrer dans les limites raisonnables prenant en compte la gravité de l’enjeu et préservant les droits de la défense » et de rechercher si leur application est compatible avec la présomption d’innocence (CEDH 7 Octobre 1988, Salabiaku c. France requête n° 10519/83 ; CEDH, 25 Septembre 1992, Pham Hoang c. France requête n° 13191/87).
La Cour de Cassation a reconnu la conventionnalité de ces procédés dès lors que :
« Ces présomptions permettent d’apporter la preuve contraire et laissent entiers les droits de la défense… » (Crim 23 Mai 2007, Bull Crim 2007 n° 138).
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Ces présomptions, qu’elles soient législatives ou jurisprudentielles, obéissent toujours à la même technique qui consiste, à partir d’une situation de fait précisément caractérisée, à en inférer une réalité dont la démonstration immédiate est impossible.
Les présomptions s’attachent le plus souvent à la réalité de l’élément matériel et de son imputation à une personne qui, dès lors considérée comme l’auteur de l’infraction reprochée, doit rapporter la preuve de sa non-‐implication, mais à l’existence d’un élément moral.
Exemples de présomptions législatives, emportant renversement de la charge de la preuve, pour certains délits:
-‐ Article 225-‐6 du Code Pénal : le proxénétisme « dès lors qu’il est établi que vivant avec une personne qui se livre habituellement à la prostitution…, elle ne peut justifier de ressources correspondant à son train de vie… »
-‐ Article 321-‐6 du Code Pénal, créé par la loi n° 2006-‐64 du 23 Janvier 2006 : le délit de non justification de ressources « le fait de ne pas pouvoir justifier de ressources correspondant à son train de vie ou de ne pas pouvoir justifier de l’origine d’un bien détenu, tout en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs personnes qui soient se livrent à la commission de crimes ou de délits, punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement…. »
-‐ Article 392 du Code des Douanes, le délit de détention de marchandises en fraude ;
-‐ Article 418 du Code des Douanes, le délit d’introduction en contrebande de marchandises prohibées ;
-‐ Article L 121-‐2 du Code de la Route : « le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule est auteur d’une infraction à le règlement sur le stationnement des véhicules « à moins qu’il n’établisse l’existence d’une évènement de force majeur ou qu’il fournisse des renseignements permettant d’identifier l’auteur véritable de l’infraction.
-‐ Article L 121-‐3 du Code de la Route : « le titulaire du certificat d’immatriculation du véhicule ou le représentant légal de la personne morale propriétaire n’est redevable que de l’amende encourue en cas d’excès de vitesse, non-respect des règles de sécurité … à moins
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d’apporter tous les éléments permettant d’établir qu’il n’est pas l’auteur véritable de l’infraction »
-‐ Article L 8221-‐4 du Code du Travail : sur le délit de travail dissimulé.
-‐ Le droit douanier pose une présomption d’intérêt à la fraude à l’encontre des personnes énumérées (entrepreneurs, membres d’entreprises, assureurs et en général, ceux qui ont un intérêt direct à la fraude ou ceux qui ont accompli des actes dans le cadre d’un plan de fraude ou couvert les agissements de fraudeurs ou celles qui ont acheté ou détenu des marchandises en quantité supérieur à celles des besoins de leur consommation familiale.
L’allègement de la charge de la preuve peut résulter de modification de règles de fond.
Exemples : En matière de corruption :
Initialement, jusqu’à la loi n°2000-‐595 du 30 Juin 2000, l’article 432-‐11 du Code Pénal incriminait, sous la qualification de corruption passive, « le fait par une personne dépositaire de l’autorité publique, chargée d’une mission de service public ou investie d’un mandat électif, de solliciter ou d’agréer, sans droit, directement ou indirectement, des offres, des promesses, des dons, des présents ou des avantages quelconques, soit pour accomplir, soit pour s’abstenir, soit pour abuser de son influence réelle… »
Il était déduit de la lettre même de ce texte que pour le délit soit constitué, les sollicitations ou l’agrément devaient avoir été obtenus, avant l’acte lié à la fonction.
La difficulté d’établir la preuve de l’antériorité du pacte constituait un frein important à la répression.
La loi n° 2011-‐525 du 17 Mai 2011 a mis un terme à ces difficultés et désormais l’article 432-‐11 du Code Pénal vise les pactes convenus « à tout moment ».
L’allègement de la charge de la preuve peut résulter de décisions jurisprudentielles.
Exemples de présomptions jurisprudentielles emportant renversement de la charge de la preuve:
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-‐ En matière d’abus de biens sociaux : L’article L 242-‐6-‐3° du Code de Commerce incrimine le délit d’abus de biens sociaux au sein des sociétés anonymes comme étant le fait :
« Pour le président, les administrateurs ou les directeurs généraux d’une société anonyme de faire, de mauvaise foi, des biens ou du crédit de la société, un usage qu’ils savent contraire à l’intérêt de celle-ci, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils sont intéressés personnellement ou indirectement… ».
La caractérisation de ce délit nécessite que soit établi, outre un élément matériel, un élément intentionnel qualifié de dol spécial, de manière à écarter à la répression le dirigeant imprudent ou négligent.
La charge de la preuve de l’intérêt personnel pris par le dirigeant incombe au ministère public.
Conformément au droit commun de la preuve en droit pénal, la preuve peut être apportée par tous moyens, mais la preuve est néanmoins difficile à établir dans les hypothèses où la destination finale des fonds détournés demeure inconnue.
Pour mettre fin à cette difficulté, dans un arrêt du 11 Janvier 1996 (Crim 11 Janvier 1996 pourvoi n° 95-‐81.776), la Chambre Criminelle a énoncé que :
« S’il n’est pas justifié qu’ils ont été utilisés dans le seul intérêt de la société, les fonds sociaux prélevés de manière occulte par un dirigeant social l’ont nécessairement été dans un intérêt personnel …»
La Chambre Criminelle a posé une présomption d’usage à des fins personnelles des biens prélevés de manière occulte.
Cette présomption se justifie dès lors qu’au sein des sociétés, le seul fait de prélever des fonds de manière occulte constitue en lui-‐même un acte illicite.
La charge de la preuve qui incombe au Ministère Public est ainsi allégée.
Ce dernier n’a pas à rechercher l’utilisation finale des sommes détournées, mais seulement à établir l’existence de prélèvements occultes, à charge pour le dirigeant, s’il entend renverser la présomption, de rapporter la preuve que les fonds ainsi prélevés de façon occulte l’ont été dans le seul intérêt de la société.
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La jurisprudence du 11 Janvier 1996 a été confirmée à de nombreuses reprises (Crim 20 Juin 1996 pourvoi 95-‐82.078 ; Crim 14 Mai 1998, pourvoi n° 97-‐82.442 ; Crim 9 Juillet 1998 pourvoi n° 97-‐80.511 ; Crim 27 Mars 2002 pourvoi n° 01-‐84.195 ; Crim 24 Septembre 2008, pourvoi n° 08-‐80.872 pourvoi n° 08-‐80.872).
-‐ En matière d’atteintes involontaires aux individus : La preuve du dol général ne suscite guère de difficulté pour satisfaire l’exigence légale énoncée à l’article 121-‐3 du Code Pénal, relatif au délit d’atteinte involontaire et de mise en danger d’autrui, puisqu’une présomption de fait permet de l’induire des faits de la cause.
Selon la Cour de Cassation, « la seule constatation de la violation, en connaissance de cause, d’une prescription légale ou règlementaire implique, de la part de son auteur, l’intention coupable exigée par l’article 121-3 du Code Pénal ».
-‐ En matière de diffamation : L’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 Juillet 1881 sur la liberté de la presse sanctionne : le délit de diffamation « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation… »
La Cour de Cassation a jugé de manière constante que les imputations diffamatoires sont réputées de droit faites avec l’intention de nuire : La mauvaise foi est donc présumée.
Pour inverser la charge de la preuve de sa mauvaise foi, l’auteur peut invoquer une bonne foi, qui est alors un fait justificatif, exonératoire de toute responsabilité pénale, et qui se caractérise par la réunion de quatre éléments cumulatifs: la légitimité du but poursuivi, l’absence d’animosité personnelle, le sérieux de l’enquête réalisée, la pondération dans l’expression.
L’absence de preuve est génératrice d’un risque : le doute
En principe, le doute n’est pas compatible avec une décision de justice : le juge ne peut motiver sa décision en invoquant des motifs dubitatifs ou hypothétiques.
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Cependant, dans certaines hypothèses, les règles de droit permettent au juge de faire profiter l’une des parties, du doute.
Le doute est exclu du vocabulaire du droit de la procédure pénale.
L’article 470 du C.P.P. dispose : « Si le Tribunal estime que le fait poursuivi ne constitue aucune infraction à la loi pénale ou que le fait n’est pas établi ou qu’il n’est pas imputable au prévenu, il renvoie celui-ci des fins de poursuite… »
Le bénéfice du doute est une notion empruntée aux juridictions civiles.
Ce doute est la conséquence opérationnelle de l’impossibilité, pour qui en a la charge, d’apporter la preuve de l’élément matériel ou de l’élément moral de l’infraction et d’emporter ainsi la conviction du juge répressif.
L’innocence n’est plus seulement présomption mais devient vérité judiciaire.
Puisque la preuve de la culpabilité n’est pas rapportée, la preuve de l’innocence est réputée faite.
Ce balancement entre présomption d’innocence et irrésolution du juge ne conduit jamais la Cour de Cassation, par sa Chambre Criminelle, à contrôler la réalité, ni la force des éléments de preuve, puisqu’il a été rappelé ci-‐dessus que l’appréciation des faits relève de la souveraineté des juges du fond et que la Cour de Cassation ne juge que l’application de la loi et pas les faits.
En revanche, la Cour de Cassation veille et distingue le doute vrai, celui dont les juges du fond ont pu montrer les raisons et pu assurer qu’il était insurmontable, du doute faux, résultant d’une insuffisance ou d’une erreur de raisonnement.
La Cour de Cassation est exigeante pour apprécier le bien-‐fondé de décisions de relaxe fondées sur l’existence d’un doute.
Exemples : il a été jugé que :
-‐ En l’absence de toute constatation de faits de la cause, le seul énoncé d’un doute sur la mauvaise foi du prévenu, ne saurait suffire à motiver une décision de relaxe (Crim 23 Septembre 2009 pourvoi n° 09-‐80.018)
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-‐ On ne saurait admettre, que « après avoir énuméré des éléments de preuve, les juges se bornent à affirmer, pour prononcer une relaxe, l’existence d’un doute » (Crim 15 Juin 1973, pourvoi n°72-‐92.223)
-‐ « Il appartient aux juges correctionnels d’ordonner les mesures d’instruction qu’ils estiment utiles à la manifestation de la vérité et qu’ils constatent avoir été omises ; faute d’avoir ordonné lesdites mesures, dont elle admet qu’elles eussent été utiles à la manifestation de la vérité, la Cour d’appel n’a pu légalement faire état, pour relaxer le prévenu, de l’incertitude qui lui apparaissait exister en faveur de celui-ci » (Crim 7 décembre 2010, pourvoi n°09-‐84.765)
Le juge du fond qui doute, parce qu’il méconnait la règle, se voit sanctionné par la Cassation.
Le juge correctionnel ne peut prononcer une décision de relaxe, qu’autant qu’il a vérifié que les faits dont il est saisi ne sont constitutifs d’aucune infraction (Crim 17 Nov 2010 pourvoi n° 09-‐84.542).
S’il s’estime insuffisamment informé, le juge, avant toute décision de relaxe, doit éventuellement ordonner un supplément d’information.
Ex : La cour ne pouvait relaxer un chef d’entreprise, invoquant une délégation de pouvoir, sans rechercher si cette délégation de pouvoir était valable (Crim 11 Mars 1993, pourvoi n°91-‐80.958).
I-B : Le Choix des modes de preuve :
Le principe de liberté quant au choix du mode de preuve retenu:
L’assertion selon laquelle la preuve est libre en droit pénal est partiellement vraie, car cette réalité doit se concilier avec le principe de la légalité de la preuve.
Les modes de preuve sont régis par deux principes, faussement antinomiques, celui de la liberté de production de la preuve et celui de la légalité dans l’administration de la preuve.
La liberté dans la production de la preuve se définit comme « ce qui, en vertu de la loi, peut être proposé en preuve, au soutien de ce qui est allégué, de
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telle sorte que le juge est tenu de prendre en considération, sans pouvoir écarter à priori, la preuve offerte, mais sans être certain que celle-ci soit reconnue apte, après examen…tous les moyens employés… »
L’article 427 alinéa 2 du C.P.P. dispose que, hors les cas prévus par la loi, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et que le juge décide d’après son intime conviction.
Ce principe de liberté a pour corollaire la règle énoncée à l’article 81 du C.P.P., selon laquelle : « Le juge procède, conformément à la loi, à tous actes d’information qu’il juge utiles à la manifestation de la vérité…Le juge instruit à charge et à décharge ».
Les parties peuvent, conformément aux articles 82-‐1 et 186-‐1 du C.P.P., demander au Juge et au Président de la Chambre d’instruction, qu’il soit procédé à tous actes qui leur paraissent nécessaires à la manifestation de la vérité, pourvu qu’il s’agisse d’actes déterminés.
Depuis la loi du 27 Mai 2014, les parties, lorsqu’une procédure n’a pas fait l’objet d’instruction, peuvent solliciter, avant l’audience, du Président, l’accomplissement d’actes utiles à la manifestation de la vérité (article 388-‐5 du C.P.P.).
Ces dispositions concrétisent tant la liberté du juge d’instruction d’instruire en vue de la manifestation de la vérité que le droit des parties de concourir à cette manifestation, par des demandes d’actes à charge ou à décharge.
Le juge choisit parmi les éléments de preuve produits, pour forger son intime conviction.
En droit pénal, le juge correctionnel a un rôle actif dans la recherche de la preuve et a pour obligation d’ordonner un complément d’information, s’il estime incomplètes les preuves soumises.
En droit pénal, aucune preuve ne peut être préalablement constituée et il n’existe pas un support particulier et spécifique pour établir telle ou telle infraction.
La preuve d’agissements répréhensibles, revêtant une même qualification juridique, peut résulter et être établies par des modes de preuve différents.
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C’est en ce sens qu’est allégué ce principe de liberté des preuves en droit pénal, principe lié à celui de l’intime conviction du juge.
Le mode de preuve porte sur la manière dont sont réunis les indices (ex. écoutes, interrogatoires etc…) et se distingue de l’indice lui-‐même qui est le fruit de constatation (ex. pièces à conviction).
La liberté de la preuve concerne essentiellement l’utilisation des modes de preuve et consécutivement leur résultat.
Des limites à cette liberté peuvent résulter de dispositions limitant l’intime conviction du juge.
Les limites au principe de liberté d’appréciation des preuves :
La liberté que la loi octroie au juge répressif dans l’appréciation des preuves a des limites, liées aux considérations suivantes: la force probante de certains procès-‐verbaux.
Certains procès-‐verbaux valent jusqu’à preuve contraire.
La loi attribut une force probante particulière à certains procès-‐verbaux.
Les Officiers de Police Judiciaires (OPJ) sont investis d’une compétence légale et générale de constatation des infractions.
Selon l’article 430 du C.P.P. « Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement, les procès-verbaux et les rapports constatant les délits ne valent qu’à titre de simples renseignements… »
Selon l’article 431 du C.P.P « Dans les cas où les OPJ, les APJ ou fonctionnaires et agents ont recu d’une disposition spéciale de la loi … le pouvoir de constater des délits par procès-verbaux, la preuve contraire ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins ».
Selon l’article 537 du C.P.P. « les procès-verbaux de constat établis en matière contraventionnelle valent jusqu’à preuve contraire ».
Selon l’article L 238 du Livre des procédures fiscales « les constatations des agents de l’administration des impôts ont une force probante jusqu’à la preuve contraire ».
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Le prévenu a le droit de combattre ces procès-‐verbaux par tous les moyens légaux de preuve, mais leur force probante ne peut être infirmée sur de seules dénégations ou allégations.
Si la preuve contraire aux procès-‐verbaux n’est pas rapportée, le juge ne peut relaxer.
Cette force probante renforcée des procès-‐verbaux ne s’attachent qu’aux constatations effectuées par les agents et non aux appréciations personnelles, reconstitutions ou déductions auxquelles elles donnent lieu, qui ne valent qu’à titre de renseignements laissés à l’appréciation des juges du fond.
Seuls les constats effectués personnellement par l’auteur du procès-‐verbal bénéficient de la valeur probatoire renforcée.
Cette force probante renforcée ne vaut que pour les constatations se rapportant aux infractions que l’auteur du procès-‐verbal est spécialement habilité à constater sur l’étendue de la circonscription à laquelle il est affecté.
Certains procès-‐verbaux valent jusqu’à inscription de faux.
Selon l’article 336-‐1° du Code des Douanes : « Lorsqu’ils sont rédigés par deux agents des douanes ou de toute autre administration, les procès-verbaux de douane font foi jusqu’à inscription de faux, des constatations matérielles qu’ils relatent ».
Les constatations matérielles sont celles qui sont faites directement par les rédacteurs du procès-‐verbal.
Aux termes de l’alinéa 2 de l’article 336, lesdits procès-‐verbaux ne font foi que jusqu’à preuve contraire de « l’exactitude et de la sincérité des aveux et déclarations qu’ils rapportent ».
Selon l’article 339 du Code des Douanes, celui qui veut s’inscrire en faux contre un procès-‐verbal est tenu d’en faire la déclaration par écrit, en personne ou par un fondé de pouvoir spécial devant notaire, au plus tard à l’audience indiquée par la sommation à comparaître devant le Tribunal qui doit connaître de l’infraction. Il doit, dans les trois jours suivants, faire au greffe dudit tribunal le dépôt des moyens de faux et les noms et qualités des
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témoins qu’il veut faire entendre, le tout sous peine de déchéance de l’inscription de faux.
Dans ces conditions, le Procureur de la République doit faire toute diligence pour qu’il soit statué sur cette inscription de faux et le Tribunal saisi de l’infraction peut surseoir à statuer au jugement de l’infraction jusqu’au jugement de l’inscription de faux.
I-C : L’Administration de la preuve :
La loi, en matière de preuve, distingue les outils et la manière de faire :
-‐ Les outils relèvent de l’administration de la preuve ; -‐ La manière de faire, de l’admissibilité de la preuve.
Les mesures d’instruction sont des procédés permettant d’acheminer en justice des modes de preuve.
Des déclarations recueillies par voie d’enquête, la production forcée de pièces, constituent des mises en œuvre procédurales de la preuve testimoniale ou de l’écrit et constituent deux des modes d’administration judiciaire de la preuve.
Les modes de preuve susceptibles d’être administrés devant la justice correctionnelles sont plus variés que ceux administrés devant la justice civile, dont les cinq modes de preuve probants sont : la preuve littérale, la preuve testimoniale, les présomptions, l’aveu de la partie et le serment.
Le Code de la Procédure Pénale comporte un répertoire des actes d’administration de la preuve, actes étendus par la loi n° 2004-‐204 du 9 Mars 2004 et plus récemment par les lois citées en introduction.
Dans le C.P.P., il existe un répertoire d’actes utiles à la manifestation de la vérité, soumis à des règles.
Pour les infractions qualifiées d’ordinaires, qui se distinguent des infractions dites spécifiques car commises en bande organisée, le panel des modes de preuve est très large.
Exemples d’actes d’administration de la preuve en procédure pénale et intégrés dans le Code de Procédure Pénale: Transport sur les lieux,
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Constatations, Aveux, Examens scientifiques, Expertises, Autopsie, Prélèvements, Comparaisons, Contrôle et vérification d’identité, Auditions, Recours aux témoins anonymes, Confrontations, Interrogatoires, Fouilles, Perquisitions, Saisies, Infiltrations, Interceptions de correspondances par la voie des télécommunication, Surveillance par géolocalisation etc…
Chacun de ces actes d’administration de la preuve est régi par le Code de Procédure Pénale.
Force est de constater que les nouveaux modes de preuve, de plus en plus techniques, risquent de minorer les marges d’interprétation et de lier davantage le juge dans son intime conviction.
Un juge répressif n’est pas passif devant des preuves apportées par des agents de l’Autorité publique ou par des particuliers.
Le juge répressif doit les administrer pour assurer la manifestation de la vérité, tout en préservant les droits fondamentaux des justiciables.
Ce travail de conciliation suppose que soient précisées les techniques permettant la découverte des faits et les principes gouvernant la présentation en justice des preuves.
Le juge peut être l’acteur de la recherche de la preuve, à travers des mesures d’instruction menées directement sous sa direction, soit à la demande des parties, soit spontanément par le juge ou à la demande du Parquet.
Les actes d’instruction à diligenter doivent être strictement limités aux nécessités de la procédure et proportionnés à la gravité de l’infraction.
Au stade de l’instruction préparatoire jusqu’à l’audience correctionnelle, malgré la persistance d’une tendance inquisitoire, la capacité d’initiative des parties, en matière de recherches de la preuve a été largement renforcée.
La liste des investigations qu’elles peuvent solliciter, énoncées à l’article 82-‐1 du C.P.P. n’est plus limitative.
Le juge d’instruction devient le juge de l’opportunité de telle ou telle mesure sollicitée.
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Le magistrat instructeur dispose de moyens d’investigation qui vont bien au-‐delà de ceux dont disposent les parties dans un procès-‐civil.
Au choix du mode de preuve à diligenter, s’ajoute la motivation et l’existence d’un intérêt probatoire.
Les pouvoirs qui en résultent pour le juge, sont encadrés afin de respecter les droits des parties :
« Seuls les faits dont dépend la solution du litige peuvent faire l’objet d’une mesure d’instruction, soit à la demande des parties, soit d’office… » (Crim 16 Juin 2011 pourvoi n° 11-‐80.348 ; Crim 11 Janvier 2012 pourvoi n° 10-‐88.197)
En revanche, cette notion d’intérêt probatoire n’est pas clairement définie et s’apprécie au cas par cas.
La faculté d’investissement de la recherche de la preuve par les parties se retrouve dans l’obligation des juges désormais de motiver leur ordonnance susceptible d’appel, s’ils n’entendent pas faire droit à une demande d’acte (article 82-‐1 du C.P.P.).
De même en est-‐il au stade de l’audience de jugement, lors des demandes de compléments d’information (articles 156, 397, 434 et 536 du C.P.P.)
L’investissement des parties dans la recherche de la vérité au stade de l’audience se manifeste aussi à travers la possibilité octroyée à l’avocat, de poser directement des questions à la personne poursuivie, à la partie civile, aux témoins et à toutes personnes appelées à la barre, en demandant la parole au Président (Articles 312, 442-‐1, 536 du C.P.P.).
Les parties ont progressivement acquis, tant au stade de l’instruction définitive, que préparatoire, des prérogatives non négligeables sur le plan probatoire, qui font d’elles des acteurs à part entière du processus de recherche de la vérité, même au pénal.
Ces dernières mesures, qui s’inspirent du système anglo-‐saxon de « cross examination » sont louables mais ce principe du contradictoire au stade de l’instruction alourdit et allonge les délais d’une procédure et risque de générer une augmentation substantielle des frais, alors que ce poste pèse déjà lourdement sur le budget de la justice.
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Des aspects économiques et financiers (les coûts) peuvent intervenir dans l’appréciation de l’intérêt probatoire de telles demandes d’actes sollicités.
C’est dans le secret que le juge d’instruction doit mener son instruction tout en garantissant les droits des parties.
Les parties sont informées des actes accomplis, ex. Commission rogatoire, qu’au retour de l’acte chez le magistrat instructeur.
Le secret des mesures d’instruction est énoncé à l’article 11 du C.P.P. « Sauf dans les cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l’enquête et de l’instruction est secrète. Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous peine des articles 226-13 et 226-14 du Code Pénal… ».
En application de cet article, seules les phases d’enquête et d’instruction sont soumises au secret, qui cesse devant la juridiction de jugement, dont les débats sont publics et sont soumis au secret : les magistrats, auditeurs de justice, greffiers, OPJ, experts et interprètes.
Ne sont pas soumis au secret : les personnes mises en examen, les témoins, les victimes, les parties civiles, les parties civilement responsables et les journalistes.
Les avocats sont tenus au respect des règles de leur profession et donc au secret professionnel, défini à l’article 160 du décret n° 91-‐1197 du 27 Novembre 1991 selon lequel : « L’avocat, en toute matière, ne doit communiquer aucune divulgation contrevenant au secret professionnel. Il doit notamment respecter le secret de l’instruction en matière pénale, en s’abstenant de communiquer sauf à son client, pour les besoins de la défense, des renseignements extraits du dossier ou de publier des documents, pièces ou lettres intéressant une information en cours… »
Toutefois, par un arrêt 15 décembre 2011 Mor c. France requête n°28198/09, la CEDH a jugé contraire à l’article 10 de la Convention, relatif à la liberté d’expression, la condamnation d’une avocate pour violation du secret professionnel, qui s’était exprimée dans la presse, à propos d’une expertise couverte par le secret de l’instruction, en soulignant que :
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-‐ Les informations divulguées s’inscrivaient dans le contexte d’un débat général et pour l’exercice des droits de la défense des clients de ce conseil,
-‐ La liberté d’expression d’un avocat, dans un contexte médiatique, n’est élargie que si cet avocat n’est pas à l’origine de la médiatisation de l’affaire, par une violation du secret professionnel.
A propos de l’accès à et de l’évocation par des journalistes de documents, relevant du secret de l’instruction, il a été jugé que « l’atteinte alléguée à la présomption d’innocence à l’encontre d’un journalise ne pouvait faire obstacle à ce que le journaliste prévenu produise, pour les nécessités de sa défense, les pièces d’où étaient tirées les informations rapportées dans l’article incriminé… » (Crim 11 Février 2003 n°01-‐86.685)
La violation du secret de l’instruction n’entraîne aucune nullité.
Exemples d’actes d’administration de la preuve:
L’expertise pénale (article 156 et suivants du C.P.P.) :
Certaines questions exigent des connaissances toutes particulières, pour lesquelles les juges n’ont pas les compétences scientifiques ou techniques suffisantes, d’où le recours à l’expertise judiciaire.
En DPA, il est fréquemment recouru à des expertises financières.
Les articles 60, 77-‐1, 156, 201, 205 du C.P.P. disposent, suivant le stade auquel se situe une procédure, de l’autorité compétente pour mandater un expert ou toute personne qualifiée.
Les principes, en matière d’expertise pénale, énoncés aux articles 156 et suivants du C.P.P., sont :
-‐ de désigner un expert inscrit sur la liste établie auprès de la Cour de Cassation ;
-‐ l’expert doit accomplir personnellement sa mission, dans le délai imparti et établir un rapport écrit ;
-‐ l’expert dépose sous serment, le cas échéant, devant la juridiction de jugement.
Auxiliaire de justice, l’expert doit être neutre, impartial et hors de tout lien de subordination avec les parties.
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Dans un système fondé sur l’intime conviction, le juge ne devrait pas être lié par les conclusions de l’expert.
Dans la pratique, les juges ont tendance à entériner purement et simplement les conclusions des experts.
Il est possible pour les parties de solliciter une contre-‐expertise.
L’article 161-‐1 du C.P.P., résultant de la loi n° 2007-‐291 du 5 Mars 2007 instaure davantage de contradictoire en matière d’expertise.
Lorsqu’une mesure d’expertise est envisagée, le juge, sauf urgence motivée, en informe les parties qui disposent d’un délai de dix jours pour émettre des observations quant aux questions posées à l’expert.
La preuve par témoin :
Les articles 435, 444, 329, 536 du C.P.P. confèrent aux parties la possibilité de solliciter une audition de témoins, conférant au juge, le pouvoir de l’opportunité d’y faire droit.
L’article 6§3 de la Convention prévoit que : « Tout accusé a droit notamment à …interroger ou faire interroger des témoins à charge et d’obtenir la convocation et l’interrogation des témoins à décharge… »
La jurisprudence de la CEDH afférente confère aux juridictions internes une grande latitude pour envisager la question de l’audition des témoins.
La présomption d’intérêt probatoire qui justifie le principe d’une audition de droit peut être renversée si, au regard des circonstances, il apparait que cette demande ne présente aucun intérêt pour l’instruction de l’affaire.
Il résulte de l’arrêt Randhawa (Crim 12 Janvier 1989) que « les juges sont tenus d’ordonner l’audition contradictoire des témoins qui n’ont, à aucun stade de la procédure, été confrontés avec le prévenu… »
A contrario, si la personne poursuivie a déjà été entendue avec le témoin, une nouvelle audition de celui-‐ci ne s’impose pas.
L’éventuelle impossibilité de procéder à l’audition du témoin sollicitée doit être motivée, dans une éventuelle décision de refus.
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L’indice :
La preuve par indices constitue le droit commun dès lors que son administration est essentiellement le fait de la police judiciaire qui recueille des indices, des éléments de preuve consistant en un fait, évènement, objet, trace…
Ces indices , renforcés par les progrès des sciences, constituent l’assise de la technique de la preuve inductive ou indiciaire, usant essentiellement de présomptions de fait qui consistent, à partir d’un ou plusieurs indices, à en inférer une réalité a priori inconnue, utiles à la manifestation de la vérité, que ce soit pour le constat d’une infraction, constitutive de la saisine de l’autorité judiciaire par le biais de la police judiciaire ou pour la démonstration ultérieure des éléments de l’infraction.
La jurisprudence a apporté des précisions, en matière de :
Preuve de la flagrance, prévue à l’article 53 du C.P.P., pour justifier l’ouverture d’une enquête de flagrance génératrice de la contrainte destinée à poursuivre l’administration de la preuve : « Il résulte de la perception par un agent ou OPJ d’un ou plusieurs indices objectifs laissant présumer la commission actuelle ou immédiatement antérieure… ».
Un recueil d’indices permet d’élaborer une présomption de faits selon laquelle une infraction flagrante paraît avoir été commise, éventuellement par telle personne.
A ce niveau initial de la procédure pénale, la notion d’indice gouverne l’administration de la preuve.
Le recueil d’indices est utile à la preuve de l’élément matériel de l’infraction qui s’attache non seulement à l’action ou à l’omission incriminée par la loi mais encore à son imputation à telle personne suspectée.
Le recueil d’indice peut être utile à la preuve de l’élément intentionnel, surtout lorsque l’élément moral présente une configuration spéciale, ex : le recel, la connaissance de l’origine frauduleuse, la preuve de cet élément moral peut être apportée soit par l’aveu, soit par des faisceaux d’indices, établissant une présomption de faits.
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A propos du recel, il suffit d’établir que « compte tenu des circonstances de faits, le receleur ne pouvait avoir aucun doute sur l’origine frauduleuse des choses détenues … ».
La préservation de contenus informatiques :
L’ OPJ peut, sur réquisition du Procureur de la République , préalablement autorisé par le JLD, sur le fondement de l’article 60-‐2 du C.P.P., requérir des opérateurs de télécommunication au public en ligne énoncés à l’article 6.1.1 de la loi n° 2004-‐575 du 21 Juin 2004 relative à la C.L.E.N., « toute mesure visant à assurer la préservation du contenu des informations consultées par les personnes utilisatrices des services fournis par les opérateurs » pour une durée d’un an.
Ces réquisitions informatiques de données de communications aux opérateurs sont des réquisitions particulières, puisque ces informations ne sont pas enregistrées directement par les enquêteurs mais par les opérateurs.
La preuve par interception de correspondances :
Sanctionnée par la CEDH, la France a été conduite à l’adoption d’une loi spécifique loi n°91-‐646 du 10 Juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par voie des communications électroniques, insérée aux articles 100 et suivants du C.P.P., loi complétée par la loi n° 2004-‐204 du 9 Mars 2004 relative à l’adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.
Ces écoutes, limitées dans le temps, ne peuvent être diligentées qu’à la requête d’un juge d’instruction, sauf en cas d’enquête de flagrance ou d’enquête préliminaire relative à l’une des infractions énoncées à l’article 706-‐73 du C.P.P. relatives à des infractions commises en bande organisée ou liées au terrorisme, parmi lesquelles figurent les escroqueries en bande organisée, où le parquet peut être autorisé par le JLD.
La Cour de Cassation, qui a rendu de nombreuses décisions sur ce mode de preuve, a énoncé que :
« Les écoutes et enregistrements téléphoniques trouvent leur base légale dans les articles 81 et 151 du C.P.P….ils peuvent être effectués à l’insu des personnes intéressées, qui ne sont pas seulement celles sur qui pèsent les
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indices de culpabilité, s’ils sont opérés pendant une durée limitée, sur l’ordre d’un juge et sous son contrôle en vue d’établir la preuve d’un crime ou de toute autre infraction portant gravement atteinte à l’ordre public et d’en identifier les auteurs…il faut en outre que l’écoute soit obtenue sans artifice ni stratagème et que sa transcription puisse être contradictoirement discutée par les parties concernées, le tout dans le respect des droits de la défense… ces prescriptions répondent aux exigences de l’article 8 alinéa 2 de la Convention, dont la méconnaissance serait de nature à entraîner l’annulation des actes critiqués… » (Crim 26 Novembre 1990 pourvoi n° 90-‐84.594 ; Crim 5 Novembre 1991 pourvoi n° 91-‐84.134).
Le choix de recourir à cette mesure connaît des limites notamment, par exemple, en raison de confidentialité des correspondances téléphoniques de l’avocat avec son client, principe auquel il ne peut être dérogé qu’à titre exceptionnel, s’il existe contre l’avocat, des indices de participation à une infraction (Crim 15 Janvier 1997, pourvoi n°96-‐83.753 ; Crim 17 Septembre 2008, pourvoi n° 08-‐85.229).
L’article 100-‐5 du C.P.P. dispose que « Le juge d’instruction ou l’OPJ transcrit la correspondance utile à la manifestation de la vérité…Cette transcription est versée au dossier…A peine de nullité, ne peuvent être transcrites les correspondances avec un avocat relevant de l’exercice de ses droits de la défense… »
Le Bâtonnier doit avoir été avisé de la mise sous écoute de l’avocat.
« Une conversation entre un avocat et son client ne peut être transcrite et versée au dossier que s’il apparaît que son contenu est de nature à faire présumer la participation de cet avocat à une infraction, fusse-t-elle étrangère à la saisine du juge d’instruction» (Crim 8 Nov 2000 ; Crim 1er Oct 2003 ; Crim 18 Janvier 2006 ; 17 Sept 2008).
La preuve par des opérations de sonorisation ou de fixation d’images :
Ces opérations sont soumises à des règles particulières, en droit interne, énoncées dans les articles 706-‐96 et suivants du C.P.P. pour la délinquance et la criminalité organisée et la lutte contre des activités terroristes.
Ces opérations, effectuées sous l’autorité et le contrôle d’un juge d’instruction, consistent à la mise en place d’un dispositif technique ayant pour effet, sans le consentement des intéressés, la captation, la fixation, la
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transmission et l’enregistrement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes à titre privé ou confidentiel, dans des lieux ou véhicules privés ou publics ou l’image d’une ou plusieurs personnes se trouvant dans un lieu privé.
La captation de données informatiques :
La loi n° 2011-‐267 du 14 Mars 2011 a défini les règles relatives à la captation de données informatiques, règles intégrées dans les articles 706-‐102-‐1 du C.P.P. applicables lorsque les nécessités de l’information concernent un crime ou un des délits énoncé à l’article 706-‐73 (en bande organisée ou terroriste).
La preuve par des opérations de géolocalisation :
La France a toujours eu une approche unitaire de la géolocalisation, qui concerne indifféremment la géolocalisation par des balises GPS installées dans des voitures et la géolocalisation par les téléphones portables.
Par deux arrêts en date du 22 Octobre 2013, la Cour de Cassation a considéré au visa de l’article 8 de la Convention que « la géolocalisation constituait une ingérence dans la vie privée dont la gravité nécessitait qu’elle soit exécutée sous le contrôle d’un juge et non d’un membre du Parquet » (Crim n° 13-‐81.945 et 13-‐81.949).
Par ces arrêts, la Cour est allée plus loin que la CEDH, laquelle dans l’affaire Uzun c. Allemagne du 2 Septembre 2010 n° 35623 a jugé valable une géolocalisation décidée et contrôlée par un procureur allemand aux motifs que « le droit interne prévoyait que la mesure devait être proportionnée à la situation et pouvait faire l’objet d’un contrôle dans le cadre de la procédure pénale ultérieure menée contre la personne concernée ».
Jusqu’en 2014, la mesure consistant à mettre, sur un véhicule automobile, un dispositif technique tentant à suivre les déplacements de celui-‐ci, ne faisait l’objet d’une dispositions spécifique en droit interne et relevait de la combinaison des articles 81 et 151 du C.P.P..
La loi n° 2014-‐372 du 28 Mars 2014 relative à la géolocalisation, intégrée dans les articles 230-‐32 du C.P.P., est venue renforcée le droit processuel interne.
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Les opérations peuvent être diligentées soit par le Ministère public, pendant 15 jours puis avec autorisation du JLD, en cas de renouvellement pendant deux mois, soit par le Juge d’instruction, pendant quatre mois, renouvelable une fois.
L’article 230-‐42 du C.P.P. dispose que « aucune condamnation ne peut intervenir sur le seul fondement des éléments recueillis » dans le cadre de ces opérations de géolocalisation, dont des procès-‐verbaux d’enregistrement ont été versés à la procédure.
La perquisition, la saisie de documents et la restitution:
Le C.P.P. énonce en ses articles 56, 76 et 92 et suivants, des règles spécifiques aux perquisitions diligentées aux différents stades d’une enquête, à la requête soit d’un OPJ, en cas de flagrance, soit du Ministère Public, en cas d’enquête préliminaire, soit du Juge d’Instruction.
Sauf cas de flagrance et infraction spécifique, une perquisition, suivant l’article 59 du C.P.P., ne peut être diligentée qu’entre 6 et 21 heures.
Suivant le cadre dans lequel la perquisition est diligentée, l’accord de la personne présente sera ou pas nécessaire.
En DPA, le support de la vérité réside souvent dans des documents ou des données informatiques.
Le recours aux transports sur place, aux sièges d’entreprise ou dans des cabinets d’avocats et à des perquisitions puis saisies est fréquent.
Lorsqu’il y a lieu de rechercher des documents ou des données informatiques, seul le magistrat sur place ou l’OPJ commis, éventuellement assisté d’une personne qualifiée requisse expressément, a seul le droit d’en prendre connaissance avant de procéder à la saisie.
Les documents, les objets ou données informatiques placés sous-‐main de justice sont immédiatement inventoriés et placés sous scellés.
Cependant, si leur inventaire sur place présente des difficultés, ils font l’objet de scellés fermés provisoirement et leur mise sous scellés définitive est reportée et réalisée ultérieurement en la présente de la personne chez laquelle la perquisition a été diligentée.
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Il est procédé à la saisie des données informatiques nécessaires à la manifestation de la vérité en plaçant sous-‐main de justice, soit le support physique de ces données, soit une copie réalisée en présence des personnes concernées.
Seule la saisie des objets, documents et données informatiques utiles à la manifestation de la vérité sont saisis.
Une saisie globale de données informatiques a été jugée valable « dès lors que les fichiers concernés ont d’une part été identifiés, inventoriés et copiés à destination de la personne mise en cause et d’autre part n’étaient pas étrangers au but de l’autorisation accordée » (Crim 14 Nov 2013).
Il est possible, de procéder à la saisie de documents afférents à d’autres faits répréhensibles, des faits qui peuvent relever d’une procédure incidente, à charge d’en informer immédiatement un représentant du Parquet.
Les perquisitions effectuées au cabinet d’un avocat sont soumises à un formalisme particulier, énoncé aux articles 56-‐1 et suivants du C.P.P..
Un magistrat et un représentant de l’Ordre des Avocats, le Bâtonnier, doivent être présents, la décision ordonnant la perquisition doit indiquer la nature de l’infraction, les raisons justifiant la perquisition et l’objet de celle-‐ci.
Seuls le magistrat présent et le représentant du Bâtonnier ont le droit de consulter ou de prendre connaissance des documents se trouvant sur les lieux préalablement à leur saisie éventuelle.
Aucune saisie ne peut concerner des documents ou objets relatifs à d’autres infractions que celles mentionnées dans la décision précitée, et ce à peine de nullité.
Le magistrat présent doit veiller à ce que les investigations ne portent pas atteinte au libre exercice de la profession d’avocat.
Le Bâtonnier ou son délégué peut s’opposer à la saisie d’un document, celui-‐ ci est alors placé sous scellé fermé et il est dressé un procès-‐verbal de cet incident.
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Ce procès-‐verbal et les documents placés sous scellés fermés sont transmis sans délai au Juge des Libertés et de la Détention (JLD) avec une copie de la procédure globale.
Dans les cinq jours de la réception de ces pièces, le JLD statue sur la contestation par ordonnance motivée non susceptible de recours.
Soit il est fait droit à la contestation et les documents saisis sont restitués, s’il n’est pas fait droit à la contestation, les documents saisis sont joints à la procédure.
En cours de procédure, il est possible de solliciter la restitution des documents ou objets saisis (articles 99 et suivants du C.P.P.).
Les sanctions en cas d’atteinte aux règles d’administration de la preuve :
Le Code pénal sanctionne des comportements qui compromettent la bonne réalisation de la justice et la recherche de la vérité.
Exemples d’infractions commises au préjudice de l’administration de la preuve :
En cas d’altération intentionnelle d’écrit, l’article 441-‐1 du Code Pénal relatif au faux peut être invoqué.
En cas d’abstention de témoigner pour un innocent, l’article 434-‐11 du Code Pénal peut être invoqué.
En cas de témoignage mensonger, l’article 434-‐13 du Code Pénal peut être invoqué.
En cas de subordination de témoin, l’article 434-‐15 du Code Pénal peut être invoqué.
En cas de refus de déférér de témoin (comparaître, prêter serment, déposer), l’article 434-‐15-‐1 du Code Pénal peut être invoqué.
En cas de destruction d’éléments de preuves matérielles, l’article 434-‐4 du Code Pénal peut être invoqué.
En cas d’escroquerie au jugement, l’article 313-‐1 du Code Pénal peut être invoqué.
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Les limites portées à la liberté d’administration de la preuve résultent de règles jurisprudentielles d’admissibilité de preuve.
D : L’admissibilité de la preuve :
La CEDH rappelle que la recevabilité des preuves relève des règles de droit interne et il revient aux juridictions nationales d’apprécier les éléments recueillis par elles.
La CEDH recherche uniquement si la procédure examinée dans son ensemble, y compris le mode de présentation des moyens de preuve, revêt un caractère équitable, en conformité avec les exigences posées à l’article 6§1 de la Convention.
La liberté de la preuve, même lorsqu’elle est affirmée, n’est pas absolue et est limitée par le respect d’autres libertés qui peuvent être en concours.
Toutes les preuves ne sont admissibles devant un juge.
Une preuve est admissible, à condition d’être loyale, d’avoir été débattue contradictoirement et de résulter de procédés exempts d’atteintes aux droits fondamentaux.
La légalité des procédés imprègne la matière de la preuve, en amont, au cours des phases de police judiciaire, au cours de l’instruction, dans l’administration de la preuve, c’est-‐à-‐dire, dans la recherche et le recueil de la preuve et en aval, par le contrôle exercé par les juridictions de jugement.
L’appréciation de la légalité de la preuve ne sera pas identique, selon que la preuve est administrée par un particulier ou par un agent de l’autorité publique.
Le respect de certaines des obligations quant à la preuve varie suivant le statut de la partie qui verse la preuve aux débats: les agents de l’autorité publique sont soumis à davantage de règles que les particuliers.
Sous cette réserve, la preuve pénale, en principe libre, peut être admise, si elle respecte des règles de légalité et cette légalité impose le respect de certains principes généraux du droit, relatifs à la preuve en procédure pénale.
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-‐ Le premier principe est celui qu’une preuve ne peut avoir été obtenue en violation du respect de la dignité, énoncé à l’article 3 de la Convention selon lequel : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants… »
Des aveux obtenus au terme de traitements inhumains ou dégradants ne doivent jamais être invoqués pour prouver une quelconque culpabilité (CEDH 11 Juillet 2006 Jalloh c. Allemagne)
-‐ Le second principe est celui du respect du principe de loyauté dans la recherche de la preuve.
L’article I dans l’article préliminaire du C.P.P. dispose que « La procédure pénale doit être équitable et contradictoire et préserver l’équilibre des droits des parties… »
Cette exigence du procès équitable a pour corollaire le principe de la loyauté des preuves.
La technique de provocation ou d’infiltration policière a suscité débats.
Il résulte de l’article précité et de la jurisprudence afférente de la Cour de Cassation que :
« Dès lors que qu’il résulte des énonciations des juges que l’interpellation d’une personne, suspectée de trafic d’influence a procédé d’une machination de nature à déterminer ses agissements délictueux et que par ce stratagème, qui a vicié la recherche et l’établissement de la vérité, il a été porté atteinte au principe de loyauté des preuves, la chambre d’accusation est fondée à prononcer la nullité de la procédure subséquente… » ( Crim 27 Février 1996, pourvoi 95-‐81.366 ; Crim 9 Août 2006 pourvoi 06-‐83.219).
A peine de nullité, une provocation ou une infiltration ne peut avoir été déterminante, avoir aboli le discernement et ne peut avoir été une incitation à commettre l’infraction.
L’infiltration dans le domaine de la cybercriminalité a donné lieu à l’application de ce principe de loyauté.
L’article 706-‐47-‐3 du C.P.P. autorise les services de police à procéder à certains actes d’infiltration et à travailler sous des pseudonymes.
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La Cour de Cassation a jugé que :
« Porte atteinte au principe de loyauté et au droit à un procès équitable, la provocation à la commission d’une infraction par un agent de l’autorité publique, en l’absence d’éléments antérieurs permettant d’en soupçonner l’existence et que la déloyauté d’un tel procédé rend irrecevables en justice les éléments de preuve ainsi obtenus, quand bien même ce stratagème aurait permis la découverte d’autres infractions déjà commis ou en cours de commission » ( Crim 7 Février 2007, pourvoi n°06-87.753).
En revanche, « ne constitue pas une atteinte au principe de loyauté, une opération policière qui a pour seul effet de permettre la constatation d’un délit de trafic d’influence dont ils n’ont pas déterminé la commission » (Crim 16 Janvier 2008, pourvoi n°07-‐87.633).
Dans un arrêt du 30 Avril 2014, la Cour de Cassation a jugé :
« Pour rejeter leurs requêtes prises de ce que la procédure serait fondée sur un stratagème, les ayant provoqués à la commission d’une infraction, l’arrêt énonce notamment que M. X. avait déjà manifesté sur d’autres sites son intérêt pour les techniques de fraude à la carte bancaire et pour l’utilisation d’internet à cette fin ; les juges ajoutent que le site de surveillance et d’enregistrement des messages échangés a seulement permis de rassembler les preuves de la commission des fraudes à la carte bancaire et d’en identifier les auteurs, aucun élément ne démontrant qu’il ait eu pour objet d’inciter les personnes qui l’ont consulté à passer à l’acte ; …en l’état de ces énonciations, d’où il n’y a pas eu de la part des autorités américaines, de provocation à la commission d’infractions… » ( Crim n° 13-88.162).
Courant 2014, la Cour de Cassation a eu l’occasion de consacrer l’autonomie du principe de loyauté, dans deux arrêts du 7 Janvier 2014 (sonorisation d’une cellule de garde à vue) et du 3 Septembre 2014 (audition à l’étranger par des agents de la DST) (13-‐85.246 et 11-‐83.598).
La provocation à la preuve est licite mais pas la provocation à l’infraction.
Il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour de Cassation, avec le soutien de la CEDH ( arrêt Schlenk du 12 Juillet 1988) qu’une partie privée peut produire comme preuve à la procédure pénale, des pièces obtenues de
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façon déloyale ou de manière illicite, tant que le principe du contradictoire est respecté.
Lorsque la preuve est constituée par un particulier, le principe est celui de l’admission des moyens de preuve illicites ou illégaux, selon une formule maintes fois répétée :
« Aucune disposition légale ne permet aux juges répressifs d’écarter les moyens de preuve produits par les parties au seul motif qu’ils auraient été obtenus de façon illicite ou déloyale. Il leur appartient seulement, en application de l’article 427 du C.P.P. d’en apprécier la valeur probante… »
Exemples :
Des enregistrements de conversations privées, qui ne sont pas à proprement parlé des actes de procédure ou des pièces de l’information, au sens de l’article 170 du C.P.P. mais des moyens de preuve ; la transcription d’enregistrement (Crim 31 Janvier 2012, Pourvoi n°11-‐85.464 ; Crim 7 Mars 2012, pourvoi n° 11-‐88.118).
La Cour exige toutefois que cette preuve illicite ou déloyale ait été soumise à un débat contradictoire et que les droits de la défense aient été respectés (Crim 27 Janvier 2010 pourvoi n° 09-‐83.395 ; 31 Janvier 2012 pourvoi n° 11-‐85.464 ; Crim 8 Janvier 2013, n° 12-‐81.242).
La production d’un film d’un salarié, la production d’une correspondance confidentielle, des opérations de testing, la production d’un enregistrement d’une conversation privée ont été admis comme modes de preuve, versés aux débats par des particuliers ou des associations (Crim 31 Janvier 2007, pourvoi n°06-‐82.383 ; Crim 19 Janvier 2010, pourvoi n° 09-‐84.408).
La Cour de Cassation n’admet pas les preuves illicites, lorsque les particuliers ont agi en concertation avec les agents de l’autorité publique.
Les enregistrements de conversations privées à l’insu des personnes concernées par un particulier, certes recevables à titre de preuve en matière pénale, sont néanmoins susceptibles de constituer une atteinte à la vie privée et d’être incriminées sur le fondement des articles 226-‐1 et 226-‐2 du Code Pénal.
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Il a été jugé que :
« par leur conception, leur objet et leur durée, nécessairement les auteurs desdites écoutes à pénétrer dans l’intimité de la vie privée des personnes concernées et de leurs interlocuteurs … » (Crim 30 Septembre 2008, pourvoi n°07-‐82.249 ; Crim du 16 Février 2010 pourvoi n°09-‐81.492).
Ce principe de loyauté exclut tout acte d’information ou toute ingérence constitutive d’une atteinte à la vie privée, droit prévu à l’article 8 de la Convention et 9 du Code Civil.
Ce principe de loyauté, combiné avec le nouveau droit au silence, droit de se taire et de ne pas s’auto-‐incriminer, inséré dans le CPP par la loi du 14 Avril 2011, fait que l’accusation doit chercher à fonder son argumentation, sans recourir à des éléments de preuve obtenus par la contrainte ou des pressions au mépris de la volonté de l’accusé, d’une part et que le silence ne peut venir au soutien d’une culpabilité, d’autre part.
Ce principe de loyauté suppose que l’ingérence, dans le cadre de la manifestation de la vérité, n’est autorisée, suivant l’article 8§2 de la Convention, que si elle constitue une mesure nécessaire dans une société démocratique et proportionnelle à l’objectif visé.
Ce principe de proportionnalité de la mesure d’enquête trouve une application très limitée.
La Cour de Cassation estime que : « Le contrôle du respect de l’exigence de la proportionnalité revient exclusivement au magistrat compétent pour assurer le contrôle direct et immédiat de l’acte et s’interdit de procéder à toute vérification complémentaire » (Crim 4 Janvier 2005).
-‐ Le troisième principe : est celui du respect impératif de la contradiction en matière pénale :
Pour la CEDH, le principe de la contradiction implique d’une part, un droit pour une partie de prendre connaissance des observations ou des pièces produites par l’autre ainsi que de les discuter, d’autre part que les éléments de preuve détenus par l’autorité de poursuite ainsi que ses réquisitions
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soient portés à la connaissance des autres parties et enfin que le juge ne fonde sa décision que sur des moyens de droit ou des éléments de preuve qui ont été discutés par les parties.
L’évolution de la jurisprudence de la Chambre Criminelle se caractérise par une prise en considération croissante des exigences des articles 6 §1 de la CEDH et préliminaire du C.P.P..
Le juge doit faire respecter le principe du contradictoire et le cas échéant ordonner le renvoi de l’affaire à une date ultérieure, si cela s’avère nécessaire pour permettre au Ministère Public et aux parties de prendre connaissance des pièces produites (Crim 22 Octobre 2003, pourvoi n° 02-‐88.388).
-‐ Le quatrième principe : certains secrets sont opposables à la preuve
Pour être admissible, une preuve doit être obtenue dans le respect des droits et libertés des justiciables, dans le respect de certaines dispositions relatives au secret, dans le respect de certaines dispositions relatives à la manière d’obtention de preuves.
La Cour de Strasbourg a eu l’occasion de statuer sur cette notion de « droit à la preuve » et ses limites.
La CEDH aborde la recevabilité d’un mode de preuve, à priori inadmissible ou suspect, à travers le prisme d’un rapport de proportionnalité entre les intérêts que le secret protège et ceux à la satisfaction desquels il fait obstacle, dès lors que, dans cette mise en balance, l’atteinte au secret paraît moindre et constituer le seul moyen de faire triompher une légitime prétention de fond ( CEDH 10 Octobre 2006 n° 7508/02 ; CEDH 13 Mai 2008 n°65097/01).
La Cour de Cassation s’est inscrit dans ce mouvement.
Il n’existe pas en France de définition de la notion du secret d’affaire et il n’existe pas davantage de protection du patrimoine informationnel d’une entreprise.
Il existe toutefois certains secrets d’affaire bénéficiant d’une protection spécifique, assurée notamment par leur qualification de secret professionnel, dont la violation est pénalement incriminée et sanctionnée par les articles 226-‐13 et 226-‐14 du Code Pénal.
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Un élément de preuve y portant atteinte n’est, en principe, pas admissible.
Le secret des correspondances des avocats et le secret bancaire constituent des exemples de secret des affaires, dont la Cour de Cassation est régulièrement saisie, surtout en DPA.
L’article 66-‐5 de la loi n° 71-‐1130 du 31 Décembre 1971 portant réforme des certaines professions judiciaires et juridiques énonce :
« En toutes matières, que ce soit dans le domaine du conseil ou dans celui de la défense, les consultations adressées par un avocat à son client ou destinées à celui-ci, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l’avocat et ses confrères à l’exception pour ces dernières de celles portant la mention « officielle », les notes d’entretien et plus généralement toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel… »
Une lecture stricte de cet article impose d’exclure de la protection les correspondances échangées entre l’avocat et l’expert-‐comptable de son client (Com 15 Juin 2010, pourvoi n°09-‐66.688)
Toutes les correspondances échangées entre l’avocat et son client ne sont pas toutes protégées.
La confidentialité ne s’impose qu’à l’avocat et pas au client.
II – LES NOUVEAUTES LIEES A L’INTERNATIONALISATION ET AUX NOUVELLES TECHNOLOGIES:
II- A : La recherche de preuve à l’étranger Hors l’Union Européenne : Les articles 694 et suivants du C.P.P., résultant de la loi n°2004-‐204 du 9 Mars 2004, disposent des modalités de l’entraide judiciaire internationale, en l’absence de convention internationale stipulant autrement.
Les interrogatoires, auditions, confrontations, surveillances ou infiltrations réalisées à l’étranger à la demande des autorités judiciaires françaises
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doivent être réalisées conformément au Code français de Procédure Pénale, sauf si une convention en dispose autrement.
L’entraide aux fins de saisie des produits d’une infraction en vue de leur confiscation ultérieure, sur le fondement des articles 694-‐10 du C.P.P. est envisagée aussi.
Dans l’Union Européenne :
Dès 1950, diverses conventions multilatérales ont été conclues dans le cadre du Conseil de l’Europe, en matière de coopération judiciaire pénale.
La première convention européenne d’entraide judiciaire en matière pénale date du 20 Avril 1959, suivie de son protocole du 17 Mars 1978, a été modifiée par une convention du 8 Novembre 2001 au niveau pré-‐sentenciel (avant audience).
Ce système de coopération judiciaire entre les pays membres de l’Union Européenne était le suivant :
Une autorité judiciaire compétente (autorité requise) relevant de l’état requis devait accomplir pour le compte d’une autorité judiciaire requérante, relevant d’un autre état, l’état requérant, un ensemble d’actes.
Ce système de coopération était peu satisfaisant : les canaux de transmission trop longs, l’absence de délai d’exécution, les possibilités multiples de refus pour des raisons de double incrimination ou de gravité ou de nature des faits.
Dans la continuité des accords de SCHENGEN de 1990, le groupe de Coopération Judiciaire Affaires Pénales (CPE) a œuvré pour la promotion de cinq conventions de coopération judiciaire pénale.
Un second système de coopération dit amélioré s’est développé avec la diffusion d’un guide des bonnes pratiques judiciaires en matière pénale dans l’Union Européenne.
Une nouvelle convention relative à l’entraide judiciaire en matière pénale du 29 Mai 2000 (JOCE du 12 Juillet 2000) et son protocole du 16 Octobre
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2001 a été promulguée et ratifiée par quasiment tous les états membres de l’Union Européenne.
Cette coopération améliorée institue des canaux de transmission plus rapides, fixe un délai, pour l’accomplissement des mesures, étend les faits susceptible de faire l’objet de cette coopération, atténue la règle selon laquelle l’acte de procédure est régi par la loi d’exécution (locus regit actum) au profit de la règle selon laquelle l’acte de procédure est régi par la loi de la procédure initiale (forum regit actum), intègre des dispositions relatives aux nouvelles technologies (vidéoconférence, téléconférence, interception des télécommunications etc…).
Pour garantir autant que possible l’admissibilité de la preuve, l’autorité requérante doit veiller à exprimer clairement, dans la demande, les formalités et les procédures qui doivent être appliquées dans les états requis et ces formalités et actes requis ne doivent pas être contraires aux droits fondamentaux de l’état requis.
Le protocole du 16 Octobre 2001 est venu préciser que pour trois types de demandes dans le secteur bancaire, demandes d’information sur des comptes bancaires, demandes d’information sur des transactions bancaires et demandes d’information sur le suivi de transaction bancaire, aucun refus, fondé sur le secret bancaire ou la nature fiscale des infraction, ne peut être opposé.
Compte tenu des limites de ce système coopération, il a été imaginé, à l’initiative des anglais, une troisième étape à l’évolution de la coopération judiciaire pénale, par la création d’un espace pénal européen, reposant sur le principe de reconnaissance mutuelle.
En raison des grandes disparités entre les garanties offertes par les droits nationaux, le passage à la reconnaissance mutuelle pour l’obtention de toutes les preuves pénales impose que des normes communes européennes règlementant les droits des personnes suspectées et poursuivies soient adoptées.
La faiblesse de garanties procédurales fragilise la preuve pénale dans les relations internes comme dans le contexte de la coopération judiciaire interétatique.
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Ce principe révolutionnaire opère un changement total de la philosophie et suppose une relation de confiance entre les états membres, laquelle suppose et va de pair avec la protection des droits fondamentaux, dans chacun des états membres, gage de l’admissibilité des preuves.
Dans une résolution du 30 Novembre 2009, le Conseil de l’Europe a reconnu que les droits des suspects et des personnes poursuivies n’avaient pas été renforcés, alors que des progrès notables ont été accomplis pour faciliter les poursuites.
Le Conseil de l’Europe a conclu qu’il était temps de prendre des mesures afin de parvenir à un meilleur équilibre entre les mesures visant à faciliter les poursuites et la protection des droits procéduraux des personnes.
Dans cet élan, les terminologies changent : l’état requérant est désormais l’état d’émission et l’état requis, l’état d’exécution.
Dans le cadre de ce système d’entraide européenne fondée sur la reconnaissance mutuelle, les canaux de transmission sont fluides par la judiciarisation du processus, les délais d’exécution de 30 j, les formalités sont allégées, les faits pouvant donner lieu à cette coopération élargis, les motifs de refus réduits.
Les acteurs de cette coopération européenne dans la recherche d’éléments de preuve sont : outre le magistrat d’instruction français, le magistrat de liaison, le réseau judiciaire européen, Eurojust, et éventuellement une équipe commune d’enquête, composée de manière temporaire (JIT) ( Joint Investigation Team).
L’article 695-‐2 du C.P.P. évoque les modalités de constitution d’une équipe commune d’enquête, pour des enquêtes transnationales complexes.
La procédure accomplie par l’équipe commune d’enquête est régie par la loi de l’état d’intervention, c’est-‐à-‐dire, par la loi de l’état sur le territoire duquel elle intervient.
Les arrêts rendus récemment par la Cour de Cassation dans le cadre de l’affaire Krombach permettent de douter de la réalité d’une volonté de coopération judiciaire (Crim 2 Avril 2014 n°13-‐80.471).
En tout cas, dans le cadre de la réalisation de cet espace européen, diverses décisions-‐cadres ont été adoptées.
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Exemples de décisions-‐cadres ayant trait au DPA:
-‐ Le protocole du 27 Septembre 1996 relatif à la lutte contre la corruption et la protection des intérêts financiers de l’Union Européenne ;
-‐ La décision-‐cadre du 28 Mai 2001 relative à la lutte contre la fraude et la contrefaçon des moyens de paiement ;
-‐ La décision-‐cadre du 26 Juin 2001 concernant le blanchiment d’argent, l’identification, le dépistage, le gel ou la saisie et la confiscation des instruments et des produits du crime ;
-‐ La décision-‐cadre du 22 Juillet 2003 relative à l’exécution dans l’Union Européenne des décisions de gel de biens ou d’éléments de preuve ;
-‐ La décision-‐cadre du 24 Février 2005 relative aux attaques visant les systèmes d’information ;
-‐ La décision-‐cadre du 6 Octobre 2006 relative à la reconnaissance mutuelle des décisions de confiscation ;
-‐ La décision-‐cadre du 18 Février 2008 relative au Mandat Européen d’Obtention de Preuve (MOP) ;
-‐ La décision-‐cadre du 24 Octobre 2008 relative à la criminalité organisée ;
(Cf. le livre vert de la commission européenne relatif à l’obtention de preuves en matière pénale entre Etats membres).
Aux fins d’harmonisation des garanties des droits fondamentaux dans les divers états membres, diverses Directives ont été promulguées :
-‐ La Directive 2010/64/UE du 20 Octobre 2010 relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales, transposée en France par la loi n°2013-‐711 du 5 Août 2013.
-‐ La Directive 2012/13/UE du 22 Mai 2012 relative au Droit à l’information dans le cadre des procédures pénales, transposée en France, par la loi n°2014-‐535 du 27 Mai 2014.
-‐ La Directive 2013/48/UE du 22 Octobre 2013 relative au droit d’accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales et les procédures de mandant d’arrêt européen qui doit être transposée au plus tard le 27 Novembre 2016.
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-‐ La Directive n° 2014/41/UE du 3 Avril 2014 relative à la Décision d’Enquête Européenne en matière pénale, qui doit être transposée avant le 22 Mai 2017.
Dans cette dynamique ont été adoptées en France, les lois ou ordonnances suivantes :
-‐ Loi n°2005-‐750 du 4 Juillet 2005 relative à l’émission et d’exécution de décisions de gel de biens ou d’éléments de preuve en application de la décision-‐cadre précitée du 22 Juillet 2003, sous les articles 695-‐9-‐1 du C.P.P. ;
-‐ L’ordonnance n° 2011-‐1069 du 8 Septembre 2011 relative aux échanges simplifié d’informations entre services, en application de la décision-‐cadre précitée du 18 Décembre 2006, sous les articles 695-‐9-‐31 du C.P.P. ;
-‐ Loi n° 2013-‐1117 du 6 Décembre 2013 sur la coopération entre les bureaux de recouvrement des avoirs des états membres en matière de dépistage et d’identification des produits du crime, en application de la décision-‐cadre du 27 Décembre 2007, sous les articles 695-‐9-‐50 du C.P.P. ;
II – B : L’influence des nouvelles technologies
La procédure en DPA se caractérise par une technicité croissante, par un régime procédural dérogatoire, dans certains cas et par l’intégration des nouvelles technologies dans le cadre de la preuve.
Les poursuites peuvent être exercées par les JIRS, disposant de moyens et de compétences élargies ou par le Parquet de Paris, qui peut disposer d’une compétence, à échelle nationale, depuis la loi n° 2012-‐1117 du 6 Décembre 2013.
Le délit d’escroquerie en bande organisée a été glissé, par la loi n°2011-‐525 du 17 Mai 2011, dans la liste d’infractions spécifiques, génératrices d’un régime procédural et de moyens d’administration de la preuve particuliers (article 706-‐73-‐8 du CPP).
Les cahiers d’Avocap – 1ère édition
Chaire de la Fondation pour le Droit Continental Casablanca (Maroc) – Janvier 2015
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Les nouvelles lois quant aux modes d’administration de la preuve ont été promulguées et sont venues étoffer le droit processuel interne d’administration de la preuve, telles que les lois n° 2011-‐267 du 14 Mars 2011 et n° 2014-‐372 du 28 Mars 2014, emportant intégrant des captations des données informatiques et la géolocalisation.
Laurence KRIEF Avocat au Barreau de Paris
Membre d’Avocap Paris et d’Avocap Bruxelles
Sources :
-‐ Rapport Annuel de la Cour de Cassation 2012 sur la preuve ; -‐ Dalloz sur la preuve ; -‐ AJ Pénal Février 2014 : la preuve du 21ème siècle ; -‐ AJ Pénal Juillet-‐Août 2014 : Enquête pénale : les nouveautés ; -‐ Le droit de la preuve d’Aurélie BERGEAUD LGDJ (Nov 2010); -‐ Article de Juliette LELIEUR RCS 2011 p 1 sur la reconnaissance mutuelle appliquée à l’obtention transnationale de preuves pénales dans l’UE ;
-‐ AJ Pénal 2011 p 438 : article d’E. BARBE l’influence de l’U.E. sur le droit pénal français ;