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Institut d’Etudes Politiques de Toulouse
L’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes au service de la croissance économique et de
la performance en Europe.
L’argument économique en faveur de l’égalité.
Mémoire présenté par Mme Pauline Druguet Directrice du mémoire : Mme Isabelle Guérin
Année universitaire 2012-2013
Institut d’Etudes Politiques de Toulouse
L’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes au service de la croissance économique et de
la performance en Europe.
L’argument économique en faveur de l’égalité.
Mémoire présenté par Mme Pauline Druguet Directrice du mémoire : Mme Isabelle Guérin
Année universitaire 2012-2013
4
Remerciements Je tiens à remercier tout particulier Madame Isabelle Guérin, qui m’aura guidée
tout au long de mon travail, pour ses précieux conseils et sa grande disponibilité.
Un grand merci à mes proches, mes parents et mes fidèles amies pour leur
soutien indéfectible pendant toutes ces années.
Enfin, une pensée particulière pour toutes les personnes que j’ai pu côtoyer
pendant mes différents stages et qui ont su éveiller ma curiosité à propos des questions
d’égalité.
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Avertissement L’IEP de Toulouse n’entend donner aucune approbation, ni improbation dans les
mémoires de recherche. Ces opinions doivent être considérées comme propres à leur
auteur(e).
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Sommaire
Introduction .................................................................................................................. 7 Chapitre 1 : L’égalité hommes-‐femmes, croissance et performance économique : l’émergence et la diffusion d’un nouveau paradigme. .................................................. 12 Section 1 : l’argument économique en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes. ........... 12 I) L’existence d’un lien entre croissance et égalité entre les femmes et les hommes. ............... 12 II) Le travail des femmes, une solution à la baisse de main d’œuvre programmée en Europe ? .................................................................................................................................................................................. 18
Section 2 : la diffusion de l’argument économique pour favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes et ses effets sur le droit ........................................................................................................ 23 I) L’impulsion des institutions internationales ......................................................................................... 24 II) Les transformations du droit ...................................................................................................................... 29
Chapitre 2 : Réaliser l’égalité entre les hommes et les femmes pour favoriser la croissance : les obstacles à surmonter. ........................................................................ 35 Section 1 : l’éducation : mieux valoriser le capital humain .............................................................. 35 I) Aujourd’hui, des filles aussi nombreuses que les garçons à l’école et qui y réussissent mieux. ............................................................................................................................................................................... 36 II) De l’école au marché du travail, transformer son bagage scolaire en un emploi : la rentabilité scolaire des filles en question. ........................................................................................................ 41
Section 2 : des freins sociaux et culturels qui limitent le développement du travail féminin à égalité avec celui des hommes. ..................................................................................................................... 47 I) Les emplois des femmes .................................................................................................................................. 48 II) Un alignement non effectif ........................................................................................................................... 53 III) Toujours des discriminations .................................................................................................................... 62
Chapitre 3 : Les débuts d’une prise de conscience a priori : l’intégration de la question de l’égalité dans les stratégies managériales des entreprises. ...................................... 72 Section 1 : Le nouveau « prêt à penser » des ressources humaines .................................................. 72 I) Les femmes : nouvel atout en entreprise ................................................................................................. 73 II) L’égalité femmes-‐hommes et la diversité .............................................................................................. 76
Section 2 : Le piège de l’essentialisme ............................................................................................. 81 I) « Qualités féminines » : le danger de l’essentialisme et la construction sociale de la qualification. ................................................................................................................................................................. 81 II) Des femmes obligées de se conformer au modèle féminin traditionnel. .................................. 86
Conclusion ................................................................................................................... 89 Annexes ....................................................................................................................... 91 Bibliographie ............................................................................................................. 122 Table des matières ..................................................................................................... 127
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Introduction
« On this International Women’s Day, I urge governments, civil society
and the private sector to commit to gender equality and the empowerment
of women – as a fundamental human right and a force for the benefit of
all. The energy, talent and strength of women and girls represent
humankind’s most valuable untapped natural resource ».
Ban Ki-moon, Secrétaire Général de l’Onu,
Intervention pour la Journée Internationale des droits des femmes, 2 mars 2012.
A l’occasion de la Journée Internationale des droits des femmes 2012, le Secrétaire
Général des Nations Unies, Ban Ki-moon intervenait en ces termes dans un message mis
en ligne sur le site internet de l’ONU, pour promouvoir la place des femmes dans la société
mondiale. Ses paroles sont tout a fait révélatrices d’une nouvelle ère. Oui, l’amélioration
de la situation des femmes est aujourd’hui plus que jamais un sujet préoccupant pour
l’ensemble de la communauté internationale. Une attention toute particulière est portée aux
menaces de recul des droits des femmes dans de nombreuses parties du monde.
On remarque une véritable prise de conscience et une volonté de changement quant à
l’absence persistante des femmes dans la vie publique et professionnelle dans de nombreux
pays. Mais aujourd’hui, c’est la manière de résoudre le problème de l’absence des femmes
qui opère un tournant. Les femmes et les filles sont mises en avant comme un véritable
enjeu dans le développement économique. Elles constitueraient ainsi une ressource
inexploitée, une véritable richesse qui mériterait de faire l’objet de davantage de
considération. Cette nouvelle approche de l’égalité, profondément novatrice, doit d’ailleurs
être analysée dans un contexte d’échec des politiques traditionnelles de développement
8
pour les pays du sud, et de ralentissement économique pour les pays développés. Pour ces
derniers, les femmes apparaissent comme un nouveau levier ou encore comme un relais de
croissance. Ce dernier point est tout a fait nouveau puisque les femmes n’ont jamais été
considérées comme une richesse ou un potentiel économique.
Ecartées pendant longtemps de la res economomica, comme elles l’étaient de la res
publica, les femmes n’ont jamais bénéficié de la même place que les hommes dans le
monde économique et professionnel. Le travail des femmes était d’ailleurs vu comme un
travail secondaire et leur salaire comme un supplément, et non comme un revenu principal
au même titre que celui de leur mari. Même récemment, alors que les choses ont beaucoup
changé et que le travail des femmes s’est démocratisé dans le pays développés, on
remarque la persistance d’idées rétrogrades qui considèrent le travail des femmes comme
un variable d’ajustement. Avec la crise de 2008, on a d’ailleurs vu revenir sur le devant de
la scène des idées, très minoritaires il faut bien l’avouer, qu’en temps de crise et de
chômage de masse, les femmes devraient laisser leur emploi aux hommes.
Toujours perçue comme le « deuxième sexe 1 », comme une variation du
« masculin », les femmes ne bénéficient pas de la même place que les hommes dans la
société. On est le plus souvent frappé par leur invisibilité dans les sphères publiques et
professionnelles et ce, malgré des décennies de politiques de promotion de l’égalité entre
les hommes et les femmes. Certes, dans les pays développés, les discriminations ont
nettement reculé. Si l’on regarde le chemin parcouru, on ne peut que constater les
avancées. Toutefois, égalité de droit ne signifie en aucune mesure, égalité de fait. En effet,
alors que l’égalité de droit existe, l’égalité de fait n’est pas encore atteinte et semble
malheureusement encore difficilement accessible, à cause de la persistance d’un sexisme
latent dans de nombreux domaines. Il paraît ainsi alors capital de trouver de nouvelles
sources de motivation au changement.
A cet égard, la mise en lumière de l’argument économique paraît en tout point
stratégique. Il est ainsi apparu qu’une plus grande égalité entre les hommes et les femmes
aurait un impact positif non négligeable sur la croissance économique. Alors même que
l’argument éthique ne semble plus suffisant, le changement que représente l’emploi d’un
argument utilitariste pour favoriser l’égalité soulève de nombreuses questions. Mais
1 Le Deuxième Sexe, Simone de Beauvoir, Editions Gallimard, 1949, Paris, 400p.
9
l’approche est intéressante car en soulignant l’importance de leur rôle économique, elle
pourrait permettre de modifier les préjugés à l’égard des femmes.
La lutte pour l’égalité entre les femmes et les hommes semble aujourd’hui opérer
un tournant. Elle mobilise dorénavant un argument économique. Il apparaît ainsi que
l’égalité favoriserait la croissance. Les mécanismes mis en jeu sont nombreux et ciblent
l’ensemble des éléments révélateurs des inégalités persistantes entre les femmes et les
hommes. Face à cela, il convient de s’interroger sur les fondements et les conséquences
d’une telle politique. Le développement d’un tel argumentaire paraît certes intéressant, car
motivant à la fois pour les gouvernements et les entreprises, à mettre en place. Toutefois, il
ne faudrait pas que l’argument économique n’en vienne à s’imposer et à occulter
l’argument pourtant supérieur de l’éthique.
Plusieurs points semblent essentiels pour mieux comprendre les enjeux de la mise en
avant de l’argument économique pour favoriser l’égalité. D’une part, il est important de
nous questionner à propos de l’émergence et de la diffusion d’une telle politique. En effet,
les questions d’égalité, quelles qu’elles soient, mettent toujours en avant les notions
cardinales d’éthique et d’équité. L’égalité entre tous les Hommes est un principe
fondamental maintes et maintes fois réitéré dans tous les textes et toutes les conventions
sur les droits de l’Homme. Toutefois, il semblerait que la vision, presque idéaliste, d’une
égalité plus proclamée qu’effective ne suffise plus. La mobilisation d’arguments plus
pragmatiques apparaît donc comme une nouvelle étape dans les stratégies de lutte contre
les inégalités. L’utilisation de tels arguments, emprunts d’une forte dimension utilitariste,
est cependant délicate.
La mission de cette étude est double. Tout d’abord, il s’agit d’analyser comment s’est
effectué le basculement dans la stratégie de promotion de l’égalité, puis d’étudier les
obstacles à l’implication des femmes dans la croissance qu’il reste à dépasser. Nous nous
concentrerons ici sur la situation dans les pays développés et notamment dans les pays
européens. Il sera bien ici question de développer l’idée que l’égalité peut constituer un
nouveau levier de croissance, comme une réponse aux faibles résultats économiques que
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connaissent la plupart des pays européens à l’heure actuelle.
De plus, puisque la promotion de l’égalité passe aujourd’hui par sa dimension
économique, il me paraissait également important d’analyser comment les entreprises se
sont emparées de la question de l’égalité et comment elles en ont fait un gage de
performance. L’argument économique pour favoriser la croissance passe donc par deux
présomptions.
La première est que la mise en avant de l’argument économique constitue un levier
efficace de changement, puisque il postule que la croissance passe par une revalorisation
de la place des femmes dans le monde économique. Cette motivation serait réelle, aussi
bien pour les gouvernements, car les femmes constituent une solution à la pénurie de main
d’œuvre, que pour les entreprises, pour lesquelles les femmes seraient à l’origine d’un
renouvellement des pratiques et engendreraient une amélioration de leurs résultats.
D’ailleurs, la transformation de la situation des femmes dans le monde professionnel
agirait comme un déclencheur et se traduirait par une amélioration globale de la place des
femmes dans la société.
La seconde est que l’utilisation d’une telle approche utilitariste a permis au monde
professionnel de reprendre à leur compte et de s’approprier les questions d’égalité. Ce
second point amène à nous interroger sur les conséquences de cette réappropriation des
questions éthiques et humanistes à des fins de performance économique.
Cette étude a été réalisée à partir de différents rapports des institutions
internationales qui mettent en avant le rôle de l’égalité pour la croissance. Il s’appuie
également sur une revue de la littérature scientifique. L’utilisation de rapports
institutionnels présente des difficultés. Ce sont pour la plupart des textes plus descriptifs
qu’analytiques. Ils ont pour vocation d’établir des faits, de présenter des objectifs et de les
justifier. Enfin, ils sont souvent force de proposition pour les différents gouvernements,
ONG et autres institutions internationales. En parcourant différents rapports de ce type, il
est apparu qu’ils partaient le plus souvent du constat que l’égalité entre les hommes et les
femmes impactait positivement la croissance, mais sans expliquer les mécanismes mis en
œuvre. A l’inverse, la littérature scientifique apporte des éléments explicatifs mais très peu
d’articles offrent une vue globale sur la question.
11
Afin de mieux comprendre les mécanismes mis en œuvre avec l’application de
cette nouvelle politique d’égalité par la croissance, il convient d’analyser dans un premier
temps dans quel contexte ce nouvel argumentaire a émergé puis s’est propagé (Chapitre 1).
Nous nous demanderons ainsi de quelle manière l’égalité entre les hommes et les femmes
peut favoriser la croissance. Par ailleurs, la particularité de cette politique est qu’elle tire
son origine dans les stratégies récentes de lutte contre le sous-développement. C’est donc
ici la transposition de ces politiques aux pays développés qui nous intéresse, sa mise en
place ainsi que ses effets sur le droit. Puis, nous verrons qu’il subsiste de nombreux
obstacles à éliminer afin de « libérer » la croissance (Chapitre 2). Ceux-ci se concentrent
sur les discriminations envers les femmes sur le marché du travail. Enfin, nous analyserons
la manière dont aujourd’hui, les entreprises ont pris en main la notion d’égalité entre les
hommes et les femmes, en en faisant un vecteur de performance économique (Chapitre 3).
Ce changement de mentalité pour les entreprises, semble apparaître, a priori, comme une
prise de conscience de la situation professionnelle actuelle des femmes. Toutefois, nous
verrons que cette réappropriation des politiques d’égalité par les entreprises est délicate et
peut s’avérer dangereuse.
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Chapitre 1
L’égalité hommes-femmes, croissance et performance économique : l’émergence et la diffusion d’un nouveau
paradigme.
D’abord apparu comme une solution au sous-développement, l’argument de
l’égalité s’est ensuite diffusé plus largement. Il est d’ailleurs repris dans de nombreux pays,
y compris dans les pays développés. L’innovation majeure de ce nouveau paradigme est de
mettre en avant l’idée que l’égalité entre les hommes et les femmes, dans tous les
domaines, aurait une influence sur la croissance. La lutte contre les inégalités constitue
ainsi un nouveau levier de croissance, ce qui permet de motiver un nombre plus large
d’acteurs autour de la lutte contre les discriminations. L’utilisation d’un tel argument, si
différent des politiques traditionnelles de croissance et de réduction des inégalités n’a pas
été sans conséquences et a provoqué un bouleversement du droit.
Section 1 : l’argument économique en faveur de l’égalité entre les hommes et
les femmes.
Les nouvelles politiques de croissance ainsi développées montrent l’existence d’un
lien entre l’égalité hommes-femmes et la croissance économique. La mise en avant d’un tel
argument constitue une manière de motiver le changement vers une plus grande égalité.
Ces politiques sont construites autour d’un argumentaire innovant. Celui-ci attire
l’attention sur plusieurs points, favorables à la croissance : l’importance du capital humain
et la place des femmes dans la main d’œuvre.
I) L’existence d’un lien entre croissance et égalité entre les femmes et les
hommes.
L’utilisation d’un argument économique pour favoriser la réduction des inégalités est
en tout point un phénomène récent. A l’origine, la diminution des inégalités était présentée
comme une manière de lutter contre le sous-développement dans les pays les plus pauvres.
13
Récemment, la mobilisation de l’argument économique a été mise en avant pour constituer
un nouveau levier de changement à la situation des femmes. Les femmes sont présentées
comme un capital humain sous-exploité à cause des inégalités.
A) L’égalité entre les hommes et les femmes : la naissance du discours égalitaire
pour favoriser la croissance.
L’idée que les femmes ont un rôle important à jouer dans le développement et la
croissance a germé tout d’abord au sein des programmes des institutions internationales
pour le développement. Aujourd’hui, la question du genre est considérée comme un point
essentiel de la lutte contre la pauvreté dans les pays du Sud (Prévost, 2011). L’idée centrale
est que l’amélioration de la place des femmes dans la société serait positive pour le
développement, ainsi que pour la réduction de la pauvreté. Les femmes sont les principales
victimes du sous-développement, en même temps qu’elles en sont la clé. Le
développement passe ainsi par l’empowerment des femmes, c’est-à-dire, par
l’augmentation de leurs capacités à décider.
L’approche de Sen concernant la pauvreté et le sous-développement apporte un
élément de compréhension important. Pour lui, la pauvreté n’est plus une simple question
de possession matérielle mais est une notion bien plus vaste qui comprend la capacité à
pouvoir jouir des libertés élémentaires, ou de « capabilités », dans la vie sociale (Jacquet,
L. Jaunaux, C. de Boissieu et J. Sgard, 2004 ; Prévost, 2011). Bien plus qu’un problème
uniquement économique, la pauvreté est également un problème social. C’est cette
pauvreté au sens large, ainsi que les inégalités, qui entravent le développement : lutter
contre les injustices est donc une solution au sous-développement. Pour Sen, les femmes
sont d’ailleurs au cœur du problème du développement. Elles sont un excellent exemple de
son raisonnement du fait qu’elles cumulent les inégalités (Prévost, 2011). L’empowerment
des femmes apparaît donc comme une solution efficace à la pauvreté et au sous-
développement.
Aujourd’hui, les institutions internationales comme la Banque Mondiale ou le PNUD
se sont emparées de la notion d’empowerment. Elles mettent en avant la réduction des
inégalités pour lutter contre la pauvreté. L’accès à l’autonomie financière des femmes,
notamment par l’emploi est donc devenu une priorité. Les femmes sont aussi vues comme
des « agents », permettant le développement (Prévost, 2011). L’amélioration de leur
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situation économique a une incidence sur l’ensemble de leur famille en termes d’éducation
et de santé, deux facteurs non négligeables dans la croissance économique.
Ainsi l’accent est mis sur le travail des femmes par les institutions internationales
(Jacquet et al. 2004 ; World Bank, 2011, OCDE, 2012). Il est bien entendu question ici
d’un travail rémunérateur financièrement pour ces femmes qui sont le plus souvent
cantonnées à des travaux domestiques, invisibles et non gratifiés. Avoir un emploi permet
une plus grande autonomie financière mais améliore également le statut social.
L’amélioration de la place des femmes dans la société par le travail est donc un moyen
important de développement par la réduction de la pauvreté.
D’autres effets, indirects cette fois-ci, à l’amélioration de la condition des femmes,
sont tout aussi intéressants. L’existence d’un revenu féminin dans un couple permet de
modifier l’allocation des dépenses, notamment en matière d’éducation des jeunes filles
(Brummet, 2008 ; Prévost, 2011 ; Word Bank 2011). Or, l’éducation a également des effets
positifs pour le développement en ce qu’il améliore la santé des enfants et conduit à une
baisse du taux de fécondité. L’autonomie financière des femmes permet donc l’apparition
d’un cercle vertueux, où les filles seront mieux éduquées que leur mère et donc plus à
même d’obtenir un emploi rémunérateur et ainsi assurer l’avenir de leurs propres enfants.
B) Investir et utiliser pleinement le capital humain pour favoriser la croissance.
L’investissement dans le capital humain, notamment dans l’éducation, est un facteur
de croissance et de productivité (Prévost, 2011 ; OCDE, 2012). Or, le niveau d’éducation
des femmes est moindre que celui des hommes dans de nombreux pays. Le rattrapage du
niveau d’éducation des femmes apparait donc comme favorable à la croissance et constitue
donc un enjeu économique important. L'égalité entre les sexes, notamment en termes
d’éducation et d’emploi, doit ainsi être considérée comme un investissement, permettant
d'augmenter la productivité et d'exploiter pleinement le potentiel des forces de travail
(Smith & Bettio, 2009).
Le facteur « éducation » est d’ailleurs un élément important de nombreux modèles de
croissance endogène (Brummet, 2008). Les inégalités en matière d’éducation ont d’ailleurs
un effet inhibiteur sur la croissance (Dollar & Gatti, 1999 ; Esteve-Volart, 2000). Une
15
étude de l’OCDE (2012) révèle que l’augmentation du niveau d’études explique pour
moitié la croissance économique dans les pays de l’OCDE depuis 1960. Plus de la moitié
de cette croissance est d’ailleurs directement liée à l’augmentation du niveau de formation
des femmes. Ce qui est très intéressant c’est que, plus que l’augmentation du niveau
d’éducation moyen, c’est la répartition égalitaire de ce capital humain qui apparaît comme
très importante pour la croissance. Les inégalités peuvent donc être considérées comme un
frein à la croissance.
Le graphique suivant révèle que le niveau d’éducation des femmes est plus élevé
dans les pays riches et que les niveaux d’éducation entre les hommes et les femmes y sont
plus équilibrés.
Le niveau d’études est plus élevé et plus équilibré entre hommes et femmes dans les pays
plus riches.
Nombre moyen d’années de scolarité des 25-34 ans, par sexe
Source : OCDE, Inégalité hommes-femmes, il est temps d’agir, 2012
Ce graphique montre qu’il existe un lien entre le niveau d’éducation et sa répartition
entre les sexes, et la richesse d’un pays. On voit d’ailleurs que dans les pays les plus
pauvres, non seulement le niveau d’éducation est plus faible, mais l’écart entre les femmes
et les hommes y est nettement plus important que dans les pays riches. L’interprétation de
ces résultats peut être double : soit les investissements dans l’éducation ont un effet positif
16
sur la croissance économique, soit les pays plus riches investissent plus massivement dans
le capital humain, s’assurant ainsi une hausse continue de leur productivité, leur
garantissant une croissance à long terme (OCDE, 2012).
Dans les pays de l’OCDE, l’éducation des femmes ne fait plus l’objet de débats.
Toutefois, malgré les efforts massifs réalisés pour l’éducation des femmes depuis environ
un siècle, il est clair qu’aujourd’hui, la société n’utilise pas pleinement ce potentiel de
femmes diplômées (Esteve-Volart, 2000 ; 2004). Une part non négligeable de
l’investissement dans l’éducation est en quelque sorte gaspillée, on parle alors de mauvaise
allocation des ressources (Brummet, 2008). En effet, alors que les garçons et les filles sont
scolarisés dans les mêmes proportions et bénéficient des mêmes investissements, le taux
d’activité des femmes demeure inférieur à celui des hommes, et les femmes, plus que les
hommes occupent des emplois à temps partiel. Egalement, l’emploi des femmes se
concentre en un petit nombre de secteurs.
L’emploi constitue une composante clé de la croissance (Löfström, 2009 ; OCDE,
2012). L’augmentation du travail des femmes a en effet contribué à une augmentation du
PIB des pays européens sur les dix dernières années (Gauvin, 2001 ; Conseil Européen,
2009) En effet, l’égalité entre les hommes et les femmes, notamment en termes d’emploi
aurait un impact non négligeable sur la croissance en ce qu’elle permettrait d’augmenter le
taux d’activité des femmes et donc, la taille de la population active. L’effet sur la
croissance est d’autant plus important qu’il s’agit d’une main d’œuvre qualifiée. Ainsi,
l’augmentation du taux d’activité, mais également l’ouverture aux femmes de nouveaux
métiers et secteurs fortement masculins est donc un enjeu pour la croissance dans les pays
développés (Löfström, 2009 ; OCDE, 2012). Ce dernier aspect est non négligeable puisque
selon une étude citée dans un rapport de l’OCDE (2012), entre 1960 et 2008, 17 à 20% de
la croissance américaine pourrait être imputée à une meilleure répartition des groupes
sous-représentés, notamment des femmes, dans la population active. L’augmentation du
nombre d’heures travaillées par les femmes est également un enjeu puisqu’on le sait, le
recours au temps partiel est un phénomène très répandu en Europe et qu’il demeure
principalement l’apanage des femmes (Löfström, 2009). Ainsi, dans les pays développés,
la croissance à long terme est intimement liée à une utilisation plus efficiente de la main
d’œuvre disponible (Mörtvik & Spånt, 2005).
Une utilisation plus efficiente du capital humain passe également par un meilleur
17
accès des femmes aux postes à responsabilités, par une prise en compte plus importante de
leurs capacités par les entreprises. En effet, les femmes restent souvent cantonnées à des
fonctions auxiliaires ou à des postes moins élevés que ceux auxquels elles pourraient
prétendre. Leurs compétences sont donc sous-utilisées dans le monde professionnel.
C) Estimation du potentiel de croissance en cas de réalisation de l’égalité hommes
- femmes
Comme nous venons de le voir, l’amélioration des inégalités entre les hommes et les
femmes, notamment en matière d’éducation et d’emploi, aurait un effet positif sur la
croissance. L’estimation du potentiel de croissance en cas d’égalité entre les hommes et les
femmes est un passage important en ce qu’il permet de quantifier et donc d’apporter un
argument supplémentaire en faveur de l’égalité.
Löfström (2009) montre que l’égalité entre les hommes et les femmes en matière
d’éducation, d’emploi et de salaires permettrait, selon ses estimations, d’augmenter la
croissance de 14% à 40% selon les pays de l’Union Européenne, de 27% en moyenne pour
l’Union Européenne. Ses projections se fondent sur une situation où l’égalité entre les
femmes et les hommes se manifesterait selon trois aspects :
- le taux d’activité féminin converge vers le taux d’activité actuel des hommes dans
chaque pays.
- Le travail à temps partiel des femmes diminue pour rejoindre le niveau du temps
partiel masculin.
- La productivité des femmes rejoint celle des hommes (ici la productivité est
calculée en fonction des écarts salariaux constatés).
Le tableau en annexe (voir annexe 1.1) est extrait de son étude et exprime le potentiel
de croissance espéré pour chaque pays de l’Union Européenne. Le potentiel de croissance
espéré est le plus faible pour la Slovaquie (14%) et est maximal pour Malte (45%). En plus
de la croissance espérée, ce tableau montre quelle part joue chaque composante (taux
d’activité, temps partiel et salaire) dans le calcul de cette croissance. Cette part varie
sensiblement en fonction des spécificités nationales mais majoritairement, c’est la
convergence des taux d’emploi qui montre la plus grande incidence. Par exemple, 80% de
18
la hausse espérée du PIB est liée à l’alignement des taux d‘activité masculins et féminins.
A contrario, au Pays-Bas où le temps partiel féminin touche 75% des femmes, plus de la
moitié de l’augmentation de la croissance est liée à l’alignement du niveau de temps de
travail des femmes sur celui des hommes.
La question de la réduction des inégalités pour favoriser la croissance a émergé à
l’origine dans les pays en développement. Mise en avant par les institutions
internationales, la réduction des inégalités qui touchent les femmes est devenue une
priorité pour régler le problème du sous-développement. Parallèlement, cette nouvelle
politique de croissance par la réduction des inégalités a été transposée dans les pays
développés. Les problématiques sont différentes. Il s’agit pour ces pays de mieux utiliser le
capital humain disponible. Les femmes apparaissent comme sous-utilisées sur le marché
du travail. Le rattrapage des femmes sur les hommes en matière d’emploi, au niveau des
taux d’activité, des temps de travail et des responsabilités professionnelles, pourrait ainsi
permettre une augmentation potentielle du PIB de 27% au sein de l’Union Européenne.
II) Le travail des femmes, une solution à la baisse de main d’œuvre
programmée en Europe ?
On l’a vu précédemment, la taille de la population active est très importante pour
favoriser la croissance. A ce titre, la baisse programmée de la population dans un nombre
important de pays de l’OCDE est un véritable problème pour assurer une croissance
pérenne dans ces pays. Cette baisse est notamment liée à un ralentissement préoccupant et
persistant du taux de fécondité des femmes, bien en dessous du seuil de renouvellement de
la population dans un certain nombre de pays (1,39 pour l’Allemagne ; 1,37 pour
l’Espagne), taux qui ne peut pas être contrebalancé par une baisse de la mortalité et/ou par
l’immigration (voir annexe 2.1).
Il convient d’ajouter un autre facteur à la baisse de la population active : le
vieillissement général de la population dû à l’allongement de la vie. La population retraitée
ne cesse donc d’augmenter alors que la population en âge de travailler tend à régresser
fortement dans la majorité des pays de l’OCDE. C’est un véritable problème pour ces pays
19
car ils risquent de faire face à un ralentissement durable de leur croissance (OCDE, 2012).
Ainsi, on ne peut que comprendre l’enjeu réel que constitue, notamment pour ces
pays, le développement de l’emploi féminin. Depuis les cinquante dernières années, c’est
principalement l’entrée des femmes sur le marché du travail qui est à l’origine du
renouvellement et de l’élargissement de la population active (CESER, 2011 ; OCDE,
2012).
A) La féminisation de l’emploi : une solution à la baisse de la population active.
Grâce à une plus grande participation féminine à l’emploi, les femmes
constitueraient un important moyen de lutter contre la baisse programmée de la population
active. A quel point, l’augmentation de la part des femmes dans la population active peut
permettre sa régénération et son développement ? L’OCDE (2012) a ainsi réalisé des
projections de la taille de la population active dans certains pays selon trois scénarios :
- Scénario de statu quo : les taux d’activité masculins et féminins subsistent à leur taux
de 2010.
- Convergence des taux d’activité : alors que le taux d’activité masculin reste stable, au
niveau de 2010, et celui des femmes rejoint celui des hommes en 2030.
- Convergence au niveau de l’intensité du travail : ce scénario tient compte de la
différence d’heures réellement travaillées par les deux sexes. Le taux d’activité
masculin est considéré comme stabilisé à son niveau de 2010 et est rejoint en 2030 par
le taux d’activité féminin en équivalent temps plein.
Les résultats de ces projections, présentés en annexe (voir annexe 1.2), révèlent que
le rattrapage des femmes en matière d’emploi sur les hommes permettrait de limiter la
baisse de la population active (comme c’est le cas pour le Japon), voire même de
l’augmenter légèrement par rapport à son niveau actuel (Allemagne). Pour les pays qui ne
connaissent aujourd’hui pas les problèmes démographiques du Japon ou de l’Allemagne, le
renforcement de la place des femmes sur le marché du travail, permettrait d’augmenter
sensiblement la taille de la population active d’ici à 2030.
Or, on le sait, la taille de la population active influence la croissance. Une estimation
de l’impact sur la croissance de différentes projections des taux d’activité masculins et
féminin a ensuite été réalisée (voir annexe 1.3). Elle révèle un impact très net du
20
rattrapage, voire de la convergence, des taux d’activité des femmes et des hommes sur la
croissance du PIB. En moyenne, pour les pays de l’OCDE, une diminution de 50% de
l’écart hommes-femmes en termes de taux d’activité aboutirait à une hausse de la
croissance annuelle du PIB par habitant de 0,3%. Pour ce qui est d’une hypothèse de
convergence totale d’ici 2030, le taux de croissance espéré s’élève à 0,6% par an, soit une
progression non négligeable de 12% du PIB en 20 ans !
Ces projections donnent des résultats très différents selon les pays, même si pour
tous, l’augmentation du taux d’activité des femmes permet une évaluation de la croissance
supérieure aux résultats envisagés dans la situation de statu quo. Ce potentiel de croissance
est d’autant plus élevé que le taux de natalité et que le taux d’activité des femmes sont
faibles à l’heure actuelle.
B) Taux d’emploi féminin et fécondité : une relation positive.
Plusieurs études récentes mettent en avant un nouvel effet de l’égalité entre les
femmes et les hommes sur la démographie ainsi que sur la croissance à long terme.
Une étude parue dans la revue L’observateur de l’OCDE (Mörtvik & Spånt, 2005)
souligne l’importance fondamentale de l’égalité entre les hommes et les femmes pour une
croissance soutenue à long terme. L’analyse de Mörtvik et Spånt établit que l’égalité
professionnelle permet non seulement aux femmes d’augmenter le taux d’emploi mais
également, et cela est beaucoup plus surprenant, qu’une plus grande égalité des sexes a un
effet positif sur la natalité. Ils ont ainsi découvert que les sociétés développées
contemporaines dont les mentalités sont encore traditionnelles connaissent un
ralentissement des naissances, alors que les sociétés plus égalitaires, notamment en termes
d’égalité professionnelle hommes-femmes, ont un taux de fécondité nettement supérieur,
ainsi qu’une structure démographique plus équilibrée.
Leur hypothèse est que dans les sociétés modernes, les mentalités traditionnelles
concernant la place des femmes dans la société, empêchent le développement de politiques
familiales efficaces (notamment en termes de garde d’enfants) et ainsi rend plus difficile la
conciliation entre travail féminin et maternité. La persistance de telles mentalités aurait
ainsi des effets non négligeables sur le nombre de naissances.
21
Les résultats de cette étude sont illustrés par le graphique suivant. On retrouve en
abscisse une évaluation du poids des mentalités traditionnelles dans les sociétés évaluées.
Cette évaluation a été réalisée à l’aide d’un sondage dont la question était « le rôle d’un
homme est de gagner de l’argent ; le rôle d’une femme est de s’occuper du foyer et de la
famille »2. L’abscisse représente le pourcentage de réponses positives à cette question. En
ordonnée, nous retrouvons le taux de fécondité des pays évalués.
Source : Mörtvik & Spånt, 2005
Grâce à ce graphique, les deux auteurs de l’étude mettent en évidence l’existence
de deux groupes de pays. Le premier, cerclé de violet, représente les pays au taux de
natalité élevé (supérieur à 1,5 enfant par femme) et dont les pourcentages de réponses
positives à la question sur la place des hommes et des femmes sont plutôt faibles
(globalement inférieur à 30%). A ce groupe, appartiennent des pays tels que les pays
scandinaves, les Etats-Unis d’Amérique, la Nouvelle-Zélande ou encore le Royaume-Uni.
A l’inverse, le second groupe montre des pays dont le taux de natalité est faible (inférieur à
1,4 enfants par femmes) et le pourcentage de réponse positive au sondage de l’ONU élevé
(de 30% à 70%).
2 Ce sondage a été réalisé par les Nations Unies (1994) dans le cadre de l’International Social Survey Programme.
22
Une autre étude va également dans ce sens. Elle montre que dans les pays de
l’OCDE, un taux d’emploi féminin élevé va de pair avec un taux de fécondité plus élevé
que dans les pays où peu de femmes travaillent. Ce constat est d’ailleurs une tendance
récente puisque l’on constatait la corrélation inverse dans les années 1980.
Emploi et taux de fécondité élevé ne sont plus incompatibles
1980 2000
Source : Babies and Bosses, OCDE, 2005.
Repéré à : Gender Equality can boost economic growth, Katseli (2007)
Ainsi, dans les pays plus favorables au travail salarié des femmes, le taux de
natalité est plus élevé que la moyenne et inversement. Les mentalités traditionnelles ont
pour conséquence de limiter à long terme la main d’œuvre par deux phénomènes. D’une
part le maintien des femmes à la maison ou en tout cas, l’absence de politiques familiales
efficaces qui limitent le taux d’activité des femmes. D’autre part, les mentalités
traditionnelles à l’égard de la place des femmes en société induisent un faible taux de
natalité.
La conséquence de ces observations est double. Les pays qui ont une natalité plus
élevée ne connaitront que dans une moindre mesure les problèmes de vieillissement de leur
population et donc du poids de ce vieillissement sur les finances publiques, problèmes non
23
négligeables dans les économies des pays de l’OCDE. De plus, une natalité dynamique
peut permettre aux Etats de se prévaloir de la chute programmée de la population et en
premier lieu de la population en âge de travailler, donc de la main d’œuvre disponible. Or,
on connaît l’importance de la main d’œuvre dans la croissance économique à long terme.
Ces études mettent en évidence l’importance de l’égalité entre les hommes et les
femmes dans la croissance par plusieurs phénomènes. Tout d’abord, l’entrée des femmes
sur le marché du travail permettrait un accroissement de la population active, dont la taille
influence positivement le niveau de croissance. Cette incidence est d’autant plus
importante que la main d’œuvre féminine est une main d’œuvre éduquée et formée.
Finalement, une plus grande participation des femmes au marché du travail apparaît
comme une meilleure utilisation du capital humain, celui-ci étant sous-exploité dans les
conditions actuelles du travail des femmes. Il apparaît également qu’une plus grande
égalité entre les hommes et les femmes influe positivement sur le taux de fécondité et donc
sur la taille de la population active sur le long terme. Les différents niveaux d’égalité entre
les sexes sont par ailleurs un facteur explicatif des écarts de croissance persistants parmi
les pays de l’OCDE. Lutter contre les inégalités apparaît donc comme une manière de
garantir une croissance stable de la population active.
Section 2 : la diffusion de l’argument économique pour favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes et ses effets sur le droit Face à ces constats, les institutions internationales se sont emparées de la question
de l’égalité dans un contexte d’échec des politiques de développement dans les pays du
Sud et de ralentissement de la croissance dans les pays développés. Mais, utiliser un
argument économique pour promouvoir l’égalité n’est pas sans conséquences sur le droit
de l’égalité professionnelle.
24
I) L’impulsion des institutions internationales Tout d’abord considérées comme une manière de régler le problème du sous-
développement dans les pays les plus pauvres, des politiques de réduction des inégalités
sont apparues dans les stratégies de développement de la plupart des institutions
internationales. Parallèlement, pour les pays européens, la question de l’égalité est
également devenue un potentiel nouveau levier de croissance, mis en avant par l’Union
Européenne.
A) L’égalité entre les hommes et les femmes au cœur des stratégies de
développement
Les questions des inégalités entre les genres sont aujourd’hui devenues un point
central des stratégies de lutte contre le sous-développement et la pauvreté dans les Pays du
Sud (Prévost, 2011). Dès les années 1990, les stratégies de lutte contre la pauvreté opèrent
un changement sous l’impulsion du Fond Monétaire International et de la Banque
Mondiale. Elles mettent en avant le renforcement nécessaire de la prise en compte des
populations concernées pour élaborer et résoudre les problèmes de pauvreté et du sous-
développement. En parallèle, de multiples rapports vont mettre en évidence le caractère
féminin de la pauvreté, en particulier le rapport sur le développement du PNUD en 1995,
sous-titré, à juste titre, « égalité des sexes et développement humain » (PNUD, 1995), dont
l’innovation cette année là est la publication d’indices sexués sur le développement : Indice
sexospécifique du développement humain (ISDH) et Indice de la participation des femmes
(IPF) (PNUD, s.d). C’est le début de l’émergence du concept de l’empowerment dans les
politiques contre la pauvreté des institutions internationales. L’année 2000 se révèle être à
cet égard un tournant avec l’élaboration des huit objectifs du millénaire pour le
développement, dont deux concernent directement les femmes et trois indirectement
(World Bank, s.d) :
• Éliminer l'extrême pauvreté et la faim
• Assurer l'éducation primaire pour tous
• Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation des femmes
• Réduire la mortalité infantile et post-infantile
• Améliorer la santé maternelle
25
• Combattre le VIH/sida, le paludisme et d'autres maladies
• Préserver l'environnement
• Mettre en place un partenariat pour le développement
Il ne faut pas non plus négliger l’importance de la pensée d’Amartya Sen, et de son
Prix Nobel de 1998, qui a permis de renouveler et de diffuser une nouvelle manière de
considérer la pauvreté (Prévost, 2011). L’amélioration de la condition économique des
femmes, bien plus que celle des hommes, devient une priorité en ce qu’elle a un impact sur
la santé et l’éducation de toute la famille. Les conséquences les plus connues de cette prise
de conscience dans les pays en développement sont illustrées par le développement du
micro-crédit, encouragé par la Banque Mondiale (World Bank, 2011).
Plus récemment, à partir des années 2000, c’est l’OCDE qui s’est emparé de la
question des femmes dans l’économie. Avec son « Initiative pour la parité » en 2010 et sa
politique ciblant les « trois E », l’Organisation met en évidence l’importance d’éliminer les
discriminations entre les hommes et les femmes en matière d’éducation, d’emploi et
d’entrepreneuriat. Cette promotion de la parité s’établit clairement dans une nouvelle
stratégie économique, afin de « trouver de nouvelles sources de croissance économique,
d’encourager une plus grande égalité entre les hommes et les femmes et d’œuvrer en
faveur d’une utilisation plus efficiente des compétences de chacun » (OCDE, 2012).
L’Organisation publie annuellement des rapports sur l’état des inégalités et met en avant
les bonnes pratiques de gouvernements en matière d’égalité.
B) Le rôle de l’Union Européenne dans la promotion de l’égalité professionnelle.
La diffusion de l’argument économique pour favoriser l’égalité a également touché
l’Europe. En effet, alors que l’Union Européenne était déjà très active sur les sujets
d’égalité, elle s’est également intéressée à la question de l’égalité comme nouveau levier
de croissance, ce qui a permis de promouvoir cette vision auprès de l’ensemble de ses Etats
membres.
L’Union Européenne a toujours joué un rôle important d’impulsion pour développer
les politiques d’égalité entre les hommes et les femmes, notamment au travers de l’emploi
26
(Dauphin, 2010). Dès 1957, le Traité de Rome pose le principe d’égalité de rémunération.
Le traité d’Amsterdam élève l’égalité entre les sexes au rang de droit fondamental. En
2000, c’est le principe d’égalité entre les hommes et les femmes dans tous les domaines
qui est réaffirmé dans la Charte des droits fondamentaux, puis en 2010 dans l’article 8 du
Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne3. Outre le rôle des traités, de
nombreuses directives ont encouragé les Etats de l’Union Européenne à adopter des lois
favorable aux femmes. On peut citer à cet égard la loi Roudy, directement inspirée de la
directive européenne du 9 février 1976 (Laufer, 2005a), ou encore la suppression de la loi
française interdisant le travail de nuit des femmes, sous l’impulsion de l’Union Européenne
(Dauphin, 2010).
L’Union Européenne a également mis en place de nouveaux outils et de nouvelles
méthodes afin d’atteindre l’égalité entre les hommes et les femmes. On pense en premier
lieu au gender mainstreaming ainsi qu’au développement d’actions positives. Ces
dernières sont apparues en France par le biais de la loi Roudy de 1983 (Laufer, 2005a ;
Dauphin, 2010). L’autorisation de mesures d’actions positives permet de créer des
avantages spécifiques et limités dans le temps afin de promouvoir l’emploi des femmes.
Ces politiques sont appelées à être des correctifs des inégalités. De la même manière, le
gender mainstreaming, en français « approche intégrée de l’égalité » est une politique
recommandée depuis 1998 aux pays européens par les institutions européennes. Elle
propose de prendre en compte les questions d’égalité entre les femmes et les hommes de
manière transversale, c’est-à-dire dans l’ensemble des politiques publiques mises en œuvre
(Milewski, 2010). Le but est ainsi de prévenir les « évènements éventuellement
discriminants des politiques » dès leur élaboration (Dauphin, 2010) et de tenir une
approche à la fois globale et cohérente envers les discriminations. En parallèle, l’Union
Européenne a mis en place des outils de comparaison statistique permettant d’harmoniser
les méthodes de calculs au sein de tous les pays membres. Avec la comparaison statistique,
l’Union européenne s’est dotée d’un outil fortement incitatif pour améliorer la situation des
femmes (Fouquet, 2005).
Concernant plus précisément les questions d’égalité et de croissance, le Conseil
Européen a réaffirmé considérer que « l’égalité entre les hommes et les femmes est une
3 Article 8 TFUE : « Pour toutes ses actions, l'Union cherche à éliminer les inégalités, et à promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes ».
27
valeur fondamentale de l’Union Européenne et que les politiques d’égalité entre les sexes
sont essentielles à la croissance économique, à la prospérité et à la compétitivité »
(Conseil de l’Union Européenne, 2011). Ce sujet est ainsi présent depuis 2000 dans les
différentes Stratégies pour la croissance mises en œuvre par l’Union Européenne.
La stratégie de Lisbonne pour la croissance a été lancée en 2000 au Sommet de
Lisbonne. Elle visait à faire de l’Europe « l’économie de la connaissance » en mettant
l’accent sur trois points :
Ø l’innovation,
Ø l’accroissement du taux d’emploi,
Ø la durabilité de la croissance.
Elle intégrait également des dispositifs pour promouvoir la croissance par l’égalité
professionnelle entre les femmes et les hommes, en augmentant le taux d’emploi,
notamment le taux d’emploi féminin à 60% pour 2010 (pour un taux d’emploi global de
70%) (Fouquet, 2005) (voir annexe 5.1). Seuls 16 pays sur 27 avaient atteint leurs objectifs
en 2010. Il faut tout de même noter que les objectifs de la Stratégie de Lisbonne n’abordent
pas la dimension « qualitative » des emplois, notamment la problématique de la durée du
temps de travail. Il y a donc un risque important que l’augmentation du taux d’emploi des
femmes se fasse par des emplois à temps partiel (Gauvin, 2001).
On retrouve ici clairement l’utilisation de l’égalité pour promouvoir la croissance. A
cet égard, l’Union Européenne a mis en avant des mesures favorables à l’emploi des
femmes, principalement par des politiques d’aides à l’emploi et des politiques pour
concilier vie privée et carrière professionnelle, notamment les services de garde à des prix
raisonnables (Fouquet, 2005 ; Löfström, 2009 ; CESER Rhône-Alpes, 2011).
Cette stratégie de croissance a été prolongée plus récemment avec la stratégie Europe
2020. L’objectif ambitieux est d’élaborer une stratégie pour « une croissance intelligente,
durable et inclusive », autour de cinq objectifs (Commission Européenne, 2010).
28
Stratégie Europe 2020
Ø remonter le taux d'emploi à au moins 75 % contre 69 % aujourd'hui ;
Ø consacrer 3 % du produit intérieur brut à la recherche et au développement, au lieu
des 2 % actuels, qui laissent l'Union loin derrière les Etats-Unis et le Japon ;
Ø réaffirmer les objectifs de l'Union européenne en matière de lutte contre le
changement climatique (dits "20/20/20"), qui sont déjà parmi les plus ambitieux du
monde ;
Ø proposer de réduire le taux de pauvreté de 25 %, ce qui reviendrait à faire sortir 20
millions de personnes de la pauvreté ;
Ø améliorer les niveaux d'éducation en réduisant le taux d'abandon scolaire à 10 % et
en portant à 40 % la proportion des personnes de 30 à 34 ans ayant obtenu un
diplôme de l'enseignement supérieur ou atteint un niveau d'études équivalent.
Une fois encore, le taux d’emploi est au cœur de la stratégie européenne pour la
croissance. La Stratégie Europe 2020 vise à renforcer le rôle économique des femmes. Ici
il n’est plus question d’obtenir un taux d’emploi moyen entre hommes et femmes mais
bien un taux de 75% pour les hommes et pour les femmes, appelant ainsi en priorité, à une
augmentation du taux d’emploi féminin (Conseil de l’Union Européenne, 2011)
Toujours dans un objectif de promotion de l’égalité professionnelle entre les
hommes et les femmes, l’Union Européenne a mis en place un plan quinquennal 2010-
2015 plus spécifique à l’emploi féminin. Cette « Stratégie pour l'égalité entre les femmes et
les hommes (2010-2015) » vise à « améliorer la place des femmes dans le marché de
l’emploi, dans la société et dans les postes de décision » (Commission Européenne, 2010).
Celui-ci met en avant l’indépendance économique des femmes, en faisant le lien avec la
stratégie Europe 2020. L’égalité est mise en avant comme nécessaire à la réalisation des
objectifs de croissance de l’Union Européenne, apparaissant comme un levier de
croissance. La contribution de l’égalité entre les hommes et les femmes en faveur de la
croissance économique est encore une fois un point essentiel du plan.
Politiquement, la Présidence suédoise de l’Union Européenne en 2009 a eu un impact
non négligeable sur la diffusion de l’argument économique en faveur de l’égalité entre les
29
hommes et les femmes. La promotion de l’égalité des sexes était un des objectifs de cette
présidence suédoise. De nombreuses conférences ont été organisées afin de promouvoir les
liens entre croissance économique et égalité entre les femmes et les hommes auprès des
pouvoirs publics et des décideurs économiques au sein des Etats membres.
Avec ces nouvelles politiques de croissance mises en avant par différentes
institutions internationales, les femmes sont alors perçues comme un potentiel inexploité,
un « réservoir de talent » disponible. L’objectif est de réaffirmer le rôle économique des
femmes et l’importance du travail féminin dans la croissance.
II) Les transformations du droit
Le développement de nouveaux modèles économiques fondés sur l’idée que l’égalité
entre les hommes et les femmes apporterait à la société, en plus des principes d’éthique,
d’égalité et de non discrimination, une dimension de bienfait et de croissance économique
est une idée récente. Ainsi la mise en œuvre de telles politiques permet d’employer un
nouvel argument « utilitaire » en faveur de l’égalité professionnelle entre les hommes et les
femmes. Cette approche plus positive et moins contraignante s’est caractérisée par une
mutation profonde du droit du travail et des politiques d’emploi envers les femmes.
A) Le travail des femmes dans la loi : de la protection des femmes au principe
général d’égalité.
Les premières lois portant sur le travail des femmes sont apparues en France dès la
fin du XIXème siècle, dans un contexte de développement de l’Etat Providence
(Battagliola, 2008). Celles-ci ont un but : éloigner les femmes du travail, notamment des
travaux pénibles et difficiles, afin de protéger la maternité et un niveau de fécondité
important. Dès 1874, une première loi interdit aux femmes les travaux souterrains ainsi que
le travail de nuit pour les femmes de moins de 21 ans. C’est ici le début des lois
spécifiques qui protègent les populations faibles de la Nation : les enfants (limitation du
travail dans l’industrie, du travail de nuit dès 1841) et les femmes (Fouquet, 2005 ;
Maruani, 2011). Le travail féminin est donc vu comme un travail non ordinaire, spécifique,
30
qui doit ainsi être protégé (Battagliola, 2008). La loi de 1892 sur « le travail des enfants,
des filles mineures et des femmes dans les établissements industriels » conforte l’idée de
cette spécificité (voir annexe 3.1). Faisant l’objet d’un large consensus au sein de la classe
politique de l’époque, le principal argument ici présenté est celui de la préservation du
modèle familial, permettant de lutter contre la dénatalité et plaidant pour la préservation de
la « famille ouvrière » et de la morale.
Ces différentes lois ont conduit à ancrer l’idée d’une spécificité du travail féminin, en
éloignant les femmes des secteurs masculins mieux rémunérés et en leur assignant la
reproduction comme principale fonction (Fouquet, 2005 ; Laufer, 2005a). Les femmes ont
le droit de travailler mais restent des mères avant tout.
Pas à pas, l’action féministe du début du XXème siècle vient améliorer les droits
civiques des femmes françaises, même si la logique de protection est toujours très
prégnante (Laufer, 2005a). Une loi de 1907 proclame le principe d’autonomie, les femmes
mariées pouvant désormais disposer librement de leur salaire et, en 1920, une nouvelle loi
donne aux femmes la liberté syndicale (Maruani, 2011).
La Constitution de la IVème République de 1946 pose dans son préambule le
principe d’égalité des droits entre les hommes et les femmes « dans tous les
domaines ». Ce principe général ouvre dans le droit français la voie à l’égalité de droit
entre les hommes et les femmes. De nombreuses mesures, éminemment symboliques,
voient le jour, comme la promulgation de principes généraux tels que celui de la liberté de
l’exercice d’une profession sans le consentement marital en 1965, l’égalité de
rémunération en 1972, la non discrimination à l’embauche en 1975 (Wierink & Meda,
2005 ; Maruani, 2011). Parallèlement, les femmes s’extraient de leur rôle uniquement
familial et maternel devant la loi : elles ne sont plus subordonnées à leur mari. En 1970, la
notion de chef de famille est supprimée et une loi de 1985 proclame l’égalité des conjoints
dans la gestion de leur patrimoine commun (Fouquet, 2005).
Ces différentes lois promulguées dans les années 1960-1970 sont certes un pas
décisif mais il n’en demeure pas moins qu’elles n’ont pas réellement été suivies d’effets
tangibles (Maruani, 2011). Même la loi Roudy de 1983 sur « l’égalité professionnelle entre
31
les hommes et les femmes », qui marque un véritable tournant4 dans la législation française
sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, censée promouvoir les
négociations au sein des entreprises et donner la possibilité de recours légaux aux salarié-e-
s, n’aura pas l’effet escompté. Seules une trentaine d’entreprises auront lancé des
négociations, mais toujours dans une visée, non pas de justice, mais d’utilité (Laufer,
2005a). Plusieurs auteurs ont tenté de faire un bilan de cette loi. Leurs conclusions
montrent une faiblesse des changements observés par les femmes, notamment à cause de
l’absence de contraintes et de sanctions (Maruani, 2011).
B) L’égalité professionnelle en entreprise, les transformations du droit et le
développement d’un droit spécifique et incitatif
Alors que les lois pour promouvoir le travail des femmes sont freinées en France au
nom du principe d’universalité (Fouquet, 2005), à partir des années 1980, un nouveau
tournant s’opère autour d’une idée d’efficacité et de résultats. La loi Roudy a permis
d’ouvrir une brèche dans ce principe d’universalisme en promouvant pour la première fois
en France, des mécanismes d’actions positives. Cependant, pour qu’un tel bouleversement
s’opère dans la tradition juridique française, il faudra que le dispositif ne soit ni
obligatoire, ni contraignant (Dauphin, 2010). Les résolutions se feront trop rares pour être
réellement efficaces. On assiste même, dans les années 1990 au grand retour de
l’universalisme, notamment dans les politiques de l’emploi. De nombreuses mesures
spécifiques instaurées dans les années 1980 sont supprimées et les femmes ne figurent plus
parmi les publics prioritaires des politiques d’emploi (Fouquet, 2005).
4 La « loi Roudy sur l’égalité professionnelle », votée en 1983, a permis de transformer en profondeur la conception de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes en France. Suivant des recommandations européennes, notamment la directive européenne sur l’égalité de traitement et l’égalité des chances de 1976, la loi Roudy élargit la notion d’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes à l’emploi, la formation, la promotion et l’égalité salariale. Plus que d’égalité des droits, il est ici question d’égalité des chances. Cette loi supprime la notion de « motif légitime » qui permettait aux employeurs de discriminer les femmes, dans certains cas « légitimes », lors de leur embauche ou de leur licenciement. Parallèlement, la loi Roudy met en œuvre de nombreux outils comme le rapport de situation comparée et la possibilité pour les entreprises de mettre en place des mesures d’actions positives en faveur des femmes. Le rapport de situation comparée est un pas essentiel. Il ouvre la porte aux premières négociations en entreprises sur la promotion de l’égalité, permet de mesurer les différences de situation entre les salariés des deux sexes, de mettre en place des politiques d’égalité et de mesurer les avancées réalisées.
32
Mais, ce sont les années 2000 qui marqueront un tournant décisif dans la
mobilisation autour de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, sous
l’impulsion de l’Union Européenne. L’égalité, notamment professionnelle, devient une
priorité communautaire, inscrite dans les traités. Des objectifs chiffrés sont fixés aux pays
membres et les comparaisons internationales font office de motivation pour le personnel
politique. Cette nouvelle stratégie, plus pragmatique et plus efficace est un important levier
d’action (Dauphin, 2010). La notion de gender mainstreaming fait son apparition et se
propage progressivement dès 1998, à la suite du Traité d’Amsterdam5. Il s’agit à présent de
mobiliser un nombre très large d’acteurs, aussi bien les partenaires sociaux que les
entreprises (Laufer, 2005a). La loi Génisson de 2001 se veut plus concrète et compte
mobiliser tous les acteurs autour de la réalisation effective de l’égalité professionnelle. Au
sein des entreprises et administrations, les négociations collectives sont renforcées afin de
faire progresser l’égalité professionnelle (Wierink & Meda, 2005). Entreprises,
administrations, syndicats se voient proposer de signer la Charte de l’Egalité
professionnelle. Cette signature n’est évidemment pas obligatoire et se fait donc rare. De
même, les entreprises ont désormais l’obligation d’organiser des négociations internes sur
l’égalité professionnelle. Les difficultés de mise en œuvre sont nombreuses car toujours
liées au bon vouloir et à la motivation des entreprises (Dauphin, 2010).
Afin de motiver les partenaires sociaux, et en premier lieu les entreprises, les
nouveaux dispositifs, mis en place récemment, se veulent plus « positifs » et vont cesser
d’être contraignants (Amintas & Junter, 2009). Le droit n’est plus imposé, notamment avec
les acteurs privés que sont les entreprises. L’obtention de l’égalité réelle doit donc passer
par une transformation fondamentale du droit (Laufer, 2005a). Les acteurs reçoivent un
objectif général de progression de l’égalité mais restent totalement libres dans les moyens
d’actions à mettre en place. Le droit devient un droit négocié. A cet égard, la diffusion de
l’argument économique sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes à des
fins de performance est fondamentale. La Présidence suédoise de l’Union Européenne de
2009 parle même de transformer le dossier économique en un dossier du monde de
l’entreprise6 (Smith & Bettio, 2009). Ce basculement juridique permet d’apporter une 5 A propos du gender mainstreaming, le traité d’Amsterdam suit les recommandations de l’ONU énoncées lors de la conférence de Pékin en 1995. 6 « An ‘Economic Case’ develops the ‘Business Case’ ».
33
véritable motivation aux entreprises, pour ainsi aboutir à une situation gagnant-gagnant. La
promotion de cet argument économique se veut être une action plus positive que celle de la
sanction en cas de non respect de la loi.
Cette nouvelle approche a pour objectif d’intégrer les principes d’égalité aux
pratiques managériales actuelles. Pour ce faire, la justification doit être autant éthique
qu’économique et mobilise ainsi la notion de performance. Le droit de l’égalité a besoin
d’une justification économique pour être efficacement appliqué. On assiste ainsi à une
« subordination des valeurs légales aux valeurs managériales » (Amintas & Junter, 2009)
ou encore, à ce qu’appellent Edelman, Fuller et Iona, une « managérialisation du droit »
(Landrieux-Kartochian, 2004 ; Amintas & Junter, 2009). Le développement de la
négociation autour des questions d’égalité ainsi que l’utilisation d’argumentaires pro-
entreprises permettent aux entreprises d’internaliser les principes d’égalité et de non
discrimination et de les modeler en fonction de leur cadre de pensée. Le développement de
ce droit négocié, que certains juristes qualifient même de « mou » aboutit à un
affaiblissement inquiétant du droit7, qui n’est plus vecteur de sanction en cas de non
respect, et même parfois à des situations où les négociations des entreprises concluent à
des règles non conformes au droit du travail (Amintas & Junter, 2009). C’est le droit post-
moderne, un droit devenu simplement incitateur, flou, négociable, sans attribut de
sanctionnalité. Il est même possible d’y déroger. On peut se demander s’il peut encore être
qualifié de droit.
7 L’exemple le plus souvent donné de ce modèle d’Etat réflexif est celui du droit de l’écologie, avec les achats de « droit à polluer ». L’affaiblissement du droit est lié à l’avènement du droit « négocié », où l’Etat cherche à orienter l’action des systèmes sociaux mais, et c’est là qu’est la nouveauté, en s’adaptant à leurs logiques, en s’inscrivant dans leurs problématiques, en tenant compte de leur rationalité propre. L’Etat ne cherche plus à obliger ou dicter une conduite, mais plutôt à influencer les entreprises en entrant dans leurs calculs économiques. Le but est d’amener les entreprises à adopter un comportement désiré pour des raisons de rentabilité (exemple de la négociation des permis de polluer). La figure de l’Etat autoritaire n’existe plus, l’Etat ne fixe plus que des objectifs flous, des orientations générales. On observe une dilution de la frontière entre les normes étatiques et néo-corporatistes, une sorte de co-normativité entre l’Etat et les groupes sociaux (Morand, C.-A., (1998). Le droit néo-moderne des politiques publiques. LGDJ, Collection Droit et Société, Paris. 224p, cité par Ortiz, L., communication personnelle, octobre 2012).
34
Finalement, en filigrane au développement des politiques d’égalité professionnelle,
on remarque une profonde transformation du droit. Le droit devient totalement flexible, il a
perdu tout attribut de systématicité et d’obligatoriété, même pour des principes pourtant
fondamentaux comme l’égalité et la non discrimination. Ainsi, alors que ce droit négocié a
été promu afin d’obtenir plus d’effets, on peut se demander si l’affaiblissement de la loi
n’aboutirait pas à l’effet inverse, l’égalité et la lutte contre les discriminations n’étant pas
au départ, une priorité pour les entreprises.
35
Chapitre 2
Réaliser l’égalité entre les hommes et les femmes pour favoriser la croissance : les obstacles à surmonter.
L’égalité entre les hommes et les femmes est considérée aujourd’hui comme un
facteur de croissance. Plus précisément, il s’agit d’améliorer la situation des femmes dans
l’éducation et l’emploi. La situation des femmes, même au sein de l’Union Européenne, est
toujours différente de celles des hommes. La variable « sexe » est toujours prédominante,
aussi bien à l’école que dans le milieu professionnel. Les freins juridiques ne sont bien
entendu plus présents. Les discriminations que rencontrent les femmes sont aujourd’hui de
nature institutionnelle, quand elles sont liées à l’histoire et au fonctionnement des
organisations comme l’école ou l’entreprise, et de nature sociale, quand les obstacles sont
liés aux représentations et aux stéréotypes sexués.
Ce chapitre présentera l’ensemble du chemin qui reste aux femmes à parcourir, tant
au niveau de l’éducation que de l’emploi. Il met en évidence les chantiers prioritaires qu’il
reste à entreprendre pour les différents gouvernements. La première section traitera des
différences qui se maintiennent dans l’éducation des garçons et des filles. L’accent sera
particulièrement mis sur les incidences de ces traitements différenciés sur l’avenir
professionnel des filles. La seconde section abordera les discriminations qui résistent
encore aujourd’hui dans le monde du travail et qui empêchent les femmes de prendre part à
l’économie, au même titre que les hommes.
Section 1 : l’éducation : mieux valoriser le capital humain Historiquement, les filles ont longtemps été exclues de l’éducation. Sans cesse, on
retrouve un décalage entre l’obligation d’éducation et l’ouverture d’écoles pour garçons et
l’attention portée à l’éducation des filles. Alors que dès 1833, toutes les communes de plus
de 500 habitants doivent ouvrir des écoles primaires pour garçons, seules les communes de
plus de 800 habitants ont cette obligation pour les filles. Cette inégalité de traitement se
retrouve dans tous les pays d’Europe et il faudra attendre 1882 et Jules Ferry en France
36
pour que les filles puissent bénéficier d’écoles au même titre que les garçons (Marry &
Schweitzer, 2005).
Le décalage dans l’enseignement secondaire sera encore plus difficile à réduire
puisque les filles n’auront accès au lycée et donc au baccalauréat que tardivement. On ne
leur enseigne pas les sciences ou la philosophie mais des matières comme les langues
étrangères ou la littérature. Seuls quelques lycées pour filles ouvrent à la fin du XIXème
siècle en France, mais ils ne préparent pas au baccalauréat avant 1924. Par manque de
formations, les femmes sont donc exclues mécaniquement des formations et donc des
métiers les plus prestigieux et des élites. Ainsi, difficilement, elles accèdent aux études
universitaires. Quand la société le leur permet, elles se voient néanmoins souvent obligées
d’arrêter leur carrière ou leurs études quand elles se marient ou sont enceintes. Ce ne sera
que dans les années 1960 que les études supérieures pour les filles deviendront la norme
dans les classes supérieures (Marry & Schweitzer, 2005).
Aujourd’hui, les filles sont aussi nombreuses que les garçons à l’école et y
réussissent mieux. Toutefois, on discerne la persistance de parcours scolaires différenciés
entre les deux sexes. Les matières plébiscitées par les filles et les garçons sont différentes
et par conséquent, ces différences se ressentent dans les orientations et sur le marché du
travail. Plus diplômées, les filles ont plus de difficultés à rentabiliser leur bagage scolaire.
Plus que pour des raisons objectives, il est important de ne pas nier l’importance des
normes sociales et culturelles dans la réussite et les orientations scolaires des garçons et
des filles.
I) Aujourd’hui, des filles aussi nombreuses que les garçons à l’école et
qui y réussissent mieux.
Globalement, les filles réussissent mieux à l’école que les garçons. Toutefois, on
remarque des disparités importantes entre les matières. Plus que pour des raisons
objectives, les différences de réussite et d’orientation entre les filles et les garçons sont
éminemment liées à des forces sociales qui traversent l’institution scolaire.
37
A) Une meilleure réussite des filles, mais pas dans toutes les matières.
Le XXème siècle a connu une augmentation spectaculaire de la scolarisation des
filles, aussi bien à l’école qu’à l’université (Maruani, 2011). Aujourd’hui, la parité,
notamment à l’école primaire, est effective dans la plupart des pays (OCDE, 2012).
Alors que la conquête de l’éducation des filles, de l’école primaire à l’université, a
été longue et tardive, on s’aperçoit aujourd’hui que les filles ont une meilleure réussite que
les garçons à l’école (voir annexe 4.1). Ce tournant marquant date des années 1970, où
plus de filles que de garçons deviennent bachelières (1971) et où il y a plus d’étudiantes
que d’étudiants (1975) (Maruani, 2011).
Aujourd’hui, les filles réussissent au moins aussi bien que les garçons dans les pays
de l’OCDE, excepté en Turquie (OCDE, 2012). La scolarisation des filles ne pose
d’ailleurs plus aucune difficulté d’ordre social. D’ailleurs, alors même que la scolarisation
des filles a été longtemps une préoccupation dans les pays développés, et l’est toujours
dans les pays en développement, en Europe, paradoxalement, c’est la question du
décrochage scolaire des garçons qui pose aujourd’hui problème.
Les filles réussissent bien à l’école et sont également plus diplômées et plus
formées que les garçons (Maruani, 2011) (voir annexes 4.2 et 4.3). Malgré tout, cette
réussite n’a pas bouleversé les inégalités sociales. Il y a toujours des résistances : alors
qu’aucun dispositif légal n’existe, on voit clairement la permanence de filières féminines
ou masculines, des orientations et des goûts sexués (Lurol, 2001 ; Marry & Schweitzer,
2005). Même au niveau des réussites des élèves par matières, on voit clairement que filles
et garçons ne sont pas doués dans les mêmes matières. Par exemple, les filles réussissent
moins bien dans les disciplines dites masculines, comme les mathématiques ou la physique
(Durand-Delvigne & Duru-Bellat, 1998). On voit apparaitre très jeune une « division
sexuée du travail » (Duru-Bellat, 2008) où les filles réussissent moins bien que les garçons
en mathématiques et où les garçons sont moins doués que les filles en lecture et ce, dans la
plupart des pays.
Aujourd’hui, on est capable de mesurer les écarts entre les garçons et les filles au
niveau international. Selon des enquêtes récentes de l’OCDE, notamment grâce à l’enquête
38
PISA8, à l’âge de 15 ans, les filles sont meilleures que les garçons en compréhension écrite
par exemple. L’écart moyen est d’ailleurs d’un an d’étude en moyenne (OCDE, 2012). A
l’inverse, généralement, les garçons dépassent les filles en mathématiques.
Le graphique présenté en annexe (voir annexe 4.4) montre les résultats de l’enquête
PISA et les écarts des scores entre les filles et les garçons dans les pays étudiés. Les
matières ciblées sont la compréhension de l’écrit (matière traditionnellement vue comme
féminine), les sciences et les mathématiques (matière dite masculine). Dans tous les pays
étudiés, les filles dépassent les garçons en compréhension écrite alors que les garçons sont
meilleurs en mathématiques.
Les résultats des garçons et des filles sont liés notamment aux attitudes respectives
que chaque sexe a vis-à-vis de ces matières. Par exemple, les bons résultats des filles en
compréhension écrite sont liés au goût plus prononcé qu’elles ont à la lecture. Les filles
sont plus tentées par la lecture pour le plaisir (voir annexe 4.5). Cela n’est d’ailleurs pas
indépendant des stéréotypes qui veulent que les filles aient des passe-temps plus calmes
que les garçons.
Paradoxalement, alors qu’elles réussissent mieux à l’école, les filles ont
globalement une moindre confiance en elles (Duru-Bellat, 2008). Parallèlement, cette
moindre confiance varie selon les matières : la confiance en leurs capacités est moindre
pour les filles dans les matières scientifiques, alors que pour les garçons, leur confiance est
minimale dans les activités perçues comme féminines comme la lecture par exemple
(OCDE, 2012). Cette dévalorisation ne s’explique pas uniquement par les données
objectives que peuvent constituer les notes. Dès les premières années de la primaire, les
filles se considèrent comme moins douées que les garçons alors même qu’à cet âge, de
telles disparités ne sont pas encore apparues (OCDE, 2012). L’éducation familiale a une
importance considérable sur ce point.
La question de l’éducation différenciée des parents envers leurs enfants, qu’ils
soient garçons ou filles et l’impact de celle-ci sur la réussite et l’orientation scolaire des
8 L’enquête PISA est effectuée tous les 3 ans, parmi les pays de l’OCDE et certains Etats partenaires, auprès des élèves de 15 ans. Réalisée sous la forme de questionnaires, l’enquête évalue le niveau de savoirs appris lors de la scolarité obligatoire. Les tests portent sur la lecture, les mathématiques et les sciences.
39
enfants est souvent soulevée. La sociologie a toujours donné beaucoup d’importance à
l’éducation des enfants par leurs parents, notamment dans leur inculcation des
comportements masculins et féminins (Duru-Bellat, 2008). Alors que la reproduction
sociale cherche à être évitée par les parents, ceux-ci persistent à reproduire les différences
sociales entre les sexes. Le vœu de « mobilité social » est très présent alors que celui de la
« mobilité de sexe » (au sens des attentes liées au sexe des enfants) n’existe peu ou pas
(Duru-Bellat, 2008). Les parents reproduisent ainsi les rôles et comportements attendus des
sexes dans l’éducation de leurs enfants.
L’éducation sexuée a donc également une incidence dans les choix et les
comportements scolaires. Les parents seraient plus stricts avec les filles et plus permissifs
avec les garçons dans de nombreux domaines comme le comportement, l’hygiène, le
savoir-vivre et la bonne tenue. L’éducation des filles serait, selon certains, une bonne
chose puisque très tôt, elles apprendraient, grâce à leur éducation plus stricte, à devenir de
bonnes élèves en classe (Duru-Bellat, 2008 ; OCDE, 2012). Cette éducation expliquerait en
partie pourquoi les filles réussissent mieux à l’école que les garçons, notamment à l’école
primaire.
B) Le rôle de l’institution scolaire : l’école, une caisse de résonnance des
inégalités ?
La question du rôle de l’école dans la reproduction des stéréotypes de genre et du
maintien des inégalités entre les garçons et les femmes mérite également d’être posée. En
effet, des études comparatives montrent que les filles réussissent moins bien dans les
matières scientifiques, alors considérées comme des « matières masculines » dans un
contexte de mixité (Maruani, 2011). On retrouve les mêmes observations dans les études
supérieures où l’établissement de concours mixtes a fait diminuer sensiblement le nombre
de femmes reçues aux concours sélectionnant sur les mathématiques, notamment dans les
grandes écoles d’ingénieurs. Les résultats des filles et des garçons apparaissent donc
comme plus sexués dans les établissements mixtes.
La mixité scolaire a été récemment débattue, notamment dans les pays anglo-
saxons. L’institution scolaire serait-elle trop masculine et aurait-elle pour conséquence de
reproduire la domination des hommes sur les femmes ? Ainsi, la question du rôle de
l’école dans ce processus de reproduction mérite d’être soulevée. A cet égard, la question
40
de la mixité est souvent évoquée, notamment dans les pays anglo-saxons, comme
handicapante pour les filles.
Historiquement rejetée depuis 1835 en France souvent pour des raisons de morale,
la mixité ne sera imposée que dans les années 1960. On le voit rapidement, dès que la
mixité est intégrée à l’école, les filles rivalisent et dépassent les garçons dans leurs résultats
(Marry & Schweitzer, 2005). Pourtant, de nombreuses recherches montrent que les filles
ont de moins bons résultats en sciences lorsqu’elles étudient dans un contexte de mixité. La
mixité serait ainsi moins stimulante pour les filles (Durand-Delvigne & Duru-Bellat, 1998 ;
Maruani, 2011).
La mixité scolaire agirait en réalité comme un renfort des stéréotypes, notamment
ceux qui expriment que les filles auraient des difficultés plus importantes que les garçons
dans les matières scientifiques comme les mathématiques (Durand-Delvigne & Duru-
Bellat, 1998). Alors que l’on pourrait croire que la confrontation entre les deux sexes dès le
plus jeune âge permettrait aux enfants de casser les images stéréotypées liées aux deux
sexes, permettant aux enfants instruits ensemble de ne faire de différences de valeur entre
les sexes, l’école mixte n’atténue en rien les stéréotypes, bien au contraire (Durand-
Delvigne & Duru-Bellat, 1998 ; Cacouault-Bitaud, 2005).
L’école mixte apprend et construit les identités de sexes. C’est de la confrontation
entre les sexes que nait l’identité et le sentiment d’appartenance à un groupe. La mixité
renforce le sentiment d’appartenance à tel ou tel sexe (Durand-Delvigne & Duru-Bellat,
1998 ; Duru-Bellat, 2008). Par confrontation, les filles et les garçons vont se conformer
plus facilement aux images préconçues qu’ils ont de leur sexe afin de marquer les
différences entre garçons et filles. Les stéréotypes attribués à chaque sexe se retrouveraient
ainsi décuplés en milieux mixtes (Cacouault-Bitaud, 2005).
Le rôle du professeur est également important. Dans les classes mixtes, ils opposent
souvent involontairement les deux sexes, notamment pour des questions de disciplines. Ils
ont également des attentes très différentes au niveau des résultats entre les filles et les
garçons, selon les matières, renforçant encore une fois l’idée qu’il existerait des matières
faites pour les filles et d’autres faites pour les garçons (Durand-Delvigne & Duru-Bellat,
1998 ; Duru-Bellat, 2008). De la même manière, puisque les garçons sont perçus comme
moins concentrés et potentiellement plus turbulents que les filles, une adaptation naturelle
41
des professeurs serait d’organiser leurs cours et les exercices de façon à susciter
prioritairement l’intérêt garçons ou encore d’être plus tolérants envers les écarts de
conduite de ces derniers (Durand-Delvigne & Duru-Bellat, 1998 ; Duru-Bellat, 2008). Les
professeurs n’encouragent pas les mêmes qualités et aptitudes chez les filles et les garçons.
Les premières doivent suivre les règles données, tandis que l’on favorise chez les seconds
l’esprit de compétition (Curraize & Hugounenq, 2004). Cela aura un impact sur le manque
de confiance en soi des filles au moment des choix d’orientation.
Alors que l’on observe une meilleure réussite globale des filles à l’école, partout,
on remarque des différences notables entre les matières, suivant des images stéréotypées
qui leur sont attribuées. Finalement, l’école ne serait-elle pas qu’une « caisse de
résonnance » des inégalités entre les hommes et les femmes présentes dans la
société comme le questionne Marie Duru-Bellat (2008) ? L’école ne fait que reproduire les
stéréotypes de genre présents dans la société qui l’entoure, elle ne serait rien de plus qu’un
miroir de la société (Durand-Delvigne & Duru-Bellat, 1998 ; Duru-Bellat, 2008). L’école
est ancrée dans une société traversée par des rapports sociaux de sexe et ceux-ci se
retrouvent naturellement à l’école. Certains pays ont tenté de développer l’enseignement
non mixte, ou tout du moins d’aménager des plages horaires non mixtes, notamment en
sciences, afin d’accroitre la confiance en elle des filles. Mais, on peut se demander si cette
approche pragmatique ne serait pas plutôt une façon de contourner le problème, en niant
l’existence de stéréotypes à l’école.
II) De l’école au marché du travail, transformer son bagage scolaire en un
emploi : la rentabilité scolaire des filles en question.
La hausse du niveau d’études et de la qualification des femmes est le principal
facteur explicatif de l’augmentation des femmes sur le marché du travail. En effet, en
France par exemple, on voit que l’élévation du taux d’activité des femmes est liée à
l’arrivée massive sur le marché du travail de femmes diplômées (Maruani, 2011).
Paradoxalement, alors que les filles réussissent mieux à l’école, elles rentabilisent
moins leurs succès que les garçons. Elles réussissent mieux à l’école mais s’insèrent moins
42
bien que les garçons sur le marché du travail. La transition entre l’école et le milieu
professionnel est ainsi plus difficile pour les filles (Duru-Bellat, 2008 ; OCDE, 2012).
Ainsi, une question reste en suspens : pourquoi la réussite scolaire et universitaire des
femmes ne se traduit pas sur le marché du travail ? Les femmes sont plus diplômées que
les hommes mais leur carrière ne suit pas cette réussite scolaire (Maruani, 2011). Par
exemple, jusqu’à l’âge de 24 ans, dans les pays développés, les femmes et les hommes ont
la même probabilité d’être inactives ou non scolarisés. Toutefois, plus l’âge des femmes
avance, et donc leur probabilité de fonder une famille, plus leur chance d’être inactives est
importante et cette probabilité devient supérieure à celle des hommes (OCDE, 2012).
Plusieurs raisons peuvent être avancées, comme la constance des filles à s’orienter dans
des secteurs professionnels moins porteurs, ou encore le choix de filières moins
prestigieuses.
A) Des choix d’orientations stéréotypés
Alors qu’à l’école et à l’université, les filles réussissent mieux que les garçons, on
observe toujours la permanence d’une ségrégation entre les filières d’enseignement. On
note un maintien continu des différences d’orientations dans les études, notamment en
sciences. Peu de femmes s’orientent dans des cursus dominés par l’enseignement des
mathématiques, de la physique, de l’ingénierie ou des technologies alors que ce sont les
cursus qui offrent le plus de débouchés professionnels (Marry & Schweitzer, 2005 ; Duru-
Bellat, 2008 ; OCDE, 2012). A l’inverse, les filles sont surreprésentées dans les filières
paramédicales, les Lettres et les sciences humaines. Elles représentent la majorité, et de
très loin, des diplômés des filières sanitaires et sociales (voir annexes 4.6 et 4.7). Il existe
d’ailleurs un cercle vicieux qui fait que la présence majoritaire de filles dans une
orientation en fait une filière féminine, ce qui renforce à termes la concentration de filles
dans de telles filières (Duru-Bellat, 2008).
Les filles s’orientent ainsi majoritairement dans les filières littéraires et les sciences
humaines. Trop peu osent encore s’orienter vers les sciences telles que les mathématiques,
l’ingénierie ou la physique. Roger Establet parle même de la scolarisation massive des
filles comme une « révolution respectueuse » car les filles continuent de respecter les
stéréotypes liés à leur sexe (cité par Maruani, 2011). Il est bien ici question d’une
reproduction sociale, où les filles réussissent mieux dans les « disciplines féminines » et se
détournent plus aisément des « matières masculines ». Les parents ont également des
43
attentes différentes en matière d’orientation. Ils sont plus enclins à envisager une
orientation scientifique ou professionnelle pour leur fils que pour leur fille (Duru-Bellat,
2008 ; OCDE, 2012).
Ce détournement des filles des matières scientifiques et techniques n’est d’ailleurs
pas une question de différences de réussite réelle, mais bien de différences de perceptions
envers les réelles qualités des filles. Les filles ont une tendance forte à se dévaloriser et à
sous-estimer leurs capacités dans les matières « masculines » (Durand-Delvigne & Duru-
Bellat, 1998), ce qui renforce leur éloignement des études scientifiques, notamment par
crainte de l’échec.
Ces choix stéréotypés sont d’ailleurs si bien intériorisés qu’on les retrouve dans les
goûts différents qu’ont les filles et les garçons. Les goûts des filles et des garçons sont
sexués en fonction des matières. Ce sont les études menées dans les pays anglo-saxons sur
la mixité scolaire qui nous enseignent cela. Par exemple, si l’on compare des classes
mixtes et des classes non mixtes, on se rend compte que dans les écoles mixtes, les filles et
les garçons sont plus attirés respectivement par les disciplines traditionnellement vues
comme féminines ou masculines. A l’inverse, dans les classes non mixtes, les garçons se
diront plus facilement attirés par les matières littéraires ou les sciences de la vie, et les
filles vers les mathématiques ou la physique (Durand-Delvigne & Duru-Bellat, 1998).
Cette intériorisation des stéréotypes, qui se traduisent ici par des goûts distincts, n’est pas
sans conséquences sur l’orientation des filles et des garçons.
Ainsi, le fait de ne pas apprécier les matières scientifiques chez les filles est bien
plus qu’une question de goût personnel. C’est une construction sociale, une intériorisation
des stéréotypes masculins et féminins. On pourrait également avancer l’idée d’un choix
rationnel, où les filles se demanderaient pourquoi s’orienter dans des filières
majoritairement masculines puisque qu’elles savent qu’elles auront plus de difficultés à y
trouver un emploi que les garçons. Il s’agirait d’une anticipation réaliste de leurs futures
difficultés sur le marché du travail. Celles-ci se trouveraient ainsi anticipées et intériorisées
par les filles au moment de leur orientation (Duru-Bellat, 2008).
Finalement, alors que la réussite scolaire et universitaire des filles est plus forte, on
observe un processus d’auto-sélection, qui peut s’avérer être également un processus
d’autocensure, plus fort chez les filles. Celui-ci les pousse moins à entreprendre des études
prestigieuses et rémunératrices alors qu’à résultats égaux, les garçons se le permettraient
44
(Duru-Bellat, 2008). On remarque que les garçons ont tendance, au moment de
l’orientation, à surestimer leurs capacités, souvent par esprit de compétition, alors que les
filles suivent la tendance inverse (Curraize & Hugounenq, 2004). Plus que pour des raisons
objectives quant à leurs capacités, ce sont les mentalités qui influencent les orientations, les
rôles traditionnellement dévolus aux hommes et aux femmes, ainsi que les images
traditionnellement véhiculées par les différentes professions (OCDE, 2012).
B) Une orientation des filles dans des filières moins porteuses.
Les femmes s’orientent dans des filières fortement féminines. Celles-ci ont la
caractéristique d’être moins porteuses. Alors que les femmes s’orientent plus vers les
lettres et les sciences humaines que vers les sciences, elles sont également moins
nombreuses à intégrer les cursus d’excellence comme Polytechnique ou les écoles
d’ingénieurs (Maruani, 2011). Cela n’est pas sans conséquence sur le déroulement de leur
carrière.
Les filles ont tendance à rejeter toute compétition (Durand-Delvigne & Duru-
Bellat, 1998 ; Maruani, 2011) et donc à s’éloigner des filières d’excellence que sont les
classes préparatoires aux grandes écoles. Egalement, on voit apparaître dès l’école une
« division sexuelle du travail » (Durand-Delvigne & Duru-Bellat, 1998) où les filles
adoptent très tôt le comportement féminin de soumission alors que les garçons essaient de
prendre plus de place dans la classe. Cette apparition des comportements différenciés
n’apparaît d’ailleurs que dans les contextes mixtes. Ainsi, très tôt, les filles abandonnent
les premières places aux garçons, mais pas pour des questions objectives de réussite
scolaire. Durand-Delvigne et Duru-Bellat (1998) expliquent même que les filles renoncent
à toute compétition car elles intériorisent déjà leur avenir de femmes dans une société
dominée par les hommes. Elles renonceraient à réussir à l’école afin de laisser leur place
aux garçons et pour se concentrer sur la recherche de leur futur mari.
En plus de cela, les femmes ont tendance à ne pas s’orienter vers des formations
très entreprenantes comme les sciences et préfèrent s’orienter vers des domaines qui leur
offriront une plus grande flexibilité professionnelle. Plus de flexibilité permet de pouvoir
plus aisément concilier vie privée et vie professionnelle, comme c’est le cas des secteurs de
la santé et de l’éducation (Lurol, 2001 ; OCDE, 2012).
45
Même quand les femmes sont très diplômées, on remarque des différences
notables. Les filières choisies majoritairement pour les femmes, comme les filières
sociales, proposent moins que les autres secteurs, des emplois de cadres. C’est l’inverse
dans les secteurs de l’ingénierie, fortement masculinisé, par exemple. Ainsi, davantage
d’hommes occupent des professions intellectuelles alors que les femmes occupent plus
souvent des postes intermédiaires (OCDE, 2012). Dès la fin de leurs études, deux fois plus
d’hommes que de femmes occupent d’ailleurs des postes de direction (9,7% des hommes
contre 5,7% des femmes).
Les filles vont également être plus enclines à s’orienter vers des cursus généraux
alors que les garçons se tourneront plutôt vers des formations spécialisées (OCDE, 2012).
Plus que le niveau de diplôme, c’est le message que celui-ci envoie qui prime. Le flou
autour des diplômes généraux n’offre pas une protection contre le chômage aussi efficace
que les diplômes spécialisés, qui envoient un message clair de compétences précises aux
potentiels employeurs (Duru-Bellat, 2008).
De plus, même quand les femmes s’orientent vers des études scientifiques, elles
sont plus à même que les hommes de devenir enseignantes, alors que les hommes
plébisciteront d’avantage les postes de spécialistes. Ainsi, même en suivant les mêmes
études, hommes et femmes n’auront pas les mêmes métiers (voir annexe 4.8).
Le choix des études et des filières n’est d’ailleurs pas sans lien avec la notion de
dévalorisation des métiers. Souvent, la féminisation des cursus apparaît, mais de moins en
moins, comme synonyme de dévalorisation des emplois (Maruani, 2011). On peut par
exemple citer le journalisme, le métier d’instituteur ou encore la magistrature, qui sont
aujourd’hui fortement féminisés, mais jouissent d’un moindre prestige sociale que dans le
passé. Or, la dévalorisation des métiers est plus une construction sociale, qui diffère selon
les pays, qu’une réalité (Cacouault-Bitaud, 2001). C’est aussi parce que les filles
perçoivent des cursus ou des professions comme moins prestigieuses qu’elles osent plus
facilement y poursuivre leurs études et cela concourt à leur féminisation accrue. On peut
ici y voir un rapport avec la peur de l’échec et le fort sentiment d’auto-sélection des filles.
Les modèles sont très importants au moment de l’orientation. Ils permettent aux
élèves de voir telle ou telle orientation comme réalisable pour eux. Par exemple, la
féminisation des filières entraine un « cercle vertueux » en ce qu’il change les
représentations sociales liées à cette profession (Duru-Bellat, 2008). C’est notamment le
cas pour la féminisation – toute relative – du métier d’ingénieur qui a permis aux filles de
46
moins rejeter cette profession. Par exemple, dans l’enseignement, la majorité des
professeurs sont des femmes. Le rôle de modèle peut alors jouer de manière importante sur
les orientations futures des élèves féminines. Cependant, même parmi les postes
d’enseignement, on remarque que la proportion d’enseignante est plus importante dans les
lettres et les langues que dans les sciences (OCDE, 2012). Encore une fois, les stéréotypes
sont encore présents, entre les matières masculines et féminines. Cette situation contribue à
renforcer les stéréotypes sexués par l’absence de modèles dans certains métiers.
La fonction première de l’école est de mettre en parallèle la formation des élèves
avec les emplois disponibles. L’école se doit ainsi d’être totalement méritocratique
idéalement, sans effet de domination d’un sexe sur l’autre (Duru-Bellat, 2008). Certes le
marché du travail connaît une ségrégation des formations. Les femmes sont moins formées
pour des postes dans des secteurs dits masculins, mais il ne faut pas non plus minimiser
l’impact de la ségrégation à l’embauche. Finalement, on remarque une inadéquation entre
le marché du travail et la formation, notamment pour les femmes.
Les femmes, qui sont de plus en plus diplômées, ne retrouvent pas dans leur emploi
les investissements qu’elles ont réalisés pendant leurs études (OCDE, 2012). Le plus
souvent surqualifiées pour les postes qu’elles occupent, elles n’utilisent pas pleinement
leurs capacités et leurs compétences. Cela entraine un manque de satisfaction au travail,
ainsi qu’une perte pour la société.
Les différences d’orientation entre les garçons et les filles, et plus encore le fait que
les élèves les plus douées ne s’orientent pas nécessairement vers les filières pour lesquelles
ils réussiraient le plus, pose un problème en termes de valorisation du capital humain dans
les sociétés modernes. Le rôle de l’école n’est pas mis en valeur. L’institution scolaire crée
dès le plus jeune âge des différences entre les garçons et les filles, orientant
involontairement les filles vers des filières moins porteuses. Ces choix entrainent le
premier décalage qui se retrouvera plus tard sur le marché du travail entre les hommes et
les femmes. Ces situations, où les femmes n’utilisent pas pleinement leurs capacités créent
des situations de sous-utilisation du capital humain (OCDE, 2012). Cela est d’autant plus
difficile que l’accent est mis ces dernières années sur l’innovation dans les économies
47
développées. L’utilisation de tous les potentiels, notamment dans les sciences, doit donc
être une priorité.
En plus d’être stéréotypés, les choix d’orientation n’ont pas le même prestige et
n’offrent pas aux filles les mêmes possibilités de carrières. Les orientations féminines
traditionnelles offrent moins de débouchés, moins de possibilités d’avancement de carrière
et de revenus élevés. Les filières choisies par les femmes offrent ainsi souvent de moins
bonnes perspectives d’avancement de carrière et une insertion professionnelle plus
hasardeuse. Alors que les femmes sont plus diplômées, ce bagage scolaire ne se retrouve
pas dans le monde professionnel, il s’effrite petit à petit, au fur et à mesure que l’on monte
dans la hiérarchie car d’autres éléments entrent en jeu dans le déroulement des carrières.
Finalement, les choix d’orientations féminins s’avèrent moins rentables que ceux des
hommes, comparés au nombre d’années d’études nécessaires (Marry & Schweitzer, 2005 ;
Duru-Bellat, 2008).
Section 2 : des freins sociaux et culturels qui limitent le développement du
travail féminin à égalité avec celui des hommes.
La salarisation des femmes est un des évènements marquants ayant affecté le
marché du travail au XXème siècle. Toutefois, ce n’est pas parce que les femmes sont de
plus en plus nombreuses à travailler en dehors de leur domicile que l’on peut pour autant
parler d’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes. En effet, alors même
qu’aujourd’hui, l’image de « la femme qui travaille » fait figure de modèle dominant, on
observe toujours la persistance d’un marché du travail inégalitaire et donc sous-optimal.
La féminisation du travail a été un phénomène continu, mais aujourd’hui encore,
les femmes travaillent moins que les hommes. Les comparaisons des taux d’emploi ainsi
que des temps de travail nous renseignent sur ce point. On remarque qu’il existe également
encore des phénomènes d’inertie forts, tendant à reproduire dans le milieu professionnel,
une division sexuelle des tâches.
48
I) Les emplois des femmes
Les années 1960 ont été le témoin de l’arrivée massive des femmes sur le marché du
travail. La salarisation du travail des femmes a été un phénomène lent mais continu.
Toutefois, on observe toujours des différences entre les hommes et les femmes sur le
marché du travail : ils n’exercent pas les mêmes métiers et encore peu de femmes font le
pari de l’entrepreneuriat.
A) La lente mais effective salarisation de l’emploi féminin.
Contrairement à ce que l’on a pu laisser entendre pendant longtemps, les femmes ont
toujours travaillé, effectuant notamment le travail domestique, ou encore en étant des
« femme de » commerçant ou agriculteur (Maruani, 2004). Mais ce travail n’était pas
salarié le plus souvent. Le travail des femmes n’était pas la norme, notamment dans les
familles bourgeoises.
Les femmes ont toujours constitué au moins 30% de la population active. Maruani et
Meron, dans Un siècle de travail des femmes en France, 1901-2011, ont d’ailleurs mis en
évidence, à travers une révision des statistiques de l’activité des femmes au XXème siècle,
que le travail des femmes avait été longtemps sous-estimé par des manipulations
statistiques. Elles montrent notamment que la baisse de l’activité féminine pendant toute la
première moitié du XXème siècle est davantage due à des changements de définitions qu’à
un réel retrait des femmes de l’emploi. A cet égard, le recensement de 1954 paraît tout a
fait significatif puisqu’il cesse de compter les femmes d’agriculteurs comme des
travailleuses, alors même qu’elles participent le plus souvent aux travaux agricoles
(Moraldo, 2012).
Depuis les années 1960, on assiste à une croissance continue de l’activité féminine
salariée. Un réel rééquilibrage entre les taux d’activité masculins et féminins s’opère dans
toute l’Europe. Aujourd’hui, près de 80% des femmes entre 25 et 49 ans sont actives en
Europe (78,9% en 2010 dans l’Europe des 27) et près de 84% en France (83,9% en 2011
en France). Alors qu’en 1960, les femmes ne représentaient que 30% de la population
49
active européenne, elles en représentent 45% en 2009 (voir annexe 5.2).
Depuis cinquante ans, ce sont les femmes qui ont majoritairement assuré
l’élargissement et le renouvellement de la population active en Europe (Meron, 2005). Au
cours de la deuxième partie du XXème siècle, l’emploi féminin a ainsi nettement plus
augmenté que l’emploi masculin (Meron, 2005). Bien plus qu’un simple travail, la
salarisation de l’emploi des femmes leur apporte un statut dans la société à une époque où
le travail est un important marqueur social (Maruani, 2004).
L’arrivée des femmes sur le marché du travail s’est déroulée parallèlement à des
changements structurels très importants. Le secteur de l’agriculture a reculé de façon
spectaculaire ainsi que l’industrie (mais dans une moindre mesure) alors que le secteur
tertiaire s’est fortement développé (Meron, 2005). La féminisation du marché du travail
s’est ainsi fait en parallèle à sa tertiarisation. La hausse du niveau d’instruction des femmes
n’est également pas étrangère au développement du travail féminin rémunéré (OCDE,
2012).
Finalement, les comportements masculins et féminins se rapprochent, même si les
taux d’emploi masculins et féminins divergent encore de 13 points dans les pays de
l’Union Européenne (voir annexe 5.3). La résistance de cet écart est notamment liée à la
persistance des difficultés de conciliation des vies familiales et professionnelles pour les
femmes, notamment les mères de familles. Dans tous les pays de l’OCDE, exception faite
de la Suède et de l’Islande, les mères ont un taux d’emploi plus faible que celui des
femmes âgées de 25 à 49 ans, surtout lorsqu’elles ont de jeunes enfants (OCDE, 2012). Le
taux d’activité des femmes décline d’ailleurs avec leur nombre d’enfants. On ne retrouve
pas cette corrélation pour les hommes (voir annexe 5.4). Cette résistance pose de
nombreuses questions et amène les pouvoirs publics à entreprendre des politiques
permettant aux parents, et notamment aux femmes, de concilier vie professionnelle et vie
familiale.
50
B) La spécificité des emplois féminins.
Même si l’on assiste à un rattrapage des taux d’activité féminins, il n’est toutefois
pas question d’un alignement. Le travail des femmes reste spécifique. Il est notamment
plus limité que celui des hommes et reste concentré dans des secteurs d’activité définis.
Parallèlement à la salarisation du travail des femmes, on a assisté à une tertiarisation
du salariat. Le développement du secteur tertiaire a permis d’offrir de nombreux emplois
aux femmes, contribuant ainsi à l’augmentation de l’activité professionnelle et salariée des
femmes (Maruani, 2011). Alors que le secteur tertiaire ne représentait que 40% des
emplois en 1955, il en représentait en 2010, 78%. Le secteur tertiaire, qui s’est le plus
développé dans la seconde moitié du XXème siècle, est celui qui a offert le plus d’emploi
aux femmes (Meron, 2005).
L’emploi des femmes est ainsi fortement tertiarisé. Il se concentre également dans un
petit nombre de secteurs. En effet, alors que les femmes représentent près de la moitié de la
population active en France, on ne peut pas réellement parler de mixité dans le travail. Le
travail des femmes reste encore aujourd’hui fortement concentré dans des emplois dits
féminins. On parle même de « ségrégation horizontale » (Maruani, 2011 ; OCDE, 2012).
Ce phénomène ne marque d’ailleurs aucun signe d’essoufflement, bien au contraire. Il se
renforce. En 2011, selon les statistiques de l’INSEE, douze familles professionnelles
regroupent 50% des femmes. Il s’agit notamment des agents d’entretien, des employés de
la fonction publique, du commerce, des services aux particuliers, des instituteurs et des
professions intermédiaires de santé. Le secteur des aides à domiciles et aides ménagères est
d’ailleurs féminisé à près de 97% en 2008 (voir annexe 5.5).
Non seulement cette concentration ne s’estompe pas, mais on remarque que les
catégories professionnelles les plus féminisées sont les mêmes aujourd’hui que dans les
années 1950. On retrouve le même phénomène pour les femmes diplômées. La
concentration des femmes dans certaines formations est en grande partie responsable de
leur concentration professionnelle dans un petit nombre de secteurs. Ainsi la mixité
professionnelle est toujours teintée d’une majorité numérique, soit masculine, soit
féminine. Les secteurs réellement mixtes, où le nombre de femmes est sensiblement le
même que celui des hommes, sont rares (Meynaud et al., 2009).
51
En plus de se concentrer dans des secteurs bien délimités, les emplois
majoritairement féminins offrent souvent peu de perspectives d’évolution, même si la part
des femmes dans les personnels d’encadrement évolue positivement, sous l’effet de la
hausse de leur niveau d’études (Meron, 2005). Les secteurs les plus plébiscités par les
femmes offrent majoritairement des postes d’employés non qualifiés et donc peu
rémunérateurs.
Cette division entre les emplois féminins et masculins n’est d’ailleurs pas étrangère
aux rapports sociaux entre les sexes (Maruani, 2011). Les emplois féminins, notamment
ouvriers, font le plus souvent appel aux qualités mises en œuvre par les femmes dans leur
travail domestique, comme la minutie, la méticulosité,…
C) Les femmes et l’entrepreneuriat : utiliser les talents pour favoriser l’innovation.
Plus que de permettre aux femmes de travailler, la question de l’entrepreneuriat
féminin est un point essentiel du développement de la place des femmes sur le marché du
travail. Encourager l’entrepreneuriat est un objectif clé de l’action gouvernementale dans
tous les pays, car un taux élevé d’activité entrepreneuriale va de paire avec de nombreuses
créations d’emploi (OCDE, 2012). Exploiter le potentiel des deux sexes est primordial
pour la croissance économique (Löfrström, 2009). D’ailleurs la Stratégie de Lisbonne
contenait des objectifs spécifiques afin de promouvoir l’entrepreneuriat.
Les femmes entreprennent moins que les hommes (Löfström, 2009). Les
différences entre les deux sexes se retrouvent dans tous les pays européens. En France, seul
30% des entrepreneurs sont des femmes. Au sein de l’Union Européenne, ce taux est de
25% (OCDE, 2012). Depuis 1990, ces chiffres n’ont guère évolué.
Pour comprendre pourquoi les femmes entreprennent moins que les hommes, il faut
se pencher sur les raisons qui poussent à entreprendre. Les logiques des femmes sont bien
différentes de celles des hommes (OCDE, 2012). Alors que chez ces derniers, c’est le désir
de travailler à son compte et de ne pas avoir de supérieur hiérarchique qui prime, chez les
femmes, on retrouve l’idée qu’entreprendre permet de pouvoir mieux gérer son emploi du
temps et donc de mieux concilier vie de famille et vie professionnelle. Cela est vrai
notamment pour les femmes aux revenus les plus faibles (Löfström, 2009 ; OCDE, 2012).
52
En effet, lorsqu’elles choisissent effectivement de fonder leur entreprise, les femmes citent
plus souvent que les hommes le souci d’un meilleur équilibre entre travail et vie
personnelle et/ou la nécessité économique comme motivation principale de leur projet de
création d’entreprise. Les femmes, plus que les hommes, se lancent également dans
l’entrepreneuriat par nécessité, car c’est la seule manière pour elles d’accéder à l’emploi
(OCDE, 2012). Pour près de 70% des femmes qui entreprennent en France, il est avant tout
question d’assurer son propre emploi.
Les entreprises fondées par les femmes sont moins dynamiques que celles détenues
par les hommes pour ce qui est de l’innovation (OCDE, 2012). Cette différence est
notamment plus marquée pour les innovations de technologies que pour les innovations
dans les procédés. Les femmes se concentrent plutôt dans certains secteurs, déjà fortement
féminisés, comme le commerce de détail, les services à la personne ou l’action sociale
(Laufer, 2004) (voir annexe 5.6). Les différences dans les formations et carrières des
hommes et des femmes expliquent en grande partie cela. Les femmes sont nettement
minoritaires dans les cursus scientifiques et sont donc moins nombreuses à entreprendre
une carrière dans ce domaine, très intense en innovation. De la même manière, les
universitaires hommes déposent deux fois et demi plus de brevets que leurs homologues
féminines (OCDE, 2012). Les femmes sont également plus inquiètes que les hommes par
le facteur de risque dans la création d’entreprises, ce qui a un impact sur l’innovation et ses
commercialisations (OCDE, 2012). Egalement, lorsque les femmes démarrent
effectivement une activité, elles le font à plus petite échelle que les hommes, elles ont
d’ailleurs moins recours à des emprunts bancaires pour financer leur activité, et
entreprennent dans un éventail limité de secteurs.
Ainsi, alors que l’entrée des femmes sur le marché du travail a été un pas décisif
pour l’égalité des droits, la féminisation du salariat s’est finalement traduite par un
renforcement de la structuration sexuée des emplois et une concentration des activités
féminines dans des secteurs déjà fortement féminisés. Travaillant principalement dans le
secteur tertiaire, les femmes sont le plus souvent employées et occupent des emplois
faiblement qualifiés. Elles ont le plus souvent de faibles perspectives de carrières.
53
II) Un alignement non effectif
On l’a vu, les femmes sont aujourd’hui de plus en plus nombreuses à travailler.
Toutefois, il existe toujours des spécificités au travail des femmes. Encore aujourd’hui, on
remarque qu’elles n’ont pas les mêmes carrières que les hommes. Plus touchées par les
interruptions de carrières, elles sont également plus en proie au chômage et au travail à
temps partiel.
A) La persistance de carrières irrégulières
Le développement du salariat féminin dans les années 1960 s’est traduit par une
augmentation massive des femmes sur le marché du travail. La norme sociale est devenue
celle de la femme qui travaille hors de son domicile.
Parallèlement à ce bouleversement, la carrière des femmes a connu une nouvelle
mutation : les carrières féminines ne s’arrêtent plus à l’arrivée des enfants (Maruani, 2011).
En effet, dans les années 1960, les femmes s’arrêtaient de travailler dès leur premier enfant
– on parle de courbe de carrière à une seule crête - ou reprenaient parfois un emploi
lorsque ceux-ci étaient grands – on parle alors de courbe d’activité bimodale. La courbe
d’activité des femmes était à son minimum entre 25 et 49 ans, période correspondante à
l’âge d’avoir des enfants et de les élever (Maruani, 2011). Aujourd’hui, les femmes, dans
la plus grande majorité, ne s’arrêtent plus de travailler lorsqu’elles ont des enfants. Le taux
d’activité féminin est d’ailleurs le plus élevé entre 25 et 49 ans – on parle ici de courbe
d’activité en U renversé. C’est notamment le cas en France (voir annexe 5.7).
Dans la France des années 1960, la carrière des femmes suivait la forme bimodale,
avec un arrêt de l’activité féminine pendant l’éducation des enfants. Très rapidement après
1968, les carrières des femmes se sont transformées en des carrières continues, selon le
modèle d’une courbe en U renversé. C’est également ce qui s’est passé au Danemark à la
même époque, mais plus lentement. A l’inverse, alors que le modèle dominant il y a
cinquante ans, en Allemagne et au Royaume-Uni était également la discontinuité des
carrières, il l’est toujours aujourd’hui, même si le taux d’activité global des femmes a
nettement augmenté depuis 50 ans et atténue ainsi l’effet discontinu (Maruani, 2011).
54
Dans certains pays d’Europe du sud, comme en Espagne ou en Italie, le taux
d’activité des femmes atteint son pic autour de 25 ans et décroit lentement par la suite.
C’est le cas aujourd’hui, comme dans les années 1960.
Dans les années 1960, aux Pays-Bas, le taux d’activité des femmes était très faible
et le pic se trouvait autour de 25 ans. Seul 20% des femmes travaillaient entre 25 et 49 ans.
Aujourd’hui, le modèle dominant aux Pays-Bas est celui de la discontinuité dans lequel les
femmes s’arrêtent à la maternité et retravaillent lorsque leurs enfants sont grands.
Ainsi, même si l’on retrouve encore de nombreuses disparités entre les pays
européens quant aux taux d’activité des femmes entre 25 et 49 ans (voir annexe 5.8), les
caractères d’inactivité dominante ou de carrières discontinues s’atténuent sous l’effet d’une
hausse générale de l’activité féminine (Maruani, 2011). La majorité des femmes ne s’arrête
plus avec la maternité. Le taux d’activité des femmes sans et avec enfant est sensiblement
le même. Cependant, on remarque une chute de l’activité des femmes à partir du troisième
enfant. Leur taux d’activité baisse à 62,6% en France à l’arrivée d’un troisième enfant.
Les femmes ne sont plus aujourd’hui dans une situation où elles doivent choisir
entre le travail et la famille, ni d’ailleurs dans une idée d’alternance entre l’emploi, l’arrêt
avec la maternité et l’éducation des enfants, puis la reprise d’un travail (Maruani, 2011).
La majorité des femmes cumule vie de famille et vie professionnelle. Cette mutation
profonde est avant tout la marque d’un changement profond des mentalités. Dans les
années 1960, il était « normal » que les femmes s’arrêtent de travailler en se mariant ou en
ayant des enfants alors qu’aujourd’hui, la norme sociale dominante est bien celle de la
continuité de la carrière professionnelle.
Depuis 50 ans, le taux d’activité des femmes n’a cessé d’augmenter dans toute
l’Europe. Alors que les carrières féminines étaient autrefois marquées par la discontinuité,
celle-ci tend à disparaître au profit de carrières ininterrompues. Toutefois, le taux d’activité
n’exprime pas le temps de travail effectué. L’augmentation du taux d’activité des femmes
s’est aussi traduite par un chômage féminin important et une explosion des emplois à
temps partiel.
55
B) Chômage et temps partiel : le travail féminin plus limité que celui des hommes.
Malgré l’entrée massive des femmes sur le marché du travail, et même si le travail
féminin salarié est devenu la norme, on retrouve toujours des disparités importantes entre
les sexes. Le chômage, tout comme le travail à temps partiel, est un indicateur
particulièrement révélateur de la persistance d’inégalités de sexe sur le marché du travail
(Gauvin, 2001 ; Maruani & Meulders, 2005 ; Maruani, 2011). Le travail à temps partiel est
devenu le symbole de la division sexuelle du marché du travail. Il est le vecteur du sous-
emploi et de la précarité des femmes.
Dans tous les pays européens, les femmes sont plus touchées que les hommes par le
chômage. On parle même d’un sur-chômage féminin (Maruani, 2004 ; Maruani &
Meulders, 2005). Ce phénomène est loin d’être récent. Il est apparu dès l’entrée massive
des femmes sur le marché du travail.
Au sein de l’Union Européenne, tous les pays connaissent des taux de chômage
féminins supérieurs à ceux des hommes et ce, depuis les années 1980. Même si l’écart se
réduit, notamment en France ou au Portugal, il demeure (Gauvin, 2001 ; Maruani &
Meulders, 2005 ; Maruani, 2011) (voir annexe 5.9).
Ces écarts entre les sexes sont d’autant plus importants que les populations étudiées sont
jeunes et faiblement diplômées (Maruani & Meulders, 2005 ; Maruani, 2011). D’ailleurs,
alors que le niveau d’étude a un effet protecteur contre le chômage, en Grèce, le taux de
chômage des femmes avec un haut niveau de diplôme est supérieur à celui des hommes,
toutes catégories confondues, même les non diplômés. En Espagne, les femmes diplômées
de l’enseignement supérieur sont touchées de la même manière par le chômage que les
hommes analphabètes (Maruani & Meulders, 2005). Ainsi, dans certains pays, la variable
« sexe » prime sur le niveau de diplôme pour ce qui est du chômage.
La crise de 2008 pourrait avoir amené un changement majeur. Pour la première
fois, en Europe, le chômage des femmes est plus faible que celui des hommes depuis 2010
(voir annexe 5.10). Une explication pourrait être que les licenciements dus à cette crise
auraient frappé majoritairement des emplois d’ouvriers masculins (Maruani, 2011).
Toutefois, on ne peut pas encore savoir si ce nouveau fait est un « accident » ou s’il est
révélateur d’un véritable changement. A ce propos, on considère habituellement que le
56
chômage masculin est conjoncturel alors que le chômage féminin a plutôt un caractère
structurel (Lurol, 2001).
L’importance du chômage des femmes constitue un révélateur de la présence des
femmes dans le monde professionnel (Maruani, 2011). En effet, l’arrivée massive des
femmes sur le marché du travail s’est faite par l’emploi mais également par le chômage
(Maruani, 2011). Par exemple, au Royaume-Uni, le taux de chômage des femmes est bas et
plus faible que celui des hommes. Pour autant, on ne peut pas en déduire que le marché du
travail britannique est moins discriminant pour les femmes que les autres pays européens.
En réalité, ce faible taux est bien le signe d’une faible activité des femmes, d’un sous-
emploi des femmes, dans un pays où l’indemnisation du chômage est difficile, surtout pour
les femmes ayant des ressources suffisantes (Maruani, 2011).
Plus qu’un problème quantitatif, ce qui frappe dans le chômage féminin c’est d’une
part sa permanence et sa durabilité et de l’autre son invisibilité (Maruani, 2011). A côté des
chiffres officiels, une zone d’ombre persiste. On estime que les chiffres du chômage sont
sous-estimés, notamment pour les femmes (Maruani & Meulders, 2005). On parle même
d’un « halo » du chômage. En effet, une partie du chômage féminin ne fait pas partie de ce
que l’on peut appeler le « chômage conventionnel », mesuré par les institutions comme
l’INSEE ou Eurostat. Le découragement des femmes au travail fait que de nombreuses
femmes se retrouvent inactives mais n‘apparaissent pas dans les statistiques du chômage.
La figure de la « femme au foyer », se fonde dans un statut d’inactivité socialement
admissible pour les femmes, notamment si elles sont mères de famille (Maruani &
Meulders, 2005).
Autre figure des difficultés que rencontrent les femmes sur le marché du travail : le
temps partiel. Tout comme le chômage, le travail à temps partiel est éminemment sélectif.
Il touche massivement les femmes et ce, dans l’ensemble des pays européens. Une des
caractéristiques du travail à temps partiel est son caractère largement féminin (Lurol,
2001 ; Löfström, 2009 ; OCDE, 2012). En 2002, 80% des postes à temps partiels sont
détenus par des femmes (Maruani & Meulders, 2005 ; Maruani, 2011). En 2010, un tiers
des emplois occupés par les femmes sont des emplois à temps partiels (voir annexes 5.11,
5.12 et 5.13).
57
Il y a cependant de réelles disparités entre les pays. Aux Pays-Bas, 76% des
femmes travaillent à temps partiel, tandis que ce n’est le cas que pour 11% des Grecques.
Globalement, on remarque que le temps partiel, aussi bien masculin que féminin d’ailleurs,
est majoritairement le fait des pays du Nord de l’Europe, où les taux de chômages sont plus
faibles. En effet, dans ces pays, l’arrivée des femmes sur le marché du travail s’est fait par
l’emploi à temps partiel, ce qui explique qu’en Allemagne, Pays-Bas, Autriche, Royaume-
Uni, le temps partiel représente plus de 40% de l’emploi féminin (Maruani, 2011 ; OCDE,
2012).
Ainsi dans certains pays, le travail à temps partiel a permis aux femmes d’accéder à
l’emploi. Dans d’autres, le temps partiel est beaucoup plus faible, c’est le cas des pays du
sud de l’Europe. Dans ces cas, l’accès des femmes s’est fait par le temps plein ou par le
chômage (comme en Espagne ou en Grèce). Enfin, dans d’autres pays comme en France, le
temps partiel fait figure de protection contre le chômage. « Faute de mieux », les femmes
choisissent ce type de contrat (Maruani, 2011). Le temps partiel a plusieurs significations.
Dans certains pays, le travail à temps partiel a permis aux femmes d’entrer sur le marché
du travail, dans d’autres, elle les éloigne des emplois « normaux », c’est-à-dire des emplois
à temps complets.
Loin d’être uniforme, le temps partiel recouvre des réalités très différentes. D’une
part, on distingue le temps partiel « choisi », qui résulte d’un choix individuel des femmes
de réduire leur temps de travail. D’autre part, on retrouve le temps partiel « subi », c’est-à-
dire des postes à durée de travail réduite et donc à salaire plus faible (Maruani & Meulders,
2005). Sous un même type de contrat, on retrouve des réalités bien différentes.
Alors que dans l’imaginaire collectif, on imagine le temps partiel comme
majoritairement celui des mères de jeunes enfants, insistant donc sur le caractère choisi du
temps partiel, la réalité est tout autre. En effet, ce sont les femmes de moins de 20 ans et
celles de plus de 55 ans qui sont le plus touchées par le temps partiel (Maruani &
Meulders, 2005 ; Maruani, 2011) (voir annexe 5.14). De plus, les salariées le plus souvent
à temps partiel sont peu diplômées et se concentrent dans les secteurs de la vente et des
services. Le temps partiel est d’autant plus une affaire de femmes qu’il est très développé
dans les secteurs d’emploi très féminin (Luriol, 2001). Il représente ainsi pour l’essentiel
des emplois peu qualifiés, ce qui renforce l’idée d’un temps partiel subi plutôt que choisi
(Maruani & Meulders, 2005).
58
Le temps partiel a longtemps été identifié comme un choix idéal permettant,
particulièrement pour les femmes, de concilier aisément, la vie de famille et la vie
professionnelle (Maruani, 2004 ; CESER, 2011). Cette image de choix a eu pour
conséquence, pendant longtemps, d’exclure des débats le sous-emploi et le temps partiel
féminin.
La distinction entre le temps partiel « choisi » et « subi » peut prêter à confusion.
Certains auteurs rejettent d’ailleurs l’idée d’une différenciation entre ces deux types de
temps partiels. Geneviève Fraisse, citée par Margaret Maruani (2011) explique que le
temps partiel n’est jamais un choix, que celui-ci puisse être considéré comme « décidé »
par les femmes pour concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale, ou dicté par
l’employeur. Les raisons du développement de l‘emploi à temps partiel sont sociales et
idéologiques et font échos à la place réservée aux femmes dans la société. Il apparaît
comme la forme la plus idéale pour les femmes de concilier vie professionnelle et familiale
(Maruani, 2004). Ainsi, même « choisi » par les femmes, notamment pour s’occuper de
leurs enfants et du travail domestique, le temps partiel est en réalité un choix imposé par la
société, qui réduit les femmes à leur rôle de mère et de « ménagère », bien avant celui de
travailleuse.
C) Une plus grande tolérance sociale à l’inactivité féminine
Le surchômage peut être considéré comme un révélateur social. De la même
manière que le chômage touche plus les étrangers et les personnes faiblement diplômées, il
touche plus les femmes. Le chômage a donc un caractère éminemment sélectif. Le seuil de
tolérance envers le chômage varie d’ailleurs en fonction des catégories sociales étudiées. Il
est fortement lié à des critères sociaux (Maruani, 2004, 2011).
La sélectivité du chômage est réelle. Le chômage ainsi que les emplois à temps
partiels sont mieux tolérés socialement pour les femmes que les hommes. Jamais considéré
comme un réel problème sociétal, il est souvent invisible et la variable « femme » est
souvent exclue des politiques d’emplois (Alonzo & Meron, 2001).
59
De plus, on ne peut remettre en cause le fait que l’emploi, surtout aujourd’hui,
permet de donner un statut et une place à chacun(e) dans la société. Le surchômage est
donc également révélateur des difficultés qu’ont les femmes, toujours aujourd’hui, à se
trouver une place dans la société (Maruani, 2011), d’autant plus que le travail domestique,
le plus souvent effectué par les femmes, ne bénéficie d’aucune reconnaissance sociale
(Lurol, 2001).
En effet, malgré l’augmentation de l’activité des femmes, elles effectuent toujours
la majorité du travail domestique et ce, sans évolution majeure (Alonzo & Meron, 2001 ;
Gauvin, 2001 ; Puech, 2005). En moyenne, les femmes y consacrent deux fois plus de
temps que les hommes (Puech, 2005 ; OCDE, 2012). Environ 80% du « noyau dur » du
travail domestique (courses, cuisine, vaisselle, linge, ménage) est réalisé par les femmes.
L’écart entre les sexes diminue, mais cela est plus dû à une baisse globale du temps passé
aux travaux domestiques qu’à une amélioration du partage des tâches. Les femmes ont
ainsi de plus en plus de difficultés à gérer travaux professionnels et domestiques, ce que
l’on appelle la « double journée ». Cela peut pousser les femmes à se satisfaire d’un travail
à temps partiel. Mais ce choix a pour conséquence de renforcer la division sexuelle du
travail. Le développement du travail à temps partiel, s’est traduit pour les femmes par une
augmentation du temps consacré aux tâches ménagères (Puech, 2005). Les femmes
demandent à travailler moins pour utiliser leur temps dégagé pour le travail domestique.
Cela continue à renforcer l’image que le travail domestique est bien une affaire de femmes,
qui passe avant leur carrière professionnelle.
De la même manière, le développement du congé parental attractif, notamment
pour les familles modestes constitue un frein à la reprise du travail des femmes après leur
grossesse et concourt ainsi à les écarter durablement de l’emploi (Lurol, 2001). Ainsi, en
plus du travail domestique, la question de la garde des enfants est centrale pour bien
comprendre le travail des femmes. Il est en effet bien vu socialement que les femmes
s’arrêtent de travailler, ou en tout cas travaillent moins, pour élever leurs enfants quand
ceux-ci sont jeunes. La question des modes de garde et de leur coût est donc primordiale.
Le coût des gardes pour les enfants a un impact non négligeable sur le travail des femmes
(Jenson & Sineau, 1998) (voir annexe 5.15). Les pouvoirs publics ont donc une vraie carte
à jouer pour favoriser l’emploi féminin, en organisant un système de garde efficace et
attractif financièrement (Lurol, 2001 ; Gauvin, 2001 ; Löfström, 2009 ; OCDE, 2012).
60
Les normes sociales ont ainsi un important rôle à jouer dans la question de la
continuité des carrières féminines, notamment celles qui lient la question du bien-être des
enfants et de leur éducation avec la vie professionnelle de leur mère. Löström (2009) a
ainsi mis en évidence le niveau d’acceptabilité du travail des mères quand elles ont des
enfants. Le sondage, réalisé en 2002, proposait deux affirmations aux européens : « une
mère qui travaille peut établit une relation avec ses enfants aussi forte et sécurisante qu’une
mère qui ne travaille pas » ; la seconde était « un travail est une chose bien, mais ce que la
plupart des femmes veulent c’est une maison et des enfants »9.
La figure suivante présente les résultats de cette enquête. Sont comptabilisés ici les
résultats pour « d’accord » et « tout a fait d’accord » selon chaque type d’affirmation.
Repéré à : Löfström, Gender Equality, Growth and Employment
Plus intéressant encore, c’est la corrélation entre la réponse « d’accord » ou « tout a
fait d’accord » avec les taux d’activité féminins.
9 La première affirmation était : “A working mother can establish just as warm and secure a relationship with her children as a mother who does not work.” La seconde était : “A job is all right, but what most women want is a home and children.”
61
Lien entre le taux d’emploi féminin en 2007 et opinion à l’affirmation « « un travail est
une chose bien, mais ce que la plupart des femmes veulent c’est une maison et des
enfants ».
Ici est représentée la proportion de personnes « d’accord » ou « tout a fait d’accord ».
Repéré à : Löfström, Gender Equality, Growth and Employment
On remarque une corrélation négative significative. Dans les pays où la majorité
des femmes travaille, les marques d’approbation envers l’idée que la famille et les enfants
doivent être prioritaires sur le travail sont moindres que dans les pays où les femmes sont
moins nombreuses à détenir un emploi.
Ainsi, même si le travail des femmes s’est fortement développé, l’alignement avec
le travail des hommes n’est encore pas effectif. Les femmes sont plus touchées que les
hommes par le chômage et le temps partiel ce qui est signe de la persistance d’une
ségrégation notable du marché du travail envers les femmes. De plus, elles souffrent du
caractère invisible de ces discriminations à cause d’une plus grande tolérance sociale vis-à-
vis de l’inactivité féminine.
62
III) Toujours des discriminations
Même lorsque les femmes ont un emploi, on remarque qu’il existe toujours des
discriminations dans leur carrière professionnelle. Nous détaillerons ici les deux
principales, qui concourent à une sous-utilisation du potentiel que représentent les femmes
A cet égard, ces discriminations constituent une véritable entrave à la croissance. La
première freine les femmes dans la progression de leur carrière, les empêchant d’accéder
aux postes à haute responsabilité. C’est ce que l’on appelle le plafond de verre. La seconde
révèle une différence notable entre les salaires des hommes et des femmes.
A) Le plafond de verre La progression du niveau d’étude des femmes a été très rapide. Elle est aujourd’hui
indéniable puisque les étudiantes sont plus nombreuses que les étudiants dans les
formations supérieures. Aujourd’hui plus diplômées que les hommes, on s’attendrait à
retrouver les conséquences de ces avancées majeures au sein des postes hiérarchiques les
plus élevés. Mais il n’en est rien. Même si la proportion de femmes cadres a augmenté,
celles-ci ont toujours des difficultés à accéder à des postes à plus hautes responsabilités. Il
s’avère que les facteurs qui permettent d’expliquer la présence de plus en plus importante
des femmes dans les postes qualifiés et donc d’accès au statut de cadre ou de manager, ne
sont pas les mêmes que ceux qui permettent d’obtenir des postes de décision au sommet
des organisations (Laufer, 2005b).
L’augmentation du taux d’activité féminin a entrainé une concentration importante
des femmes dans des métiers « féminins », le plus souvent faiblement valorisés
socialement et offrant peu d’évolution ascendantes de carrières. Parallèlement, la
croissance des cadres femmes a été importante puisqu’en 1962, seules 16% des cadres sont
des femmes. Elles sont aujourd’hui 40% (chiffres 2009) ce qui, compte tenu du fait que les
femmes sont plus diplômées que les hommes, reste assez faible (Maruani, 2011) (voir
annexe 5.16). Ainsi, même au sein des professions fortement féminisées, les hommes et les
femmes n’accèdent pas aux mêmes statuts, les femmes ayant plus de difficultés à atteindre
les postes de direction.
63
Cette difficulté qu’ont les femmes à obtenir des promotions dans leur carrière
constitue une « ségrégation verticale ». Plus connu sous le terme « plafond de verre », on
peut décrire ce phénomène comme « l’ensemble des obstacles visibles et invisibles qui
séparent les femmes du sommet des hiérarchies professionnelles et organisationnelles »
(Laufer, 2004). On parle ici d’un ensemble de pratiques ou structures qui « freinent, voire
bloquent l’ascension des femmes à des postes à responsabilité » (CESER, 2011). Le plus
intéressant est sans doute que le plafond de verre se manifeste au cours de la carrière le
plus souvent. Certes, dès l’embauche, on peut entrevoir des différences entre les hommes
et les femmes, notamment parce que les femmes rentabilisent moins leur(s) diplôme(s).
Mais, quand on observe les carrières masculines et féminines, à démarrage semblable, on
remarque que l’écart se creuse quelques années après l’entrée sur le marché du travail, où
les hommes ont évolué plus rapidement que les femmes avec qui ils avaient débuté (Meurs
& Ponthieux, 2005).
L’utilisation du terme « plafond de verre » offre une double dimension. Il exprime
à la fois l’existence de pratiques discriminantes qui entravent l’évolution ascendante des
carrières des femmes, mais également le fait que ces pratiques sont d’autant plus courantes
que le niveau hiérarchique étudié est élevé (Marchand, Saint-Charles et Corbeil, 2007).
Comment fonctionne le « plafond de verre » ? Marchand, Saint-Charles et Corbeil
(2007) ont montré qu’il agissait sous quatre aspects i) les organisations et les critères de
recrutement des directeurs des ressources humaines ne sont pas neutres ; ii) la persistance
de représentations sociales et de stéréotypes ; iii) les difficultés qu’ont les femmes à
accéder aux réseaux professionnels et sociaux dominants ; iv) la question de l’articulation
entre vie familiale et carrière professionnelle.
i) La question de la neutralité des organisations est apparue comme centrale à partir
du moment où les explications du moindre niveau de diplôme des femmes, ou encore celui
du retard historique, ne pouvaient plus être invoquées (Laufer, 2004). Les organisations
apparaissent comme des lieux stratégiques où se structurent les relations de pouvoir par des
processus informels afin de déterminer l’accès au pouvoir. Ceux-ci sont le plus souvent
invisibles, même inconscients, et également inégalitaires. Ainsi de nombreuses études
s’accordent à dire que les organisations sont traversées par des normes et que les modèles
managériaux sont plus masculins que neutres (Laufer, 2004 ; Laufer, 2005b). Cette
64
absence de neutralité se rencontre particulièrement dans les pratiques des services des
ressources humaines qui gèrent les évolutions de carrière des salariés. On peut à cet égard
citer quelques exemples de pratiques discriminantes, comme la constance d’une gestion
différenciée des carrières selon les sexes, notamment due aux représentations sexuées des
qualités, compétences, contraintes et souhaits professionnels. De même, le modèle du
« manager à haut potentiel » reste fortement lié au modèle masculin de carrière (Wierink &
Meda, 2005). Les femmes ne sont ainsi pas repérées comme étant à « haut potentiel » et ne
bénéficient alors pas des mêmes programmes d’avancement rapide et de formations
accélérées. De même, il faudrait en finir avec les pratiques du travail qui défavorisent les
femmes. Les cadres à potentiel sont le plus souvent repérés lors des réunions ou lorsqu’ils
restent tard le soir au bureau car le contexte, moins formel en petit comité, permet le
développement de relations moins hiérarchiques. Or, ce sont les femmes qui pâtissent le
plus des pratiques des réunions le soir, après 17h (Wierink & Meda, 2005). Finalement,
beaucoup de pratiques courantes se révèlent entraver l’avancée hiérarchique des femmes et
organise leur mise en retrait progressif des postes à responsabilité (Marchand et al., 2007).
De même, les représentations qu’ont les ressources humaines des questions de
performance des salariés sont fortement masculines. Les critères d’avancement
hiérarchique sont l’investissement professionnel, la disponibilité ainsi que la mobilité
sectorielle ou géographique, en France ou à l’étranger. Ces critères sont fortement liés aux
« comportements masculins » dans le travail et l’investissement professionnel. Les
femmes, pour être repérées et obtenir des promotions sont ainsi obligées de se calquer sur
les modèles masculins de la performance (Laufer, 2004).
On assiste ainsi à une exclusion des femmes des lieux de décision et à une
concentration des hommes dans ces lieux de pouvoir. Cela entraine un renforcement du
caractère masculin de la norme effective dans les milieux professionnels (Laufer, 2005b).
La présence des femmes au sein des conseils d’administration en est d’ailleurs un parfait
exemple (OCDE, 2012). Les femmes étant moins nombreuses à ces postes de direction, les
plus jeunes ne disposent pas assez de modèles féminins auxquelles elles peuvent
s’identifier. Quand elles parviennent à y accéder, les femmes se retrouvent souvent seules à
un niveau décisionnel élevé et souffrent souvent de leur « rareté » (Laufer, 2005b).
ii) La persistance de stéréotypes quant aux qualités du « bon manager » sont
également un frein au développement des carrières des femmes. Les postes de gestion et de
direction sont le plus souvent perçus comme des postes convenant mieux aux hommes
65
qu’aux femmes, notamment en ce que les qualités requises pour ces responsabilités sont
celles que l’on attribue le plus souvent aux hommes : agressivité, esprit de domination ou
encore esprit de compétition (Laufer, 2004). De même, la ségrégation horizontale qui
entraine une concentration des femmes dans des métiers fortement féminisés n’est pas sans
conséquence. En effet, les femmes se concentrent dans un petit nombre de métiers, et
changent moins souvent de secteurs. Or, il faut généralement justifier d’une certaine
diversité de postes et d’un parcours riche, mêlant postes techniques et administratifs, pour
atteindre les sommets décisionnels des organisations (Meurs & Ponthieux, 2005). De plus,
même si les femmes accèdent aujourd’hui plus qu’hier aux postes supérieurs, ce sont la
plupart du temps des postes en périphérie des fonctions stratégiques, comme les ressources
humaines ou la communication. Ces postes non centraux dans la stratégie des entreprises
ne permettent pas aux femmes à leur tête de briguer les postes les plus hauts (Laufer,
2005b ; Marchand et al., 2007).
iii) La force des réseaux dans l’avancement professionnel est non négligeable. La
capacité à les faire fonctionner au bon moment ainsi que l’identification de « mentor »
permettant d’aider au développement de carrière par des pratiques de cooptation est un
point central (Lafer, 2004). Or, les femmes plus que les hommes ont des difficultés à
entretenir et développer leur réseau professionnel. Leur quasi absence de ces réseaux est
l’une des principales cause de leur difficultés à franchir le « plafond de verre » car ils
représentent une influence officieuse non négligeable dans les modalités de promotion aux
postes les plus stratégiques (Lafer, 2004 ; Marchand et al., 2007). L’éloignement des
femmes de ces réseaux est dû en partie à la questions de reproduction sociale, les réseaux
se caractérisant par une grande homogénéité entre leurs membres (Marchand et al., 2007).
iv) La question de l’articulation entre vie familiale et carrière professionnelle
constitue le quatrième frein à l’accès des femmes aux postes à responsabilités. On l’a vu,
l’évolution professionnelle ascendante se traduit souvent par une mobilisation intense en
termes de temps de travail. Egalement, une grande disponibilité à la mobilité géographique
rapide, nationale ou internationale. Les directeurs des ressources humaines ont d’ailleurs
tendance à considérer que les femmes donneront la priorité à leur vie personnelle et
n’auront qu’un intérêt secondaire pour le développement de carrière, les écartant ainsi
automatiquement des processus de détection (Laufer, 2005b). Souvent, ces contraintes,
réelles mais aussi souvent supposées pour les femmes, sont vues comme incompatibles
66
avec la conciliation d’une vie de famille stable. De plus, le mariage et les enfants sont à
l’origine de ce que l’on appelle « l’escalier inversé » pour les femmes, constituant un frein
à leur carrière professionnel alors qu’ils sont un support et un tremplin pour celle des
hommes (Lafer, 2005b).
Plus que les hommes, les femmes sont obligées de trouver un compromis entre la
sphère professionnelle et la sphère privée. Elles doivent également négocier avec leur
conjoint les possibilités de mobilité ou de garde des enfants. Le développement parallèle
des carrières des deux conjoints est le plus souvent impossible, l’une se faisait au détriment
de l’autre. Pour que les femmes accèdent aux postes à responsabilité, il leur faut
« négocier » le plus souvent avec leur conjoint, pour qu’il prenne en charge une plus
grande partie des obligations familiales et domestiques (Laufer, 2005b).
Ainsi, le développement de l’emploi féminin n’aurait-il pas transformé la question
« travailler ou pas » en « travailler plus ou moins » (Meurs & Ponthieux, 2005) ? Cela
revient à dire qu’aujourd’hui, la plus grande difficulté des femmes n’est plus d’accéder à
un emploi, mais bien d‘obtenir un poste en adéquation avec leurs diplômes et leurs
compétences et ce, même au dépend de leur vie de famille. Pour accéder aux hautes
sphères de pouvoir et de décision, à compétences égales, elles doivent souvent fournir plus
d’effort et de travail que leurs homologues masculins (Marchand et al., 2007).
B) Les inégalités salariales
L’écart de salaire est un indicateur de la place qu’occupent les femmes sur le
marché du travail. Il est notamment plus important parmi les salaires les plus élevés
(OCDE, 2012). En parallèle, on assiste depuis quelques années à une explosion en France
des plus bas salaires. Parmi les salariés à bas et très bas salaire, les femmes sont très
fortement représentées, notamment à cause du caractère féminin des emplois à temps
partiel. Toutefois, même si on regarde les salaires horaires, on retrouve majoritairement
des femmes en bas de l’échelle (Maruani, 2011).
L’écart de salaire est également intériorisé dans les mentalités. Les salaires
féminins sont souvent vus comme des salaires « d’appoint ». Historiquement, le salaire des
67
hommes est construit sur la valeur économique du travail effectué. Cette somme doit
d’ailleurs être suffisante pour vivre et faire vivre sa famille alors que pour les femmes, le
salaire est calculé en fonction des besoins que l’on veut bien leur reconnaître. Les femmes
n’ont ainsi pas besoin d’un vrai salaire, sous-entendu ici d’un salaire d’homme,
puisqu’elles y ont accès par le mariage et que le salaire des hommes est calculé pour faire
vivre l’ensemble de sa famille (Downs, 2006).
En moyenne, en France, dans les années 2000, on estime que pour le secteur privé à
temps complet, le salaire des femmes équivaut à 80% de celui des hommes. Cet écart est
notable mais d’un point de vue historique, c’est surtout la réduction de cet écart qui frappe.
Depuis 1960, l’écart se serait réduit de moitié, mais on remarque un ralentissement du
rattrapage depuis la fin des années 1980 (Maruani, 2011 ; OCDE, 2012).
L’égalité salariale n’existe nulle part en Europe (voir annexe 5.17). Dans tous les
pays européens, il existe une différence notable entre les salaires féminins et masculins,
quelles que soient les caractéristiques prises en compte (Maruani, 2011). Toutefois, ces
écarts observés sont très variables d’un pays à l’autre. Plusieurs facteurs peuvent expliquer
ces disparités nationales, alors même que tous les pays européens ont des objectifs
communs en termes d’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes :
l’ancienneté et l’importance de la participation féminine à l’emploi et son acceptation
sociale, la fiscalité et notamment le fait qu’elle incite ou non les femmes à s’arrêter de
travailler à l’arrivée de leurs enfants, l’existence et le coût des systèmes de garde et les
modalités des congés parentaux (Ponthieux & Meurs, 2004).
Le calcul de l’écart de salaire est délicat. Quels chiffres utiliser pour comparer ? Le
salaire horaire ? Le salaire mensuel ou annuel ? Faut-il y intégrer les emplois à temps
partiels ? L’importance du choix des chiffres à comparer est primordiale, les écarts ne sont
sensiblement pas les mêmes selon les paramètres pris en compte (Curraize & Hugounenq,
2004).
68
Ecarts de revenus entre hommes et femmes en France (en%), 2006
Ecart tous temps de travail confondus 27
Ecart pour les temps complets 19
Ecart pour les salaires horaires 13
Ecart pour « toutes choses égales par ailleurs » 10
Source : Maruani, 2011
Mais que cherche-t-on à calculer finalement ? L’écart de rémunération du travail ou
bien la différence en termes de gains (Meurs & Ponthieux, 2006 ; Maruani, 2011) ?
L’écart de rémunération du travail révèle la différence réelle entre les hommes et
les femmes. Toutefois, il omet l’idée qu’il existe des variables importantes en termes
d’emplois entre les hommes et les femmes, et en premier lieu des différences dans le temps
de travail, principal facteur explicatif des écarts de salaires entre les sexes. Ainsi, calculer
l’écart de gains entre hommes et femmes maximise l’écart de salaire constaté en ce qu’il
permet de rendre compte de l’ensemble des discriminations à l’encontre des femmes sur le
marché du travail : un temps de travail inférieur des femmes qui sont plus souvent à temps
partiel, un effet « secteur » travaillé, et enfin l’importance de l’expérience professionnelle
qui est moindre pour les femmes à cause de leurs plus nombreuses interruptions de
carrières (Meurs & Ponthieux, 2005 ; Maruani, 2011).
La plupart du temps, notamment dans les comparaisons internationales, les chiffres
utilisés afin de comparer les écarts de salaires sont les salaires horaires. (Meurs &
Ponthieux, 2005). L’avantage est que tous les travailleurs peuvent donc être comptabilisés,
quelle que soit leur durée de travail hebdomadaire (Meurs & Ponthieux, 2006). Toutefois,
il nivelle les différences en termes de gains entre les hommes et les femmes car on le sait,
les hommes et les femmes n’ont pas les mêmes emplois, les mêmes postes, ni les mêmes
durées de temps de travail.
Les facteurs permettant d’expliquer les écarts de salaire entre les hommes et les
femmes sont nombreux. Il y a d’une part des effets structurels – ou expliqués - qui sont
liés à la structure du marché du travail, notamment en ce qu’il est discriminant pour les
femmes. On parle ici des différences de temps de travail entre les hommes et les femmes,
69
du capital humain et du secteur d’emploi. D’autre part, il reste une part non expliquée, qui
constitue la discrimination salariale « pure ».
La question du temps de travail est un élément primordial dans la détermination du
salaire. Le temps partiel notamment, éminemment féminin, constitue un facteur important
de différenciation entre les hommes et les femmes. Le temps partiel a en plus un effet
indirect sur les salaires car il impacte le déroulement de carrière des femmes (Meurs et
Ponthieux, 2005).
Le capital humain est également un facteur important en ce qu’il influence les
caractéristiques productives des individus. Or, d’après les théories économiques, c’est bien
les différences de productivités qui expliquent les écarts de salaire (Meurs & Ponthieux,
2005). Deux facteurs influencent ainsi le capital humain. L’éducation d’une part, et
l’expérience professionnelle d’autre part.
L’éducation est une cause explicative majeure. C’est une composante essentielle du
capital humain. Elle a une importance considérable car elle a un impact sur le poste détenu
et donc le salaire. Or, en France, les femmes sont en moyenne plus diplômées que les
hommes. On ne devrait ainsi pas observer d’écarts de salaires - ou alors un écart favorable
aux femmes - si le facteur d’éducation était le seul à entrer en jeu (Meurs & Ponthieux,
2006). Mais, malheureusement, même si les femmes sont plus diplômées que les hommes,
elles rentabilisent moins leur bagage scolaire et n’occupent pas des postes plus prestigieux
que les hommes sur le plan professionnel. Cette plus faible rentabilité est multifactorielle
(cf : chapitre 2, section 1). Certains secteurs offrent de meilleures perspectives d’évolution
professionnelle et salariale (postes d’ingénieur notamment, très masculins), alors que les
femmes se concentrent dans des secteurs peu rémunérateurs comme le social ou la santé.
Les spécialités des diplômes sont différentes, ce qui peut contribuer au maintien des
différences, avec une surreprésentation des femmes dans les secteurs peu rémunérateurs et
une sous représentations dans les secteurs à fort potentiel de rémunération (Meurs et
Ponthieux, 2005).
L’expérience professionnelle des femmes est moindre, à cause des interruptions de
carrière qu’elles sont plus à même de rencontrer, notamment à cause de la maternité. Les
femmes sont discriminées car toujours suspectées d’être des mères potentielles, qui
peuvent quitter leur travail temporairement ou définitivement à la suite d’une grossesse
(Meurs et Ponthieux, 2005 ; OCDE, 2012). La maternité et les interruptions de carrières
70
ont un impact non négligeable sur les salaires. D’ailleurs, cet écart augmente plus
rapidement après 30 ans, c’est-à-dire à l’âge vers lequel les femmes sont plus susceptibles
d’être enceinte et donc d’interrompre leur emploi temporairement, ou d’aménager leur
temps de travail (OCDE, 2012).
Enfin, dernier facteur structurel : le type d’emploi occupé et la place dans la
hiérarchie. On l’a vu précédemment, le « plafond de verre » empêche les femmes
d’occuper les mêmes postes que les hommes à diplômes, compétences et qualifications
égales. Les facteurs explicatifs sont nombreux mais la question de la moindre implication
des femmes dans leur carrière professionnelle est centrale, notamment parce qu’elles
travaillent moins que les hommes en termes d’heures et parce que les interruptions
professionnelles, dues à la maternité, peuvent être nombreuses. Les femmes n’atteignent
ainsi pas les mêmes postes que les hommes et ont donc des salaires plus faibles (Meurs &
Ponthieux, 2006).
Malgré tous ces facteurs explicatifs qui expliquent une grande partie des écarts de
salaire entre les hommes et les femmes, il reste un « résidu » non expliqué qui correspond
à la discrimination pure, celle qui ne relève que de la variable « sexe » (Maruani, 2011).
C’est ce « résidu » qui exprime les différences de salaires à productivité égale. Il se
manifeste par une moindre rémunération de la productivité des femmes (Ponthieux &
Meurs, 2004). La discrimination pure est d’une moindre importance quantitative que les
discriminations structurelles, liées au marché du travail, mais elle constitue un « noyau ».
C’est la partie la plus difficile à réduire puisqu’elle ne dépend pas du marché, des
caractéristiques des emplois des femmes, mais bien d’un problème de stéréotypes quant à
la place des femmes dans l’emploi.
Finalement, il y a deux explications aux différences de salaires entre les hommes et
les femmes. D’une part la variable « sexe », qui révèle de la « discrimination pure » dans la
fixation des salaires. Les études rendent compte d’un écart de l’ordre de 10% pour la
discrimination pure en calculant les écarts à niveau de formation, catégorie
socioprofessionnelle, expérience et âge égaux, travaillant dans des entreprises semblables
(Maruani, 2011). Mais, on fait ici abstraction du fait que les hommes et les femmes ne font
pas les mêmes tâches, ne travaillent pas dans les mêmes secteurs, et n’ont pas les mêmes
métiers. Se cumule ainsi un deuxième effet discriminatoire, celui des ségrégations
71
horizontales et verticales que les femmes rencontrent sur le marché du travail. Finalement,
l’expression « à travail égal, salaire égal » est inopérante puisque la notion de « travail
égal » n’existe pas. On a donc deux effets qui se cumulent mais sans jamais se confondre :
les discriminations des femmes sur le marché du travail et la discrimination salariale
« pure » (Meurs et Ponthieux, 2005 ; Maruani, 2011). La réduction des inégalités salariales
est ainsi un point essentiel puisqu’il représente, en quelque sorte, une traduction chiffrée de
l’ensemble des discriminations à l’encontre des femmes sur le marché du travail.
Le chemin est encore long pour atteindre l’égalité parfaite entre les hommes et les
femmes, notamment sur le plan professionnel. Alors qu’il n’existe plus aucune barrière
légale, les femmes n’ont toujours pas accédé à l’égalité professionnelle, plus de 60 ans
après l’inscription dans la Constitution du principe d’égalité des droits dans tous les
domaines.
Le niveau d’éducation des femmes est désormais élevé, supérieur à celui des
hommes dans la plupart des pays développés. Toutefois, à cause de choix d’orientation
influencés par des représentations sociales toujours fortement sexuées, elles ne s’orientent
pas dans les filières les plus prestigieuses. L’école crée ainsi le premier décalage entre les
femmes et les hommes. Afin de résoudre les problèmes d’inégalités entre les hommes et
les femmes, les gouvernements doivent donc veiller à ce que l’institution scolaire ne mette
pas les garçons plus en avant que les filles, ni ne renforce les stéréotypes. Ce premier
décalage scolaire est décuplé sur le marché du travail sous l’effet d’autres phénomènes
ayant un caractère féminin fortement développé comme l’irrégularité des carrières, le
chômage et le temps partiel. Tout cela concourt à accorder aux femmes une place
différente sur le marché du travail, inférieure à celle des hommes et donc à un marché du
travail encore touché par les discriminations.
Il reste ainsi encore de nombreux obstacles à surmonter afin d’accorder aux
femmes une place optimale dans le monde professionnel. C’est avec la réalisation d’un
marché du travail égalitaire, où les femmes seront actives, pourront utiliser pleinement leur
potentiel dans les filières où elles sont les plus douées, et accéderont au degré hiérarchique
qu’elles méritent, qu’elles pourront efficacement contribuer à la croissance.
72
Chapitre 3
Les débuts d’une prise de conscience a priori : l’intégration de la question de l’égalité dans les stratégies
managériales des entreprises.
Mobiliser l’idée que l’égalité influe positivement sur la croissance permet de
mobiliser un nombre plus important d’acteur autour de la lutte contre la discrimination. En
premier lieu, on pense aux entreprises qui sont en première ligne quand il s’agit de
combattre les inégalités sur le marché du travail. L’argument « croissance » est ainsi
converti en « performance » dans le milieu professionnel. L’idée est que les femmes
constitueraient un atout non exploité dans les entreprises. Le fait d’avancer la notion de
performance permet de motiver les entreprises à entreprendre des politiques de
féminisation, à tous les niveaux de responsabilité. Il semblerait aujourd’hui qu’une
véritable prise de conscience se soit réalisée. En effet, la mise en avant des femmes dans
les entreprises apparaît comme incontournable, comme un nouveau standard managérial.
Toutefois, on peut se demander si cette réappropriation du dossier « égalité » par le monde
professionnel n’engendre pas des effets pervers importants, comme la remise au goût du
jour des idées essentialistes.
Section 1 : Le nouveau « prêt à penser10 » des ressources humaines Face à la lenteur des changements sur la place des femmes et des hommes dans le
milieu professionnel, et alors que le pouvoir du droit apparaît comme insuffisant pour
promouvoir l’égalité, un nouveau type d’argumentaire a récemment émergé (Landrieux-
Kartochian, 2005). De nouvelles politiques, plus pragmatiques et plus aptes à séduire les
entreprises sont donc apparues, témoin de leur prise en compte de l’égalité professionnelle
comme un véritable enjeu. Cette nouvelle approche de l’égalité professionnelle vise à
promouvoir les femmes comme un atout pour les entreprises en ce que la féminisation des
sociétés serait un facteur de performance (Laufer & Paoletti, 2010). Une plus grande
égalité entre les hommes et les femmes serait donc un enjeu économique et managérial. La 10 L’expression « prêt à penser » est ici empruntée à Alain Amintas et Annie Junter, dans leur article « L’égalité prise au piège de la rhétorique managériale » (2009).
73
question de l’égalité ne se pose plus en termes de justice, mais plutôt en termes
économiques (Wierink & Meda, 2005).
Deux types d’argumentaires sont mis en avant, mettant en exergue les différences.
Le premier met en avant les qualités spécifiquement féminines et leurs incidences positives
sur la performance des entreprises. Ces travaux sont fondés selon des approches
psychologiques. Le second argument est celui des théories managériales affirmant que la
diversité, notamment celle des sexes, a une incidence positive sur les résultats des
entreprises (Landrieux-Kartochian, 2004). En effet, de nombreuses études, notamment
anglo-saxonnes, tendent à prouver ce lien entre féminisation des entreprises et
performance. Toutefois, les résultats ne sont pas toujours significatifs. On pourrait
expliquer ces lacunes par le petit nombre de femmes travaillant au sein des instances
dirigeantes des entreprises (Laufer & Paoletti, 2010).
Le principal problème est que ce nouvel argumentaire de la présence des femmes
sur le marché du travail se fait au détriment de la reconnaissance des droits (Laufer &
Paoletti, 2010) et ce, même si cette méthode peut apparaître comme plus efficace que les
contraintes légales. Par ailleurs, les politiques de féminisation se rapprochent aujourd’hui
plus des politiques de mixité que d’égalité. Or, mixité ne signifie pas obligatoirement
égalité (Wierink & Meda, 2005). Mixité signifie coexistence des deux sexes mais ne
signifie absolument pas égalité salariale, égalité dans la promotion, ni absence de
ségrégation à l’intérieur des métiers.
I) Les femmes : nouvel atout en entreprise
La première approche permettant d’expliquer que les femmes seraient un facteur de
performance mobilise un argument psychologique, exprimant que les femmes sont dotées
« par nature » de qualités propres.
Les femmes contribuent à la performance des entreprises par plusieurs biais, en
apportant des qualités féminines spécifiques, complémentaires de celles des hommes
(Landrieux-Kartochian, 2004). Il existerait une spécificité des femmes, dans leur manière
de travailler, de gérer les équipes, les dossiers, … Les femmes auraient plus de valeurs,
74
plus de loyauté envers leur entreprise, seraient plus éthiques et plus efficaces (Jonas &
Séhili, 2009).
Sophie Landrieux-Kartochian, à travers une revue de la littérature rend compte des
qualités attribuées généralement aux hommes et aux femmes11. Aux hommes, on attribue
facilement les qualificatifs tels que « leader », « agressif », « ambitieux », « confiant en
soi », « prend des risques », « dominateur ». Aux femmes, les adjectifs sont bien
différents : « sensible aux besoins des autres », « compréhensive », « loyale »,
« chaleureuse », « douce », « compatissante ». En mettant en œuvre ces différences, les
femmes seraient en mesure d’apporter quelque chose de nouveau aux entreprises.
La féminisation des entreprises aurait un effet positif sur leurs résultats et leur
performance. Cet impact ne fait d’ailleurs pas de doute pour les entreprises qui mettent en
place des politiques de mixité, comme en témoigne l’analyse du groupe de travail de
grandes entreprises organisé par la DARES12 (Wierink & Meda, 2005). Leurs qualités
spécifiques leur permettrait d’apporter un « plus » à leur organisation dans trois secteurs :
le management « féminin », les politiques commerciales et la performance financière.
Les femmes exerceraient un management spécifique, différent du modèle
traditionnel du manager, intimement lié à une approche masculine du leadership. Parce
qu’elles possèdent des qualités féminines distinctes de celles des hommes, les femmes
auraient donc une façon propre de gérer leurs équipes, un management féminin, plus
participatif, égalitaire, moins hiérarchique et plus coopératif (Landrieux-Kartochian, 2005 ;
2009). Le management féminin serait également plus interactif, participatif, moins
dominateur, permettant de partager le pouvoir et donc plus motivant pour les équipes
(Landrieux-Kartochian, 2004). En favorisant la communication et la coopération, les
femmes « humaniseraient » les entreprises. Ces méthodes, à la fois différentes et 11 Extrait du travail Bem Sandra Lipsitz, 1975. « Au-delà de l’androgynie, quelques préceptes osés pour une identité de sexe libérée. » Contribution au colloque « Nouvelles directions de recherche sur les femmes», Madison, Wisconsin, extrait de La différences des sexes, question de psychologie, M. C. Hurtig et M. F. Pichevin, Tierce Sciences, 1986. 12 Ce groupe de travail sur « la contribution de la mixité professionnelle à la performance des entreprises et à la croissance économique », mis en place en 2003 par la DARES. Le travail a consisté en des entretiens individuels ou collectifs sur l’intégration de la question de la performance aux politiques d’égalité, la question de la promotion des femmes en entreprises et enfin la question de la féminisation des métiers fortement masculins.
75
complémentaires de celles des hommes, seraient d’ailleurs plus en phase avec les
exigences actuelles des entreprises (Achin et al., 2005 ; Amintas & Junter, 2009). On parle
même de « leadership au féminin » (Jonas & Séhili, 2009).
Finalement les qualités féminines seraient censées renouveler le travail en
entreprise et le management des équipes. Cela n’est pas sans rappeler les vertus que l’on
prête aux femmes en politique, où elles seraient censées être plus honnêtes et moins à la
recherche de leur intérêt personnel (Laufer & Paoletti, 2010). La conviction des directeurs
des ressources humaines quant à l’existence d’un management spécifique est d’ailleurs une
des principales raisons de la mise en place de politiques spécifiques aux femmes dans les
ressources humaines (Landrieux-Kartochian, 2004).
Pour ce qui est des performances commerciales, la féminisation des équipes
apporterait une plus grande représentativité des consommateurs, qui permettrait de mieux
comprendre les besoins des client-e-s et leurs préférences d’achat (Landrieux-Kartochian,
2004). Les femmes sont présumées mieux comprendre et mieux anticiper les attentes des
clientes, qui réalisent la majorité des achats, parce qu’elles leur ressemblent davantage.
Une plus grande diversité, ainsi qu’une plus grande mixité permet aux entreprises de se
différencier sur le marché, par une plus grande créativité, capacité d’innovation et une
meilleure réponse aux attentes des clients (Landrieux-Kartochian, 2004 ; Achin et al.,
2005 ; Amintas & Junter, 2009 ).
Les performances financières des entreprises seraient également liées à la
féminisation de leur personnel. Une entreprise caractérisée par des postes de direction plus
féminisée est la preuve d’une meilleure utilisation des ressources de l’entreprise et donc
d’une meilleure gestion, d’une utilisation plus optimale du potentiel des salariés. Cette
meilleure gestion se retrouve dans la performance et donc dans les résultats financiers des
entreprises. D’autres études tendent à montrer que les entreprises qui ont plus de femmes
au sein de leur top management sont celles qui sont les plus rentables (Landrieux-
Kartochian, 2004).
Pour les sociétés cotées en bourse, il semblerait que la présence de femmes dans les
postes à haute responsabilité de ces entreprises soit perçue comme un signal fort de bonne
gestion, d’innovation et de performance par les marchés financiers. Cela se traduit en
bourse par un cours initial des actions élevé, une hausse régulière de leur cours et de leur
rentabilité (Landrieux-Kartochian, 2004 ; Amintas & Junter, 2009). Les femmes seraient
76
également plus raisonnables et moins enclines à prendre des risques, ce qui peut s’avérer
être un argument fort dans ces périodes d’incertitudes économiques (Landrieux-
Kartochian, 2005 ; Laufer & Paoletti, 2010). De même, selon une étude menée aux Etats-
Unis, les entreprises dont les directions sont plus féminisées ont un chiffre d’affaires
supérieur de plus d’un tiers aux entreprises les moins féminisées (Jonas & Séhili, 2009).
Les qualités prêtées aux femmes sont une raison de plus de les embaucher en ce
qu’elles pacifieraient les relations sociales au sein des entreprises. Dans le secteur du
bâtiment, la féminisation est décrite comme un processus « moderne », suivant des
logiques attribuant aux femmes de nombreuses qualités ayant de nombreux effets sur le
comportement au travail de leurs collègues masculins. Parce que les femmes sont vues à la
fois comme plus efficaces et loyales, la féminisation des métiers du bâtiment serait à
l’origine d’une pacification des rapports sociaux et d’une « disciplinarisation » des
comportements. Cette vision n’est pas exempte des stéréotypes attribuant aux femmes des
qualités de « médiatrices », « d’employées modèles » ou de salariées « disciplinées »
(Gallioz, 2009).
Aujourd’hui, les entreprises communiquent autour de la mixité et l’érigent en
« atout » pour leur entreprise, comme une « richesse ». Les femmes apporteraient un
« plus » pour les entreprises grâce à leurs qualités féminines, devenant alors un gage de
performance (Meynaud et al., 2009). Finalement, les femmes en entreprise apparaissent
aujourd’hui comme un potentiel non exploité (Landrieux-Kartochian, 2004). Développer
des politiques de féminisation est donc le symbole d’un mangement des ressources
humaines plus efficace et plus optimal. C’est également une manière d’augmenter le vivier
de talent des entreprises et d’éviter une éventuelle pénurie des cadres liée au papyboom
(Achin et al., 2005).
II) L’égalité femmes-hommes et la diversité Plus que de mettre en avant la contribution des femmes (uniquement) à la
performance, il est aujourd’hui question de mettre en avant la diversité car cette notion –
qui permet également d’englober la mixité – court moins le risque de mettre en
concurrence les salariés (Achin, Meda et Wierink, 2005).
77
Depuis le début des années 1990, beaucoup d’études ont été conduites aux Etats-
Unis sur la question de la diversité et de la performance. Ces études mettent en avant les
avantages d’un nouveau type de management, mettant en avant la diversité de l’entreprise.
Celui-ci s’éloigne de l’argument éthique et de justice pour au contraire, mettre en avant la
question de la rationalité économique. La notion de diversité n’est plus liée uniquement à
des questions d’éthique, d’égalité ou encore de légalité, mais suit bien une logique de
performance (Landrieux-Kartochian, 2004).
Ce nouveau management, plus pragmatique a connu un fort succès aux Etats-Unis.
Au contraire, on remarque beaucoup d’hésitations en France à utiliser l’argument de la
performance pour favoriser la diversité. On peut donner deux raisons à cela. Tout d’abord,
le concept de « diversité » a du mal à se trouver une place dans un pays tel que la France,
qui a une forte tradition universaliste et d’égalité. Ensuite, le recours à l’argumentaire
économique pour favoriser l’égalité professionnelle est une vision vécue par beaucoup
comme trop utilitariste. Finalement, les politiques de diversité ont émergé en France dans
un contexte de « découverte » des inégalités que le principe français d’universalisme
républicain avait masqué (Laufer, 2009). Mais, leur développement s’est fait avec
beaucoup plus de prudence que dans le monde anglo-saxon.
A) Les femmes en entreprises, un facteur de diversité
La notion de diversité, récente en France dans le discours des managers, est un
concept flou et sans définition juridique (Meynaud et al., 2009). Aujourd’hui argument
marketing, elle est utilisée dans toutes les stratégies de communication des entreprises13,
véhicule une image positive et constitue une preuve de la responsabilité sociétale des
entreprises (Wierink & Meda, 2005).
La notion de diversité est ainsi devenue centrale dans les nouvelles pratiques
managériales. Toutefois, c’est une notion floue.
13 Ce type de discours est également mis en avant par les partis politiques. Les qualités mises en avant sont alors sensiblement les mêmes que dans le milieu professionnel : humanité, sensibilité, honnêteté, probité, confiance, mise en avant de l’intérêt général par rapport à l’intérêt particulier, pacification de la vie politique…
78
« Diversité » est synonyme de variété, pluralité. Dans le monde de l’entreprise, le
concept de diversité pourrait ainsi se traduire par l’embauche et la mise en avant de
personnels issus des minorités, qu’elles soient de nationalités, de sexe, de race ou
d’orientation sexuelle (Landrieux-Kartochian, 2004). La diversité regroupe ainsi de
multiples caractéristiques, à la fois observables ou non observables. Aborder l’intérêt
managérial de la diversité incite indéniablement les entreprises à se questionner sur les
problématiques de l’égalité professionnelle comme un outil stratégique (Landrieux-
Kartochian, 2005).
La diversité est positive pour l’entreprise car elle agit sur l’image de la société, sur
le bien-être des employés14, leur productivité, leur capacité d’innovation et l’accès à des
nouveaux marchés et leurs relations avec leurs clients (Landrieux-Kartochian, 2004).
Le bien-être des salariés a une incidence positive sur la performance des
entreprises. C’est la thèse des théoriciens des « relations humaines », reprise récemment
par Najat Vallaud-Belkacem, Ministre des droits des femmes, dans une lettre adressée aux
dirigeants des grandes entreprises françaises (voir annexe 3.2). En effet, lorsque les salariés
se sentent bien, ils sont plus productifs et donc plus performants. Or, la diversité en
entreprise, les sentiments d’équité des salariés et d’égalité des chances agissent en ce sens.
L’inexistence d’un plafond de verre et l’égalité des chances entre tous les salariés est un
vecteur de satisfaction et donc de motivation au travail (Amintas & Junter, 2009). Mener
des politiques de diversité permet en outre de garder les meilleurs éléments et d’en attirer
d’autres car les entreprises qui mènent des politiques de lutte contre le plafond de verre
attirent ainsi d’autres femmes qui savent qu’elles ne seront pas bloquées dans leur
ascension professionnelle (Achin et al., 2005).
Le discours managérial sur la diversité met également en avant les différences et le
rôle de l’hétérogénéité des équipes sur la performance globale des entreprises. En
employant dans de mêmes équipes, des personnes différentes par leur culture, leur sexe,
14 A propos de l’importance du bien-être et de la cohésion du groupe de travail, on peut citer les travaux d’Elton Mayo (1880-1949). Travaillant avant tout sur les relations humaines dans le monde professionnel, il est à l’origine du mouvement des « relations humaines », qui met en avant le système social que constitue l’entreprise. Les salariés sont motivés par l’argent, mais également par des facteurs psychosociologiques tels que les sentiments, les perceptions et les attitudes. Ainsi, le groupe de travail et l’environnement des salariés ont un impact sur les attitudes et le rendement des salariés (travaux sur l'usine Western Electric de Cicero, de 1924 à 1932). Les politiques internes aux organisations favorisant le bien-être et la cohésion des salariés ont ainsi une influence sur la performance des entreprises en ce qu’elle a un impact sur la motivation des employés.
79
leur histoire personnelle, le management de la diversité apporte de la richesse, de nouvelles
méthodes de travail qui favorisent la performance. Les équipes composées de membres
différents les uns des autres sont plus innovantes et plus créatives, à condition de savoir
mettre en avant les différences et non pas de les atténuer et de les fondre dans le modèle
dominant (Landrieux-Kartochian, 2005). La théorie de la complémentarité entre les
hommes et les femmes a donc toute sa place dans la notion de diversité puisque les
hommes seraient naturellement bon dans les étapes « opérationnelles » et les femmes dans
ce qui « humain », c’est-à-dire dans la gestion des équipes et des dossiers (Meynaud et al.,
2009). Il convient ainsi qu’hommes et femmes travaillent ensemble, dans une
« complémentarité idéalisée » censée remplacer, selon ces discours, la rivalité
professionnelle entre les femmes et les hommes (Jonas & Séhili, 2009).
Le développement de la place des femmes en entreprise est donc un vecteur de
diversité (Jonas & Séhili, 2009). La diversité et en particulier la mixité seraient synonymes
de performance économique pour les entreprises. De plus, on l’a vu précédemment, les
femmes sont dotées, dans le discours managérial actuel, de toutes les qualités et de toutes
les vertus et sont à cet égard un véritable atout pour les entreprises. Par le discours mettant
en avant les spécificités féminines, il apparaît que la société lie donc la question du sexe
comme un facteur de diversité qui améliore la performance (Landrieux-Kartochian, 2005 ;
Jonas & Séhili, 2009). Ainsi, par leurs qualités, différentes, les femmes seraient un facteur
de diversité en entreprise et contribuerait à la performance des groupes de travail.
B) Egalité et diversité : comment concilier ces deux idéaux ? Le concept de diversité est séduisant puisqu’il permet de concilier deux approches a
priori incompatibles : celle de la lutte contre les inégalités et la question de la performance
économique (puisque les politiques de lutte contre les discriminations sont vues le plus
souvent comme ayant un coût). La notion de diversité apporte donc une nouvelle vision,
plus « positive » et pragmatique alors même que les politiques d’égalité traditionnelles
offrent une image plus négative, se positionnant plus sur des principes d’éthique et
s’appuyant sur la force des normes juridiques (Laufer, 2009).
On a ainsi vu, lentement, la notion de « diversité » remplacer celle « d’égalité »
dans les politiques en faveur de l’emploi des femmes. Le concept de « diversité » a pour
80
principal avantage de mettre en avant de multiples différences non définies, aussi bien
visibles, qu’invisibles. Toutefois, on oublie trop souvent que diversité ne signifie pas
égalité. Parce que la notion de diversité est plus large, on peut analyser ce glissement
sémantique comme une manière de fondre les discriminations entre les hommes et les
femmes parmi les autres formes de ségrégations, voire même comme une mise en
concurrence15. En mettant en avant la diversité, il existe un risque de perdre l’exigence
d’égalité. L’utilisation de cette notion ne serait-elle pas une manière « d’affadir » ou « de
diluer » le principe d’égalité, qui lui a une définition et une dimension juridique claire
(Laufer, 2009) ?
Finalement, on peut se demander si, la notion de « diversité » ne serait pas un
leurre (Meynaud et al., 2009). Les femmes se retrouvent ainsi parmi une « minorité comme
une autre », alors même qu’elles représentent la moitié de la population de chaque pays.
Les discriminations entre les hommes et les femmes ne sont pas des discriminations
comme les autres. Elles ont un caractère universel et transversal. A cet égard, les politiques
de diversité pourraient avoir pour effet de négliger, voire de gommer les inégalités entre les
hommes et les femmes au profit d’autres discriminations (Laufer, 2009). « Noyées » parmi
d’autres populations discriminées, on observe le plus souvent un retour des hommes au
détriment des femmes.
La notion de diversité, qui remplace aujourd’hui l’idéal d’égalité, n’offre en aucun
cas un objectif d’égalité et ne signifie que coexistence (Meynaud et al., 2009). De plus, elle
n’est emprunte d’aucune obligation juridique et ne possède nullement l’attribut de
sanctionnalité dont bénéficie le terme d’égalité. L’argument de la diversité a pour
conséquence de noyer la question de la discrimination entre les sexes parmi les autres
types de discriminations. Ces politiques marquent également la fin de la justification
éthique, remplacée par des justifications économiques (Wierink & Meda, 2005).
Les nouvelles stratégies managériales n’ont le plus souvent aucune intention de
réduction des inégalités professionnelles entre les hommes et les femmes. C’est la mise en
avant de la rationalité économique qui prime. Les politiques mises en œuvre n’ont que peu
15 En 2008, un label diversité a été créé en parallèle du label égalité. Cela témoigne en quelque sorte, d’une mise en concurrence entre diversité et égalité, alors même que c’est la notion de diversité, plus floue, moins exigeante et sans substance juridique qui semble prendre aujourd’hui le dessus (Amintas & Junter, 2009)
81
d’impact réel sur la place des femmes dans les entreprises, voire même parfois des effets
négatifs. Les politiques de diversité risquent de souligner les différences entre les hommes
et les femmes et de les enfermer dans des modèles traditionnels. Finalement, sous couvert
de bonnes idées sur la promotion des femmes dans les entreprises, il y aurait un risque de
voir un renforcement des idées différentialistes qui amènerait à justifier la place des
femmes dans les entreprises et dans la société, par leurs qualités propres, qu’elles soient
« naturelles » ou « culturelles » (Laufer & Paoletti, 2010). Toutefois, certains mettent en
avant l’idée qu’une plus grande diversité dans les entreprises pourrait permettre de
modifier les rapports sociaux qui les traverse au profit des femmes. En modifiant la culture
d’entreprise à dominante masculine, elles pourraient ainsi constituer une avancée pour
l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes (Laufer & Paoletti, 2010).
Section 2 : Le piège de l’essentialisme
L’égalité professionnelle est depuis des années portée par les féministes comme
une exigence d’égalité, d’égalité des chances et de démocratie. Mais, aujourd’hui, les
sciences de la gestion se sont emparées de la question de l’égalité professionnelle, en
contournant la question de l’éthique, et en promouvant l’égalité professionnelle de façon
ambiguë. La mixité suit alors des critères plus pragmatiques qu’éthiques, où la promotion
de la place des femmes en entreprise est perçue comme un vecteur de performance et
d’amélioration de l’image de la société. Finalement, on assiste à une sorte de storytelling
des managers, exploitant des discours visant à expliquer la réussite des entreprises par
leurs politiques sociales, notamment envers les femmes (Meynaud et al., 2009). Mais, sous
couvert de bonnes intentions, on observe le plus souvent un retour en force de
l’essentialisme et un enfermement des femmes dans des modèles féminins traditionnels.
I) « Qualités féminines » : le danger de l’essentialisme et la construction
sociale de la qualification.
On l’a vu, pour les entreprises, il n’est plus aujourd’hui question de nier les
différences entre les hommes et les femmes, mais bien d’en jouer (Jonas & Séhili, 2009).
Or, la valorisation de qualités différenciées entre les hommes et les femmes est dangereuse.
82
On peut douter de leur efficacité pour réduire les stéréotypes attachés aux hommes et aux
femmes sur le marché du travail ainsi que de leurs effets sur l’égalité professionnelle. En
conséquences, les qualités des femmes, alors perçues comme naturelles, rendent difficile la
reconnaissance de leurs qualifications.
A) Les qualités « naturelles » féminines : essentialisme et catégorisation des
aptitudes.
Historiquement, le travail des femmes n’est jamais apparu comme un travail
comme les autres, et les femmes comme un travailleur comme les autres. Le travail des
ouvrières en est un parfait exemple. Tout d’abord cantonnées à l’industrie du textile, les
femmes accèdent aux métiers de la métallurgie, de l’automobile et des produits électriques
pendant la première guerre mondiale, afin d’y remplacer les ouvriers partis au front. Cette
féminisation massive s’est traduite par une réorganisation des processus de production dès
la fin de la guerre. Celle-ci s’est effectuée, non pas selon les qualifications réelles des
ouvriers et ouvrières, mais selon les conceptions qu’avaient les patrons des usines en ce
que les différences entre les sexes pouvaient impacter positivement le travail sur les
chaînes de montage (Downs, 2006). On assiste donc à une répartition des tâches en
fonction des genres, mais masquées sous des différences de savoir-faire liés aux « qualités
naturelles » des deux sexes. Les femmes se retrouvent cantonnées aux tâches
« féminines », celles qui demandent de la méticulosité, de la rapidité et de la résistance aux
tâches répétitives. Cette division sociale des tâches a également eu pour conséquence la
naissance d’une échelle de salaire différente pour les hommes et les femmes, les ouvrières
étant inlassablement moins payées que leurs homologues masculins, alors même qu’ils
pouvaient réaliser le même travail, côte-à-côte.
Le discours managérial actuel tente de mettre en avant des différences de nature
entre les hommes et les femmes. Ces discours reposent sur la psychologie évolutionniste.
Cette approche de la psychologie tente ainsi de donner des raisons objectives aux
différences de comportement entre les hommes et les femmes, en utilisant des outils
scientifiques, tels que l’imagerie cérébrale, pour appuyer leur démarche. Selon la
psychologie évolutionniste, les hommes et les femmes n’utiliseraient pas les mêmes zones
de leur cerveau pour résoudre les problèmes. Ces différences seraient forgées par des
millions d’années d’évolution et les comportements actuels des hommes et des femmes
83
constitueraient en réalité le résultat d’adaptations. Les hommes « chasseurs » et les femmes
qui « gardaient les enfants » n’ont ainsi pas développés les mêmes aptitudes (Jonas, 2010).
Le cerveau des hommes et des femmes aurait donc été programmé différemment depuis
des millénaires et ces différentes aptitudes se retrouveraient encore aujourd’hui dans les
comportements différents des hommes et des femmes16. C’est ce qui expliquerait les
différences comportementales « naturelles » entre les hommes et les femmes, omettant
ainsi la question de la socialisation différentielle sexuée. Or, la majorité des études récentes
sont en désaccord avec cette vision sexuée de la psychologie et montrent que la variabilité
cérébrale individuelle prédomine sur les différences entre les sexes (Jonas & Séhili, 2009 ;
Jonas, 2010). En niant la force de la socialisation différenciée qui peut exister entre les
hommes et les femmes et en érigeant leurs différences comme relevant de la nature, ce
nouveau discours ne fait finalement que renforcer des comportements différents, basés sur
des modèles figés de « l’ » homme et de « la » femme.
Les différences entre les hommes et les femmes, ainsi perçues comme naturelles et
complémentaires, sont valorisées et essentialisées par le discours managérial afin de
modifier le comportement des salariés selon des logiques de pacifications des relations, de
rentabilité et de performance (Meynaud et al., 2009). La mise en avant des qualités
féminines est dangereuse car elle concourt à la catégorisation de ces qualités, renforçant les
stéréotypes à l’égard des deux sexes (Landrieux-Kartochian, 2004). Pour les femmes, le
danger est que seules leurs qualités dites féminines soient mises en avant, au détriment
d’autres, notamment celles traditionnellement vues comme masculines et qui restent plus
mises en valeur dans le monde professionnel.
Le discours essentialiste est donc ambigu car certes, il permet de mettre en avant
les qualités et les capacités des femmes mais, il accrédite l’idée que les femmes sont
présentes à leur poste, non pas pour leurs qualités individuelles, mais bien pour leurs
« qualités de femmes ». De là à dire que des femmes accèdent à des postes à responsabilité
uniquement parce que ce sont des femmes, il n’y a qu’un pas (Jonas & Séhili, 2009).
Focalisés sur le genre et les prétendues qualités qui en découlent, les managers ne sont plus
16 Serge Ginger : « L’homme s’est adapté à la chasse sur de grands espaces […] Le cerveau de la femme, pendant ce temps, s’est adapté à l’élevage de sa progéniture et au partage verbal, dans le cadre restreint de la grotte. Ainsi, sur le plan biologique, les hommes sont programmés pour la compétition, les femmes pour la coopération » (Serge Ginger, 2002, « Conférence : cerveau féminin/cerveau masculin », 3e congrès mondial de psychothérapie, Vienne, disponible sur : www.pedagoPsy.eu/serge_ginger.htm), cité par Irène Jonas (2010).
84
capables de reconnaître les qualités individuelles des femmes. Cette essentialisation des
qualités conduit à nier également les freins qui limitent la profession des femmes au sein
de leur entreprise (Jonas, 2010). Ce discours reproduit donc les discriminations puisque les
qualités des femmes mises en avant sont naturelles et donc ne sont pas le fruit du mérite et
du travail. Les femmes sont dévalorisées dans leur travail (Jonas & Séhili, 2009).
B) Qualités féminines naturelles et négation de la qualification.
Aujourd’hui encore, on retrouve une différence entre les qualifications des femmes
et des hommes dans le travail. Les compétences utilisées pour les femmes sont le plus
souvent déniées, car perçues comme « naturelles ». A l’inverse, celles des hommes sont
vues comme le fruit de la formation et de l’expérience professionnelle (Cacouault-Bitaud,
2005). Cette négation de la qualification a une répercussion sur la vision d’une même
tâche, qu’il soit réalisé par un homme ou par une femme, ce qui entraine un « processus de
hiérarchisation à qualité comparable » entre les hommes et les femmes.
La qualification est ainsi la conséquence d’une construction sociale. Comme l’ont
montré Margaret Maruani et Chantal Nicole en 1989 dans « Au labeur des dames. Métiers
masculins, emplois féminins », dans les secteurs fortement masculins, l’essentiel des
emplois occupés par les femmes sont non qualifiés alors que les emplois qualifiés sont
l’apanage des hommes. Dans leur étude, elles montrent comment l’évolution du travail des
« typos » (les hommes, anciens ouvriers du livre) et des « clavistes » (les femmes) s’est
accompagné d’un processus de réaffirmation de la division sexuelle du travail. La
modernisation du métier s’est réalisée en maintenant une différenciation entre les hommes
« typos » et les femmes « clavistes », autour de petits détails de compétences, de tâches
(comme la justification et la correction finale des textes) et de matériels utilisés. Cette
évolution en parallèle de deux métiers si proche au départ a pour conséquence de
cantonner les femmes à des postes subalternes, non qualifiés, alors que les hommes ont des
postes qualifiés et sont les supérieurs hiérarchiques des « clavistes ». Ajoutons à cela que
la dextérité des femmes dactylographes est perçue comme naturelle, et on comprend mieux
comment cette stratégie de différenciation sexuée a réussi à nier le savoir-faire des femmes
qui n’a ainsi jamais été traduit en qualification (O’Reilly, 1990). La qualification n’est pas
le résultat d’une différenciation technique mais bien d’une contestation sociale, « d’un
marchandage social » entre les ouvriers du livre et les patrons (Maruani, 2011).
85
Le secteur du bâtiment offre un bon exemple de ce phénomène. Ce milieu a l’image
d’un bastion masculin, dans lequel très peu de femmes travaillent. Or, en réalité, beaucoup
de femmes travaillent dans le milieu du bâtiment, notamment dans les postes
administratifs, qualifiés « d’improductifs ». Parce que la figure du salarié du milieu du
bâtiment est construite autour de l’image du « maçon », homme, qui travaille sur les
chantiers, les femmes sont invisibles (Gallioz, 2006). Cette figure centrale est également
construite autour des notions de force physique et de virilité, ce qui exclut les femmes de
ce milieu professionnel, celles-ci étant vues comme fragiles, sans grande force physique17.
Les femmes qui travaillent dans le secteur du bâtiment, même celles qui occupent des
fonctions « productives » font figure d’exception, surtout dans le gros œuvre. Même les
femmes qui travaillent dans ce milieu masculin, qui occupent les mêmes postes que les
hommes, souffrent d’un préjugé d’incompétence. Cependant, elles sont plus facilement
acceptées dans des travaux requérants de la minutie, comme la peinture en intérieur, le
travail du bois ou la taille de pierre. Ainsi, lorsqu’elles sont acceptées, c’est pour des
travaux minutieux et répétitifs qui nécessitent la mise en avant de leurs qualités
spécifiques.
A écouter le discours actuel des managers teinté d’essentialisme et de
différentialisme, on est donc empli de réserves. Alors que ces politiques de gestion des
ressources humaines veulent mettre en avant l’égalité professionnelle et la fin des
discriminations dans le milieu professionnel, elles soulignent véritablement une spécificité
des femmes et du travail féminin. En mettant en avant les qualités spécifiquement
attribuées aux femmes, le discours essentialiste a pour conséquence de continuer à
enfermer les femmes dans des stéréotypes et dans un modèle traditionnel, de les maintenir
à des postes pour lesquels leurs qualités féminines sont utiles, comme la communication ou
la gestion des ressources humaines (Landrieux-Kartochian, 2004 ; Jonas, 2010). De plus, il
concourt à légitimer la place des femmes en entreprises uniquement par leurs qualités
spécifiques, à la fois naturelle et forgée par les discriminations, et donc à reconnaître que
leur place n’est due qu’à leur identité de femmes. Irène Jonas parle même d’un « sexisme
bienveillant » (2010). Parce que leurs qualités sont naturelles et non issues du travail, de la
17 Stéphanie Gallioz explique également comme les images de la femme fragile et de l’homme fort sont des constructions socio-historiques, forgées depuis le XIXème siècle.
86
formation ou de l’expérience professionnelle, ce discours conduit à entretenir un processus
de déqualification du travail des femmes.
On pourrait toutefois nuancer notre propos négatif en ajoutant que ces politiques
managériales peuvent permettre des avancées pour les femmes. Par exemple, elles leur
permettre de « percer » le plafond de verre et ainsi de contribuer à modifier le modèle
dominant traditionnel du manager masculin (Landrieux-Kartochian, 2004).
II) Des femmes obligées de se conformer au modèle féminin traditionnel.
« Vendues » par les sciences de la gestion comme un gage de performance pour les
entreprises, les femmes sont aujourd’hui contraintes de démontrer leurs qualités et de se
révéler performante, « comme par magie », sans même attendre d’obtenir un statut égal à
celui des hommes. En tant que femmes, on attend d’elles des qualités et des aptitudes au
travail particulières, féminines. L’essentialisme est réaffirmé, sous couvert de promotion
des femmes en entreprises. Les femmes employées se doivent d’être parées de toutes les
vertus et qualités que l’on prête habituellement et « naturellement » aux femmes : une
manière féminine de travailler, de manager des équipes, d’entretenir une relation avec les
clients (Meynaud et al., 2009). Les femmes n’auraient ainsi plus besoin de se conformer au
modèle masculin de comportement dans le travail. Aujourd’hui, c’est en mettant en avant
leurs qualités et aptitudes « de femmes » qu’elles peuvent réussir (Jonas, 2010).
Parce qu’il est bien ici question d’une construction sociale des aptitudes féminines,
toutes les femmes ne sont pas, bien entendu, dotée de tels « dons ». Selon le discours
actuel, les femmes qui accèdent aux postes à responsabilités sont des femmes qui « ne sont
plus complexées », sont « désinhibées » et qui n’ont plus « peur de réussir ». Ainsi, il est
sous-entendu que les femmes qui ne réussissent pas ne le doivent qu’à elles mêmes et à
leurs complexes. Il n’est nullement question ici des barrières sociales qui freinent
l’ascension professionnelle des femmes, mais uniquement de barrières psychologiques
individuelles (Jonas & Séhili, 2009). Pour celles qui ne font pas leurs preuves, qui n’ont
pas « les caractéristiques de leur sexe », il est difficile de répondre aux attentes des
employeurs qui les ont ainsi engagés parce qu’elles ont telles ou telles qualités. On a vu
donc apparaître des formations et des activités de coaching spécifiques pour les femmes,
87
afin de réveiller - ou révéler - ces aptitudes naturelles. Il suffirait d’abattre leurs freins
intérieurs pour que les femmes deviennent performantes. Les incapacités individuelles sont
alors vues comme les seules causes des difficultés des femmes. Seules elles peuvent
changer les choses. Tous les obstacles sociaux sont oubliés, faisant porter toute la
responsabilité à une seule et unique personne, occultant par la même occasion la
responsabilité des dirigeants et des recruteurs.
Le coaching, personnel, est alors mis en avant comme la solution. Celui-ci entend
régler les difficultés que les femmes sont censées rencontrer spécifiquement : « se mettre
en avant » ; « être plus positive » ; « se donner la permission de réussir » ; « savoir recevoir
les critiques sans être touchées personnellement » ; « dépasser ses blocages »18 (Lanzmann,
2012).
Le problème du développement du coaching pour les femmes est qu’il laisse
entendre que si les femmes réussissent moins bien que les hommes, c’est à cause de
défauts personnels, qu’il convient alors de gommer, et non parce qu’il existe des blocages
insidieux institutionnalisés qui freinent l’ascension professionnelle des femmes (Meynaud
et al., 2009). Le coaching essaie donc de contourner le problème de la discrimination
professionnelle. Irène Jonas et Djaouida Séhili (2009) parlent même du coaching comme
d’une violence puisqu’il vise à faire accepter par les femmes et à intérioriser les difficultés
et obstacles qu’elles rencontrent dans le monde professionnel, afin d’atteindre le sentiment
d’une « soumission librement consentie ».
Alors que les nouveaux modes de management, fondés sur des approches plus
pragmatiques de performance, peuvent constituer une approche originale de favorisation de
la place des femmes en entreprises, ils ne font finalement que renforcer les stéréotypes à
l’égard des hommes et des femmes. Le problème est qu’ils se fondent sur l’existence de
différences de nature entre les hommes et les femmes, ce qui concourt à figer les deux
sexes dans les modèles que l’on attend d’eux (Jonas & Séhili, 2009). Les femmes, mais
aussi les hommes, deviennent obligés de se conformer aux attentes des entreprises. En cas
d’échec des femmes, les raisons ne sont ainsi plus que personnelles et les freins sociaux et 18 Ces difficultés spécifiques aux femmes sont décrites par Chine Lanzmann, dans son livre Guide de l’Autocoaching pour les femmes.
88
institutionnels à la promotion des femmes sont oubliés. La mise en avant des différences
met également en lumière un caractère naturel des qualités et qualifications féminines, ce
qui conduit à les mésestimer.
De plus, la mise en avant de la notion de diversité dans le milieu professionnel,
sous couvert de bonnes intentions, se fait au détriment des principes éthiques d’égalité et
de non discrimination. Finalement, ce nouvel outil de gestion des entreprises, apparaît
comme une manière pour le libéralisme, de récupérer la question de l’égalité
professionnelle, et de la vider de sa substance politique et éthique. On assiste donc à un
retournement des idéaux humanistes et progressistes par les dirigeants d’entreprise pour
réinventer le capitalisme, en engendrant de nouvelles sources de profits tout en gardant une
image positive de mise en valeur de la diversité (Meynaud et al., 2009).
89
Conclusion
Cette étude avait pour ambition d’évaluer la pertinence de la mise en place
d’arguments utilitaires dans les nouvelles stratégies de réduction des inégalités. Ce nouvel
argumentaire apparaît ainsi comme une véritable motivation, à la fois pour les
gouvernements, mais également pour les entreprises. A ce titre, et parce que les nouvelles
stratégies de réduction des inégalités entendent mobiliser aussi bien les pouvoirs publics
que les acteurs privés, elles apparaissent comme un véritable moteur de changement.
L’égalité entre les hommes et les femmes agit sur la croissance à plusieurs égards.
D’une part, une plus grande égalité aurait pour conséquence une plus grande place des
femmes dans l’emploi. Plus présentes sur le marché du travail, les femmes, qui constituent
une main d’œuvre éduquée, augmenteraient la taille de la population active qui constitue
une source quantitative de la croissance. Par d’autres effets, indirects cette fois-ci, comme
le maintien d’un taux de fécondité plutôt élevé, l’amélioration de la situation des femmes
permettrait d’élargir la population en âge de travailler et de la renouveler, constituant ainsi
une solution au vieillissement effective de la population active en Europe. Une étude de
l’OCDE a calculé qu’une égalité « parfaite » entre les hommes et les femmes en termes
d’activité engendrerait une augmentation supplémentaire du PIB de 12% sur 20 ans pour
l’ensemble des pays de l’OCDE. Pour la France, cette augmentation serait plus faible, mais
toutefois loin d’être négligeable, aux alentours de 8%.
De plus, une meilleure prise en compte des femmes en entreprise permettrait de
leur donner la place qu’elles méritent, au sommet des organisations. La mise en place de
politiques de féminisation des entreprises concourt ainsi à une utilisation plus optimale du
capital humain que sont les femmes. Même s’il y a un risque d’affronter un retour en force
de l’essentialisme, le développement de politiques actives de féminisation au sein des
entreprises et de leur top management pourrait finalement concourir à fissurer le plafond
de verre.
Pour atteindre les objectifs d’égalité, le chemin est encore long à parcourir. Au
niveau éducatif, les filles et les garçons bénéficient des mêmes investissements étatiques.
Toutefois, alors même que les filles réussissent mieux que les garçons à l’école, elles
90
rentabilisent moins leur bagage scolaire que les garçons. Cette différence de rentabilité des
études, ajoutée à des discriminations persistantes sur le marché du travail, participe à
rendre le marché du travail sous-optimal, où les femmes ne trouvent pas un emploi en
adéquation avec leurs qualifications.
Toutefois, l’utilisation d’un argument utilitariste pour favoriser l’égalité peut
s’avérer dangereuse. En entreprise, elle court le risque de vouloir mettre en avant des
qualités spécifiquement féminines et donc de renforcer les images stéréotypées que l’on
attribue le plus souvent aux femmes. De plus, la mise en avant de thèses utilitaristes peut
entrainer un bouleversement de la hiérarchie des valeurs, en substituant aux impératifs
d’égalité et d’éthique, la notion de performance économique.
91
Annexes
Annexe 1 : prévisions de croissance ............................................................................. 92 1.1 - Augmentation potentielle du PIB dans les pays membres de l’Union Européenne .................. 92 1.2 - Convergence des taux d’activité masculin et féminin et population active ............................. 93 1.3 - Estimation de la taille de l’économie en PIB, 2011-2030, selon trois scénarios. ..................... 96 Annexe 2 : taux de fécondité ....................................................................................... 99 2.1- Taux de fécondité ....................................................................................................................... 99 Annexe 3 : les textes législatifs et actions gouvernementales .................................... 101 3.1 – Extraits de la loi sur le travail des enfants, des filles mineures et des femmes dans les établissements industriels. ............................................................................................................... 101 3.2 – Lettre de Najat Vallaud-Belkacem aux dirigeants des 528 plus grandes entreprises de France pour les encourager à féminiser leur gouvernance. ......................................................................... 102 Annexe 4 : Education. ................................................................................................ 104 4.1 - Taux de retard dans le secteur public, selon le niveau, en 2011-2012 .................................... 104 4.2 - Résultats du baccalauréat général, par spécialité, 2011 .......................................................... 104 4.3 - Diplôme le plus élevé obtenu par les élèves entrés en sixième en 1995 ................................. 104 4.4 - Ecart de scores au PISA en compréhension de l'écrit, sciences et mathématiques ................. 105 4.5 - Pourcentage des garçons et des filles qui lisent pour le plaisir ............................................... 105 4.6 - Part des filles dans les différentes formations d'enseignement supérieur ............................... 106 4.7 - Proportion des diplômes de l’enseignement supérieur décernés à des femmes ...................... 107 4.8 - Répartition des diplômés occupant des professions intellectuelles et scientifiques et intermédiaires .................................................................................................................................. 108 Annexe 5 : L’activité et l’emploi des femmes et des hommes ..................................... 109 5.1 - The « Lisbon Gap » en 2007 ................................................................................................... 109 5.2 - Part des femmes dans la population active, Union Européenne, 1983-2009 .......................... 110 5.3 - Taux d'emploi des femmes et des hommes en Europe ........................................................... 111 5.4 - Taux d'activité des femmes et des hommes selon le nombre et l'âge des enfants .................. 112 5.5 - Les 12 familles professionnelles où se concentrent les emplois des femmes ......................... 113 5.6 - Répartition des créations d'entreprise par secteur d'activité selon le sexe ............................. 114 5.7 - Taux d'activité des femmes et des hommes par tranche d'âge, 1978-2011 ............................. 114 5.8 - Taux d'activité des femmes de 25 à 49 ans, Union Européenne, 1983 à 2010 ....................... 115 5.9 - Taux de chômage masculin et féminin dans l’Union Européenne .......................................... 116 5.10 - Taux de chômage* masculin et féminin, 1983-2010, Union Européenne ............................ 117 5.11 - Classement des pays européens selon le plus ou moins grand écart entre la part des hommes et la part des femmes qui est à temps partiel ................................................................................... 118 5.12 - Proportion d'emplois à temps partiel en 2011 ....................................................................... 119 5.13 - L’emploi à temps partiel en Union Européenne ................................................................... 119 5.14 - Taux de temps partiel par sexe et âge ................................................................................... 120 5.15 - Inactivité et temps partiel des femmes dus à un manque de service de garde des enfants et autres personnes dépendantes. ......................................................................................................... 120 5.16 - Proportion de femmes parmi les cadres et professions intellectuelles supérieures ............... 121 5.17 - Ecarts de rémunération horaire brute entre les femmes et les hommes ................................ 121
92
Annexe 1 : prévisions de croissance
1.1 - Augmentation potentielle du PIB dans les pays membres de l’Union Européenne suivant une transition vers une égalité pleine entre les hommes et les femmes sur le marché
du travail et distribution en pourcentage de cette augmentation potentielle.
Source : Eurostat, Labour Force Survey et Rapport de la commission européenne sur l’égalité entre les hommes et les femmes (2009)
Repéré à : Löfström, Gender Equality, Growth and Employment
Total Employment Part-time Productivity rate measured by wage
Malta 45 80 16 4
Greece 41 57 22 21
Netherlands 40 20 52 28
Ireland 35 34 45 21
United Kingdom 35 23 49 27
Italy 32 65 29 6
Austria 32 33 29 38
Spain 32 55 20 25
Czech 32 46 19 35
Slovakia 30 46 16 37
Germany 29 28 34 38
Cyprus 29 47 14 39
Luxembourg 27 49 35 16
Hungary 27 45 26 29
Estonia 27 22 17 61
Belgium 26 42 42 16
Denmark 23 23 39 38
Poland 21 55 29 16
France 21 36 28 37
Sweden 21 16 41 43
Lithuania 20 23 27 50
Romania 20 53 17 30
Finland 19 14 32 54
Latvia 18 35 23 43
Portugal 16 57 18 25
Bulgaria 15 47 12 41
Slovenia 14 54 18 28
EU average (unweighted) 27 41 28 31
* Data refers to 2007.
Source: EU Labour Force Survey and EU Commission Report on Gender Equality (2009)
93
1.2 - Convergence des taux d’activité masculin et féminin et population active
Scénario du statu quo : les prévisions relatives à la taille de la population active totale (15 à 64 ans), si les taux d’activité de la population active pour les hommes et les femmes restent constants de 2011 à 2030, à un niveau identique à celui observé en 2010. Convergence des taux d'activité : les prévisions relatives à la taille de la population active totale (15 à 64 ans), si le taux d'activité de la population active pour les hommes reste constant de 2011 à 2030, à un niveau identique à celui observé en 2010, et si le taux pour les femmes augmente progressivement (taux de croissance à l'état stationnaire) de 2011 à 2030 pour rejoindre le taux d'activité 2010 des hommes d'ici 2030. Convergence de l'intensité de l'activité : les prévisions relatives à la taille de la population active totale (15 à 64 ans), si le taux en équivalent plein-temps pour les hommes reste constant de 2011 à 2030, à un niveau identique à celui observé en 2010, et si le taux équivalent plein temps des femmes augmente progressivement (taux de croissance à l'état stationnaire) de 2011 à 2030 pour rejoindre le taux équivalent plein temps 2010 des hommes d'ici 2030. Le taux équivalent plein temps est calculé à partir du taux d’activité de la population active, multiplié par le nombre moyen d’heures habituellement travaillées par semaine par tous les salariés hommes et femmes respectivement, et divisé par 40.
Source : OCDE, Inégalité hommes-femmes, il est temps d’agir, 2012
94
Prévisions de hausse et de baisse de la population active entre 2011 et 2030
Population
active totale en 2011 (millions)
Hausse/baisse projetée de la population active totale en 2030 en pourcentage des niveaux observés en 2011
Scénario de statu-quo Convergence des taux d'activité
Convergence de l'intensité de
l'activité Australie 11,47 19,1 28,5 47,4 Autriche 4,29 -3,6 3,5 17,4 Belgique 4,89 3,2 11,6 23,9 Canada 18,38 2,3 6,8 .. Chili 7,68 7,2 27,6 36,8 République tchèque 5,09 -9,9 0,5 5,1
Danemark 2,88 -2,7 1,2 8,6 Estonie 0,67 -10,5 -7,2 -4,1 Finlande 2,64 -4,2 -1,7 3,8 France 28,72 -0,8 5,0 14,1 Allemagne 41,98 -11,9 -5,7 8,2 Grèce 5,15 -6,0 7,7 14,1 Hongrie 4,27 -10,1 -2,2 -0,3 Islande 0,18 2,9 6,1 19,1 Irlande 2,06 12,0 23,4 39,7 Israël 3,06 34,2 41,6 .. Italie 24,00 -8,2 7,1 18,6 Japon 59,96 -16,8 -5,3 .. Corée 24,01 -9,5 4,9 10,5 Luxembourg 0,22 8,9 20,8 34,2 Mexique 46,59 12,1 43,4 59,1 Pays-Bas 8,73 -6,0 0,3 22,2 Nouvelle Zélande 2,21 3,7 11,2 26,6 Norvège 2,47 5,3 8,6 18,2 Pologne 17,80 -14,8 -6,5 -1,4 Portugal 5,27 -3,4 1,8 6,3 République slovaque 2,68 -11,0 -2,1 0,4
Slovénie 1,01 -10,3 -5,6 -2,9 Espagne 22,51 -5,1 4,0 12,5 Suède 4,77 0,5 3,8 9,9 Suisse 4,39 0,2 7,2 27,6 Turquie 26,25 15,0 45,2 56,2 Royaume-Uni 31,43 2,8 10,5 26,5 Etats-Unis 154,74 9,2 17,0 .. Brésil 98,81 13,0 28,0 .. Fédération de Russie 74,80 -13,5 -7,9 ..
95
Scénario du statu quo : les prévisions relatives à la taille de la population active totale (15 à 64 ans), si les taux d’activité pour les hommes et les femmes restent constants de 2011 à 2030, à un niveau identique à celui observé en 2010. Convergence des taux d'activité : les prévisions relatives à la taille de la population active totale (15 à 64 ans), si le taux d'activité pour les hommes reste constant de 2011 à 2030, à un niveau identique à celui observé en 2010, et si le taux pour les femmes augmente progressivement (taux de croissance à l'état stationnaire) de 2011 à 2030 pour rejoindre le taux d'activité 2010 des hommes d'ici 2030. Convergence de l'intensité de l'activité : les prévisions relatives à la taille de la population active totale (15 à 64 ans), si le taux en équivalent plein-temps pour les hommes reste constant de 2011 à 2030, à un niveau identique à celui observé en 2010, et si le taux équivalent plein temps des femmes augmente progressivement (taux de croissance à l'état stationnaire) de 2011 à 2030 pour rejoindre le taux équivalent plein temps 2010 des hommes d'ici 2030. Le taux équivalent plein temps est calculé à partir du taux d’activité, multiplié par le nombre moyen d’heures habituellement travaillées par semaine par tous les salariés hommes et femmes respectivement, et divisé par 40.
Source : OCDE, Inégalité hommes-femmes, il est temps d’agir, 2012
96
1.3 - Estimation de la taille de l’économie en PIB, 2011-2030, selon trois scénarios. En milliards de dollars.
Pas de changement : l'écart entre le taux d'activité des hommes et celui des femmes se stabilise au niveau observé en 2010 (conformément au scénario de croissance présenté dans la Base de données à long terme des Perspectives économiques de l'OCDE, n°91). Diminution de 50 % de l'écart hommes-femmes : l'écart entre le taux d'activité des hommes et celui des hommes en 2010 diminue de 50 % d'ici à 2013, à la faveur d'une progression soutenue de l'activité des femmes. Convergence des taux d'activité : l'écart observé en 2010 entre le taux d'activité des hommes et celui des femmes est totalement comblé en 2030, à la faveur d'une progression soutenue de l'activité des femmes. Ce scénario repose donc sur l'hypothèse d'une convergence totale du taux d'activité des femmes avec celui des hommes d'ici à 2030.
Source : OCDE, Inégalité hommes-femmes, il est temps d’agir, 2012
97
Estimation du taux de croissance annuel moyen du PIB et du PIB par habitant en USD PPA 2005
Taux d'activité
stable
Diminution de 50 % de l'écart hommes-femmes en termes de taux d'activité
d'ici à 2030
Diminution de 75 % de l'écart hommes-femmes
en termes de taux d'activité d'ici à 2030
Diminution de 100 % de l'écart hommes-femmes
en termes de taux d'activité d'ici à 2030
PIB (1)
PIB /Hab (2)
PIB (3)
PIB /Hab (4)
Hausse du PIB /Hab: (4) - (2)
PIB (5)
PIB /Hab (6)
Hausse du PIB /Hab: (6) - (2)
PIB (7)
PIB /Hab (8)
Hausse du PIB /Hab: (8) - (2)
OCDE 2,2 1,8 2,5 2,1 0,3 2,6 2,3 0,5 2,7 2,4 0,6 Australie 3,3 2,0 3,5 2,2 0,2 3,7 2,4 0,4 3,8 2,5 0,5 Autriche 1,9 1,5 2,1 1,8 0,3 2,3 1,9 0,4 2,4 2,1 0,6 Belgique 2,5 1,8 2,8 2,1 0,3 2,9 2,3 0,5 3,1 2,4 0,6 Canada 2,1 1,4 2,2 1,6 0,2 2,3 1,7 0,3 2,4 1,8 0,4 République tchèque
2,4 2,6 2,8 3,0 0,4 3,0 3,2 0,6 3,2 3,4 0,8
Danemark 1,5 1,2 1,6 1,4 0,2 1,7 1,5 0,3 1,8 1,5 0,3 Estonie 3,2 3,4 3,5 3,7 0,3 3,6 3,8 0,4 3,7 3,9 0,5 Finlande 2,4 1,9 2,5 2,0 0,1 2,5 2,1 0,2 2,6 2,2 0,3 France 2,1 1,7 2,3 1,9 0,2 2,5 2,0 0,3 2,6 2,1 0,4 Allemagne 1,5 1,6 1,8 1,8 0,2 1,9 2,0 0,4 2,0 2,1 0,5 Grèce 1,7 1,7 2,1 2,1 0,4 2,4 2,4 0,7 2,6 2,6 0,9 Hongrie 2,6 2,8 2,9 3,1 0,3 3,1 3,3 0,5 3,2 3,4 0,6 Islande 1,9 1,5 2,0 1,6 0,1 2,0 1,7 0,2 2,1 1,7 0,2 Irlande 2,3 1,6 2,6 1,9 0,3 2,7 2,1 0,5 2,9 2,2 0,6 Israël 2,9 1,2 3,1 1,4 0,2 3,2 1,5 0,3 3,3 1,6 0,4 Italie 1,2 1,4 1,7 1,9 0,5 2,0 2,2 0,8 2,2 2,4 1,0 Japon 1,0 1,5 1,5 1,9 0,4 1,7 2,1 0,6 1,9 2,3 0,8 Corée 2,8 2,5 3,3 3,0 0,5 3,5 3,2 0,7 3,7 3,4 0,9 Luxembourg
1,4 0,8 1,7 1,1 0,3 1,9 1,3 0,5 2,0 1,4 0,6
Pays-Bas 1,9 1,6 2,2 1,9 0,3 2,3 2,0 0,4 2,4 2,1 0,5 Nouvelle Zélande
2,3 1,8 2,5 2,0 0,2 2,6 2,1 0,3 2,7 2,2 0,4
Pologne 2,4 2,7 2,8 3,0 0,3 3,0 3,2 0,5 3,1 3,4 0,7 Portugal 1,8 1,6 2,0 1,9 0,3 2,1 2,0 0,4 2,2 2,1 0,5 République slovaque
2,8 2,9 3,1 3,2 0,3 3,3 3,4 0,5 3,5 3,6 0,7
Slovénie 1,9 1,9 2,2 2,2 0,3 2,3 2,3 0,4 2,4 2,4 0,5 Espagne 1,8 1,9 2,1 2,2 0,3 2,3 2,4 0,5 2,4 2,5 0,6 Suède 2,4 1,9 2,6 2,1 0,2 2,6 2,1 0,2 2,7 2,2 0,3 Suisse 2,5 1,9 2,7 2,2 0,3 2,9 2,3 0,4 3,0 2,4 0,5 Royaume-Uni
2,1 1,4 2,3 1,7 0,3 2,4 1,8 0,4 2,6 1,9 0,5
Etats-Unis 2,6 1,7 2,9 1,9 0,2 3,0 2,0 0,3 3,1 2,2 0,5
98
Taux d’activité stable : Pas de changement : l'écart entre le taux d'activité des hommes et celui des femmes se stabilise au niveau observé en 2010 (conformément au scénario de croissance présenté dans la Base de données à long terme des Perspectives économiques de l'OCDE, n°91). Diminution de 50 % de l'écart hommes-femmes : l'écart entre le taux d'activité des hommes et celui des hommes en 2010 diminue de 50 % d'ici à 2013, à la faveur d'une progression stable de l'activité des femmes. Diminution de 75 % de l'écart hommes-femmes : l'écart entre le taux d'activité des hommes et celui des hommes en 2010 diminue de 75 % d'ici à 2013, à la faveur d'une progression stable de l'activité des femmes. Convergence des taux d'activité : l'écart observé en 2010 entre le taux d'activité des hommes et celui des femmes disparaît en 2030, à la faveur d'une progression stable de l'activité des femmes. Ce scénario repose donc sur l'hypothèse d'une convergence totale du taux d'activité des femmes avec celui des hommes d'ici à 2030.
Source : OCDE, Inégalité hommes-femmes, il est temps d’agir, 2012
99
Annexe 2 : taux de fécondité
2.1- Taux de fécondité
1980 1990 2010 Evolution (1980-2010)
Union européenne (27 pays) Allemagne 1,56 1,45 1,39 -10,90% Autriche 1,65 1,46 1,44 -12,73% Belgique 1,68 1,62 1,84 9,52% Bulgarie 2,05 1,82 1,49 -27,32% Chypre 2,42 - 1,46 -39,67% Danemark 1,55 1,67 1,88 21,29% Espagne 2,2 1,36 1,37 -37,73% Estonie - - 1,64 - Finlande 1,63 1,78 1,87 14,72% France métropolitaine 1,95 1,78 2 2,56% Grèce 2,23 1,39 1,55 -30,49% Hongrie 1,91 1,87 1,26 -34,03% Irlande 3,24 2,11 2,07 -36,11% Italie 1,64 1,33 1,41 -14,02% Lettonie 1,9 2 1,18 -37,89% Lituanie 1,99 2,03 1,55 -22,11% Luxembourg 1,49 1,6 1,63 9,40% Malte 1,98 2,04 1,44 -27,27% Pays-Bas 1,6 1,62 1,75 9,37% Pologne 2,26 2,05 1,38 -38,94% Portugal 2,25 1,57 1,32 -41,33% République tchèque 2,1 1,9 1,49 -29,05% Roumanie 2,43 1,84 1,3 -46,50% Royaume-Uni 1,89 1,83 1,98 4,76% Slovénie 2,1 1,46 1,4 -33,33% Slovaquie 2,31 2,09 1,57 -32,03% Suède 1,68 2,13 1,99 18,45%
100
Autres pays européens Albanie 3,62 3 1,4 -61,33% Biélorussie 2,04 1,9 1,49 -26,96% Bosnie-Herzégovine - - 1,19 - Croatie 1,92 1,67 1,46 -23,96% Islande 2,48 2,3 2,2 -11,29% Liechtenstein - 1,6 1,3 - Macédoine - - 1,6 - Moldavie 2,41 2,39 1,31 -45,64% Monténégro - - 1,77 - Norvège 1,72 1,93 1,95 13,37% Russie 1,86 1,9 1,59 -14,52% Serbie - - 1,41 - Suisse 1,55 1,58 1,52 -1,94% Ukraine 1,95 1,89 1,39 -28,72% Autres pays développés Australie 1,89 1,9 1,9 0,53% Canada 1,64 1,68 1,7 3,66% Etats-Unis 1,85 2,08 2 8,11% Israël 2,76 2,69 3 8,70% Japon 1,76 1,54 1,4 -20,45% Nouvelle-Zélande 2,02 2,16 2,2 8,91%
Source : Eurostat et ONU
101
Annexe 3 : les textes législatifs et actions gouvernementales
3.1 – Extraits de la loi sur le travail des enfants, des filles mineures et des femmes dans les établissements industriels. 2 novembre 1892
Cette loi s’applique à tous les établissements, à l’exclusion de ceux où ne sont employés que les membres de la famille, sous l’autorité du père, de la mère ou du tuteur. Elle fixe l’âge du travail des enfants à 13 ans et limite la durée du travail des enfants de moins de seize ans à dix heures par jour. Pour les femmes (et les filles), la durée de la journée de travail « effectif » ne doit pas excéder onze heures. Le travail de nuit est aussi réglementé : les enfants de moins de dix-huit ans, les filles de moins de vingt et un ans et les femmes ne peuvent être employés à aucun travail de nuit. Le travail de nuit est toutefois autorisé de 4 heures du matin à 10 heures du soir s’il est réparti entre deux postes ne travaillant pas plus de neuf heures chacun. Des dérogations sont prévues par la loi : certaines industries pourront bénéficier de dérogations permanentes ; dans d’autres cas, le travail pourra être prolongé jusqu’à 11 heures du soir pendant un durée n’excédent pas soixante jours. Les enfants de moins de dix-huit ans et les femmes ne peuvent être employés plus de six jours par semaine, ni les jours fériés (sauf sous certaines conditions dans les usines à feu continu). Les filles et les femmes ne peuvent effectuer les travaux souterrains (mines, carrières), ni être employées (de même que les enfants) dans des établissements insalubres ou dangereux (sauf sous conditions spéciales). Les accidents du travail doivent faire l’objet d’une déclaration. Les chefs d’établissement doivent aussi « veiller au maintien des bonnes mœurs et à l’observation de la décence publique ». Un corps d’inspecteurs est chargé de l’application de la loi.
Source : journal officiel, n°298, mercredi 2 et jeudi 2 novembre 1892, p. 5313-5316.
Repéré à : F. Battagliola (2008), Histoire du travail des femmes, 3e éd., Paris, La Découverte « Repères », 128 pages. p44
102
3.2 – Lettre du jeudi 25 Juillet 2013 de Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des Femmes, porte-parole du Gouvernement, aux dirigeants des 528 plus grandes
entreprises de France pour les encourager à féminiser leur gouvernance.
MINISTERE DES DROITS DES FEMMES, PORTE-PAROLAT DU GOUVERNEMENT
La Ministre N/REF: CAB/NVB/TB/FM
Paris, le 24 juillet 2013 Monsieur le Président, Je suis heureuse que le Gouvernement puisse s’appuyer sur l’investissement de votre entreprise en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes. L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est d’abord une question de droit. Cette égalité est inscrite au cœur de notre pacte républicain, et rien ne saurait justifier que les droits des femmes ne soient pas respectés. L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est aussi un enjeu pour notre économie et votre entreprise. Elle est un des piliers de la qualité de vie au travail dont on connait l’importance pour la cohésion sociale, le bien-être des salariés et au final la performance des entreprises. La féminisation de la gouvernance des entreprises est un enjeu clé qui ne peut progresser qu’avec l’implication personnelle des dirigeants et de l’encadrement. Je connais votre implication sur ces questions. Elle est à la fois un résultat de l’égalité professionnelle mais aussi un puissant levier pour la développer. En effet, elle impose de mettre en place des politiques d’égalité professionnelle très structurées, s’agissant de la gestion des parcours par exemple, afin de permettre aux femmes d’accéder aux plus hautes responsabilités. Compte tenu de leur rôle dans la gouvernance des entreprises, les comités exécutifs et comités directeurs ne sauraient rester à l’écart de l’objectif de féminisation. J’ai donc décidé de rendre publics tous les ans des indicateurs relatifs à la féminisation des COMEX, CODIRS et de l’encadrement supérieur des entreprises du SBF 120. Ces données seront publiées en lien avec nos partenaires médias (BFM TV, Terrafemina et Challenges) annuellement dès l’automne 2013. J’ai confié le travail de gestion du questionnaire au cabinet Ethics and Boards, spécialisé dans la gouvernance des sociétés cotées, avec le soutien de la Caisse des dépôts et consignations. Vous trouverez ci-joint le guide pour renseigner ce questionnaire. Bien entendu la fiabilité et l’exhaustivité des informations que vous renseignerez sont essentielles.
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MINISTERE DES DROITS DES FEMMES, PORTE-PAROLAT DU GOUVERNEMENT !"#$%&%'()* #AB6CD<#E5FBAGFBHFBDI##
Paris, le 24 juillet 2013
Monsieur le Président,
Je suis heureuse que le Gouvernement puisse s’appuyer sur l’investissement de votre
entreprise en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes.
L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est d’abord une question de
droit. Cette égalité est inscrite au cœur de notre pacte républicain, et rien ne saurait justifier que
les droits des femmes ne soient pas respectés.
L’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes est aussi un enjeu pour notre
économie et votre entreprise. Elle est un des piliers de la qualité de vie au travail dont on
connait l’importance pour la cohésion sociale, le bien-être des salariés et au final la
performance des entreprises.
La féminisation de la gouvernance des entreprises est un enjeu clé qui ne peut
progresser qu’avec l’implication personnelle des dirigeants et de l’encadrement. Je connais
votre implication sur ces questions. Elle est à la fois un résultat de l’égalité professionnelle
mais aussi un puissant levier pour la développer. En effet, elle impose de mettre en place des
politiques d’égalité professionnelle très structurées, s’agissant de la gestion des parcours par
exemple, afin de permettre aux femmes d’accéder aux plus hautes responsabilités.
Compte tenu de leur rôle dans la gouvernance des entreprises, les comités exécutifs et
comités directeurs ne sauraient rester à l’écart de l’objectif de féminisation. J’ai donc décidé de
rendre publics tous les ans des indicateurs relatifs à la féminisation des COMEX, CODIRS et
de l’encadrement supérieur des entreprises du SBF 120. Ces données seront publiées en lien
avec nos partenaires médias (BFM TV, Terrafemina et Challenges) annuellement dès
l’automne 2013.
…/…
103
L’atteinte de l’objectif fixé par la loi n° 2011-103 du 27 janvier 2011 relative à la représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils d'administration et de surveillance et à l'égalité professionnelle rend nécessaire à mon sens que chacune des entreprises enrichisse et rende visible les viviers de femmes pouvant et souhaitant exercer un mandat d’administratrice. La réalité nous commande de reconnaître que les femmes qui peuvent parfaitement exercer un mandat d’administratrice sont déjà très nombreuses. Il faut néanmoins continuer et accélérer le mouvement en cours vers les dirigeantes de petite et moyenne entreprise et vers les femmes salariées des grandes entreprises et qui y occupent déjà des postes de responsabilité. Seule une démarche collective permettra à chaque entreprise d’atteindre son objectif. Aussi, je vous propose de désigner parmi les femmes salariées occupant des postes de direction dans votre entreprise, au moins deux d’entre elles, sur la base du volontariat, pouvant exercer un mandat d’administratrice. Cela implique que ces femmes soient libérées le temps nécessaire pour préparer et participer aux conseils d’administration. Cette expérience d’administratrice sera un atout supplémentaire valorisable dans leur propre parcours et profitable pour les entreprises dont elles sont salariées. Parce que la constitution de ce vivier doit pouvoir bénéficier à toutes les entreprises, j’ai engagé avec plusieurs partenaires, dont des réseaux professionnels féminins ou mixtes, le travail nécessaire pour en organiser l’accès selon des modalités, notamment de sécurité et de confidentialité, répondant aux contraintes des entreprises. Je vous tiendrai rapidement informé de l’avancement de ce travail. Nous ne pourrons faire avancer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes que par une mobilisation de tous et en agissant sur tous les leviers qui y participent. Je salue encore votre engagement pour faire avancer une cause qui n’est pas seulement celle des femmes mais qui relève d’un choix de société profitable à tous. Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l’assurance de ma considération distinguée.
Najat VALLAUD-BELKACEM
Les parties du texte en caractères gras ont été soulignées par nos soins.
Source : Ministère des droits des femmes, Féminisation des directions d’entreprises : la ministre écrit aux dirigeants, juillet 2013.
104
Annexe 4 : Education.
4.1 - Taux de retard dans le secteur public, selon le niveau, en 2011-2012
Taux de retard (%)
Classe Filles Garçons CP 3,7 5,3 CE1 7,4 9,5 CE2 9,1 11,7 CM1 10,7 13,3 CM2 12,3 15,4
Champs : France métropolitaine et DOM, hors Mayotte
Source : DEPP, Les élèves du premier degré / repères et références statistiques - édition 2012
Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des femmes, mars 2013
4.2 - Résultats du baccalauréat général, par spécialité, 2011
Type de baccalauréat
Taux de réussite (%)
Filles Garçons Ensemble Bac SES 89,4 85,3 87,8 Bac L 86,7 82,5 85,8 Bac S 91,5 87,9 89,5
Source : DEPP, Les élèves du premier degré / repères et références statistiques - édition 2012 Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des
femmes, mars 2013
4.3 - Diplôme le plus élevé obtenu par les élèves entrés en sixième en 1995 (%)
Diplôme le plus élevé obtenu Filles Garçons
Aucun diplôme 9,5 16 Brevet 7,1 7,8 CAP-BEP 13 18,8 Bac sans autre diplôme 20,3 19,7 Diplôme bac +2 12 11,5 Diplôme bac +3/4 21,8 10,3 Diplôme bac +5 16,3 15,8
Source : DEPP, Résultats, diplômes, insertion / repères et références statistiques - édition 2012
Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des femmes, mars 2013
105
4.4 - Ecart de scores au PISA (scores des garçons moins scores des filles), en compréhension de l’écrit, en sciences et en mathématiques. 2009
Source : Base de données PISA de l’OCDE, 2009 Repéré à : OCDE, Inégalité hommes-femmes, il est temps d’agir, 2012
4.5 - Pourcentage des garçons et des filles qui lisent pour le plaisir
Source : Base de donnée PISA de l’OCDE, 2009 Repéré à : OCDE, Inégalité hommes-femmes, il est temps d’agir, 2012
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
Filles Garçons
106
4.6 - Part des filles dans les différentes formations d'enseignement supérieur, 2011-2012
Formation Part des
filles (%) Formations paramédicales et sociales 83,3
Universités - Lettres, sciences humaines 70,4 Universités - Médecine, odontologie, pharmacie 63
Ensemble universités (filières générales et de santé)
58,7
Universités - Sciences, Staps 38 Ensemble étudiants 55,5
Autres formations non universitaires (1) 53,8 STS et assimilés 51,1
Ecole de commerce, gestion et comptabilité 49,6 CPGE 41,9 IUT 39,9
Formations d'ingénieurs (2) 26,1
(1) Groupe non homogène: grands établissements, ENS, UT et INP hors ingénieurs, préparations intégrées, formations comptables non universitaires, écoles artistiques et culturelles, d’architecture, juridiques et administratives, de journalisme, vétérinaires...
(2) Y compris les formations d’ingénieurs dépendantes des universités, des INP, des universités de technologies et les formations d’ingénieurs en partenariat.
Champ : France métropolitaine et Dom.
Source: Les étudiants / Repères et références statistiques - édition 2012. Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des
femmes, mars 2013
107
4.7 - Proportion des diplômes de l’enseignement supérieur décernés à des femmes en 2000 et en 2009
Note : Les pays sont classés de haut en bas par ordre décroissant de la proportion des diplômes du supérieur dans les filières sanitaires et sociales en 2009 obtenus par des femmes.
Source : OCDE (2011), Regards sur l'éducation
Repéré à : OCDE, Inégalité hommes-femmes, il est temps d’agir, 2012
108
4.8 - Répartition des diplômés occupant des professions intellectuelles et scientifiques et intermédiaires, par domaine d'études et métier
NB : La catégorie « Autres » recouvre toutes les autres professions intellectuelles et scientifiques et intermédiaires.
Source : Flabbi, L. et M. Tejada (2012), « Fields of Study Choices, Occupational Choices and Gender Differentials », document de reference préparé dans le cadre de l'Initiative de l'OCDE
pour la parité. Repéré à : OCDE, Inégalité hommes-femmes, il est temps d’agir, 2012
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100
Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes
Santé Lettres et arts Sciences
% Autres Enseignement Physique, mathématiques et ingénierie
109
Annexe 5 : L’activité et l’emploi des femmes et des hommes
5.1 - The « Lisbon Gap » en 2007, écart entre les taux d’emploi réels et les objectifs de la stratégie de Lisbonne.
Source : Eurostat, Labour Force Survey Repéré à : Löfström, Gender Equality, Growth and Employment
18
Source: Eurostat Labour Force Survey
FIGURE 5: Gender employment gap in year 2007.
Source: Eurostat Labour Force Survey
FIGURE 6: The “Lisbon gap” in year 2007. (Female employment rate minus 60 %)
110
5.2 - Part des femmes dans la population active, Union Européenne, 1983-2009 (en %)
1983 1987 1991 1995 2000 2004** 2009
Europe des 12 _ 39,3 40,6 42 _ _ 45,1 Europe des 15 _ _ _ 42,3 43,3 44,4 45,3 Europe des 27 _ _ _ _ _ _ 45,3 Allemagne* 39,1 39,5 40,9 42,9 43,9 45,4 46 Autriche _ _ _ 42,9 44 45,2 46,3 Belgique 36,9 38,5 40 41,4 43,1 43,7 45,1 Danemark 45,5 46 46,6 45,5 46,8 46,8 47,1 Espagne _ 32,9 35,3 38,2 40,3 41 43,8 Finlande _ _ _ 47,9 47,9 48,1 48,6 France 41,9 43,3 44,3 45,4 45,8 46,5 47,7 Grèce 34,1 35,8 35,8 37,9 40,3 40,7 41,4 Irlande 31,1 32,8 34,1 37,6 40,7 41,9 44 Italie 34,1 35,6 37,1 37,7 38,6 40,3 40,8 Luxembourg 33,5 35,2 35,6 36 39,7 41,6 43,3 Pays-Bas 33,8 37,6 39,5 41,3 43,2 45 45,9 Portugal _ 41,8 43,8 45 45,6 46,1 47,2 Royaume-Uni 40,3 42,4 43,3 43,8 44,5 46 46 Suède _ _ _ 47,7 47,7 47,7 47,4 * A partir de 1992, il s'agit des données concernant l'Allemagne réunifiée ** Nouvelle série à partir de 2004
Source : Eurostat, Enquêtes sur les forces de travail Repéré à : Un siècle de travail des femmes en France, 1901-2011. M. Maruani et M. Meron,
La Découverte, 2012
111
5.3 - Taux d'emploi des femmes et des hommes en Europe, 2011
Taux d'emploi des femmes et des
hommes en Europe en 2011 (%)
Total Femmes Hommes Union Européenne (27 pays)
68,6 62,3 75
Belgique 67,3 61,5 73 Bulgarie 63,9 61,2 66,6 République Tchèque 70,9 61,7 79,9 Danemark 75,7 72,4 79 Allemagne 76,3 71,1 81,4 Estonie 70,4 67,6 73,5 Irlande 64,1 59,7 68,6 Grèce 59,9 48,6 71,1 Espagne 61,6 55,5 67,6 France 69,2 64,7 73,9 Italie 61,2 49,9 72,6 Chypre 73,8 67,3 80,4 Lettonie 67,2 65,8 68,7 Lituanie 67,2 66,7 67,7 Luxembourg 70,1 61,9 78,1 Hongrie 60,7 54,9 66,8 Malte 61,5 43,4 78,8 Pays-Bas 77 71,4 82,6 Autriche 75,2 69,6 80,8 Pologne 64,8 57,6 72,2 Portugal 69,1 64,8 73,4 Roumanie 62,8 55,7 69,9 Slovénie 68,4 64,8 71,8 Slovaquie 65,1 57,6 72,7 Finlande 73,8 71,9 75,6 Suède 80 77,2 82,8 Royaume-Uni 73,6 67,9 79,4
Champ : personnes de 20 à 64 ans
Source : Eurostat, données 2011
Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des femmes, mars 2013
112
5.4 - Taux d'activité des femmes et des hommes selon le nombre et l'âge des enfants, 2011 (%)
Femmes Hommes Ensemble 72,5 82,4
Sans enfant 65,1 72,4 Le plus jeune
enfant est âgé de moins de 3 ans
1 enfant 78,6 96,8 2 enfants 64,7 97,4
3 enfants ou plus 41,4 94,9 Le plus jeune
enfant est âgé de 3 ans ou plus
1 enfant 80,1 86 2 enfants 86,6 94,6
3 enfants ou plus 74,5 93,6 Champ : France métropolitaine, personne de référence et éventuel conjoint de 15 à 64 ans.
Source : INSEE, enquêtes Emploi, traitement Dress Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des
femmes, mars 2013
113
5.5 - Les 12 familles professionnelles où se concentrent les emplois occupés par les femmes, 2009-2011
Famille professionnelle
% de la population féminine occupée
% de la population masculine occupée
Part des femmes en
%
Agents d’entretien 7,1 2,7 70,7 Enseignants 5,6 2,6 65,7 Vendeurs 5,2 1,6 74,3 Employés administratifs de la fonction publique (C et assimilés) 5,1 1,7 73,1
Aides à domiciles et aides ménagères 4,3 0,1 96,9 Aides-soignants 4,1 0,4 90,2 Infirmiers, sage-femmes 3,9 0,5 88 Secrétaires 3,6 0,1 97,8 Assistants maternels 3,6 < 0,1 98,9 Employés administratifs d’entreprise 2,5 0,7 76,1 Cadres services administratifs, comptables et financiers 2,5 2,3 49,3
Employés de la comptabilité 2,4 0,4 84,2 Ensemble de ces 12 familles 49,8 13,1 77,4 Autres familles professionnelles 50,2 86,9 34,3 Ensemble des 87 familles professionnelles 100 100 47,5
Source : INSEE, enquêtes Emploi 2009 à 2011 Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des
femmes, mars 2013
114
5.6 - Répartition des créations d'entreprise par secteur d'activité selon le sexe, 2010 (en %). France.
Secteur d'activité Femmes (%)
Hommes (%)
Part des femmes
créatrices (%)
Industrie 4,1 6,5 20 Construction 6,6 23,7 10 Commerce et réparation 25,3 23,9 30 Transports et entreposage 2,1 3,2 21 Hébergement et restauration 8,2 7 32 Information et communication 3 4,3 22 Activités financières et d'assurance 1,3 1,4 27
Activités immobilières 4,5 3,4 35 Soutien aux entreprises 22 18,2 32 Enseignement, santé, action sociale 12,8 4,4 54
Services aux ménages 10,2 4,1 50 Ensemble 100 100 28
Source : enquête SINE, 2010 Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des
femmes, mars 2013
5.7 - Taux d'activité des femmes et des hommes par tranche d'âge, de 15 à 64 ans (%). 1978-2011, France.
Hommes Femmes 1978 2011 1978 2011 15-24 ans 57,1 41,6 48,5 34,9 25-49 ans 97,2 94,4 64,1 83,9 50 ans et plus 78,8 62,2 43,9 55,2 Ensemble 83 74,8 55,4 66,2
Champ : France métropolitaine, population des ménages, personnes de 15 à 64 ans
Source : INSEE, enquêtes Emploi 2011
Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des femmes, mars 2013
115
5.8 - Taux d'activité des femmes de 25 à 49 ans, Union Européenne, 1983 à 2010 (en %)
1983 1987 1991 1996 2000 2005 2010 Europe des 15 _ _ _ 71,3 74 76,9 79 Europe des 27 _ _ _ _ _ 77,1 78,9 Allemagne* 58,2 61,5 67,8 74,8 75,1 81,1 81,1 Autriche 76,2 78,7 81,5 83,7 Belgique 58,8 63,8 68,1 73,1 77,5 80 83,5 Danemark 86,4 87,7 88,8 83,9 85,2 84,7 85,3 Espagne _ 42,6 51,4 60,4 66,2 71,2 80,1 Finlande _ _ _ 83,4 85,1 85,1 84,3 France 68,4 71,9 75,1 79,2 79,7 82,3 84,5 Grèce 45,1 50,6 51,9 59,8 65,4 70,9 74,7 Irlande 38,1 43,3 49,2 60,4 68 70,9 72,5 Italie 48,3 52,7 57,1 57,8 61,1 65,9 66 Luxembourg 44,7 50,9 55 58,8 67,6 74,7 79 Pays-Bas 45,4 56,1 62,3 70,1 76 80,4 84,7 Portugal _ 66,3 74,2 78 79,6 83,6 86,6 Royaume-Uni 63,1 69,3 73,7 75,1 76,8 77,4 78,6 Suède _ _ _ 86,5 84,6 84,2 86,5
Source : Eurostat, Enquêtes sur les forces de travail pour les données 1983-2000, puis données trimestrielles (1er trimestre), extraction 2010 (série longue) pour les données de 2005 et 2010
Repéré à : Un siècle de travail des femmes en France, 1901-2011. M. Maruani et M. Meron, La Découverte, 2012
116
5.9 - Taux de chômage masculin et féminin dans l’Union Européenne, 2011
Taux de chômage (%) Total Hommes Femmes
Union Européenne (27 pays)
9,6 9,6 9,8
Belgique 7,2 7,1 7,2 Bulgarie 11,3 12,3 10,1 République Tchèque 6,7 5,8 7,9 Danemark 7,6 7,7 7,5 Allemagne 5,9 6,2 5,6 Estonie 12,5 13,1 11,8 Irlande 14,7 17,8 10,8 Grèce 17,7 15 21,4 Espagne 21,7 21,2 22,2 France 9,6 9,1 10,2 Italie 8,4 7,6 9,6 Chypre 7,9 8,1 7,7 Lettonie 16,2 18,6 13,8 Lituanie 15,3 17,7 12,9 Luxembourg 4,8 3,9 6 Hongrie 10,9 11 10,9 Malte 6,5 6,2 7,1 Pays-Bas 4,4 4,5 4,4 Autriche 4,2 4 4,3 Pologne 9,6 9 10,4 Portugal 12,9 12,7 13,2 Roumanie 7,4 7,9 6,8 Slovénie 8,2 8,2 8,2 Slovaquie 13,6 13,6 13,6 Finlande 7,8 8,4 7,1 Suède 7,5 7,6 7,5 Royaume-Uni 8 8,7 7,3
Champ : personnes de 15 ans et plus
Source : Eurostat, données 2011
Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des femmes, mars 2013
117
5.10 - Taux de chômage* masculin et féminin, 1983-2010, Union Européenne (en %)
1983 1990 1995 2000 2005 2010
Hommes Femmes H F H F H F H F H F
Europe des 12 _** _** 6,7 11 9,5 12,
7 7,3 10,1 7,5 9,1 10,3 9,8
Europe des 15 _ _ _ _ 9,5 12,
5 7,2 9,9 7,5 8,9 10,1 9,7
Europe des 27 _ _ _ _ _ _ 8,2 10,6 8,3 9,7 10,
3 9,8
Allemagne 5,8 7,5 4 6,1 7,1 9,6 7,7 8,3 11,4 10,7 8,7 7,2
Autriche _** _ ** _ _** 3,9 4,9 4,8 4,6 4,9 5,5 5,2 4,1
Belgique 8,1 17,8 4,6 11,4 7,3 12,2 5,3 8,3 7,6 9,5 8,4 8,9
Danemark 9,2 10,4 7,8 8,9 5,6 8,6 4 5 4,4 5,3 9,4 6
Espagne _** _** 12 24,2 17,9
30,6 9,5 20,3 7,1*** 12,2*** 20 20,
2
Finlande _** _** _ _** 17,8
16,2
10,3 12 8,2 8,6 10,
5 8
France 6,1 10,5 7,2 12,2 10 14,1 8,5 12,2 8 9,8 9,7 9,8
Grèce 5,8 11,7 4,3 11,8 6,2 13,8 7,4 17 6,1 15,3 9,1 15,
5
Irlande 14,3 15,9 13,7 15 12 12,1 4,4 4,3 4,6 4 16,
5 8,4
Italie 5,6 14,2 6,4 15,7 9,1 16,1 8,3 14,9 6,2 10,1 8,1 10,
5 Luxembourg 2,3 5 1,2***
* 2,4**** 2,1 4,4 1,8 3,1 3,5 5,8 4,5 5,3
Pays-‐Bas 10,9 13,7 5,6 10,9 6,1 8,7 2,2 3,5 4,5 5,1 4,6 4,4
Portugal _** _** 3,3 6,5 6,5 7,8 3,1 4,8 6,8 8,8 10 11,6
Royaume-‐Uni 12 9,8 7,3 6,6 10,
1 6,9 6,2 4,9 5,2 4,3 9,1 6,6
Suède _** _** _** _** 9,8 7,9 5,9 5 7,9**** 7,7*** 9,5 8,8
* Chômage au sens du BIT ** Données non disponibles *** Rupture de série **** Données peu fiables
Source : Eurostat, Enquêtes sur les forces de travail, résultats annuels détaillés, série longue pour les données de 1983-2000 et résultats trimestriels détaillés (extraction 2010) pour les
données 2005 et 2010 (Q1)
Repéré à : Un siècle de travail des femmes en France, 1901-2011. M. Maruani et M. Meron, La Découverte, 2012
118
5.11 - Classement des pays européens selon le plus ou moins grand écart entre la part des hommes et la part des femmes qui est à temps partiel en 2011
Total (%) Hommes (%)
Femmes (%)
Ecart en points
UE (27 pays) 18,2 7,4 31 -23,6 Pays-Bas 45,5 20,2 75 -54,8 Allemagne 25,8 8,7 45,6 -36,9 Autriche 24,8 7,7 44,5 -36,8 Belgique 24,4 8,9 43 -34,1 Luxembourg 17,9 4,1 35,8 -31,7 Royaume-Uni 24,1 9,5 40,8 -31,3 Suède 23,5 10,9 37,4 -26,5 Italie 15,2 5,4 29,2 -23,8 France 17,6 6,3 29,9 -23,6 Danemark 21,1 10,2 33,2 -23 Irlande 22,3 11,7 34,3 -22,6 Malte 11,3 4,5 24,2 -19,7 Espagne 13,5 5,6 23,1 -17,5 Finlande 12,7 8,3 17,5 -9,2 Estonie 9,1 4,9 13,2 -8,3 République Tchèque 4,6 1,8 8,4 -6,6 Portugal 9,9 6,8 13,4 -6,6 Chypre 8,7 5,8 11,8 -6 Grèce 6,5 4,1 10 -5,9 Pologne 7 4,3 10,2 -5,9 Slovénie 8,6 6,2 11,4 -5,2 Hongrie 6,4 4,4 8,8 -4,4 Lituanie 8,3 6,6 9,8 -3,2 Lettonie 8,7 7 10,2 -3,2 Slovaquie 3,9 2,6 5,5 -2,9 Roumanie 9 8,4 9,8 -1,4 Bulgarie 2,1 1,9 2,3 -0,4
Champ : personnes de 20 à 64 ans
Source : Eurostat, données 2011
Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des femmes, mars 2013
119
5.12 - Proportion d'emplois à temps partiel en 2011, France.
Proportion de
femmes à temps partiel
(%)
Proportion d'hommes à temps
partiel (%)
Part des femmes parmi les salariés (%)
A temps partiel
A temps plein
1980 15 2 83,8 36,4 1990 23,6 3,4 85,4 38,4 2003 29,5 5,4 82,3 38,9 2009 29,9 6 81,9 40,3 2010 30,1 6,7 80,2 40,4 2011 30,1 6,9 79,9 40,4
Source : INSEE, enquête Emploi
Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des femmes, mars 2013
5.13 - L’emploi à temps partiel en Union Européenne, 2010
En % de l'emploi total
En % de l'emploi des
femmes
En % de l'emploi des
hommes Europe des 15 22 38 9 Europe des 27 19 32 8 Belgique 24 42 9 Danemark 27 40 15 Allemagne 26 46 9 Grèce 6 11 3 Espagne 13 23 5 France 18 31 6 Irlande 22 34 11 Italie 15 29 5 Luxembourg 19 39 4 Pays-Bas 49 76 25 Autriche 25 44 9 Portugal 11 15 7 Finlande 15 20 10 Suède 27 41 14 Royaume-Uni 26 43 12
Source : Eurostat, Enquêtes sur les forces de travail, données trimestrielles, extraction 2010 (premier
trimestre) Repéré à : Un siècle de travail des femmes en France, 1901-2011. M. Maruani et M. Meron, La
Découverte, 2012
120
5.14 - Taux de temps partiel par sexe et âge selon le recensement 2008
Ensemble Hommes Femmes Moins de 20 ans 38 31,2 50,6 20 à 24 ans 24,1 15,6 33,9 25 à 39 ans 14,7 4,9 25,7 40 à 54 ans 16 4,3 28,7 55 à 64 ans 19 8,7 30 65 ans ou plus 36,7 33,8 40,1 Ensemble 17,1 6,8 28,6
Champ : France métropolitaine Source : recensement de la population 2008
Repéré à : Un siècle de travail des femmes en France, 1901-2011. M. Maruani et M. Meron, La
Découverte, 2012
5.15 - Inactivité et temps partiel des femmes (entre 15 et 64 ans) dus à un manque de service de garde des enfants et autres personnes dépendantes.
Proportion des femmes avec des responsabilités de soins envers les personnes dépendantes
Source : Eurostat, Labour Force Survey Repéré à : Löfström, Gender Equality, Growth and Employment
121
5.16 - Proportion de femmes parmi les cadres et professions intellectuelles supérieures (en%)
1962 1975 1982 1990 1999 2005 2009
Professions libérales 19 24 27 32 34 39 40 Cadres de la fonction publique 11 19 24 28 36 37 42 Professeurs, professions scientifiques 39 44 45 50 53 54 57 Professions de l'informatique, des arts et des spectacles 39 37 41 42 44 48 46
Cadres administratifs et commerciaux d'entreprise 13 17 20 30 35 41 43
Ingénieurs et cadres techniques d'entreprise 3 4 6 11 15 17 22
Ensemble 16 22 25 31 35 37 40
Source : INSEE, recensements de la population de 1962 à 1999, et enquête "Emploi" 2005 et 2009
Repéré à : Travail et emploi des femmes, M. Maruani, 2011
5.17 - Ecarts de rémunération horaire brute entre les femmes et les hommes en 2010, en %
Champs : femmes et hommes salariés
Source : Eurostat, données 2010
Repéré à : Les chiffres clés de l'égalité entre les hommes et les femmes, 2012 - Ministère des droits des femmes, mars 2013
0,5% 0,9%
4,5% 5,3%
7,2% 8,7% 8,8%
10,2% 12,8% 13,0%
13,9% 14,6%
15,4% 15,5% 15,6% 16,0% 16,2% 16,2%
16,8% 17,6% 17,8%
19,5% 19,6%
20,3% 22,3%
24,0% 25,5%
27,7%
Grèce Slovénie
Pologe Italie
Malte Luxembourg
Roumanie Belgique Portugal Bulgarie
Irlande Lituanie
Suède Lettonie
France Danemark
UE (27 pays) Espagne Chypre
Hongrie Pays-Bas
Royaume-Uni Slovaquie Finlande
Allemagne Autriche
République tchèque Estonie
122
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127
Table des matières
Introduction .................................................................................................................. 7 Chapitre 1 : L’égalité hommes-‐femmes, croissance et performance économique : l’émergence et la diffusion d’un nouveau paradigme. .................................................. 12 Section 1 : l’argument économique en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes. ........... 12 I) L’existence d’un lien entre croissance et égalité entre les femmes et les hommes. .......... 12 A) L’égalité entre les hommes et les femmes : la naissance du discours égalitaire pour favoriser la croissance. .................................................................................................................................................... 13 B) Investir et utiliser pleinement le capital humain pour favoriser la croissance. ..................... 14 C) Estimation du potentiel de croissance en cas de réalisation de l’égalité hommes -‐ femmes . .................................................................................................................................................................................... 17
II) Le travail des femmes, une solution à la baisse de main d’œuvre programmée en Europe ? .......................................................................................................................................................................... 18 A) La féminisation de l’emploi : une solution à la baisse de la population active. ....................... 19 B) Taux d’emploi féminin et fécondité : une relation positive. ............................................................ 20
Section 2 : la diffusion de l’argument économique pour favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes et ses effets sur le droit ........................................................................................................ 23 I) L’impulsion des institutions internationales .................................................................................... 24 A) L’égalité entre les hommes et les femmes au cœur des stratégies de développement ....... 24 B) Le rôle de l’Union Européenne dans la promotion de l’égalité professionnelle. .................... 25
II) Les transformations du droit ................................................................................................................. 29 A) Le travail des femmes dans la loi : de la protection des femmes au principe général d’égalité. ................................................................................................................................................................................. 29 B) L’égalité professionnelle en entreprise, les transformations du droit et le développement d’un droit spécifique et incitatif ................................................................................................................................... 31
Chapitre 2 : Réaliser l’égalité entre les hommes et les femmes pour favoriser la croissance : les obstacles à surmonter. ........................................................................ 35 Section 1 : l’éducation : mieux valoriser le capital humain .............................................................. 35 I) Aujourd’hui, des filles aussi nombreuses que les garçons à l’école et qui y réussissent mieux. .............................................................................................................................................................................. 36 A) Une meilleure réussite des filles, mais pas dans toutes les matières. ......................................... 37 B) Le rôle de l’institution scolaire : l’école, une caisse de résonnance des inégalités ? ............. 39
II) De l’école au marché du travail, transformer son bagage scolaire en un emploi : la rentabilité scolaire des filles en question. ........................................................................................................ 41 A) Des choix d’orientations stéréotypés ........................................................................................................ 42 B) Une orientation des filles dans des filières moins porteuses. ....................................................... 44
Section 2 : des freins sociaux et culturels qui limitent le développement du travail féminin à égalité avec celui des hommes. ..................................................................................................................... 47 I) Les emplois des femmes ............................................................................................................................. 48 A) La lente mais effective salarisation de l’emploi féminin. .................................................................. 48 B) La spécificité des emplois féminins. ........................................................................................................... 50 C) Les femmes et l’entrepreneuriat : utiliser les talents pour favoriser l’innovation. ............... 51
II) Un alignement non effectif ..................................................................................................................... 53 A) La persistance de carrières irrégulières .................................................................................................. 53
128
B) Chômage et temps partiel : le travail féminin plus limité que celui des hommes. ................. 55 C) Une plus grande tolérance sociale à l’inactivité féminine ................................................................ 58
III) Toujours des discriminations ............................................................................................................... 62 A) Le plafond de verre ........................................................................................................................................... 62 B) Les inégalités salariales ................................................................................................................................... 66
Chapitre 3 : Les débuts d’une prise de conscience a priori : l’intégration de la question de l’égalité dans les stratégies managériales des entreprises. ...................................... 72 Section 1 : Le nouveau « prêt à penser » des ressources humaines .................................................. 72 I) Les femmes : nouvel atout en entreprise ............................................................................................ 73 II) L’égalité femmes-‐hommes et la diversité ......................................................................................... 76 A) Les femmes en entreprises, un facteur de diversité ........................................................................... 77 B) Egalité et diversité : comment concilier ces deux idéaux ? .............................................................. 79
Section 2 : Le piège de l’essentialisme ............................................................................................. 81 I) « Qualités féminines » : le danger de l’essentialisme et la construction sociale de la qualification. ................................................................................................................................................................. 81 A) Les qualités « naturelles » féminines : essentialisme et catégorisation des aptitudes. ....... 82 B) Qualités féminines naturelles et négation de la qualification. ........................................................ 84
II) Des femmes obligées de se conformer au modèle féminin traditionnel. ............................. 86 Conclusion ................................................................................................................... 89 Annexes ....................................................................................................................... 91 Bibliographie ............................................................................................................. 122
Résumé
Les nouvelles politiques d’égalité, promues par les institutions
internationales comme l’Union Européenne apparaissent comme
particulièrement novatrices. Inspirées des stratégies de lutte contre le
sous-développement, elles visent à arguer que l’égalité entre les hommes
et les femmes aurait un impact sur la croissance économique.
Par plusieurs biais, notamment une plus grande participation à
l’emploi, une meilleure adéquation entre les formations et qualifications
des femmes et enfin par une amélioration de la place des femmes en
entreprises, l’égalité entre les hommes et les femmes influencerait
positivement la croissance et la performance.
Mais, la mobilisation d’un argument utilitariste pour promouvoir
l’égalité doit être effectuée avec beaucoup de précaution. En effet, il
existe un risque important d’observer un retour des idées essentialistes et
d’une catégorisation des différences. Toutefois, on ne peut que se réjouir
d’une mobilisation générale, aussi bien des pouvoirs publics que des
acteurs privés, autour de la question d’égalité entre les hommes et les
femmes.
Mots-clés
Egalité, croissance, performance, discriminations