LE-FRANCAIS

Embed Size (px)

Citation preview

REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE MINISTERE DE LEDUCATION NATIONALE

INSTITUT NATIONAL DE FORMATION ET DE PERFECTIONNEMENT DU PERSONNEL DE LEDUCATION

ENSEIGNER LE FRANAIS:APPROCHES ET METHODES

Support de Formation dstin aux enseignants de la Langue Franaise

OUVRAGE RALIS ET COORDONN PAR:

Melle . et Mrs: Samia Benbrahim, Mrs. Bentifour Belgacem, Atatfa Djillali, lassaoui Abdelnacer, enseignants universitaires, et Mr. Moussaoui Ali, IEF.

Ad r e s s e : 0 4 , r u e O u l e d S i d i C h e i k h , E l - H a r ra c h T l : 0 2 1 5 2 5 3 4 1 - 0 2 1 5 2 5 0 6 3 - Fa x : 0 2 1 5 2 9 7 6 3 S i t e we b : w w w. i n f p e. e d u . d z e - m a i l : co n t a c t @ i n f p e. e d u . d z

SOMMAIREPrface Avant propos 1. Linguistique gnrale et syntaxe. 1.1. La linguistique gnrale 1.2. Syntaxe. 2. Comprhension de lcrit et grammaire textuelle. 2.1. Comprhension de lcrit. 2.1.1. Lenseignement de la comprhension de lcrit. 2.1.2. Problmatique du choix du texte. 2.2. Grammaire des textes. 3. Didactique. 3.1. Psychopdagogie. 3.2. Projet. 3.2.1. Pdagogie du projet. 3.2.2. Projet dtablissement / Service. 3.3. Problmatiques de lenseignement. 3.4. Nouvelles approches pdagogiques. 3.4.1. Lapproche diffrencie. 3.4.2. Lapproche par les comptences. 3.5. Lvaluation. Bibliographie. 71 74 98 127 141 143 155 157 161 171 176 177 183 218 229 11 31 5 6

Prface

Nous nous sommes efforcs de faire de cet ouvrage un outil pour les enseignants en langue trangre (franais) lcole primaire et au collge denseignement moyen, ainsi que pour les enseignants concerns par la formation distance.

Nous esprons que le contenu de cet ouvrage pourrait leur apporter des lments de base en linguistique et en comprhension de lcrit et qu travers les sujets traits dans le chapitre rserv la didactique, nous les aiderions mieux saisir les nouvelles approches pdagogiques. Ces claircissements et ces nouvelles orientations trouveront, peut tre, un cho auprs de nos jeunes enseignants rpondraient ainsi leur attente en leur procurant des rponses leurs interrogations quant aux rcentes approches pdagogiques et connaissances en linguistique.

Cette modeste publication pourrait aussi intresser les enseignants ayant plus dexprience, soit parce quelle leur aura apport des clairages nouveaux en linguistique, soit quelle les aura conforts et encourags dans leurs pratiques pdagogiques et quelle leur donne ainsi plus dassurance face aux contraintes de prparation et dorganisation rencontres quotidiennement dans leur classe et dans leur formation distance.

5

6

Avant Propos

Cette brochure qui a pour objectif de contribuer la formation des ducateurs aurait pour ples trois axes relevant des domaines de la linguistique, de la didactique et celui de la psychopdagogie.

La premire partie sera consacre la linguistique et la syntaxe : nous nous intresserons, brivement il est vrai, lhistorique de la linguistique et son objet dtude, ses diffrentes volutions ou courants linguistiques (coles) et leurs proccupations, mais aussi lapprentissage des langues trangres, la phontique et enfin la phonologie. Cet expos sera suivi dune tude sur la reprsentation de la phrase grammaticale en arbre syntagmatique qui sera bien utile pour expliquer et dfinir la structure dune phrase. Cette tude, proposition en fait doutils de formalisation la comprhension de lanalyse syntagmatique nous donne un aperu de la syntaxe, branche de la linguistique qui tudie la faon dont les mots (morphmes) se combinent pour former des syntagmes (nominaux ou verbaux) pouvant mener des propositions (indpendantes ou principales / subordonnes, relatives), lesquelles peuvent se combiner leur tour pour former des noncs.

Le deuxime axe sera rserv la comprhension de lcrit et son corollaire, la grammaire des textes. Lcrit est une des dimensions la plus importante de notre enseignement car ne pas matriser lcrit, cest courir le risque daller grossir les rangs de ceux qui ne savent pas faire du sens avec lcrit, soit pour en produire par criture, soit pour en recevoir par lecture (A.Lion).7

Cette partie du livre posera la problmatique reprsentant les interrogations des ducateurs telles que, comment dvelopper la capacit de faire du sens avec lcrit ? , ou encore quelles techniques mettre en uvre dans le cadre de la re-construction de lcrit selon Portine ? , ou bien quelles habitudes de lecture faut-il installer chez lapprenant ? (R.Sahnouni dans Oasisfle.). A travers la lecture des deux dossiers sur la comprhension de lcrit tudis dans ce chapitre, nous dcouvrons que chaque texte est dtermin par son genre, par son type de squence ou faisant partie de lordre dialogal ou monologal, si bien que chaque texte possde une grammaire qui dpend de ces trois apparentements cits ci-dessus. Nous souhaitons donc, par le biais du texte qui traite de la grammaire textuelle dans ce chapitre, apporter de nouveaux clairages sur la lecture de lcrit.

Quant au troisime volet du fascicule qui comprend des dossiers se rfrant des sujets dactualit en psychopdagogie, se veut porteur de modernit selon les nouvelles rformes dans lenseignement et selon les dernires recommandations ministrielles. Les auteurs de ces crits, inspecteur de lenseignement et de la formation, pdagogues et professeurs universitaires en langue franaise ont prsent des thmes ayant trait leurs diverses expriences et pratiques professionnelles sur le terrain, leurs rcentes recherches dans le domaine psychopdagogique et surtout leurs savoirs acquis auprs de formateurs trs au fait des nouvelles approches pdagogiques. Dans les chapitres de cette partie, les auteurs traitent, aussi clairement que possible, des mthodologies de lenseignement des langues trangres, des mthodes ou8

nouvelles approches pdagogiques, telles que lapproche communicative, lapproche par les objectifs, lapproche par les comptences, lapproche diffrencie.

Cependant avant daborder ces points devenus primordiaux dans notre enseignement, dautres centres dintrt seront soulevs comme par exemple les fonctions de lenseignant en tant quducateur et formateur, ( dveloppant chez lapprenant le savoir vivre, la facult de sadapter, la ponctualit, le soin et le srieux apports la ralisation du travail, le respect des chances fixes, lesprit dinitiative et de la recherche, les facults danalyse et de synthse), ou encore la pdagogie du projet, ou le projet dtablissement Ces lments de recherche seront suivis par celui de lvaluation, que nous considrons comme tant essentielle, tant donn quelle dpasse le simple contrle,quelle est dynamique et fait voir comment les apprenants se situent les uns par rapport aux autres et comment leur progression peut tre amliore. Elle assure aussi des conditions de russite, aide chacun progresser, permet le travail dquipe, elle est un constat de rsultats, elle les analyse et les rgule.

Nous tenons remercier celles et ceux qui ont dj tenu cet ouvrage en main. Nous esprons quil rpondra leur attente et nous accueillerons avec un vif intrt toutes remarques et toutes propositions de complments ou de modifications.

Les auteurs.

9

1.Linguistique gnrale

LINGUISTIQUE GENERALE

11

1.Linguistique gnrale

12

1.Linguistique gnrale

1.1. Linguistique gnrale :

1.1.1. La linguistique, science du langage : La linguistique est une discipline, la fois trs ancienne et trs jeune : la rflexion sur le langage et les langues date de lAntiquit mais on a coutume de considrer que la linguistique ne sest constitue comme discipline scientifique quau dbut du XXe sicle. On considre souvent que Ferdinand de Saussure est le pre fondateur de la linguistique moderne. Jugement schmatique mais qui souligne loriginalit de la pense de Saussure qui a t lorigine de la constitution dune discipline autonome qui naurait pour unique et vritable objet (que) la langue envisage en elle-mme et pour elle-mme (CLG, d. ENAG, 1990, p.376). Son souci de comprendre le fonctionnement du langage comme institution sociale, ici et maintenant, conduit ce linguiste mettre laccent sur la notion de systme : la langue est considre comme un systme de signes articulant un signifi et un signifiant. Privilgiant pour cela ltude synchronique qui lui permet dobserver lquilibre du systme de la langue un moment donn, il relguera au second plan ltude diachronique qui s'attache dcrire les changements linguistiques: l'volution ne serait que le passage d'un tat de langue stable un autre (c'est--dire une relation entre des coupes synchroniques opres des poques diffrentes). Enfin, la pice matresse de l'difice saussurien est celle de la thorie du signe. La langue est un systme de signes qui ne sont pas immdiatement perceptibles, mais qui sont identifis par l'analyse, ils unissent chacun un signifi (concept) et un signifiant (image acoustique). La thorie du signe opre une rupture par rapport la conception navement nominaliste qui identifie le langage la pense, le mot la chose, et ne voit dans la langue qu'une nomenclature de termes renvoyant des13

1.Linguistique gnrale

objets du monde. D'o la notion d'arbitraire du signe : arbitrarit du lien entre le signifiant et le signifi, entre le signe et la ralit qu'il dsigne. Enfin, Saussure insiste sur la primaut des rapports entre les lments de la langue. Chaque lment n'est rien d'autre que ce que les autres ne sont pas : signifiants et signifis se dfinissent par diffrence avec, respectivement, les autres signifiants et les autres signifis de la langue ; quant aux signes, ils s'opposent entre eux au sein du systme de la langue et ne reoivent de valeur que ngativement, c'est--dire travers le rseau de relations d'oppositions dans lequel ils se trouvent pris. Une telle approche de la langue, o seuls comptent les rapports purs indpendamment des grandeurs mises en rapport ( la langue est une forme et non une substance ), est la source de ce que l'on appellera par la suite le structuralisme linguistique.

1.1.2. Quelques concepts-cls pour aborder la linguistique :1.1.2.1. Langue versus langage : La facult de langage, qui se traduit par la matrise d'une ou de plusieurs langues, est propre l'espce humaine. Aucun autre tre vivant ne parle vritablement. La facult de langage implique en effet la capacit d'articuler des sons en les reliant des significations, une matrise de la pense abstraite et rflexive et une crativit permettant de produire et de comprendre un nombre infini de phrases nouvelles : toutes aptitudes dont les abeilles aussi bien que les perroquets en sont totalement dpourvus, et que mme les chimpanzs (dont les performances linguistiques se heurtent trs vite des limites indpassables) semblent incapables d'acqurir. Saussure a oppos la linguistique la smiologie, c'est-dire le langage tous les autres systmes de signes, il attirait ainsi l'attention sur le fait que l'tablissement de la communication n'est pas le trait spcifiquement distinctif du langage humain, puisqu'il partage ce trait avec tous les autres moyens ou systmes de communication. Par contre, il insistait14

1.Linguistique gnrale

sur un autre caractre des units linguistiques, qu'il appelait l'arbitraire du signe (le fait qu'il n'y ait aucune obligation naturelle d'appeler une pomme pomme ; il est, en effet, possible de l'appeler apple , touffaha , etc.). Mais il n'en faisait pas le caractre propre du langage humain. De fait, beaucoup d'autres systmes de communication : code de la route, cartes routires, codes ferroviaires ou maritimes, etc., utilisent des signes arbitraires. Le fait que les messages linguistiques soient linaires, c'est--dire se droulent sur laxe du temps, leur donne des proprits importantes, qui les distinguent des systmes o les units s'organisent dans l'espace (reprsentations graphiques, dessin, cartographie, peinture, etc.). Mais ce fait ne leur est pas propre : d'autres systmes droulent leurs messages de la mme faon dans le temps (musique, cinma au moins partiellement). Saussure avait aussi mis en vidence le caractre discret des signes linguistiques, le fait qu'ils signifient par oui ou non, tout ou rien ; le signe mouton signifie mouton d'abord, par diffrence avec tous les autres signes qui pourraient figurer sa place ; il ne peut jamais (comme dans un systme constitu par la reprsentation de grandeurs continues) signifier plus ou moins mouton , selon l'intonation par exemple. Mais beaucoup d'autres systmes fonctionnent au moyen d'units discrtes, ainsi le code de la route, les feux de position, etc. Le fait que les units linguistiques soient combinables selon des rgles et forment systme n'est pas spcifique non plus : tous les systmes de communication prsentent ce caractre. Grce une analyse de L. T. Hjelmslev, dj suggre par Ferdinand de Saussure et dfinitivement mise au point par Andr Martinet, le trait qui distingue spcifiquement le langage conu comme l'ensemble des langues naturelles des hommes s'est rvl dans ce qu'on nomme sa double articulation. On entend par l que les langues naturelles humaines paraissent tre les seuls codes construits sur une codification systmatique deux tages. Les messages y sont construits par des suites d'units minimales dites significatives (ou monmes ; ou morphmes dans la terminologie anglo-saxonne), units deux faces, une face signifiante et une face signifie. Le train file15

1.Linguistique gnrale

vite contient quatre de ces units, quand on nglige quelques subtilits dans l'analyse de file . Grce cette premire articulation, le nombre des messages possibles est infiniment plus grand que si chaque message devait possder un signifiant totalement distinct. Ces units, leur tour, sont construites au moyen d'units plus petites, non signifiantes mais distinctives, les phonmes. Le mot file en contient trois : [f], [i], [l]. Ces units de deuxime articulation, toujours en petit nombre dans une langue - entre vingt et cinquante -, permettent de construire des milliers de monmes diffrents d'une faon plus conomique que si chaque monme (comme dans une criture idographique) devait disposer d'un signifiant totalement distinct de tous les autres. La double articulation rend certainement compte en grande partie, sinon en totalit, de cette proprit si mystrieuse des langues humaines, toujours aperue, jamais techniquement explique : l'extraordinaire quantit de messages possibles, au moyen d'une double conomie dans la structuration par rapport ce que peuvent tous les autres systmes de communication. Qu'on prenne le code des abeilles, ou celui de la route, ou celui des symboles des mathmatiques (+, -, , :, >, V + SN (verbe transitif direct) :L'enfant L'agent de police SN1 mange du chocolat. rgle la circulation V Transitif SN2 Direct

55

1.2. Syntaxe

-SV ==> V + SP (verbe transitif indirect) :Nous Nous SN rflchissons pensons V Transitif Indirect la question nos parents. SP

-SV ==> V + SN + SP (verbe double complmentation) :

Mon frre Le professeur SN1

prte remet V Transitif SV

sa voiture les copies SN2

son ami. ses lves SP

-SV ==> V + SP + SP (verbe double complmentation)Mon frre L'ingnieur a parl s'entretient V Intransitif SV de ce problme de ces projets SP1 son directeur. avec les techniciens. SP2

SN1

2-SV avec un verbe d'tat (V) : Le verbe d'tat attribue une qualit au SNS. Nous pouvons avoir plusieurs cas de structures : - SV ==> V + SA (la fonction du SA est attribut du SNS) : Ex : La villa du maire est belle. Mouloud serait content de ses rsultats.

56

1.2. Syntaxe

- SV ==> V+ SN (la fonction du SN est attribut du SNS). Ex : Cet homme est directeur de banque. Salim tait mon unique tmoin. - SV ==> V+ SP (la fonction du SP est attribut du SNS). Ex : Le joueur parat en bonne sant. Le chauffeur demeure dans un tat grave. 3- SV avec un verbe attributif (Va) :

Le verbe attributif donne un attribut au complment du verbe. Nous pouvons avoir plusieurs cas de structure. - SV ==> Va + SN + SA (le SA est attribut du SN complment de verbe). Ex : L'entraneur trouve votre tactique trs intressante. Le patron estime cet employ digne de confiance. - SV ==> Va + SN + SN (le 2me SN est attribut du SN complment de verbe). Ex : On appelle cet engin un concasseur. Nous vous imaginons 1er Ministre. - SV ==> Va + SN + SP (le SP est attribut du SN complment de verbe). Ex : Les lves considrent la classe comme un salon de repos. Les journalistes prennent les lecteurs pour des idiots.

57

1.2. Syntaxe

-Applications : *Comment identifier les SV et analyser les lments de leurs constituants ? Exemple : [Mon pre a prt sa voiture son voisin.]Mon pre SN1 a prt V SV sa voiture SN(D+N) + son voisin SP(prp+D+N)

a-[ Mon pre lit tous les soirs les journaux.] -Corrig :Mon pre SN lit V SV Tous les soirs les journaux SP de phrase+ SN

b- [Les lves soucieux de leur avenir s'appliquent dans leur travail.] -Corrig :Les lves soucieux de leur s'appliquent avenir V SN SV dans leur travail SP(prp+D+N)

c). Le syntagme prpositionnel (SP) : Le syntagme prpositionnel constitue le 3me bloc non essentiel de la phrase mais il peut tre un lment constitutif du SN ou du SV.

58

1.2. Syntaxe

Le SP est gnralement form d'une prposition (prp) et d'un syntagme nominal (SN). 1- Le SP comme 3me constituant de la phrase : Le SP comme 3me constituant de la phrase est facultatif et mobile sur l'axe de fonctionnement (syntagmatique).

Ex : Le gardien ouvre le portail huit heures. A huit heures, le gardien ouvre le portail. Le gardien ouvre, huit heures, le portail. Le gardien ouvre le portail.

Il arrive parfois que la prposition soit efface (ensemble vide?), autrement dit le constituant est appel syntagme prpositionnel sans que la prposition soit apparente ; il suffit que le constituant soit facultatif et mobile pour qu'il soit considr comme syntagme prpositionnel complment de phrase.

Ex : La bonne garde la petite fille le jour. Le pre rentre chez lui tous les soirs. Parfois, il y a contraction entre la prposition et le dterminant. Ex : Le docker se rend au travail au lever du jour. Le fellah quitte le champ au crpuscule. 2- Le SP comme lment du SV : Le SP comme lment du SV est un constituant essentiel du SV et dans ce cas, la prposition n'est jamais efface. Le SP fonctionne avec des verbes transitifs indirects.

59

1.2. Syntaxe

Ex : Le voyageur va la gare. Le chauffeur appuie sur l'acclrateur. Le directeur est dans son bureau. La mre a offert une montre son fils. 3- Le SP comme lment du SN : Le SP comme lment du SN est considr comme un qualifiant et dans ce cas, il n'est pas un constituant essentiel du SN mais juste une expansion du SN.

Ex : Le rapport de l'inspecteur tait trop long. Les passagers ont pris l'avion de 23h Les valses quatre temps sont la mode. -Applications : Comment identifier les SP et analyser leurs lments ? Exemple : [Les inspecteurs de la brigade criminelle se pencheront sur cette pineuse affaire vers seize heures. ]Les inspecteurs de la brigade criminelle SN + SP1[pr+D+N+Adj] se pencheront V sur cette pineuse affaire SP2 [pr+D+Adj +N] vers seize heures. + SP3[pr+D+N]

SN

SV a- [Mon oncle a achet cette voiture El-Harrach.]

-CorrigMon oncle SN a achet V SV 60 Cette voiture SN2 El-Harrach. SP[pr+N]

1.2. Syntaxe

b-[Les enfants de la voisine ont attendu leur pre pendant trois jours.] -CorrigLes enfants de la voisine SN + SP1[ Prp.+ D+ N] SN1 Ont attendu v SV leur pre SN2 Pendant trois jours SP2[prp+D+N]

1.2.2.4.

La Reprsentation Graphique :

La reprsentation par arbre ncessite l'identification des constituants de la phrase : SN, SV et SP . Prenons la phrase [Le professeur a remis les copies onze heures]. phrase dclarative ; matriau constitu de SN, SV et SP ; le SN est le professeur, le SV est a remis les copies, le SP est onze heures.

Le syntagme nominal le professeur est constitu de deux lments : le est un dterminant (D) et professeur est un nom (N).61

1.2. Syntaxe

La rgle de constitution de ce syntagme nominal est:

qui se lit [SN] se rcrit [D] plus [N ] et que nous pouvons reprsenter par :

Le Dterminant est le et le Nom est professeur :

Nous avons vu galement que le syntagme verbal [ a remis les copies] est constitu de deux lments, [a remis] et [les copies] : -[a remis] est un verbe (V) - les copies est un syntagme nominal (SN).

62

1.2. Syntaxe

La rgle de constitution de ce syntagme verbal est donc :

qui se lit [ SV] se rcrit [V] + [SN ] et que nous pouvons reprsenter par :

Le verbe est a remis, le SN est les copies, qui est lui-mme constitu d'un Dterminant, les, et d'un nom, copies ; c'est-dire que nous avons de nouveau l'application de la rgle :

63

1.2. Syntaxe

Nous ajoutons cette portion d'arbre ce que nous avons jusqu'ici:

Enfin le syntagme prpositionnel onze heures est constitu de deux lments : et onze heures.

est une prposition (Prp), onze heures est un syntagme nominal (SN).

La rgle de constitution de ce syntagme prpositionnel est " SP se rcrit Prp plus SN " :

64

1.2. Syntaxe

La Prp est , le SN onze heures, et il faut l encore faire intervenir la rgle de rcriture du syntagme nominal qui dveloppe SN en Dterminant plus Nom :

65

1.2. Syntaxe

Nous ajoutons cette dernire portion d'arbre ce que nous avions, et l'arbre complet reprsentant la structure syntagmatique de la phrase est le suivant :

66

1.2. Syntaxe

1.2.2.5. Que signifie un arbre?

Quand on le lit de HAUT EN BAS, cet arbre montre la constitution de la phrase, faite d'units hirarchises, depuis l'unit la plus grande, la phrase jusqu'aux units les plus petites, ici les mots. Chaque bifurcation partir d'un nud est la traduction graphique d'une rgle de rcriture :

Et si on le lit de BAS EN HAUT ? ce que cet arbre montre, c'est que les mots d'une phrase ne sont pas simplement les uns la suite des autres, mais ils entretiennent entre eux des relations syntagmatiques. Nous voyons que chaque mot est inscrit sous un nud, et que de ce nud part une branche qui, avec une autre branche, converge vers un mme nud suprieur. Les mots inscrits sous des nuds domins par un mme nud forment un constituant, de nature donne par l'tiquette du nud suprieur.

67

1.2. Syntaxe

1.2.2.6. Intrt de la reprsentation en arbre : Les procdures de reprsentation de phrases sont multiples : reprsentation par embotements successifs, reprsentation en cercles concentriques, etc. ; elles renvoient chacune des modes d'analyse particuliers. Elles ont chacune leurs avantages et leurs inconvnients. La reprsentation en arbre permet de bien montrer le dcoupage de la phrase en groupe nominal, groupe verbal et ventuellement groupe (s) prpositionnel (s).

Elle permet aussi de voir que les complments de phrase ne font pas partie du groupe verbal mais sont un constituant de la phrase. Prenons par exemple les deux phrases suivantes :

1. Ma fille dort dans sa chambre. 2. Ma fille est dans sa chambre.

Grce la reprsentation en arbre, l'lve va dcouvrir que le syntagme dans sa chambre est :

68

1.2. Syntaxe

- complment de phrase dans l'exemple 1 car ce syntagme est facultatif : que fait la fille ? La fille dort. Il est mobile aussi, c'est--dire que nous pouvons le dplacer : Dans sa chambre, la fille dort. L'arbre reprsentant la structure syntagmatique de cette phrase est le suivant :

Nous remarquons donc que la branche du SP est domine par le nud P ; ce qui permet de constater que le SP dans sa chambre est facultatif et mobile.

69

1.2. Syntaxe

- complment de verbe dans l'exemple 2 car ce syntagme n'est pas facultatif : que fait la fille ? *La fille est. est une phrase agrammaticale. Ce SP n'est pas mobile non plus car : Dans sa chambre, la fille est. est aussi une phrase agrammaticale. L'arbre reprsentant la structure syntagmatique de cette phrase est le suivant :

Nous remarquons donc que la branche du SP est domine par le nud SV ; le fait que le SP dans sa chambre soit domin par le nud SV signifie que ce syntagme n'est ni facultatif, ni mobile. En plus de cet avantage, la reprsentation en arbre permet d'aller du plus grand constituant au plus petit constituant de la phrase, c'est--dire des groupes aux mots qui les constituent.

70

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

COMPREHENSION DE LECRIT

71

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

72

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

2.1. La comprhension de lcrit :La sance de la comprhension de lcrit nous impose, selon Rachid Sahnouni (dans son document paru dans Oasis), les questions suivantes : quest-ce que lire ? Comment dvelopper la capacit de faire du sens avec lcrit ? Quelles techniques mettre en uvre dans le cadre de la rception et de la dcouverte de lcrit ? Quelles habitudes de lectures faut-il installer chez lapprenant ? La comprhension de lcrit, telle que la conoivent nos pdagogues et formateurs (Salah Chouaki, Djillali Attatfa, Rachid Sahnouni), a pour objectif primordial, celui de faire de lapprenant un lecteur autonome. A partir dune pdagogie explicite de la lecture, nous pouvant aider nos lves intrioriser la notion de cohrence textuelle, prendre conscience de la structure des diffrents types de textes, les duquer et les convertir la grammaire de texte. Il leur est ncessaire dacqurir de nouvelles comptences qui leur permettent de saisir la structure smantique dun texte, son contenu rfrentiel et de reconnatre le genre textuel, de diversifier leurs stratgies dapproche du sens du texte (apprhension globale du sens dun texte,laboration dhypothses de sens, recherche dindices lexicaux ou grammaticaux porteurs de sens, dcloisonnement ou dstructurations , des lments du texte pour la reconstruction du sens progression thmatique du texte tudi ).

73

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

Lacte de lire est une activit fondamentalement cognitive, trs complexe. La lecture suppose la matrise dun mcanisme et la recherche du sens. Cest un moment privilgi dans nos classes bien que difficile, car quels sont les objectifs que nous devons choisir pour donner le got de la lecture nos lves, leur faire apprcier pleinement un crit, pour quels textes devons-nous opter pour installer les capacits et comptences de lecture chez nos lves ?

2.1.1. Lenseignement de la comprhension de lcrit :(DOSSIER 1)

Thme du dossier :Les objectifs gnraux viss par la comprhension de lcrit. Introduction : Les professeurs denseignement secondaire exploitent rgulirement, propos de chaque unit didactique, un ou plusieurs textes pour la comprhension de lcrit. Sils utilisent un manuel, ils se servent ou au moins sinspirent du questionnaire qui est propos la suite du texte. Sils travaillent sur un texte quils ont eux-mmes choisi, ils laborent un questionnaire en tenant compte des indications du programme. Mais la plupart du temps, ils nont pas une vision claire de tous les objectifs gnraux que lon peut viser travers lexploitation dun texte, quil soit littraire, journalistique, scientifique ou autre. Objectifs viss travers ltude du dossier : Aprs ltude de ce dossier, le professeur sera capable : - didentifier le ou les objectifs gnraux que lon peut viser travers lapproche dun texte ; - de slectionner celui ou ceux qui rpondent aux besoins74

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

quil aura dfinis en fonction du programme ou du projet didactique quil aura ngoci avec ses lves ; - de dfinir la dmarche adquate pour l (les) atteindre. Pr-requis ncessaires : Aucune connaissance spcifique nest requise ici, mis part les notions habituellement utilises par le professeur dans le cadre de lenseignement de la comprhension. Les notions qui pourraient paratre nouvelles pour certains enseignants sont de toute manire explicites dans la premire partie de ce dossier. 1.2.1.1. Les objectifs linguistiques : Il sagit ici de lexploitation des textes dans la perspective de lacquisition de connaissances acadmiques, afin denrichir le bagage linguistique de llve. Ces objectifs sont les plus vidents, ce sont ceux qui tombent sous le sens, ceux auxquels on pense immdiatement ds quil sagit de texte car, dans notre systme ducatif, ltude des textes est avant tout axe sur lacquisition de la langue En effet, un texte, cest avant tout de la langue mise en uvre dans un contexte - de manire fonctionnelle, pour servir la communication (transmission dun message au lecteur) ; - de manire authentique, puisque ce texte na pas t fabriqu par lenseignant dans un but prcis, pour illustrer telle ou telle notion linguistique, mais produit par un auteur qui ne se proccupait nullement de lenseignement de la notion mise en uvre dans le texte. Dans cette perspective, le texte est utilis comme support des activits langagires organises par le professeur ; il lui offre une matire premire quil va pouvoir exploiter de la manire qui lui semblera la plus judicieuse. Le travail sur la langue peut se situer diffrents niveaux, que lon va numrer ci-aprs.

75

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

a). Le niveau du lexique : Dans lenseignement secondaire, lenseignant doit aider llve dvelopper ses connaissances dans le domaine du vocabulaire, en travaillant dans plusieurs directions : 1- Un enrichissement en surface , consistant en un accroissement quantitatif du stock lexical de lapprenant. Les textes permettent de travailler dans cette perspective puisquils donnent loccasion dexploiter : -un vocabulaire thmatique, li au sujet abord dans le texte : Exemple : Le jardin potager tait luvre de la matresse et de ses filles. Elles avaient bch, elles avaient arrach la mauvaise herbe, engraiss et travaill la terre jusqu la rendre lgre et fine. Puis elles avaient pris des cordes et des btons et dessin des plates-bandes et des petits sentiers quelles avaient tracs en les pitinant. Enfin, elles avaient sem et plant et les enfants les avaient aid. Quelle joie ! Et maintenant, ce quon avait sem sortait de terre. (Selma Lagerlof) Dans ce texte, il y a tout un lexique relatif au jardin, qui constitue le thme abord par lauteur : potager, bcher, arracher, mauvaise herbe, engraisser, travailler, terre, plates-bandes, sentiers, tracer, semer, planter. -un vocabulaire li au type du texte : Exemple : Une motocyclette, portant un petit homme, mavait doubl et stait installe devant moi, au feu rouge. En stoppant, le petit homme avait cal son moteur et svertuait en vain lui redonner souffle. Au feu vert, je lui demandai de ranger sa motocyclette pour que je puisse passer. Le petit homme76

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

snervait sur son moteur poussif. Il me rpondit daller me rhabiller. Avec plus de fermet, je lui fis remarquer quil entravait la circulation. Lirascible personnage, exaspr par la mauvaise volont son moteur, rpliqua que si je dsirais une drouille, il me loffrirait de grand cur. (Albert Camus) Dans ce texte, on relvera un certain nombre de verbes qui introduisent le discours indirect : demander, rpondre, faire remarquer, rpliquer. - un vocabulaire li aux notions syntaxiques investies dans le texte ; ainsi, pour lexpression de la cause, par exemple, pourra-t-on rencontrer certains termes synonymes tels que : raison , motif , origine , agent , auteur , responsable , source etc. 2). Un enrichissement en profondeur , pour aider lapprenant prciser le sens de certains mots acquis au cours de sa scolarit antrieure mais quil na pas encore mis en place et qui gardent encore un sens assez vague, surtout lorsquil sagit de synonymes quil emploie indiffremment lun la place de lautre. Prenons un exemple simple, celui de lopposition voir / regarder ; on pourra trouver dans les textes des noncs tels que : (1) Je regardais le ciel mais je ne voyais rien. (2) Je voyais bien quelquun savancer mais je ne le regardais pas. Ces noncs permettent dexpliquer la diffrence entre les deux verbes : - regarder : diriger volontairement son regard vers quelque chose. - voir : percevoir quelque chose par les yeux sans le vouloir. Bien entendu, la sance de comprhension de lcrit nest pas une sance de lexique ; il ny a donc pas lieu de trop y insister, mais de sintresser uniquement ce qui peut tre important pour la saisie du sens.

77

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

3). Une approche pratique de certaines notions, telles le champ lexical par exemple, travers le vocabulaire thmatique, qui peut effectivement constituer un champ plus ou moins riche en fonction du texte. 1.2.1.2. Le niveau de la syntaxe : Chaque texte est construit sur un certain nombre de notions syntaxiques, elles-mmes dtermines par le type de texte. Ce qui est intressant, cest que ces notions syntaxiques sont prsentes en situation et non de manire artificielle, comme les exemples que lon peut donner pour illustrer une rgle. Cela permet aux apprenants de voir quoi elles peuvent servir dans la pratique de la communication, pour la production de quel type de message. Autre avantage : le texte met souvent en relation des notions syntaxiques qui ne prennent de valeur que lune par rapport lautre mais qui sont souvent tudies sparment dans les ouvrages de grammaire. c). La langue comme but et non plus comme moyen : Si le professeur utilise, pour lenseignement de la langue, des textes qui nont pas t conus dans ce but, il nempche quil existe des ouvrages qui ont effectivement t raliss cette fin. On citera ce propos : - la mthode MENTOR, qui comporte une srie de romans conus pour lapprentissage dune langue trangre. Elle propose en effet des romans pour apprendre langlais, lallemand ou lespagnol, et mme des langues mortes comme le latin. Chaque roman comprend le texte en langue trangre, la traduction en franais ainsi que des notes qui expliquent certains points de grammaire. Lapprenant na pas besoin dtre aid par un professeur ; il peut progresser tout seul, son rythme.

78

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

- un roman dAlain Robbe-Grillet, Djinn (Editions de minuit, 1981 1985), qui, comme tous ses romans, raconte une histoire et peut tre lu comme un roman classique. Mais en fait le livre a t crit lintention des tudiants amricains dsireux de se perfectionner en franais. Dailleurs, lauteur nous en avertit indirectement dans les premires pages, o lon peut lire ce passage : En lisant [ce] rcit, on a dabord limpression davoir affaire un livre scolaire, destin lenseignement du franais, comme il doit en exister des centaines. La progression rgulire des difficults grammaticales de notre langue sy distingue sans mal, au cours des huit chapitres de longueur croissante qui correspondraient, en gros, aux huit semaines dun trimestre universitaire amricain. Les verbes y sont introduits selon lordre classique des quatre conjugaisons, avec encore, pour la seconde, une opposition nettement marque entre ceux qui comportent linfixe inchoatif et ceux qui ne le comportent pas. Les temps et les modes ont t aussi parfaitement classs, se succdant de manire rigoureuse depuis le prsent de lindicatif jusquau subjonctif imparfait, au futur antrieur et au conditionnel. Il en va de mme pour lemploi des pronoms relatifs, dont les formes complexes napparaissent que tardivement. Comme dhabitude, les verbes pronominaux rciproques et idiomatiques se trouvent, en majeure partie, rservs pour la fin. Nanmoins, le contenu anecdotique de ces pages demeure trs loign de celui, volontairement anodin, que lon rencontre en gnral dans les ouvrages du mme type . On notera que, dans ce roman, il y a des passages qui font directement rfrence des notions linguistiques, comme celuici : Estimant sans doute quelle avait assez dit de btises, Marie a dclar, alors, que ctait mon tour de raconter quelque chose. () Je demande quel genre dhistoire elle dsire. Elle veut cest catgorique une histoire damour et de sciencefiction , ce dernier mot tant prononc la franaise, bien entendu. Je commence donc :79

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

Voil. Un robot rencontre une jeune dame Mon auditrice ne me laisse pas aller plus loin. Tu ne sais pas raconter, dit-elle. Une vraie histoire, cest forcment au pass. - Si tu veux. Un robot, donc, a rencontr une - Mais non, pas ce pass-l. Une histoire, a doit tre au pass historique. Ou bien personne ne sait que cest une histoire. Sans doute a-t-elle raison. Je rflchis quelques instants, peu habitu employer ce temps grammatical, et je commence : Autrefois, il y a bien longtemps, dans le beau royaume de France, un robot trs intelligent, bien que strictement mtallique, rencontra dans un bal la cour, une jeune et jolie dame de la noblesse. Ils dansrent ensemble. Il lui dit des choses galantes. Elle rougit. Il sexcusa. Il y a dautres passages dans lesquels lauteur manipule visiblement des notions linguistiques trs prcises, mais sans expliciter ce quil fait : Nous nous sommes rencontrs de faon la fois bizarre et banale, grce une petite annonce lue dans un quotidien. Nous cherchions lun et lautre du travail : un petit travail intermittent qui nous permettrait, sans trop nous fatiguer, de nous offrir, sinon lindispensable, du moins le superflu. Il se disait tudiant, lui aussi. Une brve annonce, donc, crite en style tlgraphique avec des abrviations plus ou moins claires, recherchait un j. h ; ou une j. f. pour soccuper de deux enfants, un garon et une fille, quil sagissait probablement de garder le soir, daller chercher lcole, demmener au zoo, ou dautre choses du mme genre. Nous nous sommes prsents tous les deux au rendez-vous. Mais personne dautre nest venu. Lannonceur avait d, dans lintervalle, renoncer son projet, ou bien se procurer par une autre voie ce dont il avait besoin. Toujours est-il que, nous trouvant, Simon et moi, lun en face de lautre, chacun de nous a dabord cru que lautre tait son ventuel employeur.80

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

Lorsque noua avons dcouvert quil nen tait rien, et que lannonceur en ralit nous faisait faux bond (quil nous avait pos un lapin, comme cela se dit en France), jai t pour ma part assez due. Mais lui, sans se dmonter une seconde, sest complu prolonger volontairement sa mprise, se mettant mme me parler comme si jallais devenir dsormais son patron. Le lecteur aura sans aucun doute remarqu une accumulation assez inhabituelle de verbes pronominaux. 1.2.1.2. Les objectifs formatifs : Il sagit ici de lacquisition de connaissances procdurales, qui vont permettre llve de dvelopper des savoir faire, et de lacquisition de comportements, cest--dire de savoir tre. Etudier un texte, cest aussi une occasion pour former llve. Cette formation peut seffectuer quatre niveaux : a). Le niveau mthodologique : Il sagit ici dinculquer aux lves des techniques, des procds, des savoirs faire. Le texte servira donc de modle pour apprendre : - organiser un discours ; - structurer un nonc ; - argumenter ; - exposer ; - raconter ; - dcrire etc. On notera que ce niveau est bien pris en charge par les programmes du secondaire puisquils sont justement bass sur une typologie des textes : on tudie des textes pour apprendre en reconnatre les caractristiques au niveau de lanalyse et les rutiliser au niveau de lexpression crite. On regrettera tout de mme une chose : ces caractristiques sont dgages aprs ltude dun seul texte, alors quil aurait t plus pertinent danalyser au moins deux textes81

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

pour pouvoir les comparer afin de dgager dune part les lments communs, qui correspondent aux invariants du type, et dautre part les lments spcifiques chacun, qui sont des variables. Cette faon de procder prsente un avantage certain dans la mesure o elle met en garde les lves contre la tentation de retrouver, dans chaque texte du mme type abord par la suite, toutes les caractristiques dgages pour caractriser ce type. On en donnera un exemple vcu. Aprs avoir tudi le texte narratif et en avoir dgag la structure partir dun premier texte, un professeur propose un second texte aux lves et leur demande den dgager la structure. Dans leurs rponses, tous les lves ont retrouv dans le texte une situation initiale, des vnements et une situation finale. Rien de plus normal, dira-ton. Le problme, cest que la situation initiale ntait pas du tout voque dans ce texte qui commenait directement par lnumration des vnements ! Mais les lves, nayant pas t mis en garde, ont pens que cette structure tait invariable et quil y avait lieu de la dgager chaque fois. b). le niveau intellectuel : Lobjectif ici est de dvelopper chez les lves la pratique doprations mentales telles que dfinies par exemple par BLOOM dans sa taxonomie des objectifs cognitifs : - identifier ; - comprendre ; - appliquer ; - analyser ; - synthtiser ; - valuer. On y arrivera en demandant aux lves, au cours de la sance de comprhension, deffectuer certaines recherches : reprer un personnage, un objet, une ide, un articulateur82

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

logique ; relier des personnages des actions ou des objets des caractristiques ; retrouver les diffrentes phases dun rcit, les diffrents lments dune argumentation ; rsumer les principaux points dun dveloppement ; exprimer un point de vue critique sur une thorie, un comportement Ainsi entran, lesprit de llve deviendra plus souple, plus sr, plus rapide. c). Le niveau moral : Le rle de lenseignant tant aussi dduquer lenfant auquel il a affaire, il doit lui proposer des textes qui exaltent les vertus, les qualits morales, les bons et les beaux sentiments. Il devra donc proposer des textes qui mettent en scne des hros positifs, susceptibles de constituer des modles pour llve, qui pourra les imiter sans risquer de verser dans des dviations. On citera ce propos les romans dinitiation qui montrent comment un personnage le hros du roman fait son chemin dans la vie et comment les multiples expriences par lesquelles il passe trempent son caractre, cest--dire dveloppent en lui des qualits qui laideront russir dans la vie. Cest ainsi que Fnelon (1651 1715), qui tait le prcepteur du dauphin le fils du roi Louis XIV , crivit son intention Les Aventures de Tlmaque (1699), un roman dans lequel il imagine les aventures de Tlmaque, le fils dUlysse, parti la recherche de son pre qui tardait rentrer aprs la fin de la guerre de Troie. Le dauphin tait cens simprgner des qualits morales mises en uvre par Tlmaque pour surmonter les preuves et les difficults rencontres au cours de son voyage. A noter aussi, propos de morale, que le dauphin navait accs aux textes que dans des ditions expurges , cest--dire dans lesquelles on avait supprim tous les passages qui pouvaient choquer sur le plan moral et qui ne convenaient donc83

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

pas lducation dun jeune enfant. d). Le niveau esthtique : La frquentation des textes doit aussi former le got esthtique de llve, cest--dire lui apprendre trouver du plaisir dans la lecture. On prendra donc soin de choisir des textes bien crits, susceptibles de toucher le lecteur par le choix des mots, des structures syntaxiques, du rythme et des sonorits. Si llve est ainsi entran apprcier la littrature de qualit, il saura sloigner des uvres de mauvais got ( lalittrature , comme disait un crivain bien connu), qui dforment lesprit beaucoup plus quelles ne le forment. 1.1.2.3. Les objectifs culturels : On parle dobjectifs culturels quand on vise accder aux faits de culture que vhicule le texte et qui permettent de linscrire dans une perspective socio-historique dfinie, dans un cadre civilisationnel prcis. En effet, un texte nest pas seulement constitu de structures syntaxiques et lexicales, il vhicule aussi une vision du monde. Ces objectifs ont t totalement occults jusqu prsent ; en effet, les textes littraires taient et sont toujours prsents comme tant totalement coups du contexte socio-culturel qui a prsid leur production, et sans lequel on ne saurait les comprendre pleinement. Il sagit l de la consquence dun choix fait par linstitution, qui a privilgi laspect utilitaire de la langue, partant du principe que lurgence consistait doter llve dune comptence linguistique et ignorant en cela que la comptence linguistique ne suffit pas pour communiquer valablement si elle84

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

nest pas accompagne dautres comptences, telle la comptence socio-culturelle qui permet dajuster le message produire la situation de communication vcue dune part, et dinterprter convenablement le message reu dautre part, qui, par exemple, ne doit pas toujours tre pris dans son sens littral. Cela permet de dcouvrir dautres conceptions du monde, dautres modes de vie et de pense. Llve sera ainsi amen, par comparaison, relativiser sa propre culture, prendre conscience quelle nest ni meilleure ni pire quune autre et que toute culture droit au respect. Jean-Paul Sartre disait justement : Je ne me crois pas oblig de salir ce quoi je ne crois pas. Cest ainsi que lon apprend la tolrance et le respect, deux choses qui font cruellement dfaut dans les socits contemporaines. Cette dcouverte dune autre culture peut se produire de plusieurs manires : - un roman renseigne indirectement sur le milieu dans lequel lauteur la situ. Par exemple, un auteur franais du XIXme sicle, crivant sur la socit de son temps, nous renseignera sur cette socit. Cest ainsi que Honor de Balzac, dans les diffrents romans qui composent la fresque de la Comdie humaine , nous donne une foule de renseignements sur diffrents milieux sociaux ou professionnels : la presse, la banque, laristocratie, la bourgeoisie, la paysannerie, larme etc. ; - un auteur franais qui situe laction de son roman dans un autre pays nous permet de dcouvrir certains aspects de la civilisation, de la culture et de lhistoire de ce pays ; on en donnera comme exemple Andr Malraux, dont les romans (La condition humaine, La voie royale) nous permettent de dcouvrir certains pays du sud-est asiatique ; - des essais peuvent traiter directement de la civilisation de telle socit telle poque (lEgypte ou la Grce antiques, la Chine ou le Japon du Moyen-ge, le Prou ou le Sngal daujourdhui).85

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

Dcouvrir ainsi une civilisation diffrente de la sienne permet de se situer par rapport dautres pratiques culturelles et de relativiser ses propres pratiques. Llve apprendra ainsi la tolrance, cest--dire lacceptation et le respect de la diffrence culturelle. 1.1.2.4. Applications Aprs avoir numr et comment succinctement les objectifs gnraux, voyons maintenant comment on peut les exploiter concrtement. a) Exercice 1 : Voici un texte extrait de lancien manuel de franais de re 1 A.S., I.P.N., Alger, dition de 1995. Lisez le texte, tudiez le questionnaire propos et retrouvez les objectifs gnraux qui y sont viss. Le retour Georges Duroy, aprs une longue absence, revient dans son village natal, accompagn de sa femme que ses parents ne connaissent pas. Duroy aperut soudain, quelques centaines de mtres, deux vieilles gens qui sen venaient, et il sauta de la voiture, en criant : Les voil. Je les reconnais. Ctaient deux paysans, lhomme et la femme, qui marchaient dun pas irrgulier, en se balanant et se heurtant parfois de lpaule. Lhomme tait petit, trapu, rouge et un peu ventru, vigoureux malgr son ge ; la femme, grande, sche, vote, triste, la vraie femme de peine des champs qui a travaill ds lenfance et qui na jamais ri, tandis que le mari blaguait en buvant avec les clients. Madeleine aussi tait descendue de voiture et elle regardait venir ces deux pauvres tres avec un serrement de cur, une tristesse quelle navait point prvue. Ils ne reconnaissaient point leur fils, ce beau monsieur, et ils nauraient jamais devin leur bru dans cette belle dame en robe claire.86

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

Ils allaient, sans parler et vite, au devant de lenfant attendu sans regarder ces personnes de la ville que suivait une voiture. Ils passaient. Georges, qui riait, cria : Bonjour, pre Duroy. Ils sarrtrent net, tous les deux, stupfaits dabord, puis abrutis de surprise. La vieille se remit la premire et balbutia sans faire un pas : Cest bien toi, notre fils ? Le jeune homme rpondit : Mais oui, cest moi, le mre Duroy et, marchant elle, il lembrassa sur les deux joues, dun gros baiser de fils. Puis il frotta ses tempes contre les tempes du pre, qui avait t sa casquette, une casquette la mode de Rouen, de soie noire, trs haute, pareille celle des marchands de bufs. Puis Georges annona : Voil ma femme. Et les deux capagnards regardrent Madeleine. Ils la regardrent comme on regarde un phnomne, avec une crainte inquite jointe une sorte dapprobation satisfaite chez le pre, une inimiti jalouse chez la mre. Daprs Guy de Maupassant, Bel ami. Questions : 1. Dgagez limage du texte. 2. Relevez les termes qui dsignent les personnages. 3. Quels liens les unissent ? 4. Certains dtails indiquent que la scne se passe en milieu paysan. Relevez-les. 5. Quand la description commence-t-elle ? 6. Comment progresse-t-elle ? Relevez les verbes de mouvement. 7. Comment Madeleine voit-elle les deux vieux ? 8. Relevez les termes par lesquels les deux paysans dcrivent Madeleine. 9. Dterminez les passages descriptifs et les passages narratifs du texte. Quelle remarque pouvez-vous faire ?

87

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

Commentaire du questionnaire : Les questions 2, 3, 4, 6 (deuxime partie), 7 et 8 portent sur le lexique et elles visent donc lobjectif linguistique. Les questions 1, 5, 6 (premire partie) et 9 portent sur : -limage du texte, pour la formulation dhypothses de lecture (question 1) ; -la structure du texte, pour la dlimitation des passages descriptifs (questions 5 et 9) ; -le type de description, pour attirer lattention sur le fait que les personnages sont dcrits en mouvement (description dynamique). Ces questions visent lobjectif formatif, au niveau mthodologique. On notera que pour lobjectif linguistique, on na pos aucune question de syntaxe. On aurait pu, ce propos, prvoir deux questions, lune portant sur les temps utiliss dans le texte et le reprage des temps du rcit et de ceux de la description, lautre portant sur les procds de la description, en particulier la caractrisation laide des adjectifs qualificatifs. Quant lobjectif formatif, on aurait pu aussi prvoir une question sur les aspects des personnages qui sont dcrits ici, pour montrer que le portrait des personnages comporte des touches ayant trait au physique et des touches ayant trait au moral. On relvera que lobjectif culturel est compltement ignor ici alors quil aurait t facile de demander aux lves de procder une comparaison entre la socit dcrite dans le texte et celle dans laquelle ils vivent. Cette comparaison aurait permis de mettre en vidence que, malgr le dcalage dans le temps et dans lespace (Maupassant a vcu en France au sicle dernier et llve vit aujourdhui en Algrie), il y a des points communs, en particulier les sentiments quprouve gnralement la belle-mre pour sa bru ( une inimiti jalouse ).88

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

b) Exercice 2 Voici donc une srie de trois textes. Il vous est demand de les lire attentivement, puis dindiquer pour quel(s) objectif(s) on peut les utiliser et de justifier vos choix. Texte 1 : Une promotion dangereuse Les militaires franais ont install une S.A.S. section administrative spcialise dans un village de Kabylie pour contrler la population et lempcher davoir des contacts avec les moudjahidine. Ils veulent dsigner des responsables parmi les habitants du village pour faire excuter les ordres de larme. Il avait t la roulure de nos rues, Tayeb. Nous le foulions aux pieds comme nous foulions la poussire du chemin et, comme pour la poussire, nous le savions peine. Il vivait par un miracle chaque jour renouvel et ce rythme avait fini par acqurir un vrai gnie de linvention. Il tait humble, poli, obsquieux jusqu la nause Il vous disait le premier bonjour, et de loin rptait si vous ne lui rpondiez pas, faisait le pitre pour se faire pardonner dtre l, obstacle sur lequel les pieds et les regards des heureux ne pouvaient faire autrement que de buter. Sil vous voyait indiffrent ou agac, il recommenait, cherchait, trouvait, inventait de nouvelles grimaces, de nouveaux mots, sacharnait, sabaissait, qumandant laumne dun sourire, ft-il du mpris ! Tant de bassesse avait fini par le faire supporter. Quand le lieutenant Delcluze, en arrivant Tala, avait demand trois responsables pour le village, on avait t bien en peine de les lui fournir. Jadis, on se disputait les honneurs ; maintenant personne nen voulait. De quelquun qui a perdu tout sentiment de dignit, on dit chez nous que la honte pleut sur lui quand il marche : nul ne voulait de cette pluie. On tait rest trois jours sans trouver personne. Le quatrime, le lieutenant avait rassemble les hommes du village et leur avait dit : Il est huit89

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

heures, je vous donne deux heures encore. Si dix heures vous ntes pas venus me prsenter vos responsables, ne vous en prenez qu vous de ce qui pourra vous arriver . Personne, naturellement, navait pens Renard . (Renard, ctait le sobriquet de Tayeb). Quand quelquun avait prononc son nom, tout le monde avait fait : Ah oui ! cest vrai ! Comme toujours, on lavait oubli. On le dcouvrit dans un coin. On lui fit la proposition. Tout le monde tait dcid, part soi, le faire accepter au besoin par la contrainte. Mais il y avait trop longtemps quil disait oui tout, trop longtemps que les humiliations lui revenaient de droit. Il avait accept tout de suite et comme toujours il avait remerci : Je suis trop heureux de pouvoir servir en quelque chose cette cit qui est la mtropole des cits . Il se contorsionnait. Pourtant, avant de quitter la place, il avait tendu sur ses paules les deux pans de son burnous comme les notables, au lieu de le porter comme jadis ramass autour de son cou, puis il avait promen sur lassemble un long regard. Les plus timides avaient baiss les yeux. De ce jour, rgulirement, chaque soir, il descendait la S.A.S. prendre des ordres. Le lendemain matin, il faisait le tour du village : Le capitaine a dit Tayeb savait trs bien que Delcluze tait lieutenant, il lappelait mon capitaine par flagornerie. Au dbut, on avait essay de se moquer de lui comme jadis, un peu pour rire, mais surtout pour conjurer ainsi le pouvoir redoutable dont on lavait arm. Mais on avait vite renonc ce jeu. Le capitaine a dit... , retranch derrire cette formule comme derrire un rempart, fort dune autorit que personne moins dtre fou net song contester,Tayeb grandissait chaque jour. Nagure encore, il rasait les murs ; maintenant, il marchait droit, il prenait le haut du chemin, continuait de porter un burnous tombant droit de ses paules et ne riait plus jamais. Mouloud Mammeri, Lopium et le bton.

90

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

Texte 2 : Un soldat fort et dcid Michel Strogoff tait haut de taille, vigoureux, paules larges, poitrine vaste. Sa tte puissante prsentait les beaux traits de la race caucasique. Ses membres, bien attachs, taient autant de leviers disposs mcaniquement pour le meilleur accomplissement des ouvrages de force. Ce beau et solide garon, bien camp, bien plant, net pas t facile dplacer malgr lui, car, lorsquil avait pos ses deux pieds sur le sol, il semblait quils y fussent enracins. Sur sa tte, carre du haut, large du front, se crpelait une chevelure abondante, qui schappait en boucles, quand il la coiffait de la casquette moscovite. Lorsque sa face, ordinairement ple, venait se modifier, ctait uniquement sous un battement plus rapide du cur, sous linfluence dune circulation plus vive qui lui envoyait la rougeur artrielle. Ses yeux taient dun bleu fonc, avec un regard droit, franc, inaltrable, et ils brillaient sous une arcade dont les muscles sourciliers, contracts faiblement, tmoignaient dun courage lev, ce courage sans colre des hros , suivant lexpression des physiologistes. Son nez puissant, large de narines, dominait une bouche symtrique avec les lvres un peu saillantes de ltre gnreux et bon. Michel Strogoff avait le temprament de lhomme dcid, qui prend rapidement son parti, qui ne se ronge pas les ongles dans lincertitude, qui ne se gratte pas loreille dans le doute, qui ne pitine pas dans lindcision. Sobre de gestes comme de paroles, il savait rester immobile comme un soldat devant son suprieur ; mais, lorsquil marchait, son allure dnotait une grande aisance, une remarquable nettet de mouvement, ce qui prouvait la fois la confiance et la volont vivace de son esprit. Ctait un de ces hommes dont la main semble toujours pleine des cheveux de loccasion , figure un peu force, mais qui les peint dun trait. Michel Strogoff tait vtu dun lgant uniforme militaire qui se rapprochait de celui des officiers de chasseurs cheval en91

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

campagne, bottes, perons, pantalon demi-collant, pelisse borde de fourrure, et agrmente de soutaches jaunes sur fond brun. Sur sa large poitrine brillait une croix et plusieurs mdailles. Jules Verne, Michel Strogoff

Texte 3 : La communaut Amish Tous mes anctres taient paysans et mes enfants le seront ! confie David Ash, trente-sept ans, lil bleu pass, cheveux blonds et barbe taille lamish way. David est un Amish regular ou normal, donc conservateur, comme la plupart des vingt-cinq mille mes de sa communaut du comt de Lancaster. Dautres sont qualifis dultras ou de mous ! Sur sa ferme de 27 hectares Gordonville, il cultive la terre sans machine agricole, avec ses mules pour seule aide. Un cheval tracte le buggy, troite carriole grise ferme, quon utilise pour chaque dplacement. Ici, on ne se sert ni de voiture ni mme de bicyclette, le caoutchouc et surtout les pneumatiques, synonymes de vitesse, tant interdits. Comme tous les soirs la tombe du jour, David avance, pieds nus, jusque dans ltable, la seule lueur dune lampe ptrole qui fait danser son ombre. Il est suivi de son fils an Alan, dix-sept ans, qui remplit les mangeoires de foin et de mas concass. Pour traire ses trente-cinq vaches, David pose terre son obligatoire chapeau de paille. Ses vtements, comme ceux de la communaut, viennent de chez Kaufmann ou de chez Zimmermann, Intercourse, la ville la plus proche : chemise grossire, bretelles et pantalon de coutil noir. On ne verra jamais un Amish arborer une moustache ou bien une veste boutons, des attributs rservs aux militaires. Car les Amish sont pacifistes Un conseil dvques-paysans veille sur lapplication de leurs svres principes. Dune suspicion sans bornes lgard du progrs qui les loigne de leur identit, ils ont donc dcid darrter le cours du temps. Dans le comt de Lancaster, le prix des terres agricoles92

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

est si exorbitant (100 000 F lhectare, soit 3,5 fois plus que la moyenne en Pensylvanie) que linstallation des jeunes pose problme ! Mais sans autre ducation que le strict ncessaire pour faire un bon paysan et un pre de famille , les Amish nont gure dautre choix Grce aux rsultats des fermes amish, le comt de Lancaster bat tous les records de rendement et de qualit aux Etats-Unis pour le lait, les poulets, les ufs et le btail. Nous nutilisons pas llectricit, nos vques nous linterdisent , explique David. Il faut parfois trouver des arrangements et faire des entorses aux stricts prceptes de la communaut. Ils emploient par exemple des gnrateurs diesel pour rfrigrer les rservoirs de lait, une obligation sanitaire impose par les laiteries. Autre concession la modernit : une petite cabine tlphonique extrieure la maison pour ne recevoir et donner que les appels indispensables aux activits de la ferme, pas pour papoter . Les Amish prtendent vivre heureux, sans crime, sans lectricit, sans photographie et sans machinisme agricole moderne. Tout prouve quils le sont. Mais pour combien de temps encore ? Michel Lasseur

PROPOSITIONS DEXPLOITATION :Texte 1 : Une dangereuse promotion Ce texte peut tre exploit diffrents niveaux : 1. pour des objectifs linguistiques : Au plan du lexique, il y a : - tout un champ lexical relatif au mpris : fouler, obsquieux, nause, sabaisser, qumander, aumne, bassesse, perdre tout sentiment de dignit, humiliations. - une srie doppositions lexicales montrant la transformation du personnage (on pourrait mme dire la mue ) : sabaissait / grandissait ; faisait le pitre / ne riait plus jamais ; rasait les murs / marchait droit ; burnous ramass /93

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

tombant droit ; humiliations / autorit ; disait oui tout / le capitaine a dit . Au plan de la syntaxe, il y a : - une opposition temps du pass / prsent, correspondant lalternance rcit (quand cest le narrateur qui parle) / discours (quand cest lun des personnages qui intervient. - lutilisation de limparfait et du plus-que-parfait, le second exprimant lantriorit par rapport au premier. 2. pour des objectifs formatifs : Au plan mthodologique : - ce texte constitue un bon modle pour apprhender limage du texte dans la mesure o il en prsente tous les lments : titre, chapeau, signes typographiques particuliers (majuscules pour les noms propres, guillemets pour le discours rapport), dcoupage en paragraphes correspondant au plan du texte ; - il constitue aussi un bon modle de rcit ; il prsente en effet une structure narrative complte : une situation initiale dquilibre (Tayeb avant : un personnage mpris), un tat de dsquilibre (lintervention de Delcluze), des vnements (les pripties de la dsignation de Tayeb comme responsable), une modification (la transformation de Tayeb), une situation finale (un personnage redout) marquant un nouvel quilibre. Au plan moral : - travers ce texte, llve sera sensibilis au fait quil ne faut pas mpriser les autres, et ce pour deux raisons : la premire, cest que cela nest pas trs charitable et ne relve pas dune bonne ducation ; la deuxime, cest que cela risque de se retourner contre nous un jour ou lautre, quand la personne dont nous nous sommes moqu aura la possibilit de se venger.94

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

3. pour des objectifs culturels : Ce texte donnera tout dabord au professeur loccasion de faire des rappels propos de lhistoire nationale : colonisation franaise, lutte de libration, intervention de l'arme franaise, regroupement des populations, contrle des villages etc. Il permettra aussi aux lves de dcouvrir des adages populaires propres une rgion de lAlgrie : la Kabylie. Texte 2 : Un soldat fort et dcid 1. Objectifs formatifs Au plan mthodologique : En effet, ce qui simpose au lecteur, cest que lon a ici un modle presque parfait de description dun personnage : Michel Strogoff est en effet prsent dun triple point de vue (physique, moral et vestimentaire), avec une progression trs rigoureuse, puisque lauteur a consacr un paragraphe chacun de ces trois aspects, en les sparant nettement. Cette description sorganise aussi selon un double progression thmatique : une progression thme constant, caractrise par la reprise du nom du personnage au dbut de chaque paragraphe, et une progression thme clat, puisque lauteur aborde dans ce portrait, comme nous lavons dj signal, trois aspects : description physique, description du caractre, description de la tenue. Au plan moral : Ltude de ce texte permet de prsenter llve un type de hros positif, qui possde des qualits morales remarquables : courage, gnrosit, bont, esprit de dcision, sobrit, patience, aisance, confiance en soi, volont. On pourra donc le considrer comme un modle95

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

susceptible de contribuer la formation morale de llve, qui pourra limiter sans crainte de verser dans la dviation. 2. Objectifs linguistiques : Au plan lexical : On peut recenser ici plusieurs champs lexicaux : - un champ lexical relatif aux parties du corps humain : paules, poitrine, tte, pieds, chevelure, face, cur, yeux, arcade, muscles, nez, narines, bouche, lvres ; - un champ lexical relatif aux adjectifs exprimant des formes : haut, large, vaste, carr, droit, symtrique, saillant ; - un champ lexical relatif aux qualits morales : courage, gnreux, bon dcid, sobre, confiance, volont. Au plan syntaxique : On pourra noter ici lutilisation de diffrents procds de qualification : - les adjectifs qualificatifs : haut, vigoureux, large, vaste, puissant, beau, solide, carr, abondant, ple, rapide, vif, fonc, droit, franc, inaltrable - les subordonnes relatives : qui schappait en boucles , qui lui envoyait la rougeur artificielle , dont les muscles sourciliers tmoignaient , qui prend rapidement son parti , qui ne se ronge pas les ongles - les complments de nom : de la race caucasique , des ouvrages de force, dune circulation plus vive , sans colre des hros , de ltre gnreux On notera aussi lusage des deux temps utiliss pour la description : - limparfait, utilis pour noter les prdicats qualifiants , cest--dire les qualits : tait, prsentait, se crpelait, schappait, coiffait, venait, envoyait, brillaient, tmoignaient, dominait - le prsent, utilis pour noter les prdicats96

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

fonctionnels , cest--dire les attitudes : prend, ronge, gratte, pitine, semble. Texte 3 : La communaut Amish Ce texte sera exploit pour 1. des objectifs culturels, prioritairement, pour dcouvrir une autre conception du monde, que lon peut caractriser ainsi : dans un pays qui a atteint le plus haut degr dans lutilisation de la technologie moderne (les Etats-Unis), il existe paradoxalement des gens qui rejettent cette technologie pour utiliser les mthodes traditionnelles (et archaques) hrites de leurs anctres ; ce rejet de la modernit se traduit par le refus des apports du progrs (tracteur, automobiles, lectricit) ; le refus dides reues, qui ont pourtant cours dans bon nombre de socits, dont la notre : dune part, que la productivit et la qualit ne dpendent pas des moyens utiliss, mais de la faon dont le travail est fait, dautre part que lon peut en fait se passer de beaucoup de choses considres gnralement comme tant indispensables : voitures, machines, lectricit, tlphone ; 2. des objectifs linguistiques, accessoirement, pour exploiter le vocabulaire relatif lagriculture : paysans, ferme, hectares, terre, machine agricole, mules, cheval, carriole, table, mangeoires, foin, mas, traire, vaches, rendement, lait, poulets, ufs, btail ; 3. des objectifs formatifs, ventuellement, dans la mesure o ce texte pourrait servir pour ltude du type expositif, sauf quil ne sagit pas dun exemple trs rigoureux et quil ne pourrait donc pas servir de modle.

97

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

CONCLUSIONS On aura remarqu que : - tous les textes permettent de travailler sur des objectifs linguistiques parce quil y a toujours, dans un texte, des structures syntaxiques ou des champs lexicaux susceptibles dtre exploits ; - certains, sils sont bien construits, peuvent tre utiliss pour des objectifs formatifs ; - un petit nombre de textes prsentent un contenu intressant, pouvant donner lieu une exploitation sur le plan culturel. Ces trois types dobjectifs sont en interaction, cest-dire quil ne sont pas indpendants : il y a un point de dpart, lobjectif linguistique, sur lequel vont venir se greffer les objectifs formatif et culturel.

2.1.2. Problmatique du choix du texte (Dossier 2)Introduction :

Nous avons vu dans un premier temps quels taient les objectifs que lon pouvait viser travers lexploitation dun texte. Mais avant den arriver l, il faut dabord choisir le texte. Nous allons donc voir quels sont les critres prendre en considration pour choisir un texte correspondant ce que lon veut faire. Nous le ferons travers un certain nombre de choix qui seront proposs sous forme dalternatives et discuts. Des conclusions seront ensuite dgages. Objectifs du dossier : Aprs tude de ce dossier, lenseignant sera capable de : - cerner tous les critres qui doivent prsider au choix dun texte exploiter en comprhension de lcrit ; - comprendre les implications dcoulant du choix de telle ou telle perspective ;98

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

- retenir bon escient le critre adquat pour le choix du texte correspondant lobjectif quil sest fix. Plan du dossier : Texte modle ou texte-prtexte ? 1. uvre entire ou extraits ? 2. Texte classique ou texte moderne ? 3. Texte original ou texte adapt ? 4. Rcit ou dialogue ? 5. Texte littraire ou document authentique ? 6. Texte de littrature franaise (ou francophone) ou texte traduit ? 7. Texte long ou texte court ? 8. Texte type ou variante ? 9. Manuel ou banque de textes personnelle ?

2.1.2. Texte-modle ou texte-pretexte ? a). Texte-prtexte : Cest un support que lon utilisait dans les annes 60 et 70, lorsque lon parlait encore de lecture explique . A lpoque, la sance de comprhension de lcrit ne sinscrivait pas dans une perspective donne, comme cest le cas actuellement. Lobjectif tait de dvelopper laptitude des lves la comprhension des textes ; le professeur pouvait donc choisir nimporte quel texte pour en exploiter le contenu smantique et linguistique ; il ntait soumis aucune contrainte. En voici un exemple, pris dans Recueil de textes et techniques dexpression, un manuel de franais conu pour la 2me A.S. (I.P.N., Alger, 1985) : La grand-mre Elle se disait que ses enfants et petits enfants laimaient bien, mais quelle leur semblait dun autre ge, dpasse, ne99

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

comprenant au fond pas grand chose, et que tout ce quelle pourrait dire et faire maintenant ne servirait rien. Elle avait t jeune elle aussi et se le rappelait ; mais elle avait limpression quautour delle on ne parvenait pas le croire : elle tait pour tout le monde une vieille de toujours. Or elle avait dans, rv, dsir, attendu beaucoup de choses, et pourvu quelle ne se regardt pas dans une glace, il ne lui semblait pas quelle et tellement chang. On ne voyait delle que ce visage rid, ces lunettes toujours de travers quelle retenait par un lastique, cette dmarche un peu cahotante, toute la laideur de la vieillesse. Bien mieux, elle avait limpression que sa prsence gnait. Elle remarquait quon la recevait volontiers chez lun de ses enfants mais personne ne la retenait au bout dune semaine si elle parlait de repartir. En effet, quel plaisir recevoir une vieille ? Sans doute, se disait-elle, est-ce une bonne prparation au dpart dfinitif, et mme une grce de Dieu : se sentir de trop partout. Elle naurait donc presque plus rien quitter mais elle ne pouvait se dfendre dtre triste en songeant cela. Jos Cababanis, Les cartes du temps. I. COMPREHENSION GLOBALE 1) Comment ses enfants et petits enfants la voient-ils ? 2) Accepte-t-elle facilement limage quils lui renvoient ? 3) A-t-elle de tout temps t telle quils la voient actuellement ? 4) Comment sa prsence est-elle ressentie ? Pourquoi ? 5) Quelle conclusion en tire-t-elle ? II. COMPREHENSION APPROFONDIE 1) Comment la grand-mre est-elle actuellement ? 2) Comment tait-elle dans le pass ? 3) Quelles sont ses relations avec les siens ? 4) Comment se console-t-elle ? Mais est-ce vraiment une consolation ? Pourquoi ? 5) Que pensez-vous de la situation des vieux dans le monde urbain daujourdhui ? III. EXPLOITATION LINGUISTIQUE 1) Morpho-syntaxe : Etude de la compltive100

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

2) Lexique Etude du champ lexical en rapport avec la vieillesse. IV. PROLONGEMENT ECRIT Quelle place occupe votre grand pre ou votre grand-mre dans votre famille ? Quel est votre comportement avec eux ? Etes-vous heureux de les avoir la maison ? Pourquoi ? On aura not que lexploitation propose pour ce texte ne sinscrit dans aucune approche mthodologique pralablement dfinie : les auteurs affirment seulement quils ont essay de prendre en charge les proccupations linguistiques dune part et dautre part le problme de la motivation, facteur psychologique dune relle importance . Plus loin, ils ajoutent que llve et le professeur trouveront dans ce livre : 1) des textes dont la thmatique essaie de rpondre aux proccupations de ladolescent ; 2) des questionnaires dtude et de comprhension proposs titre indicatif ; 3) des exercices de langue susceptibles denrichir ou de consolider les mcanismes fondamentaux de la langue . On laura constat : il ny a aucune stratgie dans cette dmarche ; peu importe le texte, pourvu quil donne loccasion aux lves de se livrer des activits de comprhension et dexpression. Actuellement, le texte-prtexte est utilis uniquement comme cadre intgrateur de notions linguistiques que lon veut faire fonctionner en contexte, pour viter de revenir aux pratiques traditionnelles qui consistaient travailler sur des phrases isoles. Ce faisant, on se place dans une double perspective, celle de la grammaire de texte et celle de lapproche communicative.

101

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

b). Texte-modle : Cest un texte qui illustre bien les caractristiques dun modle textuel parmi ceux qui figurent au programme (rcit, description, argumentation). En voici un exemple : Pour la premire fois, la vieille Rahma dcouvrait une femme bien diffrente de celles du village. Elle voyait se dresser devant elle une personnalit mrie par les preuves sous les apparences de la jeune fille nave. Rahma tait comme fascine. Sur les lvres, flottait un mystre qui attirait. La bouche, sduisants, les dents, rgulirement plantes, clatantes, exprimaient la joie de vivre. De longs cils, des sourcils bien fournis aux arcs parfaits, accentuaient le charme du regard : ils rehaussaient la beaut du visage autant quils dcelaient la vigueur du caractre. Le mouvement des mains sharmonisait avec les paroles et leur donnait plus de chaleur. La tresse, abondante, souple, dans une courbe gracieuse, retombait sur la ceinture blanche. Et les fleurs damandier sur la robe apportaient une note de printemps. Abdelhamid Benhadouga, La fin dhier. Ce texte peut tre utilis pour travailler sur la description des personnages (le portrait), en cela il constitue un modle que lon peut imiter dans son organisation. c). Conclusions : Le choix sera donc fonction de lobjectif vis : si lon doit travailler dans une perspective mthodologique, dans une perspective dtermine, on optera pour un textemodle ; si lon doit travailler dans une perspective purement linguistique, sans axe ni critres pralablement dfinis, on optera pour un texte-prtexte.

-

-

102

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

2.1.2.1. Ouvre entire ou extraits ? Faut-il opter pour une uvre entire que lon tudiera pendant un certain temps (un trimestre par exemple) ou pour des extraits choisis de manire clectique dans des uvres diffrentes ? La rponse la question dpend, l encore, de lobjectif vis : - si lon fait de la lecture suivie et dirige, une uvre entire simpose ; - si lon travaille sur un genre littraire (le roman, la conte, la nouvelle), on aura l aussi besoin de parcourir toute une uvre pour cerner les caractristiques de ce genre, qui ne peuvent pas tous apparatre dans une seule page ; - si lon fait de la comprhension de lcrit, un extrait sera plus indiqu parce que, dune sance lautre, le type de texte ou le thme de la leon change et il nest pas vident que lon puisse trouver dans une seule uvre toutes les notions que lon veut exploiter ; - si lon travaille sur des notions linguistiques, un court extrait pourra suffire. On fera simplement remarquer que la lecture suivie et dirige a pratiquement disparu de nos classes alors que cest un instrument privilgi pour : - donner le got de la lecture aux lves, condition sine qua non pour faire de nos lves des lecteurs autonomes ; - dvelopper la culture littraire des lves ; - enrichir leurs connaissances linguistiques, en particulier le vocabulaire. 2.1.2.3. Texte classique ou texte moderne ? a). Texte classique : Nous entendons par l un texte de littrature franaise des XVIme, XVIIme et XVIIIme sicles, qui na pas t modernis , cest--dire quil na pas t rcrit en franais contemporain.103

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

En voici un exemple : Ce discours me surprend, il le faut avouer. Je ne vous cherchais pas pour lentendre louer. Quoi ! Pour vous confier la douleur qui maccable, A peine je drobe un moment favorable, Et ce moment si cher, Madame, est consum A louer lennemi dont je suis opprim ! Qui vous rend vous mme, en un jour, si contraire ? Quoi ? Mme vos regards ont appris se taire ? Que vois-je ? Vous craignez de rencontrer mes yeux ? Nron vous plairait-il ? Vous serais-je odieux ? Racine, Britannicus, acte II, scne 6 (1669) Que remarque-t-on la lecture de ce texte ? La langue utilise prsente certaines diffrences par rapport la langue daujourdhui. Au plan du vocabulaire : peine (ligne 4) : avec peine, opprim (ligne 6) : dont on subit les mfaits, qui (ligne 7) : quest-ce qui, contraire (ligne 7) : diffrente, odieux (ligne 10) : hassable. Au plan de la syntaxe : il le faut avouer (ligne 1) : il faut lavouer, dont (ligne 6) : par qui vous rend vous-mmesi contraire (ligne 7) : vous rend si contraire vous-mme.

-

b). Texte moderne : Nous entendons par l un texte crit au XIXme ou au XXme sicles. En voici un exemple : Eugne se trouva seul et face face avec Vautrin. Je savais bien que vous y arriveriez, lui dit cet homme en gardant un imperturbable sang-froid. Mais coutez ! Jai de la104

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

dlicatesse tout comme un autre, moi. Ne vous dcidez pas dans ce moment, vous ntes pas dans votre assiette ordinaire. Vous avez des dettes. Je ne veux pas que ce soit la passion, le dsespoir, mais la raison qui vous dtermine venir moi. Peuttre vous faut-il un millier dcus. Tenez, le voulez-vous ? Ce dmon prit dans sa poche un portefeuille et en tira trois billets de banque quil fit papilloter aux yeux de ltudiant. Eugne tait dans la plus cruelle des situations. Il devait au marquis dAjuda et au comte de Trailles cent louis perdus sur parole. Il ne les avait pas et nosait aller passer la soire chez Mme de Restaud, o il tait attendu. Ctait une de ces soires sans crmonie o lon mange des petits gteaux, o lon boit du th, mais o lon peut perdre six mille francs au whist. H. de Balzac, Le pre Goriot Quand on lit ce texte, on remarque que, bien quil ait t crit en 1834, le vocabulaire et la syntaxe nen sont pas tellement diffrents de ce que lon peut voir dans la langue daujourdhui. c). Conclusions : Pour lenseignement du franais langue trangre, le texte classique est dconseiller pour deux raisons essentielles : -il prsente des particularits linguistiques qui peuvent gner les lves dans la mesure o il sagit dacceptions ou de tournures qui ne sont plus en usage aujourdhui ; on va donc prsenter llve des mots et des structures quil ne pourra pas rutiliser dans ses productions, cela reviendrait en fait encombrer son esprit inutilement ; -il traite de thmes qui ne sont plus dactualit et qui ne sont donc pas susceptibles dintresser les lves. Le texte moderne, par contre, fait usage dune langue que llve peut rutiliser telle quelle et il traite de thmes beaucoup plus en rapport avec ses proccupations. On notera cependant que le texte classique prsente un aspect positif qui est denrichir la culture littraire de llve et de lui permettre de prendre connaissance duvres marquantes de la littrature franaise. A ce titre, et sans en faire un usage105

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

trop frquent, on pourra prsenter aux lves quelques textes classiques au cours de lanne, en prenant soin de choisir les moins marqus, cest--dire ceux dont la langue se rapproche le plus de celle d'aujourd'hui. 2.1.2.4. Texte original ou texte adapte ? a). Texte original : Cest le texte que lon reprend tel quil a t crit par lauteur, sans y apporter aucune modification, ni dans le fond ni dans la forme. En voici un exemple : Le fil de laurore ne faisait quapparatre quOmar apportait dj la laine achete Socq-el-G Le bonheur de ces aubes tendres, rayonnantes, la fracheur blouie, le dchirait comme une charde. Il commenait tout de suite dvider les cheveaux. Puis il allait aux commissions pour les ouvriers. Il se sentait moins sombre et triste ; les conversations dsabuses des tisserands, il les coutait de loin, dans un demi-engourdissement. Il courait ensuite jusqu Bab Zir, chez Mahi Bouanane, pour y prendre un couffin et des consignes. Il avait la charge de faire le march du patron. Mais sa mission ntait jamais remplie selon les dsirs de dame Bouanane ; il coutait religieusement les remontrances de celle-ci. Pour aider le vieux Skali que la snilit rendait, certains jours, impropre tout travail, il embobinait de la chane des Trara, tnue comme des cheveux dange. Un peu plus tard, il portait de la laine au teinturier et len rapportait sitt que lhomme la retirait de son chaudron noir. Sacquittant tant bien que mal des mille et une corves que lon requrait de lui, il narrivait satisfaire personne. Toujours quelquun le poursuivait de ses insultes, le tanait. Quon linjurie, bah ! il sy est habitu ; ce dont il ne veut pas, ce sont les coups de poing, les navettes quon lui envoie la tte. Si, daventure, il lui arrivait dembrouiller un cheveau, tous les tisserands, de leurs mtiers, lui envoyaient des jets de salive. M. Dib, Le mtier tisser.106

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

b). Texte adapt : Cest un texte qui a t retouch, cest--dire quil a subi des transformations. Ces modifications portent sur le vocabulaire (des mots sont remplacs par dautres), sur la syntaxe (des phrases sont reconstruites) et mme sur la structure du texte (des passages entiers sont supprims ou rajouts) et elles sont justifies par le dsir de rendre le texte plus abordable . Quand le texte est adapt, cest signal par la mention suivante : daprs , qui prcde lindication du nom de lauteur En voici un exemple, cest en fait le texte original prcdent qui a t adapt : Le soleil se levait peine ; dj Omar apportait la laine quil avait achete la veille au souk. Il commenait tout de suite dvider les cheveaux. Puis il faisait les commissions pour les ouvriers. Il courait ensuite jusqu Bab Zir chez Mahi Bouanane, pour y prendre un couffin ; en effet, ctait lui qui tait charg de faire le march du patron. Mais dame Bouanane ntait jamais contente : les lgumes ntaient pas frais, la viande tait trop grasse, il avait oubli de porter le pain au four du boulanger Il coutait sans rpondre, en baissant la tte, les svres reproches de dame Bouanane. Il y avait dans latelier un vieil ouvrier, que lge rendait, certains jours, incapable de travailler. Pour laider, Omar embobinait des fils fins comme les cheveux ; les faibles yeux du vieillard narrivaient pas les distinguer. Un peu plus tard, il portait de la laine au teinturier et len rapportait ds que lhomme la retirait de son chaudron noir. Chacun lui donnait des ordres ; il essayait de rendre service tout le monde ; mais il narrivait satisfaire personne. Il y avait toujours quelquun pour lui lancer des reproches. Bah ! il sy tait habitu ; ce dont il ne voulait pas, ctaient les coups de poing, les navettes quon lui envoyait

107

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

la tte. Si, par hasard, il embrouillait un cheveau, tous les tisserands, de leurs mtiers, le grondaient vivement. (Texte extrait du Manuel de franais, 5e et 6e AF, IPN, ALGER) On notera quil sagit l dun autre texte pratiquement, puisquil ne subsiste de loriginal que les passages souligns. En effet, on a remplac certains mots par dautres, on a supprim certains passages et on en a rajout dautres ; si les deux premires oprations peuvent se concevoir (mots difficiles, passages non ncessaires la comprhension du texte), on peut par contre sinterroger sur lopportunit de laddition de passages. Le rsultat de cette adaptation, cest que lon a compltement dnatur le texte de lauteur : le texte obtenu nest plus un texte de Dib. On peut donc se demander quel peut tre lintrt de telles pratiques, que rien ne peut justifier sur le plan pdagogique, car ou bien le texte original correspond lusage que lon veut en faire (dailleurs rien nempche dexpliquer les mots difficiles en notes) ou bien on en cherche un autre ; et lon a toujours la ressource de fabriquer un texte pour la circonstance, cest ce que font de nombreux enseignants, surtout dans les premires annes de lapprentissage. Voici un exemple de texte fabriqu (nous dirons aussi texte didactique ) : Monsieur le Chef du personnel, Comme vous me le demandez par votre lettre du 20 mars, je mempresse de vous donner les renseignements me concernant. Je travaille actuellement dan lunit de production Batimtal o joccupe le poste de secrtaire de direction du service commercial, en relation constante avec les clients et les fournisseurs. Je mintresse beaucoup aux problmes du btiment ; je me permets de vous prciser que je suis seconde par une dactylographe et que jai lentire responsabilit du secrtariat.108

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

Du fait de la rcente nomination de mon mari Mostaganem, je dois envisager de quitter Alger ; jaimerais nanmoins que mon exprience me soit utile dans mon nouvel emploi. Cest pourquoi je souhaite vivement quil vous soit possible de retenir ma candidature. Malika Mokhtar (Texte extrait de Le franais au lyce, 1re A.S., ditions LIBRIS, Alger, 1999). Ce texte a t fabriqu pour donner aux lves un modle de lettre. c) Conclusions : - Le texte original est gnralement un texte riche, que lon peut exploiter sur diffrents plans ; il donne une ide exacte du style de lauteur, de sa sensibilit, de la langue quil utilise. - Le texte adapt trahit la pense et le style de lauteur ; son utilisation ne se justifie en aucune faon. - Si, pour une raison ou pour une autre, on ne peut pas utiliser un texte original, il vaut encore mieux fabriquer un texte qui convienne la situation. 2.1.2.5. Rcit ou Dialogue ? a). Rcit : On entend par rcit , dans ce contexte, un texte rapport la troisime personne et dans lequel les personnages ninterviennent pas directement. En voici un exemple : Un matin, alors que la mer tait toute blanche, et que la lueur des toiles faisait scintiller les nuages blancs qui sentassaient au-dessus de la Marmara, Slime rassembla son courage et dcida de prendre le large. Le cur serr, tiraillant sans cesse ses moustaches rousses, il examinait la surface de la mer, tout en menant le bateau vers l'le Maudite, l o il avait si souvent rencontr les dauphins. Il fit deux fois le tour de lle, puis il parcourut le large, jusquaux environs de Yalova. La mer109

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

tait calme et dserte. De l, il mit le cap sur Silivri, puis revint vers Mnekch, pour repartir aussitt dans la direction des les. Et soudain, comme en un rve, ce fut le miracle La dauphine en tte, ils surgirent devant lle des Princes ; ils bondissaient en traant des arcs de lumire, ils sapprochaient de lui, tincelants La mer tait secoue par un ouragan de lumire, de joie de chaude amiti. Yachar Kemal, Et la mer se fcha. b). Dialogue : On entend ici par dialogue un texte dans lequel les personnages sont mis en scne ; ils interviennent directement et leurs propos sont rapports tels quels. En voici un exemple : Bonjour, dit le renard. - Bonjour, rpondit poliment le petit prince Qui es-tu ? Tu es bien joli. - Je suis un renard. - Viens jouer avec moi, lui proposa le petit prince. Je suis tellement triste - Je ne puis pas jouer avec toi, dit le renard. Je ne suis pas apprivois. - Ah ! pardon, fit le petit prince. Mais aprs rflexion, il ajouta : - Quest-ce que signifie apprivoiser ? - Tu nes pas dici, dit le renard. Que cherches-tu ? - Je cherche les hommes, dit le petit prince. Quest-ce que signifie apprivoiser ? - () - Cest une chose trop oublie, dit le renard. a signifie crer des liens Saint-Exupry, Le petit prince En principe, le rcit est utilis comme support pour travailler sur lcrit, parce quil est justement caractristique de lexpression crite tandis que le dialogue sera utilis de110

2 .Comprhension de lecrit et grammaire textuelle

prfrence pour travailler sur lexpression orale parce quil prsente diffrents types dintonation. On notera cependant que le dialogue ne respecte pas toujours les caractristiques de loral dans la mesure o il nest souvent que la transcription de lcrit (crit oralis). 2.1.2.6. Texte littraire ou document authentique ? On peut utiliser trois sortes de support dans le cadre de la comprhension de lcrit : a). texte littraire : Il peut tre dun auteur franais (comme Voltaire, Malraux ou Flaubert) ou francophone (comme Mammeri, Chrabi ou Csaire) et consister en un extrait de roman, un conte, un pome ou un extrait dune pice de thtre. Ce genre de texte tant bien connu des enseignants, il ne parat pas utile den donner un exemple. b). Document authentique : Cest un texte que lon peut trouver dans lenvironnement de llve, qui na pas t conu pour tre exploit en classe