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Orlandini Carcreff, L’expédition scientifique de Maupertuis 214 L’expédition scientifique de Maupertuis en Laponie Alessandra ORLANDINI CARCREFF Université Paris-Sorbonne doi.org/10.26337/2532-7623/ORLANDINI Riassunto: La Lapponia è sempre stata un’area particolarmente interessante per gli uomini di scienza e per le spedizioni scientifiche nel corso dei secoli, trattandosi di un territorio relativamente vergine dal punto di vista naturalistico, ma abbastanza vicino, non richiedendo, di conseguenza, lunghi viaggi estenuanti per raggiungerlo. Nel Settecento, la Lapponia ospitò la prima e più importante missione scientifica francese: la spedizione guidata da Maupertuis nel 1737 per misurare il grado di meridiano della Terra al polo. L’articolo presenta un panorama delle conoscenze sulla forma della Terra nel Seicento e nel Settecento, l’organizzazione pratica della spedizione in Lapponia e le ripercussioni scientifiche che essa provocò al ritorno degli scienziati. Vengono inoltre analizzate le relazioni di viaggio di Maupertuis e dell’abate Outhier, facenti parte della riflessione sul genere letterario del viaggio boreale. Abstract: Lapland has always been a particularly interesting area for scientists and for scientific expeditions over the centuries, being a relatively virgin territory from the point of view of nature, but not so far, which did not require long and difficult travels. In the 18 th century, Lapland hosted the first and largest French scientific mission: the expedition led by Maupertuis in 1737 to measure the Earth’s degree of meridian at the pole. The article presents what Europe knew about the shape of the Earth during the 17 th and the 18 th centuries, the practical organization of the expedition in Lapland and the scientific repercussions it provoked. The travel relationships of Maupertuis and Outhier are also analyzed, as part of the reflection on the Nordic travel literary genre. Keywords: Lapland, meridian, Earth Introduction La Laponie fut toujours un terrain particulièrement intéressant pour les hommes de science et pour les expéditions scientifiques au fil des siècles, s’agissant d’un territoire assez vierge du point de vue naturel, mais suffisamment proche, ce qui n’imposait pas de longs et exténuants voyages. Au XVIII e siècle, la Laponie accueillit la première et plus importante mission scientifique française : l’expédition dirigée par Maupertuis en 1737 pour mesurer le degré de méridien de la Terre au pôle. La « figure de la Terre » aux XVII e et XVIII e siècles et la nécessité d’une étude sur le terrain En 1666, le roi Louis XIV créa l’Académie des Sciences à Paris, alors que la Hollande et l’Angleterre, plusieurs décennies auparavant, avaient déjà établi des académies scientifiques. Une des personnalités les plus célèbres dans le domaine astronomique en Europe était Giovanni Domenico Cassini, professeur d’astronomie à l’université de Bologne, où il travailla activement à l’étude du mouvement apparent du soleil, pour vérifier la première loi de Kepler ; il observa également Vénus, Mars, Saturne et Jupiter et découvrit les satellites de Saturne et la grande tache rouge de Jupiter. Sa valeur et sa célébrité parvinrent en France et Louis XIV l’invita à diriger l’Observatoire de Paris. Dans les années 70 du XVII e siècle, le problème de la forme de la Terre commença de nouveau à se poser : les observations de Jean Richer à Cayenne et d’Edmond Halley à Sainte-Hélène montraient, en effet, que sous ces latitudes le pendule oscillait plus lentement qu’à Paris et à Londres. Pour Newton ces informations furent une révélation : elles signifiaient que le pendule était plus éloigné du centre de la Terre à Cayenne et à Sainte-Hélène et, par conséquent, que la Terre n’était pas ronde, mais aplatie aux pôles. Une affirmation de ce genre fut accueillie en France comme un véritable scandale : la science française était encore liée à la vision cartésienne du monde, vision que le fils de Cassini (Giacomo Cassini) contribua à confirmer, car les mesures qu’il avait fait du degré du méridien à Paris et à Dunkerque

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Orlandini Carcreff, L’expédition scientifique de Maupertuis

214

L’expédition scientifique de Maupertuis en Laponie

Alessandra ORLANDINI CARCREFF Université Paris-Sorbonne

doi.org/10.26337/2532-7623/ORLANDINI

Riassunto: La Lapponia è sempre stata un’area particolarmente interessante per gli uomini di scienza e per le spedizioni scientifiche nel corso dei secoli, trattandosi di un territorio relativamente vergine dal punto di vista naturalistico, ma abbastanza vicino, non richiedendo, di conseguenza, lunghi viaggi estenuanti per raggiungerlo. Nel Settecento, la Lapponia ospitò la prima e più importante missione scientifica francese: la spedizione guidata da Maupertuis nel 1737 per misurare il grado di meridiano della Terra al polo. L’articolo presenta un panorama delle conoscenze sulla forma della Terra nel Seicento e nel Settecento, l’organizzazione pratica della spedizione in Lapponia e le ripercussioni scientifiche che essa provocò al ritorno degli scienziati. Vengono inoltre analizzate le relazioni di viaggio di Maupertuis e dell’abate Outhier, facenti parte della riflessione sul genere letterario del viaggio boreale. Abstract: Lapland has always been a particularly interesting area for scientists and for scientific expeditions over the centuries, being a relatively virgin territory from the point of view of nature, but not so far, which did not require long and difficult travels. In the 18th century, Lapland hosted the first and largest French scientific mission: the expedition led by Maupertuis in 1737 to measure the Earth’s degree of meridian at the pole. The article presents what Europe knew about the shape of the Earth during the 17th and the 18th centuries, the practical organization of the expedition in Lapland and the scientific repercussions it provoked. The travel relationships of Maupertuis and Outhier are also analyzed, as part of the reflection on the Nordic travel literary genre. Keywords: Lapland, meridian, Earth Introduction

La Laponie fut toujours un terrain particulièrement intéressant pour les hommes de science et pour les expéditions scientifiques au fil des siècles, s’agissant d’un territoire assez vierge du point de vue naturel, mais suffisamment proche, ce qui n’imposait pas de longs et exténuants voyages.

Au XVIIIe siècle, la Laponie accueillit la première et plus importante mission scientifique française : l’expédition dirigée par Maupertuis en 1737 pour mesurer le degré de méridien de la Terre au pôle. La « figure de la Terre » aux XVIIe et XVIIIe siècles et la nécessité d’une étude sur le terrain

En 1666, le roi Louis XIV créa l’Académie des Sciences à Paris, alors que la Hollande et l’Angleterre, plusieurs décennies auparavant, avaient déjà établi des académies scientifiques. Une des personnalités les plus célèbres dans le domaine astronomique en Europe était Giovanni Domenico Cassini, professeur d’astronomie à l’université de Bologne, où il travailla activement à l’étude du mouvement apparent du soleil, pour vérifier la première loi de Kepler ; il observa également Vénus, Mars, Saturne et Jupiter et découvrit les satellites de Saturne et la grande tache rouge de Jupiter. Sa valeur et sa célébrité parvinrent en France et Louis XIV l’invita à diriger l’Observatoire de Paris.

Dans les années 70 du XVIIe siècle, le problème de la forme de la Terre commença de nouveau à se poser : les observations de Jean Richer à Cayenne et d’Edmond Halley à Sainte-Hélène montraient, en effet, que sous ces latitudes le pendule oscillait plus lentement qu’à Paris et à Londres. Pour Newton ces informations furent une révélation : elles signifiaient que le pendule était plus éloigné du centre de la Terre à Cayenne et à Sainte-Hélène et, par conséquent, que la Terre n’était pas ronde, mais aplatie aux pôles. Une affirmation de ce genre fut accueillie en France comme un véritable scandale : la science française était encore liée à la vision cartésienne du monde, vision que le fils de Cassini (Giacomo Cassini) contribua à confirmer, car les mesures qu’il avait fait du degré du méridien à Paris et à Dunkerque

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montraient que la longueur des degrés augmentait vers le sud et diminuait vers le nord1 : la Terre aurait été donc oblongue, ce qui était tout à fait cohérent avec le système cartésien des tourbillons dont la pression influe sur le pendule en en provoquant le retard : « la résistance des cartésiens – de leur point de vue au moins – était donc assez bien fondée et assez sérieuse en 1730. »2

Parmi les défenseurs des idées de Newton, on trouvait un jeune savant, élu à l’Académie des Sciences à vingt-cinq ans pour ses études de mathématiques : Pierre-Louis Moreau de Maupertuis. Né à Saint-Malo le 7 juillet 1698, Maupertuis s’était déjà intéressé à la mécanique et à l’astronomie, mais ce fut avec son voyage à Londres de 1728 qu’il se convainquit de l’exactitude des théories newtoniennes. En Angleterre, il fut élu membre de la Royal Society et, après son retour à Paris, il se plongea dans les études astronomiques.

La tâche que Maupertuis se proposa n’était pas facile. […] Il fallait montrer que l’attraction n’était pas ce fameux

« monstre métaphysique » proscrit par Descartes, et faire accepter la loi de l’inverse des carrés ; il fallait surtout infirmer les mesures géodésiques établies avec tant de peine pendant trente ans par Cassini, pour le compte de l’Académie et « par ordre du Roi »3.

Louis XIV avait déjà commandé à l’Académie de déterminer de façon correcte la dimension de la

Terre et, désormais, c’était l’occasion pour Maupertuis de souligner qu’il fallait absolument connaître la longueur des degrés du méridien au nord et à l’équateur, pour établir les mesures exactes de la Terre et pour apporter une aide fiable aux navigateurs (la mesure de la longitude ne sera calculée qu’au milieu du XVIIIe siècle).

Grâce au soutien du comte de Maurepas, ministre de la Marine, deux missions scientifiques partirent l’une vers les régions équatoriales et l’autre vers la partie septentrionale de l’Europe. En 1735, l’expédition dirigée par La Condamine, Godin et Bouguer partit en direction du Pérou. Pour ce qui est des régions nordiques, dans un premier temps les savants avaient pensé à l’Islande, qu’on croyait être beaucoup plus proche du cercle polaire qu’elle ne l’est vraiment ; mais ensuite, Maupertuis proposa de se tourner vers la Scandinavie et, en particulier, vers la Suède, pays avec lequel la France entretenait de bons rapports politiques et institutionnels.

La responsabilité de l’expédition fut donc confiée à Maupertuis qui s’entoura d’un groupe d’amis dans lequel il pouvait avoir une entière confiance : Alexis Claude Clairaut, mathématicien (académicien dès l’âge de dix-huit ans), Pierre Charles Le Monnier, astronome, Charles Étienne Camus, mathématicien, et enfin Anders Celsius, astronome et physicien célèbre pour ses études sur la température, qui devait rejoindre l’expédition à Dunkerque ; en outre, Celsius connaissait très bien la région lapone et put être très utile, ne serait-ce que dans le rôle d’interprète. Maupertuis prit ensuite la décision de faire participer à la mission un secrétaire, Sommereux, un dessinateur, Herbelot, et un abbé, Réginald Outhier, membre de l’Académie des Belles-Lettres de Caen et spécialiste d’astronomie, qui avait dessiné une carte du globe très précise. Pour ses expérimentations, Outhier obtint l’assentiment de l’évêque de Bayeux, son diocèse, pour participer au voyage en Laponie.

1 « Les résultats de Cassini sont loin de convaincre. D’abord, Cassini ne prit pas toutes les mesures : le temps à Strasbourg était trop mauvais pour des observations astronomiques, donc il utilisa des projections obtenues par Eisenschmid. […] Il y avait le problème évident qu’après la mort de Eisenschmid en 1712, Cassini était en train d’utiliser des données vieilles de vingt-deux ans, obtenues avec des équipements désuètes. » (D. BEESON, Maupertuis: an intellectual biography, Oxford, Voltaire Foundation, 1992 : The Cassini results are very far from convincing. In the first place, Cassini did not even take all his own measurements: the weather in Strasbourg was too poor for astronomical observations, so he used figures obtained by Eisenschmid. […] There was the obvious problem that since Eisenschmid died in 1712, Cassini was using figures at least twenty-two years old, obtained with equipment long since out of date). 2 P. CASINI, Maupertuis et Newton , in Actes de la journée Maupertuis (Créteil, 1er décembre 1973), Paris, J. Vrin, 1975, p. 118. Cette opposition entre cartésianisme et newtonisme est bien évoquée par Voltaire dans la XIVe lettre anglaise : « Un français qui arrive à Londres trouve les choses bien changées. […] Il a laissé le monde plein, il le trouve vide. À Paris on voit la pression de la lune qui cause le flux de la mer ; chez les anglais, c’est la mer qui gravite vers la lune. […] Chez vos cartésiens, tout se fait par une impulsion qu’on ne comprend guère, chez M. Newton, c’est par une attraction dont on ne connaît pas mieux la cause. À Paris, vous vous figurez la Terre faite comme un melon, à Londres, elle est aplatie des deux côtés. » (Voltaire, Lettres philosophiques, Paris, Garnier, 1988, p. 70). 3 CASINI, Maupertuis et Newton, pp. 118-119.

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Le 20 avril 1736, l’expédition partit en direction de Dunkerque, où les savants embarquèrent vers Copenhague et Stockholm. De là, ils continuèrent en voiture vers Uppsala, Umeå, Luleå et Tornio. En attendant de choisir les lieux des mesures, Outhier, Camus et Sommereux furent chargés de faire un voyage jusqu’à Oulu, pour en explorer la campagne environnante. Mais, finalement, Maupertuis choisit les montagnes près de Tornio et d’Aavasaxa (plus au nord) pour y établir les observatoires.

Figg. 1 et 2. Le monument et la plaque commémorative sur la colline d’Aavasaxa, à l’endroit où se trouvait l’un des observatoires de Maupertuis (© Alessandra Orlandini Carcreff, 2010)

Le 6 juillet, les savants partirent vers les montagnes, où ils restèrent jusqu’à la fin d’octobre ; ils passèrent l’hiver à Tornio, où ils continuèrent leurs études, malgré les températures glaciales, jusqu’à la fin de mars, quand ils purent se rendre de nouveau au cœur de la Laponie, pour une deuxième session de recherches et d’observations.

Figg. 3 e 4. L’église de Tornio et son clocher depuis lequel Maupertuis effectua plusieurs études et mesures, à travers le petit œil qu’on voit dans le détail (© Alessandra Orlandini Carcreff, 2010)

Le 9 juin Maupertuis, Le Monnier, Sommereux et Herbelot partirent en bateau vers Stockholm, alors que Outhier, Clairaut, Camus et Celsius choisirent la route par les terres. Mais une tempête s’abattit sur le golfe de Botnie, en obligeant le bateau à rentrer dans le port : Maupertuis et ses compagnons

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rejoignirent donc les autres savants à Piteå et redescendirent le long de la côte suédoise jusqu’à Stockholm, après une brève excursion dans les mines de cuivre de Falun. La commission embarqua enfin pour la France et arriva à Paris le 20 août.

Le lendemain, le roi reçut les savants à Versailles. Une semaine après, ce fut le tour de la visite à l’Académie : oui, la Terre était bien aplatie au pôle. L’Académie resta prudente, car il fallut attendre le retour de l’expédition péruvienne. Maupertuis se consacra alors à la rédaction de sa relation officielle, La Figure de la Terre (1737)4 : il n’obtint aucune forme de soutien économique de la part de l’Académie, mais le livre fut accueilli avec une grande attention, surtout en Angleterre où il fut immédiatement traduit et grâce auquel les Anglais (pragmatiques) corrigèrent les erreurs sur leurs cartes maritimes.

Maupertuis revint à Saint-Malo, où il commença à projeter un second voyage en Suède, pour reprendre les mesures sur un lac gelé situé à mi-distance entre Tornio et Paris, ce qui aurait rendu les observations déjà faites encore plus précises. Mais peu de temps après, parut un opuscule anonyme, Anecdotes physiques et morales5, dans lequel on accusait Maupertuis et ses compagnons d’avoir mené une vie dissipée en Laponie, en prenant des maîtresses et en dédiant peu de temps aux calculs auxquels ils auraient préféré les bals et les divertissements. On ne sait pas si l’opuscule a été écrit par les détracteurs de Maupertuis ou par lui-même, dans le but de dépeindre son séjour nordique avec des accents ironiques. Le savant chercha à continuer l’organisation de son nouveau voyage en Scandinavie, mais le même Celsius renonça, en accusant une soudaine fatigue. Maupertuis décida alors de publier un pamphlet (anonyme), Lettre d’un horloger anglais à un astronome de Pékin6, pour ridiculiser les Cassini et défendre ses propres écrits. L’abbé Outhier finit d’écrire son récit de voyage, Journal d’un voyage au Nord (1744), qui fut accueilli avec grand intérêt et fit l’objet d’une deuxième édition, deux ans plus tard, à Amsterdam. En effet, l’opuscule de Maupertuis fut presque superflu, car en 1744 Pierre Bouguer puis, trois mois après, La Condamine rentrèrent du Pérou et confirmèrent l’écrasement de la Terre aux pôles. Ce fut donc à ce moment-là que Frédéric II invita Maupertuis à Berlin, pour qu’il y participe aux activités de l’Académie des Sciences : le savant français y reçut de grands honneurs. Après un bref retour à Paris, Maupertuis devint directeur de l’Académie berlinoise et ce fut à ce moment qu’il eut sa dernière déception : Voltaire, dans ses écrits, avait toujours été favorable aux théories newtoniennes et avait toujours soutenu Maupertuis et son expédition lapone. Malgré la pension supérieure à celle de Maupertuis, obtenue par Voltaire dès son arrivée à Potsdam, en réalité le philosophe visait la place de l’astronome à l’Académie : il commença donc à diffuser des libelles ironiques et en 1752 publia deux ouvrages où Maupertuis figure parmi les protagonistes. D’abord Micromégas, dans lequel Voltaire donnait sa version d’un événement arrivé pendant le voyage en Laponie : le bateau sur lequel voyageait Maupertuis, au retour de l’expédition, fit naufrage dans le golfe de Botnie, à cause d’une forte tempête. Voltaire expliqua donc que le bateau avait été soulevé en réalité par le géant Micromégas et par le nain de Saturne, curieux d’en voir le contenu7. Pendant que Micromégas et le nain regardaient le bateau et les êtres bizarres qui en sortaient, un des savants (évidemment Maupertuis) prit ses instruments et mesura la taille du géant, en le surprenant et en faisant s’exclamer le nain de Saturne : « il est géomètre, il connaît ma grandeur ; et moi qui ne le vois qu’à travers un microscope, je ne connais pas encore la sienne ! »8 Certains chercheurs, comme Jean-Pierre Martin, y ont vu un portrait bienveillant de Maupertuis et des autres savants, Voltaire peignant de « très mauvais métaphysiciens », tout en conservant « son estime aux philosophes »9. D’autres érudits considèrent au contraire Micromégas comme un des premiers textes polémiques contre Maupertuis, même si « les savants-philosophes font assez honorable figure », comme le soutient Jacques Van den Heuvel qui a édité le texte

4 P.-L. MOREAU DE MAUPERTUIS, La Figure de la Terre, determinée par les Observations de Messieurs de Maupertuis, Clairaut, Camus, le Monnier, de l’Académie Royale des Sciences, et de M. l’Abbé Outhier, Correspondant de la même Académie, Accompagnés de M. Celsius, Professeur d’Astronomie à Upsal, faites par ordre du Roy au Cercle Polaire, Paris, Imprimerie Royale, 1738. 5 [Anonyme], Anecdotes physiques et morales, Paris, s. e., 1738. 6 [P.-L. Moreau de Maupertuis], Lettre d’un horloger anglais à un astronome de Pékin, Paris, s. e., 1740. 7 VOLTAIRE, Micromégas, in Romans et contes, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade », 1979, p. 29. 8 Ivi., p. 32. 9 J.-P. MARTIN, La Figure de la Terre – Récit de l’expédition française en Laponie suédoise (1736-1737), Cherbourg, Isoète, 1987, p. 132.

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voltairien10. Mais le pamphlet de Voltaire le plus acide contre Maupertuis est la Diatribe du docteur Akakia à un natif de Saint-Malo11, où les ouvrages de l’homme de science sont repris dans le but de montrer leurs incohérences scientifiques. Publié à Leyde, toujours en 1752, il fit scandale auprès de Frédéric II qui fit brûler tous les exemplaires du libelle dans sa propre chambre et obligea Voltaire à se retirer à Genève12. Quant à Maupertuis, il trouva refuge dans son travail, car, depuis longtemps, il pensait à la vérification dans l’hémisphère austral de ses observations sur la Terre : déjà les Cassini avaient fait l’hypothèse que l’aplatissement de la Terre au nord n’était pas valable pour le sud. L’abbé La Caille, académicien français, partit donc pour une dernière expédition au cap de Bonne-Espérance et, après quatre ans, il put confirmer que la Terre est bien écrasée aux deux pôles.

Maupertuis mourut à Bâle le 27 juillet 1759, l’abbé Outhier, nommé correspondant étranger de l’Académie de Berlin, mourut le 12 avril 177413.

Le voyage en Laponie

À propos de l’expédition en Laponie, on peut affirmer qu’il s’agit de la première mission importante conduite dans ces terres septentrionales : l’organisation avait été confiée à Maupertuis, qui choisit les participants parmi ses amis au sein de l’Académie : si Outhier cite seulement les noms des autres savants, Maupertuis dans la Figure de la Terre les décrit avec leurs occupations et leurs centres d’intérêt. Aucun des deux, par contre, ne parle des instruments techniques apportés en Laponie : la relation de Maupertuis est à caractère officiel, adressée à l’Académie, dont les membres connaissent très bien l’apparat instrumental nécessaire pour ce type de mesures. Outhier illustre brièvement la préparation, non seulement des objets, mais aussi de l’itinéraire, et la prise de contacts avec les autorités suédoises :

Nous passâmes les quatre ou cinq mois qui précéderent le départ à veiller à la construction des Instruments qui nous

étoient nécessaires, & à pourvoir à tout ce qui pouvoit nous être utile dans le Voyage. […] Les meilleures Cartes marquent le long des Côtes de ce Golfe [de Botnie] un grand nombre d’Isles qui devoient vraisemblablement être très-avantageuses pour l’ouvrage qu’on avoit à faire. M. de Maupertuis se décida donc pour le fond du Golfe de Bothnie, & demanda à M. le Comte de Maurepas les ordres du Roi, & les recommandations nécessaires, & de vouloir bien faire écrire en Suède.

La réponse ne fut pas plutôt arrivée que nous nous disposâmes à partir incessamment. Tous les Instruments étoient prêts, & furent emballés avec soin. Le Roullier qui les portoit, fut accompagné jusqu’à Dunkerque, par un des Domestiques que M. de Maupertuis avoit pris ; il en avoit encore quatre autres, dont l’un avoit déjà été pendant quelque tems à Stockholm, & savoit la Langue Suédoise14.

Outhier revient sur les préparatifs, au moment de décrire le départ de Tornio vers les montagnes : Quelques Biscuits, quelques Bouteilles de vin, des Peaux de Réennes pour nous coucher sur la terre ; quatre tentes,

dans chacune desquelles il ne pouvoit tenir que deux Personnes ; deux quarts de Cercle, une Planchette, un Pendule, des Thermomètres, & tous les Instruments qui pouvoient nous être nécessaires ou utiles pour le succès de nos Opérations ; ce fut là tout notre bagage15.

10 VOLTAIRE, Romans et contes, p. 696. 11 VOLTAIRE, Diatribe du docteur Akakia à un natif de Saint-Malo, Leyde, Luzac, 1752. 12 Sur les rapports entre Voltaire et Maupertuis, voir : J. TUFFET, Introduction, VOLTAIRE, Histoire du Docteur Akakia et du natif de Saint-Malo, Paris, Nizet, 1967, p. VII-CXXXVI. 13 Sur Maupertuis, Outhier et l’expédition en Laponie, voir : I. TUOMIKOSKI-DOMBRE, Voyageurs français en Finlande, Paris, Bibliothèque Nordique, 1966, p. 14-25 ; De Maupertuis à Berzelius. Savants français et suédois à l’Ère des Lumières, Pau, Ville de Pau, 1980 ; MARTIN, La Figure de la Terre ; D. BEESON, Maupertuis ; F. BATTAGLINI, Il Voyage di Giuseppe Acerbi ed altre relazioni di viaggio al Nord in lingua francese, « Settentrione », Turku, 15-16, (2003-2004), p. 36-43 ; A. BALLAND, La Terre mandarine. Journal d’un voyage au Nord pour déterminer la figure de la Terre, par M. l’abbé Réginald Outhier, Paris, Seuil, 1994 ; Y. VARPIO, Matkalla moderniin Suomeen, Helsinki, SKS, 1997, p. 45-46 ; V. FOURNIER, Le Voyage en Scandinavie, Paris, Robert Laffont, 2001, p. 771 ; O. PEKONEN, La rencontre des religions autour du voyage de l’abbé Réginald Outhier en Suède en 1736-1737, Rovaniemi, Lapland University Press, 2010 ; O. PEKONEN, A. VASAK, Maupertuis en Laponie, Paris, Hermann, 2014 et M. MOLANDER BEYER, F. FAVIER, Les Relations entre la France et la Suède de 1718 à 1848, Paris, Michel de Maule, 2015, p. 105-108. 14 R. OUTHIER, Journal d’un voyage au Nord, en 1736 et 1737, Paris, Piget, 1744, p. 3. 15 Ivi, p. 53.

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Dans ce passage, on trouve quelques-uns des instruments utilisés pour les mesures : entre autres, le pendule, fondamental comme on l’a déjà vu à propos des observations à Cayenne et à Sainte-Hélène, et les thermomètres de Réaumur, dont un de mercure et un autre d’esprit-de-vin (ce dernier, en janvier 1737, finira pas geler, alors que le premier mesurera – 37°)16.

La pièce principale était un instrument appelé « quart-de-cercle » qui servait à mesurer les angles et qui était d’un emploi

très courant en géodésie. […] Un autre instrument devait jouer un rôle capital dans la détermination des angles : un « secteur » de neuf pieds de rayon (2.92 m) servant aux mesures astronomiques. […] Celsius […] rapportait aussi de son séjour à Londres, un quart-de-cercle « d’un modèle tout nouveau » également appelé « octant de Hadley », ancêtre du sextant, et une lunette méridienne qui avait coûté 17 livres sterling.

À côté des grands instruments destinés aux mesures angulaires, l’expédition disposait d’instruments plus petits, facilement transportables ; planchettes, graphomètres qui étaient ordinairement utilisés par les arpenteurs et pouvaient servir aux estimations grossières17.

Toujours à propos du travail de recherche, Outhier décrit les observatoires que Maupertuis fait

construire une fois arrivés sur les montagnes au nord de Tornio : M. de Maupertuis a fait faire une pyramide d’Arbres dépouillés de leurs branches, & dressés les uns contre les autres :

ces Arbres arrêtés par le haut avec des harres18, & écartés par le pied, faisoient en même tems un signal dont on pouvoit observer la pointe avec précision, & une espèce d’Observatoire, au centre duquel on plaçoit l’Instrument pour faire l’Observation des Angles, sans aucune réduction au centre19.

On peut dire que ces observatoires reprennent non seulement la forme normale d’un observatoire,

mais aussi la structure de la tente lapone, comme on peut très bien le voir dans la gravure qui reproduit un traîneau tiré par un renne, une tente et tout au fond deux observatoires.

Fig. 5 - Réginald Outhier, Lapon sur un traîneau (A, B), une tente (C), un Lapon sur les skis (D) et deux observatoires au fond (E), 1744 (© Biblioteca nazionale centrale, Roma)

16 Ivi, p. 145. 17 MARTIN, La Figure de la Terre, p. 29. 18 Terme de peaussier. Forme altérée de hart. Le hart est une cheville de fer, courbée en demi cercle et fixée à la muraille, sur laquelle le gantier et le peaussier passent et étirent les peaux. Voir : É. LITTRE, Dictionnaire de la langue française, Paris, Hachette, 1863, tome I, p. 1986. 19 OUTHIER, Journal, p. 56-57.

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En ce qui concerne les hébergements, les savants français ne rencontrèrent pas de problèmes, car pendant les travaux d’observation ils dormaient dans leurs tentes et pendant les déplacements ils trouvaient souvent hospitalité chez les Lapons ; Outhier reste vivement frappé par ces familles qui, même si elles sont pauvres, se mettent toujours à la disposition des voyageurs, en partageant leurs repas et leur maison :

L’hospitalité est exercée assez généralement dans tout le Pays : si le besoin de repos ou la crainte du mauvais tems nous

obligeoit à nous retirer dans quelque Maison ; le Maître avant qu’on lui eût rien dit, quelquefois même n’ayant point d’Interprète pour nous faire entendre, s’empressoit à nous ouvrir une Chambre qui paroît n’être destinés qu’aux étrangers ; & demeuroit debout à nous regarder ; sa famille s’assembloit autour de lui, & chacun bien-tôt s’empressoit à nous servir. S’il faisoit tant soit peu froid, le feu étoit promptement allumé : & assez souvent ils apportoient le peu qu’ils avoient à manger, avant que nous l’eussions demandé20.

Pour le voyage initial en bateau, on conserve au contraire la liste des provisions rédigée par

Maupertuis : le pain, les biscuits, la farine, le riz et le fromage sont les vivres de première nécessité, apportés en grande quantité, mais on peut remarquer la présence de beaucoup de viande, dont deux moutons vivants, un mouton et un veau morts, plusieurs jambons et soixante-dix poulets vivants. Maupertuis avait prévu, en outre, beaucoup de nourriture pour les animaux et, au-delà des ustensiles et de la literie, il inséra dans sa liste 340 bouteilles de vin et environ 400 litres d’eau-de-vie. Le total des frais s’éleva à 2168 livres.21

Si dans le sud de la Suède les voyageurs utilisaient des voitures pour effectuer le long voyage, en Laponie, ils se servirent plutôt de traîneaux et des bateaux qui effectuaient le service de transport sur le fleuve Tornionjoki. Bien évidemment Celsius parlait suédois, mais les autres personnes qui accompagnaient les hommes de science (comme le gouverneur de Tornio) parlaient en finnois entre eux. Les savants apprirent quand même quelques mots indispensables, pour les nécessités immédiates :

Comme M. Helant, le seul Interprète Finois que nous avions, ne pouvoit pas être par-tout ; pour ne pas manquer du

nécessaire en son absence, nous avions appris à saluer, à demander du Lait, du Beurre, du Pain, de l’eau, ou à boire22. Tout comme plusieurs autres voyageurs, Outhier remarque la difficulté de se déplacer en Laponie

en été, à cause du terrain marécageux : Nous avons trouvé des Chemins affreux : comme il n’y avoit pas longtems que les Neiges étoient fondues, les Marais

qui font une grande partie du Chemin étoient impraticables. Les Habitans pour traverser ces Marais ont couché bout à bout des Sapins, sur lesquels on pourroit marcher en gardant l’équilibre, si les nœuds de ces Arbres, qui sont comme autant de pointes, permettoient d’y placer les pieds23.

Et comme on l’a vu, les accidents ne manquaient pas : Maupertuis en fit l’expérience directe, en

risquant de compromettre toute la mission. Pas plus le Journal d’Outhier que La Figure de la Terre de Maupertuis ne font référence à des objets

rapportés en France, mais on conserve une lettre envoyée par Maupertuis à Mme de Vertillac le 6 avril 1737, de Pello, dans laquelle le savant se laissa aller à des jugements plus personnels et, entre autres, aborde le sujet des « souvenirs de voyage ». En effet, la dame lui avait demandé de lui rapporter « des cartes à jouer des pays du nord, un volume in-12 de poésies danoises, et des jolies choses de la Laponie. »24 Ce sont de bien curieuses demandes et Maupertuis répondit gentiment, en donnant quelques portraits lapons : d’abord, il expliqua qu’il n’avait pas eu le temps d’aller chercher les cartes à jouer nordiques, mais qu’il se serait informé sur cela ; ensuite, il affirma qu’il n’existait pas de poésie au Danemark (!) et qu’il aurait été inutile d’en chercher un livre. Quant aux curiosités lapones, voilà l’explication du voyageur :

20 Ivi, p. 91-92. 21 MARTIN, La Figure de la Terre, p. 30-31 et p. 135-136. 22 OUTHIER, Journal, p. 92. 23 Ivi, p. 54-55. 24 MARTIN, La Figure de la Terre, p. 134.

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Les habillements, et tout ce qui sert aux Lapons, est trop vilain pour vous en porter, et serait capable d’infecter votre cabinet. Je pourrai cependant l’enrichir, à mon retour, d’une paire de souliers de huit pieds de long, pour vous apprendre à douter que les culottes de Finnois descendent jusque dans leurs souliers25.

Ce genre de correspondance rédigée par Maupertuis tout au long du voyage fut l’objet d’une ample

diffusion dans les salons parisiens et mit le voyageur au centre d’une querelle de tout autre genre : la prétendue coutume hospitalière des femmes lapone envers les étrangers : les préjugés sur les présumés habitudes d’accueil des femmes sont un véritable topos de la littérature de voyage. La Laponie n’a jamais fait exception et attira l’attention des voyageurs et des savants à partir du XVIe siècle, en développant le mythe de l’hospitalité lapone particulièrement au XVIIIe siècle, selon lequel les femmes lapones n’avaient pas le même concept européen de « moralité », car elles avaient l’habitude de s’accorder aux étrangers et, en général, pas pour le profit26. Comme nous l’avons souligné, Maupertuis recherchait une « médiatisation » de son expédition, face au groupe Cassini. Dans une querelle si âpre dans le contexte académicien, Maupertuis chercha à diffuser ses théories au grand public et, pour en accrocher l’attention, il visa sur la coquetterie des Lapones et les sujets libertins. D’ailleurs, comme nous pouvons l’imaginer, l’abbé Réginald Outhier n’évoqua jamais ce genre de circonstances, en se limitant à citer très vaguement la présence de femmes lapones dans les villes ou dans les campagnes, accompagnant leurs troupeaux de rennes.

Maupertuis cita en particulier et à plusieurs reprises une certaine Christine, à laquelle il dédia de nombreux vers et poèmes d’amour dans ses écrits. Ce fut le début de la célèbre « affaire des deux Lapones ».

En 1738, Christine et sa sœur arrivèrent à Paris et l’histoire se brouilla assez vite. Mme de Graffigny évoqua dans une lettre la situation :

Le secrétaire de M. Clairault, l’un des voyageurs aux pôles, a fait l’amour à une Lapone ; il lui a promis le mariage, et

est parti sans tenir sa parole. La demoiselle vient d’arriver à Paris avec une sœur à elle, pour suivre son amant. Elles sont débarquées chez M. Clairault, qui les héberge, quoique très médiocrement riche. L’épouseur ne veut point épouser, et la demoiselle ne veut point s’en retourner. Enfin M. de Clairault, qui mande cela à Voltaire, lui marque qu’il lui a déjà fait donner une petite pension, et va tâcher de la faire entrer dans quelque couvent pour la consoler. Tout Paris va chez lui pour voir ces Lapones. Ah, mon Dieu, comment peut-on être Lapon ?27

Qui a réellement été l’amant de Christine parmi les membres de l’expédition ? Le secrétaire de

Clairault ? Maupertuis ? Lemonnier ? Herbelot ? Tout le monde accusait tout le monde ! L’affaire toucha le comique quand Maupertuis demanda à Mme du Châtelet et à Voltaire de participer à une quête pour soutenir financièrement les deux filles. Voltaire adhèra avec enthousiasme à l’initiative, avec l’ironie habituelle qui le caractérisait :

Madame la marquise du Châtelet, et moi indigne, nous sommes si attachés à ce qui a du rapport à votre mesure de la

Terre et à votre voyage au pôle, nous sommes d’ailleurs si éloignés des mœurs de Paris, que nous regardons votre Lapone trompée comme notre compatriote. Nous proposerions bien qu’on mît en faveur de cette tendre hyperboréenne une taxe sur tous ceux qui ne croient pas la Terre aplatie ; mais nous n’osons exiger de contributions de nos ennemis. Demandons seulement des secours à nos frères. Faisons une petite quête. Ne trouverons-nous pas quelques cœurs généreux que votre exemple et celui de Madame Clairaut auront touchés ? Madame du Châtelet, qui n’est pas riche, donne déjà 50 liv. ; moi qui suis bien moins bon philosophe qu’elle, et pas si riche, mais qui n’ai point de grande maison à gouverner, je prends la liberté de donner 100 francs. Voilà donc cinquante écus qu’on vous apporte ; que quelqu’un de vous tienne la bourse, et je parie que vous faites mille écus en peu de jours. Cette petite collecte est digne d’être à la suite de vos observations ; et la morale des Français leur fera autant d’honneur dans le Nord que leur physique.

[...]

25 Ibidem. 26 Voir M. WÄHLBERG, L’anthropologie des Lumières et le mythe de l’hospitalité lapone – Regnard, Buffon, Maupertuis, Voltaire, Sade, dans U. HASKINGS GONTHIER (ed.), Opinion : Voltaire : Nature et culture, Oxford, Voltaire Foundation, « SVEC », n° 12, 2007, p. 277-302. 27 Lettre du 18 décembre 1738. F. de Graffigny, Correspondance de Madame de Graffigny, éd. J. A. Dainard et al., Oxford, Voltaire Foundation, 1985-, vol. I, p. 231.

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La voyageuse Académie Recommande à l’humanité, Comme à la tendre charité, Un gros tendron de Laponie. L’amour, qui fait tout son malheur, de ses feux embrasa son cœur Parmi les glaces de Bothnie. Certain français la séduisit : Cette erreur est trop ordinaire ; Et c’est la seule qu’on fit En allant au cercle polaire. Français, montrez-vous aujourd’hui Aussi généreux qu’infidèles ; S’il est doux de tromper les belles, Il est doux d’être leur appui. Que les Lapons, sur leur rivage Puissent dire dans tous les temps : Tous les Français sont bienfaisants ; Nous n’en avons vu qu’un volage.28 Une quinzaine d’années plus tard, quand la rupture avec Maupertuis sera totale, après le séjour à la

cours de Frédéric II de Prusse, Voltaire reviendra sur l’affaire des Lapones, de manière bien plus critique à l’égard de Maupertuis, d’abord dans le Discours en vers sur l’homme : « Ramenez des climats soumis aux trois couronnes / Vos perches, vos secteurs, et surtout deux Laponnes »29, ensuite dans Micromégas, quand le géant, descendu sur Terre dans la mer Baltique, soulève le navire de Maupertuis : « Les géomètres prennent leurs quart de cercle, leurs secteurs et des filles lapones, et descendent sur les doigts du Sirien »30.

À guise de conclusion de toute cette affaire, il est intéressant de remarquer que finalement Christine et sa sœur n’étaient pas lapones, mais deux jeunes filles appartenantes à la bourgeoisie marchande finlandaise de Tornio !

La relation de voyage d’Outhier et la relation officielle de Maupertuis

La Figure de la Terre fut la relation officielle de l’expédition, une relation technique qui devait expliquer des résultats scientifiques. Ce ne fut donc pas le récit du voyage (dont la tâche fut confiée à l’abbé Outhier dans son Journal), même si, dans quelques passages de la première partie, on peut cueillir des informations viatiques, comme la lutte quotidienne contre les moustiques qu’on retrouve presque à chaque page. Mais comme Maupertuis le dit clairement à la fin de la première moitié du livre, qui correspond au Discours lu à l’Académie des Sciences :

Nous partîmes le 9 Juin, les uns par terre, les autres par mer. Mais le reste de nos avantures (sic), ni notre naufrage dans

le golfe de Bottnie, ne sont point de notre sujet31. La deuxième moitié de l’ouvrage (« Observations faites au Cercle Polaire ») est entièrement dédiée

aux tableaux et aux résultats scientifiques et accompagnée par de dessins et d’une carte de la région. L’abbé Outhier publia le Journal d’un voyage au Nord, en 1736 et 1737 en 1744 à Paris. Le choix du

titre de « journal » donne une idée du style du texte : comme un journal, il est un carnet de voyage, avec des notes prises jour après jour.

À la suite des épîtres dédicatoires au chevalier de Tassy et à l’évêque de Bayeux, Outhier fournit une brève préface pour expliquer les raisons de la rédaction de son récit. Le Journal commence avec l’état de la recherche sur l’aplatissement de la Terre aux pôles, ce qui clarifie immédiatement les raisons du 28 Lettre du 20 décembre 1738. Voltaire, Œuvres complètes de M. de Voltaire, Lyon, Chez J.B. Delamollière, 1791, p. 128-130. 29 VOLTAIRE, Discours en vers sur l’homme, Œuvres de M. de Voltaire, Dresde, George Conrad Walther, 1752, t. 3, p. 28. 30 VOLTAIRE, Le Micromégas de M. de Voltaire, À Londres [i. e. Paris, Michel Lambert, 1752], p. 52. 31 MOREAU DE MAUPERTUIS, La Figure de la Terre, p. 78.

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voyage et l’intérêt scientifique de l’auteur. Le texte n’est pas partagé en chapitres ou parties, mais il est constitué par une narration continue, avec la seule insertion d’un extrait du journal de bord du pilote, Adam Guenstelik, relatant le voyage maritime de Dunkerque à Waxholm, sur les côtes suédoises. À droite et à gauche du texte, en marge, on trouve des manchettes indiquant le sujet du paragraphe ou tout simplement la date de la journée. Le récit est accompagné par des gravures qui reproduisent des paysages ou des vues, mais aussi des plans de ville et les structures des maisons nordiques ; on trouve enfin deux cartes, l’une générale de la Scandinavie, l’autre du parcours du fleuve Tornionjoki.

Fig. 6 - Réginald Outhier, « Carte d’une partie de l’Europe », 1744 (© Biblioteca nazionale centrale, Roma)

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Fig. 7 - Réginald Outhier, « Carte du fleuve de Torneå », 1744 (© Biblioteca nazionale centrale, Roma)

La Laponie est une région à « utiliser » pour des expérimentations scientifiques qui n’ont rien à voir avec l’exploration du territoire et la connaissance des peuples qui y habitent. Voici par exemple, la journée du 30 juillet 1736, qui donne une idée générale du style :

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Le Lundi un peu après midi nous descendîmes tous d’Avasaxa ; Messieurs Clairaux & Camus se chargérent de

déterminer la direction de la base & les extrémités ; & M. de Maupertuis avec le reste de sa troupe s’est embarqué dans cinq Bateaux pour aller à Půllingi. Sur les 9 heures du soir, nous avons mis pied à terre pour monter la Cataracte de Katilla qui est coupée par le Cercle Polaire ; nos Matelots nous ont menés à Hiougsing sur le bord Occidental du Fleuve, dans une bonne Maison où nous avons soupé : nous y avons trouvé de bon Pain d’Orge, du Poisson sec, du Lait, de la Crême, du Beurre & du Fromage, & nous fûmes servis assez proprement.

Nous sommes partis de cette Maison à 11 heures ; & au lieu d’aller de Lambisen à Půllingi par terre, nous avons continué en Bateau jusqu’au petit Village de Tůrtůla, & de là à l’embouchure de la Rivière Keütas qui n’est pas navigable. Nous avons laissé nos Bateaux sur le bord du grand Fleuve, & sommes allés à pied jusqu’au bord du Lac Keütas32.

En effet, le récit tend à être tourné vers l’auteur et ses compagnons, sans faire trop attention aux

lieux alentours et aux personnes rencontrées. C’est une attitude encore plus évidente dans La Figure de la Terre et dans les autres écrits de Maupertuis, qui semble presque s’excuser d’avoir pris quelques jours pour aller chercher une pierre runique, dans la partie intérieure de la Laponie33. On peut noter une particularité linguistique, le « ů » employé pour exprimer le son [u] : les voyageurs français qui doivent écrire certains noms de lieux utilisent toujours le diphtongue « ou » pour le distinguer du son français [y] : Outhier est le seul parmi les voyageurs à utiliser ce signe graphique.

Il n’existe pas de digressions dans le Journal d’Outhier, qui décrit quotidiennement les recherches et les petits événements. La « présentation » de la Laponie qu’avait faite aux voyageurs le roi de Suède Frédéric Ier de Hesse (époux d’Ulrique Eléonore, sœur de Charles XII) ne révélait pas d’enthousiasme particulier :

Je me suis trouvé dans de sanglantes batailles, mais j’aimerais mieux retourner à la plus meurtrière que d’entreprendre

les voyages que vous allez faire : c’est un pays affreux34. On peut même être surpris de ne pas entendre l’abbé se plaindre de certains inconvénients, comme

le froid ou la nourriture. Les trois seuls aspects de la vie lapone qu’Outhier remarque renvoient à la vie et aux activités quotidiennes : la façon de piloter les bateaux sur les fleuves, les habitations et les saunas. Outhier et ses compagnons ont l’habitude d’utiliser la voie fluviale pour se déplacer autour de Tornio, mais l’abbé décrit cette pratique de façon assez impersonnelle.

Les Finois conducteurs des Bateaux […] voudroient le rendre [le bateau] si léger, qu’à peine touchât-il la surface de

l’eau, pour éviter les Cailloux contre lesquels ils sont exposés à tout moment à être brisés ; c’est également pour soutenir leur Bateau au-dessus des flots, & pour le dérober aux vagues qui le poursuivent, que de trois hommes qu’ils sont dans chaque Bateau, deux forcent de rames tant qu’ils peuvent, pendant que le troisième à l’aide de son Aviron, détourne sans cesse de côté & d’autre pour éviter les Rochers. Lorsqu’il nous est arrivé de mettre pied à terre, nous avons vû quelquefois du rivage, ces Bateaux la moitié en l’air, soutenus au-dessus des vagues, comme si ç’avoit été sur des rouleaux, tant ils alloient vîte ; d’autres fois nous les voyions comme engloutis dans les flots35.

Les tentes décrites par Outhier ont déjà été représentées dans la gravure illustrant le traîneau : Ces cabanes sont formées de plusieurs perches, hautes de 12 à 15 pieds, posées par un bout sur le terrain, où elles

forment ensemble un cercle large d’environ 12 pieds : ces perches par l’autre extrémité se réunissent toutes en haut, & forment un cone. Ils étendent sur ces perches quelques haillons, & quelques Peaux de Réennes, qui n’en couvrent qu’une partie. Le haut est entiérement découvert, & sert de Cheminée pour le feu qu’ils font au milieu de cette espèce de Tente : ils passent là leur Hiver, très-mal vêtus, & couchent souvent dans la neige. Quand ils veulent changer d’habitations, ils emportent leurs haillons, & leurs Peaux de Réennes, & laissent leurs perches toutes dressées ; ils en trouvent d’autres par-tout dans les Forêts36.

32 OUTHIER, Journal, p. 73-74. 33 Voir : P.-L. MOREAU DE MAUPERTUIS, Relation d’un voyage fait dans la Lapponie septentrionale, pour trouver un ancien monument, in Œuvres, Hildesheim, RFA – New York, G. Olms, 1974, vol. III, p. 179-206. 34 TUOMIKOSKI-DOMBRE, Voyageurs français en Finlande, p. 15. 35 OUTHIER, Journal, p. 60. 36 Ivi, p. 154-155.

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Telle est la description la plus générale que les voyageurs donnent des tentes lapones. Outhier note l’habitude qu’ont les Lapons, lorsqu’ils se déplacent pour les transhumances des rennes, de laisser les perches plantées dans le sol, pour les réutiliser l’année suivante.

Quant au sauna, qu’Outhier appelle simplement « bain », l’abbé précise que Maupertuis a voulu l’essayer (et en a mesuré la température), en faisant entendre, implicitement, qu’il ne l’a pas expérimenté :

Leur bain est si chaud, que M. de Maupertuis qui voulut en essayer, trouva que le Thermomètre fait sur les principes

de M. de Reaumur y montoit à 44 degrés au-dessus de la congélation. Ils ont dans leurs bains une espère de Fourneau, tout semblable à celui dont j’ai dit qu’ils se servent pour secher les Bleds : il est placé de même dans l’angle de la Chambre. Quand le massif de Cailloux qui le forme est bien échauffé, ils jettent de l’eau dessus, & la vapeur de cette eau leur sert pour le Bain ; ils y vont ordinairement deux ensemble, & tiennent chacun une poignée de verges, dont ils se frappent pour exciter la transpiration. J’ai vû à Pello un vieillard fort âgé sortir du Bain tout nu & tout en sueur, traverser ainsi sa cour par un grand froid sans en être incommodé37.

L’expédition de Maupertuis est la première mission scientifique importante en Scandinavie, et en

Laponie en particulier. L’importance des résultats a rendu ce voyage extrêmement célèbre dans le domaine scientifique. Maupertuis a été souvent cité par d’autres voyageurs qui, surtout à l’époque, ont commencé à mieux connaître les régions nordiques. Même si le but de fut pas celui d’étudier les lieux et les peuples locaux (à la différence de l’expédition de la Commission scientifique du Nord un siècle plus tard), la rigueur technique et la célébrité des participants ont fait de ce voyage l’un des plus importants au XVIIIe siècle ; l’œuvre de Maupertuis n’est pas seulement une source d’informations du point de vue astronomique, mais le savant a également eu le mérite d’avoir fait connaître la Laponie comme territoire important par sa position géographique stratégique scientifiquement parlant.

37 Ivi, p. 107.

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