La Vie Associative | n°13 | Le service civique

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    Le service civique,ltat et les associationsPa g e 4

    Les enjeux socitauxdu service civiquePage 18

    La mise en uvredu service civiquePage 28

    Et demain ?Page 36

    VieAssociative

    C o n f rence permanente des coordinations associative s

    letin de la Confrence permanente des coordinations associatives N 1 3 S e p t e m b re 2010

    a

    Le service

    civique

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    2 La Vie associative n 13 Septembre 2010

    4Le service civique, ltat et les associations

    Retour sur la gnalogie du service civique

    La loi dbattue au Pa r l e m e n t

    La concertation avec les associations

    Interviews croises de Nadia Bellaoui, Ligue delenseignement et CPCA, Marie Trellu Kane, Unis-Cit,Eric Sapin, Comit de coordination pour un service civil

    Le cadre rglementaire en rsum

    18Les enjeux socitaux du service civique

    Une culture du volontariat encore balbutiante

    La CPCA sengage pour lanne europenne

    du bnvolat et du volontariat

    Le service civique : au-del ou en de de lemploi?

    28La mise en uvre du service civique

    Dans les associations, un dispositif dengagement

    Interview de Cdric Mazire, Ligue de lenseignement

    Dans les collectivits, un tremplin vers lemploi

    36Et demain ?Interviews croises de Nadia Bellaoui, Ligue delenseignement et CPCA, Marie Trellu Kane, Unis-Cit,Eric Sapin, Comit de coordination pour un service civil

    Interview de Martin Hirsch, Agence du service civique

    Un premier lev i e r : le comit de la chartedu service civique?

    Pour aller plus loin

    Sommaire

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    La Vie associative n 13 Septembre 2010 3

    La Vie associative N 13 S e p t e m b re 2010

    D i recteur de la publication :Jacques Henrard

    Responsable de la rdaction :Nadia Bellaoui (vice-prsidente de la CPCAen charge de l'engagement associatif,Ligue de lenseignement)

    R d a c t i o n :Stphanie Rizet (Universit Paris V I I Laboratoire de changement social), Vi r g i n i e

    Ro (CPCA), Hlne Spoladore (La Pirogue)Ont particip ce numro :Nadia Bellaoui (Ligue de lenseignement,CPCA), Eric Sapin (Comit de coordinationpour un service civil), Marie Trellu Kane(Unis-Cit), Benot Berthelot (CPCA)

    I l l u s t ra t i o n s :F l o w

    M a q u e t t e :Stphane Prvt

    Publication dite par la CPCA :2 8 , place Saint-Georges 75009 Pa r i sT l . 01 40 36 80 10i n f o @ c p c a . a s s o.fr www. c p c a . a s s o. f r

    I S S N : 1 7 6 1 - 9 1 4 9Dpt lgal : septembre 2010dite en 3 5 0 0 e x e m p l a i r e s

    I m p re s s i o n :Chevillon Imprimeur,2 6 , b o u l e vard Kennedy 89101 S e n s

    Publication ralise avec le soutien dela Direction de la jeunesse, d elducation populaire et de la viea s s o c i a t i v e.Nos partenaires, le Crdit Coopratif, leGroupe Chque Djeuner, Chorum et laMaif, nous soutiennent au titre dumcnat dentreprise pour ledveloppement dun mouvement associatiforganis, autonome et dintrt gnral.

    Vous pouvez commander ce numro par mail [email protected] ou en tlchargeant lebon de commande sur www. c p c a . a s s o. f r.

    Le PDF de cette publication y est librementt l c h a r g e a b l e.Exemplaire papier (frais de port inclus) :1 e x e m p l a i r e : 5e 2 e x e m p l a i r e s : 8e3 e x e m p l a i r e s : 1 0e

    ditorialNouvelles valeurs citoyennes

    Le 1erjuillet dernier, la loi relative au service civique estentre en vigueur. Lobjectif annonc par legouvernement est de recruter terme 10 % dune classedge, soit 75 000 jeunes, partir de 2014. Cet objectifambitieux ne pourra tre tenu quavec linvestissementfort des mouvements associatifs qui accueillent la trsgrande majorit de ces nouveaux volontaires. Leurscomptences daccompagnement devront tre soutenues la hauteur des enjeux.

    La CPCA et les coordinations associatives nationales ontparticip activement aux travaux qui ont conduit lamise en uvre de ce dispositif. Depuis le rapport pourune meilleure reconnaissance de lengagementbnvole , remis en 2006 lors de la premire Confrence

    nationale de la vie associative, jusqu la consultation dela mission Luc Ferry sur lavenir du dispositif devolontariat, sans oublier les travaux conduits au sein dugroupe de travail sur lengagement associatif dans lecadre de la deuxime Confrence de la vie associative du17 dcembre 2009.

    Ce nouveau numro de La Vie associative propose deretracer lhistorique du service civique au regard dupartenariat entre ltat et les associations, et danalyserles enjeux et les problmatiques sociales,organisationnelles et humaines, qui font du service

    civique un sujet politique de premier plan pour notrepays, dans une perspective de recherche de nouvellesvaleurs citoyennes en actes et pas seulement enparoles.

    Jacques Henra rd ,prsident de la CP C A

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    4 La Vie associative n 13 Septembre 2010

    La loi sur le service civique a t adopte en mars 2010 et dev r a i t

    c o n c e rn e r, selon les ambitions annonces, dix mille jeunes cette anne et

    1 0 % dune classe dge dici cinq ans. Ce nouveau cadre lgislatif fa i t

    suite une multitude dautres dispositifs auxquels il cherche donner une

    cohrence et une nouvelle impulsion aprs des annes de flottement

    politique. Financ par ltat, ouve rt aux 16-25 ans pour des missions

    dintrt gnral, il vient ainsi prendre la relve du service national

    suspendu en 1997. Son enjeu est galement fort pour les associations qui

    constitueront, avec les collectivits territoriales, le principal lieu de sa mise

    en uvre. Elles auront loccasion daccueillir une population jeune qui leur

    faisait parfois dfaut, de dvelopper de nouveaux projets, de bousculer et

    de dynamiser leurs structures. Certaines bnficiaient dj dailleurs de

    l exprience des prcdents volontariats. Le regard rtrospectif propos ici

    r evient sur la construction de la nouvelle loi et sur la place qua occup lemonde associatif cet ga r d .

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    La Vie associative n 12 Septembre 2009 5

    Retour sur la gnalogie

    du service civique

    Apparues en 1961, les for-

    mes civiles du serv i c enational se sont progressi-vement multiplies jus-qu la suspension de ce

    dernier en 1997. partir de 1959, lechamp de la dfense a dbord le strictcadre militaire pour englober de nou-veaux domaines dont lconomie, lin-dustrie ou encore la recherche,auxquels les appels du contingentpouvaient dsormais contribuer.

    La multiplication des formesciviles du service national

    Une telle diversification a galement permis demployer lexcdent crois-sant des effectifs dappels que lesarmes, de plus en plus rduites ettechnicises, ntaient plus en mesuredabsorber. Elle concernait les formeslgales de service civil, mais aussi cel-les de service militaire finalits civi-les, et sest accompagne dans lemme temps dune augmentation nota- ble des effectifs concerns. A u x25 000 appels affects ce type demissions en 1995, il convient dajouter

    les objecteurs de conscience dont le

    nombre stait galement accru, sur-tout dans les annes 1990. la veillede la suspension du service national,ils taient entre 7 000 et 8 000 sedclarer chaque anne (soit 13 0 0 0appels compte tenu de leurs vingtmois de service), et une partie nonngligeable dentre eux tait affectedans des associations.

    Cette prolifration des formes civiles aaussi constitu une rponse aux

    demandes croissantes des diffrentesadministrations dtat. Un tel constatclaire sans doute pour partielabsence de cohrence ou de lignedirectrice qui a guid leur mise en place progr e s s ive et le manque decontrle dont elles ont par la suite faitlobjet. De plus, cette premire atteinte la vocation initiale du service natio-nal se doublait dune remise en causede son caractre universel et de sonrle de brassage social. La quasi-tota-lit des formes civiles du serv i c eimpliquait en effet des critres der e c rutement exigeants, de bac+2 bac+5 le plus souvent, sans que cetteslection ne soit toujours justifi e .

    Leurs conditions dexercice taientaussi largement plus favorables quecelles du service militaire. Dans cettesituation, le nombre de vo l o n t a i r e spour une forme civile du service tait bien suprieur celui des postes

    ouverts, redoublant la slection ainsique la frustration des jeunes non rete-nus. Indirectement, les effectifs desobjecteurs de conscience sen trou-vaient galement gonfls par ceux quinavaient pu en bnficier mais recher-chaient une affectation proche de leurdomicile et toujours plus confortableque lenvironnement des units mili-taires. La dimension idologique pre-mire de lobjection sen trouvait, ence sens, quelque peu mousse.

    La suspensiondu service national

    En 1996, Jacques Chirac, alors prsi-dent de la Rpublique, a dcid derorganiser le secteur de la dfense etde professionnaliser les armes. Cettedcision sinscrivait dans un contextegopolitique transform par leffon-drement de lempire sovitique et lafin de la Guerre froide, et par la multi-

    plication des crises rgionales traversle monde. Le principe de la conscrip-tion a t jug inadapt cette nou-velle donne qui ncessitait desinterventions complexes, hors du cadrenational. De plus, celui-ci se trouvaitconfront de nombreuses difficults. la remise en cause de son rle decohsion nationale et de brassagesocial sajoutait en effet une gestion deplus en plus difficile des effectifs ducontingent, notamment en raison de lamultiplication des demandes de sursislies lallongement de la scolarit.Les dbats ont alors port sur les pos-sibilits de substitution au serv i c enational existant, et sur leur

    La loi sur le service civique sinscrit dans une histoire

    que lon peut faire remonter aux annes 1960, ave c

    lapparition des formes civiles du service national.

    Quasiment ds lorigine, les associations en ont tparties prenantes en tant que lieux daccueil privilgis

    des populations vises par les cadres lgislatifs et

    r g l e m e n t a i res qui se sont succds.

    ..

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    caractre obligatoire ou volon-taire. Dans un contexte de restrictionbudgtaire, ltat sest fi n a l e m e n torient vers la cration dun rendez-vous citoyen (recensement et parti-

    cipation la Journe dappel et deprparation la dfense JAPD) et lamise en place de volontariats civils etmilitaires.La loi de rforme du service national,devenu service national universel, at adopte en octobre 1997. Levolontariat civil cr dans ce cadrevisait apporter un concours per-sonnel et temporaire la communautnationale dans le cadre dune missiondintrt gnral, ou dvelopper la

    solidarit et le sentiment dapparte-nance la Nation . Il sadressait auxjeunes de 18 27 ans, pour une durede 6 24 mois, et concernait troisdomaines, la dfense, la scurit etla prvention , la cohsion socialeet la solidarit , et enfin la coop-ration internationale et laide humani-taire . La dfinition prcise de cesvolontariats civils a t renvoye une loi ultrieure, finalement vote en2000 et suivie darrts spcif i a n tchacune de leurs modalits. Mais le

    dcoupage opr tmoignait dj desproximits existant entre les ancien-nes formes civiles du service nationalet les nouveaux volontariats venusleur succder.

    Les dboires des premiersvolontariats civils

    Inscrits dans un cadre lgislatif com-mun, ces volontariat civils ont connu

    des destins diffrents. Le premier voir le jour a t, en 2000, le volonta-riat international en administration eten entreprise. Les critiques formules son encontre ont t nombreuses etlargement similaires celles dont cetype de coopration faisait djlobjet. Plusieurs associations, maisaussi des hommes politiques de diff-rents bords, ont soulign notammentson caractre litiste et son rapportplus que lointain avec la vocation pre-

    mire dune dmarche de volontariat.Celui-ci a cependant t le plus sou-tenu par les pouvoirs publics et a ren-contr une certaine audience auprsde jeunes la recherche dune pre-mire exprience professionnelle etdun possible recrutement. En 2003, ilconcernait 2 316 volontaires, majori-tairement des hommes et trs dipl-ms.En 2001, le volontariat civil dvolu la dfense, la scurit civile et la pr-vention a t cr afin de promouvoir

    prioritairement la fonction de sapeur- pompier. Mais sa confidentialit etlorientation directe de beaucoup descandidats potentiels vers le corps dessapeurs-pompiers volontaires ne luiont pas vritablement permis de cro-

    tre. Il concernait, deux ans plus tard,328 personnes.Le volontariat de cohsion sociale etde solidarit, mis en place en 2002, aconnu, lui aussi, une russite plutt

    mitige (382 personnes en 2004). Sonfaible investissement par les pouvoirs publics, mais aussi par les associa-tions, pourtant premires concernes,permet dclairer ce dveloppementrest embryonnaire.

    La concurrencedes emplois-jeunes

    Si elles ntaient pas directement

    lies, la loi de cration des emplois- jeunes et celle qui suspendait le ser-vice national ont t adoptes quasisimultanment. Beaucoup de postesauparavant occups par des appelsen service civil et par des objecteursde conscience ont alors t pourvusgrce ce nouveau dispositif.On comprend mieux, au passage,pourquoi lancienne coopration, quintait pas concerne par les emplois- jeunes, a bnfici dun soutienimportant. La promulgation tardive

    des textes dapplication, et les faiblesfinancements ddis la mise enuvre du volontariat de cohsionsociale et de solidarit sont ainsiindissociables de cette nouvelle prio-rit politique ne avec lalternancegouvernementale, aprs les lectionslgislatives de 1997. Les associationsont dailleurs eu largement recoursaux emplois-jeunes, devenant mmetrs rapidement leur premieremployeur.

    En revanche, beaucoup dentre ellesse sont dtournes du vo l o n t a r i a tquelles jugeaient inadapt leurs pratiques et surtout coteux. Lacharge financire des jeunes recrutsrevenait en effet, lexception de leurcouverture sociale, aux structures quiles accueillaient. Beaucoup dassocia-tions ont fait le choix de ne pas sins-crire dans le nouveau cadre propos par les pouvoirs publics, y comprispour celles qui possdaient dj desrfrence anciennes au volontariat etau service civil.

    Formes civiles

    de lancien service national

    Volontariats civils

    du nouveau service national

    Coopration en administration (CSNA)

    Coopration en entreprise (CNSE)

    Volontariat international en administration (VIA)

    Volontariat international en entreprise (VIE)

    Aide technique outre-mer Volontariat laide technique (forme spcifique duvolontariat de cohsion sociale et de solidarit)

    Police nationale et scurit civile Volontariat dfense, scurit civile et prvention

    Objection de conscience Volontariat de cohsion sociale et de solidarit

    Des formes civiles aux volontariats

    ..

    Source : Valrie Becquet , Volontariat et service civil volontaire en France. tat des lieuxdes politiques publiques et des pratiques associatives, Etude CDVA, 2006, p. 16.

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    Le label englobantdu service civil volontaire

    Avec le changement de majorit poli-tique en mai 2002, la circulaire per-mettant la mise en uvre duvolontariat de cohsion sociale et de

    solidarit a donc finalement t publie. Lintrt pour ce thme nacependant pas disparu des proccupa-tions de lquipe gouvernementale enplace. Trs vite, le projet de deux nou-veaux statuts a t annonc : le contratde volontariat international et celui devolontariat associatif. Le premier a tadopt en 2005 et le second en 2006.Tous deux apportaient des prcisionsjuridiques sur ce nouveau statut qui nerelevait ni du bnvolat ni du salariat,et ne concernaient pas spcifiquementla jeunesse. Ils visaient la fois uneadquation plus large aux besoins dumonde associatif et une valorisation delengagement citoyen. Mais ils redou-

    blaient galement le caractre frag-ment de loffre existante en lamatire.Les meutes dans les banlieues fran-aises en 2005 se sont droules alorsque la loi sur le volontariat associatif

    tait en discussion lAssembl enationale. Jacques Chirac a annonc,quelques mois aprs, la cration dunservice civil volontaire pour rpondre la crise que venait de connatre le p ays. Le nouveau dispositif a tinscrit aprs coup dans le cadre pluslarge de la loi pour lgalit des chan-ces de mars 2006. Ce service civilvolontaire a t plac sous la tutelle dela nouvelle Agence nationale pour lacohsion sociale et lgalit des chan-ces (ACS), charge de dlivrer lesa grments aux structures daccueilpotentielles. Ces dernires pouvaienttre des personnes morales de droitpublic ou de droit priv, agissant dans

    un but dintrt gnral, sans que descontenus spcifiques de missions nesoient mentionns. Elles deva i e n tapporter aux jeunes recruts une for-mation la citoyennet, un accompa-

    gnement dans le cadre de leursactivits et une aide la concrtisationde leur projet professionnel. Le servicecivil volontaire tait ouvert aux jeunesde 16 25 ans, rsidant sur le territoirefranais depuis plus dun an et pourune dure de 6, 9 ou 12 mois, raisondau moins 26 heures par semaine. Parailleurs, il faisait lobjet dun finance-ment public qui concernait la fois lesindemnits des volontaires prises encharge 90 %, et la formation et lac-

    compagnement qui leur taient dispen-ss.Ce label na pas t prsent commeun nouveau volontariat, mais commeun socle commun pour les form e sexistantes. Les volontariats de solida-rit internationale, associatif, de coh-sion sociale et de solidarit taientdonc susceptibles den releve r, enmme temps que dautres dispositifspourtant fort diffrents. De nombreuxreproches ont ainsi t adresss au ser-vice civil volontaire dont les missions

    htrognes navaient parfois que peu voir avec la notion dintrt gnral.La lourdeur des procdures adminis-tratives lie la ncessit dun doubleagrment (au titre du volontariat et celui du service civil) a galement tsouligne. Mais cest surtout, selondivers observateurs politiques et asso-ciatifs, labsence de fi n a n c e m e n t spublics significatifs qui a empch leservice civil volontaire de se diffuserl a rgement. Ces diffrents lments

    sont lorigine de son faible dvelop- pement, bien loin des 50 000 jeunesinitialement viss.

    Des obstacles identifis aud veloppement du service civique

    partir de la suspension du servicenational, cette gnalogie a t mar-que par une certaine instabilit et denombreux retournements. L a c t iv i t politique dploye et les ambitionsannonces contrastaient toujours, fina-lement, avec la modestie des effectifset des rsultats concerns. Dive r scueils ont ainsi t identifis.

    Type de contrat Effectifs

    Volontariats susceptibles de recevoir le label service civiqueVolontariat associatif (VA)

    2900 (dont 95% en VA)Volontariat civil de cohsion sociale et de solidarit(VCCSS)

    Volontariat civil l'aide technique (VCAT) 450 500

    Volontariat de solidarit internationale (VSI) 2145

    Volontariat de prvention, scurit et dfense civile 320

    Volontariat pour l'insertion (dit dfense 2e chance ) 1800

    Cadets de la Rpublique 857

    Volontariat international en administration (VIA) 1 000

    Volontariat franco-allemand (VFA) 7 Franais, 7 Allemands

    Volontariats rgis par des dispositions spcifiques

    Volontariat francophone

    Service volontaire europen (SVE) 380

    Mission d'engagement civique sports 10

    Pompiers volontaires 54 486 (< 25 ans)

    Volontariat international en entreprise (VIE) 5 800

    Les dispositifs de volontariat et leurs effectifs fin 2008

    Source : Rapport de Claude Greff sur la proposition de loi, adopte au Snat, relative au servicecivique, n 2269, dpos le 27 janvier 2010.

    ..

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    Ceux-ci concernent en part i elalternative entre obligation et volon-tariat qui na cess dtre discute. Duct de la classe politique, les dbatsse sont focaliss sur le danger de la

    seconde option qui risquait datteindreau caractre universel de la vocationd i n t gration citoyenne vise. Lesassociations, elles aussi, se sont long-temps divises sur la question. Les dis-cussions ont encore pris de lampleuravec la publication dun Appel pourun service civique obligatoire danslhebdomadaireLa Vie en novembre2005. Ce dernier a t sign par ungrand nombre de personnalits et par plus de 400 parlementaires de tous

    horizons politiques. Labsence deconsensus autour de la dmarchemme de volontariat, entre le mondepolitique et le secteur associatif maisaussi en leur sein, nest sans doute passans lien avec le faible dveloppementde ce statut.Par ailleurs, la prgnance des cadresissus de la conscription est demeureforte sur la structuration des disposi-tifs suivants qui ne sen sont jamaisv r i t a blement mancips. De cetempilement de cadres successifs a

    dcoul une offre htrogne dont les principes et la vocation partagsntaient pas aisment identifiables.Ce manque de cohrence et de lisibi-lit sest galement traduit dans lar-chitecture de leurs modesdorganisation, souvent construite lahte. Le volontariat de cohsionsociale et de solidarit a pti dunegestion dcentralise, soumise labonne volont des diffrentes adminis-trations concernes et dj accapares

    par dautres missions. Son essor limitsest alors accompagn dune diffu-sion trs ingale de loffre sur le terri-

    toire. Avec la cration du service civilvolontaire, lAgence nationale pour lacohsion sociale et lgalit des chan-ces a permis de remdier en partie ces difficults, mais au prix dunredoublement des dmarches raliser par les associations dsireuses dyprendre part. Toujours marqus par desdcoupages administratifs anciens,mais dpourvus de la symbolique forteet unificatrice qui leur donnait sens,ces volontariats se sont trouvs freins

    dans leur mise en uvre opration-nelle.

    Cependant, cest sans doute du ctdes financements publics octroys queles flottements sont apparus les plusflagrants, non sans lien avec les deuxpoints prcits. En dpit de la volont politique affiche, ces financementsont toujours t des plus modestes. Ilsont contribu maintenir les nouveauxdispositifs crs dans une cert a i n econfidentialit et limiter les effectifs,malgr linvestissement actif de plu-sieurs associations dans laccueil de

    volontaires.

    ..

    Lobjection de conscienceReconnue en 1963 mais tout dabord soumise de fortes contraintes (interdictiondinformer les conscrits sur cette possibilit, obligation dun entretien de motivationdevant une commission, affectation systmatique lOffice national des forts et

    dure double de celle du service militaire), lobjection a t libralise en 1983.Elle a alors fait lobjet dune libert dinformation, dun bnfice automatique surlettre de motivation et dune diversification de ses conditions daffectation.

    Repres

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    La Vie associative n 13 Septembre 2010 9

    Diffrentes tapes ont pr-cd le projet de loidpos au Parlement. Les

    nombreux retentisse-ments de l Appel pour

    un service civique obligatoire danslopinion publique ont amen les prin-cipaux candidats aux lections prsi-dentielles inclure cette question dansleur programme.

    Remise sur lagenda politiqueaprs les lections prsidentielles

    Peu de temps aprs son arr ive l E lyse, Nicolas Sarkozy a charg Luc Ferry, alors prsident dlgu duConseil danalyse de la socit, derdiger un rapport sur la rnovation duservice civique. Remis en septembre2008, ce dernier envisageait les diff-rentes options possibles et soulignait,dans tous les cas de figure, limpor-tance de recourir une phase de volon-tariat pour une monte en puissanceprogressive. Dans un deuxime temps,le nouveau haut commissaire laJeunesse, Martin Hirsch, a men denombreuses consultations afin de rdi-ger un Livre vert sur les politiques dejeunesse prsent en juillet 2009. La

    mise en uvre dun service civiqueconstituait lune de ses propositions,ensuite approfondie par la commission

    de concertation sur la politique de la jeunesse. Cette dernire en prcisaitles contours qui devaient reposer sur labase du volontariat et concerner 10 %dune classe dge dans un dlais decinq annes. Une valuation de sonimpact pouvait ensuite conduire sasystmatisation.Suite ces prconisations, 40 millionsdeuros ont t inscrits dans la loi definances pour 2010. Ds 2009, unedotation de 18,9 millions deuros a t

    consacre au recrutement de3 000 volontaires en service civil dansle cadre dune phase dexprimenta-tion prparatoire.Cest dans ce contexte quen septem- bre 2009, Yvon Collin et le groupeRassemblement dmocratique et socialeuropen (RDSE) ont dpos au Snatune proposition de loi sur le servicecivique. Ce projet visait fusionner lesprincipaux statuts de volontariat exis-tants et simplifier les procdures pour les structures daccueil. Sil aconnu un destin heureux, il ntaitpourtant pas le premier voir le jourau sein du Parlement.

    La jeunesse, symptme dumalaise national ?

    Le projet de loi dYvon Collin fait enralit suite une multitude dautres,soumis au Parlement par des dputsou des snateurs dappartenances poli-tiques varies depuis plusieurs annes.Le rapport Ferry permet den compta-

    biliser douze, entre septembre 2003 etoctobre 2006, qui nont pas tous tdiscuts. Les cadres dfinis, en termesde dure, dge, de modalits dexer-cice varient, mme sils sappuientdans la plupart des cas sur une logiquedobligation et non sur du volontariat.Mais, au-del des divergences philoso-phiques bien relles qui sous-tendentces propositions, leurs contextes dap-parition ne peuvent manquer dattirerlattention. Une premire vague inter-vient en effet suite la canicule de

    2003 et au dcs de plusieurs milliersde personnes ges. Une seconde voitle jour aprs les meutes dans les ban-lieues en 2005. Les origines et lesconsquences de ces deux sriesdvnements nont que peu de pointscommuns, mais toutes deux ont suscitune forte motion collective et desinquitudes quant laffaiblissementdu lien social et de la cohsion natio-nale. Ainsi ces diffrents projets ont-ilsvu le jour dans des climats de malaise

    social dont la jeunesse devenait unsymptme criant.Le nouveau projet de loi ne sinscritpas en raction un vnement drama-tique ponctuel mais, sur fond de criseconomique accrue, les dbats et lesrapports quil a suscits au Parlementfont apparatre ces mmes craintesdun dlitement du lien social dont les jeunes seraient les premiers porteurs.Les expressions employes en tmoi-gnent lorsquelles dressent un portraitde la socit franaise caractrise par la monte de lindividualisme etle repli sur soi ou encore par lmiettement des solidarits . Et la jeunesse vient alors cristalliser

    La loi dbattue au Pa r l e m e n tMalgr leur russite re l a t i ve, les pre m i res formes de

    volontariat ont prpar le terrain de nouve a u x

    d veloppements. La loi sur le service civique a t

    p romulgue en mars 2010, aprs plusieurs mois de

    dbats parlementaires marqus par un consensus

    exceptionnel. La volont de ra v i ver le civisme de lajeunesse, jug dfaillant, tait en effet au cur de toutes

    les proccupations politiques.

    Le service civique, ltat et les associations

    ..

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    10 La Vie associative n 13 Septembre 2010

    cette ide dun dclin, en raisonde son manque de repres , de ses valeurs rpublicaines jugesdfaillantes , de sa tendance pri-vilgier ses droits personnels au dtri-

    ment de ses devoirs en matire desolidarit nationale . Dans ce cadre,les vertus prtes au service civiquese font avant tout morales et sont rap-portes au vide apparu en la matireavec la suspension du service natio-nal, autrefois source de brassagesocial, dapprentissage de la vie encommunaut, dexpression de la soli-darit nationale et de respect de lau-t o r i t . Il sagit avant tout de transmettre des valeurs de citoyen-

    net , dencourager les jeunes sengager au service de la collectivitnationale . Les allusions la ques-tion de linsertion professionnelle,largement prsentes lors de la cra-tion du service civil volontaire, sontcette fois-ci beaucoup moins mar-ques. Ce qui peut dailleurs susciterun certain tonnement dans uncontexte de croissance massive duchmage des jeunes.Aliment par des reprsentations plu-tt inquites et dfiantes vis--vis de

    la jeunesse, le consensus autour du projet de loi sur le service civiquesest donc appuy sur un registre trsmoral qui a permis des votes favora-bles la quasi-unanimit au Snat et l A s s e m ble nationale. Cet accordexceptionnel et inhabituel sur lesgrandes lignes sest cependantaccompagn de nombreuses discus-sions sur diffrents points de sa miseen uvre.

    Donner un nouveau souffle la geste rpublicaine

    Sur fond de rfrences rcurrentes la conscription, les dbats se sont,bien entendu, ports sur le caractreobligatoire ou volontaire que devaitrevtir le service civique. La proposi-tion de loi prsente se fondait sur laseconde option qui a t discute parbeaucoup de parlementaires, en parti-culier de gauche. Les arguments pro- poss ntaient pas nouveaux. Ilsfaisaient valoir la garantie dun relbrassage social et dune mixit effec-tive, ainsi que la ncessit de mainte-

    nir un lien oblig entre les jeunes et laRpublique. Leurs adversaires, parmilesquels Martin Hirsch, arguaient sur-tout des difficults pratiques saconcrtisation et, notamment, de

    limpossibilit de proposer un nom- bre suffisant de missions dintrtgnral pour les 700 000 jeunes duneclasse dge potentiellement concer-ns. Reprenant les conclusions durapport de Luc Ferry, un consensus at tabli sur la base dune monte enpuissance progr e s s ive du serv i c ec ivique fonde, dans un premiertemps tout au moins, sur une logiquede volontariat. Cette position taitdailleurs celle du snateur Y vo n

    Collin, linitiative du projet. Uncomit de suivi a t prvu afin dac-compagner la mise en uvre de la loiet de prsenter devant le Parlement unrapport sur dventuelles propositionsdamlioration, avant le 31 dcembre2011. Cependant, la rfrence expli-cite une volution vers lobligation,initialement prvue dans ce docu-ment, a t supprime. La loi sur leservice civique dfini comme volon-taire a donc suscit un consensus quine se prsente, pour linstant, que

    comme transitoire.

    Linscription au code du servicenational

    Dans ce contexte, linscription aucode du service national a, pour sa p a rt, fait lobjet dune unanimitcomplte et immdiate. Si le servicecivil volontaire, rattach au cadre plusglobal de la loi sur lgalit des chan-

    ces, devait prendre place dans le codede laction sociale et des familles,cette nouvelle version a t rsolu-ment inscrite dans la ligne de laconscription dont elle visait prendrele relais. Le service civique devientnon seulement lune des formes duservice national, mais aussi son ferde lance .Les discussions ont alors port sur lesmodifications apporter ce code, defaon en amliorer la cohrence etla lisibilit. Lobjectif de cohsionnationale a t ajout celui dedfense et la Journe dappel et deprparation la dfense a t rebap-tise Journe dfense et citoyen-

    net . Cette journe doit comprendreun temps dinformation et de sensibi-lisation au service civique. De cerepositionnement fort sur le plansymbolique na dcoul quun dsac-

    cord de fond lorsque, dans le rapportde la commission snatoriale, unedure minimale de trois ans de rsi-dence sur le territoire pour les candi-dats au service civique a t voque.Celle-ci a finalement t ramene un an dans le texte dfinitif, comme leproposait le projet initial.

    Des missions dintrt gnral

    Les vises du service civique ont tdfinies de la faon suivante : celui-cia pour objet de renforcer la coh-sion nationale et la mixit sociale, etoffre toute personne volontaire lop-portunit de servir les valeurs de laRpublique en faveur dun projet col-lectif, en effectuant une mission din-trt gnral auprs dune personnemorale agre . Les champs dinter-vention possibles (repris dans lestableaux rcapitulatifs ci-aprs) doi-vent rpondre de missions juges

    prioritaires par ltat. Un importanttravail de dfrichage tait parallle-ment effectu par lIGAS. Ces champsont donc suscit moins de discussionsque le primtre des structures sus-ceptibles daccueillir des jeunes enservice civique et pouvant rpondrede cet intrt gnral. Pour finir, sontconcerns les organismes sans butlucratif de droit franais ou les per-sonnes morales de droit public. Leprimtre se voit donc largi compa-

    rativement aux rgimes antrieurs. Levolontariat associatif, par exemple, nevisait que les associations de droitfranais ou les fondations dutilitpublique, alors que dautres types defondations ou des mutuelles peuventdsormais y prtendre. Cependant, lesassociations cultuelles, politiques, lescongrgations, les fondations dentre- prise et les comits dentreprise enont t exclus. Cet largissement sestaussi vu justifier par la volont dac-cueillir, terme, 10 % dune classedge, soit 70 000 jeunes.Cette volont de revivification de la geste rpublicaine doit en effetsaccompagner dune monte en puis-

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    sance rapide du service civ i q u e ,comme le prconisait dj la commis-sion de concertation sur la politiquede la jeunesse. Dans ce cadre, sonfinancement par ltat est apparu

    comme une vidence non discutableau sein des deux assembles, finance-ment accru pour rpondre aux ambi-tions annonces. La refonte totale descadres rglementaires existants cons-titue le deuxime axe de cette monteen puissance.

    Simplification et rationalisationdes dispositifs existants

    A fin de dpasser les fa i blesses desdispositifs prcdents, la nouvelle loivise fusionner la plupart dentre euxdans un cadre unique et lisible. A i n s ile volontariat associatif, le vo l o n t a r i a tc ivil de cohsion sociale et de solida-rit, le volontariat civil laide tech-nique, le volontariat de prve n t i o n ,

    scurit et dfense civile, le serv i c ec ivil volontaire disparaissent-ils pourlaisser la place au service civique. Pa railleurs, le service volontaire euro-pen (SVE), les volontariats de solida-rit internationale (VSI), lesvolontariats internationaux en admi-nistration (VIA) et en entreprise(VSE) restent rgis par leurs disposi-tions propres, mais ils peuvent consti-tuer des formes de service civ i q u ee ffectues ltranger et donner droit une attestation.Si la volont dhomogniser les mul-tiples rgimes existants tait larg e-ment partage au sein des deuxa s s e m bles, le nouveau dcoupage

    propos na pas pour autant fait luna-nimit. Relayant le point de vue dec e rtaines associations, des parlemen-taires ont plaid pour le maintien duvolontariat associatif dont les vises et

    le mode de fonctionnement ne recou- paient pas exactement celles du ser-vice civique et ne pouvaient donc syfondre. Ce point, sur lequel ils nontpas obtenu gain de cause, est plus lar-gement abord par la suite, proposdu processus de concertation entreassociations et pouvoirs publics. Acontrario, linclusion du vo l o n t a r i a t

    i n t e rnational en entreprise, absente duprojet de loi initial et de sa premireversion modifie par les snateurs, afait resurgir les dbats qui entouraientdj sa prsence dans les dispositifsantrieurs. En effet, celui-ci nest pase ffectu au service de lintrt gnralmais dune entreprise et suscitait doncde larges rticences. Toutefois, unemajorit de dputs ont souhait lerintroduire dans ce nouveau cadrea fin de le rendre plus attractif et plus

    v i s i ble.

    Un service civiquepour la jeunesse

    Cette volont dhomognisation ancessit galement la cration dunstatut et dun rgime juridiques com-muns et cest sans doute sur ce pointque les controverses ont t le plus prsentes. Celles-ci ont tout dabordconcern la tranche dge vise par leservice civique, finalement compriseentre 16 et 25 ans. La limite dgeinfrieure tait dj prsente pour leservice civil volontaire, mais elle a

    pris un nouveau sens ds lors quellese voyait associe un autre projetgouvernemental dvolution du ser-vice public de lorientation. Avec laprise en charge obligatoire des jeunes

    de 16 18 ans, certains parlementai-res craignaient que le service civiquene remplace leur endroit une vrita-ble formation scolaire ou profession-nelle. Cet argument a notamment trepris par ceux du Parti communisteet du Parti de gauche, qui souhaitaientque le dispositif ne vise que lesmajeurs et qui nont pas vot le textedfinitif.La limit dge suprieure fixe 25 ans a, pour sa part, fait lobjet dun

    relatif consensus mme si, dans un premier temps, les snateurs avaiente nvisag un service civique sanslimite dge suprieure mais financpar ltat jusqu 25 ans. Des condi-tions daccueil spcifiques ont gale-ment t tablies pour les mineurs quidoivent bnficier dune autorisationparentale.

    Une tape de vie

    Un autre dbat a port sur la dureglobale et hebdomadaire des mis-sions, ainsi que sur leur caractrecontinu ou morcel. Sur ce point ga-lement, les positions ont diverg. Letexte du Snat faisait preuve dunegrande flexibilit tandis que les dpu-ts de lAssemble nationale ont cher-ch rigidifier le dispositif : leservice civique ne peut tre fractionnet doit avoir une dure continue com-prise entre 6 et 12 mois. Leur inten-

    tion tait de marquer symboliquementson importance et le poids quil devaitavoir dans la vie des jeunes suscepti-bles de sy engager.Dans le mme esprit, les membres delAssemble nationale ont galementrejet lamendement propos par legouvernement concernant le bnvo-lat de service civique. Selon cette pro- position, certains bnvolats delongue dure et complts par uneformation citoyenne devaient pouvoirbnficier dune attestation de servicec ivique. Mais, outre son caractrefragment, cette proposition risquaitgalement datteindre la volont declarification qui tait au principe

    Ve r b a t i m L'engagement en service civique insufflera unenouvelle dynamique la geste rpublicaine et donneraenvie chaque jeune de s'investir dans la socit. Claude Greff, dpute UMP, rapporteure pour la loi relative au

    service civique

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    de la nouvelle loi. Elle a doncessuy un refus majoritaire, au grandsoulagement de beaucoup dassocia-tions comme le dtailleront les para-graphes consacrs leur concertation

    avec les pouvoirs publics.Une volont partage de souplesse a,en revanche, guid la dfinition de ladure hebdomadaire des missions quireprsentent sur la dure du contrat,

    au moins 24 heures par semaine et permettent ainsi dalterner priodesde forte activit et priodes plus creu-ses. Dans le mme temps, elles ne p e u vent dpasser 48 heures parsemaine et 35 heures pour lesmineurs. Par ailleurs, cette conception

    dun service civique comme tempsspcifiquement ddi un engage-ment pour lintrt gnral a aussientran des discussions sur sa com- patibilit avec une formation ou unemploi. Contrairement aux snateurs,les dputs sy sont opposs pendantles dbats lAssemble. Mais, rienntant spcifiquement indiqu cesujet dans le texte lgislatif, celle-ciest finalement autorise de fait. Ilsagit l dune volution majeure par

    r a p p o rt aux dispositifs antrieurs,notamment ceux qui relevaient du ser-vice civil volontaire envisag commeune occupation unique.

    Un encadrement renforc

    Les contours de ce contrat qui orga-nise une collaboration exclusive detout lien de subordination entre lundes organismes ou lune des person-nes morales agres, et la personnevolontaire ont t moins sujets controverse. Lenjeu, dj prsent lorsde la cration des dispositifs ant-rieurs, consistait encadrer ce statut,

    lui affrer des droits et une protec-tion sociale tout en le distinguant clai-rement du salariat et donc du droit dutravail. cet gard, le modle du ser-vice civil volontaire a t largement

    repris et complt. Le volontaire enservice civique bnficie dune cou-verture maladie, de droits la retraiteet de congs. Seul le montant de sonindemnit, quelque peu revu la

    baisse selon les dcrets promulgus, avritablement suscit linquitude decertains parlementaires. Il sagit, lencore, dune des raisons qui ontamen les parlementaires communis-tes et du Parti de gauche sopposerau service civique. Le statut a, dautre

    part, fait lobjet dun encadrementrenforc. Il ne peut tre tabli pourdes missions qui auraient t effec-tues par un salari moins dun ana u p a r avant af in de diminuer lesrisques de substitution lemploi. Ilne peut pas non plus tre exerc dansune structure o le volontaire seraitdj salari. Et enfin, il ne sapplique pas aux dirigeants bnvoles qui p o u rraient ainsi faire financer parltat le travail quils effectuent de

    manire dsintresse au sein dasso-ciations.

    Des procdures simplifies etgres par une structure ddie

    Une autre simplification notabl ec o n c e rne la procdure dagr m e n t pour les structures daccueil. Uneseule est dsormais ncessaire et obte-nue auprs dun organisme unique quigre aussi le versement des indemni-ts directement aux volontaires. Cetted e rnire disposition vise, dans lemme temps, consolider le lien entreltat et les volontaires, autrement dit

    la force symbolique de lenga g e m e n ten faveur de lintrt gnral que ve u tconstituer le service civique. Les orga-nismes daccueil font par ailleurs lob- jet dun soutien financier qui doit

    couvrir une partie des cots relatifs laccueil des volontaires. Comme danslancien service civil, ces derniers doi-vent en effet bnficier dune form a-tion citoyenne, dun accompagnementpour leurs missions et dune aide laf o rmulation de leur projet dave n i r. cet ga r d, les parlementaires ontsouhait la dsignation dune institu-tion spcifique ddie la gestion dun o u veau service civique. Le gouve r-nement, soutenu par lAssembl e

    nationale, a propos la cration dungroupement dintrt public (GIP)dnomm Agence du serv i c ec iv i q u e . Il regroupe ltat, lAgencenationale pour la cohsion nationale etl galit des chances (AC S ), lInstitutnational de la jeunesse et de lduca-tion populaire (IN J E P) et lassociationFrance Volontaires. Une telle architec-ture prsente lintrt, selon ses pro-moteurs, dtre adaptable aux besoinset donc suffisamment souple pouraccompagner lessor rapide du serv i c e

    c ivique, et de pouvoir impliquer danssa gouve rnance les diffrents acteursc o n c e rns (organismes daccueil, ta- blissements denseignement, etc.) aufur et mesure de son dve l o p p e m e n t .Linstauration dun comit consultatifreprsentant la socit civile doit ga-lement permettre de renforcer cettedmarche partenariale.Les dbats qui ont accompagn levote de cette loi sont donc rests trsaxs sur la promotion dun engage-

    ment au service de lintrt gnral,relais de la conscription disparue, etlargement encadr par les pouvoirs publics. Dans le mme temps, lesassociations en constitueront, avec lescollectivits territoriales, les princi-paux lieux de mise en uvre. Se posealors la question de la place et du rlequi leur ont t octroys dans ce pro-cessus de construction lgislatif.

    Ve r b a t i m Je suis favorable un service civique initiatique etprcis, pas un service civique homopathique. Il lui

    faut donc un dispositif bien identifi. Marcel Rogemont, dput PS

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    La concertationentre associationset pouvoirs publics

    Des points de dsaccorddans la concertation

    Linscription au code du service natio-nal na pas fait lobjet dune dissen-sion explicite entre les associations etles pouvoirs publics. Certaines ytaient mme compltement favora- bles tandis que dautres ont exprimleurs rserves devant ce rattachement une histoire, des symboles et desvaleurs conus comme trangers lavie associative. Les plus rfractaires nesouhaitaient pas cependant faire lim-passe sur les opportunits dun servicecivique pris en charge par ltat et nese sont donc pas engages dans uneopposition frontale. En revanche, deuxautres points principaux ont fait lobjetdpres discussions dj voques

    propos des dbats au Snat et l A s s e m ble nationale. Le premierconcernait la suppression du volonta-

    riat associatif dont le maintien tait p o u rtant trs largement souhait etsoutenu la fois par le Comit pour lesrelations nationales et internationalesdes associations de jeunesse et ddu-cation populaire (CNAJEP) et la CPCA.Face la volont dhomognisationqui animait les parlementaires, ilsagissait de dfendre un cadre souple(notamment en termes de dure desengagements), relevant de la liberta s s o c i a t ive et non dune politiquedtat. Un volontariat de serv i c ecivique a finalement t cr pour lesplus de 25 ans, qui peut concerner lesassociations et les fondations recon-nues dutilit publique. Celui-ci ne

    bnficie pas dun financement publicmais son montant est fix par dcret.Nanmoins, certaines droga t i o n spour les 18-25 ans peuvent tre accor-des par lAgence du service civique.Le second point qui a suscit de fortesractions dans le monde associatiftenait lintroduction du bnvolat deservice civique dans la loi. Cette initia-t ive gouve rnementale, fi n a l e m e n tcarte par les dputs, soulevait eneffet de nombreuses craintes explici-

    tes par les acteurs associatifs interro-gs ci-dessous.

    Quel bilan aujourdhui ?

    Quel regard portent sur cette concert a-tion les associations qui y ont prisp a rt ? Nadia Bellaoui (Ligue de len-seignement, CPCA), Eric Sapin(Comit de coordination pour un ser-vice civil), et Marie Trellu Kane (Unis-

    Cit) dressent cet gard un bilanplutt positif et reviennent sur les diff -rents points quils ont dfendus dans cecadre.

    Le rapport de Luc Ferry, la rdaction du Livre vert etles travaux de la commission de concertation sur la

    politique de la jeunesse ont constitu des tapes de

    consultation des associations, pralables au vote de la

    loi sur le service civique. Relativement approfondies,

    ces consultations ont trs tt permis un travail

    commun avec les pouvoirs publics, qui na cependantpas empch quelques tensions quant aux positions

    prises par les parlementaires et par le gouvernement.

    Le service civique, ltat et les associations

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    Quel est votre point de vue globalsur le processus de concertatione n t re le monde associatif et les pou-v o i rs publics sur le service civique ?

    Marie Trellu Kane : il y a deux aspects.Dune part, un travail de consultationi n t e r a s s o c i a t ive a t men au sein dungroupe compos de structuresaccueillant dj des volontaires (lAfev,l A fij, A n i m a fac, la Croix-Rouge, la

    Ligue de lenseignement et Unis-Cit).Cette dmarche a facilit par la suite lac o n c e rtation avec les pouvoirs publ i c scar elle a permis de faire merger unevision commune et un accord sur les-sentiel.Dautre part, il y a le dialogue avec lesp o u voirs publics qui sinscrit dans unehistoire plus ancienne. Le servicec ivique tait lune des promesses decampagne de Nicolas Sarko z y, mais tantque nous navons pas eu un interlocuteur

    s p c i fique en charge de ce dossier, il at difficile dtablir un change cons-t ructif. L a rr ive de Luc Fe rry a marq u une premire tape de concertation pen-dant laquelle de nombreux acteurs ontt reus. Unis-Cit a t trs entendudans ce cadre. Le rapport Fe rry estdailleurs totalement en phase avec nosrecommandations. Mais au-del de notresituation spcifique, il existait cert a i n e-ment dj un dbut de vision commune,des points faisant lunanimit et qui sesont retrouvs dans le rapport : contrel o bl i gation, une vritable tape de vie,l i m p o rtance de la mixit. Globalement,les grandes lignes y taient. De monpoint de vue, cette premire tape a t

    russie. Jai galement trouv remarq u a- ble le travail men ensuite pendant lemandat de Martin Hirsch. Les runionsont t rgulires, ont abord de vraissujets et se sont caractrises par une

    v r i t a ble coute et une prise en comptedes avis de chacun. Avec son quipe, il asu faire preuve dune ouve rture, dunpragmatisme, dune efficacit qui mri-tent dtre souligns.

    Eric Sapin :Nous tions dans la conti-nuit des changes ayant nourri le Liv r eve rt sur la jeunesse. Le service civique ytait dj abord. Mais nous avons fa i tsur ce sujet un saut qualitatif incompa-r a ble par rapport ce qui existait aupa-

    r avant en matire de dialogue avec lesp o u voirs publics.On peut juste regretter le temps perducar la promesse dun service vo l o n t a i r eremonte une quinzaine dannes,lorsque Jacques Chirac a annonc lasuspension du service national. Ceretard a aujourdhui des consquencessur la socit, sur lhistoire de notre p ays, sur le civisme contemporain.Cependant, il ny a pas de concert a t i o np a r faite et celle-ci tait perfectibl e .M a rtin Hirsch nous entendait, tout en

    ayant des ides bien arrtes sur un cer-tain nombre de points, compte tenu deses propres contraintes gouve rn e m e n t a-les et budgtaires.

    Nadia Bellaoui : Ctait une drle dec o n c e rtation. La proposition de loidbattue au Snat et lAssemblentait pas dinitiative gouve rn e m e n t a l e ,mme si tout le monde savait quelletait porte par le gouve rnement. Cettesituation avait son importance parce

    quelle permettait Martin Hirsch dejouer (habilement) un rle de mdiateurentre les points de vue des associations,de Bercy et de lElyse, mais aussi desparlementaires issus des diffrents gr o u-pes politiques. Lenjeu tait daller ve r scette belle ide, largement partage ausein de lintelligentsia, mais comport a n taussi les dfauts dune belle ide peu en phase avec la ralit. En tantquassociatifs, nous tions aussi sensi-bles lide de creuset rpubl i c a i n ,mais en nous appuyant sur notre ralitqui tait celle de quelques milliers dejeunes, et non sur un projet de socit,du moins pas directement. Et chacuns avait que la monte en puissance du

    s e rvice civique devait sappuyer surcette belle ide, sans dnaturer pourautant ce que nous, associations, av i o n spetitement russi faire sur le terrain.Ctait donc une drle de concert a t i o n ,

    faite dallers-retours entre des positionsde principe ncessaires, la ralit asso-c i a t ive et les contraintes bu d g t a i r e s .Chacun prenait en compte les diffi c u l t sde positionnement de lautre, parce quetout le monde tait convaincu de lint-rt daboutir. Dailleurs, nous ne tenionspas exactement le mme discours dansle cadre de la concertation avec Hirschet avec les parlementaires parce quenous nen attendions pas les mmeschoses.

    Cette petite histoire est intressante parce quelle illustre bien lintrt dusujet, entre lide gnrale quon peut sefaire du civisme et les enjeux concretsde la russite de lune de ses form e s bien particulire et qui a ses ressort spropres. En ce sens, cette concert a t i o ntait inhabituelle, mais elle a aussi cer-tainement constitu un modle dugenre.

    Quelques points ont fait dbat pen-dant cette concertation : la dispari-

    tion du volontariat associatif,linscription au code du service natio-nal ou encore le bnvolat de servicec i v i q u e

    Eric Sapin : C o n c e rnant le vo l o n t a r i a tassociatif, lamnsie de nos lus estfrappante. Ils en ont t porteurs et onttenu des discours dithyrambiques surl i m p o rtance de sa cration, il y aquelques annes. Et finalement, il passe la trappe. Certaines associations,

    C o t r avaux en tte, se sont manifestespour rappeler que ce statut rpondait des besoins pour certaines catgories deb n voles ou de volontaires qui ne ren-traient pas dans les autres cadres. Leurpoint de vue mritait une vritable va-luation partir de laquelle on aurait pu juger de lopportunit de dissoudre levolontariat associatif dans le vaste ser-vice civique, lui-mme rintgr dans les e rvice national. Les associationsavaient chacune leurs difficults pourexister quotidiennement de manirelgitime travers leur pratique duvolontariat. Elles nont pas t port e u s e sdun projet vraiment ficel, sur ce point,dans la discussion avec les pouvo i r s

    Marie Trellu Kane

    Marie Trellu Kane estprsidente dUnis-Cit.

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    p u blics. Par exemple, aucun moment,la rintgration gnrale des vo l o n t a-riats dans le service national ntait voque. Lide est venue des serv i c e sde ltat qui souhaitaient donner de la

    cohrence lensemble des vo l o n t a-riats.Dans ce cadre, larticulation au serv i c enational tenait aussi lventuelle per-s p e c t ive den faire quelque chosed o bl i gatoire. Ctait une surprise pourmoi car jtais le seul ces dern i r e sannes, y compris dans ma propreo rganisation, voquer limport a n c ede garder un pied dans le service natio-nal. Le CCSC est n en 1972, avecl volution du service national et son

    o u ve rture vers le civil, pousse par lesobjecteurs de conscience. Nous som-mes donc rests trs sensibles cettequestion du rle des civils par rapport

    des enjeux de paix et de scurit, dedfense au sens large, plus que jamaisdactualit. Le glissement de civil civique est intressant observe r. Nous y tions opposs parce que c iv i l renvoie une acception larg e , la dmocratie politique dans toute sarichesse et ses composantes, tandis que c iv i q u e restreint lacception etrecentre sur linstitution. Mais ce mou-vement peut permettre un enga g e m e n tplus important de ltat, ce qui sembl etre le cas.

    Marie Trellu Kane : Un des princi-paux sujets sur lequel Unis-Cit a eudes discussions concernait le serv i c e

    c ivique comme tape de vie. La pireoption aurait t celle de lobl i ga t i o nmorcele, deux heures par-ci par- l .Elle aurait tu la vocation du serv i c ec ivique, juste pour en faire quelque

    chose dobl i gatoire et de fi n a n a bl e .Lide est que le jeune puisse disposerdune tape de vie, bnfique la foispour la socit et pour son dve l o p p e-ment personnel. Sur ce point, nousnous sommes battus, parce que perm e t-tre un jeune de donner 6 mois de sonexistence signifie lui donner de quoiv ivre, se log e r, manger, et a cote. aa t notre grand combat.Jadhre lide que nous avons perduquinze ans mais cest un fait, nous

    avons loup le coche de la rforme dus e rvice national. lpoque, il auraitt vident dy inscrire le serv i c ec ivique. Le faire aujourdhui me paratintelligent et cest vrai que nousn avons pas tellement discut sur cepoint. mon avis, le volontariat asso-ciatif ne rpond pas aux mmesenjeux, cest un outil qui permet led veloppement de la vie associative .Mais il ny avait pas contradiction, onaurait pu le garder et cest la positionque nous avons dfendue.

    En revanche, nous tions trs oppossau bnvolat de service civique qui ris-quait, terme, de tuer lide mme des e rvice civique. Dautant quil y ava i tune Confrence de la vie associative encours, avec des groupes de travail sur le b n volat et sa valorisation. Il taitcompltement prmatur de dire quona p p o rtait une solution, avant mmed avoir pos la question, et de brouillerle message par la mme occasion. Dureste, mon avis sur ce sujet est trs

    f e rme, parce que jai toujours la mmecrainte : le service civique est une belleide, tout le monde adhre, mais acote cher car il faut prendre en charg eles frais de subsistance des jeunes, etleur encadrement. Labelliser serv i c ec ivique du bnvolat est une manirede tuer lide dans luf.

    Nadia Bellaoui :Nous avons souhaitque le code change de nom, quil passede code du service national code dus e rvice national et de la cohsion natio-nale, ce qui a t retenu. Il est vrai quela discussion ne nous a pas beaucoupoccups, mais cette position de prin-cipe tait lune des plus intressantes.

    Elle traduisait la tension lgitime entredune part, une conception de la viea s s o c i a t ive libre et auto-organise et,dautre part, ce nouveau projet. Cettetension se retrouvait entre les tenantsdu volontariat associatif et ceux du ser-vice civique, derrire Unis-Cit, et lar-gement repris son compte par toute laclasse politique. Pour cette dernire, iltait vident quon parlait de civ i s m e ,

    quil sagissait dune forme denga g e-ment public, appropriable par la collec-t ivit nationale, qui dpassaitl e n gagement associatif.Par contre, la proposition dintgrer leb n volat dans la loi sur le serv i c ec ivique navait que des dfa u t s .Comme Marie la dit, a risquait de brouiller le message de ltape dev i e et nous avions tous en tte que,d e rrire, il y avait la tentation de fa i r edu chiffre, qui tait le principal cueil.

    Cette proposition aurait aussi eu, demanire plus gnrale, un impact sur leb n volat lui-mme, puisquelle ame-nait de fait distinguer les bnvo l e slabelliss s e rvice civ i q u e desautres. Or, dans le monde associatif, onsait combien la nature humaine estm o u vante et combien il est import a n tde ne pas mettre les gens dans des sta-tuts trop figs. La fluidit du bnvo l a tva lencontre de toute typologie insti-tuant des formes plus ou moins appro-fondies, plus ou moins lgitimes. ana aucun sens, le bnvolat est un donde soi qui a des formes diffrentes maisnon hirarchisables.

    Nadia Bellaoui

    Nadia Bellaoui est secrtairenationale de la Ligue delenseignement, vice-prsidente

    de la CPCA.

    Eric Sapin

    Eric Sapin est secrtaire gnraldu Comit de coordination pourun service civil.

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    Qui ?

    Les jeunes de 16 25 ans possdant la nationalit dun tat membre de lUnion europenne ou delespace conomique europen, ou justifiant dun sjour rgulier en France depuis plus dun an. Uneautorisation parentale est requise pour les mineurs. Au-del de 25 ans, la loi instaure, en parallle de lengagement de service civique, le volontariat de ser-vice civique pour lequel ltat ne prend pas en charge lindemnit.

    Quelles conditions ? Le service civique est cumulable avec le statut dtudiant et avec celui de salari (sauf sil sagit de lamme structure). Il est incompatible avec un mandat de dirigeant bnvole dans la structure o il est effectu.

    Quelles missions ?

    Neuf champs sont dfinis : solidarit, sant, culture et loisirs, sport, ducation pour tous, environne-ment, mmoire et citoyennet, dveloppement international et action humanitaire, intervention dur-gence.

    Ces missions ne peuvent tre effectues si elles ont t prises en charge par un salari dont le contrata t rompu moins dun an avant le dbut du service civique.

    Quel contrat ?

    Ce contrat ne relve pas du droit du travail. Il concerne une dure de 6 12 mois. Sur la dure du contrat, laccomplissement des missions reprsente au moins 24 heures par semaineet est plafonn 48h (35h pour les mineurs). Il peut tre rompu sans dlais en cas de force majeure, de faute grave ou dembauche en CDI ou CDDde plus de 6 mois. Dans les autres cas, il ncessite un pravis dun mois.

    Quelle indemnit ?

    Lindemnit est de 440 euros, indexe sur lindice brut de la fonction publique. Elle est verse directe-ment au jeune par lAgence de Service et de Paiement pour le compte de lAgence du service civique. Elle comprend 100 euros supplmentaires pour les jeunes anciennement bnficiaires du RSA ou tu-

    diant boursier de 3e ou 4e chelon. La structure daccueil verse un complment dindemnit dun montant minimum de 100 euros indexsur lindice brut de la fonction publique, en espces, en nature ou en titre-repas volontaires.

    Quel impactde lindemnit ?

    Lindemnit nest pas soumise limpt sur le revenu. Le service civique suspend les versements des indemnits de chmage et de RSA qui reprennent lidentique au terme du contrat.

    Quelle protection sociale ? Le jeune saffilie au rgime gnral de lassurance maladie. Lensemble de la priode de service civique est valid au titre de la retraite.

    Quelle

    reconnaissance ?

    Une attestation de service civique est dlivre par ltat lissue de la mission. Les comptences acquises en service civique sont prises en compte dans la VAE et dans le passe-

    port orientation formation. Les modalits de valorisation dans les cursus denseignement suprieur sont encore inconnues.

    Le cadre rglementaireen rsum

    Du ct des jeunes

    Le service civique, ltat et les associations

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    Qui ? Les organismes sans but lucratif de droit franais et les personnes morales de droit publicsont concerns. En revanche, les associations cultuelles, politiques, les congrgations et lesfondations dentreprise ne peuvent recevoir dagrment.

    Comment ? Lagrment est dlivr par lAgence du service civique aprs dpt dun dossier dedemande, et pour une dure dtermine.

    Quelles obligations ?

    Les structures doivent assurer aux jeunes accueillis une formation civique et citoyenne

    dont le rfrentiel est conu par lAgence du service civique. Celle-ci peut faire lobjet dunemutualisation au niveau local. Elles doivent aussi mettre disposition des jeunes un tuteur dsign et leur fournir unaccompagnement pour la ralisation de leurs missions et leur projet davenir.

    Quelles aides de ltat ? Les structures agres peroivent une aide fixe de 100 euros par mois et par jeune.

    Comment est-elle organise ?

    LAgence du service civique est un GIP dont les membres fondateurs sont ltat (ministrede la Jeunesse), lAcs, LInjep et France Volontaires. Des personnalits qualifies sigent son conseil dadministration au ct des reprsen-

    tants des membres fondateurs. Un comit stratgique consultatif, compos notamment de reprsentants des structuresdaccueil et de parlementaires est galement constitu.

    Qui y a t nomm ?

    Martin Hirsch en est le prsident, nomm par arrt du ministre de la Jeunesse et de la Vieassociative. Francis Godard (prsident de luniversit de Marne-la-Valle) et Marie Trellu Kane (prsi-dente dUnis-Cit) sont nomms personnalits qualifies au sein de son conseil dadminis-

    tration. Luc Ferry et Jacques Godfrain (prsident de France Volontaires) en sont vice-prsidents.

    Quelle structuration rgionale ?

    Le dlgu rgional de lAgence est le prfet de rgion. Il dsigne un dlgu territorialadjoint parmi les chefs de service dconcentr ou les membres du corps prfectoral. Il assure la coordination des politiques de promotion, d'valuation et de contrle du servicecivique. Pour mener ses missions, il sappuie sur la direction rgionale de la Jeunesse, des Sports

    et de la Cohsion sociale, et sur les directions dpartementales interministrielles chargesde la cohsion sociale.

    Du ct des associations

    LAgence du service civique

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    Le service civique suscite de nombreux espoirs. Ses enjeux sont en eff e t

    i m p o rtants pour la jeunesse, pour les pouvoirs publics et pour lesassociations qui en constitueront des lieux daccueil privilgis. Du fait de

    leur multiplicit, ces enjeux sont aussi susceptibles dentrer en tension les

    uns avec les autres. Ils appellent donc une grande vigilance dans la mise

    en uvre du dispositif. Dautant que, si ce dernier sinscrit dans une

    histoire plus ancienne, sa forme actuelle nest vritablement comparabl e

    q u avec le service civil volontaire, son prdcesseur direct. L exprience surlaquelle sappuyer est donc modeste par sa dure et son chelle. La

    culture du vo l o n t a r i a t souhaite par de nombreuses associations reste

    c o n s t ruire. Cependant, pour viter de dvoyer ses intentions premires

    d e n gagement citoyen et de cohsion sociale, elle doit tenir compte des

    s p c i ficits du statut quelle promeut, statut hybride entre le bnvolat et le

    salariat. Car cest bien l, en particulier dans un contexte daccroissement

    massif du chmage des jeunes et de baisse des subventions aux

    associations, que se situent les principaux cueils.

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    Les entretiens mens dans lecadre de lenqute port e n tsur plusieurs thmatiquesqui pourraient tre autantde sujets de dbats : le

    r e c rutement des volontaires quioscille entre motivation et recherchede comptences, les missionsc o n fies qui montrent la difficult d finir ce statut, laccompagnement

    qui vise autant la contribu t i o nc i t oyenne que la professionnalisation,lindemnit, un sujet sensible et peudbattu. Entre lengagement citoye n ,le tremplin vers lemploi et le dispo-sitif dinsertion, la finalit du SCVreste floue. Et il nest pas sr que len o u veau service civique permettra degagner en clart. Reste un enjeu pr-p o n d r a n t : la relation lemploi.

    Recrutement : la motivation

    avant tout

    La motivation est le premier critre derecrutement nonc et celui qui revient

    systmatiquement dans toutes les asso-ciations. Il prsente lintrt dtreextrmement positif et difficilementcontestable, renvoyant des notionstelles que lenvie ( il suffit den avoirenvie ) ou lnergie. Il est aussi pr-sent comme le gage dun recrutementle plus dmocratique possible et cons-titue en ce sens un moyen de mettre distance la question des qualifications,

    des comptences et donc de lemploi.Cependant, dautres critres peuventsy ajouter et jouer un rle plus oumoins important.

    Une exprience associativepralable

    Certaines associations prfrent recru-ter des volontaires qui ont dj uneexprience de bnvolat. Ce passassociatif constitue tout dabord unepreuve supplmentaire de la motiva-tion sengager, et tmoigne que cettedisposition est ancienne. Le volonta-riat est alors envisag comme une

    opportunit de renforcer et de prolon-ger le bnvolat antrieur sous une

    forme nouvelle.Dans les associations o de nombreuxbnvoles sont prsents, une premireexprience bnvole est aussi le gagedune bonne connaissance du statut etde la condition de ces derniers. En cesens, il facilitera les relations et lespossibilits de travail mutuel lorsque lejeune sera devenu volontaire. Plusieursassociations ne demandent pas seule-ment une exprience bnvole prala-ble, mais une exprience en leur sein.Il peut sagir de ne pas parachuter

    le volontaire dans un lieu quil neconnat pas et de faciliter son intgra-tion dans une quipe dont il fait dj p a rtie, sous un autre statut.Lexprience pralable sur le lieu dufutur volontariat constitue aussi unegarantie pour le recruteur que a vacoller puisque le jeune a dj t vu luvre.Enfin, elle permet dconomiser toutle travail de prsentation de lassocia-tion et dexplicitation de son mode de

    fonctionnement de la part du tuteur,tandis quelle pargne en partie auvolontaire la phase dadaptation etdappropriation prparatoire lac-complissement des missions. Cetteconnaissance pratique antrieure per-met ainsi un gain de temps et dnergiede part et dautre.

    Des qualits relationnelles

    Que le volontaire soit ou non issu de lastructure quil rejoint, des critres de personnalit peuvent aussi entrer enligne de compte lors du recrutement.Le premier dentre eux, le plus

    Une culture du volontariate n c o re balbutiante

    En 2009, la CPCA a command une tude sur la

    situation des jeunes en service civil volontaire (SCV) ausein des associations. Celle-ci met en vidence une

    grande htrognit de pratiques mais aussi les

    nombreux flottements qui caractrisent encore ce

    statut. Elle donne ainsi matire rflexion pour la mise

    en uvre du service civique.

    ..

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    gnralement exprim, est le cri-tre relationnel : le volontaire doitavoir le contact facile , tre capa-

    ble dvoluer sans difficult dans ungroupe , tre ouvert et facile dac-cs . Beaucoup de missions de volon-tariat prennent en effet place au sein decollectifs et comprennent une partiei m p o rtante de r e l a t i o n n e l . Cestmme l, pour certains des recruteurs,la spcificit du monde associatif : La relation, cest le fondement duneassociation, on ne fait que a. Il estdonc ncessaire que le vo l o n t a i r edispose de telles qualits personnelles

    qui lui permettront de mener bien sesmissions mais aussi, plus largement,de sinscrire dans les valeurs et le pro-jet philosophique dfendu par les asso-ciations (tisser du lien social, etc.).Si elles ne sont pas toujours envisagescomme telles, la connaissance prala-ble du monde associatif et les qualitsrelationnelles relvent pourtant decomptences socialement construitesqui dpassent la simple motivation.Mais elles sont considres commedes complments ncessaires, qui per-mettront aux jeunes recruts de bn-ficier pleinement du volontariat et auxassociations de les accueillir dans lesmeilleures conditions possibles.

    En creux, la question delautonomie

    La tension entre motivations et comp-tences est encore plus perceptible travers la question de lautonomie. Laplupart du temps, cette dernire nest pas associe celle des critres derecrutement. Elle apparat plutt aumoment de lvocation des problmesrencontrs par le pass et des leonsqui en ont t retires pour les candi-dats futurs. Un prsident souhaite ainsique les prochains vo l o n t a i r e saccueillis au sein de son association

    soient un peu plus gs : On sestrendu compte quils taient un peu jeu-nes et quil fallait tre trs prsent(). Cest quand mme plus pertinentpour des jeunes de 22 ou 23 ans, il fautque le volontaire soit suffisammentautonome. De son ct, une coordi-natrice du dispositif fait le bilan desannes passes : La deuxime anne,on avait pris beaucoup de jeunes desMissions locales () Accueillir unjeune ou deux, cest envisageable mais plus, on ne la pas refait Lademande de suivi et daccompagne-ment est tellement lourde que cestcompliqu grer. Dans la pratique,les critres de recrutement des volon-

    taires sont donc susceptibles dvoluerpour faire face aux ralits et aux dif-ficults rencontres.Le suivi, notamment, peut requrir dutemps, de lnergie et des moye n s

    humains que lassociation ne peut pastoujours lui consacrer. Dans beaucoupde structures, le calcul des cots et desbnfices relatifs au volontariat incitealors recruter des jeunes qui saurontfaire montre dune certaine autonomieet qui nauront pas besoin dun accom-pagnement trop appuy.Ltape du recrutement tmoigne ainside la difficult poser les contours dustatut de volontaire, entre motivation etcomptences, entre ouverture au plus

    grand nombre et slection minimum.Ce constat pose, bien entendu, la ques-tion du sous-emploi, mais aussi cellede la place des publics les plus loi-gns de ces comptences tacitementattendues.

    Cadrer les missions pour dfinirla place du volontaire

    En fonction des associations, lecontenu des missions peut diverger

    fortement, mais celui-ci fait toujourslobjet dun important travail de dfi-nition pralable. Ce cadrage est locca-sion dune rflexion sur la place que vaoccuper le volontaire dans lassocia-tion, sur les projets mener et sur lor-ganisation du travail en son sein. Ilvise dfinir des missions qui nem-piteront pas sur le travail dj effectupar les salaris et par les bnvoles eninterne. Il sagit aussi de clarifier lesstatuts des uns et des autres et de par-

    venir faire une place cette nouvellecatgorie dacteurs que sont les volon-taires.Le contenu des missions constitueainsi souvent le fondement le plusconcret et le plus vident de la dfini-tion de leur rle, qui permet chacunde se positionner et dviter la confu-sion. Mais si au sein dune mme asso-ciation, la nette sparation pralabledes missions peut permettredtayer la diffrenciation des statuts,elle ne rsiste pas la comparaisonentre structures. Par exemple, des acti-vits typiques des volontaires en cer-tains lieux pourront, dans dautres,tre expressment rserves aux sala-

    M t h o d o l o g i e

    Ltude ralise lt 2009 et intitule Analyser le potentiel et les freins audveloppement des formes dengagement associatif en France. Le cas duvolontariat associatif comprend une partie quantitative et une partie qualitative.La premire consiste en un sondage auprs de 373 volontaires de trois rseaux quimettaient en uvre le service civil volontaire (Animafac, la Ligue delenseignement et Unis-Cit). La seconde repose sur 31 entretiens qui concernentcinq structures affilies la CPCA (lAfev, Animafac, la Croix-Rouge, La Ligue delenseignement, le Secours catholique) et deux structures extrieures. Diffrentsacteurs intresss par le dispositif y ont t interviews : coordinateurs au niveaunational, salaris et bnvoles tuteurs, salaris et bnvoles en contact avec lesvolontaires sur leurs missions, volontaires.Ltude constitue le n 7 de la collection Etudes et documents, publi en septembre2009. Elle est tlchargeable sur le site de la CPCA.

    Par la suite, elle a donn lieu en octobre 2009 un colloque sur Les enjeuxsocitaux du volontariat qui a rassembl diffrents chercheurs sociologuesproccups par ces questions : Valrie Becquet, Matthieu Hly, Jacques Ion,Stphanie Rizet, Maud Simonet et Roger Sue. Leurs interventions sont galementen ligne sur le site de la CPCA.

    w w w. c p c a . a s s o. f r

    Repres

    ..

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    ris ou aux bnvoles. Il nexiste donc pas de missions de volontariats u igeneris.

    Un cadre difficile tenir

    Le cadrage thorique du contenu desmissions se voit souvent transgress aufur et mesure de lintgration des jeu-nes dans la structure. Ce phnomne peut tre dnonc comme une drivemalheureuse, en particulier par lesvolontaires. Il intervient notammentlorsque ceux-ci se trouvent insrsdans des quipes de salaris et queleurs missions sont multiples et parti-

    tionnes, consistant par exemple pauler un ou plusieurs dentre eux surleurs actions. Les rcriminations expo-ses ne tiennent pas tant alors laquantit de temps requise quau senti-ment de s e rvir de bouche-trou ,dtre c o rv a ble linf i n i .Dautant que leur statut de volontairenest pas toujours bien identifi partout le monde et que, nouveaux venusdans lassociation, ils seront disposs tous les efforts pour sy intgrer.Dans les associations composes de

    bnvoles, le glissement des missionssemble soprer pour des raisons diff-rentes. Larrive du volontaire peut lesamener se dcharger sur lui dun cer-tain nombre de tches et notammentdes moins gratifiantes.Dans dautres cas, le volontaire peutlui-mme prendre les devants, progres-ser rapidement sur les projets en raisonde sa disponibilit, mais sans toujourslaisser un espace suffisant aux bnvo-les pour sen saisir.

    A contrario, cette transgression ducadre des missions peut tre trs bienvcue par tous les acteurs du disposi-tif. Elle est mme trs souvent le signedun volontariat russi, o le jeune estparvenu une autonomie complte eto il a largement dpass les objectifsde travail qui lui avaient t fixs lors-quil est arriv. Pour les volontaires,obtenir des responsabilits non pr-vues lorigine peut aussi devenir unvrai signe de reconnaissance du travailaccompli. Autrement dit, pour chacunedes parties, un bon volontariat est unvolontariat qui a justement drog aucadre initial de ses missions. Lecontenu de ces dernires apparat, sur

    le terrain, comme le principal moyendidentifier les divers statuts, de distin-guer les volontaires des salaris et desbnvoles, mais il est aussi trs mou-vant et ses frontires bien floues. Il

    souligne en ce sens toute la difficult faire exister des critres de dfinitionde la condition spcifique de volon-taire.

    Laccompagnement entrecontribution citoyenneet professionnalisation

    Laccompagnement des vo l o n t a i r e soccupe une place importante dans les

    discours recueillis. Pour les acteursassociatifs, il savre dautant plusfondamental quil dcoule dun recru-tement sur des critres de motivationprincipalement, et non sur des comp-tences professionnelles. Un tel suiviest indissociable des attentes qui sontfixes concernant les volontaires.Et cette question est complexe, quirenvoie tout dabord au positionne-ment des volontaires par rapport auprojet de la structure. Ceux-ci doiventen effet rpondre un besoin de las-

    sociation sans pour autant relever dusalariat. Leurs missions sont ainsi sou-vent prsentes, au moins dans les dis-cours, comme un p l u s , un complment , un renfort sansjamais tre juges indispensables sonfonctionnement. Dans leur conceptionmme, elles ne peuvent tre quun -ct du projet associatif et ne sy rat-tacher que de manire plus ou moins priphrique afin de parer au risquedemploi dguis.

    Il est, par consquent, dlicat de for-muler des attentes vis--vis des volon-taires dont les missions, par dfinition,ne sont pas essentielles lassociation.Des expectatives trop fortes ne vien-draient-elles pas contredire ce carac-tre complmentaire du volontariat ? Acontrario, peut-on vraiment en noncersi les missions exerces ne constituentpas rellement un enjeu ?

    Des critres dvaluation ?

    Les attentes formules ne tiennent passeulement au contenu des missionsmais aussi aux critres partir des-

    quels les volontaires seront valus. Etleur dfinition peut, elle aussi, savrerproblmatique. En effet, aux missionsde SCV sont gnralement attachscertains objectifs remplir. En aucune

    manire cependant, daprs les promo-teurs du dispositif interrogs, le volon-taire ne peut tre valu selon descritres de professionnalit. Un volon-taire recrut, au moins en partie, surdes critres de motivation ne peut trejug sur des comptences qui rappro-cheraient ses missions dun emploi.Mais comment peut-il alors tre va-lu ? Doit-il mme tre valu autre-ment que sur la base de sa bonnevolont et de son implication ?

    Nombreux sont les tuteurs qui se re-t r o u vent ainsi dans une situationquelque peu paradoxale face la ques-tion de lvaluation quimpliquelaccompagnement.

    Peut-on contraindre unvolontaire et quel titre ?

    Une autre question se pose alors, cellede la contrainte des volontaires et desjustifications qui peuvent laccompa-

    gner. Le suivi des volontaires impliqueune relation dautorit, pour ne pasdire hirarchique. Si le terme dac-compagnement tend leuphmiser,elle nen est pas moins prsente,concernant des problmes de disci- pline quotidienne (arriver lheure,faire preuve de politesse) mais aussi plus globalement propos des mis-sions et des attentes dont elles fontlobjet. Cette dimension de contrainteest tangible lorsquil sagit par exem-

    ple damener des volontaires rticents lcriture rdiger les bilans de leursprojets, afin dviter une surcharge detravail aux salaris de la structure.Mais elle ne semble pas se justifier, le plus souvent, par le volontariat lui-mme et par lengagement cens les o u s - t e n d r e : Cest compliqu, entant que volontaires, est-ce quon peutleur demander de se montrer profes-sionnel comme des salaris ? Elletend plutt sexercer au nom de laformation et de la professionnalisationf u t u r e : En mme temps, cestimportant de les former ces ques-tions, pour nous mais mme pour eux,pour aprs, sils veulent postuler ..

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    quelque part . Ainsi le suiv icristallise-t-il un grand nombre desambivalences et des ambiguts atta-ches au statut de volontaire. Ni bn-vole, ni salari, les liens et les

    obligations qui le relient la structureassociative napparaissent pas toujoursfaciles identifier et oprationnali-ser. Et cest souvent par le recours unregistre extrieur, celui de la profes-sionnalisation, que les tensions trou-vent alors se rsoudre.

    Lindemnit : un sujet sensibleet peu dbattu

    Les volontaires eux-mmes hsitent aborder le sujet de lindemnit.Lorsquun sentiment dinjustice ou demcontentement sexprime, celui-ciest le plus souvent rapport dautresdont la situation est perue commeplus critique que la sienne. Une formed e m b a rras prdomine donc. Lesvolontaires ne sont pas gaux face cette question de lindemnit et leursexigences sont aussi susceptibles devarier en fonction du rle que jouepour eux le SCV.

    Mais quels que soient leur capital ded p a rt et leur niveau de qualif i c a t i o n ,ils se vivent comme engags et aucunne cite cette indemnit comme lam o t ivation premire de son SCV, ycompris lorsque leur situation ant-rieure tait des plus difficiles. Celle-ci, justement parce quelle est jugefa i ble, peut mme constituer la preuvede cet engagement vritable au sensde dsintress, effectu pour de b o n n e s raisons. Elle est en

    quelque sorte garante des motiva t i o n sdes volontaires et la questionner peutr evenir mettre en doute la nature deleurs propres desseins, la sincrit deleur dmarche.Toute forme dinsatisfaction devientainsi difficilement exprimable et, fina-lement, les revendications nonces neportent pas sur le montant de lindem-nit mais sur laccs des droits sup- plmentaires ou des gains e nnature , tels les tickets restaurants oudes rductions dans les transports encommun.

    La gne des acteurs associatifs

    Beaucoup des acteurs associatifs, sala-ris ou bnvoles, qui promeuvent etmettent en place le dispositif se mont-

    rent eux aussi rticents discuter lin-demnit verse aux vo l o n t a i r e s ,arguant du principe de ralit et de lancessit de faire avec ce quon leurdonne, avec les rgles du jeu en placequils nont pas contribu dfinir.Aucun ne lestime trop importante et peu la jugent compltement satisfai-sante. Cependant : Bien sr que danslidal on pourrait souhaiter que cesoit plus, mais en attendant cestcomme a.

    La ncessit de ne pas faire de cetteindemnit un salaire part entire,afin de diffrencier les statuts des sala-ris de celui des SCV est galementvoque. Dautant que certaines asso-ciations fonctionnent maintenant avecdes volontaires depuis plusieursannes et dpendent, pour partie, de laressource humaine que ceux-ci consti-tuent. La question de lindemnitapparat alors totalement imbriqueavec celle, plus large, du financementde leurs activits et de leurs projets.

    Cette dernire limite est dailleurs bienidentifie par certains acteurs interro-gs, en particulier au sein des petitesstructures dont la survie est la plusincertaine.

    Une justification basesur la professionnalisation

    Lindemnit perue peut donc appara-tre faible aux yeux des acteurs associa-

    tifs, tuteurs ou coordinateurs dudispositif. Mais lexprience profes-sionnelle acquise, la constitution dunrseau, lenrichissement du CV sontalors considrs comme des formes decompensation, des bnfices nonfinanciers mais tout aussi prcieux.Cest, encore une fois, plutt sur ceterrain de la professionnalisation quesur celui de lengagement citoyen, dudon de son temps et de son nergie lac o l l e c t ivit, que la tension lie aumontant de lindemnit trouve sersoudre. Cependant, si ces deuxregistres ne sont pas compltementcontradictoires, ils posent nanmoinsla question des f inalits du SCV.

    Une contribution citoyenne

    Pour nous, le SCV permet tousceux qui en ont vraiment envie de levivre. Cest lenvie de sengager dans

    un projet, de faire des choses pour soiet pour la collectivit. Point. Cettefinalit est la plus largement partageet la plus spontanment vo q u e .Cependant, si tous les acteurs associa-tifs dbutent leur discours laide dece type darguments, il est cependantrare quils sen tiennent l.

    Un tremplin vers lemploi

    Lenjeu de la professionnalisation joueun rle tout fait structurant dans lex- prience de SCV. Quil interroge lescritres de recrutement, taie la pos-ture et le rle du tuteur ou justifie endernire instance le montant de lin-demnit, cet enjeu est massivementprsent. tel point dailleurs que lonpeut se demander dans quelle mesureil ne tend pas devenir parfois lunedes principales finalits du SCV, si cenest la premire. Linsertion profes-sionnelle des anciens participants peut

    mme devenir le principal critredvaluation du dispositif pour cer-tains acteurs associatifs.Mme lorsque cet enjeu de profession-nalisation est moins central, cesacteurs demeurent largement cons-cients des bnfices que les jeuneschercheront retirer en la matire. Ilssen flicitent et soulignent la richessede lexprience acquise, tout faitcompatible avec des aspirations ult-rieures linsertion professionnelle.

    Cependant, tenir ces deux aspectse n s e m ble, celui de lenga g e m e n tcitoyen et celui de lexprience profes-sionnalisante, est-il possible lorsque lepoids de la seconde se fait si crasantpour bon nombre de volontaires ? Unetutrice indique par exe m p l e : S u rleurs CV, elles (les volontaires) parlentde leur exprience dans lassociationen donnant un intitul de poste qui esttout fait professionnel, en disant :coordinatrice de projet culturel, statutvolontaire. Moi, a ma fait ragirdans la mesure o, du coup, le servicecivil ne devenait plus quun statut. Aumme titre quon pourrait dire CDDou CDI. Comme si le volontariat se

    ..

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    rduisait a, comme sil ny avait pasautre chose va l o r i s e r. Est-ce quecest comme a quelle ont vcu leurexprience, est-ce que cest a quellesen retirent ? Finalement, je ne sais

    pas.

    Un dispositif dinsertion

    Lenjeu de professionnalisationconcerne en particulier les jeunes djdiplms pour lesquels le volontariatest susceptible de jouer le rle de trem-plin vers la vie professionnelle, de sup-port lacquisition dexprience et decomptences. Il intervient beaucoup

    moins pour les jeunes dont le niveaude qualification est peu lev et pourqui le volontariat pourra plutt relever,selon certains discours recueillis dansltude, de politiques sociales dinser-tion destination de publics en diffi-cult. travers la question des finalits duvolontariat, cest donc bien aussi celledes populations privilgies auxquel-les sadresse le service civil volontairequi est pose. Donner une chance ,cette expression est revenue plu-

    sieurs reprises dans les entretiensmens auprs dacteurs associatifs,prenant rebours la finalit citoyenneannonce du volontariat. Les jeunessont alors moins positionns commedes contributeurs , engags, lacollectivit que comme des bnficiai-

    res dun nouveau dispositif daidesociale. Certains responsables associa-tifs expriment cet gard leur refus devoir le service civil volontaire tir vers linsertion, sestimant incomp-

    tents remplir de telles missions, tan-dis que dautres en font au contraire lavocation premire de cette forme devolontariat.On peroit ainsi combien les finalitsdu service civil volontaire se voientassimiles des perspectives diffren-tes qui relvent denjeux sociaux tousimportants et bien rels, la fois pourla jeunesse et pour le champ associatif,mais qui ne sont pas totalement assi-milables les uns aux autres.

    Un enjeu prpondrant :la relation lemploi

    Les divers flottements reprs dans lamise en uvre du service civil volon-taire soulignent toute la complexit dece statut situ entre bnvolat et sala-riat, et qui emprunte tantt au premierle registre du don de soi et de la contri- bution citoyenne, tantt au secondcelui de la professionnalit et de leffi-

    cience. Ils sont sans doute dautant plus prsents que les attentes desvolontaires font galement apparatreun dcalage certain avec la vocationpremire du SCV.Selon ltude quantitative mene, lesvolontaires recherchent en priorit une

    premire exprience professionnelle etdes comptences valoriser sur lemarch du travail. Cette tendance estdautant plus forte quils sont dipl-ms. Un tel constat na rien de trs sur-

    prenant dans un contexte de chmagemassif o linsertion professionnelleconstitue la premire proccupation dela jeunesse. Pour autant, il pose aussiquestion dans le cadre du dploiement grande chelle du nouveau servicecivique. Le caractre hybride de ce sta-tut, alli aux nombreuses difficultsdentre sur le march du travail de la population qui viendra sy inscrire,font en effet courir certains risques audispositif. Ils positionnent, bien

    entendu, le dbat du ct des liens quecette forme renouvele de volontariatentretiendra avec lemploi. Et les asso-ciations, en tant que lieu de mise enuvre privilgi, seront au