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7-1 Chapitre 7 La théorie de Wilson du groupe de renormalisation Dans cette section je présente le principe de la théorie du groupe de renormalisation des phénomènes critiques (théorie principalement due à K. Wilson). Comme précédemment je vais m’intéresser à l’exemple du point critique du modèle d’Ising. La présentation suit les ouvrages classiques comme celle du Le Bellac. 7.1 Principe des transformations du groupe de renormalisation Je commence par donner une définition formelle des transformations du groupe de renormalisation dans l’espace réel. Nous verrons des exemples et des calculs plus explicites après. Pour simplifier je considère un système avec un paramètre d’ordre continu f et des transformations de renormalisation linéaires dans les champs. 7.1.1 Décimation et transformations d’échelle 7.1.1.a - Modèle et Hamiltonien microscopique On part d’un modèle statistique défini sur réseau carré L ' Z D (en dimension D), avec une maille de réseau a (qui fixe l’échelle minimale de distance). D’autres types de réseaux sont évidemment possibles. Les degrés de liberté sont des variables f i attachées aux sites i du réseau L. Génériquement je considère que les f i sont des variables continues réelles, avec une mesure «plate» D[f]= i df i . Les contraintes sur ces variables seront incorporées dans le Hamiltonien microscopique H[f] 1 . Dans des cas plus élaborés, les f i auront plusieurs composantes (par exemple un champ vectoriel ~ f = {f a ; a = 1, N} décrivant des degrés de libertés supplémentaires) que je n’explicite pas à ce stade. La physique (à l”équilibre) du système est décrite par un Hamiltonien microscopique (fonctionnelle énergie libre) H[f] local, qu’on peut écrire comme une intégrale sur tout l’espece (en fait une somme sur les sites i du réseau) d’une somme de termes associés aux observables locales O a .Ces observables O a sont des fonctions de f et de ses dérivés spatiales rf, r 2 f, etc. évaluées au site i (sur le réseau les dérivées r sont bien sûr remplacées par des différences finies). A ce stade cette définition est assez vague, mais on l’écrit simplement H[f]= Z d D x  a k a O a = a D  i2L k a O a [f i , rf i , ··· ] (7.1.1) Les coefficients k a sont les paramètres, ou constantes de couplages, du modèle. Les paramètres physiques comme la température, les champs appliqués, les couplages entre sites, sont contenus dans ces paramètres de H. La fonction de partition Z du modèle sur réseau est Z =  e -H[f] = Z i2L df i e -H[f] (7.1.2) 1. Par exemple la contrainte |f i | = 1 pour Ising est obtenue en ajoutant un terme en A  i (f 2 i - 1) 2 , et en faisant tendre A ! . Programme Doctoral de Suisse Occidentale Théorie statistique des champs et groupe de renormalisations

La théorie de Wilson du groupe de renormalisation - CUSO · La présentation suit les ouvrages classiques comme celle du Le Bellac. 7.1 Principe des transformations du groupe de

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7-1

Chapitre 7

La théorie de Wilson du groupe derenormalisation

Dans cette section je présente le principe de la théorie du groupe de renormalisation des phénomènescritiques (théorie principalement due à K. Wilson). Comme précédemment je vais m’intéresser à l’exemple dupoint critique du modèle d’Ising. La présentation suit les ouvrages classiques comme celle du Le Bellac.

7.1 Principe des transformations du groupe de renormalisationJe commence par donner une définition formelle des transformations du groupe de renormalisation dans

l’espace réel. Nous verrons des exemples et des calculs plus explicites après.Pour simplifier je considère un système avec un paramètre d’ordre continu f et des transformations de

renormalisation linéaires dans les champs.

7.1.1 Décimation et transformations d’échelle7.1.1.a - Modèle et Hamiltonien microscopique

On part d’un modèle statistique défini sur réseau carré L ' ZD (en dimension D), avec une maille deréseau a (qui fixe l’échelle minimale de distance). D’autres types de réseaux sont évidemment possibles.

Les degrés de liberté sont des variables fi attachées aux sites i du réseau L. Génériquement je considèreque les fi sont des variables continues réelles, avec une mesure «plate» D[f] = ’i dfi. Les contraintes surces variables seront incorporées dans le Hamiltonien microscopique H[f] 1. Dans des cas plus élaborés, les fiauront plusieurs composantes (par exemple un champ vectoriel ~f = {f

a; a = 1, N} décrivant des degrés delibertés supplémentaires) que je n’explicite pas à ce stade.

La physique (à l”équilibre) du système est décrite par un Hamiltonien microscopique (fonctionnelle énergielibre) H[f] local, qu’on peut écrire comme une intégrale sur tout l’espece (en fait une somme sur les sites i duréseau) d’une somme de termes associés aux observables locales O

a

.Ces observables Oa

sont des fonctionsde f et de ses dérivés spatiales rf, r2

f, etc. évaluées au site i (sur le réseau les dérivées r sont bien sûrremplacées par des différences finies). A ce stade cette définition est assez vague, mais on l’écrit simplement

H[f] =Z

dDx Âa

k

a Oa

= aD Âi2L

k

a Oa

[fi,rfi, · · · ] (7.1.1)

Les coefficients k

a sont les paramètres, ou constantes de couplages, du modèle. Les paramètres physiquescomme la température, les champs appliqués, les couplages entre sites, sont contenus dans ces paramètres deH. La fonction de partition Z du modèle sur réseau est

Z = Â e�H[f] =Z

’i2L

dfi e�H[f] (7.1.2)

1. Par exemple la contrainte |fi | = 1 pour Ising est obtenue en ajoutant un terme en A Âi(f2i � 1)2 , et en faisant tendre A ! •.

Programme Doctoral de Suisse Occidentale Théorie statistique des champs et groupe de renormalisations

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7-2 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

On suppose qu’on est suffisament proche d’un point critique pour que la longueur de corrélation x soit grande.

x � a (7.1.3)

Alors il est naturel de s’intéresser au système à des échelles intermédiaires a ⌧ ` ⌧ x. C’est ce que permettentde faire les transformations de groupe de renormalisation.

7.1.1.b - Transformation de renormalisation

1 - Décimation – variables de bloc : On s’intéresse à la dynamique moyenne des spins dans une région. Pourcela on décime le réseau et on le divise en blocs b de taille B, (carrés de BD sites). On défini le champ moyennésur le bloc b par la moyenne efb des spins sur le bloc b

efb =

1BD Â

i2bfi (7.1.4)

B est le facteur d’échelle de la procédure de décimation 2.

2 - Hamiltonien effectif pour les variables de bloc : On moyenne sur les fluctuations des spins à l’intérieur desblocs pour arriver à un Hamiltonien effectif Heff[efb] pour les variables de bloc efb attachées aux site du réseaueL de maille ea = Ba.

e�Heff[efb ] =Z

’i2L

dfi ’b2eL

d

efb �

1BD Â

i2bfi

!e�H[fi ] (7.1.5)

On a bien sûrZ =

Z’b2eL

defb e�Heff[efb ] (7.1.6)

Attention ! Génériquement ce Hamiltonien effectif n’est plus “ultralocal", c’est à dire que même si H necontient que des termes d’interactions entre spins à distance finie |i � i0| dmax, Heff contiendra des termesd’interaction entre blocs à des distances |b � b0| arbitrairement grandes. Cependant, on peut s’assurer que cesinteractions restent locales, c’est à dire décroissent exponentiellement avec la distance entre blocs (voir plusloin).

3 - Changements d’échelles : La troisième étape consiste à comparer ce Hamiltonien effectif (qui décrit la dy-namique à l’échelle ea = Ba des blocs) avec le Hamiltonien de départ (qui décrit la dynamique à l’échelle adu réseau initial), en changeant d’échelles pour obtenir des quantités rénormalisées. Ceci est illustré sur lesfigs. 7.1-7.2.

3.a - Changement d’échelle dans l’espace : Pour ce faire, on rescale d’abord les distances

x ! x0 = x/B (7.1.7)

si bien que le réseau eL de maille ea = Ba redevient le réseau L de maille a

eL ! L0 = L , b 2 eL ! i0 2 L0 = L (7.1.8)

3.b - Changement d’échelle sur les champs f : Simultanément on fait un changement d’échelle adéquat sur leschamps, en redéfinissant les variables sur le nouveau réseau L0 comme

f̃b ! f

0i0 = BD

f̃b (7.1.9)

D est un facteur à ajuster, que l’on appellera la dimension d’échelle de f. La raison pour le rescaling du champ7.1.9 est que l’on souhaite que H0[f0

i0 ] «ressemble le plus possible» au Hamiltonien initial H[fi]. Un exemple

2. stricto sensu il faudrait que B = (10/9)1/D pour que ce soit une décimation

c� François David, 2014 Notes de cours – 27 mars 2014

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7.1. PRINCIPE DES TRANSFORMATIONS DU GROUPE DE RENORMALISATION 7-3

a

!

2a

!

a’=a

FIGURE 7.1 – Les 3 étapes d’une transformation élémentaire du GR : 1) définition de variables de bloc de spinà partir du réseau initial ; 2) calcul du Hamiltonien effectif pour les variables de bloc ; 3) rescaling de x et deschamps pour obtenir un modèle renormalisé.

de détermination de D est d’imposer que les fluctuations de f

0 en un site i0 soient du même ordre que lesfluctuations de f en un site i du réseau initial (autrement dit que les variances soient du même ordre)

hf0i0

2icH0 ' hfi

2icH (7.1.10)

Cette renormalisation du champ est illustrée sur la fig. 7.2. Naturellement le choix pour D depend en généraldu Hamiltonien initial H (c.a.d. que D = D[H]).

Φ

!

~

Φ

!

’Φ

FIGURE 7.2 – Les distributions typiques pour le champ en un site (illustrées ici pour un champ discret, typeIsing). La distribution du champ moyenné sur un bloc f̃b est plus resserrée que celle de fi, on rescale ce champf̃b ! f

0i0 pour réobtenir une distribution du même type (même variance).

Après ce rescaling le Hamiltonien effectif pour les nouvelles variables f

0i0 est appelé le Hamiltonien renorma-

lisé et est noté H0[f0i0 ]. Il est tel que

’b2eL

defb e�Heff[efb ] = ’i02L

df

0i0 e�H0 [f0

i0 ] (7.1.11)

7.1.1.c - Hamiltonien renormalisé et action sur les observables

On a obtenu ainsi le Hamiltonien renormalisé H0[f0] qui décrit la physique du système en terme des variablesde blocs, après qu’on ait intégré sur les degrés de liberté à l’intérieur des blocs de taille B et qu’on ait fait unetransformation d’échelle par le facteur B�1. Si on a été capable de faire exactement cette transformation, onn’a évidemment pas changé la physique du système. On a donc des relations simples entre les observables dusystème initial et celle du modèle décrit par H0.

Fonction de partition : Les fonctions de partition des deux systèmes sont évidemment égales

Z =Z

df e�H[f] =Z

df

0 e�H0 [f0 ] (7.1.12)

mais ce ne sont pas les mêmes systèmes.

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7-4 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

De façon plus précise, si l’on considère un système sur un réseau de taille finie L (disons avec L � a et desconditions aux limites périodiques pour éviter de discuter les effets de bord) on a

ZH(L) = ZH0(L/B) (7.1.13)

!

FIGURE 7.3 – La renormalization change la taille du système

Fonctions de corrélations : Je note maintenant les coordonnées de façon continue x = xi = a i, donc f(x) = fi.On a des relations simple entre les fonctions de corrélations du modèle initial et celle de la théorie renormalisée.Pour la fonction à un point

hf(x)iH = hfiiH = hefbiHeff= B�D hf0(x0)iH0 , x0 = x/B (7.1.14)

Pour la fonction à deux points, au moins tant que |i1 � i2| � B, i 2 b, i2 2 b2, on a aussi

hfi1 fi2iH ' hefb1efb2iHeff

La différence faisant intervenir des corrélations entre rf qui seront négligeables à grandes distance. On a donc

hf(x1)f(x2)iH ' B�2D hf0(x1/B)f0(x2/B)iH0 (7.1.15)

et la même chose pour les fonctions à K points

hf(x1) · · · f(xK)iH ' B�KD hf0(x1/B) · · · f

0(xK/B)iH0 (7.1.16)

7.1.1.d - Itération de la transformation de renormalisation et flots

Enfin pour déterminer les propriétés du système à grande distance (typiquement la longueur de corréla-tion), on itère la procédure. Pour arriver à l’échelle ` en partant de l’échelle microscopique a, il faut faire unetransformation d’échelle par un facteur S = `/a, donc itérer N fois avec N = log S/ log B pour arriver à unHamiltonien renormalisé HS. Si ce Hamiltonien n’est pas trop compliqué, la détermination des propriétés auxgrandes échelles x ⇠ ` du système initial sur réseau de maille a est équivalente à déterminer les propriétés àcourte distance x0 ⇠ a = `/S du système renormalisé, problème à priori plus simple.

On pourrait évidemment faire une seule transformation de renormalisation avec B = S pour passer dea à `, mais c’est un problème difficile, équivalent à calculer directement le potentiel effectif G[f] à partir duHamiltonien microscopique H[f]. Comme on va le voir, décomposer une grosse transformation d’échelle enbeaucoup de petites offre plusieurs avantages.

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7.1. PRINCIPE DES TRANSFORMATIONS DU GROUPE DE RENORMALISATION 7-5

h]

!

FIGURE 7.4 – Renormalisation des fonctions de corrélations

7.1.1.e - Transformations non-linéaires dans les champs :

Ici j’ai considéré une opération de moyennage des f dans un bloc (fi ! f̃b) qui est linéaire. D’autresprocédures de renormalisation, par exemple Migdal-Kadanoff pour le modèle d’Ising, sont non-linéaire. Cecin’obère pas la suite de l’analyse, qui considère les transformations du GR dans l’espace des couplages. Parcontre pour considérer l’effet des transformations du GR sur les fonctions de corrélations il faut regarder pro-prement la renormalisation du champ externe h (voir plus loin).

7.1.2 Les flots du GR dans l’espace des Hamiltoniens effectifs7.1.2.a - Hamiltoniens et champs renormalisés

Les transformations itérées donnent donc un «flot» (en fait ici une application itérée – donc des «map-pings») dans l’espace des Hamiltoniens

H ! H0 ! H00 ! · · · ! H(N�1) ! H(N) = HS (7.1.17)

On passe du Hamiltonien initial H au Hamiltonien renormalisé HS, en fonction du facteur d’échelle

S = BN . (7.1.18)

HS dépend à la fois du facteur d’échelle S et du Hamiltonien initial H.Simultanément on a une série de changements d’échelle des champs

f(x) = B�Df

0(x0) = B�D�D0f

00(x”) = · · · = B�(D+D0+···+D(N�1))f

(N) (7.1.19)

qui conduit à définir un “champ renormalisé" fS relié au champ initial f par un facteur (multiplicatif) derenormalisation Z(S)

fS(xS) = f

(N)(xS) = ZS f(x) ; xS = x/S ; Z(S) = ZS = BD+D0+···+D(N�1)(7.1.20)

Rappelons que chaque D(n) peut dépendre du point (dans l’espace des Hamiltoniens) H(n) où on est arrivé àl’étape n en partant du Hamiltonien initial H. Donc le facteur de renormalisation du champ Z(S) dépend dufacteur d’échelle S et du Hamiltonien initial H.

7.1.2.b - Le groupe de renormalisation

Je note RS la transformation sur les Hamiltoniens correspondant au facteur d’échelle S

H RS�! HS , S facteur d’échelle (7.1.21)

Ces transformations forment un (semi-)groupe

RS2 �RS1 = RS2S1 (7.1.22)

Programme Doctoral de Suisse Occidentale Théorie statistique des champs et groupe de renormalisation

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7-6 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

multiplicatif dans le facteur d’échelle S, donc additif dans son log, qui joue le rôle d’un «temps» discret pourles transformations d’échelle,

s = log(S) = NDs , d’incrément Ds = log(B) (7.1.23)

L’ensemble de ces transformations dans «l’espace des Hamiltoniens du système» forme ce qu’on appelle legroupe de renormalisation.

7.1.2.c - Action du groupe de renormalisation sur les observables

Si ZH(L) désigne la fonction de partition pour le système initial, mais pour un réseau fini de taille L (et demaille a) on a

ZH(SL) = ZHS(L) (7.1.24)

Pour les fonctions de corrélation on a la relation très importante

hf(Sx1) · · · f(SxK)iH ' Z(S)�K hfS(x1) · · · fS(xK)iHS(7.1.25)

où Z(S) est le facteur de renormalisation de f définit par 7.1.20. La même relation s’applique évidemment auxfonctions de corrélations connexes hf · · · ficonn.

H .Il en découle la relation très importante entre les longueurs de corrélation x du système initial et du système

renormalisé. La longueur de corrélation xH pour le Hamiltonien H est définie par le comportement à grandedistance de la fonction à 2 points

hf(x)f(y)iH µ e�|x�y|/xH quand |x � y| ! • (7.1.26)

et on axH = S xHS (7.1.27)

7.1.2.d - Hamiltoniens, opérateurs et flot dans l’espace des couplages

Pour l’instant ces définitions restent totalement formelles. Pour les rendre un peu plus précise, je considèredes Hamiltoniens de la forme

H[f] = aD Âi2L

Âa

k

a Oa

[fi] (7.1.28)

où les Oa

sont des opérateurs locaux (dans le sens d’observables locales) dans les champs, de la forme générale

Oa

[fi] = rn1fi rn2

fi · · · rnkfi (7.1.29)

r désignant l’opérateur de difference finie sur le réseau.

fi = fi+eµ � fi (7.1.30)

Par exempleO

a

[fi] = 1, f

2, f

4, f

6, (rf)2, (rf)4, (Df)2 (7.1.31)

Les k

a sont les constantes de couplages, parfois appelées aussi champs (champs externes) associées aux opéra-teurs. Ce sont les coordonnées (au moins locales) dans l’espace (mal défini) des Hamiltoniens du système. UnHamiltonien H est défini par ses coordonnées (couplages) k

k

k = {k

a}. Le groupe de renormalisation agit doncdans l’espace des couplages comme

k

k

k

RS�! k

k

k(S) = K(kkk, s = log S) (7.1.32)

Ces transformations k

k

k ! k

k

k(S) = K(kkk, s) sont continues dans les couplages k

k

k. Puisqu’elles forment un (semi)-groupe additif s = log S on a K(K(kkk, s1), s2) = K(kkk, s1 + s2).

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7.1. PRINCIPE DES TRANSFORMATIONS DU GROUPE DE RENORMALISATION 7-7

7.1.2.e - Réduction à un nombre fini de couplages

En pratique on doit tronquer l’espace (mal défini) des Hamiltoniens à un sous espace (bien défini) de Ha-miltoniens ne dépendant que d’un nombre fini de paramètres (couplages), dans certains cas une sous familleinfinie des couplages possibles. Les transformations de GR sont approchés (projetées) en fixant un nombre finide conditions de normalisation (autant que de couplages). On va voir des exemples explicites dans la suite.Tout le jeu consiste à trouver de bons choix de troncatures tels que les caractéristiques globales des transforma-tions du GR soient préservée, et qui permettent de calculer avec une bonne précisions ces flots, les exposantscritiques et les rapports d’amplitudes critiques.

7.1.2.f - Des applications itérées aux flots continus, fonctions de Wilson

Quand le nombre d’itérations est grand N � 1 on va considérer le facteur d’échelle S comme un paramètrecontinu et non plus discret. En fait c’est justifié au voisinage des points fixes du GR, où la vitesse du flot estpetite, donc où les «pas» des itérations dans l’espace des couplages dk = k

0 � k sont petits. On peut donc faireun grand nombre d’itérations en restant dans un petit domaine de couplages. On le vérifiera explicitement surdes exemples dans la suite.

Une autre justification est donnée par l’étude des modèles définis avec un régulateur UV dans l’espace desmoments k au lieu de l’espace des positions x (modification du comportement à haute énergie au lieu de dis-crétisation par réseau). Dans ces cas on peut définir assez proprement des transformations de renormalisationdépendant d’un paramètre continu S.

Dans ce cas les itérations du GR prennent la forme d’équations de flot (de courant) engendré par un champde vecteur dans l’espace des couplages. En effet, comme les transformations sont additives en s = log S, sion définit les fonctions de Wilson Wa(kkk) comme les dérivées logarithmiques des constantes renormaliséesk

a par rapport au facteur d’échelle S, les transformation du groupe de renormalisation s’écrivent sous formedifférentielle

S∂

∂Sk

a(S) = Wa

�k(S)

�(7.1.33)

avec les fonctions de Wilson

Wa(kkk) =k

a

0 � k

a

log B=

Ka(k, Ds)� k

Ds= lim

S!1

k

a

S � k

a

log S(7.1.34)

Equations de flot : Autrement dit, les transformations prennent la forme d’équations différentielles du premierordre

∂sk(S) = S

∂Sk(S) = W

�k(S)

�(7.1.35)

qui sont des équations de flot engendré par un champ de vecteur W. Les fonctions de Wilson Wa sont les com-posantes de ce champ de vecteur W dans l’espace des couplages qui engendre les flots du groupe de renorma-lisation.

Dimension du champ : De la même façon, la dérivée du facteur Z(S) de renormalisation des champs présentdans les fonctions de corrélation est donnée par l’équation

S∂

∂Slog⇥Z(S)

⇤= D

�k(S)

�(7.1.36)

où D(k) n’est autre que la puissance D qui intervient à chaque étape de la renormalisation du champ f, cf.Eq. (7.1.9). La fonction D(k) est appelée la dimension d’échelle du champ f, et est notée D

f

(elle dépend descouplages k en général, donc c’est une fonction sur l’espace des couplages).

Covariance des équations de flot : Le fait que les transformations du GR dérivent d’un flot implique que lorsd’une redéfinition des couplages (c’est à dire d’un changement de système de coordonnées dans l’espace des

Programme Doctoral de Suisse Occidentale Théorie statistique des champs et groupe de renormalisation

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7-8 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

Hamiltoniens), k ! k̃ les fonctions de Wilson changent W ! fW comme des vecteurs contravariants (compo-santes d’un champ de vecteur)

k

a ! k̃

a , Wa ! eWa avec eWa(k̃) =∂k̃

a

∂k

b

Wb(k) (7.1.37)

La dimension du champ Df

se transforme comme un scalaire (0-forme)

Df

[k] ! D̃f

[k̃] = Df

[k] (7.1.38)

(s=0)

κ

κ0

1 2 3

κκ(s)

κ κ

FIGURE 7.5 – Les itérations des transformations du GR peuvent être remplacées par un flot continu dans l’es-pace des couplages.

7.1.2.g - Renormalisation du champ f et du champ externe h :

Le traitement du champ f (la variable sur laquelle on intègre) semble différent de celui des couplages k.En fait ce n’est pas le cas, le champ f est l’opérateur associé au champ externe h considéré comme couplagesupplémentaire correspondant à l’ajout au Hamiltonien microscopique du terme

H[f] ! H[f] + dH[f] , dH[f] = � hZ

dDx f(x) = � aD Âi2L

h fi (7.1.39)

Dans une étape élémentaire de la procédure de renormalisation, ce terme se transforme comme

Âi2L

h fi = Âb2L̃

h BDf̃b = Â

i02Lh BD�D

f

0i0 (7.1.40)

donc le couplage h est renormalisé comme

h ! h0 = BD�D h

En itérant pour obtenir un rescaling par un facteur d’échelle S le couplage h se tranforme donc en

h ! h(S) = SD Z(S)�1 h (7.1.41)

et la fonction de Wilson associée au couplage h est simplement

Wh(k) = S∂

∂Sh(S) =

�D � D(k)

�h (7.1.42)

La dimension Df

du champ f, qui nous dit comment le champ f est rescalé par les transformations du GR, estdonc simplement relié au flot de la constante de couplage h (le champ externe) par

Wh = (D � Df

) h (7.1.43)

NB : Cet argument est général et permet de définir la dimension d’échelle D pour le champ f à partir du flotpour h dans le cas de transformations d’échelles non-linéaires dans le champ, en particulier les transformationsdites de bloc de spin ou de décimation à la Migdal-Kadanoff (voir plus bas).

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7.2. EXAMPLES SIMPLES 7-9

D>4

0uG

r0

? 0uG

r0

D<4FIGURE 7.6 – Les flots en u et r pour la théorie de Landau pour D > 4 et D < 4

7.2 Examples simples :

7.2.1 Théorie de Landau : groupe de renormalisation = analyse dimensionnelleConsidérons d’abord un exemple trivial : la théorie de LAndau vue du point de vue de Wilson. Si on part

du modèle défini par le Hamiltonien de Landau

H[f] =Z

dDx

12(rf)2 +

r02

f

2 +u04!

f

4 � h0f

�(7.2.1)

(r0 = t la température réduite) et qu’on reste dans le cadre de la théorie de Landau, c’est à dire qu’on négligeles fluctuations, le programme du GR se réduit à faire de l’analyse dimensionnelle. En effet les deux premièresétapes (décimation + calcul du Hamiltonien effectif) sont triviales (le champ f ne fluctue pas dans un bloc) etdonc

ef(x) = f(x) et Heff[ef] = H[f] (7.2.2)

Ensuite le changement d’échellex = B x0 , e

f = B�Df

0 (7.2.3)

donne le Hamiltonien renormalisé

H0[f] =Z

dDx0

BD�2�2D

2(rf

0)2 +BD�2Dr0

2f

02 +BD�4Du0

4!f

04 � BD�Dh0f

�(7.2.4)

Pour retomber sur un Hamiltonien H de la même forme que celui de départ la dimension du champ D doitêtre

D =D � 2

2, dimension canonique de f (7.2.5)

Ceci implique que le comportement à courte distance de la fonction à deux points est inchangé ( bG(p) ' 1/p2).Les flots du GR dans l’espace des couplages sont

r0 ! rS = S2 r0 ; u0 ! uS = S4�Du0 ; h0 ! hS = S2+D

2 h0 ; (7.2.6)

correspondant aux dimensions canoniques du champ et des couplages.

[f] =D � 2

2; [r] = 2 ; [u] = 4 � D ; [h] =

D + 22

; (7.2.7)

L’interprétation physique des flots est simple. On retrouve évidemment les résultat du champ moyen pour lecomportement de la longueur de corrélation avec r

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7-10 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

r 6= 0 : On est en dehors du point critique, quand rS ! •, la masse diverge, c’est à dire de la longueur decorrélation x qui est finie décroit avec l’échelle `. r est un couplage relevant ou pertinent.

r = 0 : On est au point critique, rS = 0, c.a.d. que la longueur de corrélation est infinie (à toute les échelles).

Le comportement du couplage non-linéaire u avec l’échelle permet de retrouver le résultat de l’analyse deGinzburg- Si D > 4 le couplage non-linéaire u effectif décroit avec l’echelle S. Les termes non linéaires deviennentinimportants (inessentiels ou non pertinents) aux grandes distances, la théorie du champ moyen est une bonneapproximation.- Si D < 4 le couplage non-linéaire u effectif dcroit avec l’echelle S. Les termes non linéaires deviennentimportants (essentiels ou pertinents) aux grandes distances, la théorie du champ moyen n’est plus une bonneapproximation. La descrition aux grandes échelles est donnée par quelque chose d’autre, à déterminer.- si D = 4 le couplage u est dit marginal (marginalement pertinent). Dans la description du champ moyen iljoue le même rôle à toutes les échelles. La théorie de Landau est invariante d’échelle.

Autres opérateurs : C’est la même analyse pour les opérateurs avec n � 2 champs et k � 2 dérivées. Leurdimension est n D�2

2 + k donc le couplage associé a comme dimension (2 � n)D�22 + 2 � k qui est < 0, donc

irrelevant. Les opérateurs avec une seule dérivé sont des dérivées totales, donc n’influent pas sur la physiquedans le volume.

Point fixe Gaussien : L’origine Gr0 = u0 = h0 = 0 (7.2.8)

est un point fixe des transformations d’échelle, le point fixe Gaussien.

H⇤G[f] =

Z 12(rf)2 (7.2.9)

On va voir qu’il reste un point fixe quand on tient compte des fluctuations.

7.2.2 Ising 2D sur réseau triangulaire - transformation de «bloc de spin»

Voici un premier exemple non trivial et physiquement intéressant de calcul de groupe de renormalisation.On considère le modèle d’Ising sur le réseau triangulaire 2D (voir dessin) avec le Hamiltonien microscopique

H[S] = �

J0 Nsites + J1 Â<ij>

S1SJ + J2 Âi

Si

!(7.2.10)

J0 est juste une constante de normalisation, J1est le couplage ferro, J2 est le champ externe. On définit la pro-cédure de décimation avec les blocs de 3 spin de la figure 7.7. Le réseau L̃ des blocs est encore un réseautriangulaire, le facteur d’échelle de la transformation est

B =p

3 (7.2.11)

Le spin effectif d’un bloc b = {i, j, k}, S̃b, est le signe de la somme de trois spins (attention, c’est une transfor-mation non-linéaire)

S̃b = Signe(Si + Sj + Sk) (7.2.12)

Explicitement(+ ++) (+ +�) (+�+) (�++) ! (+)

(��+) (�+�) (+��) (���) ! (�)

Contrairement à la transformation 7.1.4 linéaire dans les f, la transformation 7.2.12 est une transformation nonlinéaires dans les Si.

Enfin on rescale le réseau L̃ ! L0, qui est le même que le réseau initial L (à une rotation d’angle p/6 près),par le rescaling des distances x ! x0 = x/

p3. Les spins S n’ont pas besoin d’être rescalé puisque les spins S̃

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7.2. EXAMPLES SIMPLES 7-11

FIGURE 7.7 – Transformation de «bloc de spin» sur le réseau triangulaire

sont toujours des spin d’Ising (S̃ = ±1). Donc on n’a pas besoin de rescaler S puisque les spins sont toujoursdes spin d’Ising (S̃ = S0). Donc

S̃b ! S0i0 = S̃b (7.2.13)

Pour calculer le Hamiltonien renormalisé H0, on va traiter exactement les couplages dans chaque bloc, etles couplages entre blocs par une approximation de champ moyen. Dans le cadre de cette approximation nousallons voir que H0 reste de la même forme que le Hamiltonien d’Ising initial H.

On sépare les termes de couplage de spins en deux contributions, celle des liens dans un bloc, et celle desliens entre blocs voisins

Â<ij>

SiSj = Âb

Â<ij>2b

SiSj + Â<bb0>

Â<ij>2<bb0>

SiSj

Le Hamiltonien renormalisé H0 s’écrit

e�H0 [Sb ] = ÂSi!Sb

e�H[Si ] = ’b

Zbloc[Sb]D

eJ2 Â<bb0> Â<ij>2<bb0> SiSjE

{Sb}

Zbloc étant la somme des termes à l’intérieur du bloc b

Zbloc[±1] = e3J0⇣

e3J1±3J2 + 3e�J1±J2⌘

C’est le deuxième terme qui est compliqué et qui va donner des termes d’interactions à N > 2 spins et destermes non-locaux dans H0. On fait une approximation de type champ moyen pour estimer ce terme, en leremplacant par

*exp

2

4J2 Â<bb0>

Â<ij>2<bb0>

SiSj

3

5+

{Sb}

�!approx. C M

exp

2

4*

J2 Â<bb0>

Â<ij>2<bb0>

SiSj

+

{Sb}

3

5

Comme les variables de bloc Sb sont fixées dans chaque bloc, cela se sépare en*

J2 Â<bb0>

Â<ij>2<bb0>

SiSj

+

{Sb}

= J2 Â<bb0>

Â<ij>2<bb0>

⌦SiSj

↵{Sb}

= 2J2 Â<bb0>

hSiiSb

⌦Sj↵

Sb0

avec

hSsitei±1 = ± e3J1±3J2 + e�J1±J2

e3J1±3J2 + 3e�J1±J2

et redonne donc une interaction entre blocs plus proches voisins seulement. En remettant tout ensemble, onvérifie que le Hamiltonien renormalisé H0 est toujours un Hamiltonien d’Ising, de la forme 7.2.10, mais avecde nouveaux couplages (couplages renormalisées) J00, J01 et J02. Ces couplages renormalisés sont (pour J2 ⌧ 1)

J01 = 2J1

✓e3J1 + e�J1

e3J1 + 3e�J1

◆2

(7.2.14)

J02 = 3J2

✓e3J1 + e�J1

e3J1 + 3e�J1

◆(7.2.15)

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7-12 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

Considérons les itérations de cette transformation pour le modèle en champ nul (J2 ' B = 0). La transfor-mation J1 ! J01 a trois points fixes, deux points fixes attractifs triviaux J1 = 0 et +• et un point fixe répulsifnon trivial

J⇤1 =14

log(1 + 2p

2) ' 0.3356... (7.2.16)

(à comparer au point critique exact Jexactc = log(3)/4 = 0.2746...) et on vérifie que si J1 < J⇤1 , J01 < J1, tandis que

si J1 > J⇤1 , J01 > J1. Autrement dit si on itère la transformation, le couplage renormalisé tend respectivementvers le points fixe J1 = 0 (modèle d’Ising à température •) ou vers le point fixe J1 = • (modèle d’Ising àtempérature nulle). On va voir dans la suite que le point fixe J⇤1 s’identifie au point critique du modèle d’Ising,et que les deux domaines [0, J⇤1 [ et ]J⇤1 , •] correspondent aux deux phases du modèle (resp. désordonnée=paraet ordonnée=ferro).

point critique

0 J*1

FerroPara

FIGURE 7.8 – Les 3 points fixes de la transformation de renormalisation pour le couplage d’Ising et leur inter-prétation

7.3 Points fixes et variétés critiques

L’analyse du groupe de renormalisation consiste à regarder quelle est la géométrie et la topologie des trans-formations du GR dans l’espace des Hamiltoniens. Dans cette analyse un rôle essentiel est joué par les pointsfixes du GR, c’est à dire les Hamiltoniens qui ne sont pas changés par les transformations, et par l’analyse dece qui se passe au voisinage de ces points fixes.

7.3.1 Idée générale : topologie des flots et phases du système

On suppose donc valides les hypothèses suivantes (déjà discutées) :

1. Les flots k ! k

k

k(S) du GR sont des fonctions régulières des couplages k.

2. On peut les traiter comme des flots continus en s = log(S), engendrés par le champ de vecteur WWW donnépar les fonctions de Wilson

Dk

Ds= W(k) ! dk

ds= W(k) (7.3.1)

Alors la structure globale des flots sera décrite par les points fixes et les bassins d’attraction.De façon générale, on s’attend à ce que

1. Le bassin d’attraction A d’un point fixe stable kA correspond à une phase donnée du système. Pourtoute valeur des couplages microscopiques k 2A, les propriétés macroscopiques (grande distance) dusystème seront les mêmes, et sont décrites par celle du point fixe.

2. La frontière entre deux bassins d’attraction A et B est une variété S de codimension 1 dans l’espacedes couplages. Elle correspond à la transition entre ces deux phase : si on fait varier continuement undes paramètres, pas exemple la température, on se déplace dans l’espace des couplages et quand ontraverse la surface S, les propriétés macroscopiques du système changent de A à B. S est donc la surfacecritique, ensemble des couplages correspondant à un point critique entre les phases A et B.

3. Cette variété critique est stable sous les flots du GR et on s’attend donc à ce qu’elle contienne un pointfixe k⇤ des transformations du GR, avec une seule direction instable. La variété critique est le bassind’attraction de ce point fixe k⇤, qui va donc décrire les propriétés à grande distance du système au pointcritique.

On va donc étudier les propriétés des flots au voisinage d’un tel point fixe et leurs conséquences.

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7.3. POINTS FIXES ET VARIÉTÉS CRITIQUES 7-13

phase A

K*

FIGURE 7.9 – Un point fixe attractif des flots du GR : le bassin d’attraction correspond à une phase du système

ligne instable

point fixe K*

surface critique

phase B

phase A

FIGURE 7.10 – Les flots du GR au voisinage d’un point fixe avec une direction instable : son bassin d’attractionest la surface critique qui sépare deux phases du système.

NB : En théorie les flots du GR peuvent avoir des cycles limites, voire des comportements plus complexes(attracteurs étranges, chaos...). En pratique ça n’est pas le cas dans les systèmes standards, et il y a des raisonsassez profonde pour ça : le «théorème c» (prouvé pour D = 2, conjecture pour D > 2) implique que les flotsdu GR sont des gradients.

7.3.2 Linéarisation au voisinage d’un point fixe : champs et dimensions d’échellesLes propriétés locales des flots du GR au voisinage d’un point fixe suffisent déjà pour déterminer beaucoup

de caractéristiques des points critiques, en particulier les propriétés d’universalités et les lois d’échelles.

7.3.2.a - Linéarisation des flots

Un point fixe est un zéro des fonctions de Wilson, donc au voisinage d’un point fixe k

k

k

⇤ on peut linéariserles flots

Wa(k) = Wa

b

· (kb � k

⇤b) + O(|k � k⇤|2) (7.3.2)

avec la convention d’Einstein de sommation sur les indices répétés. Les Wa

b

sont les dérivées du champ devecteur au point fixe

Wa

b

=∂Wa

∂k

b

����k

k

k

⇤(7.3.3)

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7-14 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

et forment la matrice Jacobienne W 0 = {Wa

b

} du champ de vecteur W au point k?.A ce stade nous allons faire une hypothèse non triviales en général satisfaite pour des systèmes physiques

«simples», et que nous justifierons un peu plus loin. Nous supposons donc que la matrice réelle WWW 0 est dia-gonalisable, donc avec des valeurs propres réelles, et qu’il existe une plus grande valeur propre l0, et que lesvaleurs propres de W 0 sont dénombrables et s’ordonnent comme

l0 > l1 > l2 > · · · > lk > · · · (7.3.4)

Dans ce cas, on peut diagonaliser W 0 = U�1 diag(la)U et se placer dans un système de coordonnées localesk ! g = {ga} (dans l’espace des couplages) dont le point fixe est l’origine et dans lequel la matrice W 0 estdiagonale. Un tel système est donné simplement par

g = U (k � k?) i.e. ga = Ua

b

(kb � k

?b) (7.3.5)

Comme W est un champ de vecteur dont les composantes wa se transforment comme 7.1.37 sous un change-ment de coordonnée, dans les nouvelles coordonnées ga le point fixe et la matrice W 0 deviennent respective-ment

k? ! g⇤ = 0 , W 0 ! diag(la

) (7.3.6)Autrement dit, au voisinage du point fixe, dans ce nouveau système de coordonnées, les fonctions de Wilsonsont simplement

Wa(g) = l

a

ga +O(g2) (7.3.7)

7.3.2.b - Couplages/champs d’échelle et opérateurs d’échelle

Réexprimer le modèle et les transformations du GR en terme des nouveaux couplages equivaut à ré-écrirele Hamiltonien H (défini par 7.1.1) comme une perturbation du Hamiltonien correspondant au point fixe H⇤,perturbation obtenue en ajoutant des nouveaux opérateurs O

a

, avec les couplages ga

H[f] = H⇤[f] +Z

dDx Âa

ga Oa

[f] (7.3.8)

Les couplages ga sont appelés couplages d’échelle ou champs d’échelle (scaling fields). Ils mesurent l’amplitudede la perturbation du Hamiltonien au point fixe par des opérateurs associés O

a

(f), les opérateurs d’échelle(scaling operators). La dénomination «champ d’échelle» (scaling field) vient de ce qu’on peut voir les ga commedes champs externes couplés aux opérateurs O

a

. Ils se transforment simplement sous les transformations derenormalisation puisque ces couplages effectifs sont tels que

Sdga(S)

dS= l

a

ga(S) + O(g2) ) ga(S) = Sl

a

ga + · · · (7.3.9)

En fait la situation est un peu plus complexe, à cause d’opérateurs qui correspondent à une reparamétrisationdes f (opérateurs redondants) mais nous n’en discutons pas à ce stade.

7.3.2.c - Dimensions d’échelle

La valeur propre l

a de Wa

b

associée au couplage ga caractérise comment le couplage évolue avec S et estappelée naturellement la dimension d’échelle (scaling dimension) de ga.

l

a = dim[ga] = Dga dimension d’échelle de ga (7.3.10)

De même la dimension d’échelle de l’opérateur associé Oa

est définie comme

DOa

= dim[Oa

] = D � l

a dimension d’échelle de Oa

(7.3.11)

C’est en accord avec les définitions déjà données pour les dimensions de f (l’opérateur associé au parametred’ordre) et du champ externe (ou terme source) h.

D = Df

= dim[f] ; Dh = dim[h] = D � Df

(7.3.12)

Avec ces définitions, la dimension de x (les distances ou coordonnées dans l’espace réel) est �1. Nous sommesdans en train de parler de dimensions dans l’espace réciproque (en impulsions k ou en masse m qquand onpassera à la théorie des champs).

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7.4. EXPOSANTS CRITIQUES, LOIS D’ÉCHELLES ET UNIVERSALITÉ 7-15

7.3.2.d - Couplages essentiels, inessentiels et marginaux

Le signe de la dimension du couplage g détermine si le flot du GR est attractif ou répulsif au voisinagedu point fixe. Si le flot est répulsif le couplage est dit pertinent ou essentiel (relevant en [fr]anglais), si le flotest attractif le couplage est dit non pertinent ou inessentiel (irrelevant en [fr]anglais), si la dimension est nulle lecouplage est dit marginal. Les mêmes dénominations s’appliquent à l’opérateur associé O.

couplage relevant l > 0 opérateur relevant D < Dcouplage irrelevant l < 0 opérateur irrelevant D > Dcouplage marginal l = 0 opérateur marginal D = D

(7.3.13)

En première approximation seuls les couplages essentiels sont importants pour le comportement aux grandeséchelles S ! •. Comme on va le voir, ce sont leurs dimensions d’échelle (et donc de celle des opérateurscorrespondants) qui va déterminer les exposants critiques associés au point fixe.

7.3.2.e - Retour sur les hypothèses

Revenons maintenant sur l’hypothèse que la matrice W est diagonalisable. C’est d’abord une observation«expérimentale» ; dans un grand nombre de situations physiques les calculs explicites de renormalisation (re-normalisation dans l’espace réel, développement en e) montre que les valeurs propres sont réelles (au moinscelles que l’on peut calculer). Cela peut ensuite s’expliquer par des arguments généraux de théorie des champsbasés sur l’unitarité. Comme ont va le voir plus loin, les classes d’unversalités sont associées à des théoriesquantiques des champs, et les théories les plus simples qui décrivent les points critiques «usuels» comme lemodèle d’Ising, les systèmes magnétiques, etc. , sont des théories unitaires (l’espace des états purs est un es-pace de Hilbert avec un produit scalaire positif, les valeurs moyennes d’observables sont données par desprobabilités, etc.). Les opérateurs d’échelle O

a

(voir plus loin) correspondent aux observables locales (opé-rateurs hermitiens) de la théorie des champs, et l’unitarité implique que leur dimension d’échelle est réelle.Enfin, l’unitarité se traduit pour des modèles de mécanique statistique sur réseau (avec des degrès de libertéclassique et discrets) par le fait que leur matrice de transfert est auto-adjointe (symétrique ou hermitique).

Les situations où les valeurs propres de W sont complexes, ou bien où W 0 n’est pas diagonalisable sontplus rares, mais se rencontrent dans certains systèmes avec désordre. Et il faut signaler aussi qu’il existe dessystèmes avec des points fixes où les dimensions des opérateurs d’échelle sont réelles, bien que la théorieassociée soit non-unitaire ! Enfin l’unitarité assure qu’on n’a pas de situation «exotique» où les itérations duGR présentent des cycles limites, des attracteurs étranges et un comportement chaotique, etc.

7.4 Exposants critiques, lois d’échelles et universalitéAvant d’aborder la discussion détaillée de ce qui se passe au voisinage d’un point fixe, et plus générale-

ment d’une surface critique, faisons un rappel important. Les concepts de couplages d’échelles (relevants ouirrelevants) et d’opérateurs d’échelles sont relatifs au voisinage d’un point fixe dans l’espace des couplages,et ne sont pas absolus. En général les flots du GR possèdent plusieurs points fixes, et les dimensions des cou-plages et des opérateurs (quand on peut les considérer globalement) sont différentes aux différent points. uncouplage peut être relevant au voisinage d’un pont fixe et irrelevant au voisinage d’un autre.

Considérons d’abord le cas le plus simple : le point fixe ne possède qu’une seule direction instable, il n’y adonc un seul couplage relevant g0 tel que l0 > 0. Les autres couplages g

a

sont irrelevants (0 > a1 > a2 > · · · ).La surface critique (bassin d’attraction du point fixe) est donc de codimension 1, et sépare les deux phasesg0 > 0 et g0 < 0.

Ce cas s’applique au modèle d’Ising et au modèle de Landau Ginzburg en champ nul. Le champ moyenindique que c’est un couplage essentiel, mais si on fixe h = 0 on se restreint aux Hamiltoniens H[f] pairs,invariants Z2 (f ! �f). Le couplage essentiel g0 est alors donné par l’écart à la température critique t =T � Tc/Tc, et l’opérateur associé O0(x) sera l’opérateur «énergie» qu’on notera #(x).

7.4.1 Invariance d’échelle au point fixe, exposant h :On se place d’abord au point fixe g⇤ = 0. En utilisant l’eq. 7.1.27 pour les fonctions de corrélations

hf(Sx1) · · · f(SxK)ig = Z(S)�K hf(x1) · · · f(xK)ig(S)

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7-16 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

puisqu’au point fixe g⇤, où g(S) = g⇤ et Z(S) = SD(g⇤) où D(g⇤) = D⇤f

est la dimension d’échelle du champ f

au point fixe, on obtient immédiatement

hf(Sx1) · · · f(SxK)ig⇤ = S�KD⇤ hf(x1) · · · f(xK)ig⇤ (7.4.1)

Au point fixe les fonctions de corrélations sont donc invariantes d’échelle, et la longueur de corrélation estinfinie. En particulier la fonction à deux points est

hf(x)f(y)ig? = hf(x � y)f(0)ig? = |x � y|�2D⇤ hf(u)f(0)ig? , u =x � y|x � y| , |u| = 1 (7.4.2)

hf(u)f(0)ig? est une constante d’ordre O(1) (la fonction à deux points pour un distance de l’ordre du regula-teur). Donc la fonction à deux points décroit bien algébriquement à grande distance.

hf(x)f(y)ig? µ |x � y|�2D⇤

On rappelle que à un pint critique d’un système statistique la fonction à deux points se comporte comme

hf(x)f(y)icrit µ |x � y|2�D�h

L’exposant critique h est donc donné par

h = D + 2 � 2Dh = 2 � D + 2D⇤ , D⇤ = Df

(k⇤) (7.4.3)

7.4.2 Approche du point fixe, longueur de corrélation et exposant n :On considère maintenant le système au voisinage du point fixe. Dans un premier temps on néglige les

couplages inessentiels ga

, a = 1, 2, · · · , et donc seul g0 6= 0 (on est sur la ligne instable). Puisqu’on est endehors de la surface critique, on est dans une phase massive et la longueur de corrélation x est maintenantgrande mais finie. On ne connait pas la valeur exacte x(g0), mais on sait que

x(g0(S) =1S

x(g0) et g0(S) = Sl0 g0 (7.4.4)

On connait donc la dépendance en g0 de x

x(g0) µ |g0|� 1

l0 (7.4.5)

et puisque l0 > 0, la longueur de corrélation x devient bien infinie au point fixe critique g0 = 0.

0 0gFIGURE 7.11 – Flots du GR au point fixe avec un seul couplage essentiel g0

Pour le modèle d’Ising ou le modèle de Landau-Ginsburg le couplage important k est la température et lecouplage (champ) d’échelle g0 est donc est relié à l’écart au point critique

g0 µ T � Tc (7.4.6)

On a le résultat très important que l’exposant critique de la longueur de corrélation n est donné par l’inversede la dimension du couplage le plus relevant au point fixe

n =1

l0=

1dim[g0]

(7.4.7)

Donc les deux exposants h et n sont directement reliés aux dimensions d’échelle du champ f et du couplageessentiel g0 au point fixe.

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7.4. EXPOSANTS CRITIQUES, LOIS D’ÉCHELLES ET UNIVERSALITÉ 7-17

Exercice : (voir TD) Estimer n et h pour Ising 2D à partir des flots obtenus dans 7.2.2 avec les transformationsde bloc de spin sur réseau triangulaire.

Il faut maintenant vérifier que la prise en compte des autres couplages inessentiels ne modifie pas cesrésultats.

7.4.3 Universalité des lois d’échelles sur la surface critique

En général, pour un système donné (par exemple le modèle d’Ising avec couplages entre plus prochesvoisins) au point critique, c’est à dire à la température critique Tc on n’est jamais au point fixe mais seulementquelque part sur la surface critique (variété stable de codimension 1), à une distance finie du point fixe. Si onest sur la surface critique, mais pas exactement au point fixe (cas général), il faut tenir compte des couplagesirrelevants et estimer si ils modifient ou non les comportements d’échelle.

Je considère ici pour simplifier le cas simple où il y a un seul opérateur irrelevant O1 avec le couplage g1(de dimension l1 < 0) et où on est toujours suffisament près du point fixe pour pouvoir linéariser les flots duGR (et donc considérer que la dimension du paramètre d’ordre D

f

= D est constante).

0 1gFIGURE 7.12 – Flots du GR sur la surface critique avec un seul couplage inessentiel g1

Je suppose donc que je suis à un point critique, donc sur la surface critique g0 = 0, mais à une distance finiedu point fixe, donc g1 6= 0. La fonction à deux points se comporte toujours comme

hf(Sx1)f(Sx2)ig1 = S�2D⇤ hf(x1)f(x2)ig1(S)

mais comme g1(S) µ Sl1 est petit quand S ! •, puisque l1 < 0 on peut développer au voisinage du pointfixe

= S�2D⇤ ⇥hf(x1)f(x2)ig1=0 + O(g1(S))⇤

= S�2D⇤ hf(x1)f(x2)ig1=0 + O(S�2D⇤+l1)

donc on trouve finalement que le comportement à grande distance de la fonction à deux points est de la forme

hf(x)f(y)i µ |x � y|�2Dh⇣

A + B |x � y|l1 + · · ·⌘

(7.4.8)

Cet argument se généralise simplement à plusieurs couplages inessentiels, et aux fonctions à N points . On adonc montré deux choses.

1. L’universalité du comportement d’échelle à grande distance des fonctions de corrélations sur la sur-face critique.

2. En général il existe des corrections sous dominantes à ce comportement d’échelle. Ces corrections sontelles-mêmes des puissances de |x � y| universelles, données par les dimensions d’échelles des cou-plages inessentiels, l’amplitude de ces corrections n’est pas universelle mais dépend de la position surla surface critique.

7.4.4 Universalité de l’approche au point critique, limite continue, fonctions d’échelle

Regardons maintenant ce qui se passe quand on s’approche d’un point critique général, c’est à dire qu’ons’approche de la surface critique en restant à une distance finie du point fixe. Pour simplifier on va d’abordconsidérer le cas où il y a le couplage essentiel g0 et un seul couplage inessentiel g1 , et où on peut linéariserles flots.

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7-18 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

g0

g1

00S(g )

ξ finie

S=1

référencepoint de

R

c

FIGURE 7.13 – Flots du GR au voisinage de la surface critique g0 ! 0 mais à distance finie du point fixe(g1 6= 0).

7.4.4.a - Longueur de corrélation

On se place d’un coté donné de la surface critique (par exemple g0 > 0), et on choisit un point de référence Rsur la ligne instable, c’est à dire un couplage gref.

0 6= 0. La longueur de corrélation x0 = x(gref.0 , 0) est finie en ce

point, et varie continument avec les couplages g0 et g1 au voisinage de ce point. On sait déjà que x0 µ���gref.

0

���1/l0

.On est intéressé en fait au comportement de x quand on s’approche d’un point critique c sur la surface

critique qui n’est pas le point fixe 0 (voir la figure), c.a.d.

g0 ! 0 , g1 6= 0 fixé (7.4.9)

Pour cela on va suivre les flots du GR à partir d’un tel couplage microscopique jusqu’au voisinage du point R,et pour cela ajuster le facteur d’échelle S = S(g0) pour que

g0(S) = gref.0 ) S(g0) =

hg0/gref.

0

i� 1l0 (7.4.10)

Ce facteur d’échelle diverge quand on s’approche de la surface critique (S(g0) ! +• quand g0 ! 0) et doncdans cette limite on s’approche de plus en plus du point R

g1(S(g0)) = S(g0)l1 g1 =

hg0/gref.

0

i� l1l0 g1 ! 0 puisque l1 < 0 .

Autremet dit, le GR envoie le voisinage de c dans un voisinage de l’axe instable [0, R].Mais on sait que la longueur de corrélation obéit à la relation d’échelle

x(g0, g1) = S x(g0(S), g1(S))

et qu’elle est analytique dans les couplages au voisinage de R, donc qu’on peut développer x en g1(S). Onobtient donc un développement en

x(g0, g1) = S x

⇣gref.

0 , g1Sl1⌘

=h

g0/gref.0

i� 1l0

"x0 +

hg0/gref.

0

i� l1l0 g1 ∂g1 x(gref.

0 , 0) + · · ·#

(7.4.11)

On voit que quand on traverse la surface critique en un point qui est à une distance finie du point fixe, ladivergence de la longueur de corrélation est la même (universalité de l’exposant n). Mais on obtient maintenantdes corrections non-analytiques et sous dominantes pour la longueur de corrélation, corrections qui sont de laforme générale

x =g0!0

|g0|� 1

l0

a0(g1) + a1(g1)|g0|

� l1l0 + · · ·

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7.4. EXPOSANTS CRITIQUES, LOIS D’ÉCHELLES ET UNIVERSALITÉ 7-19

où les coefficients a0, a1 sont des fonctions régulières du couplage inessentiel g1. Enfin, notons que bien quel’argument dépende du choix d’un point de référence R, le résultat final n’en dépend pas.

Le même argument peut être répété de l’autre coté du point critique g0 < 0. On obtient pour x un déve-loppement de la même forme, mais avec des coefficients a0, a1 différents puisqu’on doit utiliser un point deréférence R0 différent.

Généralisation : Cet argument se généralise au cas de plusieurs couplages inessentiels ga

et au delà de l’ap-proximation des flots linéarisés(voir plus bas), auquel cas des termes analytiques dans la température se ra-joute. De façon générale les corrections au comportement d’échelle de x dans le domaine critique fait intervenirdes puissances de |T � Tc|w̄ avec les exposants w̄ = n0 + Â

a�1 na

w

a

, w

a

= �l

a

/l0, na

2 N.

7.4.4.b - Exposants de corrections aux lois d’échelles

Dans le cas du modèle d’Ising par exemple, ceci implique que la longueur de corrélation diverge au pointcritique comme

x(T) =T!Tc

|T � Tc|�n

⇥A± + B± |T � Tc|w + · · ·

⇤(7.4.12)

L’exposant n est toujours donné par 7.4.7 et est bien universel. Les coefficients A, B etc. sont différents si T > Tc(cas + phase désordonnée) ou si T < Tc (cas � phase ordonnée). Les premières corrections aux lois d’échellesont décrites par un autre exposant w > 0. Cet exposant est aussi obtenu par les v.p. des équations de flotslinéarisées, et est donc un autre exposant critique universel

w = �l1l0

(7.4.13)

NB : Cet argument se généralise au cas de plusieurs couplages inessentiels ga

et au delà de l’approximationdes flots linéarisés, auquel cas des termes analytiques dans la température se rajoute. De façon générale lescorrections au comportement d’échelle de x dans le domaine critique fait intervenir des puissances de |T � Tc|w̄avec les exposants w̄ = n0 + Â

a�1 na

w

a

, w

a

= �l

a

/l0, na

2 N.Donc on a bien vérifié l’universalité des lois d’échelles pour x à l’approche du point critique.

7.4.4.c - Limite continue des fonctions de corrélations et fonctions d’échelles

Ce raisonnement est général et ne s’applique pas qu’à la longueur de corrélation x, mais aussi aux fonctionsde corrélations du système. Il conduit à la notion très importante de fonctions d’échelles, qui est cruciale pourdériver les relations d’échelles entre exposants critiques.

La procédure précédente consiste à s’approcher d’un point c sur la surface critique en faisant g0 ! 0 et àsimultanément rescaler toutes les distances x ! x0 de façon à ce qu’elles soient proportionelles à la longueurde corrélation du système. Pour cela, on choisit un point de référence R sur la ligne instable, de coordonnées(gref.

0 , 0, · · · ). Ce point est caractérisé par une longueur de corrélation finie x(gref.0 , g1 = · · · = 0) = xref. < •.

On rescale maintenant les distances par le facteur

S = x/xref. .

La fonction de corrélation à deux points (par exemple) se comporte comme

hf(x1)f(x2)ig0,g1··· =h

x

xref.

i�2D⇤hf(x1/S)f(x2/S)igref.

0 ,g1(S)

=h

x

xref.

i�2D⇤"hf(x1/S)f(x2/S)igref.

0+ O(g

� l1l0

0 )

#(7.4.14)

et ceci se généralise aux fonctions à K points, ainsi qu’aux fonctions connexes comme

hf(x)f(y)iconn. = hf(x)f(y)i � hf(x)ihf(y)i .

Programme Doctoral de Suisse Occidentale Théorie statistique des champs et groupe de renormalisation

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7-20 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

Autrement dit, quand on s’approche de la surface critique, les fonctions de corrélations à K points prennentune forme universelle donnée par

hf(x1) · · · f(xK)i ' x

�KD⇤GK(x1/x, · · · , xK/x) (7.4.15)

Les fonctions d’échelles universelles GK(z1, · · · , zK) sont données par les fonctions de corrélations de la théorieau point R, donc définie sur la ligne instable (et correspondant à la perturbation du point fixe par le couplageessentiel g0).

GK(z1, · · · , zK) = (xref.)KD⇤ hf(z1 xref.) · · · f(zK xref.)iR (7.4.16)

D⇤ est la dimension d’échelle du champ f au point fixe 0, et xref. = x(R) la longueur de corrélation au point deréférence R sur la ligne instable. Les variables de positions zi et la fonction GK sont sans dimension. Vu 7.4.15les fonctions d’échelle GK ne dépendent en fait pas du choix du point de référence R sur la ligne instable.

Notons que s’ajoute à la définition des fonctions d’échelle des termes réguliers dépendant de la normalisa-tion des champs f et en général (si on est en dehors du domaine de linéarisation des flots du GR) des couplagesinessentiels g1, etc. Donc en général la relation 7.4.15 fera intervenir une constante multiplicative Cc dépendantdu point critique c sur la surface critique au voisinage duquel on étudie la limite d’échelle, mais dépendant defaçon régulière de c, c’est à dire des couplages inessentiels qui paramètrisent la surface critique

hf(x1) · · · f(xK)i ' CKc x

�KD⇤GK(x1/x, · · · , xK/x)

Là encore, les fonctions d’échelles sont différentes si on est d’un coté ou de l’autre de la variété critique, maisauront le même comportement d’échelle à courte distance. Par contre leur comportement à grande distancedépendra de la phase du système.

Contrairement aux fonctions de corrélations du modèle de départ, dont le comportement à courte distancedépend du régulateur à courte distance (réseau), les fonctions d’échelles ont un comportement à courte dis-tance universel donnée par la théorie au point fixe. Commeon va le voir plus loin, ces fonctions d’échelles sontles fonctions de corrélations d’une théorie continue, et peuvent s’identifier aux fonctions de corrélations d’unethéorie quantique des champs Euclidienne. Le GR révèle donc une relation profonde entre les phénomènescritique et les théories quantiques des champs.

Point fixe ) théorie continue invariante d’échelle (masse nulle) décrivant les propriétés universelles (à grandedistance) de l’ensemble des points critiques (surface critique).Ligne instable ) théorie continue massive décrivant les propriétés d’échelles (c.a.d. à l’échelle de la longueurde corrélation x) universelles près du point critique. Cette théorie est obtenue en perturbant la théorie de massenulle. Cette théorie des champs dépend des couplages relevants gi, il y a autant de constantes de couplagesque de directions instables au point fixe.

7.4.5 Au delà de la linéarisation : universalité et domaine critiqueTous les calculs donnés ici ont utilisé le fait qu’on était suffisament près du point fixe pour qu’on puisse

linéariser les équations de flot. En fait ils sont valables même si on traverse la surface critique loin du point fixe.En effet si on est à une distance finie du point fixe, mais suffisamment près de la surface critique, les flots duGR nous amènent près du point fixe avant que le couplage relevant l’emporte et que l’on soit entraîné loin dela variété critique. ceci est représenté Fig. 7.14. L’important pour avoir le comportement d’échelle caractérisépar le point fixe est que le flot du GR nous amène en un «temps» s1 = log(S1) = O(1) fini dans le domaine oùla linéarisation des flots est valable et nous y laisse pendant un temps s2 = log(S2) � 1 suffisament grand parrapport au temps total avant d’en être finalement éjecté. Ceci définit de façon qualitative le domaine critiquedans le formalisme du GR.

Finalement, pour observer un comportement critique pour un modèle statistique donné, décrit par unnombre fini de paramètre, il suffit que, en faisant varier un de ces paramètres, on traverse la surface critiqueen un point (dans le domaine d’attraction du point fixe). Les comportements d’échelle observés si on est suf-fisamment près de ce point critique seront toujours décrits par le même point fixe. Ceci est illustré (très abs-traitement) sur la Figure 7.15 pour le cas du modèle d’Ising. Le modèle microscopique (Ising sur réseau carréavec couplage entre plus proches voisins, et en champ nul) ne dépend que d’un paramètre, la température T.Les transformations du groupe de renormalisation envoient ce modèle dans un espace beaucoup plus grandde théories dépendant d’un grand nombre de couplages. Quelque part dans cet espace va se situer le point

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7.4. EXPOSANTS CRITIQUES, LOIS D’ÉCHELLES ET UNIVERSALITÉ 7-21

linéarisation

Domaine critique

Surface critique

point fixe

Domaine de

FIGURE 7.14 – Le domaine critique (gris clair) est le voisinage de la surface critique d’où sont issus les flots du GR quipassent suffisament près du point fixe (domaine en gris foncé) pour que l’approximation de linéarisation des flots du GRsoit valide pendant un “temps” s = log(S) long et qu’on observe donc les comportements d’échelle.

fixe, et la surface critique. La ligne (de dimension 1) paramètrée par T et correspondant au modèle d’Ising tra-verse la surface critique (de codimension 1) en Tc, la température critique du modèle d’Ising. D’autres modèlesappartenant à la même classe d’universalité (Ising sur un réseau différent, avec des couplages entre secondvoisins, à plusieurs spins, avec des spins continus, etc...) vont être décrits par d’autres courbes dans l’espacedes couplages, qui traverserons la surface critique en des points différents, donc leurs températures critiquesrespectives seront différentes. Néanmoins, leur comportement à grande distance à leur point critique respec-tif sera toujours décrit par le point fixe, et leur comportement au voisinage du point fixe (dans leur domainecritique) sera décrit par la ligne instable. Donc ils sont dans la même classe d’universalité. Leurs exposantscritiques sont les mêmes et les fonctions de corrélations données par les mêmes fonctions d’échelle.

ligne instable

surface critique

point fixe

modèle 2

couplages

Tc T’cT"c

modèle 1

Température

Autres

Modèle d’Ising

FIGURE 7.15 – Illustration de l’argument général pour l’universalité. Quand on fait varier la température pour différentsmodèles (Ising, Modèle 1 et Modèle 2), les températures critiques Tc, T0

c, T00c sont différentes. Au voisinage des points

critiques la physique à grande distance ` � x est universelle, et décrite par le point fixe et sa variété instable.

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7-22 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

7.5 Dérivations des exposants critiques et des relations d’échelles pourles systèmes magnétiques

7.5.1 Système en champ externe h, point bicritiqueNous pouvons maintenant dériver les relations d’échelles qui permettent de calculer les autres exposants

critiques a, b, g et d pour les systèmes magnétiques.Pour cela il faut considérer le modèle d’Ising dans un champ externe h, et faire l’hypothèse que le point

critique correspond toujours au point fixe non trivial en champ nul, mais qu’il y a maintenant deux couplagesrelevants.

1. le couplage t (température réduite ⇠ T � Tc ) couplé à l’opérateur énergie E ' f

2 (opérateur pair pourla symétrie Z2 : f ! �f), c’est le couplage considéré jusqu’à présent ;

2. le champ externe h, couplé à l’opérateur de champ s = f (opérateur impair).Les flots du GR au voisinage du point fixe ont maintenant l’allure représentée sur la Fig. 7.16 (la variété instableest maintenant une surface de dimension 2). Le point fixe est donc maintenant un point bi-critique. On a vu

t

h

FIGURE 7.16 – Les flots du GR pour le modèle d’Ising en fonction des deux couplages essentiels t (température réduite)et h (champ magnétique)

que les dimensions des couplages t et h et des opérateurs associés E et s sont reliées aux exposants h et n par

Dt =1n

, DE = D � Dt = D � 1n

(7.5.1)

Ds

=D � 2 + h

2, Dh = D � D

s

=D + 2 � h

2(7.5.2)

Il suffit d’exprimer les quantités thermodynamiques en terme de fonctions de corrélation des opérateursd’échelles et de faire l’hypothèse que ces corrélations prennent une forme universelle donnée par une fonc-tion d’échelle près du point critique pour obtenir les différents expposants critiques.

7.5.2 Calcul des exposants critiques7.5.2.a - Susceptibilité magnétique c et exposant g

La susceptibilité magnétique c est reliée à la fonction à deux points, qui prend la forme d’une fonctiond’échelle H près du point critique (|t| ⌧ 1, h = 0)

c =Z

dDx hs(x)s(0)ic =Z

dDx x

�2Ds H(x/x) µ x

D�2Ds

comme x diverge comme |t|�n = t�1/Dt (pour h = 0) on obtient c µ |t|2D

s

�DDt donc

g =D � 2D

s

Dt= n(2 � h) (7.5.3)

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7.6. MODÈLE DE LGW : GR & APPROXIMATION DU POTENTIEL LOCAL 7-23

7.5.2.b - Chaleur spécifique Cv et exposant a

Même argument, la partie singulière de la chaleur spécifique est donnée par l’intégrale de la fonction àdeux points pour E , qui à une limite d’échelle donée par une fonction G

Cv =Z

dDx hE(x)E(0)ic =Z

dDx x

�2DE G(x/x) µ x

D�2DE µ |t|2DE�D

Dt (7.5.4)

et donc

a =D � 2DE

Dt= 2 � nD (7.5.5)

7.5.2.c - Aimantation M, exposants b et d

Enfin l’aimantation est donnée par la fonction à un point, qui scale avec la longueur de corrélation comme

M = hsi µ x

�Ds (7.5.6)

Quand h = 0, t ! 0� on a vu que x µ |t|�1/Dt ; donc

b =D

s

Dt=

n

2(D � 2 + h) (7.5.7)

Quand t = 0, h 6= 0 c’est maintenant h qui joue le rôle du couplage essentiel. Les mêmes arguments s’ap-pliquent en remplaçant t par h, et donc la longueur de corrélation diverge quand h ! 0 comme x µ |h|�1/Dh ,si bien que

d =DhD

s

=D + 2 � h

D � 2 + h

(7.5.8)

7.6 Modèle de Landau-Ginzburg-Wilson dans l’approximation du poten-tiel local

Ici je donne un premier exemple de calcul précis de Groupe de Renormalisation avec une théorie continue(le modèle de Landau-Ginzburg-Wilson) et des transformations d’échelle continues. Le principe est du à Wo-ilson et Kogut mais j’en donne une version un peu élaborée. Les idées de base sont

1. partir de la théorie de Landau, donc du Hamiltonien de Landau-Ginzburg+Wilson2. tenir compte des fluctuations thermiques au premier ordre en T3. faire un calcul de groupe de renormalisation dan sl’espace des impulsions

Attention, ce calcul nécessite un peu de connaissance de théorie quantique des champs, en particulier onutilise un régulateur continu dans l’espace des moments, pas un régulateur dans l’espace des positions de typeréseau.

On part d’un modèle avec un paramètre d’ordre continu f(x) (le champ) et un Hamiltonien de Landau-Ginzburg H[f] avec un potentiel local V(f) pour l’instant non précisé.

H[f] =Z

dDx

12(rf)2 + V(f)

�(7.6.1)

La fonction de partition est formellement

Z = Âf

exp� 1

TH[f]

et on définit le potentiel effectif G[j] comme en physique statistique. On introduit le terme source (champexterne) h(x), la fonctionelle connexe (- l’énergie libre) W[h] est le logarithme de la fonction de partition dansle champ h. Le potentiel effectif G[j] est la transformée de Legendre de W[j], fonction du champ de fond(aimantation moyenne) j(x)

W[h] = T log

"

Âf

e�1T (H[f]�hf)

#, G[j] =

Z

xhj � W[h] , j(x) =

d

dh(x)W[h] (7.6.2)

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7-24 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

7.6.1 Régularisation dans l’espace des moments :

Pour définir proprement la somme sur les configurations de champ Âf

, au lieu de considérer le modèlesur un réseau (carré) de maille a, ce qui revient à limiter les fréquences spaciales de f à la zone de Brillouin

bf(k) défini dans la zone de Brillouin k

µ

2 [�p/a, p/a] (7.6.3)

on va utiliser un régulateur “sharp" dans l’espace des moments, en définissant la sommation sur les champs f

comme la somme sur les modes f̂ de moments plus petits qu’une certaine échelle de moment L

bf(k) 6= 0 , |k| < L (7.6.4)

L est un régulateur ultra-violet ⇠ p/a. Autrement dit, dans l’intégration sur les modes de f on remplace lazone de Brillouin de taille 2p/a par la boule de rayon L (voir figure 7.17)

Zone de Brillouin BouleFIGURE 7.17 – Régularisation sur réseau versus régularisation «dure» dans l’espace des moments

Potentiel effectif : On rappelle ici que le potentiel effectif est donné à l’ordre d’une boucle (c’est à dire aupremier ordre en température T) par

G[j] = H[j] +T2

tr log⇥�D + V00(j)

⇤+ O(T2) (7.6.5)

(ceci généralise le résultat pour le champ libre, sera montré plus tard).Si on néglige les gradients de j dans le tr log [�D + V00(j)] (c’est à dire qu’on suppose que le champ de

fond varie lentement par rapport à l’échelle de courte distance |rj| ⌧ 1), on peut approximer le tr log (quiest une quantité non-locale) par une quantité locale

tr log⇥�D + V00(j)

⇤'Z

dDx hx| log⇥�D + V00(j(x))

⇤|xi (7.6.6)

et alors on a (en tenant compte du régulateur)

trL log⇥�Dx + V00(j)

⇤=Z

dDxZ

|k|<L

dDk(2p)D log

h�k2 + V00(j(x))

�/L2

i(7.6.7)

analogue au résultat pour le champ libre sur réseau

tr logh�D + m2

i=Z

dDxZ

|kµ

|< p

a

dDk(2p)D log

" 4a2 Â

µ

sin2(ka/2) + m2

!a2

#(7.6.8)

On note que l’intégrale sur les moments k est bornée par le régulateur L.

c� François David, 2014 Notes de cours – 27 mars 2014

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7.6. MODÈLE DE LGW : GR & APPROXIMATION DU POTENTIEL LOCAL 7-25

7.6.2 Renormalisation par intégration sur les modes «durs» :7.6.2.a - Etape 1 : intégration sur les modes rapides

Principe : On intègre sur une “tranche de moments durs" k tels que

L/B < |k| < L (7.6.9)

On sépare donc f(x) en composantes “fast” et “slow”

f = ffast + fslow (7.6.10)

définies simplement en transformées de Fourier par

bfslow(k) =

(bf(k) si |k| L

B ,0 si |k| > L

B ., b

ffast(k) =

(0 si |k| L

B ,bf(k) si |k| > L

B .(7.6.11)

Si on intègre seulement sur les composantes rapides,o n obtient un Hamiltonien effectif Heff[ef]

e�1T Heff[f̃] =

ZD[ffast] e�

1T Heff[f] (7.6.12)

où le champ moyenné est donné par les modes slow de f

ef = fslow (7.6.13)

ef est donc défini pour les modes k avec le cut off L0

L0 = L/B (7.6.14)

On va maintenant évaluer Heff avec les deux approximations énoncées plus haut.s

Obtention de Heff dans l’approximation du potential local : Pour un champ de fond j variant lentement (c’est àdire tel que j = j< = e

j), l’action effective GL0 [j] obtenue avec Heff doit être la même que celle obtenue avecH

GL[j] = GL0 [j] (7.6.15)

(l’intégration sur les modes durs ne change pas la dynamique des modes mous). On en déduit sans calculssupplémentaires que le Hamiltonien effectif pour ef est de la même forme que H

Heff[ef] =Z

dDx

12(rf)2 + Veff(f)

�+ O(T2) (7.6.16)

avec

Veff[ef] = V[ef] + T2

Z

LB <|k|<L

dDk(2p)D log

h�k2 + V00(ef)

�/L2

i(7.6.17)

Variante : Calcul par intégration directe sur les modes rapides On peut aussi directement intégrer sur les modesrapides ffast tels que L/B < |k| < L en faisant l’approximation du potentiel local et l’approximation gaus-sienne.

Si on suppose que seul V(f) est renormalisé (c’est à dire qu’on néglige les termes en rf, r2f, etc. dans

Heff), on peut calculer le potentiel effectif Veff(f̃) en prenant un f̃ constant f̃(x) = f̃. Autrement dit, on écrit

f(x) = f̃ + ffast(x) (7.6.18)

où ffast(x) est un champ Gaussien réel de variance (en transformée de Fourier)

hf̂fast(p)f̂fast(q)i =((2p)D

d

D(p + q) |p|�2 if l/B < |p| l and l/B < |q| L0 otherwise.

(7.6.19)

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7-26 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

avec bien sûrf̂fast(�p) = f̂

⇤fast(p) (7.6.20)

Dans la procédure de renormalisation de Wilson, Veff(f̃) est obtenu comme

e�1TR

dD x Veff(f̃) =Z

D[ffast] e�1T H[f̃+ffast] (7.6.21)

Si on développe H[f̃ + ffast] en ffast, le terme linéaire s’annule, car f̃ = constante, et f̂fast(p = 0) = 0. Si on negarde que les termes d’ordre 2 (approximation Gaussienne) on a

H[f̃ + ffast] =Z

dDx✓

V(f̃) +12(rffast)

2 +12

V00(f̃) f

2fast + · · ·

◆(7.6.22)

= H[f̃] +Z

L/B<|k|L

dDk(2p)D f̂fast(�p)

⇣k2 + V00(f̃)

⌘f̂fast(p) (7.6.23)

L’intégration sur les modes rapides ffast est réduite à une intégration Gaussienne. On obtient donc un déter-minant fonctionnel

det⇥��D + V00(f̃)

�fast⇤�1/2 (7.6.24)

l’opérateur �D + V00(f̃) étant projeté sur le sous espace des modes rapides L/B < |k| L. Ce déterminant secalcule facilement, il est simplement

log�det

⇥��D + V00(f̃)

�fast⇤�

= tr⇥log���D + V00(f̃)

�fast�⇤

(7.6.25)

=Z

dDxZ

L/B<|k|L

dDk(2p)D log

✓k2 + V00(f̃)

L2

◆(7.6.26)

C’est la même formule que le déterminant de l’opérateur non projeté, simplement la projection sur les modesrapides restreint l’intégration sur les impulsions k aux modes rapides.

Maintenant on suppose que le calcul fait pour f̃ constant est aussi valable si f̃(x) dépend de x (mais aprèstout il varie lentement par rapport aux modes rapides, ce qui justifie, dans une certaine mesure, l’approxima-tion faite...). On obtient alors le Hamiltonian effectif (où seul le potentiel local est renormalisé)

Heff[ef] =Z

dDx

12(rf̃)2 + Veff(f̃)

�(7.6.27)

avec

Veff(ef) = V(ef) +T2

Z

LB <|k|<L

dDk(2p)D log

✓k2 + V00(ef)

L2

◆(7.6.28)

C’est le même résultat que celui obtenu directement à partit de l’action effective.

7.6.2.b - Rescaling.

La deuxième étape du GR (le rescaling) s’obtient simplement en faisant

x = x0B , k = k0/B , ef = B2�D

2f

0 (7.6.29)

si bien que le Hamiltonien renormalisé est

H0[f0] =Z

dDx0

12(rf

0)2 + VB(f0)�

(7.6.30)

où seul le potentiel local V est renormalisé V ! VB

VB(f) = BD V⇣

B�Df

+T2

Z

L<|k0 |<LB

dDk0

(2p)D logh�

B�2k02 + V00(B�Df)�/L2

i+ O(T2)

(7.6.31)

On voit qu’il faut prendre comme exposant de rescaling D pour le champ f sa dimension canonique

D =D � 2

2(7.6.32)

c� François David, 2014 Notes de cours – 27 mars 2014

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7.6. MODÈLE DE LGW : GR & APPROXIMATION DU POTENTIEL LOCAL 7-27

decimation rescaling

FIGURE 7.18 – Renormalisation dans l’espace des moments avec un régulateur dur |k| L

7.6.3 Equation de flots du GR :Le flot prend une forme particulièrement simple dans la limite où on intègre sur une tranche infinitésimale

de moments à chaque itération, c’est à dire si on prend au départ

B = 1 + ds ds ⌧ 1 (7.6.33)

auquel cas on obtient (on absorbe T dans les normalisations de V, et f)

VB(f) = V(f) + ds

D V(f) � D f V0(f) +12

LD SD(2p)D log

h1 + L�2V00(f)

i�

SD est le volume de la sphère unité dans RD, SD = 2 p

D/2/G(D/2).En intégrant cette équation pour des S = B = (1 + ds)N continus, on obtient le potentiel local renormalisé

VS(f) = VB(f). L’équation de flot du GR pour VS prend la forme d’une équation aux dérivées partielles non-linéaire (en terme des dérivées par rapport à la variable f). Si on normalise x, k et f pour que L = 1, cetteéquation de flot s’écrit

S∂

∂SVS(f) = D VS(f) � D � 2

2f V0

S(f) + A log⇥1 + V00

S (f)⇤

(7.6.34)

avecA = (4p)�D/2/G(D/2)

une constante positive. La valeur exacte de cette constante ne va pas jouer de rôle dans la discussion qui suitsur la structure des flots du GR et le calcul des exposants critiques dans cette approximation.

Attention ! La valeur de A est importante quand on compare les calculs de théorie des champs et ceux duGR dans l’espace réel.

7.6.4 Flots et points fixes à D = 4 � e

On peut étudier de façon générale ces équations et la géométrie des flots dans l’espace des potentiels locauxV(f). On remarque aussi que dans cette équation la dimension D de l’espace est juste un paramètre. On peutdonc traiter D comme une paramètre continu, et regarder ce qui se passe quand D varie de D > 4 à D < 4.

On va faire une approximation supplémentaire.

7.6.4.a - Projection sur le potentiel en f

4 :

On s’intéresse à ce qui se passe pour LG à D < 4, lorsque le point fixe Gaussien V(f) = 0 est instable. On vasupposer que ce qui se passe d’intéressant est pour des V(f) pas trop grand, et on va projeter l’équation de flotsur le potentiel de LG, en ne gardant dans V que les termes de degré 4 au plus en puissance de f (procédurede troncation)

V(f) = e +r2

f

2 +u4!

f

4 (7.6.35)

alors

log⇥1 + V00(f)

⇤= log

h1 + r +

u2

f

2i= log [1 + r] +

u2(1 + r)

f

2 � u2

8(1 + r)2 f

4 + · · · (7.6.36)

Programme Doctoral de Suisse Occidentale Théorie statistique des champs et groupe de renormalisation

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7-28 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

Le terme en log [1 + r] est juste une renormalisation additive de l’énergie libre e. On obtient des équations deflots fermées pour les deux couplages u et r, donc les fonctions de Wilson associées

S∂

∂Sr = Wr(r, u) = 2 r + A

u(1 + r)

S∂

∂Su = Wu(r, u) = (4 � D) u � 3A

u2

(1 + r)2

(7.6.37)

7.6.4.b - Le point fixe de Wilson au premier ordre en e

On note la distance à la dimension critique supérieure Duc = 4

e = 4 � D (7.6.38)

Et on va étudier les flots tronqués en supposant que e est petit. Si on développe à l’ordre 2 en r et u (justifié àl’ordre e = 4 � D) les fonctions de Wilson sont

Wr(r, u) = 2 r + A u � A r u , Wu(r, u) = (4 � D) u � 3A u2 (7.6.39)

On a un point fixe nontrivial W (le point fixe de Wilson) en

r⇤ = �16

e , u⇤ =1

3Ae (7.6.40)

qui est dans la région physique u > 0 si D < 4. Ce point fixe est à une distance O(e) de l’origine (le point fixeGaussien) donc l’approximation précédente est bien justifiée).

direction instable

ligne critique

phase para

Gaussien

phase ferro

point fixepoint fixede Wilson

D<4

u

r

G

W

FIGURE 7.19 – Flots du GR en u et r pour D < 4 (G est le point fixe Gaussien, W le point fixe de Wilson).

La matrice des dérivés des flots à ce point fixe est

∂(Wr, Wu)∂(r, u)

=

✓2 � e

3 A�1 + e

6�

0 �e

◆(7.6.41)

Donc r correspond à une direction relevante (1, 0) et u à une direction irrelevante (�A, 2). Les dimensionsd’échelle des couplages d’échelles (champs d’échelle) associés g0 = (r � r⇤) + (u � u⇤)A/2 = r + uA/2 etg1 = (u � u⇤) sont

l0 = 2 � e

3, l1 = �e (7.6.42)

Donc pour D < 4 on a trouvé un nouveau point fixe W. Les flots sur la surface critique sont attirés vers cepoint fixe, et non plus vers le point fixe Gaussien G. C’est donc W qui décrit la classe d’universalité du pointcritique du modèle d’Ising. Ce point fixe est à distance e du point fixe Gaussien (qui correspond au champmoyen).

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7.6. MODÈLE DE LGW : GR & APPROXIMATION DU POTENTIEL LOCAL 7-29

Cas D > 4 : Pour D > 4 on a retrouvé les résultats du champ moyen. C’est le point fixe Gaussien G en u = 0qui gouverne le comportement critique.

ligne critique

phase para

phase ferro

point fixeGaussien u

r

G

D>4FIGURE 7.20 – Flots du GR en u et r pour D > 4.

Cas D = 4 : Pour D = 4 la fonction Wu = � 316p

2 u2 est < 0 si u > 0. Le couplage u est marginalement irrelevant(s’il est positif), c’est à dire que sur la surface critique le flot du GR est attiré vers le point fixe Gaussien u = 0,mais les flots convergent vers G beaucoup moins rapidement que pour D > 4 . On discute ça plus en détailaprès.

ligne critique

phase para

phase ferro

Gaussienpoint fixe

u

r

G

D=4FIGURE 7.21 – Flots du GR en u et r pour D = 4.

7.6.4.c - Exposants critiques

Les relations générales nous permettent de calculer les exposants critiques associés au point fixe de Wilson.On a vu que dans l’approximation du potentiel local la dimension D

f

du champ f est inchangée par rapport àsa dimension canonique. Par contre l0 6= 2 et de plus la dimension l1 va nous donner l’exposant w des pre-mières corrections aux lois d’échelles. On a donc obtenu à l’ordre e les trois exposants critiques indépendants

n =12+

e

12, h = 0 , w =

e

2(7.6.43)

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7-30 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

A ce stade c’est déjà intéressant de faire e = 1 et de comparer aux exposants critique pour les systèmes dans laclasse d’universalités du modèle d’Ising à 3 dimensions

D=3 champ moyen ordre e théorique expériencen 1/2 0.58 0.630(1) 0.625(10)h 0 0 0.035(3)

(7.6.44)

(les exposants sont en fait connus avec une bien plus grande précision). On voit que les corrections au champmoyen donnés par ce calcul simple de groupe de renormalisation vont dans le bon sens.

La méthode peut être généralisée en tronquant le potentiel à l’ordre f

2n, n > 2, ou en étudiant numérique-ment les flots de l’équation 7.6.34 obtenus dans l’approximation du potentiel local. A titre d’exemple je donneles estimations pour n pour n 12 (et e = 1). On voit qu’on converge vers un npot.loc. = 0.68(1) qui est plusgrand que la valeur attendue.

2 4 6 8 10 12

0.55

0.6

0.65

0.7

0.75

0.8

0.85

0.9

7.6.4.d - Développement en e et autres extentions

En fait la théorie quantique des champs permet de construire (à partir de la théorie f

4) un développementperturbatif systématique en e = 4 � D (développement en e de Wilson-Fisher) pour les exposants critiques et lesfonctions d’échelle.

En particulier, cette théorie permet de justifier à l’ordre e les approximations faites ici dans l’approximationdu potentiel local : les termes négligées dans le calcul (gradients de f et termes d’ordre supérieurs en f et rf)n’interviennent que dans les corrections en O(e2).

A l’ordre 2 le développement en e donne

n =12+

e

12+

7 e

2

162; h =

e

2

54(7.6.45)

Ce qui donne pour e = 1 (d = 3)n = 0.62 , h = 0.02 (7.6.46)

La méthode de renormalisation dans l’espace des k et l’approximation du potentiel local peuvent êtresystématisées et généralisées pour beaucoup d’applications (équation de Wilson-Polchinski, potentiel effec-tif moyenné de Wegner-Wetterich). Des résultats rigoureux peuvent être obtenus par ces méthodes.

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7.7. OPÉRATEURS MARGINAUX 7-31

7.7 Opérateurs marginauxNous n’avons pas discuté le cas d’une perturbation par un couplage g marginal, de dimension nulle Dg =

0. Ce cas est important en dimension D = 4 (théories de jauge) mais aussi important pour des systèmesbidimensionnels, à la fois en physique statistique en dimension D = 2, et en physique de la matière condenséeen dimension (effective) D = 1 + 1. Dans ce cas il faut développer les équations de flots au deuxième ordre eng et la situation dépend évidemment du signe de la fonction de Wilson.

7.7.1 Couplage marginalement relevant :On considère d’abord le cas d’une théorie qui ne dépend que d’un seul couplage g marginalement relevant

quand g > 0. A l’ordre dominant au voisinage du point fixe g⇤ = 0 la fonction de Wilson W pour ce couplageest

W(g) = b2 g2 +O(g3) , b2 > 0 (7.7.1)

En intégrant l’équation de flot, on trouve que le couplage renormalisé g(S) croit avec S comme

g(S) ' g1 � g b2 log S

La longueur de corrélation diverge exponentiellement quand on s’approche du point fixe comme

x(g) µ exp✓

1b2 g

◆quand g ! 0+ (7.7.2)

donc plus vite que toute loi de puissance. Autrement dit, la masse de la théorie des champs correspondantes’annule avec g comme

m ' exp✓� 1

b2 g

◆(7.7.3)

Des modèles avec ce type de point fixe sont extrêmement importants.— Les modèles de spins classiques en 2 dimensions comme le modèle de Heisenberg et les modèles sigma

non-linéaires (avec une symétrie continue) ont un point fixe à température nulle T = 0 et la températureest un paramètre marginalement relevant. Ceci indique que à toute température non-nulle la longueurde corrélation x(T) doit être finie, et diverger quand T ! 0.

— Ce comportement se rencontre également dans des systèmes quantiques en 1 dimension (chaînes despins quantiques).

— Enfin c’est la cas des théories de jauge non-abéliennes en 4 dimension (liberté asymptotique).

7.7.2 Couplage marginalement irrelevant : corrections logarithmiques aux lois d’échelleRéciproquement si b2 < 0 pour g > 0 le couplage est marginalement irrelevant. Il induit des corrections

aux lois d’échelles qui ne sont pas en loi de puissance mais logarithmiques.C’est ce qui se passe pour LGW à D = 4. Si on identifie g0 ' r ' t = T � Tc et g1 ' u les fonctions de

Wilson sontS

∂g0∂S

= W0 = l0g0 , l0 > 0 ; S∂g1∂S

= W1 = �c2g21 , c2 > 0 (7.7.4)

t = g0 est donc un couplage relevant mais u = g1 est marginalement irrelevant. On peut répéter l’analyse faitelorsque g1 est irelevant. La longueur de corrélation x(g0, g1) diverge au point critique, c.a.d. quand g0 ! 0,g1 > 0 fixé, mais avec des corrections logarithmiques aux lois d’échelles

x(g0) ' cst. g� 1

l00

1 + cst.

1log(1/g0)

+ · · ·�

(7.7.5)

C’est ce qui se passe pour LG à D = 4. g0 = |T � Tc|, l0 = 2, donc

x(T) µ |T � Tc|�1/2

1 +cste

log(1/|T � Tc|)+ · · ·

�(7.7.6)

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7-32 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

7.7.3 Ligne de points fixes : exemple du modèle XYEnfin si W(g) = 0 est identiquement nul, on a une ligne de points fixes. Chaque point fixe décrit une classe

duniversalité différente, avec des exposants critiques qui varient continuement en fonction du couplage g. Unexemple fameux (et utile) est le modèle XY en 2 dimensions et la transition de Kosterlitz-Thouless. Je ne décritpas les calculs de la renormalisation de ce modèle, mais juste les résultats.

En plus des ondes de spins (les modes de Goldstones qui sont les excitations de basse énergie) ce modèlepossède des excitations topologiques, les vortex. Les deux couplages importants sont k = T la raideur de spin(température effective des ondes de spin) et z la fugacité des vortex.

Si z = 0 (pas de vortex) le modèle est Gaussien et la température T n’est pas renormalisé. Si z > 0 il y a desvortex et une température critique TKT où les vortex sont libérés (transition de Berezinski-Kosterlitz-Thouless).En notant t = T � TKT la température réduite les fonctions de Wilson pour les deux couplages z et t sont

Wz = tz , Wt = z2 (7.7.7)

La première fonction donne la renormalisation de la fugacité des vortex z par la température t. La deuxièmela renormalisation de la température t par les vortex (plus de vortex =) plus de désordre =) températureeffective plus grande).

Transition de KT

KTT

z

ligne de pt fixes stables

Tligne de pt fixes instables

FIGURE 7.22 – Les flots du modèle XY : un exemple de ligne de points fixes

On peut dériver ces équations de flot 7.7.7 à partir de la théorie de Sine-Gordon, qui est la théorie deschamps duale du modèle XY.

Ligne critique t + z = 0. Point fixe de KT t = z = 0. Ligne instable t � z = 0. Pour t < tc = �z (T < Tc), lesflots vont vers la ligne de points fixes stables z = 0, t < 0. C’est la phase de masse nulle. La densité de vortexest nulle. Pour t > tc = �z la ligne de point fixes z = 0 est instable. Les fluctuations thermiques renormalisentla fugacité des vortex z qui devient grande. Les vortex sont libérés et le système est désordonné.

Au voisinage du point critique l’intégration des flots donne le comportement de la longueur de corrélation

x µ exp✓

cst.pt � tc

◆(7.7.8)

On peut dériver ces équations de flot 7.7.7 à partir de la théorie de Sine-Gordon, qui est la théorie deschamps duale du modèle XY.

7.8 Limite continue et relation avec les théories quantiques des champsDans cette section je reviens sur l’obtention des fonctions d’échelles et le formalisme associé. En fait on

montre que les fonctions d’échelle dans le domaine critique sont les fonctions de corrélations d’une théoriedes champs associée au point fixe correspondant. Il y a donc une relation extrêmement profonde et importanteentre la théorie des phénomènes critique et la théorie quantique des champs.

7.8.1 Limite continueEn fait les fonctions d’échelles universelle s’obtiennent à partir des fonctions de corrélation pour un système

statistique donné (par exemple le modèle d’Ising en température T et champ externe H) hs(x1) · · · s(xK)i en

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7.8. LIMITE CONTINUE ET THÉORIES QUANTIQUES DES CHAMPS 7-33

dilatant l’échelle des distances par un facteur d’échelle S (x ! x0 = s/S) et en faisant simultanément tendreles couplages vers le point critique (donc ici T ! Tc, H ! 0) en «remontant» les trajectoire du groupe derenormalisation de façon à ce que les observables scalent comme dans la limite continue. Dans notre cas ondéfinit les «constantes de couplages renormalisées» tR et hR et le «champ renormalisé» fR pour la théoriecontinue comme

tR = tSDt , hR = hSDh , fR = SDf

s (7.8.1)

t µ T � Tc et h µ H sont des couplages «réduits» sans dimension. Les fonctions d’échelles GK pour le champ f

sont obtenues en prenant la limite d’échelle des fonctions de corrélations du champ renormalisé S ! •, tR ethR fixés (donc les couplages t et h tendent vers le point critique tc = hc = 0

GK(x1, · · · , xk; tR, hR) = limS!•

tR ,hR fixed

⇣SD

f

⌘Khs(Sx1) · · · s(SxK)it,h (7.8.2)

Autrement dit, on part d’un système statistique défini avec un régulateur à courte distance fini (pour Ising lamaille de réseau a = 1), on rescale les distances x ! x0 = x/S c’est à dire qu’on fait tendre le régulateur vers 0(limite continue a ! a0 = 1/S ! 0) tout en ajustant les couplages (ici t et h) et la normalisation des observableslocales (ici le champ f = s) pour que la longueur de corrélation et les fonctions de corrélations restent finies.Ceci est illustré sur la Fig. 7.23. La théorie du groupe de renormalisation assure que ceci est possible si on estau voisinage d’un point critique, et il faut ajuster autant de couplages qu’il y a de couplages essentiels au pointfixe correspondant, en suivant les flots du GR issus du point fixe.

FIGURE 7.23 – Limite continue : les fonctions d’échelles sont obtenues en faisant tendre le régulateur à courte distance

vers 0 et en faisant tendre simultanément les couplages vers le point critique c, de façon à ce que les couplages renormalisés

(et donc la longueur de corrélation) restent finis.

Les fonctions d’échelles de la théorie continue ainsi obtenus ne sont rien d’autre que les fonctions de cor-rélations pour le modèle statistique initial restreint à la variété instable (ici de dimension 2) issus du point fixepar les flots du groupe de renormalisation. Les couplages renormalisés tR et hR ne sont rien d’autre qu’un choixde coordonnées sur cette variété instable F (il y a une relation simple entre tR et hR et les couplages effectifst(S) et h(S) qui sont les coordonnées initiales sur la surface instable). cci est illustré sur la Fig. 7.24

7.8.2 Conséquences7.8.2.a - Fonctions d’échelles en champ nul

Les fonctions d’échelles en champ nul h = 0 obtenues dans les deux phases, resepectivement désordonnée(t ! 0+) et ordonnée (t ! 0�), G±

K (x1, · · · , xK) sont donc juste des valeurs particulière des fonctions d’échellesgénérales

G±K (x1, · · · , xK) = GK(x1, · · · , xK; t = ±1, h = 0) (7.8.3)

Elle ne sont donc pas indépendantes, puisqu’elles sont données par les fonctions de corrélations d’une seuleet même théorie.

7.8.2.b - Rapports d’amplitudes critiques

On en déduit que les quantités sans dimensions obtenues en prenant des rapports de fonctions d’échellesdans les deux phases sont aussi des quantités universelles, qui ne dépendent que de la classe d’universalité du

Programme Doctoral de Suisse Occidentale Théorie statistique des champs et groupe de renormalisation

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7-34 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

c

point critique

R

hR

h

t

0

modèle microscopique

surface instablepoint fixe

limite continue

t

FIGURE 7.24 – Limite continue : le comportement au voisinage du point critique c pour un modèle microscopique donné

(surface du haut), est décrit par la variété instable (surface du bas). Il ne dépend que d’un nombre fini de couplages

essentiels renormalisés (ici tR et hR).

poit critique. L’exemple le plus connu est le rapport d’amplitudes pour la longueur de corrélation

A+

A�, x =

T!TcA± |T � Tc|�n , T > Tc ou T < Tc (7.8.4)

7.8.2.c - Fonctions d’échelles pour des points critiques différents dans la même classe d’universalié

Si on contruit les fonctions d’échelles par la procédure de limite continue à partir de deux points critiquesdifférents c et c0 (par exemple en partant d’un modèle d’Ising sur des réseaux carré ou triangulaire) on ob-tient des fonctions d’échelles G(x; gR) et G0(x, gR) à priori différentes (je note gR l’ensemble des couplagesrenormalisés). Les mêmes arguments que ceux pour l’universalité montrent que ces fonctions d’échelles sontéquivalente par une redéfinition finie des couplages renormalisés gR ! g0R (donc à une changement local decoordonnés sur la variété instable F ) et un changement de normalisation des champs f ! f

0 = Zf

GK(x; gR) = ZKG0K(x; g0R) (7.8.5)

Donc la théorie des champs associée à la limite continue et la physique dans le domaine critique sont bienuniverselles.

7.8.3 Relation avec la théorie quantique des champs f

4

7.8.3.a - Principe

La construction des fonctions d’échelles par cette procédure de limite continue d’un système statistique (enD dimensions) est tout à fait analogue à la construction de la mécanique quantique (à temps Euclidien) commelimite continue d’un système statistique 1D de chemins (voir la partie II du cours). En fait on construit ainsi unethéorie quantique des champs (à temps Euclidien) en D-dimension, et les fonctions d’échelles sont les fonctionsde corrélations de cette théorie des champs, c’est à dire les éléments de matrice de produits d’opérateurs locauxpour cette théorie. Voir la partie III du cours pour les détails. Ce qu’il faut retenir c’est que de façon générale :

— A un point fixe du GR est associé une théorie quantique des champs de masse nulle (invariante d’échelle).— La variété instable associée à ce point fixe (déformation par des opérateurs essentiels) décrit des théories

quantiques des champs massive (non invariante d’échelle).

c� François David, 2014 Notes de cours – 27 mars 2014

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7.8. LIMITE CONTINUE ET THÉORIES QUANTIQUES DES CHAMPS 7-35

— Les couplages d’échelles essentiels (champs d’échelle) sont les contantes de couplages de cette théoriequantique des champs massive.

— Les fonctions de corrélations du modèle statistique sur la variété instable sont les fonctions d’échellesassociées à la classe d’universalité du point fixe. Ces fonctions d’échelles sont données par les fonctionsde corrélations (éléments de matrice dans le vide de produits d’opérateurs locaux) de la théorie deschamps correspondante.

7.8.3.b - Exemple : théorie de Landau-Ginzburg-Wilson

QFT

champlibre masse nulle

theories de

Φ4

Ising QFT

D<4

u

r

GW

A titre d’exemple je représente dans la figure les théories quantiques des champs (QFT) correspondant auxlimites d’échelles du modèle de Landau-Ginzburg-Wilson en dimension 1 < D < 4. On considère ici le modèleen champ nul h = 0. r = t est la température réduite (couplage essentiel) et u le couplage en f

4. On a deuxpoints fixes ; G le point fixe Gaussien et W le point fixe de Wilson.

— La théorie d’Ising «vit» sur la ligne d’instabilité du point fixe de Wilson W et ne dépend que d’un seulparamètre (la masse m2 ' r ' t). C’est la limite continue du modèle d’Ising.

— La théorie f

4 «vit» entre le champ libre et Ising, sur le domaine d’instabilité de G, elle dépend de deuxparamètres, la masse m2 et le couplage u ⇠ g. C’est la limite continue du modèle de LGW, qu’on vaétudier dans la partie III par des développements perturbatifs.

— En particulier, la ligne des flots du GR qui part de G pour arriver en W correspond aux théories f

4 demasse nulle.

— La théorie pour u = 0 est le champ scalaire libre, limite continue du modèle Gaussien.— Il faut bien sûr considérer aussi le champ externe h, qui est toujours un couplage essentiel. On va voir

dans la partie III qu’en pratique il suffit de connaître les fonctions de corrélations de la théorie en champnul h = 0 pour pouvoir calculer celles de la théorie en champ externe h 6= 0.

7.8.4 Equations du groupe renormalisation pour la théorie continue

La théorie continue ne dépend que d’un ensemble fini N de constantes de couplage renormalisées, gR ={ga

R; a = 1, N} qui correspondent aux couplages essentiels (champs d’échelles) sur la variété instable F pourle point fixe 0. Les fonctions d’échelle étant les fonctions de corrélation pour la théorie sur F , elles obéissent àla relation de base 7.8.4 pour les fonctions de corrélation

hf(Sx1) · · · f(SxK)iH ' Z(S)�K hfS(x1) · · · fS(xK)iHS

mais maintenant resteinte à un nombre fini de couplage, les couplages renormalisés, sans qu’il soit fait d’ap-proximation. Je note comme dans la discussion générale par Wa(gR) les fonctions de Wilson pour les couplagesrenormalisés gR = {ga

R; a = 1, N} (ce sont les composantes d’un champ de vecteur W sur F qui engendre lesflots du groupe de renormalisation sur F ) et D(gR) la dimension du champ f sur F (c’est une fonction scalairesur F ). On a donc

Wa(gR) = Sd

dSga

R(S) , D(gR) = Sd

dSlog Z(S)

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7-36 CHAPITRE 7. LE GROUPE DE RENORMALISATION DE WILSON

En dérivant la relation générale 7.8.4 par rapport au facteur d’échelle S on obtient l’équation différentielle quidonne le comportement d’une fonction d’échelle

GK(x1, · · · , xK; gR) = hf(x1) · · · f(xN)igR

sous une dilatation.

Equation du Groupe de Renormalisation :

"S

∂S� Â

aWa(gR)

∂gaR

+ K D(gR)

#GK(Sx1, · · · , SxK; gR) = 0 (7.8.6)

Cette équation réexprime simplement le fait qu’un changement d’échelle est réabsorbé dans une redéfinition(renormalisation) des constante de couplage et des champs. Elle se généralise simplement au cas des fonctionsde corrélations avec plusieurs type d’opérateurs (par exemple s ⇠ f et E ⇠ f

2 pour la théorie d’Ising), chacunavec leur dimension D (pour Ising D

s

= D = D � Dh et DE = D � Dt).Cette équation est extrêmement importante en théorie des champs et est reliée à l’équation de Callan-

Symanzik (voir section III) qui décrit comment une théorie des champ dépend de «l’échelle de renormalisa-tion» utilisée pour la construire.

7.8.5 Etude des phénomènes critiques par la théorie des champsLa relation entre phénomènes critiques et théorie quantique des champs mise en évidence par la théorie du

groupe de renormalisation s’est avérée extrêmement fructueuse depuis 30 ans.Pour étudier des phénomènes critiques on peut bien sûr étudier les flots du GR et les points fixe. En pratique

c’est souvent assez lourd et les approximations faites délicates à contrôler.On peut aussi identifier (si c’est possible) la théorie des champs qui correspond à la classe d’universalité

du système, et l’étudier directement par des méthodes de théories des champs, notamment :— La théorie perturbative des champs : ceci conduit par exemple aux développement en D = 4 � e de

Wilson-Fisher pour les systèmes magnétiques, ou à des calculs directes en 3 dimension. Voir la partie IIIpour une inroduction à la théorie perturbative des champs.

— Les solutions exactes de théories des champs. Ceci s’est avéré extrêmement fructueux pour les systèmesbidimensionnels. Les points critiques en 2D (et certains systèmes quantiques 1D) correspondent à desthéories des champs invariantes conformes, qui possèdent des propriétés mathématiques fascinantes :on peut classifier mathématiquement ces théories (du moins une très large classe, calculer le contenuen opérateurs, les dimensions d’échelles, les fonctions de corrélations, etc. De plus les déformations deces théories (théories massives décrivant le domaine critique) sont souvent des théories des champsintégrables (possédant une infinité de quantités conservés) pour lesquelles on peut également calculerexactement un certain nombre de choses.

c� François David, 2014 Notes de cours – 27 mars 2014