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56 ACTUALITÉS Bibliothèque La Sécurité sociale Rapport de la Cour des comptes Un rapport de la Cour des comptes est sans doute pour une administration ce qu’un Conseil de classe est pour un collé- gien : l’occasion de prendre conscience de ses insuffisances et de ses erreurs mais aussi de trouver de nouvelles orientations. De fait, depuis la mise en œuvre de la LOLF, la mission de la Cour semble avoir intégré plus de contrôle d’efficacité que de contrôle de conformité. Pour autant, le propos est dur. Au fil des pages, la Cour dissèque les comptes, les résultats, les écarts aux objectifs, les mécanismes régu- lateurs, l’anticipation des risques, l’effica- cité des nouvelles gouvernances… et sug- gère des pistes d’amélioration. Selon ses thèmes de prédilection, chacun pourra y trouver la réaffirmation de grandes éviden- ces (nécessité d’un retour à l’équilibre des dépenses d’assurance-maladie), la stigma- tisation de procédures irrégulières (reports de charges des hôpitaux publics), le débus- quage de curiosités analytiques (« une ligne de 350 Mde mesures diverses sur laquelle l’administration n’a pas été en mesure de fournir d’explications », la dou- ble comptabilisation d’une partie de l’acti- vité de l’AP-HP concernant un peu plus d’un milliard d’euros), des diagnostics sévères (le faible rendement du plan d’économie sur les traitements antibio- tiques de ville, l’incohérence des frontières entre Agences), des alertes (les risques d’influence sur la formation médicale continue), des soutiens (à une base publi- que de données sur le médicament), mais aussi des euphémismes (« absence de sys- tème sélectif au stade de la réévaluation des médicaments en cours de commer- cialisation » pour « absence de courage politique des décideurs sur les dérembour- sements ») et des néologismes (« dépro- lifération » des médicaments à l’hôpital). Bref, un document ardu, mais riche d’enseignements. B. ÉDOUARD Rapport sur l’application de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2006, septembre 2007. Disponible sur http://www.ccomptes.fr/CC/ documents/RELFSS/07-securite-sociale.pdf 464 pages The Medicinal Uses of Cannabis and Cannabinoids G.W. Guy, B.A. Whittle, P. J. Robson Ce livre important (480 pages) com- porte 14 chapitres illustrés sous-tendus par une très une abondante littérature spécialisée. Il explore tous les domaines relatifs au cannabis depuis l’histoire de ses usages médicaux (chap. 1) jusqu’à son contrôle international (chap.13) et le développement de ses applications médicales (chap. 14). Ce sont les chi- nois, 4 000 ans avant l’ère chrétienne, puis Gallien (qui, l’ayant prescrit pour ses effets gastro-intestinaux avait noté un effet psycho-actif à fortes doses), qui ont témoigné très tôt d’un usage empiri- que de cette plante, bien avant la décou- verte des récepteurs centraux (CB1) et périphériques (CB2) et les premiers usages cliniques au Canada (2001). Avant d’être un médicament, c’est une plante (description pharmacognosique : chap. 2 et analytique : chap. 11) cultivée dans diverses régions du monde (chap. 3) et qui existe sous divers bioty- pes (chap. 4 taxonomie). La réceptologie et la pharmacodynamie tiennent une grande place (chap. 5 pp. 103-138) illus- trant l’abondance des travaux de recher- che depuis la découverte des cannabinoï- des naturels et maintenant synthétiques et les endocannabinoïdes, ainsi que le « système endocannibinoïde ». La sclé- rose en plaques (chap. 6) et les douleurs chroniques (chap. 10) sont à ce jour les grandes pathologies à profiter du poten- tiel thérapeutique du cannabis. Mais cette plante recèle aussi des terpènes et des flavonoïdes, cause d’interactions avec les cannabinoïdes (chap. 7). Les auteurs font le point des expériences animales et des essais cliniques dans plusieurs indications : douleur chroni- que (tétrahydrocannabivarine et béta- myrcène), effets anxiolytiques du lina- lool (monoterpène cyclique), dépression (peu de données encore), dépendance alcoolique, états spasmodiques, schi- zophrénie (cannabidiol), alors que le rôle précipitant du THC dans la psy- chose est plutôt décrié (...), épilepsie, effets antioxydants, effets anti-inflamma- toires. Le chapitre 8 explore le méta- bolisme et la pharmacocinétique des diverses voies : inhalée (tabac), orale, intraveineuse et rectale. Bien que les étu- des cliniques (chap. 9) apparaissent limitées en raison des difficultés politi- ques, éthiques (voir l’impact addictif et la conduite automobile – chap. 12) et méthodologiques liées à cette drogue « pariah », des changements sont néan- moins patents (Canada, UK) (chap. 13) si bien qu’après avoir été mis hors-la-loi, le cannabis est maintenant réévalué médicalement (chap. 14). Ce livre très intéressant qui fait le tour des connaissances indispensables de cette plante et de ses applications médi- cales actuelles ou potentielles, est une référence pour pharmaciens, médecins et pharmacologues intéressés par les molécules dérivées et le traitement des maladies intraitables. Il s’agit d’une pre- mière édition. Notons un glossaire très

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Rapport de la Cour des comptes

Un rapport de la Cour des comptes estsans doute pour une administration cequ’un Conseil de classe est pour un collé-gien : l’occasion de prendre conscience deses insuffisances et de ses erreurs maisaussi de trouver de nouvelles orientations.De fait, depuis la mise en œuvre de laLOLF, la mission de la Cour semble avoirintégré plus de contrôle d’efficacité que decontrôle de conformité. Pour autant, lepropos est dur. Au fil des pages, la Courdissèque les comptes, les résultats, lesécarts aux objectifs, les mécanismes régu-lateurs, l’anticipation des risques, l’effica-cité des nouvelles gouvernances… et sug-gère des pistes d’amélioration. Selon sesthèmes de prédilection, chacun pourra ytrouver la réaffirmation de grandes éviden-ces (nécessité d’un retour à l’équilibre desdépenses d’assurance-maladie), la stigma-tisation de procédures irrégulières (reportsde charges des hôpitaux publics), le débus-quage de curiosités analytiques (« uneligne de 350 M€ de mesures diverses surlaquelle l’administration n’a pas été enmesure de fournir d’explications », la dou-ble comptabilisation d’une partie de l’acti-vité de l’AP-HP concernant un peu plusd’un milliard d’euros), des diagnosticssévères (le faible rendement du pland’économie sur les traitements antibio-tiques de ville, l’incohérence des frontièresentre Agences), des alertes (les risquesd’influence sur la formation médicalecontinue), des soutiens (à une base publi-

que de données sur le médicament), maisaussi des euphémismes (« absence de sys-tème sélectif au stade de la réévaluationdes médicaments en cours de commer-cialisation » pour « absence de couragepolitique des décideurs sur les dérembour-sements ») et des néologismes (« dépro-lifération » des médicaments à l’hôpital).Bref, un document ardu, mais riched’enseignements.

B. ÉDOUARD

Rapport sur l’application de la loi de financementde la Sécurité sociale pour 2006, septembre 2007.

Disponible sur http://www.ccomptes.fr/CC/documents/RELFSS/07-securite-sociale.pdf

464 pages

The Medicinal Uses of Cannabis and Cannabinoids

G.W. Guy, B.A. Whittle, P. J. Robson

Ce livre important (480 pages) com-porte 14 chapitres illustrés sous-tenduspar une très une abondante littératurespécialisée. Il explore tous les domainesrelatifs au cannabis depuis l’histoire deses usages médicaux (chap. 1) jusqu’àson contrôle international (chap.13) et ledéveloppement de ses applicationsmédicales (chap. 14). Ce sont les chi-nois, 4 000 ans avant l’ère chrétienne,puis Gallien (qui, l’ayant prescrit pourses effets gastro-intestinaux avait notéun effet psycho-actif à fortes doses), quiont témoigné très tôt d’un usage empiri-que de cette plante, bien avant la décou-

verte des récepteurs centraux (CB1) etpériphériques (CB2) et les premiersusages cliniques au Canada (2001).Avant d’être un médicament, c’est uneplante (description pharmacognosique :chap. 2 et analytique : chap. 11) cultivéedans diverses régions du monde(chap. 3) et qui existe sous divers bioty-pes (chap. 4 taxonomie). La réceptologieet la pharmacodynamie tiennent unegrande place (chap. 5 pp. 103-138) illus-trant l’abondance des travaux de recher-che depuis la découverte des cannabinoï-des naturels et maintenant synthétiqueset les endocannabinoïdes, ainsi que le« système endocannibinoïde ». La sclé-rose en plaques (chap. 6) et les douleurschroniques (chap. 10) sont à ce jour lesgrandes pathologies à profiter du poten-tiel thérapeutique du cannabis. Maiscette plante recèle aussi des terpènes etdes flavonoïdes, cause d’interactionsavec les cannabinoïdes (chap. 7). Lesauteurs font le point des expériencesanimales et des essais cliniques dansplusieurs indications : douleur chroni-que (tétrahydrocannabivarine et béta-myrcène), effets anxiolytiques du lina-lool (monoterpène cyclique), dépression(peu de données encore), dépendancealcoolique, états spasmodiques, schi-zophrénie (cannabidiol), alors que lerôle précipitant du THC dans la psy-chose est plutôt décrié (...), épilepsie,effets antioxydants, effets anti-inflamma-toires. Le chapitre 8 explore le méta-bolisme et la pharmacocinétique desdiverses voies : inhalée (tabac), orale,intraveineuse et rectale. Bien que les étu-des cliniques (chap. 9) apparaissentlimitées en raison des difficultés politi-ques, éthiques (voir l’impact addictif etla conduite automobile – chap. 12) etméthodologiques liées à cette drogue« pariah », des changements sont néan-moins patents (Canada, UK) (chap. 13)si bien qu’après avoir été mis hors-la-loi,le cannabis est maintenant réévaluémédicalement (chap. 14).Ce livre très intéressant qui fait le tourdes connaissances indispensables decette plante et de ses applications médi-cales actuelles ou potentielles, est uneréférence pour pharmaciens, médecinset pharmacologues intéressés par lesmolécules dérivées et le traitement desmaladies intraitables. Il s’agit d’une pre-mière édition. Notons un glossaire très