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La place des pères en salle de naissance : leurs attentes et leur vécu lors d’un accouchement par voie basse. Quel accompagnement la sage-femme peut-elle leur apporter ? Mémoire de Fin d’Études Travail de Bachelor Morel Anouk N° matricule : 08323339 Zellweger Valentine N° matricule : 07301922 Directrice : Caroline Chautems anthropologue de la naissance Genève, septembre 2014

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La place des pères en salle de naissance : leurs

attentes et leur vécu lors d’un accouchement par

voie basse. Quel accompagnement la sage-femme

peut-elle leur apporter ?

Mémoire de Fin d’Études

Travail de Bachelor

Morel Anouk

N° matricule : 08323339

Zellweger Valentine

N° matricule : 07301922

Directrice : Caroline Chautems – anthropologue de la naissance

Genève, septembre 2014

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Bachelor thesis Sage-femme – HEDS Genève

2

Déclaration sur l’honneur

Genève, le 31 juillet 2014,

« Les prises de position, la rédaction et les conclusions de ce travail

n’engagent que la responsabilité de ses auteur-e-s et en aucun cas celle

de la Haute école de santé Genève, du Jury ou du Directeur ou

Directrice de Travail de Bachelor. Nous attestons avoir réalisé seul(e)s le

présent travail, sans avoir utilisé d’autres sources que celles indiquées

dans la liste des références bibliographiques ».

Morel Anouk

Zellweger Valentine

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3

Remerciements

À Caroline Chautems, notre directrice de mémoire, pour sa disponibilité et son aide

régulière dans notre processus de recherche.

À Barbara Kaiser, pour son aide précieuse.

À Medja, notre expert de terrain, pour son regard et son apport professionnel.

À nos familles, pour leur investissement dans notre formation et dans ce travail. Un

grand merci notamment à nos papas, pour les heures passées à lire et à relier notre

travail.

À nos camarades de classe pour ces quatre années de formation : nous en retenons

des moments uniques et beaucoup d'émotions.

À tous les pères que nous avons rencontrés, pour nous avoir apporté de l’inspiration

et un sujet qui nous tient à cœur.

À la bibliothécaire, Evelyne Schorer, pour sa gentillesse et sa patience après les

heures de fermeture.

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Bachelor thesis Sage-femme – HEDS Genève

4

Résumé

Titre : La place des pères en salle de naissance : leurs attentes et leur vécu lors d’un accouchement

par voie basse. Quel accompagnement la sage-femme peut-elle leur apporter ?

Objectif : Évaluer les attentes, l’expérience et les besoins des pères lors d’un accouchement par voie

basse et apporter des pistes de réflexion pour la pratique sage-femme.

Contexte : En ce début de XXIème siècle, le thème des pères dans la société, et plus

particulièrement dans la périnatalité, suscite une multitude d’interrogations. Les pères sont présents

en salle d’accouchement depuis les années 1970 et leur intégration récente soulève certaines

difficultés.

Méthode : Recherche d’articles dans les bases de données en lien avec la problématique, à partir

d’une méthode de recherche incluant des études qualitatives et quantitatives. Les critères d’exclusion

sont une date de publication d’étude avant l’année 2000 et l’accouchement par césarienne.

Résultats : Les pères ressentent des difficultés à trouver leur place, notamment vis-à-vis de la

douleur de leur partenaire, et ils ne comblent pas les attentes qu’ils avaient projetées sur leur rôle en

salle d’accouchement. Il en découle de hauts niveaux de stress. Les compétences sage-femme

(présence, écoute, soutien, information) et l’analgésie péridurale ont une influence positive sur le vécu

des pères.

Conclusion : Les pères ont besoin d’être reconnus comme des acteurs à part entière dans la

périnatalité et accompagnés par les professionnel-le-s de la santé.

Abstract

Title : Fathers’ experiences and expectations about the birth of their child during vaginal delivery : how

midwives can improve care and support for them ?

Aim : To evaluate fathers’ expectations, experiences and needs during a normal delivery and bring

relfexions about professional care to support them.

Background : From the beginning of the XXIst century, fathers’ involvement in the society, and more

particularly in the perinatal period, has been a topical subject of many interrogations. Fathers are

present in the birth room since the 1970s, and their recent integration raises some dificulties.

Methods : Research on several databases for the subject, with a pre-determined search method.

Inclusion criteria were quantitative and qualitative studies. Exclusion criteria were studies published

before 2000 and caesarean section.

Findings : Fathers encounter some difficulties to find their place and to fulfill their expectations about

the role they wish to provide for their partner during birth. Epidural analgesia and midwifery care such

as presence, listening skills, support and information providing are important to improve a positive

experience for fathers.

Conclusions : Fathers need to be considered as actual partners in maternity care by health

professionals.

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5

Glossaire

Abréviation Terme

AVB Accouchement par Voie Basse

APD Analgésie Péridurale

DPP Dépression du Post-Partum

FSSF Fédération Suisse des Sages-Femmes

HUG Hôpitaux Universitaires de Genève

IES Impact of Event Scale

OMS Organisation Mondiale de la Santé

PANP Préparation À la Naissance et à la Parentalité

P-P Post-partum

RdL Revue de la Littérature

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6

Table des matières

A. QUESTIONNEMENT PROFESSIONNEL ............................................................................................. 10

A. INTRODUCTION ......................................................................................................................................... 10

B. MOTIVATIONS PROFESSIONNELLES ........................................................................................................... 14

C. QUESTIONNEMENT .................................................................................................................................... 15

B. CADRE DE RÉFÉRENCE ........................................................................................................................ 16

A. L’IDENTITÉ MASCULINE ............................................................................................................................ 16

I Définition par le sexe .......................................................................................................................... 16

II Définition par le genre ........................................................................................................................ 17

III Une masculinité, des masculinités ....................................................................................................... 18

B. ÉVOLUTION DE LA PATERNITÉ À TRAVERS L’HISTOIRE ............................................................................. 19

I Introduction ......................................................................................................................................... 19

II La Rome antique (~IVe siècle) ............................................................................................................ 19

III Le Moyen-Âge (VIe siècle au XVe siècle) ............................................................................................ 19

IV Le courant de la Renaissance (XVIe siècle) ........................................................................................ 20

V « L’âge d’or des pères » (XVIe siècle au XVIIIe siècle) ................................................................... 21

VI La Révolution (1789) .......................................................................................................................... 21

VII Le père bourgeois (XIXe siècle) ........................................................................................................ 22

VIII Le contexte historique de la paternité contemporaine (1945 -nos jours) ........................................... 23

1. La modification du mariage, des types de famille et du droit de filiation......................................................... 24

2. L’autorité parentale conjointe, l’intérêt de l’enfant et la redistribution des rôles ............................................. 25

3. Les mouvements féministes ............................................................................................................................. 26

4. L’évolution des sciences biomédicales ............................................................................................................ 27

5. Le contrôle des naissances ............................................................................................................................... 27

IX L’évolution globale de la paternité .................................................................................................... 27

C. LA PATERNITÉ .......................................................................................................................................... 30

I Introduction ......................................................................................................................................... 30

II Le père biologique ............................................................................................................................... 30

III Le rôle du père dans le développement de l’enfant : approche psycho-développementale ................. 30

1. Rôle des pères dans le développement de la petite enfance .............................................................................. 31

2. Rôle des pères dans l’éducation de l’enfant ..................................................................................................... 31

3. Rôle des pères dans l’autorité et le respect de la liberté auprès de l’enfant ...................................................... 31

4. Rôle des pères dans la sécurité émotionnelle de l’enfant ................................................................................. 32

5. Rôle des pères dans la construction de l’identité et la socialisation de l’enfant ............................................... 32

6. Rôle des pères dans la construction de l’identité sexuelle de l’enfant .............................................................. 32

IV Le « primipère » et le « multipère » .................................................................................................... 33

V Cadre juridique suisse autour de la paternité ...................................................................................... 34

1. La notion de filiation ........................................................................................................................................ 34

2. La filiation paternelle ....................................................................................................................................... 34

3. La filiation maternelle ...................................................................................................................................... 35

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7

D. LE PROCESSUS DE PATERNITÉ ................................................................................................................... 35

I Introduction ......................................................................................................................................... 35

II La grossesse......................................................................................................................................... 36

1. La confirmation de la grossesse ....................................................................................................................... 36

2. La dimension imaginaire de la grossesse ......................................................................................................... 36

3. La dimension psychique de la grossesse .......................................................................................................... 37

3.1 Le syndrome de « couvade » .................................................................................................................. 38

3.2 La « transparence psychique » ................................................................................................................ 38

4. La relation émotionnelle des futurs pères avec leur fœtus ................................................................................ 39

5. Les préoccupations des futurs pères ................................................................................................................. 39

III La naissance ........................................................................................................................................ 40

IV L’attachement et la relation des pères avec leur nouveau-né ............................................................. 41

V L’instinct paternel existe-t-il ?............................................................................................................. 42

E. CONTEXTE ACTUEL DES PÈRES EN PÉRINATALITÉ ..................................................................................... 43

I Le père dans la grossesse .................................................................................................................... 44

II Le père à l’accouchement .................................................................................................................... 44

III Le père dans le post-partum ................................................................................................................ 45

F. CONCLUSION ............................................................................................................................................ 45

C. L’ACCOMPAGNEMENT DES PÈRES PAR LES SAGES-FEMMES : UN QUESTIONNEMENT

ÉTHIQUE ................................................................................................................................................... 47

D. MÉTHODOLOGIE ................................................................................................................................... 49

A. DÉFINITIONS UTILES À LA COMPRÉHENSION ............................................................................................. 49

I L’accouchement normal ...................................................................................................................... 49

II L’accouchement instrumenté ............................................................................................................... 49

III L’accouchement par voie basse ........................................................................................................... 49

IV Analgésie péridurale : ......................................................................................................................... 49

B. MOTS-CLÉS EN LIEN AVEC NOTRE QUESTION DE RECHERCHE ................................................................... 49

C. RECHERCHE DES ARTICLES ....................................................................................................................... 50

I Bases de données ................................................................................................................................. 50

II Screening des bibliographies ............................................................................................................... 52

D. CRITÈRES DE SÉLECTION DES ARTICLES .................................................................................................... 52

E. DIMENSION ÉTHIQUE DE NOTRE DÉMARCHE DE RECHERCHE ..................................................................... 55

F. ARTICLES CHOISIS POUR LA REVUE DE LA LITTÉRATURE .......................................................................... 56

G. LIMITES DE NOTRE RECHERCHE ................................................................................................................ 56

H. MISE À JOUR DE NOTRE REVUE DE LA LITTÉRATURE ................................................................................. 57

E. ANALYSE CRITIQUE DE LA REVUE DE LA LITTÉRATURE ....................................................... 58

A. TABLEAUX DESCRIPTIFS DES ÉTUDES SÉLECTIONNÉES .............................................................................. 58

B. PRÉSENTATION DES RÉSULTATS ................................................................................................................ 67

I La présence des pères en salle d’accouchement.................................................................................. 67

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8

1. Le sens qu’ils accordent à leur présence .......................................................................................................... 67

2. La pression sociale perçue par les pères pour assister à la naissance ............................................................... 67

3. L’impact de la présence des pères sur l’expérience des mères ......................................................................... 68

II La perception des pères de leur rôle en salle d’accouchement : attentes et réalités ........................... 68

1. Les représentations du futur rôle des pères en salle d’accouchement ............................................................... 68

2. Les rôles adoptés par les pères en salle d’accouchement ................................................................................. 69

2.1 Le soutien des pères envers leur partenaire durant le travail et l’accouchement ..................................... 69

2.2 Le rôle « protecteur » des pères envers leur partenaire ........................................................................... 71

2.3 Les ressources pouvant aider les pères à définir leur rôle pendant l’accouchement ............................... 71

i La communication avec la partenaire ..................................................................................................... 71

ii Prendre modèle sur les sages-femmes .................................................................................................... 71

iii La préparation à la naissance .................................................................................................................. 71

iv Les gestes symboliques : couper le cordon ............................................................................................. 72

III Le vécu du travail et de l’expulsion ..................................................................................................... 72

1. Le vécu émotionnel des pères .......................................................................................................................... 72

1.1 Le stress des pères autour de l’accouchement et ses facteurs associés ................................................... 73

i Le stress autour de la naissance .............................................................................................................. 73

ii La présence des pères au moment de la naissance : un facteur causal .................................................... 74

iii La satisfaction de l’expérience globale : un facteur causal ..................................................................... 75

iv L’analgésie péridurale : un facteur causal .............................................................................................. 75

v Le caractère inconnu de la naissance : un facteur causal ........................................................................ 75

vi L’âge, le statut marital, le nombre d’enfant et le fait d’avoir été présent à une naissance auparavant : des

facteurs non significatifs ......................................................................................................................... 75

2. La douleur ........................................................................................................................................................ 75

3. L’analgésie péridurale ...................................................................................................................................... 76

IV Représentations des pères vis-à-vis des sages-femmes ........................................................................ 77

1. Introduction ...................................................................................................................................................... 77

2. Soutien des sages-femmes ................................................................................................................................ 77

3. Présence des sages-femmes .............................................................................................................................. 78

4. Informations dispensées aux pères ................................................................................................................... 78

5. Intégration des pères par les sages-femmes ...................................................................................................... 79

6. Gestion de la situation par les sages-femmes ................................................................................................... 79

V Synthèse des résultats en fonction de la satisfaction des pères ........................................................... 80

C. BIAIS ET LIMITES DE LA REVUE DE LA LITTÉRATURE ................................................................................. 80

I Biais et limites relatifs à l’échantillon ................................................................................................. 80

1. Région .............................................................................................................................................................. 81

2. Population ........................................................................................................................................................ 82

II Biais et limites relatifs à la méthode .................................................................................................... 82

III Biais et limites relatifs à la date de publication ................................................................................. 83

IV Biais et limites relatifs aux résultats .................................................................................................... 83

V Biais et limites relatifs à nos critères d’inclusion et d’exclusion......................................................... 85

1. Mode d’accouchement par voie basse .............................................................................................................. 85

2. Attentes ............................................................................................................................................................ 86

3. Vécu ................................................................................................................................................................. 86

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9

4. Pratique sage-femme ........................................................................................................................................ 86

VI Validation éthique ............................................................................................................................... 86

F. DISCUSSION ............................................................................................................................................. 88

A. QUELLES SONT LES ATTENTES ET REPRÉSENTATIONS DES PÈRES À PROPOS DE L’ACCOUCHEMENT ? ........ 88

B. QUEL EST LE VÉCU DES PÈRES EN SALLE D’ACCOUCHEMENT ? ................................................................. 88

I Rôles adoptés ....................................................................................................................................... 88

II Les pères sont-ils satisfaits de leur expérience par rapport à leurs attentes ? .................................... 90

III La pression sociale d’assister à l’accouchement ................................................................................. 91

IV L’expérience émotionnelle des pères ................................................................................................... 92

C. QUELLES PEUVENT ÊTRE LES CONSÉQUENCES DE L’EXPÉRIENCE DE LA NAISSANCE POUR LES PÈRES DANS

LE POST-PARTUM ?.................................................................................................................................... 93

D. COMMENT LES SAGES-FEMMES PEUVENT-ELLES APPORTER UN ACCOMPAGNEMENT ADAPTÉ AUX PÈRES EN

SALLE D’ACCOUCHEMENT ? ...................................................................................................................... 94

E. QUEL EST L’IMPACT DE L’ANALGÉSIE PÉRIDURALE SUR LE VÉCU DES PÈRES EN SALLE D’ACCOUCHEMENT ?

................................................................................................................................................................. 97

F. Y A-T-IL UNE DIFFÉRENCE DANS LE VÉCU DE L’ACCOUCHEMENT ENTRE LES PRIMIPÈRES ET LES

MULTIPÈRES ? ......................................................................................................................................... 100

G. QUELLE EST L’INFLUENCE DES COURS DE PRÉPARATION À LA NAISSANCE ET À LA PARENTALITÉ SUR

L’EXPÉRIENCE DES PÈRES ? ..................................................................................................................... 101

G. PERSPECTIVES PROFESSIONNELLES............................................................................................ 104

A. INTRODUCTION ....................................................................................................................................... 104

B. EN PRÉNATAL ......................................................................................................................................... 104

I Concepts de Préparation à la Naissance et à la Parentalité pour les futurs pères ........................... 106

C. EN SALLE D’ACCOUCHEMENT ................................................................................................................. 108

D. EN POST-PARTUM ................................................................................................................................... 110

E. CONCLUSION : ENJEUX POUR LA PROFESSION SAGE-FEMME .................................................................... 112

H. FORCES ET FAIBLESSES DU TRAVAIL .......................................................................................... 113

I. CONCLUSION GÉNÉRALE ................................................................................................................. 114

J. BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................................... 117

K. ANNEXES ................................................................................................................................................. 126

A. ANNEXE 1 ............................................................................................................................................... 126

B. ANNEXE 2 ............................................................................................................................................... 127

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Bachelor thesis Sage-femme – HEDS Genève

10

A. Questionnement professionnel

a. Introduction

Poser la question du père aujourd’hui, c’est prendre conscience que son rôle est encore très flou dans

les esprits même si, sur bien des plans, en ce début du XXI siècle, il est clair que les pères construisent

leur place au jour le jour, auprès de leur compagne et de leur enfant. (Garau, 2005, p.119)

Le rôle des pères dans la société actuelle est en constante évolution, et il semblerait en effet

qu’ils soient de plus en plus présents auprès de leur(s) enfant(s) et de leur partenaire dans le

contexte de la périnatalité et de la parentalité1. Ils sont néanmoins encore peu reconnus

dans leur rôle paternel par leur entourage, leurs employeurs/ses et même par les

professionnel-le-s de la santé (Casse & Polomeno, 2010). Selon l’Organisation Mondiale de

la Santé [OMS] (2007), le réseau de soins en périnatalité serait encore trop centré sur les

mères et leur(s) enfant(s).

Ces pères semblent pourtant avoir besoin d’une attention particulière de la part du personnel

soignant et de leur entourage. L’une des raisons de ce besoin provient du fait que la

transition à la paternité est une étape de crise identitaire et implique de profonds

changements dans la vie d’un homme : « Une paternité, qu’elle soit première ou multiple,

exige une capacité d’adaptation importante » (Ebtinger, 1978, cité par Nanzer, 2009, p.103).

Ce processus de transition à la paternité créerait une grande vulnérabilité émotionnelle chez

les pères, allant parfois jusqu’à des troubles psychologiques (Nanzer, 2009). En effet, la

dépression du post-partum [DPP] est la complication la plus fréquente en postnatal

(Lombardo, 2013), et 10% des pères en souffriraient. Il s’agit là d’une part non négligeable

des pères et il se pourrait que ce trouble ait des répercussions sur la vie de couple, sur la

santé de l’enfant et sur l’attachement père-enfant (Nanzer, 2009). Il semble alors qu’il soit

important d’accentuer les mesures sanitaires et sociales afin d’entourer et de soutenir les

pères dans leur processus de transition à la paternité.

Deux exemples de mesures sociales suisses viennent illustrer cette divergence entre les

attentes normatives de la société quant à la paternité actuelle et la reconnaissance sociale

des pères : le congé paternité et la révision de la loi sur l’autorité parentale.

1 En abordant le père dans la société actuelle, nous avons conscience de l’aspect normatif et hétérocentrique que

cela peut représenter et nous ne perdons pas de vue d’autres compositions familiales (couples homoparentaux, recompositions familiales, mères célibataires, adoptions, etc.).

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Bachelor thesis Sage-femme – HEDS Genève

11

Alors que la majorité des pays européens ont commencé à introduire le congé paternité

depuis les années 90 (Bauer & Penet, 2005, voir infra Annexe 1), en Suisse, le congé

paternité ne fait toujours pas partie de la loi fédérale. En effet, la majorité du temps, les pères

bénéficient d’un ou de deux jours de congé spécial1. Certaines entreprises n’octroient

cependant pas ces congés spéciaux et les pères doivent alors prendre un ou plusieurs jours

de congés usuels sur le temps de vacances (code des obligations art. 329, al.3). Il existe tout

de même en Suisse quelques entreprises et institutions publiques qui offrent un congé

paternité plus long (Commission fédérale de coordination pour les questions familiales,

2010). Pourtant, selon Månsdotter, Lindholm & Winkvist (2007), le congé paternité réduirait

les risques de mortalité de 16% chez les hommes. De plus, les hommes prenant un congé

paternité de deux semaines et plus s’occuperaient davantage de leur enfant à neuf mois

post-partum [P-P] (Nepomnyaschy & Waldfogel, 2007). Des bénéfices certains semblent

alors découler d’un congé postnatal chez les hommes.

Avec la révision de la loi sur l’autorité parentale, la Suisse apporte des éléments en faveur

de l’implication des pères dans la vie familiale : mise en vigueur le 1er juillet 2014, cette

révision permet de faire de l’autorité parentale conjointe la règle, indépendamment de l’état

civil des parents. Brièvement, cela signifie que les parents doivent assumer ensemble la

responsabilité de leur(s) enfant(s) – avec tous les droits et les devoirs que cela implique – et

cette loi s’applique maintenant également aux couples divorcés et aux couples non mariés.

Selon l’Office fédéral de la justice, cette loi est tout d’abord un bénéfice pour les enfants, qui

nécessitent des liens étroits avec leurs deux parents afin de favoriser un développement

harmonieux. (Département fédéral de justice et police, 2014 ; Office fédéral de la justice,

2014). Mais cette révision est aussi l’occasion de favoriser l’implication des pères auprès de

leur(s) enfant(s) (notamment pour les couples non mariés) et de les protéger dans leur

relation avec leur(s) enfant(s) en cas de divorce (Humanrights, 2014).

Il semble en tout les cas que l’intérêt porté à la paternité, au rôle des pères et à leur place en

périnatalité soit croissant dans notre société. A Genève, ce sujet a éveillé l’attention des

Hôpitaux Universitaires de Genève [HUG], qui ont organisé une « Journée de périnatalité »

en novembre 2013 sur « L’homme en périnatalité : quel accompagnement par les

professionnels ? ». Les questions qui ont été débattues lors de cette conférence illustrent

bien la problématique actuelle de la paternité : « Actuellement, la présence de l’homme est

1 Congé spécial : possibilité existant pour les salariés qui doivent régler des affaires personnelles pendant leur

temps de travail (visites chez le médecin, décès d’un proche, mariage, déménagement et naissance d’un enfant) (Commission fédérale de coordination pour les questions familiales, 2010).

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Bachelor thesis Sage-femme – HEDS Genève

12

attendue dans toute la période périnatale mais quel est réellement son rôle ? Qu’en est-il des

bouleversements dans le devenir du père ? Du lien à l’enfant ? Comment pour les

professionnels, au-delà de leurs représentations, accompagner et permettre à l’homme

d’éprouver la place qu’il souhaite prendre aux différentes étapes de cette transformation

complexe ? » (HUG, 2013).

Cela nous amène au cœur de notre problématique ; comment permettre aux hommes de

trouver une place et un/des rôle(s) qui leur conviennent lors de l’étape importante qu’est la

naissance de leur(s) enfant(s) ? Nous verrons tout au long de ce travail que de

nombreux/ses auteur-e-s se sont penchés sur cette question. Pourtant, l’intérêt pour ce sujet

est relativement récent, étant donné que « pendant des siècles l’accouchement a été une

affaire de femmes entre elles, comme s’il existait une résistance ou un interdit masculin de

voir le sexe féminin qui accouche. » (Bydlowski, 2010, p.112). Selon Jacques (2007), les

pères ont été amenés à accompagner leur partenaire dans la salle d’accouchement dès les

années 70 et cette présence masculine est rapidement devenue une norme, voire une

injonction. Aujourd’hui, 70 à 80% des pères sont auprès de leur partenaire le jour de

l’accouchement (Richard-Guerroudj, 2006).

Il semble que cet apport soit très positif, autant pour les femmes, qui en seraient très

satisfaites (Casse & Polomeno, 2010), que pour la santé des pères, de leur(s) enfant(s) et de

leur partenaire (OMS, 2007). McClanahen (1999) indique que les pères seraient également

très réceptifs à créer un lien d’attachement avec leur enfant au moment de la naissance (cité

par Kaplan, 2004).

Cependant, les pères ne seraient pas toujours satisfaits de cette expérience : ils auraient de

la peine à trouver leur rôle, se sentiraient impuissants et souhaiteraient être plus actifs en

salle d’accouchement (Casse & Polomeno, 2010). Chapman (1992) a montré que les pères

pourraient se sentir forcés d’adopter certains rôles en salle d’accouchement dans lesquels ils

ne se sentent pas à l’aise (cité par Longworth & Kingdon, 2010). De plus, ils se sentiraient

inutiles, anxieux et auraient besoin de plus de soutien de la part des soignants (Genesoni &

Tallandini, 2009 cité par Johansson, Ruberston, Radestad & Hildingsson, 2011). Enfin,

beaucoup de pères se sentiraient non désirés et pas à leur place en salle d’accouchement

(OMSm, 2008).

Certain-e-s auteur-e-s avancent même des avis plus tranchés sur la présence des pères en

salle d’accouchement : Marinopoulos (2008), psychologue et psychanalyste, pense que

certains pères devraient être protégés de la réalité de l'accouchement alors que d’autres

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pourraient bien le vivre. En effet, pour elle, le passage à la paternité et la naissance de

leur(s) enfant(s) sont des instants délicats que certains pères ne pourraient pas assumer ;

cela aurait notamment des conséquences sur les relations parents-enfants. Il y a également

la notion que certains pères n’auraient pas l’envie d’être présents mais se plieraient à une

certaine norme sociale (Richard-Guerroudj, 2006). Bernard Fonty (2009) soulève lui aussi

cette contrainte et cette pression sociale à assister à l’accouchement, et c’est cela qui

pourrait amener, selon lui, à un mauvais vécu de l’accouchement. (apparaît dans Scènes de

ménage, 2009). Michel Odent (2004), quant à lui, avance une série d’arguments allant à

l’encontre de la présence des pères en salle d’accouchement : celle-ci gênerait l’avancée du

travail et rendrait l’accouchement plus difficile pour les mères. De plus, il relève que la vision

de l’accouchement de leur partenaire laisserait des séquelles irréversibles au niveau de la

sexualité du couple et engendrerait davantage de divorce. Enfin, les pères seraient plus à

risque de développer une DPP (Odent, 2008).

Nous constatons donc que les avis diffèrent en ce qui concerne la présence des pères en

salle d’accouchement, pourtant déjà bien ancrée dans les mœurs. Doit-on alors suivre l’avis

de Odent et Fonty – retourner à l’époque où les pères n’étaient pas admis en salle

d’accouchement ? Ou y a-t-il des moyens de les aider à trouver une place qui leur convienne

et à en retirer une meilleure expérience ? Est-ce que le fait de se préparer à cet événement

peut-il être une solution ? En effet, les pères sont actuellement les bienvenus aux cours de

préparation à la naissance et à la parentalité [PANP]. Mais là aussi, il semble que les pères

n’en soient pas toujours satisfaits : selon Frédéric Ragot (2006), les pères souhaiteraient

assister à davantage de séances de PANP, mais ont des difficultés à s’y rendre à cause de

leurs horaires de travail (cité dans Richard-Guerroudj, p.38). De plus, le contenu des cours

de PANP ne serait pas toujours adapté à leurs besoins (Casse & Polomeno, 2010). En

réponse à cela, d’autres types de PANP pensés spécifiquement pour les futurs pères voient

le jour, notamment des conférences, des ateliers et des groupes pour les pères (Moreillon,

Berthoud, Strouk, Arcade sages-femmes, Benoît, Kaplan). Certains couples se tournent

également vers la préparation par l’haptonomie1 pour permettre aux pères de s’investir

davantage dans la grossesse de leur partenaire (Richard-Guerroudj, 2006).

Au vu de ces multiples opinions et questionnements sur la place des pères en salle

d’accouchement, il semble qu’il soit important de prendre en compte l’expérience et l’avis

1 L’haptonomie est une « science des interactions et des relations affectives humaines » créée par Frans Veldman (cité par Garau, 2005, p.60). Elle est utilisée en obstétrique pour se préparer à la naissance (voir infra e. p.43).

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des pères à ce sujet afin de cerner les enjeux que représente la naissance pour leur

paternité et de réaliser comment les sages-femmes peuvent leur venir en aide.

b. Motivations professionnelles

L’intérêt d’étudier le sujet des pères en salle d’accouchement est apparu tôt dans notre

formation de sage-femme. Lors des périodes de formation pratique, nous nous sommes

rendu compte que l’intégration des pères dans le processus de la naissance était l’une des

facettes du métier de sage-femme qui nous touchait particulièrement, et ce sentiment s’est

développé à travers différentes expériences marquantes tout au long de ces quatre années

de formation.

Tout d’abord, nous avons été impressionnées par les personnalités et la nature si différentes

des pères rencontrés en salle d’accouchement. Cela a participé à l’émergence de l’une de

nos premières interrogations ; comment pouvait-on offrir un accompagnement personnalisé

à chacun de ces pères alors qu’ils n’avaient manifestement pas tous les mêmes besoins

face à la situation ? Nos interrogations se sont également axées sur le fait que les pères,

tout comme les mères, portaient tous une histoire et un parcours de vie bien différents, qui

contenaient de multiples facteurs pouvant influencer leur expérience et leur comportement

en salle de naissance (désir de grossesse, relation de couple, enfance personnelle, suivi de

cours de PANP, vécu des naissances précédentes, désir de s’intégrer dans la périnatalité,

etc.). Nous avons par ailleurs été confrontées à des situations où les pères manifestaient un

certain malaise en lien avec la situation dans laquelle ils se trouvaient. La plupart semblaient

éprouver des difficultés particulières à trouver leur rôle et leur place dans l’expérience du

travail et de la naissance.

Nous avons souhaité cibler notre problématique sur le champ professionnel de la salle

d’accouchement, car ces rencontres autour de la naissance nous ont offert des moments de

partage et d’interaction avec les pères que nous n’arrivions pas à créer lors des

consultations prénatales ou dans le suivi en P-P.

Nous avons ainsi été sensibilisées à l’accompagnement des pères en salle d’accouchement

dans le but d’offrir une prise en charge holistique1 de la triade mère/père/nouveau-né. Par

exemple, nous avons réalisé que certaines actions que nous entreprenions envers les pères

1 « Le terme holistique s'applique à toute démarche globalisante ou syncrétique où divers éléments,

habituellement isolés, sont regroupés et coordonnés pour l'obtention plus efficace d'un résultat visé. » (communication personnelle, [polycopié], Gendre, 2013).

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semblaient favoriser leur intégration et leur adaptation à la situation ; il pouvait s’agir de

simples gestes, montrant que l’on se préoccupait de leurs besoins (proposer à boire, de

s’asseoir, d’aller faire une sieste, etc.) ou d’actions permettant de créer une relation d’aide et

de confiance, ainsi qu’un climat de sécurité émotionnelle (donner des informations et la

possibilité de faire des choix éclairés, écouter les besoins, apporter de la bienveillance, du

non-jugement et du respect, etc.).

Malgré cette prise de conscience et des efforts développés pour intégrer davantage les

pères, un malaise restait parfois palpable dans certaines situations (par exemple, des pères

posant beaucoup de questions et semblant perdre le contrôle de la situation). Les enjeux de

cette problématique se sont alors développés dans nos esprits, et ont participé au

développement et à l’appropriation de notre future identité de sage-femme.

c. Questionnement

Les deux points principaux qui ont découlé de ces premières interrogations et que nous

avons choisis de développer dans ce mémoire sont les attentes (ou les projections sur la

naissance) et le vécu (ou l’expérience réelle) des pères en salle d’accouchement, car il nous

semblait important d’apporter une prise en charge adaptée à leurs besoins.

Ce mémoire vise donc dans un premier temps à comprendre quelles sont les attentes et les

représentations des pères à propos de l’accouchement, leur vécu en salle de naissance,

l’impact de l’analgésie péridurale [APD] sur ce vécu et s’il existe une différence de vécu entre

les primipères1 et les multipères2. Dans un deuxième temps, il serait intéressant de se rendre

compte des éléments de la pratique sage-femme qui pourraient apporter un

accompagnement adapté aux pères et dans quelle mesure les cours de PANP ont un impact

sur leur vécu. Enfin, ce travail tente d’élargir la problématique de départ en s’intéressant aux

conséquences psychiques qui peuvent se développer chez les pères dans le P-P.

Ce mémoire débute par un cadre de référence afin d’apporter certaines notions théoriques

en lien avec la paternité. Ensuite, la méthodologie de cette revue de la littérature [RdL] est

expliquée, suivie d’une description et d’une analyse critique des études sélectionnées. Ce

travail se termine enfin par une discussion ainsi qu’un chapitre comprenant des perspectives

nouvelles pour la pratique professionnelle.

1 Le terme « primipère » est un néologisme qui se réfère aux pères attendant leur premier enfant.

2 Le terme « multipère » fait référence aux pères attendant leur deuxième enfant, ou plus. Ces deux termes sont

expliqués plus en détail dans le cadre de référence (voir infra IV p.33).

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B. Cadre de référence

a. L’identité masculine

Ce chapitre a pour but de développer une définition de l’identité masculine à travers les

notions de sexe et de genre. Cela sera important pour la suite de ce travail afin de

comprendre les enjeux sous-jacents de la paternité.

I Définition par le sexe

« L’humanité fait partie des espèces à reproduction sexuée, elle a donc deux "sexes"

anatomo-physiologiques qui ont pour seule fonction sa perpétuation physique : la production

de nouveaux individus. » (Mathieu in Hirata, Laborie, Le Doaré & Senotier, 2000, p.205). Il

semble alors que l’espèce humaine contienne deux sexes biologiques : le sexe féminin et le

sexe masculin.

Compelli & Fellous (2005) définissent le sexe biologique selon trois classes :

Le sexe génétique est défini par la présence d’un chromosome X et d’un

chromosome Y dans le caryotype génétique de l’homme et de deux chromosomes X

dans celui de la femme.

Le sexe gonadique est défini par la présence des gonades (testicules chez l’homme

et ovaires chez la femme), l’organe produisant les gamètes, c'est-à-dire, les cellules

capables de reproduction sexuelle.

Le sexe phénotypique correspond à l’aspect des organes génitaux externes (in

Héritier, pp.92-93).

A la puberté, le sexe phénotypique est complété par l’apparition des caractères sexuels

secondaires (pilosité, glandes mammaires, masse musculaire, taille, etc.), qui découlent de

la sécrétion des hormones féminines et masculines (testostérone, œstrogène et

progestérone) produites par les gonades.

Selon cette définition en trois niveaux, on comprend donc qu’il peut être difficile de

« classifier » certains individus naissant avec une ambiguïté sexuelle ; en effet, il peut exister

des cas d’hermaphrodisme complexe avec, par exemple, un caryotype XY, la présence de

testicules non descendues et des organes génitaux externes de type féminin.

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En dehors des cas d’ambiguïté sexuelle, on peut constater que d’un point de vue biologique,

il est aisé de définir ce qu’est un homme ; en revanche, on verra qu’il est déjà plus difficile de

le définir de manière comportementale, sociologique ou culturelle, sans risquer de tomber

dans des généralités ou des clichés.

II Définition par le genre

Selon Catherine Vidal (2005), neurobiologiste, si le sexe biologique avait un rôle majeur à

jouer dans le comportement d’un individu, on devrait s’attendre à des comportements

masculins et féminins bien distincts l’un de l’autre et similaires dans toutes les cultures. Or,

l’auteure constate une grande diversité culturelle et pense alors que ce ne serait peut-être

pas le sexe biologique qui guide ces conduites comportementales (in Héritier, p.76). Mathieu

(2000) amène une autre notion à ce sujet : « On oppose généralement le sexe comme ce qui

relève du biologique et le genre (gender en anglais) comme ce qui relève du social. » (in

Hirata, Laborie, Le Doaré & Senotier, p.205). Il semblerait que ce concept de « genre » soit

repris par beaucoup d’auteur-e-s et amène une distinction claire par rapport à la notion du

« sexe biologique » (Boyancé, 2013 ; Clair, 2012 ; Welzer-Lang, 2004 ; Parini, 2006). Ce

concept se serait progressivement institutionnalisé au cours des quinze dernières années,

notamment dans les domaines de la sociologie (Clair, 2012, pp.10-12 et p.95). En voici la

définition que nous propose l’Association des Femmes Africaines pour la Recherche et le

Développement (AFARD, 2003) :

Le genre en tant que concept fait référence aux rôles et responsabilités des femmes

et des hommes tels qu’ils sont déterminés par la société. Il est lié à la façon dont

nous sommes perçus et censés penser et agir en tant qu’hommes et femmes en

fonction de l’organisation de la société et non du fait de nos différences biologiques.

[…] Ces rôles et responsabilités sont déterminés d’un point de vue social et culturel et

peuvent différer d’une communauté à une autre, d’un pays à un autre. (cité par

d’Almeida, 2007)

Le genre représenterait donc entre autres les rôles masculins et féminins attendus par la

société. Pascale Molinier et Daniel Welzer-Lang (2000) précisent ce qu’est le masculin et le

féminin :

En sociologie et anthropologie des sexes, masculinité et féminité désignent les

caractéristiques et les qualités attribuées socialement et culturellement aux hommes

et aux femmes. Masculinité et féminité existent et se définissent dans et par leur

relation. Ce sont les rapports sociaux de sexe, marqués par la domination masculine,

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qui déterminent ce qui est considéré comme "normal"- et souvent interprété comme

"naturel" - pour les femmes et les hommes. » (in Hirata, Laborie, Le Doaré &

Senotier, p.77)

Il en résulterait alors que ce sont les interactions sociales entre hommes et femmes qui

construisent les identités féminines et masculines ainsi que leurs rôles sociaux attendus.

III Une masculinité, des masculinités

Selon Michel Boyancé (2013), il n’y a pas de définition qui nous dise ce qu’est l’homme ou

ce qu’est la femme en tant que tels (p.82). Il y aurait plutôt une multitude de masculinités à

travers les cultures et les périodes historiques. Il en existerait même plusieurs formes

coexistant au sein d’une même culture et au sein des relations sociales que les individus

entretiennent entre eux. Par exemple, une forme hégémonique de masculinité est

représentée comme la plus souhaitable dans la culture occidentale, mais ne serait pas

nécessairement la plus commune (Connell in Welzer-Lang, 2000). Pour Connell et

Messerschmidt (2005) « la masculinité hégémonique […] est sans aucun doute normative.

Elle incarne la forme la plus vénérée de ce que doit être un homme, elle impose à tous les

autres hommes de se positionner par rapport à elle et elle légitime idéologiquement la

subordination totale des femmes aux hommes. » (in Prieur & Dupont, 2012, p.14). Il y aurait

alors des attentes normatives par rapport à ce que doit être un homme et une notion de

dominance de la masculinité sur la féminité.

Selon Planned Parenthood (2014), toute culture attribue certains stéréotypes aux

comportements que devraient adopter les individus en fonction de leur genre. Ces attentes

normatives de la société peuvent, par exemple, porter sur les traits de la personnalité, la

répartition des rôles dans les tâches domestiques, les activités professionnelles ou encore

sur l’apparence physique. Les auteur-e-s de Planned Parenthood illustrent ces attentes

normatives par certains adjectifs représentatifs des caractéristiques fréquemment associés

au genre masculin : indépendant, impassible, agressif, compétitif, maladroit, expérimenté,

fort, actif, confiant, dur, rebelle, etc. Bien que ces représentations soient des généralités,

elles peuvent montrer qu’une certaine pression incombe aux hommes de notre société.

Pour la suite de ce travail, on peut donc retenir plusieurs points concernant l’identité

masculine : de prime abord, les hommes se différencient des femmes par leur sexe

génétique, gonadique et phénotypique. Ensuite, on comprend qu’il n’existe pas qu’une

masculinité mais une multitude de masculinités rencontrées à travers le temps et les

sociétés. Celles-ci se construisent à travers les interactions sociales et en fonction des

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attentes de la société, se rapportant alors à la notion de genre. Par ailleurs, s’il existe une

multitude de masculinités, alors il existe certainement aussi une multitude de manière d’être

père. Une question se dessine alors en lien avec le sujet de ce travail : dans quelle mesure

est-ce que ces modèles masculins peuvent-ils influencer le comportement des futurs pères

et influer sur leur envie de s’impliquer dans la grossesse, l’accouchement et la parentalité ?

b. Évolution de la paternité à travers l’histoire

I Introduction

Dans la littérature, on peut se rendre compte que la paternité a évolué de manière

conséquente depuis la Rome antique ; elle a été marquée par différentes époques et

événements marquants (notamment le Moyen-âge, la Renaissance, la Révolution et

l’Industrialisation). Il est donc intéressant dans un premier temps d’identifier quels ont été les

principaux facteurs de changement de la paternité à travers ces différentes périodes de

l’histoire, afin de comprendre les mécanismes liés aux représentations de la paternité d’une

manière générale. Dans un second temps, l’objectif de ce chapitre est de survoler les enjeux

autour de la paternité dans un contexte contemporain. Bien que ce chapitre relève les

principales données de l’histoire de la paternité, il ne représente pas un recueil exhaustif.

II La Rome antique (~IVe siècle)

Selon l’historien André Rauch (2007), le père au temps de l’Empire romain incarne une

figure de pouvoir appelée le pater familias : le père de famille (p.13). La filiation paternelle

dépend de la volonté du père à reconnaître son enfant, sans forcément qu’intervienne la

notion de lien biologique avec celui-ci (p.14). En termes de devoirs, le père doit nourrir et

éduquer son enfant. Cependant, le père détient plus de droits que de devoirs ; bien que les

écrits ne soient pas avérés, il est mentionné dans la littérature que le père possède le plein

pouvoir sur son enfant, notamment celui de mort et d’abandon : « Le pater, maître de la vie

de son fils, peut l’exposer – c’est à dire le déposer sur un dépotoir public où il périt si aucun

passant, messager de la faveur divine, ne vient le recueillir. » (Rauch, 2007, p.16).

III Le Moyen-Âge (VIe siècle au XVe siècle)

Plusieurs éléments déterminants du Moyen-âge s’inscrivent dans un processus de

changement dans la paternité. Rauch (2007) expose que le droit canonique (la loi

ecclésiastique) s’introduit au Moyen-Âge, et cela représente le principal changement par

rapport à la Rome Antique (p.21). Cette loi impose donc le mariage comme institution

primordiale. Ainsi, la paternité d’un homme n’est reconnue qu’à travers le mariage, et non

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plus par choix, comme le mentionne la sociologue Christine Castelain-Meunier (1997) : « Le

mariage lui permet d’inscrire sa lignée dans une autre lignée (celle de l’épouse) et de

s’inscrire dans une communauté. Le père est défini par la place que lui confère l’institution

du mariage. » (p.11).

On peut constater que Dieu est perçu comme le père créateur, et l’Église Chrétienne comme

une forme de paternité : « Incontestablement, la paternité obéit au Moyen-Âge à d’autres

critères que dans le droit romain. Cela tient à l’hégémonie de la religion chrétienne, qui fait

de Dieu le créateur, le principe et le modèle de toute paternité. » (Rauch, 2007, p.21).

Par conséquent, cela crée un changement majeur dans les droits juridiques du père envers

son enfant, notamment celui de droit de vie et de mort sur celui-ci :

Dès la fin de l’empire romain (milieu du Ve siècle après Jésus-Christ), la puissance

paternelle, telle que nous l’avons décrite au chapitre précédent, décline

juridiquement. En voici une illustration : si le droit de vie et de mort échappe au père

de famille, ce n’est pas simplement la conséquence du déclin de la civilisation

romaine, mais c’est parce que, du point de vue de l’Église, le droit sur la vie

n’appartient qu’à Dieu le père. (Rauch, 2007, p.21)

Les différents points cités plus haut témoignent d’un réel changement dans la paternité en

termes de filiation par rapport à celle en vigueur à l’époque romaine.

IV Le courant de la Renaissance (XVIe siècle)

La paternité est influencée par de nouveaux enjeux dès la période de la Renaissance. On

observe tout d’abord un développement de nouveaux courants de pensée. Plusieurs

écrivains traitent du thème de la paternité dans leurs ouvrages, comme par exemple,

Rabelais (Pantagruel) et Montaigne (Les Essais), qui témoignent d’un certain remaniement

philosophique de la fonction paternelle comparée à ce qu’elle était au Moyen-Âge :

Si l’on retrouve les caractéristiques du Moyen Age dans l’exercice de la paternité

chez Rabelais, pourtant les connotations sont plus sensibles et plus culturelles, moins

obscurantistes et moins mystérieuses. Le père est toujours à distance physique de la

naissance, toutefois il n’est pas dépourvu de tendresse et d’affection tout en gardant

des croyances religieuses sur l’origine de la vie et de la mort. (Castelain-Meunier,

1997, p.20)

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Par ailleurs, les hommes de la Renaissance s’inscrivent dans un processus de

questionnement métaphysique sur l’existence, ce qui entraîne les gens à se rapprocher,

comme le mentionne Castelain-Meunier (1997) : « Ces préoccupations fondamentales

amènent à resserrer les liens. » (p.24).

Enfin, on observe pendant cette période un changement des mœurs dans la vie de couple,

notamment une répartition des responsabilités et un rapprochement des partenaires : « Les

liens à l’intérieur du couple acquièrent une dimension affective. Le père doit avoir toute

confiance pour l’éducation et la conduite des enfants par la mère. » (Castelain-Meunier,

2007, p.25).

V « L’âge d’or des pères » (XVIe siècle au XVIIIe siècle)

« L’âge d’or des pères »1 est une période marquante dans l’évolution de la paternité.

Castelain-Meunier (1997) tend d’ailleurs à démontrer que c’est lors de cette période que

l’autorité paternelle est à son apogée. En effet, le père a le droit de correction sur son enfant

(il a le droit de le punir), ainsi que le droit sur le mariage (il prend la décision concernant le

mariage de son fils/sa fille). La sociologue fait par ailleurs le lien entre autorité et pouvoir, en

affirmant que les deux sont intimement liés. En effet, le père possède une autorité puissante

envers son enfant et cela provoque une certaine méfiance : « Avec de tels pouvoirs, on

conçoit que le père ait été redouté. » (ibid., 1997, p.33).

Lors de cette période, le père possède une puissance telle, qu’il est hautement respecté

dans sa fonction ; il a de hautes responsabilités, et plusieurs devoirs lui incombent : « Le

père a pour mission d’assurer sa descendance, mais aussi par ses conseils et son exemple,

de montrer quelle est la meilleure voie pour parvenir à la prospérité familiale et

patrimoniale. » (Molinier, 1973, pp.446-473, cité par ibid., 1997, p.29).

VI La Révolution (1789)

La Révolution marque un réel changement dans la puissance et l’autorité que le père détient,

car la population rejette catégoriquement toute forme de pouvoir, comme illustré dans cette

citation :

Désireux de s’affranchir des prérogatives du « roi-père », les révolutionnaires, qui

veulent lui arracher leur liberté, s’acharnent à proclamer les valeurs de la fraternité.

Une fois que l’égalité fraternelle des citoyens unira le corps social, ce ne sera plus le

« roi-père » qui fondera l’ordre de la nation. (Rauch, 2007, p.40)

1 Castelain-Meunier (1997) fait référence à la période entre le XVIe siècle et le XVIIIe siècle comme étant

« communément appelée "l’âge d’or" des pères. » (p.29).

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Rauch (2007) affirme que « La souveraineté du roi sur son peuple, [...] s’inspirait de l’autorité

du peuple sur sa famille [...] » (p.39), et c’est en ce sens que le lien semble se créer entre

l’autorité du roi et de celle du père.

En outre, l’historien affirme que la fuite et l’arrestation de Louis XVI provoque un

bouleversement de l’image du père : il est perçu alors comme un père indigne dans

l’idéologie générale et il s’en suit un affranchissement de l’image du « roi-père », tant dans

l’idéologie de la population que dans les journaux (apparition d’images caricaturales et

grotesques) (ibid., 2007, p.42).

Cette période-là remet également en question le devoir d’éducation du père. En effet,

l’organisation de l’éducation est entièrement revue et n’est plus dispensée par le père, mais

par le Comité d’Instruction Publique.

Par ailleurs, d’autres éléments viennent ébranler l’autorité paternelle au sein de la société,

comme la création d’une identité juridique pour les femmes, ainsi que la transformation de

l’institution du mariage sous forme de contrat civil.

Voici quelques événements importants qui ont influé sur la paternité au cours de la

Révolution, selon Rauch (2007) :

1790 : Le père ne peut pas faire enfermer ses enfants et n’a plus d’autorité absolue :

le père doit se remettre à un juge pour « corriger » son enfant.

1791 : Le mariage n’est plus qu’un contrat civil.

1792 : La puissance paternelle n’agit plus sur les enfants majeurs.

1793 : Une Convention est établie interdisant au père de déshériter ses enfants (pp.

46-47).

Les différentes dates citées ci-dessus soulèvent l’idée que la paternité prend un nouveau

tournant à la Révolution.

VII Le père bourgeois (XIXe siècle)

Une nouvelle forme de paternité est décrite dans la littérature au sein de la bourgeoisie, une

classe sociale qui émerge au XIXe siècle. En effet, l’homme tient alors le statut de père de

famille honnête et responsable, qui développe une bonne relation avec ses enfants, et qui

soutient les intérêts de son patrimoine. Le père est un individu respecté dans la société et

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par ses enfants : « En toute logique, les fils doivent à leur père de l’honorer par leur réussite

dans la société. » (Rauch, 2007, p.52).

Par ailleurs, on note l’apparition de la préoccupation des pères à transmettre leur réussite à

leurs enfants, dans l’idée de pérenniser la prospérité de génération en génération. On

remarque alors que cette nouvelle forme de paternité s’inscrit dans une démarche tournée

vers le futur :

En un mot, un bon père de famille se glorifie moins de la noblesse de ses ancêtres

qu’il ne s’honore des succès de sa progéniture. Au souci d’honorer le lignage dont il

est issu, il a substitué la préoccupation de promouvoir les enfants qui sont nés de lui.

Les premiers contemplaient leur passé, pour lui tout se joue dans l’avenir. (Rauch,

2007, p.55)

On peut se rendre compte que cette forme de paternité s’apparente à la conception de la

paternité contemporaine et des représentations des pères dans la société actuelle.

VIII Le contexte historique de la paternité contemporaine (1945 -

nos jours)

Le contexte de la paternité contemporaine relève de nombreux événements déterminants

amenant la fonction paternelle à se remanier de manière significative, comme l’affirme

Rauch (2007) : « La définition classique de la paternité, telle que nous l’avons connue dans

notre histoire, est rendue caduque par le progrès de la biologie de la reproduction et par les

modifications du droit de la filiation. » (p.93).

Delumeau & Roche (2000) ajoutent que trois faits marquants sont à l’origine de la nouvelle

identité des pères dès 1970 :

Le changement des formes de mariage et des types de famille.

Les modifications des lois et de la filiation.

L’évolution de la biomédecine (p.394).

Ces trois points semblent évoquer que la paternité contemporaine repose sur plusieurs

facteurs concomitants qui ne concernent pas uniquement la loi juridique en vigueur.

Ce sous-chapitre a pour objectif de contextualiser la paternité contemporaine, et non de

définir les rôles et la place des pères dans notre société actuelle.

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1. La modification du mariage, des types de famille et du droit de filiation

On a pu constater que les critères de filiation des pères sont sensiblement différents en

fonction du contexte et des lois en vigueur. En 1972, la loi française modifie les droits de

filiation de manière significative : un homme peut devenir le père d’un enfant sans qu’un lien

biologique les unisse de manière évidente (Delumeau & Roche, 2000, p.394).

En effet, la filiation découle à présent de trois critères distincts :

Le mariage.

La preuve du lien biologique.

La « possession d’état » (sous réserve d’une enquête, le père peut affirmer sa

paternité dans le contexte d’une relation quotidienne avec l’enfant) (Rauch, 2007,

p.69).

Ce changement dans la filiation a d’importantes conséquences, car on relève

démographiquement qu’il s’en suit une baisse du taux de mariages, une augmentation du

taux de divorces ainsi que du taux de concubinages (Delumeau & Roche, 2000, p. 394).

Par ailleurs, on observe dans cette même période (à partir des années 1970) un

changement dans les types de familles. Dans cette société, trois types distincts émergent et

se développent : la famille traditionnelle, la famille monoparentale et la famille recomposée.

Cela incite à repenser l’identité propre du père – celle de géniteur, puisque plusieurs types

de nouveaux pères font surface (par exemple, dans les familles recomposées où le père

n’est pas forcément le père biologique). Comme le mentionne Delumeau & Roche (2000) :

« On assiste à une disjonction des fonctions du père entre plusieurs hommes.» (p.395).

Cette diversification dans la définition de la paternité actuelle est également relevée par la

sociologue Florence Weber (2005) :

Pourquoi est-ce si difficile de penser la paternité quotidienne ? En d’autres termes,

pourquoi n’y a-t-il pas, à côté du mot géniteur pour la paternité de sang, et du mot

père pour la paternité de nom, un mot pour dire, autrement qu’en langage enfantin,

celui qui vous élève : papa ? (p.234)

La question est pertinente et semble relever de multiples interrogations en lien avec la place

des pères au sein de la société.

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2. L’autorité parentale conjointe, l’intérêt de l’enfant et la redistribution

des rôles

On appelle la Réforme de 1970 la loi française qui vient bouleverser la paternité, car elle

remplace l’autorité paternelle par l’autorité conjointe de la mère et du père. L’autorité

parentale conjointe est soutenue dans la loi par un concept de « fonction » parentale, qui

peut être pourvue aussi bien par la mère que par le père.

Le père et la mère deviennent responsables de manière équivalente d’un certain nombre de

droits et de devoirs envers leur enfant :

Désormais, il n’y a plus qu’un seul chef de famille, le père, mais deux : le père et la

mère. Ces chefs ont d’ailleurs moins de droits que de devoirs envers l’enfant. Le

paterfamilias, dont l’origine se trouve dans les lois romaines, disparaît du droit, parce

que disparu des mœurs. (Delumeau & Roche, 2000, p.382)

Ainsi, les rôles sont redistribués, et les fonctions associées au père et à la mère sont

ébranlées. Selon Delumeau & Roche (2000), ces faits remanient de manière positive le lien

père-enfant :

Les rôles parentaux durant cette période tendent de plus en plus vers une

indifférenciation des pratiques paternelles et maternelles, qui deviennent

interchangeables sur un certain nombre de points. La réforme sur l’égalité parentale a

favorisé ce mouvement. Aux images d’un père « puissant » ou « défaillant » se

superposent celles d’un père exerçant son autorité et exprimant son affection sur un

mode où engagement personnel et échanges prennent une place

prépondérante. (p.382)

La Réforme de 1970 participe donc de manière considérable au développement de l’intérêt

de l’enfant, et vient renforcer les lois précurseurs dans ce domaine (comme par exemple, en

1883, l’école publique est rendue obligatoire et surtout, en 1924, la loi promeut l’intérêt de

l’enfant).

Delumeau & Roche (2000) affirment que l’autorité parentale conjointe entraîne une

intégration à part entière de l’enfant au sein de la famille, et modifie les responsabilités qui

incombent à son père :

Au sommet du triangle, il y a désormais l’enfant et son « intérêt », les deux bases

étant constituées d’un côté par le « couple parental », de l’autre par ce tiers

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médiateur entre parents et enfants qu’est l’État. Quant aux droits du père, de l’avis

des juristes, ils sont dominés par des « devoirs » envers l’enfant. (p.394)

On l’a vu, la Réforme de 1970 semble apporter bien des aspects positifs au développement

de la structure familiale ; cependant, les pères se retrouvent déstabilisés par cette nouvelle

forme de partage des rôles entre les parents, comme le souligne Castelain-Meunier (1997) :

« Le grand changement, pour le père contemporain, est qu’il se trouve ainsi face à un défi

stimulant et complexe : celui de construire lui-même sa paternité en ayant des difficultés à

s’appuyer sur un rôle bien défini. » (p.72).

Par la suite, les intérêts de l’enfant sont renforcés en 1990 par la mise en place en France de

la Convention promouvant les droits de l’enfant (Rauch, 2007, p.66).

Comme nous l’avons dit au début de ce travail (voir supra A.a p.10), les dernières

modifications de la loi sur l’autorité parentale conjointe, en Suisse, remontent au mois de

juillet 2014 et apportent davantage d’aspects positifs pour le développement des intérêts de

l’enfant et des droits des pères, indépendamment de l’état civil des parents (par exemple, les

droits et devoirs du couple sont identiques suite à un divorce ou lors de concubinage).

3. Les mouvements féministes

Les mouvements féministes se développent progressivement dans la société contemporaine

(déjà dès le XIXème siècle), et l’émancipation des femmes devient un enjeu important

(Castelain-Meunier, 1997, p.57).

On peut penser que les mouvements féministes ont influencé la paternité contemporaine.

Cependant, selon la sociologue, le mouvement des femmes n’a pas été la cause principale

de la perte de la « puissance paternelle », car elle a, au contraire, poussé l’homme à

s’engager dans une paternité où la relation et la communication au sein de la famille sont

favorisées :

Le mouvement des femmes n’est pas responsable de la diminution de la puissance

paternelle, comme il a été souvent accusé de l’être. Il est invitation au partenariat. Le

mouvement des femmes constitue une étape dans la reconstruction de la paternité

par la recomposition des relations entre l’homme et la femme et entre l’homme et

l’enfant. (ibid., 1997, p.58)

Bien que cette citation ne reflète pas l’opinion générale, elle semble impliquer que

l’émancipation des femmes n’est pas un enjeu déterminant dans l’évolution de la paternité.

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4. L’évolution des sciences biomédicales

Un critère important vient s’inscrire dans l’évolution de la paternité dans la société

contemporaine ; en effet, les sciences biomédicales se développent de manière considérable

dans le courant des années 1950.

En premier lieu, l’analyse sérologique du lien paternel, découverte en 1955, marque une

réelle avancée dans la redéfinition de la filiation telle qu’on la connaît. L’analyse sérologique

fournit la preuve de paternité, et ainsi, apporte une authenticité à la paternité, comme le

souligne Castelain-Meunier (1997) :

On sort ainsi un peu plus, du secret de la conception et donc de la nécessité qu’il y

avait d’entourer le rôle paternel de garanties religieuses, sociales, culturelles et

idéologiques là où il fallait le consolider et le rendre infaillible, faute de preuve. La

paternité était jusqu’alors incertaine. (p.51)

Aux alentours des années 1980, l’insémination artificielle voit le jour, et permet notamment

aux hommes infertiles de devenir pères, ce qui donne un nouveau sens à la paternité,

comme l’affirme Rauch (2007) : « Assistée, la procréation renouvelle le rôle et le statut d’un

père qui devient le parent socio-affectif d’un enfant dont la conception a exigé l’intervention

d’un autre homme. » (p.88).

5. Le contrôle des naissances

De manière générale, la « puissance paternelle » est également touchée par le contrôle des

naissances qui s’opère. En effet, en 1967, la contraception est légalisée. La légalisation de

l’interruption volontaire de grossesse en 1975 participe également à ce processus

d’appropriation de la grossesse aux femmes, ce qui affecte les hommes dans leur processus

vers la paternité :

La procréation n’obéit plus au hasard ou au désir d’un homme qui impose

« naturellement » à une femme son désir d’avoir un enfant. Dorénavant, la paternité

résulte aussi du choix, fait par une femme, de devenir mère. À présent, elle a le

pouvoir d’arbitrer l’accès de l’homme à la paternité. (Rauch, 2007, p.75)

IX L’évolution globale de la paternité

Les différents points de ce chapitre permettent de se rendre compte que la paternité dépend

de plusieurs facteurs complexes et intrinsèques à une culture, une histoire et un contexte

donnés.

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28

Rauch (2007), affirme que c’est la perception de la figure du père dans les différents

contextes qui délimite la paternité :

Traditionnellement, depuis le droit romain, le père était celui qui commandait. Cette

conception a été battue en brèche par l’affirmation révolutionnaire selon laquelle le

seul véritable père est moins celui qui commande que celui qui aime un enfant et s’en

occupe. (p.68)

Pour conclure, le tableau ci-dessous permet d’aborder l’évolution de la paternité en fonction

des époques et des différents thèmes concernant les liens entre le père et son enfant d’un

point de vue global.

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29

Légende des sources utilisées pour l’élaboration du tableau :

Rauch (2007) [1]

Castelain-Meunier (1997) [2]

Unicef (2007) [3]

Code civil Suisse (2013) [4]

/ = notion non

trouvée dans les textes

Rome Antique (~ IVe siècle)

Moyen-âge (Vie siècle au XVe siècle)

«L'âge d'or des pères» (XVIe

siècle au XVIIIe siècle)

Révolution 1789

Le père bourgeois

(XIXe siècle)

Paternité contemporaine

Statut du père

Chef de famille puissant : pater

familias [1] /

Père tout puissant [2]

/

Père de famille respecté :

promotion de la famille,

développement d'un foyer [1]

Varie en fonction des

modèles familiaux [1]

Droits et devoirs du

père envers

son enfant

Plein pouvoir sur l'enfant :

droit de vie et de mort. Devoir de nourrir son

enfant [1]

Pas de droit de vie ou de mort

sur l'enfant. Devoir

d'éducation envers son enfant [1]

Droit de correction, droit sur le mariage [2]

Décret en 1790 : le père ne peut pas

faire emprisonner son enfant [1]

L'enfant est considéré comme un

individu à part entière, une priorité [1]

Convention des droits de

l'enfant [3]

Éducation de l'enfant

Dispensée exclusivement par le père [1]

Dispensée exclusivement par le père [1]

Droit du père de

choisir un éducateur

[2]

Dispensée par le Comité d'Instruction Publique [1]

/ Dispensée par

l'État [3]

Autorité sur

l'enfant

Exclusivement paternelle [1]

Paternelle / Église [1]

Paternelle [2]

Paternelle / Loi [1]

/

Autorité parentale

conjointe entre la mère et le

père [1]

Filiation père - enfant

Choix et volonté du père et non forcément par lien biologique

[1]

Mariage [1] / / /

Mariage, lien biologique ou «possession

d'état» [1]

Héritage

Droit de léguer ses biens à la personne qu'il souhaite, droit de déshériter son enfant [1]

/ /

Le père a l'interdiction

de déshériter son enfant [1]

/

Les descendants

sont des héritiers

réservataires [4]

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30

c. La paternité

I Introduction

Nous avons pu voir dans le chapitre de l’identité masculine (voir supra a p.16) qu’il existe

une multitude de masculinités et, certainement, une multitude de pères. En effet, nous

voyons à travers les époques que les pères ont pu être très différents (voir supra b p.19).

Fize (2008) nous dit que « […] le père n’a jamais été aussi pluriel qu’aujourd’hui. […]. De nos

jours, il n’y a plus, c’est certain, UN père, mais DES pères […].» (p.157). Nous allons donc

voir dans ce chapitre ce que ces multiples figures de pères représentent actuellement, dans

notre société.

II Le père biologique

Prenons tout d’abord la notion du père biologique1, « celui qui engendre » (Fize, 2008,

p.158). Il s’agit donc du père génétique. Il est intéressant de constater qu’actuellement, la

fécondation peut être faite de manière naturelle et artificielle – notamment avec les

fécondations in vitro et les inséminations artificielles – et que cela a amené à de nouvelles

distinctions juridiques concernant la notion de filiation. Nous pouvons ici soulever l’exemple

des donneurs de sperme (pour les couples infertiles ou les couples homosexuels), des pères

biologiques, par définition, qui n’auront pas d’autres liens de paternité avec l’enfant à venir.

Actuellement, des tests d’analyse génétique sont employés à titre privé ou juridique, afin de

déterminer le lien de parenté entre un père et un enfant. Selon Meier et Stettler (2009), « la

fiabilité toujours croissante des expertises scientifiques destinées à déterminer la paternité

génétique, […], ont favorisé le développement du courant selon lequel chacun a droit à une

information « véridique » sur son ascendance. » (p. 14-15).

III Le rôle du père dans le développement de l’enfant : approche

psycho-développementale

Comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, le contexte historique influence la

conception de la paternité dans différentes époques et nous permet de mieux appréhender

cette notion au sein de la société actuelle. Castelain-Meunier (1998) souligne que la

construction de l’identité actuelle des pères dépend de la configuration familiale de manière

générale (divorce, recomposition familiale, etc.) ainsi que de la place que la partenaire laisse

autour de l’enfant (p.44). L’auteure relève également que la place des pères est aujourd’hui

1 Par opposition au père adoptif.

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l’objet de controverses (pp.54-55) : certain-e-s auteur-e-s parlent des « nouveaux pères »

ou, au contraire, « des pères absents », « carents » ou « défaillants » (Castelain-Meunier in

Le Roy, 1996 ; Reveyrand-Coulon in Le Roy, 1996 ; Fize, 2008). Les « nouveaux pères »

apparaîtraient dès les années 1970, à la suite des changements de statuts sociaux et

familiaux, et sont perçus comme des pères surinvestis et très, voire trop « maternants »,

prenant alors la place de la mère (Fize, 2008, p.26 ; Hurstel in Zaouche-Gaudron, 2001, p.

67). A l’inverse, les notions de « pères absents » ou de « démission des pères » (Garau,

2005, p.84) représentent des pères désinvestis, manquant d’autorité auprès des enfants et

apparemment trop souvent absents (Hurstel in Zaouche-Gaudron, 2001, pp.65-66).

Ces éléments montrent bien que la place des pères n’est pas évidente à l’heure actuelle et

que certains pères se cherchent encore une identité. Le partage des rôles dans le couple et

au sein de la parentalité n’est pas prédéfini et il est difficile de donner une image

représentative de ce que peuvent être les rôles des pères auprès de leurs enfants

aujourd’hui. Selon Modak & Palazzo (2002), leur implication dans la parentalité est pourtant

souhaitée par les femmes (p.77). Ce chapitre vise à présenter quelques rôles attribués aux

pères dans littérature psycho-développementale de l’enfant.

1. Rôle des pères dans le développement de la petite enfance

Jean Le Camus se base sur diverses études pour montrer que si le père est engagé auprès

de son enfant, dans les soins, les jeux et l’éducation, cela crée un bénéfice certain pour le

développement de l’enfant, notamment dans le développement du langage, de l’intelligence

et du développement « socio-personnel » (construction des attachements et de l’identité

sexuée) (in Zouache-Gaudron, p.81-84).

2. Rôle des pères dans l’éducation de l’enfant

Les pères auraient un rôle éducatif et d’accompagnement auprès de l’enfant, dans le sens

où ils peuvent lui transmettre certaines valeurs (Garau, 2005, p.5), lui indiquer des manières

d’être ou encore lui permettre de se socialiser avec les autres (Fize, 2008, p.172).

3. Rôle des pères dans l’autorité et le respect de la liberté auprès de

l’enfant

Un des rôles des pères est d’exercer une certaine autorité sur l’enfant, de manière à donner

du sens aux actions de l’enfant et à fixer des limites (Fize, 2008, p.171). Il semble que ce soit

un rôle délicat à investir pour les pères d’aujourd’hui (Garau, 2005, p.84).

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32

4. Rôle des pères dans la sécurité émotionnelle de l’enfant

L’enfant a besoin d’un cadre de sécurité, stable et cohérent et la présence des pères serait

rassurante pour l’enfant (Fize, 2008, p.175). Ainsi, un des rôles des pères est d’apporter

cette sécurité physique et émotionnelle, notamment, en lui apportant de l’affection et de

l’amour. Selon Garau (2005), les pères d’aujourd’hui exprimeraient plus volontiers leurs

émotions à leurs enfants, bien que certains ne s’y autorisent qu’avec parcimonie (p.85).

Enfin, Fize (2008) pense que l’affection qu’un père peut donner à son enfant relève tout

d’abord d’un choix personnel et de la possibilité d’accéder à l’idée d’être père (p.165).

5. Rôle des pères dans la construction de l’identité et la socialisation de

l’enfant

L’enfant aurait besoin de son père pour réguler son image et son estime de lui-même,

notamment grâce à la construction d’un système de valeurs et de limites fixées. (Garau,

2005, p.86). En effet, les pères auraient un rôle dans la socialisation de l’enfant, et

participeraient à l’avènement de la maîtrise des pulsions (Castelain-Meunier, 1998, p.43). Ils

favoriseraient également la découverte et la création de la personnalité de l’enfant (Fize,

2008, p.172).

6. Rôle des pères dans la construction de l’identité sexuelle de l’enfant

La présence masculine et la fonction des pères permettraient une certaine identification de

l’enfant et répondraient à un besoin de stabilité, d’autonomie et de continuité du lien. L’enfant

a besoin de se référer à une présence masculine de manière régulière (Castelain-Meunier,

1998, p.58).

Pour conclure, l’investissement d’un homme dans son rôle de père est « une continuité

affective et relationnelle suffisante pour créer les conditions d’une relation de confiance entre

l’enfant et son entourage ; une ouverture à la différence pour sortir l’enfant d’un lien trop

fusionnel ; et l’intériorisation progressive de limites et d’interdits et d’un système de

valeurs. » (Lauru & Le Run (Dir.), 2004, in Garau, 2005, p. 86). Nous voyons par là que le

père joue un rôle fondamental dans le développement de l’enfant (Le Camus in Zouache-

Gaudron, 2001, p.84). Il est intéressant de constater que malgré la disparition d’une paternité

excessive comme à l’époque du paterfamilias – où le père n’était qu’autorité et la mère

tendresse – certains schémas restent ancrés dans les mœurs de la société actuelle et cela

influence les rôles des pères et des mères (Fize, 2008, p.24 ; Garau, 2005, p.21).

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33

IV Le « primipère » et le « multipère »

Pour ce travail, il est intéressant de distinguer si un père est père pour la première fois – il

sera appelé ici un « primipère » - ou s’il a déjà eu un ou plusieurs enfants auparavant – ici un

« multipère ». En effet, la première expérience de la grossesse, de l’accouchement et de la

parentalité sera marquée par une grande part d’inconnue. Geneviève Delaisi de Parseval

(1981) a centré une partie de ses recherches sur la première paternité et utilise ce nouveau

terme de « primipère » :

[…] nous avons essayé de comprendre le vécu du « primipère » (si l’on veut bien

accepter ce néologisme). Bien des éléments, en effet, permettent de penser que la

première expérience de la paternité (comme celle de la première maternité) possède

une spécificité qui la distingue des paternités suivantes. (p.32)

On peut remarquer que la littérature scientifique sur la périnatalité distingue souvent la

femme primipare de la femme multipare et, de manière plus récente, l’homme primipère de

l’homme multipère. This et Belaiche (2011) parlent eux aussi de ces néologismes : « On

commence à parler de "primipère" et de "multipère". Mais ces termes sonnent encore

bizarrement. » (p.138).

Nous avons pu remarquer dans les études portant sur notre problématique que les

auteur-e-s utilisaient facilement le terme anglais « first-time father » pour décrire le primipère,

aussi bien durant la grossesse qu’après la naissance. Nous emploierons alors le terme de

primipère dans notre travail de la même manière que le terme anglais, sans différencier le

futur père durant la grossesse, du père après la naissance de son enfant. D’autres

auteur-e-s utilisent également le terme « expectant father », pour lequel nous n’avons à

nouveau pas de traduction française, si ce n’est le futur père. Delaisi de Parseval (1981)

ajoute ceci :

Toujours dans les étranges omissions de notre langage, nous constatons l’absence

du verbe « paterner » ou du substantif « paternage ». […] M.P Racamier a d’ailleurs

proposé, afin de remédier à cette carence, le vocable de « paternalité » pour désigner

les processus psycho-affectifs survenant lors de la période du devenir-père (father-to-

be, en anglais). (p.34)

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Il est intéressant de constater que même dans notre langage, le rôle et la place des pères

sont sous-entendus. Ainsi, peut-être qu’en parant à ces omissions de la langue française, les

pères pourraient se sentir davantage intégrés dans la périnatalité et la parentalité.

V Cadre juridique suisse autour de la paternité

1. La notion de filiation

Selon Meier & Stettler (2009), « La filiation est une notion juridique. Elle n’existe que si le

droit la consacre. Le rapport repose, alternativement ou cumulativement, sur le lien

biologique (descendance) ou la relation psycho-sociale existant entre les parents et

l’enfant. » (p.1). Par ailleurs, tout enfant a droit à une filiation maternelle et à une filiation

paternelle (ibid., 2009, p.7).

L’existence d’un lien de filiation maternelle ou paternelle suffit à entraîner :

Une obligation d’entretien du parent envers l’enfant (dette alimentaire).

Le droit d’entretenir des relations personnelles avec l’enfant.

Le droit à l’information et aux renseignements concernant l’enfant.

La qualité d’héritier légal dans les deux sens (p.8).

2. La filiation paternelle

« Alors que la filiation maternelle résulte en principe de la naissance, la filiation paternelle

découle du mariage avec la mère, d’une reconnaissance ou d’un jugement. » (Meier &

Stettler, 2009, p.7). En effet, lors d’un mariage avec la mère, la filiation est fondée sur la

présomption de paternité du mari. Celle-ci vaut également lors d’une insémination artificielle

avec donneur de sperme (ibid., 2009, p.33). La reconnaissance, quant à elle, se fera à l’aide

d’un test de paternité qui peut être demandé dans le cas d’une contestation de la

présomption (ibid., 2009, p.28). Enfin, le jugement institue le lien de filiation paternelle à la

suite d’une action de recherche de paternité (ibid., 2009, p.69). Il y aura notamment une

recherche de paternité dans les cas ou l’enfant est privé de filiation paternelle à la naissance

(ibid., 2009, p.7).

Les moyens de prouver l’existence ou le défaut de lien biologique entre un enfant et un

homme sont :

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35

La preuve de cohabitation au cours d’une période déterminée (la cohabitation voulant

dire tout rapport sexuel susceptible d’entraîner une fécondation, y compris le coït

interrompu ou la relation accompagnée de l’utilisation de moyens

anticonceptionnels).

La preuve directe de la paternité par expertise scientifique (ibid., 2009, pp.81-84).

D’année en année, un léger recul de la filiation paternelle découlant du mariage se dessine

pour les enfants nés en Suisse (93% en 1992 et de 83,8% en 2007). Pour une grande

majorité des enfants nés hors mariage, une filiation paternelle est reconnue de manière

spontanée avant ou après la naissance. Enfin, les jugements de paternité sont de moins en

moins effectués en raison du recours aux tests de paternité à titre privé (ibid., 2009, p.31).

3. La filiation maternelle

En matière de filiation maternelle, le droit suisse est fondé sur le principe « mater semper

certa est » (Meier & Stettler, 2009, p.21), c’est à dire que la filiation s’établit

automatiquement lorsqu’une femme donne naissance à un enfant, « y compris lorsque la

fécondation a eu lieu en dehors de son corps ». Cette filiation existe déjà pendant la

grossesse à titre conditionnel, cependant, elle prend fin en cas d’adoption (ibid., p.22).

Pour conclure, nous retiendrons donc qu’il existe différents pères – biologiques, donneurs de

sperme, adoptants, juridiques, primipères, multipères – et nous adopterons pour ce travail le

terme de père en étant conscientes de cette diversité et de cette multitude de facettes.

d. Le processus de paternité

I Introduction

Afin de comprendre les implications liées à la transition vers la paternité, il convient de

décrire les différents mécanismes qui sont à l’origine de cette transition.

Les études sur la maternité se sont penchées sur la transition psychique des femmes lors de

leur grossesse et ont démontré qu’elles traversaient une série de transformations

essentielles lors de cette période (Delumeau & Roche, 2000, p.469). Pour les hommes, la

transition est encore différente, étant donné que la grossesse n’est pas un phénomène qu’ils

vivent à travers leur corps :

L’incroyable pouvoir de créer un enfant dont est dotée la femme pourrait faire croire

que devenir mère est une évidence… Il n’en est rien, bien que l’on puisse penser que

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36

cela facilite les premiers liens. Devenir père va encore moins de soi : l’homme est

totalement absent de ce corps à corps qu’est une grossesse. (Fonty, 2003, p.17)

Ainsi, il est pertinent de se rendre compte des étapes fondamentales qui constituent la pierre

angulaire de la transition d’un homme vers la paternité.

II La grossesse

1. La confirmation de la grossesse

Le début du processus de paternité passe par l’étape de la confirmation de la grossesse. Il

est difficile de généraliser l’impact de celle-ci à un seul type de réaction étant donné les

conditions multifactorielles de la survenue d’une grossesse (désir d’enfant, grossesse non

planifiée, situation économique, etc.) ; il semble cependant que la confirmation de la

grossesse ainsi que l’annonce publique de la grossesse sont deux éléments participant

fortement à la perception des pères d’une certaine connexion avec leur fœtus (Draper, 2002,

p. 566).

Clerget (2008) relève par ailleurs que les futurs pères sont confrontés à des mécanismes

d’adaptation complexes lorsqu’ils apprennent la grossesse de leur partenaire :

Il est confronté, pour de vrai et pas seulement en idées, à un intime consentement au

mouvement du désir qui prend vie, hors de lui, dans le corps d’une femme, porteuse

de ce qu’il a mis en elle et dans leur relation, physiquement et psychiquement. (pp.

54-55)

La confirmation de la grossesse constituerait donc la première étape dans la transition vers

la paternité.

2. La dimension imaginaire de la grossesse

Au début de ce chapitre, on a introduit l’idée que les futurs pères ont des difficultés à se

connecter avec l’expérience physique de la grossesse, et ils ont ainsi de la peine à concevoir

la grossesse (encore virtuelle, imaginaire), malgré le caractère réel de l’annonce.

Ainsi, la notion d’imagination va avoir son importance pour les futurs pères, car « Il n’y a

malheureusement pas beaucoup d’autres possibilités laissées à l’homme que celles de

réfléchir, imaginer, s’angoisser, rêver, se souvenir, bref faire travailler sa tête pour se

préparer à devenir père. » (Teboul, 1995, pp. 95-96).

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Une des premières expériences permettant aux futurs pères de s’approprier le fœtus est

l’échographie obstétricale, comme le mentionne Garau (2005) :

Technologie – et imagination – aidant, si les hommes ne ressentiront jamais les

premiers coups de pied de leur enfant dans leur ventre, ils peuvent parfaitement

imaginer leur futur bébé dans le corps de leur compagne, grâce, par exemple, aux

différentes échographies qui jalonnent désormais le déroulement de la grossesse.

(p.41)

En outre, Garau (2005) souligne que grâce à l’échographie, « l’homme peut avoir un accès

plus précoce à sa fonction paternelle. » (p.58). Par ailleurs, Fonty (2003), explique combien il

est important pour certains futurs pères de connaître le sexe de l’enfant, afin de s’inscrire

dans une démarche d’identification au futur enfant et de réalisation du « phénomène de

paternité » (p.136).

Enfin, les mots employés par la future mère ainsi que ses perceptions représentent un enjeu

important dans le processus de paternité, comme le mentionne le psychanalyste Bernard

This (1994) :

Mais, pour l’instant, je dois reconnaître que celle qui me fait « devenir père », c’est

elle, la mère de notre enfant. C’est sa parole qui a le plus d’effet ; je sens bien que,

pour elle, je suis plus que « son » compagnon : je suis aussi « le père » de son

enfant. (p.35)

On peut ainsi constater que les images et le langage sont deux éléments participant

fortement à l’appropriation du fœtus par les futurs pères.

D’une manière générale, Draper (2002) relève qu’en plus de l’échographie, les événements

qui sont à l’origine de la connexion physique des futurs pères avec leur fœtus lors de la

grossesse sont la confirmation de la grossesse, l’annonce publique de la grossesse (voir

supra 1. p.36), la perception des mouvements fœtaux et la participation des futurs pères à

l’accouchement (p.566) ; le processus de paternité s’inscrirait ainsi dans plusieurs

dimensions différentes.

3. La dimension psychique de la grossesse

La notion de transition implique que les hommes entament un processus de changement

identitaire essentiel pour devenir pères.

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Selon Genesoni & Tallandini (2009), il semble que la grossesse est la période la plus critique

pour les futurs pères en termes de réorganisation psychologique (p.305). Par conséquent, il

est intéressant de décrire les grands phénomènes d’identification psychiques qui sont à

l’origine de la transition vers la paternité.

3.1 Le syndrome de « couvade »

Lors de la grossesse, certains futurs pères se retrouvent confrontés à un phénomène

psychique particulier connu sous le nom de «couvade », qui toucherait 11% des futurs pères

et ne serait que passager (Houzel, 2010, p.119). This & Belaiche (2011) expliquent que les

hommes souffrent souvent de symptômes de grossesse, tels qu’une prise de poids, ou

d’autres manifestations : « douleurs appendiculaires, ulcère gastrique, coliques

néphrétiques, hépatiques, angoisses, insomnies... » (p.107). Selon Garau (2005), ce

phénomène se développerait par besoin d’extérioriser les différents sentiments négatifs du

futur père en lien avec la grossesse : « C’est aussi une façon de traduire leur inquiétude ou

les questions qu’ils se posent et n’osent pas nécessairement formuler, de crainte de ne pas

« être à la hauteur » (p.43). Cette citation implique par ailleurs que les futurs pères se

sentent contraints de devoir cacher – voire refouler leurs sentiments négatifs en lien avec la

grossesse.

3.2 La « transparence psychique »

Le phénomène de la « transparence psychique » maternelle a été développé par Monique

Bydlowski (2010), médecin psychiatre spécialisée en maternité. Il est décrit comme « un état

relationnel particulier, un appel à l’aide latent, ambivalent et quasi permanent, tout comme à

l’époque de l’adolescence (p.89). Pour l’expliquer brièvement, on relève que la

« transparence psychique » consiste principalement en la réactivation du passé de la femme

(notamment le passé amoureux), où plusieurs souvenirs et sentiments refoulés émergent

lors de la grossesse (p.90).

Par rapport à ce concept, Delumeau & Roche (2000) soutiennent l’idée que certains futurs

pères – dont l’équilibre psychique présente des fragilités, seraient également touchés par ce

phénomène de « transparence psychique » (cela s’intégrerait d’ailleurs, au syndrome de la

couvade, par « contagion » du psychisme féminin) (p.469).

Ainsi, les futurs pères se retrouvent confrontés à un certain nombre de difficultés dans les

relations qu’ils entretiennent avec leur famille :

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Ceux, notamment que nous avons appelés les « primipères » (par analogie avec les

primipares) vivent une paternité dont l’approche mobilise une fantasmatique,

défensive le plus souvent, qui tourne autour d’un certain nombre de pôles

conflictuels : conflits vis-à-vis de la future mère et du bébé bien sûr, mais aussi vis-à-

vis de la fratrie du futur père, enfin et surtout peut être vis-à-vis des parents de ce

dernier, son propre père en particulier. (ibid., 2000, p.469)

Par conséquent, il semble pertinent d’attribuer ce phénomène de « transparence

psychique » aux deux futurs parents.

Dans l’idée de développer plus précisément cette « transparence psychique » chez les

pères, les auteur-e-s relèvent que la paternité se construit à travers des modèles connus,

c’est-à-dire, sur l’expérience que les pères ont de leur propre histoire familiale (parents,

fratrie) (ibid., 2000, p.470). Par conséquent, l’accompagnement personnalisé des futurs

pères représente un enjeu de prévention sociale et sanitaire essentiel dans le

développement harmonieux de la famille :

Ainsi, une meilleure écoute du père pendant la maternité de sa compagne peut – et

doit – être instaurée. Parce que certains troubles émergeants à l’aune de sa future

paternité peuvent remettre en cause l’équilibre de sa relation à venir avec femme et

enfant, faute d’avoir « réglé » son histoire avec ses propres parents. (Garau, 2005,

p.44)

4. La relation émotionnelle des futurs pères avec leur fœtus

L’étude de May (1982) a révélé que les sentiments et pensées que les futurs pères

expriment pendant la grossesse envers le fœtus avaient des conséquences importantes sur

la transition à la paternité (Habib & Lancaster, 2009 p.129). On peut comprendre que les

futurs pères amorcent leur transition vers la paternité de manière plus ou moins efficace en

fonction de leur « relation » émotionnelle avec le fœtus.

5. Les préoccupations des futurs pères

Dans le sous-chapitre précédent, on a pu constater à quel point la transition vers la paternité

comporte des remaniements psychologiques importants. Par conséquent, il est logique de

penser que ces transformations ne vont pas sans une multitude de préoccupations

inhérentes à la grossesse.

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Finnbogadóttir, Crang Svalenius & Persson (2002) soulignent le fait que pour la majorité des

futurs pères, le sentiment de responsabilité augmente de manière considérable lors de la

grossesse ; en effet, les futurs pères se retrouvent plus enclins à changer leurs priorités

(économies, loisirs), à changer certaines activités quotidiennes et à agir avec plus de

réflexion, d’une manière générale (p.101).

D’autres préoccupations sont présentes dans l’esprit des futurs pères, qui se traduisent par

la notion de préparation ; Deave & Johnson (2008) démontrent que les futurs pères ont

besoin de beaucoup d’informations (concernant la parentalité, les soins au nouveau-né et

l’évolution des relations familiales) pendant la grossesse et qu’ils ont besoin de s’inscrire

dans un processus de préparation avant l’arrivée de l’enfant.

En outre, une étude qualitative de Fenwick, Bayes & Johansson (2011) explorant

l’expérience des futurs pères lors de la grossesse démontre que le fait de se préparer pour la

naissance par un certain nombre de tâches domestiques concrètes (préparer la chambre du

bébé, acheter le matériel nécessaire, installer le siège auto) est une étape essentielle pour

que les futurs pères se sentent intégrés dans un processus de paternité (p.6).

Par ailleurs, la période de la grossesse aurait des conséquences sur la sexualité au sein du

couple (pour des raisons découlant de plusieurs facteurs ; le ventre de la future mère qui

grandit, l’inquiétude des futurs pères de blesser l’enfant, les modifications de la libido, etc.),

amenant parfois les pères à avoir des sentiments ambivalents, comme souligné par This &

Belaiche, 2011) :

Dans les groupes de parole limités aux pères, la crainte de blesser l’enfant lors de

rapports sexuels n’est pas seule en jeu et l’expression de fantasmes agressifs ne doit

pas être ignorée : la place envahissante de l’enfant, le sentiment d’exclusion, la mort

du couple, le désir de fuite, les cauchemars. (p.137)

Il semble que les pères traversent une multitude d’étapes intellectuelles cruciales lors de la

grossesse et qu’ils ne sont pas toujours amenés à pouvoir partager cela avec d’autres pères.

III La naissance

Le moment de la naissance de l’enfant représente un enjeu particulièrement important dans

la transition vers la paternité ; le sentiment de paternité est renforcé par le moment précis de

la naissance, car, à l’inverse de la femme, ils seraient moins confrontés à la réalité physique

de l’enfant grandissant dans leur corps : « En somme, le père ne passerait pas – ou en tout

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cas nettement moins que la mère – par cette phase de l’enfant imaginaire que l’on se figure

plein des qualités que nous désirons pour lui. » (Garau, 2005, p.57). Ce phénomène semble

également se produire dans l’étude de Longworth & Kingdon (2010) étudiant le vécu des

pères au moment de la naissance ; les résultats démontrent que les pères sentent leur

paternité débuter au moment de la naissance de leur enfant, ce qui met un terme à la

déconnexion physique qu’ils ont pu ressentir lors de la grossesse (p.591). Cependant, il a

été démontré dans une seconde étude (Condon, 2006) que 20% des pères ne ressentiraient

pas le lien d’attachement au moment de la naissance (Nanzer, 2009, p. 107).

A l’instar du moment de la naissance, les instants suivant celle-ci seraient essentiels, car les

pères sont confrontés à une réalité nouvelle qu’ils n’avaient réussi à imaginer que

partiellement auparavant, comme le mentionne Delassus (2007) :

L’événement se produit souvent peu de temps après l’accouchement, lorsque se sont

en partie dissipées les émotions réelles ou convenues liées à ce moment. Alors, le

père se met à voir tout à coup la mère et l’enfant ; il les englobe dans une vision

globale, il réalise l’ensemble qu’ils constituent devant lui et hors de lui. (p.135)

On retrouve les mêmes propos en rapport avec les représentations des pères avant la

naissance chez Bydlowski (2010) : « La représentation qui l’avait [le futur père] envahi

auparavant était sans rapport avec le réel de l’enfant. Souvent surprise, la paternité ne

s’assumera qu’après coup. » (p.112).

IV L’attachement et la relation des pères avec leur nouveau-né

Le processus de paternité s’inscrit par la suite dans le lien d’attachement qui va se créer

entre le jeune père et son nouveau-né. La théorie de l’attachement est exposée pour la

première fois en 1969 par Bowlby (Pierrehumbert, 2003, p.87), et se définit comme un

« besoin d’attachement primaire, tout aussi vital que le lait maternel. » (Bowlby, cité par

Milkjovitch in Pierrehumbert, 2005, p.31). Ce lien mère-enfant est constitué de

« comportements innés d’attachement dont la fonction est de réduire la distance, et d’établir

la proximité et le contact avec la mère. » (Montagner in Pierrehumbert, 2005, pp.22-23). Il se

construirait dans le but de générer une « sécurité affective » pour le nouveau-né (p.23). A

l’origine, les écrits sur la théorie de l’attachement ne s’intéressaient qu’à l’attachement

envers la mère (Jean Le Camus in Pierrehumbert, 2005, p.117) ; qu’en est-il donc de

l’attachement de l’enfant envers son père ?

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D’après les recherches d’une étude (Main & Weston, 1981) comparant les schémas

d’attachement entre les deux parents, Bowlby (2011) a déduit que les schémas

d’attachement qu’un enfant développe envers sa mère ne sont pas si différents que ceux

adoptés envers son père, et ces mêmes schémas peuvent varier d’un parent à l’autre (p.24).

En outre, le psychanalyste développe sa réflexion en soulignant que ce phénomène

découlerait du comportement maternel et paternel envers leur enfant :

Comme il a été montré que le schéma d’attachement à sa mère d’un enfant sain à la

naissance est le produit de la manière dont celle-ci le traite, il est plus probable que,

de la même façon, le schéma mis en place avec le père résulte de la même manière

dont celui-ci le traite. (ibid., 2011, p.24)

Par ailleurs, les actes symboliques effectués par les jeunes pères après la naissance

(couper le cordon ombilical, donner le bain au nouveau-né, etc.) participent vivement au

processus de paternité et favoriseraient le lien d’attachement. En effet, le fait de couper le

cordon ombilical tend à favoriser l’implication émotionnelle des pères envers leur nouveau-

né, ce qui soutiendrait la participation des pères ainsi que le concept d’ « empowerment »1

lors de la naissance (Brandao & Figueiredo, 2012, p.2730).

Alors que l’attachement se repose sur les mêmes bases que ce soit pour les mères ou pour

les pères, il semble que les rôles parentaux comportent quelques différences ; selon Nanzer

(2009), le rôle paternel dans la relation avec l’enfant serait bien distinct de celui de la mère ;

alors que les mères engageraient une relation fusionnelle avec leur enfant, les pères

pousseraient celui-ci à se tourner vers l’extérieur à travers différentes activités ludiques qui

auraient pour but de le stimuler et de l’orienter vers l’indépendance. Les pères assureraient

ainsi une forme d’équilibre au sein de la triade (pp.106-107).

Il est cependant difficile de généraliser les rôles des pères et des mères à toutes les

variations que constituent les types de famille.

V L’instinct paternel existe-t-il ?

Le concept d’instinct maternel (ou parental de manière générale) repose sur une

interrogation centrale de son origine innée ou acquise. Selon Garau (2005), les

psychanalystes n’attribueraient le concept d’ « instinct maternel» qu’aux espèces animales,

1 Le concept d’ « empowerment » se définit comme « un processus de développement et d’acquisition des

compétences. Selon ce processus, les gens gagnent la maîtrise de leur vie par la reconnaissance de leurs forces intrinsèques et le soutien de leurs capacités, et ils acquièrent un sentiment de contrôle sur leur vie par l’augmentation de leurs compétences. » (Lafrance & Maillhot, 2005, p.7).

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puisqu’il découlerait d’un savoir inné et non d’un apprentissage. À l’inverse, dans l’espèce

humaine, les mères se retrouveraient inévitablement confrontées à certaines étapes

d’apprentissage pour s’occuper de leur nouveau-né (soins, allaitement, etc.) (p.72).

Qu’en est-il de l’instinct paternel ? Il semble que certains hommes aient de la difficulté à

imaginer un tel concept, en partie parce que la paternité n’est pas forcément une évidence

pour les hommes au sein de la société :

Et si les hommes se sentent dépourvus d’« instinct paternel », peut-être est-ce

simplement parce qu’ils ne disposent pas comme les mères, d’une image transmise

de génération en génération par l’inconscient collectif, selon laquelle un homme

accompli est un homme père. (Garau, 2005, p.72)

En outre, on relève qu’au même titre que l’instinct maternel, l’instinct paternel n’existerait

pas, car il serait issu de l’apprentissage des « différents gestes capables de rassurer le tout

petit et qu’il [le père] adapte son rôle au fur et à mesure de l’évolution de l’enfant, afin de

donner tout son sens au terme "paterner" » (Dumas, cité par Garau, 2005, p.73).

Muldworf (1972) développe quant à lui la notion de « sentiment paternel » en soulignant que

celui-ci s’inscrirait dans un contexte d’apprentissage différent de celui de la mère : « Si le

"sentiment maternel" s’enracine sur une relation à deux, le "sentiment paternel" passe par

une relation à trois. » (p.82).

D’après les différents éléments ci-dessus, il semble que les jeunes parents auraient

respectivement les capacités similaires de « parentage » et que celles-ci passeraient par un

certain nombre de connaissances apprises et non innées.

A travers ce chapitre sur le processus de paternité, on se rend compte de l’impact de la

grossesse et de la naissance sur l’identité de l’homme et l’enjeu important d’accompagner

les futurs pères de manière personnalisée répondant à leurs besoins.

e. Contexte actuel des pères en périnatalité

Ce chapitre vise à présenter un aperçu de l’intégration des pères dans le milieu de la

périnatalité, et cela indépendamment de leurs sentiments et de leur vécu.

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I Le père dans la grossesse

Actuellement, il semble que les hommes peuvent participer aisément aux contrôles

obstétricaux avec leur partenaire ainsi qu’aux diverses échographies qui jalonnent la

grossesse. Leur participation serait la bienvenue notamment dans le fait de poser des

questions aux professionnel-le-s de la santé (Colonna-Cesari, 2012, p.146). De plus, selon

une enquête d’Audier, Blancho, Callamand, malavialle & Pérez (1999) auprès des

professionnel-le-s de la santé, les pères seraient également présents aux cours de PANP,

d’autant plus lorsque ceux-ci se déroulent en soirée et dès le huitième mois de gestation.

Les questions qu’ils poseraient lors de ces séances sont en majorité des questions

concrètes ou d’ordre pratique (in Marciano, pp.25-33).

L’une des méthodes de préparation favorisant l’intégration des pères lors de la grossesse est

l’haptonomie. Elle est définie par son créateur Frans Veldman comme une « science des

interactions et des relations affectives humaines » (Veldman, cité par Garau, 2005, p.60).

Elle est utilisée en obstétrique pour se préparer à la naissance, et se pratique à partir du 4ème

mois de grossesse (le fœtus a alors la possibilité de ressentir le lien affectif). Elle renforcerait

l’intégration des trois intervenants de la triade père-mère-enfant (Garau, 2005, p.60).

II Le père à l’accouchement

L’intégration des pères en salle d’accouchement a débuté dans les années 1970. Selon

Michel Odent (in Le Roy, 1996), cela aurait même commencé dès les années 1960. Les

sages-femmes, encouragées à cette époque par les mouvements féministes, auraient

permis aux pères d’accéder aux salles d’accouchement. Leur présence devient assez

rapidement une norme sociétale et culturelle, au point qu’à la fin des années 1980, elle serait

perçue par les pères comme une injonction. Dès lors, deux tâches essentielles sont

déléguées aux pères en salle d’accouchement : couper le cordon (geste symbolique

représentant la séparation de la mère et de l’enfant) et donner le premier bain au

nouveau-né (interprété comme un premier baptême de l’enfant). Les pères ont ensuite

l’honneur de pouvoir présenter leur enfant à l’entourage familial (Jacques, 2007, pp.151-

156).

Selon Audier & al. (1999), en France, il y aurait un très grand pourcentage de pères présents

en salle d’accouchement, bien que certaines origines seraient moins représentées

(notamment les pères maghrébins ou « gitans ») (in Marciano, pp.25-33).

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III Le père dans le post-partum

Dans le P-P, les pères rendraient généralement visite quotidiennement à leur partenaire et

seraient pour la plupart impliqués dans les soins au nouveau-né (Audier & al., 1999, in

Marciano, pp.25-33). Selon Quelvennec, Griffond, Blanquet, Vasselin & Bonnerue (1999), ils

seraient bien accueillis par les professionnel-le-s de la santé pour participer à ces soins.

Pourtant, les pères seraient parfois soumis au même régime que les autres visiteurs

concernant les horaires de visite, rendant alors difficiles les moments de découverte entre le

couple et leur bébé. Selon les mêmes auteur-e-s, les pères ne peuvent généralement pas

dormir avec leur partenaire à la maternité. Par ailleurs, le nom de famille du bébé (présent

sur le bracelet et le dossier de naissance) serait généralement le nom de famille porté par la

mère, indépendamment de l’état civil des parents (in Marciano, pp.35-39). Ces exemples

semblent montrer que l’intégration des pères dans la maternité n’est pas toujours facilitée.

Pour conclure, les pères seraient bien plus présents aux différentes étapes de la grossesse,

de l’accouchement et du P-P depuis les années 1960 et bien accueillis par les

professionnel-le-s de la santé. D’après Audier & al. (1999), « La place accordée aux pères

par les équipes constitue un élément absolument essentiel pour l’avenir. » (In Marciano,

pp.25-33). En effet, le regard des professionnel-le-s et le soutien qu’ils apportent aux pères

pourraient leur être d’une grande aide dans le contexte de la périnatalité.

f. Conclusion

Pour conclure ce cadre de référence, nous pouvons souligner que les thèmes de la

masculinité et de la paternité actuelle sont difficiles à traiter, puisqu’ils sont en constante

évolution dans la société. On remarque d’ailleurs que bien que certaines lignes directives

puissent être dégagées des différentes époques énoncées, actuellement c’est la diversité et

l’individualité qui semblent faire foi. Nous avons pu voir que la multitude de masculinités se

construit à travers des interactions sociales et, de manière générale, à travers le contexte

sociétal. En effet, l’évolution de la paternité à travers l’histoire montre bien à quel point

certains contextes sont propices aux changements identitaires se rapportant au concept du

genre. L’Église, l’apparition de lois juridiques, les révolutions et mouvements du peuple, les

courants de pensées de la Renaissance et l’évolution des sciences biomédicales ont influé

sur la paternité l’amenant à ce qu’elle est aujourd’hui. Nous avons également pu constater

qu’il existe une multitude de pères et différentes façons de prendre sa place et sa fonction

dans une famille et dans le contexte de la périnatalité. De même, la manière de faire face à

l’événement d’une grossesse et d’une naissance est propre à chacun et dépend d’éléments

multifactoriels (désir de grossesse, d’enfant, grossesse non planifiée, situation familiale et

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économique, etc.). On se rend compte que les étapes de ce processus ne sont pas toujours

faciles à traverser pour le couple et qu’un accompagnement serait important. Par ailleurs, la

présence des pères en périnatalité est de plus en plus courante à chaque étape du

processus de la naissance (contrôles de grossesse, cours de PANP, naissance, etc.), ce qui

permet aux professionnel-le-s, de pouvoir davantage interagir avec les futurs pères et de

dépister les situations à risque.

Dans le premier chapitre (voir supra A p.10), nous avons pu constater que certain-e-s

auteur-e-s ont notamment des avis très tranchés sur la présence des pères en salle

d’accouchement. D’un côté, celle-ci semble déranger, être la cause de divers troubles en

postnatal, et être liée à un mauvais vécu de cet événement. D’un autre côté, d’autres

auteur-e-s maintiennent que cette présence est bénéfique, tant pour la mère que la famille et

qu’il y a des possibilités d’améliorer les conditions d’intégration des pères en salle

d’accouchement afin de favoriser un bon vécu de cette expérience. Nous en venons donc au

cœur de notre problématique pour ce travail de Bachelor qui se ciblera sur les attentes et le

vécu des pères face à l’accouchement par voie basse [AVB] ainsi que sur

l’accompagnement que l’on peut leur apporter en tant que sage-femme. En voici la question

de recherche :

« La place des pères en salle de naissance : leurs attentes et leur vécu lors d’un

accouchement par voie basse. Quel accompagnement la sage-femme peut-elle leur

apporter ? »

De cette question principale ont découlé plusieurs sous-questions auxquelles nous espérons

pouvoir répondre suite à l’analyse de notre RdL :

a. Quels sont les attentes et les représentations des pères à propos de l’accouchement ?

b. Quel est le vécu des pères en salle d’accouchement ?

c. Quelles peuvent être les conséquences de l'expérience de la naissance chez les pères

dans le P-P ?

d. Comment les sages-femmes peuvent-elles apporter un accompagnement adapté aux

pères en salle d’accouchement ?

e. Quel est l’impact de l’APD sur le vécu des pères en salle d’accouchement ?

f. Y a-t-il une différence dans le vécu de l’accouchement entre les primipères et les

multipères ?

g. Quelle est l’influence des cours de PANP sur l’expérience des pères ?

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C. L’accompagnement des pères par les sages-

femmes : un questionnement éthique

D’une manière générale, le rôle des sages-femmes est de promouvoir la santé1 de la femme

et des familles. C’est pourquoi l’accompagnement des pères représente un enjeu éthique

important, comme illustré par la section genevoise de la Fédération Suisse des Sages-

femmes (2014) :

De par ses activités, la sage-femme offre une contribution importante à la promotion

de la santé de la mère, de l'enfant, et plus globalement de la famille en son entier.

Elle favorise un déroulement physiologique de la grossesse, de l'accouchement et du

post-partum et contribue ainsi à long terme au bien-être de toute la famille.

Dans le Code International de Déontologie des sages-femmes2, on retrouve deux articles qui

stipulent l’importance des sages-femmes dans ce contexte :

1) « Les sages-femmes sont reconnues pour leurs capacités à promouvoir la santé des

femmes tout au long de leur vie, de même auprès des familles et des autres

professionnels de la santé. »

2) « Les sages-femmes participent à l'élaboration et à la mise en œuvre de politiques de

santé visant la promotion de la santé des femmes et des familles qui

s'agrandissent. » (FSSF, 1994)

D’un point de vue clinique, l’éthique repose sur trois valeurs essentielles :

La bienfaisance (ou la non-malfaisance) : promouvoir les effets des soins médicaux

sur le bien-être (bio-psycho-social) d’une personne.

L’autonomie : respecter le choix libre et éclairé des patients, protéger les personnes

vulnérables.

1 La charte d’Ottawa (1986) relève que « La promotion de la santé a pour but de donner aux individus davantage

de maîtrise de leur propre santé et davantage de moyens de l'améliorer. Pour parvenir à un état de complet bien-être physique, mental et social, l'individu, ou le groupe, doit pouvoir identifier et réaliser ses ambitions, satisfaire ses besoins et évoluer avec son milieu ou s'y adapter. » (OMS Europe). 2 Le Code International de Déontologie des sages-femmes a pour objectif d’ « améliorer les normes et les critères

de prise en charge des femmes, des bébés et des familles dans le monde entier par le développement, l'éducation et l'utilisation appropriée des compétences de la sage-femme professionnelle. » (FSSF, 1994).

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La justice : permettre l’égalité en fournissant les ressources médicales aux personnes

de manière équitable.

(Communication personnelle, [polycopié], Gendre, mars 2013)

L’accompagnement des pères par les professionnel-le-s s’inscrit dans chacune de ces trois

valeurs, et on comprend que c’est une question éthique que de considérer que les

prestataires de soin des sages-femmes ne sont pas seulement les mères et leur nouveau-

né, mais également les pères.

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D. Méthodologie

a. Définitions utiles à la compréhension

I L’accouchement normal

L’accouchement normal est un AVB qui « n’est pas assisté par forceps, par ventouse

obstétricale ou par césarienne, […] » (The Society of Obstetricians and Gynaecologists of

Canada, 2008). L’OMS ajoute que « […] l'enfant naît spontanément en position céphalique

du sommet entre les 37e et 42e semaines de gestation.» (OMS, 1997, p.11).

Toutes les méthodes pharmacologiques et non pharmacologiques pour soulager la douleur

du travail sont admises dans la définition de l’accouchement normal, y compris l’APD.

II L’accouchement instrumenté

L’accouchement instrumenté est un AVB avec l’aide d’une ventouse obstétricale ou d’un

forceps pour extraire le fœtus (HUG, 2013). L’utilisation des instruments d’extraction se fait

uniquement à dilatation complète, avec une présentation engagée (Marpeau, 2010, p .469).

III L’accouchement par voie basse

L’AVB, terme que nous utilisons souvent dans ce travail, est donc un accouchement normal

ou instrumenté.

IV Analgésie péridurale :

« L'anesthésie péridurale est une anesthésie loco-régionale péri-médullaire. Elle est réalisée

par l’administration d’un anesthésique local dans l’espace péridural, en injection unique à

l’aiguille ou par des injections répétées au travers d’un cathéter. » (Pitte, 2009). Cette

technique permet d’anesthésier la partie inférieure de l'abdomen et les membres inférieurs.

Pour soulager les douleurs tout au long du travail, un cathéter est placé dans l’espace

péridural permettant d’injecter des doses d’anesthésiques locaux en continu (Marpeau,

2010, p.114).

b. Mots-clés en lien avec notre question de recherche

Pour la sélection des articles de notre RdL, nous avons tout d’abord défini les quatre champs

de recherche concernés par notre problématique (population étudiée, circonstances, issues,

interventions) afin d’en faire ressortir les mots-clés.

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Nous avons ensuite établi une recherche de MeSH terms1 à l’aide de l’outil HONselect ; nous

n’avons cependant trouvé que peu de MeSH terms associés à notre sujet. Nous avons donc

traduit les mots-clés que nous avions sélectionnés en anglais, et cela a été suffisant pour

rencontrer un nombre important d’articles liés à notre question de recherche.

Le tableau ci-dessous démontre ce processus :

Question de recherche

La place des pères en salle de naissance : leurs attentes et leur vécu lors d’un accouchement par voie basse. Quel accompagnement la sage-femme peut-elle leur apporter ?

Mots-clés MeSH Terms

Population étudiée

Pères, Primipères, Hommes Father(s), First time Father(s), Man (Men)

/

Circonstances Travail, Accouchement, Accouchement par voie basse, Naissance

Childbirth, Birth Labor, Delivery

Issues Expérience, Vécu, Attentes, Sentiments, Anxiété Experience, Expectations, Feelings

Anxiety

Interventions Sage-femme, Soutien Midwife, Support /

Nous n’avons pas retenu des mots-clés se référant précisément à l’AVB (par exemple,

« vaginal delivery » ou « normal delivery ») pour une raison que nous allons expliquer au

sein de ce chapitre (voir infra d. p.52).

c. Recherche des articles

I Bases de données

Les bases de données utilisées pour notre RdL sont les suivantes :

- MEDLINE via Pubmed (NCBI, 2014)

- MIDIRS (Midwifery Information and Resources Service, Wolter Kluwer Health, 2014)

- Cochrane Database of systematic reviews (Cochrane Collaboration, 2014)

- CINAHL (EBSCO, 2014)

- PsycINFO (Wolter Kluwer Health, 2014)

1 Les MeSH terms (Medical Subject Heading) constituent un vocabulaire d’indexation notamment utilisé dans la

base de données MEDLINE pour faciliter la recherche d’articles.

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L’utilisation de l’opérateur booléen « AND » nous a été utile pour notre recherche ; en

revanche, « OR » n’a pas été un outil efficace car les résultats de la recherche s’éloignaient

de notre problématique. Nous avons donc essayé plusieurs combinaisons différentes et

avons souvent rencontré les mêmes articles.

Nous avons dans un premier temps concentré nos recherches dans la base de données

MEDLINE via Pubmed, puis nous avons affiné nos recherches au sein des autres bases de

données. Dans ces dernières, les seuls articles intéressants pour notre question avaient déjà

été trouvés dans MEDLINE via Pubmed.

Recherche dans la base de données MEDLINE via Pubmed :

Mots-clés Champ de recherche Articles obtenus Articles retenus

Father AND Childbirth AND Experience All 115 5

Father AND Labor AND Experience All 272 0

First-time Father AND Birth AND Support

All 84 0

Father AND Childbirth AND Midwife All 106 0

Father AND Childbirth AND Expectations

All 34 0

Men AND Childbirth AND Experience All 83 0

Father AND Childbirth AND Anxiety All 44 0

Father AND Childbirth AND Feelings All 82 0

Father AND Delivery AND Experience All 130 0

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52

Recherche dans les autres bases de données :

II Screening des bibliographies

Notre recherche s’est également portée sur les bibliographies présentées au sein des

articles que nous avions déjà sélectionnés. Nous avons ainsi pu trouver une étude grâce à

cette méthode : l’étude n°2 a été trouvée dans la bibliographie de l’étude n°1 (voir infra f.

p.56).

d. Critères de sélection des articles

Nous avons sélectionné les huit articles de notre RdL selon nos critères d’inclusion et

d’exclusion en étudiant tout d’abord leur titre ; si celui-ci pouvait s’apparenter à notre sujet,

nous avons alors regardé son abstract et utilisé l’outil « rechercher » dans l’application

Adobe Acrobat Reader permettant de trouver rapidement certains termes dans le texte et de

vérifier l’adéquation avec nos critères d’inclusion et d’exclusion (exemples : pour le mode

d’accouchement : « caesarean », « vaginal », « forceps », « vacuum » ; pour l’APD :

« analgesia », « epidural »). Dans les cas où une incertitude persistait après cette recherche,

nous avons alors procédé à la lecture et l’analyse de l’article afin de déterminer si celle-ci

convenait pour notre RdL. Voici nos critères d’inclusion et d’exclusion :

Bases de données

Mots-clés Champ de recherche

Articles obtenus

Articles déjà trouvés dans MEDLINE

Articles retenus

MIDIRS Fathers AND Birth AND Experience AND Role

All 62 2 1

Cochrane Father AND Childbirth All 6 0 0

CINAHL Father AND Childbirth AND Experience

All 55 2 0

PsycINFO Father AND Childbirth AND Midwife

All 50 1 0

Screening des bibliographies (voir infra II p.52)

/ / / / 1

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1) Mode d’accouchement : Nous avons exclu les études qui incluaient les césariennes

électives et les césariennes d’urgence. A notre sens, le fait d’inclure ces deux modes

d’accouchement dans une étude qui évalue le vécu des pères représente un biais : en effet,

une césarienne élective nécessite une toute autre préparation pour le couple et l’expérience

que peuvent vivre les pères est bien différente que celle d’assister à un AVB. Cependant, il

semblerait que le taux d’expérience positive ou très positive chez les pères est identique

selon si leur partenaire a eu un AVB spontané ou une césarienne élective (Johansson,

Rubertsson, Radestad & Hildingsson, 2011).

La césarienne d’urgence, quant à elle, implique qu’il y ait un ou des éléments pathologiques

et une notion d’urgence (hypoxie fœtale, état maternel inquiétant, stagnation de la dilatation

ou de la présentation). Dans plusieurs études, les pères rapportent être très anxieux lors

d’une césarienne d’urgence (Yokote, 2007 ; Lindberg & Engström, 2013).

Après réflexion, nous avons choisi d’inclure les AVB instrumentés par forceps ou ventouse

obstétricale car peu d’études se concentrent uniquement sur les accouchements normaux.

En effet, sur les huit études retenues, seules quatre n’incluent que des AVB normaux. Dans

les quatre autres articles, trois ne le spécifient pas (ils ne parlent que d’AVB, sans distinction)

et, enfin, nous comprenons dans la dernière étude qu’une mère a eu un AVB par forceps

dans un extrait d’entretien. Nous avons pourtant pu voir dans plusieurs études que les

accouchements instrumentés sont associés à une expérience négative de la naissance pour

les pères (Hildingsson, Karlström & Nystedt, 2012 ; Chan & Paterson-Brown, 2002 ;

Johansson & al., 2011). Cela constitue donc une limite pour nos études retenues.

Lors de notre recherche d’articles dans les bases de données, nous n’avons pas pu utiliser

les mots-clés « normal delivery/birth », « spontaneous delivery/birth » et « vaginal

delivery/birth », car cela réduisait fortement le nombre d’études sortantes et la majorité

n’était pas ciblée sur notre sujet. Nous avons alors dû utiliser des mots-clés plus larges et

trier ensuite les résultats nous-même.

2) Champ étudié (grossesse, naissance, P-P) : Notre question portant spécifiquement sur les

moments du travail et de la naissance, nous avons exclu toutes les études dont les

recherches étaient ciblées sur la grossesse ou le P-P. Nous avons tout de même prêté

attention à garder des études dont la méthode incluait des questionnaires prénataux et

postnataux, afin de pouvoir répondre aux sous-questions portant sur les attentes et

représentations des pères vis-à-vis de l’accouchement et les conséquences de l’expérience

de la naissance dans le P-P.

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3) Lieu : Nos recherches se sont ciblées sur des études effectuées au sein d’un système

médical similaire à celui de la Suisse et où les pères sont intégrés dans le contexte de la

périnatalité depuis un certain nombre d’années. Certaines études que nous avons trouvées

et qui provenaient de certaines régions géographiques (notamment en Grèce, en Afrique du

Sud et au Népal) n’ont pas été retenues car le contexte de soin décrit au sein de ces études

nous semblait très différent du nôtre (pratique sage-femme différente, intégration des pères

dans la périnatalité très récente, etc.)

4) Population : Pour cette RdL, nous espérions tout d’abord cibler notre problématique sur

l’expérience des primipères en salle d’accouchement car une première expérience de la

naissance rapporterait plus de résultats « bruts », sans être influencés par des facteurs liés à

des expériences précédentes (par exemple, un vécu très positif d’une naissance précédente,

la satisfaction de l’accompagnement de l’équipe médicale, un antécédent d’accouchement

difficile ou un antécédent de mort in utero). Cependant, nous avons été confrontées à deux

éléments qui nous ont fait changer d’avis : tout d’abord, au moment de sélectionner nos

études, nous avons réalisé qu’il était important de cibler la problématique sur les AVB. Cela

a réduit drastiquement les études disponibles et nous a mis devant le fait que nous n’avions

pas suffisamment de matière si l’on incluait seulement les primipères. Simultanément, dans

nos lectures diverses, certain-e-s auteur-e-s s’interrogeaient sur la réelle différence entre le

vécu des primipères et celui des multipères : par exemple, le travail de master de Carbines

(2003) relève qu’un des primipères présent dans son échantillon a eu avec sa partenaire un

antécédent de mort in utéro à 21 SA, et qu’il avait assisté à cet accouchement. L’auteure se

demande alors si un tel antécédent aurait dû figurer dans ses critères d’exclusion, car il

pourrait influencer ses résultats. Elle conclut en disant que visiblement les critères d’éligibilité

d’un primipère sont ouverts à l’interprétation (p.44). Suite à cela, nous avons alors réalisé

que les pères, tous confondus, avaient chacun une histoire propre autour de la naissance qui

pouvait influencer leur vécu en salle de naissance : par exemple, un primipère peut avoir

vécu une interruption de grossesse tardive ou avoir déjà assisté à un accouchement

auparavant (quelqu’un de sa famille ou parce qu’il travaille dans le milieu des soins). À

l’inverse, un multipère pourrait ne jamais avoir assisté aux naissances de ses enfants ou

alors seulement à des naissances par césarienne. Il serait donc arbitraire de dire que les

primipères sont des pères « novices » et que les multipères sont des pères

« expérimentés ». De plus, certaines études montrent que la parité ne semble pas être un

facteur associé à la satisfaction de l’expérience de l’accouchement pour les hommes et les

femmes (Bélanger-Lévesque, Pasquier, Roy-Matton, Blouin & Pasquier, 2014 ; Salonen,

Kaunonen, Åstedt-Kurki, Järvenpää, Isoaho, & Tarkka, 2009).

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55

Comme second critère d’inclusion au niveau de la population, nous avons ouvert notre

champ de recherche aux couples, afin d’inclure d’autres perspectives aux résultats de cette

RdL, notamment lorsque ceux-ci faisaient l’objet d’une étude comparative entre le vécu du

père et le vécu de la mère ou d’une étude sur l’impact de la présence du père en salle

d’accouchement par rapport au vécu de la mère

5) Type d’étude : Nous avons ouvert nos critères de recherche à tous les types d’étude

(quantitatif, qualitatif, métasynthèse, méta-analyse, revue de la littérature) et nous avons

essayé de respecter un équilibre entre le nombre d’études qualitatives et quantitatives afin

de fournir de la profondeur aux résultats de cette RdL. Malheureusement, les RdL et les

métasynthèses que nous avons trouvées ne faisaient pas de distinction entre les modes

d’accouchement et comprenaient des césariennes. Nous ne les avons donc pas retenues.

6) Date de publication de l’étude : Nous avons tout d’abord pris en compte toutes les études,

quelque soit leur année d’acceptation ou de publication, et avons finalement réduit les

recherches aux études acceptées ou publiées entre 2000 et 2014, afin d’actualiser les

données sur notre problématique par rapport à d’autres travaux plus anciens déjà effectués

dans ce domaine.

e. Dimension éthique de notre démarche de recherche

Tout au long de notre processus de recherche, nous avons gardé à l’esprit que tous les

résultats étaient potentiellement pertinents pour notre question de recherche.

Nous avons adopté une position éthique en n’excluant aucune étude ni ses résultats, même

si elle représentait un point de vue différent du nôtre.

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f. Articles choisis pour la revue de la littérature

La méthode que nous avons utilisée a abouti à une sélection de huit études, dont voici le

tableau récapitulatif :

g. Limites de notre recherche

Nous avons dû consacrer un temps conséquent à trier les différents articles, car nous avons

volontairement renoncé à définir des critères de recherche trop spécifiques. En effet, nous

avons toujours choisi de prendre en compte tous les champs de recherche (« All »), et avons

rencontré beaucoup d’articles. Cependant, il nous a semblé important de traverser ce

processus afin de retenir d’autres articles pour le cadre de référence et la discussion. Il nous

Nom Type Population

1) Hildingsson, I., Cederlöf, L. & Widén, S. (2010). Fathers’ birth experience in relation to midwifery care. Women and birth, 24, 129-136

Quantitative 595 pères

2) Bäckström, C. & Hertfelt Wahn, E. (2009). Support during labour: first-time fathers’ descriptions of requested and received support during the birth of their child. Midwifery, 27, 67-73

Qualitative 10 pères

3) Premberg, Å., Carlsson, G., Hellström, A-L. & Berg, M. (2011). First-time fathers’ experiences of childbirth – A phenomenological study. Midwifery, 27, 848-853

Qualitative 11 pères

4) Kopff-Landas, A., Moreau, A., Séjourné, N. & Chabrol, H. (2008). Vécu de l’accouchement par le couple primipare : étude qualitative. Gynécologie Obstétrique & Fertilité, 36, 1101-1104

Qualitative 33 couples

5) Johnson, M-P. (2002b). An exploration of men’s experience and role at childbirth. The journal of men studies, 10(2), 165-182

Quantitative et qualitative

53 pères

6) Johnson, M-P. (2002a). The implications of unfulfilled expectations and perceived pressure to attend the birth on men’s stress levels following birth attendance: a longitudinal study. Journal of psychosomatic Obstetrics & Gynecology, 23, 173-182

Quantitative 53 pères

7) Moreau, A., Kopff-Landas, A., Séjourné, N. & Chabrol, H. (2008). Vécu de l’accouchement par le couple primipare : étude quantitative. Gynécologie Obstétrique & Fertilité, 37, 236-239

Quantitative 33 couples

8) Capogna, G., Camorcia, M. & Stirparo. (2006). Expectant fathers’ experience during labour with or without epidural analgesia International Journal of Obstetric Anesthesia, 16, 110-115

Quantitative 243 pères

Total de l’échantillon des pères : 1031 pères

(population réelle : 945 pères, car deux études utilisent le même échantillon : [4] et [7] ; [5] et [6]) Total de l’échantillon des mères : 66 mères

(population réelle : 33 mères)

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a d’ailleurs été facile de sélectionner les études grâce à la lecture de l’abstract et à nos

critères de sélection.

Par ailleurs, lors du screening des bibliographies de nos articles sélectionnés, nous avons

réalisé que nous avions déjà rencontré la plupart des études utilisées par les auteur-e-s.

Cela nous a confortées dans l’idée que nous avions plus ou moins effectué une revue

exhaustive de la littérature.

h. Mise à jour de notre revue de la littérature

Nous avons régulièrement actualisé notre recherche afin d’être à jour dans notre RdL ; le 30

mai 2014, nous avons rencontré une métasynthèse publiée en mai 2014 et potentiellement

intéressante pour notre sujet. Nous ne l’avons pas retenue car elle ne répondait pas à nos

critères d’inclusion (accouchement par césarienne inclus dans l’étude).

Notre dernière recherche de la littérature sur les diverses bases de données a été effectuée

le 16 juillet 2014.

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E. Analyse critique de la revue de la littérature

a. Tableaux descriptifs des études sélectionnées

Dans ce chapitre, nous allons présenter les huit études sélectionnées pour cette RdL sous

forme de tableaux descriptifs. Il s’ensuivra une présentation transversale de leurs résultats

pour enfin développer les biais et les limites de notre RdL.

Afin de faciliter la lecture des tableaux ci-dessous, il convient d’expliquer la manière dont

nous avons déterminé les points forts et les points faibles de nos études : nous avons repris

les sous-questions issues de la conclusion de notre cadre théorique (voir supra f. p.45) et

avons cherché à savoir si l’étude en question y répondait.

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Article 1 Objectifs Population Méthodologie Principaux résultats Thèmes explorés

Points forts / points faibles de l’étude

Hildingsson, I., Cederlöf, L. & Widén, S. (2010). Fathers’ birth experience in relation to midwifery care. Women and birth, 24, 129-136

Identifier la proportion de pères ayant vécu une expérience positive d’un AVB spontané. Explorer les facteurs de prise en soin de la sage-femme qui sont associés à une expérience positive.

Suède 595 pères (43% de primipères et 57% de multipères) dont les partenaires ont eu un accouchement normal.

Etude quantitative longitudinale Questionnaires deux mois après l’accouchement Echelle de Likert Comparaison entre la réalité perçue et l’importance subjective de plusieurs items.

82% des pères ont eu un vécu positif de la naissance contre 18% de vécu plutôt négatif. Trois facteurs déterminants dans le vécu positif de la naissance : 1) Le soutien de la sage-femme 2) La présence de la sage-femme 3) L’information donnée sur l’avancée du travail

Vécu : exploré Pratique sage-femme : exploré. Distinction entre primipères et multipères.

Attentes : pas exploré. Impact de l’APD : pas exploré.

Points forts : Étude récente. Échantillon large. Césarienne considérée comme un biais. Utilisation de plusieurs outils de mesure différents. Points faibles : Délai relativement long entre l’accouchement et les questionnaires (2 mois).

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Article 2 Objectifs Population Méthodologie Principaux résultats Thèmes explorés

Points forts / points faibles de

l’étude

Bäckström, C. & Hertfelt Wahn, E. (2009). Support during labour: first-time fathers’ descriptions of requested and received support during the birth of their child. Midwifery, 27, 67-73

Explorer la manière dont les pères décrivent le soutien qu’ils doivent apporter et le soutien reçu lors d’une naissance par voie basse spontanée.

Suède 10 pères (100% de primipères) dont les partenaires ont eu un accouchement normal.

Etude qualitative. Entretien individuel semi-dirigé en P-P.

Les pères ont envie d’être investis pour pouvoir être en connexion avec leur partenaire durant le travail. L’implication augmente lorsqu’ils reçoivent des informations sur l’avancée du travail et sur leur rôle pour aider leur partenaire selon les différents moments du travail et de l’accouchement. A l’inverse, ils se sentent davantage exclus, inutiles ou paniqués lorsqu’ils ne reçoivent pas ce genre d’information.

Vécu : exploré. Pratique sage-femme : exploré.

Attentes : pas exploré. Impact de l’APD : pas exploré.

Points forts : Étude récente. Résultats structurés. Points faibles : Résultats parfois imprécis. Limites culturelles et géographiques.

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Article 3 Objectifs Population Méthodologie Principaux résultats Thèmes explorés

Points forts / points faibles de l’étude

Premberg, Å., Carlsson, G., Hellström, A-L. & Berg, M. (2011). First-time fathers’ experiences of childbirth – A phenomenological study. Midwifery, 27, 848-853

Recenser les différentes expériences des primipères relatives à la naissance.

Suède 11 pères (100% de primipères) dont les partenaires ont accouché par voie basse (pas de distinction entre normal ou instrumenté).

Etude qualitative. Entretien 4 à 6 semaines après l’accouchement.

Actions sage-femme déterminantes : Rassurer le père sur le déroulement normal du travail. Dispenser des informations claires et répondre aux questions des pères. Favoriser la coopération pères/sages-femmes en proposant des tâches. Respecter et prendre en compte le rôle, les choix et les besoins des pères dans la prise en charge.

Vécu : exploré. Pratique sage-femme : exploré.

Attentes : peu exploré. Impact de l’APD : pas exploré.

Points forts : Etude récente. Clarté dans les résultats. Résultats variés qui amènent de la profondeur à la pratique sage-femme. Points faibles : Limites culturelles et géographiques.

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Article 4 Objectifs Population Méthodologie Principaux résultats Thèmes explorés Points forts / points faibles de l’étude

Kopff-Landas, A., Moreau, A., Séjourné, N. & Chabrol, H. (2008). Vécu de l’accouchement par le couple primipare : étude qualitative. Gynécologie Obstétrique & Fertilité, 36, 1101-1104

Appréhender le vécu de l’accouchement auprès des couples primipares.

France 33 couples (100% de primipares) dont les partenaires ont accouché par voie basse (AVB normal et instrumenté).

Etude qualitative et exploratoire. Entretiens semi-directifs en P-P.

La seule présence du père est perçue comme étant un soutien pour la mère. Les pères se sentent impuissants. Les cours de PANP sont un moyen de mieux appréhender l’accouchement.

Vécu : exploré. Apporte des résultats secondaires quant à l’impact de la présence des pères sur le vécu des mères.

Pratique sage-femme : peu exploré (uniquement le rapport au cours de PANP). Attentes : pas exploré. Impact de l’APD : pas exploré (30/33 femmes avec APD).

Points forts : Comparaison entre le vécu des pères et celui des mères. Existence d’une autre étude (quantitative) menée par les mêmes auteur-e-s, ce qui apporte de la complémentarité aux résultats de manière réciproque. Points faibles : Pas de limites relevées par les auteur-e-s. Peu de résultats. Biais éventuel en raison de la présence des deux parents lors des entretiens.

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Article 5 Objectifs Population Méthodologie Principaux résultats Thèmes explorés

Points forts / points faibles de l’étude

Johnson, M-P. (2002b). An exploration of men’s experience and role at childbirth. The journal of men studies, 10(2), 165-182

Explorer l’expérience des pères de la naissance en partant d’un sous-échantillon aléatoire.

Angleterre Cohorte de 53 pères (41,5% de primipères et 58,5% de multipères) dont les partenaires ont eu un accouchement normal.

Etude quantitative et qualitative. Questionnaires (Pregnancy Outcome Questionnaire) remplis dans les 60 heures après l’accouchement par l’échantillon total. Entretiens semi-structurés. Echantillon aléatoire de 20 pères pour conduire des entretiens semi-structurés.

78% des hommes présents à l’accouchement souhaiteraient assister à la naissance de leur prochain enfant. Le rôle perçu par les pères est celui de soutenir leur partenaire (70%) et de participer au processus d’attachement (17%). Certains pères n’ont pas été satisfaits du soutien qu’ils ont fourni. 57% des pères ont ressenti de la pression dans leur choix de participer à la naissance.

Attentes : exploré. Vécu : exploré. Liens entre attentes et vécu. Apporte des résultats sur le fait d’assister à la naissance. Présence d’un résultat qui distingue les primipères des multipères.

Pratique sage-femme : pas exploré.

Points forts : Plusieurs formes de résultats en raison du type d’étude (qualitative et quantitative : questionnaire et sous-échantillon qualitatif). Existence d’une autre étude (quantitative) du même auteur. Points faibles : Pas de limites relevées par l’auteur.

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Article 6 Objectifs Population Méthodologie Principaux résultats Thèmes explorés Points forts / points

faibles de l’étude

Johnson, M-P. (2002a). The implications of unfulfilled expectations and perceived pressure to attend the birth on men’s stress levels following birth attendance: a longitudinal study. Journal of psychosomatic Obstetrics & Gynecology, 23, 173-182

Comparer le stress perçu par les hommes durant la grossesse, durant l’accouchement et à 6 semaines P-P. Etudier les attentes et les rôles perçus par les hommes et évaluer si la réalisation de ces derniers peut influencer sur le niveau de stress perçu. Investiguer s’il existe une contrainte à devoir assister à l’accouchement et évaluer dans quelle mesure cela influence le stress perçu par les hommes.

Angleterre 53 pères (41,5% de primipères et 58,5% de multipères) dont les partenaires ont eu un accouchement normal.

Etude quantitative longitudinale. Questionnaire prénatal et postnatal (Pregnancy Engagement Questionnaire et Pregnancy Outcome Questionnaire). Echelle Impact of Event Scale [IES], 3x pendant la grossesse, 2x après la naissance.

Le stress perçu chez les pères durant la grossesse, l’accouchement et à 6 semaines P-P est élevé par rapport à la norme. Les scores les plus élevés de stress ont été mesurés au moment de l’accouchement. Ce stress perçu est particulièrement élevé chez les hommes qui ont eu l’impression de ne pas avoir pu combler les attentes qu’ils avaient projetées sur leur rôle, ou chez ceux qui ont ressenti une certaine pression pour être présent à la naissance.

Attentes : exploré (réponses précises sur le vécu de l’accouchement en lien avec le stress perçu et ses conséquences dans le P-P).

Pratique sage-femme : pas exploré. Impact de l’APD : pas exploré. Pas de distinction entre primipères et multipères.

Points forts : Questionnaire prénatal et postnatal. Mise en lien du vécu des pères avec le facteur stress : apporte de la profondeur aux résultats. Existence d’une autre étude (quantitative/qualitative) du même auteur. Points faibles : Echantillon limité pour une étude quantitative.

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65

Article 7 Objectifs Population Méthodologie Principaux résultats Thèmes explorés Points forts / points faibles

de l’étude

Moreau, A., Kopff-Landas, A., Séjourné, N. & Chabrol, H. (2008). Vécu de l’accouchement par le couple primipare : étude quantitative. Gynécologie Obstétrique & Fertilité, 37, 236-239

Examiner les similarités et les différences de l’expérience de l’accouchement chez les couples primipares ainsi que leur état émotionnel dans le P-P

France 33 couples (100% de primipares) dont les partenaires ont accouché par voie basse (accouchement normal et instrumenté).

Etude quantitative. Questionnaire individuel en P-P (adaptation du Wijma-Delivery Experience Questionnaire). Echelle EPDS.

Il existe chez les pères une corrélation positive entre le vécu de l’accouchement (travail, phase d’expulsion et les deux réunis) et l’état émotionnel en P-P. Les pères se sentent plus satisfaits, plus fiers, plus heureux, plus calmes et ressentent moins de souffrance que les mères. En revanche, ils se sentent plus seuls et moins utiles que les mères. Les mères évaluent le soutien et la participation des pères de manière significativement plus élevée que les pères eux-mêmes.

Vécu : exploré (résultats complémentaires aux autres études sur le vécu des pères en comparaison avec le vécu des mères). Apporte des résultats quant aux conséquences du vécu sur l’état émotionnel dans le P-P.

Vécu des pères (indépendamment des mères) : peu exploré. Attentes : pas exploré. Pratique sage-femme : pas exploré. Impact de l’APD : pas exploré (30/33 femmes avec APD).

Points forts : Comparaison entre le vécu des pères et celui des mères. Existence d’une autre étude (qualitative) menée par les mêmes auteurs. Lien entre vécu et risque DPP. Points faibles : Peu de résultats. Echantillon limité pour une étude quantitative.

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66

Article 8 Objectifs Population Méthodologie Principaux résultats

Thèmes explorés Points forts / points faibles de

l’étude

Capogna, G., Camorcia, M. & Stirparo. (2006). Expectant fathers’ experience during labour with or without epidural analgesia. International Journal of Obstetric Anesthesia, 16, 110-115

Evaluer l’influence de l’APD sur l’expérience des pères en salle de naissance.

Italie 243 pères (100% de primipères) dont les partenaires ont accouché par voie basse (pas de distinction entre accouchement normal et instrumenté).

Etude quantitative.

Deux questionnaires

prospectif /

rétrospectif entre 36

et 38 SA et à 1 jour

après la naissance.

Score d’anxiété STAI

(State-Trait Anxiety

Invetory).

Méthode comparative

entre :

Groupe 1 : 40 %

sans APD

Groupe 2 : 60% avec

APD

Groupe 1 sans APD : 1) Les pères se sont sentis inutiles et ont eu l’impression que leur présence gênait. Groupe 2 avec APD, qui a contribué à : 1) Augmenter le sentiment des pères d’avoir pu aider leur partenaire. 2) Augmenter l’implication des pères. 3) Diminuer le stress et l’anxiété des pères.

Vécu : exploré. Attentes : exploré (notion de « préparation »). Impact de l’APD : exploré.

Pratique sage-femme : pas exploré.

Points forts : Résultats très significatifs. Questionnaire prénatal et postnatal. Mise en lien du vécu avec le facteur péridurale : apporte de la profondeur aux résultats. Points faibles : L’étude ne mentionne pas le type de prise en charge dont a bénéficié le groupe sans APD. S’il n’y a pas eu d’accompagnement particulier, cela peut expliquer les résultats très contrastés entre le groupe sans APD et celui avec APD.

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67

b. Présentation des résultats

I La présence des pères en salle d’accouchement

1. Le sens qu’ils accordent à leur présence

Des études apportent des résultats quant au sens accordé par les pères à leur présence en

salle d’accouchement.

Selon les résultats de l’entretien postnatal de l’étude qualitative de Kopff-Landas, Moreau,

Séjourné & Chabrol (2008), la raison principale de la présence d’une grande majorité des

pères en salle d’accouchement est l’occasion d’assister à la naissance de leur enfant. La

seconde raison, évoquée par 57% des pères, est d’accompagner et de soutenir leur

partenaire. Finalement, 27 % sont curieux de « voir » un accouchement (le terme « voir » est

récurrent lors des entretiens). Par ailleurs, l’étude qualitative et quantitative de Johnson

(2002b) démontre qu’une petite minorité des pères accorde de l’importance à être présent à

la naissance pour amorcer le processus d’attachement entre le père et l’enfant.

Plusieurs couples recommanderaient aux hommes d’être présents en salle d’accouchement,

notamment parce que la notion d’ « être ensemble » à ce moment-là est importante pour eux

(Kopff-Landas & al., 2008).

En outre, 78% des pères qui ont assisté à la naissance assisteraient volontiers à la

naissance de leur prochain enfant (Johnson, 2002b).

2. La pression sociale perçue par les pères pour assister à la naissance

Les deux articles de Johnson (2002a, b) relèvent qu’une grande majorité des pères se sont

sentis contraints d’assister à l’accouchement (respectivement 61% et 57,1%).

Dans l’étude de Johnson (2002b), 54,2% de ces 57,1% estiment que la pression provient de

l’équipe médicale ; l’autre étude de Johnson (2002a) constate un résultat similaire (54%).

D’autres acteurs influençant la présence des pères en salle de naissance sont relevés par

Johnson (2002a) : la partenaire (25% des hommes l’ont reconnu), la famille (12,5%) et les

amis (8%).

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Par ailleurs, Kopff-Landas & al. (2008) ont interviewé les pères en présence des mères et

seulement trois d’entre eux ont mentionné des éléments pouvant faire comprendre qu’ils se

sont sentis obligés d’assister à la naissance.

Enfin, il a été soulevé dans l’étude de Johnson (2002a), que le niveau de stress (score de

l’échelle Impact of Event Scale [IES]) au P-P précoce (i.e moins de 48h après la naissance)

(p<0.0001) et à 6 semaines P-P (p<0.001) est plus élevé chez les hommes qui ont perçu une

pression de la part de leur entourage à assister à la naissance que chez ceux qui n’en ont

pas perçu.

3. L’impact de la présence des pères sur l’expérience des mères

L’étude de Kopff-Landas & al. (2008) apporte un nouvel angle de vision à notre recherche en

prenant en compte le vécu des femmes en salle d’accouchement, notamment du point de

vue de l’impact de la présence de leur partenaire : 36% des femmes ont exprimé que cette

présence avait été indispensable et importante pour elles. Une majorité des femmes a

également trouvé que leur partenaire avait été un soutien pour elles et que leur

comportement avait répondu à leurs attentes tout au long de l’accouchement. La plupart de

ces femmes pensent que c’était essentiellement dû au simple fait qu’il soit présent. Par

contre, pour 12%, ce n’est qu’au moment de l’expulsion que le comportement de leur

partenaire a répondu à leurs attentes.

II La perception des pères de leur rôle en salle

d’accouchement : attentes et réalités

Pour la partie qui suit, les résultats sont classés en deux groupes : les représentations du

rôle que les pères se font avant l’accouchement (attentes, souhaits, …) et la réalité du vécu

(rôles adoptés le jour de l’accouchement).

1. Les représentations du futur rôle des pères en salle d’accouchement

83% des pères espèrent avoir un rôle actif durant le travail (Johnson, 2002a). Les

questionnaires des deux études de Johnson (2002a et b) (l’un effectué en prénatal et l’autre

en postnatal) rapportent des résultats similaires : dans l’étude de Johnson (2002a), à la

question « D’après vous, quel sera votre rôle en salle d’accouchement ? » (Traduction libre,

p.178), 73,6% des pères ont répondu que leur rôle serait de soutenir leur partenaire. 15%

ont reporté que leur rôle serait de créer un lien avec leur enfant. Enfin, 11% n’ont pas su quel

serait leur rôle. Les niveaux de stress perçu entre ces 3 groupes de pères ont été comparés

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mais la différence n’est pas significative (Respectivement pour les trois groupes : p= 0,75/

0,56/ 0,71).

Dans le questionnaire postnatal de l’étude Johnson (2002b, qualitative et quantitative), à la

question « D’après vous, quel était votre rôle à la naissance ? » (Traduction libre, p.173),

70,7% ont cru que leur rôle était d’offrir un soutien à leur partenaire ; 17,1% ont supposé que

c’était pour aider à créer le lien avec l’enfant et 12,2% ont déclaré ne pas savoir pourquoi ils

étaient présents.

2. Les rôles adoptés par les pères en salle d’accouchement

L’étude de Capogna, Camorcia & Stirparo (2006) met en lien les expériences des pères avec

l’utilisation de l’APD : de manière générale, 97% des pères du groupe avec APD ont estimé

que leur présence en salle de naissance correspondait à ce qu’ils avaient imaginé en

prénatal alors que seulement 21,4% de ceux du groupe sans APD ont reporté cet avis

(p<0.0001).

Dans la même étude, les pères du groupe sans APD, ont estimé que leur présence avait été

superflue (p<0.0001), inutile (p=0.03), et moins utile (p<0.0001) que les pères du groupe

avec APD. Cependant, lors du questionnaire prénatal, les deux groupes avaient jugé de

manière équivalente l’importance de leur soutien et de leur présence auprès de leur

partenaire (p<0.0001).

2.1 Le soutien des pères envers leur partenaire durant le travail et

l’accouchement

Selon l’étude qualitative de Kopff-Landas & al. (2008), 18 pères ont adopté un comportement

apaisant envers leur partenaire, en particulier lors de la phase de travail. De plus, 22 pères

(66%) rapportent avoir été un soutien pour leur partenaire lors du travail et de

l’accouchement. Cependant, douze pères de ce groupe (54%) ont utilisé dans leurs

réponses des mots évoquant de l’incertitude, par exemple, « […] il me semble oui » (p.1103).

Le rôle de soutien est également rapporté par les pères dans l’étude qualitative de

Premberg, Carlsson, Hellström, & Berg (2011), et les résultats précisent les différentes

actions en lien avec ce soutien : masser, hydrater, donner des forces, rassurer, avoir un rôle

de « supporter » lorsque cela est nécessaire, et même soutenir physiquement (notamment

au moment l’expulsion).

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70

Le soutien physique lors de l’expulsion est également décrit par la moitié des pères comme

faisant partie de leur rôle (Kopff-Landas & al., 2008).

Cependant, la plupart des études montrent que les pères ont des sentiments négatifs

concernant le soutien qu’ils ont pu apporter. Dans l’étude quantitative de Johnson (2002a),

53,7% des pères pensent qu’ils n’ont pas été soutenants envers leur partenaire. L’autre

article de Johnson (2002b) relève également cela pour la plupart des pères, alors que 70,7%

avaient imaginé que leur rôle serait soutenant. Par ailleurs, cette même étude démontre que

12% des pères se sont sentis déroutés à cause de cela.

D’une manière générale, divers sentiments négatifs sont ressortis des études autant

qualitatives que quantitatives : 30% des pères se sont sentis inutiles (Kopff-Landas & al.,

2008). 18% se sont sentis impuissants. (Kopff-Landas & al., 2008). Enfin, 51% se sont

décrits comme ayant été passifs (Johnson, 2002a).

L’étude qualitative de Bäckström & Hertfelt Wahn (2009) révèle quant à elle que certains

pères se sont retrouvés dans une situation où ils ne savaient plus comment aider leur

partenaire durant la phase du travail. Ils se sont sentis paniqués, inutiles et désinvestis, et ils

déplorent n’avoir reçu aucun soutien de la part du personnel soignant. Cela a entravé leur

confiance envers les soignants. En outre, la même étude démontre qu’il est parfois difficile

pour les pères de savoir ce qu’ils peuvent faire pour aider leur partenaire. Dans le même

ordre d’idées, on retrouve dans l’étude quantitative de Johnson (2002a) que 56% des pères

ont eu le sentiment de ne pas avoir été à leur place.

Selon la même étude, le fait que les pères se sentent inutiles et ne comblent pas les attentes

qu’ils avaient projetées en lien avec leur rôle en salle d’accouchement augmente leur stress

(score IES plus élevé chez les pères qui pensent ne pas avoir été soutenant envers leur

partenaire comparé aux hommes qui ont l’impression d’avoir réussi dans ce rôle (p<0.05)).

Enfin, quelques résultats portent sur la différence de perception entre les pères et les

mères : l’étude qualitative de Kopff-Landas & al. (2008) montre que « cinq femmes ont

estimé le soutien du conjoint supérieurement à l’évaluation de celui-ci. » (p.1103). Le même

résultat apparaît dans l’étude quantitative de Moreau, Kopff-Landas, Séjourné & Chabrol

(2008) où les mères évaluent la participation et le soutien des pères de manière

significativement plus élevée que les pères eux-mêmes (p<0.001).

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71

2.2 Le rôle « protecteur » des pères envers leur partenaire

L’étude qualitative de Premberg & al. (2011) montre que les pères pensent qu’ils ont un rôle

de médiateur entre l’équipe médicale et leur partenaire dans le but de les protéger des

stimuli négatifs (en filtrant et en cachant les informations dispensées par les

professionnel-le-s). Dans la même étude, les pères ont ressenti le besoin de réprimer leurs

sentiments de frustration, d’irritation et d’anxiété pour ne pas inquiéter leur partenaire durant

le travail.

Une autre étude qualitative relève que les pères se sont parfois volontairement mis de côté

pour que la sage-femme puisse se concentrer sur la prise en soin de la partenaire et de

l’enfant (Bäckstrom & Hertfelt Wahn, 2009).

2.3 Les ressources pouvant aider les pères à définir leur rôle pendant

l’accouchement

i La communication avec la partenaire

L’étude de Bäckström & Hertfelt Wahn (2009) souligne le besoin des pères d’être aiguillés

dans leur rôle, autant par leur partenaire que par la sage-femme (voir infra 4. p.78). En effet,

ils se sont sentis encouragés et guidés lorsque leur partenaire leur disait quoi faire et

comment être plus actifs, plus soutenants auprès d’elle. De plus, les pères ont relevé que la

communication avec leur partenaire durant le travail était aidante.

ii Prendre modèle sur les sages-femmes

Dans la même étude, les pères se sont sentis davantage impliqués dans le processus de la

naissance lorsqu’ils pouvaient imiter la manière dont la sage-femme accompagnait la

femme.

iii La préparation à la naissance

Trois études s’intéressent notamment aux cours de PANP et évaluent si ceux-ci ont pu être

une aide pour les pères présents à l’accouchement. Kopff-Landas & al. (2008, étude

qualitative) nous rapportent que 54% des pères ont assisté à des cours de PANP. Sur cet

échantillon, 72% ont trouvé que cela leur avait été utile pendant le travail et l’accouchement,

notamment pour mieux appréhender les événements et l’accompagnement de leur

partenaire.

Selon Bäckström & Hertfelt Wahn (2009, étude qualitative), Les pères se sont sentis

rassurés et moins stressés lorsqu’ils se sont remémoré certaines informations reçues durant

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72

la grossesse (lecture diverses, discussion avec des amis, discussions avec une sage-

femme, discussion avec leur partenaire, cours de PANP) et cela a influencé leur implication

auprès de leur partenaire.

Enfin, Johnson (2002b, étude qualitative et quantitative) révèle que certains hommes ne se

sont pas sentis assez préparés pour l’expérience du travail et de l’accouchement, et ce

sentiment a été retrouvé tant chez les primipères que chez les multipères. Ils ont notamment

été pris au dépourvu face à la douleur de leur partenaire.

iv Les gestes symboliques : couper le cordon

Cinq hommes ont spontanément parlé du moment où ils ont coupé le cordon ombilical dans

l’entretien de l’étude Kopff-Landas & al. (2008). Par ailleurs, l’étude qualitative et quantitative

de Johnson (2002b) stipule que l’acte de couper le cordon ombilical est important pour les

pères. En effet, la majorité des pères qui ont coupé le cordon ombilical se sont sentis

impliqués dans la naissance de leur enfant de manière significative, et pour certains, c’est le

seul moment de l’accouchement où ils se sont sentis utiles.

Cependant, les pères ont éprouvé des émotions négatives lorsqu’ils se sont sentis contraints

de couper le cordon ombilical (Premberg & al., 2011, étude qualitative).

III Le vécu du travail et de l’expulsion

1. Le vécu émotionnel des pères

D’une manière générale, l’étude quantitative d’Hildingsson, Cederlöf & Widén, (2010) relève

que 82% des pères ont reporté avoir eu une expérience positive (positive ou très positive) de

l’accouchement, alors que 18% ont eu une expérience plutôt négative (négative, très

négative ou sentiments ambivalents).

Pendant le travail, les sentiments des pères varient entre la joie et le désespoir (notamment

face à la douleur de leur partenaire et du fait de ne pas pouvoir l’aider), et entre excitation et

anticipation (Premberg & al., 2011, étude qualitative).

Moreau & al. (2008) comparent l’expérience émotionnelle des pères et des mères en

étudiant des sentiments spécifiques durant l’accouchement : les pères se sentent plus

satisfaits (p<0.01), plus fiers (p<0.05), plus heureux (p<0.001), plus calmes (p<0.05) et

ressentent moins de souffrance (p<0.01) que leur partenaire. Cependant, ils se sentent plus

seuls (p<0.001) et moins utiles (p<0.001).

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73

L’étude a également comparé les sentiments d’anxiété, d’impatience, de contrôle et de peur

entre les pères et les mères mais il n’y avait pas de différence significative. (t de Student, p >

0.1).

Les sentiments négatifs que les pères ont ressenti lors du travail s’estompent par le

caractère bouleversant de la naissance et sont remplacés par des émotions variées et

difficiles à décrire (Premberg & al., 2011, étude qualitative). Par ailleurs, l’étude qualitative de

Kopff-Landas & al. (2008) révèle que le moment de la naissance est perçu comme un

moment de bonheur et de joie pour la majorité des parents. Cependant, l’étude quantitative

de Moreau & al. (2008) souligne qu’il n’y aurait pas de différence significative de vécu entre

la phase de travail et la phase d’expulsion (p>0.05). Les pères ont ressenti des émotions

très fortes au moment de la naissance, notamment face à la douleur de la partenaire, à la

vision de l’apparence physique du nouveau-né et à l’action de couper le cordon ombilical

(Johnson, 2002b, étude quantitative et qualitative). De plus, les pères se sont sentis pères

au moment de la naissance ; l’enfant devient réel, alors qu’avant, il représentait quelque

chose d’indéfini qui appartenait au futur (Premberg & al., 2011, étude qualitative).

Enfin, pour Moreau & al. (2008, étude qualitative), le vécu de l’accouchement (évalué en

trois temps : phase de travail, naissance et vécu total) influence de manière significative les

scores de l’échelle EPDS1 obtenus à 2-3 jours P-P, pour les pères (comme pour les mères).

(Corrélation de Pearson, p< 0,05).

1.1 Le stress des pères autour de l’accouchement et ses facteurs

associés

i Le stress autour de la naissance

L’étude quantitative de Johnson (2002a) utilise une échelle IES pour mesurer le stress perçu

par les pères en trois temps différents : durant la grossesse, durant le P-P précoce et à 6

semaines P-P. Ce niveau de stress perçu est calculé à l’aide des scores obtenus dans deux

catégories : les « pensées intrusives » (7 questions) et « l’évitement » (8 questions). Les

pensées intrusives sont des pensées involontaires qui s’imposent à notre esprit, ici relatives

à la grossesse et à la naissance ; il peut s’agir de pensées spontanées, d’images, de rêves,

d’émotions fortes ou de comportements répétitifs. L’évitement, quand à lui, est la façon dont

un individu évite de penser à un événement stressant : il peut s’agir de déni, de colère ou

1 L’Edinburgh Postnatal Depression Scale permet le dépistage de la dépression postnatale.

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d’inhibition. L’addition de ces deux catégories forme le score total de stress qui peut être

comparé à une norme de la population masculine présentant une bonne santé psychique

(moy. = 6,9 ; SD = 6,8) obtenue dans l’étude de Horowitz, Wilner & Alvaraz (1979). La norme

d’une population atteinte de stress post-traumatique atteint 35,3 (SD=22,6).

Cette étude démontre que les niveaux de stress relevés chez les pères sont

significativement plus hauts que la norme (rappel : moyenne de la norme IES=6,9) durant la

grossesse (moy. IES=15,8 ; SD=6.6 ; t=9.77 ; df=52 ; p<0,0001), lors du P-P précoce (moy.

IES=19,7 ; SD=7,1 ; t=13,1 ; df=52 ; p<0,0001) et à 6 semaines P-P (moy. IES=16,4 ;

SD=7,2 ; t=9,55 ; df=52 ; p<0,0001). L’étude ajoute que la différence entre ces trois

moyennes IES est significative (F(2,140)=56,5, p<0,0001). Elle constate donc que le niveau

de stress des pères est plus élevé dans le P-P précoce que durant la grossesse

(F(1,52)=162,8, p<0,0001), et qu’il diminue à 6 semaines P-P (F(1,52)=45,2, p < 0,0001).

Enfin, l’étude révèle que la catégorie des pensées intrusives – en comparaison avec la

catégorie de l’évitement – est l’élément qui influence le plus le niveau de stress total.

ii La présence des pères au moment de la naissance : un facteur causal

Dans la même étude, il s’avère que le niveau de stress est plus élevé chez les hommes

ayant été présents à la naissance de leur enfant (n=41) dans le P-P précoce (moy. : 22,0,

écart-type : 6,2) et à 6 semaines P-P (18,4 +/- 6,3) que chez ceux qui sont sortis de la salle

au moment de l’expulsion (n=12 ; moy. du P-P précoce = 11,7 +/- 2,7 et à 6 semaines P-P =

9,6+/- 6,0).

L’auteur a effectué une analyse de covariance (ANCOVA1) pour déterminer si le niveau de

stress durant la grossesse pouvait également être un facteur causal de ces niveaux de

stress relevés dans le P-P précoce : il semblerait que ce résultat soit significatif lui aussi

(F(1,50)=8,4, p=0, 01). Il y a donc deux facteurs influençant le stress du P-P précoce : le

niveau de stress durant la grossesse et la présence des pères au moment de la naissance.

L’analyse de covariance montre en effet que le fait d’avoir été présent à la naissance – tout

en prenant en compte ce facteur de stress durant la grossesse – augmente davantage le

stress dans le P-P précoce (F(1,50)=20,7, p<0,0001).

Les mêmes résultats apparaissent pour les niveaux de stress relevés à 6 semaines P-P ; les

niveaux de stress durant la grossesse (F(1,50)=8,4, p<0,01) et la présence des pères à la

1 ANCOVA est une méthode statistique permettant de tester la « significativité des facteurs de mesures répétées

univariées avec plus de deux niveaux » (Statsoft, 2013).

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75

naissance de leur enfant (F(1, 50)=20,7, p<0,0001) sont des facteurs influençant le stress à

6 semaines P-P.

iii La satisfaction de l’expérience globale : un facteur causal

L’étude de Capogna & al. (2006), quant à elle, a démontré une corrélation entre la

satisfaction de l’expérience de la naissance et le niveau d’anxiété perçu. Plus la satisfaction

de l’expérience est négative, plus l’anxiété est élevée (p<0.0001).

iv L’analgésie péridurale : un facteur causal

Dans la même étude, les pères du groupe sans APD ont montré des niveaux d’anxiété plus

élevés durant le travail que ceux du groupe avec APD (STAI score 75 vs 30, p<0.0001). Un

jour après la naissance de leur enfant, 99% des pères du groupe sans APD ont reporté de

hauts niveaux de stress alors que 94% de ceux du groupe avec APD ont reporté des

niveaux de stress moins élevés (p<0.0001).

v Le caractère inconnu de la naissance : un facteur causal

Selon Premberg & al. (2011), les pères ont éprouvé du stress dû au caractère inconnu de la

naissance et au fait qu’ils ne savaient pas comment ils allaient réagir et gérer la situation.

vi L’âge, le statut marital, le nombre d’enfant et le fait d’avoir été présent à une

naissance auparavant : des facteurs non significatifs

L’étude d’Hildingsson & al. (2010) compare les données démographiques de l’échantillon

(âge, statut marital, origine, niveau d’éducation) avec l’évaluation des pères du vécu de

l’expérience générale de la naissance ; les auteur-e-s n’ont pas trouvé de relation

significative entre les deux. Par ailleurs, dans l’étude de Johnson (2002a), l’auteur a effectué

une analyse de variance (ANOVA1) entre différentes données démographiques (l’âge, le

statut marital, le nombre d’enfants, le fait d’avoir été présent à une naissance auparavant,

etc.) et les niveaux de stress durant la grossesse, le P-P précoce et à 6 semaines précoces ;

ces facteurs n’induisent pas de différence significative.

2. La douleur

La notion de douleur est traitée dans l’étude qualitative et quantitative de Johnson (2002b);

on apprend que pour 56% des hommes, la douleur de la partenaire a été l’expérience la plus

bouleversante du travail, car ils n’ont pas été en mesure d’aider leur partenaire à gérer la

douleur ou de pouvoir la partager. La même idée est ressortie chez Kopff-Landas & al.

1 ANOVA est une méthode statistique visant « à tester les différences significatives entre les moyennes. »

(Statsoft, 2013).

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(2008), où 21% des pères ont ressenti de la souffrance liée au fait de voir leur partenaire

souffrir et de ne pas pouvoir la soulager. De manière plus précise, l’étude qualitative de

Premberg & al. (2011) relève que pour les pères, le fait de voir leur partenaire souffrir,

notamment durant le travail et lors des examens (palpations et touchers vaginaux), est une

expérience désagréable décrite comme un supplice. Les pères gèrent cela par la fuite (ou

l’envie de fuir). D’après la même étude, la manière dont les femmes vivent le travail et gèrent

la douleur influence l’expérience des pères de manière positive ou négative sur le sentiment

de stress.

3. L’analgésie péridurale

Parmi nos huit études sélectionnées, deux seulement font la relation entre l’expérience des

pères et l’utilisation de l’APD. Cependant, Kopff-Landas & al. (2008) ne relève que

brièvement ce sujet : quelques couples mettent en avant l’intérêt de l’APD et la

conseilleraient à de futurs parents.

L’étude quantitative Capogna & al. (2006) compare l’expérience de deux groupes de pères

dont la partenaire a bénéficié d’une APD et l’autre non ; plusieurs thèmes en sont ressortis :

100% des pères du groupe avec APD ont été satisfaits de l’expérience globale de la

naissance alors que 97% du groupe sans n’ont pas été satisfaits (p<0.0001).

96% des pères du groupe avec APD se sont sentis suffisamment préparés pour

assister à la naissance alors que 71,5% des pères du groupe sans APD ne se sont

pas sentis assez prêts (p<0.0001).

Dans le groupe avec APD, les pères ont estimé que leur présence avait été

nécessaire, utile et relaxante (p<0.0001). L’APD a contribué à renforcer l’implication

des pères (p<0.0001) et à diminuer le stress et l’anxiété (p<0.0001).

98% des pères du groupe avec APD et 77,5% des pères du groupe sans

souhaiteraient que leur partenaire reçoive l’APD lors d’une prochaine naissance

(p<0.0001).

93,5% des pères du groupe avec APD recommanderaient à d’autres pères d’assister

à la naissance alors que 78,9% des pères du groupe sans APD déconseilleraient aux

pères d’y assister (p<0.001).

Ces résultats montrent que l’APD influence de manière significative l’expérience de la

naissance.

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77

IV Représentations des pères vis-à-vis des sages-femmes

1. Introduction

Les pères trouvent que les sages-femmes leur ont apporté un sentiment de sécurité, ont

entretenu une relation proche avec le couple et les considérent comme possédant des

compétences humaines et professionnelles propres à leur métier (Premberg & al., 2011,

étude qualitative). Par ailleurs, les trois facteurs significatifs qui ont conduit à une expérience

positive de l’accouchement pour les pères sont le soutien (OR 4.0 ; 95% CI 2.0-8.1), la

présence continue de la sage-femme (OR 2.0 ; CI 1.1-3.9) et l’information dispensée sur

l’avancée du travail (OR 3.1 ; CI 1.6-5.8) (Hildingsson, & al., 2010).

Afin de mieux comprendre les résultats de l’étude quantitative de Hildingsson & al. (2010), il

convient d’expliquer que les auteur-e-s évaluent dans un premier temps la réalité perçue des

pères à propos de différents facteurs de prise en charge sage-femme, et dans un deuxième

temps, l’importance de ces éléments pour eux. Ceci amène à une estimation de la

satisfaction des pères quant à différents aspects de la prise en charge sage-femme.

2. Soutien des sages-femmes

Hildingsson & al. (2010, étude quantitative) relèvent que les pères ayant eu une expérience

positive de la naissance étaient significativement plus satisfaits du soutien de la sage-femme

(OR 4.0 ; CI 2.6-6.2), comparé aux pères ayant eu une expérience négative. Le soutien de la

sage-femme leur a apporté de la sécurité et a favorisé leur confiance en eux. Dans la même

étude, on trouve que les primipères ont été significativement plus satisfaits du soutien de la

sage-femme que les multipères (OR 4.0 ; CI 2.0-8.1, p<0.001). Les auteur-e-s relèvent

également que les pères ont évalué la réalité perçue du soutien de la sage-femme de

manière plus élevée que l’importance qu’ils accordaient pour ce facteur (+ 6.4% de

différence), ce qui veut dire qu’ils ont estimé le soutien meilleur que ce à quoi ils

s’attendaient. On retrouve également le même phénomène pour le facteur « intérêt de la

sage-femme envers les pères » (+3.6% de différence).

Les pères ont ressenti que certains comportements adoptés par les sages-femmes

(inattention, manque d’intérêt pour le couple, difficultés à gérer la situation), provoquaient un

sentiment d’inutilité, une perte de confiance envers les sages-femmes. Par conséquent, ils

se sont sentis moins soutenants envers leur partenaire (Backtröm & Hertfelt Wahn, 2009,

étude qualitative).

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3. Présence des sages-femmes

Les pères ayant eu une expérience positive de la naissance ont estimé être satisfaits de la

présence de la sage-femme comparé aux pères ayant eu une expérience négative (OR 3.4 ;

CI 2.1-5.3). La présence d’une sage-femme a favorisé leur intégration dans un processus

d’accompagnement de leur partenaire, et ils ont également pu avoir l’opportunité de poser

des questions sur l’avancée du travail (Hildingsson, & al., 2010, étude quantitative). Par

ailleurs, les pères décrivent que la simple présence physique d’une sage-femme dans la

salle d’accouchement leur a apporté du soutien. L’absence ponctuelle de la sage-femme n’a

pas altéré leur sentiment de sécurité lorsqu’ils avaient instauré une relation de confiance

avec celle-ci (Backtröm & Hertfelt Wahn, 2009, étude qualitative).

4. Informations dispensées aux pères

Les pères ayant eu une expérience positive de la naissance ont estimé être satisfaits de

l’information dispensée sur le travail, comparé aux pères ayant eu une expérience négative

(OR 4.1 ; CI 2.6-6.5). Ce facteur de prise en soin était d’autant plus significatif pour les

multipères (OR 3.1 ; CI 1.6-5.8). L’information leur a permis de ressentir un sentiment de

contrôle (Hildingsson & al. 2010, étude quantitative). La même étude relève par ailleurs que

le plus grand écart entre la réalité perçue et l’importance subjective est le facteur

« information concernant l’avancée du travail » (-8.6 % de différence) ; cela signifie que les

pères ont estimé l’information dispensée de manière plus élevée que ce qu’ils ont reçu en

réalité.

D’après l’étude qualitative de Bäckström & Hertfelt Wahn (2009), les pères ont trouvé

important que les sages-femmes leur transmettent spontanément des informations

concernant le travail ; ils souhaitent également pouvoir poser des questions et obtenir des

réponses compréhensibles et honnêtes. Selon la même étude, pour les pères, le fait de ne

pas recevoir de réponses à leurs questions a entraîné une perte de confiance envers

l’équipe médicale, un sentiment d’irritation, et les a dissuadés de s’enquérir de plus

d’informations sur le travail.

Enfin, lorsque les sages-femmes répondaient d’une manière perçue par les pères comme

étant « exagérément positive » (Traduction libre, p.850) à leurs questions, cela a créé un

sentiment de perte de confiance et de non reconnaissance de leur anxiété ; ils ont perçu cela

comme une tentative de les calmer, plus que de répondre à leurs questions. De plus, lorsque

les professionnel-le-s communiquent entre eux, les pères tentent d’interpréter leur dialogue

et leur gestuelle, et cela entraîne de l’anxiété (Premberg & al., 2011, étude qualitative).

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5. Intégration des pères par les sages-femmes

Les pères trouvent important d’être perçus par les sages-femmes comme étant une

personne unique ayant des besoins individuels, et comme étant un membre à part entière au

sein du couple donnant naissance à un enfant (en l’invitant à participer aux conversations,

en prenant en considération son opinion, en répondant à ses besoins individuels, en lui

montrant comment faire un massage et comment aider sa partenaire à respirer) ; le fait qu’ils

soient perçus de cette manière par l’équipe médicale renforce leur sentiment d’implication et

leur investissement auprès de leur partenaire (Bäckström & Hertfelt Wahn, 2009, étude

qualitative). On retrouve les mêmes notions dans l’étude qualitative de Premberg & al.,

2011 : le fait que les sages-femmes aient inclus les pères dans la prise en soin de leur

partenaire (tâches précises) crée un sentiment d’implication et de sécurité. Cela a entraîné

une reconnaissance de leur présence, de leurs efforts, et de la souffrance qu’ils ressentent.

Cependant, deux autres études amènent des résultats concernant des sentiments plus

négatifs ; en effet, Johnson (2002b, étude qualitative et quantitative) souligne que certains

hommes ont ressenti de l’hostilité de la part de l’équipe des sages-femmes, et 56,1% ne se

sont pas sentis à leur place du point de vue de l’équipe médicale. De plus, Hildingsson & al.

(2010) ont constaté que les pères avaient noté l’importance subjective de leur intégration en

salle d’accouchement de manière plus élevée que la réalité perçue (ce qu’on leur a proposé)

(-5.8% de différence) ; cela veut dire que la volonté des pères à participer aux soins était

plus grande que les opportunités qui leur ont été offertes en réalité (selon leur perception).

Cependant, les pères ont noté la réalité perçue de manière plus élevée que l’importance

subjective pour le facteur « opportunités offertes pour participer aux prises de décision »

(+1.1%). Enfin, Premberg & al. (2011) relèvent dans une étude qualitative que les pères ont

éprouvé un sentiment négatif lorsque les sages-femmes n’ont pas pris leur rôle

d’accompagnant en considération et lorsqu’elles ont négligé leurs besoins de dormir et de

manger.

6. Gestion de la situation par les sages-femmes

L’étude qualitative de Premberg & al. (2011) apporte un résultat sur la perception des pères

de la gestion de la situation par les sages-femmes ; en effet, lorsque les pères identifiaient

un comportement calme chez les sages-femmes dans toute situation et que celles-ci

répondaient à leurs questions répétées, ils se sentaient rassurés.

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80

V Synthèse des résultats en fonction de la satisfaction des

pères

Voici un tableau qui met en lien les principaux résultats avec la satisfaction et le stress

perçus par les pères :

+ de satisfaction

– de stress

Pas d’incidence sur la

satisfaction et sur le stress

– de satisfaction

+ de stress

- APD

- Soutien de la sage-femme (surtout pour

les primipères)

- Présence continue de la sage-femme

- Informations fournies (surtout pour les

multipères)

- Intérêt de la sage-femme envers le père

- Préparation préalable

- Données démographiques

- Nombre d’enfants

- Présence préalable

- Présence à la naissance

- Stress pendant la grossesse

- Caractère inconnu de la situation

- Douleur de la femme

- Réaction négative de la femme

face à la douleur

c. Biais et limites de la revue de la littérature

I Biais et limites relatifs à l’échantillon

D’une manière générale, une première limite à notre RdL est que son échantillon total est

limité (1031 pères), et par conséquent difficilement généralisable. Ceci est dû au fait qu’il

était essentiel pour notre sujet d’inclure des études qualitatives qui comportent un échantillon

plus petit que les études quantitatives.

Par ailleurs, il se pourrait qu’un biais de sélection soit fait de manière générale : les raisons

qui poussent un individu à accepter ou à refuser de participer à ce type d’étude pourraient

influencer les résultats. En effet, Hildingsson & al. (2010) relèvent que leurs résultats ne sont

pas généralisables dû à l’incapacité d’analyser l’expérience des pères qui ont refusé de

participer. Premberg & al. (2011) pensent, quant à eux, qu’il est possible que les pères

acceptant de participer à ce type d’étude soient déjà des hommes particulièrement engagés

dans la grossesse de leur partenaire. Nous pensons alors qu’il se peut qu’ils soient plus

informés, peut être mieux préparés et donc moins sujets à vivre de mauvaises expériences

liées à l’accouchement de leur partenaire.

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Ensuite, deux de nos études quantitatives relèvent que leur échantillon est limité (Johnson,

2002a et Moreau & al., 2008). Par ailleurs, l’étude qualitative de Premberg & al. (2011)

ajoute que leur échantillon n’est pas généralisable à tous les primipères.

Enfin, nous avons également pu remarquer que les deux études de Johnson (2002a et b) ont

très probablement été conduites sur la base du même échantillon (même auteur, même

nombre de participant, même lieu et méthode de recrutement, même année de publication et

quelques résultats similaires). Pour une RdL, il aurait été préférable d’avoir deux études

différentes, représentant alors deux échantillons différents, mais nous avons estimé que cela

pouvait aussi être un atout pour notre problématique : en effet, les études qualitatives et

quantitatives ont toutes deux certaines limites pour répondre à notre sujet1 et le fait de

soumettre le même échantillon aux deux types d’études peut permettre d’apporter une vision

plus globale de la réalité des pères et d’approfondir les résultats obtenus.

Nous avons eu la même réflexion pour les études de Kopff-Landas & al. (2008) et Moreau &

al. (2008) qui indiquent qu’il s’agit en fait de la même recherche, basée sur le même

échantillon mais divisée en deux parties, l’une qualitative et l’autre quantitative.

1. Région

Nous avons relevés plusieurs biais et limites concernant le lieu de la recherche et la culture

des participants dans certaines de nos études. En effet, selon les auteur-e-s de Bäckström &

Hertfelt Wahn (2009), l’étude a été faite dans une région géographique limitée. Premberg &

al. (2011), rapportent quant à eux que la place du père en périnatalité peut être influencée

par la culture suédoise et que leurs résultats sont donc difficilement comparables à d’autres

régions.

Nous avons également remarqué que la population de l’étude d’Hildingsson & al. (2010) était

issue d’un comté dans le nord de la Suède comportant 244'000 habitants. Nous pourrions

donc aussi penser que leurs résultats sont difficilement généralisables.

Enfin, dans l’étude de Capogna & al. (2006), nous ne savons pas dans quelle région l’étude

a été menée. Les auteur-e-s semblent parler d’un hôpital précis dans leur méthodologie et

1 Les études qualitatives ont généralement un nombre limité de participants, ce qui amène à des résultats peu représentatifs

mais apportent des réponses spontanées, plus étendues et plus proches de ce que pensent réellement les participants. A

l’inverse, les études quantitatives ont généralement des échantillons plus larges et plus représentatifs mais amènent des

réponses suscitées dans un questionnaire et qui ne représentent pas toujours le sens que les participants donnent à leur

expérience (Couvreur & Lehuede, 2002).

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nous avons donc déduit qu’il s’agissait de l’hôpital dans lequel travaillent les auteur-e-s de la

recherche (Département d’anesthésiologie, Città di Roma Hospital, Roma, Italy).

2. Population

Dans l’étude d’Hildingsson & al. (2010), les données démographiques sont majoritairement

identiques (statut marital, niveau d’études, origine), et cela laisse penser que les résultats

pourraient être difficilement généralisables. Nous avons fait le même constat pour l’étude de

Premberg & al. (2011) où la grande majorité de l’échantillon est d’origine suédoise.

II Biais et limites relatifs à la méthode

D’une manière générale, nous avons remarqué qu’il était impossible de prendre en compte

toutes les variables qui pourraient influencer le vécu des pères à l’accouchement dans une

seule étude (âge du père, primipère ou multipère, expériences précédentes, participation à

un cours de PANP, recours à l’APD par la partenaire, éléments de complication ou de

stress pour le couple, satisfaction de la partenaire, satisfaction de l’accompagnement de la

sage-femme, adaptation néonatale, etc.). Il est évident que l’on ne peut pas s’attendre à ce

que chaque étude prenne en compte autant de facteurs. Cependant, il nous semble que

certains éléments sont plus importants que d’autres et représentent un biais s’ils ne sont pas

pris en compte dans une étude ; nous pensons, par exemple, que le fait d’avoir suivi des

cours de PANP peut influencer le vécu des pères, et plusieurs études soulèvent ce point

(Kopff-Landas & al., 2008, Bäckström & Hertfelt Wahn, 2009, Capogna & al., 2006, Johnson,

2002b). Nous pensons également que les pères dont la partenaire a eu une APD durant le

travail peuvent avoir une toute autre expérience que s’il n’y a pas d’APD. En effet, la moitié

de nos études mettent en avant qu’un des éléments se rapportant à un mauvais vécu pour le

père est le fait d’être témoin de la douleur de leur partenaire (Johnson, 2002b ; Kopff-Landas

& al., 2008 ; Premberg & al., 2011 ; Capogna & al., 2006).

Dès lors, nous avons remarqué que la majorité de nos huit études ne prenait pas en compte

cet élément : dans l’étude de Premberg & al. (2011), nous ne savons pas si les partenaires

des participants avaient une APD ou non et il n’y a donc pas de résultats sur l’impact de

celle-ci sur le vécu du père. Il en va de même dans les deux études de Johnson (2002a et

b), dans celle de Bäckström & Hertfelt Wahn (2009) et dans celle de Hildingsson & al.

(2010). Pourtant dans cette dernière étude, nous avons pu remarquer que les auteur-e-s

avaient essayé de prendre en compte une multitude de variables différentes afin d’évaluer le

vécu des pères en salle d’accouchement. Enfin, dans les deux études françaises de Kopff

Landas et Moreau & al. (2008 ; 2008), basées sur le même échantillon, nous apprenons que

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30 femmes sur 33 ont reçu une APD. Cependant, il n’y a pas de résultats en lien avec son

impact sur le vécu des pères. Cela constitue donc un biais pour les résutlats de notre RdL.

D’autres biais et limites ont été relevés dans nos études ; Hildingsson & al. (2010) pensent

que les études quantitatives pour ce genre de sujet pourraient représenter une limite quant

aux résultats trouvés, dû au fait que les questions posées n’ont que quelques réponses à

choix. Les auteur-e-s relèvent également comme limite de leur étude qu’ils n’ont pas eu

accès aux dossiers de naissance et ont dû se fier aux dires des pères dans leur

questionnaire, notamment par rapport au mode d’accouchement de leur partenaire.

Cependant, il est précisé que l’un des facteurs d’inclusion de l’étude est que leurs

participants maîtrisent la langue suédoise ; nous pouvons donc penser qu’ils ont compris la

question et que les données sont fiables. Nous avons également relevé pour cette étude que

les questionnaires avait été remplis deux mois après la naissance. Il est possible que dans

certains cas, les pères aient déjà oublié certains détails de l’accouchement.

Finalement, nous avons relevé dans l’étude de Kopff-Landas & al. (2008) que les entretiens

avaient été menés en présence des mères. Or, on peut supposer que dans certains cas, les

pères n’osent pas forcément parler de l’accouchement de la même manière lorsqu’ils sont en

compagnie de leur partenaire. De plus, ces entretiens ont duré en moyenne 17 minutes pour

chaque couple (de 6 à 48 minutes). Cela représente, à notre sens, peu de temps pour se

faire une idée globale du vécu de deux personnes.

III Biais et limites relatifs à la date de publication

Nous avions spécifié dans nos critères d’inclusion que nous ne prenions que des études

acceptées ou publiés après l’année 2000. Nous avons donc retenu les deux études de

Johnson datant de 2002 (a et b), mais nous nous rendons bien compte que celles-ci nous

amènent des résultats qui ont été obtenus il y a plus de dix ans et que cela n’est pas

forcément représentatif de notre population actuelle.

IV Biais et limites relatifs aux résultats

D’une manière générale, les études qualitatives représentent un échantillon limité, et les

résultats sont donc difficilement généralisables (voir supra I p.80).

Les parties des résultats des études Kopff-landas & al. (2008) et Moreau & al. (2008) nous

semblent respectivement restreintes ; nous avons toutefois évalué que les résultats des deux

études étaient complémentaires et qu’elles formaient un recueil complet de résultats

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lorsqu’elles étaient mises ensemble. Nous pensons que les auteur-e-s ont séparé les deux

études par mesure de clarté pour les lecteurs.

Dans l’étude de Johnson (2002a), la présentation des résultats nous a semblé difficile à

comprendre et par conséquent, l’analyse de ceux-ci a été un processus long et complexe.

Johnson (2002b) ne mentionne pas de limites au sein de son étude et cela réduit, à notre

sens, la pertinence des résultats.

Par ailleurs, nous avons remarqué que les résultats des deux études de Johnson (2002a, b)

sont souvent très proches (sauf pour les résultats concernant le stress qui est un facteur

uniquement traité par Johnson, 2002a) ; or, l’auteur ne précise pas si les résultats provenant

des deux études sont complémentaires ou s’ils sont identiques et utilisés dans les deux

études. Malgré une tentative de notre part de contacter l’auteur, la question n’a pas pu être

élucidée. Cela représente donc une limite pour notre RdL bien que les résultats qui se

répètent ne concernent toutefois pas la majorité.

Enfin, les auteur-e-s de l’étude Capogna & al. (2008), ont comparé les résultats du

questionnaire anténatal (entre 36 et 38 SA, alors que l’accouchement n’avait pas encore eu

lieu, et qu’il n’y a donc pas encore de distinction avec ou sans APD) avec ceux du

questionnaire postnatal (où les deux groupes avec et sans APD sont alors distingués) ;

ils/elles se sont rendus compte que les pères qui avaient rapporté en prénatal un sentiment

de manque de préparation pour assister à l’accouchement de leur partenaire, se trouvent

être les pères du groupe sans APD en postnatal. L’étude relève alors une potentielle

influence culturelle sur le choix de recevoir une APD et sur le fait de se sentir prêt ou non.

Cela peut représenter à notre sens un biais quant aux résultats, qui par ailleurs nous ont

semblé particulièrement contrastés.

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V Biais et limites relatifs à nos critères d’inclusion et

d’exclusion

Voici un tableau récapitulatif des études en lien avec nos critères d’inclusion :

1. Mode d’accouchement par voie basse

Nous pouvons imaginer que le fait d’avoir inclus des AVB instrumentés dans notre RdL

pourrait être considéré comme un biais, notamment au vu des résultats que nous avons pu

trouver dans d’autres études mentionnant que les accouchements instrumentés sont

associés à une expérience négative de la naissance pour les pères (Hildingsson, Karlström

& Nystedt, 2012 ; Chan & Paterson-Brown, 2002 ; Johansson & al., 2011). Or, seulement

quatre études retenues n’incluent que les AVB normaux et c’était donc pour nous un biais

inévitable que de retenir aussi celles qui incluent les AVB instrumentés ou celles qui ne le

précisent pas. Cependant, la naissance en elle-même ne représente qu’une phase de

l’expérience vécue des pères et il semblerait que les résultats de notre RdL portent autant

sur la phase de travail que sur la phase de l’accouchement.

Attentes Vécu

Pratique sage-

femme APD

Mode

d’AVB

Hildingsson & al.

(2010) - + + - Normal

Bäckström, & Hertfelt Wahn (2009)

- + + - Normal

Premberg & al. (2011)

Peu

exploré + + - Inconnu

Kopff-Landas & al. (2008) - + Peu exploré -

Normal et

Instrumenté

Johnson, M-P. (2002b)

+ + - - Normal

Johnson, M-P. (2002a) + + - - Normal

Moreau & al. (2008) -

Peu exploré indépendamment des

mères + - Inconnu

Capogna & al.

(2006) + + - + Inconnu

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2. Attentes

D’une manière générale, les études retenues dans la RdL n’explorent pas de manière

exhaustive les attentes des pères en lien avec l’accouchement ; en effet, seulement trois

études s’intéressent à cette question.

Nous pensons que le fait d’avoir exclu la césarienne dans notre RdL a pu induire un manque

de résultats quant aux attentes des pères, car la majorité des études excluant certains

modes d’accouchement (césarienne élective, d’urgence, ou autres) ont pu sélectionner leur

échantillon seulement après la naissance. Elles n’effectuent donc pas de questionnaire

prénatal visant à évaluer les attentes des pères par rapport au jour de l’accouchement.

En ne retenant pas les études qui incluaient tous les modes d’accouchements, nous avons

donc écarté une majorité des études qui comportaient dans leur méthode un questionnaire

ou un entretien prénatal.

3. Vécu

Le thème du vécu est exploré dans la plupart des études sélectionnées, sauf dans l’étude de

Moreau & al. (2008) où le vécu des pères est peu exploré indépendamment de celui des

mères.

4. Pratique sage-femme

On peut remarquer que seulement la moitié de la RdL explore l’impact de la pratique sage-

femme sur le vécu des pères ; cependant, l’étude quantitative de Hildingsson & al. (2010)

concentre son objectif sur les facteurs de prise en charge sage-femme et cela représente un

avantage pour les conclusions que nous pouvons apporter à notre question de recherche.

VI Validation éthique

La dimension éthique a été relevée dans la plupart des études ; elles ont toutes respecté la

confidentialité. Cependant, certain-e-s auteur-e-s ne mentionnent pas l’acceptation de leur

étude par un comité d’éthique, et cela représente une limite pour notre RdL.

Voici un récapitulatif des huit études de notre RdL en lien avec les trois critères éthiques que

nous avons établi :

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Comité d’éthique Consentement Confidentialité

Hildingsson & al. (2010) ok ok ok

Bäckström, & Hertfelt Wahn (2009)

ok ok ok

Premberg & al. (2011)

ok Pas de référence dans

le texte ok

Kopff-Landas & al. (2008)

Pas de référence dans le

texte ok ok

Johnson, M-P. (2002b)

Pas de référence dans le

texte

Pas de référence dans

le texte ok

Johnson, M-P. (2002a)

ok ok ok

Moreau & al. (2008)

Pas de référence dans le

texte

Pas de référence dans

le texte ok

Capogna & al. (2006)

ok ok ok

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F. Discussion

Nous avons choisi de structurer le développement de la discussion à partir de notre question

de recherche centrale ainsi que des sous-questions qui en ont découlé.

a. Quelles sont les attentes et représentations des pères à

propos de l’accouchement ?

Nous avons rencontré peu de résultats sur les attentes des pères en lien avec

l’accouchement à venir ; notre RdL comporte cependant des résultats concernant les

attentes que les pères projettent sur leurs rôles à l’accouchement. On relève que la majorité

des pères espère avoir un rôle actif et que le sens de leur présence varie pour certains entre

l’accompagnement, le soutien de leur partenaire et la création d’un lien avec leur enfant.

Pour d’autres pères, la raison de leur présence en salle d’accouchement ne leur est pas

évidente. Somers-Smith (1998) et Gungor & Kizilkaya Beji (2007) relèvent également que les

pères s’attendent à adopter un rôle de soutien envers leur partenaire au moment de

l’accouchement.

Les résultats de notre RdL peuvent être mis en lien avec les attentes que les futures mères

projettent sur la participation de leur partenaire au moment de l’accouchement ; l’étude de

Somers-Smith (1998) relève que les futures mères s’attendent à ce que leur partenaire les

soutiennent par des gestes (passer une serviette humide, essuyer le front, tenir la main),

mais surtout psychologiquement, par des expressions d’empathie, d’affection et d’attention

envers elle. Par ailleurs, les futures mères pensent que leur partenaire va réussir à maintenir

un rôle de soutien dans la mesure où le travail se déroule de manière harmonieuse (p.103) ;

on comprend par cela que les futures mères ont confiance en leur partenaire lors de

situations physiologiques. Les attentes des pères en lien avec l’équipe médicale sont

développées ultérieurement (voir infra d. p.94).

b. Quel est le vécu des pères en salle d’accouchement ?

I Rôles adoptés

Nos études relèvent que les pères adoptent des comportements d’accompagnement très

variés. Les résultats portent à la fois sur les rôles adoptés par les pères et sur les sentiments

engendrés par leur expérience.

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Le rôle de soutien est le comportement adopté qui apparaît le plus au sein des résultats de

la RdL. Les autres comportements adoptés par les pères varient entre un rôle de

« supporter », une attitude apaisante ou un apport de soutien physique. L’étude de Chapman

(1991) identifie pour sa part trois rôles distincts que les pères adoptent lors du travail : celui

de coach, celui de coéquipier et celui de témoin (ce rôle est aussi relevée par Longworth &

Kingdon : le « spectateur »). Il semble que d’une manière générale, les résultats de notre

RdL relèvent les mêmes types de rôle, bien qu’à notre sens, il soit difficile d’adopter une

typologie applicable à tous les pères.

Le deuxième aspect des résultats portant sur les sentiments des pères engendrés par leur

expérience montre que les pères se sont sentis inutiles, impuissants, passifs, et qu’ils n’ont

pas su précisément ce qu’était leur rôle. D’autres pères ont ressenti le besoin de cacher

leurs émotions négatives (anxiété, frustration, irritation) à leur partenaire pour ne pas les

inquiéter ; on retrouve le même phénomène dans l’étude de Chandler & Field (1997, p.21).

Le fait que les pères se sentent impuissants et aient de la difficulté à identifier leur rôle est

également relevé par la métasynthèse de Johansson, Fenwick & Premberg (2014), qui

souligne que les pères ressentent des sentiments d’inadéquation dans leur habilité à

soutenir leur partenaire durant le travail.

On peut mettre en lien les difficultés vécues à l’accouchement avec les difficultés

rencontrées par les pères lors de la grossesse (voir supra d. p.35) ; en effet, les difficultés à

s’approprier la grossesse et les remaniements psychologiques que peuvent engendrer la

transition vers la paternité pourraient, à notre sens, contribuer aux difficultés rencontrées par

les pères en terme de ressenti émotionnel et d’adaptation au travail et à l’accouchement.

L’étude de Longworth & Kingdon (2011) mentionne d’ailleurs une « déconnexion d’avec la

grossesse et le travail » ressentie par les pères ; il semble donc que les auteur-e-s

établissent un lien entre les deux événements, car cette « déconnexion » serait autant

présente lors de la grossesse que lors des événements du travail.

On retrouve dans la même étude la notion de « contrôle », qui n’est pas apparue dans les

résultats de la RdL ; elle est définie dans cette étude comme le fait d’être une personne à

part entière, impliquée dans la situation et dans les processus de décision ; il semble que la

majorité des pères aient ressenti le manque de ce « contrôle ». Cette notion est également

mentionnée par l’étude Hasman, Kjaergaad & Esbensen (2014), qui stipule que lorsque le

processus de la naissance devient incontrôlable (par exemple, lors d’une non-progression du

travail), les pères se sentent impuissants.

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Dans notre RdL, on identifie certaines ressources qui permettent aux pères de mieux définir

leur place et de se sentir intégrés dans le processus de la naissance : l’attitude de la

partenaire, les sages-femmes, la PANP et la section du cordon ombilical ; cela est corroboré

par d’autres références citées ci-dessous. Le fait que certains gestes symboliques (comme

couper le cordon ombilical) renforcent le sentiment d’implication des pères dans le processus

de la naissance est une notion déjà relevée par une autre étude citée au sein du cadre

théorique (Brandao & Figueiredo, 2012, voir supra IV p.41).

Chapman (1991), relève également que la partenaire et l’équipe médicale sont deux

ressources qui guident les pères dans leur rôle d’accompagnants (p.116). L’étude mentionne

par ailleurs que le degré de compréhension au sein de la relation avec leur partenaire

influence le type de rôle que les pères vont adopter.

Enfin, notre RdL ne montre pas de résultats significatifs entre les données démographiques

des pères et leur vécu ; Schytt & Bergström (2013) relèvent pourtant que les primipères plus

âgés (>34 ans) ont plus de difficultés lors du travail et de l’accouchement que les primipères

jeunes (<27 ans). Par ailleurs, il semble que les primipères plus âgés soient plus satisfaits du

soutien de l’équipe médicale que les primipères plus jeunes. Bien que cela ne représente

qu’un résultat, il semble que l’expérience des pères soit influencée par leur âge ; d’une

manière générale, on peut en retirer que leur accompagnement en salle d’accouchement par

les professionnel-le-s s’inscrirait dans une considération de tous les facteurs socioculturels et

démographiques de chaque père.

II Les pères sont-ils satisfaits de leur expérience par rapport à

leurs attentes ?

Une partie des résultats de notre RdL mentionne que certains pères ne se sentent pas

satisfaits du soutien qu’ils ont apporté à leur partenaire. Le même phénomène est relevé par

Chandler & Field (1997), qui ajoutent que les pères ne sont pas satisfaits de leur

accompagnement, alors qu’ils avaient pensé qu’ils seraient capables de rassurer et de

soutenir leur partenaire (p.20). On a pu remarquer dans nos études que le rôle de soutien

est pourtant celui qui est le plus souvent évoqué dans les attentes des pères en lien avec

l’accouchement. Il semble donc que d’une manière générale, les attentes des pères ne sont

pas comblées, et qu’ils ressentent une certaine déception quant aux rôles qu’ils ont adoptés.

Or, on a pu constater que la non-réalisation des attentes des pères augmentait leur stress de

manière significative et que la satisfaction de l’expérience est inversement corrélée avec le

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niveau d’anxiété. La réalité du vécu des pères ne correspondrait donc pas forcément à leurs

attentes et cela a un impact sur leur expérience émotionnelle.

Cependant, un élément apparaît dans l’une de nos études comme étant un facteur favorisant

la satisfaction de l’expérience des pères : il s’agit de l’utilisation de l’APD. En effet, la

majorité des pères du groupe avec APD estime que leur expérience en salle

d’accouchement correspond à leurs attentes ; au contraire, une minorité des pères du

groupe sans APD reporte cet avis. Cela peut amener à déduire que l’utilisation de l’APD

serait un facteur favorisant la satisfaction des pères par rapport à leurs rôles adoptés en

salle de naissance. La corrélation entre l’expérience des pères et l’APD est traitée

ultérieurement dans la discussion (voir infra e. p.97)

Parallèlement à cela, les résultats de notre RdL indiquent que les mères évaluent le soutien

apporté par leur partenaire de manière plus élevée que les pères eux-mêmes, et que leur

accompagnement a répondu à leurs attentes. Bien que ce résultat soit difficilement

généralisable, il semble que les pères sous-estiment leurs capacités d’accompagnement et

cela peut être dû à leurs difficultés rencontrées en salle d’accouchement d’une manière

générale (sentiments négatifs, douleur de leur partenaire, etc.).

Enfin, Wilson, Rholes, Simpson & Tran (2014) relèvent que le niveau d’anxiété des femmes

est inversement corrélé à leur perception du soutien apporté par leur partenaire, et que par

conséquent, les femmes plus anxieuses perçoivent moins de soutien que les femmes moins

anxieuses. Cela peut être expliqué par le fait que lorsque la femme est anxieuse, elle a plus

de difficultés à percevoir les comportements d’aide de leur partenaire, ou à l’inverse, par le

fait que l’homme a plus de difficulté à maintenir son rôle de soutien dans des situations où

leur partenaire est anxieuse.

III La pression sociale d’assister à l’accouchement

Il semble que la question du choix des pères d’être présent ou non se pose naturellement

dans le prolongement de la discussion. Certaines études démontrent que les pères se

sentent contraints par différents intervenants (partenaire, réseau social, équipe médicale) à

assister à la naissance de leur enfant. Il est intéressant de constater que cette notion avait

déjà été introduite au début de ce travail (voir supra A p.10), et qu’elle était l’une des raisons

pour lesquelles nous avions choisi d’étudier ce sujet. Dans l’étude de Epiney, Cardia

Vonèche, Mathieu & Luisier (2009), on constate que les mères évaluent l’accompagnement

de leur partenaire comme très important et que leur seule présence participe à encourager la

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femme pendant le travail : « elles leur demandent surtout d’être là et de pouvoir "s’accrocher"

à eux » (p.31).

Par ailleurs, Hodnett, Gates, Hofmeyr & Sakala (2013) révèlent que les femmes bénéficiant

d’une présence continue d’un accompagnant lors du travail (qu’il soit un membre de l’équipe

médicale ou un accompagnant choisi par la femme) ont plus de probabilité d’accoucher par

voie basse et d’avoir un travail court, et moins de risques d’accoucher par césarienne ou par

accouchement instrumenté. Or, d’après notre expérience professionnelle, les parturientes

sont le plus souvent accompagnées par les futurs pères.

Cependant, il nous semble important de relever que les pères ne devraient pas être poussés

à assumer un rôle pour lequel ils ne sont pas préparés. Fonty (2003) affirme d’ailleurs que

les pères devraient pouvoir disposer d’un libre choix, qui reposerait sur leur désir et leur

amour pour leur partenaire, et non sur une norme sociale imposée (p.20). Les conséquences

de la pression ressentie par les pères sont mises en évidence à deux reprises au sein de la

RdL. Il semble que la pression perçue pour assister à l’accouchement renforce le stress

perçu par les pères ; parallèlement à cela, les pères ressentent des sentiments négatifs

lorsqu’ils se voient contraints de réaliser des actes non souhaités (par exemple, couper le

cordon ombilical). Il semble donc que de manière générale, la pression perçue par les pères

ait un impact négatif sur leur expérience.

IV L’expérience émotionnelle des pères

De manière générale, la RdL relève que la majorité des pères reportent une expérience

positive du travail et de la naissance, qui représentent un événement émotionnellement

intense pour eux. Cela est également évoqué par Erlandsson & Lindgren (2009), qui

soulignent que la naissance est liée à des sentiments de joie et de soulagement pour les

pères, indépendamment de l’histoire obstétricale ou de l’adaptation néonatale (p.341). Le

moment de la naissance semble entraîner un remaniement émotionnel pour les pères ; cet

événement participe fortement à la transition vers la paternité : les pères se sentent pères au

moment exact de la naissance. Ce résultat est corroboré par une autre étude citée dans le

cadre de référence (voir supra IV p.41) ; Erlandsson & Lindgren (2009) appuient également

cela en ajoutant que le moment de la naissance déclenche des sentiments des pères de

responsabilité et de protection envers leur nouvelle famille.

D’une manière générale, nous pouvons relever que notre RdL n’a pas apporté de résultats

sur le vécu des pères en lien avec certains gestes usuels pratiqués par les sages-femmes

(comme par exemple, la pose de voie veineuse périphérique, la rupture artificielle des

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membranes, l’augmentation des contractions par une perfusion d’ocytocine, la délivrance1,

l’adaptation néonatale ou l’allaitement2).

c. Quelles peuvent être les conséquences de l’expérience

de la naissance pour les pères dans le post-partum ?

Plusieurs résultats de notre RdL font le lien entre l’expérience de la naissance et le niveau

de stress perçu par les pères ; la majorité des résultats concerne le stress évalué en P-P. Il

semble que le stress de la grossesse et la présence des pères en salle d’accouchement

soient deux facteurs influençant leur stress en P-P de manière significative. Il est intéressant

de constater que ces résultats ne sont pas corroborés par l’étude de Vehviläinen-Julkunen &

Liukkonen (1998), où la moitié des pères ne se sont pas du tout sentis anxieux durant

l’accouchement.

A notre sens, les résultats portant sur le stress sont particulièrement pertinents pour notre

pratique professionnelle, car le stress est un facteur de risque - et un symptôme - de la DPP,

trouble psychologique qui peut se développer dans la première année après la naissance de

l’enfant (Nanzer, 2009). Or, nous avions déjà évoqué au début de ce travail que 10% des

hommes sont touchés par la DPP ; selon Nanzer (2009), ce trouble peut avoir des

conséquences importantes, notamment sur le couple ainsi que sur le processus

d’attachement (p.105, 108). L’étude de Ramchandani & al. (2008) relève que la DPP

paternelle peut avoir un impact sur la santé mentale de l’enfant, puisque qu’elle est

significativement corrélée à des troubles psychiatriques chez l’enfant survenant dans les

sept premières années de vie, et ce, indépendamment de la DPP maternelle. Dans le

prolongement de cette discussion, il est important de relever que la DPP maternelle et le

manque de soutien subjectif de la partenaire sont des facteurs de risque importants de la

DPP paternelle (Nanzer, 2009) ; de plus, Gürber & al. (2012) relèvent qu’une expérience

émotionnelle négative et/ou une expérience traumatique de l’accouchement sont des

facteurs influençant les scores de symptômes dépressifs maternels et de trouble de stress

aigu (qui est un facteur de risque du syndrome de stress post traumatique) chez les mères ;

nous pouvons imaginer qu’un vécu difficile de l’expérience de la naissance pour les pères

pourrait également influer sur les symptômes dépressifs paternels. D’une manière générale,

il semble que tous ces facteurs soient interconnectés.

1 La délivrance correspond à l’expulsion du placenta et des membranes amniotiques, qui fait suite à la section du

cordon ombilical et à la reprise des contractions utérines entraînant le décollement placentaire (Pitte, 2009). 2 Pour promouvoir l’allaitement, L’OMS et l’UNICEF recommandent le démarrage de l’allaitement dès la première

heure après la naissance (en salle d’accouchement) (OMS, 2014).

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Il est intéressant de constater que nous n’avons pas rencontré de résultats sur le vécu des

pères en lien avec certaines issues obstétricales telles que l’épisiotomie, la déchirure

périnéale ou de manière générale avec la sexualité du couple. Nous pouvons imaginer que

la vision du corps de la femme qui accouche pourrait engendrer des sentiments négatifs

pour certains pères. Olsson, Robertson, Björklund, & Nissen (2010) soulignent cependant

que malgré les inquiétudes des mères, les modifications physiques dues à la grossesse et à

l’accouchement (prise de poids, déchirures périnéales) représentent un problème mineur

pour les pères dans la vie sexuelle du couple (comparé à d’autres facteurs comme par

exemple, la baisse de la libido ou la fatigue). Epiney & al. (2009) soulignent que pour

certaines femmes, le fait que leur partenaire ait vécu l’expérience de la naissance avec elles

a favorisé leurs sentiments de compréhension envers elles, notamment en ce qui concerne

la reprise des rapports sexuels (p.31).

d. Comment les sages-femmes peuvent-elles apporter un

accompagnement adapté aux pères en salle

d’accouchement ?

Ce que l’on peut soulever dans les résultats de notre RdL, c’est que le soutien, la présence

et l’information dispensée par les sages-femmes semblent fortement liés à une expérience

positive des pères en salle d’accouchement. En effet, la présence des sages-femmes en

salle d’accouchement semble être un élément clé pour les pères, car elle favoriserait leurs

sentiments de soutien, de sécurité, d’intégration et les aiderait dans l’accompagnement de

leur partenaire. Elle apporterait également des opportunités d’échanges entre les sages-

femmes et les pères et ainsi, ils se sentiraient mieux informés. Il semble donc que la

présence de la sage-femme soit liée aux autres facteurs sage-femme favorisant un bon vécu

des pères (soutien, intégration des pères et informations dispensées). De manière générale,

les pères semblent satisfaits de la présence des sages-femmes en salle d’accouchement

(Johansson & Hildingsson, 2013 ; Hallgren, Kihlgren, Forslin & Norberg, 1999 ; Chapman,

1991). Il nous semble évident que lorsque la sage-femme est présente la majorité du temps

dans la salle, cela peut permettre de développer une relation de confiance avec le couple et

de répondre à leurs besoins. Cela nous semble d’autant plus important dans les structures

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où il n’y a pas la possibilité de faire un suivi global1 ; cela signifie que le couple ne connaît

pas la sage-femme qui sera présente à leur accouchement.

Selon les résultats de notre RdL, le soutien de la sage-femme a également son importance

par rapport au vécu des pères, car il permettrait aux pères de se sentir en sécurité et en

confiance. Dans le cas contraire, les pères se sentent paniqués, inutiles et désinvestis. Dans

l’étude de Poh, Koh & Seow (2013), les pères semblent satisfaits du soutien dispensé par les

sages-femmes. Johansson, Rubertsson, Radestad & Hildingsson (2011) ajoute que les

pères gagnent une impression de contrôle de la situation lors qu’ils reçoivent du soutien des

sages-femmes.

En ce qui concerne l’information dispensée par les sages-femmes, Chandler & Field

(1997) rapportent que les pères ont besoin de plus d’informations tout au long du travail

(évolution du travail, aide qu’ils peuvent apporter) et d’explications dispensées de manière

plus adéquate. Les résultats de notre RdL vont dans ce sens et montrent que le fait de

recevoir des informations durant le travail rassure les pères et semble leur donner un

sentiment de contrôle. Dans le cas contraire, ils ressentent une perte de confiance envers

l’équipe médicale, de l’irritation et un sentiment de non reconnaissance de leur anxiété. De

plus, les pères s’attendent à obtenir plus d’informations, à pouvoir poser davantage de

questions et à obtenir plus des réponses claires.

Ensuite, nous avons pu voir dans les résultats de notre RdL que l’intégration des pères

dans l’accompagnement de leur partenaire, dans les soins et le fait de se sentir considérés

comme des personnes à part entière par les sages-femmes semblent également être des

éléments importants pour les pères. Le fait de se sentir intégré par les sages-femmes

semble renforcer les sentiments d’implication et de sécurité des pères qui perçoivent cela

comme une reconnaissance de leurs efforts et de leur souffrance. Cependant, certains pères

ont ressenti de l’hostilité de la part des sages-femmes, tandis que d’autres ont perçu qu’ils

gênaient et qu’ils n’étaient pas à leur place. Il est étonnant de constater que d’un autre côté,

nous avons des résultats dans notre RdL qui montrent que les pères perçoivent de la

pression de la part de l’équipe médicale pour assister à l’accouchement. Nous nous

demandons alors quelle est l’opinion des équipes médicales quant à la présence du père en

salle d’accouchement, et s’il n’y a pas une discrépance entre leurs attentes et la réalité ; par

1 Suivi global : « un seul praticien assure la surveillance médicale de la grossesse lors des consultations

prénatales, la préparation à la naissance, la surveillance et la responsabilité de l’accouchement, les soins postnatals de la mère et de l’enfant. » (Psychologies, 2013).

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exemple, une attente des équipes médicales pourrait être qu’elles considèrent les pères

comme un atout et une aide dans la situation (Jordan, 1990). La réalité perçue de cette

situation par les professionnel-le-s serait que les pères sont présents mais n’apportent pas

d’aide. Il serait alors intéressant de faire des recherches plus approfondies sur les attentes et

représentations des équipes médicales. La métasynthèse de Steen, Down, Bamford &

Edozien (2011) relève que les pères se sentent souvent comme une personne étrangère (ni

patient, ni visiteur) dans les soins en maternité, et cela contribue à créer des sentiments de

peur, d’incertitude et d’exclusion. Ils ajoutent que les pères ne peuvent pas soutenir leur

partenaire de manière efficace dans la grossesse, l’accouchement et le P-P, si ceux-ci ne se

sentent pas eux-mêmes soutenus, inclus et préparés à ce qui les attend. Chandler & Field

(1997) relèvent également que les pères se sentent exclus lors du travail ; ils trouvent que

leur présence est tolérée par l’équipe médicale alors qu’ils souhaiteraient être considérés en

tant qu’acteurs impliqués dans le processus de la naissance. Les résultats de notre RdL

relèvent également que le sentiment d’implication des pères est renforcé lorsqu’ils sentent

que la sage-femme leur porte de l’intérêt (par exemple, répondre à leurs besoins, les inviter

dans les conversations, leur montrer comment faire un massage, etc.). Dans la situation

contraire, les pères éprouveraient un sentiment d’inutilité, une perte de confiance envers les

sages-femmes et se sentent moins soutenant envers leur partenaire.

La participation dans les prises de décisions semble également être un élément

important pour les pères dans les résultats de notre RdL. Johansson & Hildingsson (2013) le

relèvent eux aussi et se demandent si les pères ont vraiment la possibilité de prendre des

décisions dans les circonstances actuelles du processus de la naissance. Nous nous

demandons si ces résultats ne seraient pas plutôt dûs à un sentiment de manque de contrôle

dans la situation. Ainsi, l’envie de participer aux décisions concernant leur partenaire leur

donnerait l’impression d’être plus impliqués.

Un autre facteur qui influence le vécu des pères dans les résultats de notre RdL est leur

perception de la gestion de la situation par les sages-femmes ; il semble que ce soit

rassurant pour les pères de penser que la sage-femme gère la situation. En se basant sur

les propos d’Hervieu (2009) qui dit que les mères font face à certaines angoisses de vie et

de mort durant leur grossesse et leur accouchement, nous pouvons imaginer que les pères y

sont également confrontés, notamment lors de l’accouchement, où la peur de perdre leur

partenaire ou leur bébé peut devenir plus tangible. Les résultats de notre RdL montrent que

dans une situation où ils sentent que la sage-femme est en difficulté, ils éprouvent alors un

manque de confiance envers l’équipe médicale et se sentent moins soutenants et moins

utiles envers leur partenaire. Johansson & Hildingsson (2013) appuient ces résultats et

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montrent que les pères aimeraient se sentir en sécurité par rapport aux soins que leur

partenaire reçoit.

Pour conclure, nous avons pu voir que même si certaines études montrent que les pères

sont satisfaits de l’accompagnement des sages-femmes, les auteur-e-s, relèvent tous de

manière générale que cet accompagnement est important pour les pères et qu’il pourrait être

davantage développé. Dellman (2004), par exemple, soutient que les pères devraient être

reconnus et soutenus par les sages-femmes dans leurs besoins émotionnels durant

l’accouchement. Johansson & Hildingsson (2013) montrent, quant à eux, que la prise en

soins intrapartum est déficiente selon les pères et que celle-ci l’est d’autant plus selon le

mode d’accouchement ; ils auraient donc davantage besoin de l’accompagnement de

l’équipe médicale lors de situations plus difficiles ou urgentes. Enfin, nous avons pu voir que

les pères ont également des attentes concernant les soins apportés par les sages-femmes à

leur partenaire. L’étude de Sengane & Nolte (2011) révèle notamment que les pères

souhaiteraient des sages-femmes qu’elles amènent principalement du soutien et du confort à

leur partenaire durant le travail et qu’elles aient une prise en charge holistique.

e. Quel est l’impact de l’analgésie péridurale sur le vécu

des pères en salle d’accouchement ?

Dans les résultats de notre RdL, le fait de voir souffrir la partenaire durant le travail et

l’accouchement est décrit par les pères comme une expérience désagréable, bouleversante

et créant un sentiment d’impuissance. Il semble que ce soit pour eux un « supplice » et une

grande souffrance car ils ne se sentent pas en mesure d’aider leur partenaire à gérer les

douleurs. Une majorité des études vont dans ce sens (Nolan,1994 ; Chandler & Field, 1997 ;

Epiney & al. 2009 ; Vehviläinen-Julkunen & Liukkonen, 1997). Nous pouvons effectivement

imaginer que le fait de voir souffrir un être aimé est une expérience difficile, et ce, d’autant

plus au sein d’une société algophobe1 dans laquelle la technologie médicale permet d’éviter

une majorité des souffrances physiques. Cette confrontation à la douleur pourrait être

responsable d’angoisses de mort chez les pères, ne comprenant pas que cela puisse être

nécessaire et normal lors d’un accouchement.

Il semble que la manière dont les pères expérimentent les douleurs de l’accouchement dans

les résultats de notre RdL dépend également de la manière dont leur partenaire réagit face à

1 Algophobie est la peur de la souffrance

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ces douleurs. En effet, nous pouvons imaginer que certaines situations doivent être plus

difficiles à vivre pour les pères : il s’agirait, par exemple, de situations induisant des douleurs

difficilement supportables pour les femmes, qui semblent alors ne plus gérer la situation (par

exemple, une impossibilité de poser une APD alors que la femme le souhaitait, ou une APD

devenue inefficace après une phase de soulagement complet des douleurs). Un autre

exemple serait celui de la stagnation de la dilatation, avec l’idée que les contractions

ressenties par les femmes ne sont pas efficaces ; Hasman & al. (2014) montrent alors que

les pères dans cette situation se sentent impuissants face à la douleur de la partenaire. Ces

exemples seraient essentiellement liés aux capacités psychologiques de la mère à accepter

ses contractions, et nous imaginons qu’il est plus facile pour les pères d’accepter la douleur

de leur partenaire si elle l’accepte aussi.

Toutefois, un résultat de Fenwick, & al. (2011) nous montre qu’il ne suffit pas que la mère

gère ses douleurs pour que les pères en retirent une expérience positive : en effet, les pères

ayant vécu une expérience positive d’un accouchement sans APD – où leur partenaire

semblait gérer ses douleurs – ressentent quand même une certaine anxiété à l’idée d’un

prochain accouchement sans APD. Les mères de cette étude auraient même accepté des

analgésiques durant leur accouchement dans le but d’aider leur partenaire à se sentir mieux.

D’après Ip (1999), les mères utilisent davantage d’analgésiques lorsque leur partenaire est

présent en salle d’accouchement. L’auteur pense que les mères agiraient ainsi pour diminuer

le malaise perçu chez leur partenaire. Les analgésiques seraient un élément permettant un

meilleur vécu des pères en salle d’accouchement.

Il est intéressant de mettre en lien ces résultats sur le vécu de la douleur avec ceux de

l’étude de Capogna & al. (2006) qui apporte des conclusions étonnantes concernant l’impact

de l’APD sur le vécu des pères. En effet, les pères semblent avoir été très satisfaits de l’APD

administrée à leur partenaire. Certains la conseilleraient à d’autres couples et la majorité des

pères la souhaiterait pour une prochaine naissance. Elle diminuerait l’anxiété des pères

durant le travail et le premier jour du P-P, et elle leur permettrait de se sentir mieux préparés,

plus utiles et plus impliqués dans la naissance. Les pères rapportent également qu’ils se

sentent plus en accord avec ce qu’ils avaient imaginé en prénatal concernant leur rôle. Les

pourcentages des résultats de cette étude, comparant le vécu des pères avec et sans APD,

sont étonnamment contrastés, et l’on constate une scission entre les deux groupes. Nous ne

nous attendions pas à de tels résultats, pensant que les pères pouvaient apporter une plus

grande aide à leur partenaire lorsqu’elle ne souhaite pas d’APD. En effet, dans les

accouchements avec APD, l’accompagnement et le soutien de la femme peut devenir moins

conséquents et les pères pourraient avoir un rôle moins actif auprès de leur partenaire. Les

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résultats nous montrent alors que les pères seraient au contraire plutôt déstabilisés lors d’un

accouchement sans APD et qu’ils auraient de la difficulté à trouver leur place. Fenwick & al.

(2011) proposent des résultats allant dans ce même sens : quand bien même ils sont

admiratifs de leur partenaire, les pères qui ont assisté à une naissance sans APD

demandent à leur partenaire d’envisager le choix de l’APD pour une naissance suivante. Il

semble alors que ces pères aient eu un mauvais vécu de la douleur subie par leur

partenaire. L’étude relève également que la douleur de l’accouchement et les moyens pour

la soulager sont des sujets récurrents dans les entretiens avec les pères. Chapman (2000)

relève que les pères ont eu l’impression de retrouver leur partenaire lorsque l’APD a été

posée et que leur vécu de la situation est passé d’une expérience stressante à une

expérience calme.

On peut alors imaginer que la douleur est un des éléments principaux pouvant influer sur

l’expérience des pères ; ainsi, davantage de préparation en prénatal et d’accompagnement

en salle d’accouchement pourraient être positifs pour les pères. D’ailleurs, Chapman (2000)

montre que les pères ont besoin du soutien de la sage-femme pour faire face aux douleurs

de leur partenaire.

D’après ces résultats, on se rend compte que la douleur de l’accouchement est un facteur

important lié à un mauvais vécu pour les pères, au point que les femmes vont parfois

concéder leur désir d’accouchement naturel pour une APD. L’utilisation d’analgésiques, et

plus précisément de l’APD, est au contraire un facteur favorisant un bon vécu des pères.

Bien que cela soit un résultat intéressant, notre accompagnement en tant que sage-femme

est avant tout de respecter le libre choix éclairé des femmes, indépendamment d’autres

facteurs, comme par exemple l’avis et le ressenti de leur partenaire. Plutôt que de favoriser

l’utilisation de l’APD pour que les pères aient une expérience positive de la naissance, il

s’agirait d’adapter des cours de PANP leur étant destinés, afin de les préparer à ce qu’un

accouchement sans APD peut représenter, et de leur apprendre comment ils peuvent

interagir dans une telle situation.

Nous sommes étonnées de ne pas avoir rencontré de résultats dans notre RdL concernant

le vécu des pères en lien avec d’autres méthodes d’analgésies ou d’accompagnement de la

douleur (morphine, gaz hilarant, acupuncture, massages, homéopathie, aromathérapie,

TENS1, etc.). De même, nous n’avons pas trouvé de résultats concernant le vécu des pères

1 TENS : Transcutaneous Electrical Nerve Stimulator ou stimulateur électrique transcutané, qui entraîne une

réduction de la douleur (HUG, 2012).

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lors d’accouchement à domicile ou en maison de naissance. Il serait intéressant de

développer des recherches futures à ce sujet.

f. Y a-t-il une différence dans le vécu de l’accouchement

entre les primipères et les multipères ?

Nous avons très peu de résultats dans notre RdL qui distinguent le vécu des primipères de

celui des multipères ; en effet, cinq de nos études ne comportent que des primipères, et les

autres ne montrent pas ou peu de distinction dans leurs résultats. Au total, nous avons 61%

de primipères dans nos études (629/1031) et 39% de multipères (402/1031). Ces résultats

ne sont pas généralisables, mais ils montrent qu’il peut être intéressant de faire davantage

de recherche à ce sujet. Draper (1997) observe que les recherches existantes sont ciblées

sur les primipères ; à l’heure actuelle, les études contiennent davantage de multipères mais il

semble qu’aucune ne se concentre sur la différence de vécu entre les primipères et les

multipères.

Dans les résultats de notre RdL, on constate que les primipères sont plus satisfaits du

soutien des sages-femmes que les multipères. Cela pourrait s’expliquer par le fait que les

sages-femmes sont plus présentes pour la naissance d’une femme primipare1, notamment

parce qu’elles perçoivent davantage d’inconfort et de peurs de la part du couple. Cela

pourrait également venir des pères, qui montrent aux sages-femmes qu’ils ont plus besoin

d’elles ou peut-être qu’ils sont plus réceptifs à l’aide qu’elles leur apportent. En effet,

Vehviläinen-Julkunen & Liukkonen (1998) nous rapportent que les primipères sont souvent

plus inconfortables durant le travail que les multipères, et Berry (1988) montre que

l’expérience de la naissance est plus anxiogène pour les primipères. Dans les résultats de

notre RdL, les primipères ne se sentent pas suffisamment préparés pour cette expérience,

mais ce sentiment a également été retrouvé chez des multipères. Nous verrons plus en

détails la notion de préparation dans le chapitre suivant (voir infra g. p.101).

Parmi les résultats de notre RdL, les multipères semblent plus satisfaits de l’information

reçue durant le travail que les primipères. Cela est peut-être dû au fait qu’ils ont déjà vécu

cela une ou plusieurs fois et qu’ils ont alors besoin de moins d’informations sur le

déroulement du travail et de l’accouchement. Selon Johansson & al. (2014), les multipères

seraient également moins enclins à recevoir de l’aide d’une sage-femme et se reposent

1 Si l’on considère que la majorité des primipères sont en couple avec des femmes primipares.

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souvent sur leurs précédentes expériences. Cela leur donne le sentiment d’être mieux

préparés pour la naissance à venir.

Bien que ces résultats ne soient pas généralisables, nous percevons tout de même que

l’expérience des primipères et des multipères semble être différente. Les multipères seraient

rassurés par leurs précédentes expériences et plus autonomes en salle d’accouchement,

alors que les primipères sont face à l’inconnu et auraient besoin de plus d’accompagnement.

Il est difficile de tirer des conclusions pour la pratique sage-femme sur la base de ces

résultats, d’autant plus que dans l’ensemble des résultats de notre RdL, les pères semblent

être tous différents les uns des autres et ont des besoins bien différents. Leur

accompagnement devrait donc être ciblé sur leurs besoins personnels plutôt que sur leur

expérience obstétricale.

g. Quelle est l’influence des cours de préparation à la

naissance et à la parentalité sur l’expérience des pères ?

La notion de préparation apparaît de manière éparse dans les résultats de notre RdL, mais

nous comprenons que peut être important pour les pères. Nous avons pu voir que cette

notion n’est pas forcément liée au cours de PANP mais peut aussi venir d’autres ressources

(lectures diverses, discussions avec l’entourage, avec leur partenaire ou avec des

sages-femmes). Selon Hallgren, Kihlgren, Forslin & Norberg (1999), le fait de regarder des

films sur la naissance serait une aide précieuse pour certains pères. Enfin, selon Gage &

Kirk (2002), la préparation des pères passerait avant tout par le fait d’avoir préparé la maison

à l’accueil du bébé et d’avoir préparé les affaires et la voiture pour le jour de l’accouchement.

Cela fait référence à ce qui a été dit dans le cadre théorique sur les préoccupations des

hommes qui se préparent à devenir père (voir supra 5. p.39) : ils changent leurs priorités

durant la grossesse (économie, loisirs) et effectuent certaines tâches domestiques afin de se

préparer à la venue d’un enfant (préparation de la chambre, installation du siège-auto, etc.).

D’après les résultats de notre RdL, le fait de se sentir « prêt » rassure les pères, diminue leur

stress et renforce leur implication auprès de leur partenaire durant le travail et

l’accouchement. D’après Boyce, Condon, Barton & Corkindale (2007), les pères qui ne

reçoivent pas suffisamment d’informations sur la grossesse, la naissance ainsi que sur leur

rôle en tant que pères – et ceux qui n’ont pas la possibilité de parler de leur ressenti sur leur

transition à la paternité – sont plus à risque de développer une détresse psychologique.

Longworth & Kingdon (2010) reprennent cette notion de rôle des pères durant la naissance :

ils auraient de la difficulté à trouver un rôle qui leur convienne et cela engendre un sentiment

de manque de contrôle dans la situation. Selon les auteur-e-s, cela serait dû au manque de

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connaissances sur le sujet. Dans les résultats de notre RdL, certains hommes ont également

ressenti un manque de préparation, notamment pour faire face à la douleur de leur

partenaire. Cela rejoint ce qui a été dit dans le sous-chapitre sur le vécu de la douleur de

l’accouchement (voir supra e. p.97). Ce résultat est appuyé par le fait que lorsque les pères

assistent à un accouchement avec APD, ils se sentent mieux préparés. Pourtant, selon les

auteur-e-s de cette étude, les groupes de pères avec et sans APD ont révélé les mêmes

pourcentages de participation au cours de PANP. Cela reviendrait donc à dire que s’ils se

sentent mieux préparés, c’est peut-être parce que leur présence lors d’un accouchement

avec APD demanderait moins de préparation.

Les cours de PANP sont-ils alors une bonne manière de se préparer à la naissance ?

D’après les résultats de notre RdL, les pères ayant suivi des cours de PANP seraient

satisfaits des informations reçues. Cela les a aidés à mieux appréhender cette expérience.

Selon Li, Lin, Chang, Kao, Liu & Kuo (2009), les pères ayant participé à des cours de PANP

ont perçu moins d’anxiété après la naissance de leur enfant. Mais les résultats ne sont pas

aussi positifs dans toutes les études : selon Hallgren & al. (1999), les pères ne se sont pas

sentis assez préparés durant le travail et l’accouchement de leur partenaire, malgré leur

participation aux cours de PANP. Il semblerait que ces cours ne correspondent pas à leurs

attentes : ils seraient trop ciblés sur les femmes et apporteraient de fausses représentations

sur le rôle des pères. Dans l’étude Dellman (2004), les pères pensent également que les

cours de PANP manquent d’informations destinées aux pères. Enfin, selon Deave &

Johsnon (2008), les pères souhaiteraient davantage d’informations concernant la parentalité,

les soins du nouveau-né et les relations intrafamiliales alors que dans l’étude de Hallgren &

al. (1999), certains pères souhaitent que les cours contiennent des exercices de relaxation et

de respiration.

Il est intéressant de noter que certain-e-s auteur-e-s ont essayé de comparer des cours de

PANP classiques à des méthodes de PANP plus particulières afin d’évaluer leurs bénéfices :

des méthodes de préparation à un accouchement naturel (incluant par exemple de la

relaxation, des exercices de respiration, des informations sur la physiologie du travail et des

stratégies pour gérer la douleur) n’amélioreraient pas le vécu des pères en salle

d’accouchement et ne réduiraient pas leur stress (Bergström, Kieler & Waldenström, 2009).

Cependant, les mêmes méthodes, incluant un entraînement au rôle de coach pour les pères

semblent influencer de manière positive l’expérience des pères en salle d’accouchement

(Bergström & al. 2013).

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Pour conclure, le vécu des pères en salle d’accouchement serait influencé par le fait de se

sentir « prêt ». Cette notion semble inclure divers moyens pour se préparer à une naissance

et non pas seulement des cours des PANP. Il pourrait donc être intéressant d’investiguer ces

autres moyens dans des recherches futures (groupes de pères, lectures, visionnage de

films, etc.). Les cours de PANP, quant à eux, auraient un impact sur le vécu des pères, à

condition que ceux-ci répondent à leurs divers besoins. En effet, les pères auraient

différentes attentes sur ce que peuvent leur apporter ces cours et sur la manière dont ils

doivent être présentés. Nous pouvons imaginer que certains pères s’attendent à des cours

de relaxation ou de travail corporel, alors que d’autres préféreraient un cours théorique sur

l’accouchement. Sur la base de ces observations, nous proposerons dans le chapitre suivant

(voir infra I p.106) un positionnement par rapport au fait de cibler les besoins des pères et de

leur proposer des cours de PANP adaptés.

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G. Perspectives professionnelles

a. Introduction

Le but de ce chapitre est de pouvoir faire des parallèles entre les résultats de notre RdL et la

pratique professionnelle en tant que sages-femmes. Bien que notre question de recherche

porte sur le champ de la salle d’accouchement, nous avons pu constater que les

interventions des sages-femmes dans l’accompagnement des pères tout au long du

processus de périnatalité (prénatal, accouchement et P-P) peuvent être aidantes pour eux.

Nous sommes cependant conscientes que le travail et l’accouchement sont potentiellement

des moments « clés », où les sages-femmes peuvent s’investir dans une relation de

confiance avec les couples. De plus, selon les lieux, les sages-femmes ont peu de temps

pour parler avec les pères durant les contrôles de grossesse, et l’accouchement est souvent

un moment privilégié pour interagir avec eux.

b. En prénatal

Comme nous l’avons déjà relevé, la grossesse est source de stress pour les pères, et cela

engendre des répercussions sur la période du P-P. Dans l’optique d’apporter des pistes de

réflexion à ce travail et en considérant que l’accompagnement des pères dans la périnatalité

s’inscrit dans une médecine préventive des familles, on peut relever que la grossesse, la

naissance et ses implications psychiques peuvent avoir des répercussions considérables et

sont à prendre en compte par les professionnel-le-s de la santé. Ainsi, dans la mesure du

possible, nous aimerions développer un accompagnement pour les pères dès le début de la

grossesse, en fonction de leurs besoins.

Lors des consultations de grossesse (contrôles, échographies), auxquelles les pères sont

généralement présents, les sages-femmes pourraient leur offrir un espace de parole.

Cependant, il est important de prendre en compte que la présence de leur partenaire peut

influencer le cours de la discussion.

Il serait donc approprié de créer des espaces de parole uniquement pour les pères (comme

par exemple, des consultations spécialisées) où les sages-femmes peuvent évaluer leur

vécu de la grossesse, leurs attentes en lien avec l’accouchement et le P-P. Par exemple,

elles peuvent évaluer le désir des pères d’être présent à l’accouchement : cela peut être

amené dans la conversation de manière informelle, en adoptant une tournure de phrase

ouverte et non jugeante, montrant que le choix repose sur les pères et non sur l’équipe

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médicale. Cela éviterait alors de leur faire ressentir une quelconque pression de la part des

professionnel-le-s. Ainsi, au lieu de dire « Est-ce que vous serez présent à la naissance ? »,

les professionnel-le-s pourraient poser une question plus ouverte, telle que « Comment vous

imaginez-vous le jour de l’accouchement ? ».

Dans le cadre de ces consultations, une idée serait de distribuer une fiche contenant

certaines pistes de réflexions pour les pères, qui seraient alors amenés à se projeter dans

l’expérience de l’accouchement. Le but de cette fiche serait de faire émerger leurs attentes

et leurs besoins vis-à-vis de leur partenaire et de l’équipe médicale, et ainsi, de favoriser leur

intégration et amener à un vécu positif de cette expérience (voir infra Annexe 2). Ces

réflexions seraient également l’occasion pour les pères de partager leurs attentes et leurs

besoins avec leur partenaire, et éventuellement de confronter les différents points de vue.

Durant les consultations suivantes, les professionnel-le-s pourraient s’entretenir avec les

futurs pères concernant leurs réflexions. Dans un deuxième temps, il serait intéressant de

faire intervenir les futures mères dans ces consultations afin de concilier les attentes de

chacun. Cela permettrait, entre autres, de s’assurer que les futurs pères souhaitent assister

à l’accouchement de leur plein gré.

Ces consultations seraient également importantes pour le dépistage des situations à risque

(dépression, violence, problèmes financiers, etc.), et cela permettrait de rediriger les pères /

les couples vers une prise en charge multidisciplinaire.

Malheureusement, dans certaines structures, l’aménagement de ces consultations peut être

difficile car la charge de travail est grande et les ressources nécessaires pour offrir cet

accompagnement ne peuvent être fournies.

La préparation (notamment à travers les cours de PANP) est une ressource importante pour

l’intégration de certains pères lors du travail et de l’accouchement. D’une manière générale,

les résultats de notre RdL démontrent que certaines de nos interventions pourraient avoir

lieu plus tôt dans la grossesse, pour prévenir les difficultés que les pères risquent de

rencontrer en salle d’accouchement (notamment concernant les rôles et les représentations

qu’ils ont à propos de l’événement à venir, ainsi que la douleur de l’accouchement).

Pourtant, malgré le fait qu’une majorité des pères soient présents aux cours de PANP, le

vécu de l’accouchement semble être relativement difficile, et les pères ne se sentent pas

satisfaits du contenu de ces cours. Cela nous a alors amenées à réfléchir à la manière dont

nous pouvions aider les futurs pères en répondant à leurs besoins ; nous avons tout d’abord

imaginé qu’il pourrait être bénéfique d’augmenter l’offre d’informations adaptées aux futurs

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pères par divers moyens qui sont exposés ultérieurement. Puis, nous avons réfléchi à la

création d’un modèle de PANP adapté aux futurs pères, sur la base des résultats de notre

RdL et des études mobilisées dans la discussion.

I Concepts de Préparation à la Naissance et à la Parentalité

pour les futurs pères

1) Cours standard adapté à tous les futurs pères :

L’idée de cette méthode serait non pas d’exclure les futures mères mais de privilégier un

espace de parole entre hommes où ils pourraient interagir et recevoir des informations

destinées directement à eux. Nous pouvons nous imaginer qu’une certaine partie du

programme des cours s’organiserait en couple et comprendrait le programme standard de

PANP, alors que le reste serait divisé entre les hommes et les femmes.

A notre sens, l’idéal serait d’animer les groupes de paroles pour les futurs pères par

l’intermédiaire de médiateurs (plusieurs multipères différents qui raconteraient leur histoire

de la naissance, éventuellement des psychologues ou des hommes sages-femmes), car il

semble que les pères n’osent pas toujours se livrer spontanément à une sage-femme

(Richard-Guerroudj, 2006).

Bien que nous imaginons que les groupes de paroles pour les futurs pères peuvent

s’organiser de manière assez libre et informelle, nous avons pensé à adopter une structure

répondant à quelques objectifs précis :

Engager la discussion sur la place des pères au sein de la société actuelle et les

attentes qui y sont liées.

Aborder les thèmes qui sont ressortis comme étant prépondérants au sein de notre

travail : le vécu psychique et l’appropriation de la grossesse par les futurs pères, la

relation avec leur partenaire, la signification qu’ils attribuent à leur présence en salle

d’accouchement, les sentiments qu’ils éprouvent par rapport à l’idée d’assister à la

naissance de leur enfant et par rapport à l’arrivée de l’enfant dans la dynamique

familiale, etc.

Amorcer des pistes de réflexion sur les représentations des pères, de leur rôle et de

leur implication en salle d’accouchement, en leur suggérant qu’il est important d’en

parler avec leur partenaire lors de la grossesse.

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Sensibiliser les futurs pères à la notion de douleur, en leur expliquant ce qu’un

accouchement avec ou sans APD représente, et leur apprendre des techniques pour

aider leur partenaire à gérer la douleur (lors des cours en couple).

L’objectif de ces cours de PANP spécialisés est également de promouvoir la santé des pères

et des familles ; nous connaissons bien le caractère imprévu que le travail et l’accouchement

peuvent représenter, et l’idée serait donc de prévenir les pères à l’avance de toutes les

complications qui pourraient survenir lors du travail et de l’accouchement (douleur intense,

stagnation de la dilatation, accouchement instrumenté, malformation, césarienne, etc.), afin

de leur permettre de faire face à ces situations le jour de l’accouchement.

2) Développement de l’information et du réseau de santé en lien avec la paternité :

Nous avons pu constater que les futurs pères semblent tous avoir des besoins différents, et

c’est en ce sens que nous avons réfléchi à la meilleure manière de répondre aux demandes

de chacun. En effet, un cours standard, comme énoncé plus haut, peut ne pas convenir à

tout le monde. L’idée serait alors de développer le réseau de santé en lien avec la paternité

afin de faciliter l’accès à l’information et de rediriger les futurs pères vers les organismes qui

répondraient le mieux à leurs besoins. Tout d’abord, il s’agirait de sensibiliser les

professionnel-le-s de la santé autour de ce sujet (conférences, rapports d’études dans les

revues médicales, formations post-grades ou obligatoires) et, tout particulièrement dans les

lieux fréquentés par les couples (par exemple, au Planning Familial ou au sein des services

des Consultations Prénatales). L’objectif, en tant que professionnel-le-s, serait de pouvoir

proposer un panel de possibilités aux pères (cours de PANP, groupes de pères, etc.), ce qui

répondrait à leurs attentes de manière personnalisée et les redirigerait par la suite vers les

organismes concernés.

Dans le même ordre d’idées, il s’agirait de recenser tous les types de PANP disponibles

dans une région (standard, théorique, relaxation, haptonomie, groupes de pères, espace de

paroles, etc.) sur un site Internet dédié aux futurs pères et d’y spécifier pour chaque type

quelques notes explicatives (notamment sur les thèmes abordés dans les séances et

pouvant répondre à tels et tels besoins ou attentes, si cela se fait en groupe ou en individuel,

en couple ou séparé, le type d’intervenant se chargeant de l’animation du cours, le prix, le

nombre de cours, d’heures, etc.). Pour compléter cette offre, il s’agirait de fournir davantage

d’informations et d’offres destinées aux pères sur ce site Internet en collaboration avec

divers intervenants multidisciplinaires (par exemple, Quel droit pour le congé paternité ?,

Quelle place pour les pères à l’hôpital / en clinique privée / lors d’un accouchement à

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domicile / en maison de naissance ?, Quels rôles pour les pères pendant la grossesse de

leur partenaire, pendant l’accouchement et le P-P ?, Comment se préparer aux

changements en lien avec la paternité ?, etc.).

Ceci pourrait également être présenté sous forme de brochure d’informations à distribuer

aux futurs pères – notamment dans les lieux cités ci-dessus – et ayant un titre accrocheur,

par exemple : « Quelle place pour les futurs pères ? ».

La dernière étape, serait alors de vérifier que les types de PANP disponibles dans la région

correspondent bien aux besoins et attentes des futurs pères en effectuant une enquête de

satisfaction et en évaluant les pourcentages de participation à chaque type de cours. Cela

permettrait, entre autres, de déterminer s’il est nécessaire de créer une nouvelle offre

convenant davantage aux futurs pères.

c. En salle d’accouchement

Il convient tout d’abord de préciser que nous sommes favorables à l’intégration des pères en

salle d’accouchement ; nos expériences professionnelles et les résultats de notre RdL

appuient le fait que leur présence est bénéfique pour plusieurs aspects (relation de couple,

soutien et aide de la partenaire, attachement père-enfant, etc.). Cependant, nous aimerions

favoriser la promotion du choix libre et éclairé pour les pères d’assister à l’accouchement,

ainsi qu’un meilleur vécu de l’accouchement lorsque cela est possible. Cela pourrait

contribuer à la prévention des conflits de couples en P-P et des risques de DPP. Il est tout

de même important de relever que, pour les professionnel-le-s de la périnatalité, le travail et

l’accouchement s’avèrent parfois être des situations difficiles et chargées d’émotions. Dans

ces cas là, il peut être difficile de prêter attention aux besoins de chacun et d’intégrer une

dimension relationnelle telle qu’elle est attendue par les pères (intégration dans les prises de

décisions, communication des informations importantes, réassurance, écoute et réponse aux

questions).

Par ailleurs, les sages-femmes, de par leur formation et leur expérience sur le terrain, ont les

capacités de faire face à certaines situations (douleurs, complications impliquant un certain

stress), qui peuvent engendrer des sentiments difficiles, voire traumatiques pour les pères

expérimentant cela pour la première fois, et craignant pour la vie de leur partenaire et de leur

bébé. Il est ainsi difficile de favoriser un bon vécu de l’accouchement pour toute situation.

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Malgré l’essor des cours de PANP, nous sommes conscientes que tous les futurs pères n’y

assistent pas et ne disposent donc pas de l’opportunité de pouvoir parler de leurs

représentations en lien avec l’accouchement avant que celui-ci ait lieu. C’est donc lors du

travail que les sages-femmes de la salle d’accouchement peuvent intervenir pour s’entretenir

avec les futurs pères sur la place qu’ils désirent prendre pour l’accompagnement de leur

partenaire, et sur ce que leur présence représente pour eux (cela peut être fait au moins de

manière succincte si l’activité du service ne le permet pas). A notre sens, l’écoute des pères

lors de ce moment fait partie d’une des compétences primordiales à l’issue de notre RdL.

Cette écoute permettrait, notamment, de respecter leur choix quant à certains gestes qu’ils

ne désireraient pas faire (ou des éléments qu’ils ne désireraient pas voir, tels que le sang, le

placenta, etc.) et ainsi, de promouvoir un accompagnement personnalisé pour les futurs

pères et pour le couple.

Dans le cas où la situation le demanderait (par exemple, lors d’un désaccord entre la mère et

le père), les sages-femmes devraient également être compétentes pour agir en tant que

médiatrice au sein du couple afin de pouvoir trouver un compromis qui permettrait aux deux

parents de vivre une belle expérience de la naissance tout en ayant la perception que leurs

besoins ont été respectés.

Par ailleurs, la présence continue, le soutien et l’information dispensée par les sages-

femmes semblent être des éléments « clés » qui favorisent les sentiments de sécurité et de

confiance des pères. Or, ces éléments nous paraissent déjà très présents dans notre

pratique professionnelle, bien que parfois plus ciblés sur la femme et le nouveau-né. L’idée

serait donc de sensibiliser les sages-femmes à être conscientes que leurs interventions

(présence, relation, information, soutien) ont des implications réelles sur le vécu des pères.

Nous sommes convaincues que cela tendrait à favoriser un vécu positif du travail et de

l’accouchement chez les pères. Par ailleurs, dans les cas où l’accouchement serait vécu

comme très douloureux pour la femme, les sages-femmes – en plus de l’accompagnement

de la femme – pourraient guider les pères dans le soutien qu’ils apportent à leur partenaire,

et les aider à comprendre que la douleur – aussi intense soit-elle, fait partie de

l’accouchement physiologique. Elles peuvent notamment proposer certains gestes aux pères

(par exemple, respirer avec leur partenaire pendant la contraction, leur rappeler de détendre

les muscles après la contraction, faire un massage dans le bas du dos), tout en leur

montrant comment être à l’écoute des besoins de leur partenaire.

Les pères semblent se sentir exclus de la situation, et c’est également dans ce sens-là que

les sages-femmes peuvent intervenir pour promouvoir leur intégration, en faisant en sorte

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qu’ils se sentent considérés comme des acteurs à part entière, et non pas comme des

observateurs extérieurs. Cela pourrait se traduire, par exemple, par une attitude non-verbale

bienveillante des sages-femmes (regards envers eux, expression faciale, position tournée

vers les deux parents et non pas le dos tourné aux pères, etc.), mais aussi par le fait de

guider les futurs pères à travers certains gestes, ce qui leur donnerait le sentiment d’être

intégrés et utiles dans le travail de leur partenaire. Par ailleurs, le vécu des pères est

influencé de manière positive lorsque ceux-ci ressentent que les sages-femmes leur portent

de l’intérêt (par exemple, répondre à leurs besoins, les inviter dans la conversation, etc.), et

c’est en ce sens que l’accompagnement des pères en salle d’accouchement peut également

être développé. Cela n’implique pas forcément des changements radicaux dans notre prise

en charge sage-femme, mais plutôt une prise de conscience de l’impact de nos

compétences sage-femme sur l’expérience des pères.

La promotion de l’intégration des pères dans la salle d’accouchement passerait également

par le fait de les impliquer dans les processus de décision, notamment en leur fournissant de

manière spontanée et naturelle des informations sur le déroulement des événements, leur

permettant ainsi de faire des choix éclairés avec leur partenaire.

Enfin, lors de l’apparition de complications, nous pensons qu’il serait important de rediscuter

avec les pères de leur désir de rester dans la salle, afin de prévenir un vécu traumatique de

l’accouchement. Cela nous semble cependant difficile à accomplir dans l’urgence, c’est

pourquoi nous pensons qu’il est important de les informer en prénatal et de rappeler ces

notions à l’accueil du couple en salle d’accouchement.

d. En post-partum

Bien que les résultats de notre RdL ne démontre pas de lien direct entre le vécu de

l’accouchement et la DPP paternelle, nous savons que le stress généré par la grossesse, la

naissance et la restructuration familiale influence le risque de survenue de ce trouble. Or, les

sages-femmes ont un rôle de prévention quant au risque de DPP maternelle, et il serait

intéressant de prendre en compte la DPP paternelle dans cette même perspective.

Nous savons cependant que l’interaction des sages-femmes avec les pères dans le P-P

n’est pas toujours assurée (cela peut être dû, notamment, à la durée du congé de paternité).

L’idée serait ainsi, dans un premier temps, de les intégrer au mieux au sein de leur nouvelle

famille lors du séjour de la mère dans le service du P-P (sauf dans les cas d’accouchement

ambulatoire, à domicile ou en maison de naissance). Pour cela, nous avons plusieurs

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propositions dont il convient d’évaluer la réalisation en fonction de la structure hospitalière

(par exemple, s’il y a des horaires précis pour les soins ou si l’activité et la charge de travail

sont conséquentes dans le service) :

Chercher à interagir avec les pères lors de leurs visites (en posant des

questions ouvertes sur leur état émotionnel, leur vécu de la naissance, leur

fatigue, etc.) et ce, de préférence, par l’intermédiaire d’une sage-femme avec

qui le couple a créé une relation de confiance.

Rappeler aux pères qu’il est toujours possible de revenir ultérieurement pour

discuter de l’accouchement avec un(e) professionnel-le (dans les cas où des

questions resurgiraient ou lors de stress secondaire à l’accouchement).

Aménager des horaires de visite pour les pères (et si cela est possible : leur

permettre l’accès à leur famille en tout temps).

Permettre aux pères de commander des repas pour manger avec leur

partenaire.

Proposer aux pères de participer aux soins de leur nouveau-né (aménager les

horaires des soins en fonction de leurs heures de visite) tout en les laissant

prendre la place qu’ils désirent occuper.

Aider les pères à trouver leur place lors de l’allaitement (aide à la partenaire,

apport de confort et de soutien).

Permettre aux pères de pouvoir dormir avec leur partenaire et leur nouveau-né

s’ils le désirent, et si cela est possible1 (dans les établissements proposant des

chambres à un lit).

Dans un deuxième temps, il s’agirait de pouvoir intervenir lors des visites des sages-femmes

à domicile2, qui mèneraient un entretien détaillé avec la jeune mère / le couple sur leur vécu

de l’accouchement, et qui identifieraient les situations à risque (nous proposons d’ajouter un

aspect « état émotionnel des pères » aux consultations standard). Par ailleurs, les

consultations en lactation3 seraient un autre moyen pour les sages-femmes d’entrer en

contact privilégié avec le couple, et ainsi, de faire émerger les préoccupations issues de leur

nouveau statut (Lombardo, 2013). Un des objectifs de ces interventions serait de rediriger

1 L’UNICEF recommande le « rooming-in » (présence constante du nouveau-né dans la chambre de sa mère

pendant le séjour en P-P) pour favoriser la mise en route de l’allaitement et donc la relation mère-enfant. L’intégration du père dans cette dyade pourrait apporter un soutien supplémentaire. 2 L’assurance de base (LAMal) prend en charge les consultations à domicile dispensées par une sage-femme

jusqu’à dix jours P-P ainsi que la consultation de contrôle à six semaines P-P (FSSF, 2014). 3 L’assurance de base (LAMal) prend en charge jusqu’à trois consultations d’allaitement sur l’intégralité de la

période de l’allaitement (FSSF, 2014).

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les pères vers une prise en charge multidisciplinaire (psychologue, consultation spécialisée

pour revenir sur le vécu de l’accouchement) dans le cas d’une situation à risque.

L’idée serait aussi, dans un esprit de continuité des cours de PANP, de créer un espace de

parole pour les pères (idéalement, le même groupe auquel ils ont participé lors de la

grossesse), où ils pourraient parler de leur expérience de la naissance et des implications de

leur nouvelle paternité avec d’autres pères.

La question de la durée du congé paternité se pose naturellement dans le prolongement de

ce chapitre. Or, l’égalisation des droits en Suisse représente à l’heure actuelle un enjeu

politique (Tribune de Genève, 2014). Nous pensons que le congé paternité permettrait de

promouvoir la santé des familles et des pères, de leur fournir un moyen de se reposer et de

s’adapter à leur nouvelle fonction. C’est également cela qui pourrait, à notre sens, participer

à la prévention de la DPP paternelle et maternelle, puisque, rappelons-le, le manque de

soutien du/de la partenaire est un facteur influençant ce trouble. De même, le congé

paternité pourrait influencer de manière positive le lien père-enfant.

e. Conclusion : enjeux pour la profession sage-femme

Pour la réalisation de ce travail, nous avons délibérément choisi de nous focaliser sur

l’expérience des pères, indépendamment de celle des mères ; bien que nous ne l’ayons

mentionné que très brièvement, nous sommes conscientes que l’accompagnement des

femmes et des nouveaux-nés est au centre de notre métier de sage-femme. Or, nous avons

pu voir que certains phénomènes sont souvent interconnectés (par exemple la satisfaction

des femmes liée à la présence de leur partenaire, les pères qui se sentent rassurés lorsque

les sages-femmes s’occupent de leur partenaire, la DPP maternelle et paternelle, etc.). Ainsi,

l’accompagnement des pères par les sages-femmes représente un enjeu de prévention et de

promotion à la santé des familles, favorisant le lien et l’attachement parents - enfant, la

relation de couple, la santé de l’enfant et diminuant les risques de DPP paternelle.

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H. Forces et faiblesses du travail

L’intérêt de ce travail est qu’il porte sur un sujet actuel qui soulève des enjeux

pluridisciplinaires au sein de notre société (sociologiques, psychologiques, obstétricaux,

politiques, etc.). A l’heure actuelle, l’intégration des pères dans la périnatalité est devenu un

thème transversal dans la pratique sage-femme, quel que soit le champ professionnel

(prénatal, salle d’accouchement, P-P). Cela apparaît d’autant plus dans certaines politiques

familiales (Finlande, Suède, Canada, etc.) Nous pensons donc que les perspectives

professionnelles de ce travail pourraient être généralisés à une plus large échelle.

Les perspectives professionnelles que nous proposons concernent notamment des actions

sage-femme concrètement applicables, sans qu’elles demandent toutes davantage de

ressources matérielles ou économiques.

Les points forts de ce travail sont les découvertes importantes portant sur l’expérience des

pères en salle d’accouchement, le fait que les conclusions portent sur plusieurs champs

professionnels différents et la richesse des résultats apportés par la RdL, composée à parts

égales d’études qualitatives et quantitatives.

Le regret que nous avons par rapport à notre RdL est que nous n’avons pas pu nous limiter

au vécu des pères d’un AVB spontané, sans instrumentation (en raison de la disponibilité

restreinte d’études n’incluant que l’AVB), et cela représente un biais à notre processus de

recherche.

Dans la même optique, il nous tenait à cœur de nous intéresser particulièrement aux

primipères en raison du caractère particulier que peut représenter l’arrivée d’un premier

enfant dans la dynamique familiale, mais nous n’avons pas pu nous restreindre à cela (car

nous n’avons pas trouvé suffisamment d’études qui n’incluaient que les primipères). Nous

regrettons également de ne pas avoir trouvé d’études qui distinguent le vécu des primipères

de celui des multipères car cela aurait apporté plus de profondeur à notre RdL. Cependant,

au terme de ce travail, nous comprenons que les besoins des pères sont très différents et

qu’ils ne se limitent pas qu’à leur histoire obstétricale.

Comme relevé tout au long de ce travail, d’autres recherches mériteraient d’être menées

dans ce domaine, en vue d'une prise en charge holistique de la parentalité et non centrée

sur la dyade mère-enfant.

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I. Conclusion générale

Nous avons pu constater que la naissance représente pour beaucoup de pères une

expérience stressante et inquiétante. Ils ont également de la difficulté à adopter un rôle

précis et à réaliser les attentes qu’ils ont projetées sur le moment de l’accouchement

(notamment sur le soutien qu’ils désirent apporter à leur partenaire). Les résultats ont donc

montré une différence flagrante entre les projections et représentations des pères autour de

l’accouchement et la confrontation avec la réalité. Nous avons par ailleurs été surprises de

remarquer que l’APD favorise nettement un bon vécu de l’accouchement pour les pères.

Nous avons pu identifier les actions qui pourraient être mises en place pour favoriser un bon

vécu, notamment en créant plus d’offre de cours de PANP et en amenant les sages-femmes

à être plus conscientes des besoins des pères. Par ailleurs, l’accompagnement des pères en

salle d’accouchement repose principalement sur des compétences relationnelles (écoute,

intégration, communication non-verbale).

En outre, notre travail met particulièrement bien en évidence le fait que les sages-femmes

peuvent agir en amont (PANP, consultations prénatales) et en aval (groupes de pères,

consultation d’allaitement, visites P-P à domicile) du moment de l’accouchement pour

promouvoir un bon vécu de l’accouchement chez les pères, leur bien-être en général et

prévenir certaines complications.

D’une manière générale, ce travail souligne le fait que les pères font partie intégrante du

processus de périnatalité et qu’ils ont besoin d’être reconnus comme tels par les

professionnel-le-s. A notre sens, la conclusion importante à retirer de ce travail est l’immense

diversité des pères, et le fait qu’un accompagnement personnalisé pour chaque père

implique une considération de son contexte bio-psycho-social.

L’élaboration de ce travail a renforcé notre sensibilité sur le thème de l’accompagnement des

pères dans la périnatalité, et nous porterons certainement une attention particulière à la prise

en charge des pères tout au long de notre carrière de sage-femme. Ce travail nous a apporté

des raisons et des motivations pour favoriser l’intégration et le bien-être des pères par

différents moyens cités dans les perspectives professionnelles (projet de PANP, site Internet,

accompagnement personnalisé). Les hypothèses et les interrogations concernant

l’accompagnement des pères que nous avions élaborées lors des expériences

professionnelles acquises dans le cadre de notre formation (sur leur vécu et sur certains

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gestes que nous adoptions et qui semblaient les aider) se sont avérées légitimes et cela a

confirmé notre engagement dans ce thème qui nous tient à cœur.

Des perspectives de changement se profilent à l’issue de ce travail ; tout d’abord, c’est au

niveau sociétal que la manière dont on conçoit la paternité est appelée à évoluer, car nous

nous rendons compte que la société a encore besoin de s’adapter au fait que la place des

pères n’est plus celle qu’elle était il y a quelques décennies. Ensuite, c’est au niveau

politique que des améliorations peuvent être apportées, notamment concernant

l’élaboration d’une loi sur le congé paternité ou l’augmentation des emplois à temps partiel.

En effet, en Suisse, bien qu’une amélioration ait été constatée depuis les dix dernières

années, seulement 12,6% des hommes salariés travaillent à temps partiel (Office Fédéral de

la Statistique, 2009, cité par Briner, 2010). Les employeurs seraient souvent réfractaires à

cette idée et les hommes n’oseraient pas le demander. Un objectif serait donc de sensibiliser

les entreprises a avoir une politique plus flexible quant aux temps de travail, ce qui

permettrait ainsi aux pères d’allier leur vie professionnelle avec leur vie familiale (ibid., 2010).

Enfin, c’est au niveau professionnel que se dessinent également les perspectives d’avenir

en lien avec l’accompagnement des pères. Cette sensibilisation peut s’appliquer aux sages-

femmes, mais également à d’autres professions de la santé qui sont également touchées par

ce sujet, comme par exemple, les gynécologues-obstétricien-ne-s, les éducateurs/rices de la

petite enfance, les pédiatres, les psychologues ou les assistant-e-s sociaux/les.

Nous pensons que d’autres recherches en lien avec les pères pourraient être menées, afin

d’apporter davantage d’informations sur le sujet et de nouvelles conclusions. Cela

permettrait de donner de l’ampleur à cette problématique au sein des milieux professionnels.

Nous imaginons notamment que des études futures pourraient s’intéresser au lien entre le

vécu de l’accouchement et la DPP paternelle (en étudiant notamment l’influence sur la

relation du couple ou sur l’attachement père-enfant) ; on pourrait également imaginer une

étude sur la différence de vécu entre des primipères et des multipères. Enfin, il serait

intéressant d’étudier les perceptions de l’équipe médicale envers la question des pères en

périnatalité (intégration, rôles, place, etc.), afin de mieux comprendre d’où peuvent venir

certaines pressions ou hostilités ressenties par les pères.

Pour conclure ce travail, nous pouvons relever qu’un des éléments qui pourrait s’opposer à

la présence des pères dans la périnatalité – et plus particulièrement en salle

d’accouchement – est l’utilisation du vocable « maternité » dans notre langue française (ou

« hôpital mère-enfant »). En effet, c’est le nom que porte généralement l’établissement où

viennent accoucher les femmes. Cela est notamment dénoncé par certains pères qui

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réclament une « materpaternité » ou une « parentalité » (Missonnier in Robineau, 2010,

p.101). Certain-e-s auteur-e-s critiquent également cela : Aubert-Godard relève que ce terme

est trop centré sur les mères et leur enfant, tout en masquant la paternité sous-jacente (in Le

Roy, 1996, p.137). Enfin, This & Belaiche (2011) critiquent cet intitulé qui révèle les

représentations de notre société et du milieu professionnel (p.120). Nous pouvons remarquer

que les « maisons de naissance », autre lieu pour accoucher avec des sages-femmes, ont

adopté un vocable plus ouvert et respectueux envers les pères. Nous pourrions aussi

proposer un terme plus neutre pour les institutions hospitalières, comme une « natalité », ou

un « centre de naissance ».

Ainsi, à la conclusion de ce travail, nous souhaiterions pouvoir contribuer à une avancée sur

la question de l’intégration des pères en périnatalité à travers les différentes propositions

amenées dans ce mémoire.

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K. Annexes

a. Annexe 1

Tiré de Bauer & Penet, 2005

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b. Annexe 2

Fiche destinée aux futurs pères

Nous souhaitons améliorer l’intégration et le vécu des pères en salle d’accouchement. Cette fiche peut amorcer une réflexion qui vous aidera à vous préparer au jour de l’accouchement et donnera aux sages-femmes une meilleure connaissance de vos attentes et de vos besoins. Le partage de ces réflexions avec votre partenaire et avec les sages-femmes permettra de prendre en compte vos besoins au même titre que ceux de votre partenaire. Après lecture, vous pourrez prendre un rendez-vous individuel avec les sages-femmes, qui répondront à toutes vos questions, et pourront discuter d'éventuelles divergences entre vos attentes et celles de votre partenaire. (Adresse de l’établissement, numéro de téléphone, site Internet de référence et horaires d’ouverture). Vos attentes liées au jour de l’accouchement vous appartiennent et les sages-femmes sont présentes pour vous accompagner dans vos choix (pour autant que ceux-ci soient réalisables).

Quelques pistes de réflexion :

1. Vous êtes sur le point de vivre les étapes de la grossesse, de l’accouchement et de la

transition vers la paternité. Vous sentez-vous prêt pour cela ?

2. Quelles seraient les ressources pouvant vous aider à vivre cette grossesse,

l’accouchement et la transition vers la paternité ? (Exemples : cours de préparation à la naissance et à la parentalité avec une sage-femme, lectures, communication avec votre partenaire, partage d’expérience avec d’autres parents, accompagnement par un psychologue, divers cours de relaxation, etc.)

3. Désirez-vous être présent le jour de l’accouchement ?

4. A qui appartient ce choix (Exemples : à vous-mêmes, à votre partenaire, à l’équipe

médicale, à la société, etc.) ?

5. Quelle place souhaiteriez-vous prendre auprès de votre partenaire lors du travail de

l’accouchement et de la naissance ?

6. Quelle place votre partenaire souhaiterait-elle que vous preniez auprès d’elle ce jour là ?

7. Quels sont les éléments qui vous tiennent à cœur pour la naissance de votre enfant ?

(Exemples : couper le cordon, le prendre dans les bras, donner le premier bain, le présenter à la famille, permettre une mise au sein rapide, permettre à votre partenaire de l’avoir dans les bras le plus longtemps possible, avoir une photo de cet instant, etc.)

8. Quels sont les éléments que vous préféreriez ne pas voir ou ne pas faire ? (Exemples :

assister à la naissance, assister aux touchers vaginaux, voir les douleurs de votre partenaire, voir le placenta, habiller votre bébé, le porter dans les bras, etc.)

9. Quelles sont vos attentes vis-à-vis de l’équipe médicale ? (Exemples : qu’elle vous donne

des informations tout au long du travail et de l’accouchement, qu’elle vous guide dans votre rôle, qu’elle vous apporte du soutien et vous rassure, qu’elle s’occupe uniquement de la sécurité de votre femme et votre enfant, etc.)