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«La matière n’est plus formée, elle est informée, conformée par la forme notationnelle
du système» .Meier (2007)
Cohousing : Vers une météorologie à habiter Quartier St-Sauveur, Québec
essai (projet) soumis en vue de l’obtention du grade m. arch école d’architecture de l’université laval . hiver 2013
Patrick Maheux Image conceptuelle de l’auteur
3
Avant-propos
Marie-Chantal, merci pour ton «calme olympien» et la confiance mise envers le processus
exploratoire qui n’était pas toujours facile à suivre.
Christelle et Sébastien, merci d’avoir fait partie de l’équipe Croft.
Les amis (es) de l’atelier, merci pour les discussions profondes sur les questions d’architectures,
la musique émancipatoire, les délires loufoques, bref, les petits plaisirs.
Julie, merci pour ta patience et ton support indispensable.
5
Résumé
Cet essai-projet s’intéresse à une approche systémique de la conception architecturale basée
sur des prémisses bioclimatiques et programmatiques. L’émergence des solutions
architecturales provient d’un développement formaliste combinatoire, logique, critique et
hiérarchique en regard de 3 paramètres fondamentaux de travail qui sont établis comme étant;
la lumière, la température et les relations publics/privés relatives au programme, dans ce cas-ci,
le cohousing. Ces paramètres se travaillent à partir d’études d’ensoleillement, de vents et de
relations programmatiques inhérentes au type de programme. Le but sous-jacent une telle
approche est d’informer et conformer le système architecturale aux contraintes relatives aux 3
paramètres de travail afin d’en arriver à une solution météorologique optimale en terme
d’économies énergétiques, de confort et de bien-être des occupants. Le terme
«météorologique» reprend les grandes lignes de la théorie de l’architecte suisse Philippe Rahm
qui prône l’émergence du programme architectural de façon inattendu en considérant le
rapport du corps humain (actif, inactif, digestif) en lien avec les climats intérieurs (température,
humidité) émergeant. Concrètement, les thèmes importants abordés sont l’apport en lumière
naturelle, le chauffage passif, l’occultation solaire, la ventilation naturelle et la disposition
optimale du programme vis-à-vis la performance de ces thèmes. Les outils technologiques à
notre disposition sont indispensables afin de concrétiser les données météorologiques. Le travail
s’effectue systématiquement du générique au spécifique. Ainsi, les émergences
météorologiques envisageables selon la forme développée provoquent des possibilités
d’optimisation du programme architecturale en termes d’économies énergétiques, de confort et
de bien-être des occupants. La philosophie et les qualités du programme architectural d’un
projet de cohousing et son importance sociale s’inscrivent bien dans la logique de l’approche
fondée sur l’économie de coûts et le développement durable.
Somme toute, l’objectif du projet est d’arriver à concevoir un système architectural ayant un
rapport optimal dans sa relation au climat, en terme de performance bioclimatique, et
possédant un programme hiérarchisé quant à ses températures en rapport à l’humain, le tout
dans le cadre d’un projet où la quête ultime est d’être économique, écologique et social c’est
donc dire un exemple en terme de développement durable.
7
Membres du jury
Marie-Chantal Croft | Architecte associée, Coarchitecture (superviseur)
Olivier Jacques | Étudiant-doctorant, École d’architecture de l’université McGill
Élodie Nourrigat | Professeur, École nationale supérieure d’architecture de Montpellier
Jacques Plante | Professeur agrégé, École d’architecture de l’université Laval
8
Table des matières
Avant-propos 3
Résumé 5
Membres du jury 7
Table des matières 8
Liste des figures 10
Introduction 13
1. Cadre théorique 14
1.1. Météorologie à habiter : La théorie de Philippe Rahm 14
1.1.1. Architecture et climat : Formalisation du système météorologique 16
1.2.La machine abstraite et ses outils de qualifications et quantifications. 17
1.2.1. La machine abstraite 17
1.2.2. Les outils de qualifications et quantifications 19
1.3. Météorologie à habiter fonctionnellement programmée 20
1.3.1. Ajustement de la théorie de Rahm 20
1.4.Le cohousing et ses principes comme plate-forme expérimentale 22
1.4.1. Les notions élémentaires 22
2. Cadre méthodologique 23
2.1. Le processus du projet 23
2.1.1. L’expérimentation du site : Générateur du projet 24
2.1.2. Le processus itératif 24
2.1.3. Fonctions : Émergence de nouvelles relations entre l’individu et son environnement 25
2. Le développement du projet 26
3.1. Les données de base – Vers la critique préliminaire 26
3.1.1. Le site d’intervention 26
3.1.2. Les données climatiques de base 27
3.1.3. Les intentions préliminaires 29
3.1.4. Les commentaires 29
3.2. L’architecture et son climat – Vers la critique intermédiaire 30
3.2.1. Les itérations 30
3.2.2. L’enveloppe solaire 32
9
3.2.3. Météorologie à habiter fonctionnellement programmées 37
3.2.4. Les commentaires 38
3.3. Le climat, l’architecture et l’être humain – Vers la critique finale 39
3.3.1. Le climat et l’architecture 39
3.3.2. Météorologie à habiter 41
3.3.3. Les systèmes écologiques et économiques 41
3.3.4. Les commentaires 42
Conclusion 44
Bibliographie 49
Annexes 51 I. Les 10 principes du cohousing
II. Quelques itérations préliminaires : l’avant enveloppe solaire.
III. Le développement du système d’enveloppe solaire.
IV. Les planches de la critique finale. (Le 19 avril 2013)
10
Liste des figures
Figure 1 : Analyse des différents niveaux de température (météorologie d’intérieure) par Rahm dans le cadre d’un projet de musée d’Art contemporain de Wroclaw en Pologne. Source : Rahm (2009)
Figure 2 : Analyses virtuelles par la firme de Norman Foster pour la complexe d’Al Raha afin d’optimiser la conception du bâtiment dans l’interaction du bâti avec le vent (gauche) et le soleil (droite). Source : Rahim (2002)
Figure 3 : La maison Archimède de Philippe Rahm. Source: Rahm (2009)
Figure 4 : Spatialisation des fonctions dans la forme thermique de l’air pour la maison Archimède de Philippe Rahm. Source : Rahm (2009)
Figure 5 : Site d’intervention. Source : googlemaps (en ligne)
Figure 6 : Étude d’ensoleillement préliminaire sur le site d’intervention. Source: Maheux (2013)
Figure 7: Exemple d’itération systématique, dans ce cas-ci la #3, testé selon les critères d’aptitudes 2 et 3 dans le cas de l’image du haut et selon le critère 1 dans le cas de l’image du bas. Sources : Maheux (2013)
Figure 8 : Exemple de développement volumétrique de l’enveloppe solaire et démonstration d’une transition possible vers un résultat architectural.
Figure 9 : Données graphiques relatives au rayonnement solaire sur le site d’intervention, en date du 21 décembre, fournit par l’outil sunearthtools. Source : sunearthtools (en ligne)
Figure 10 : Données mathématiques relatives au rayonnement solaire sur le site d’intervention,en date du 21 décembre, fournit par l’outil sunearthtools. Source :sunearthtools (en ligne)
Figure 11 : Coupe du système d’enveloppe solaire développé. Source :Maheux (2013)
Figure 12 : Étude d’ensoleillement du système d’enveloppe solaire sur le site d’intervention. Source : Maheux(2013)
11
Figure 13 :Analyse du critère d’aptitude #3 concernant le contrôle des zones d’ombres où l’ombrage créé par le tissu bâti avoisinant et même celui créé par les volumes habitables du projet n’a pas d’incidence néfaste majeure sur les autres. Source : Maheux (2013)
Figure 14 : Coupe thermique analysant le rapport du système architectural au climat et hiérarchisation du programme selon les paramètres de travail. Source :Maheux (2013)
Figure 15 : Implantation axonométrique présentée lors de la critique finale. Source : Maheux (2013)
Figure 16 : Plan d’étage et étude annuelle de l’apport en lumière naturelle présenté lors de la critique finale. Sources : Maheux (2013)
13
Introduction
Les politiques de développement durable représentent aujourd’hui un facteur déterminant du
renversement du processus de conception architectural. Jason F. Mclennan mentionne dans son
œuvre intitulée The philosophy of sustainable design que l’architecture bioclimatique deviendra,
dans la prochaine décennie, le «parti» de la conception architecturale : «In the coming decades
green architecture will move from a fringe activity to become the dominant approach to
design»1. La pratique architecturale doit dépasser les réponses couramment apportées lors de
l’apparition d’innovation, qui se contentent d’adapter les nouvelles techniques sur des
typologies déjà existantes. La réalisation du possible sur des formes déjà prédéfinies n’ajoute
rien au projet excepté de la réalité (DeLanda, 2000). Le philosophe français Henri Bergson qui,
au tournant du siècle, a critiqué sévèrement l’inhabilité du domaine des sciences de l’époque à
penser d’une nouvelle manière ou d’adapter son approche, affirme que le premier obstacle au
développement topologique en architecture est ce regard mécanique et linéaire de causalité et
le déterministe rigide que cela implique (De Landa, 2000). Ce regard induit un manque d’identité
et de singularité du cadre bâti. Le développement topologique et fonctionnel en architecture
doit transgresser la limite du déjà vu pour proposer un système évolué, mieux adapté à notre
réalité, à l’heure où la terre ne cesse de trembler sous nos pieds (Borassi, 2006). À l’ère où nous
possédons tous les outils nécessaires à l’étude des données climatiques ainsi que ceux
nécessaires à la création de nouvelles typologies architecturales, nous devons en arriver à
développer une nouvelle technique de conception se détachant des techniques déjà bien
enracinées dans la pratique.
«Ce mode singulier de spatialisation dépasse les analyses sociales et culturelles traditionnelles du lieu, de la forme et du sens et devient de fait un formidable outil de résistance à la normativité.»
. Meier (2008)
1 F. Mclennan, Jason. The philosophy of sustainable design. Ecotone publishing company, Canada. 2004. 324p.
14
1. Cadre théorique
Cette section fait état de toute la théorie entourant la position du concepteur vis-à-vis du projet.
Elle établit les bases d’un processus de projet qui cherche à développer les outils et les
méthodes de travail propres à une démarche axée sur le développement durable, la position
topologique en architecture et les relations de l’être humain à son climat habité.
1.1. Météorologie à habiter : La théorie de Philippe Rahm
Philippe Rahm, architecte diplômé de l’école polytechnique fédérale de Lausanne et de celle de
Zurich et représentant de la Suisse à la 8e biennale d’architecture de Venise en 2002, suggère
l’observation et la mesure de conditions de vie élémentaires comme la température, l’humidité,
et la lumière qui ont toutes un effet direct, autant physique que psychologique sur la vie
humaine. Rahm s’inspire, en quelques parties, de la théorie de Louis Kant (fonctions follows
form) (la fonction suit la forme) suivant le fait que Kant concevait un ensemble d’espaces
hiérarchisés un par rapport à l’autre, créant un cadre structurellement rigide, mais
programmatiquement ouvert. Rahm, pour sa part, travaille à un renversement des méthodes
traditionnelles du projet, il prône la prise en compte, dès la conception, des nouvelles
techniques, pour pouvoir matérialiser de nouvelles formes et de nouveaux usages, non encore
totalement identifiés. Dans une optique et une méthodologie suivant les principes du
développement durable, le propos de Rahm est de «questionner ce rapport entre la forme et la
fonction à partir de la relation contingente entre l’architecture et le climat» (Borassi, 2006).
Selon lui, il s’agit «d’arriver à une architecture libre de prédéterminations formelles et
fonctionnellement déprogrammée, une architecture qui serait ouverte aux variations
météorologiques et saisonnières, aux alternances du jour et de la nuit, au passage du temps, au
surgissement de fonctions ignorées et de formes inattendues»2.
La théorie de Rahm est d’actualiser cette relation de l’architecture au climat, qu’il soit naturel ou
artificiel, à l’ère du développement durable. Il soutient que la forme architecturale devrait surgir
spontanément du climat et devenir comme une météorologie d’intérieur. Pour ce faire, Rahm
utilise ce qu’il appelle ses 3 paramètres de travail fondamentaux pour les économies
énergétiques c’est-à-dire, la température (T), la lumière (lux) et l’humidité relative(H), desquels
il établit un rapport entre formes et fonctions en faisant apparaître des usages de l’espace
2 CCA (BORASI, Giovanna). Environ(ne)ment, Manières d’agir pour demain|approaches for tomorrow. Skira Editore, Italie. 2006. p.131
15
déterminés par la concordance aléatoire de ces 3 paramètres. Rahm supporte son idée en
faisant l’analogie avec les maisons des vieux quartiers à Bagdad, qui, en coupe, définissent une
série d’espaces, de la cave au toit, avec des températures variant respectivement de 30oC à 50oC
et des taux d’humidités allant de 70% à 15%. En ce sens, le nom des pièces d’une maison ne
désigne souvent pas une fonction, mais plutôt une qualité climatique. Par ailleurs, Rahm
effectue un travail similaire dans le cadre du projet de musée d’Art contemporain de Wroclaw
en Pologne. Par l’analyse des différents niveaux de température (météorologie d’intérieur), il
souhaite voir l’émergence du programme selon le besoin en température de chacune des
fonctions où, par exemple, celles près de 16o C sont pour le stockage et les locaux peu utilisés et
celles près de 22o C pour les bureaux. C’est ce que Rahm recherche, une architecture
formellement libre d’aménagement des espaces et ouverte aux interprétations en vue
d’accueillir des comportements et des modes de vie inattendus. En somme, Rahm est à la
recherche d’une architecture dont le but est d’être là avant d’être quelque chose»3 (figure 1).
D’autre part, Rahm cherche à éliminer toute programmation prédéterminée de l’espace. Il
cherche, à travers sa pratique architecturale, à produire du sens, donner matière à illustrer et
présenter des espaces et des temporalités physiques, climatiques, géographiques et
physiologiques. Il souhaite instaurer une liberté d’usage et d’interprétation à travers, ce qu’il
appelle, sa météorologie d’intérieure. Rahm mentionne que fonctionnellement, ce qui
3 CCA (BORASI, Giovanna). Environ(ne)ment, Manières d’agir pour demain|approaches for tomorrow. Skira Editore, Italie. 2006. p.133
Figure 1 : Analyse des différents niveaux de température (météorologie d’intérieure) par Rahm dans le cadre d’un projet de musée d’Art contemporain de Wroclaw en Pologne. Source : Rahm (2009)
16
l’intéresse est la manière dont un problème ou une solution architecturale ont pu provoquer
l’apparition de modes de vie nouveaux et imprévus. À titre d’exemple, il illustre l’utilisation de la
pièce appelée «voûte» dans les nombreux villages français, qui servait à la fois d’étable, de
réserve à fumier et de salle pour la vie familiale. Il soutient qu’on y pratiquait, durant les soirées
d’hiver, la veillée pour profiter de la chaleur (T) dégagée par les animaux et par la fermentation
du fumier ce qui résolvait un problème thermique tout en générant une pratique sociale. C’est à
ce niveau que sa théorie intervient : créer une architecture formellement rattachée à un
concept climatique et fonctionnellement libre d’interprétation d’usage selon le besoin. Somme
toute, Rahm cherche à rendre l’espace construit plus libre, de le sortir de sa détermination
fonctionnelle univoque pour le rendre interprétable.
Bref, les propos de Rahm relancent le débat sur l’idéologie traditionnelle de la conception
architecturale. Par sa méthode, il propose une voie par laquelle les contrôles climatiques, autant
naturels qu’artificiels, œuvreraient sur une forme libre de toutes prédéterminations
fonctionnelles. Par la même occasion, il évoque la variation de la forme architecturale et de ses
usages au même titre que les variations des milieux qui ont transformé le cours de l’histoire des
peuples.
1.2.1. Architecture et climat : Formalisation du système météorologique
Par ailleurs, la question de l'existence objective d'un problème et des schémas qui le définisse
est une question cruciale dans la philosophie de Deleuze concernant la matière et la forme. La
philosophie Deleuzienne vise à remplacer les conceptions essentialistes de genèse de la forme
qui impliquent une conception avide de sens provenant de l’extérieur par une genèse de la
forme provenant d’un principe morphogénétique où les schémas qui définissent un système
sont capables de générer leur propre forme (De Landa pour Deleuze, 2000). Plus concrètement,
dans notre cas, la forme devrait surgir ou être le résultat d’une boucle itérative analysant les
contraintes climatiques d’un site. Les critères d’aptitudes sont relatifs à l’emplacement du site
de travail. Le fait que celui-ci soit positionné en montagne, dans une plaine ou en milieu urbain
risque d’entraîner une modification de quelques-uns des paramètres. Par essais et erreurs, à
travers l’analyse des critères d’aptitudes fixés préalablement, on tente d’en arriver à une
solution climatique optimale en considérant l’ensemble des facteurs fixés préalablement. Les
rétroactions vis-à-vis des itérations se produisent à ce moment, c’est-à-dire qu’en regard des
topologies développées, le modèle est jugé selon les critères d’aptitudes (contraintes et
17
objectifs) et tel un algorithme, les éléments jugés pertinent sont conservés et les autres données
sont retirées. Le processus se développe et la rétroaction en boucle s’alimente des éléments
jugés pertinents jusqu’à l’émergence de la solution optimale. Le travail s’effectue
systématiquement du générique au spécifique. Les outils technologiques à notre disposition,
tels que les systèmes géoréférencés et de simulations, sont un indispensable dans l’idéologie de
la forme, car ils permettent la simulation de formes virtuelles jusqu’au développement de
modèles numériques en lien direct avec la somme des données du site prises en compte. Les
notions de proportion et d’échelle ne sont plus considérées, on envisage dorénavant le projet
comme étant le détail et son entièreté à la fois, c’est-à-dire qu’on considère le projet comme
une entité singulière, un système. À la manière de Peter Eisenman, Norman Foster, OMA et BIG,
pour ne nommer que ceux-là, on ne cherche pas nécessairement à enraciner le projet à son lieu,
mais plutôt d’expérimenter celui-ci (figure 2). La forme est une réponse à un idéal climatique et
technique propre à son lieu.
Bref, l’algorithme des données climatiques et techniques subsistantes dans l’environnement
immédiat du projet devrait, en somme, proposer un surgissement formel inattendu optimisé.
1.3. La machine abstraite et ses outils de qualifications et quantifications.
1.3.1. La machine abstraite
Les paramètres de travail que sont la température, la lumière et l’humidité relative dans le cas
de Rahm par exemple, sont issus de l’invisible, de l’intangible. Ils ont une forte influence sur la
morphologie architecturale mais n’ont pas ou presque pas d’influence perceptible par l’œil sur
le bâti. Plusieurs auteurs réfèrent ce rapport de force intangible à ce qu’ils appellent la
«machine abstraite». La «machine abstraite» opère selon les forces et la hiérarchie de données
et non par substance. Elle opère par la fonction de la chose et non par la forme. Manuel
DeLanda, philosophe, écrivain, artiste et également professeur associé à la Graduate School of
Figure 2 : Analyses virtuelles par la firme de Norman Foster pour la complexe d’Al Raha afin d’optimiser la conception du bâtiment dans l’interaction du bâti avec le vent (gauche) et le soleil (droite). Source : Rahim (2002)
18
Architecture, Planning and Preservation de l’Université Columbia à New York, précise
concernant les fondements de la «machine abstraite» qu’elle permet de comprendre une réalité
de façon paramétrique en posant les relations et contraintes selon la nature des éléments
composant un système. Intellectuellement, la machine abstraite prend ses fondements sous la
théorie du pragmatisme. Elle représente une méthode de pensée et d'appréhension des idées
qui s'oppose aux conceptions cartésiennes et rationalistes sans renoncer à la logique. «Selon la
perspective pragmatique, penser une chose revient à identifier l'ensemble de ses implications
pratiques car seules ses implications confèrent un sens à la chose pensée. Les idées deviennent
ainsi de simples, mais nécessaires, instruments de la pensée.»4 Quant à la vérité, elle n'existe
pas à priori, mais elle se révèle progressivement par l'expérience. En simplifiant la chose, on
peut s’en tenir à la doctrine selon laquelle l’intelligence a pour fin la capacité d’agir, et non la
connaissance.
La machine abstraite est donc un outil issu d’un processus non-linéaire où la pensée pose les
généralités de la logique inhérente aux objectifs conceptuels. Le projet d’architecture n’a plus
de début, de milieu et de fin : le processus remplace le but. Le projet n’est plus seulement défini
par un bâtiment, mais peut aussi l’être par des spéculations théoriques ou des recherches.
MVRDV, firme d’architecture néerlandaise reconnue à travers le monde, a une fascination pour
l’utilisation de méthodes radicales de conception. La firme suggère que le processus de design
contemporain s’accompagne d’une grande complexité de données de base relatives au projet.
La firme ne croit pas nécessairement à un processus linéaire de conception, elle mentionne, au
contraire, en rapport à l’utilisation des nombreuses données à travers un procédé
paramétrique : « […] MVRDV feel that the ready manipulability of data allows them to treat
architecture as a form of research»5 soulignant ici ce renversement de l’approche architecturale
qui devient un processus évolutif de recherche en regard des itérations fournies par la machine
et des paramètres qui l’alimente. On parle désormais d’un processus rétroactif entre les
données fournies à la machine, qui nourrissent un système, et l’argumentation active des
concepteurs faite à travers ces multiples itérations. En plus d’être un outil de rétroaction entre
les données et les concepteurs, le procédé paramétrique est un processus génératif d’un
nombre infini de modèles où l’objectif de l’algorithme est de parachever un équilibre entre une
série de paramètres en aboutissant à une solution optimisée. Dans ce processus rétroactif, suite 4 Le petit Larousse illustré. 2005. «pragmatisme» 5 Patteeuw, Véronique. Reading MVRDV. NAi Publishers, Rotterdam. 2003. P.13
19
à chacune des itérations, une estimation selon des critères d’aptitudes fixés au préalable sont
attribués à chacun des paramètres. «Ainsi, la prochaine itération tient compte de ce qu’elle a
déjà appris, afin de diminuer le champ des possibilités par une rétroaction en boucle.
(feedback)»6 L’algorithme est le résultat d’une complexe rétroaction en boucle existant entre la
technologie et la culture. Ainsi, l’avenir des techniques contemporaines de conceptions réside
dans ce processus rétroactif entre l’homme et la machine où, l’homme, est capable de tester
instantanément l’effet produit par la technique générative.
L’approche traditionnelle au projet d’architecture basée sur des valeurs subjectives connait
désormais un renversement et se retrouve reléguée au second plan. L’objectivité de la
démarche dans le processus itératif est la tangente adoptée et la subjectivité du concepteur lui
sert dans l’analyse des critères d’aptitude. DeLanda renchérit l’idée de la «machine abstraite» à
travers l’utilité de l’algorithmique en affirmant que l’utilisation de celle-ci remplace les notions
prédéterminées à une cause donnée par un procédé non-linéaire de la pensée générant des
espaces riches et fertiles souvent inattendus. Il ajoute, par le fait même: «For the evolutionary
result to be exceptional, and sufficiently open-ended to make it impossible for the designer to
consider all possible configurations in advance. These create emergent organisations of several
variations instead of singular static object. »7. Cette affirmation de DeLanda illustre l’envergure
de la technique contemporaine de conception en architecture dans une quête de l’inattendu,
d’un surgissement.
Le processus génératif découlant de cette rétroaction entre l’homme, sa pensée et les modèles
(itérations) fournis par la machine et/ou les modèles analogiques dans certains cas rend possible
la considération d’éléments conceptuels qui, sans l’outil, n’auraient pu l’être.
1.3.2. Les outils de qualification et quantification
Il existe plusieurs outils à notre disposition nous permettant que qualifier et quantifier les
notions invisibles ou intangibles que sont l’ensoleillement et la température, par exemple. Le
système géoréférencé d’ensoleillement de Sketch-up nous permet de simuler directement
l’effet de l’ensoleillement sur la zone d’étude pour tous les jours et les heures de l’année. L’outil
nous permet ainsi d’évaluer rapidement les qualités du système architectural développé
6 Teyssot, Georges. 2011. Diagrammes machiniques. En ligne. 7 Rahim, Ali. Contemporary Techniques in Architecture. Architectural design (Wiley-Academy), London. 2002. P.9
20
concernant le rapport au rayonnement direct (chauffage passif) et occultation solaire. Par
ailleurs, l’outil de simulation des ambiances physiques Ecotect est performant à plusieurs
niveaux. Selon le système architectural développé, il permet de quantifier l’apport en lumière
naturelle dans chacun des espaces et l’apport en chauffage naturel relatif au rayonnement
direct. Autant à l’échelle macroscopique qu’à celle du détail, ces 2 outils s’avèrent très utiles.
Par contre, Sketch-up est davantage un outil qualitatif et/ou de visualisation rapide tandis
qu’Ecotect est davantage un outil quantitatif.
1.2. Météorologie à habiter fonctionnellement programmée
1.3.3. Ajustement de la théorie de Rahm
L’idée sous-jacente la météorologie à habiter, au niveau de la fonction, permet de hiérarchiser,
d’établir des rapports de proximité ou de distance, de connexion ou de séparation entre les
espaces ainsi que le rapport de volumes entre les besoins de l’homme et l’efficacité du/des
paramètres (température, lumière, relations publics/privés). Le diagramme devient,
concrètement, l’outil désignant par la quantification et la qualification, la logique de l’intangible.
L’intangible se traduit comme la relation de l’homme avec les 3 paramètres de travail, en
d’autres mots, il se traduit comme la relation entre l’habilé et le déshabillé, l’actif et l’inactif, le
jour et le soir, la présence et l’absence et le tout en relation avec la lumière et la température.
L’architecte suisse Philippe Rahm exploite, en partie, la hiérarchisation fonctionnelle en
considérant le paramètre de la température (oC), par exemple, pour spatialiser des rapports de
volume et de connexion. Dans son projet de Maisons Archimèdes (figure 3), il cherche à établir
une relation intrinsèque entre la maison et l’air, en spatialisant les fonctions de l’habitation dans
Figure 3 : La maison Archimède de Philippe Rahm. Source: Rahm (2009)
21
la forme thermique de l’air (figure 4). Ce qui est intéressant dans cet exemple est le
façonnement de l’espace selon un paramètre invisible qui est l’air et sa température. Le
développement d’outils capables de concrétiser tangiblement des données mathématiques
et/ou climatiques concernant la température est mis à profit dans ce cas-ci. Les émergences
climatiques envisageables selon la forme développée provoquent des possibilités de
détermination de programme susceptibles d’être optimisées en termes d’efficacité énergétique
relativement au confort, bien-être et productivité des occupants. En ce sens, en contrôlant de
manière rigoureuse l’interaction des paramètres intérieurs en relation avec l’activité humaine,
nous pourrions en arriver à une programmation énergétiquement efficace et définie. Ainsi, la
rétroaction entre les topologies développées et la relation intrinsèque des critères d’aptitudes
fixés pour la détermination du programme devrait conduire à un idéal fonctionnel.
Concrètement, une fois le système architectural bien connu, il est possible de qualifier et
quantifier les espaces intérieurs en terme de température et lumière et d’établir une relation,
un rapport optimal entre l’humain et son milieu. Contrairement à Rahm, l’idée n’est pas de faire
Figure 4 : Spatialisation des fonctions dans la forme thermique de l’air pour la maison Archimède de Philippe Rahm. Source : Rahm (2009)
22
surgir des fonctions inattendues de manière aléatoire, mais d’en arriver à une solution optimale
de confort, de productivité et de bien-être contrôlée et définie. Les connaissances spécifiques au
domaine climatique et aux notions de développement durable du concepteur devraient lui
permettre de comprendre et de contrôler ce surgissement météorologie à habiter. De la sorte,
celui-ci pourrait maximiser ses efforts de conception durable et du même coup, proposer des
espaces où ces météorologies seraient entièrement contrôlées.
1.4. Le cohousing et ses principes comme plate-forme expérimentale
Dans le cadre de ce projet, le cohousing a été choisi comme plate-forme expérimentale afin de
tester l’effet produit par la démarche architecturale. Il est donc essentiel de décrire les
fondements de ce type d’habitation.
1.4.1. Les notions élémentaires
Un projet de cohousing concerne des gens de tout âge qui recherchent un style de vie coopératif
et social en milieu urbain. Ces gens souhaitent une proximité des services, du travail, de l’école
pour les enfants mais également une vie de communauté où le voisinage se côtoie et participe
activement à la qualité de vie de tous et chacun. Normalement, la première étape d’un projet de
la sorte est la formation d’un groupe qui partage des philosophies de vie similaire en lien avec la
façon d’habiter. Le comité formé, celui-ci se porte acquéreur d’un terrain, d’une parcelle où le
futur projet d’habitation pourra être construit. Les architectes sont engagés par le comité avec
qui le projet est développé. L’idée est de créer une densité et une mixité sociale au profit
d’espaces intérieurs et extérieurs communs et, en plus, de réduire les coûts reliés à l’acquisition
d’une nouvelle habitation. Chacune des unités d’habitation peut voir sa superficie diminuée au
profit des espaces communs. De plus, une maison commune comportant entre autre une
cuisine, une salle à manger, des espaces de jeu, de rencontre et de détente est construite
(Durrett, McCamant 1994 et 2011).
23
1.4.2. Les 10 principes du cohousing8 9 10
À travers les lectures effectuées sur le sujet, dix principes ont été ciblés comme étant les dix
règles de base à respecter pour concevoir un bon cohousing (voir annexe I) :
1-Un contact visuel entre plusieurs voisins.
2-Le voisinage tend à entourer l’espace de jeu des enfants.
3-Forcer les gens à passer à travers ou par la maison et la terrasse commune sur leur chemin
d’aller ou de retour.
4-Le stationnement est détaché du développement.
5-Supporter la sociabilisation par l’insertion de points-relais incitant à l’arrêt, la réunion.
6-Posséder un nombre d’habitations variant entre 15 et 34.
7-La maison commune et les autres services communs sont le cœur du cohousing.
8-Les aires de vie des unités sont en contact direct avec les aires communes.
9-Emplacement abordable et à une distance raisonnable du travail, de l’école et des autres
attractions.
10-Accomoder une population large par la réduction des coûts de construction et d’opération.
2. Cadre méthodologique
2.1. Le processus du projet
Cette section décrit l’approche méthodologique anticipée avant même que le projet ne soit
amorcé. Il s’agit de spéculations qui seront validées ou démenties lors du processus de
conception. Elle a été volontairement conservée afin de bien faire sentir au lecteur le processus
expérimental et évolutif du projet.
8 Durrett, Charles and McCamant, kathryn. Cohousing: A contemporary approach to housing ourselves. Ten Speed
Press. États-Unis. 1994. 288p.
9 Durrett, Charles and McCamant, kathryn. Creating Cohousing : Building sustainable communities. New Society
Publishers. Canada. 2011. 321p.
10 Fromm, Dorit. Cohousing, central living, and other new forms of housing with shared facilities. Van Nostrand
Reinhold. États-Unis. 1991. 295p.
24
2.1.1. L’expérimentation du site : Générateur du projet
L’amarrage du projet se fait par l’étude de trois (3) données primaires de travail. Ces données,
considérées comme sources d’alimentation initiales du système architectural, concernent la
morphologie du site (forme, topographie), le confort éolien (et/ou enneigement de la structure)
et l’ensoleillement. Initialement, l’étude des données se fait sur un site encore vierge, c’est-à-
dire sans intention conceptuelle. La connaissance des données de base générées par le site
même nourrit l’amorce du processus architectural. L’étude des trois données primaires permet
de construire des couches d’informations initiales génératrices de vecteurs de force en regard
du site. Les outils de simulation tels que le canal hydraulique, l’héliodon et même le système
géoréférencé d’ensoleillement de Sketch-up, par exemple, fournissent l’information nécessaire
à la collecte de données. L’appréhension du projet se fait dans une optique d’optimisation
environnementale pour le confort, le bien-être et la productivité des habitants. Les intentions
conceptuelles prennent ensuite forme selon les différentes couches de conditions contextuelles
construites préalablement. Une amorce architecturale est ainsi produite.
À cette étape, le formalisme développé est un geste pragmatique vis-à-vis les données initiales
nourrissant le système architectural (morphologie, confort éolien et ensoleillement) mais
également du respect des gabarits, le cas échéant. Les simulations sont à nouveau répétées à
cette étape afin de collecter les nouvelles couches de données générées par le modèle. Les
influences tant positives que négatives sont évaluées afin d’en soutirer une synthèse et ainsi
faire évoluer le système architectural. Le modèle évolué suivant pourra incorporer d’autres
couches d’information relatives au site par exemple les zones ombragées en hiver, les zones
bruyantes et calmes.
2.1.2. Le processus itératif
La rétroaction en boucle entre l’homme, sa pensée et le modèle, aussi appelée processus
itératif, est essentielle au développement du système architectural. Les modèles initialement
développés sont jugés selon des critères d’aptitude inhérentes au confort, au bien-être et à la
productivité des habitants dans un cadre environnemental responsable. Plus concrètement, ces
critères concernent l’apport en lumière naturelle, le chauffage passif, l’occultation solaire, la
ventilation naturelle, la création de microclimats positifs et la disposition optimale du
programme vis-à-vis de la performance de ces thèmes. À mesure que la rétroaction vis-à-vis les
25
itérations avance, le modèle se raffine. Le modèle produit peut être soumis à des tests virtuels
(informatique) où la rétroaction se fait entre l’homme, sa pensée et la machine.
2.1.3. Fonctions : Émergence de nouvelles relations entre l’individu et son environnement
C’est à travers la formalisation inédite que les fonctions se redéployent provocant l’émergence
ou l’adaptation de nouvelles relations entre l’individu et son environnement. En ce sens, la
théorie avancée par Rahm où la forme est libre de toute prédétermination fonctionnelle colle
bien à cette logique. Le système formel développé dans une optique environnementale
responsable sert de cadre «météorologique» (Rahm, 2009) optimisé dans lequel les fonctions
seront hiérarchisées. L’énoncé ici n’est pas de faire surgir la forme par la spatialisation des
conditions climatiques intérieures, mais plutôt de comprendre les qualités climatiques du
système développé et adapter les relations de l’individu à son espace. Concrètement, les
simulations, à l’aide de logiciels tel qu’Ecotect, du cadre formel développé permettront de
hiérarchiser les fonctions selon les besoins du corps. L’intérêt principal est la définition de
l’espace en termes de température en relation avec les besoins du corps. À titre d’exemple, les
espaces plus chauds concernent les fonctions relatives à l’inactivité et/ou le déshabillé tandis
que ceux plus froids concernent les fonctions relatives à l’activité, l’habillé, la digestion et les
endroits de transition. Le troisième paramètre de travail que sont les relations public/privé
ajoute une contrainte importante à ne pas négliger dans ce processus de hiérarchisation.
26
3. Le développement du projet
Cette section correspond à la session d’hiver 2013 où le projet a été développé. Elle reprend
chacune des trois parties de la session correspondant aux trois critiques. Elle permet de
constater le développement du projet à chacune des étapes.
3.1. Les données de base – Vers la critique préliminaire
3.1.1. Le site d’intervention
Figure 5 : Site d’intervention. Source : googlemaps (en ligne)
Le site se situe dans le quartier St-Sauveur et est occupé par l’église St-Joseph actuellement en
cours de démolition. Le bâtiment abritant autrefois le presbytère appartient maintenant au
Centre Jeunesse de Québec et on y retrouve un foyer de groupe. Juste au bas de la Pente-douce
et aux abords de la falaise, ce site est une véritable porte d’entrée au quartier.
Le site est bordé d’habitation au nord, sud et est, alors que, le parc Roger Lemelin borde son
côté ouest. Dans un rayon de quinze minutes de marche, on accède, entre-autre, au Parc
industriel Jean Talon, au Parc linéaire de la rivière St-Charles, aux Plaines d’Abraham, à la
Grande-Allée, au quartier du Nouvo St-Rock avec tous ses attraits, à l’arrondissement Montcalm
et à la rue Cartier. Cette parcelle est donc toute indiquée pour accueillir un projet de cohousing
avec la proximité de plusieurs points commerciaux, éducatifs et récréatifs.
27
3.1.2. Les données climatiques de base
À l’échelle macroscopique, le site possède une dénivellation de deux mètres du sud-est vers le
nord-ouest. De plus, une étude d’ensoleillement permet de constater ce que le site nous offre
en termes de rayonnement direct (température) pendant l’année. On constate qu’une zone
derrière le foyer de groupe est ombragée en hiver signifiant donc qu’elle n’a pas accès au
rayonnement direct à l’année. Ce constat induit déjà une position conceptuelle au niveau de
l’implantation du projet. Cette zone est à proscrire pour de l’habitation puisqu’en terme de
température elle ne répond pas à un idéal climatique de chauffage passif en hiver.
29
3.1.3. Les intentions préliminaires
Initialement, la zone traitée dans le cadre du projet ne concerne que la partie de terrain
couverte par l’ancienne église. Le foyer de groupe conserve son programme tel quel et n’est pas
inclus. Les intentions préliminaires portées au projet sont de méthodologiquement de l’ordre de
l’architecture traditionnelle, c’est-à-dire que le concepteur s’inspire de précédents afin de
mesurer et contrôler les proportions relatives aux habitations vis-à-vis les espaces communs.
Maladroitement, ces typologies sont adaptées et orientées par intuition vers le sud afin de,
selon les idées du concepteur à ce moment, maximiser le rapport de la typologie architectural
au climat. Cette méthodologie induit un ratio de 20 unités variant entre 50 m2 et 70 m2 divisées
selon 4 typologies.
3.1.4. Les commentaires
Au moment de la critique préliminaire, la démarche à prendre par le concepteur pour en arriver
à un système architectural ayant un rapport optimal dans sa relation au climat est encore très
abstraite. Le jury est, par ailleurs, très sceptique sur l’issue d’une démarche de la sorte.
Considérant un programme de cohousing, le jury propose d’utiliser l’entièreté de la parcelle et
de récupérer l’ancien presbytère pour y introduire le programme de la maison commune. Ce
geste est beaucoup plus en cohérence avec la lecture du site, comme porte d’entrée au quartier
et contribue à la cohésion sociale du projet.
30
3.2. L’architecture et son climat – Vers la critique intermédiaire
3.2.1. Les itérations
Tel que mentionné précédemment dans le cadre théorique, en regard d’un site en milieu urbain,
des critères d’aptitudes ont été fixés afin de bien cadrer les objectifs de recherche relatifs aux
trois paramètres de travail. L’architecture, dans ce cas-ci, régit fortement son climat interne
(météorologie) par les températures issues du rapport à la course du soleil. Ainsi, dans le cadre
d’un projet, où une volonté inhérente à sa démarche est d’être un exemple en termes de
développement durable, celui-ci doit absolument tenir compte du voisinage dès l’étape de
conception afin de l’intégrer à cette logique. Voilà pourquoi le premier critère d’aptitude fixé est
celui de l’accessibilité à l’énergie solaire pour les façades orientées est, sud et ouest des voisins
immédiats au site d’intervention. Un autre critère d’aptitude principal fixé est celui de l’accès au
rayonnement direct en date du 21 décembre à 12h30 pour toutes les habitations ponctuant le
cohousing. La date du 21 décembre étant choisie puisqu’elle correspond au moment de l’année
le plus contraignant en terme de rayonnement solaire puisque son angle d’incidence est à son
plus bas. Par conséquent, un troisième critère d’aptitude s’ajoute et c’est celui du contrôle des
zones d’ombres où l’ombrage créé par le tissu bâti avoisinant et même celui créé par les
volumes habitables du projet n’a pas d’incidence néfaste majeure sur les autres. À travers
l’analyse des critères d’aptitudes fixés préalablement, par essais et erreurs, on tente d’en arriver
à une solution climatique optimale. Les rétroactions vis-à-vis les itérations se produisent, c’est-à-
dire qu’en regard des topologies développées, le modèle est jugé selon les critères et les
éléments jugés pertinents sont conservés et les autres données sont retirées. Le processus se
développe et la rétroaction en boucle s’alimente jusqu’à l’émergence de la solution optimale.
Les itérations sont testées à partir du système géoréférencé de sketch-up.
32
Figures 7 Exemple d’itération systématique, dans ce cas-ci la #3, testé selon les critères d’aptitudes 2 et 3 dans le cas de l’image du haut et selon le critère 1 dans le cas de l’image du bas. Sources : Maheux (2013)
Une faiblesse ressort clairement de la méthodologie employée. Le processus algorithmique
supposé où les éléments jugées pertinents sont conservés et les autres sont retirés demeure
assez exhaustif et permet difficilement d’en arriver à un système au rapport optimal à son
climat. Étant donnée l’interdépendance de chacun des critères d’aptitudes, il est quasiment
impossible pour le concepteur d’en arriver à un consensus par itérations rétroactives. Un autre
outil et une nouvelle méthode de travail doivent être développés.
3.2.2. L’enveloppe solaire (Sun, Wind and light. 2001)
L’enveloppe solaire permet de définir le volume maximum constructible pour un site donné qui
ne portera pas ombrage sur les sites adjacents assurant ainsi l’accessibilité à l’énergie solaire
pour ces sites. Les dimensions et la forme de l’enveloppe solaire varient selon la dimension du
site, son orientation, sa latitude, la période de la journée où l’accès au rayonnement direct est
désiré et, finalement, la quantité d’ombre portée permise sur les rues et bâtiments adjacents.
Figure 8 : Exemple de développement volumétrique de l’enveloppe solaire et démonstration d’une transition possible vers un résultat architectural. Sources :Sun, Wind and Light (2001)
33
Dans notre cas, les dimensions hors-tout de l’enveloppe solaire correspondent aux distances
nord-sud et est-ouest entre les façades des bâtiments voisins où les valeurs numériques sont de
56, 6 m est-ouest et 165, 92 m nord-sud. La latitude du site à l’étude est de 46,5o N ainsi selon le
Sun, Wind and Light, manuel utilisé pour formaliser l’enveloppe solaire, la latitude utilisée sera
48o N. Selon les tests d’ensoleillement effectués initialement, on constate que le 21 décembre,
le site est principalement ensoleillé entre 10h et 14h, ceci s’ajoute donc aux 3 autres critères
d’aptitudes fixés préalablement et permet de statuer sur les contraintes ayant une incidence sur
l’angle de 62o utilisé pour dessiner les arêtes du futur volume. La hauteur de ce volume est fixé
par un simple calcul mathématique issu du critère d’aptitude mentionné plus haut : 0,27 x 56,6 =
15,282 m où le produit est la hauteur maximale sud-est de l’enveloppe solaire. Ce volume est
ensuite abaissé de 2m pour s’inscrire dans la topographie naturelle du site. La quantité d’ombre
portée permise sur les bâtiments adjacents est révisée et permise sur les deux premiers mètres
correspondant à la hauteur du bas des fenêtres permettant ainsi de rehausser le volume de
l’enveloppe solaire de 2 m. Ceci induit un plus grand volume habitable. Le volume est finalement
tronqué vis-à-vis les rues pour le restreindre à la zone constructible.
Un outil très performant offert gratuitement sur internet : sunearthtools permet de bien évaluer
le rapport du soleil au site et ainsi poser un autre geste concret vers cette compréhension du
rapport entre le climat et le système architectural.
34
Figure 9 : Données graphiques relatives au rayonnement solaire sur le site d’intervention, en date du 21 décembre, fournit par l’outil sunearthtools. Source : sunearthtools (en ligne)
En plus des connaissances acquises telles qu’un apport en énergie solaire entre 10h et 14h en
date critique du 21 décembre et une portion de site entièrement ombragée en hiver, l’outil
permet de comprendre que le premier rayonnement efficient de 10h, étant également l’angle
d’incidence le plus faible, frappe le site quasiment perpendiculairement. Ceci confirme donc que
l’angle d’incidence du rayonnement solaire en date du 21 décembre est la mesure minimale à
respecter pour optimiser le système architectural. Le concepteur considère les angles
d’incidence du rayonnement solaire à 10h et 14h correspondant à 16o et 20o comme référence
pour développer un système architectural au rapport optimal à son climat. Bien que le tableau
Figure 10 : Données mathématiques relatives au rayonnement solaire sur le site d’intervention,en date du 21 décembre, fournit par l’outil sunearthtools. Source :sunearthtools (en ligne)
35
indique 10,69o à 10h en date du 21 décembre, il est déterminé par analyse comparative des
jours avant et après cette date que le 16o (15,99o) est atteint au minimum à 10h30 et que cette
heure tend vers 10h à mesure que ‘on s’éloigne du 21 décembre. Pour sa part, le 20o est majoré
par rapport au 19,66o atteint à 13h également selon les quelques jours précédents et suivants la
date d’étude. Au même titre, dans un optique de contrôle des températures et donc de
l’occultation solaire sur les espaces intérieurs en été, les angles d’incidences minimum et
maximum en date du premier mai, soit 52o et 58o, sont utilisés pour contrôler le paramètre de
la température.
À partir des données et outils mentionnés ci-haut, le système architectural initial est conçu en
procédant par itérations afin d’optimiser le rapport au climat. À mesure que les topologies
développées sont jugées selon les critères d’aptitudes, les éléments pertinents sont conservés et
les autres données sont retirées. Ainsi, à mesure que le processus se raffine des constats et
marge de travail sont ajoutés au processus réduisant, par le fait même, le champ de possibilités.
Une marge de 5 m est ajoutée en bordure de la rue Franklin afin d’augmenter l’accès à l’énergie
solaire des habitations la longeant étant donnée l’influence néfaste du tissu bâti adjacent. De
plus, une distance nord-sud de 6m entre les deux rangs d’habitations est jugée cohérente et
minimale au bon fonctionnement du système. La longueur normative initiale des deux volumes
d’habitation est de 14 750 mm le long de la rue Franklin et 12 250 mm le long de la rue
Chateauguay.
Figure 11 : Coupe du système d’enveloppe solaire développé. Source :Maheux (2013)
36
Bref, l’idée à ce stade-ci du processus est d’en arriver à une solution où la forme architecturale
est issue des données du climat immédiat. Considérant l’angle du rayonnement solaire frappant
le site selon différentes heures et saisons en relation au bâti environnant existant mais
également à diverses tentatives de densification, l’objectif est d’obtenir un système optimal
alliant simplicité, densité, écologie et économie, le tout dans une optique de développement
durable. Le système d’enveloppe solaire est un outil de conception qui fixe les marges et limites
de travail pour la production d’une architecture bioclimatique efficace, l’architecture
proprement dite, débute au moment où le système est bien mis en place.
37
3.2.3. Météorologie à habiter fonctionnellement programmées
Maintenant le système préliminaire développé, celui-ci doit être testé en regard des trois
paramètres de travail (température, lumière, relations public/privée).
Figure 12 : Étude d’ensoleillement du système d’enveloppe solaire sur le site d’intervention. Source : Maheux(2013)
38
L’enveloppe solaire est conservée sur la totalité du site et le programme est inséré dans les
volumes. Les espaces chauds sont utilisés pour les espaces de vie tels que la cuisine, la salle à
manger, le salon; les espaces tempérés sont utilisés pour les salles de bains et les espaces froids
sont utilisés pour les chambres à coucher. Cette hiérarchisation est fixée selon les relations du
corps (actif, inactif, digestif, habillé, déshabillé) mais également selon le troisième paramètre de
travail concernant les relations publiques/privées.
Figure 13 :Analyse du critère d’aptitude #3 concernant le contrôle des zones d’ombres où l’ombrage créé par le tissu bâti avoisinant et même celui créé par les volumes habitables du projet n’a pas d’incidence néfaste majeure sur les autres. Source : Maheux (2013)
Figure 14 : Coupe thermique analysant le rapport du système architectural au climat et hiérarchisation du programme selon les paramètres de travail. Source :Maheux (2013)
3.2.4. Les commentaires
Lors de la critique intermédiaire, un système architectural et non une architecture complète.
Volontairement, le jury est informé de la technicité du système en cours de développement et
des potentiels émergents d’une telle démarche pour produire du sens vis-à-vis des contraintes
de conception liées au développement durable. Le système est jugé rigide. Il propose, selon le
jury, la création d’espaces résiduels inhabitables dû aux pentes et aux hauteurs restreintes. Les
39
toitures en pente créent un malaise dû au risque de chute de neige. Le discours bioclimatique et
orienté selon les notions de développement durable ne concorde pas avec la logique des plans
proposés qui comportent plusieurs chambres non-ventilées naturellement. Suite à cette
critique, plusieurs commentaires demeurent pertinents.
3.3. Le climat, l’architecture et l’être humain – Vers la critique finale
3.3.1. Le climat et l’architecture
Le système bien mis en place, le développement du projet d’architecture s’amorce. Les
paramètres de travail (température, lumière, relations publics/privés) établis précédemment
permettent à ce stade-ci d’orienter les décisions en jouant avec les marges, les gabarits, les
espacements régis par l’enveloppe solaire mais également la topographie, la profondeur et les
hauteurs du plancher au plafond des unités en ayant comme but ultime d’arriver à répondre aux
principes du cohousing tout en ayant en tête les notions d’économie, d’écologie et social
relatives au développement durable.
Le système architectural final est implanté dans la zone du site d’intervention ensoleillée
pendant toute l’année. La portion du site ombragée en hiver est utilisée pour des jardins
communautaires puisqu’ils n’ont besoin logiquement que du soleil en été. L’ancien presbytère
devient la maison commune, au cœur du cohousing, elle est littéralement sa porte d’entrée.
Dans un souci d’économie, les unités sont réunies en équipe de 2, 3 ou 4 afin de réduire la
quantité d’enveloppe extérieure. Selon le système d’enveloppe solaire, les volumes
d’habitations sont orientés vers le sud-est et sont décalés, autant que possible, l’un par rapport
à l’autre pour permettre à chacun d’entre eux d’aller chercher le maximum de rayonnement
direct relativement à la course du soleil entre 10h et 14h le 21 décembre (voir figure 7). En plus
de la marge minimale de 5 m prévue le long de la rue Franklin, une marge minimale de 1,5 m est
prévu du côté de la rue Chateauguay en réponse au troisième paramètre de travail que sont les
relations publics/privés où la marge prévue correspond à la cour extérieure privée. Ce décalage
des unités une par rapport à l’autre, dans le respect des marges fixées par l‘enveloppe solaire,
est rendu possible par l’ajustement de la profondeur de chacune des unités. Celles longeant la
rue Franklin, passe de 14,75 m à 10,5 m et celles longeant la rue Chateauguay passe de 12,25 m
à 12 m ou 13 m le tout fixé dans une trame de 5 m de large par unité la densité demeurant un
critère important aux niveaux social et économique. Chaque interstice entre les unités devient
une occasion, un moment, proposant des ambiances différentes.
40
Figure 15 : Implantation axonométrique présentée lors de la critique finale. Source : Maheux (2013)
41
3.3.2. Météorologie à habiter
Les rapports entres les volumes d’habitations bien établis et un système architectural bien
connu, il est possible de qualifier et quantifier les espaces intérieurs en terme de température et
lumière. Il s’agit bien ici de la poursuite d’un processus itératifs puisqu’il n’en reste pas moins
que la hiérarchisation du programme est le fruit d’une rétroaction entre les tentatives
d’implantation et la performance des critères d’aptitudes relatifs aux paramètres de travail.
Ainsi, il est possible d’établir une relation, un rapport optimal entre l’humain et son milieu dans
un objectif de bien-être et de confort. La cohérence entre les trois paramètres de travail est sans
aucun doute la partie la plus difficile du processus principalement dans l’application des règles
du cohousing vis-à-vis l’approche météorologique.
Figure 16 : Plan d’étage et étude annuelle de l’apport en lumière naturelle présenté lors de la critique finale. Sources : Maheux (2013)
3.3.3. Les systèmes écologiques et économiques
En plus de la hiérarchisation des fonctions selon les températures intérieures et les qualités en
apport de lumière naturelle, les stratégies architecturales deviennent importantes dans ce
rapport étroit avec le climat et cette quête d’un projet écologique, économique et social.
Bien évidemment, les systèmes passifs induits par la forme architecturale même, en rapport à
son climat contrôlant l’accès ou non à l’énergie solaire, font partie de ces stratégies. Également,
la compréhension de cette logique dans le déploiement de systèmes complémentaires tels que :
l’utilisation du béton comme masse thermique au niveau des planchers collaborants en bois
42
lamellé-croisé et mais également au niveau des murs recevant le rayonnement solaire direct en
hiver; l’insertion de mur trombe, également en béton, pour permettre un chauffage passif,
principalement en soirée, de la salle de bain; l’apport en lumière naturelle et ventilation
naturelle pour chacune des pièces; l’utilisation de brises-soleil sur les façades orientées sud-
ouest allouant le rayonnement solaire vers l’intérieur en hiver mais le bloquant en été; le
contrôle du rayonnement solaire par un dimensionnement et positionnement juste des debords
de toit; l’utilisation du bois comme matériau sous forme de panneaux de bois lamellé-croisé
comme système constructif principal et l’utilisation du cèdre comme parement pour les
élévations orientées sud-est.
Par ailleurs, l’objectif économique entraîne également certains dilemmes et encourage des
décisions : le choix d’implantation en regard de la densification du site considérant la cohérence
social d’un projet de type cohousing; l’utilisation d’une logique relative aux systèmes passifs;
l’idée de standardisation à l’échelle des unités même et de leur aménagement, mais également
à l’échelle du système constructif en panneaux préfabriqués de bois lamellés-croisés; la
standardisation de l’enveloppe dans la simplicité et la cohérence de la mise en œuvre de ses
matériaux c’est-à-dire le bois au sud-est et l’acier corrugé pour le reste, la logique du projet
inhérente aux systèmes passifs et constructifs relativement à l’emplacement des murs de béton
et de bois lamellé-croisé et finalement, la simplicité du système constructif avec une structure
de béton au niveau d’un stationnement souterrain et un système hybride de bois et de béton
pour les habitations. Relativement au programme, la grande dimension du stationnement et les
nombreuses cases disponibles offrent la possibilité d’avoir un secteur locatif générant ainsi un
revenu pour les habitants du cohousing considérant que les stationnements sont très
recherchés au centre-ville.
3.3.4. Les commentaires
La critique finale a été le moment ultime de tester le produit issu de cette démarche
exploratoire. Le jury a généralement bien reçu le projet. La cohésion du discours, des intentions
et du projet a été applaudie. Une grande discussion entre les divers intervenants du jury a
permis de cibler quelques éléments ne faisant pas l’unanimité. Par contre, est-ce que
l’unanimité existe en architecture?
43
Un membre du jury est méfiant quant à l’approche climatique et précise qu’il ne faut pas croire
qu’une démarche de la sorte donnera toute les réponses architecturales. Il doit en effet exister
une rétroaction entre le concepteur et les itérations produites afin de ne pas produire de
résultats obsolètes. La question de l’emplacement du projet est également soulevée. Le jury est
mitigé sur la question. Certains croient, qu’étant donné sa faible densité, il devrait plutôt se
retrouver en banlieue et être un bon modèle de densification pour celle-ci. Les projets de
cohousing existent fondamentalement pour servir une portion de la population qui recherche
un style de vie coopératif et social mais à proximité des services de la ville. Par contre, il est
entendu qu’économiquement le projet doit être viable selon le ratio habitants/prix pour
l’ensemble du terrain. La position des habitations décalées en marge de la rue pour faire place à
des cours extérieurs privées soulève un questionnement relativement à la l’intimité mais
également en regard du respect des typologies donnant directement sur la rue du quartier. Ces
marges sont issues du processus conceptuel en réponse aux paramètres de travail. Elles
permettent, d’une part, un fonctionnement optimal du système et, d’autre part, un contact
social avec les gens habitants les bâtiments adjacents au projet. Finalement, la rue centrale est
débattue quant à sa largeur de 6 m. Certains membres du jury croient qu’elle est peut-être trop
étroite. Par ailleurs, le fait qu’elle ait une largeur de 6 m engendre un certain malaise dû à la
vision de l’un sur l’autre.
Bref, dans son ensemble le projet est bien reçu des critiques. La méthodologie développée en
regard des critères de conception est cohérente, appréciée et prometteuse.
44
Conclusion
Somme toute, grâce à une sensibilité de l’architecture vis-à-vis son climat, il est possible de
concevoir un système architectural optimal où le rapport de l’humain à son milieu est
hiérarchisé dans une quête de bien-être et de confort.
Ainsi, dans une optique de développement durable où les critères écologiques, économiques et
sociaux doivent être pris en compte, l’auteur Matthew Cousins nous propose dans son livre
intitulé Design qualitying newhousing : Learning from Netherlands, un exercice d’évaluation
selon 20 critères à savoir si le schéma du projet est en cohérence avec les notions de
développement durable. Les 20 critères sont répartis selon 4 grandes catégories soient : le
caractère du projet; les rues, les stationnement et voies pédestres; le design et la construction
et, finalement, l’environnement et la communauté. Les pages suivantes font état de l’évaluation
produite dans le cadre du projet.
La démarche présentée tout au long de cet essai-projet a été volontairement exploratoire. La
volonté sous-jacente à un tel processus était de développer une ou des méthodes de travail et
d’y rattacher des outils performants dans l’objectif d’une conception axée sur la bioclimatique
et le développement durable. Comme mentionné par Jason F. Mclennan et Giovanna Borasi en
introduction de cet essai, à l’ère où la terre ne cesse de trembler sous nos pieds (Borasi, 2006),
le concept d’architecture bioclimatique et de développement durable doit devenir une position
prise dès lors le moment de la conception. Ainsi, en développant une méthodologie de travail et
des outils cohérents avec ce parti, l’architecture même sera induite et issue d’une position
beaucoup plus en relation avec son climat, son environnement. Cette démarche n’enlève rien
aux autres approches de l’architecture pouvant être davantage axées sur une relation au
paysage par exemple, mais elle propose d’ajouter un paramètre absolument essentiel dans
notre pratique d’aujourd’hui. En prenant position par rapport au climat et à l’environnement
dès la phase conceptuelle, la réponse formelle et la hiérarchisation du programme deviendront
indéniables à la cohérence du projet et ne seront plus jamais de simples banalités ou objets
ajoutés au projet. Cette approche contribuera à développer des singularités architecturales
propres à leur site d’intervention.
45
Le caractère du projet
Objectifs
1. Est-ce que le
projet démontre
des unités
singulières?
2. Est-ce que les
bâtiments
démontrent une
qualité
architecturale?
3. Est-ce que les
rues sont en
cohérence avec le
projet de design?
4. Est-ce que
l’organisation
générale des
bâtiments et rues
permettent de s’y
retrouver
facilement?
5. Est-ce que le
projet exploite les
bâtiments, le
paysage et la
topographie
existante?
Forces
-
Belle approche
autant dans la
forme que dans le
choix des
matériaux.
-
La rue centrale est
l’axe principal du
projet.
Utilisation
efficiente de la
topographie
servant bien le
parti architectural.
Faiblesses
Vu de l’extérieur, il
ne semble y avoir
que 3 typologies
différentes.
-
-
-
-
Évaluation
Manque peut-être
de recherche dans
l’identité propre à
chacune des
unités.
Architecture
sympathique et
attrayante
respectant celle du
quartier.
Les systèmes de
circulations sont
simples et
efficaces.
Bonne
organisation des
espaces publics et
habitations de part
et d’autre de l’axe
de la rue centrale.
La topographie
ainsi que la
relation aux
gabarits voisins est
considérée dans
les choix de design.
Les rues, stationnements et voies pédestres
Objectifs
6. Est-ce que
l’aménagement
général domine
sur les rues et
stationnements?
7. Est-ce que les
rues et voies
pédestres sont
sympathiques?
8. Est-ce que les
stationnements
sont bien intégrés
supportant ainsi la
qualité du paysage
urbain?
9. Est-ce que le
projet s’intègre
bien aux rues et au
tissu urbain
environnant?
10. Est-ce que les
espaces publiques
et voies pédestres
sont à la vue et
sécuritaire pour
tous?
Forces
L’aménagement
paysager contribue
à atténuer l’impact
de la rue.
-
Les
stationnements
souterrains
éliminent la
présence de
véhicule sur rue.
-
Le sens de
communauté est
renforcit par la
proximité des
habitations, voies
pédestres et
espaces communs.
Faiblesses
-
-
-
La marge de 5 m
sur la rue Franklin
peut créer un
malaise.
La rue centrale
peut être bruyante
par moment.
Évaluation
L’emphase sur les
gens et les espaces
communs et privés
font en sorte que
ces espaces
dominent.
Excellent design.
La présence de
végétation et
l’interconnexion
des circulations
donnent du
caractère.
L’absence de
véhicule et de
garage donne un
meilleur caractère
à la relation entre
rues et habitations.
Les gabarits sont
bien respectés. Les
marges le long des
rues Franklin et
Chateauguay
peuvent entraîner
un certain malaise.
Les espaces
communs et de
jeux sont au cœur
du cohousing et à
la vue de tous.
Le design et la construction
Objectifs
11. Est-ce que le
design est
spécifique à son
site?
12. Est-ce que les
places publiques
sont bien conçues
et son
appropriable par
l’aménagement en
place?
13. Est-ce que la
répartition entre
les bâtiments et les
espaces publiques
est cohérente?
14. Est-ce que le
projet utilise des
innovations
constructives
contribuant à sa
performance,
qualité et
attraction?
15. Est-ce que les
espaces intérieurs
permettent
l’adaptation, la
conversion ou
l’extension?
Forces
Le climat, la
topographie et les
gabarits adjacents
ont eu un impact
sur le design.
Chacun des
espaces commun
est conçus sous
une thématique.
Bonne mixité entre
densité et espaces
communs.
Utilisation de
systèmes passifs,
structure en bois
et systèmes
collaborants
La hauteur de
certaines pièces
permet
l’adaptation et
conversion.
Faiblesse
-
-
Peut-être un
manque de densité
pour la ville.
-
Systèmes passifs et
structuraux
contrôlés et
rigides. Difficile
pour l’extension.
Évaluation
Projet entièrement
conçu selon les
contraintes
propres au site et
son climat.
La simplicité des
aménagements
laisse place à
l’inventivité des
utilisateurs.
Bon ratio entre les
unités
d’habitations et les
espaces
extérieures.
Systèmes
constructifs et
écologiques
innovants
Les modifications
sont beaucoup
plus probables
selon des
interventions en
coupe (hauteur)
plutôt qu’en plan.
48
L’environnement et la communauté
Objectifs
16. Est-ce que le
projet a un accès
facile aux
transports en
commun?
17. Est-ce que le
projet comporte
des éléments
réduisant son
impact
environnemental?
18. Est-ce qu’il y a
une mixité de
typologie reflétant
les besoins de la
communauté
locale?
19. Est-ce qu’il y a
une mixité
d’accommodations
reflétant les
besoins de la
communauté
locale?
20. Est-ce que le
développement
donne accès à des
services tel que
école, parc,
espaces de jeux,
magasins, café?
Forces
Accès rapide à la
station du
belvédère par le
parcours #10.
Les systèmes
passifs contribuent
à l’autonomie des
habitations.
4 typologies
différentes
Les typologies
développées
reflètent les
volontés
inhérentes au
cohousing.
Accès à moins de
20 minutes de
marche à de
multiples services
et attraits.
Faiblesses
Minimum d’un
transfert en
autobus pour
parcourir la ville.
-
-
-
-
Évaluation
Bon emplacement
pour une
accessibilité
couvrant la ville.
Les systèmes
passifs et les
aménagements
extérieurs
contribuent à une
empreinte
environnementale
minimale.
Typologies
pouvant accueillir
des familles, des
couples et des
personnes vivant
seul.
Le design reflète la
volonté d’habiter
et de partager des
espaces extérieurs
communs.
Emplacement du
projet fortement
justifié dans son
rapport de
proximité aux
services.
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Meier, Alexis. Diagrammes, architecture, musique. Rue Descartes. 2007/2 n° 56, p. 46-57
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