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12 | La Lettre du Rhumatologue N o 377 - décembre 2011 MISE AU POINT La hanche de l’enfant : le point de vue du chirurgien Hip pathology in children: the surgeon’s point of view J. Cottalorda*, D. Louahem*, P. Mazeau*, M. L’Kaissi* * Service d’orthopédie infantile, hôpital Lapeyronie, CHRU de Montpellier. L es ostéochondroses correspondent à une atteinte des noyaux d’ossification secondaire des apo- physes d’insertions tendineuses. Elles sont dues à des microtraumatismes, le plus souvent sportifs. Elles s’expriment par des douleurs mécaniques aux sites d’insertion. La palpation de l’apophyse est dou- loureuse, et celle-ci est souvent tuméfiée et enflée. À un stade plus avancé, un arrachement apophysaire survient chez l’adolescent sportif. Ce type d’arrache- ment concerne surtout les épines iliaques et le petit trochanter. La symptomatologie est typique : sur- venue d’une douleur vive à la suite d’une contraction musculaire violente imposant l’arrêt immédiat de l’activité sportive (impotence fonctionnelle majeure). L’examen clinique retrouve un point douloureux exquis correspondant à l’insertion arrachée du tendon. Le traitement est exceptionnellement chirurgical, et un repos de 3 semaines au lit permet la consolidation de l’arrachement. Les pathologies de la hanche sont fréquentes chez l’enfant et de gravité très variable. Comme souvent, il faut aborder ces pathologies en fonction de leur âge de survenue. L’interrogatoire est un temps essen- tiel, car il oriente le diagnostic. Il s’agit d’une relation tripartite (médecin-enfant-parents), rendant l’inter- rogatoire parfois difficile et nécessitant patience et opiniâtreté pour recueillir des informations les plus précises possible. Certains éléments sont particu- lièrement importants à préciser : l’existence d’une boiterie, d’une douleur associée, le caractère uni- ou bilatéral, l’ancienneté de la symptomatologie, le ou les facteurs déclenchants (il faut éviter le piège clas- sique chez l’enfant du traumatisme évoqué à tort comme facteur déclenchant) et le siège de la douleur (la douleur projetée – douleur du genou sur patho- logie de hanche, douleur de hanche sur pathologie rachidienne – constitue un autre piège classique). Les signes d’appel sont variables en fonction de l’intensité de la douleur, allant du refus de marche complet avec attitude antalgique jusqu’à la marche quasi normale. Dans cette dernière éventualité, ce sont les parents qui signalent le caractère inhabituel de la marche. L’examen doit préciser le siège exact de la douleur. La localisation dans le pli inguinal est évocatrice d’une douleur strictement articulaire. L’analyse de la boi- terie est également un temps essentiel de l’examen. Il s’agit généralement d’une boiterie d’esquive. L’étude des amplitudes articulaires se fait de façon compa- rative, en insistant sur la recherche d’une limitation des secteurs articulaires en rotation. Un flexum est recherché en maintenant la hanche controlatérale en flexion afin de contrôler une possible bascule pelvienne. La recherche de points douloureux élec- tifs et d’une amyotrophie conclut l’examen local. Un examen régional et général est indispensable. À ce stade de l’examen, plusieurs situations sont à envisager en fonction de l’âge du patient. Chez le jeune enfant, la synovite aiguë transitoire, l’ostéo- chondrite primitive de hanche et la pathologie infec- tieuse dominent largement les causes de douleurs de hanche. Cependant, les étiologies tumorales, rhuma- tismales et hématologiques ne sont pas à écarter. Chez l’adolescent, il faudra évoquer en priorité les pathologies de surcharge et l’épiphysiolyse de hanche. Ostéochondrite primitive de hanche Appelée aussi maladie de Legg-Perthes-Calvé, l’ostéo chondrite primitive de hanche est une pathologie vasculaire ischémique idiopathique transitoire de l’épiphyse fémorale supérieure. Elle représente chez l’enfant l’équivalent de la nécrose idiopathique de la tête fémorale de l’adulte. Elle se différencie cependant de cette dernière par le fait

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mise au point

La hanche de l’enfant : le point de vue du chirurgienHip pathology in children: the surgeon’s point of view

J. Cottalorda*, D. Louahem*, P. Mazeau*, M. L’Kaissi*

* Service d’orthopédie infantile, h ô p i t a l L a p e y ro n i e , C H R U d e Montpellier.

Les ostéochondroses correspondent à une atteinte des noyaux d’ossification secondaire des apo-physes d’insertions tendineuses. Elles sont dues

à des microtraumatismes, le plus souvent sportifs. Elles s’expriment par des douleurs mécaniques aux sites d’insertion. La palpation de l’apophyse est dou-loureuse, et celle-ci est souvent tuméfiée et enflée. À un stade plus avancé, un arrachement apophysaire survient chez l’adolescent sportif. Ce type d’arrache-ment concerne surtout les épines iliaques et le petit trochanter. La symptomatologie est typique : sur-venue d’une douleur vive à la suite d’une contraction musculaire violente imposant l’arrêt immédiat de l’activité sportive (impotence fonctionnelle majeure). L’examen clinique retrouve un point douloureux exquis correspondant à l’insertion arrachée du tendon. Le traitement est exceptionnellement chirurgical, et un repos de 3 semaines au lit permet la consolidation de l’arrachement.Les pathologies de la hanche sont fréquentes chez l’enfant et de gravité très variable. Comme souvent, il faut aborder ces pathologies en fonction de leur âge de survenue. L’interrogatoire est un temps essen-tiel, car il oriente le diagnostic. Il s’agit d’une relation tripartite (médecin-enfant-parents), rendant l’inter-rogatoire parfois difficile et nécessitant patience et opiniâtreté pour recueillir des informations les plus précises possible. Certains éléments sont particu-lièrement importants à préciser : l’existence d’une boiterie, d’une douleur associée, le caractère uni- ou bilatéral, l’ancienneté de la symptomatologie, le ou les facteurs déclenchants (il faut éviter le piège clas-sique chez l’enfant du traumatisme évoqué à tort comme facteur déclenchant) et le siège de la douleur (la douleur projetée – douleur du genou sur patho-logie de hanche, douleur de hanche sur pathologie rachidienne – constitue un autre piège classique). Les signes d’appel sont variables en fonction de l’intensité

de la douleur, allant du refus de marche complet avec attitude antalgique jusqu’à la marche quasi normale. Dans cette dernière éventualité, ce sont les parents qui signalent le caractère inhabituel de la marche. L’examen doit préciser le siège exact de la douleur. La localisation dans le pli inguinal est évocatrice d’une douleur strictement articulaire. L’analyse de la boi-terie est également un temps essentiel de l’examen. Il s’agit généralement d’une boiterie d’esquive. L’étude des amplitudes articulaires se fait de façon compa-rative, en insistant sur la recherche d’une limitation des secteurs articulaires en rotation. Un flexum est recherché en maintenant la hanche controlatérale en flexion afin de contrôler une possible bascule pelvienne. La recherche de points douloureux élec-tifs et d’une amyotrophie conclut l’examen local. Un examen régional et général est indispensable. À ce stade de l’examen, plusieurs situations sont à envisager en fonction de l’âge du patient. Chez le jeune enfant, la synovite aiguë transitoire, l’ostéo-chondrite primitive de hanche et la pathologie infec-tieuse dominent largement les causes de douleurs de hanche. Cependant, les étiologies tumorales, rhuma-tismales et hématologiques ne sont pas à écarter. Chez l’adolescent, il faudra évoquer en priorité les pathologies de surcharge et l’épiphysiolyse de hanche.

Ostéochondrite primitive de hancheAppelée aussi maladie de Legg-Perthes-Calvé, l’ostéo chondrite primitive de hanche est une pathologie vasculaire ischémique idiopathique transitoire de l’épiphyse fémorale supérieure. Elle représente chez l’enfant l’équivalent de la nécrose idiopathique de la tête fémorale de l’adulte. Elle se différencie cependant de cette dernière par le fait

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Points forts » Le pronostic de l’ostéochondrite primitive de hanche est fonction de l’âge de l’enfant, classiquement

bon avant 5 ans, moyen entre 5 et 8 ans et mauvais après 8 ans. Lorsque la nécrose respecte le tiers latéral de l’épiphyse, le pronostic est bon. En revanche, l’effondrement de celui-ci signe un mauvais pronostic.

» Dans l’épiphysiolyse fémorale supérieure (EFS), l’enfant se présente avec une douleur, une boiterie perma-nente et une marche en rotation externe du membre inférieur. Lorsque l’enfant fléchit sa hanche, une abduc-tion-rotation externe automatique du membre inférieur se produit. Ce signe est pathognomonique de l’EFS.

» L’EFS est la principale cause de boiterie de hanche en période pubertaire. C’est le cliché de profil qui visualise le mieux le glissement.

» Le traitement est toujours chirurgical et consiste en une fixation de l’épiphyse sur la métaphyse (épiphysiodèse).

Mots-clésEnfantHancheÉpiphysiolyseOstéochondrite

Highlights » The prognosis of primitive

hip osteochondritis depends on the child’s age; in general, prognosis is good before age 5, average between ages 5 and 8, and poor after the age of 8. When necrosis spares the lateral third of the epiphysis, prognosis is good. However, collapse of the lateral third of the epiphysis predicts poor outcome. » In superior femoral epiphysis

(SFE), the child presents with pain, a permanent limp and external leg rotation. Bending of the hip causes automatic external abduction/rotation of the leg. This sign is pathogno-monic of SFE. » SFE is the main cause of

hip-related limp during the pubertal period. Profile radi-ography shows gliding bones most clearly. » Treatment is always surgical

and consists of fastening the epiphysis onto the metaphysis (epiphysiodesis).

KeywordsChild

Hip

Slipped capital femoral epiphysis

Legg-Calvé-Perthes disease

que, contrairement à l’adulte, l’enfant a la faculté de reconstruire cette tête. De plus, comme elle survient précocement dans la croissance, un remodelage de la tête va se poursuivre jusqu’à la fin de la crois-sance. Des artériographies réalisées dans quelques études ont montré qu’il s’agissait d’une oblitération du réseau de l’artère circonflexe postérieure ou de ses collatérales. Les causes de cette ischémie sont mal comprises, mais quelques hypothèses ont été proposées. La première suppose une relation entre la synovite aiguë transitoire et l’ostéochondrite. L’épanchement intra-articulaire de la synovite aiguë transitoire pourrait provoquer une tamponnade de l’artère circonflexe postérieure. La deuxième hypo-thèse suppose que la tête fémorale est trop cartila-gineuse pour l’âge (retard de maturation osseuse). Les pressions augmentent au niveau de la tête lors de la mise en charge, dépassant la pression veineuse de retour. Il n’y a ainsi plus de lit d’aval au flux arté-riel et l’artère se bouche. Cet arrêt circulatoire dure quelques mois, puis la vascularisation réapparaît pro-gressivement. Le problème majeur réside dans le fait que cet incident provoque une nécrose de tout ou partie de l’épiphyse fémorale. Il s’ensuit un processus de réparation long, s’étalant sur 18 à 24 mois, au cours duquel le tissu osseux nécrosé est résorbé puis remplacé par une matrice cartilagineuse qui s’ossifie progressivement. Durant toute cette période, la tête fémorale est fragile et susceptible de se déformer de façon définitive. On aboutit ainsi à une recons-truction spontanée de la tête fémorale avec ou sans séquelles. Cette réparation osseuse sera d’autant plus efficace que les enfants atteints sont jeunes. L’ostéochondrite primitive de la hanche est donc une pathologie potentiellement sévère, pouvant évoluer vers une coxarthrose précoce invalidante. Il faut la différencier des ostéochondrites secondaires (à une hypothyroïdie, postréductionnelle sur une luxation congénitale de hanche, ou lors de maladies générales du squelette comme les ostéochondrodystrophies).

Examen clinique

Cet accident de croissance de la hanche de l’enfant est fréquent (1 pour 1 000 enfants). Elle touche le garçon (4/1) de type caucasien (exceptionnelle-

ment le garçon noir), entre 3 et 12 ans (mais avec un pic très important entre 6 et 7 ans). L’atteinte est habituellement unilatérale (90 %). En cas de bilatéralité, elle est souvent décalée dans le temps et asymétrique. L’enfant atteint présente une taille plus petite que la moyenne. Il s’agit d’un retard de croissance tout à fait net qui est mis en évidence par l’âge osseux. Ce retard de croissance sera rat-trapé quelques années plus tard. Le tableau clinique retrouve une impotence fonctionnelle douloureuse de la hanche et une limitation des amplitudes arti-culaires. La limitation des mobilités de la hanche touche principalement les rotations. L’abduction est limitée plus tardivement. Une amyotrophie du quadriceps est constante. Il n’y a pas de syn-drome infectieux ni d’altération de l’état général. Ce tableau clinique peut être très discret, mais il faut systématiquement penser à l’ostéochondrite de hanche devant toute douleur de la hanche et/ou boiterie chez un jeune enfant et demander une radiographie.

Examens paracliniques

Le bilan inflammatoire est normal. Il faut demander une radiographie du bassin de face et un profil de hanche. Au début de l’évolution et pendant 2 à 3 mois, la radiographie est normale. Une radio-graphie de hanche normale chez un enfant qui boite n’élimine donc pas le diagnostic d’ostéochon-drite de hanche. L’échographie est le plus souvent normale, mais un épanchement intra-articulaire non spécifique peut être présent. Une scintigraphie au technétium 99 (99mTc) montre un “trou de fixation” (hypofixation) au stade précoce, avant l’apparition des premiers signes radiologiques. Elle peut donc aider au diagnostic au tout début de l’évolution de la maladie, quand la radiographie est normale. Plus tard, quand les signes radiologiques sont apparus, cet examen devient inutile. L’image radiologique est évolutive dans le temps :

➤ aspect radiologique normal (2 à 3 mois) ; ➤ phase de nécrose : au début, l’aspect typique est

celui du coup d’ongle sous-chondral, ou “coquille d’œuf”. Puis apparaissent un aplatissement plus ou moins net au pôle supérieur de la tête, un élar-

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Figure 1. Aspect typique d’une ostéochondrite de hanche droite en phase de nécrose avec aplatissement et condensation du noyau épiphysaire.

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La hanche de l’enfant : le point de vue du chirurgien mISE AU POInT

gissement de quelques millimètres de l’interligne articulaire et une condensation du noyau épiphysaire (figure 1) ;

➤ phase de revascularisation de la tête fémorale : cette phase correspond à la fragmentation radio-logique du noyau épiphysaire. Il existe un risque d’excentration de la tête hors du cotyle ;

➤ phase de réparation : la tête se remodèle avec la croissance résiduelle. Selon la qualité de cette reconstruction, la tête aura un aspect normal ou sera déformée en fin de croissance (phase de séquelles). Les séquelles possibles sont une coxa plana (aplatissement de la tête fémorale), une coxa magna (augmentation de taille de la tête fémorale), un raccourcissement et un varus du col fémoral, une coxarthrose précoce (en cas de grosses déformations de la tête en fin de croissance).L’imagerie par résonance magnétique (IRM) permet de visualiser l’étendue de la nécrose. Elle est très utile avant de prendre une éventuelle décision chirurgicale d’ostéotomie du bassin.

Pronostic

Le pronostic est fonction de plusieurs éléments. Le premier est l’âge de l’enfant : classiquement, le pro-nostic est bon avant 5 ans, moyen entre 5 et 8 ans, mauvais après 8 ans. Le deuxième est l’étendue de la nécrose de l’épiphyse fémorale. Lorsque la nécrose

respecte le tiers latéral de l’épiphyse, le pronostic est bon. En revanche, l’effondrement de celui-ci signe une forme de mauvais pronostic. Sont de mauvais pro-nostic également une raideur articulaire marquée, une obésité, une excentration de la tête, une calcification latérale, un signe de Gage (image claire épiphysaire externe), une horizontalité du cartilage de croissance, une géode métaphysaire. Les séquelles articulaires sont fréquentes. Elles n’auront souvent des conséquences fonctionnelles qu’à l’âge adulte, sous la forme d’une détérioration articulaire plus précoce (25 % d’arthrose invalidante et 25 % de têtes irrégulières). Il faut cepen-dant noter que, même en cas d’ostéochondrite sévère, la gêne clinique en fin d’évolution peut rester faible.

Traitement

Il n’y a pas de traitement curatif. La prise en charge thérapeutique est variable en fonction des écoles, et il n’existe aucun consensus thérapeutique. Aussi convient-il de se limiter aux principes généraux. Le traitement symptomatique consiste à protéger la tête fémorale durant toute sa période de fragi-lité (18 à 24 mois) et à éviter son effondrement, qui peut être responsable d’une coxarthrose précoce. Les possibilités thérapeutiques sont nombreuses :

➤ surveillance et abstention thérapeutique (enfant très jeune, bonne mobilité articulaire) ;

➤ traitement orthopédique : traction continue (initialement, pendant 3 semaines, la traction est maintenue jour et nuit, puis, si la hanche reste tou-jours raide, cette traction est continuée uniquement la nuit jusqu’à obtenir une hanche plus souple), mise en décharge en fauteuil roulant, kinésithérapie. Les orthèses de décharge de type Atlanta, Chicago ou Toronto permettent une autonomie de marche à l’enfant. Ces appareils sont conçus pour que la hanche soit bien centrée en abduction (le “containment” des Anglo-Saxons) et soit en décharge au moins partielle ;

➤ le traitement chirurgical a pour but de recentrer la tête fémorale dans le cotyle (ostéotomie fémorale de varisation) ou d’obtenir une meilleure couver-ture du cotyle sur la tête fémorale (ostéotomie du bassin de type Salter ou triple ostéotomie). Le trai-tement chirurgical concerne les formes sévères. Les grandes études prospectives multicentriques n’ont pas montré de manière évidente qu’un trai-tement pouvait changer l’évolution naturelle de la maladie (1, 2). Le praticien posera les indications en fonction des facteurs pronostiques, en essayant de conduire ce traitement long sans perturber la vie scolaire et affective de l’enfant.

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mISE AU POInT

Synovite aiguë transitoire (ou rhume de hanche)C’est le principal diagnostic différentiel de l’os-téochondrite primitive de hanche. C’est la plus fréquente des pathologies de hanche à cet âge (en dehors des traumatismes). Elle reste cepen-dant un diagnostic d’élimination. Il s’agit d’une pathologie bénigne, dont l’origine est mal connue. L’inflammation synoviale est probablement liée à une réaction antigénique croisée lors d’une infection virale, le plus souvent ORL. En réalité, la notion de rhume ou d’infection ORL précédant la boiterie n’est pas toujours retrouvée (dans 50 % des cas seulement). La synoviale irritée va pro-duire du liquide synovial en excès, ce qui provoque un épanchement intra-articulaire au niveau de la hanche. Cet épanchement est inflammatoire aseptique.

Examen clinique

Le début est brutal. Il est non spécifique, avec une impotence fonctionnelle parfois importante et l’apparition d’une boiterie douloureuse de hanche associée à une limitation des amplitudes articulaires, en particulier en abduction et rotation interne. La boiterie survient progressivement ou brutalement. Il n’y a pas de rétraction des adduc-teurs (l’abduction est limitée par la douleur). La synovite aiguë transitoire survient volontiers chez un garçon de 3 à 8 ans, et le tableau clinique est donc très voisin de celui de l’ostéochondrite primitive de hanche.

Examens paracliniques

La radiographie de hanche est normale (comme dans l’ostéochondrite primitive de hanche au début). Tout au plus peut-on noter, dans les formes sévères, un refoulement des liserés grais-seux, témoin de l’importance de l’épanchement intra-articulaire. La biologie retrouve un discret syndrome inflammatoire, sans signe biologique d’infection bactérienne. Une lymphocytose est souvent notée. Le taux de protéine C réactive (PCR) n’est pas élevé. L’échographie permet de visualiser un épanchement intra-articulaire non spécifique, qui aide à différencier un rhume de hanche d’une ostéochondrite primitive de hanche au début (la radiographie est alors encore normale).

Pronostic et traitement

L’enfant est mis au repos strict pendant 5 jours sans autre traitement (certains auteurs prescrivent des anti-inflammatoires). Dans les formes hyper-algiques, une traction de quelques jours peut sou-lager le patient. Son évolution, toujours favorable en quelques jours, confirme le diagnostic. Ce n’est qu’en cas d’évolution défavorable que le diagnostic est remis en cause et qu’une scintigraphie osseuse est demandée. Les parents doivent être avertis d’une possible récidive ipsilatérale ou controlatérale dans les années qui suivent, toujours sur un mode bénin. Un contrôle radiographique des hanches est indis-pensable à 3 mois pour s’assurer que l’épisode de boiterie n’a pas été l’événement inaugural d’une ostéochondrite primitive de hanche.

Épiphysiolyse de hanche

Il s’agit d’une pathologie de cause inconnue, vrai-semblablement multifactorielle, faisant intervenir des facteurs mécaniques (surpoids et excès de contraintes), des facteurs hormonaux (puberté, insuffisance de testostérone et d’hormone de crois-sance) et des facteurs métaboliques (fréquence de l’épiphysiolyse chez les enfants insuffisants rénaux). L’épiphysiolyse fémorale supérieure (EFS) se définit comme un glissement non traumatique de l’épiphyse fémorale supérieure sur sa métaphyse en rapport avec une fragilité temporaire du cartilage de crois-sance fémoral proximal. Ce glissement se produit avec une bascule de la tête en bas, en dedans et en arrière, sa composante principale étant postérieure (coxa retrorsa). Cela induit une limitation de la rota-tion interne et une majoration de la rotation externe de hanche. Le corollaire de ce déplacement est un possible dommage vasculaire, avec une lésion du pédicule postérieur, et le risque d’une nécrose de la tête fémorale, entraînant une coxarthrose précoce. L’EFS est la principale cause de boiterie de hanche en période pubertaire. Il est rare que cette maladie survienne avant la période pubertaire (formes dites “juvéniles”). Sa fréquence est estimée entre 1 et 10 cas pour 100 000 personnes. Elle survient au cours de la croissance pubertaire, c’est-à-dire entre 11 et 16 ans, avec un âge moyen de 12 ans chez la fille et de 14 ans chez le garçon. Il s’agit d’une maladie de la hanche trop souvent méconnue, dont le traite-ment, s’il est assuré précocement, est simple et sûr. En raison des importants retards au diagnostic, le délai moyen de prise en charge chirurgicale de cette

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Figure 2. La flexion de hanche du côté sain n’entraîne pas de rotation automatique (à droite), contrairement au côté où il y a une épiphysiolyse de hanche (à gauche).

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La hanche de l’enfant : le point de vue du chirurgien mise au point

affection après les premières douleurs est actuelle-ment de 3 mois. L’EFS se manifeste sous 2 formes différentes (stable et instable). Nous allons insister sur l’EFS, tableau clinique le plus trompeur et de loin le plus fréquent. L’EFI sera décrite séparément dans les complications.

Examen clinique

Les garçons sont touchés dans 60 % des cas. L’at-teinte est généralement unilatérale (80 %). Deux morphotypes sont souvent retrouvés : le morpho-type “pseudo-adiposogénital”, qui se caractérise par une surcharge pondérale nette et un développement retardé pour l’âge des organes génitaux externes, et le morphotype associant une grande taille et une grande minceur souvent en rapport avec une vitesse de croissance importante en début de puberté. Cli-niquement, l’enfant se présente avec une douleur, une boiterie permanente et une marche en rotation externe du membre inférieur. La boiterie s’inten-sifie après les efforts et les activités sportives. Il faut insister sur le caractère modéré et même parfois mineur du syndrome douloureux. Les douleurs sont de type mécanique, typiquement au niveau de la région inguinale, mais souvent aussi projetées au genou (classique douleur projetée qui retarde le dia-gnostic). L’enfant consulte généralement davantage

pour une boiterie que pour une véritable douleur de hanche. L’examen retrouve les signes de rétroversion, avec une limitation de la rotation interne de hanche, un excès de rotation externe et parfois une limita-tion de l’abduction. La mise en rotation interne de hanche réveille une douleur vive. L’existence d’une raideur de hanche est de mauvais augure, témoi-gnant d’une évolution déjà longue. Elle fait redouter une chondrolyse débutante. Une amyotrophie qua-dricipitale est souvent retrouvée. Lorsque l’enfant fléchit sa hanche, une abduction-rotation externe se produit (figure 2). Ce signe est pathognomonique de l’EFS (3). Il faut systématiquement penser à l’EFS devant toute boiterie survenant chez un enfant pré-pubère ou adolescent.

Examens paracliniques

Il faut demander une radiographie du bassin de face et des 2 hanches de profil. Au début, et du fait que le glissement est d’abord postérieur, la radio-graphie de bassin de face peut paraître normale. Celle-ci met en évidence les signes directs de la maladie du cartilage de croissance (aspect élargi, feuilleté et mal dessiné) ou les signes indirects du glissement (diminution de la hauteur de l’épiphyse fémorale supérieure). Le petit trochanter est souvent bien visualisé sur la radiographie du bassin, ce qui témoigne d’un membre inférieur en rotation externe. C’est le cliché de profil qui visualise le mieux le glis-sement (bascule postérieure de l’épiphyse fémorale supérieure). On mesure l’angle entre l’axe du col et la ligne basi-épiphysaire (81° ± 9°). Le cliché de profil est fondamental, car il permet toujours de faire le diagnostic, alors qu’une épiphysiolyse débutante peut passer inaperçue sur un cliché de face. À un stade plus évolué, la bascule épiphysaire est non seulement postérieure, comme au début, mais aussi interne. Elle devient alors évidente sur les clichés de face. La classique ligne de Klein, tangente au bord supérieur du col fémoral, ne croise plus le pôle supé-rieur de l’épiphyse. Elle lui devient tangentielle.

Évolution et traitement

L’évolution spontanée se fait vers une limitation sévère des amplitudes articulaires du fait de la majoration du déplacement, puis vers la coxarthrose précoce. Dès que le diagnostic est posé, il faut hospitaliser l’enfant et le mettre en décharge (traction collée au lit) si le geste chirurgical est différé. Le traitement est toujours

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mise au point

chirurgical et consiste en une fixation de l’épiphyse sur la métaphyse (épiphysiodèse) [3]. La fixation de la tête se fait en place (in situ) sans réduction, par un embrochage ou un vissage. La rééducation postopé-ratoire visera à maintenir une bonne mobilité arti-culaire, en sachant que, en raison de la bascule de la tête (fixation sans réduction), le membre inférieur restera toujours en rotation externe. Il ne sert donc à rien d’essayer de “travailler” la rotation interne en kinésithérapie. Les formes traitées précocement sont de bon pronostic du fait du faible déplacement de l’épiphyse. Dans les grands déplacements (> 60°), les avis divergent quant à la prise en charge, car la fixation en place laisse persister de gros défauts archi-tecturaux. Une réduction du glissement risque de léser les vaisseaux et d’entraîner une nécrose secondaire. Certains auteurs proposent une ostéotomie de rac-courcissement et de réorientation du col fémoral.

Complications

Elles peuvent aboutir à une dégradation fonc-tionnelle sévère de la hanche et sont dominées, à court terme, par le passage à une forme instable, la nécrose ischémique et la coxite laminaire de la tête fémorale, et, à long terme, par la coxarthrose.

◆ Épiphysiolyse instable Le contexte de survenue de l’EFS dans sa forme ins-table est complètement différent. C’est en urgence que l’on est amené à voir un adolescent qui présente une impotence fonctionnelle totale du membre, évo-quant une fracture. Deux éléments caractérisent le tableau clinique : le traumatisme causal est minime, voire inexistant. Presque constamment, une douleur de hanche et une boiterie ont été négligées depuis plusieurs mois, témoin que cette forme instable peut aussi survenir sur une évolution chronique négligée. On retrouve le tableau clinique fracturaire d’un col du fémur, avec une impotence fonctionnelle totale, une vive douleur, un raccourcissement, une adduc-tion et une rotation externe du membre inférieur. Le diagnostic est évident sur le cliché de face, avec une bascule importante de la tête sur la métaphyse, équivalente à une fracture de type Salter 1. Le dia-gnostic entre fracture et épiphysiolyse instable (ou aiguë) est facile. Il faut un traumatisme très violent pour provoquer une fracture (accident sur la voie publique, défenestration), alors que l’épiphysiolyse survient pour un choc minime, voire inexistant. La réduction d’une épiphysiolyse à grand déplacement expose à une complication très grave : la nécrose

de la tête fémorale. Cette réduction doit donc être prudente. Elle peut être réalisée soit en urgence, soit progressivement, par une traction. Les avis divergent cependant sur le choix des méthodes : intervention en urgence ou retardée après traction légère dans l’axe, foyer ouvert ou fermé. Le plus souvent, une réduction très douce est proposée pour réduire en partie le glissement. Le risque de nécrose étant important, une scintigraphie osseuse pourra ren-seigner sur la vitalité de la tête après traitement et servira d’élément pronostique.

◆ Nécrose de la tête fémoraleIl s’agit d’une redoutable complication du traite-ment d’une épiphysiolyse (4). La vascularisation de la tête fémorale chez l’enfant est une vascularisa-tion terminale, sans suppléance, qui ponte le carti-lage de croissance (artère circonflexe postérieure). En cas d’épiphysiolyse, la bascule postérieure de l’épiphyse conduit au raccourcissement de cette artère par rétraction en raison de la diminution de la longueur de son trajet. Lorsque le chirurgien essaie de remettre la tête fémorale en place par des manœuvres externes de réduction, il risque d’arracher cette artère et de provoquer la nécrose de la tête fémorale. Il s’agit donc essentiellement d’une com-plication iatrogène du traitement de l’épiphysiolyse. La nécrose survient habituellement dans l’année qui suit la survenue de l’épiphysiolyse. La radiographie met en évidence une condensation et un aplatisse-ment de la tête fémorale. La scintigraphie permet de diagnostiquer précocement cette complication en montrant un défaut de fixation du traceur au niveau de la tête fémorale. L’évolution de la nécrose se fait vers la destruction plus ou moins complète de la hanche, avec une gêne fonctionnelle (enraidissement douloureux) et un état fonctionnel catastrophique. Cette complication est inaccessible à un traitement efficace (en dehors d’une arthroplastie de hanche) et justifie de tout faire pour éviter sa survenue.

◆ Coxite laminaireUne forme très particulière de coxarthrose précoce est décrite dans l’épiphysiolyse. Il s’agit de la chondro-lyse de hanche, ou coxite laminaire (figure 3, p. 20). Le mécanisme en est inconnu. Il correspond à une destruction complète du cartilage d’encroûtement de la hanche en quelques mois, aboutissant à une ankylose rapide de la hanche. Celle-ci se traduit cli-niquement par un enraidissement progressif de la hanche, indolore, souvent en position vicieuse. La mobilisation sous anesthésie générale retrouve une mobilité supérieure, témoignant d’une contracture

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Figure 3. Aspect radiologique d’une coxite laminaire gauche.

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La hanche de l’enfant : le point de vue du chirurgien mISE AU POInT

musculaire associée. La moitié des coxites laminaires aboutit à une coxarthrose précoce, les diverses moda-lités de prise en charge se révélant décevantes. Le traitement le plus classique est une mise au repos de l’articulation par traction pour une durée de 4 à 12 mois, associée à une rééducation régulière et douce de la hanche.

◆ CoxarthroseLe risque de coxarthrose est un risque tardif, à un âge où il est justifié de mettre en place une prothèse de hanche. Il dépend de l’importance du déplacement et de la rapidité du diagnostic et du traitement. Les coxarthroses symptomatiques conduisant à une arthroplastie restent tout de même rares, sauf en cas de nécrose postréductionnelle.

◆ Atteinte controlatéraleIl ne s’agit pas d’une complication vraie, mais l’affec-tion est bilatérale d’emblée dans 15 % des cas et à long terme dans 50 % des cas. L’atteinte contro-latérale survient au cours des 18 mois suivant le diagnostic initial dans 25 % des cas. Chez la fille, le risque est faible dès l’apparition des règles. Cela explique la nécessité de surveiller attentivement l’évolution de la hanche controlatérale, voire de fixer préventivement celle-ci si l’enfant est très jeune ou si un suivi régulier s’avère impossible. La fréquence assez élevée des formes bilatérales incite certaines équipes à réaliser dans le même temps chirurgical la fixation du côté atteint et du côté sain à titre pré-

ventif. Si une fixation préventive n’est pas réalisée, il est nécessaire d’informer le patient du risque de bilatéralisation et d’assurer une surveillance.

Pathologie infectieuse

Cette pathologie est fréquente, surtout chez l’enfant jeune. Elle est évoquée devant tout signe infectieux général, mais il faut savoir qu’elle peut survenir chez un enfant floride en l’absence de fièvre (5). Il s’agit d’une ostéomyélite, d’une ar-thrite infectieuse ou d’une ostéoarthrite chez le tout-petit. Lorsque l’examen clinique fait suspecter une origine infectieuse, 3 examens doivent être prescrits en urgence :

➤ un bilan inflammatoire biologique. Il a une bonne valeur, notamment la PCR très précocement élevée. Sa normalité n’exclut pas le diagnostic (forme précoce, forme décapitée) ;

➤ une échographie (notamment de la hanche), à la recherche d’un épanchement intra-articulaire (arthrite) ou d’un abcès sous-périosté (ostéomyé-lite) ;

➤ des radiographies standard à la recherche de signes osseux, généralement tardifs. Une radio-graphie normale n’élimine donc pas une pathologie infectieuse.

Si ces éléments sont positifs, la démarche habituelle pour toute pathologie infectieuse doit être conduite dans les plus brefs délais :

➤ recherche de l’agent infectieux en cause par le biais de prélèvements bactériologiques au niveau des portes d’entrée, hémoculture en cas de fièvre ;

➤ ponction articulaire ou osseuse sous anesthésie générale en urgence ;

➤ instauration d’une double antibiothérapie pro-babiliste, qui est adaptée si besoin, lorsque le germe est identifié.Ce n’est qu’en cas de négativité des examens simples de première urgence ou de doute diagnostique que des investigations plus complètes sont indiquées en fonction de l’évolution :

➤ si la localisation des symptômes est vague, une scintigraphie osseuse est demandée, dont l’inter-prétation peut orienter le diagnostic vers une lésion infectieuse du bassin (sacro-iléite) ou du rachis (spondylodiscite). Une scintigraphie osseuse corps entier permet aussi de rechercher d’autres localisa-tions infectieuses ;

➤ une IRM centrée sur la région suspecte peut être pratiquée. Elle permettra de confirmer la présence

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Figure 4. Arrachement de l’épine iliaque antéro-inférieure gauche (classiquement après un shoot dans le vide).

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mISE AU POInT

d’une réaction inflammatoire locale en précisant son extension (osseuse, articulaire et au sein des parties molles) et de localiser d’éventuelles zones liquidiennes collectées, guidant ainsi la ponction.

Syndromes d’hypersollicitation

Les ostéochondroses correspondent à une atteinte des noyaux d’ossification secondaire des apophyses d’insertions tendineuses. Elles sont dues à des micro-traumatismes, le plus souvent sportifs, à l’origine d’une modification de l’ossification enchondrale de ces apophyses (6). Elles s’expriment par des douleurs mécaniques aux sites d’insertion. La palpation de l’apophyse est douloureuse, et celle-ci est souvent tuméfiée et augmentée de volume. La douleur est réveillée par le mouvement contrarié. La radiographie retrouve parfois une fragmentation ou une anomalie d’ossification du noyau. Les atteintes des épines iliaques antérieures ou des ischions sont plutôt l’apanage des adolescents sportifs. Le repos strict et les mesures visant à l’antalgie sont les principales armes thérapeutiques. Les arrachements apophy-saires sont une complication possible mais rare (6). Ces arrachements sont observés chez l’adolescent, en particulier l’enfant sportif, souvent de haut niveau. Ils apparaissent le plus souvent au niveau de la hanche, sous la forme d’un arrachement apophy-saire entraînant une symptomatologie douloureuse aiguë au décours d’une activité sportive soutenue. Ce sont des lésions provoquées par la mise en tension violente d’une structure musculaire. Ces arrache-ments peuvent concerner les épines iliaques anté-rosupérieure (sartorius) ou antéro-inférieure (rectus femoris) [figure 4], le petit trochanter, qui s’arrache sous l’action du psoas major, et l’ischion, arraché par la mise en tension des muscles ischiojambiers. La symptomatologie est typique : survenue d’une douleur vive à la suite d’une contraction musculaire violente imposant l’arrêt immédiat de l’activité spor-tive (impotence fonctionnelle majeure). L’examen clinique retrouve un point douloureux exquis corres-pondant à l’insertion arrachée du tendon. La contrac-tion contrariée du muscle correspondant provoque une douleur importante. La radiographie montre l’image de l’arrachement apophysaire, et un recours à des incidences obliques ou localisées est souvent nécessaire pour mieux visualiser la lésion. Ces clichés simples seront volontiers répétés 15 jours plus tard en cas de doute initial. Le traitement est exception-nellement chirurgical, et un repos de 3 semaines au lit permet la consolidation de l’arrachement.

Atteintes rhumatismales

Elles sont rares chez l’enfant et sont évoquées devant un épanchement de grande abondance, aseptique, typiquement inflammatoire. Dans une forme oligoarticulaire, l’atteinte intéresse le genou ou la cheville, exceptionnellement la hanche (5). Dans la forme polyarticulaire, l’atteinte de la hanche est plus fréquente. Le problème diag-nostique se pose surtout lors du premier épisode. Le diagnostic est plus aisé à l’occasion d’une réci-dive ou lors d’une seconde localisation. Le premier épisode ne permet souvent pas de l’établir, et il faut savoir répéter les examens. Le syndrome inflamma-toire n’est associé à la présence de facteurs anti-nucléaires que dans 30 % des cas au début, mais leur positivité augmente avec l’évolution. L’examen ophtalmologique à la lampe à fente recherchera une uvéite. La ponction articulaire et la biopsie synoviale apportent des arguments en faveur du diagnostic dans les cas douteux.

Douleurs mal systématisées

L’adolescence constitue une période à laquelle la fréquence des tumeurs bénignes et malignes autour de la hanche est non négligeable. Rappelons que la hanche est l’une des localisations préférentielles des ostéomes ostéoïdes et des tumeurs bénignes

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Avec le parrainage de la Société française de rhumatologie

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Chicago5-9 novembre 2011

D’après le congrès de l’American College of Rheumatology

STRASBOURG19 novembre 2011Présidée par le Pr Jean SIBILIA

MONTPELLIER22 novembre 2011Présidée par le Pr Bernard COMBE

PARIS (Mondor)22 novembre 2011Présidée par les Prs Xavier MARIETTE, Jean-Marc ZIZA, et Xavier CHEVALIER

BEAUNE23 novembre 2011Présidée par le Pr Jean-Francis MAILLEFERT

PARIS (Lariboisière)23 novembre 2011Présidée par le Pr Thomas BARDIN

TOURS23 novembre 2011Présidée par le Pr Philippe GOUPILLE et les Drs Denis MULLEMAN et Émilie DUCOUREAU-BARBARY

BESANÇON24 novembre 2011Présidée par le Pr Daniel WENDLING

METZ24 novembre 2011Présidée par le Pr Isabelle CHARY-VALCKENAERE

PARIS (Saint-Antoine)24 novembre 2011Présidée par les Prs Francis BERENBAUM et Pierre BOURGEOIS

RENNES24 novembre 2011Présidée par le Pr Gérard CHALÈS

AGEN29 novembre 2011Présidée par le Pr Arnaud CONSTANTIN

BREST29 novembre 2011Présidée par le Pr Alain SARAUX

LE MANS29 novembre 2011Présidée par le Dr Emmanuelle DERNIS

CAEN (Ouistreham)30 novembre 2011Présidée par le Pr Christian MARCELLI et le Dr Jean-Jacques MORA

SEMUR-EN-AUXOIS30 novembre 2011Présidée par le Pr Jean-Francis MAILLEFERT

ANNECY1er décembre 2011Présidée par le Pr Philippe GAUDIN

BORDEAUX1er décembre 2011Présidée par le Pr Thierry SCHAEVERBEKE

CLERMONT-FERRAND1er décembre 2011Présidée par le Pr Martin SOUBRIER

LYON1er décembre 2011

MARSEILLE1er décembre 2011Présidée par les Prs Jean ROUDIER et Pierre LAFFORGUE

MOUGINS1er décembre 2011Présidée par le Dr Olivier BROCQ

NANTES1er décembre 2011Présidée par le Pr Yves MAUGARS

OLIVET (Orléans)1er décembre 2011Présidée par les Drs Stéphanie RIST et Éric LESPESSAILLES

REIMS1er décembre 2011Présidée par le Pr Jean-Paul ESCHARD

ROUEN1er décembre 2011Présidée par les Prs Olivier VITTECOQ et Xavier LE LOËT

LILLE2 décembre 2011Présidée par les Prs René-Marc FLIPO et Éric HACHULLA

ANGERS6 décembre 2011Présidée par le Pr Maurice AUDRAN

BELFORT6 décembre 2011Présidée par le Pr Daniel WENDLING

LE HAVRE6 décembre 2011Présidée par le Dr Charles ZARNITSKY

NIORT6 décembre 2011

PLŒMEUR (Vannes/Quimper/Lorient)6 décembre 2011Présidée par le Pr Alain SARAUX

TOULOUSE6 décembre 2011Présidée par le Pr Alain CANTAGREL

BRIVE7 décembre 2011Présidée par le Pr Philippe BERTIN

GRENOBLE7 décembre 2011Présidée par les Prs Robert JUVIN et Philippe GAUDIN

ARPAJON8 décembre 2011Présidée par les Drs Pascal HILLIQUIN et Christophe THEPOT

CHÂTEAUROUX8 décembre 2011Présidée par le Dr Ahmed BENMANSOUR

SAINT-ÉTIENNE8 décembre 2011

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La hanche de l’enfant : le point de vue du chirurgien mise au point

kystiques (figure 5). Les radiographies standard doivent être systématiques, sans omettre les arti-culations sus- et sous-jacentes. Dans cette circons-tance encore, l’orientation diagnostique se fait en fonction de l’âge.Chez le petit enfant, les causes traumatiques sont les plus fréquentes. Parfois, les clichés stan-dard retrouvent assez facilement une fracture “en motte de beurre” métaphysaire. L’existence d’une fracture “en cheveu” est plus difficile à mettre en évidence. Chez l’enfant plus grand, les étiologies tumorales sont à rechercher en première intention. Les fractures de fatigue sont également à évoquer chez l’adolescent. Pour toutes ces raisons, il ne faut pas hésiter, en cas d’examens complémentaires normaux, à revoir l’enfant en consultation après un délai de 3 semaines. La persistance de la symptoma-tologie douloureuse à cette période fait indiquer :

➤ de nouveaux clichés standard, qui peuvent alors mettre en évidence une apposition périostée, témoin d’une agression traumatique, tumorale ou infectieuse ;

➤ une scintigraphie osseuse, qui peut montrer un foyer

d’hyperfixation localisé à la région douloureuse ou à dis-tance de celle-ci et prouvant l’organicité de la douleur.En matière de douleur de hanche ou de cuisse, la chronicité du symptôme au-delà d’une période de 3 semaines ne doit pas faire retenir un diagnostic de tendinopathie, d’hématome périosté ou autre enté-sopathie. Il faut impérativement prescrire un nouveau bilan radiographique standard et ne pas hésiter à com-pléter les investigations par d’autres examens (IRM et/ou TDM en fonction des cas).Chez l’enfant noir, en présence d’une douleur de hanche, il faudra évoquer une éventuelle drépanocy-tose (5). La β-thalassémie peut aussi être à l’origine de douleurs osseuses. La maladie de Gaucher est respon-sable, dans 20 à 30 % des cas, d’une nécrose aseptique de la tête fémorale et donc de douleurs (5). Au cours des leucoses lymphocytaires aiguës et des leucoses myéloïdes aiguës, les manifestations ostéoarticulaires sont habituelles et très souvent révélatrices de l’hémo-pathie (5). Il s’agit le plus souvent de douleurs osseuses et articulaires diffuses, mal systématisées, qui sont dues à la prolifération massive de tissu hématopoïé-tique dans la médullaire. Des images radiologiques peu spécifiques peuvent exister : bandes claires métaphy-saires, ostéopénie, zone d’ostéolyse. Le bilan sanguin peut être normal au début. Au moindre doute, un myé-logramme sera demandé pour confirmer le diagnostic.

Douleurs d’origine psychogène

Elles sont moins fréquentes que chez l’adulte. Elles doivent parfois être évoquées, particulièrement chez l’adolescent sous la forme de conversion hystérique ou de dépression masquée. Il n’en demeure pas moins qu’un tel diagnostic doit rester un diagnostic d’élimi-nation, et nous n’hésitons pas, dans de telles circons-tances, à avoir recours à nouveau à la scintigraphie osseuse avant de l’affirmer. Un entretien avec les parents, en l’absence de l’enfant, est indispensable afin d’expliquer, de rassurer et de proposer des solu-tions thérapeutiques simples. Ces douleurs intriquées de manifestations psychiques nécessitent une prise en charge thérapeutique spécialisée. ■

Figure 5. Douleur de hanche consécutive à un kyste osseux essentiel du col fémoral gauche.

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Références bibliographiques

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