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TUIKALEPA Moliga Stagiaire PLC2 en Lettres modernes Lycée La Prat’s, Cluny. MÉMOIRE PROFESSIONNEL " TEMPS FORTS ET TEMPS FAIBLES : COMMENT ORGANISER UNE SÉANCE DYNAMIQUE EN FRANÇAIS DANS UNE CLASSE DE SECONDE ? " Sous la direction de Madame Jovignot IUFM de Dijon Année scolaire 2005-2006 Dossier n° 05STA00589

IUFM de DIjon€¦ · Pour réussir une transmission efficace des savoirs et des savoir-faire, ... classe entière dans la semaine, à une heure de module tous les quinze jours où

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TUIKALEPA Moliga Stagiaire PLC2 en Lettres modernes Lycée La Prat’s, Cluny.

MÉMOIRE PROFESSIONNEL

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Sous la direction de Madame Jovignot

IUFM de Dijon Année scolaire 2005-2006 Dossier n° 05STA00589

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SOMMAIRE

INTRODUCTION p.1

I. Observations p.4

A. Présentation du lycée1. un cadre idyllique et reposant, propice au travail 2. un lycée de tradition scientifique

B. Présentation de la classe

1. une classe hétérogène 2. des élèves partisans du « moindre effort »

C. Les obstacles à l’apprentissage et à la réussite scolaire

1. des élèves dissipés et peu autonomes 2. les tâtonnements d’un professeur débutant

D. Le sujet du mémoire

II. Les éléments qui influencent la performance scolaire p.12

A. Le rapport au temps 1. le temps générateur d'angoisse 2. la fuite du temps 3. la fuite des temps de réflexion 4. le temps comme transformation B. Rythme scolaire et rythme biologique

1. les rythmes biologiques a) les rythmes ultradiens

b) les rythmes circadiens c) les rythmes infradiens

2. les régulateurs des rythmes biologiques a) l'horloge biologique interne b) l'alternance veille-sommeil

3. la vigilance journalière a) les variations périodiques des niveaux de vigilance et de

performances de l'enfant en milieu scolaire b) pour une meilleure "cohabitation" entre rythmes biologiques et vie

scolaire

C. Le développement cérébral1. Un développement progressif, non linéaire 2. "Le temps d'évocation"

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D. La mémoire 1. les deux niveaux de mémoire 2. les obstacles à la mémoire à long terme a) le stress b) l'inconnu c) la saturation d'informations ou la « surcharge cognitive » d) un rythme effréné E. De l'intérêt d'alterner temps forts et temps faibles

III. La mise en place de séances dynamiques p.24 A. Le travail préparatoire du professeur : un travail de sélection.

1. choisir un projet pédagogique dans la séquence 2. choisir des objectifs précis dans la séance 3. choisir des activités en fonction du moment

B. La posture du professeur : une attitude déterminante

1. la tonicité 2. la voix 3. le regard 4. la gestion des interventions

C. « Joindre l’utile à l’agréable » en variant les activités

1. le travail en groupe 2. l’insertion dans la séance de la lecture de l’image 3. l’alternance d’activités orales et d’activités écrites

D. Comment rendre l’élève acteur de l’activité : la notion d’effort IV. Analyse et évaluation de l’entreprise p.36

A. Critères de résultats 1. les résultats satisfaisants 2. les résultats décevants

B. Remédiations possibles CONCLUSION p.39

QUELQUES CITATIONS A MÉDITER … p.41

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INTRODUCTION

Après l’euphorie des résultats du CAPES, une certaine inquiétude s’est fait

sentir à l’approche de la rentrée. Comment passer du statut d’élève à celui de

professeur ? Plusieurs difficultés s’annonçaient.

Tout d’abord, il ne s’agissait plus d’adopter cette posture confortable de l’apprenant ,

il fallait à présent se montrer actif, et endosser le rôle d’enseignant, trouver des

stratégies pour faire passer mes connaissances et mes compétences.

D’autre part, après une année de préparation aux épreuves du CAPES de Lettres

Modernes, j’allais être confrontée au problème d’adaptation au niveau et aux attentes

d’un jeune public.

En effet, très vite les premières difficultés sont apparues. Elles m’ont alors

amenée à m’interroger sur ma pratique d’enseignement. Les questions affluaient :

comment intéresser mes élèves ? Comment les motiver ? Comment maintenir leur

attention ?

En définitive, toutes ces interrogations m’ont conduite à réfléchir sur la

dynamique d’une séance, sur son articulation. Pour réussir une transmission efficace

des savoirs et des savoir-faire, il fallait que j’organise ma séance autour de temps

forts et de temps faibles. Autrement dit, il me fallait adopter un tempo adapté à ma

classe qui prenne en compte toutes les composantes qui influencent la performance

scolaire comme par exemple la motivation, l’attention, la mémoire, etc.

Une étude plus précise de ces concepts, m’a permis d’établir et d’utiliser des

stratégies d’interventions qui m’ont guidée dans la création ou la modification

d’activités d’apprentissage présentées au cours de ce mémoire.

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I OBSERVATIONS

1. Présentation du lycée

a) un cadre idyllique et reposant, propice au travail

Le Lycée La Prat’s se trouve dans une des plus belles villes de la Saône et

Loire : Cluny. Le Lycée surplombe cette magnifique petite ville touristique célèbre

pour son abbaye. Ainsi dans les salles de classe, nous avons le choix entre une vue

sur un décor champêtre et une autre sur les vieilles bâtisses conservées de

l’Abbaye. Ce cadre splendide et reposant est propice à une atmosphère sereine

dans l’enceinte même du Lycée. En effet, j’ai été très surprise dès mon arrivée de ce

calme ambiant, du respect accordé aux locaux, au matériel. De plus, le petit effectif

du Lycée engendre une certaine convivialité entre les élèves qui sont pour la plupart

internes. En effet, sur les 450 élèves, 200 d’entre eux vivent durant la semaine à

l’internat qui a été entièrement rénové il y a deux ans.

Des locaux tout neufs, une belle région, un splendide panorama, un effectif réduit, le

Lycée semble réunir les conditions idéales de travail.

b) un Lycée de tradition scientifique

C’est un lycée au passé scientifique qui continue dans cette lignée comme le

confirme le schéma suivant.

LES OPTIONS AU LYCÉE LA PRAT’S

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Il prépare à des bacs généraux et technologiques (ES - S/SVT - S/SI – GM – GE ), et

propose aussi un Brevet de Technicien Supérieur ( technico-commercial ; Génie

Mécanique / Génie Electronique) et une classe préparatoire (PTSI - PT). Les

matières scientifiques comme on peut le constater priment, et le français dans tout

cela est malheureusement passé un peu aux oubliettes. Pour les quelques élèves

littéraires désireux de poursuivre un cursus littéraire, la seule possibilité qui leur est

offerte est de s’expatrier à Mâcon ou à Chalon-sur-saône. Quant au latin et au grec,

le Lycée ne dispose que d’un seul professeur de Lettres Classiques, qui chaque

année voit ses effectifs se réduire comme une peau de chagrin. Pour l’année 2005, il

ne compte dans sa classe que huit élèves passionnés par les langues anciennes.

Pour ce qui est des classes de seconde, elles sont au nombre de quatre, et se

répartissent généralement les élèves selon les options choisies par chacun, ceci pour

faciliter la gestion administrative des emplois du temps des différentes classes. Le

Lycée La Prat’s présente, pour la classe de Seconde, les options suivantes :

Sciences Economiques et Sociales (SES) option mise en place récemment, Initiation

aux Sciences de l’Ingénieur (ISI) , Informatique et Système de Production (ISP),

Mesures Physiques et Informatique (MPI) ; en options facultatives, les élèves

peuvent choisir entre une option Education Physique et Sportive (EPS), une option

Latin et une option Grec. Encore une fois, nous constatons la forte densité des

matières scientifiques au détriment des matières littéraires.

Pour intéresser les élèves à la littérature, les ouvrir à la culture, les trois

professeurs de français soutenus par le professeur de philosophie et par le

documentaliste au Lycée La Prat’s se mobilisent et réunissent leurs forces. C’est

ainsi qu’un atelier théâtre et un club vidéo ont été créés. Chaque année, un petit

groupe d’élèves motivés et courageux s’investit pour monter une pièce de théâtre

sous la tutelle du professeur de philosophie, dramaturge par ailleurs à ses heures

perdues. Ce travail fait l’objet d’une représentation au théâtre municipal de Cluny

vers la fin de l’année scolaire. Voilà un petit aperçu du travail fourni par le petit

groupe de professeurs de Lettres qui tente de se faire une place au milieu de ce

grand monde de scientifiques.

2. Présentation de la classe

a) une classe hétérogène

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La classe de seconde 4 qui m’a été attribuée compte trente-trois élèves, ce qui

est assez important même si aujourd’hui un tel effectif paraît tout à fait normal. Sur

ces trente-trois élèves, seize ont choisi l’option MPI alors que les autres ont opté

pour les sciences économiques et sociales.

La mixité est assez bien respectée : 16 filles pour 17 garçons. Si la seconde 4

est très bien équilibrée dans la répartition des sexes, il en est autrement pour la

répartition des âges. Elle comprend en effet vingt élèves nés en 1990 et qui ont donc

un cursus scolaire qui ne présente aucun retard, six élèves nés en 1989 dont trois

redoublent leur seconde et quatre nés en 1988 dont trois redoublants. Enfin, deux

élèves de 1991 ont une année d’avance, ce sont d’ailleurs des élèves très brillants,

et l’un des deux se trouve être le meilleur de la classe.

Outre la différence d’âge, les élèves ne proviennent pas tous des mêmes

collèges, comme cela se produit généralement en seconde. Le Lycée La Prat’s

regroupe toute une zone qui s’étend autour de Cluny. Ainsi, la majorité vient du

collège Prud’hon de Cluny, une autre bonne dizaine du Collège Saint Cyr de Matour,

deux autres élèves sont du Collège en Fleurette à Saint Gengoux le National, et

enfin deux élèves se trouvaient au Collège Saint Gilbert à Montceau les Mines. La

plupart des élèves se connaissaient déjà en arrivant au Lycée, et des groupes

étaient déjà constitués.

L’hétérogénéité de la classe est encore accentuée par la forte concentration

d’élèves internes (12 élèves) qui vivant en communauté toute la semaine ont fini par

créer des liens et donc former un petit groupe isolé et très solidaire.

Notons par ailleurs que la moitié des élèves veulent s’orienter vers une

première SES, les autres en ISI, ce qui correspond aux choix des options. Seul un

élève désire faire une première L ce qui sûrement l’obligera à quitter Cluny puisque

le Lycée ne propose pas de filière littéraire. Cependant, il présente déjà deux années

de retard et des difficultés en français. Enfin deux filles sont arrivées dans cette

classe par défaut puisqu’elles n’ont pas été reçues en BEP. Il est très difficile de les

motiver et de les intéresser aux cours. Elles présentent un désintérêt total pour

toutes les matières, et affirment sans honte qu’elles s’ennuient toute la journée.

On peut conclure que cette classe présente quelques aspects hétérogènes. Cela

s’est confirmé avec les premières évaluations puisque j’ai constaté une grande

différence de niveau entre les élèves. En effet, alors que dix élèves semblent avoir

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des facilités en français et atteignent par conséquent une moyenne de 14, dix autres

éprouvent de réelles difficultés d’expression et de compréhension.

Les professeurs des autres disciplines de la seconde 4 font le même constat .

Cependant le caractère hétérogène de la classe semble avoir été dépassé et tous

unanimement sommes satisfaits du climat général.

b) des élèves sympathiques mais partisans du « moindre effort »

Notons tout d’abord que les élèves assistent à quatre heures de français en

classe entière dans la semaine, à une heure de module tous les quinze jours où la

classe est partagée en deux selon les options (il ne s’agit pas de groupes de

niveaux) ainsi qu’à une dernière heure d’aide individualisée dont l’horaire est peu

judicieux. En effet, le petit groupe de huit élèves désireux de venir à l’Aide

individualisée n’a le choix qu’entre le lundi soir de 17h00 à 18h00 ou le vendredi

matin à la première heure, c’est-à-dire à 8h00. Il me faut alors parfois désigner les

volontaires que je choisis en fonction des difficultés. Quant aux autres cours, ils ont

lieu le plus souvent en fin d’après-midi entre 16h00 et 18h00. Ces horaires difficiles

compliquent ma tâche, de plus j’ai affaire à des élèves fatigués de leur longue

journée. En effet, le vendredi soir, la seconde 4 arrive en cours de français à 16h00

après sept heures de cours derrière eux !

Dans l’ensemble, les professeurs de la seconde 4 trouvent les élèves très

gentils, très sympathiques, mais là s’arrêtent les compliments. Après réflexion entre

professeurs, nous nous sommes accordés sur le fait que cette gentillesse latente

était néfaste. La classe de seconde 4 est souriante mais paresseuse. C’est de là que

vient le réel problème. Il est difficile de motiver ces élèves qui semblent ne pas

vouloir s’investir.

3. Les premiers obstacles aux apprentissages

a) des élèves dissipés et peu autonomes

J'ai rencontré dès les premières séances des difficultés auxquelles il fallait

faire face immédiatement.

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Les plus évidentes étaient de l'ordre de la discipline. Les élèves comprennent

vite que nous sommes de tout jeunes professeurs inexpérimentés, et par conséquent

cherchent à nous déstabiliser et à nous pousser dans nos derniers retranchements.

Cela se manifeste par des remarques déplaisantes, des tentatives de familiarité, ou

des bavardages intempestifs.

En effet, un élève apparemment très intelligent et assez cultivé s'était permis

de commenter et de juger mon travail. Après avoir rendu les copies du premier devoir

à la maison qui malheureusement était loin d'être excellent, Valentin s'est mis à dire

suffisamment fort pour que je puisse entendre : "L'année dernière j'avais 17 de

moyenne en français, et mon professeur était compétent !". Je lui ai demandé

calmement de venir me voir à la fin de l’heure pour un petit entretien entre quatre

yeux ; il n’a pas mis longtemps pour reconnaître ses torts et s'excuser. De mon côté,

je me suis renseignée sur les moyennes de mes élèves, et j'ai pu voir que Valentin

n'avait jamais eu 17 de moyenne en français !

D'autre part, j'ai dans ma classe, un élève très difficile à canaliser. D'une très grande

énergie, pitre de nature, Raphaël aime se faire remarquer en faisant rire la galerie.

Malgré ses deux années de retard, il est loin d'être sot, bien au contraire, il manifeste

un grand intérêt pour le français, la culture littéraire et culturelle. Néanmoins, il prend

beaucoup de place dans la classe, et c'est fatigant de devoir toujours le calmer. Je le

reprends sans cesse, ce qui me donne l'impression de m'acharner sur lui. Cette

situation conflictuelle me déplait fortement. De plus mon attention est davantage

portée sur lui plutôt que sur l'ensemble de la classe.

Par ailleurs, j'ai eu affaire dès la première semaine à des familiarités dans les

copies (il s’agissait d’un questionnaire sur leurs habitudes de lecture), du genre "je

n'écris que des conneries qui me passent par la tête", "j'en ai rien à foutre du français

!". Là encore, j'ai tout de suite mis les points sur les "i" en leur faisant comprendre

que je suis leur professeur et qu'il doivent me respecter tout comme je les respecte.

Jamais plus je n'ai rencontré ce genre de problème par la suite.

Enfin, mes élèves ont tendance à bavarder beaucoup, mais aussi à répondre

tous en même temps, sans lever la main, sans prendre le temps d'écouter leur

camarade. J'ai beau leur expliquer que pour un travail plus efficace, pour une

atmosphère plus reposante et donc plus studieuse, il faut parler chacun son tour,

lever le doigt, écouter l'autre, très vite ils reprennent leurs vieilles habitudes. Certes

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ma classe est très active et participe au cours, mais cette hyper activité incontrôlée

laisse place à un désordre intenable.

Dès que l’occasion se présente, comme par exemple pendant un temps mort lorsque

je leur demande de prendre une feuille, ou encore d’ouvrir leur manuel, les élèves en

profitent pour discuter entre eux de choses et d’autres qui sont sans aucun rapport

avec le cours. La séance est sans cesse entrecoupée par ces moments de flottement

et de brouhaha, ce qui ne me permet pas d’avancer comme je le souhaite. Que

j'essaie de responsabiliser la classe en leur montrant qu'un tel climat n'est pas

propice au travail, ou que je reprenne individuellement les élèves bavards, le travail

fourni en classe n'est toujours pas convaincant.

En fait, si le silence revient momentanément, la paresse demeure. Je crois qu’ils

attendent tout simplement que je leur donne la matière du cours. Partisans du

« moindre effort », ils se sont décidés à ne fournir qu’un minimum de travail, suffisant

pour obtenir une note passable aux devoirs.

A tout cela, se rajoute encore la difficulté que rencontrent ces tout jeunes

lycéens à s'adapter au rythme du Lycée. La transition entre le Collège et le Lycée ne

se fait pas sans heurts, et la plupart des élèves se sentent un peu perdus face à la

quantité de travail personnel qu’on leur demande de fournir, mais aussi face à cette

nouvelle « autonomie » vers laquelle on les conduit.

En effet, au premier devoir à la maison, qui était un petit exercice de préparation à

une lecture analytique, la plupart des élèves m’ont rendu un travail très succinct. Ils

n'avaient fait que du repérage, et à aucun moment on pouvait lire une

« reformulation », une analyse ou une explication. De plus, beaucoup n’on même

pas pris le temps de faire des phrases complètes : ils ont bâclé leur devoir puisqu'au

lieu de rédiger ils ont utilisé des abréviations et des symboles.

Quant au matériel, pour être sûre qu’ils apportent tout le nécessaire pour la séance

suivante, il est indispensable de le leur rappeler systématiquement la veille du cours.

De même, il faut toujours leur dire en début de séance de prendre une nouvelle

feuille, d’écrire le titre de la séance en haut, de numéroter la feuille, et enfin de

prendre des notes. Sans cela, ils ne font jamais rien et ne gardent aucune trace

écrite du cours. S’ils ne sont pas sollicités par le professeur, les élèves ne prennent

pas d’initiatives.

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Ces difficultés témoignent bien du manque de volonté des élèves qui ont tendance à

ne pas se mettre volontairement au travail.

b) Les tâtonnements d’un professeur débutant

Il ne faut pas jeter la pierre uniquement aux élèves, je suis persuadée que le

professeur tient lui aussi un rôle très important dans la dynamique d’une classe. Je

dirai même qu’il est la pierre d’achoppement et que souvent sa pratique fait alors

obstacle à la transmission des compétences et des connaissances.

Pour ma part, j’ai vite constaté de multiples erreurs dans ma conduite de la classe ou

encore dans ma pratique d’enseignement. Peut-être est-ce dû au manque

d’expérience, ou est-ce lié à mon caractère ? Quoiqu’il en soit, mes choix

pédagogiques , n'étaient pas toujours bien adaptés au cours et à mes élèves.

Effectivement, j’ai réalisé dès les premiers cours qu’entre mes élèves et moi

s’ouvrait un gouffre. Celui-ci était dû à mes objectifs trop ambitieux et trop denses, à

mon débit de paroles trop important, à mon rythme d’enseignement trop rapide. Et,

de façon inéluctable, je pouvais voir en face de moi des élèves perdus, fatigués et

énervés, qui ne prenaient comme notes que les quelques traces écrites au tableau.

C’est ainsi que je me suis retrouvée à faire une lecture analytique sur un extrait des

Confessions de Rousseau en trois heures. Heureusement, cela n’est arrivé qu’une

seule fois, car j’ai compris tout de suite que si je poursuivais mes cours avec un tel

rythme j’allais directement à la catastrophe. Une semaine après, j’ai fais un bilan sur

l’écriture dans le cadre de cette première séquence accordée à l’objet d’étude « Lire,

écrire, publier ». J’ai demandé à mes élèves de reprendre les textes qui traitaient des

plaisirs et des difficultés d’écrire, et de compléter un tableau dont les titres des

colonnes étaient : « plaisir et difficultés d’écrire », « but de l’écriture », « les moyens

de l’écriture ». Plus de la moitié de mes élèves ne se souvenaient plus du texte de

Rousseau. Dans une volonté d’être exhaustive, je les avais noyés dans des

explications qui n’étaient pas pertinentes et qui s’éloignaient de ma problématique.

Mon maître de stage qui avait assisté à une de mes séances dès la première

semaine avait fait ce même constat. Mon premier objectif fut alors de mieux cibler

les points importants dans mes lectures analytiques.

Même si par la suite les lectures analytiques ne duraient qu’une heure, mon

rythme d’élocution était trop élevé, et d’une manière générale je parlais beaucoup

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trop et ne prenais pas assez en compte les interventions de mes élèves. J’avais la

hantise de ne pas pouvoir finir ma séance comme je l’avais prévu, et c’est pourquoi

je ne prenais pas le temps d’écouter mes élèves, de rebondir sur leurs propos

souvent pertinents et intéressants. Un jour, en module, dans un cours de grammaire

consacré aux paroles rapportées, je posai la question suivante : « Quelle autre

transformation mis à part les signes typographiques et les types de phrases oyez-

vous après avoir mis le discours direct en discours indirect ? ». J’attendais qu’ils me

parlent des interjections qui n’étaient plus présentes dans le discours indirect. Au lieu

de cela, un élève remarqua le changement des pronoms et des temps, ce qui était

tout à fait juste. Seulement, dans mon obsession des interjections, je lui répondis que

l’on verrait ce point plus tard. Mauvaise réaction de ma part, puisque j’aurais dû

valoriser cette réponse plutôt que de la rejeter. Il m'arrive encore de dire "non" aux

élèves quand leur réponse est fausse ou inopportune sans leur expliquer leur erreur.

Enfin, je crois que je ne multiplie pas assez les méthodes d’apprentissage et

n’en reste alors qu’au cours dialogué.

Ce choix didactique a ses intérêts et ses avantages, mais il n'est pas toujours

satisfaisant. Le cours dialogué consiste à instaurer un dialogue entre le professeur et

ses élèves suivant un questionnaire précis qui cherche à faire émerger, dans le

cadre de l'étude d'un texte, deux ou trois dimensions fondamentales. Ce

questionnement part alors du simple repérage pour aboutir à l'interprétation. Cet

exercice semble à première vue intéressant et pertinent puisqu'il permet aux élèves

de découvrir un texte en suivant le professeur comme guide. Pourtant ce principe de

questions/réponses entre élèves et professeur pose plusieurs problèmes.

Tout d'abord, cette démarche est faussement inductive puisqu'elle ne laisse pas de

véritable marge de liberté aux élèves dans leur découverte du texte. En effet, il s’agit

d’une démarche dirigiste et déductive puisque le professeur a une représentation

préétablie des réponses. En ce qui me concerne, mon maître de stage m'a tout de

suite mise en garde sur mon questionnement car la plupart de mes questions étaient

très fermées, et finalement apportaient déjà la réponse. Elles étaient du genre : "Ce

texte vous semble-t-il si réaliste ?", "Pensez-vous vraiment que ce discours est

convaincant ?". De plus, cet exercice s'il est mal mené s'essouffle très vite par sa

monotonie. Il installe alors les élèves dans un certain confort qu’il est ensuite difficile

de bousculer.

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4. Le sujet du mémoire : comment construire une séance dynamique ?

Pour éviter cette monotonie des cours et cette passivité des élèves, je me suis

interrogée sur la construction d’une séance, sur son tempo. De la même manière

qu’une symphonie alterne « allegro » et « moderato », une séance doit elle aussi

avoir son propre rythme. Cela dans le but d’attirer l’attention des élèves, de les

intéresser et enfin de les rendre participants actifs au cours. Je dois alors multiplier

les stratégies d’apprentissages pour que puissent alterner dans mes séances des

temps forts et des temps faibles que je définis un peu plus loin. Mozart avait raison

de dire que " le plus nécessaire et le plus difficile dans la musique c'est le tempo". Il

en est de même pour le professeur qui lui aussi doit organiser son enseignement

selon des rythmes complexes.

II. LES ÉLÉMENTS QUI INFLUENCENT LA PERFORMANCE SCOLAIRE

A. le rapport au temps

1. Le temps générateur d'angoisse

Il faut tout d'abord revenir à la notion de temps, élément essentiel dans notre

société, puisqu'il gouverne et structure notre quotidien. Le temps explique Jean-Louis

Servan-Schreiber est un facteur de stress.

Tout commence avec l'apparition des montres en particulier celles à quartz qui

égrainent inexorablement les secondes. L'occidental dans sa quête de la maîtrise du

temps se voit de plus en plus dépendant de lui jusqu'à en devenir son esclave. En

effet, "le temps actuel, moderne, est unique, rythmé et encombré"1. Unique parce

que toute la Planète est synchrone. Rythmé parce que nous sommes soumis à des

habitudes sociales, notre quotidien étant ponctué par les horaires de travail, les

heures de repas, etc. Encombré enfin, car pour subsister dans cette société

complexe, la performance doit être notre qualité première ; or pour cela il nous faut

1 1 L’Art du temps, Servan - Schreiber J-L., Éd. Fayard, p.23

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être productif c'est-à-dire "faire tenir davantage d'activités dans le temps unique qui

nous est alloué".

2. La fuite du temps

Il en résulte de l'analyse précédente une phobie de l'attente accompagnée

d'une déconcentration.

Nous courons après le temps qui nous échappe et ne supportons pas cette

impression de fuite impalpable. En témoignent toutes ces fictions qui nous font rêver

en nous proposant de remonter le temps afin de changer le cours de notre existence.

Je pense évidemment au film Retour vers le futur, ou encore à la série télévisée

Code Quantum. De manière plus concrète, une expérience très simple qui nous est

relatée dans le livre de Servan-Schreiber, L'Art du temps a été réalisée en classe.

Elle consistait à mesurer le temps d'attente d'un professeur après qu'il a interrogé un

élève. On a donc vu qu'en moyenne ce temps d'attente était de 0,9 seconde, soit un

laps de temps extrêmement réduit. Combien de fois ai-je fait preuve moi-même

d'impatience à l'égard de mes élèves ? Combien de fois ai-je terminé ma séance

dans la précipitation de peur de ne pas être dans les temps ?

3. La fuite des temps de réflexion

Cette "impatience chronique" a par ailleurs de fâcheuses conséquences sur

les capacités de concentration. Nous délaissons le temps de la réflexion au profit du

temps du faire, de l'agir. Nous pouvons à ce moment-là, rejoindre Pascal qui pensait

que nous nous réfugions dans des activités multiples et diverses pour éviter une

confrontation avec nous-mêmes, pour éviter de nous poser des questions simples et

d'autant plus profondes. Nous sommes dans une société où il faut "foncer" à toute

allure, ce qui conduit souvent à ne rien faire à fond. Force est de constater que nos

élèves ont vite appris cette leçon de société. Rares sont ceux qui analysent une

citation ou un sujet de dissertation, les élèves passent généralement tout de suite à

l'étape finale qui consiste à la rédaction et ainsi sautent les étapes essentielles,

celles de l'analyse et de la réflexion. À nous professeurs de montrer l'exemple.

4. Le temps comme transformation

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L'angoisse de l'homme face au temps peut aussi s'expliquer par son

incapacité à définir précisément cette notion. "Qu'est-ce que le temps ?" se demande

Servan-Schreiber qui propose alors une définition intéressante dans le cadre de ce

mémoire : "s'il faut choisir la définition la plus simple possible du temps, [on pourrait

dire] que c'est ce qui mesure une transformation "2. Il s'agit là d'une mesure du temps

qui rejoint celle de nos ancêtres. Par l'observation des transformations de la nature,

nos ancêtres primitifs pouvaient alors sentir l'écoulement du temps. Si l'on adapte

cette définition à notre sujet on peut dire que le temps à l'école peut se mesurer par

l'observation des transformations opérées chez nos élèves. Lorsque l'on se réfère

aux Instructions officielles nous relevons dès la première phrase : "L'enseignement

du français contribue à la formation personnelle et civique des lycéens". L'élève est

en devenir. Les transformations sont alors diverses : elles touchent à la fois ses

capacités, ses compétences et son comportement, son état d'esprit. En effet, en tant

qu'enseignant nous sommes amenés à provoquer chez les élèves des attitudes

nouvelles de réflexion. L'adolescence est une période de transition entre l'enfance et

la vie d'adulte souvent difficile voire douloureuse. C'est à ce moment-là que s'éveille

une conscience accrue des problèmes de société, que les centres d'intérêts

deviennent des passions, que se forge une réflexion de plus en plus personnelle et

poussée. Il m'est paru alors essentiel pour le professeur de français que je suis

d'accompagner ces adolescents dans cette période de transformation en essayant

de les amener le plus souvent possible à réfléchir, à s'interroger, à mettre en doute.

J'essayais d'ouvrir leur esprit vers d'autres horizons, et pour cela il me faut être

attentive à leurs attentes tout comme à leur rythme.

B rythmes biologiques et rythme scolaire

1. les rythmes biologiques

Tous les êtres vivants, animaux et végétaux sont soumis à des rythmes

naturels : la rythmicité est une des propriétés fondamentales de la matière vivante.

L'enfant, comme l'adulte est ainsi soumis à des variations rythmiques de ses

2 L’Art du temps, Servan - Schreiber J-L., Éd. Fayard, p.18

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différentes fonctions physiologiques. Un rythme biologique se définit comme la

variation périodique ou cyclique d'une fonction particulière d'un être vivant. Celui-ci

peut être d'ordre physiologique (battement cardiaque, activité électrique cérébrale…)

biochimique (synthèse moléculaire, hormonale…) ou comportementale (sommeil,

migration). De nombreux rythmes, fort différents les uns des autres ont été identifiés.

On distingue des rythmes de haute, de moyenne et de basse fréquence.

a) les rythmes ultradiens

Les rythmes ultradiens sont des périodes courtes, de quelques minutes à

quelques heures, qui régulent nos jours et nos nuits. Les cycles nocturnes de

sommeil de 1h30 à 2 heures, les alternances de sommeil lent et de sommeil

paradoxal en sont des exemples. Dans la journée, nous alternons aussi des cycles

de repos et d'activité, de fatigue et de grande efficacité : phases d'éveil actif au cours

desquelles nous sommes très vigilants, et phases d'éveil passif au cours desquelles

nous sommes beaucoup moins vifs, beaucoup moins efficaces. Ces rythmes

influencent la plupart de nos fonctions biologiques : rythme cardiaque, rythme

respiratoire, température corporelle, sécrétions internes. Ils jouent ainsi un rôle

important sur nos performances physiques et mentales.

b) Les rythmes circadiens

Les rythmes circadiens sont des alternances de 24 heures environ. Les

variations périodiques circadiennes gouvernent les fonctions métaboliques,

physiologiques et psychologiques des êtres vivants. Dans les conditions normales,

cette alternance est synchronisée par le rythme jour-nuit et permet un ajustement de

l'organisme au mode de vie. Nos activités passent, chaque période de 24 heures, par

un sommet et un creux qui ne sont pas distribués au hasard mais relèvent d'une

véritable programmation dans le temps. Pour l'humain, tous les rythmes biologiques

répondent à la nécessité de faire face, physiquement et intellectuellement, à une

activité diurne. Les performances du système nerveux (attention, coordination

motrice, mémoire), la force musculaire, les fréquences cardiaque et respiratoire

atteignent leur maximum au cours de la journée.

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c) Les rythmes infradiens

Les rythmes infradiens sont des rythmes lents. Ils peuvent être mensuels,

saisonniers ou annuels et sont repérables chez certains d'entre nous : signes

dépressifs survenant chaque année à la même période, besoin plus important de

sommeil et sensibilité accrue aux infections en hiver.

2. Les régulateurs des rythmes biologiques

La diversité des rythmes biologiques implique l'existence de plusieurs types de

mécanismes régulateurs. Une horloge interne présente dans chaque organisme et

des donneurs de temps liés à l'environnement organisent notre vie dans des cycles

proches de 24 heures.

a) l'horloge biologique interne

Les rythmes biologiques sont sous le contrôle de l'horloge interne, structure située

dans le cerveau. Elle doit s'ajuster quotidiennement aux événements périodiques de

l'environnement, permettant ainsi à l'organisme de s'adapter, en particulier aux

alternances entre le jour et la nuit. Elle permet de coordonner les rythmes

biologiques de nature endogènes, c'est-à-dire des rythmes résultant de l'influence

d'éléments d'origine génétique.

b) l'alternance veille-sommeil

C'est un des facteurs essentiels de la régulation des rythmes biologiques. Il ne

cesse d'évoluer de la période fœtale à l'adolescence.

À partir de 12 ans, la structure du sommeil se modifie de façon importante, le

sommeil nocturne devenant plus léger. Cette période de la vie est caractérisée par

une tendance à se coucher et se lever plus tard. Ceci explique l'apparition, à l'âge de

l'adolescence, d'épisodes de somnolence diurne. Du fait des impératifs scolaires, le

jeune dort moins (sept heures par jour en moyenne à 20 ans). Ses besoins en

sommeil restant néanmoins encore élevés, il compense habituellement par des

temps de sommeil plus longs le week-end.

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N'oublions pas que chaque individu est unique et qu'il existe alors une grande

variabilité interindividuelle, à tous les âges, pour les besoins de sommeil.

Soulignons par ailleurs qu'une privation partielle de sommeil (nuit de 5 heures par

exemple) sur une seule nuit suffit à perturber l'apprentissage des tâches les plus

complexes (tâches de créativité) et les plus éloignées des tâches habituelles.

Des experts réunis par l'Inserm pour étudier la question de l'aménagement du temps

scolaire conseillent de retarder l'heure d'entrée en classe. Il est proposé que les

cours ne commencent pas avant 9 heures. Or comme la plupart des lycéens, mes

élèves rentrent au Lycée à 8 heures. Mon enseignement doit alors s'adapter de toute

évidence aux horaires qui leur sont imposés. Je dois organiser les activités en

fonction des heures auxquelles je fais cours avec mes élèves de seconde, mais

aussi en fonction de chacun d'eux, puisque tous n'ont pas le même rythme

biologique, la même énergie au même moment. Pour construire une séance

dynamique, il me faut alors être davantage attentive à ces données.

3. la vigilance journalière

a) les variations périodiques des niveaux de vigilance et de

performances de l'enfant en milieu scolaire

Des études menées en France sur les variations périodiques des niveaux de

vigilance et de performances de l'enfant en milieu scolaire, montrent que l'activité

intellectuelle des élèves fluctue au cours de la journée et aussi au cours de la

semaine. Les variations journalières de l'activité intellectuelle sont surtout liées aux

rythmes biologiques de l'enfant, tandis que les fluctuations au cours de la semaine

résultent davantage de l'influence de l'emploi du temps hebdomadaire.

Au cours des 24 heures, la vigilance passe par des hauts et des bas, c'est ce que

nous montre le schéma suivant.

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LE TAUX DE VIGILANCE DANS UNE JOURNÉE

Heures Activité Performance physique Eveil actif

Efficacité

Repli Fatigue Détente Sieste

Sommeil de nuit

23h

20h 17h

14h11h

8h

5h

2h

On obtient un tracé sinusoïdal repérable à la même heure ou presque chez tous les

humains, corrélé à l'heure du soleil.

Cette vigilance est précédée par une autre courbe parallèle qui est celle de notre

température corporelle. Lorsque la température s'élève, notre organisme se prépare

à une phase active, éveillée, efficace. Lorsque que la température baisse, la

vigilance diminue.

Lorsqu'on observe cette courbe, on peut dégager différentes phases :

- une phase active entre 5 et 8 heures du matin où nous sommes efficaces,

prêts à apprendre, à mémoriser, à effectuer un travail physique important.

- une phase de repli, de fatigue, de faibles performances physiques entre 11

et 14 heures. Il s'agit d'une fatigue biologique, avec refroidissement corporel.

- une nouvelle phase de haute vigilance entre 17 et 20 heures où nous

pouvons effectuer de grandes performances physiques et intellectuelles.

Généralement c'est l'heure de l'excitation chez les enfants et les adolescents qui

peuvent alors faire du sport, étudier très efficacement, apprendre très vite.

- une phase de fatigue et de très faible vigilance entre 23 heures et 2 heures

du matin. Le froid et la fatigue se font sentir, nous écoutons avec moins de lucidité

les conversations environnantes, et sommes proches de l'endormissement.

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b) pour une meilleure "cohabitation" entre rythmes biologiques et vie

scolaire

On dit d'un individu qu'il est en phase, lorsqu'il vit et travaille aux moments de

meilleure performance, et se repose ou dort dans les moments de faible

performance. On constate donc que nos élèves comme nous-mêmes, sommes très

rarement en phase. Si l'on voulait tenir compte de la rythmicité de la vigilance pour

organiser la journée scolaire, il faudrait réserver les créneaux horaires définis comme

étant les plus favorables (fin de matinée / milieu d'après-midi), à des apprentissages

nouveaux, nécessitant de l'attention et, à l'inverse, occuper les moments moins

favorables à des activités d'entretien des connaissances ou à caractère plus ludique.

C. Le développement cérébral

Outre le rythme biologique, facteur essentiel dans l'apprentissage, il ne faut

pas oublier l'activité cérébrale qui elle aussi joue un rôle déterminant. Certes, il est

indispensable de prendre en considération le rythme biologique de chacun, mais il

est aussi important de comprendre que le cerveau lui aussi, adopte un rythme qui lui

est propre.

1. Un développement progressif, non linéaire

"Le développement cérébral s'effectue par poussées et paliers" explique

Brigitte Chevalier dans son livre Méthodes pour apprendre à l'école, au Collège. En

effet, d'après des recherches menées par des scientifiques, trois, sept, onze et

quinze ans sont les âges les plus propices à l'apprentissage. Ainsi, à quinze ans,

l'élève mettra quatre fois moins de temps à comprendre une notion qu'à treize ou

quatorze ans. Le cerveau ne se développe pas régulièrement, mais progressivement,

il ne peut pas "absorber" à tout âge la même quantité de connaissances.

2. "Le temps d'évocation"

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Il est nécessaire de passer par cette étape pour que l'on soit certain que

l'élève a vraiment assimilé une notion. Trop souvent nous passons très vite d'une

notion à une autre sans nous assurer de son intégration par l'élève. Pour qu'un

concept soit réellement assimilé, il doit d'abord être compris, puis l'élève doit se

l'approprier par intériorisation. Ce temps d'évocation peut se concrétiser en

demandant aux élèves de revoir ou redire mentalement ce qu'ils viennent de

découvrir. Il est possible aussi de mettre en place à ce moment-là une forme de 3tutorat : chaque élève explique à son voisin avec ses propres mots ou par

l'intermédiaire de croquis, de schémas, ce qu'il vient d'apprendre.

Retenons simplement que le cerveau a besoin de mettre de l'ordre dans les

informations, et pour cela doit respecter la durée de maturation et de structuration.

D. La mémoire

Mémoriser, c'est assimiler des concepts nouveaux. Cette activité est centrale

chez l'élève qui dans toute sa scolarité devra sans cesse retenir en mémoire des

connaissances et des compétences. Comment alors utiliser cette mémoire à bon

escient pour un apprentissage efficace ?

1. les deux niveaux de mémoire

On distingue deux niveaux de mémoire, le premier dit mémoire immédiate, et

le second mémoire à moyen ou long terme.

La première, ne conserve les souvenirs que très peu de temps, elle nous permet par

exemple de trouver la page d'un article dans une encyclopédie en fonction des

indications données par le sommaire ou l'index peu avant. Elle est donc limitée sur le

plan de la durée. Sur le plan de la capacité, elle ne peut retenir plus de sept

éléments (mots isolés, chiffres).

La deuxième, la mémoire à moyen ou long terme fonctionne sur des durées

beaucoup plus longues et possède une capacité beaucoup plus grande. C'est cette

mémoire qui nous intéressera particulièrement, que l'on essayera d'activer chez les

3 Penser, apprendre, oublier, Vester F., Éd. Delachaux et Niestlé, 1984, p.203

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élèves. Comment les informations de la mémoire à court terme passent-elles à la

mémoire à long terme ?

2. Les obstacles à la mémoire à long terme.

a) le stress

À nouveau nous sommes confrontés à ce problème lié au temps et qui

provoque de lourdes conséquences sur la mémoire. En effet, un stress lié à la

réception du message peut provoquer inhibition et oubli. Autrement dit, l'élève est

moins disponible quand il est émotivement perturbé ou encore quand l'ambiance est

mauvaise, tendue.

À l'inverse, un climat agréable est beaucoup plus stimulant, et l'élève se souviendra

mieux de l'apprentissage qu'il a effectué." Les informations qui sont associées à des

souvenirs positifs sont traitées et assimilées particulièrement bien."4 En tant

qu'enseignant, il est donc nécessaire de pratiquer une pédagogie de la réussite,

c'est-à-dire de placer les élèves en situation de réussite. Nous devons pour cela être

persuadés d'une évolution positive possible chez eux, et enfin leur donner confiance

en eux. Il nous faut aussi veiller à ce qu'un climat sécurisant et agréable règne dans

notre classe, condition essentielle pour un apprentissage réussi.

Pour ma part, je dois améliorer mon attitude en classe, et me présenter devant mes

élèves beaucoup moins tendue. Il est vrai que cette notion de temps m'angoisse

particulièrement : j'ai constamment peur de ne pas finir dans les délais, de perdre du

temps dans des inepties, je redoute les moments de silence et d'accalmie

considérant ces périodes comme des temps morts. Ma conseillère pédagogique m'a

fait remarquer qu'une certaine agitation était manifeste chez certains de mes élèves

et qu'elle était sûrement due à un climat de tension que je créais du fait de mon

propre stress.

b) l'inconnu

La mémoire a peur de l'inconnu, les élèves peuvent manifester de l'effroi

devant une nouvelle tâche. Pour éviter cette crainte, le professeur doit partir du

souvenir vécu, du familier, ce qui rassurera l'apprenant, mais aussi éveillera sa 4 Méthodes pour apprendre à l'école, au collège, Chevalier. B., Éd. Nathan pédagogie, 1997, p.110

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curiosité. Il est aussi bon de fixer la quantité et la durée de la tâche à accomplir pour

sécuriser l'élève et pour le rendre plus efficace dans son travail. Effectivement,

travailler en temps limité permet à l'élève d'utiliser au maximum ses capacités de

concentration. Le cerveau réagit dans les délais que nous lui fixons, à condition

évidemment que ce délai soit raisonnable et réaliste.

c) la saturation d'informations ou "la surcharge cognitive"

La mémoire ne retient que des ensembles organisés. "Si les données ne

s'intègrent pas dans une architecture cohérente, l'apprenant ressent une impression

décourageante d'accumulation et d'éparpillement"5. Le "bachotage" est inefficace et

décevant, les informations sont jetées aux oubliettes par un cerveau saturé. Pour

éviter cette saturation, l'enseignant doit doser, réguler le taux d'informations au

préalable en notant les objectifs de connaissances et de compétences avant chaque

séance. De même il pourra indiquer aux élèves par l'intermédiaire d'un classement

inscrit au tableau le plan du cours. Intervient ici l'importance d'une prise de notes

structurée, organisée que les élèves doivent acquérir pour faciliter cette

mémorisation.

d) un rythme effréné

Des études montrent que la mémorisation diminue au fur et à mesure que le

temps s'écoule. C'est ce que nous prouve le graphique suivant.

Quantité retenue

Temps en heure(s)

100%

75%

50%

25%

5 4 3 2 1

LA MÉMORISATION EN COURS D'APPRENTISSAGE6

5 Méthodes pour apprendre à l'école, au collège, Chevalier. B., Éd. Nathan pédagogie, 1997, p.111 6 d’après Buzan T., Une tête bien faite : exploitez vos ressources intellectuelles, Éd. d’Organisation.

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Il faut absolument ménager des pauses à l'activité mentale au cours desquelles, le

cerveau effectue un travail de décantation. Il structure, réorganise les notions, réalise

des associations avec des savoirs préexistants. Tout ce travail permet une meilleure

intégration des connaissances. C'est finalement ce que proposait Rabelais puisque

selon lui, il était indispensable de digérer tous ces savoirs.

Concrètement, nous pouvons solliciter les élèves à prendre de véritables instants de

détente lorsqu'ils font leurs devoirs le week-end ou le mercredi après-midi. Ces

pauses de dix minutes environ devront vraiment être reposantes : l'élève peut

écouter de la musique, faire quelques mouvements de relaxation. Dans tous les cas,

il doit se détacher complètement de ses cours.

Quant au déroulement de la séance en classe, il est important d'alterner et de varier

les activités (leçons et exercices oraux, écrits). De plus, nous oublions trop souvent

que le corps participe à une meilleure activité intellectuelle. Le cerveau a besoin

d'être irrigué régulièrement pour augmenter la capacité d'attention et à l'inverse

diminuer la fatigue. Un exercice simple et efficace peut se pratiquer en heure de

classe lorsque l'on sent une certaine lassitude et baisse de concentration chez les

élèves. Il s'agit tout bêtement de les faire respirer, de leur faire prendre deux bonnes

bouffées d'oxygène qui pourront réactiver efficacement leur cerveau. "Nous

consommons chaque jour quatre kilos d'oxygène et, sur ces quatre kilos, le cerveau

en consomme 20 % à lui tout seul"7 Changeons de discours et disons plutôt à nos

élèves "Respirez" au lieu de "Soyez attentifs". Tel est le message lancé par Brigitte

Chevalier.

E. De l'intérêt d'alterner temps forts et temps faibles

Après toutes ces analyses, on en vient à la conclusion suivante : pour un

meilleur apprentissage, il est nécessaire d'organiser la séance selon un rythme

particulier. Celui-ci s'adaptera au moment de la journée, à l'énergie que peuvent

fournir les élèves. De plus, il paraît essentiel de devoir alterner des moments de

grande activité intellectuelle avec d'autres de relâchement. La vigilance ou l'attention

des élèves ne pouvant pas être constante durant la journée et même durant une

séance d'une heure, il me semble judicieux de ménager de temps à autre des

7 Méthodes pour apprendre à l'école, au collège, Chevalier. B., Éd. Nathan pédagogie, 1997, p.116

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moments dits faibles, c'est-à-dire de repos intellectuel ; cela pour mieux rebondir sur

des moments forts, plus intenses où les élèves seront d'avantage actifs et productifs.

Il me faudra jongler avec prudence et intelligence sur ces différents moments de la

séance, en essayant de varier les approches, de diversifier les activités. Il me faudra

par ailleurs être plus attentive à chacun de mes élèves, essayer de connaître leur

rythme afin d'utiliser leur énergie au bon moment pour donner une dynamique au

cours et ainsi entraîner le reste de la classe vers une attitude positive et active.

III. LA MISE EN PLACE DE SÉANCES DYNAMIQUES

A. Le travail préparatoire de l’enseignant : un travail de sélection

J’ai pu constater dès les premières séances que l’attention de mes élèves

diminuait très rapidement, que leur intérêt pour le cours était faible et enfin que leur

participation était loin d’être dynamique. Cette démotivation évidente s’expliquait en

réalité par la mauvaise gestion de ma première séquence ainsi que celle de mes

séances.

En effet, je pense avoir commis de nombreuses erreurs dans mes choix didactiques.

La première erreur est d’avoir commencé par une séquence que je n’avais pas

construite moi-même. Avec beaucoup de gentillesse, mes collègues de français qui

travaillent très souvent ensemble et qui suivent la même progression annuelle, ont

voulu pour me faciliter la tâche me donner toute la première séquence. Je me suis

donc retrouvée avec une séquence ainsi que des lectures analytiques déjà toutes

prêtes. Conséquence, je ne maîtrisais toujours pas la construction d’une séquence,

la logique de celle qui m’était proposée n’était pas la mienne et ne me satisfaisait

pas, les textes étudiés ne me plaisaient pas tous, et enfin j’avais du mal à

m’approprier ces lectures analytiques faites par d’autres. En définitif, je ne respectais

pas moi-même ce temps de décantation ou d’évocation que j’ai expliqué dans la

partie précédente.

La seconde erreur est d’avoir étiré ma séquence sur une période beaucoup trop

longue puisqu’elle a duré six semaines. De même mes séances de lectures

analytiques s’éternisaient et en moyenne s’effectuaient en deux - trois heures. J’ai

fait preuve sans nul doute d’une mauvaise gestion du temps ce qui a engendré une

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atmosphère parfois pesante pendant le cours, un désintérêt pour les activités

monotones que je proposais.

1. choisir un projet pédagogique dans la séquence

Dans les séquences suivantes, j’ai essayé de réorganiser mon travail afin de

leur donner une dynamique plus attractive. Pour cela, un travail de réflexion s’est

imposé sur les objectifs que je fixais pour chacune de mes séquences. Beaucoup

trop ambitieuse dans mes débuts, j’ai dû par la suite sélectionner judicieusement les

objectifs de connaissances et de compétences que je voulais faire atteindre à mes

élèves. De plus, mes séquences ne devaient pas servir de prétexte à l’étude et à

l’apprentissage de notions grammaticales ou littéraires. Je devais donc dégager un

véritable projet pédagogique qui me permettrait de conduire ma séquence avec

logique et dynamisme. Il me fallait pour cela commencer par apporter une vraie

problématique à mes séquences.

La première séquence consacrée à l’objet d’étude « Lire, écrire, publier » avait pour

problématique : Qu’est ce qu’un livre ? Comment est-il « fabriqué » ? Que peut-il

nous apporter ? On remarque tout de suite que ce questionnement est beaucoup

trop vaste et finalement, n’a pas vraiment de projet. En effet, j’abordais dans cette

séquence trop de points divers et variés comme la relation entre un auteur et son

éditeur, la relation entre narrateur et lecteur, l’acte d’écriture et celui de lecture en ce

qui concerne les connaissances, et enfin la méthodologie pour répondre à une

question de type BAC pour les compétences. Cet éparpillement n’a pas du tout été

productif, et les élèves n’ont rien retenu des textes étudiés en lecture analytique.

J’ai essayé de faire un effort de problématisation dans ma deuxième séquence qui

portait sur l’étude d’un mouvement littéraire, le réalisme. Cette séquence avait pour

problématique : Comment le réalisme, mouvement littéraire inscrit dans la

provocation, a-t-il inventé puis dépassé un modèle théorique ? Les élèves ont alors

retenu que ce mouvement littéraire avait été considéré à l’époque comme

provocateur. De plus, ils ont compris la différence entre réalité objective et réalité

subjective ou « spéciale » comme l’écrit Maupassant dans la Préface de Pierre et

Jean. J’ai donc réussi à obtenir de la part de mes élèves ce que je souhaitais : les

élèves se sont impliqués davantage dans la séquence, et ont mieux compris l’intérêt

des divers documents étudiés. Je devrais ajouter que cette réussite est peut-être

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due aussi à une meilleure gestion du temps. La séquence en elle-même n’a duré que

deux semaines et demie, et les séances s’étendaient sur une heure seulement.

L’ennui manifeste des premiers cours semblait alors s’être dissipé et le rythme de la

séquence paraissait plus adapté à leurs attentes et à leur capacité d’écoute, de

concentration et d’attention. Par ailleurs, une certaine motivation est apparue chez

certains ce qui était fort encourageant et pour moi, et pour les autres élèves encore

réticents.

2. choisir des objectifs précis dans la séance

De même, une sélection s’impose au sein même de chaque séance afin

d’éviter de tomber dans le travers de l’exhaustivité ennuyeuse, erreur que j’ai

commise. Influencée par la formation universitaire, je me perdais dans des

digressions qui non seulement n’interpellaient pas l’esprit des élèves, mais qui aussi

ne permettaient pas de construire du sens. Ainsi, comme il nous l’a été répété

plusieurs fois lors de la formation à l’IUFM : il faut choisir, sélectionner les éléments

porteurs de sens afin d’éviter de perdre les élèves dans des digressions inutiles.

Si mes premières lectures analytiques s’éternisaient, c’était à cause de ce défaut

hérité de notre passage à l’Université. Je n’arrivais pas à sélectionner l’essentiel, tout

me semblait intéressant et je dirais même que cela me faisait mal au cœur de devoir

faire des choix. Je me souviens de la première fois où mon maître de stage est venu

assister à une de mes séances ; je faisais la lecture analytique d’un extrait de

L’Enfant de Jules Vallès. Ce jour-là, je m’étais égarée dans des explications sur la

valeur du présent ce qui m’avait entraînée vers la situation d’énonciation. J’en avais

complètement oublié le fil conducteur de la lecture analytique, et par la même

occasion j’avais perdu la majorité de mes élèves qui alors avaient décroché. De plus,

elle me reprochait d’écrire trop d’informations au tableau, l’essentiel en était alors

moins visible. J’ai pu réellement progresser sur ce point lors du stage de pratique

accompagnée au collège. Ma tutrice du collège m’a proposé de construire une

séquence entière sur la Bible et de la conduire du début jusqu’à la fin avec la classe

de sixième qu’elle me confiait. Cette expérience a été très enrichissante. Le fait de

passer d’une classe de seconde à une classe de sixième est très intéressant : nous

sommes contraints à ce moment-là de produire un travail de sélection. Pour ma part,

j’ai appris à cibler l’essentiel dans les textes que l’on a étudié et ainsi à gérer le

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temps d’une séance. Je me fixais un objectif précis pour chaque séance, puis ne

retenais que les éléments qui permettaient d’orienter mon étude vers cet objectif

précis. Ainsi, pour montrer que le mythe biblique se fonde sur une part de réalité, j’ai

choisi d’étudier le passage de la Mer Rouge issu de la Bible en le confrontant au récit

fait par Christian Jacq dans Ramsès. L’étude a été menée selon un tableau (voir

annexe 1) que l’on a rempli au fur et à mesure de la séance. J’ai dû choisir les

éléments pertinents qui me permettaient de dégager les ressemblances et les

différences entre ces deux textes. Il m’a fallu faire un travail très sélectif puisque

j’étudiais deux textes en parallèle, et m’en tenir à mon objectif final. Les élèves ont

manifestement bien suivi et surtout compris la leçon que l’on a écrite en conclusion.

3. choisir des activités en fonction du moment de la journée

Nous avons vu comment le taux de vigilance fluctuait au fil de la journée ; il

me semblait alors nécessaire de proposer aux élèves des activités en fonction de

cette donnée. Ainsi, j’ai décidé dans un premier temps de consacrer le vendredi à

des activités plus ludiques. En effet, je récupère mes élèves de seconde 4 tous les

vendredi en dernière heure, de 16 heures à 17 heures. Ils ont alors accumulé entre

six heures et sept heures de cours dans la journée, et environ trente heures dans la

semaine. Incapables de tenir en place, ils sont fatigués, excités et pressés d’être en

week-end. Ils éprouvent beaucoup de mal à se concentrer et ont tendance à

s’éparpiller. Je prévois donc généralement pour cette séance des activités qui

changent du cours ordinaire afin de mieux solliciter leur attention. Par exemple, j’ai

mis en place dans la première séquence sur « Lire, écrire, publier », une séance

d’atelier d’écriture où nous nous sommes prêtés aux jeux des surréalistes. C’était

l’occasion d’aborder le mouvement littéraire surréaliste que j’aimerais étudier de

façon plus approfondie à la fin de l’année, mais c’était aussi une manière de leur

montrer que l’écriture pouvait être un jeu, et procurer un certain plaisir. Ils ont

beaucoup apprécié les cadavres exquis, jeu qui m’a permis par ailleurs de revoir la

nature et la fonction grammaticale des mots. Ils ont réalisé aussi quelques

calligrammes ainsi que des acrostiches ce qui me permettait d’aborder ici la poéticité.

Cette séance leur a tellement plu qu’ils se souviennent de tous les jeux que je leur ai

proposés et ont retenu le mot « calligramme » et sa définition. En outre, pour le

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cours du mardi de 10 heures à 11 heures, je profite de leur capacité à être attentif et

calme pour aborder des points parfois délicats. Je réserve cette tranche horaire soit à

des cours de méthodologie, soit à des lectures analytiques. Beaucoup plus réceptifs,

il m’est plus facile de leur faire acquérir à ce moment-là de la journée des

connaissances et des compétences. J’ai par exemple réalisé un mardi une séance

de méthodologie pour apprendre à construire un paragraphe argumentatif dans le

cadre de l’étude de l’argumentation. La séance commençait par un exercice de

repérage : il s’agissait de trouver pour chaque argument, à propos d’un sujet sur les

romans de science fiction, le développement qui lui convenait. Puis je leur ai

demandé de trouver un exemple précis pour illustrer chaque argument que l’on a

alors analysé ensemble. Cette séance d’une heure a été très productive puisqu’à la

fin les élèves avaient compris et rédigé un paragraphe argumentatif comportant

toutes les étapes attendues.

B. La posture du professeur : une attitude déterminante

Le professeur joue un rôle très important dans la relation pédagogique avec

l’élève. Son attitude peut influencer considérablement les élèves dans leur

apprentissage. En effet, l’enseignant doit agir sur lui-même et son attitude afin de ne

pas nuire à la motivation de l’élève.

Au cours de l’année scolaire, mon maître de stage m’a montré l’importance

qu’avaient mon attitude physique, ma voix, ma prise en compte des élèves et mes

déplacements dans la gestion du groupe de classe. Le module « Animation et

dynamisation de la classe » de la formation transversale personnalisée, assuré par

M. Christian Daujeard m’a permis de comprendre tous ces signes non verbaux

utilisés dans la communication.

1. la tonicité

Pour solliciter l’énergie des élèves, le professeur doit faire preuve de tonicité,

autrement dit adopter une attitude dynamique. En effet, placé sur le devant de la

scène, le professeur est exposé aux yeux de tous ses élèves qui ne laissent rien

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échapper. Une attitude laxiste chez le professeur entraînera un relâchement évident

chez les élèves. On peut parler ici de l’effet pygmalion. L’attitude que montre le

professeur à l’égard de ses élèves ainsi que le regard qu’il porte sur eux, influencent

leur comportement et leur capacité. J’ai remarqué que les jours où je ressens une

certaine fatigue et où l’agacement prend vite le dessus, mes élèves manifestent

beaucoup d’énervement. Par contre, les jours où je me rends au lycée avec plaisir,

où je suis plus disposée à faire cours, l’attitude de mes élèves est toute autre : ils

montrent de l’intérêt pour le cours et restent attentifs beaucoup plus longtemps.

2. la voix

La voix doit être claire, d’un volume modeste et le débit de paroles modéré. Il

n’est pas évident de trouver le bon rythme de paroles afin de garder l’attention des

élèves éveillée pendant la séance. J’ai tendance malheureusement à parler très vite

ce qui peut agacer et fatiguer mes élèves comme me l’a déjà fait remarquer ma

conseillère pédagogique. J’essaye alors de me freiner, mais cette mauvaise habitude

revient trop souvent et le débit de paroles s’accélère irrémédiablement. Pour

m’améliorer, je m’oblige à me poser de temps en temps. En effet, les silences

permettent le retour au calme après un moment de discussion et instaurent une

ambiance de travail qui facilite la réflexion de l’élève et sa concentration lors d’un

travail écrit.

Malgré tout, j’ai encore tendance à trop parler, angoissée par les « blancs », par la

crainte de ne pas terminer à temps, de ne pas atteindre l’objectif de ma séance.

3. le regard

Il est nécessaire de jouer avec les différents regards possibles. Je me

souviens de ce premier cours de rentrée à l’IUFM : notre formatrice a commencé par

une explication sur les divers regards que l’on peut lancer à nos élèves. Ainsi, un

regard qui balaye toute la classe permet de rappeler à l’ordre les élèves, un regard

insistant indique un mécontentement, un clignement des yeux peut encourager, etc.

Il existe autant de regards que de sentiments. Toutes les émotions peuvent passer

par un simple coup d’œil. Les écrivains l’ont bien compris lorsqu’ils décrivent dans la

scène de rencontre amoureuse, le bouleversement provoqué par un simple regard.

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Par ailleurs, un regard permet d’instaurer une pause, un temps faible en suspend

très utile pour vérifier si l’information est comprise par l’élève.

4. la gestion des interventions

La crainte de ne pas atteindre l’objectif de ma séance m’a souvent poussée à

ignorer sans m’en rendre compte, certaines interventions d’élèves qui étaient

pertinentes mais qui risquaient de m’éloigner de mon objectif ou du moins du chemin

que j’avais mentalement tracé pour y arriver. C’est grâce aux observations de ma

conseillère pédagogique que j’ai pu prendre conscience de ce problème. Au lieu de

rebondir sur les réponses de mes élèves, je rejetais systématiquement toute réponse

fausse ou sans lien avec la question posée. Je créais ainsi des élèves frustrés

comme nous l’a expliqué C. Daujeard lors du module « animation et dynamisation de

la classe ». De plus, je ne rendais pas les élèves acteurs de leur activité, mon

questionnement était une illusion : je savais où je voulais les mener, et en aucun cas

je ne les laissais libre de choisir le chemin pour y arriver.

À cela s’ajoute mon impatience, défaut qu’il me faut absolument contrôler. Le silence

me met mal à l’aise, et l’impression qu’aucun élève n’arrive à répondre à mes

questions me déstabilise et me trouble. Je laisse trop peu de temps de réflexion à

l’élève que j’interroge, j’interviens trop vite pour l’aider à formuler sa réponse.

J’ai compris à présent qu’il faut laisser du temps aux élèves et que leur imposer mon

rythme ne leur est d’aucune aide. Bien au contraire, en les secondant de cette sorte,

je les installe dans une situation confortable où le professeur apporte quoiqu’il arrive

les réponses.

C. « joindre l’utile à l’agréable » en variant les activités

Il m’est apparu rapidement que « joindre l’utile à l’agréable » était une

nécessité pour une meilleure assimilation des notions. Il me fallait faire preuve d’un

esprit de créativité et penser à des activités un peu plus ludiques pour intéresser les

élèves.

1. le travail en groupe

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Cette situation pédagogique a été la première que j’ai tentée pour tester les

capacités intellectuelles et comportementales de mes élèves.

J’ai tout d’abord commencé par des petits travaux en binôme. Les élèves travaillent

simplement avec leur voisin de table. J’ai essayé d’instaurer ce moment là dans

presque toutes mes séances, en particulier lors des lectures analytiques où je leur

demande d’essayer de dégager deux axes de lecture, ou encore de trouver les

arguments dans un texte argumentatif et de les expliquer. C’est devenu pour les

élèves un mode de travail tout à fait normal et ils ont vite pris l’habitude de travailler

ainsi. Un élève cependant préfère travailler seul, et à mon grand étonnement, il s’agit

d’un élève en difficulté, conscient de ses problèmes et qui ne souhaite pas se

reposer sur son voisin, qui lui est plutôt doué en français. Cette façon de travailler

semble toutefois leur convenir et elle est un moyen stimulant pour les intéresser. En

entrecoupant mes séances par des petits travaux en binôme, je crée un rythme

particulier qui rompt avec la monotonie d’un cours. Après ces dix minutes maximum

de réflexion à deux, nous faisons la synthèse de ce que les élèves ont trouvé, et

c’est un autre temps qui s’installe, un temps de relâchement où les élèves sont moins

actifs. Cette variation de rythmes entraîne un tempo varié qui évite toute lassitude

chez les élèves.

J’ai par la suite essayé une nouvelle expérience en élargissant les groupes. Ainsi,

dans le cadre de l’étude de l’argumentation, j’ai décidé d’organiser un débat. Dans

cette quatrième séquence, j’étudiais le sujet délicat de la peine de mort. J’ai proposé

pour les débats trois sujets d’actualité pour qu’ils aient à disposition des arguments

et des exemples : le premier était sur la peine de mort, le second sur la prison, et le

dernier sur la délinquance. Voici la formulation exacte des sujets :

- premier sujet : la peine capitale : un abus de pouvoir

- deuxième sujet : la prison est un lieu de rédemption et de transformation :

l’homme en ressort meilleur

- troisième sujet : sévir ou éduquer : quelle médiation aux problèmes de

délinquance ?

J’ai séparé la classe en six groupes de cinq ou six élèves. Chaque groupe devait soit

illustrer soit réfuter un des trois sujets proposés. Cela ne fonctionnait pas avec le

dernier sujet sur la délinquance, et c’est pourquoi un groupe devait étudier la

question de l’éducation, alors que l’autre s’intéressait à la répression comme

solution. Les sujets ont été donnés à l’avance pour que les élèves effectuent des

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recherches personnelles à la maison durant le week-end. Le lundi, je suis arrivée en

avance pour organiser ma salle : j’ai regroupé les tables de manière à ce que

j’obtienne six blocs de tables dans la salle. Sur chacun de ces blocs j’ai placé un petit

cavalier qui portait une lettre pour indiquer le groupe d’appartenance des élèves. En

effet, sur la porte d’entrée de ma salle, la liste des groupes A, B, C, D, E, F était

affichée afin que les élèves ne perdent pas de temps pour se regrouper. Chaque

groupe disposait d’une feuille sur laquelle était inscrit le sujet et qu’il fallait compléter.

Un élève désigné par ses camarades devait écrire sur cette feuille à rendre à la fin

de l’heure, les trois arguments suivis des exemples que le groupe avait retenus (voir

annexe 2). Enfin, chaque élève devait choisir le rôle qu’il allait jouer dans le débat

parmi ceux que je proposais : avocat, détenu, victime, psychologue, professeur, etc.

Le but de cette première séance était de les faire réfléchir. La mise en place a été

très rapide grâce à l’organisation dont j’ai fait preuve et très vite les élèves se sont

mis au travail. Cependant, la difficulté des sujets leur faisait obstacle, et ils avaient

beaucoup de mal à trouver des arguments intéressants et pertinents. J’ai dû alors me

déplacer régulièrement de groupe en groupe afin d’aider chacun dans sa réflexion en

apportant quelques connaissances qui leur manquaient. J’ai par cette occasion pu

observer combien ils s’investissaient et finalement s’interrogeaient sur de

nombreuses questions sociales.

Le lendemain, nous avons commencé les débats. Pour les mettre à l’aise, j’ai joué le

rôle de la présentatrice d’une émission télévisée « tout le monde en débat », et avec

humour j’ai essayé d’introduire les débats. Certes, cela les a amusés, mais en tout

cas, beaucoup se sont sentis décomplexés, et la plupart se sont prêtés au jeu.

Certains se sont même révélés être d’excellents avocats ! Cette expérience a été

très intéressante malgré quelques erreurs de ma part et mon manque d’expérience

dans la gestion du groupe. J’aurais dû leur fournir plus de connaissances avant

d’entreprendre des débats sur de tels sujets. Par ailleurs, j’ai sous-estimé le temps

nécessaire à ce genre d’exercice puisqu’il a duré deux fois plus de temps que je

l’avais prévu. Enfin, il est très difficile de gérer toute une classe pendant des débats.

Il fallait que je fasse circuler la parole tout en surveillant les autres qui écoutaient et

prenaient des notes, je devais penser à l’évaluation de la prestation de ceux qui

passaient tout en jouant le rôle de la présentatrice : très vite j’ai été dépassée par les

événements et par conséquent j’ai éprouvé des difficultés à obtenir le calme dans les

derniers débats. Les élèves s’agitaient, ne s’écoutaient plus, intervenaient à tout

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moment et interrompaient leurs camarades. Les débats s’essoufflaient, et l’attention

des élèves s’envolait. Le point positif de cette expérience est que j’ai réussi à faire

réfléchir les élèves. Or mon objectif premier dans cette séquence sur la peine de

mort était de les amener petit à petit à une réflexion de plus en plus approfondie.

2. l’insertion dans une séance de la lecture de l’image

L’image est un outil qui peut aider à la compréhension, à la mémorisation, à

l’inspiration et surtout à la motivation. Elle peut être utilisée à divers moments de la

séance.

Placée à l’ouverture d’une séquence, elle sert d’accroche. Pour introduire le

mouvement réaliste j’ai choisi d’étudier des tableaux lors de ma première séance. Le

premier était Le Déjeuner sur l’herbe de Manet, le second Olympia toujours du même

peintre en comparaison avec La Vénus d’Urbino du Titien, et enfin Un enterrement à

Ornans de Courbet, premier tableau déclaré réaliste. J’ai voulu montrer à mes élèves

que le mouvement réaliste est un mouvement culturel qui se voulait à l’époque

provocateur. L’étude de ces tableaux, accompagnée de quelques anecdotes que je

leur ai racontées au sujet de l’interprétation que les gens de l’époque faisaient sur les

œuvres de Manet a particulièrement plu aux élèves. Cela leur a permis de mieux

comprendre les textes que l’on a ensuite étudiés dans la séquence. En effet, la

lecture analytique qui suivait cette introduction était celle de la Préface de Germinie

Lacerteux des frères Goncourt. Les élèves ont alors compris pourquoi les frères

Goncourt prenaient autant de précaution avec le public dans cette Préface qui

ressemble à un manifeste.

Placée au milieu de la séance, l’image est un moyen d’explication permettant

une meilleure compréhension du texte. Lors de mon stage de pratique

accompagnée, j’ai été amenée à faire l’étude d’un extrait du Chevalier à la charrette

de Chrétien de Troyes pour une classe de cinquième. Il s’agissait du passage où

Lancelot combat contre Méléagant devant Guenièvre la dame qu’il aime. Pour leur

faire comprendre pourquoi Lancelot perd le combat au début, puis finit par prendre le

dessus, je leur ai demandé d’imaginer la scène sous forme de croquis. En quelques

minutes j’ai dessiné au tableau sous leurs recommandations un schéma qui

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expliquait le combat. Les élèves ont pris plaisir à dessiner eux aussi ce croquis, et

surtout ont compris la raison de la victoire de Lancelot. Ce temps de dessin a permis

non seulement de gagner du temps pour la compréhension du texte, mais aussi a

instauré un moment d’activité ludique qui a rendu les élèves acteurs. Pour ma classe

de seconde, dans le cadre de la séquence sur l’étude de la tragédie et de la

comédie, j’ai distribué une carte de la Grèce antique afin de situer les lieux où se

déroule l'action. Une meilleure représentation rend l’étude des textes beaucoup plus

concrète.

Enfin, placée en clôture d’une séance, l’image est une aide mémoire. Toujours dans

mon stage de pratique accompagnée, j’ai terminé la séance sur l’étude du passage

de la Mer Rouge en montrant aux élèves le même passage dans le film « les dix

commandements » réalisé par Cécil B. De Mille. Ces images très spectaculaires les

ont impressionnés et je pense alors que cet épisode biblique restera ancré dans leur

mémoire. Dans cette même séquence, pour expliquer le symbole aux sixièmes, j’ai

apporté deux affiches publicitaires, celle du parfum Eden de Cacharel qui reprend le

mythe du paradis terrestre et le symbole du fruit défendu, et celle de la nouvelle

Megane de Renault qui utilise le serpent comme symbole du danger. Les élèves ont

fait immédiatement le lien avec les épisodes de la Genèse que l’on venait d’étudier.

De plus, ils ont compris que l’héritage judéo-chrétien est omniprésent dans notre

culture quotidienne et qu’il est nécessaire de connaître quelques grandes références

bibliques pour déchiffrer des messages quotidiens diffusés par les médias.

3. l’alternance d’activités orales et d’activités écrites

J’essaye pour chaque séance de créer un rythme qui ne soit pas trop

monotone. Afin de rendre mes séances dynamiques, j’alterne les activités. Ainsi, un

cours dialogué ne s’étend pas sur toute une séance ; je propose à mes élèves des

activités en binôme ou des activités orales ou écrites.

Pour la séquence sur l’étude de la narration, nous avons étudié en œuvre intégrale

Germinal de Zola. Avant chaque lecture analytique, je demandais à des élèves de

venir exposer au reste de la classe les recherches qu’ils avaient faites sur un sujet

bien particulier qui nous permettrait d’éclairer le texte que l’on allait étudier. Pour

l’étude du passage descriptif du Voreux, quelques élèves sont venus auparavant

nous expliquer le fonctionnement de la mine. Cette manière de procéder rompt avec

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le cours traditionnel. J’ai remarqué aussi que les élèves respectaient la parole de leur

camarade et écoutaient assidûment les exposés.

Lorsqu’on a étudié l’argumentation, j’ai essayé de prévoir pour chacune de mes

séances un moment d’exercice écrit que je plaçais dans le dernier quart d’heure afin

de maintenir leur concentration éveillée. Je leur demandais de reformuler des

arguments, de trouver des exemples et de les expliquer, de développer un

argument : tous ces exercices devaient servir à l’assimilation d’une compétence,

celle de savoir écrire un paragraphe argumentatif. Si au début les élèves

manifestaient une certaine réticence, ils se sont investis progressivement. Mon

objectif était de les faire écrire car j’avais remarqué au début de l’année que

beaucoup d’entre eux éprouvaient des difficultés dans l’expression écrite. Grâce à

ces petits exercices d’écriture argumentative, j’ai constaté des progrès chez la

plupart de mes élèves. Néanmoins, cela demande alors beaucoup de rigueur et de

persévérance de la part du professeur, pour que les élèves ne se relâchent pas et

ne perdent pas tous les acquis. Il faut renouveler la tâche régulièrement pour laisser

le temps aux élèves d’assimiler ces savoirs-faire.

C. Comment rendre l’élève acteur de l’activité : la notion d’effort

En ne variant jamais les activités, en ne proposant que du cours dialogué ou

du cours magistral, le professeur ne rend pas l’élève acteur de l’activité, et surtout

crée une monotonie qui peut s’avérer ennuyeuse. Certes une telle pédagogie doit

être rassurante pour certains élèves, mais il n’empêche qu’elle reste très peu

efficace. L’élève ne fournit que très peu d’efforts et se repose sur l’épaule rassurante

et confortable du professeur.

C’est un peu ce qui m’est arrivé : mes élèves ont compris dès le début que je faisais

beaucoup pour eux, que je leur apportais toujours les réponses, que je leur mâchais

tout le travail. J’étais trop présente, et peut-être même étouffante, puisque je ne les

laissais pas s’exprimer. Cette pédagogie de l’inhibition n’est pas du tout productive et

il me fallait absolument changer de méthode.

J’ai décidé alors de non seulement varier les activités comme je l’ai expliqué

précédemment, mais surtout de me faire plus discrète afin de faire davantage

participer mes élèves et de les rendre pleinement acteurs des activités. Pour cela, il

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fallait leur faire comprendre la notion d’effort, étape essentielle pour se mettre au

travail.

Selon Bergson, l’effort intellectuel n’est ressenti qu’à travers l’inquiétude qu’il

nécessite, et qu’il faut assumer. Cela peut expliquer certainement le manque de

volonté des élèves pour fournir un effort. Il faut alors en tant que professeur les

accompagner dans l’effort et se montrer rassurant ce qui implique que l’on doit

pratiquer une pédagogie de la réussite : croire en eux et à leur réussite, telle est

notre devise.

J’ai expliqué à mes élèves que je n’étais pas là pour faire le travail à leur place, mais

que mon rôle était de les aider dans leur effort et que sans cet effort, il n’y aurait

aucun progrès. Pour cela, je n’hésite pas à les seconder lors des petits exercices

d’écriture que je donne en classe. Je leur propose aussi de me rendre les brouillons

des devoirs à la maison que je corrige avec eux en aide individualisée ou même en

dehors des cours. Dernièrement, plus de la moitié de la classe m’ont rendu leur

brouillon afin que je leur donne des conseils. Cette méthode les motive à travailler

parce qu’ils ont effectivement compris que c’était un moyen de progresser et de

récolter de meilleures notes. Dans l’ensemble je peux dire qu’aujourd’hui ils se sont

mis à travailler. Je suis particulièrement fière d’une de mes élèves qui au début de

l’année ne rédigeait aucun devoir, les rendait en retard, ne faisait que le strict

minimum, et qui à présent se met au travail et fait l’effort de rédiger.

Evidemment, cette méthode demande un surcroît de travail de la part de

l’enseignant, mais je crois que nous servons de modèle à nos élèves : ils sont alors

d’autant plus reconnaissants lorsqu’ils voient que leur professeur s’investit.

IV. ÉVALUATION DE L’ENTREPRISE

A. Critères de résultats

Les différents dispositifs pédagogiques que j’ai mis en place afin de créer un

rythme adapté à mes élèves et afin de les rendre acteurs de leurs apprentissages ont

fournis des résultats plus ou moins convaincants.

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1. les résultats satisfaisants

En ce qui concerne les petits groupes de travail en binôme, je suis assez

contente de ce dispositif qui apparemment stimule mes élèves. Ils se mettent au

travail sans réticence et assez rapidement, confrontent leurs idées, réfléchissent

davantage. Ces petits moments de dix minutes sont très productifs et me permettent

de varier le rythme de la séance afin de conserver l’attention de mes élèves.

Pour ce qui est des exercices d’expression écrite, les élèves commencent à

s’investir de plus en plus, et essayent de progresser. Au début de l’année, ils

prenaient ces exercices comme une punition, et avaient tendance alors à les faire

sans grand soin. À présent leur attitude a changé, plus volontaires, ils s’appliquent et

s’impliquent davantage.

Enfin, en variant les supports, et en diversifiant les activités, j’ai constaté

qu’effectivement j’arrivais mieux à capter l’attention de mes élèves. Les élèves sont

plus sensibles à l’image, c’est pourquoi je joins très souvent aux textes que l’on

étudie, une illustration que je commente rapidement avec eux. Cela introduit une

pause très brève dans la séance et relance l’activité sur un autre moment qui

demande plus de concentration.

En conclusion, ces moments de réflexion à deux, d’exercices écrits ou encore

d’étude de l’image en classe entière me permettent d’alterner temps faibles et temps

forts, et ainsi de garder une attention soutenue tout au long de ma séance. J’ai par

ailleurs remarqué qu’il faut que ces temps de travail ne dépassent pas dix minutes.

Au delà, l’attention et la concentration retombent, et les élèves se dispersent. Il est

aussi important d’avertir les élèves du temps qu’il leur est accordé pour fournir leur

effort. Ce travail qui se fait en temps limité est alors plus productif. Le travail dans

l’urgence a parfois ses avantages !

2. les résultats décevants.

En revanche, j’ai été particulièrement déçue par ma tentative des débats. Je

n’ai malheureusement pas obtenu des résultats satisfaisants : les productions des

élèves n’étaient pas à la hauteur de mes attentes. Ils ont manqué d’autonomie,

éprouvé de grandes difficultés à s’entendre sur le choix des arguments, à trouver des

exemples pertinents. Quant à mon rôle, je pense avoir sous-estimé ma tâche, et je

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crois qu’il faut beaucoup de maîtrise pour pouvoir mener des débats. De plus, la

séance s’est éternisée, et les élèves se sont vite lassés de ce type d’activité.

J’ai aussi été mécontente des exposés réalisés par mes élèves. Peu d’entre

eux se sont vraiment donnés de la peine pour rendre un travail complet et personnel.

La plupart d’entre eux se sont contentés de photocopier des documents, ou m’ont

sorti des articles trouvés sur Internet. De plus, lors de leur passage à l’oral, très peu

ont pu se détacher de leurs notes et ont su répondre aux questions que je leur ai

posées.

Par conséquent, ce temps d’exposés qui devait introduire de manière attractive la

séance, est devenu un moment de détente et d’amusement pour les élèves.

B. Remédiations possibles

De toute évidence, mon manque d’expérience dans la gestion du groupe,

explique certains de mes échecs. Très vite j’ai été submergée par les difficultés lors

des débats. Il me paraît sage d’attendre d’être plus sûre de moi dans la gestion de la

classe avant de recommencer cet exercice. En effet, cette situation demande un

encadrement très strict. De plus, il me faudra être plus précise dans mes consignes

et dans mes objectifs. Plus de rigueur s’impose afin d’obtenir un résultat satisfaisant.

Pour le travail des exposés, il aurait fallu que je suive de près mes élèves

dans leurs démarches. La prochaine fois que je mettrai en œuvre ce type d’activité,

je vérifierai au préalable les recherches effectuées par les élèves, je fixerai des

objectifs précis de compétences et de connaissances. Je pensais que les élèves

étaient habitués à ces travaux et je comptais sur leur expérience. Cette erreur m’a

fait prendre conscience qu’un bon encadrement motive les élèves, et les pousse à

l’effort.

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CONCLUSION

Le temps institutionnel impose aux élèves un rythme qui va à l’encontre de

leur rythme biologique. Le professeur récolte alors malheureusement les retombées

que peut provoquer un tel décalage. Nous devons faire cours à des élèves qui sont

souvent épuisés en début d’après-midi et excités en fin de journée. Face à ce

problème, j’essaye tant bien que mal de m’adapter à toutes situations en instaurant

des moments dits faibles comme ces travaux en binôme pour mieux rebondir sur des

moments forts où les élèves doivent fournir un réel effort intellectuel. En variant les

démarches au sein même de la séance, je m’adapte mieux au rythme des élèves. Je

pense avoir réussi à « ritualiser » certains exercices ce qui crée alors dans la séance

un rythme soutenu mais modéré auquel les élèves se sont accoutumés. J’ai constaté

alors de grands progrès chez la plupart d’entre eux et davantage d’implication dans

le travail.

Cependant, il reste certains points que je dois améliorer pour rendre les

élèves acteurs de leur apprentissage tout en les maintenant dans un rythme tout à

fait raisonnable.

Tout d’abord je crois qu’il faut que je cible mieux les objectifs que je veux faire

atteindre à mes élèves. Je dois alors être plus précise dans la décomposition des

apprentissages afin que mes élèves comprennent clairement ce que j’attends d’eux.

De même, je manque de rigueur dans mes consignes ce qui entraîne une certaine

incompréhension chez les élèves.

Par ailleurs, je dois prêter plus d’attention aux interventions de mes élèves, et les

laisser s’exprimer avec leurs propres mots. J’ai tendance à leur apporter les mots

qu’ils ne trouvent pas, et donc à formuler les réponses à leur place. De même, il faut

que j’apprenne à rebondir sur les erreurs que peuvent commettre les élèves.

J’éprouve beaucoup de difficultés à cerner la raison pour laquelle l’élève s’est

trompé, et très souvent je ne fais pas cas de la réponse de l’élève en question.

Je dois aussi faire un effort pour parler moins vite, et surtout pour me mettre un peu

en retrait. En les secondant comme je le fais, je les conforte dans une situation qui

ne les rend pas du tout autonomes.

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Enfin, je dois accepter de perdre parfois du temps pour en gagner après. Je

transmets trop souvent mon stress à mes élèves qui alors ne supportent plus d’être

pressés par le temps. Je dois alors me focaliser davantage sur mes élèves et non sur

les objectifs que je me suis fixés. En étant plus attentive à leur rythme, je crois que je

pourrais créer une atmosphère - bien qu’elle soit déjà agréable - beaucoup plus

détendue.

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QUELQUES CITATIONS A MÉDITER…

« On ne peut oublier le temps qu’en s’en servant »

Mon cœur mis à nu, Charles BAUDELAIRE

« Le temps est invention, ou il n’est rien du tout » L’Evolution créatrice, Henri BERGSON, Éd. P.U .F

« Ce n’est point le temps qui manque, c’est nous qui lui manquons » Partage de midi, Paul CLAUDEL, Éd. Gallimard

« L’être humain n’a jamais le temps d’être, il n’a jamais le temps que de devenir » Mesure de l’instant, Fénélon, Georges POULET, Éd. Plon

« Il est possible qu’à ceux qui emploient bien leur temps, la science et l’expérience croissent avec la vie ».

Essais, Livre 1er, Michel de MONTAIGNE

« Le temps est assez long pour quiconque en profite ; Qui travaille et qui pense en étend la limite. »

Discours en vers sur l’homme, VOLTAIRE

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ANNEXES

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ANNEXE 1

Etude comparée d’un même épisode (le passage de la mer Rouge) en classe de sixième.

Texte 1

Miracle de la mer rouge Yahvé dit à Moïse : "Pourquoi ces cris lève ta verge, étends ta main sur la mer, de la mer à sec." […] Moïse étendit sa main sur la mer. Et Yaavec impétuosité toute la nuit; il mit la meentrèrent au milieu de la mer à sec, et lesà leur gauche. Les Égyptiens les poursuises cavaliers, entrèrent après eux au mcolonne de feu et de nuée, regarda le caÉgyptiens. Il ôta les roues de leurs charsalors : Fuyons devant Israël, car Yahvé cYahvé dit à Moïse : "Étends ta main sur lleurs chars et sur leurs cavaliers." Moïsereprit son impétuosité, et les Égyptiens sÉgyptiens au milieu de la mer. Les eautoute l'armée de Pharaon, qui étaient enéchappa pas un seul.

? Parle aux enfants d'Israël, et qu'ils marchent. Toi, et fends-la; et les enfants d'Israël entreront au milieu

hvé refoula la mer par un vent d'orient, qui souffla r à sec, et les eaux se fendirent. Les enfants d'Israël eaux formaient comme une muraille à leur droite et

virent; et tous les chevaux de Pharaon, ses chars et ilieu de la mer. A la veille du matin, Yahvé, de la mp des Égyptiens, et mit en désordre le camp des

et en rendit la marche difficile. Les Égyptiens dirent ombat pour lui contre les Égyptiens. a mer; et les eaux reviendront sur les Égyptiens, sur étendit sa main sur la mer. Et vers le matin, la mer 'enfuirent à son approche; mais Yahvé précipita les x revinrent, et couvrirent les chars, les cavaliers et trés dans la mer après les enfants d'Israël; et il n'en

L'Exode, chapitre 14, versets 5-16, 21-28

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Texte 2

La mer des roseaux Moïse décida de faire halte non loin de la frontière, près du lac Sarbonis et de la méditerranée; l'endroit était considéré comme dangereux, car le vent du désert déposait d'énormes quantités de sable sur des surfaces d'eau incertaines et créait de fausses terres qui formaient "la mer des roseaux". Personne ne vivait en ces lieux désolés, abandonnés aux bourrasques et aux colères de la mer et du ciel; même les pêcheurs les évitaient, de peur d'être la proie des sables mouvants. […] Les chars de Serramanna, accompagnés d'un "fils royal" qui représentait Ramsès, avaient progressé à vive allure à la poursuite des Hébreux. Lorsqu'il respira l'air de la mer, les narines de l'ancien pirate se dilatèrent. Il fit signe à ses hommes de s'arrêter. - Parmi vous, qui connaît ces lieux ? Un charrier expérimenté prit la parole. - L'endroit est hanté. Je ne vous conseille pas de déranger les démons. […] Non sans appréhension, les chars repartirent à travers les terres humides. Aaron se réveilla en sursaut; Moïse était déjà debout, bâton en main. - Ce bruit sourd… - Oui, c'est celui des chars égyptiens. - Ils foncent sur nous! - Nous avons le temps de nous échapper. Les Hébreux, affolés, acceptèrent de suivre Moïse et s'aventurèrent dans la mer des roseaux. Avec la nuit tombante, plus personne ne distinguait l'eau de la bande de sable, mais Moïse avançait d'un pas sûr entre la mer et le lac, guidé par le feu qui lui brûlait l'âme depuis l'adolescence, ce feu devenu désir d'une Terre promise. En se déployant, les chars égyptiens commirent une erreur fatale. Les un s'enfoncèrent dans les sables mouvants, les autres se perdirent dans des marais parcourus d'invisibles courants; le char du fils royal s'immobilisa dans une terre poisseuse, tandis que celui de Serramanna heurta de plein fouet les deux Bédouins qui s'étaient dissociés des Hébreux. Le vent d'est se leva, se joignant à celui du désert; ainsi fut asséché le passage qu'empruntèrent les Hébreux pour traverser la mer des roseaux. Indifférent à la mort des deux espions, écrasés par les roues de son char, Serramanna s'ensabla à son tour; le temps de dégager les véhicules et de rassembler ses hommes, dont certains étaient blessés, le vent avait changé. Chargées d'humidité, des bourrasques déclenchèrent de fortes vagues qui noyèrent le passage. La rage au cœur, Serramanna regarda Moïse s'enfuir.

Ramsès, "La dame d'Abou Simbel", chapitre 56, Christian Jacq

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Étude des textes

La Bible

Ramsès de C. Jacq

Le lieu Mer Rouge

le récit se situe au Sud Est de l’Egypte « non loin de la frontière, près du lac Sarbonis et de la méditerranée » « mer des roseaux »

le récit se situe au Nord Est de l’Egypte Le temps

« toute la nuit » « A la veille du matin » « au point du jour »

« la nuit tombante »

Les personnages

Opposants Héros Adjuvant Egyptiens Moïse DieuL’ armée du Pharaon Israélites

Opposants Héros Adjuvant Egyptiens Moïse Serramanna Hébreux « fils royal » Aaron charrier

Situation

À dessiner

À dessiner

Comment apparaît Dieu ?

« L’Ange de Dieu », « la colonne de Nuée »

« un feu qui lui brûlait l’âme »

Actions Comment s’y prend Moïse pour ouvrir et refermer la mer ? Qu’arrive-t-il à l’armée des Egyptiens ?

Il lève son bâton Il tend la main Il fend la mer « Yahvé refoula la mer par un vent fort d’est ; il la mit à sec et toutes les eaux se fendirent »

Aidé de Dieu, Moïse a des pouvoirs extraordinaires Dieu « jeta la confusion dans le camp des Egyptiens. Il enraya les roues de leurs chars qui n’avançaient plus qu’à grande peine » « Yahvé culbuta les Egyptiens au milieu de la mer »

C’est Dieu qui est à l’origine de la déroute des Egyptiens

« Le vent d’est se leva, se joignant à celui du désert ; ainsi fut asséché le passage qu’empruntèrent les Hébreux pour traverser la mer des roseaux »

le vent seul est à l’origine de l’assèchement de la mer « les chars des égyptiens commirent une erreur fatale. Les uns s’enfoncèrent dans les sables mouvants, les autres se perdirent dans des marais parcourus d’invisibles courants ; le char royal s’immobilisa dans une terre poisseuse » « des bourrasques déclenchèrent de fortes vagues qui noyèrent le passage »

Ce sont les conditions climatiques qui provoquent la confusion chez les Egyptiens.

Conclusion

Le texte biblique et celui de C. Jacq racontent la même histoire : celle de la traversée d’une mer par les Hébreux guidés par Moïse et pourchassés par les Egyptiens. Cependant, on relève des différences :

- le texte de la Bible relate des faits extraordinaires qui sont l’Œuvre de Dieu. - le texte de C. Jacq donne une explication plus réaliste à l’événement en apportant des

précisions scientifiques, géographiques.

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ANNEXE 2

Des débats sur des sujets d’actualité en classe de seconde : fiches que les élèves ont remplies en groupes.

Sujet 1 : « la prison est un lieu de rédemption et de transformation : l’homme en ressort meilleur. »

Illustration de la thèse

1er argument Pendant la peine, le prisonnier a le temps de réfléchir aux actes qu’il a commis (prise de

conscience). Ce temps d’isolement lui laisse le temps de réfléchir à son comportement. À sa sortie

de prison, il ne commettra plus les mêmes erreurs.

exemple ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

2ème argument En prison, le détenu est suivi par des psychologues, ce qui lui permet de mettre de l’ordre dans ses

idées, et ainsi de mieux se raisonner. Ce suivi psychologique peut l’aider à s’en sortir.

exemple ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

3ème argument Le détenu peut toujours demander à suivre des cours. Il a la possibilité d’apprendre un métier et de

reprendre des études pour se donner une nouvelle chance.

exemple ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

groupe A Océane, Marie, Constance, Daisy, Amélie, Edouard.

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Sujet 1 : « la prison est un lieu de rédemption et de transformation : l’homme en ressort meilleur. »

Réfutation de la thèse

1er argument Un prisonnier peut être influencé au cours de sa détention par d’autres individus incarcérés. En

effet, ses idées peuvent évoluer dans le mauvais sens à causes des mauvaises fréquentations.

exemple Si l’on fait cohabite un simple voleur avec un tueur en série dans une même cellule, le tueur peut

inciter le voleur a l’imiter, c’est-à-dire à commettre des actes atroces.

2ème argument En prison, certains détenus subissent des harcèlements, des agressions de tout genre qui finissent

par les détruire psychologiquement.

exemple Un dealer qui se fait régulièrement frapper, humilier en prison par d’autres détenus, en ressort

traumatisé. Il ne pourra plu faire confiance à personne et vivra constamment dans la peur.

3ème argument Dans leur cellule, les prisonniers sont coupé du monde extérieur, ce qui rend leur réinsertion

difficile, voire impossible.

exemple Dans la vie de tous les jours, on a toujours peur des personnes dont on sait qu’elle ont déjà

commis un crime ou un délit, et qu’elles pourraient recommencer. Une certaine

discrimination se fait sentir.

groupe B Philippe, Geoffrey, Etienne, Marjorie, Charlotte

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Sujet 2 : « sévir ou éduquer : comment remédier aux problèmes de délinquance ? »

SEVIR 1er argument Il faut sévir pour donner l’exemple. L’exemple permet de dissuader les individus, d’éviter qu’ils

deviennent eux-aussi des délinquants.

exemple arrestation dans les banlieues des jeunes qui ont brûlé les voitures ou des jeunes qui piratent de la

musique et des films sur Interne.

peine exemplaire d’une femme qui a téléchargé sur Internet.

2ème argument Il faut sévir pour donner des limites aux jeunes. L’éducation passe par la sanction. La société a

besoin de règes pour éviter l’anarchie. Vivre en société demande à tous de respecter des règles

afin que la cohabitation se fasse dans l’harmonie.

exemple problème des banlieues.

3ème argument

…………………………………………………………………………………………………………

…………………………………………………………………………………………………………

…………………………………………………………………………………………………………

…………………………………………………………………………………………………………

exemple ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

Groupe C Pierrick, Yoann, Valentin, Perrine, Marilyn

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Sujet 2 : « sévir ou éduquer : comment remédier aux problèmes de délinquance ? »

EDUQUER 1er argument L’école permet aux jeunes d’apprendre des savoirs, d’autres choses en dehors de leur vie. Cela

leur permet de sortir de chez eux et de s’évader du quotidien. La culture évite l’ignorance. L’école

inculque des valeurs indispensables

exemple ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

2ème argument Les études permettent une meilleure intégration dans la société. Avec un diplôme, un jeune

trouvera plus facilement du travail que celui qui n’en a pas.

exemple Les sociologues ont démontré que l’éducation permet une meilleure insertion dans la société et

facilite ainsi la prévention des conduites délinquantes.

3ème argument Il faut plus se focaliser sur une éducation dès le plus jeune âge plutôt que d’essayer de sévir, ce n’est pas la solution. Il faut privilégier l’éducation aux punitions.

exemple Crise des banlieues : pas besoin de sévir. Si les jeunes avaient été aidés, soutenus et éduqué, dès le plus jeune âge, alors on n’aurait pas eu affaire à ce genre de problème.

groupe D Loïs, Fanny, Sylvain, Pauline, Florian

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Sujet 3 : « La peine capitale : un abus de pouvoir »

Illustration de la thèse 1er argument Dénoncer les pratiques frauduleuses d’organismes connus peut dans certains cas être cause de

condamnations à la peine de mort. Abus de pouvoir

exemple Un journaliste de Reporter sans Frontières a été victime en 2004 d’une vengeance d’une action de

lutte contre la drogue parce qu’il avait dénoncé la corruption d’un organisme financé par le

gouvernement américain.

2ème argument On ne donne aucune chance a une personne de se racheter si on la tue. Une personne ayant

commis un meurtre, peut avoir appris beaucoup de choses en prison, et si on la tue, il n’aura pas

eu la chance de se racheter.

exemple En décembre, Stanley Williams a été exécuté. Le gouverneur de Californie n’a pas voulu lui donner

une seconde chance malgré toutes les actions humanitaires qu’il a faites.

3ème argument Examiner la peine de mort sous l’angle économique est un abus de pouvoir. Tuer une personne

sans en référer la cause revient moins cher que de le nourrir et loger en prison jusqu’à la fin de ses

jours.

exemple On préfère tuer quelqu’un que de le garder en vie jusqu’à sa mort car condamner à perpétuité est coûte trop cher.

groupe E Matthieu, Paul-Jean, Angélique, Paul-Armand, Clément, Emeline

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Sujet 3 : « La peine capitale : un abus de pouvoir »

Réfutation de la thèse 1er argument La vengeance, la loi du talion. L’exécution des meurtriers procure aux familles et aux amis de la

victime la satisfaction de ne pas voir l’assassin de leur proche continuer à vivre.

exemple Une personne a vu ses parents se faire tuer devant ses yeux. Elle veut se venger, voir le meurtrier

souffrir, mourir.

2ème argument Eradiquer « le mal ». La peine capitale garantit que des criminels dangereux ne seront pas remis

en liberté au bout d’un certain temps. La peine capitale est un moyen économique de se

débarrasser de criminels dangereux, dont le maintien en détention serait coûteux.

exemple Dans certains pays, les peines de prison à vie de le sont pas et les condamnés peuvent être libérés

sur parole après un certain nombre d’années.

3ème argument Montrer l’exemple. Celui-la permet de dissuader de futurs criminels à violer, tuer, etc. On espère

alors obtenir une baisse de la criminalité.

exemple ……………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………………

groupe F Annabelle, Elodie Raphaël, Lucile, Hugo, Charles

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BBIIBBLLIIOOGGRRAAPPHHIIEE

OUVRAGES LUS

Servan-Schreiber, J-L (1983) L’art du temps, Paris, Fayard.

Chevalier, B. (1997) Méthodes pour apprendre à l'école et au collège, Nathan pédagogie.

Rieunier, A. (2001) Préparer un cours, tome 2 "les stratégies pédagogiques efficaces", ESF.

Blanchard-Laville C. Une séance de cours ordinaire, l'Harmattan.

Meirieu Ph. (2005) Lettre à un jeune professeur, ESF.

Accompagnement des programmes en français, classe seconde première, CNDP, 2001

AARRTTIICCLLEESS LLUUSS

Articles extraits des cahiers pédagogiques que l'on trouve à l'adresse Internet suivante : www.cahiers-pedagogiques.com - Masson Olivier (5 mai 2004) Donner du jeu. - Dargent Géraldine et Olivier (5 mai 2004) Trouver la bonne organisation. - Forestier Yann (10 avril 2000) Enseigner et apprendre au lycée à l'heure de la massification. - Legrand Nicole (5 mai 2004) Passer à l'apprentissage actif.

Dossier de presse : expertise collective de l'Inserm, (février 2001) Rythmes de l'enfant; de l'horloge biologique aux rythmes scolaires, Éd. Inserm.

OUVRAGES CONSULTÉS

Perrenoud Ph. (2004) Métier d’élève et sens du travail scolaire, ESF.

Rochex Y. et Bautier E. (1998) L'expérience scolaire des nouveaux lycéens. Démocratisation ou massification ?, Paris, Armant Colin.

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TTEEMMPPSS FFOORRTTSS EETT TTEEMMPPSS FFAAIIBBLLEESS :: CCOOMMMMEENNTT RRÉÉAALLIISSEERR UUNNEE SSÉÉAANNCCEE DDYYNNAAMMIIQQUUEE EENN FFRRAANNÇÇAAIISS DDAANNSS UUNNEE CCLLAASSSSEE DDEE SSEECCOONNDDEE ??

RESUME :

Le temps, paramètre essentiel dans notre société, permet de réguler notre

quotidien. Cependant, il existe autant d’individus que de rythmes différents :

comment alors trouver le bon tempo ?

Cette question peut être transposée dans le cadre de l’enseignement du français. Il

est essentiel de s’interroger sur la structure d’une séance, sur sa dynamique, son

tempo. L’enseignant prendra donc le rôle du chef d’orchestre pour donner la mesure

et essayera de mettre en place des moments dits faibles et d’autres dits forts, afin de

maintenir éveillée l’attention de ses élèves.

MOTS-CLES : ACTIVITÉS – ATTENTION – ÉLÈVE-ACTEUR – RYTHME BIOLOGIQUE ET RYTHME SCOLAIRE –

TEMPS.

Lycée La Prat’s , Cluny Classe de seconde

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