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IRM dans le syndrome de
Guillain-Barré: à propos de trois
cas pédiatriques.
J. MAMUENE (1), T. BUI (2), M. ELMALEH (2), S.DORGERET(2), G. SEBAG (2), S. PASSEMARD (3).
(1) CHG Lamentin, Service de Radiologie, B.P.429-97292 Lamentin
Cedex 2 Martinique (France).
(2) CHU Robert DEBRE, Département d’Imagerie Pédiatrique, 48
Bd Sérurier 75935 Cedex 19 (Paris).
(3) CHU Robert DEBRE, Service de Pédiatrie, unité Neurologie
Pédiatrique.
INTRODUCTION
Le syndrome de Guillain-Barré (SGB) est une polyradiculonévrite aiguë caractérisée par une démyélinisation segmentaire du système nerveux périphérique.
Le mécanisme est probablement d’origine immunologique*.
Il survient généralement au décours d’une virose (gastro-entérite notamment à Campylobacter jejuni, infection àcytomegalovirus, hépatites, …), d’une vaccination, d’un traumatisme, d’un acte chirurgical.
Incidence :1/ 100 000 habitants; pas de prédominance saisonnière particulière.
Deux pics d’âge: l’adulte jeune et le sujet âgé.
Prédominance masculine.
* Fenichel GM. Clinical Pediatric Neurology. A Signs and Symptomis Approach. Second Edition 1993. Philadelphia. W.B. Sauders; 190-191
**Guillain-Barré syndrome. Sereviratne U, Postgrad Med J 2000 ;76 :774-782
La présentation classique du SGB est celle d’une paralysie
progressive, ascendante et symétrique des extrémités, avec
hypo-réflexie ou aréflexie ostéo-tendineuse.
Il existe des formes atypiques suivant les formes cliniques et
l’ancienneté des troubles: paresthésie, crampes, fatigabilité à
la marche, dysarthrie, paralysie faciale, ophtalmoplégie.
Chez l’enfant, la symptomatologie est plus frustre et se traduit
par une hypotonie sévère, une détresse respiratoire, des
vomissements, des céphalées et des douleurs aux membres.
L’examen neurologique met en évidence une fatigabilité et une
aréflexie, associées souvent à des signes d’irritation
méningés. Une encéphalopathie est souvent mise en cause à
tort.
L’analyse du LCR met en évidence une dissociation
albumino-cytologique.
L’électromyographie permet de différentier le SGB avec
d’autres syndromes aigus chez l’enfant notamment la
poliomyélite, le botulisme, la myasthénie familiale, la
polymyosite*.
En général le SGB chez les enfants diffère peu de celui des
adultes. Pour les enfants la récupération est plus complète
et plus rapide.
* Jones HR Jr. Guillain-Barré syndrome in children. Curr Opin Pediatr. 1995 Dec; 7(6): 663-8. Review
L’imagerie intervient surtout dans les formes atypiques afin d’éliminer les diagnostics différentiels de paralysie aiguë.
La prise de contraste des racines nerveuses autour du cône médullaire et de la queue de cheval en IRM est bien connue dans le SGB de l’adulte* et également dans le SGB pédiatrique**.
* Asbury AK, Cornblath DR. Assessment of current diagnostic criteria for Guillain-Barré syndrome. Ann Neurol 1990; 27 ( suppl): S 21-S 24.
* Georgy BA , Chong B, Chamberlain M, Hesselink JR, Cheung G. MR of spine in Guillain-Barré syndrome.
AJR Am J Neuroradiol.1994 Feb; 15 (2) : 300-1.
* Gorson Kc, Ropper AH, Muriello MA, Blair R. Prospec- tive evaluation of MRI lumbosacral nerve root enhancement
in acute Guillain-Barré syndrome.
Neurology. 1996 Sept; 47 (3): 813-7.
* Byun WM, Park BH et al. Guillain-Barré syndrome: MR imaging findings of the spine in eight patients.
Radiology. 1998 Jul; 208 (1): 137-47.
** Iwata F, Utsumi Y. MR imaging in Guillain-Barré syndrome. Pediatr Radiol. 1997 Jan; 27(1): 36-8.
** Wilmshurt JM et al. Lower limb and back pain in Guillain-Barré syndrome and associed contrast enhancement in MRI of the cauda equina.
Acta Paediatr. 2001 Jun; 90 (6): 691-4.
** Tam JK, Bradley WG Jr, Goergen SK et al. Patterns of contrast enhancement in pediatric spine at MR imaging
with single-and triple-dose gadolinium. Radiolgy. 1996 Jan; 198(1): 273-8.
** Coskun A et al. Chilhood Guillain-Barré syndrome. MRI imaging in diagnosis and follow-up. Acta Radiol. 2003
Mar; 44 (2): 230-5.
Nous présentons trois cas pédiatriques de SGB
consécutifs survenus dans une période de
quatre mois, présentant une imagerie IRM
très évocatrice de SGB et ayant permis une
prise en charge précoce.
Premier cas clinique
Garçon de 16 mois consulte pour boiterie gauche persistante
depuis 3 jours.
Il n’y pas d’antécédents personnels particuliers ni familiaux
connus.
Le calendrier vaccinal est bien suivi.
Un rhume banal était apparu deux semaines avant le début de
la maladie.
Le bilan d’imagerie initial à la recherche d’une ostéomyélite
ou d’un rhume de hanche (radiographies du bassin et du
membre inférieur gauche) est normal.
Un traitement symptomatique à domicile est instauré.
Le patient reconsulte pour apparition progressive d’une hypotonie des deux membres inférieurs avec incapacitéde se mettre en position assise et refus de marcher, puis d’une hypotonie des membres supérieurs.
L’examen clinique révèle un déficit moteur des membres inférieurs avec hyporéflexie ostéo-tendineuse. Absence de fièvre ou de signe méningé.
La CRP est normale.
Le scanner cérébral et l’IRM cérébrale sont normaux.
L’IRM médullaire, à la recherche d’une compression médullaire, montre une prise de contraste avec un aspect épaissi des racines nerveuses de la queue de cheval et des racines antérieures autour du cône terminal. Le diagnostic de SGB est évoqué.
Le bilan complémentaire a montré:
- une hyperprotéinorachie modérée ( 0,53g/l ) isolée sans hypercellularité (dissociation albumino-cytologique).
- des amplitudes axonales motrices des membres inférieurs diminuées et des membres supérieurs à la limite de la normale à l’électromyographie.
Le diagnostic de SGB est retenu.
Le bilan infectieux exhautif négatif.
Traitement et évolution:
- prise en charge en unité de neurologie pédiatrique.
- perfusion intra-veineuse d’immunoglobulines; kinésithérapie.
- après 3 semaines d’hospitalisation, le nourrisson a récupéréla position assise.
- après 5 semaines, la récupération motrice est quasi-complète.
Deuxième cas clinique
Fillette de 31 mois adressée au service de radiologie pour impotence fonctionnelle des membres inférieurs et incapacité de se mettre assise et difficulté à tendre le bras.
Douleurs à la mobilisation globale.
Il n’ y a pas d’antécédent personnel particulier.
L’examen clinique montre un déficit moteur distal et proximal des membres inférieurs et supérieurs avec aréflexie ostéo-tendineuse, ainsi qu’un rachis douloureux àla mobilisation.
La CRP est normale et le bilan infectieux exhaustif est négatif. L’analyse du LCR montre une hyperprotéinorachiemodérée à 0,36g/l avec dissociation protéino-cellulaire.
Le diagnostic de SGB est évoqué.
Sag T1 Sag T2 Sag T1 GADO Ax T1 GADO
D12
L’IRM médullaire montre le
même type de réhaussement
radiculaire de la queue de
cheval que chez le premier
patient, avec également une
localisation radiculaire
antérieure.
L’EMG montre une atteinte axonale motrice hétérogène aux membres supérieurs et inférieurs, sans anomalie sensitive.
Le diagnostic de SGB est confirmé.
Traitement par immunoglobines en perfusion permettant initialement une récupération partielle aux membres supérieurs et une stabilisation du déficit des membres inférieurs. Rétraction des pieds en équin bilatéral traité par le port d’attèle avec séances de kinésithérapie.
Bonne évolution clinique.
Troisième cas clinique
Garçon, âgé de 10 ans, reçu aux urgences pédiatriques pour persistance et aggravation d’une boiterie depuis 4 jours.
Notion d’un épisode de diarrhée fébrile, après des vacances passées en Tunisie.
Asthmatique connu, allergique aux acariens. Microcéphalie avec retard psycho-moteur avec suivi en neuro-pédiatrie.
Clinique:
• Rachis raide et douloureux avec déficit moteur bilatéral et symétrique des membres supérieurs et inférieurs. Mollets douloureux à la palpation
• Réflexes rotuliens et achiléens faibles puis abolis.
• Dysurie.
Biochimie:
• LCR montre une hyper-protéinorachie à 1,46 g/l avec dissociation protéino-cellulaire.
• CRP normale.
• Sérologie campylobacter jejuni avec taux d’anticorps totaux fortement positif.
EMG:
• Perte axonale sévère motrice pure aux MI avec signe de souffrance neurogène de la fibre musculaire.
Une polyradiculonévrite type SGB de forme axonale est évoquée.
Le diagnostic de SGB est classiquement établit à partir des éléments cliniques (faiblesse musculaire aiguë, progressive et symétrique avec aréflexie ostéo-tendineuse), biochimiques ( classique dissociation albumino-cytologique) et électromyographiques ( ralentissement des vitesses de conduction nerveuse et augmentation des latences distales).
La présentation clinique du SGB peut être atypique (formes variantes): syndrome de Miller Fisher (ophtalmoplégie, ataxie, aréflexie), forme sensitive pure, forme dysautonomique pure, forme pharyngo-brachio-cervicale, dysfonctionnement sphinctérien prédominant…).
DISCUSSION: clinique du SGB
Devant cette paralysie flasque d’installation rapide, il faudra éliminer:
- une atteinte médullaire (myélite transverse aiguë, compression médullaire),
- une maladie de Lyme,
- une myosite ou dermatomyosite,
- une poliomyélite,
- autres (diphtérie, paralysie dyskaliémique, porphyrie aiguë, neuropathie toxique, botulisme).
DISCUSSION: diagnostics différentiels du SGB
L’IRM médullaire sera généralement réalisée afin d’éliminer
une compression médullaire, une tumeur médullaire, une
myélite transverse.
Elle peut mettre en évidence une prise de PDC des racines
nerveuses autour du cône terminal et de la queue de
cheval.
On évoquera alors un SGB.
DISCUSSION: SGB et IRM I
La sensibilité est de 95% dans la forme typique de SGB et de
83% dans les formes variantes*.
Elle est de 91% dans la série pédiatrique de 11 enfants de
Coskun et al**.
* Gorson Kc, Ropper AH, Muriello MA, Blair R. Prospec- tive evaluation of MRI lumbosacral nerve root enhancement
in acute Guillain-Barré syndrome.
** Coskun A et al. Chilhood Guillain-Barré syndrome. MRI imaging in diagnosis and follow-up. Acta Radiol. 2003
Mar; 44 (2): 230-5.
Normalement, les racines nerveuses intra-téchales
normales ne se rehaussent pas après injection de
chélate de gadolinium du fait de l’existence d’une barrière hémato-radiculaire ( BHR), équivalent de la barrière hémato-encéphalique au niveau des racines nerveuses.
La prise de contraste des racines nerveuses dans le SGB reflète donc la rupture de cette BHR, pouvant correspondre à des phénomènes inflammatoires autour de la gaine de myéline (infiltration lymphocytaire et macrophagique), une démyélinisation-remyélinisation segmentaire, voire une atteinte axonale de type dégénérescence wallérienne*.
DISCUSSION: SGB et IRM II
* Berciano et al. Axonal form of Guillain-Barré syndrome:Evidence for macrophage associed demyelination.
Muscle Nerve 1993; 16: 744-51
Ce rehaussement radiculaire n’est pas spécifique de SGB et peut se rencontrer dans des pathologies radiculaires inflammatoires endommageant la BHR:
- carcinose méningée (1), sarcoïdose (2), lymphome lepto-méningé (3),
- polyradiculopathie à cytomegalovirus liée au sida (4),
- maladie de Lyme (5) et encéphalite à tique (6),
- arachnoïdite (7), maladie de Krabbe (8), polyradiculonévrite subaiguë chronique (9)
DISCUSSION: SGB et IRM III
(1) MR of cranial and spinal meningeal carcinomatosis : a comparaison with CT and myelography, Krol G, SZE G, AJR 1988 ;12 :494-500
(2) Sarcoidosis of the cauda equina : a report of three cases, Zajicek J, J Neurol 1990 ;237 :424-426
(3) MR imaging with Gd-DTPA in leptomeningeal spread of lymphoma. J Comp Axial Tomogr 1988 ;12 :494-500
(4) Magnetic resonance imaging of AIDS-related polyradiculopathy, Talpos D, Tien R, Hesselink J, Neurology 1991 ;41 :1996-1997
(5) Cranial nerve involvement with Lyme borreliosis demonstrated by magnetic resonance imaging, Neurology 1991 ;42 :671-673
(6) Gadolinium enhancement of cauda equina: a new MR imaging finding in the radiculitic form of tick-borne encephalitis, AJNR 2006;27:995-97
(7) Benign lumbar arachnoiditis : MR imaging with gadopentetate dimeglumine, AJNR 1990 ;11 :763-770
(8) MRI Nerve Root Enhancement in Krabbe Disease, Vasconcellos E, Smith M, Pediatr Neurol 1998 ;19 :151-152
(9) Magnetic Resonance Imaging of the Cauda Equina in Chronic Inflammatory Demyelinating Polyneuropathy, Crino PB et al,
Ann Neurol 1993 ;33 :311-313
DISCUSSION: particularités générales du
réhaussement après injection de Gadolinium
1- Dans l’étude de Coskun et al, le rehaussement après
injection de gadolinium concernait aussi bien les racines
antérieures et postérieures, mais avec une prédominance
sur les racines antérieures dans 30 % des cas.
2- Buyn et al ont montré que dans les formes motrices pures
de SGB, le rehaussement intéresse spécifiquement les
racines antérieures, rendant alors l’aspect très spécifique.
NB1: Seulement deux cas de rehaussement des racines spinales antérieures
mimant un SGB ont été rapportés: un cas de neuropathie à la vincristine chez
un enfant traité depuis deux ans pour leucémie aiguë lymphoblastique et un
cas de neurobrucellose.
NB2: Cette forme motrice pure ne représente qu’un faible pourcentage du SGB,
entre 3 % et 16 % des cas chez l’adulte.
DISCUSSION: particularités pédiatriques
Dans nos trois observations pédiatriques, nous retrouvons également un réhaussement spécifique des racines antérieures autour du cône terminal et des racines de la queue de cheval. Leur EMG montrent des anomalies motrices sans anomalies sensitives.
Nos trois observations semblent indiquer que la forme motrice pure du SGB serait plus fréquente chez l’enfant.
Cependant, nous ne connaissons pas la fréquence de la forme motrice pure du SGB chez l’enfant. De plus, l’examen neurologique sensitif objectif chez les tout-petits enfants est difficile.
Il a été montré que le degré de réhaussement en IRM était
corrélé avec la sévérité du déficit musculaire et à la durée
de la convalescence. L’atténuation de l’intensité de la prise
de contraste est corrélée avec la récupération clinique.
DISCUSSION: IRM et éléments pronostiques?
L’IRM médullaire avec injection de chélate de gadolinium peut s’avérer utile dans le diagnostic de SGB notamment dans les formes cliniques difficiles, en montrant une prise de prise de contraste des racines de la queue de cheval et autour du cône terminal, et en éliminant les diagnostics différentiels de paralysie aiguë.
L’IRM devient encore plus sensible en cas de rehaussement des racines antérieures.
Enfin l’IRM pourrait fournir un élément de pronostic du SGB, en relation avec l’importance de rehaussement.
CONCLUSION