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INTRODUCTION GÉNÉRALE
La plupart des pays qui ont gravi les échelons du développement ont eu
recours, à diverses étapes de leur croissance, aux capitaux étrangers. Plusieurs
raisons peuvent servir à justifier le recours par un pays aux emprunts extérieurs.
Ces emprunts permettent au pays débiteur de combler les écarts entre l’épargne
intérieure et l’investissement, de réduire les contraintes imposées à la croissance
par des réserves de devises insuffisantes, d’influer sur le profil temporel de la
consommation et de financer les déficits provisoires de la balance des paiements
(Williammson et Milner, 1991).
Ainsi, les Etats-Unis ont fait largement appel à l’épargne pendant la
guerre de sécession, de 1835 à 1860. De la même manière, la Russie a eu besoin
de fonds extérieurs pour assurer son développement dans les trois décennies qui
ont précédé la première Guerre mondiale et la révolution communiste. En
revanche, le Japon, qui a pourtant fait activement obstacle aux soutiens
financiers et aux investissements extérieurs tout au long de son histoire, ne s’en
est pas moins transformé en une nation moderne. Les financements étrangers
peuvent favoriser le développement, mais n’en constituent pas un facteur
essentiel. La majorité des pays en développement continuent à voir, dans les
financements extérieurs, un élément important de leur politique d’essor
économique. Mais l’aide, les implantations étrangères et la dette qui a résulté de
l’emprunt extérieur donnent lieu à controverses.
De plus, les récentes crises économiques et financières qui ont également
secoué les pays en développement ont amplifié les controverses relatives à la
contribution de la dette extérieure au développement. Au Bénin, depuis
l’indépendance jusqu’aux années 1970, la politique d’endettement extérieure a
été très prudente et modérée.
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Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 2
Cependant, l’accumulation des arriérés tant intérieurs qu’extérieurs, le recul du
Produit Intérieur Brut (PIB), le déficit chronique des finances publiques dans les
années 1980, ont contraint les pouvoirs publics à souscrire au premier
Programme d’Ajustement Structurel (PAS) le 16/06/1989.
L’observation de la dette publique par rapport au PIB pose la question des
limites dans lesquelles un tel processus peut se poursuivre.
La présente étude se donne pour tâche d’analyser la viabilité de la dette
extérieure au regard des critères du (nouveau) Cadre de Viabilité de la Dette
(CVD) puis d’évaluer l’impact de l’endettement extérieur sur la croissance
économique du Bénin.
Le travail sera présenté en trois chapitres :
- Le premier permettra de définir le cadre méthodologique et théorique ;
- Le deuxième sera essentiellement consacré à l’analyse de la viabilité de la
dette extérieure du Bénin à partir des critères du CVD.
- Le troisième et dernier chapitre conduira à l’élaboration d’un modèle
économétrique d’évaluation de l’impact de la dette extérieure sur la
croissance économique avant d’aboutir aux recommandations de
politiques économiques qui en découleront.
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Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 3
CHAPITRE I CADRE THÉORIQUE ET MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
SECTION 1 : PROBLÉMATIQUE, INTÉRET, OBJECTIFS ET
HYPOTHÈSES DE L’ÉTUDE
PARAGRAPHE 1 : PROBLÉMATIQUE ET INTÉRET
1- Problématique de la recherche
Depuis la crise de la dette en 1982, le financement du développement est
devenu l’un des problèmes les plus préoccupants de l’économie mondiale.
Il ne peut y avoir de développement sans financement, tout le monde en
convient.
Ainsi, les nations du tiers monde, dans l’espoir d’un développement
économique, ont eu massivement recours à l’aide extérieure.
Cette situation d’endettement intensif est accompagnée d’une dépendance
continuelle dans laquelle elles ne cessent de s’enliser.
La dette extérieure d’un pays représente autant sa dette publique que sa
dette privée.
Toutefois, il est important de souligner que dans un pays en voie de
développement comme le Bénin, la plus grande part de l’endettement extérieur
représente soit les prêts directs aux gouvernements ou aux entreprises publiques,
soit des prêts au secteur privé mais avec garantie publique.
Au Bénin, le retournement des conjonctures économiques au début des
années 1980, dû à l’aggravation du déficit de la balance des paiements et
l’accélération de la croissance de la dette, a entraîné une situation critique au
niveau de la capacité réelle de l’économie à faire face à la demande du
financement extérieur ainsi qu’au niveau de la soutenabilité de ses dettes.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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L’encours de la dette totale rapporté au PIB, de 79,15% en 1990 est passé
à 82,64% en 1994 pour retomber à 19,2% en 2007.On remarquera avec
l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés (IPPTE) que ce ratio se situe
en dessous de 50% depuis 2002.Quant au service de la dette rapporté aux
exportations, il a connu sensiblement la même évolution que l’encours passant
de 31 ,19% en 1990 à 22,55% en 1994, puis 4,5% en 2007.Ces données
indiquent que les capacités d’investissements de l’Etat sont réduites et cette
situation accroît sa dépendance à l’égard des financements extérieurs.
La soutenabilité de la dette désigne alors, l’aptitude du pays à satisfaire
entièrement à ses obligations extérieures actuelles et futures sans devoir recourir
au rééchelonnement ou à l’accumulation d’arriérés.
Comme la vulnérabilité d’un pays augmente en fonction de sa dette
extérieure, on juge prudent de chercher à limiter le fardeau de cette dette. La
méthode typiquement utilisée pour le calcul de la viabilité de la dette consiste à
choisir un horizon temporel sur lequel on peut projeter les variables
macroéconomiques du pays débiteur. Ces projections, couplées aux estimations
de la valeur future des variables exogènes, servent ensuite à établir les comptes
de la balance des paiements du pays.
Pour que la dette extérieure puisse être jugée viable, les scénarii doivent
satisfaire à deux conditions : premièrement, pendant la période de projection,
l’équilibre de la balance des paiements doit être atteint sans l’aide de
financements exceptionnels ; deuxièmement, le niveau d’endettement en fin de
période doit être assez faible pour rendre peu probable tout problème éventuel
de service de la dette. Ainsi, ni les taux d’intérêt ni les taux de croissance de la
dette extérieure ne devraient dépasser d’une manière persistante le taux de
croissance des exportations ou du revenu.
L’incapacité des nations en développement à honorer le service de la dette
associée à l’accumulation de l’endettement ont conduit les Institutions
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Financières Internationales (IFI) en 1996 à adopter un dispositif global de
réduction de la dette des Pays Pauvres très Endettés (PPTE).
Cette initiative prévoit des seuils pour les ratios d’endettement afin de
juger de la soutenabilité ou non de la dette du pays concerné. Une première
évaluation, datant de juillet 1997 déclarait la dette extérieure béninoise
soutenable. Cette appréciation exclut du coup le Bénin du champ des pays
devant bénéficier de l’IPPTE.
Cependant, de pertinentes critiques relatives à la méthodologie
d’évaluation de la soutenabilité de la dette ont conduit à des actions correctives.
Ce réexamen par la nouvelle méthode, sur la période 1996-1998 a conduit
à déclarer la dette béninoise insoutenable.
Cette analyse de la viabilité de la dette s’est limitée au calcul des ratios
d’endettement sur une période de deux ou trois années et à en établir des
projections à court et moyen terme à partir de scénarii sur l’évolution de la
conjoncture, pour déterminer si la dette est soutenable. La situation ainsi
dégagée par l’analyse faite ci-dessus est-elle simplement due à une mauvaise
situation conjoncturelle? Quel a été l’impact réel de la dette sur l’activité
économique ? Ce sont là quelques interrogations non encore élucidées. De ce
fait, le problème du statut réel de la dette extérieure prise dans sa globalité
depuis son origine reste posé. Quel est alors le véritable rôle joué par
l’endettement extérieur au Bénin ? Telle est la question fondamentale à laquelle
le présent mémoire se propose de répondre. Il s’agira d’étudier la viabilité de la
dette extérieure du Bénin dans un contexte post-IPPTE, en n’occultant pas le
caractère essentiellement public de la dette.
2- Intérêt de l’Etude
Comme étude dans le présent mémoire, nous nous intéressons au véritable
caractère de la dette et son impact sur l’économie béninoise. Les raisons qui
motivent un tel choix comme thème de mémoire sont entre autres :
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• l’imprécision observée autour de la viabilité ou non de la dette extérieure du
Bénin ;
• le besoin d’évaluer la viabilité de la dette plus largement que dans le
contexte de l’IPPTE, de manière à conseiller tous les pays à faible revenu ,
le Bénin en particulier, sur de nouveaux emprunts assurant ainsi la viabilité
de la dette à long terme : c’est la nouvelle approche des Institutions de
Breton Woods (IBW) à travers le Cadre de Viabilité de la Dette (CVD) qui
privilégie les projections futures au lieu de l’approche historique de
l’IPPTE.
PARAGRAPHE 2 : OBJECTIFS ET HYPOTHÈSES
A- Objectifs
Le présent travail s’est assigné pour objectif principal de faire une analyse
de la dette extérieure du Bénin et d’étudier son impact sur la croissance
économique.
De manière spécifique, il s’agira :
OS1 : de déterminer le niveau à partir duquel le service de la dette extérieure
influe négativement sur les performances économiques ;
OS2 : d’étudier la relation entre dette extérieure et croissance économique
B- Hypothèses
Pour atteindre ces objectifs, nous avons formulé les hypothèses suivantes :
H1 : Le service de la dette constitue un frein à la croissance économique du
Bénin ;
H2 : Il existe une relation non linéaire entre dette et croissance économique au
Bénin.
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SECTION 2 : REVUE DE LA LITTERATURE
Avant d’aborder les fondements théoriques et empiriques, il nous est
apparu nécessaire par souci de concision et de précision de clarifier certains
concepts relatifs à l’étude.
Paragraphe 1 : Clarification des concepts
La dette peut être définie comme un transfert non définitif de ressources au
profit de l’agent ayant un besoin de financement. On distingue la dette intérieure
de la dette extérieure, et la dette publique de la dette privée.
La dette intérieure met en rapport des agents résidant sur le territoire d’un
même Etat ; elle est libellée en monnaie nationale et ne subit pas le risque de
change.
Selon la Banque Mondiale, le FMI, l’OCDE : « la dette extérieure
brute est égale au montant à une date donnée, des engagements contractuels en
cours et ayant donné lieu à versement à des résidents d’un pays vis-à-vis de non
résident, comportant obligation de remboursement du principal avec ou sans
paiements d’intérêts, ou de paiements d’intérêts avec ou sans remboursement de
principal ».
La dette publique ; elle est l’ensemble des emprunts contractés par l’Etat
(obligations d’Etat, bons du Trésor) pour financer généralement le déficit public
(solde budgétaire négatif, les dépenses de l’Etat étant supérieures aux recettes).
La dette publique englobe non seulement les dettes auxquelles l’Etat doit faire
face en vertu d’emprunts qu’il a faits (obligations d’Etat, bons du trésor) ou de
pensions dont il doit assurer le service, mais aussi les versements qu’il doit faire
pour payer ses fonctionnaires et ses fournisseurs.
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La dette bilatérale est une créance détenue par un Etat sur un Etat. De façon
précise, elle peut être définie comme la dette due à un gouvernement ou à une
institution spécialisée d’un gouvernement ou encore celle due à une banque
publique ou privée d’un autre pays.
La dette multilatérale est une créance détenue par un groupe d’Etats ou une
institution financière internationale sur un Etat.
Dette perpétuelle est celle dont le remboursement peut être indéfiniment différé
sous réserve des paiements des intérêts ; Ici, le débiteur n’est jamais tenu d’en
rembourser le capital, la charge est réduite aux intérêts.
Le service de la dette est la charge financière qui incombe à l’emprunteur en
contrepartie des services du prêteur. Il regroupe les montants à payer au titre du
principal, des intérêts et diverses commissions.
Le rééchelonnement de la dette consiste en un ajustement des charges relatives
aux engagements, ce qui permet au débiteur de différer les transferts pendant
une période de grâce stipulée dans l’accord de réaménagement.
La solvabilité caractérise la situation financière d’un pays capable de faire face
à ses engagements, c’est-à-dire la contrainte budgétaire intertemporelle est
respectée. En d’autres termes, la solvabilité d’un Etat est sa capacité à payer
totalement sa dette (annuler sa dette à long terme en respectant les échéances).
Les Programmes d’Ajustements Structurels (P.A.S.) sont des politiques de
stabilisation du FMI de grande ampleur dont l’application est une condition de
rééchelonnement de la dette de certains pays en développement.
Schéma de Ponzi , chaîne de Ponzi, dynamique de Ponzi, ou jeu de Ponzi,
est un système de vente pyramidale, une forme d’escroquerie par cavalerie,
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fonctionnant par effet boule de neige, consistant en la promesse de profits très
intéressants, financés par l’afflux de capitaux investis progressivement, jusqu’à
l’explosion de la bulle spéculative ainsi créée.
Aide au développement : L’aide au développement a été définie par une
Convention de l’O.C.D.E. comme : « l’octroi de ressources aux pays en voie de
développement à titre de dons ou de crédits préférentiels, comme les prêts à long
terme ou à des taux d’intérêts bonifiés d’au moins 25% par rapport à ceux du
marché.»
Paragraphe 2 : Théories de l’endettement
L’Intérêt porté aux transferts et mouvements de capitaux au plan
international pour le financement du développement se justifie par l’abondance
des théories proposées par les divers courants de pensée économique.
Il urge d’abord de clarifier deux notions voisines et presque indissociable
en matière d’endettement : La solvabilité et la soutenabilité.
Si l’on convient que la solvabilité d’une nation est sa capacité à honorer
ses engagements, le F.M.I définit la soutenabilité de la dette d’une nation
comme l’aptitude de cette dernière à financer le solde de sa balance d’opérations
courantes et assurer les obligations du service de la dette sans faillir, sans
solliciter le rééchelonnement, sans accumuler les arriérés et enfin sans
compromettre le croissance.
L’appréhension du rôle de l’endettement a été diversement abordée par les
courants de pensée économique.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 10
1- Les conceptions traditionnelles
Selon la conception keynésienne, les gouvernements doivent, dans
certains cas, stimuler l’économie par des augmentations des dépenses publiques
ou par des diminutions de taxes ; les déficits publics sont donc une solution
permettant d’accélérer la reprise économique en cas de crise. En effet,
concernant la théorie sur la dette extérieure et la croissance, les keynésiens
pensent que l’endettement n’occasionne des charges ni pour les générations
futures ni pour des générations présentes du fait des investissements qu’il
génère. Le modèle de l’Etat selon les keynésiens, tire ses fondements dans la
demande globale et sur ses effets multiplicateurs et accélérateurs, caractéristique
fondamentale de leur théorie. Dans cette approche, l’endettement entraînant la
relance de la demande provoque par l’effet accélérateur une hausse plus que
proportionnelle de l’investissement, qui à son tour incite une hausse de la
production. Le déficit budgétaire menant par ses flux successifs à augmenter le
stock de la dette produit l’expansion du cycle économique par la demande et
l’investissement autonome. Ainsi, le déficit auquel correspond l’emprunt stimule
la demande et ne permet d’alléger le coût de ses remboursements que seulement
et probablement en situation de sous-emploi des ressources productives.
Par contre les classiques ou néoclassiques considèrent l’endettement
comme un impôt futur et l’imputent à l’Etat. Car selon eux, l’endettement public
défavorise l’accumulation du capital et la consommation des générations
présentes et futures. En fait les citoyens, selon Ricardo voient dans l’emprunt
un impôt différé dans le temps et vont se comporter comme s’ils sont contraints
de payer un impôt ultérieurement pour rembourser cet emprunt peu importe le
décallage intergénérationnel. Autrement, les comportements des agents
économiques sont guidés par une anticipation à la hausse des impôts. Toutefois,
une réserve peut être introduite selon la nature ou la qualité des dépenses
(dépenses de transferts et d’investissements) financée par l’emprunt. Barro
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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(1970), reprenant le théorème d’équivalence attribué à Ricardo a montré que la
dette publique était équivalente à l’impôt en supposant que les agents
économiques anticipent rationnellement les politiques gouvernementales. Il
conclut que la dette n’a pas d’impact sur l’économie et donc qu’une dette
publique est toujours soutenable. Autrement dit une politique de déficit
budgétaire financée par l’emprunt reste sans effet sur l’activité économique dans
la mesure où des agents ne sont pas victimes de l’illusion fiscale.
2- Les conceptions récentes (modernes) de l’endettement
a- La conception de l’école des anticipations rationnelles face à l’endettement
Il faut donc remarquer que Barro expose sa théorie grâce à un outil
appelé fonctions d’utilités intertemporelles à générations imbriquées, appelé
principe d’équivalence Ricardienne. La paternité revient à Ricardo mais le
principe est attribué à Barro (1974). Il approfondit la thèse de Ricardo en
combinant les thèmes d’évictions et d’anticipations rationnelles. Selon lui, si le
gouvernement finance un accroissement de dépenses publiques en ayant recours
à l’emprunt (cher aux keynésiens), ou s’il abaisse les impôts en laissant les
dépenses publiques et la masse monétaire inchangées, le public va anticiper les
hausses d’impôts qui seront nécessaires ultérieurement pour payer les intérêts de
la dette accrue et pour rembourser le principal. De ce fait, les agents savent à
priori que ces deux modalités de financement sont un recours aux déficits
publics ; ils savent aussi qu’il aura alourdissement de la dette publique et usage
de la taxe inflationniste. L’accumulation de l’inflation à long terme et
l’augmentation des impôts finiront par rendre peut crédible l’Etat. Les agents
vont donc se préparer à la purge fiscale future. Ils vont accroître leur épargne
actuelle en prévision des alourdissements futurs des impôts et ne se
considèreront pas plus riches après la mise en œuvre de la politique de relance.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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Il en résultera que cette politique suivie par le gouvernement n’aura aucun effet
stimulant sur l’économie, quelles que soient les modalités de financement des
déficits ; les effets à long terme sont équivalents. Cette proposition générale
signifie donc la neutralité de la dette publique à long terme (multiplicateur
fiscal et budgétaire tendant vers zéro).
b- Les approches alternatives à la théorie keynésienne face à l’endettement
La théorie keynésienne justifie la nécessité de l’endettement public pour
la relance économique alors que ces approches explorent le champ des stratégies
électorales, les gouvernements de coalition et les gouvernements unitaires etc…
Pour Alesina et Tabellini (1989), s’il existe dans un pays où on a deux
partis qui sont potentiellement en position d’accéder fréquemment au pouvoir
alors ces partis ont des préférences différentes quant à la nature des dépenses
publiques. Le parti au pouvoir peut décider d’augmenter aujourd’hui les
dépenses publiques en s’endettant, satisfaisant son électorat, au mieux de se
maintenir au pouvoir et au pire de ne pas faciliter la vie à son adversaire. Ainsi,
il crée des conditions de gêner ultérieurement son adversaire politique du point
de vue de la gestion du budget, si ce dernier venait à conquérir le pouvoir. Il
engage aujourd’hui des recettes fiscales futures et donc diminue les possibilités
futures de dépenses de son adversaire surtout si la dette venait à être importante.
En effet, la deuxième partie, une fois au pouvoir sera tenue de rembourser à un
moment le service de la dette de l’emprunt. Ainsi, il sera obligé de réviser ses
promesses électorales en diminuant les dépenses sociales et au risque de
mécontenter son électorat. D’où l’idée de stratégies électorales à travers la dette.
D’autres auteurs ont également élaboré les modèles sur les stratégies électorales
et les cycles politiques et l’endettement public (Persson, Savenson (1989) ;
Aghion et Bolton (1990) ; Milesi-Ferret (1995).
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 13
3- Les développements empiriques sur l’endettement et la croissance
a- Les développements empiriques sur l’endettement
Les études recensées en rapport avec le thème ne sont pas nombreuses. En
effet, le lien entre le degré d’endettement et certaines variables macro-
économiques a fait l’objet de recherches économétriques, bien que la plupart
d’entre elles ne traitent pas spécifiquement le cas du Bénin.
Les travaux de B. Eichengreen et R. Portes (1986) se sont intéressés à
l’identification des déterminants du stock de la dette d’une trentaine de pays à
un moment donné (1955) de leur économie. Pour eux, l’endettement excessif et
le défaut de paiement tendent à réduire le taux de croissance réelle et la
crédibilité de l’Etat.
Le plus connu des travaux est celui réalisé par K. O. Ojo (1989) "Debt
capacity model of Sub-saharan African" qui par une approche économétrique
montre que le rapport de l’encours de la dette/PIB d’une trentaine de pays
africains durant la période de 1976 à 1984 est déterminé par : la variation des
exportations (X), le rapport des importations/PIB, la population (Pop) et au taux
de croissance du PIB (Y) les résultats statistiques lui permettent de conclure que
le rapport de l’encours de la dette/PIB est lié négativement à la variation des
exportations, au taux de croissance du PIB et positivement au rapport de
l’importation/PIB, puis à la croissance de la population (Pop).
Aussi, d’autres ont-ils identifié le service de la dette comme étant un
déterminant qui influence positivement l’endettement extérieur à travers des
modèles économiques (Claessens (1990), Warner (1992) et surtout de
Borensztein (1990)). Borenstein a conclu par une étude économétrique sur les
données de la dette des Philippines l’encours et le ratio du service de la
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 14
dette/exportations ont globalement un effet inverse sur la formation du capital
privé et incitent l’endettement du pays.
S. Ibi AJAYI (1991), analyse l’impact des facteurs extérieurs et intérieurs
de l’endettement du Nigéria. En effet, il choisit comme déterminants du ratio
dette/exportations les variables suivantes : les termes de l’échange, le taux de
croissance du revenu des pays industrialisés, le taux d’intérêt réel, le ratio déficit
budgétaire/PIB et le trend. Il affirme qu’on doit s’attendre à ce qu’une
aggravation des déficits budgétaires accroisse le ratio dette/exportation. Les
résultats de l’estimation de son modèle confirment cet état de fait.
Lamine N’Diaye (1993), fait une modélisation de l’endettement pour le
Sénégal. Il montre que l’endettement s’explique positivement par le stock de
dette antérieure et négativement par le niveau de déficit de la balance courante.
Aussi, l’appréciation du taux de change moyen CFA/US diminue le service de la
dette. Considérant la quasi-inexistence de réserves au Sénégal, l’équation essaie
d’expliquer les mouvements monétaires composés du compte d’opération, du
tirage sur le FMI et de la contribution des banques primaires au financement de
la balance des paiements. Il trouve que malgré la faiblesse du coefficient de
corrélation, cette explication des mouvements monétaires par le compte courant
et les investissements directs nets peut être retenue. Au regard de ce résultat et
de l’évolution de l’encours de la dette en rapport avec le compte courant, il est
difficile de justifier le niveau d’endettement du Sénégal par la recherche d’un
équilibre des grandeurs macro-économiques. C’est dire que le Sénégal ne
s’endette ni pour équilibrer sa balance courante ni pour accroître ses
investissements, car le modèle montre que l’impact du stock de dette sur ces
derniers est très faible. Il estime en outre que l’explication des mouvements
monétaires (compte d’opération) par le solde de la balance des paiements
courants et les investissements nets directs, n’est pas satisfaisante du point de
vue des résultats statistiques.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 15
Rougier (1994) trouve, de même, des résultats contrastés au sein des pays
africains. D’après ses analyses économétriques, l’encours de la dette rapporté au
PIB exerce un effet dépressif sur la croissance en Côte d’Ivoire, au Mali et au
Tchad sur la période 1970-1991. en revanche, l’effet est positif pour le Niger,
Madagascar et le Kenya.
D. Cohen (1996) montre empiriquement que la dette a pesé sur la
croissance dans les pays en développement (ainsi d’ailleurs, que le nombre de
rééchelonnements). Cependant, ce résultat général n’est pas obtenu pour tous les
pays de l’échantillon, notamment en ce qui concerne les pays africains. L’impact
de l’endettement sur la réduction de la croissance est négligeable pour le
Burkina Faso, le Kenya, Les Iles Maurice, le Rwanda, l’Afrique du Sud, le
Zaïre, le Zimbabwe et le Mali. Dans deux autres cas, l’impact de la dette sur la
croissance est même positif (Ghana et Tanzanie).
Massa Coulibaly et al (2001) dans une étude réalisée sur l’endettement
du Mali ont montré que les indicateurs statistiques tels que le taux d’intérêt, le
financement ont un effet positif sur le niveau d’endettement du mali.
b- Les développements empiriques sur la croissance
Les nouvelles théories de la croissance ont engendré une forte reprise des
analyses empiriques et notamment économiques. Ceci a eu des retombées
positives en ce qui concerne la constitution des bases de données. Toutefois, peu
de ces analyses portent spécifiquement sur les pays les plus pauvres.
S’agissant de la quantification du lien entre le financement extérieur
générateur d’endettement et les facteurs de croissance, l’hypothèse est que tout
financement extérieur reçu est destiné à l’investissement. Le fait de supposer
qu’une partie du financement est destinée à la consommation (Kessler 1985), ne
modifie pas les résultats qualitatifs. Il modifie bien entendu les résultats
quantitatifs, en repoussant la date d’annulation de la dette (en cas
d’insovabilité), sauf si l’on adopte la position à la Azam Plane (1986) qui
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Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 16
considère la connaissance comme source de croissance dans les pays les plus
pauvres, il faut tenir compte du fait que l’Etat est le seul agent économique
susceptible d’emprunter à l’étranger, en raison du rationnement de crédit qui
touche presque tous les opérateurs privés.
Savidès (1995) a montré qu’en Afrique, les conditions initiales (PIB par
habitant de l’année de départ) influent négativement sur le taux de croissance du
PIB par habitant, ce qui étaye la thèse de convergence au sein du groupe. En
revanche, le taux d’investissement, la croissance de la population, l’ouverture
commerciale, le développement financier et le degré de liberté politique et
économique ont un impact positif et significatif sur le taux de croissance. En
revanche la croissance du ratio de dépenses publiques sur le PIB contribue à
l’augmentation de la croissance du PIB par habitant.
Il souligne que l’absence de significativité du taux de scolarisation peut
être due au fait que le taux de scolarisation dans le secondaire n’est sans doute
pas un bon indicateur du capital humain, parce qu’il ne prend pas en compte
l’efficacité de la formation.
Des résultats très proches sont obtenus par Ojo et Oshikoya (1995). Pour
eux, la croissance africaine est essentiellement expliquée (positivement) par le
taux d’investissement, (négativement) par le taux de croissance de la population,
(positivement) par les exportations, (positivement) par le taux de change réel.
Cette analyse inclut un groupe de pays à faibles revenus qui comprend six pays ;
(Bénin, Ethiopie, Kenya, Tanzanie, ex Zaïre et Zambie).
Ojo et Oshikoya (1995) procèdent à une analyse économique de panel
(68 pays de 1970 à 1995) qui semble aussi valider cette hypothèse pour les pays
africains en général. Dans les équations qui expliquent le taux de croissance réel
par habitant d’une part, le taux d’investissement d’autre part, la variable taux
d’endettement extérieur est significative, quoique faiblement dans le second cas.
D’après leurs estimations, une réduction du taux d’endettement (dette
extérieure/PIB) de 10% entraînerait une augmentation du taux de croissance des
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 17
économies africaines de 0,3% et une augmentation de 0,4% du taux
d’investissement.
Dessus et Herrera (1996) utilisant une procédure d’estimation
d’équations simultanées, mettant en lumière un effet négatif de la dette publique
sur l’investissement privé de faible niveau (élasticité de 0,03), mais fortement
significative (il est cependant curieux de constater que les résultats ne présentent
aucun effet repérable de l’endettement public sur l’investissement public). Mais
ces résultats ne font pas l’unanimité.
D. Cohen (1996) montre empiriquement que la dette a pesé sur la
croissance dans les pays en développement. Cependant, le résultat général n’est
pas obtenu pour tous les pays de l’échantillon, notamment en ce qui concerne les
pays africains.
La plupart des analyses générales mettent l’accent sur une particularité
africaine, qui se matérialise par le fait que la variable muette attachée aux pays
africains est significative. Cette spécificité a été analysée en détail par Collier et
Gunning (1997). Ces derniers concluent que quatre facteurs jouent un rôle
important dans la faible performance africaine en terme de croissance ; faible
ouverture du marché des biens (du fait de nombreuses distorsions, manque de
capital social, fractionnement socio-ethnique, le respect des contrats), risques
élevés (notamment au niveau de l’inflation) et faible performance du secteur
public.
La faiblesse du secteur financier joue également un rôle mais moins important.
Dans la situation typique de ces pays en dehors de l’Etat proprement dit,
seules quelques grandes entreprises publiques sont susceptibles d’obtenir
quelques crédits extérieurs et généralement auprès d’agences publiques
spécialisées (SFI, Proparco…). Encore que ces crédits sont en majorité avalisés
par l’Etat d’après les données de la Banque mondiale pour 1995 (Global
Développement Finance 1997).
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 18
SECTION 3 : APPROCHE MÉTHODOLOGIQUE
PARAGRAPHE 1 : LA COLLECTE DES DONNÉES
Dans le cadre de cette étude, nous avons utilisé des données secondaires :
les données annuelles issues des institutions : internationales (le Fonds
Monétaire international, la Banque Mondiale), régionales (Union Economique et
Monétaire Ouest-Africain (l’U.E.M.OA), Banque Centrale des Etats de
l’Afrique de l’Ouest (B.C.E.A.O)) et nationales (Institut National de Statistique
et d’Analyse Economique (l’INSAE), Caisse Autonome d’Amortissement
(C.A.A.)) ont été mobilisées pour construire une base de données.
Il s’agira ainsi des séries chronologiques qui couvrent la période 1974 à
2006 soit 33 observations. Par ailleurs, l’outil informatique sera d’un grand
secours afin de renforcer et de mieux affiner la recherche documentaire.
PARAGRAPHE 2 : LE TRAITEMENT DES DONNÉES
Pour réaliser l’estimation du modèle et vérifier les hypothèses formulées,
nous utiliserons des outils statistiques et économétriques. Le modèle à correction
d’erreur (error correction model en anglais) est estimé par la méthode des
Moindres Carrés Ordinaires (MCO) mais les variables sont prises en différence
(première ou seconde).
Après avoir importé les données il nous reviendra de :
1. Déterminer le degré d’intégration des variables des modèles
o test de dickey Fuller augmenté
o test de phillips Perron
2. Vérifier que les séries sont cointégrées
o Test de Engle et Granger (test ADF sur les résidus)
o Test de Johansen
3. Estimer le modèle à correction d’erreur
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 19
o Estimation du modèle proprement dit
o Test d’autocorrélation pour s’assurer que les estimateurs sont
BLUE
o Test de stabilité, (etc).
La méthode d’estimation qui sera utilisée est : "les moindres carrés
ordinaires". L’estimation du modèle se fera sur le logiciel Eviews 5. La
validation statistique de la qualité globale des modèles est appréciée par le
coefficient de détermination. L’analyse de la qualité globale du modèle
s’effectue à travers le coefficient de détermination de la variable (R²), ce
coefficient explique la part de l’évolution de la variable dépendante qui est
expliquée par les variables exogènes. La validation statistique de la qualité
individuelle des variables est appréciée par la probabilité associée à chaque
variable.
PARAGRAPHE 3 : CADRE OPERATOIRE DE L’ÉTUDE
Pour ce qui est de la validation des deux hypothèses, une analyse
économétrique suivie d’une analyse bien détaillée des résultats nous servira de
démonstration à travers le modèle de croissance de base suivant :
Txcroist = ao + a1 (Pibh)t-1 + a2Texcht + a3Logtxpopt + a4Apdt + a5Logtxinvt
+ a6Opent + a7Deficitt + a8Servexpt + a9Dextt + a10(Dext) t² + it
qui a été proposé par Ojo et Oshikoya (1995) et repris par Alain YOUMBE.
(2006)
Où les différentes variables représentent ce qui suit :
• Txcrois : le taux de croissance réelle par habitant du PIB ;
• (Pibh)t-1 : le revenu national réel par habitant décalé d’une période ;
• Texch : les variations des termes de l’échange ;
• Deficit : le déficit du solde budgétaire de l’administration centrale ;
• Logtxpop : le taux de croissance démographique (en logarithme) ;
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 20
• Apd : l’indicateur de l’aide publique au développement de tous les bailleurs
de fonds ;
• Logtxinv : taux d’investissement public (en logarithme) ;
• Open : un indicateur de l’ouverture commerciale (les exportations et les
importations en pourcentage du PIB) ;
• Servexp : le total du service de la dette publique en pourcentage des
exportations ;
• Dext : les variables indicatives de l’encours de la dette en valeur nominale
soit en pourcentage des exportations soit en pourcentage du PIB ;
• (Dext)² : ces mêmes variables de l’encours de la dette mais cette fois ci
élevée au carré ;
• It : représente les perturbations aléatoires, suit une loi normale de moyenne
nulle et de variance constante.
Où ao ……. a10 sont des valeurs constantes.
Les causes déterminantes de la croissance économique dans le long terme selon
la littérature économique sont données par la croissance de la technologie et la
croissance de la population économiquement active, la croissance de la
technologie et la croissance du capital physique (investissement).Dans ce travail,
on pose la dette extérieure comme une variable de contrôle qui affecte
indirectement la croissance à travers l’investissement. Le modèle empirique que
nous utilisons pour estimer les effets de la dette sur la croissance est de la forme
txcrois = f(Y,ç) où Y sont des variables explicatives et txcrois la variable
dépendante et ç le terme d’erreur.
Le choix des variables du modèle prend en compte les réalités politiques,
économiques et financières du pays. Aussi convient-il de souligner que la
transformation logarithmique de certaines variables répond à un double souci.
D’abord il s’agit d’éviter les problèmes liés aux effets de grandeur, ensuite de
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 21
faciliter les interprétations avec les élasticités entre les variables explicatives
(Bourbonnais 1998).
Enfin dans le souci de simplifier le nombre de variables afin de les coller
aux réalités économiques et suite à l’indisponibilité de certaines variables, il sera
procédé à la modification du modèle. Ce faisant, la forme fonctionnelle retenue
est la suivante :
Txcroist = ao + a1 (Pibh)t-1 + a2Logtxpopt + a3Apdt + a4Logtxinvt + a5Opent +
a6Servexpt + a7Dextt + a8(Dext) t² + it
En effet, pour valider l’hypothèse de l’effet d’éviction de la dette, il faut que le
ratio service de la dette exportation ait un signe négatif (-) ; tandis que pour
valider l’hypothèse de la thèse de surendettement, il faut que le signe du
coefficient de la dette soit positif et que celui de la dette portée au carré soit
négatif (-).
SECTION 4 : ESTIMATION ET JUSTIFICATION DU MODELE ET
SIGNES ATTENDUS DES VARIABLES
Nous avons introduit des variables de contrôles car il n’y a pas que la
dette qui influe sur la croissance. Il s’agit du revenu réel par habitant qui est
décalé d’une période pour vérifier l’hypothèse de la théorie de la convergence
des modèles de croissance de Barro. Dans ce cas, le signe attendu pour son
coefficient doit être négatif ; le taux de croissance démographique et le taux
d’investissement reflètent l’impact du facteur capital humain et capital physique
dans le processus de production, cependant le coefficient du taux de croissance
démographique attendu négatif tandis que celui du taux d’investissement positif.
L’indicateur de l’ouverture commerciale avec un signe positif est introduit
pour stimuler la productivité à travers les transferts des connaissances et des
bénéfices efficients ; l’aide publique au développement est modélisée pour voir
son importance dans ces économies et doit avoir un signe positif. Enfin, pour
faire la distinction entre l’effet d’éviction de la dette et la thèse du
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 22
surendettement c’est-à-dire l’existence d’une relation de la courbe de Laffer
entre la dette et la croissance, nous avons utilisé le service de la dette rapporté
aux exportations et les indicateurs de la dette au premier et second degré. Le
ratio service de la dette exportation doit avoir un signe négatif pour illustrer cet
effet d’éviction tandis que pour l’existence de la thèse du surendettement, il faut
que le signe du coefficient de la dette soit positif et celui de la dette au carré
négatif. Ainsi, le pic de notre équation quadratique va identifier le niveau du
stock de la dette où l’impact marginal de la dette sur la croissance devient
négatif.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 23
CHAPITRE II VIABILITÉ DE LA DETTE EXTÉRIEURE DU BÉNIN
Dès 1988, la communauté internationale s’est engagée au sein du Club de
Paris dans un processus global d’allégements de dette des pays pauvres
(traitement de Toronto), tout en refusant tout retraitement de la dette
multilatérale. Fin 1996, l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés a
étendu le processus de réduction de dette aux Institutions de Bretton Woods
(IBW).
La plupart des partenaires bilatéraux ont décidé d’aller plus loin, en
annulant la quasi-totalité du reste de leurs créances sur les pays qui atteignent le
point d’achèvement de l’Initiative PPTE. Cela a permis de financer des dépenses
de lutte contre la pauvreté, mais la communauté internationale a jugé insuffisant
son soutien aux pays à faible revenu (PFR).
Un allégement supplémentaire a été accordé en 2005 aux pays arrivant au
terme de l’initiative PPTE par trois des principaux créanciers multilatéraux – le
Fonds Monétaire International (FMI), l’Association Internationale de
Développement (IDA) et le Fonds Africain de Développement (FAD) – dans le
cadre de l’Initiative d’Allégement de la Dette Multilatérale (IADM). Cet
allègement représentait en moyenne 70% du stock de la dette des pays post-
PPTE. A la suite de ces annulations, le service de la dette de ces pays s’est
considérablement réduit, ouvrant ce faisant, des perspectives en termes de
réendettement.
Le risque de voir s’enclencher un nouveau cycle d’endettement
conduisant à une nouvelle crise préoccupe les acteurs du développement et,
notamment, la communauté des bailleurs internationaux. D’où l’intérêt
d’analyser le Cadre de Viabilité de la Dette (CVD) des pays à faible revenu
élaboré conjointement par le FMI et la Banque Mondiale pour contrôler le
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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processus de réendettement – ce que nous nous proposons de faire après un
rappel du niveau d’endettement du Bénin et des perspectives de réendettement.
SECTION 1 : ANALYSE DE LA DETTE EXTÉRIEURE DU BÉNIN
Après avoir peint la structure et l’évolution de la dette extérieure au
Bénin, nous aborderons au travers du ratio de l’encours de la dette en
pourcentage du Produit Intérieur Brut, une appréciation de la situation
d’endettement.
PARAGRAPHE 1 : STRUCTURE DE LA DETTE EXTÉRIEURE
BÉNINOISE
La dette extérieure béninoise est composée de deux grandes parties
inégales :
- La dette multilatérale
- La dette bilatérale
Le graphique suivant (graphique n°1) montre la proportion que chacune
des parties occupe dans le total de l’encours de la dette extérieure de 1986 à
2008.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 25
Graphique 1 : Encours de la dette extérieure
Evolution de la dette extérieure du Bénin
0
100
200
300
400
500
600
700
800
900
198619871988
198919901991199219931994
19951996199719981999
200020012002200320042005
200620072008
Année
%
Dette bilatéraleDette multilatérale
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 26
Au 31 décembre 2008 la dette due aux créanciers institutionnels
multilatéraux totalise un montant de 189,7 milliards de FCFA. Les principaux
bailleurs dans cette catégorie demeurent l’Association Internationale pour le
Développement (AID) et la Banque Ouest Africaine de Développement
(BOAD). Les autres bailleurs sont la Banque Européenne d’Investissement
(BEI), le Fonds International pour le Développement en Afrique (BADEA), la
Banque Islamique pour de Développement (BID), l’Organisation des Pays
Exportateurs de Pétrole (OPEP), le Fonds Monétaire International (FMI) et le
groupe de la Banque Africaine de Développement (BAD) etc…
Il faut noter qu’en général la grande part de la dette des pays pauvres très
endettés est bilatérale, 56% de créance bilatérale, 28% de créance multilatérale
et 16% de créance privée mais pour le Bénin, la situation est différente. En effet
au 31 décembre 2008 la dette bilatérale ne représente que 36,7% et la dette
multilatérale 63,3%. La prépondérance de la dette multilatérale du Bénin
s’explique par le recours aux prêts concessionnels que privilégie le pays.
Au demeurant l’allocation des crédits a été telle que la reconstitution des
ressources n’est pas assurée, celles-ci n’ayant pas été affectées prioritairement
aux activités productives. Aussi force est de constater que même pour les projets
générateurs de revenus, les problèmes de gestion ont souvent entravé la
reconstitution voulue des ressources et ont conduit à l’incapacité d’assurer
régulièrement le service de la dette. Le cas de la dette rétrocédée aux entreprises
publiques est significatif à cet égard. Il s’avère donc qu’en plus de la question
d’allocation intersectorielle des crédits, l’efficacité n’a pas toujours été de mise
dans les projets financés. La rentabilité des investissements réalisés n’ayant pas
été celle espérée, le poids excessif de la dette extérieure sur l’économie
nationale reflète les effets pervers de la détérioration des termes de l’échange
ainsi que les faiblesses observées dans l’allocation et la gestion des emprunts.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 27
Plus qu’une question de mesure du poids de l’endettement, le service de la
dette est devenu un véritable problème dans la gestion des ressources internes et
externes de l’Etat.
Il est indéniable que dans l’ensemble la pression sur les ressources
financières du pays débiteur est plus ou moins forte selon que les nouveaux
tirages sur emprunts sont faibles ou importants. Sur le plan de l’allocation des
ressources internes, la priorité accordée au paiement du service de la dette
extérieure et la régression des tirages sur les prêts ont poussé l’Etat à se
désengager des activités productives et mieux se concentrer sur les rôles qui sont
les siens (justice, sécurité, éducation etc…) ; les tableaux présentant la situation
et les indicateurs de la dette extérieure sont disponibles ci-dessous.
A - ÉVOLUTION DE LA DETTE MULTILATERALE
Les principaux créanciers du Bénin dans cette catégorie sont les
institutions internationales les prêts se font à des taux concessionnels avec une
durée plus ou moins longue (voir tableau n°1)
Tableau n°1 : Les conditions d’octroi des crédits par les bailleurs multilatéraux Bailleurs Devises
de prêts Devises de
remboursementTaux d’intérêt
moyen Nombre d’années
d’échéance Nombre d’années
de différé AID $US-DTS $US-Euro 0,75% 40 10 BADEA $US $US 2% 13 à 16 5 à 6 BEI Euro Euro 1% 5 à 40 4 BID DI DI-$US 2,5% 15 à 25 3 à 7 BOAD FCFA FCFA 3,025% 18 5 à 7 FIDA DTS Euro 0,75% 30 10 Fonds CEDEAO UCAO Euro 4% 14 4
Fonds OPEP
$US $US 1% 12 à 20 5
FAD UC $US 0,75% 50 6 à 7 FSN UC $US 2% 24 4 FMI DTS Euro 0,5% 1,5 5
Source : CAA
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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Le tableau relatif aux conditions des crédits octroyés par les bailleurs de
fonds multilatéraux met en relief les conditions de taux d’intérêts, de devises de
remboursement et de durée ainsi que le différé de chacun des créanciers
multilatéraux.
Au 31 décembre 1986, l’AID avait déjà accordé à l’économie béninoise
26 prêts pour un engagement de 79 milliards de FCFA. Pendant cette période,
57 milliards étaient déjà décaissés et l’AID décomptait un encours de 55,4
milliards de FCFA sur le Bénin. Ensuite le FAD apparaît et accorde des prêts
aux mêmes conditions que l’AID.
A partir de 1989 nous assisterons à une explosion de la dette multilatérale
expliquée d’une part par l’accès du Bénin au financement international (après la
signature du premier PAS), et d’autre part par l’octroi des prêts à des taux
concessionnels par les organismes multilatéraux.
B : ÉVOLUTION DE LA DETTE BILATÉRALE
Cette catégorie de dette, comme la première, se présente sous plusieurs
formes. On distingue :
La dette directe de l’Etat qui peut être à la charge définitive, rétrocédée à la
structure bénéficiaire du financement ou répercutée. Dans le cas de la dette
répercutée, la structure bénéficiaire du financement supporte intégralement le
risque de change ;
La dette avalisée par l’Etat est celle où le bénéficiaire est distinct de l’Etat qui
n’intervient qu’en cas de défaillance de ce dernier ;
La dette non avalisée est due par la structure bénéficiaire mais non garantie par
l’Etat.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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Tableau n°2 : Les conditions d’octroi de crédit par les bailleurs bilatéraux Bailleurs Devises
de prêts Devises de
remboursement Taux d’intérêt
moyen Nombre d’années
d’échéance Nombre
d’années de différé
Fonds Koweïtien DK DK 5% 17 6
Chine YUAN RMB
Nature ou devise 1% 10 à 25 10
Japon Yen Yen 0% à 1% 30 10 France Euro Euro 2,25% 10 à 30 3 à 10 USAID $ US $ US 2,25% 25 9 Belgique Euro Euro 0% 12 à 25 4 à 10 Russie RBL $ US 2,25% 18 10 Source : CAA
Le portefeuille de la dette bilatérale du Bénin est assez diversifié au
regard de la diplomatie agissante mise en œuvre dans la coopération avec le
reste du monde.
A l’instar de ce qui a été fait au niveau de la dette multilatérale, nous
apprécierons globalement le niveau des contributions au financement du
développement du Bénin à travers les crédits et les conditions dont ils sont
assortis dans le processus de l’endettement extérieur. La France reste le premier
partenaire en matière de financement de l’économie béninoise ; elle intervient
soit par le biais des avances du trésor, soit par les emprunts.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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PARAGRAPHE 2 : Analyse de l’évolution de quelques indicateurs
macroéconomiques
La situation de la dette extérieure a évolué progressivement de 1989
jusqu’en 1993 avant de s’envoler sous l’effet de la dévaluation du FCFA
intervenue en janvier 1994. l’encours de la dette extérieure est le montant
mobilisé moins les intérêts. Il est passé de 321,53 milliards au 31 décembre
1993 à 628,43 milliards FCFA au 31 Décembre 1994 pour s’établir ensuite à
703,6 ;757,1et 748,21 milliards de FCFA respectivement en 1995, 1996 et 1997.
L’évolution de l’encours de la dette extérieure depuis 1989 connaît une
ascension plus ou moins régulière avant et après la dévaluation du FCFA. Elle
s’explique d’une part par l’importance des crédits mobilisés dans le cadre de
l’ajustement et aussi par l’effet double du rééchelonnement sur la consolidation
des intérêts et l’annulation partielle de l’assiette de consolidation. Sur les
encours de la dette extérieure, ceux de la dette multilatérale présentent une
prédominance suite au retrait des statistiques de la Société Sucrière de Savè
(SSS) et de la Société des Ciments d’Onigbolo (SCO) aux effets des
rééchelonnements. Ainsi de 1990 à 1993 les encours de la dette multilatérale
représenteraient respectivement 56,3% ; 60,9% ; 61,4% et 63,6% du total contre
43,7, 39,1% ;38,6% et 36,4% pour la dette bilatérale. Le ratio encours / PIB très
déterminant dans l’analyse de la dette n’est pas très stable à partir de la
dévaluation. Il a atteint des niveaux qui dépassent le maximum des 70% retenu
dans le cadre de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA)
en 1994, 1995 et 1996 (75% ; 80,32% ; 75,08%) avant de redescendre à 72,56%.
De 1995 à 2008, nous avons également assisté à cette évolution à la baisse qui
est passée de 80,32% à 10,3%.
Par contre, la tendance à la hausse du ratio encours / PIB peut s’expliquer
aussi par le fait que le facteur exogène qui est la dévaluation n’a fortement
affecté que l’encours qui a presque doublé alors que le PIB qui est déterminé en
monnaie nationale n’a pas connu la même évolution.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 31
Le service de la dette est effectivement assuré et depuis 1993 aucun
arriéré n’est enregistré à la fin de l’année. Malgré le doublement du service à
partir de 1994, un effort particulier est fait à cet effet et ceci rentre dans le cadre
du respect des critères de performance du programme. De 1980 à 1984 le service
de la dette extérieure est normalement assuré et ne posait pas de problème ; les
difficultés précédemment exposées ont contribué à l’alourdir et il faut attendre
les années 1993 avant de revenir à la situation normale.
Le coefficient du service de la dette extérieure ou ratio de service de la
dette extérieure / recettes d’exportations indique la part prélevée des recettes
courantes d’exportations pour régler le montant des intérêts et du principal
afférents aux emprunts extérieurs au titre d’une année. Il a été successivement
de 62,62% ; 45,88% ; 93,73% ; 48,47% ; 26,38% et 30,52% de 1990 à 1995. Ce
ratio est contenu dans la limite du seuil de 25% acceptable pour une utilisation
judicieuse du solde des recettes d’exportation à des opérations d’importation de
biens d’équipement sur la période de 1996 à 2008. Ce ratio se situe
principalement autour de 3% depuis les années 2008.
Le ratio de la dette assuré/recettes publiques montre la part des recettes
globales de l’Etat affectée au service de la dette extérieure. Le budget étant
essentiellement fiscal, ce ratio devrait être très bas pour permettre à l’Etat
d’affecter la grande partie de ses ressources à l’importation des biens
d’équipement, au financement des projets et au paiement des salaires de
fonctionnaires.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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PARAGRAPHE 3 : ANALYSE GRAPHIQUE DE L’EVOLUTION DU
RATIO DE L’ENCOURS DE LA DETTE EN
POURCENTAGE DU PRODUIT INTERIEUR BRUT
Graphique n°2 : Evolution de la dette extérieure / PIB (%)
Encours de la dette extérieure / PIB(%)
0
10
20
30
40
50
60
70
80
1986
1987
1988
1989
1990
1991
1992
1993
1994
1995
1996
1997
1998
1999
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
Années
L’allure générale de l’encours de la dette en pourcentage du PIB révèle une
contraction au lendemain des années 1987 avant l’envolée du même ratio à
partir des années 1994.
La tendance à la baisse du même ratio sur la période 1995 à nos jours traduit la
maîtrise du niveau de l’encours par rapport à l’évolution du PIB.
Cet indicateur est alors révélateur (de manière marginale) de la bonne maîtrise
de l’évolution de l’encours par rapport à celle du PIB.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 33
SECTION 2 : ANALYSE DE LA VIABILITÉ DE LA DETTE
EXTÉRIEURE DU BÉNIN.
PARAGRAPHE 1 : POLITIQUE DE FINANCEMENT POST-PPTE
DANS UN CONTEXTE DE SOLVABILITÉ
RESTAURÉE.
Le contexte de solvabilité restaurée pose la question de la politique de
financement des bailleurs traditionnels dans les pays post-PPTE et, plus
précisément, celle des modalités d’une intervention en prêts, en particulier pour
les bailleurs bilatéraux1. Son actualité est d’autant plus pressante que les
besoins de financement pour la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le
Développement (OMD) sont considérables. Le déficit de financement pour
l’ensemble des pays les moins avancés (PMA) et des pays à faibles revenus
(PFR) est estimé à 135 milliards de dollars à l’horizon 2015 (Pnud, 2005).
Les financements par prêts sont économiquement plus adaptés que les
dons quand ils n’entament pas la solvabilité du pays et lorsque le taux d’intérêt
servi est inférieur au taux de croissance de l’économie. En effet, les prêts
concessionnels permettent des volumes de financement plus importants que les
dons surtout s’ils peuvent être combinés aux ressources levées sur le marché
(effet volume). Néanmoins, Bulow et Rogoff (2005) estiment que le risque de
non-viabilité généré par de nouveaux prêts dépasse tous les bénéfices que l’on
peut en attendre. Il n’en demeure pas moins qu’abandonner l’option d’un prêt
concessionnel a un coût car, dans un contexte de ressources publiques limitées,
il conduit à renoncer à des projets importants.
En outre, le risque-pays attribué aux PMA par les marchés est tel que ces
pays n’ont de facto pas accès aux financements à long terme sur les marchés de
1- Par une sorte de règle tacite, les bailleurs bilatéraux interviennent en effet généralement sous forme de dons dans les PMA et les PFR alors que les institutions multilatérales type IDA et FAD continuent à intervenir en prêts.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 34
capitaux internationaux (primes de risques prohibitives). Il peut ainsi arriver
qu’un pays ne puisse financer ses investissements publics porteurs d’externalités
positives – et donc de croissance à long terme (infrastructures, investissement en
capital humain, santé, etc.) – faute d’accès à des financements par prêts. En
l’absence d’un véritable accès aux marchés financiers des pays concernés, un
financement par prêts concessionnels permet de relâcher la contrainte de
liquidité et favorise la croissance.
Un financement par prêts peut en outre comporter également des
incitations positives pour le pays qui en bénéficie2, l’exigence de
remboursement peut induire une meilleure discipline budgétaire (gestion active
des charges financières récurrentes) et renforcer ainsi la crédibilité du pays pour
un accès futur aux circuits de financement privés.
Enfin, la faiblesse des volumes de financements gratuits ou
concessionnels par rapport à la demande actuelle pousse certains pays à se
réendetter à des conditions onéreuses et peu transparentes auprès de bailleurs
émergents (n’appartenant ni au Comité d’aide au développement de l’OCDE
[CAD] ni au Club de Paris), qui n’ont aucune obligation de se montrer attachés
aux questions de gouvernance. Ces bailleurs bénéficient ainsi de l’effort collectif
fait par la communauté internationale en termes d’annulation de la dette, sans y
avoir eux-mêmes participé (phénomène de "passager clandestin" ou free
riding).
Ce contexte légitime l’octroi de nouveaux prêts concessionnels par des
bailleurs bilatéraux traditionnels. Mais il ne faut pas oublier que les précédentes
crises de la dette sont apparues malgré ce type de prêts, ce qui impliquait déjà un
faible poids relatif du service de la dette. Ce phénomène est d’autant plus
troublant que depuis les années 1980, les PFR n’ont reçu de prêts que d’un
nombre très réduit d’organismes, essentiellement le FMI et l’IDA.
2 - Une étude du FMI (Gupta et al. 2004) a évalué l’impact relatif des dons et des prêts concessionnels sur l’effort de collecte fiscale d’un pays : il semblerait que l’aide accordée sous forme de prêts soit associée à un effort fiscal accru par rapport à celle accordée sous forme de dons (une hausse des dons provoquant un recul des recettes
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 35
Il est donc difficile de soutenir qu’il y ait eu à l’époque un problème de
coordination des créanciers ou un problème d’information.
Le risque de surendettement est dès lors toujours présent, d’autant que les
régimes de croissance de ces pays dépendent encore largement de facteurs
exogènes.
La décision d’accorder de nouveau prêts aux PMA et aux PFR ne pourra
être prise que si les bailleurs multi et bilatéraux ont de bonnes raisons de penser
que cet endettement ne mènera pas à de nouvelles crises de la dette. Elaboré
conjointement par le FMI et la Banque Mondiale, le CVD vise donc à encadrer
le processus de réendettement des pays post-PPTE en limitant son rythme en
fonction de ratio d’endettement dont la valeur pertinente varie selon la qualité
des politiques économiques suivies et des institutions en place.
PARAGRAPHE 2 : LES INDICATEURS DE LA VIABILITÉ DE LA DETTE
Préalablement à l’introduction de l’initiative PPTE en 1996, la viabilité de
la dette des pays à faibles revenus était évaluée à l’aide des ratios du stock de
dette au PNB et/ ou aux exportations, ainsi que du service de la dette aux
exportations. Avec l’introduction de l’initiative PPTE en 1996 et son
renforcement en 1999, les IBW préconisent certains indicateurs clés et les seuils
pour évaluer la viabilité de la dette à long terme d’un pays. C’est ainsi qu’ils ont
établi le nouveau Cadre de la Viabilité de la Dette (CVD). Outre ces indicateurs,
il existe des critères applicables à l’échelle régionale tels que les plafonds sur les
ratios dette / PIB découlant des initiatives de convergence régionale notamment
celles de l’UEMOA.
Dans le cadre de l’IPPTE, la dette est déclarée insoutenable si, au point de
décision, un des ratios suivants est supérieur au seuil. La dette excédentaire est
alors annulée en plusieurs étapes. Les allègements sont calculés à partir du stock
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 36
pré date butoir de la dette après traitement traditionnel (terme de Naples) au club
de Paris.
Tableau 3 : Indicateurs de la viabilité de la dette des PPTE.
Indicateurs et seuils P.P.T.E.
Valeur actualisée de la dette aux
exportations
150%
Valeur actualisée de la dette aux
recettes budgétaires intérieures
250%
Service de la dette aux exportations < 15% - 20% au point d’achèvement. Source : Programme de renforcement des capacités des Pays pauvres très endettés (2005)
Au cours des récentes années, les IBW ont examiné comment évaluer la
viabilité de la dette plus largement que dans le contexte de l’initiative PPTE, de
manière à conseiller tous les pays à faible revenu sur de nouveaux emprunts
assurant ainsi la viabilité de la dette à long terme. Les considérations des IBW
s’appuient sur trois questions clés :
Le besoin d’évaluer la viabilité de la dette d’une manière plus universelle
est lié au nouveau critère de l’IDA concernant l’éligibilité aux dons, introduit
par l’IDA-14. Bien que l’IDA-13 prévoyait un mécanisme de don, celui-ci
imposait un certain nombre de critères pour en évaluer l’éligibilité, tandis qu’au
titre de l’IDA-14 l’éligibilité d’un pays aux dons de l’IDA est estimée
uniquement sur la base du risque d’endettement du pays.
Le problème des « profiteurs » (free-riders), que les IBW définissent
comme la « situation dans la quelle l’allègement concessionnel de la dette ou
des dons peuvent profiter par ricochet aux prêteurs qui offrent des prêts
concessionnels ». En d’autres termes, si les pays post-PPTE qui reçoivent
actuellement des prêts fortement concessionnels ainsi que des dons des
créanciers ou donateurs multilatéraux et bilatéraux commencent à emprunter de
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 37
manière moins concessionnelle auprès d’organismes de crédit à l’exportation ou
de gouvernements bilatéraux hors OCDE (Chine et Inde, par ex.), cela risque
d’accroître leur risque de futur endettement.
A mesure qu’un nombre croissant de pays achève l’IPPTE et l’IADM, il
est nécessaire de suivre la viabilité de la dette de manière à prévenir de futurs
problèmes d’endettement. C’est pour cela que la nouvelle approche des IBW- à
travers le Cadre de viabilité de la Dette (CVD) – privilégie les projections
futures, au lieu de l’approche historique de l’IPPTE.
En théorie il existe cinq indicateurs. Dans la pratique toutefois, les IBW
privilégient surtout les ratios au PIB et aux exportations. Elles estiment que les
données nationales sur les recettes sont moins fiables et moins comparables
entre pays que les données sur le PIB et les exportations. Les indicateurs liés aux
recettes ont été exclus lors de l’évaluation de l’éligibilité aux dons de l’IDA-14.
Tableau 4 : Indicateurs et seuils de viabilité de la dette du CVD Indicateurs et seuils du cadre de la viabilité de la dette (CVD)
Evaluation de la solidité institutionnelle et de la qualité des politiques
Indicateurs
Insuffisantes Moyennes Satisfaisantes Valeur actuelle dette/PIB 30% 40% 50% Valeur actuelle dette/ Exportations
100% 150% 200%
Service dette/exportations 15% 20% 25% Valeur actuelle dette/recettes budgétaires
200% 250% 300%
Valeur dette/recettes budgétaires
25% 30% 35%
Source : Programme de renforcement des capacités des Pays pauvres très endettés (2005) Tel qu’illustré au tableau 4, les pays dotés de solides politiques et
institutions sont censés être en mesure de maintenir un fardeau de la dette
nettement plus élevé que les pays moins performants. En conséquence, les seuils
appliqués aux pays les plus performants sont considérablement plus élevés que
les seuils à partir desquels la dette d’un pays moins performant est jugée non
viable. La justification de cette méthode est purement empirique. Au-delà de ces
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 38
seuils, on constaterait historiquement que les pays ont rencontré des difficultés
de remboursements. Par ailleurs, elles supposent que les réformes contenues
dans le DSCRP et l’amélioration de la cohésion sociale due à l’accroissement
des dépenses sociales sont de nature à engendrer une rupture par rapport aux
tendances antérieures.
Les ratios d’endettement utilisés pour évaluer la viabilité par rapport aux
seuils sont issus du nouveau modèle CVD des IBW. Cette méthodologie du
CVD diffère de celle de l’IPPTE surtout pour les indicateurs d’endettement.
Paragraphe 3 : Les plafonds d’endettement selon le CVD
Le CVD (FMI/Banque mondiale, 2004) est destiné à fixer un plafond
d’endettement au-delà duquel le risque de non remboursement devient très
important. Il vise à encadrer le processus de réendettement des pays post-PPTE
en limitant son rythme en fonction de la qualité de leurs politiques économiques
et de leurs institutions. Les pays sont classés en trois groupes, selon la qualité de
ces politiques (estimées à partir des CPIA), faible, moyenne et forte. Dans le
CVD, chaque groupe de pays a des seuils d’endettement maximum qui lui sont
propres et qui dépendent de la capacité à gérer la dette telle qu’elle est appréciée
par le CPIA3. Le niveau des seuils a été longuement débattu au sein des IBW,
avant d’aboutir aux taux finalement retenus qui reflètent des compromis à
plusieurs niveaux, notamment sur les montants de financements (FMI/Banque
mondiale, 2005 ; Ocampo et al., 2007).
Tableau 5 : Seuils d’endettement par les différentes catégories de pays selon le
CPIA. VAN du stock de dette en% Service de la dette en %
Exportations PIB Recettes fiscales Exportations Recettes
fiscales Faible qualité CPIA< 3,25
100 30 200 15 25
3 Le Country Policy and Institutional Assessment (CPIA – Evaluation de la politique et des institutions d’un pays est un indice de la notation de la qualité des politiques et des instructions d’un pays.. Il est mesuré à travers une grille d’analyse comportant 16 critères, regroupés en quatre volets ayant une égale pondération : (i) la gestion économique, (ii) les politiques structurelles, (iii) les politiques pour la cohésion sociale et l’équité et (iv) la gestion publique et les institutions. Pour plus de détails, se référer à l’annexe 1 du rapport des administrateurs de l’IDA sur la quatorzième reconstitution des ressource http/www.wortdbank/images/fr/IDA14reportFrench_final.pdf
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 39
Qualité moyenne 3,25<CPIA<3 ,75
150 40 250 20 30
Forte qualité CPIA >3,75
200 50 300 25 35
Source : CVD. FMI/Banque mondiale
PARAGRAPHE 4 : VIABILITÉ DE LA DETTE APRES L’IADM ET
ÉLIGIBILITÉ AUX PRÊTS : (CAS DU BENIN)
Vingt et un (21) des vingt-trois (23) pays ayant bénéficié des initiatives
PPTE (Pays pauvres très endettés) et IADM (Initiative d’allègement de la dette
multilatérale) ont des niveaux d’endettement inférieurs aux seuils de viabilité de
la dette extérieure publique tels que définis dans le (Cadre de viabilité de la
dette) CVD.
D’après les plus récentes analyses de viabilité de la dette (AVD), sur les
19 pays africains concernés par des annulations P.P.T.E et IADM, huit sont
classés en risque faible de crise de la dette (Cameroun, Madagascar, mali,
Mozambique, Ouganda, Sénégal, Tanzanie, Zambie), neuf en risque modéré
(Bénin, Burkina Faso, Ethiopie, Ghana, Malawi, Mauritanie, Niger, Sao Tomé et
Sierra Leone) et deux (Gambie et Rwanda) en risque fort.
Les pays classés en risque faible ou modéré de crise de la dette sont
éligibles totalement (feu vert) ou en partie (feu orange) aux prêts concessionnels
de l’IDA4(International Développement Association) et du FAD (Fonds Africain
de Développement). Le niveau de risque qui découle des AVD de l’IDA et du
FAD influe sur l’enveloppe que les pays reçoivent et sur sa répartition entre
prêts et dons.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 40
Ainsi pour le Bénin, l’Analyse de la viabilité de la dette ressort les
indicateurs suivants : Tableau 6 : Impact de l’IADM sur les ratios de viabilité de dette dans les différents pays
Classement du risque de défaut de crise de la dette à partir des dernières AVD (publiées fin mai 2008) : Cas du Bénin
Pays/Date de la Dernière AVD
Qualité des Politiques, Base CPIA 2006
Seuils CVD (%) Ratios 2006 Après IADM(%)
Classement "risque"4
Bénin VAN stock/PIB = 150 86,3 Moyenne VAN stock/PIB = 40 10,6 Jan. 2008 Service/Exp. = 20 5,5
Risque modéré feu orange
Le CVD reste toutefois perfectible, notamment en ce qui concerne la méthode
d’analyse de la viabilité, la façon dont le risque est pris en compte, mais aussi le
rôle que joue la bonne gouvernance dans cette nouvelle approche. Au-delà de
ces aspects techniques, il convient aussi de s’interroger sur l’objectif poursuivi
grâce à un instrument de ce type : s’agit-il seulement d’éviter des déboires futurs
aux prêteurs actuels ou potentiels ou bien de promouvoir la croissance et la
réduction de la pauvreté dans les pays emprunteurs.
PARAGRAPHE 5 : CADRE ET HORS-CADRE : LES LIMITES DE
L’ANALYSE PROPOSÉE PAR LE CVD
Les seuils ;
L’utilisation de seuils pour apprécier la viabilité de la dette risque de
conduire à des diagnostics erronés. Comme nous l’avons vu, les seuils ne
peuvent pas rendre complètement compte de la dynamique de la dette. De plus,
la critique concernant l’arbitraire des seuils retenus, souvent émise à propos de
l’Initiative PPTE, demeure. Les différences de seuils retenus entre l’initiative
PPTE initiale et l’initiative renforcée montrent bien que les décisions sont plutôt
le résultat de compromis que des valeurs résultant d’une analyse sérieuse des
défauts de paiement parmi les PFR. 4 Les classements de l’IDA peuvent différer de ceux des AVD émanant du FMI et de la Banque mondiale. C’est notamment le cas pour le Ghana (feu vert), le Honduras (feu vert), et Sao Tomé (feu rouge) concernant l’année fiscale 2007.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 41
Si les seuils retenus dans l’Initiative PPTE initiale pouvaient se targuer
d’une certaine validation empirique (Cohen, 1996), il n’en va pas de même pour
ceux de l’initiative renforcée. L’analyse de Kraay et Nehru (2004) ne fait pas
ressortir de seuils. Elle montre que la probabilité de « détresse de la dette » est
significativement liée au niveau de gouvernance mesuré par le CPIA ainsi qu’à
d’autres variables (ratio d’endettement, croissance, chocs). Pour trouver un seuil
avec cette approche, il faut se fixer une probabilité de détresse, ce qui relève
nécessairement d’un certain arbitraire. Pour illustrer leurs résultats, Kraay et
Nehru calculent qu’avec une probabilité de détresse de 25% (ce qui correspond
à la moyenne de leur échantillon), le seuil d’endettement d’un pays avec une
croissance égale à la moyenne de l’échantillon5 est de 100% environ si le CPIA
est égal à 3 et de 300% si le CPIA est de 4,2 (contre 200-250% pour tous les
pays dans l’Initiative PPTE initiale, 150% dans l’initiative PPTE renforcée et
entre 100 et 200 suivant le CPIA dans le CVD). En tout état de cause, l’analyse
ne fait pas ressortir de seuils particuliers.
L’instabilité et les chocs
L’instabilité joue un rôle important pour expliquer les problèmes
d’endettement rencontrés par les PFR (Martin, 2004). Dans leur cas, cette
instabilité concerne essentiellement les prix des matières premières exportées et
les chocs sur les niveaux de production (climat, invasions acridiennes, etc.)
d’autres chocs importants portent sur les prix des produits importés comme le
pétrole, et sur les taux de change. Ils se traduisent sur les finances publiques au
niveau des recettes (mais surtout indirectement, puisque les taxes sur les
exportations ont pratiquement disparu) et au niveau des dépenses (soutien des
cours pour stabiliser les prix aux producteurs et subventions aux prix des
produits pétroliers par exemple). Mais l’instabilité dépasse le cadre purement
5 VA de la dette divisée par les exportations de biens et de services.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 42
économique : elle concerne les institutions elles-mêmes et s’étend aux tensions
sociales et aux risques de conflit.
L’importance des chocs sur la viabilité de la dette ressort aussi du travail
empirique de Kraay et Nehru (2004), même lorsque l’on tient compte du niveau
de CPIA. Ce point est important car, plus que les chocs eux-mêmes, la résilience
des économies (leur capacité à gérer les chocs) et leur flexibilité jouent un rôle
majeur pour assurer la viabilité de la dette – résilience et flexibilité que l’on peut
supposer associées à des niveaux élevés de CPIA. Ces auteurs en tirent
explicitement la conclusion que des seuils différenciés sont plus appropriés, tant
en terme de qualité de gestion que d’exposition aux chocs.
Le fardeau virtuel de la dette
La fixation des seuils ne fait aucune référence aux travaux sur le fardeau
virtuel de la dette, qui montrent qu’au-delà de certains seuils, la dette exerce un
effet dépressif sur l’investissement et la croissance. Ces analyses ont pourtant
servi de justification théorique pour les réductions de dette et auraient pu être
mobilisées par enrichir les réflexions. Cela conduirait à intégrer dans les
projections une relation entre le niveau d’endettement et le taux de croissance de
l’économie (voir Pattillo et al., 2002 et 2004, pour une qualification). Même si la
quantification de cette relation reste sujette à caution dans le cas des PFR – les
travaux économétriques manquant de robustesse (Idlemouden et Raffinot, 2005)
– il serait souhaitable de l’intégrer dans les AVD. Dans le même sens, Wyplosz
(2005) s’étonne que les AVD ne tiennent pas compte de la relation entre le taux
d’intérêt payé et le taux d’endettement (croissance du spread) dans le cas des
pays émergents.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 43
La politique des bailleurs de fonds en matière de dons
Dans les pays les plus pauvres, l’analyse de la viabilité de la dette dépend
de manière cruciale de l’hypothèse posée sur le niveau des dons accordés à
l’Etat dans la période de projection (ou, de manière plus technique, sur le taux
de concessionalité des nouveaux flux de financement). La viabilité dépend donc
aussi de la politique des donateurs qui peuvent ainsi prendre en charge,
directement ou indirectement, une partie de leurs propres remboursements. Il
faut souligner en effet que les deux tiers des financements concessionnels sont
des dons. L’analyse de la viabilité ne porte donc que sur des flux résiduels et
devrait au moins définir une approche standardisée à ce niveau. Ce n’est pas le
cas actuellement, même si les AVD présentent souvent un scénario alternatif de
financement « moins concessionnel » que dans le scénario de référence.
Evidemment, il s’agit d’un point très délicat, puisqu’il faut rendre explicite un
montant prévisionnel de ressources extérieures et sa répartition probable entre
prêts et dons. Mais c’est justement sur ce type de questions qu’une AVD peut
faire avancer les choses, non pas en donnant une fausse impression de
scientificité, mais en provoquant une discussion entre bailleurs de fonds et
gouvernement concerné, de manière à coordonner les anticipations. Cela
suppose que le CVD soit conçu comme un exercice effectivement participatif.
Dette extérieure contre dette intérieure
Le CVD continue à privilégier l’analyse en termes de dette extérieure.
Nous savons pourtant que dans les pays les plus pauvres, la dette intérieure pose
un problème grandissant. Même si le montant est plus ou moins identique dans
les PFR, il y a bien deux problèmes macro-économiques différents. Bien
entendu, le remboursement de la dette publique extérieure pose un problème de
réserve en devises mais, également, le problème le plus grave se situe au niveau
des finances publiques (en monnaie locale). Nous constatons que, pour la
plupart des pays bénéficiaires de l’Initiative PPTE, le financement extérieur du
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 44
déficit public conduit à une accumulation de réserves de change6. Dans le CVD,
la dette publique est formellement prise en considération, mais les tests
concernant sa viabilité restent quelque peu « facultatifs ». la question est alors
posée de savoir quel est le but de l’exercice : vérifier que les créanciers
extérieurs seront bien remboursés ou vérifier que les Etats restent globalement
solvables ? L’argument habituellement avancé a trait à la mauvaise qualité des
données sur la dette intérieure (ce qui est souvent dû au fait que la dette
intérieure est composée en grande partie d’arriérés de paiement peu ou mal
retracés par la comptabilité publique). Mais c’est une bonne occasion de
s’attaquer à ce problème et de chercher à améliorer l’information sur la dette
intérieure.
Sur un plan technique, l’insistance sur la dette extérieure devrait conduire
à prendre en compte explicitement dans les projections, les variations futures du
taux de changes ainsi que leur impact sur les autres variables de la projection et,
en premier lieu, sur la croissance (en liaison avec la recherche d’une politique de
change pertinente). La variation des taux de change nominal et réel peut avoir un
impact important sur la viabilité de la dette. En fait, les prévisions des taux de
change étant très peu fiables, surtout sur des périodes très longues, la plupart des
AVD préfèrent (probablement à juste titre du point de vue opérationnel) faire
l’impasse sur cette question. Cela limite toutefois la pertinence de l’exercice
(Wyplosz, 2005), notamment parce qu’une variation du taux de change peut
faire partir des moyens de restaurer la soutenabilité de la dette.
6 Les CVD devraient logiquement définir une procédure spéciale pour les pays de la zone franc, puisque la garantie de change du Trésor français devrait conduire à poser systématiquement le problème en terme de dette publique. Cela n’a rien d’anecdotique étant donné le grand nombre de pys de la zone franc éligibles aux initiatives PPTE et IADM
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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CHAPITRE IIIÉVALUATION ÉCONOMÉTRIQUE DE L’IMPACT DE LA DETTE EXTÉRIEURE SUR LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE
Ce chapitre examine les explications empiriques du taux de croissance
réelle par habitant du PIB du Bénin à travers l’étude de la stationnarité et de la
cointégration (section 1).
Il s’agit de présenter l’estimation de la relation de long terme ainsi que la
détermination de l’ordre d’intégration des variables qui autorise l’étude de la
cointégration et l’élaboration de modèle à correction d’erreur.
La section 2 recherche les limites de l’étude (Paragraphe 1) et formule des
suggestions (Paragraphe 2).
SECTION 1 : ÉTUDE DE LA STATIONNARITÉ ET COINTÉGRATION
PARAGRAPHE 1 : RAPPEL DU MODÈLE ET DETERMINATION DES
DEGRÉS D’INTÉGRATION DES VARIABLES
A- Rappel du Modèle
Le modèle estimé est défini comme suit :
Txcroist = ao + a1 (Pibh)t-1 + a2Logtxpopt + a3Apdt + a4Logtxinvt + a5Opent +
a6Servexpt + a7Dextt + a8(Dext) t² + it
Où les différentes variables représentent ce qui suit :
• Txcrois : le taux de croissance réelle par habitant du PIB ;
• (Pibh)t-1 : le revenu national réel par habitant décalé d’une période ;
• Logtxpop : le taux de croissance démographique (en logarithme) ;
• Apd : l’indicateur de l’aide publique au développement de tous les bailleurs
de fonds ;
• Logtxinv : taux d’investissement public (en logarithme) ;
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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• Open : un indicateur de l’ouverture commerciale (les exportations et les
importations en pourcentage du PIB) ;
• Servexp : le total du service de la dette publique en pourcentage des
exportations ;
• Dext : les variables indicatives de l’encours de la dette en valeur nominale
soit en pourcentage des exportations soit en pourcentage du PIB ;
• (Dext)² : ces mêmes variables de l’encours de la dette mais cette fois ci
élevées au carré ;
• It : représente les perturbations aléatoires, suit une loi normale de moyenne
nulle et de variance constante.
Où ao ……. a8 sont des valeurs constantes.
B- Détermination de l’ordre d’intégration des variables
Depuis que l’économétrie a perçu que la validité des estimations est
tributaire de la stationnarité des variables, il est recommandé de toujours
commencer par chercher l’ordre d’intégration des variables dans tout travail
d’Econométrie.
Cela est d’autant plus important et pertinent dans la présente étude que les
variables utilisées dans le modèle, sont toutes des variables macroéconomiques,
qui d’ordinaire, sont non stationnaires.
1- Règles de décision
La détermination de l’ordre d’intégration des variables est faite suivant les
tests de racine unitaire. A ces tests, appliqués à l’aide du logiciel Eviews 5 sont
attachées des règles de décisions précises permettant de se prononcer sur l’ordre
d’intégration des variables.
- Dans les différents tests appliqués ici, le nombre de retards retenus est
celui correspondant au test pour lequel la statistique d’Akaike (Akaike,
info critérion) est la plus faible.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 47
- Le nombre de retards étant reconnu sur la base de la statistique d’Akaike,
la stationnarité de la variable est jugée à partir de la comparaison entre les
statistiques ADF (Augmented Dikey Fuller test statistic) et critical value
(Mackinnon critical values for rejection of hypothesis of unit root c’est-à-
dire la valeur critique de Marckinnon).
Les hypothèses alternatives qui se présentent à l’issue du test sont :
H0 : racine unitaire ou non stationnarité
H1 : non racine unitaire ou stationnarité
Si |ADF| < valeur critique de Mackinnon alors l’hypothèse H0 est acceptée.
Par conséquent la série est non stationnaire ;
Si |ADF| > valeur critique de Mackinnon alors l’hypothèse alternative H1 est
acceptée. Cela traduit la stationnarité de la série.
Les tests sont appliqués à niveau, en différence première, au cas où il y aurait
présence de racine unitaire à ce stade.
- L’étude de la cointégration se fait sur la base de la stationnarité des séries.
Les séries étant stationnaires et intégrées d’ordre différent, le test de
cointégration se fera par la méthode de JOHANSEN.
Des MCE peuvent alors être élaborés et estimés à partir de la relation de long
terme estimée. Les MCE fournissent les élasticités des variables aussi bien pour
le court terme que pour le long terme. Ils traduisent le degré d’influence des
variables exogènes sur la variable endogène.
- L’étude considère le seuil de 5% pour la validation des hypothèses.
2- Tests de stationnarité
Par souci de synthèse, compte tenu du nombre important des tests appliqués, le
tableau ci-dessus résume les résultats des tests de racine unitaire appliqués à
niveau à l’ensemble des variables.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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Tableau N°7 : Résultats des tests de stationnarité à niveau
Variables Statistiques
A.D.F
Valeurs
critiques 5%
Valeurs critiques
1% Résultats
Txcrois - 4,770438 - 3,562882 - 4,284580 Txcrois est I (0)
Apd - 2,201689 - 3,562882 - 4,284580 Apd n’est pas I (0)
Dext 0,367112 - 3,562882 - 4,284580 Dext n’est pas I (0)
Open - 3,127041 - 3,568379 - 4,296729 Open n’est pas I (0)
Pibh - 1,847109 - 3,562882 - 4,284580 Pibh n’est pas I (0)
Servexp - 1,845354 - 3,568379 - 4,296729 Servexp n’est pas I (0)
Logtxinv - 2,271058 - 3,562882 - 4,284580 Log txinv n’est pas I (0)
Logtxpop - 4,507315 - 3,562882 - 4,284580 Logtxpop est pas I (0)
(Dext) ² - 0,425028 - 3,562882 - 4,284580 Dext² n’est pas I (0) Source : Les auteurs du présent document
I (0) : Stationnaire à niveau
Les tests de racine unitaire sur toutes les variables aboutissent aux résultats
suivants :
* / ADF / < Valeur critique de MACKINNON au seuil de 5% pour les variables
Apd, Dext, Open, Pibh, Log txinv, (Dext)²,
Donc ces 7 variables ne sont pas stationnaires à niveau.
* / ADF / > Valeur critique de MACKINNON au seuil de 5% pour les variables
txcrois et Logtxpop. Ces 2 variables sont alors stationnaires à niveau.
L’examen de l’ordre d’intégration des 7 variables non stationnaires à niveau se
poursuit en différence première et les résultats sont fournis par le tableau
suivant.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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Tableau N°8 : Résultats des tests de stationnarité en différence première
Variables Statistiques
A.D.F
Valeurs
critiques 5%
Valeurs
critiques 1%
Résultats
Apd - 4,977680 - 3,568379 - 4,296729 I (1) Dext - 5,221522 - 3,568379 - 296729 I (1) Open - 6,397979 - 3,574244 - 4,309824 I (1) Pibh - 4,673509 - 3,568379 - 4,296729 I (1) Servexp - 5,967143 - 3,580623 - 4,323979 I (1) Log txinv - 3,811172 - 3,568379 - 4,296729 I (1) (Dext)² - 5,648407 - 3,568379 - 4,296729 I (1)
Source : Les auteurs du présent document
NB : I(1) = Intégré d’ordre 1
Les résultats des tests de racine unitaire en différence première permettent ainsi
l’étude de la cointégration.
En effet pour toutes les variables :
/ADF / > valeur critique de MACKINNON au seuil de 5%.
Ce qui permet d’accepter l’hypothèse alternative H1 de stationnarité en
différence première des variables correspondantes. Ainsi, on peut procéder à la
construction de Modèle à Correction d’Erreur (MCE) encore appelé «Modèle à
Correction d’Équilibre » déduit de la relation de long terme.
L’estimation des MCE donne des élasticités aussi bien de court terme que
de long terme des variables du modèle, permettant de juger directement du degré
de liaison causale entre les variables explicatives et le taux de croissance.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 50
PARAGRAPHE 2 : COINTEGRATION ET VALIDATION DES
HYPOTHESES
A- Test de cointégration, modèle de long terme et modèle à correction
d’erreur
1- Test de cointégration.
Dans notre étude, les séries n’étant pas intégrées du même ordre, le test de
cointégration de JOHANSEN s’impose.
Les résultats du test de cointégration de JOHANSEN indiquent l’existence
de six (6) relations de cointégration à 5% lorsqu’on prend pour méthode de
décision la statistique de la trace : (Trace Test). Par contre, en se basant sur le
maximum de vraissemblance (Maximum Eigenvalue), le test indique l’existence
de quatre (4) relations de cointégration au seuil de 5%.
Après une analyse minutieuse des relations de cointégration, nous
sommes parvenus à retenir une seule relation de cointégration, ce qui signifie
que les sentiers de croissance des variables sont les mêmes et on a une relation
d’équilibre de long terme entre ces variables.
Nous sommes alors amenés à estimer un M.C.E.
2- Modèle de long terme.
a- Résultats de l’estimation
Nous utiliserons la méthode des Moindres Carrés Ordinaires (MCO) pour relier
les différentes variables indépendantes à la variable dépendante.
L’estimation par les MCO recherche les valeurs des coefficients de l’équation
qui minimisent la somme des carrés des erreurs.
Les résultats de l’estimation se présentent dans le tableau ci-après :
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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Tableau N°9 : Résultat de l’estimation du modèle de long terme
Variables Coefficients t de student
C 8,210959 0,532846
Apd 2,4310-8 2,421225
Dext 0,289269 1,799533
(Dext)² - 0,002537 - 2,209283
Open 0,462290 4,015758
Pibh (- 1) - 0,078940 - 1,787162
Servexp 0,239571 0,897929
Logtxinv - 2,278745 - 0,896521
Log txpop - 13,02210 - 1,562367
• R² = 0,5355 ; DW = 1,92 ; Prob (F – statistic) = 0,015
• R² = 0,5355 ce qui prouve que le modèle a un pouvoir explicatif
acceptable du txcrois. En effet, 53,55% du txcrois sont expliqués par les
variables prises en compte dans ce modèle.
• Les résidus ne sont pas autocorrolés.
• Le test d’hétéroscédascité de white permet de conclure que les résidus
sont homoscédastiques.
• Le test de normalité de Jacque Berra révèle que les résidus sont normaux
• La probabilité de FISHER indique la significativité globale du modèle
Les résultats des tests sont au niveau des annexes.
b- Test de Ramsey sur le modèle de long terme
L’objectif de ce test est de savoir si le modèle souffre d’une omission ou
d’une insuffisance de variables pertinentes et ceci en introduisant une variable
fictive.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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Ce test consiste à vérifier la significativité du modèle à travers l’effet de la
variable fictive introduite. Si elle n’est pas significative, alors la spécification du
modèle est complète c'est-à-dire que le modèle a pris en compte les variables
pertinentes qui interviennent dans l’explication de la variable dépendante.
Si par contre, la variable fictive est significative alors les variables
susceptibles d’influencer les variations de la variable dépendante seront
introduites.
D’après le test de Ramsey sur le modèle de long terme, la probabilité de la
variable fictive est de 0,1062 donc supérieure à 5% ; le modèle ne souffre alors
d’aucune omission (pertinente).
3- Modèle de court terme.
Le modèle à correction d’erreur traduit la relation de court terme entre la
variable endogène et les variables exogènes. Nous l’avons estimé en utilisant la
méthode d’estimation à deux (02) étapes.
txcrois = a0 + a1 D (Pibh)t-1 + a2 logtxpop t
+ a3 D (Apd)t + a4 D (logtxinv) t
+ a5 D (Open)t + a6 D (Servexp)t
+ a7 D (Dext)t + a8 D (Dext) 2t
+ Résid 1 (-1) + μ t
L’estimation du modèle a donné les résultants suivants:
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Tableau N°10 : Résultat de l’estimation du modèle de court terme
Variables Coefficients t de student
C 6,620501 1,133337
D (Apd) 6,46.10-9 0,551777
D (Dext) - 0,177919 - 1,269547
D (Dext)² 0,000402 0,465767
D (Open) 0,620983 6,088591
D (Pibh) (- 1) 0,210906 3,168453
D (Servexp) 0,101044 1,277406
Logtxinv 0,539808 0,491253
Log txpop - 5,917627 - 1,156095
Résidu 1(- 1) - 0,900466 - 2,866207
DUM1 -1,038188 -0,513744
DUM2 0,515286 0,438229
• R² = 0,7918 ; DW = 1,46828 ; Prob (F – statistic) = 0,000353
B- Interprétation et validation des hypothèses
1- Interprétation des résultats
a- Long terme
Dans l’ensemble, le modèle est cohérent du point de vue de la théorie
économique pour les variables :
Apd : l’indicateur de l’aide publique au développement de tous les bailleurs de
fonds ;
Open : un indicateur de l’ouverture commerciale (les exportations et les
importations en pourcentage du PIB) ;
Pibht-1 : le revenu national réel par habitant décalé d’une période ;
logtxpop : le taux de croissance démographique (en logarithme) ;
logtxinv : taux d’investissement public (en logarithme) ;
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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Dext : les variables indicatives de l’encours de la dette en valeur nominale soit
en pourcentage des exportations soit en pourcentage du PIB ;
(Dext) ² : ces mêmes variables de l’encours de la dette mais cette fois ci élevée
au carré ;
En effet, les résultats de l’estimation montrent que :
• L’aide publique au développement, de coefficient positif très faible est
significative. Ceci justifie la médiocrité de son importance sur le taux de
croissance ;
• Le coefficient du taux d’ouverture commerciale a un signe positif et
significatif traduisant que l’ouverture commerciale a un impact positif sur
le taux de croissance ;
• Le revenu réel par tête décalé n’est pas significatif mais son signe
confirme la littérature à savoir qu’elle influence négativement ;
• L’élasticité du taux de croissance de la population est négative et non
significative à long terme.
La théorie économique vous enseigne une variété de conceptions quant à
l’impact de cette variable sur la croissance économique.
Ainsi, certains auteurs comme BOSERUP estiment que la croissance
démographique est un atout pour la croissance économique, d’autres comme
MALTHUS estiment qu’à long terme la croissance démographique constitue un
frein pour la croissance économique.
• Le Taux d’investissement public a un impact négatif et non significatif sur
le taux de croissance réel du PIB par habitant. Ce qui est contraire à la
théorie selon laquelle l’investissement public par les effets qu’il induit
favorise la croissance donc le développement.
En effet il est possible de voir ce signe lorsque les investissements réalisés
ne sont pas utiles aux populations ou tout simplement une mauvaise utilisation
de ces infrastructures peut induire des flux de recettes négatifs donc des
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 55
financements pour l’entretien assez coûteux et ralentirait par ricochet la
croissance.
• Le service de la dette n’a pas le signe attendu et reste non significatif.
• Dans l’équation de croissance on a introduit l’indicateur de dette sur le
PIB au carré dans le but d’estimer une courbe de Laffer entre la dette et la
croissance et de cette manière, connaître le niveau de la dette pour lequel
l’effet sur la croissance est optimal et le degré à partir duquel il devient
négatif. En effet, nos résultats montrent qu’il y a une relation non linéaire
entre la dette et la croissance car le coefficient de la dette extérieure sur le
PIB est positif et significatif à 10% tandis que celui de la dette extérieure
sur le PIB élevé au carré est négatif et significatif à 5%
Ainsi le cas du Bénin démontre un comportement comme celui décrit par
la courbe de Laffer. En maximisant l’équation de croissance quadratique en ce
qui concerne la dette extérieure, on a trouvé que le niveau optimal pour la
croissance correspond à une proportion de 57,01% de cette dette extérieure sur
le PIB. A partir de ce niveau la contribution marginale de la dette à la croissance
diminue progressivement.
A propos de la théorie du surendettement (debt overhang), elle est vérifiée
par les conclusions de nos estimations. Ainsi, son effet désincitatif à travers une
taxation marginale de la dette sur les investissements suite à une grande
probabilité de l’accroissement de la pression fiscale reste généralement très
faible mais évidente.
En plus, beaucoup d’études montrent que l’accroissement de la pression
fiscale dans les pays africains n’a pas d’effet considérable sur les
investissements privés car leur système fiscal est caractérisé par des
exonérations fiscales très élevées, une corruption vive faisant que les recettes
publiques sont détournées. Il sied également de noter que dans les pays pauvres
très endettés africains et particulièrement le Bénin, l’investissement public
constitue le moteur principal de la croissance.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 56
En définitive il existe au Bénin une corrélation entre l’endettement et la
croissance confirmant celle que les chercheurs ont décelée dans les pays pauvres
très endettés de manière générale.
b- Court terme
L’écriture du modèle de court terme est justifiée car le coefficient de la
force de rappel à l’équilibre (– 1,00082) est négatif et significativement différent
de zéro au seuil de 1%. Il existe un mécanisme à correction d’erreur. A long
terme les déséquilibres entre le taux de croissance par tête du PIB et les
variables explicatives du modèle se compensent de sorte que les séries ont des
évolutions similaires. Le coefficient de la force de rappel représente la vitesse à
laquelle tout déséquilibre entre les niveaux désirés et effectifs du taux de
croissance par tête du PIB est résorbé dans l’année qui suit tout choc. Le
coefficient de la force de rappel(-1,00082) implique que l’on arrive à ajuster
100% du déséquilibre entre les niveaux désirés et effectifs du taux de croissance
par tête du PIB. Ainsi les chocs sur le taux de croissance par tête du PIB au
Bénin se corrigent à 100% par effet de « feed-back ». En d’autres termes, un
choc constaté au cours d’une année est entièrement résorbé au bout de l’année
suivante.
Les différents tests effectués au niveau de ce modèle ont été concluants.
En effet le R² ajusté = 0,791822, la probabilité de Fisher est égale à 0.000353 qui
permet de dire que le modèle reste globalement significatif. Egalement la
distribution est normale, les erreurs sont homoscédastiques et non corrélées au
seuil de 5%. Sans oublier le test de Ramsey qui nous rassure quant à la bonne
spécification du modèle (voir annexe pour les différents résultats).
L’introduction de deux variables Dumming est justifiée par les instabilités
détectées par le test de CUSUM CARRE.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 57
Le DUM1 corrige l’instabilité détectée en 1990, qui correspondrait à
l’avènement de la démocratie.
Le DUM2 quant à lui corrige l’instabilité constatée en 1998, 1999 et 2000.
Cette période d’instabilité pourrait être justifiée par la crise énergétique.
En outre l’analyse économétrique à court terme ne révèle la significativité
que de deux (02) variables explicatives :
• Open : Degré d’ouverture
• Pibh (-1) : Pib réel par habitant retardé d’une période
2- Validation des hypothèses
Première hypothèse :
La non significativité du service de la dette associée à son impact positif
sur le taux de croissance du PIB réel par habitant tant à court terme qu’à long
terme infirment la première hypothèse.
Le service de la dette ne constitue donc pas (selon les résultats empiriques
contenus dans la présente étude) un frein à la croissance économique au Bénin.
Deuxième hypothèse :
Les variables devant valider cette hypothèse sont non significatives à
court terme.
Par contre, la significativité des variables impliquées dans la validation de
cette hypothèse associée à l’obtention des signes attendus confirment l’existence
d’une relation non linéaire entre l’endettement extérieur et la croissance du PIB
réel par habitant à long terme.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 58
SECTION 2 : LIMITES ET PERSPECTIVES
PARAGRAPHE 1 : LES LIMITES DE L’ETUDE
La présente étude, sans remettre en cause essentiellement nos résultats comporte
des limites en des points.
L’étude a effectué une exploration profonde de la littérature sur la relation
dette extérieure, investissement et croissance. Pour une analyse plus approfondie
du problème posé dans ce document, il requerrait un plus grand nombre
d’observations. L’absence de données auprès des structures nationales fait que
certaines variables comme le capital humain et le taux de scolarisation ont été
omises. En outre, pour quelques variables, les changements de base de calcul
peuvent produire d’importantes distorsions dans la mesure.
Ainsi, l’utilisation des données de la CAA avec celles du FMI- Banque
Mondiale pose le problème de base du taux de change. Une conséquence de ce
qui précède, bien qu’on ait considéré d’autres variables comme importantes dans
la spécification de l’équation de croissance, celles-ci n’ont pas été significatives
dans les estimations.
L’étude n’a pas pris en compte certaines variables qualitatives qui
paraissent avoir d’une manière ou d’une autre, une influence sur la croissance
du PIB. Ce sont entre autres : la stabilité politique, économique et sociale ; la
régularité des institutions de la république et la bonne gouvernance de l’Etat.
L’idéal aurait été de les inclure dans le modèle pour voir l’impact de chacun de
ces facteurs.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 59
PARAGRAPHE 2 : SUGGESTIONS ET RECOMMANDATIONS DE
L’ETUDE
Les résultats fournis par la présente étude autorisent la formulation des
suggestions et recommandations suivantes :
Depuis son origine dans les années 1980, la crise de la dette des pays en
développement a marqué une rupture profonde dans l’Aide Publique au
Développement (APD) dans la mesure où elle va révéler que les prêts
d’assistance s’étaient accumulés en une dette insoutenable remettant en question
l’utilisation des prêts pour financer le développement. Ainsi Lerrick et Meltzer
(2002), Radelet (2005) soutiennent que les prêts créent des incitations
perverses, liées en particulier aux pressions sur les créditeurs de faire de
nouveaux prêts qui permettent au pays de rembourser les plus anciens, tandis
que les dons peuvent être conçus pour créer des incitations positives.
La mauvaise gestion du service de la dette extérieure et l’absence d’une
discipline financière rigoureuse ont entraîné un accroissement considérable du
poids de la dette. Ceci a rendu l’adoption du PAS tout à fait inévitable.
L’objectif fondamental du PAS est d’assainir la situation de l’économie ; pour y
parvenir, il est nécessaire d’un côté de rendre les structures de production, de
prix de décision et de gestion plus flexibles et plus adaptées aux exigences de
l’efficacité et l’évolution de l’environnement économique national et
international. La capacité de gérer effectivement la dette extérieure dépend
essentiellement de la liberté des autorités concernées par cette gestion, de
choisir et de prendre des décisions telles que les moments d’intervention, les
montants et les devises à emprunter et le remboursement par anticipation. Sans
une maîtrise effective des différentes variables de la dette et des conditions
d’emprunts, il serait difficile de penser à une gestion véritable de la dette.
L’essentiel dans cette gestion est qu’il ne faut jamais laisser le taux d’intérêt
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 60
dépasser le taux de croissance du PIB. L’agrégat macroéconomique qui revêt un
caractère préoccupant est le ratio de la valeur actuelle de la dette sur les recettes
d’exportations. Ceci, au regard de la contrainte réelle que représente la hausse
des taux d’intérêt internationaux, l’appréciation de l’Euro par rapport au Dollar
et la baisse des cours internationaux du coton. La défense de la restauration de la
solvabilité de la dette à travers la réduction et l’annulation de la dette a été
envahissante. Toutefois cela n’implique pas que les instruments de la dette
doivent être discrédités.
Les résultats montrent le rôle assez faible de l’APD dans la croissance
économique cependant dans une optique d’atteinte des OMD il faudrait que les
IFI arrivent à faire une distinction claire entre l’APD (qui sera composé
uniquement de dons directs) et les prêts que les marchés et intermédiaires
financiers fourniraient. Une première explication repose sur l’idée que les PED
sont insolvables à cause du manque d’institution crédible qui leur rappellerait
leur engagement à rembourser la dette. Les prêts subventionnés dans ce cas
n’ont de sens que si les institutions de développement multilatérales ou
bilatérales sont dans une meilleure position que le marché privé pour obtenir le
remboursement en dépit des faiblesses institutionnelles locales. Une autre
explication est reliée au « paradoxe de Lucas » (Lucas, 1990) posait la question
de savoir pourquoi le capital ne circule pas entre des pays riches vers les pays
pauvres. Dans un cadre néoclassique avec une fonction de production standard à
rendement d’échelle constant, le rendement du capital devrait être plus élevé
dans les pays pauvres où le capital est rare et par conséquent ces pays devraient
recevoir les flux massifs de capitaux. Alfaro et al. (2005) concluent aussi de
leurs investigations empiriques sur la période 1970-2000 que la faible qualité
institutionnelle a été l’explication majeure de ce parodoxe. Comment les IFI
peuvent-elles aider les pays en développement à stimuler leur croissance
suffisamment pour atteindre ces objectifs sans créer de nouveaux problèmes
d’endettement qui pourraient les faire dévier de leur trajectoire ?
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 61
La réponse, évidemment, est une forte augmentation des dons accordés à
ces pays, combinée à l’élimination des obstacles aux échanges et des
subventions agricoles dans le monde industrialisé. Faire de progrès notables sur
ces deux fronts, toutefois, le maintien d’une dette viable devient une épreuve
cruciale en vue d’atteindre les OMD.
Cependant il est difficile de comprendre comment un financement
extérieur composé d’un mélange de dons et de prêts aussi bon marché a pu
conduire à une crise d’endettement. Cette crise, elle-même est atypique, en ce
sens qu’elle ne correspond pas vraiment à ce que l’on nomme « crise
d’endettement » pour les pays émergents. Ainsi par exemple, des pays comme le
Burkina et le Mali ont remboursé la totalité du service de leur dette depuis 1994
sans problème majeur (Raffinot ; 2004). Ils ont également bénéficié d’une série
de réduction de dette. Pourtant ces pays qui ont assuré le service de leur dette
sont considérés comme faisant partie du même groupe de pays que ceux qui
n’ont pas remboursé souvent pour des raisons politique interne, de
désorganisation administrative ou de guerre civile.
En définitive une stratégie d’emprunt durable doit tenir compte de six
types de contraintes (qui se chevauchent souvent) pesant sur la capacité des pays
à faible revenu de générer les ressources nécessaires pour assurer le service de
leur dette :
• les contraintes de ressources : le service de la dette doit être tiré du PIB du
pays, ce qui peut être particulièrement problématique pour les pays les
plus pauvres, où des ponctions supplémentaires sur les ressources peuvent
pousser le revenu par habitant en deçà du niveau de subsistance.
• Les contraintes de devises : les facteurs intérieurs de production peuvent
être transformés de manière limitée en devises pour assurer le service de
la dette et financer les importations ;
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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• Les contraintes budgétaires : il s’agit de la capacité limitée des pouvoirs
publics de prélever des impôts afin d’assurer le service de la dette, en plus
des autres dépenses prioritaires ;
• La fongibilité limitée des ressources, qui résulte, par exemple, de
l’affectation de recettes à des administrations ou organismes locaux, ou de
restrictions à l’utilisation de l’aide étrangère pour assurer le service de la
dette ;
• Les contraintes de refinancement : il s’agit du recours à des créanciers et
donateurs essentiellement officiels pour refinancer de gros paiements
concentrés sur la pauvreté.
.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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CONCLUSION GENERALE
Les dernières décennies ont vu s’affirmer le succès d’expériences
nationales de croissance fondées sur une stratégie d’ouverture sur l’extérieur,
alliant la promotion des exportations au recours au financement externe. La crise
de la dette a paru un moment devoir remettre en cause le succès de ces
stratégies, et il reste important d’évaluer la contrainte qu’exerce sur les
politiques nationales de croissance l’exigence de solvabilité externe ou, en
d’autres termes, de soutenabilité de la dette extérieure.
L’endettement extérieur béninois et son activité économique ont évolué
depuis 1974 jusqu’à 2008. Dans la décennie soixante dix (1970) la dette
extérieure, l’investissement et l’activité économique ont présenté de hauts taux
de croissance. Dans les années quatre-vingt dix (90), la croissance économique a
décéléré tant que l’endettement extérieur a été accéléré avec l’investissement
public. Dans cette dernière période, la dette du secteur public a augmenté
réduisant ainsi la capacité du Bénin à rembourser ses dettes qui dépendent à la
fois du niveau d’endettement et de ses performances macroéconomiques à long
terme. Au Bénin les régimes de croissance dépendent encore largement de
facteurs exogènes, et n’assurent pas une croissance autoentretenue, fondée sur
des mécanismes endogènes de création de richesse. Le seul moyen de limiter le
surendettement semble donc être, à court et moyen terme, de limiter les niveaux
d’endettement du pays.
Ce travail a fait une large revue des questions d’endettement et surtout le
lien entre dette extérieure, investissements et croissance économique. L’analyse
de la viabilité de la dette du Bénin selon le CVD révèle que la dette extérieure
du Bénin présente des indicateurs à l’orange.
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
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L’estimation économétrique par la méthode des moindres carrées stipulée par la
théorie pour un modèle quadratique de la croissance a infirmé la première
hypothèse et confirmé la deuxième. Ainsi, l’estimation dans l’équation
quadratique de croissance trouve que la dette extérieure sur le PIB est mise en
rapport de manière positive ou négative avec la croissance suivant son niveau
pour la période d’analyse. Dans la simulation de la courbe de Laffer on
remarque que la plus grande contribution de la dette extérieure à la croissance
est atteinte quand la dette extérieure sur le PIB équivaudra à 57,01%.A partir de
ce niveau, la contribution diminue jusqu’à s’annuler et finalement induire
négativement sur le taux de croissance réelle. Les résultats permettent de
conclure que l’investissement et l’APD (faiblement) influencent la croissance
économique du Bénin.
Selon les résultats obtenus, il y a des preuves empiriques de l’hypothèse
de surendettement dans le cas du Bénin. Cette conclusion est en adéquation avec
le fait que le Bénin est classé comme un pays pauvre très endetté, selon la
Banque Mondiale, le FMI. A partir de ce qui est exposé dans ce travail,une des
recommandations est que pour financer un déficit fiscal à travers l’endettement
extérieur,il est nécessaire de tenir compte des effets négatifs que cela produit sur
l’exercice de l’activité économique. Dans un tel sens, la courbe de Laffer pour la
dette extérieure est une approche alternative de discipline fiscale.
Enfin,une autre possibilité pour préciser certaines relations entre l’endettement
extérieur et le comportement de l’économie pourrait consister à construire des
modèles d’équilibre général calculable de l’économie du Bénin, pour tester
l’impact du remboursement de la dette(notamment sur le taux de change),et des
anticipations de croissance de la pression fiscale.
Le CVD et les pratiques destinées à évaluer la soutenabilité de la dette des
pays à faible revenu constituent certainement une amélioration par rapport aux
méthodes existantes. La volonté de faire du CVD un outil de coordination entre
bailleurs et emprunteurs pour limiter les risques d’une nouvelle crise de la dette
Viabilité de la dette extérieure du Bénin dans une perspective de réendettement post-allègements de dette
Réalisé et soutenu par Corneille AHODEGNON et Eric THON 65
dans le contexte post-annulations, est nouveau et constitue le pilier central de la
nouvelle gouvernance de la dette. Etant donné les fortes implications
opérationnelles de cet instrument, il est important qu’il soit jugé crédible. A ce
stade, nous estimons que de nombreuses améliorations peuvent être apportées.
Les fondements analytiques du CVD restent fragiles. L’importance de la
volatilité et des chocs continue à être sous-estimée. Le CVD ne débouche pas
sur une évaluation adéquate des risques, qui reposerait sur une pondération des
divers emprunts en fonction de leur impact sur la soutenabilité de la dette. La
coordination recherchée entre tous les prêteurs, actuels ou potentiels, risque en
outre d’être limitée si les IBW considèrent le CVD comme un instrument
technique qu’elles seraient les seules à gérer, plutôt que comme une base de
discussion avec toutes les parties prenantes. Enfin, le CVD n’apparaît
probablement pas encore clairement pour les gouvernements emprunteurs
comme un instrument efficace pour gérer leur endettement (extérieur et
intérieur) dans le cadre d’une politique globale de développement et de lutte
contre la pauvreté. Afin que la mise en œuvre du CVD réussisse et qu’il
permettre la coordination de la communauté internationale autour de la politique
d’endettement des pays à faible revenu, il est primordial que ses limites et
faiblesses soient identifiées et, dans la mesure du possible, prises en compte par
les IBW, en concertation avec les parties prenantes. Sans cela, la nouvelle
gouvernance de la dette risque de n’être qu’un effet d’annonce sans réel impact
sur le réendettement annoncé des PFR.
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