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 Venance Grumel Recherches récentes sur l'iconoclasme In: Échos d'Orient, tome 29, N°157, 1930. pp. 92-100. Citer ce document / Cite this document : Grumel Venance. Recherches récentes sur l'iconoclasme. In: Échos d'Orient, tome 29, N°157, 1930. pp. 92-100. http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rebyz_1146-9447_1930_num_29_157_2633

Iconoclasm

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  • Venance Grumel

    Recherches rcentes sur l'iconoclasmeIn: chos d'Orient, tome 29, N157, 1930. pp. 92-100.

    Citer ce document / Cite this document :

    Grumel Venance. Recherches rcentes sur l'iconoclasme. In: chos d'Orient, tome 29, N157, 1930. pp. 92-100.

    http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rebyz_1146-9447_1930_num_29_157_2633

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    Recherches rcentes sur l'iconoclasme

    Parmi les tudes rcemment parues sur l'iconoclasme, celle de M. Ostrogorsky, malgr des points faibles, est la plus comphensive en rsultats.

    Le premier devoir de tout historien est d'inventorier les sources qui intressent la priode ou l'ensemble d'vnements qu'il tudie. S'il s'agit d'une lettre doctrinale, il sera indispensable de recueillir avec soin les thories et arguments prsents" de part et d'autre. La tche ne laisse pas que d'tre quelquefois malaise. Quand la querelle est ne, s'est dveloppe, a pris fin dans l'intrieur d'un empire, la grande difficult est d'entendre la voix du parti vaincu. C'est le cas-de l'iconoclasme : la victoire de l'orthodoxie entrana la destruction de tous les crits hrtiques. L'on ne peut douter, certes, de ce qui faisait le fond de l'hrsie : mais les nuances, mais les dveloppements et variations, mais les arguments ne nous sont connus qu'indirectement, travers les rfutations des orthodoxes. Heureux sommes-nous donc quand ceux-ci nous mettent en contact direct, soit avec les documents officiels destins imposer l'erreur, soit avec descitations textuelles des docteurs de la secte.

    Le plus clbre des documents ainsi transmis, et longtemps aussi le seul connu ou remarqu, est Voros ou dfinition du concile iconoclaste de 754 (c'est la date adopte par l'auteur), cite et rfute par les Pres du IIe Concile de Nice (787). Si important qu'il soit, il ne saurait suffire nous donner une connaissance complte de tout le dveloppement de l'hrsie, mais reprsente en quelque sorte son apoge doctrinal. Pour obtenir une vue d'ensemble, il faut y joindre les citations de saint Nic- phore. Celui-ci, dans ses Antirrhtiques, a pris tche de rfuter, lemme par lemme, certains crits iconoclastes. Cette source de premier ordre, fort peu d'historiens l'on exploite, et aucun fond. M. Ostrogorsky reprend cette tude parla base, et en y faisant converger les donnes fournies par les historiens et les hagiographes, essaie de projeter de nouvelles lumires, sur les doctrines et les tendances diverses du mouvement iconoclaste. Son travail comprend trois dissertations : 1. L'crit de Constantin V contre la vnration des images et le premier concile iconoclaste. 2. Le deuxime concile iconoclaste. 3. Les crits du Pseudo-piphane (2) contre la vnration des images. Nous allons les analyser successivement.

    1. L'crit de Constantin V contre les images. Cet crit se lit par fragments dans le Ier et le IIe des Antirrhtiques de saint Nicphore publis par Mai et reproduits dans la Patrologie grecque. M. Ostrogorsky les

    (1) Studien zur Geschichte des byzantinischen Bilderstreites. Breslau, M. et . Marcus,. 1929, in-8, 114 pages.

    (2) Cette expression, qui renferme dj un jugement,, est de nptre auteur.

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    rassemble ici pour la premire fois. Il y trouve, d'aprs l'indication mme de Nicphore, P. G., col. 32, A, deux parties distinctes dnommes . Il relve aussi que l'crit de Constantin n'est pas cit intgralement. Dans le souci de faire uvre critique, le texte de Migne a t contrl d'aprs le ms. Coisl. g3, et amlior par endroits. Le parfait et t de collationner le manuscrit mme utilis par Mai.

    Par l'examen du contenu, M. Ostrogorsky reconnat chaque un objet propre. Dans la premire, l'imprial thologien, rigeant en principe que l'image est con.substantielle son prototype, dclare impossible de peindre le Christ cause de ses deux natures insparables. Le tenter, c'est vouloir circonscrire la nature divine incirconscriptible. Que si l'on dclare ne peindre que la chair du Christ, c'est alors tablir en elle une personne propre et distincte, ce qui introduit quatre personnes dans la divinit, ou bien, c'est en faire la chair d'un pur homme, c'est ter la nature divine au Christ et faire de lui une simple crature. Une image du Christ doit ou circonscrire la nature divine ou sparer les deux natures insparables. De toute faon elle ruine le dogme de '.

    La deuxime dveloppe que la seule vritable image du Christ est le mystre du pain et du vin consacrs au corps et au sang de Jsus- Christ; voil l'image que le Christ a lgue son Eglise. Constantin V proteste ensuite par serment qu'il n'est pas l'ennemi du Christ que ses adversaires proclament. Il termine en invitant ceux qui il s'adresse se prononcer sur les autres images que celle du Christ.

    M. Ostrogorsky n'a pas de peine prouver que ces deux sont bien de Constantin V dont l'activit littraire est du reste atteste par ailleurs. Mais quel est le caractre de cet crit? Est-ce un libelle de propagande? Le titre de pourrait le faire croire. Mais notre critique relve l'pithte que lui attache Nicphore : , . C'est un ordre plutt qu'une exhortation. Ne serions-nous point devant une action prparatoire au concile de 754,. traant une ligne de conduite l'assemble des Pres iconoclastes? Et de fait, la dfinition du concile reflte assez bien la thologie impriale. On y rencontre les mmes jugements sur l'impossibilit de peindre le Christ,, la mme affirmation que la seule vraie image du Christ est dans la sainte Cne. C'est mme le point de vue christologique qui forme le centre de Yoros de 754, qui ds lors apparat comme un cho des de Constantin. Ce point de vue christologique n'est point absolument nouveau : il apparat dj dans la premire priode de l'iconoclsme : ce qui est nouveau, c'est qu'il devient le centre de la controverse. Ds lors, l'crit de Constantin revt une importance exceptionnelle, il est un tournant, un Wendepunkt, de l'iconoclsme. Plus importante encore est cette autre consquence que M. Ostrogorsky croit pouvoir tirer de ce mme crit. Il y voit une tendance marque au monophysisme. Les preuves sont peut-

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    tre un peu trop pousses. Il en faut retenir seulement le fait que pas une seule fois l'auteur n'emploie l'expression alors que par deux fois il se sert de la formule . /' et le ne sont point, selon nous, assez caractrisques, et de plus notre critique ne semble pas avoir remarqu ce passage : , , () dont la saveur est plutt chalcdonienne. Cette tendance monophysite qu'il dnonce en Constantin V, M. Ostrogorsky nous la montre atteste clairement par Michel le Syrien qui en fait honneur cet empereur. Cette vue amne le savant professeur voir dans la rdaction de Yoros de 754 une mise au point doctrinale des de Constantin dans le but d'viter toute apparence de lien avec une hrsie si unanimement rprouve, mais le canevas imprial fut excut dans ses traits essentiels. Pour n'tre point trop long, je passe sous silence, malgr les intressantes conclusions de dtail qu'il renferme, l'expos de M. Ostrogorsky sur l'attitude hostile de Constantin V au sujet du culte de la Vierge et des saints.

    2. Le concile iconoclaste de 8i5. On se souvient comment D. Serruys, que les questions vitales des temps prsents ont ravi aux problmes du pass, a publi, d'aprs les citations de l'Antirrhtique indit de saint Nicphore, Yoros du deuxime concile iconoclaste (2). Un examen plus attentif des deux manuscrits de Paris qui contiennent cet Antirrhtique, a permis notre critique de remarquer des lacunes considrables dans la publication de D. Serruys, ncessitant une nouvelle dition. Elle nous est donne p. 48-51 et forme comme longueur le double de celle de son devancier.

    M. Ostrogorsky rappelle comment ce concile, au tmoignage de l'anonyme Vita Leonis Armeni (3), fut prpar par les recherches de Jean Morokharsianos et Antoine de Perg dans la littrature patristique, et comment le patriarche saint Nicphore refusa de s'y prter, fut dport clandestinement et remplac par. Thodote qui tint le concile projet.

    Quant au contenu de Yoros, il consiste principalement dans une confirmation du premier concile iconoclaste. Seulement, et on peut mesurer par l le terrain gagn par les iconophiles, Yoros a fortement estomp l'accusation d'idoltrie : on consent ne plus donner le nom d'idoles aux icnes: les accusations de nestorianismeet de monophysisme ont disparu. Toutefois le point de vue christologique n'est point absent : on accuse ceux qui peignent le Christ ou de circonscrire la divinit incirconscriptible ou de sparer la chair du Christ de la nature divine. Quant aux images

    (1) Ostrogorsky, p. 8, I, -n* 5. (2) Mlanges d'archologie et d'hisloire (Ecole franaise de Rome), t. XXIII (I9o3),

    p. 34.5-351. (3) P. G., t. CVIII, col. 1028 sq.

  • RECHERCHES RCENTES SUR L ICONOCLASME Cp

    des saints, elle sont un opprobre pour eux : c'est mettre dans une matire vile ceux qui sont dans la gloire. Si la perscution est aussi violente que sous le Copronyme, la doctrine eet manifestement en recul.

    3. Les crits du Pseudo-piphane. Saint piphane a t de bonne heure invoqu par les iconoclastes l'appui de leur doctrine. Saint Jean Damascene leur rpond dj ce sujet. Durant la seconde priode de l'iconoclasme, saint Nicphore a crit tout un trait pour repousser comme inauthentiques les citations de saint piphane prsentes par les icono- maques (i). Que faut-il penser de ce problme? Holl lui a consacr une tude parue en 1916 et reproduite en 1928 dans ses Gesammelte Aufstze, II, p. 351-387. Pour lui, les passages cits proviennent d'uvres authentiques de saint piphane et c'est Nicphore lui-mme qui les en a extraits. M. Ostrogorsky dmontre aisment que Nicphore ne fait qu'utiliser dans son ouvrage un recueil de compos par les iconomaques. Autre remarque : ce n'est pas seulement dans YAdversus Epiphanidem que se trouvent des citations d'Epiphane; il y en a aussi dans son Antirrhtique indit, et ceux-ci jusqu'ici ont pass inaperus. Il y a donc possibilit de reconstituer les crits piphanides. M.Ostrogorsky compte cinq fragments, plus ou moins longs qu'il dite de la page 67 la page 75. Ce sont : I. Le testament d'Epiphane (p. 67-68). II. ptre dogmatique (p. 68). III. Un crit Contre ceux qui font la manire des idoles des images du Christ, de la Vierge, des martyrs, etc., (p. 68-71). IV. La lettre l'empereur Thodose (p. 71-73). V. La lettre a Jean de Jrusalem (p. 73-75). A l'exception du premier, M. Ostrogorsky juge tous ces crits- inauthentiques. Voici les grandes lignes de son argumentation.

    L'crit III est un crit de polmique tel qu'il n'est intelligible qu'en pleine priode iconoclaste. Les raisons des iconophiles y sont exposes et rfutes et l'argument christologique est exprim; exprim aussi le reproche fait par les iconomaques de ternir la gloire des saints en les reprsentant dans une matire inerte et morte.

    L'crit V, lettre Jean de Jrusalem, qui existe aussi, dans une traduction latine attribue saint Jrme, ne peut tre, comme le veut Holl, une retraduction sur le latin. Celui-ci est moins long et comporte des diffrences remarquables d'expression qui rendent impossible une telle hypothse (p. 85-86). Surtout, tandis que dans saint Jrme, elle est donne comme faisant corps avec une autre lettre, Nicphore, lui, la cite comme constituant un tout complet, et point du tout comme un extrait, une , et cela est ausssi conforme au contenu, qui n'a aucun lien avec la vraie lettre Jean. Parv ailleurs, le plus ancien des manuscrits contenir cette prtendue traduction latine de saint Jrme ne dpasse pas le ixe sicle.

    (1) Adversus Epiphanidem, dans Pitra, Spicilegium Solesmense, t. IV, p. 292 sq.

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    L'crit IV, lettre Thodose, provient manifestement du mme faussaire qui est d l'crit III. On y rencontre mmes mouvements pathtiques, mme suite d'ides, mme ton.

    Le fragment II n'est pas autre chose qu'un extrait textuel des anath- matismesdu concile de 754. Si ce concile l'avait emprunt saint Epiphane il n'aurait pas manqu de le dire. Et nous voil conduits des prcisions chronologiques.

    De tous ces piphanides, le concile de 754 ne cite que le premier, le Testament, qui est de tous le moins significatif contre les images. C'est donc aprs 754 qu'il faut placer la composition de tous les autres. De ces derniers', le concile de 787 ne connat que la lettre Thodose. Le faussaire, qui appartient aussi l'crit III, bien les ides de 754, mais attnues la manire de Yoros de 81 5. Cette attnuation empche de placer la composition de ces apocryphes durant la seconde moiti du rgne de Constantin V o dominrent les tendances extrmistes. M. Ostro- gorsky leur assigne le laps de temps qui spare la mort de Constantin V du concile orthodoxe. Le parti iconoclaste, puis par ses excs, n'tait plus assez fort pour imposer toutes les dcisions de 754 : il devait chercher des formules plus conciliantes.

    Ces diverses pices piphanides furent rassembles peu avant le concile de 8i5 et c'est ce recueil qui aurait servi de modle ce concile. Cette explication est conforme ce que nous apprend la Vila Leonis Arment sur l'activit de Jean Morokharsianos et d'Antoine de Perg. Le Pseudo- Epiphane apparat .donc comme l'anneau qui relie les deux conciles iconoclastes.

    Sur qui n'a pas lu le travail de Holl, cet ensemble d'arguments peut faire impression. Mais qui l'a lu et veut bien relire s'aperoit vite que le savant professeur russe est loin d'avoir branl les conclusions de son devancier en ce qu'elles ont de fondamental. M. Franz Dlger (1) a pris la peine de relever dans le dtail les points faibles et mme les contradictions de M. Ostrogorsky. Son tude, trs pntrante, affermit, part quelques dtails secondaires facilement concds, l'difice critique de Holl que risquait de compromettre cette attaque inattendue.

    Une premire remarque essentielle est celle-ci : Les crits piphanides en question sont tout fait conformes, et quant au fond et quant au style, aux autres rcits de saint Epiphane. Les nombreuses citations parallles apportes par Holl, parfait connaisseur de ce Pre, crent cet gard une trs forte prsomption d'authenticit, qu'Ostrogorsky a passe sous silence.

    Cela tant donn, la question dbattue revient ceci: Oui, ou non, y a-t-il chez Epiphane trace certaine d'opposition au culte des images?

    1) Compte rendu de l'ouvrage dOstrogorskr dans Gttingischen gelehrten Anzeigen, n 8, p. 353-372.

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    Si c'est non, on ne peut encore dire, moins d'autres indices positifs, que les crits ne sont pas de lui, mais si c'est oui, il ne faut plus s'tonner qu'piphane ait trouv des arguments qui ont t employs aprs lui dans ce qu'ils ont d'essentiel. Or, Ostrogorsky lui-mme se voit contraint d'admettre qu'au moins le testament d'piphane est bien de lui. Par cette brche, toute son argumentation croule.

    Les indices positifs qu'il avance sont insuffisants la rparer. Voici quelques prcisions :

    II est vrai que l'argument christologique se trouve dans les piphanides, mais ce qui domine, c'est l'objection tire de l'idoltrie, qui est, en effet, la premire venir la pense au sujet des images. A cet argument s'apparente naturellement le reproche de dshonorer les saints en les reprsentant inertes comme les faux dieux.

    L'argument christologique, dit-on, n'a pu apparatre qu'aprs les querelles christologiques. Pourquoi cet impossibilit? Bien au contraire, la manire dont l'argument est trait fait supposer que les querelles christologiques ne sont pas encore nes : le langage en est archaque et priv des formules qui caractrisent les luttes doctrinales du ve sicle.

    Sur la lettre Jean de Jrusalem, Ostrogorsky a raison de voir dans le texte grec l'original et non point une retraduction, mais en faire une invention de la fin du vrae sicle (entre 754 et 787) ne peut que conduire des impasses. Cette lettre est cite dans les Livres Carolins, mais n'est connue que par une traduction de saint Jrme. Les Livres Carolins, par ailleurs, ne connaissent pas d'autre tmoignage de saint piphane sur les images : ce qui semble indiquer que leur source d'information est distincte de celle des Grecs. Du reste, les manuscrits du ixe sicle qui l'attribuent saint Jrme supposent un prototype plus ancien qui contient la mme donne, et qui est par suite indpendant du prtendu faussaire.

    Ostrogorsky dit aussi que l'pisode racont dans la lettre Jean n'a rien faire avec le reste de la lettre. Holl avait dj rsolu cette objection en montrant que la lettre Jean tait une sorte de rglement de compte des griefs qu'avait contre lui Epiphane, et l'pisode d'Anablatha rappelle un de ces griefs. Est-il en outre vraisemblable qu'un faussaire du vme sicle, voulant crer un tmoignage patristique, l'ait ainsi envelopp dans une situation vcue et situ dans un lieu aussi prcis, et par ailleurs aussi obscur >

    Ce que M. Ostrogorsky prend dans les crits III et IV pour des mouvements pathtiques n'est aux yeux de Dlger que procd dialectique. piphane, du reste, tait capable de l'un comme de l'autre. Le fragment II est, selon Ostrogorsky, un extrait textuel des anath-

    matismes de 754, par la raison que le concile, s'il l'avait emprunt au Saint, n'aurait pas manqu de le dire. Ce procd cependant est assez frquent.

    chos d'Orient. T. XXIX. 4

  • chos d'orient

    Ostrogorsky dit encore 'que le concile iconoclaste ne connat, de [tous ces piphanides, qu'un seul, le premier. Ce concile, il est vrai, n'en cite qu'un seul, mais aprs l'avoir cit, il ajoute (= saint piphane) . ' & , ) -. (). Il en connaissait donc plusieurs autres, et Dlger insinue que le concile iconophile de 787 n'a laiss subsister dessein dans que le texte le plus anodin en supprimant les autres. Ce mme concile pourtant cite un passage de la lettre Thodose (2).

    Telle est dans l'ensemble la rfutation oppose par Dlger la thse d'Ostrogorsky. Nous avons omis plusieurs points, en particulier tout ce qui concerne les arguments de saint Nicphore contre authenticit des piphanides. Nous en avons dit assez pour conclure, avec Dlger, qu's- trogorsky a s.ous-estim les preuves de Holl, et n'a par ailleurs aucune donne suffisante leur. opposer.

    Dlger termine en disant que si saint Epiphane n'a pas eu le sort d'Ori- gne, c'est que la lutte entreprise par lui peu avant sa mort n'a pas eu le temps de prendre d'ampleur, et qu'au ve sicle l'attention publique fut: occupe par des problmes thologiques d'une tout autre importance.

    Cette brve analyse permet de mesurer la lois la valeur de l'tude de M. Ostrogorsky et les taches qui la dparent. Elles pourront facilement disparatre dans le grand ouvrage d'ensemble qu'il nous promet, Nous lui soumettons ici quelques remarques qui l'aideront peut-tre perfectionner son uvre.

    Dans son introduction, M. Ostrogorsky fait le bilan de la littrature iconoclaste releve jusqu' lui. Son apport personnel enrichit considrablement ce matriel. Il semble toutefois qu'il n'et pas d ngliger d'autres citations de Nicphore, qui, pour tre d'auteurs inconnus, mritaient cependant d'tre recueillies. Je signale P. G., t. C, col. 420 A, 402 B, 425 D, 486 B, 487 B, 457 B, 468 D-469 A, 477 C, 677 D, 601 A, 777 C. D'autres passages, sans tre des citations proprement dites, renseignent sur les ides ou arguments des iconoclastes. Nous trouvons aussi dans saint Thodore Studite, outre les iambes, au moins une citation textuelle : c'est la souscription Voros de 8i5, P. G., t. XCIX, col. 465. Peut-tre plusieurs des objections qu'il rfute sont tires directement de libelles iconoclastes de son temps. Du reste, les rfutations nous font connatre les objections et penses des hrtiques : et Une faudrait pas que la recherche du mtal l'tat pur nous ft ngliger l'exploitation du minerai qui en contient. La lecture des Antirrhtiques de saint Thodore Studite nous apprend que si l'iconoclasme officiel de 8 1 5 s'tait compos un visage

    (1) Mansi, XIII, 292 e. (2) Ibid., 293.1

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    moins svre, il ne manquait pas de sectaires pour ressasser les mmes accusations et d'idoltrie (i) et de nestorianisme (2) (on ne rencontre pas expressment celle de monophysisme). On y trouve mme une fois l'o

    bjection tire de l'institution de la ,Cne (3). Une chose encore plus importante que nous apprend saint Thodore, c'est l'existence d'un culte exagr des images (4). Certains allaient jusqu' accorder la latrie l'image du Christ, et c'est l une hrsie, t. XCIX, col. 1472, d'autres disaient qu'on ne pouvait approcher de l'image du Christ sans s'tre auparavant purifi de ses pchs, et ceux-l sont des insenss, col. 352 B.

    M. Ostrogorsky parle de la phase ultime de l'iconoclasme sans paratre souponner l'existence d'un troisime concile iconoclaste sous l'empereur Thophile. Le Synodicon (5) le mentionne comme ayant eu lieu aux Bla- chernes aprs l'intronisation de Jean Morokharsianos. Rien ne nous en a transmis les dlibrations, mais il est bien possible que les mitigations qu'avait consenties celui de 81 5 en furent absentes et qu'on en revint la doctrine rigoriste de 754.

    Le Synodicon le place aprs l'intronisation de Jean Morokharsianos, je croirais plutt qu'il se tint sous son prdcesseur Antoine, au dbut du rgne de Thophile, car la lettre des patriarches orientaux {signale qu'Antoine est mort d'une pnible maladie . A moins qu'il ne s'agisse encore d'un synode distinct, ce qui porterait quatre le nombre des conciles iconoclastes.

    Je viens de mentionner la lettre des patriarches orientaux. Tout ainsi -qu'un grand nombre de ceux qui se sont occups d'iconoclasme, M. Ostrogorsky ignore la publication qu'en a faite le savant grec J. Sakkelion il y a trois quarts de sicle et ne connat que le document postiche publi par Lequien et reproduit dans Migne, P. G., t. XCV, col. 345-396.

    La publication de Sakkelion a paru pour la premire fois dans plusieurs livraisons de en 1864, puis a t imprime part la mme anne (6). M1" Duchesne a reproduit le texte de ce document dans Roma et Oriente, ann. III (1912), p. 225 sq, en lafaisant accompagner d'une traduction italienne, et cependant des dissertations erudites sur l'iconoclasme ont continu l'ignorer (Emereau, art. Iconoclasme dans le D. T. C; Leclercq, art. Images dans le D. A. C. /,.).

    Cette lettre synodale mrite d'tre tudie pour connatre l'tat ultime

    {i) P. G., t. XCIX, col. 33o. (2) Ibid., col. 484, 1534. (3) Ibid., col. 340. (4) Michel le Bgue dans sa lettre Louis le Dbonnaire signale aussi des excs,

    mais dans le but de discrditer le .culte des images. Mansi, t. XIV, col. 417 sq. (5) Voel et Justel, Bibl. iuris canon, veteris, t. II, p. 1212. (6) Nous avons sous les yeux cette double publication. Plusieurs auteurs, Bayet*

    Duchesne, Vincent et Abel, se copiant sans doute les uns les autres, la placent en 1874 Nous avons commis nous-mme la mme erreur, art. Images, dans D. T. C.

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    de l'iconoclasme prs d'expirer : elle est sans doute une rplique du synode qui a prcd la mort d'Antoine.

    Nous y remarquons certaines particularits dignes d'attention : une allusion la pense des iconoclastes que la vraie image du Christ est dans la Cne, la distinction des pouvoirs du sacerdoce et de l'empire, le rejet de l'accusation d'idoltrie, la rfutation de ceux qui mprisent l'image tout en accordant qu'elle n'est pas une idole. Notons aussi, car cela touche de prs la troisime dissertation de M. Ostrogorsky, l'opinion exprime dans ce document sur l'auteur des crits piphanides : c'est un docte, piphanide le Chypriote, exil autrefois par l'empereur Thodose. Cette attribution est une preuve de plus que ces crits n'avaient pas l'origine rcente que veut leur donner Ostrogorsky : personne n'y a vu, sinon par manire de doute transitoire, comme dans le concile de 787, un crit compos, dans la querelle. Pour saint Nicphore, l'auteur des piphanides est aussi un docte.

    Ces quelques complments (1) sont bien modestes cot des dcouvertes faites par notre auteur : heureux serons-nous cependant si elles peuvent aider mettre au point le grand ouvrage qu'il nous prpare.

    V. Grume l.

    (1) Signalons aussi une distraction. P. 35, il est parl du martyr Euphemios dont les reliques sont jetes la mer. Il s'agit de la grande sainte Euphmie, l'orgueil des Chalcdoniens.

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    Plan1. L'crit de Constantin V contre les images2. Le concile iconoclaste de 8153. Les crits du Pseudo-piphane