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1387 - J EUDI 14 AVRIL 2016 44 ÉVÉNEMENT T out d'abord, je vous remercie tous d'être venus si nombreux pour honorer la mémoire de Serge Benattar (zal). Son Sefer-Thora que nous inaugurons ce soir est une histoire qui dure depuis plus de quatre ans et demi. Le chemin a été long des Lilas à Jérusalem ! Car, malgré tous nos efforts, nous n'avons pu le faire réaliser comme il se devait pour l'année de son décès en 2011, c’est-à-dire en juillet 2012. Et il n'était toujours pas prêt pour la bar-mitsva de Ruben, notre premier petit-fils en sep- tembre dernier : de quoi s'énerver… C'est pourquoi quand nous avons su qu'il était terminé, nous sommes partis le récupérer à Jérusalem en décembre dernier avec le rav Nissim Dayan, Jac- queline Landesberg, la sœur de Serge et moi- même. Et nous voilà un soir à Mea Shearim dans le laboratoire où il venait d'être cousu. Placé dans un cof- fre, on me l'a remis tout blanc dans les bras, comme un bébé qui venait de naître. C'était la première fois que je voyais un Sefer Thora sans housse. Les Rabanim présents m'ont dit : « C'est une grande joie pour vous, Ma- dame, et une grande mitzva ainsi que pour votre cher époux là-Haut, il se ré- jouit ». Ce fut un moment intense d'émotion pour nous tous, des larmes de chagrin se mêlaient à celles du : « Enfin, le voilà ! ». C'était surréaliste. Nous avons voulu faire partager ces instants à mes trois enfants restés à Paris. Nous leur avons envoyé des photos de l'écriture et nous avons invo- lontairement photographié la paracha de la bar-mitsva de notre fils Yohan. Il n’y a pas de hasard… J’avoue aussi que mes enfants ont été marqués par mon look inhabituel de rabbanite ! Des petites ruelles de Mea Shearim, nous avons été dirigés dans un autre quartier de Jérusalem où on nous at- tendait pour commander le tik, l’écrin du Sefer Thora. J'étais consciente que l'instant pré- sent que nous vivions était extraordi- naire, exceptionnel. Comme si Serge était auprès de nous. Bizarre, même le fait d'avoir choisi le Sofer n’était pas innocent parce qu'il le connaissait : il était en effet presque de la famille… Je reviens au choix de l’écrin, du tik - j'avoue que je n'y connaissais rien - et quand j'ai vu dans ce petit magasin tous les coffres de Sefer- Thora, j'aurais voulu partir ou être ailleurs. Mais la dé- cence m'en a empêchée. Je n'avais pas le choix car il fallait tout finir dans la soi- rée. Vous qui êtes présents, devez sou- rire de mon inculture dans ce domaine mais les dorures, les bling bling, « oï va voi ! » Il me fallait choisir le moins chargé, le plus simple. Quand le ven- deur a vu mon embarras, il m'a suggéré de faire un mixte de ce que je souhai- tais. C'est avec un grand soulagement que j'ai saisi l’offre et il communiquait en France simultanément avec mes fils Michael qui parle hébreu et avec Yohan auprès de lui pour essayer de compren- dre. Il faut imaginer qu’il n’avait pas d’ordinateur ! Le prototype créé que vous voyez est unique sans trop de fiori- tures que nous détestions Serge et moi. De plus, le Sefer Thora est simple à l'image du grand homme que vous avez connu, n’aimant pas le Kavod et la gaava, lui si mystique et clairvoyant à la fois. Voilà pourquoi il était apprécié et écouté de tous. Aujourd'hui encore quand nous faisons paraître ses anciens éditos, nous constatons qu'il aurait pu les écrire aujourd’hui. Ce Sefer Thora que nous inaugurons ensemble, avec nos enfants, petits-en- fants, belle-fille et gendre, famille, amis, et vous messieurs les prési- dents, grands rabbins, et j'en oublie sûrement, c'est sa marque, sa signa- ture et sa mémoire bénie qui y sont inscrits. Il rejoindra la synagogue des Lilas, celle où il aimait prier, étudier, se recueillir. C’est aussi le Sefer Thora d’Actualité Juive. Il manque à ses enfants, ses petits- enfants, son frère, sa sœur, et pour moi ce soir c'est comme une cicatrice que l'on rouvre. Je sais que je n'ai pas le niveau spirituel pour cette occasion, le chagrin est toujours présent, même si je sais pertinemment que l'intronisa- tion d'un Sefer Thora c'est une fête, une joie en l'honneur du défunt. Je respecte la volonté de mes enfants et de vous tous, ce soir, selon la Hala- kha. Alors que la fête soit et surtout un grand merci à vous tous d'être à nos cô- tés pour ce chaleureux hommage à Serge Shimon Benattar Zal. L YDIA BENATTAR C ’était le dimanche 10 avril dernier, en début de soirée, dans les salons de l’Ecole Georges Leven, l’inaugura- tion d’un Sefer Torah à la mémoire de Serge Benattar, le fondateur d’Actualité Juive, dis- paru trop tôt le 27 juillet 2011 alors qu’il avait encore beaucoup de sa sagesse à trans- mettre. Une pensée féconde que l’on (re)dé- couvre dans les éditos que cet autodidacte a rédigé pour Actualité Juive et dont la moder- nité, toujours à propos, ne cesse de nous étonner et de nous interpeller. Nombreux étaient les grands rabbanim, les rabbins, les présidents d’institutions ou d’as- sociations, les personnalités, les amis, l’équipe d’Actualité Juive a avoir répondu présent autour de son épouse et de sa famille pour assister à cette Hakhnassah où des émotions différentes se mêlaient : l’appré- hension côtoyait l’allégresse de pouvoir ren- dre hommage à Serge Benattar (zal) et, par l’écriture de ce livre de la Torah, pérenniser sa mémoire et la conserver en héritage. La soirée a ainsi débuté par la lecture d’un discours écrit dans la nuit par son épouse, Lydia Benattar, rappelant l’histoire chargée de péripéties de ce Sefer-Torah. Son émotion étant trop prenante, c’est sa fille Sandra, qui s’est chargée singulière- ment de sa lecture. (Voir discours reproduit ci-dessus) Puis plusieurs discours ont été prononcés, d’abord celui du rabbin Nissim Dayan qui a rappelé sa proximité et son respect de la per- sonnalité de Serge Benattar avant de laisser la parole au président des Consistoires, Joël Mergui, qui a ouvert la vente aux enchères des lettres restantes à écrire, puis les rabbins Mevorah Zerbib et Yitzhak Pewzner. Le grand rabbin Olivier Kaufmann a, quant à lui, rappelé la signification d’un Sefer-Torah, une copie manuscrite du livre de la Torah ou les cinq livres du pentateu- que, un véritable trésor pour la commu- nauté qui en possède un. Ainsi que l’a expliqué en off le grand rab- bin de France, Haïm Korsia, qui avec beau- coup d’intelligence a lié cette cérémonie à un passage des « Misérables » de Victor Hugo - dont il connaît les références par cœur – à Ac- tualité Juive. L’ouverture sur autrui incarné par le message de la Torah et prononcé dans la bouche de Jean Valjean, héros du roman, doit aussi s’incarner dans l’hebdomadaire de la communauté juive par la diffusion de la mémoire et de la culture du judaïsme. Après la finalisation de son écriture, sa couture, et sa danse traditionnelle, le Sefer- Torah a été conduit dans sa nouvelle de- meure, le Beth Hamidrach du rav Dayan aux Lilas où priait Serge Benattar pour une nouvelle cérémonie en présence d’un my- nian selon la Tradition. SANDRINE SZWARC (1) Discours prononcé lors de la Hakhnassa du Sefer Torah écrit à la mémoire de Serge Benattar le dimanche 10 Avril au soir, lors d’une cérémonie privée. H AKN ASSAH Une soirée émouvante Certificat remis aux personnes ayant partici- pées à son élaboration. La petite histoire du Sefer Thora de Serge Benattar * Zal Hommage EREZ LICHTFELD. DR

HAKNASSAH Une soirée émouvante - consistoire.org · ce soir est une histoire qui dure depuis plus de quatre ans et demi. Le chemin a été long des Lilas à Jérusalem ! Car,

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Page 1: HAKNASSAH Une soirée émouvante - consistoire.org · ce soir est une histoire qui dure depuis plus de quatre ans et demi. Le chemin a été long des Lilas à Jérusalem ! Car,

N° 1387 - J E U D I 14 AV R I L 201644 É V É N E M E N T

Tout d'abord, je vous remercie tousd'être venus si nombreux pour honorerla mémoire de Serge Benattar (zal).Son Sefer-Thora que nous inauguronsce soir est une histoire qui dure depuisplus de quatre ans et demi. Le chemina été long des Lilas à Jérusalem ! Car,malgré tous nos efforts, nous n'avonspu le faire réaliser comme il se devaitpour l'année de son décès en 2011,c’est-à-dire en juillet 2012. Et il n'étaittoujours pas prêt pour la bar-mitsva deRuben, notre premier petit-fils en sep-tembre dernier : de quoi s'énerver…

C'est pourquoi quand nous avons suqu'il était terminé, nous sommes partisle récupérer à Jérusalem en décembredernier avec le rav Nissim Dayan, Jac-queline Landesberg, la sœur de Sergeet moi- même. Et nous voilà un soir à

Mea Shearim dans le laboratoire où ilvenait d'être cousu. Placé dans un cof-fre, on me l'a remis tout blanc dans lesbras, comme un bébé qui venait denaître. C'était la première fois que jevoyais un Sefer Thora sans housse.Les Rabanim présents m'ont dit :« C'est une grande joie pour vous, Ma-dame, et une grande mitzva ainsi quepour votre cher époux là-Haut, il se ré-jouit ». Ce fut un moment intensed'émotion pour nous tous, des larmesde chagrin se mêlaient à celles du :« Enfin, le voilà ! ». C'était surréaliste.

Nous avons voulu faire partager cesinstants à mes trois enfants restés àParis. Nous leur avons envoyé desphotos de l'écriture et nous avons invo-lontairement photographié la parachade la bar-mitsva de notre fils Yohan. Iln’y a pas de hasard… J’avoue aussique mes enfants ont été marqués parmon look inhabituel de rabbanite !

Des petites ruelles de Mea Shearim,nous avons été dirigés dans un autrequartier de Jérusalem où on nous at-tendait pour commander le tik, l’écrindu Sefer Thora.

J'étais consciente que l'instant pré-sent que nous vivions était extraordi-naire, exceptionnel. Comme si Sergeétait auprès de nous. Bizarre, même lefait d'avoir choisi le Sofer n’était pasinnocent parce qu'il le connaissait : ilétait en effet presque de la famille…

Je reviens au choix de l’écrin, du tik -j'avoue que je n'y connaissais rien - et

quand j'ai vu dans ce petit magasin tousles coffres de Sefer- Thora, j'auraisvoulu partir ou être ailleurs. Mais la dé-cence m'en a empêchée. Je n'avais pas lechoix car il fallait tout finir dans la soi-rée. Vous qui êtes présents, devez sou-rire de mon inculture dans ce domainemais les dorures, les bling bling, « oï vavoi ! » Il me fallait choisir le moinschargé, le plus simple. Quand le ven-deur a vu mon embarras, il m'a suggéréde faire un mixte de ce que je souhai-tais. C'est avec un grand soulagementque j'ai saisi l’offre et il communiquaiten France simultanément avec mes filsMichael qui parle hébreu et avec Yohanauprès de lui pour essayer de compren-dre. Il faut imaginer qu’il n’avait pasd’ordinateur ! Le prototype créé quevous voyez est unique sans trop de fiori-tures que nous détestions Serge et moi.De plus, le Sefer Thora est simple àl'image du grand homme que vous avezconnu, n’aimant pas le Kavod et lagaava, lui si mystique et clairvoyant à lafois. Voilà pourquoi il était apprécié etécouté de tous. Aujourd'hui encorequand nous faisons paraître ses ancienséditos, nous constatons qu'il aurait pules écrire aujourd’hui.

Ce Sefer Thora que nous inauguronsensemble, avec nos enfants, petits-en-fants, belle-fille et gendre, famille,amis, et vous messieurs les prési-

dents, grands rabbins, et j'en oubliesûrement, c'est sa marque, sa signa-ture et sa mémoire bénie qui y sontinscrits. Il rejoindra la synagogue desLilas, celle où il aimait prier, étudier,se recueillir. C’est aussi le Sefer Thorad’Actualité Juive.

Il manque à ses enfants, ses petits-enfants, son frère, sa sœur, et pourmoi ce soir c'est comme une cicatriceque l'on rouvre. Je sais que je n'ai pasle niveau spirituel pour cette occasion,le chagrin est toujours présent, mêmesi je sais pertinemment que l'intronisa-tion d'un Sefer Thora c'est une fête,une joie en l'honneur du défunt.

Je respecte la volonté de mes enfantset de vous tous, ce soir, selon la Hala-kha. Alors que la fête soit et surtout ungrand merci à vous tous d'être à nos cô-tés pour ce chaleureux hommage à SergeShimon Benattar Zal. ●

LYDIA BENATTAR

C’était le dimanche 10 avril dernier, endébut de soirée, dans les salons del’Ecole Georges Leven, l’inaugura-

tion d’un Sefer Torah à la mémoire de SergeBenattar, le fondateur d’Actualité Juive, dis-paru trop tôt le 27 juillet 2011 alors qu’ilavait encore beaucoup de sa sagesse à trans-mettre. Une pensée féconde que l’on (re)dé-couvre dans les éditos que cet autodidacte arédigé pour Actualité Juive et dont la moder-nité, toujours à propos, ne cesse de nousétonner et de nous interpeller.

Nombreux étaient les grands rabbanim, lesrabbins, les présidents d’institutions ou d’as-sociations, les personnalités, les amis,l’équipe d’Actualité Juive a avoir réponduprésent autour de son épouse et de sa famillepour assister à cette Hakhnassah où desémotions différentes se mêlaient : l’appré-hension côtoyait l’allégresse de pouvoir ren-dre hommage à Serge Benattar (zal) et, parl’écriture de ce livre de la Torah, pérennisersa mémoire et la conserver en héritage.

La soirée a ainsi débuté par la lectured’un discours écrit dans la nuit par sonépouse, Lydia Benattar, rappelant l’histoirechargée de péripéties de ce Sefer-Torah.Son émotion étant trop prenante, c’est sa

fille Sandra, qui s’est chargée singulière-ment de sa lecture. (Voir discours reproduitci-dessus)

Puis plusieurs discours ont été prononcés,d’abord celui du rabbin Nissim Dayan qui arappelé sa proximité et son respect de la per-sonnalité de Serge Benattar avant de laisserla parole au président des Consistoires, JoëlMergui, qui a ouvert la vente aux enchèresdes lettres restantes à écrire, puis les rabbinsMevorah Zerbib et Yitzhak Pewzner.

Le grand rabbin Olivier Kaufmann a,quant à lui, rappelé la signification d’unSefer-Torah, une copie manuscrite du livrede la Torah ou les cinq livres du pentateu-que, un véritable trésor pour la commu-nauté qui en possède un.

Ainsi que l’a expliqué en off le grand rab-bin de France, Haïm Korsia, qui avec beau-coup d’intelligence a lié cette cérémonie à unpassage des « Misérables » de Victor Hugo -dont il connaît les références par cœur – à Ac-tualité Juive. L’ouverture sur autrui incarnépar le message de la Torah et prononcé dansla bouche de Jean Valjean, héros du roman,doit aussi s’incarner dans l’hebdomadaire dela communauté juive par la diffusion de lamémoire et de la culture du judaïsme.

Après la finalisation de son écriture, sacouture, et sa danse traditionnelle, le Sefer-Torah a été conduit dans sa nouvelle de-meure, le Beth Hamidrach du rav Dayanaux Lilas où priait Serge Benattar pour unenouvelle cérémonie en présence d’un my-nian selon la Tradition. ●

SANDRINE SZWARC

(1) Discours prononcé lors de la Hakhnassa du Sefer Torah écrit à la mémoire deSerge Benattar le dimanche 10 Avril au soir, lors d’une cérémonie privée.

HAKNASSAH

Une soirée émouvante

Certificatremis auxpersonnesayant partici-pées à sonélaboration.

La petite histoire du SeferThora de Serge Benattar*Zal

Hommage

EREZ

LIC

HTFE

LD.

DR