Gustavo Gutierrez Essai Pour Une Theologie de La Liberation

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g.gutierrèzessaipourune théologiedelalibérationchristianismeetfacultéde théblo^pensée contemporainede lyonDigitized by the Internet Archivein2009with funding fromUniversity ofOttawalittp://www.archive.org/details/essaipourunethOOguti.G.GUTIBRREZ'SE33AI POUR UNETHEOLOGIELADELIBERATIONLibération, ce mot a pour lui d'être do notre époqu'il que, c'est à dire cristallise bien de nos pensées et de nos actions. Mais comme beauqui coup de mots

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Digitized by the Internet Archivein

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Ottawa

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G.

GUTIBRREZ

'S

E33AI POUR UNE

THEOLOGIELA

DE

LIBERATION

Libration, ce mot a pour lui d'tre do notre poqu'il que, c'est dire cristallise bien de nos penses et de nos actions. Mais comme beauqui coup de mots-cls sont des mots d'ordre, 1' usage et l'usure le renfont, et dent familier qu il n inspire plus la conversion laquelle il appelle,' '

Il devenait donc ncess'interroger de saire sur le contenu vritable, la porte, les incidences religieuses, sociales et politiques d'un mot qui est loin d tre tranger mais christianisme au qui est promu une existence nouvelle dans une Eglise qui toujours cherche tre plus proche des hommes.'

,

il a Cet essai a pour lui d'tre de notre poque ancien tudiant pour nous de venir du P. GUTIERREZ actuellement la Facult de Thologie de Lyon l'un des plus minents thologiens que compte l'Eglise d'Amrique du Sud., , ,

o

PRESENTATION PRELIMINAIRE DU DOGUI'IENT

Une tude du sens thologique du procossus de libration entrepris par l'homme au long de son histoire prsuppose mthodoloeiquement la prcision des termes en jeu La premire partie de ce travail est consacre Ce premier moment de la rflexion nous les prciser permettra de signaler les raisons pour lesquelles nous tiendrons compte, tout au long du travail et d vme manide la fonction critique de la thologie re spciale l'gard de la prsence et de l'agir de l'Eglise dans le aujourd'hui Le fait majeur de cette prsence monde surtout dans les pays sous-dvelopps c'est la participation des chrtiens la lutte pour btir une socit juste et fraternelle, o les hommes puissent vivre digneNous ment et devenir les agents de leur propre destin pensons que le terme "dveloppement" n'exprime pas assez Le terme "libration" parat ces aspirations profondes plus exact, car il exprime mieux le caractre conflictuel du processus, parce qu'il est plus riche en virtualits, et aussi parce qu'il offre un champ plus fcond la rflexion thologique. .'

,

.

,

,

,

.

.

En second lieu, il convient de bien situer la question d'une thologie de la libration. Nous verrons qu'il la fois traditionnel et nouveau. s' agit. d'un problme apparatra avec plus d'acuit si l'on Ce double trait analyse les rponses diffrentes donnes au problme au Cela par la thologie catholique cours de l'histoire nous amnera conclure que les approches traditionnelet qu'on commence la les ont puis leurs possibilits recherche de pistes nouvelles de rflexion thologique Cet examen aidera dblayer le chemin et aller plus Ce sera la deuxime vite dans les tapes ultrieures parti de notre travail., .,

.

i

.

Cet ezamen aidera dblayer le chaain et aller plua Ca gei-i la euxic.f vita dans leo tapes ultrieures partx de notro travail,

kous conduit raseeisix- la L' inalyae prcdente Le, "orstioua" de l' Eglise dans 1 mone d aujcj^d'hui eul cr-.iti:i.sn+, ea taajordL'' ifltaxioa de l-ioiriqua Ls-tina t chrtien psriai lfe;ii;ulir cie et d intorprtation deg? forr&.' que 1& pxf^-ince Ci'iptioi ABsri-iue Latine nous parfiie'ttr& d ''apde. l':3lisia rcrrt prbeniar la, iiro'blmati'iU'5 propos de lecu^lle doit xve. exerce uii authentique rflssion tholo^-iqn La. troisiKl psxti de ce travail sera eonsaore cette tfjntative^'

*

,.

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.

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'

ai'i.

,

Tout ^5 cb.end.n.emeit nous fe;re, s-oir que la q)ifestion du nue thologique de la libiratioa est er. ra:.it une

^^ e'^'t't, il V- eut uri temps o 1 Bglise en falt-ant aux probliBe posta par la ralit r-pondeit Meis la graap'oeX ses x-esr'^^ dcct-rinales et l'i talevit st 1- ampleur du processus qu^ nour.^ appelons Ixbra'tion sent aujourd'hui telles que la foi chrtir*n et On demaade l'Siriie;e font radical-^sent mises ea questlou' celles-ci qu'ellsa maaif'sstftnt leur aer^^ vie-"-*'-''is >,iuelquGS pistes aou3 d'yrie t'jiie htiasain devenue adislta peravettrotit d destiner brivmeivt .cette problaaati

,

i,

^

.

1960=^1961,(9)

"On tait pass de la^Baci'a pagina'' la "thologie" au sens moderne qu"Ablard a t le premier employer (Y CONGAR "La foi et la thologie " p 238)-

*

:

,

,

,

.

.

(10) Cf; Y

CONGAR et J COMBLIN. op cit Voir ausal M D CH2NU. "L^ tholo^^ ? e^^^e^-le une ? Paris, 1957 Saint Thomas considre cefi o^ence pendant que la thologie n, est pas sevilement une science mais galement une a&gesBB dont la source est la charit qui unit 1 homme a^^rec Dieu (cf pax Cet quiliexemple, STheol 12, q.9, a. 2 ad l) bre est rompu au sicle suivant'*. ;>

(11) Cet aepec+ a t fort bien soulign'*La

DUMONT per- C rflexion sur la mthode thologique" en M ^iH^T dc.f 1961, pp 1034-1050 et janv , 1962, pp. 17-35...

, J KOUROUX. "Je.Jiroi2_ftn_toi""'Faris 1954s B3 HARING, 1954 ? Preiburg i Breisgau "Des C-asetz Chriatl"' 1958 j Paria A LIIiGE "Mtf.V-.^r^-^^a.- lft-Sh-r.Lst'' ?hri fttli.cbe, B:ruderliQb\ett " Die. J:. HATZINGER, Misachen, i960 Gh SPICQ ^Thi^filcya^i^ morgil^ du Nou'", >' . ;

veau Teataaent'*

>

'Pax'ls

.

1965

.

,

10(14)Cf..

NOTES

Cf. P. PHILIPPE "La S. Theol. II. 2, q.l88, a. 6 contemplation au XIII 2 sicle" dans Dict. de Spiri tualit fasco XIV, Paris, 1956. mais elle exprime bien (15) L'expression est de Nadal l'intuition d'Ignace de Loyola .Cf. M. GIULIANI "Trouver Dieu en toutes choses" dsins Christus avril 1955, pp. 172-194, et G, PBSSAHD, " La dialectique des exercices spirituels de saint Ignace de Loyola ", , ,.

,

Paris, 1956c" (16) Cf. Yo CONGAR, " Jalons pour une thologie du lacat Paris 1954 ch. IX ( Au monde et pas du monde ), , ;

" Valeur spirituelle du profane " RABUT " Exprience du monde Ph. ROQUBPLO 1963 rience de Dieu ? " Paris, 1968.

Oo

,

,

;

,

;

Paris exp ,

,

(17)

la thologie dogmatique doit devenir une anthropologie thologique. cet 'anthropocentrisme' est ncessaire et fcond" (K. RAHNER "Thologie et sinthropologie" dans " Thologie d au jourd'hui et de demain ", Paris, 1967, Pc99). "(La Bible) ne nous parle jamais de Dieu sajas nous "1945-1965. La parler aussi de l'homme" (Y. CONGAR recherche thologique" dans " Situation tches et prsentes de la thologie ", Paris, 1967, p. 37). Voir aussi J.B. METZ, " Christliche Anthropozentrik " Munchen, 1962 C. DUMONT "Pour une conversion anthropocentrique dans la formation .des clercs" dans N.R.T. mai 1965, pr- 449-465 "Pret L MALEVEZ sence de la thologie Dieu et l'homme" dans NoR.T. oct. 1968, pp. 785-800.".. Aujourd'hui.

,

'

,

;

,

,

.

;

,

.

(is)

"Le mouvement de la rflexion thologique a t marqu, dsins son ensemble, par un transfert de l'atten-

tion du pur en-soi des ralits surnaturelles au rapport qu'elles ont avec l'homme avec le monde, avec les problmes et les affirmations de tous ceux qui, pour nous, reprsentent les Autres " (Y. CONGAR, " Situation et tches... " p 27 ),

,

.

(19) Cf.

la mise au point sur cette question de J.P. J03SUA "Christieinisme horizontal ou vertical ?" dajas Parole et Mission avril 1968, pp. 245-255.:,

(20) Cf le discours de Paul VI la clture du Concile le 7 -XI 1-6 5 Voir le commentaire de MOUROUX "Le discours de Paul VI la clture du Concile" dans " L'Eglise et le monde de ce temps " TIII Paris, 1967, PP" 195-200.

,

,

,

11

diants (14) Ce qui, d'autre part, n'est qu'une transition vers l'"in actione contemplt ivue" de la spiritualit ignatienne (l5). Ce processus, renforc par la recherche d'une spiritualit du lacat s'achve aujourd'hui avec les tudes sur la valeur religieuse du profatae et sur la spiritualit de l'agir du chrtien dans le monde (16). De meinire convergente on est aujourd'hui de plus en plus sensible aux aspects anthropologiques de la Rvlation (17) ce qui entrane la revalorisation religieuse de la prsence et de l'action de l'homme dans le monde en particulier en ce qui concerne l'agir en relation avec les autres hommes (is) On ne saurait dceler aucun "horizontalisme" dans cette attitude Il s'agit simplement de la redcouverte de l'u(19) nit indissoluble de l'homme et de Dieu (20). D'autre part la vie mme de l'Sglise apparat comme un "lieu thologique" (21) Ce qui a t mis en vidence par la "nouvelle thologie" et souligna (22) souvent la suite de cette dernire La parole de Dieu convoque, et elle s'incarne dans la communaut de foi qui s'adonne entirement au service de tous les hommes Vatican II a raffirm avec vigueur que, , f, .

-

,

.

.

(21) Cfo MoD de 1937

texte CHENU "La thologie au Saulchoir" La foi dans dans " La Parole de Dieu. I En parl'intelligence " Paris, I964 pp. 249-260 lant de la participation des chrtiens aux grands mouvements sociaux de l'poque M.D. CHENU crit pour la "autant de thologiques en acte 'lieux' doctrine de la grce de l'incarnation de la rdemption expressment promulgus d'ailleurs et dcrits au fur et mesure par les encycliques des Papes. Mauvais thologiens ceux qui enfouis dsuns leurs infolios et leurs disputes scolastiques ne serraient pas ouverts ces spectacles, non seulement dans la pieuse ferveur de leur coeur, mais formellement dans leur science donn thologique en plein rendement dans la prsence de l'Esprit" (opo cite,,

(

)

:

,

,

.

,

:

,

,

,

,

,

,

,

;

,

p.

259).", ,,

(22) Cf.

G. THILS et op. cit. J COMBLIN thologie de l'action ". Bruxelles, I964.

Vers une

.

12

l'Eglise n'est pas centre s-ar elle-mSnie et qu'elle ne "se retrouve" que quand elle "se perd" lorsc.u' elle les tristesses et les vit "les joies et les espoirs angoisses des hommes de notre temps" (G-audiiim et Spes l). Ce courant apporte une nouvelle perspective: voir la prsence et l'agir de l'Eglise dans le monde coiTune point de dpart pour une rflexion thologique Dans la mme ligne se situe ce qui depuis Jean XXIII coumence tre appel une thologie et Vatican II il ne faut pas En effet des signes des temps (23) oublier que les signes des temps ne sont pas un appel l'analyse intellectuelle. Ils sont, avant tout, une service aux de d'engagement exigence d'action autres "Ecouter" les signes des temps comporte les deux dimensions (24). C'est en graxide partie la problmatique philosophique actuelle qui nous conduit souligner la valeur de cette philosophie l'activit humaine D'autre part ne fait que recueillir les consquences que les relations nouvelles de l'homme avec la nature ont impliLe thme de ques pour sa propre conscience de soi l'exprience existentielle de l'homme est l'ordre du jour Blondel avait dj fait Mais, bien avant sentir son influence en prsentant la philosophie comme une rflexion critique de l'action (25) il laborait une nouvelle apologtique de grande consquence pour la thologie (26) A cela s'ajoute l'influence de la philosophie marxiste de la praxis (27) provensLnt d'un autre horizon, dont l'origine est plus ancienne nais dont le rayonnement s'est accentu dans le climat culturel des dernires annes (28) La thologie chrtienne est aiguillonne par le marxisme et s'oriente vers une rflexion sur le sens de la transformation de ce monde (29),

,

,

,

,

.

.

,

.

.

,

;

,

.

,

.

b)

Rflexion critique sur l'action

:

Cet ensemble de facteurs ont amen redcouvrir ou expliciter la fonction de la thologie comme rflexion critique la lumire de la Rvlation de la prsence et de l'agir de l'Eglise dans le monde. L'Eglise annonce et accueille le don du Royatime de Dieu au cours de l'histoire humaine par' sa prdication du message vanglique par ses sacrements, par la charit de ses membres 30 ) L'Eglise est charit efficace elle est action elle est engagement au service des hommes.,

,

,

(

.

,

,

"

.

NOTES

13

" L'E/^li (23) Cf. M.. CHBITU, "Les signes des temps" dans Tours, 1967 pp.95dans le monde de ce temps " se "Les signes des temps. Ret du mme auteur ll flexion tholociq.ue" dans " L'Eprlise dans le monde de ce temps ". T. II, pp. 205-208., ,, :

(24) C'est pourquoi Gaudiura et Spes

sienale que n^4Acette responsabilit concerne "pasteurs et tholosiens". Les pasteurs ont surtout la mission d'orienter l'action de 1' Eglise., , ,

Paris, 1957, (25) Cf. H. DUMERY, " Critique et relif:ion " " Raison et religion dans la phi et du m3mo auteur losophie de l'Action ", Paris, 1963.,

(2)

"( K. Blondel dont l'importance philosophique et thologique s'affirme mieux d'anne en anne" et taches... ", p. 76). (y. COiTGAR, " Situation)

(27) Cf.

"Les phi. ce propos le texte connu de Marx losophes se sont limits interprter le monde de de le diffrentes manires ce qui importe c est transformer" ( Thses sur Feuerbach " nSll), :;

,

'

.

(28)

"Le marxisme comme cadre formel de toute pense philosophique d aujourd'hui est indpassable. " " (j.P. SARTRE dans R. G-ARUY Perspectives de l'homme " Paris, i960, p. 112).'

,

,

,

(29)

"La conscience concrte de ce que la morale chrtienne doit inspirer aussi la praxis politique, commence peine pntrer avec une certaine ampleur dans la mentalit des chrtiens (g. COTTIER "L'attirance du communisme face aux tches du dveloppeCf. ment" dans ConciliLun mars 1965 n23 p. 95) " Spoleto G-. GIRAREI Karxismo e cristianosimo " " V/ien 1965 Chris tentum und Marxismus heute " " Chrtiens marxistes " COTTIER et 1966 et 'g. Tours, 1967.,,

>

,

,

,

,

;

,

,

;

,

,

(30) Cf.

la critique pertinente de R. SCHNACKENBURG des expressions comme "construii-e le Royaume de Dieu" ou dans "tendre le Royaume de Dieu dans le monde" " Paris Rgne et Royaume de Dieu " 1964 p. 294Cette critiq.ue a t adopte par H. KUNG " L'Eglise ", , , ,

(

T.I, Paris, 1968, p. 79).

.

.

14

N0T33

(5l)

et tous les esprits en"Tous les corps ensemble semble et toutes leurs productions, ne valent pas " Pen le moindre mouvement de charit" (B. PASCAL d. Brunschvicg, n2 289). ses ", ,, ,

(32) Cf. J. COMBLIN So Paulo, 1969,

"

,

p.

Historia da teolofia 120-121.

catolica "

(33)

"Si l'Eglise veut rejoindre les vraies questions du monde prsent et s'efforcer d'esquisser une rponse ... elle doit ouvrir comme un nouveau chapitre d'pistmologie thologico-pastorale. Au lieu de psurtir seulement du donn de la Rvlation et de la tradition, comme la thologie classique l'a fait gnralement il faut partir ici d'un donn, de faits et de questions reus du monde et de l'histoire" " (y. CONGAR, " Situation et tches, p. 72)., ,

.

.

(34) DansH.

ce de sens le texte si souvent mal cit BOUILLARD acquiert une nouvelle validit "Une thologie qui ne serait plus actuelle serait une thologie fausse" ( " Conversion et f:rcc chez saint Thomas d'Aquin " Paris, 1944, p. 219).,

:

,

.

15

La thologie est rflexion, attitude critique. Ce qui est premier c'est l'engagement de charit de service La thologie vient "aprs" elle est un acte second (3l)' L'action pastorale de l'iglise ne se dduit pas, conirao une conclusion, des prmisses thologiques. La thologie n'engendre pas la pastorale (32), elle est plutt rflexion sur elle elle doit savoir trouver dans la pastorale le Saint-Bsprit inspirant l'agir de la communaut chrtienne la vie de l'Sglise sera pour la thologie un "lieu thologique'.' Rflchir sur la prsence et l'agir de l'iDglise dans le monde signifie tre ouvert ce dernier recueillir les questions qu'ils se pose tre attentif aux vicissitudes de son devenir historique (33). Et cette tche est indispensable La rflexion la lumire do la foi doit accompagner constamment l'agir pastoral de l'Sglise en relativisant La thologie les ralisations contribue ce que l'iglise ne La s'installe pas dans ce qui n'est que provisoire thologie, en rappelant les sources de la Rvlation, orientera l'action en la mettant dans un contexte 'plus large et en lui donnant ainsi l'apport propre qui empche l'action de se dgrader dans l'activisme et 1 immdiatet totale. La thologie en tant que rflexion sur l'agir de l'3glise en est une intelligence progressive et, d'une certaine manire aussi, variable Si l'engagement de la communaut chrtienne revt des formes l'intelligence diffrentes au long de l'histoire qui accompagne cet engagement se renouvellera continuellement et prendra, en quelque sorte, des chemins indits Une thologie qui n'a comme points de rfrence que des "vrits" tablies une fois pour toutes, ne peut tre que statique long terme, et strile (34),

,

,

;

;

,

,

.

.

,

,

.

'

,

,

.

,

.

,

,

Conclusion

:

La thologie comme rflexion critique la l^omire de la foi, sur la prsence et l'agir de l'Eglise dans le monde complte les deux autres fonctions de la thologie (comme sagesse et comme savoir rationnel) mais, de plus, elle les prsuppose. Dans le prsent travail cause de la nature du sujet nous tiendrons compte surtout de cette fonction critique de la thologie. Cela nous rendra spcialement attentifs la vie de l'Eglise aux engagements que les chrtiens assument,, , , ,

,

16Et en peurticulier leur participation dans le monde au processus de transformation sociale, fait majeur de notre temps qui prend une couleur propre dauas les pays dits du tiers-monde.,,

B/ Dveloppement ou libration- Le -

?

monde d'aujourd'hui traverse une tape de transformation socio-culturelle profonde. Sn outre l'homme moderne a pris clairement conscience des bases conomiques de cette transforma>

tion.-

Dans les pays pauvres, o se trouve l'immense males efforts jorit de la population mondiale pour le changement social revtent une grande urgence et prennent des caractristiques de conflit,

l)

La notion de dveloppementLe terme

.

de dveloppement parat formuler de manire synthtique les aspirations des hommes d'aujourd'hui des conditions de vie plus humaines..)

rigme,

Pour l'histoire du sens du terme dveloppement l'oeuvre de l'conomiste anglais COLIN CLARK semble L.J. LEBRET situmarquer un jalon important (55) ait son apparition en 1945, san.s signaler de manire plus prcise la source de son assertion (36). Pour certains, l'origine du terme serait, pour ainsi dire, ngative Il aurait surgi en opposition la notion de sous-dveloppement qui exprimait la situation - et la dtresse - des pays pauvres compars aux peuples riches (37).. .

b) Approches.

On Le concept de dveloppement n'est pas univoque en donne maintes dfinitions (38) Plus que de les rappeler toutes c'est de ce qui nous intresse prciser les perspectives dans lesquelles elles se.

.

,

situent.

"

17

NOTES

(35)(36)

"The theory of conomie progress"

,

London

,

1940.

date de 1945" ( L.Jc "Le concept de dveloppement L3BRET " Dynamique concrte du dveloppement " Paris, 1967, p. 38). R.LAURSNTIN en citsuit Lebret noqu "il est bien difficile de dater te justement Dveloppement et l'acceptation d'un nouveau mot" salut", Paris, 1968, p. 54). Il s'efforce d'en prciser les antcdents, et d'tablir son sens actu, ,'

(

el (op.(37) Cf. Th.

cit., pp. 54-71).

SUAVET, "Dveloppement" dans " Dictionnaire conomique et social ", 3- d., Paris, 1962.

(38)

est d'un emploi encore trop "Le mot dveloppement rcent pour que son sens soit absolument fix" (Th. SUAVET, loc. cit.).

18

NOTES

(39) Parnii ceux-ci il faut situer une oeuvre qui, par des circonstances spciales et grce des moyens de diffusion bien calculs, a connu son poque de gloi-

re dans les pays sous-dvelopps VI. V/. ROSTOW, " The sta/^es of conomie growth. A non coniin\xnist manifes to", Cambridge, The University Press, i960.:

.

(40) Cf. par exemple, G.,

SEBRE&ONDI, " Sullo sviluppo dl ia societa italiana " Boringhieri H. JAGUA195 " RIBE Desenvolvimento economico e desenvolvimento politico " Rio de Janeiro, 1967 R. BARRE, " Le d veloppement conomique Analyse et politique " Pa. , ;

,

;

.

,

ris, 1958.

19

1

-

Le dvclopj)emcnl peut tre envisag dans une optique purement conomique. Dans ce sens, il serait synonyme de croissance conomique.

Le degr de dveloppement d'un pays se mesurerait alors, par exemple, par la comparaison de son produit national ou de son revenu per capita avec ceuxd'un pays dont on considre qu'il a atteint un^ haut niveau de dveloppement. Cette mesure peut tre afmais le schma sous fine et devenir pius complexe le dveloppement est jacent reste toujours le mme avant tout une augmentation de richesse.; :

Ce sens est le premier apoaraftre historiquement. Ce qui a conduit cette manire de voir, c'est poittre la considration la fois du processus qui a eu lieu en Angleterre, premier pays avoir atteint son

dveloppement, et du mirage que ples riches a provoqu.

le

bien-tre des peu-

Mais peu nombreux sont ceux qui, aujourd'hui, adoptent, explicitement du moins, cette perspective (39). Celle-ci sert olutt de contraste par rapport des conceptions plus intgrales. Cependant, il est pertinent de se demander si elle ne demeure pas, quoique de faon plus ou moins larve, dans le modle capi taliste de dveloppement.2-

Les insuffisances de la perspective prcdente ont conduit une autre, plus importante et aussi plus frquente dans l'actualit. Ici, le dveloppement est pos comme processus social global,

comprenant des aspects conomiques, sociauxpolitiques et culturels.

,

Cette conception s'efforce de montrer que ces diffrents plans sont interdpendants. Le dveloppement de l'un d'entre eux entrane celui des autres,^ et in versement, la stagnation de l'un entrave le dveloppement de tous les autres (40).

Considrer le dveloppement comme un processus global, suppose aussi qu'il faut tenir compte des conditionnements externes d'un pays, et, plus prcisnent voir que la dynamique de l'conomie mondiale d'aujourd'hui

.

,

20

mne d'aujourd'hui mi que de l'conomie mondiale simultanment la cration de plus de richesse pour la minorit et de plus de pauvret pour la majorit (41). De tout cela se dduit une stratgie de dveloppement permette qui, en tenant compte des diffrents aspects de faire avancer globalement un peuple en vitant de daxigereux retours en arrire,,

3- Envisager le dveloppement comme processus social

global engage ncessairement des valeurs thiune ques ce qui suppose, en dernire instance conception de l'homme. Le passage vers l'explicitation d'une perspective humaniste dans la considration du dveloppement, se fait aJ-ors insensiblement et prolonge le point de vue antrieur, sans le contredire L.J. LEBRET a travaill dans ce sens avec insistance. L'conomie dont l'objet est le dveloppement est dfinie par lui comme "la. discipline du passage d'une phase Nous remoins humaine une phase plus hiimaine" (42) trouvons la mme ide dans une autre dfinition du dveloppement "avoir plus pour tre plus" (43) Il serait tout fait erron de penser que cette optin'a comme que qui tient compte des vaieurs hiimaines partisans que ces idalistes invtrs que sont les chrtiens On rencontre des points de vue convergents dans ujn horizon marxiste (44) Cette approche humaniste situe la notion de dveloppement dan.s un contexte plus large dajas une vision historique o l'h^omanit assume son propre destin (45) Cela introduit un changement de perspective que nous prfrons dsigner par le terme de libration Nous tcherons de la prciser dans le paragraphe qui suit., , , ,

.

:

,

,

.

:

(41) Thme labor en particulier par les spcialistes en sciences sociaJ.es qui se sont proccups de la situ-

ationLatine )

des

pp. 53-61

pays dits du, tiers-monde (cf. infra, sur le processus de libration en Amrique:

(42) La citation complte est,

"Le dveloppement seest l'objet mme de l'conomie humaine lon nous est la discipline du pasage ... d'une o.. Celle-ci phase moins humaine une phase plus humaine au rythme le plus rapide possible au cot le moins lev possible compte tenu de la solidarit entre " sous-populations et populations. cit. op. (,

.

,

,

,

.

.

NOTES (suite)p. 28).

21

F. PBRROUX signalait dj cette perspective une conomie "De l'avarice des nations en 1952 du genre humain" dans " Richesse et misre " [39 SeParis, 1952, pp. 195-212. maine Sociale de France) cf. ausVoir en particulier, pp. 199-202 et p. 210 " Paris, L'conomie du XXS sicle " si F. PBRROUX: , ; ,

,

1964.(45) Cette expression,

ont t ainsi que la prcdente adoptes par Populorum Progressio. Voici la dfinition que V. Cosmao avait propose et que L.J. Le"Le dveloppement ne peut bret avait approuve tre que l'volution globale d iine socit se mobilisant elle-mme sous l'impact' de la civilisation scientifique et technique et mettant en oeuvre tout son capital de civilisation et de culture pour faire face la situation nouvelle dans laquelle elle du fait de l'volution historique" ("Les se trouve exigences du dveloppement au service de l'homme", octobre 1967 pp. 587-588). daxLS Parole et mission Voir aussi la dfinition propose par R. LAURENTIN comme rsum de son enqute (op. cit., p. 70).,

:

'

,

,

(44) Cf.

tout le thme de l'homme nouveau et de l'homme total dsLns la socit communiste. L'homme s'y dfi"Ainsi nira non par son aveir mais par son tre l'abolition positive de la proprit prive... doit tre conue non seulement au sens de la .jouissance immdiate et exclusive, non seulement au sens de la L'homme s'approprie son possession de 1' avoir tre ixniversel d'une majnire universelle, donc com"Okonomisch-philosome un homme total" ( K. MARX phische Manuskripte (l844)" dans " Marx-Engels. WerErster Schriften bis 1844 " Ergnz\ingsband ke Teil, Berlin, 1968 p. 539. (Les deux derniers mots Voir souligns du texte de Marx le sont par nous) H.LEFBBVRE, aussi R.GARAUDY, op. cit., pp. 347-551 " Le matrialisme dialectique ", Paris, 1957, pp. 133: , . ,.

,

,

,

.

;

152.(45) Tmoin

de cette inclusion invitable dans le contexte, le paragraphe suivant de Cosmao: "Nous sommes ainsi conduits au-del de l'intgration du dveloppement social au dveloppement conomique, ou comme on dit encore des facteurs extra-conomiques au dveloppement conomique, une vision de l'histoire o l'humanit collectivement prend en charge sa destine collective pour s'humaniser au profit de tout l'homme et de tous les hommes" (art. cit., p.58l).

.

22

NOTES

(46) Voir infra

,

pp 54

,

sur la dcade

de l'idologie du

dveloppement

(47) Dans le cas de l'Amrique Latine liance pour le Progrs.

,

CBPAL

,

BID

,

Al-

.

e

252)

Le procegsas de libratioria)

o

Critique de "1' idologie-du-dveloppement" (peUFaphrase pour dire un mot espagnol dont la traduction littraile serait "dveloppementisme" et en anglais "developmentism" ),

terme dveloppement a synthtis les aspirations des peuples pauvres pendant les dernires dcadesMais il a commenc rcemment s'avrer insuffiseuit Plus encore, on donne aujourd'hui au terme un dsignant le mouvement-pour-le-dveloppement sens pjoratif en particulier en Amrique Latine - Dernirement on a beaucoup parl de dveloppement d'aide aux pays pauvres On a mme tch de crer Les encouune certaine mystiqu.e du dveloppement en ragements au dveloppement assez; chaleureux Amrique Latine dans les annes 50? veillrent des espoirs Mais parce qu'ils n'attaquaient point les racines du mal provoquant plutSt ils chourent dceptions confusion et frustration (46), - Il faudrait reconnatre parmi les causes de cette c'est que le situation une des plus importantes dveloppements dans une perspective tendance plutt conomiste et moderniste a t souvent promu par des organismes internationaux dpendant leur tour des groupes qui ont en leurs mains le contrle les Bn consquence de l'conomie mondiale (47) changements prns vitaient soigneusement de toucher aux grands intrts conomiques internationaux les oligaret ceux de leurs allis naturels Plus encore, dans la plupart des chies nationales ces prtendus chsingements n'taient que des cas formes nouvelles et camoufles permettant d'accrotre la domination de ces grands groupes conomi- Le,.

>

,

,

,

,

:

,

,

'

o

.,

ques.- Le

'

mouvement-pour-le-dveloppement se transforme ainsi en synonjrme de rformisme et de modernisac'est' dire de mesures timides et ineffication lorsqu'elles ne sont pas des erces long terme voire des obstacles une vritable transreurs formation. Les pays pauvres prennent une conscience de plus en plus claire du fait que leur sous-dveloppement n'est que le sous-produit du dveloppeEt donc, que leur propre dment des autres pays veloppement ne se fera que contre la domination que les pays riche exercent sur eiix - Cela conduit du processus une vision moins rose Ci in +.0 o+ /-in o a i-^rM-i-FT + ran -ifaii. Le d velODTDement, , , .

r>

=!--;

ri

-

.

24

doit s'attaquer axxx causes de la situation et parmi celles-ci la plus profonde est la dpendance conomique, sociale, politique et culturelle de certains peuples en relation d'autres. Dans cette perspecparler d'un processus de libration s'avre tive plus adquat et plus riche en contenu h-omain.,

b)

L'horrane,

agent de sa propre destine

:

Caractriser la situation des pays pauvres comme domination et oppression nous mne parler de liune vision beaucoup plus Mais, de plus bration globale et plus profonde du devenir historique de l'humanit est en jeu..,

1- Nous avons dj vu que l'approfondissement mme de la notion et des a aspirations au dveloppement conduit au fait qu'il faut tenir compte des valeurs thiques et humaines qu'un tel processus engage. actuellement d'autre part Mais l'homme ne peut tre compris que dans une perspective historique - Les XVI2 et XVII2 sicles marquent un tournant dans la comprhension que l'homme a de lui-mme .Ses relations avec la nature changent substantiellement cause de la naissance de la science exprimentale et de la technique de manipulation de la nature qui en rsulte - En dpendance de ce processus, l'homme commence se percevoir d'une manire diffrente (4S) Une philosophie de la subjectivit cratrice nat avec DSSCAHTiilS et surtout avec IvAI^T. ILG-IjL prolonge cotte approche (49) en dveloppant le thme de l'histoire (50) Le devenir historique travers la clbre dialectique du matre et de l'esclave, apparatra comme un processus de libration de l'homme (pi). Dans ce processus, l'homme assiime peu peu la matrise de son destin en l'orientaunt vers une socit affranchie de toute servitude. - I^IARX dans cette ligne (52) par se situe l'analyse de la socit capitaliste dans laquelle l'exploitation de l'homme par l'homme est effective et en signalant les voies de solution pour que l'homme puisse vivre comme tel (53).'

,

,

,

.

.

.

,

,

,

,

.

t

25

NOTES

(48)

"C'est par leur physique que les mtaphysiques vieillissent" selon la phrase bien connue de G-ILSON. Sur la dpendance de la relation homme - nature et l'auto-comprhension de l'homme voir E. SCHILLBBEECKX "L'immagine di Dio in un mondo secolariazato" dans " Ricerca " (Roma) Il s'agit 31. III. 1968 d'ailleurs d'une perspective fortement souligne par Marx,

,

,

.

(49) Cf.

H. DE LIMA VAZ Paulo, 1968.

",

Ontolo^ia

e

historia "

,

Sao

est (50) Le point de vue d'une philosophie de l'histoire dj prsent en Kant ( orientation vers le royaume des fins ) et mme avant lui Mais la thmatisa^ion plus systmatique est due Hegel..

(51) Aspect"

soulign plus spcialement par* A. KOJEVE Introduction la lecture de Hegel Leons sur la phnomnologie " Paris, 1947.,.,

(52) On ne prtend pas ici que l'oeuvre de Marx se rduise une orchestration socio-conomique de la thma'

tique hglienne Son originalit est indiscutable, mme si on l'interprte diversement..

(53) Comme on le sait,,

cette perspective n'est pas trangre Hegel surtout dans ses travaux de jeunesse. Cf. G-. LUKACS, " Der .iijn.ge Hegel und die Problme der voir Berlin, 1954 kapitalistischen G-esellschaf " " aussi J. HYPPLITE Etudes sur Marx et Hegel ", Paris En aucun cas cette partie de son oeuvre 1955 n'atteint cependemt la rigueur des travaux de Marx on peut mme dire que l'apport de ce dernier a permis de rapprcier cet aspect des oeuvres de jeunesse de Hegel.,

;

,

,

.

;

,

26(54) Ce qui explicite, d'autre psirt,

NOTBS

les virtualits plus profondes contenues dans la notion de dveloppement: "le concept de dveloppement... est une version qui transpose dans l'immanence l'ide de providence divine, version encore plus scularise que le concept de progrs" (H. JAGUARIBS, op. cit., p. 15).

(55) On sait que le terme "dveloppement" est d'introducDans tion rcente deuis le magistre ecclsiastique " 3glise et socit conomi le livre de J.Y. CALVEZ.,

que " Paris, 1959 on ne trouve aucune rfrence cette notion Le thme est abord pour la premire cf. Laufois ( sauf une brve allusion de Pie XII rentin op. cit., pp. 134-135 ), par Jean XXIII dans Mater et Magistra (j.Y. Galvez lui consacre un chapitre entier du deuxime volume du livre prcit publi quatre ans plus tard ) Pacem in Terris lui accorde une attention spciale G-audiiom et Spes lui consacre toute une section. Finalement ,Populoriam Progressio fait du dveloppement son sujet central et, ,

.

,

,

,

.

*

xinique.

par exemple (56) Voir les travaux de H. MARGUSE, qui, en se situant dans une ligne hglienne et marxiste ajoutent des lments do rflexion plus contem, ,

,

porains.(57) Cf.

parmi les auteurs rcents les tudes inspiran" tes de E. BLOGH Pas Prinaip Hof fnunp: " Frankf urt " Voir aussi J. MOLTMAIJJ 1959 Thologie der Hoff nung " Mimchen, 1965, , .

.

,

.

(58)

Il est dommage que cotte ide n'ait pas t plus explicite dans l'encyclique A cet gard Populorum Progressio est un texte de transition Gomme on l'a remarqu mme si elle parle de "l'imprialisme international de l'argent" d'une "injustice qui crie vers le ciel" ainsi que d'une sparation grandissante entre pays riches et pays pauvres elle s'adresse aux puissants de ce monde pour qu'ils veuillent tre assez bons pour raliser les changements ncessaires Cf. R. DUHONT "Populorum Progressio. Un pas en avant trop timide" en Esprit juin 1967, R. OZANAI-1 DE ANDRADE pp. 1092-1096 "Populorum Progressio neocapitalismo ou revoluao" dans Paz e terra, Rio de Janeiro, n24 aot 1967, pp. 209-221.,

.

,

,

,

,

.

,

,

,

;

,

:

,

,

;

(suite de la note 58 et les notes 59-60

:

cf. p.

29)

272- Voir l'histoirecornraeur.

-arocessus d'-

tion du dveloppement dans une perspective plus large, plus profonde, plus radicale 54 ) De plus cette approche exprime mieux les aspirations des peuples pauvres qui se peroivent euxmmes avant tout comme des peuples opprims. Pace cela, le terme dveloppement parat quelque peu "aseptis" et en consquence dformant une ralit tragique et lourde de conflits (55). La libration de l'homme au long de l'histoire suppose non seulement de meilleures conditions de vie, un changement radical des structures, une rvolution sociale mais plus encore la cration constante d'une nouvelle manire d'tre homme, une rvolution culturelle permanente (56). Ce qui est surtout en Jeu c'est une conception dynamique et historique de l'hor.ime orient dfiii'tivement vers son avenir agissant dans le prsent en fonction du lendemain, en vue d'une ralisation toujours plus pleine et totale de luimme, et en solidarit avec toute la collectivi(. , , ,

,

:

,

s'insinuent dj dans quelques actes du magistre ecclsiastique. Un texte, un peu isol, de Populorum Progressio parle de "construire un monde dans lequel tout homme, sans exception de race de de religion nationalit, puisse vivre une vie pleinement humaine affi-anchie de la servitude qui lui vient d'autres hommes et d'une nature insuf f isajTiment matrise" (n247) (58). L'ide est franchement exprime dans le message des Bvques du Tiers-Monde publi en rponse l'appel de Populorum Progressio (59) Ce thme de la libration, nous le trouvons souvent. Jusqu' constituer presque la synthse de son message, dans un texte plus important que le prcdent du point de vue de son autorit doctrinale: les documents de la 112 Confrence de l'ipiscopat Latine -Amricain (tenue Medellin en 196s), ,,

t hiimaine (57). Ce thme et ces expressions

,

(60).

28

Conclusion-

:

Le ternie libration vite les connotations pjoratives En mme temps, ce que celui de dveloppement comporte terme s'insre dans la logique des virtualits les plus profondes du processus qualifi comme dveloppement. ~ D'autre part libration souligne les aspects de conlequel oppose les peuples pauvres flit du processus Ce caractre de conflit peut faaux peuples opulents cilement tre laiss de ct par le terme dveloppement - De plus libration parat mieux exprimer tant les asque la plnitude d'une pirations des peuples opprims perspective qui fait de l'homme non pas un lment passif;, mais au contraire, l'agent de l'histoire. - Plus profondment concevoir l'histoire comme un prositue les changements cessus de libration de l'homme sociaux que l'on soixhaite dans un contexte dynamique et dans un horizon largi. Cela permet, en mme temps, une meilleure comprhension de notre poque. - Finalement, le terme dveloppement oblitre quelque peu (6l) Par la problmatique thologique qui en surgit contre parler de libration nous mne plus facilement aux sources bibliques qui inspirent la prsence et l'agir de l'homme dans l'histoire.. , ,

.

,

,

,

,

.

,

,

NOTES(Note 58P.-

29

suite)

l'encyclique de PERROUX "Populorum Progressio la Rsurrection" dans " L'Eglise dans le monde de ce T. III temps " Si l'encyclique avait pp. 201-212 employ le langage de la libration de mstnire plus nette elle aurait touch plus directement les opprims de manire qu'ils prennent eux-mmes en charge leur propre destin., , , , , . ,

(59) Reproduit entre autres, Lima, 1968, pp. 19-29.,

dans

"

Si^nos de renovacion "

(60) Nous tudierons rement, voir pp.

de plus prs ces textes, ultrieu 69-74-

(61) R.

LAURENTIN, op. cit., p. 53-

.

NOTES

(1)

sa manire, la thologie dite des ralits terrestres a tch de rpondre cette question; il en va de mme pour la thologie de l'histoire.affirmait rcemment "Ea dpit des nombreuses discussions sur l'Eglise et le monde rien n'est moins clair que la nature de leurs rapports mutuels" "L'Eglise et le monde" dans " Thologie " d aujourd hui p.l50). "La question de l'Eglise et du monde est irritajite de complexit" (Ch.DUQUOC "L'Eglise et le monde" dans Lumire et Vie n2 73, 1965, p.49):

(2)

J.B. METZ

,

('

'

.

.

,

,

(5) Cf. p.

M. PEUCHMAURD "Esquisse pour vme- thologie de la rvolution" dans Parole et Missionoct. 1967,,,

633.

.

CHAPITRE II

:

DE POSITION QUESTION LA

Les prcisions qui prcdent nous mnent une rflexion qui s'oriente dans la ligne d'une Thologie de la libration.

Cette thologie devra partir de la prsence et de l'agir des chrtiens dans le monde. Mais d'abord il convient de bien poser la question. Celle-ci a reu des rponses diffrentes au cours de la vie de l'Eglise et prsente actuellement des caractristiques propres.

A/ La question.

Lorsqu'on parle d ujae thologie de la libration, quel il s'agit de trouver une rponse la question rapport y a-t-il entre le salut et le processus d'mancipation de l'homme au long de l'histoire ?'

:

Seulement, La question est, certes, ajicienne (l) il s'agit d'une nouvelle manire de poser le problme classique de la relation entre foi et existence humaine, foi et ralits terrestres, ou, sous une autre reforme. Royaume de Dieu et construction du monde lation dont une autre se dgage, celle de l'Eglise et.

,

du monde

(

2

)

quels De l surgit une seconde grande question doivent tre les principes thiques qui inspirent la participation du chrtien au processus de libration ? (3).:

.

32 Ce qui est nouveau, ce n'est pas de msuaif ester de l'inmais de dcouvrir au trt pour la tche terrestre Si nous creusein de cette tche la valeur du salut sons un peu, nous percevons que la question vise la si car tre chrtien gnification mSme du christianisme c'est accepter, et vivre dans la foi, l'espraince et la charit le sens que la parole rvle et la rencontre personnelle avec le Seigneur donnent l'existence humaine. Nous sommes donc, on le voit mieux de nos jours, face la question thologico-pastorale centrale qu'est-ce qu'tre chrtien ? Comment tre Eglise dans la nouvelle situation qui merge ? (4),

.

;

,

:

Il ne suffit pas aujourd'hui de dire que le chrtien ni ne doit pas se dsintresser des tches terrestres que celles-ci ont une certaine relation avec le salut II faut faire un effort pour dterminer cette re(5) lation ( et faire face aux problmes concrets qu'elle soulve coopration avec les marxistes dans l'action politique oubli de la vaJ.eur inspiratrice de l'action temporelle que la foi est cense possder division et conflix des options politiques au sein de la communaut chrtienne jusqu'o peut aller l'enseignement du magistre en cette matire dans quelle mesure la foi peut juger les modles de dveloppement etc ...),

c

:

;

;

;

;

,

Cette dmarche mne vers une autre image de l'EgliPeut-tre est-ce l ce qu'on craint Mais beaucoup de chrtiens n'ont-ils pas dj commenc en vivre dans le monde actuel ? (6)se..

B/ Rponses diffrentes.

Telle que nous l'avons rappele, la question est ancienne et a reu des rponses diffrentes au long de l'histoire tant au niveau de la pastorale qu' celui de la rflexion de l'Eglise.,

Ces approches de la relation de la foi et des ralits terrestres de l'Eglise et du monde sont aujourd'hui, d'une manire ou d'une autre encore actuelles. C'est pourquoi nous les rappellerons brivement (?), ,,

33

NOTES

(4)

C'est chercher dans la Rvlation la rponse cette question qui est pour Camus la plus importante de la philosophie "Juger que la vie vaut ou ne vaut pas c'est rpondre la question la peine d'tre vcue fondamentale de la philosophie" ( " Le mythe de Sisy phe").: ,

(5)

Gaudium et Spes donne parfois l'impression de rester Il en va de mme pour la pludans ces gnralits part de ses commentateurs..

(6)

Cf., par exemple, R. LAURENTIN, et contestation dans l'Eglise "

",

Bn.jeu du IIS Synode et "A Paris, 1969;

la recherche d'une Eglise" juillet 1969.

dsuis

Faxole et Mission

,

(7)

Cf.- G.

GUTIBRREZ, " La pastoral de la Iglesia en Ame rica Latina " Montevideo, 1968.,

34

NOTES

(s)

C'est seuleraent Vatican II que l'Eglise a commenc abandonner la mentalit de chrtient, poque historiquement rvolue., quatre sicles auparavant.Ce sont les squelles de ce que l'on a appel "l'au-

(9)

gustinisme" politique cf. H. ARQUILLBRE tinisme politique ". 22 d., Paris, 1955.,

",

L'

augus -

(10)

"L'Eglise n'avais pas, en face de soi, un monde pleinement monde tout ordorjae qu'tait la socit servir les fins du salut ternel dont l'Eglise dterminait les rgles" (y. CONGAR, "Eglise et monde", dans " Le Concile au .jour le .jour troisime session " Paris. 1965, p.l43)o,,

,

(11) Nous en trouvons un cas typique

dans l'interdit clbre ("non possumus") aux catholiques italiens de participer la vie politique de leur pays.

(12) Ce fut l'ide qui inspira les partis confessionnels en Europe et en Amrique Latine la fin du sicle pass et au dbut de ce sicle C'est ce que l'on rclame encore aujourd'hui des catholiques qui remplissent une fonction publique..

(13) Cette

perspective se reflte clairement dans le classique " Manuale d'Azione Caxtolica " de L.CIVARDI, voir en particulier les chapitres VI et VIII du tome premier (72 d., Pavia, 1932).,

(14) Cf., par exemple

le cas du schma le plus discut du Concile, celui sur la libert religieuse Voir cet gard G. GUTIERREZ "Libertad religiosa y dia" logo Salvador" dans Salvacion y construccion del mundo " Barcelona, 1968, pp. 11-43.:

,

.

35l) La chrtiant.

Bile est, La chrtient n'est pas un concept lieu, un fait. C'est l'exprience historien premier que la plus longue de l'Eglise, ce qui explique qu'elle ait laiss une trace si forte dans sa vie et dans sa rflexion (s)..

Dans cette perspective, les ralits terrestres Le temporel ne possdent pas une autonomie propre n'a pas de consistance face l'Eglise. En consquence, celle-ci l'utilise en vue de ses propres fins (9). pour le Royaume de Dieu ne laisse pas de Le projet place un projet historique profane (lO). L'Eglise apparat en premier" lieu comme la d"Hors de l'Eglise, pas positaire exclusive du salut susceptible de nuances de salut" Cet exclusivisme justifie que qui ne modifient pas la pense de fond l'Eglise se prsente comme un pouvoir vis--vis du monde et surtout, qu'elle se considre le centre de 1 o eu vr e sal vat r i c e.:

.

,

,

,

'

Dans ces conditions, participer a.ux tches terrestres aura pour le chrtien xin sens bien prcis travailler pour le bien direct et immdiat de l'Eglise (il). La "politique chrtienne" sera celle qui contribue , ce que l'Eglise puisse raliser sa mission vanglisatrice et vite que les intrts de l'Eglise soient affects (l2) Ceux-ci sont reprsents les avant tout par la hirarchie et le clerg lacs seront leurs auxiliaires spcialement grce leur situation dans la socit politique (l3):,

.

,

,

;

,

Ne considrons pas trop facilement cette mentalit comme liquide de Elle subsiste aujourd'hui faon explicite ou implicite, dans des secteurs numriquement vastes et importants de l'Eglise C'est ce qui provoque de nos jours des conflits et des rsistances au changement, qui ne s'expliqueraient pas autrement et peut-tre Les dbats conciliaires (l4) surtput 1 aprs-concile le prouvent largement.. , . .,'

,

2;

La nouvelle chrtient

.

Les graves questions que la nouvelle situation historique pose l'Eglise partir du XVI9 sicle, et qui se radicalisent avec la rvolution franaise, donnent lieu," lentement une autre approche pasto-',

36

C'est raie et une autre mentalit thologique celle qui, grce MARITAIN, recevra le nom de nouvelle chrtient (l5)..

Il s'agit d'un premier effort pour considrer le La tche de monde dans sa consisteince propre (l6) construction de la socit politique apparat comme n'ayant pas un sens exclusivement religieux ou de dEn consquence, l'aufense des intrts de l'Eglise tonomie du temporel est surtout affirme vis--vis de la hirarchie de l'Eglise afin d'viter qu'elle intervienne dans un champ dont on considre dsormais qu'il n'est pas de sa comptence.=

.

,

La vision de l'Eglise comme pouvoir face au monse nuance considrablement Mais, d'une certaine manire elle demeure au centre de l'oeuvre salvatrice.de, o,

Cette position cherche aussi - un moindre degr toutefois que la prcdente - des conditions favorables l'action de l'Eglise dans le monde Pour cela, il est ncessaire d'difier une "chrtient profane". Une fois affirme la consistance du monde le lac acquiert une fonction propre qu'il n'avait pas auparavant (l?) Il lui revient principalement de crer cette chrtient nouvelle. C'est pourquoi il convient de se regrouper dans des organisations d'inspiration - et d'tiquette - chrtienne (is)..,

Cette position reprsente un premier effort pour apprcier positivement la tche terrestre aux yeux de la foi et pour mieiox situer l'Eglise dans le monde moderne. Ce qui a produit des engagements authentiques et gnreux de beaucoup de chrtiens pour la construction d'une socit juste. Mais aujourd'hui nous voyons qu'il s'agissait d'vm essai timide et, au fond, ambigu,

(19).

5/ La distinction des pleins .

L'approche de la nouvelle chrtient a permis, d'abandonner la vision traditionnelle et d'avancer vers une position dans laquelle les termes de la relation apparaissent mieux dfinis (20) La pastorale et la rflexion thologique de quelques secteurs de l'Eglise s'orientaient dans les annes prcdant le Concile vers une distinction trs nette entre Eglise et monde l'intrieur de l'unit du plah de Dieu (2l)..,

,

,

37

NOTES(15) Cf." L'humanisme intgral " Paris 1936 (nous cide tons suivant 1 d de 1947). Les antcdents cette position remontent au "libralisme catholique" du XIX2 sicle.,

,

'

.

(16) Si dans l'approche antrieure la thologie augustinienne donnait le ton, ici ce sera le thomisme.

(17) Cette fonction

est facilite par la clbre distinction entre agir "en chrtien" et "en tant que Cetchrtien" (cf. J. MARITAIN, op. cit., p. 299) cf. par exemple, te distinction fera vite fortune A. DE SORAS, " Action catholique et action temporel . ,

le", Paris, 1938.(18) Cf.J. MARITAIN, op. cit., pp. 272-275. Ce qui donna lieu l'apparition des partis modernes d'inspiration social-chrtienne.

(19) Malgr ses efforts il reste toujours dans cette poMaritain se sition un relent d ecclsio-centrisme'

.

comment un non-chrtien peut demande, par exemple appartenir un parti politique d'inspiration chrmais il ne s'arrte pas considrer la tienne question, aujourd'hui plus actuelle, de savoir dans quelles conditions un chrtien peut participer un ixne ou mme hostile parti politique tranger perspective chrtienne., :

,

,

(20) Le premier effort de distinction des plans saxis les

Mais sparer vient prcisment de J. MARITAIN cette thmatique s'enrichit et se radicalise trs vite, en laissant de ct tout rsidu de "chrtien,

.

t".(21) Les travaux d'Y. CONGAR reprsentent bien cette position cf. " Jalons pour ixne thologie du laxcat ", Voir aussi A. GRAVASSE, " Eglise et a Paris, 1962 " Le ". 32 d., Paris, 1953 postolat G. PHILIPS, . ;

,

Tournai rle du lacat dans l'Eglise " 1954 J. HAMER, " L'Eglise est une communion ", Paris, 1962.,

,

;

.

.

.

.

38(22) Cf.(

NOTBS",

par exemple note doctrinale

Civilisation

et

vanglisation "),

du Comit Thologique de Lyon

Lyon, 1957.(23) Cette ide.

affleure dans des textes de l'piscopat franais Slle est le rsultat de l'exprience des mouvements apostoliques spcialiss.Y. CON&AR a les oeuvres cites la note -19rappel rcemment l'existence de ces deux missions de l'Eglise dans le monde de "Le rle de l'Eglise ce temps" dans " L'Eglise dans le monde de ce temps ",. :

(24) Cf.

T. II

,

p.

305.

(25) A. LIEGE fait la distinction entre institutions temporelles ciirtiennes "potestatives" et "d'ducation"(" Thologie pastorale gnrale " polycopi ;,

Paris, 1962, cours

(26) Cf. les critiques;

connues et tx^s pertinentes d'E. MOUNIER voir "Peu la chrtient" par exemple dans " Oeuvres " T. III, Paris, 1962, pp. 686-714., . ^ .

,

(27) Voir le clbre chapitre III ("Royaume, Eglise, de Hirarchie et lacat") dans " Jalons pour.

Mon"

(28) C'est la position d'Y.CONGAR, A.GHAVASSE, G.PHILIPS, et d'autres K. RAHNER, dans un article qui suscita.

des polmiques ardentes avait affirm qu'il ne revient au lac que la construction du monde ("L'apostolat du lac" dans N.R.T. janvier 1956, pp. 3-32 voir aussi Ch. 3AUMGARTNER, "Formes diverses de l'apostolat des lacs" dajns Christus janvier 1957, pp. 9-33 qui reprend avec un vocabulaire un peu diffrent les mmes ides) Y. CONGAR refusa explicite ment cette ide ( "Esquisse d'une thologie de l'Action Catholique" dans Cahiers du clerg rural aotseptembre 1958 Voir aussi la note des pp. 399-400 aumniers de l'A.C.O. franaise "A propos de l'apostolat des lacs" dans Masses Ouvrires mai 1957, pp. 1-29).,,

;

,

;

.

,

,

.

,

,

(29) Cf. par exemple, A. (30) Cf.".

CHAVA3SE, op. cit., p. 18.,

" Jalons pour. chapitre VIII o il s'agit de l'Action Catholique et de l'engagement temporel des

lacs.(31) Cf.J.

BONDUSLLE,

"

La rvision de vie"

.

Paris, 1964

39

Le monde oureissait beaucoup plus claireraent que par le pass, comme consistant en lui-mme, comme distinct de l'iiglise, et ayant ses fins propres (22). L'autonomie du temporel tait affirme non pas seulement face la hirarchie mais aussi par rapport la mission de l'Eglise Celle-ci ne doit pas intervenir institutionnellement en matire temporelle, sauf, selon la plus ancienne tradition, travers la morale - nous allons le prciser ce qui signifie dans la pratique, l'intervention travers la mdiation de la conscience du chrtien 1.23). L'dification de la cit terrestre possde donc sa consistance propre.,

.

,

En consquence, la fonction de l'Eglise dans le monde se prcise On dira que l'Eglise a deux mis1 vanglisation et sions l'animation du temporel (24). La tche de construction du monde ne la concerne pas Il s'ensuit que cette position regarde avec peu de sympathie les institutions temporelles d'inspiration chrtienne en particulier celles qui reprsentent un "pouvoir" (25). '>n effet, elles font apparatre le christianisme cor-ime une idologie pour la Les plans se trouvent construction du monde (26) clairement diffrencis L'unit sera donne par le Royaume de Dieu l'Eglise et le monde contribuent chacun sa manire, son dification [27 J. :'

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Cela conduit galement diffrencier les fonctions du prtre et du lac Le prtre abandonne son point d'insertion dans le monde. Sa mission s'identifie avec l'Eglise: vangliser et animer le temporel. Intervenir directement dans l'action politique, c'est trahir sa fonction L'appartenance l'Eglise n' enlve pas au lac son insertion dans le monde 28) .Dans la construction du monde le lac cherche difier une socit avec d'autres hornnies chrtiens ou non dans laquelle il y ait plus de justice et d'humanit, tout en sachant que par cette action il est en train de btir une socit dans laquelle l'homme peut rpondre librement l'appel de Dieu (29). Mais ceci en respectant pleinement l'autonomie propre la socit temporelle La mission des mouvements apostoliques lacs, par contre, ne doit pas aller plus loin que la mission de l'Eglise et du prtre: vangliser et animer le temporel ( 30 ) Une certaine faon d'envisager la "rvision de vie" correspond cette thologie cette rvision assure une prsence chrtienne authentique dans le monde (31).. .

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40Ce schma a l'avantage de la clart. Il aboutit aussi un quilibre difficile entre l'unit du Avec plaja de Dieu et la distinction Eglise-monde l'une ou l'autre nuance, c'est la thologie prsente en majorit dans les textes de Vatican II (32)..

C/ La crise de_la thologie de_la distinction des plans.

L'apparition de la position que nous avons appele de nouvelle chrtient implique naturellement le refus de la vision qui l'a prcde .Mais son toiir elle est critique par celle de la "distinction des plans" Or les dernires annes ont vu la mise en question d'iine thologie, et de l'action pastorale qui lesquelles, s'en dgage base sur ces distinctions il faut bien le reconnatre ont permis d'clairer beaucoup de problmes - en se frayant une voie parmi autant de difficults- non-ngligeables (35)Cette crise se manifeste avec nettet deux dans niveaxix dans la pastorale et en consquence la rflexion thologique.o,

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l) Au niveau pastoral

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Le schma de la distinction foi-ralits terrestres Eglise-monde qui mne discerner deux missions dans l'Eglise et diffrencier les rles du prtre et du la^c commence perdre sa vitalit et devient un cueil. Deux questions peuvent servir d' exemples, ,,

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a)

Crise des mouvements apostoliques de lacs

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L'closion et l'affirmation d'un lacat adulun des faits majeurs de l'Eglise dans les dernires dcades G-ermes d'une profonde rnovation ecclsiologique et spirituelle les mouvements d'apostolat lac, en tant que mouvements, vivent une grave crise laquelle il est utile de rte

ont t

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flchir.

Ainsi que nous l'avons voqu, on considrait les mouvements d'apostolat lac" avaient pour mission d vangliser et d'animer le- temporel, sansque'

41

NOTES

(32) Il y a cependant

des approches et des intuitions qui visent plus loin, cf. par exemple, Gaudium et Spes, n2 39 et 43 Y. CONGAR fait remarquer qu' cause de la mthode inductive adopte, Gaudium et Spes ne pajrle pas avec clart de deux missions de l'Eglise "cela aurait pu tre dit ds le dbut par mode de thse doctrinale" ( " Le rSle de l'E glise dans le monde de ce temps ", T. II, p. 306 ). Mais, prcisment, la dynamique mme de la mthode adopte mne certains moments au-del d ixne distinction de plans rigide; :'

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(33) Un bon rappel et une critique de ces distinctions dans A.MANARANCHE, "Foi d'aujourd'hui et distinctions d'hier" dans Pro.jet juin 1967, pp. 641-656.,

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42

NOTES

(34) A propos d'iine des premires manifestations de cette crise, cf. " ACJF, Signification d'une crise. Analyse et documents ". Paris, 1964.

(35)

"En ralit croire que l'on peut donner des jeunes une formation spirituelle vivante qui serait dgage des problmes temporels est une illusion Ainsi une ducation religieuse et humaine suppose que les militants de nos mouvements soient mme d'laborer la lumire de l'Evangile une solution concrte tous leurs problmes de vie. Cela, ils ne le peuvent qu' l'intrieur des mouvements" ( Compterendu d'iin dirigeant de la J.E.C. en 1950, op. cit.,, . .,

p.

59).

(36) Cf. J.Ao DIAZ,

" La crisis permanente de la Accion Catolica " Barcelona, 1966 En Amrique Latine au Brsil en particulier, le problme a pris des formes aigus (cf. infra, pp. 62-65).,.

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(37) J.

COMBLIN s'tait dj interrog il y a quelques " annes Echec de l'action catholique ? " Paris, 1961 Mais la solution qu'il proposait allait apparemment en sens inverse du mouvement qui avait provoqu la crise.,: ,

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n

43

La vie de ces intervenir directement dans ce domaine mouvements dborda ce schma conceptuel . la fois troit et "aseptis" se sont Les mouvements de jeunes, en particulier sentis de plus en plus appels des prises de position claires et engageantes (34), c'est dire assumer plus profondment les problmes du milieu dans lequel ils taient censs assurer une prsence d'Eglise..

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On voulut d'abord l'expliquer en prtendajat qu'il les mouves'agissait d'une proccupation pdagogique ments de jeiznes ne pouvaient pas sparer la formation religieuse de la formation politique (35). Nanmoins, la question tait beaucoup plus profonde. Ce qui entrait en crise, c'tait la conception mme de ces organisations dans la mesure o les mouvements prenaient position au l'Eglise (en particulier la hirarchie) plan temporel Mais, s'engageait un niveau qui n'tait pas le sien en mme temps, la dynamique mme d'un mouvement dont les membres taient sollicits par leur situation prendre entranait ndes engagements de plus en plus dfinis incompatible cessairement une radicalisation politique dans la meavec la position "officielle" d'une Eglise sure o celle-ci prnait une certaine neutralit en matire temporelle.: :

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(56) Les crises se sont succdes et x-pandues tels qu'ils sont Les mouvements apostoliques lacs semconus par le schma de la distinction des plans blent avoir puis leurs possibilits (37)..,,

h) Prise de

conscience d'une situation_aline

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Depuis longtemps on parle dans les milieux chrtiens du problme social, mais c'est seulement dans les dernires annes qu'on a pris une conscience claire de l'ampleur de la misre, et surtout de la situation d'oppression et d'alination dans laquelle vit l'immense majorit de l'humanit. Plus encore, on a pris conscience du fait que l'Eglise est lie ceux qui dtiennent le pouvoir conomique et. politique dans le monde actuel, soit parce qu'elsoit parce que dans le appartient aux peuples opulents les pays pauvres - comme en Amrique Latine - elle se lie aux classes exploiteuses.,

que l'Eglise dans ces conditions Peut-on dire n'intervient pas dans le "temporel" ? Lorsqu'elle lgiest-ce time un gouvernement dictatorial et oppresseur, ,

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44

qu'elle accomplit exclusivement une fonction religieu? On dcouvre alors que la non- intervention en matire politique ne vaut que pour certains actes de l'autorit ecclsiastique mais non pour d'autres C'est dire que ce principe n'est pas appliqu quand il s'agit de maintenir le statu quo mais qu'il est allgu quand l'apostolat lac prend une attitude considre comme subversive.se,

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En outre face 1 immense misre et 1 injustice - l surtout o l'Ecomme en Amrique Latine glise jouit d'une grande influence sociale ne devrait-elle pas intervenir plus directement et abandonner le domaine des dclarations lyriques ? De fait, elle a agi ainsi quelques fois mais en disant que c'tait une fonction de supplance (38) L'ampleur et la permanence du problme rendent cet argument insuffisant.,' '

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En rsum

:

les options politiques se radicalisent et les engagements concrets que .les chrtiens sont en train d assiimer manifestent l'insuffisance du schma thologicopastoral de la distinction des plans.'

2

)

Au niveau de la rflexion thologique