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SOLANGE FALADÉ : CLINIQUE DES NÉVROSES Patrick Delaroche ERES | « Figures de la psychanalyse » 2005/1 n o 11 | pages 226 à 232 ISSN 1623-3883 ISBN 2-7492-0337-6 Article disponible en ligne à l'adresse : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-figures-de-la-psy-2005-1-page-226.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- !Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Patrick Delaroche, « Solange Faladé : Clinique des névroses », Figures de la psychanalyse 2005/1 (n o 11), p. 226-232. DOI 10.3917/fp.011.0226 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour ERES. © ERES. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. Powered by TCPDF (www.tcpdf.org) Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 179.199.229.38 - 10/12/2015 13h27. © ERES Document téléchargé depuis www.cairn.info - - - 179.199.229.38 - 10/12/2015 13h27. © ERES

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SOLANGE FALADÉ : CLINIQUE DES NÉVROSESPatrick Delaroche

ERES | « Figures de la psychanalyse »

2005/1 no11 | pages 226 à 232 ISSN 1623-3883ISBN 2-7492-0337-6

Article disponible en ligne à l'adresse :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-figures-de-la-psy-2005-1-page-226.htm--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

!Pour citer cet article :--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Patrick Delaroche, « Solange Faladé : Clinique des névroses », Figures de la psychanalyse2005/1 (no11), p. 226-232.DOI 10.3917/fp.011.0226--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

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* Anthropos/Economica, 2003.1. Cette note de lecture a récemment été publiée par Psychologie clinique, que nous remer-cions ici.2. Les numéros de page entre parenthèses renvoient à cette édition.3. A ‡ j (a, a’, a’’…).4. PUF, 1971.

La mort récente de Solange Faladé,fidèle historique de Jacques Lacan,donne une gravité et une résonanceémouvantes au témoignage qu’elle avaitfait paraître peu de temps auparavantsous le titre de Clinique des névroses 2

qui rassemble les séminaires des années1991-1993 et prend de ce fait les alluresd’un testament. Rien de plus vivantcependant que ces leçons hebdoma-daires qui suivent pas à pas l’enseigne-ment du Maître. C’est parfois l’aveu dis-cret d’une certaine difficulté : « Ça faitlongtemps que je suis sur cette formulede Lacan 3 » (170) ; ou encore uneremarque personnelle sur son plaisir delire Freud : « J’aime l’observation deLucy » (268). Cette Lucy des Etudes surl’hystérie 4 qui répond à Freud que jus-qu’à sa question elle ne savait pas qu’elleavait un penchant pour son patron.Solange Faladé s’attardera à plusieursreprises sur cette réponse étonnante quiinterroge sérieusement le travail fait encure. Car, on l’a déjà compris, en grandeclinicienne, Faladé n’essaie pas d’ajuster

la théorie au dire du patient et prend sesdistances avec les maîtres : « On ne peutpas rendre compte de la clinique avec unseul schéma », remarque-t-elle (278). Etailleurs (59), à propos des doutes qu’avaitle petit Hans sur le sexe de sa mère : « Cesont des points qui se sont perdus dansl’enseignement de Lacan, mais des pointsqui permettent de comprendre les cli-niques qui nous intéressent ». Aussi bienconcilie-t-elle sa rigueur et son désir deguérir : « On ne peut toucher à la struc-ture mais on peut faire en sorte qu’il n’yait pas du pathologique » (145). Sa lec-ture de Lacan lui permet d’affirmer que« l’amour n’est pas uniquement narcis-sique » (271) et « à cause du savoir quinous est supposé on nous met du côté dusujet », et elle en conclut ceci qui en ferabondir plus d’un mais se réjouir ceux quiont connu un Lacan vivant : « Si noussavons garder nos analysants, c’est quenous les aimons aussi » (272).

Pourquoi ce titre, et non clinique psy-chanalytique des névroses ? Faladé s’en

Solange Faladé :Clinique des névroses*

• Patrick Delaroche 1 •

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5. C’est nous qui soulignons (sauf mention spéciale).6. Ce qui sera repris bien sûr dans les Quatre discours.

explique à plusieurs reprises : « La pul-sion on l’entend, c’est ce que (le patient)nous dit ; ce n’est qu’à partir de ce qu’ilnous dit que nous pouvons vraimentfaire de la clinique… Si j’ai intitulé notretravail de cette année “clinique desnévroses” et non pas “clinique psychana-lytique des névroses” c’est parce que j’aiestimé qu’il ne pouvait pas y avoir de cli-nique autre que ce qui se recueille véri-tablement au chevet du patient, au lit dupatient… Ce ne sont nullement lesobservations du comportement qui per-mettent de savoir quoi que ce soit d’uneclinique des névroses… Hors de la psy-chanalyse, de la clinique des névroses onn’en connaissait que ce qui est du com-portement » (130). On pourrait, enrevanche, écrire « clinique psychanaly-tique des psychoses » parce qu’« avantFreud il y a eu une clinique psychiatrique,une clinique des psychoses qui a étéécrite et qui nous intéresse encore »(143). Cette clinique de l’être parlants’articule par et autour du signifiant :« Le signifiant ? C’est cette batterie quiva faire le savoir autour de la jouissanceet de ce qu’il en choit, l’objet a. C’estainsi qu’on va pouvoir saisir la différenceentre les différentes structures », nousdit Faladé (64) dans cette phrase quiannonce tout son enseignement et dontnous suivrons le plan.

La chaîne signifiante

Elle s’articule autour de deux signi-fiants, S1 et S2. Chez le névrosé en toutcas. Cette articulation se fait en deuxtemps :

– Un premier appel au champ de l’Autre(69) fait que du $ (sujet barré) se met enplace. « Barré (parce qu’il n’y a aucunsignifiant pour représenter le sujetinconscient. Ce sujet qui vient de naîtreva être représenté pour un de ces S1 quise trouve au champ de l’Autre 5 » (69).Plus loin, Faladé dira que ce S1 « est lepremier signifiant qui vient barrer lesujet » (143). Ailleurs que ce S1 est lesignifiant maître 6, représentant du sujetbarré qui peut dire moi-je (141). Ce sujetbarré n’est pas encore divisé et le psy-chotique ne va pas au-delà de ce premierappel, ou, en tout cas n’obtient pas deréponse.

– Deuxième appel au champ de l’Autre.Pour que tous les S1 puissent signifier ilfaut qu’un deuxième signifiant, S2,vienne s’inscrire. Ce S2 c’est le savoir,« mais comme nous sommes dans l’incons-cient, ce S2 n’aura aucun autre signifiantqui lui permette de signifier » (69) :c’est le refoulement originaire (Urver-drängung). Donc, parce qu’il y a de l’Ur-verdrängung, tout le sens ne pourra êtretrouvé mais c’est grâce à lui que du senspourra être cherché. Comment se faitcette opération ? Il faut pour cela, nousdit Faladé, que le sujet repère le manquedans l’Autre pour prélever de quoi faireS2, repérage qui se fait grâce au Nom-du-Père (4). Ici vient une explication quelquepeu énigmatique et toujours rigoureuse-ment tirée de l’enseignement de Lacan :« C’est au niveau de ce que Lacanappelle l’être de l’organisme, c’est-à-direle corps et quelque chose qui est horscorps, que pourra être prélevé par lesujet ce qui permettra qu’il soit repré-

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7. Traduit par représentance de la représentation dans la nouvelle traduction des Œuvres

complètes, PUF. Les Vorstellungsrepräsentanzen (Vrp) sont la partie représentation de la pulsion,

celle qui constitue l’inconscient en tant que refoulement originaire. Avec lui se produit une

fixation (d’après Laplanche et Pontalis), Vocabulaire de la psychanalyse, Paris, PUF, 1968.8. Dans Névrose, psychose et perversion, Paris, PUF, 1973.9. Op. cit., p. 225.

senté » (7) : une partie sera portée à lasignifiance (S2), l’autre partie sera l’objetpetit a qui est un reste, un déchet.

Refoulement originaire, fantasmefondamental et masochisme primordial.

Le S2, c’est ce que Lacan après Freudappelle le Vorstellungsrepräsentanz(représentant-représentation 7) qui faitpont avec le refoulement originaire (94).Le sujet barré est divisé par le secondsignifiant. C’est-à-dire par tout ce que lesparents – à leur insu – viennent lui appor-ter (95). Dans la psychose, le S2 ne va pass’inscrire dans la chaîne signifiante etc’est sous forme de réel que ce S2 va reve-nir (87). « Avec le refoulement originairese constitue une phrase qui ne pourra sedire (183)… à partir de toutes lesdemandes qui n’ont pas eu de réponseset ne pourront être reprises par le sujet ».Mais ces demandes sont des signifiantsqui auront des effets dans l’inconscientdu sujet : c’est ainsi que le névrosé« s’imagine que l’Autre lui demande sacastration, et il ne veut pas la luidonner » (184). C’est une telle phrase,refoulée, que Faladé retrouve dans lefantasme dit fondamental, soit unenfant est battu relevé par Freud 8.Freud, on se le rappelle, distingue troisphases dans ce fantasme :– le père bat l’enfant haï par moi,– je suis battu par le père,– beaucoup de garçons sont battus 9.

Comme on le voit, deux phasessadiques entourent une phase maso-chiste mais, alors que la première et latroisième phases sont retrouvées dansl’analyse, la deuxième phase, elle, estune construction de l’analyse (Freud).C’est pourquoi cette phase est rapportéepar Faladé au refoulement originel, soitcette phrase qui ne pourra plus jamais sedire et qui correspond au fameux « pré-lèvement sur l’être de l’organisme » dece deuxième signifiant absent du corpsdes signifiants du grand Autre. Ainsi senoue pour notre auteur fantasme fonda-mental, refoulement originaire et maso-chisme primordial.

Les signifiants hors chaîne

Au cours de ce prélèvement, quipermet que « du S2 s’inscrive », se for-mera une « partie qui sera un signifiant,un signifiant pas comme les autres, unsignifiant qui ne se trouvera pas dans lachaîne des signifiants, c’est-à-dire lachaîne S1-S2, et ce signifiant c’est l’idéaldu moi » (135). Lacan, dit Faladé, fait àce propos un jeu de mots. L’enfant rece-vant le sein, reçoit un seing, un sceau del’Autre, matrice de l’idéal du moi. Pour-quoi matrice ? Parce que si, « au coursdu deuxième appel, il a une réponse del’Autre… alors une part de cet S2, cetidéal du moi, vient marquer, remarquerce que le petit d’homme a reçu dès ledépart de ses relations avec l’Autre »(135). Ce signifiant vient marquer le sujet

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10. Le Das Ding freudien.11. Jacques Lacarrière, Paris, J.-C. Lattès, 1983.

au moment où une « réponse estdonnée à cette découverte que la mèren’a pas de pénis ». C’est ainsi « revêtude l’insigne du père », par un « traitidentificatoire à son père » que Hans sortde la phobie (23). Mais si lors de l’émer-gence du sujet ce qui est du signifiant estsynchronique (à un S1 il faut un S2), pourle reste c’est de l’ordre de la diachronie :c’est ainsi qu’il a fallu, nous dit Faladéaprès Lacan, douze ans pour que l’idéaldu moi entre dans la vie du jeune Gide etcela quand le regard de sa tante, regard« plus qu’intéressé », s’est posé sur lui. Ilse peut, ajoute Faladé, « qu’à la fin del’œdipe, le surmoi se mette en place,mais aussi à tel ou tel autre moment dela vie, l’idéal du moi » (248).

La jouissance

À la fin d’un séminaire, Bernard Marys’exclame : « En somme, ce que vousnous présentez, c’est une clinique de laChose 10 », et Solange Faladé de luirépondre : « Oui, c’est ça ». Et en effet,par sa lecture clinique imprégnée del’œuvre de Lacan, Faladé revient sanscesse aux fondements de l’Être. Ainsi lesujet barré « émerge en relation avec levide de la chose ». Et c’est « avec le videde la chose que le signifiant a affaire ».Ce sujet en effet qui n’a pas de signifiantqui lui soit propre va décompléter l’Autrepar la relation entre S1 et S2 qui est aussiécrit S(A barré), c’est-à-dire signifiant dumanque dans l’Autre. Désormais « barrépar le signifiant de ce premier temps,aliéné à ces signifiants du grand Autre, le

sujet… aura à être divisé certes, maisaussi à s’évanouir » (307). Et « à cause dudésir de la mère… surgit de tout ce videun signifiant, le phallus, ce symbole,cette “présence réelle” » (307). Faladéprend pour exemple la mère de Gide.Cette mère « qui ne peut être castrée » etqui choisit comme mari un homme pieuxpour procréer ce chrétien qu’elle veutoffrir à Dieu (246) : elle est du côté del’exception puisqu’elle permettra, sansréférence au père, l’inscription du Nom-du-Père chez son rejeton. Quelles sont lesrelations entre le grand Autre et la Chose ?Les premières demandes qu’adresse lesujet à l’Autre vont conduire l’infans àune expérience traumatique. En effet, làoù il pense trouver un objet, il estconfronté, en ce lieu du grand Autre, àune place évidée de ce que pourrait luiapporter la jouissance (280). L’hystériques’éloigne de ce vide par le dégoût ; l’ob-sessionnel s’en barricade, mais il est sûrque cet évidement est aussi la conditionde la parole. Si c’est le phallus (F) quipermet que sens soit donné au vide de lachose (S), au manque de la mère, c’estgrâce au Père qu’est nommé ce lieu évidéoù se trouvait ce premier objet de jouis-sance, la Chose. Cette capacité denommer, et donc de provoquer l’expul-sion de la Chose, c’est cela, nous ditFaladé, la métaphore paternelle (302). Lasublimation dès lors, en suivant Freud etLacan, c’est donner consistance au videen créant un objet qui est élevé à ladignité de La Chose (Lacan) (305) etFaladé en donne pour exemple Maried’Égypte 11, cette courtisane d’Alexan-drie qui a épuisé toutes les jouissances

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12. C’est-à-dire S2 avec S1.13. La naissance de la psychanalyse, Paris, PUF, 1956.

phalliques possibles. Elle recherche unejouissance Autre pour trouver un « enplus » (261) qu’elle rencontre avec un chatd’abord, puis dans le désert ensuite (296).

Les structures

Bien entendu ce livre consacré à lastructure, et surtout à la différence entrestructure obsessionnelle et hystérique,est jalonné d’aphorisme concernant lesstructures.

– L’hystérique masculin comme fémininse demande : « Suis-je homme oufemme ? » (14), s’arrange avec lemanque en tant que refoulé (62), souffredu coup d’amnésie (70), est théorique-ment barré puis divisé par le signifiant.

– L’obsessionnel se demande s’il estvivant ou mort (14), opère une disjonc-tion des rapports de causalité (71), vitmal mais à l’abri de son désir, sedétourne du S(A barré).

Mais repérons ces différences parrapport au signifiant phallus, au maître,au cogito revu par Lacan, et au mythe dela horde.

Le phallus

Selon la structure en effet, le rapportdu sujet au phallus imaginaire n’est pasle même. Si l’hystérique s’en accommode(53), l’obsessionnel en fait un véritablerival et va s’efforcer d’être cet objet quela mère recherche, tandis que le pervers,lui, l’est, tandis que Schreber ne pouvantêtre le phallus qui manque à la mère,sera cette femme qui intéresse leshommes (32).

Le maître

L’obsessionnel est celui qui refuse dese prendre pour un maître. Il a de la dif-ficulté à faire conjoindre savoir et pou-voir 12 : il doute de savoir (sur le sexe dela mère) (61) et vit avec l’angoisse aucontraire de l’hystérique qui, du fait deson symptôme, s’épargne l’angoisse. Ducoup, il remarque les choses (parexemple les règles de la mère chezl’homme aux rats), mais ne peut leurdonner sens. Il s’efforce en fait de fairedu maître un petit autre. Mais « lorsqu’ilpourra franchir le seuil qui lui permet dedire “je suis” (cf. ci-dessous)… il va pou-voir jouer avec le discours du Maître quin’est rien d’autre que le discours de l’in-conscient… Il va pouvoir se servir de sespensées jusque-là rejetées » (112).D’ailleurs, « quand il accepte d’être dansla jouissance, quand il peut, dit Lacan,jouir de la femme qu’il aime, à cemoment-là, l’homme aux rats n’a plusd’obsessions » (157). L’hystérique, elle,cherche un maître, le trouve et le met àla place du grand Autre, pour le dominer,le mettre en échec (83). Pour Faladé,reprenant le Freud des Lettres à Fließ 13,hystérique comme obsessionnel ont encommun la satisfaction (Befriedigung)initiale reçue de la mère dans la passivité,l’hystérique restant dedans, l’obsession-nel y ajoutant une certaine activité (87).

Le cogito

C’est à propos des pensées de l’in-conscient éliminées dans le rêve queLacan compare le sujet du cogito et lesujet de l’inconscient (105). « Dans un

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14. Rappelons que la pulsion s’écrit chez Lacan $ ‡ D, sujet barré A/E poinçon A/E demande.

premier temps celui qui va devenir sujeta à choisir entre l’être et le sens. Le sens,c’est le langage S1-S2. Puisqu’il est sujetparlant, il choisit le sens, c’est-à-dire qu’ilrenoncera à l’être pour être sujet de l’in-conscient, sujet parlant » (105). Mais ilsera aussi « écorné d’une partie inverse »et de plus un signifiant va s’éclipser enraison du refoulement. Cette premièrealiénation est appelée aliénation-sépara-tion car le sujet, ensemble vide, recouvrede son vide le manque de l’Autre. Ladeuxième aliénation fera s’opposer le« je ne pense pas » (écorné du « suis »)au « je ne suis pas » (ce qui de la véritépourra se faire connaître). L’obsession-nel, on le verra, est du côté « je ne pensepas », l’hystérique du côté « je ne suispas ». L’obsessionnel est celui qui nepeut dire « je suis » mais qui est envahide fausses pensées, car il refuse les pen-sées de l’inconscient (cela facilite le pas-sage à l’acte). C’est pourquoi ce sont leshystériques qui ont permis de découvrirla psychanalyse que Freud applique(ensuite) aux obsessionnels (110). L’ob-sessionnel, comme sujet de la parole, arefusé l’être pour être du côté du sens,mais il refuse la perte. Donc il refuse le« je ne suis pas » avec la pensée qui pour-rait le complémenter, et il se met là où ily a le « je ne pense pas », c’est-à-dire ducôté du rejet des pensées (109). Il ne peutdire ni « je suis » ni « je ne suis pas » ;reste le « je ne pense pas » envahi defausses pensées. « Lui qui refuse de seprendre pour un maître va, tout au longde sa vie, s’efforcer d’être maître de sonêtre, celui qui ne peut dire moi-je. » (115)Dans la phase refoulée du fantasme fon-damental reste donc le « battu par mon

père » : là où je suis ne peut se dire setrouve en effet la pulsion (234). La pul-sion, en effet, n’a pas de sujet ; elle n’apas affaire avec le grand Autre ; elle semet en place quand le grand Autremanque. Faladé argumente avec cetexemple : le lait chaud apporte une tellesatisfaction à l’enfant que se met enplace une compulsion de répétition.C’est-à-dire que l’enfant met en place lapulsion orale avant que le lait chaud soitprésenté de nouveau. Elle conclut que lapulsion concerne ce qui manque dansl’Autre. Le désir de l’obsessionnel, dit parLacan désir impossible, est du côté dumensonge parce qu’en ce lieu de l’Autrerien du désir n’a pu se dire (151). À lademande de l’Autre en effet, l’obsession-nel met en place la pulsion (152) : il nieainsi le désir de l’Autre et met à l’abri sondésir tout en pouvant le satisfaire. Il meten place un fantasme homosexuel danslequel c’est le petit autre qui prend laplace de l’objet petit a ($ ◊ a) car ce fan-tasme le met à l’abri du désir de l’Autre(154). Chez l’obsessionnel la demande esten fait appel au phallus et avec le phallusappel au désir 14. « Ces objets qui sontcause du désir, et en particulier le regard,ces objets, l’obsessionnel s’en sert, si jepuis dire, non pour mettre en place lefantasme mais la pulsion. » (162)

Le mythe de la horde

Reprenant les formules de la sexua-tion (224), Faladé rappelle que le père dela horde s’écrit comme l’exception à la cas-tration. C’est parce qu’il y a cette excep-tion que S1 peut se conjoindre au S2 (136).Du coup, l’hystérique doit tuer le père quia joui d’elle. Le pervers, lui, peut le faire

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15. Jacques Lacan, un psychanalyste, par E. Porge, érès, 2000.

jouir à nouveau bien que mort. La paroledu père n’ayant pas de valeur pour lamère, le pervers reste cet assujet, assujettiau désir et à l’objet du désir de la mère.Pour l’obsessionnel, la mère se réfère à unautre homme que le père. Le meurtre dupère ? « Il est là à se demander si oui ounon c’est lui qui l’a décidé » (139). Quantau psychotique, l’appel à l’Autre est sanseffet : le père est « toujours appelé etjamais advenu ». Il y a donc à tuer ce pèrede la horde primitive (141).

Ce survol de l’enseignement deSolange Faladé s’est voulu le plus fidèleque possible au texte de son séminairepour tenter de tenir compte de ce quepeut être la transmission de la penséelacanienne. Transmettre cette pensée eneffet ne va pas sans difficulté, et même si« le sujet ne comprend pas, ou mal, parcequ’il est lui-même compris dans ce qu’illit 15 » on ne peut nier que la lecture deLacan soit avant tout interprétation. Celle

de Faladé l’est donc à sa manière, toutcomme notre compte-rendu. Et à cetégard, on ne peut nier que l’obscurité quiressort de certaines formules ne fassesans cesse renvoyer le sens à un autre sansjamais permettre à la boucle de se cloredans une signification. Cela rejoint bienentendu la logique de la chaîne signi-fiante et l’évanouissement du sujet laca-nien. Nous parlions au début de cet énig-matique « prélèvement au niveau del’être de l’organisme ». Il faut recon-naître que grâce à S. Faladé, ce mysté-rieux concept s’éclaire chez Dora dans sonidentification au père. Dora est par satoux ce père jouisseur auquel elle est obli-gée de renoncer. Le deuxième signifiant,c’est cette toux prélevée sur l’être de l’or-ganisme, du père en l’occurrence (202).« Ce qui est prélevé chez le père satisfaitla pulsion orale et permet qu’un objet decette zone érogène orale soit mis enplace. » On ne saurait être plus freudien.

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