75
Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne Rapport final BRGM/RP-65987-FR Juin 2016

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

  • Upload
    others

  • View
    7

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Page 1: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande

ampleur du Mont Baduel à Cayenne Rapport final

BRGM/RP-65987-FR Juin 2016

Page 2: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de
Page 3: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande

ampleur du Mont Baduel à Cayenne Rapport final

BRGM/RP-65987-FR Juin 2016

Étude réalisée dans le cadre des projets de Service public du BRGM

P. Bourbon, A. Nachbaur

Vérificateur :

Nom : Severine BERNARDIE

Fonction : Responsable Scientifique du programme

Date : 30/06/2016

Signature :

Approbateur :

Nom : Laure VERNEYRE

Fonction : Directrice BRGM Guyane

Date : 13/07/2016

Signature :

Le système de management de la qualité et de l’environnement est certifié par AFNOR selon les normes ISO 9001 et ISO 14001.

Page 4: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Mots-clés : Mouvement de terrain, Stabilité, Versant, Instabilité, Plan de Prévention, Risques, Aléa, Carte, Enjeu, Levé sismique, Habitat, Coefficient de sécurité, Talren, Alice, Cayenne, Guyane, Mont Baduel. En bibliographie, ce rapport sera cité de la façon suivante : Bourbon P., Nachbaur A. (2016) – Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne. Rapport final. BRGM/RP-65987-FR, 67 p., 41 ill. © BRGM, 2016, ce document ne peut être reproduit en totalité ou en partie sans l’autorisation expresse du BRGM.

Page 5: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 3

Synthèse

a présence d’un habitat très dense sur les versants du mont Baduel cartographiés en zone rouge dans le PPR mouvements de terrain a conduit les services de l’Etat à initier des études pour préciser le risque sur le Mont Baduel. La principale crainte des pouvoirs publics

et de la population réside dans l’occurrence d’un mouvement de terrain de grande ampleur affectant tout ou partie d’un versant, comme celui survenu sur le Mont Cabassou en avril 2000.

Les récentes mesures sismiques réalisées par le BRGM en 2015 associées à l’ensemble des investigations menées notamment par le LBTP depuis une quinzaine d’années, sur le flanc sud-est du Mont Baduel, ont permis d’améliorer nettement la connaissance sur la configuration géologique du mont Baduel et notamment de préciser les horizons mobilisables au sein du profil latéritique.

La présente étude vise à réaliser une analyse spécifique et détaillée du phénomène de mouvement de terrain de grande ampleur (plusieurs dizaines à centaines de milliers de m3) sur le flanc sud-est du Mont Baduel. Par rapport aux précédentes études de stabilité conduites depuis 2006, cette étude bénéficie d’une meilleure précision de la topographie (MNT Lidar haute résolution, financé par la DEAL en 2015, réalisé par ALTOA et validé par l’IGN), et de l’épaisseur des altérites, deux des paramètres les plus importants pour les calculs de stabilité.

Deux outils de calculs géotechniques complémentaires ont été déployés pour évaluer, de manière déterministe, la stabilité vis-à-vis d’un phénomène de grande ampleur sur la zone étudiée. Le logiciel Talren 5 (® Terrasol) a d’abord permis de mener des analyses de sensibilité sur des profils 2D caractéristiques et de fixer ainsi plusieurs paramètres discriminants. A l’aide de ces calages, le logiciel ALICE (® BRGM) a ensuite été utilisé pour évaluer cette stabilité sur l’ensemble du flanc sud-est de la colline de Baduel.

Sur le mont Baduel comme sur les autres collines de l’ile de Cayenne, le profil d’altération présente un continuum de dégradation des paramètres mécaniques sur plusieurs dizaines de mètres, difficile à représenter dans les modèles. Dans le cadre de cette étude, deux configurations ont donc systématiquement été testées : une correspondant aux valeurs mécaniques mesurées in situ par le LBTP en 2006 distinguant les argiles d’altération superficielles et la saprolite (configuration 1) et une, plus sécuritaire, représentant le profil d’altération comme un seul horizon aux caractéristiques mécaniques homogènes, calées par les retours d’expérience (configuration 2). Les horizons géologiques superficiels (colluvions et cuirasse latéritique), dont les instabilités ne sont pas l’objet de l’étude, n’ont pas été introduits dans les calculs.

Les résultats sont représentés cartographiquement par le coefficient de sécurité vis-à-vis d’une instabilité de grande ampleur ; les secteurs avec les plus forts niveaux de prédisposition sur le mont Baduel ont finalement été identifiés. Ces principes ont également été appliqués pour des glissements plus modestes de type « talus » (de l’ordre de quelques centaines de m3), bien que cela ne soit pas la finalité de cette étude.

Les investigations menées dans le cadre de cette étude ont permis d’aboutir aux conclusions suivantes :

l’occurrence d’un glissement de grande ampleur (de plusieurs dizaines à centaines de milliers de m3) est probable sur deux secteurs bien identifiés, dont l’un est exposé à l’instabilité d’une centaine de milliers de m3 ;

L

Page 6: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

4 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

ailleurs, les calculs de stabilité tendent à montrer que le risque d’instabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur est limité en conditions normales. Cependant, les coefficients de sécurité obtenus ne sont pas suffisants pour garantir la stabilité dans des conditions pluviométriques exceptionnelles ou lorsque l’on considère par exemple, des facteurs aggravants non pris en compte (captivité de la nappe, excavations successives,..) ;

le risque de déstabilisation des talus anthropiques (éboulements de quelques m3 à plusieurs centaines de m3), reste également très fort sur l’ensemble du flanc est du mont Baduel. Ces instabilités sont très dommageables quel que soit leur volume car il n’y a pas nécessairement de signes visibles avant-coureurs.

Au vu de ces résultats, le BRGM recommande :

concernant le secteur exposé à l’instabilité d’une centaine de milliers de m3, les enjeux doivent être mis en sécurité car plusieurs facteurs défavorables s’accumulent à cet endroit ;

vu que le risque de grand glissement reste possible en condition exceptionnelles sur le versant, pour maintenir les enjeux, un dispositif de suivi (et non d’alerte) est nécessaire, d’une part pour suivre l’initiation d’une instabilité d’ampleur (réseau inclinométrique ou topographique) et, d’autre part, pour pallier le manque de connaissances hydrogéologique (réseau piézométrique voir capteur de pression interstitielle) ;

concernant les talus anthropiques, seules des solutions de réduction du risque (mesures de confortement/reprofilage de talus) paraissent adaptées pour maintenir des enjeux.

Cette étude de stabilité apporte de nouvelles informations sur la prédisposition et l’intensité des glissements de grande ampleur envisageables sur le mont Baduel, ce qui n’était pas disponible lors de la réalisation des cartes d’aléa en 2000. Dès lors, ces nouvelles informations permettent d’envisager d’affiner et de compléter le zonage d’aléa mouvement de terrain actuel.

A noter que le présent travail, en l’absence de toute surveillance existante actuellement sur les glissements de moyenne et grande ampleur, ne donne pas d’indication sur la probabilité d’occurrence ni sur la notion de péril imminent ou de temporalité d’occurrence des événements.

Page 7: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 5

Sommaire

1. Introduction ............................................................................................................. 9

2. Cadre de l’étude .................................................................................................... 11

2.1. CONTEXTE ..................................................................................................... 11

2.1.1. Contexte géographique ........................................................................... 11

2.1.2. Contexte géologique ............................................................................... 11

2.1.3. Contexte hydrogéologique ...................................................................... 14

2.2. CONTEXTE DE L’HABITAT SUR LE FLANC EST DU MONT BADUEL .......... 15

3. Les mouvements de terrain susceptibles d’affecter le mont Baduel ................. 17

3.1. L’ALÉA MOUVEMENT DE TERRAIN ACTUEL DU MONT BADUEL ............... 17

3.2. HISTORIQUE DES MOUVEMENTS DE TERRAIN .......................................... 18

3.2.1. Glissements de terrain recensés sur le mont Baduel .............................. 18

3.2.2. Glissements de terrain remarquables recensés sur l’ile de Cayenne ...... 22

4. Caractérisation 3D de la colline de Baduel .......................................................... 29

4.1. TOPOGRAPHIE ............................................................................................... 29

4.1.1. Modèle numérique de terrain (MNT) ....................................................... 29

4.1.2. Informations dérivées du MNT ................................................................ 30

4.2. MODÈLE GÉOLOGIQUE 3D DU MONT BADUEL ........................................... 31

4.2.1. Principe de la modélisation géologique 3D ............................................. 31

4.2.2. Présentation des résultats de l’interpolation ............................................ 32

4.3. CONTEXTE HYDROGÉOLOGIQUE ................................................................ 37

4.3.1. Synthèse des données antérieures ......................................................... 37

4.3.2. Eléments hydrogéologiques retenus pour la modélisation....................... 37

5. Etude de la stabilité du mont Baduel sur profil 2D (glissement de grande ampleur) ............................................................................................................................... 39

5.1. CHOIX MÉTHODOLOGIQUE RETENU ........................................................... 39

5.1.1. Logiciel et principe de calcul utilisé pour l’étude ...................................... 39

5.1.2. Choix des profils étudiés ......................................................................... 39

5.1.3. Calage des caractéristiques mécaniques ................................................ 41

5.1.4. Synthèse des choix méthodologiques retenus pour les calculs de stabilité45

5.2. PRÉSENTATION DES RÉSULTATS ............................................................... 45

5.2.1. Une remontée du socle garantissant la stabilité (Profil A) ....................... 45

5.2.2. Effet du terrassement (profil A et Abis) .................................................... 46

Page 8: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

6 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

5.2.3. Une instabilité suspectée le long du Profil D ........................................... 47

5.2.4. Les profils B, E, G et H ........................................................................... 49

5.3. CONCLUSION VIS-A-VIS DES GLISSEMENTS DE GRANDE AMPLEUR ..... 51

6. Prédisposition aux mouvements de terrain sur le mont Baduel ....................... 53

6.1. LE PROGRAMME ALICE® ............................................................................. 53

6.2. LA PRÉDISPOSITION AU GLISSEMENT DE GRANDE AMPLEUR ............... 54

6.2.1. Calage des paramètres du logiciel ALICE® ............................................ 54

6.2.2. Résultat cartographique ......................................................................... 56

6.2.3. Carte de prédisposition aux glissements de terrain de grande ampleur .. 57

6.3. LA PRÉDISPOSITION AU GLISSEMENT DE TALUS (PLUSIEURS DIZAINES A CENTAINE DE M3) SUR BADUEL .................................................................. 59

6.3.1. Calage des paramètres du logiciel ALICE® ............................................ 59

6.3.2. Résultat cartographique ......................................................................... 59

6.3.3. Carte de prédisposition aux glissements de talus ................................... 60

6.4. DISCUSSION DES RÉSULTATS .................................................................... 61

6.4.1. Les facteurs aggravants, non pris en compte par les modèles ............... 62

7. Recommandations ................................................................................................ 65

7.1. RÉDUCTION DU RISQUE LIÉ A UN GLISSEMENT DE GRANDE AMPLEUR 65

7.1.1. La mise en sécurité des enjeux sur la zone la plus exposée ................... 65

7.1.2. Un dispositif de suivi instrumental (hors zone précédente) ..................... 66

7.1.3. Un dispositif de suivi visuel ..................................................................... 67

7.1.4. Des mesures préventives pour réduire l’aléa .......................................... 67

7.1.5. Sensibilisation de la population .............................................................. 68

7.2. RÉDUCTION DU RISQUE LIÉ A UN GLISSEMENT DE TALUS ..................... 68

8. Conclusion ............................................................................................................ 69

9. Bibliographie ......................................................................................................... 71

Page 9: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 7

Liste des figures

Illustration 1 – Plan de situation du mont Baduel, fond cartographique d’après l’IGN SCAN 25.11

Illustration 2 – Extrait de la carte géologique de Cayenne, d’après Choubert (1956). ............... 12

Illustration 3 – Coupe schématique du mont Baduel. .................................................................. 14

Illustration 4 – Terrassements sur le flanc est du Mont Baduel et emprise de l’aléa fort du PPR (enveloppe rouge) .............................................................................................. 15

Illustration 5 – Exemple d’une construction adossée à un talus en déblais. ............................... 16

Illustration 6 – Exemple de parades non adaptées ..................................................................... 16

Illustration 7 – Cartographie du risque mouvement de terrain sur la commune de Cayenne. .... 17

Illustration 8 – Mouvements de terrain recensés sur le mont Baduel d’après infoterre.brgm.fr Fond cartographique : bâtiment (BD Topo 2012) et Lidar (IGN, 2015) ............. 19

Illustration 9 – Schéma des instabilités récentes ayant affecté le mont Baduel. En bleu, les habitations, en pointillé, la zone d’éboulis. ........................................................ 20

Illustration 10 – Vues aérienne de la zone affectée par le glissement du 1er juin 2009 (Weng, 2009) ........................................................................................................................... 21

Illustration 11 – Vue aérienne générale de la zone affectée par le glissement du 1er juin 2009 (Weng, 2009) ..................................................................................................... 21

Illustration 12 – Profil du front de taille instable (Renault et al., 2006) ........................................ 22

Illustration 13 – Photos de la cicatrice du glissement de Cabassou ........................................... 24

Illustration 14 : Typologie des deux mouvements de terrain possible sur le Mont Baduel ......... 25

Illustration 15 – Tableau de synthèse des facteurs aggravants potentiels pour les glissements naturels .............................................................................................................. 26

Illustration 16 - Tableau de synthèse des facteurs aggravants potentiels pour les glissements de talus anthropiques.............................................................................................. 26

Illustration 17 – Origine des talus et contexte géologique des pentes talutées en Guyane ....... 27

Illustration 18 : Modèle Numérique de Terrain issu du levé Lidar (IGN, 2015) Source bâtiment (BD Topo 2012) ......................................................................................................... 30

Illustration 19 – Carte des pentes du mont Baduel issue du Lidar (IGN, 2015) Source bâtiment (BD Topo 2012) ......................................................................................................... 31

Illustration 20 – Altitude des interfaces socles et saprolites, d’après l’interpolation des mesures géophysiques ..................................................................................................... 33

Illustration 21 – Comparaison de l’épaisseur des altérites d’après l’interpolation des mesures géophysiques et l’épaisseur donnée par les sondages ayant recoupé le socle 35

Illustration 22 – Présentation des coupes au niveau de 3 profils transversaux du mont Baduel 36

Illustration 23 – Epaisseur des terrains non saturés (établi d’après le calcul : surface topographique - niveau piézométrique le plus haut relevé) ......................................................... 38

Illustration 24 – Position des profils étudiés et emprise de l’aléa fort du PPR (enveloppe rouge) (emprise du bâti (BDTopo, 2012) et fond topographique Lidar (IGN, 2015) ..... 40

Illustration 25 – Valeurs de cohésion c’ obtenues lors d’analyses en laboratoire (en kPa) ........ 41

Illustration 26 – Angles de frottement internes ' obtenus lors d’analyses en laboratoire (en°) . 41

Illustration 27 – Analyse de sensibilité des paramètres mécaniques, le long du profil C ........... 42

Page 10: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

8 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 28 – Coefficients de sécurité obtenus (FS) avec l’hypothèse 5 de l’Illustration 27 et dans des conditions piézométriques égales au maximum observé, pour un glissement de talus (à gauche) et pour un glissement de versant (à droite). On constate que la tête de talus, en pied du profil C, est instable. .......................................................... 43

Illustration 29 – Coefficients de sécurité (FS) au niveau du talus qui a glissé le 1er

juin 2009, dans des conditions piézométriques égales au maximum observé et avec les caractéristiques mécaniques ............................................................................. 43

Illustration 30 – Synthèse des deux configurations considérées pour les calculs de stabilité .... 44

Illustration 31 – Coefficient de sécurité minimal obtenu sur chaque profil pour des glissements d’ampleur suivant les configurations choisies (*glissement de taille plus limité)45

Illustration 32 – Evolution des coefficients de sécurité (FS) selon la localisation des glissements envisagés dans le profil A, pour la configuration 1 ............................................ 46

Illustration 33 – Comparaison du coefficient de sécurité (FS) avec et sans terrassement, le long des profils A (à gauche : sans terrassement) et A bis (à droite : avec terrassements)

pour la configuration 2 : = 18 kN.m-3

, ' 25°, c’ 15 kPa ................................... 47

Illustration 34 – Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil D ........................................................................................................................... 48

Illustration 35 – Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil D

(configuration 2 : ' 25°, c’ 15 kPa, =18 kN/m3) .............................................. 48

Illustration 36 – Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil E ........................................................................................................................... 49

Illustration 37 – Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil B ........................................................................................................................... 50

Illustration 38 - Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil H ........................................................................................................................... 51

Illustration 39 - Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil G ........................................................................................................................... 51

Illustration 40 : Etude de sensibilité sur la taille du glissement, pour une résolution de raster de 20 m. A : Taille de glissement de 40 m; B : Taille de glissement de 60 m; C : Taille de glissement de 80 m; D : Taille de glissement de 100 m; E : Taille de glissement de 120 m ................................................................................................................. 55

Illustration 41 – Coefficent de sécurité (Fs) pour des glissements de 100 m, pour la configuration 2 la plus sécuritaire et dans des conditions piézométriques égales au maximum observé ........................................................................................................................... 56

Illustration 42 – Cartographie des secteurs où le niveau de prédisposition à une instabilité d’ampleur est le plus fort ..................................................................................................... 58

Illustration 43 – Coefficent de sécurité (Fs) pour des glissements de 10 m et dans des conditions piézométriques égales au maximum observé ................................................... 60

Illustration 44 - Cartographie des secteurs où le niveau de prédisposition à une instabilité de talus est le plus fort ..................................................................................................... 61

Illustration 45 – Evolution du coefficient de sécurité suite à une série d’excavation au pied ...... 62

Illustration 46 – Schéma très simplifié des profils types de Cabassou et Baduel ....................... 63

Illustration 47 – Zone fortement exposée à un glissement de terrain d’ampleur Fond cartographique : bâtiment (BD Topo 2012) et Lidar (IGN, 2015) .................................................. 65

Page 11: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 9

1. Introduction

Les collines de l’île de Cayenne sont exposées aux phénomènes naturels et potentiellement dangereux des mouvements de terrain. Des glissements superficiels ou de plus grande ampleur, tel celui qui a affecté le Mont Cabassou en avril 2000, ont généré de graves désordres matériels et mêmes humains.

Réalisé avec l’appui du BRGM (Nguyen et Joseph, 2000), le Plan de Prévention des Risques mouvements de terrain de l’ile de Cayenne, approuvé par l’arrêté préfectoral n°202/SIRACEDP du 15 novembre 2001, a classé la majeure partie de la colline du Mont Baduel en zone exposée à un aléa fort, interdisant ainsi toute construction nouvelle et tout développement de l’habitat. Malgré ce classement, l’habitat spontané et illégal continue de se développer.

Sur la colline du Mont Baduel, un certain nombre de mouvements de terrain ont été inventoriés. Si ces derniers, plutôt rares, sont de faible ampleur, on observe depuis quelques années une augmentation du nombre de ces phénomènes qui menacent les habitants du secteur. Ainsi, le 1er juin 2009, deux glissements se sont produits sur le flanc est du Mont Baduel, après d’importantes pluies, et un autre glissement s’est produit le 4 février 2012 dans le même secteur, en amont de la piste Tarzan. Ces glissements ont donné lieu à des arrêtés municipaux d’évacuation.

Sur le Mont Baduel, le risque est d’autant plus élevé que la vulnérabilité des constructions est forte. On y recense une forte concentration d’habitations très modestes, construites avec une méconnaissance des risques, une absence de traitement des eaux usées et où la mise en place d’un réseau de voiries et réseaux divers (VRD) apparait aujourd’hui difficile à réaliser. Par ailleurs, il y existe de nombreuses plateformes en déblais, non-conformes et sans respect des règles de l’art en matière de construction.

Dans un rapport établi en 2006 (réf. 05.CN.37.SF), le LBTP indique que le versant sud-est du Mont Baduel est stable et qu’il n’y a pas de risque de glissement de grande ampleur. En 2009, une nouvelle série de calculs de stabilité a permis au groupement GIPEA-GSI de constater que ce risque était beaucoup plus élevé dans le cas de glissements d’amplitude plus modeste (réf. R322.09, 2009). De même, le risque d’un glissement de grande ampleur est apparu beaucoup plus important en tenant compte des terrassements à flanc de colline, tels qu’ils existent sur le Mont Baduel.

L’absence de signe d’instabilité pour un glissement de grande ampleur n’a pas permis de définir précisément de secteur où un évènement de ce type peut se produire. De ce fait, un programme d’investigations complémentaires avait été proposé par GIPEA-GSI afin d’améliorer les connaissances sur les paramètres qui contrôlent l’aléa. Au terme de cette réflexion, un dispositif de surveillance a été mis en place, mais sans que ce dernier ne puisse garantir la détection d’un évènement suffisamment à l’avance.

La présente étude sur les mouvements de terrain vise à réaliser une analyse spécifique et détaillée du phénomène de mouvement de terrain de grande ampleur (plusieurs dizaines à centaines de milliers m3) sur le flanc sud-est du Mont Baduel, c’est-à-dire sur la zone rouge du PPR où se concentrent les investigations géologiques et géotechniques depuis 2002.

Page 12: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

10 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Ce diagnostic repose sur des études de stabilité menées à l’aide de deux outils géotechniques complémentaires :

- Dans un premier temps, le logiciel Talren 5 (® Terrasol) pour mener des analyses de sensibilité, sur des profils 2D caractéristiques (cf. chapitre 5) ;

- Dans un second temps, à l’aide de ces calages, le logiciel ALICE (® BRGM) pour évaluer cette stabilité vis-à-vis du phénomène de mouvement de terrain de grande ampleur, sur l’ensemble du flanc est de la colline de Baduel (cf. chapitre 6).

Ces calculs déterministes serviront à évaluer et représenter cartographiquement le niveau de prédisposition à un mouvement de terrain de grande ampleur, sur le flanc sud-est du Mont Baduel puis à proposer un dispositif de surveillance adapté.

Page 13: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 11

2. Cadre de l’étude

2.1. CONTEXTE

2.1.1. Contexte géographique

Le Mont Baduel (cf. Illustration 1) constitue un des rares reliefs de l’île de Cayenne. Il est axé grossièrement nord-ouest-sud-est et est composé de deux collines distinctes. La première, au nord, qui culmine à 57 m et la seconde, au sud, qui culmine à 114 m. Par ailleurs, contrairement aux autres monts situés sur la commune de Cayenne, le Mont Baduel a la particularité d’être fortement urbanisé, notamment sur son flanc sud-est, où se concentre un habitat spontané et illégal (cf. Illustration 1).

Illustration 1 – Plan de situation du mont Baduel, fond cartographique d’après l’IGN SCAN 25.

(Le contour rouge limite approximativement l’emprise du Mont Baduel)

2.1.2. Contexte géologique

D’après la carte géologique de Cayenne au 1/100 000 (Choubert, 1956 ; cf. Illustration 2), le Mont Baduel est divisé en deux grands ensembles : un socle granitique dans sa partie ouest et des quartzites appartenant à la série de l’Ile de Cayenne à l’Est. La limite entre les deux formations est matérialisée par un filon de dolérite d’orientation NNW-SSE (cf. Illustration 2). Toutefois, une faille d’orientation ONO-ESE recoupe également ces deux séries.

Page 14: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

12 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 2 – Extrait de la carte géologique de Cayenne, d’après Choubert (1956).

En Guyane, l’ensemble des formations du substratum a subi une forte altération. Ainsi, le socle sain est surmonté d’une frange superficielle d’altération que l’on nomme « profil latéritique ». Celui du mont Baduel peut se schématiser de la manière suivante, de la base au sommet :

Mont Baduel

Page 15: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 13

- socle sain à plus ou moins fracturé (granitique ou quartzitique concernant le mont

Baduel) ;

- saprolite1 de consistance argilo-sableuse à la base à plus franchement argileuse dans

la partie supérieure (généralement 10 à 50 m d’épaisseur, parfois plus) ;

- argiles tachetées2 (quelques mètres à plus de 10 m d’épaisseur) ;

- cuirasse latéritique3 (de 1 à environ 10 m d’épaisseur, parfois plus pour les plus

évoluées).

Le moteur principal du développement d’un profil latéritique est l’hydrolyse des minéraux primaires sous l’action de l’eau, accompagnée de la mise en solution et de l’évacuation vers l’aval des éléments chimiques les plus solubles. Les éléments non évacués forment de nouvelles phases minérales, pour l’essentiel des argiles et des minéraux de type hydroxydes : la saprolite.

L’évolution de la séquence d’un profil latéritique a donc pour effet de concentrer différentiellement à son sommet les éléments chimiques les moins solubles : le fer et l’aluminium. Ainsi, des concrétions ferrugineuses apparaissent dans une matrice souvent riche en kaolinite : l’argile tachetée.

Ensuite, la déshydratation des hydroxydes entraine la néoformation et l’accumulation des oxydes et mène à la formation d’une roche indurée : la cuirasse.

En subsurface, soit environ entre 1 et 2 m de profondeur, l’apport saisonnier d’eau par les pluies réhydrate les oxydes de fer la cuirasse se désagrège en nodules ferrugineux de plus en plus petits, formant ainsi ce qui est nommé le latosol.

Par ailleurs, sur les flancs des collines de Guyane comme celle du mont Baduel, les formations d’altération sont fréquemment surmontées par des colluvions (formations de pente), issues du lent démantèlement gravitaire de la colline. Il s’agit d’une formation relativement hétérogène et généralement de faible épaisseur, mis en place par transport de matériaux et généralement localisée en pied de pente.

Le chapitre 4.2 précisera le profil géologique du Mont Baduel, grâce aux mesures géophysiques.

1 Saprolite : couche géologie généralement meuble résultant de l’altération chimique par hydrolyse, infiltration et lessivage de la roche mère. C’est une altération iso-volumétrique (isaltérite), formée in-situ (autochtone). 2 Argile tachetée (ou carapace latéritique) : couche géologique issue de l’altération des roches, à un stade plus évoluée que celui de la saprolite. Il s’agit d’une zone de prélude au cuirassement. Le fond matriciel est souvent riche en kaolinite. Il peut-être jaune, rose ou rouge. Des concrétions ferrugineuses ou alumineuses se forment et se déshydratent sous l’effet du climat, à mesure que l’on remonte dans le profil. C’est une altération soustractive (Allotérite), formée également in-situ. 3 Cuirasse latéritique : sommet du profil d’altération, très enrichi en fer ou en aluminium. La goethite (hydroxyde de fer) se déshydrate et recristallise en hématite (oxyde de fer), dont la forte cristallinité provoque l’induration du milieu. Elles sont soumises à l’érosion et peuvent se dégrader en surface (cf. latosol).

Page 16: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

14 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 3 – Coupe schématique du mont Baduel.

(Source rapport BRGM/RP-50474-FR)

2.1.3. Contexte hydrogéologique

Dans le contexte des formations de socle recouvertes par des altérites (cas de l’ensemble des collines de Guyane, dont le Mont Baduel), les circulations d’eau sont fortement liées à la présence d’une frange fracturée du substratum située à l’interface entre le rocher sain et les altérites argilo-sableuses sus-jacentes.

Cette configuration implique la présence d’un aquifère4 avec une nappe captive5, dont la perméabilité est variable en fonction de la densité du réseau de fractures.

Par ailleurs, on peut également considérer la présence d’une nappe libre6 et « perchée » dans les formations latéritiques à faible perméabilité. Dans le détail, les horizons cuirassés, coiffent les collines et se présentent le plus souvent sous un aspect massif et macroporeux, mais également en surface sous forme remaniée, gravillonnaire dans une matrice limono-argileuse. Ils drainent rapidement les eaux. L’argile tachetée favorise de façon prépondérante l’infiltration profonde des eaux météoriques sur les zones de replat. Le fort contraste de perméabilité entre les argiles tachetées et les cuirasses résiduelles permet la constitution de nappes perchées (au moins en saison humide). Les écoulements prennent alors une composante à dominante horizontale pour constituer des zones d’émergences, le plus souvent diffusives, à la faveur de la topographie.

Ces aquifères ne sont généralement pas en relation hydraulique directe (échange très limités), mais sont par contre en relation de pression quasi-continuelle, notamment en période humide pendant laquelle les transferts de pression sont très rapides (ordre de grandeur de l’heure à la journée).

4 Aquifère : couche géologue perméable contenant une nappe d’eau souterraine (eau contenue dans les interstices ou les fissures d’une roche). 5 Nappe captive : nappe contenue dans un aquifère surmonté par une formation peu perméable et dont la charge hydraulique de l’eau qu’elle contient est supérieure à celle du toit de la nappe. 6 Nappe libre : nappe en contact direct avec l’atmosphère, via une zone non saturée en eau.

Page 17: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 15

2.2. CONTEXTE DE L’HABITAT SUR LE FLANC EST DU MONT BADUEL

Le flanc sud-est du mont Baduel est caractérisé par une urbanisation spontanée, dense et anarchique, ayant conduit à la réalisation de très nombreux terrassements en gradins à flanc de colline (cf. Illustration 4).

La plupart de ces aménagements ne respectent pas les règles de l’art :

- les talus en déblais sont exempts de toute protection ou de soutènements, d’autres font l’objet de soutiens inadaptés : tôle simple, parpaings non armés, drainage interne défaillant, etc. (cf. Illustration 5 et Illustration 6) ;

- le système de récupération des eaux pluviales est défaillant voire inexistant dans l’ensemble de la zone considérée, y compris au niveau des plateformes de terrassement.

Pour certains talus, bien que la plupart soit de taille modeste (< 6 m généralement mais souvent entre 2 et 3 m), de petits glissements superficiels ou indices d’érosion se produisent et sont observés, menaçant ainsi les infrastructures ou les personnes. Ces instabilités fréquentes sur le mont Baduel induisent un risque résultant élevé, en raison de la vulnérabilité des enjeux (habitat).

Illustration 4 – Terrassements sur le flanc est du Mont Baduel et emprise de l’aléa fort du PPR (enveloppe rouge)

Fond cartographique : bâtiment (BD Topo 2012) et Lidar (IGN, 2015)

Page 18: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

16 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 5 – Exemple d’une construction adossée à un talus en déblais. (L’axe d’observation de la photo A est opposé à celui de la photo B)

Illustration 6 – Exemple de parades non adaptées (photo A : mur de 4 m de hauteur, fissuré, en cours de ruine ; B : barbacanes

7 inefficaces ; C : tôle en guise de

soutènement et D : mur de soutènement rompu par la poussée des terres.)

7 Barbacanes : système de drainage interne d’un mur de soutènement, limitant la montée en charge hydrostatique en arrière d’un mur.

A

C D

B A

B

B A

Page 19: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 17

3. Les mouvements de terrain susceptibles d’affecter le mont Baduel

3.1. L’ALÉA MOUVEMENT DE TERRAIN ACTUEL DU MONT BADUEL

Le Plan de Prévention des Risques « mouvements de terrain » du territoire de l’Ile de Cayenne a été approuvé le 15 novembre 2001.

Ce document classe le flanc sud-est du mont Baduel en zone R1 correspondant à un aléa « glissement de terrain et coulée de débris » élevé (cf. Illustration 7).

Le rapport de présentation du PPR précise que cette cartographie ne concerne que les mouvements de faible à moyenne ampleur, et non les glissements de versant de type Cabassou (Nguyen D., Joseph B., 2000). En effet, il avait été décidé, à l’époque, qu’il était prématuré de se prononcer sur l’ensemble des causes et des facteurs qui avaient conduit à la catastrophe du 19 avril 2000.

Illustration 7 – Cartographie du risque mouvement de terrain sur la commune de Cayenne.

Source : site « Cartorisques »

Mont Baduel

Page 20: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

18 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

3.2. HISTORIQUE DES MOUVEMENTS DE TERRAIN

Le présent chapitre vise à identifier le type de mouvements de terrain susceptibles d’affecter le mont Baduel, à partir de l’inventaire des évènements recensés sur le Mont Baduel stricto sensu d’abord (cf. § 3.2.1), élargi à des événements caractéristiques ayant affecté d’autres monts similaires de l’île de Cayenne (cf. § 3.2.2).

L’inventaire s’est basé sur la base de données de mouvements de terrain, consultable sur infoterre.brgm.fr, qui est issue de l’inventaire des mouvements de terrain réalisé en Guyane en 2004 (Théveniaut et al., 2004) et aujourd’hui actualisé.

On constate que l’ensemble des glissements de terrain recensés sur le mont Baduel reste de taille limitée (volume < 500 m3) alors que des instabilités de plus grande ampleur ont pu affectées d’autres monts similaires (> 1000 m3 voire plus de 300 000 m3).

3.2.1. Glissements de terrain recensés sur le mont Baduel

Les mouvements de terrain recensés sur le mont Baduel concernent uniquement des anciens fronts de taille ou des terrassements anthropiques et mettent en jeu la saprolite.

Ces instabilités sont localisées sur l’Illustration 8 (la position géographique des instabilités « avant 1990 », reste peu précise). A noter sur cette illustration que le fond bâti n’a qu’une valeur indicative et ne correspond pas à un inventaire actualisé de l’habitat sur le mont.

Page 21: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 19

Illustration 8 – Mouvements de terrain recensés sur le mont Baduel d’après infoterre.brgm.fr Fond cartographique : bâtiment (BD Topo 2012) et Lidar (IGN, 2015)

Les 3 phénomènes évoqués dans les années 90 sont peu documentés, mais ils concerneraient des talus liés à d’anciennes exploitations de latérites (zone d’emprunt). Parmi ces événements, l’un d’entre eux semble atteindre un volume d’environ 100 m3, en aval d’une habitation.

L’Illustration 8 montre que les trois dernières instabilités, recensées entre 2009 et 2012, affectent les talus les plus hauts du versant sud-est (hauteurs de 10 à 15 m maximum). Ces trois glissements, aux mécanismes très comparables, mettent en jeu des talus subverticaux de saprolite qui correspondent à d’anciens fronts de taille. Les volumes déplacés atteignent entre 100 et 500 m3. La propagation des matériaux glissés a été limitée par les obstacles, situés en pied de talus.

Page 22: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

20 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

L’Illustration 9 ci-dessous schématise les trois récentes instabilités ayant affecté le mont Baduel :

Illustration 9 – Schéma des instabilités récentes ayant affecté le mont Baduel. En bleu, les habitations, en pointillé, la zone d’éboulis.

On peut résumer ces trois évènements de la manière suivante :

- Le glissement du 1er juin 2009 : les volumes de matériaux en jeu sont estimés à 450 m3. D’après le compte-rendu BRGM de l’événement (Weng, 2009), la niche d’arrachement mesure 7 à 10 m de large sur 12 à 15 m de hauteur, pour une épaisseur décrite comme « peu épaisse ». Le matériau glissé a été en grande partie stoppé par un mur situé en amont immédiat d’une habitation (cf. Illustration 10). La niche d’arrachement a ensuite poursuivi sa rétrogradation et de petites coulées de boues ont été mises en évidence (Weng, 2009).

Le glissement du 1er juin 2009 (cf. Illustration 11) a la particularité d’être situé dans une vallée, sèche, orientée est-ouest qui présente une morphologie spécifique, discutée plus loin dans cette étude.

D’après Weng (2009), le glissement serait superficiel. Bien qu’aucun élément ne permette d’émettre une hypothèse sur une éventuelle structure plus profonde qui aurait déclenché cette instabilité superficielle, le BRGM n’avait pas totalement exclu, à l’époque, l’hypothèse d’un glissement de grande ampleur et préconisait l’installation d’inclinomètre jusqu’au socle. Depuis 2009, aucun indice d’instabilité supplémentaire n’a été mis en évidence.

Page 23: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 21

Illustration 10 – Vues aérienne de la zone affectée par le glissement du 1er juin 2009 (Weng, 2009)

Illustration 11 – Vue aérienne générale de la zone affectée par le glissement du 1er juin 2009 (Weng, 2009)

- Le glissement du 7 juin 2009 : ce glissement affecte la tête d’un haut talus situé en bordure de la route de Tarzan, en pied du mont Baduel (10 m NGG). La niche d’arrachement est considérée comme « relativement superficielle » sur environ 15 m de largeur et 6 m de hauteur (BRGM, 2009). Les matériaux glissés ont été stoppés par une construction faisant office de bar-dancing. En plus des précipitations intenses, un autre facteur aggravant potentiel avait été évoqué par les riverains à l’époque : la rupture d’une canalisation d’eau en amont immédiat du talus concerné. Par ailleurs, les habitants ont indiqué la présence d’une source pérenne qui s’écoulait à la base du glissement, avant la rupture.

Page 24: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

22 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

- Le glissement du 4 février 2012 : ce glissement affecte le même talus que celui du glissement du 7 juin 2009, sur une zone où il mesure environ 10 à 12 m de hauteur. Il se présente sous la forme d’un glissement de la partie supérieure du talus sur 8 à 10 m de largeur et sur 2 à 3 m d’épaisseur (LBTP, 2012b).

L’observation des escarpements laissés par les anciens glissements est difficile en raison de la végétation et des obstacles en tête et en pied de talus (carcasse de véhicule, décharge, etc.). Ces obstacles ne permettent pas de réaliser un diagnostic complet mais ces talus n’ont a priori pas évolué de manière significative depuis 2010.

3.2.2. Glissements de terrain remarquables recensés sur l’ile de Cayenne

Glissement en tête de talus, sur la colline du Mont Lucas (volume ~ 24 000 m3)

La configuration géologique du mont Lucas est similaire à celle du secteur sud-est du mont Baduel, il s’agit de collines dont le substratum est constitué d’une amphibolite de la série de l’île de Cayenne (cf. § 2.1.2).

Un glissement de grande ampleur a été constaté dès 2003, sur la colline du Mont Lucas avec un volume estimé à 24 000 m3.

L’instabilité se présente sous la forme d'un décrochement de plusieurs milliers de m3 de la tête d’un talus de saprolite. Une fissure située à une vingtaine de mètres en retrait du font taille sur au moins 60 m de long matérialise une rupture circulaire volumineuse (cf. profil de l’instabilité en Illustration 12, Renault et al., 2006). L'ancien front de taille, subvertical, atteint une longueur cumulée de 260 m. Sa hauteur maximale approche localement la quinzaine de mètres mais plus généralement, elle est de l’ordre 8 à 10 m.

Le schéma ci-dessous illustre le phénomène observé :

Illustration 12 – Profil du front de taille instable (Renault et al., 2006)

Page 25: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 23

Glissement de versant du Mont Cabassou (volume ~ 300 000 et 500 000 m3)

Le mont Cabassou est constitué d’un socle métamorphique recouvert d’une épaisseur de 20 à 30 m de latérite, qui présentait une pente initiale générale d’environ 60%, pouvant être supérieure localement.

D’un point de vue hydrogéologique, deux nappes ont été mises en évidence sur le mont Cabassou : une nappe perchée donnant naissance à des sources sur les pentes du versant et une nappe captive en profondeur. Cette dernière est alimentée par des venues d’eau provenant du substratum fracturé.

Les premières traces d’instabilité remonteraient à 1976 et 1989, où un glissement de grande ampleur (180 m de long sur 80 m de largeur) avait affecté le pied de versant. La surface de rupture atteignait 20 m de profondeur, d’aprés le CEREMA (2015).

Le 19 avril 2000, un glissement de terrain du flanc nord du Mont Cabassou, entraine la mort de 10 personnes dont 7 salariés d’une usine et provoque des dégâts matériels importants. Le glissement s’est déclenché brutalement et se serait propagé à des vitesses avoisinant les 40 km/h (source non connue). Le volume mis en jeu est estimé entre 300 000 et 500 000 m3. Il a affecté la quasi-totalité du versant nord sur une surface 4 à 5 fois supérieure à celle du glissement de 1989.

D’après le CEREMA (2015), la raison principale du déclenchement de cette instabilité serait les surpressions interstitielles exceptionnelles qui se sont accumulées dans la partie fissurée du substratum rocheux suite aux pluies exceptionnelles. Ces surpressions étant consécutives à la faible perméabilité des terrains latéritiques argileux sus-jacents qui mettent en charge l’aquifère du substratum. Par ailleurs, l’analyse des précipitations d’avril 2000 indique une configuration climatique exceptionnelle, conjonction de deux phénomènes: pluies importantes sur 4 mois consécutifs et pluies très intenses en avril 2000.

D’autres facteurs déclenchant sont aussi évoqués :

- La présence d’un sillon dans le substratum, parallèle à la pente, a pu favoriser un effet de barrage des écoulements vers l’aval, accentuer les mises en charges et entrainer des mises en pression différentielles « rapides » des terrain de couverture et conduire à leur déstabilisation ;

- La suppression de la butée de pied suite au glissement de 1989.

Page 26: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

24 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 13 – Photos de la cicatrice du glissement de Cabassou (source BRGM)

3.3. TYPOLOGIE DES INSTABILITÉS REDOUTÉES SUR LE MONT BADUEL

D’après cet inventaire, deux types de glissement sont susceptibles d’affecter le mont :

- Des glissements naturels, pouvant atteindre des volumes importants (supérieure à 10 000 m3 voire 100 000 m3) suivant la profondeur de la surface de rupture ;

- Des glissements affectant les talus anthropiques, dont le volume est estimé entre 1 et 500 m3 vu la géométrie des talus sur le mont Baduel.

Ils sont schématisés sur l’Illustration 14.

Page 27: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 25

Illustration 14 : Typologie des deux mouvements de terrain possible sur le Mont Baduel

a). Glissement naturel

Un « glissement naturel » inclut tout glissement des matériaux en place, non lié à un talus anthropique. Ce phénomène est défini par une surface de rupture, qui apparaît soit au contact colluvions/altérites, soit dans les altérites.

Les glissements affectant les colluvions concernent généralement de petits volumes. Ils sont liés aux mauvaises caractéristiques mécaniques de ces formations de pente. Les facteurs déclenchants sont essentiellement pluviométriques, accentués par les interventions humaines (rejet d’eau ou sapement du pied de ces colluvions). Il n’existe pas d’inventaire de ces évènements.

Les versants des collines guyanaises sont exposés à des mouvements d’ampleur comme celui qui a affecté le flanc nord du Mont Cabassou en 2000. La surface de rupture apparaît dans l’horizon de saprolite, à une profondeur potentiellement importante (potentiellement > à 20 m). Ces phénomènes peuvent mettre en jeu un volume important de matériaux glissés (quelques mètres à plusieurs centaines de milliers de m3).

Les facteurs déclenchants sont d’abord pluviométriques, souvent couplés à des facteurs hydrogéologiques ; ainsi une nappe en charge constitue la situation la plus défavorable. Dans la catastrophe du Mont Cabassou, la suppression de butée de pied provoquée par le premier glissement a probablement également joué un rôle important.

Volume mobilisable = 1 à 500 m3

Page 28: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

26 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Morphologie favorable Géologie favorable

Facteur aggravant autre que la pluie

directe

Intensité

Flanc des mornes Saprolite et argile

d’altération

Surpression interstitielle

(Nappe en charge, ..) Suppression butée de

pied …

Moyenne à très forte

Flanc des mornes Colluvions, remblais

anthropiques

Rejet d’eau, Suppression butée de

pied

Faible à moyenne

Illustration 15 – Tableau de synthèse des facteurs aggravants potentiels pour les glissements naturels

b). Glissement de talus anthropiques

Ces phénomènes qui correspondent à la majorité des glissements de terrain observés sur l’île de Cayenne, concernent les talus artificiellement créés par l’homme (que cela soit pour des extractions de matériaux, des talus routiers ou des terrassements). Ces modifications topographiques perturbent l’équilibre naturel du versant et un processus de rééquilibrage régressif de la tête de talus est inéluctable.

Ces talus sont taillés dans la saprolite, le plus souvent verticaux, pour limiter l’érosion due aux importantes précipitations. Suivant leur hauteur et la configuration du site, ces talus peuvent recouper, de haut en bas :

- des colluvions (plus ou moins épaisses, le plus fréquemment de l’ordre d’un à deux mètres),

- des argiles tachetées (lorsqu’elles sont présentes dans le profil),

- la saprolite.

La surface de rupture apparaît généralement, dans les saprolites. Si les volumes sont le plus souvent peu importants (de la dizaine à la centaine de m3), dans certain cas, suivant l’ampleur des terrassements, ils peuvent atteindre plus de 10 000 m3 (glissement de la carrière Est du Mont Cabassou, Carrière du Mont Lucas).

Les facteurs déclenchants sont d’abord pluviométriques et peuvent être favorisés par des écoulements souterrains particuliers, comme l’illustre l’évènement du 7 juin 2009 à Baduel, qui correspond à un écoulement privilégié en pied.

Morphologie favorable Géologie favorable

Facteur aggravant

autre que les précipitations

Intensité

Tous les talus anthropiques

Saprolite Ecoulements souterrains, rejet d’eau

Faible à forte

Illustration 16 - Tableau de synthèse des facteurs aggravants potentiels pour les glissements de talus

anthropiques

Page 29: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 27

Illustration 17 – Origine des talus et contexte géologique des pentes talutées en Guyane (source : PPR mouvement de terrain de l’île de Cayenne)

Page 30: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de
Page 31: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 29

4. Caractérisation 3D de la colline de Baduel

Ce chapitre décrit l’ensemble des données nécessaires pour l’analyse de stabilité vis à vis de glissement de terrain, qui sera décrit dans le chapitre suivant. Certaines sont des données de base, comme le modèle numérique de terrain, d’autres résultent de traitement numérique (carte des pentes, modèle de drainage).

Pour pouvoir effectuer des calculs de stabilité, plusieurs informations géographiques ont été compilées à partir des données existantes :

- modèle numérique de terrain (MNT) ;

- modèle géologique en 3D (à partir des reconnaissances géophysiques, calées par les sondages carrotés du LBTP, 2006) ;

- modèle piézométrique (à partir des données LBTP, 2006).

4.1. TOPOGRAPHIE

4.1.1. Modèle numérique de terrain (MNT)

Le modèle numérique de terrain (MNT) au pas de 0.5 m (IGN, 2015) a été fourni pour les besoins de l’étude par la DEAL.

Ce MNT a été ré-échantillonné à différentes résolution (entre 5 et 20 m), pour optimiser les résultats des études de stabilité.

L’Illustration 18 présente la topographie fine du Mont Baduel issue de ces données topographiques haute-résolution.

Page 32: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

30 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 18 : Modèle Numérique de Terrain issu du levé Lidar (IGN, 2015) Source bâtiment (BD Topo 2012)

4.1.2. Informations dérivées du MNT

Plusieurs cartes ont été dérivées de ce MNT : - une carte des pentes, en degrés (cf. Illustration 19) ; - une carte des directions d’écoulement, indiquant par un code l’octant de la ligne de plus

grande pente, parmi les 8 directions possibles (N, NE, E, SE, S, SW, W, NW); - une carte des « flux accumulés », issue d’un calcul de modèle de drainage. La valeur de

chaque maille est la surface drainée (i.e. surface du bassin versant) exprimée en nombre de mailles.

Ces informations sont notamment nécessaires comme données d’entrées du logiciel Alice (@BRGM).

Page 33: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 31

Illustration 19 – Carte des pentes du mont Baduel issue du Lidar (IGN, 2015) Source bâtiment (BD Topo 2012)

4.2. MODÈLE GÉOLOGIQUE 3D DU MONT BADUEL

4.2.1. Principe de la modélisation géologique 3D

Des reconnaissances géophysiques successives ont été menées sur le mont Baduel :

- 2011 : panneaux électriques par le LBTP (réf. RCF6.B.016 et FB.041) ;

- 2015 : sismique réfraction par le BRGM (Bretaudeau et al., 2016, BRGM/RP-65823-FR).

Les données géophysiques issues de ces deux campagnes de reconnaissances ont été calées à l’aide des sondages réalisés par le LBTP en 2005 (réf. 05.CN.37.SF).

L’ensemble de ces information a permis d’identifié les profondeurs respectives des couches ou « interfaces géologiques » suivantes, au droit de l’ensemble des profils :

- toit du socle (limite socle-saprolite) ;

- limite entre la saprolite et les argiles d’altération ;

Page 34: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

32 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

- limite inférieure de la cuirrasse latéritique.

L’interface saprolite/argile d’altération est associé à une plus forte incertitude que les autres limites en raison notamment des propriétés mécaniques relativement diffuses entre ces deux entités. Cet interface devra être considérée par la suite comme une limite géophysique plus que géologique.

Par ailleurs, les formations de pentes (colluvions), apparaissent trop minces pour être repérées de manière suffisamment nette sur les profils géophysiques (épaisseur max. < 5 m d’après les sondages).

A l’aide de ces données ainsi qu’aux informations issues des sondages réalisés par le LBTP au cours des deux campagnes (2005 et 2012), le BRGM a proposé un modèle 3D du sous-sol du mont Baduel par une méthode de krigeage qui est détaillée dans le rapport d’investigations géophysiques (Bretaudeau et al., 2016).

4.2.2. Présentation des résultats de l’interpolation

Représentation 2D des interfaces géologiques

D’après les résultats obtenus, le toit du substratum rocheux du Mont Baduel suit globalement la topographie, excepté certaines remontées altimétriques localisées le long du profil C et du profil A (cf. Illustration 20). Ainsi, l’altitude du toit du socle est de -10 à -20 m NGG au minimum (en pied de versant), et remonte jusqu’à 45 m NGG en partie sommitale. Le toit de la saprolite s’étend entre 10 et 50 m NGG.

Finalement, l’Illustration 21 présente l’épaisseur du profil d’altération sur le mont Baduel. Cette épaisseur est maximale au sommet du mont Baduel où elle atteint 70 à 80 m et minimale en pied de versant, de l’ordre de 20 m. A titre de comparaison, la profondeur du toit du substratum fracturé mesurée par sondage sur le mont Cabassou (Géode, réf. 01 DOS 139, 2002), variait entre 20 et 40 m dans la partie amont 20 et 25 m dans la partie aval avant glissement.

Page 35: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 33

Illustration 20 – Altitude des interfaces socles et saprolites, d’après l’interpolation des mesures géophysiques

Page 36: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de
Page 37: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 35

Illustration 21 – Comparaison de l’épaisseur des altérites d’après l’interpolation des mesures géophysiques et l’épaisseur donnée par les sondages ayant recoupé le socle

Représentation par profil 2D des flancs du mont Baduel

Les trois coupes suivantes ont été extraites du modèle géologique 3D. Elles précisent la géométrie du profil d’altération sur le flanc est du Mont Baduel (cf. Illustration 22).

Page 38: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

36 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 22 – Présentation des coupes au niveau de 3 profils transversaux du mont Baduel

On remarque plusieurs configurations distinctes sur ces trois profils, notamment concernant la profondeur et la topographie du toit du socle. L’épaisseur d’altérites est particulièrement importante sur le profil D (jusqu’à 80 m de profondeur), ce qui correspond aux plus fortes épaisseurs d’altérites connues en Guyane.

Source ?

Page 39: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 37

4.3. CONTEXTE HYDROGÉOLOGIQUE

4.3.1. Synthèse des données antérieures

Le bureau d’études GIPEA (R322.09, 2009) indique la présence d’une nappe captive sous les argiles dans la frange altérée du massif rocheux du mont Baduel.

Par ailleurs, l’existence d’un aquifère de socle est, a priori, confirmée par la présence de la source de Baduel, qui coule de manière pérenne (communication orale des habitants), entre les deux collines du mont Baduel. Le niveau aquifère pourrait correspondre à la base de la saprolite (à confirmer).

Par ailleurs, les écoulements évoqués dans les témoignages en pied du talus du profil C (glissement du 7 juin 2009, cf. § 3.2.1), pourraient correspondre à un exutoire de nappe perchée, à la faveur d’infiltrations dans les altérites et pouvant donner naissance à des sources ponctuelles dans le versant.

D’après l’exploitation du suivi piézométrique mené sur une année hydrologique, entre le 14/06/2005 et le 10/07/2006, le LBTP (réf. 05.CN.37.SF02, 2006) avait mis en évidence que :

- Le versant a une forte pente qui favorise le ruissellement rapide des eaux d’impluvium. Par ailleurs les formations de surface, argiles latéritiques peu ou pas graveleuses ont, après saturation, un coefficient de perméabilité faible. Ce sont les aménagements (type terrassements) qui favorisent les infiltrations ;

- En pied de pente, la variation du niveau de la nappe est faible, en relation directe avec la pluviométrie et les marécages entre le Mont Baduel et le Mont Lucas ;

- Vers l’amont du versant, la nappe est plus profonde et il n’y a pas de relation entre la nappe et la pluviométrie.

Cependant, remarquons que ce suivi a été réalisé par des piézomètres qui ne captent que le niveau d’eau dans la saprolite. De plus, les deux piézomètres qui ont atteint le socle (PZ1 et PZ4) sont crépinés sur l’ensemble de la colonne.

4.3.2. Eléments hydrogéologiques retenus pour la modélisation

Pour compléter la modélisation 3D du mont Baduel en vue d’intégrer les paramètres hydrogéologiques dans les calculs de stabilité, une interpolation des mesures piézométriques extrêmes (maximum et minimum) relevées pendant le suivi du LBTP de 2006 a été réalisée. Ces dernières ont été complétées par les observations ponctuelles du LBTP au niveau des sondages SC1, SC2 et SC3 de 2012 (LBTP, FB041, 2012), ainsi que par l’exutoire de la source pour avoir une surface correspondant à un pseudo-niveau piézométrique (cf. Illustration 23). Les variations saisonnières atteignent 8 m au maximum, en pied de pente.

Ce niveau piézométrique reste un indicateur du contexte hydrogéologique car il est délicat de concevoir un niveau hydrostatique dans une formation peu perméable.

Ce modèle 3D d’épaisseur des terrains non saturés ainsi obtenu (cf. Illustration 23) est assez peu contraint en dehors des points de sondages où les informations de niveau d’eau ont été relevées. Il constitue une base satisfaisante, sur le flanc sud-est du mont Baduel, compte-tenu des données existantes sur ce secteur, objet de la présente étude.

Page 40: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

38 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Les données issues de cette interpolation seront utilisées et intégrées dans les calculs de stabilité en tant que niveaux maximums atteints annuellement, en dehors de toutes considérations météorologiques exceptionnelles.

Illustration 23 – Epaisseur des terrains non saturés (établi d’après le calcul : surface topographique - niveau piézométrique le plus haut relevé)

Page 41: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 39

5. Etude de la stabilité du mont Baduel sur profil 2D (glissement de grande ampleur)

5.1. CHOIX MÉTHODOLOGIQUE RETENU

5.1.1. Logiciel et principe de calcul utilisé pour l’étude

La présente étude vise à déterminer la stabilité du mont Baduel, vis-à-vis d’un glissement de grande ampleur de type « versant » (plusieurs dizaines à centaines de milliers de mètres cubes).

Ce diagnostic repose sur des approches déterministes qui se basent sur des paramètres spatialement explicites. Pour cela, deux outils complémentaires de calculs géotechniques ont été utilisés :

- Dans un premier temps, le logiciel Talren 5 (@Terrasol), pour mener des analyses de sensibilité sur des profils 2D caractéristiques, détaillées dans ce chapitre ;

- Dans un second temps, à l’aide de ces calages, le logiciel ALICE (@BRGM), pour évaluer cette stabilité vis-à-vis du phénomène de mouvement de terrain de grande ampleur, sur l’ensemble du flanc est de la colline de Baduel (cf. chapitre 6).

La stabilité a été évaluée pour des géométries de rupture circulaire, selon des principes de calculs complémentaires : la méthode de Bishop pour Talren et les équations de Morgenstern & Price (1967) pour Alice @BRGM.

Les deux calculs ont pris en compte les mêmes données d’entrées, soit les caractéristiques mécaniques des terrains à long terme (conditions drainées), l’épaisseur des formations altérées, la topographie et le niveau de la nappe d’eau en condition statique.

Les résultats des deux outils de calculs s’expriment de la même manière, par la valeur d’un facteur ou coefficient de sécurité (Fs). Le calcul de ce coefficient utilise la méthode classique dite « des tranches », c’est-à-dire que le talus est découpé en tranches verticales d’épaisseur unitaire et l’on considère l’équilibre limite de chaque tranche. Le coefficient de sécurité (Fs) correspond, pour une surface de rupture donnée, au rapport de la contrainte de cisaillement maximale mobilisable à la contrainte de cisaillement mobilisée le long de la surface de rupture. Théoriquement, on considère les éléments suivants :

- Fs < 1 : un glissement est inévitable ;

- 1 < Fs < 1,5 : le risque de rupture n’est pas exclu ;

- Fs > 1,5 : le versant est considéré comme stable.

5.1.2. Choix des profils étudiés

Plusieurs profils ont été choisis et positionnés afin d’examiner l’ensemble de la zone d’étude tout en étant représentatif de différentes configurations :

Page 42: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

40 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

- Une forte épaisseur d’altérites (profil D) ;

- Une variation de la profondeur du substratum ;

- La présence de successions de plateformes en déblais (profil Abis) ;

- L’occurrence d’anciens glissements sur le profil (profil F, C et D).

L’Illustration 24 positionne ces profils, sachant que le profil A correspond au profil étudié en 2006 par le LBTP (05.CN.37.SF02) puis en 2009 par GIPEA-GSI (R322.09) et que le profil F recoupe le talus affecté par le glissement de terrain du 1er juin 2009.

Illustration 24 – Position des profils étudiés et emprise de l’aléa fort du PPR (enveloppe rouge) (emprise du bâti (BDTopo, 2012) et fond topographique Lidar (IGN, 2015)

Page 43: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 41

5.1.3. Calage des caractéristiques mécaniques

Analyse préliminaire des données in situ existantes

Au démarrage de la présente étude, l’ensemble des données géotechniques issues d’analyses en laboratoire sur des échantillons de sols latéritiques prélevés sur des collines de l’île de Cayenne ont été récupérés. Une analyse comparative a ensuite été établie avec les analyses de laboratoires acquises sur le Mont Baduel, de manière à déterminer les valeurs les plus plausibles de ces paramètres mécaniques toujours délicats à définir.

Les Illustration 25 et Illustration 26 présentent les valeurs de cohésion (c’) et d’angle de

frottement interne (')8 mesurées sur plusieurs échantillons de saprolites et d’argile d’altération, prélevés sur le mont Baduel (LBTP, 05.CN.37.SF02, 2006) et sur la colline de Montabo (LBTP, FD-156, 2013).

Illustration 25 – Valeurs de cohésion c’ obtenues lors d’analyses en laboratoire (en kPa)

Illustration 26 – Angles de frottement internes ' obtenus lors d’analyses en laboratoire (en°)

Ces valeurs de cohésion sont cohérentes avec les tendances affichées dans les différents rapport du LBTP qui indiquent que les saprolite présentent des valeurs de cohésion plus faibles

8 La cohésion (c’) et l’angle de frottement interne (')8 sont les caractéristiques intrinsèques d’un sol qui déterminent sa résistance au cisaillement.

Page 44: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

42 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

(10-15 kPa en moyenne) que les argiles d’altérations, plus évoluées (40 kPa en moyenne). La présence plus ou moins abondante de la fraction sableuse dans les matériaux issus de la latéritisation est fortement influencée par la nature de la roche mère dont ces altérites sont issues.

Calage des caractéristiques mécaniques d’après les retours d’expériences

Pour caler les hypothèses géotechniques à retenir pour cette étude spécifique, différentes

valeurs du poids volumique () et des paramètres mécaniques c’ et ' ont été testées le long du profil C (cf. Illustration 28), pour des conditions piézométriques correspondant au maximum observé.

Cette méthode vise à contraindre les paramètres pour s’approcher d’un coefficient de sécurité proche de 1, valeur correspondant à une condition de déséquilibre à un endroit que l’on sait proche de l’instabilité par ailleurs. En effet, l’occurrence de deux glissements en pied du profil C (en 2009 et en 2012) permet de considérer, en première approche, que l’on se trouve en limite de stabilité en pied de ce talus.

Ainsi, d’après cette analyse de sensibilité (Illustration 27 et Illustration 28), les caractéristiques géomécaniques qui permettent d’expliquer le mieux une instabilité de talus en pied de versant tout en restant cohérent avec les valeurs mesurées in situ, sont :

- = 18 kN.m-3

- ' = 25° ;

- c’ = 15 kPa.

Ces valeurs s’approchent des caractéristiques les plus faibles mesurées in situ (valeurs min. c’

de 5 kPa et ' de 25° dans l’Illustration 25 et Illustration 26) et peuvent donc être considérées comme sécuritaires. Et en considérant ces valeurs pour l’ensemble du versant, la stabilité du versant vis-à-vis des mouvements de terrains de grande ampleur le long du profil C, n’apparait pas remise en question (cf. Illustration 28).

' (°) c’ (kPa) Coeff Séc Min Glissement de

Versant

Coeff Séc Min Glissement de

Talus

Argile d’altération / Saprolite (LBTP, 2006)

29 40 2.32 1.75

34 20

Argile d’altération (LBTP, 2006) 29 40 2.12 1.98

Saprolite (LBTP, 2006) 34 20 2.34 1.45

Hypothèse 1 29 20 1.9 1.35

Hypothèse 2 29 10 1.83 0.98

Hypothèse 3 29 5 1.7 0.75

Hypothèse 4 25 20 1.65 1.24

Hypothèse 5 25 15 1.61 1.07

Illustration 27 – Analyse de sensibilité des paramètres mécaniques, le long du profil C

Page 45: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 43

Illustration 28 – Coefficients de sécurité obtenus (FS) avec l’hypothèse 5 de l’Illustration 27 et dans des conditions piézométriques égales au maximum observé,

pour un glissement de talus (à gauche) et pour un glissement de versant (à droite). On constate que la tête de talus, en pied du profil C, est instable.

Ces mêmes valeurs mécaniques (hypothèse 5 de l’Illustration 27) donnent un coefficient de sécurité de 1,13 le long du profil F, au niveau du talus ayant été affecté par un glissement le 1er juin 2009 (cf. Illustration 29). Ce constat souligne l’équilibre précaire du talus actuel, à cet endroit.

NB : les profils topographiques avant glissement de ces talus ne sont pas connus NB2 : le profil F est subparallèle aux lignes topographiques et donc au niveau piézométrique (d’où l’allure de la nappe)

Illustration 29 – Coefficients de sécurité (FS) au niveau du talus qui a glissé le 1er

juin 2009, dans des conditions piézométriques égales au maximum observé et avec les caractéristiques mécaniques

(définies par, à gauche, les analyses en laboratoire (saprolite et argile d’altération différenciées) et à

droite, l’hypothèse 5 ( = 18 kN.m-3, ' 25°, c’ 15 kPa) (profil F))

FSmin = 1.711 FSmin = 1.13312

FSmin = 1.071

FSmin = 1.61601

Page 46: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

44 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Caractéristiques mécaniques retenues pour la suite

Les essais laboratoires ont bien mis en évidence les différences de caractéristiques mécaniques entre les niveaux de saprolites et d’argiles d’altération. Cependant, ce modèle conceptuel du profil d’altération par « couches » s’éloigne un peu de la réalité puisqu’elle ne prend pas en compte le continuum de dégradation des paramètres mécaniques. En réalité, pour des profils d’altération que l’on trouve en Guyane, on s’attend à une diminution progressive de la cohésion avec la profondeur et une augmentation de l’angle de frottement. Par ailleurs, la distinction de ces niveaux d’altération est délicate en raison de la variabilité spatiale, voire de la discontinuité probable de cette interface géologique (entre niveaux de saprolites et argiles d’altération). Rappelons également que la fiabilité de cette interface repérée par les mesures géophysiques, reste à vérifier.

Ainsi dans la suite de cette étude, deux configurations schématisées dans l’Illustration 30, ont été systématiquement testées :

- configuration 1 : deux horizons superposés correspondant aux argiles d’altération superficielles et aux saprolites, avec les mêmes caractéristiques mécaniques que celles considérées par le LBTP (réf. 05.CN.37.SF02, 2006) puis par GIPEA-GSI (Réf. R322.09, 2009), calées sur des essais de cisaillement sur échantillons prélevés in situ sur le mont Baduel ;

- configuration 2 : un seul horizon intégrant l’ensemble du profil d’altération, avec des

caractéristiques mécaniques homogènes calées par les retours d’expérience (soit =

18 kN.m-3 , ' 25° et c’ 15 kPa). Cette configuration peut être considérée comme une configuration plus sécuritaire, intégrant le manque de connaissance et la variabilité intrinsèque des caractéristiques mécaniques à l’intérieur de ce profil d’altération.

Les horizons géologiques superficiels (colluvions et cuirasse latéritique), dont les instabilités ne sont pas l’objet de l’étude, n’ont pas été introduits dans les profils.

Illustration 30 – Synthèse des deux configurations considérées pour les calculs de stabilité

Page 47: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 45

5.1.4. Synthèse des choix méthodologiques retenus pour les calculs de stabilité

Pour chaque profil étudié, les calculs de stabilité ont systématiquement été conduits pour les deux configurations décrites précédemment, soit une situation proche des valeurs mesurées (configuration 1 de l’Illustration 30) et une situation plus sécuritaire (configuration 2).

Pour ces calculs sur profils 2D, seule la stabilité vis-à-vis de mouvements de terrain de grande ampleur (c’est-à-dire avec une surface de rupture supérieure à 10 m) a été évaluée. En effet, dans les calculs de stabilité, il est important de ne pas prendre en compte les ruptures localisées avec des cercles de glissement peu profonds, tels les glissements de talus ou des glissements dans les colluvions, qui présentent généralement les coefficients de sécurité calculés les plus faibles.

Les conditions piézométriques considérées correspondent au maximum des niveaux d’eau observés.

5.2. PRÉSENTATION DES RÉSULTATS

L’Illustration 28 synthétise les coefficients de sécurité minimaux obtenus sur chaque profil dans les deux configurations de caractéristiques mécaniques retenues, pour des glissements de grande ampleur, dans des conditions piézométriques correspondant au maximum observé.

Coeff Séc Minimal

Configuration 1 Coeff Séc Minimal

Configuration 2

Profil A 2.37 1.6

Profil Abis 1.85 1.24*

Profil B 2.02 1.39

Profil C 2.3 1.61

Profil D 1.40 1.00

Profil E 1.98 1.36

Profil G 1.87 1.35

Profil H 2.01 1.43

Illustration 31 – Coefficient de sécurité minimal obtenu sur chaque profil pour des glissements d’ampleur suivant les configurations choisies (*glissement de taille plus limité)

5.2.1. Une remontée du socle garantissant la stabilité (Profil A)

Remarque : le profil A est celui qui a été étudié par le LBTP (05.CN.37.SF02, 2006) puis par GIPEA-GSI (R322.09, 2009), et qui passe par les sondages SC1, PZ4 et PZ5.

Lors des différents calculs de stabilité, le coefficient de sécurité le plus faible est toujours obtenu pour une surface de rupture qui passe en pied de pente, soit pour la partie du versant la plus pentue.

Suivant les caractéristiques mécaniques de la configuration 2 et en considérant les niveaux piézométriques les plus élevés qui ont été observées, on obtient un coefficient de sécurité de 1,6.

Ainsi, au droit du profil A, la stabilité vis-à-vis des glissements de grande ampleur parait assurée, favorisée par la remontée de l’altitude du socle.

Page 48: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

46 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Ce résultat confirme la conclusion du LBTP (2006) : « pas de risque de glissement de grande ampleur » et de GIPEA-GSI (2009) « La stabilité au grand glissement parait assurée, ce qui confirme ainsi les conclusions optimistes du LBTP ».

Illustration 32 – Evolution des coefficients de sécurité (FS) selon la localisation des glissements envisagés dans le profil A, pour la configuration 1

5.2.2. Effet du terrassement (profil A et Abis)

L’effet de l’accumulation de terrassements le long de la pente a été évalué en comparant la stabilité vis-à-vis de glissements de terrain de grande ampleur pour les deux profils voisins, A (sans terrassement) et Abis (avec terrassement). Les calculs confirment bien que l’effet terrassement doit est considéré comme un facteur aggravant. En effet, entre le profil A et Abis, le coefficient de sécurité passe de 1,58 à 1,24, le risque est donc nettement accru. Le long du profil Abis, les terrassements de pied de pente suppriment en effet, une butée importante.

L’existence des terrassements (tels qu’observés aujourd’hui le long du profil Abis), augmente donc fortement la probabilité d’occurrence d’un glissement d’ampleur moyenne à modérée (cf. Illustration 33), surtout quand ils sont situés en pied de pente. Ceci rejoint les conclusions de GIPEA-GSI (2009) : « On observe une diminution significative de la valeur du coefficient de sécurité pour le cas d’un glissement de grande ampleur lorsque l’on tient compte des

FSmin = 4.30

FSmin = 2.37

FSmin = 2.66

Page 49: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 47

modifications topographiques (excavations successives, plateformes en déblais) : le risque d’instabilité générale du versant est amplifiée par les terrassements successifs. ».

Toutefois, dans le cas des profils A et Abis, la remontée du socle limite le risque de déstabilisation du versant dans son ensemble (cf. Illustration 33). Dans la configuration topographique actuelle, la surface de rupture serait ainsi limitée à 15 m de profondeur.

Illustration 33 – Comparaison du coefficient de sécurité (FS) avec et sans terrassement, le long des profils A (à gauche : sans terrassement) et A bis (à droite : avec terrassements)

pour la configuration 2 : = 18 kN.m-3, ' 25°, c’ 15 kPa

5.2.3. Une instabilité suspectée le long du Profil D

Le profil D est parallèle à l’axe du talweg où la géomorphologie des escarpements, nettement grâce aux données Lidar, laisserait suggérer qu’il s’y soit déjà produit un glissement de versant.

Avec les conditions mécaniques de la configuration 1 et des conditions piézométriques correspondant au maximum observé, on obtient un coefficient de sécurité de 1.4, garantissant certes la stabilité en condition normale, mais peu sécuritaire (< 1.5) (cf. Illustration 34). Des conditions mécaniques issues de la configuration 2, conduisent à réduire nettement le coefficient de sécurité, qui atteindrait ici 1,0 soit un critère d’instabilité (cf. Illustration 35). Ce résultat se justifie par la forte pente (> 35°) et la forte épaisseur d’altérites (jusqu’à 75 m) sur ce profil.

FSmin = 1.24 FSmin = 1.58

Page 50: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

48 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 34 – Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil D

(configuration 1 : ' 34° à 29°, c’ de 20 à 40 kPa, =18 à 19 kN/m3)

Illustration 35 – Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil D

(configuration 2 : ' 25°, c’ 15 kPa, =18 kN/m3)

Par conséquent, il apparait que la stabilité vis-à-vis d’un glissement de grande ampleur au niveau de l’axe de la vallée située le long du profil D n’est aujourd’hui pas assurée. La surface de rupture pourrait atteindre 25 m de profondeur sur une longueur de plus de 100 m, avec un volume mobilisable estimé à une centaine de milliers de mètres cubes.

D’autant que d’autres facteurs, non pris en compte (augmentation locale des pressions interstitielles par exemple) pourraient réduire encore le coefficient de sécurité affiché.

FSmin = 1.40

FSmin = 1.00

Page 51: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 49

5.2.4. Les profils B, E, G et H

Le long de ces deux profils, que cela soit en considérant des caractéristiques mécaniques de la configuration 1 ou 2, les coefficients de sécurité semblent garantir une certaine stabilité vis-à-vis des glissements de grande à moyenne ampleur en condition normale (coef mini = 1.35). Cependant, le coefficient de sécurité n’est pas suffisant (< 1.5) pour garantir la stabilité dans toutes situations ; il reste susceptible d’évoluer vers des valeurs peu sécuritaires en conditions exceptionnelles. Les volumes mobilisables ainsi estimé s’élèveraient à plusieurs dizaines de milliers de mètres cubes.

Sur le profil E, le glissement associé au coefficient de sécurité le plus faible, mesure 90 m de largeur moyenne pour une surface de rupture de 25 m de profondeur.

Sur le profil B, la surface de rupture du glissement associé au coefficient de sécurité le plus faible, atteint plus de 30 m de profondeur (Illustration 37, droite).

La surface de rupture du glissement associé au coefficient de sécurité le plus faible, atteint 15-20 m de profondeur sur le profil H, (Illustration 38) et 20-25 m sur le profil G (Illustration 39).

Illustration 36 – Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil E (configuration 1 à gauche et configuration 2 à droite)

FSmin = 1.36

FSmin = 1.98

Page 52: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

50 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 37 – Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil B (configuration 1 à gauche et configuration 2 à droite)

FSmin = 2.02

FSmin = 1.39

Page 53: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 51

Illustration 38 - Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil H (configuration 1 à gauche et configuration 2 à droite)

Illustration 39 - Coefficient de sécurité (FS) vis-à-vis d’un glissement de versant le long du profil G (configuration 1 à gauche et configuration 2 à droite)

5.3. CONCLUSION VIS-A-VIS DES GLISSEMENTS DE GRANDE AMPLEUR

Les calculs menés sur ces 8 profils caractéristiques ont montré que l’occurrence d’un glissement de grande ampleur était probable sur le profil D (coefficient de sécurité minimal de 1.0). Le volume potentiellement instable est important (estimé à une centaine de milliers de m3). Une situation peu sécuritaire est également rencontrée sur le profil Abis, avec un volume un peu plus limité.

FSmin = 1.43 FSmin = 2.01

FSmin = 1.35 FSmin = 1.87

Page 54: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

52 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Sur tous les autres profils, malgré les fortes épaisseurs d’altérites (> 40 m) constatées sur le flanc-est de Baduel, les calculs de stabilité tendent à montrer que le risque d’instabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur est réduit en conditions normales (coefficient de sécurité minimale de 1.4 pour les configurations mécaniques les plus défavorables). Bien que l’occurrence d’un glissement de grande ampleur puisse apparaitre de ce fait peu probable sur la plupart des profils, le coefficient de sécurité minimal n’est pas suffisant (< 1.5) pour garantir la stabilité dans toutes situations ; il reste susceptible d’évoluer vers des valeurs peu sécuritaires en conditions exceptionnelles ou lorsque l’on considère par exemple, des facteurs aggravants non pris en compte (captivité de la nappe, excavations successives, ..).

Les calculs de stabilité confirment bien également que l’accumulation de terrassements le long de la pente (et notamment en pied) est un facteur aggravant, le risque surtout lorsque ces excavations affectent le pied du versant.

Dans tous les cas, les facteurs qui pourraient déclencher une instabilité de versant se concentrent surtout en pied de pente.

Page 55: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 53

6. Prédisposition aux mouvements de terrain sur le mont Baduel

Le chapitre précédent a consisté à caler les paramètres grâce à des études de sensibilité puis à mener des études de stabilité, sur des profils 2D caractéristiques. Ce chapitre permet d’extrapoler ces diagnostics à l’ensemble du flanc sud-est sujet de l’étude, au moyen du programme Alice®.

Ce diagnostic sera représenté cartographiquement comme un niveau de prédisposition à un glissement de grande ampleur (plusieurs dizaines à centaines de milliers de m3). Les principes seront également appliqués pour des glissements plus modestes de type « talus » (de l’ordre de quelques centaines de m3).

Evaluer la prédisposition d’un site à un glissement de terrain est une manière d’estimer la probabilité qu’un glissement de terrain se déclenche à un endroit donné, à partir de l’étude des conditions permanentes (caractéristiques mécaniques des terrains, épaisseur, topographie) qui caractérise le site. A la différence de l’aléa, la taille du phénomène redouté est fixée et on ne tient pas compte de facteur déclenchant (comme la pluviométrie) et donc de notion de période de retour.

6.1. LE PROGRAMME ALICE®

Le programme ALICE®, pour Assessment of Landslides Induced by Climatic Events, est un logiciel d’aide à la cartographie développé par le BRGM, pour répondre à des besoins de Recherche et de Service Public. Le programme permet une approche quantifiée du risque de glissement de terrain.

Il appartient à la famille des modèles d’évaluation basés sur une approche mécanique, pour lesquels les principales propriétés physiques du milieu sont quantifiées et utilisées par un modèle mathématique qui calcule un facteur de sécurité (Aleotti & Chowdhury, 1999). Ces modèles mettent en œuvre un Système d’Information Géographique (SIG) où l’information est spatialisée sous forme de grilles (raster). Ces modèles nécessitent de connaître la répartition spatiale (et parfois temporelle) des paramètres qui vont conditionner la stabilité des sols (caractéristiques mécaniques et géométriques des couches, état hydrique, sous une forme en général très sommaire compte tenu de la variabilité naturelle de ces paramètres au sein de zones d’étude importantes). Cette information spatialisée consolidée sur Baduel a été présentée dans le chapitre 4.

En résumé, ALICE® se caractérise par la mise en œuvre d’un modèle de stabilité de pente fini, avec géométrie de rupture quelconque (cercle, plan ou autres), utilisant la méthode de Morgenstern et Price (Morgenstern & Price 1965, 1967). Le principe est de calculer les facteurs de sécurité le long de profils topographiques 2D couvrant l’ensemble de la zone d’étude.

Le logiciel ALICE sera utilisé ici de manière déterministe, sur des paramètres spatialement explicites.

Page 56: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

54 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

6.2. LA PRÉDISPOSITION AU GLISSEMENT DE GRANDE AMPLEUR

6.2.1. Calage des paramètres du logiciel ALICE®

Les simulations Talren ont permis de fixer certains paramètres mécaniques et géométriques importants : les caractéristiques mécaniques et les dimensions du glissement envisageable (profondeur de la surface de rupture/taille). Comme pour les simulations Talren, le niveau piézométrique le plus défavorable (le maximum observé) a été considéré.

On conservera donc les hypothèses issues des analyses de sensibilité des calculs 2D. Les calculs ont donc été conduits pour les deux configurations mécaniques identifiées précédemment mais seule la configuration mécanique 2, la plus sécuritaire, est représentée ici.

Par rapport au logiciel Talren, le logiciel ALICE a la particularité de traiter des données sous forme de raster. De ce fait, la résolution de ces rasters est un paramètre sensible vis-à-vis des résultats.

Les cercles de rupture critiques mis en évidence par les simulations Talren mettaient en évidence des glissements de 60 à 120 m de longueur environ. La taille de glissement a été ajustée de manière à ce que les résultats soient les plus cohérents avec les calculs TALREN sur les profils 2D, pour les glissements d’ampleur.

Parmi l’ensemble des simulations, la situation la plus cohérente avec les calculs TALREN sur les profils 2D s’est avérée être une taille de glissement de 100 m, avec des rasters d’entrées à 20 m de résolution.

A B

Page 57: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 55

Illustration 40 : Etude de sensibilité sur la taille du glissement, pour une résolution de raster de 20 m. A :

Taille de glissement de 40 m; B : Taille de glissement de 60 m; C : Taille de glissement de 80 m; D : Taille de glissement de 100 m; E : Taille de glissement de 120 m

C D

E

Page 58: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

56 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

6.2.2. Résultat cartographique

L’Illustration 41 présente les coefficients de sécurité obtenus par le logiciel Alice pour des grands glissements (longueur de 100 m).

Illustration 41 – Coefficent de sécurité (Fs) pour des glissements de 100 m, pour la configuration 2 la plus sécuritaire et dans des conditions piézométriques égales au maximum observé

(Résolution des raster de 20 m).

Les résultats cartographiques confirment qu’il n’existe pas de secteurs pour lesquels le coefficient de sécurité est inférieur à 1 ce qui correspondrait à une situation d’instabilité (ou avec un très fort niveau de prédisposition vis-à-vis des glissements de grande ampleur).

Page 59: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 57

Ces calculs mettent en évidence des zones associées à des coefficients de sécurité compris entre 1 et 1.5. Comme avancé plus haut, bien que l’occurrence d’un glissement de grande ampleur puisse apparaitre de ce fait peu probable, le coefficient de sécurité minimal n’est pas suffisant (< 1.5) pour garantir la stabilité dans toutes situations, notamment en conditions pluviométriques exceptionnelles ou lorsque l’on considère des facteurs aggravants non pris en compte (captivité de la nappe, excavations successives, ..).

Parmi ces secteurs, deux secteurs ressortent comme plus sujets au risque de glissement que les autres (1 < Fs < 1.25), confirmant les résultats des simulations Talren sur les profils D et Abis.

6.2.3. Carte de prédisposition aux glissements de terrain de grande ampleur

D’après les coefficients de sécurité obtenus (Illustration 41), les secteurs où la prédisposition à un glissement de grande ampleur est la plus forte ont été cartographiés sur l’Illustration 42, à dire d’experts. Rappelons que le niveau de prédisposition ne tient pas compte, notamment, de la période de retour du phénomène.

L’emprise de la zone de propagation, non prise en compte dans les calculs ALICE a notamment été délimitée à dire d’expert mais les limites aval resteraient à être confirmées.

Page 60: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

58 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 42 – Cartographie des secteurs où le niveau de prédisposition à une instabilité d’ampleur est le plus fort

Page 61: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 59

6.3. LA PRÉDISPOSITION AU GLISSEMENT DE TALUS (PLUSIEURS DIZAINES A CENTAINE DE M3) SUR BADUEL

Comme l’ont confirmé les récents événements (3 événements depuis 2009), des ruptures de faible à moyenne intensité sont susceptibles de se produire au niveau de tous les talus anthropiques qui parsèment le versant et qui n’ont pas été mis en œuvre suivant les règles de l’art. Ainsi, il y a une forte probabilité de glissement de faible à moyenne ampleur au niveau des talus anthropiques.

Bien que cela ne soit pas la finalité première de cette étude, les calculs de stabilité ont également été appliqués pour des glissements plus modestes de type « talus » (de l’ordre de plusieurs dizaines à quelques centaines de mètres cubes), de manière à faire ressortir les secteurs les plus exposés.

6.3.1. Calage des paramètres du logiciel ALICE®

La taille des glissements redoutés au niveau de ces talus est évaluée à une dizaine de mètre, d’après les événements passés (cf. schéma des instabilités de l’Illustration 9).

Pour cette taille de glissement, la résolution optimale permettant de faire ressortir les talus identifiés comme en limite de stabilité d’après l’étude Talren est une maille de raster de 5 m.

Ces calculs ont été conduits pour la configuration mécanique 2 la plus défavorable, décrite dans l’Illustration 30, pour identifier les secteurs les plus exposés.

N’étant pas ici dans une logique d’aléas mais de calcul déterministe, le niveau piézométrique le plus défavorable (le maximum observé) a été considéré.

6.3.2. Résultat cartographique

L’Illustration 43 représente le coefficient de sécurité à chaque endroit vis-à-vis d’un glissement d’une taille de 10 m environ, soit de plusieurs dizaines à quelques centaines de mètres cubes. L’étude a été conduite pour cette taille de glissement et ne tient donc pas compte de toutes les instabilités de quelques mètres cubes, pourtant très probables depuis les talus de la zone étudiée.

Les résultats obtenus se corrèlent bien avec les instabilités ayant affecté le mont Baduel ces dernières années (glissements de 2009 et 2012) ainsi qu’avec les récentes instabilités notifiées par les agents de la mairie de Cayenne lors de leurs rondes de surveillance (saison des pluies 2016). Plusieurs talus, qui n’ont pas fait l’objet d’instabilité connues, sont aussi identifiés.

Page 62: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

60 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Illustration 43 – Coefficent de sécurité (Fs) pour des glissements de 10 m et dans des conditions piézométriques égales au maximum observé

(Résolution des raster de 5 m)

6.3.3. Carte de prédisposition aux glissements de talus

D’après les coefficients de sécurité obtenus (cf. Illustration 43), les secteurs où la prédisposition à un glissement de talus est la plus forte ont été cartographiés à dire d’experts sur l’Illustration 44).

Page 63: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 61

Illustration 44 - Cartographie des secteurs où le niveau de prédisposition

à une instabilité de talus est le plus fort

6.4. DISCUSSION DES RÉSULTATS

Ces résultats cartographiques permettent d’identifier les secteurs les plus exposés et de prioriser les secteurs sur lesquels intervenir.

En l’absence de toute surveillance visant les glissements de moyenne et grande ampleur, il est important de rappeler que ces résultats cartographiques ne donnent aucune indication sur la probabilité d’occurrence ni sur la notion de péril imminent ou de temporalité d’occurrence des événements.

Page 64: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

62 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Concernant les talus anthropiques, les ruptures évoquées peuvent intervenir de manière brutale, sans qu’il n’y ait nécessairement de signe avant-coureur ; la notion de péril imminent est pratiquement sous-entendue mais méritent une investigation de terrain à une échelle plus fine, qui n’a pas été conduite dans le cadre de cette étude.

6.4.1. Les facteurs aggravants, non pris en compte par les modèles

Certains facteurs particuliers sont susceptibles d’augmenter le niveau de prédisposition à un glissement de versant mais ne peuvent être pris en compte dans les études de stabilité, par manque de connaissance ou de d’adaptabilité des outils. Ces situations particulières, qui pourraient modifier les résultats évalués en conditions normales, sont à prendre en compte.

Effet 3D de suppression de butée de pied

Les effets 3D, évoqués par GIPEA-GSI (réf. R322.09, 2009), ne sont pas pris en compte par les calculs Talren ou Alice, qui se concentrent sur des profils 2D.

Ces effets 3D correspondent à une accumulation d’effets défavorables liés à des suppressions de butée de pied successives (cf. Illustration 45). Ces effets concernent donc des topographies convexes, particulièrement terrassées. Au droit de ces configurations, la probabilité d’occurrence d’une instabilité générale du versant serait alors amplifiée.

Cependant, une diminution de la stabilité générale du versant est observée au gré de la réalisation de plateformes successives, notamment lorsque celles-ci se situent sur le même cercle de glissement. Ce type de configuration a pour effet de supprimer la butée de pied qui permet de retenir les terres en amont.

Illustration 45 – Evolution du coefficient de sécurité suite à une série d’excavation au pied

(vis-à-vis d’une surface de rupture ellipsoïdale - d’après GIPEA – GSI, réf. R322.09, 2009).

Page 65: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 63

Une nappe captive sous les horizons argileux

D’après le CEREMA (2015), la raison principale du déclenchement du glissement de Cabassou serait les surpressions interstitielles exceptionnelles qui se seraient accumulées dans la partie fissurée du substratum rocheux. En effet, la captivité d’une nappe dans la frange fissurée du socle mis en charge par les horizons argileux peu perméables est une configuration tout à fait envisageable dans le contexte des collines de Guyane, comme le mont Baduel.

GIPEA (2009) a d’ailleurs évoqué cette hypothèse sur le mont Baduel. Cependant, nous ne disposons actuellement d’aucun indice de captivité tangible sur le mont Baduel.

Pour qu’une configuration d’aquifère captif puisse déclencher un glissement de grande ampleur, il est nécessaire que :

- les surpressions interstitielles provoquées par cette captivité soient suffisantes, ce qui dépend notamment, de la vitesse de recharge de cette nappe et de la perméabilité de l’horizon aquifère et de l’horizon argileux ;

- Le recouvrement s’opposant à cette surcontrainte ne soit pas trop épais.

Sur ce point, les profils d’altération du mont Baduel et du mont Cabassou sont très différents (cf. schéma de l’Illustration 46). La forte épaisseur d’altération sur le mont Baduel et la surcontrainte verticale induite aurait d’un coté tendance à limiter le risque de déstabilisation mais de l’autre, à augmenter la mise en charge, si elle existe. Cette forte épaisseur aurait aussi probablement tendance à temporiser le rechargement de la nappe profonde, lors d’événements pluviométriques.

Comme une captivité reste réaliste, il est important de poursuivre les investigations avant d’exclure cette hypothèse éventuellement. Des préconisations sont évoquées au § 7.1 à ce sujet.

Illustration 46 – Schéma très simplifié des profils types de Cabassou et Baduel

MONT CABASSOU (avant glissement)

20 à 40 m

mmm

20 à 25 m Socle

fracturé

altérite

MONT CABASSOU (après glissement)

Page 66: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

64 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

Une mise en pression des écoulements par remontée du substratum

Sur le mont Cabassou, certaines expertises ont évoqué une remontée du substratum qui aurait pu provoquer un effet de barrage des écoulements vers l’aval et ainsi des mises en charges rapides.

Sur le mont Baduel, d’après la carte du socle imagée par les mesures géophysiques, il ne semblerait pas y avoir de remontée du socle pouvant jouer le rôle de barrage continu aux écoulements vers l’aval. Si l’altitude du socle remonte sur le profil A et sur le profil D, il ne s’agirait que de particularités localisées suggérant que les écoulements puissent contourner l’obstacle. Cette configuration géologique aurait tendance à réduire le risque d’un scénario de mise en pression hydraulique comme celui évoqué dans le cas du glissement de Cabassou.

Un glissement historique en pied

La survenue d’un glissement en pied (comme celui de 1989 à Cabassou, d’un volume de plus de 10 000 m3) est un facteur de déstabilisation du versant amont, par suppression de la butée de pied. Si aucun glissement d’ampleur n’a jusqu’alors affecté le pied de Baduel, un doute subsiste sur la morphologie du terrain naturel au niveau du talweg pouvant suggérer un glissement très ancien (profil D, cf. § Illustration 47). Sans informations complémentaires à ce sujet, il s’agit là d’un facteur de prédisposition défavorable.

Page 67: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 65

7. Recommandations

7.1. RÉDUCTION DU RISQUE LIÉ A UN GLISSEMENT DE GRANDE AMPLEUR

7.1.1. La mise en sécurité des enjeux sur la zone la plus exposée

Un secteur reste néanmoins particulièrement exposé à un glissement amont d’ampleur, susceptible de se propager en aval (cf. Illustration 47). Le volume instable suspecté (estimé à une centaine de milliers de m3) est tel que les solutions techniques, si elles existent, nécessiteront de moyens techniques et financiers d’ampleur.

Or, les enjeux doivent être mis en sécurité car plusieurs facteurs défavorables s’accumulent :

- Forte épaisseur d’altérites à cet endroit (> 75 m) et forte pente (> 35°), justifiant les faibles coefficients de sécurité mis en évidence par les calculs Talren et Alice ;

- Suspicion d’une zone d’ancien glissement d’ampleur d’après la topographie, ayant également supprimé une grande partie de la butée de pied.

La zone de propagation ci-dessous a été cartographiée, à dire d’expert et ses limites resteraient à être confirmées.

Illustration 47 – Zone fortement exposée à un glissement de terrain d’ampleur Fond cartographique : bâtiment (BD Topo 2012) et Lidar (IGN, 2015)

Page 68: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

66 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

7.1.2. Un dispositif de suivi instrumental (hors zone précédente)

Aucun indice d’instabilité de grande ampleur n’a été mis en évidence sur le terrain, ne justifiant pas la mise en place d’un dispositif d’alerte stricto sensu.

Cependant, bien que les résultats des études de stabilité ne soient pas alarmistes, un glissement de grande ampleur n’est pas totalement exclus à l’heure actuelle et justifie le suivi et l’acquisition de connaissance, au moyen d’un dispositif instrumental (un suivi visuel n’est pas suffisant pour suivre l’évolution d’un tel phénomène s’il venait à se déclencher).

Un dispositif de suivi des déplacements (inclinométrique ou topographique) pour les zones les plus susceptibles de glisser

Pour détecter la survenue d’une instabilité d’ampleur, un suivi instrumental reste souvent nécessaire.

Pour des glissements d’ampleur comme ceux qui sont redoutés ici, le dispositif de surveillance peut consister soit en des inclinomètres ancrés dans le socle, soit en un réseau de suivi topographique haute-résolution en surface. Rappelons que le dispositif inclinométrique mis en place par GIPEA-GSI, ne peut prévenir la survenue d’un mouvement de terrain de grande ampleur (les 5 forages équipés n’atteignent pas plus de 6 m de profondeur).

L’Illustration 42 présente les deux secteurs qui apparaissent comme les plus sujets à des instabilités de versant (plusieurs milliers à dizaines de milliers de m3) et qui mériteraient en priorité, d’être instrumentés (hors zone de propagation en pied de pente).

Un dispositif pour suivre le niveau piézométrique et mettre en évidence une éventuelle captivité de la nappe

Le niveau piézométrique (et notamment les hautes-eaux) reste une donnée d’entrée à consolider, pour améliorer la connaissance du contexte hydrogéologique et mieux contraindre les conditions pluviométriques exceptionnelles, qui peuvent être particulièrement défavorables.

Par ailleurs, la captivité d’une nappe dans l’horizon fissuré du socle qui pourrait mettre en charge les horizons argileux peu perméables (saprolite), est un des principaux facteurs pouvant entrainer des glissements de grande ampleur. Cette configuration est possible dans le contexte hydrogéologique guyanais comme en témoigne la catastrophe de Cabassou.

L’hypothèse d’une telle nappe captive ne peut être mise en évidence par le dispositif actuel : sur le réseau de piézomètre mis en place par le LBTP en 2006, seuls deux piézomètres ont atteint le rocher et ceux-ci, ont été crépinés sur toute leur hauteur. Le réseau piézométrique actuel est composé de 9 points d’entrées qui atteignent le rocher, mais qui sont équipés de tubes crépinés sur toute leur hauteur. La possibilité de remettre en état ce réseau doit être étudié.

Deux possibilités apparaissent, nécessitant un ou plusieurs nouveaux forages, équipés pour :

- La mise en place d’un piézomètre pour suivre la nappe « profonde », en l’équipant de manière à ne capter que l’horizon fissuré (crépines ciblées sur l’horizon fissuré, étanchéité, etc.). Le ou les nouveaux piézomètres pourront idéalement être installés au droit des secteurs prioritaires identifiés sur l’Illustration 42 ;

Page 69: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 67

- La mise en place de capteurs de pressions interstitielles dans les horizons argileux. Compte tenu du contexte et de la nature des terrains argileux, ces capteurs apportent une précision sur les variations de pressions interstitielles au sein de ces horizons argileux peu perméables et à faible transmissivité. Ces instruments restent délicats à installer.

A partir de ces suivis, il serait ensuite opportun de modéliser le champ des pressions interstitielles (par un calcul aux éléments finis par exemple), pour évaluer plus précisément leurs effets sur la stabilité des pentes, dans le contexte spécifique du mont Baduel (i.e. la plus forte épaisseur d’altérites).

7.1.3. Un dispositif de suivi visuel

Un dispositif de suivi visuel a été mis en place depuis 2012, par la DDE, établi sur la base des zonages proposés par GIPEA-GSI (réf. R322.09, 2009). Ce programme de suivi visuel est opérationnel depuis 2016, par la Mairie de Cayenne. Ce dispositif mérite d’être pérennisé.

En effet, en complément d’un dispositif de suivi instrumental, un suivi visuel est adapté pour déceler d’éventuels indices précurseurs de glissement actif : déformations, cicatrices d’arrachement, niches d’arrachement, fissures, bourrelets, arbres inclinés et ajuster, si besoins, le suivi instrumental. Son objectif vise à suivre l’évolution des instabilités déjà recensées et à en détecter de nouvelles, en s’affranchissant des déstabilisations localisées concernant les talus.

7.1.4. Des mesures préventives pour réduire l’aléa

Limiter la pression anthropique

Un facteur aggravant à ces glissements de grande ampleur, reste la pression anthropique exercée sur le versant.

Il devient impératif, a minima, de :

- Stopper tout terrassement supplémentaire ;

- Stopper toute nouvelle construction/installation de personnes ;

- Mettre en œuvre des mesures de confortement lors de l’occurrence d’un glissement de terrain, notamment en pied de pente.

Maîtriser les écoulements

La maitrise des écoulements est un facteur prépondérant de réduction du risque, à concevoir globalement ainsi qu’à l’échelle de la parcelle.

Pour ce qui est de la gestion des écoulements souterrains, il convient impérativement de ne pas boucher les exutoires naturels et de maintenir ou de créer des exutoires pérennes pour les sources connues.

Pour empêcher les infiltrations diffuses et concentrées dans la pente, la gestion des eaux pluviales doit être exemplaire. Il est fortement recommandé de mettre en place :

Page 70: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

68 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

- Un réseau de drainage en réalisant des fossés de collecte avec une légère pente, permettant de canaliser et de récupérer les eaux pluviales sur l’ensemble du mont Baduel ;

- Un drainage des plateformes et des talus vis-à-vis des eaux de ruissellement (protection vis-à-vis de l’infiltration en tête des talus, récupération, canalisation puis évacuation vers un exutoire adapté).

7.1.5. Sensibilisation de la population

La population, la première exposée, est également, la plus à même de percevoir une évolution suspecte des terrains.

De ce fait, il est fortement recommandé de mener une campagne d’information et de sensibilisation auprès des habitants, afin qu’ils puissent, d‘une part, améliorer les conditions d’usage et d’autre part, signaler aux autorités toute situation suspecte (déformation des terrains, apparition de fissures, désordres aux constructions et aux aménagements, …).

7.2. RÉDUCTION DU RISQUE LIÉ A UN GLISSEMENT DE TALUS

Sur tout le flanc est du mont Baduel, le risque lié à la déstabilisation de colluvions ou de tête de talus est fort, ce qui est confirmé par les études de stabilité. Ces instabilités de moindre ampleur, qui peuvent se produire sans nécessairement de signes annonciateurs, peuvent avoir des conséquences fortement dommageables et entrainer des pertes matérielles voire humaines.

Vu les niveaux de risque élevés pour les biens et les personnes, pour maintenir des enjeux, seules des solutions de réduction du risque sont adaptées concernant ces talus. Etant donné que les talus restent globalement de hauteur limitée (< 6 m, mais souvent entre 2 et 3 m), il existe des moyens de protéger les enjeux situés à proximité.

La principale mesure de réduction des risques recommandée par le BRGM est donc de rectifier les aménagements dans les règles de l’art, que cela soit un reprofilage de talus quand cela est possible ou par des mesures de confortement, en suivant également les règles de l’art. On se réfèrera par exemple aux recommandations pour les terrassements décrites dans le règlement du PPR mouvement de terrain de l’Ile de Cayenne.

Rappelons que l’ensemble des talus est potentiellement instable (notamment concernant les éboulements de quelques mètres cubes, non étudié ici), mais l’Illustration 44 présente les talus les plus sujets à des instabilités de plusieurs dizaines à centaines de m3.

Page 71: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 69

8. Conclusion

Les récentes mesures géophysiques associées à l’ensemble des investigations menées depuis une quinzaine d’années ont permis d’améliorer nettement la connaissance et notamment de préciser les horizons géologiques mobilisables au sein du profil latéritique sur le Mont Baduel, un des paramètres les plus discriminants dans les calculs de stabilité.

La présente étude a montré que l’occurrence d’un glissement de grande ampleur était probable sur deux secteurs bien identifiés. L’un d’entre eux est exposé à l’instabilité d’une centaine de milliers de m3, difficilement protégeable. Or, les enjeux doivent être mis en sécurité car plusieurs facteurs défavorables s’accumulent à cet endroit.

Sur tous les autres profils, malgré les fortes épaisseurs d’altérites (> 40 m) constatées sur le flanc-est de Baduel, les calculs de stabilité tendent à montrer que le risque d’instabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur est limité en conditions normales. Cependant, les coefficients de sécurité obtenus ne sont pas suffisants pour garantir la stabilité dans des conditions pluviométriques exceptionnelles ou lorsque l’on considère par exemple, des facteurs aggravants non pris en compte (captivité de la nappe, excavations successives,..).

En effet, certains facteurs de déclenchement de glissement de grande ampleur sont méconnus et souvent difficiles à prendre en compte dans les calculs de stabilité. Il apparait de ce fait nécessaire a minima de procéder à l’installation d’un ou plusieurs piézomètres pour suivre le niveau piézométrique, identifier une éventuelle captivité au niveau du socle fracturé voire quantifier les suppressions interstitielles. Il serait ensuite opportun de modéliser le champ des pressions interstitielles pour évaluer plus précisément leurs effets sur la stabilité des pentes dans le contexte spécifique du mont Baduel.

En parallèle, un système de surveillance (inclinométrique ou topographique) doit être mis en place pour détecter, à l’aide d’instrument de mesure, le déclenchement d’une instabilité d’ampleur, en s’appuyant sur les résultats de l’étude pour cibler dans un premier temps, les secteurs les plus exposés au risque.

De plus, et bien que cela n’était pas la finalité première de cette étude, une carte de prédisposition aux glissements de terrain plus modestes de type « talus » (plusieurs dizaines à centaines de m3) a été réalisée à l’aide du logiciel ALICE, développé par le BRGM. Les résultats obtenus se corrèlent bien avec les instabilités ayant affecté le mont Baduel ces dernières années (glissements de 2009 et 2012) ainsi que les récentes instabilités notifiées par les agents de la mairie de Cayenne lors de leurs rondes de surveillance (saison des pluies 2016). Sur ce point, le BRGM rappelle que l’ensemble des talus sont potentiellement instables et susceptibles de générer des éboulements de quelques m3 à une centaine de m3. Vu les niveaux de risque élevés pour les biens et les personnes quel que soit le volume et vu qu’il n’y a pas nécessairement de signes visibles avant-coureurs, seules des solutions de réduction du risque sont adaptées concernant ces talus pour maintenir des enjeux. La notion de péril imminent est pratiquement sous-entendue mais méritent une investigation de terrain à une échelle plus fine, qui n’a pas été conduite dans le cadre de cette étude.

Cette étude de stabilité apporte de nouvelles informations sur la prédisposition et l’intensité des glissements de grande ampleur envisageables sur le mont Baduel, ce qui n’était pas disponible lors de la réalisation des cartes d’aléa en 2000. Dès lors, ces nouvelles informations permettent d’envisager d’affiner et de compléter le zonage d’aléa mouvement de terrain actuel.

Page 72: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

70 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

A noter que le présent travail, en l’absence de toute surveillance existante actuellement sur les glissements de moyenne et grande ampleur, ne donne pas d’indication sur la probabilité d’occurrence ni sur la notion de péril imminent ou de temporalité d’occurrence des événements.

Page 73: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

BRGM/RP-65987-FR – Rapport final 71

9. Bibliographie

Aleotti P., Chowdhury R. (1999). Landslide hazard assessment: summary review and new

perspectives. Bull. Eng. Geol. Env., 58, 21-44

Arrêté Préfectoral n°202 /SIRACEDP du 15 novembre 2001 : PPR mouvements de terrains

de l’île de Cayenne.

Barras A.V., Chanéac L. (2010). Diagnostic et étude de l’évolution des mouvements de

terrain des collines de l’île de Cayenne (Guyane Française) - Rapport BRGM/RP-58749-FR.

Bretaudeau F., Mathieu F., François B. (2016). Investigations sismiques et électriques sur le

mont Baduel. Rapport final. BRGM/RP-65823-FR, 99 p, 74 fig., 3 tabl., 3 ann.

Bourbon P. (2014). Mont Baduel : expertise du dossier de suivi des mouvements de terrain

et diagnostic de l’aléa. Rapport final. BRGM/RC-63987-FR, 67 p., 31 ill., 2 ann.

CETE (septembre 2003). Diagnostic géotechnique des versants Sud et Est du mont Baduel

– Assistance technique – Affaire n°8124-1. DDE de Guyane.

CEREMA (2015). Glissement de Cabassou. Synthése Bibliographique. Rapport Affaire

C14RR0314

Choubert (1956). Carte géologique à l’échelle du 1/100.000e – feuille de Cayenne et notice

explicative.

Duponcheel (2003). Rapport relatif à la campagne d’investigations complémentaires menée

sur la zone ouest.

GIPEA-GSI (2009). Etude de faisabilité pour la mise en place d’un système d’alerte et de

pré-alerte des glissements de terrain sur le mont Baduel (réf. R322.09).

GIPEA (2012). Mont Baduel à Cayenne, mission de suivi et d’interprétation d’une campagne

d’investigations topographiques, géotechnique et géophysiques. Rapport R2790.

LBTP (2006a). Note de synthèse provisoire sur la stabilité du versant du Mont Baduel.

LBTP (2006b). Rapport d’étude géotechnique aménagement du Mont Baduel. Dossier 05-

CN.37.SF.

LBTP (2006c). Piézométrie - Aménagement Mont Baduel. Dossier 05.CN.37.SF02.

LBTP (2011). Reconnaissance géophysique du mont Baduel - Rapport RCF6.B.016.

LBTP (2012a). Surveillance du Mont Baduel, rapport d’étude géotechnique G0. Rapport

FB.041.

Page 74: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de grande ampleur du Mont Baduel à Cayenne

72 BRGM/RP-65987-FR–Rapport final

LBTP (2012b). Note sur le glissement de terrain du Mont Baduel du 4 et 5 février 2012. Note

n°11.0073.

Morgenstern N.R., and Price VE. (1965). The analysis of the stability of general slip

surfaces. Geotechnique, 15(1): 79-93.

Morgenstern N.R., and Price VE. (1967). A numerical method for solving the equations of

stability of general slip surfaces. Computer Journal, 9: 388-393.

Nguyen D., Joseph B. (2000). Plan de prévention des risques naturels de mouvements de

terrain de l’Ile-de-Cayenne – Communes de Cayenne, Rémire-Montjoly, Matoury.

Rap. BRGM R 40811, 33 p., 7 tabl., 10 fig., 9 pl, 1 ann.

Theveniaut H., Mirlocca J., Laporte P., Bes de Berc S., Joseph B. et Sejourne C. (2004).

Inventaire départemental des mouvements de terrain de la Guyane. Rapport final.

BRGM/RP-53022-FR

Renault O., Mathon C., Parizot M. (2006). Commune de Cayenne (Guyane). – Mise en

sécurité de la carrière de Mont Lucas – étude de réactualisation. Rapport final. BRGM/RP-

55123-FR, 31 pages, 10 illustrations, 4 annexes.

Weng (2009). Glissement de terrain sur le Mont Baduel. Compte rendu BRGM dans le

cadre des missions d’appui aux administrations du BRGM. Missions de terrain de juin 2009.

23 juin 2009.

Page 75: Etude de stabilité vis-à-vis des mouvements de terrain de

Centre scientifique et technique

3, avenue Claude-Guillemin BP 36009

45060 – Orléans Cedex 2 – France

Tél. : 02 38 64 34 34 - www.brgm.fr

Direction régionale Guyane

Domaine de Suzini – Route de Montabo BP 10 552 97333 – Cayenne Cedex – France

Tél. : 05 94 30 06 24 - www.brgm.fr