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Revue mensuelle - N° 47- Février - 2012 Le magazine promotionnel de l'Algérie www.eldjazaircom.dz LE MALG DES HOMMES, UNE HISTOIRE

EldjezairMALG

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  • R e v u e m e n s u e l l e - N 4 7 - F v r i e r - 2 0 1 2

    Le magazine promotionnel de l'Algrie

    www.eldjazaircom.dz

    L E M A L GDES HOMMES,

    UNE HISTOIRE

  • EDITORIAL

    AMMAR [email protected]

    Ayant sa charge lun des plus gros ministres aprs celui de la Dfense, Dahou Ould Kablia sen sort de faon juste et conforme aux lourdes prrogatives que sont les siennes. Mis au-devant de la scne par une conjoncture marque par les profondes mutations politiques et sociales que connat lAlgrie, le ministre de lIntrieur fait face sobrement et sans trop de bruit aux multiples attentes manant de la socit et de la classe politique, sans se laisser dsorienter par les drapages de certains et les diversions des autres. Homme de terrain et de dossiers, le ministre de lIntrieur, issu de la prestigieuse cole du MALG, fort de son pass militant et de son exprience dans la gestion des affaires publiques, continue inlassablement de nous prodiguer une belle leon de constance et de consistance travers un comportement digne dun grand responsable. Que ce soit dans le cadre de ses rapports avec les walis ou travers sa prise en charge des questions scuritaires et dordre public ou encore par rapport au volet relatif aux rformes politiques quil est charg de mettre en uvre, il a toujours russi donner une image sereine et confiante dun homme dEtat qui matrise son sujet. En aucun moment, il na cd limprovisation ou aux approches approximatives. Il est sans conteste lun des principaux architectes de ldifice dmocratique en cours de construction. Un rle quil assume dans la discrtion la plus absolue et le respect le plus strict des traditions rpublicaines, exprimant de la manire la plus clatante un sens lev de la fidlit aux principes et lesprit qui avait anim les hommes de Novembre 54. Ce trait de caractre, extrait dun vaste registre contenant le riche parcours dun homme ayant fait du sacrifice et du don de soi un simple exercice de patriotisme, est on ne peut plus conforme au profil de celui qui a eu le mrite de perptuer la mmoire du MALG et du gnie dAbdelhafidh Boussouf, un moment o des voix commenaient slever ici et ailleurs pour dnigrer Si Mabrouk et son hritage, en prenant le soin de couvrir leurs manuvres suspectes par le droit de revisiter lHistoire. Cest donc dans un contexte marqu par les reniements frapps du sceau des subterfuges faussement acadmiques que le patriote Ould Kablia sest fix le devoir de prenniser le combat du MALG et de ses hommes en donnant naissance une association charge de prserver un pan des plus importants du patrimoine rvolutionnaire et militant algrien. Cette attitude, sinscrivant contre-sens du forcing men par certains partisans du on efface tout et on recommence zro , nous renseigne pleinement sur le temprament dun homme qui ne tolre ni les compromis compromettants ni les compromissions rentables sur le plan matriel mais dgradantes sur le plan moral. Ce profil stable, mesur et inflexible par rapport lhritage de lALN et du MALG, Ould Kablia lassume en toute conscience et en toutes circonstances au moment o certains sreintent changer de couleur en sempressant, chaque fois, de brler aujourdhui ce quils avaient ador hier. A linverse de ces hommes-boussole toujours laffut de la moindre occasion potentiellement bnfique pour leurs intrts personnels, le ministre de lIntrieur est demeur fidle ses attaches. Il a certes volu afin de mieux sadapter aux nouveaux dfis auxquels fait face lAlgrie, mais il a bien gard intactes ses caractristiques fondamentales acquises une poque o ceux qui saventurent aujourdhui donner des leons de gouvernance ntaient pas encore ns. Fidle au sang des chouhada et au sacrifice incommensurable des moudjahidine, Dahou Ould Kablia a su observer un loyalisme et un dvouement irrprochables lgard dun pays et dun peuple que dautres flagorneurs zls nont pas hsit lcher sans tat dme. Ayant t lev dans le respect des valeurs ancestrales de ce peuple, le ministre de lIntrieur a toujours accord une importance capitale aux principes moraux. Dautres sa place auraient facilement succomb lattrait de la puissance que confre ce poste stratgique. Lui, jamais ! Il est tel quil a t et tel quil est : un homme de grande valeur dont la modestie et la correction ne sont plus dmontrer.

    [email protected]

    Un homme dEtat

  • Fvrier - 2012

    Le magazine promotionnel de l'Algrie

    N47

    Contacts : Eurl COMESTA MEDIA N 181 Bois des Cars 3 - Dely-Ibrahim - Alger - AlgrieTl. : 00 213 (0) 661 929 729 / 00 213 (0) 661 929 726 / +213 (21) 360 915Fax : +213 (21) 360 899 E-mail : [email protected]@gmail.com

    Fondateur Directeur Gnral: Ammar KHELIFACoordinatrice : Abla BOUTEMEND.A.F : Meriem KHELIFA

    Ils contribuent avec nous :Dahou Ould Kablia, ministre de l'Intrieur et des Collectivits locales, prsident de lassociation nationale des anciens du MALG ( AN-MALG)Boualem Bessah, prsident du Conseil constitutionnelBoubekeur Benbouzid, ministre de lEducation nationaleDr Boudjema Hachour, ancien ministre, chercheur universitaire Abdelmalek Boudiaf, wali dOranMohamed Abdou Bouderbala, directeur gnral des douanesPhilippe Coste, ambassadeur membre du Conseil des affaires trangres (franais)Farida Sellal, universitaire, crivaine et prsidente de lassociation Imzad

    RdactionLela BOUKLIAbdelmadjid BOUZIDIMohamed MEBARKIAhmed YASSERSmail ROUHASalim HOURABrahim BENSEFIAFarouk SALIMAnis L .

    Direction Artistique :Ahmed SEFFAH

    www.eldjazaircom.dz

    A LA UNE

    P. 08 LE MALGDes hommes, une histoire

    DOSSIER MALGP. 10 Accuss tort de tous les maux

    Le MALG et le DRS face une campagne de dnigrement

    P. 15 Les prcurseurs

    P. 21 Le commandant Mohamed Boudaoud dit Mansour LAlgrien qui a dit NON Yves Courrire

    HISTOIRE DE LA REVOLUTIONP. 30 Zohra Bitat ne Drif

    Si ctait refaire, je le referais

    P. 37 Les martyrs du Mouloudia Sportif cherchelloisLemblme de toute une jeunesse

    EL DJAZAIR DE LINTERIEURP. 41 Rformes de ltat civil

    LAlgrie tablit son passeport biomtrique

    DOSSIRER TICP. 47 Haut dbit et trs haut dbit

    Moussa Benhamadi appelle la mutualisation des moyens nationaux

    P. 51 Dix ans aprs sa crationAlgrie-Poste plus proche que jamais de ses 15 millions de clients

    DGSN P. 59 Le gnral-major Abdelghani Hamel

    Une rforme de la formation pour une lutte efficace contre la criminalit

    P. 62 Le commissaire divisionnaire Yamouni Laziz, chef de sret de Stif Le citoyen est de plus en plus coopratif

    P. 47

    Youcef Yousfi, ministre de l'nergie et des Mines

    Mohamed Benmeradi, ministre de l'Industrie, de la PME et de la Promotion de l'investissement

    Moussa Benhamadi, ministre de la Poste et des Technologies de linformation et de la communication

    P. 78P. 78

    Pour des raisons techniques et dabondance de matire, le magazine El Djazair.com a t contraint dannuler les contributions du directeur gnral de douanes, Mohamed Abdou Boudrebala, La rforme fiscale en Algrie , du ministre de lEducation nationale, Aboubakr Benbouzid, La rforme de lEducation en Algrie : enjeux et ralisations , du wali dOran, Abdelmalek Boudiaf, Modernisation de Constantine et du juriste, spcialis en communication audiovisuelle, Tahar Bediar, La mise en uvre de la Tlvision Numrique Terrestre(TNT), corollaire de l'ouverture du champ audiovisuel. Vous pourrez consulter leurs contributions sur le site du magazine ww.eldjazaircom.dz.

  • Avec les compliments de la doyenne des eaux minrales algriennes Sada

    SO

    MM

    AIR

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    Copyright Comesta mdia

    Ministre de la Poste et des Technologiesde lInformation et de la Communication

    Edit par Comesta mdiaDpt lgal : 235-2008ISSN : 1112-8860

    HOMMAGE P. 65 El Hadi Khediri

    Un homme d'Etat modle

    ACTUALITESP. 68 24 fvrier 1971 - 24 fvrier 2012Les grandes ralisations de Sonatrach

    P. 78 Dveloppement de partenariats industrielsEquipag quipera Sonatrach et Sonelgaz

    VIE DENTREPRISEP. 82 Promo Invest

    Groupe de socits citoyennes fier de son label made In Algeria

    EVENEMENTP. 89 Aux origines du syndicalisme algrien

    LUGTA et la question nationale, dAssat Idir Sidi Sad

    DEVELOPPEMENT LOCAL P. 99 Djelfa, capitale des haut-plateaux

    Le train sifflera de nouveau dans la steppe

    P. 105 Aboubakr Seddik Boucetta, wali de Djelfa : Nous privilgions laction de proximit

    P. 117 Bordj Bou-ArreidjQuand llectronique va, tout va !

    Le gnral-major Abdelghani Hamel, directeur gnral de la Sret nationale

    Abdelhamid Zerguine, P-DG de Sonatrach Abdelmalek Sahraoui, P-DG PromoInvest

    Ouled Salah Zitouni, wali de Mascara

    Azzedine Mecheri, wali de Bordj Bou Arreridj

    Aboubakr Seddik Boucetta, wali de Djelfa

    P. 74 P. 82P. 59

    P. 32 Ouda Zoulikha Yamina, ne EchabLa bravoure faite femme

    P. 127

    P. 117

    P. 105

    Photo prise en 1959, au nord des frontires marocaines ( 30 km d'Oujda)

    De droite gaucheDebout : Chengueriha Abdelkader, Si Boulfouateh, Tebal Hadjadj Mahfoudh, Abdelmadjid Benkedadra, Abdelhafid Boussouf dit si Mabrouk, Si Hocine Gadiri, le colonel si Amar Benaouda, Rachid Mosteghanemi, le capitaine si Zoubir, Berreouane Abderrahmne dit Saphar, Mohamed Boudaoud dit Mansour, le colonel Abdelhamid Latrche, si Salah Ouled Nehari,

    Accroupis : Abdelaziz Bouteflika, dit Abdelkader El Mali, le colonel Ali Kafi, Nacer Bouiezem, Houari Boumediene, le commandant Mohamed Roua dit El-Hadj Tewfik, El-Hadj Mohamed Allahoum,

  • De g. dr. : Houari Boumedine, Boualem Bessah,

    Abderrahmane Berreouane dit Saphar, Benaouda Mustapha,

    Abdelhafid Boussouf, Abdelaziz Bouteflika et Dahou Ould Kablia

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    2.A LA UNE

    Le MALG

    Des hommes, une histoire

    Faudrait il rappeler en ce sens que plus quune struc-ture de larmement et de la liaison, le MALG a permis lAlgrie dtre lun des rares pays engags dans le mouvement de libration nationale se doter dune

    structure de renseignement militaire aussi puissante quintelligente. Il est vrai quoutre les moyens quelle sest employe crer tout au long du combat, cette institution stra-tgique de lALN a t, par ailleurs, la seule institution disposant dun

    programme et de cellules dcoutes et de veilles branches jusquaux confins du territoire national, et mme lextrieur des frontires. Lon convient aussi que le point fort de sa stratgie fut essentiellement les capacits danticipation et de

    Ayant t parmi les fondements de la dmarche du MALG, la prservation de la scurit intrieure du pays et la dfense des intrts vitaux de l'Algrie constituent aujourdhui lune des doctrines immuables lgues la Nation par la glorieuse Rvolution de No-vembre. Que de gnrations de lArme nationale populaire sen sont imprgnes, notamment face aux adversits du temps et des conjonctures difficiles. Cest autant reconnatre le niveau de conscience profonde des hommes ayant mis et gr cet outil de guerre et du renseignement au service du combat pour lindpendance et le recouvre-ment de la souverainet sur le territoire national.

    Par Ahmed Yasser

    Les renseignements ont jou un grand rle durant la guerre de lindpendance

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    2.

    A LA UNE

    planification de ses jeunes cadres. Les nombreux visiteurs du Muse de larme et celui du dijhad au Parc de la Victoire (Maqam Echahid) peuvent faire le constat du haut niveau de savoir-faire et dorgani-sation atteint par cette historique structure de la Guerre de libration, sous limpulsion de Abdelhafid Boussouf, alias Si Mabrouk , lun des chefs de la Wilaya V et de l'ar-me des frontires. Fusils Sten, Mat 49, mitrailleuse, mortier, grenades, quipements de propagande et de subversion sont l comme repres de tmoignage qui mettent en vidence remarquablement une certaine inadquation entre des moyens militaires drisoires et la puissance de lorganisation de lArme de libration nationale qui recourait aux techniques de la gu-rilla, des embuscades, des assauts, des encerclements, des replis et de

    la manipulation de toutes les armes disponibles. Pourtant, cinq fabri-ques darmes clandestines ont t cres au Maroc, une base regrou-pant 200 cadres parmi les spcialis-tes a pu tre cre 80 km de Tripoli en Libye, devenue une centrale du renseignement. Lon croit savoir que cest cet endroit, devenu le centre nerveux de la Rvolution, de coordination des rseaux nationaux et internationaux du FLN, quont t traits des dossiers politiques, conomiques, sociaux et militaires de la Rvolution, notamment celui des ngociations dEvian. Alors que certains mdias interna-tionaux ont tendance aujourdhui confondre les diffrents types de rvoltes internes avec ces vraies rvolutions manant de la volont des peuples engags dans le com-bat pour les droits lgitimes et la juste cause, lon doit rappeler que

    le mrite du MALG a t aussi de russir son programme de moralisa-tion de la Rvolution de Novembre. Outre le srieux, lesprit mthodique et les traditions de rigueur prvalant dans le travail, il a t une cole de civisme, de droiture, dabngation et des hautes valeurs universelles de justice et de paix. Lon ne cessera de rappeler la persvrance des hommes de lombre , leur dvoue-ment entier pour la cause nationale. Nul ne peut ignorer pourtant leur mission difficile et dlicate un mo-ment crucial de lhistoire du pays. Il est vrai qu cette poque marquan-te du processus de combat pour lindpendance nationale, confiance et sens de la responsabilit rimaient avec sacrifice, abngation et enga-gement.

    A. Y.

    1- Djamel Meliani, 2-Mohamed Roua, 3-Kamel Khalef, 4-Mohamed Lemkami, 5-Kasdi Merbah, 6-At Mesbah, 7-Larbi Tabeti8-Mohamed Ould Kablia, 9-Si Ahmed Abdelmadjid, 10-Nourredine Yazid Zerhouni.

  • 10 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DU MALG

    A cinq mois de la comm-moration du cinquan-time anniversaire de lindpendance de lAlgrie, acquise au prix dnormes sacrifices de tout un peuple dtermin arracher sa

    libert et recouvrer ses droits spolis, des voix commencent slever ici et de lautre ct de la Mditerrane pour convoquer lHistoire en prtendant que cette interpellation est stricte-ment motive par le besoin de

    savoir et de comprendre. Nous aurions bien souhait accrditer ce remue-mnage intellectuel dune honorable mention si les auteurs des articles et des ou-vrages staient donn la peine de maquiller leurs intentions

    Supposons un seul instant que notre guerre de libration et nos cinquante ans dindpendance navaient t quune interminable srie de coups fourrs et de secrtes conspirations monts par des clans assoiffs de pouvoir et de puissance, comment se fait-il alors quun simple journaliste, crivain et ralisateur, et accessoirement scnariste de bandes dessines, arrive tout expliquer dans un livre au titre racoleur ? Que cet auteur nous cite un seul pays au monde o les services secrets ne sont pas omniprsents, commencer par le pays o il rside actuellement.

    Par Mohamed Mebarki

    Accuss tort de tous les maux

    Le MALG et le DRS face une campagne de dnigrement

    1 - Abdelaziz Bouteflika, 2 Le colonel Houari Boumediene, 3- Colonel Ali Kafi, 4- Colonel Abdelhafid Boussouf, 5- Colonel Mostefa Benaouda, 6- Colonel Dghine Boudghne dit Lotfi, 7- Commandant Mohamed, Roua, dit Tewfik, 8- Commandant

    Rachid dit Mosteghanemi, 9- Ex-ambassadeur Lala (MALG), 10 - Mohamed Boudaoud, dit Mansour. En arrire-plan : des cadres et des militants

  • 11N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DU MALG

    franchement malveillantes avec un soupon dobjectivit au lieu de persister gratuitement coller des tiquettes infamantes sur le dos de ceux qui leur ont permis davoir aujourdhui une identit et dutiliser un passeport pour voyager librement, et de dire tout haut sans aucune contrainte tout le mal quils pensent dun rgime qui ne cadre pas avec leurs am-bitions personnelles. Mais cet acharnement flagrant dans lexploitation de lhistoire de la libration nationale et des hommes qui lont faite dans de sordides oprations de rgle-ment de comptes nous force ragir et marquer notre entire dsapprobation devant de telles manuvres qui ne visent en ralit qu semer le doute et le trouble dans lesprit des gnra-tions de lindpendance. Supposons un seul instant que notre guerre de libration et nos

    cinquante ans dindpendance navaient t quune intermi-nable srie de coups fourrs et de secrtes conspirations monts par des clans assoif-fs de pouvoir et de puissance, comment se fait-il alors quun simple journaliste, crivain et ralisateur, et accessoirement scnariste de bandes dessines, arrive tout expliquer dans un livre au titre racoleur ? Que cet

    auteur nous cite un seul pays au monde o les services secrets ne sont pas omniprsents, com-mencer par le pays o il rside actuellement. Pourquoi fait-il une fixation sur le Dpartement du renseignement et de la scurit en sobstinant rveiller les vieux dmons du qui tue qui ? pour quils lassistent dans son uvre de charlatanisme ? Si lui-mme reconnat explicitement que

    Tenu par lobligation de rserve lie au poste sensible quil occupe, Dahou Ould Kablia, le ministre de lIntrieur, intervient souvent lorsque la question

    du MALG est souleve en tentant dapporter le maximum de srnit un dbat que certains souhaitent dvier de son cours normal. Ses diffrents tmoignages doivent donner rflchir quand il voque le parcours de Boussouf.

    Le colonel Houari Boumediene, sa droite commandant El Hadj Tewfik Roua, sa gauche le colonel Benmostefa, colonel Boussouf, Abderrahmne Berrouane dit Hadj Saphar, Mohamed Boudaoud, Lala (ex-ambassadeur)

  • 12 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DU MALG

    ces services suscitent toujours fantasmes et interrogations , comment est-il arriv dmysti-fier une question aussi lourde de consquences juste parce quil aurait russi sentretenir, comme il le dit, avec quelques anciens responsables civils et militaires ? Riche en rvlations et tmoignages indits, le livre revient sur la personnalit des diffrents patrons des services, de Abdelhafid Boussouf, leur fondateur, Mohamed Mdiene connu sous le nom de Toufik qui les dirige depuis 1990 , acclame et rclame son diteur qui se frotte dj les mains en attendant dencaisser des bnfices son-nants et trbuchants sur le dos dun auteur ayant perdu toute notion dthique et de morale allant jusqu utiliser la guerre de libration et la tragdie nationale comme un fonds de commerce duquel il ne touchera que les miettes. Sans quelles ne soient claire-ment affiches, les intentions apparaissent travers ce rac-courci mettant en exergue le colonel Abdelhafid Boussouf et le gnral de corps darme Tou-

    fik. Lapproche est simple, mais la manire avec laquelle elle est mise en uvre est diabolique : diffamer et calomnier lANP sous le prtexte de dfendre la dmocratie et les droits de lHomme, cette miraculeuse machine sous des temps mod-ernes qui renfloue les caisses des trusts et des multination-ales, pour sattaquer ensuite au gros morceau reprsent par la glorieuse ALN. De la pure ma-nipulation aux fins de discrditer le combat librateur engag par lALN et sauvegard par le MALG, et en mme temps, lEtat algrien indpendant dont la stabilit et la prennit sont as-sures en grande partie par ses services de renseignements. De la pure provocation dans le but de toucher le fils en ciblant le pre et vice-versa, supervise par des officines ayant atteint le sommet de lopportunisme en uvrant sournoisement dcul-pabiliser lex-FIS, malgr le fait quelles soient convaincues de son entire responsabilit dans la tragdie nationale rien que pour jeter lignominie sur le FLN historique. Nous avons toujours

    en mmoire ce tragi-comique pisode mettant en vedette ce transfuge du DRS embarqu dans une sale histoire de manipu-lation fabrique de toutes pices dans le but de nuire lAlgrie. Rsidant en Europe, il stait proclam curieusement comme un tmoin qui avait entendu dire et qui on avait confi, mais qui navait rien vu. Ceux qui lavaient retourn croyaient mettre dans lembarras un service et une ANP laquelle il tait organique-ment li engags dans une lutte hroque contre les phalanges de la mort que certains cercles oc-cidentaux considraient encore comme une opposition arme spolie de ses droits dmocra-tiques . Bien sr, il ne fallait pas sattendre ce que ce dserteur voque objectivement le proces-sus criminel de dmantlement des services mis en uvre dans les annes 1980. Autrement, il aurait t oblig de relater lexceptionnel sursaut dorgueil qui a vu des hommes comme les gnraux Toufik et Sman Lamari reprendre les choses en mains et entamer une runification salvatrice de ces services sans

    La traverse du dsert dos de chameaux

  • 13N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DU MALG

    laquelle lAlgrie aurait succomb ses blessures . Ce ntait pas sur sa feuille de route et a ne cadrait pas avec les objectifs de ses conseillers qui nont apparemment prouv aucune peine exploiter ses prdispo-sitions la flonie et ses pen-chants trs terre--terre incom-patibles avec le temprament de quelquun qui prtend tre un grand amateur de jeux dchec. Si les Services nont pas jug utile de rpondre ses lucubra-tions, ctait tout juste pour ne pas lui offrir lillusion davoir pro-voqu un dbat ou de croire un seul instant quil tait en mesure de faire lactualit. LInstitution contre laquelle il stait retourn ainsi que les hommes qui la dirigeaient ne pouvaient pas sabaisser un tel niveau au ris-que daccorder une importance une campagne de dnigre-ment qui sentait le caniveau. Pur produit du MALG, cette grande cole du patriotisme que certains revanchards tentent de discrdit-er par tous les moyens, le patron du DRS ntait pas du genre se laisser distraire par une aussi

    misrable mise en scne con-cocte par de mauvais gnies et excute bassement par un individu qui stait livr pieds et mains lis ceux qui nont pas encore digr le triomphe de lALN et la victoire de lANP. Comme toutes les rvolutions, linsurrection arme dclenche par les novembristes algriens a eu ses moments de faiblesse, ses errements, ses erreurs et mme ses drapages. Cela, les Algriens le savent. Cependant, ils ne tolrent pas que ce sujet li la mmoire collective du peuple soit rcupr et travesti par des rglements de compte partisans. Abdelkader El Mali (Abdelaziz Bouteflika), Boussouf, Lotfi, Bou-mediene, Bentobal, El Hadj Safar, El Hadj Barigou, Zerhouni, Khelifa Laroussi et Ould Kablia nont jamais prtendu tre des anges descendus du ciel pour librer un peuple soumis une atroce rpression coloniale. Tous ces hommes ainsi que lensemble de leurs compagnons darmes nont jamais prtendu avoir ralis plus que le devoir que leur dictait leur conscience. Il faut avoir vcu ce

    quils avaient endur pour pouvoir dresser leurs profils et sonder leurs profondes convictions. Tenu par lobligation de rserve lie au poste sensible quil oc-cupe, Dahou Ould Kablia, le ministre de lIntrieur, intervient souvent lorsque la question du MALG est souleve en tentant dapporter le maximum de srnit un dbat que certains souhaitent dvier de son cours normal. Ses diffrents tmoi-gnages doivent donner rflchir quand il voque le parcours de Boussouf. La scission du MTLD, en janvier 1954 entre partisans de Messali Hadj et les membres du comit central regroups autour de Hocine Lahouel, le pousse sortir de cette alterna-tive et choisir son camp na-turel, c'est--dire le noyau dur des partisans de l'action arme, seule susceptible aux yeux de ces derniers de transcender les clivages politiciens et de redon-ner l'espoir aux militants de base , souligne le ministre qui ajoute que la violence de la crise de l't 62 gnre par les apptits politiques des uns et

    De g. dr. : Si Mabrouk ( Boussouf), ?, ?, commandant Rachid Mosteghanemi, Mohamed Boudaoud dit Mansour, commandant Roua, dit Tewfik, membre du cabinet du MALG

  • 14 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DU MALG

    des autres ne lui a malheureuse-ment pas permis de continuer sa mission au service de son pays l'indpendance. Il se retira digne-ment non sans avoir demand ses collaborateurs de poursuivre le combat avec la mme vigueur et le mme engagement pour la consolidation de l'indpendance et la construction de l'Etat nais-sant . Est-ce cela le profil dun machiavlique comploteur doubl dun diabolique conspirateur qui ne vivait que pour assouvir son ambition personnelle ? Encore une fois, nous som-mes dans lobligation de poser cette question : pourquoi tant dacharnement contre Boussouf et le MALG ? El Hadj Safar, un des plus proches compagnons de Boussouf se souvient : Si Mabrouk nous rappelait sans cesse de bien prserver lAlgrie dans nos curs et de ne rien entreprendre qui puisse lui nuire . Comment un homme de cette trempe qui stait consacr entirement assurer la rvolu-tion arme les conditions de sa victoire pourrait-il se rvler un calculateur sans tat dme guid par dobscures motivations ? Comment un homme de cette trempe pour lequel toute une g-nration de moudjahidine garde

    un profond respect et une admi-ration sans limite a-t-il pu tromper tout son monde ? Comment un homme de cette carrure qui a russi neutraliser lappareil de propagande coloniale pourtant trs sophistiqu et le retourner contre ses propres concepteurs peut-il tre trait comme un mon-stre dgnr par une poigne de politiciens et dintellectuels trahis par une conscience som-nolente et clignotante ? Si on suit la logique dveloppe par ces derniers, on sera amen penser que mme le retrait volontaire de Boussouf ntait quune nime manipulation de sa part ! Ceux qui slvent aujourdhui pour exiger la leve du secret sur lensemble des dossiers du MALG sous des prtextes incon-cevables et irrecevables dans le fond et la forme sont soit incon-scients ou trop conscients de la fausse route quils ont emprunte. Domins par leurs fantasmes mal entretenus, ils demand-ent aux Algriens de divulguer tous leurs secrets de guerre qui leur ont permis de rsister face la troisime puissance mili-taire de lpoque et daccder lindpendance. Pour mieux avancer dans leur manuvre, ils utilisent des thmes grande

    sensibilit au niveau de lopinion publique tels que la dmocratie, les droits de lhomme, le droit de savoir, la libert dopinion, la justice et lgalit. Le mme stratagme est employ lencontre du DRS qui constitue lgitimement la relve du MALG historique. Lorsque nous tions des enfants en culotte, nos parents nous ont appris ne jamais parler la bouche pleine . Et si aujourdhui, nous avons le courage de dire que le MALG et le DRS constituent une part de notre fiert nationale, cest parce que nous sommes srs que labominable campagne de dni-grement dirige contre ces deux institutions particulirement a ses raisons que la raison ignore. Car au-del de Boussouf, du MALG, du gnral de corps darme Tou-fik, nous sommes persuads que le complot vise lAlgrie dans son ensemble. Notre raction nest ni masochiste ni opportuniste. Il sagit dun rflexe naturel, bi-ologique et conscient que chaque tre humain normalement con-stitu dveloppe quand il sent lurgence de prserver le respect de lui-mme.

    M. M.

    1-Houari Boumediene, 2-Mohamed Roua, 3-Ali Kafi, 4-Mohamed Boudaoud, 5-Abdelhafid Boussouf, 6-Hadj Saphar, 7-Rachid Mostghanemi, 8-Abdelkader El Mali (Abdelaziz Bouteflika), 9-Kad Ahmed, et des militants de la cause nationale

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    HISTOIRE DU MALG

    Les prcurseurs

    Abdelkader Bouzid dit Abou El Feth a voulu trs tt crire dabord lhistoire des transmissions nationales pour finir avec celle du MALG en gnral.Loccasion lui fut offerte, alors quil tait attach culturel notre ambassade de Washington, dcrire une srie darticles sur la naissance et le dveloppement fulgurant des transmissions que le quotidien national El Moudjahid publia cette poque, vers le dbut des annes quatre-vingt.Larme des transmissions, aussi indis-pensable que le fusil devait par la suite donner naissance plusieurs services dont lcoute, le chiffre, les liaisons, le renseignement, le contre-renseignement, la vigilance, etc.Abou El Feth tait bilingue (arabe - fran-ais) et possdait une belle plume dans les deux langues. Il avait intitul son premier article Le rcit de notre en-gagement dans lALN : les Prcurseurs alors que je pensais le dnommer les Pionniers. Cette premire promotion des transmissions de lALN fut baptise promotion Zabana en hommage au premier martyr, guillotin par la horde coloniale. Frre dans lAlgrie combattante, il devi-ent mon ami dans lAlgrie indpendante.Le caractre objectif de son tmoignage,

    le rcit du rel-vcu est un docu-ment qui servira de base essentielle aux historiens qui nauront aucune peine lauthentifier et le codifier. *

    Par Abdelkader Bouzid dit Abou-El-Fath n le 24

    octobre 1930 dcd le 15 mars 1998

    Abdelkader Bouzid dit Abou-El-Fath ( g.) en compagnie de Abderrahmane Berreouane dit Saphar.

  • 16 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DU MALG

    Au sein des cellules FLN, l'ordre de rejoindre s'tait propag. Les jeunes Algriens qui remplis-saient les conditions il fallait tre clibataire, instruit et en bonne sant se portrent vo-lontaires. Rendez-vous fut donn pour le mardi 6 aot 1956 au coucher du soleil en diffrents lieux convenus. Un camion bch vint procder au ramas-sage. Dans l'obscurit du camion, nous tions assis serrs les uns contre les autres la fois inquiets et pleins de fiert. Enfin, nous al-lions rejoindre les Frres dont on nous relatait les exploits dans les djebels. Inquiets aussi, parce que notre acte signifiait le don total de notre personne ou peut-tre au bout le sacrifice suprme.Aprs avoir longuement roul et aprs de multiples dtours, le ca-mion nous dposa enfin devant la porte d'une grande maison. Nous la reconnmes d'emble : c'tait le domicile de Me Triqui, un avocat algrien d'Oujda. Un un, nous y pntrmes en si-lence. Dans le couloir nous vmes, enfin, des djounoud en chair et en os, sangls dans leur battle-dress, arms de mitraillettes et chausss de pataugas.

    Dans notre extrme et respec-tueuse timidit, nous n'osmes mme pas les saluer, mais nous ne cessmes pas de les admirer la drobe. Nous avions vingt ans, alors.Un un, on nous fit entrer dans une pice. Celle-ci tait sombre. Derrire une table claire par une lampe se tenait une sorte de Japonais, raide, les cheveux presque ras, le visage rond mais blme, avez des petits yeux perants derrire des lunettes verres pais, une veste grise la

    Mao, boutonne jusqu' la gorge. Sur le ct gauche de la table, tait assis un autre personnage aussi raide, aussi blme que le premier, et tellement maigre que de son visage, on ne voyait que les pommettes et les mchoires. Des yeux d'aigles logeaient dans deux profondes cavits. Avec sa chevelure rousse et abondante, il tait vtu de la djellaba (ou kachabia) des premiers moudja-hidine. Ctaient Boussouf, alors colonel commandant la Wilaya V, et son adjoint le commandant Boumediene (qui ne sappelait pas encore Houari). Il va sans dire que nous ne smes leur identit que plus tard. Aprs le questionnaire, l'ensemble du groupe fut remis dans le camion qui, comme laller, fit de nombreux dtours avant de nous dposer, vers minuit, devant une maison o nous retrouvmes pratiquement le groupe de Si Moussa, Ghaouti, Abdelmoumne, Ali Guerraz, etc.Je dois avouer que nous tions dus parce que nous pensions tous que nous allions tre dirigs droit vers le djebel. Ce groupe tait compos des frres Ab-

    1-Abdelhafid Boussouf, 2-Boualem Bessah, 3-Benaouda Mustapha, 4-Lala (ex-ambassadeur), 5-Ali Kafi, 6-Abderrahmane Berreouane dit Saphar, 7-Mohamed Roua dit Toufik, 8-Houari Bou-medine, 9-Mohamed Boudaoud et des compagnons darmes

    Debout (de g. dr.): Abderrahmane Berreouane dit Saphar, Abdelkrim Hassani dit Ghaouti , Nourredine Benmiloud dit Bensouda, Larbi Assis (de g. dr.): Saddar Senoussi dit Moussa, Abdelkader Bouzid dit Abou-El-Fath, Abdelmadjid Gaouer dit Assa, les premiers cadres des transsmissions de l'ALN (1956)

  • 17N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DU MALG

    delkader Achour dit Azzouz, Mu-stapha Attar dit Farid, Mustapha Bennacef dit Larbi, Mohamed Bendimered dit Chahid, Nourre-dine Benmiloud dit Benssouda, Abderrahmane Berrouane dit Safar, Hassan Boukli dit Abde-louafi, Brahim ( ?) dit Zenaga, Abdelmadjid Gaouar dit Aissa, Mustapha Aoul Hadjadj dit Mah-foud, Benamar Hakiki dit Rachid, Hassen Benyakhlef dit Mounir, Krim Abdelekrim dit Ouassini, Mohamed Seferdjeli dit Mansour, le frre Miloud dont le nom ma compltement chapp (toutes mes excuses) un certain Youcef qui fut vite rform et enfin moi-mme. J'en ai oubli srement, mais je compte sur la vigilance de mes compagnons pour suppler aux dfaillances de ma mmoire.Cette premire promotion porta

    le nom du chahid Zabana qui venait d'tre excut en ce mois d'aot 1956. Il fut, si mes infor-mations sont exactes, le premier Algrien subir la guillotine pour sa participation la Rvolution arme.La maison qui nous servit de centre de formation tait carre et compose de deux niveaux : un rez-de-chausse o se trou-vaient deux chambres abritant la famille nourricire, une chambr rserve Si Moussa (avec son norme metteur-rcepteur) si Moussa fut dsign notre premier responsable direct. Une cham-bre double servait pour Si Omar, le corps de garde et le service d'coute.A l'tage il y avait trois cham-bres deux servaient de dortoirs, la troisime de salle de cours.

    Le stage commena vers le 8 aot 1956 pour se terminer le 10 septembre. En un mois, nous venions de recevoir une formation technique acclre, srement superficielle mais suffisante pour crer un rseau capable d'assurer des liaisons radio sinon entre les wilayas, du moins et pour le mo-ment entre certaines zones de la Wilaya V. Enfin, les hommes taient prts, le matriel aussi. A quelques jours d'intervalle, nous quittmes la maison deux par deux, chaque groupe vers la destination qui lui tait assigne. Le frre Berrouane (Si Safar) et moi-mme furent dtachs au service de Boussouf qui nous embarqua dans une voiture et nous conduisit jusqu' une ferme dans la rgion de la basse Moulouya, au nord de

    La premire promotion des transmissions baptise Promotion Zabana

  • 18 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DU MALG

    Berkane. De l, nous entreprmes, tous les trois derrire un guide, une marche pied qui dura plus de trois heures. A la tombe de la nuit, nous arrivmes une mai-son isole, en pleine campagne. Le lendemain matin, Boussouf nous laissa l et disparut. Il ne revint que trs tard la nuit. Le mme mange dura ainsi pen-dant trois ou quatre jours. En revenant, il ne nous disait rien, mais allait directement au coin de la chambre qui lui tait rserv, prenait un poste radio miniature (de marque Zenith, je m'en souvi-ens bien) et collait son oreille au haut parleur. Au quatrime jour, il nous adressa enfin la parole pour dire : a y est ils l'ont eu ! et il nous apprit que l Athos , le fameux bateau qui devait nous amener des armes venait d'tre arraisonn par la marine ennemie. Tous les soirs, Boussouf se ren-dait donc au bord de la mer pour l'attendre. Il ne vint pas. D'autres bateaux et d'autres avions devaient, par la suite, suppler l' Athos .Le lendemain, il nous fit conduire jusqu la ville de Nador (dans le nord du Maroc), do il fit prendre

    le car en direction de la ville de Ttouan.A notre arrive, un frre nous ac-cueillit et nous conduisit au sige du FLN o nous attendait Bous-souf. Il semblait nous retrouver dailleurs avec plaisir. Le soir, il nous fit prsenter frre comme tant le responsable qui nous devions remettre les messages, en un lieu et un moment d-termins. Ce n'est que bien plus tard que j'identifiai ce frre, c'tait Boudiaf. Nous fmes conduits ensuite une maison l'extrieur de la ville o nous retrouvmes notre matriel. Nous procdmes immdiatement son installation. Ce fut la premire station radio de l'ALN implante l'extrieur. Elle tait dote d'un matriel trs perfectionn : l'metteur tait de type ART/13 de marque amric-aine utilis par l'aviation militaire. Sa puissance tait de 100 watts. Le rcepteur tait un BC 610 d'une extraordinaire sensibilit. Notre premier contact fut tabli avec ltat-major le soir mme en prsence de Boussouf qui ne cacha pas sa joie devant le suc-cs de ce premier essai. C'tait la premire fois que nous vmes son

    ple visage clair par un sourire.Notre station avait pour mission de transmettre et de recevoir les messages changs entre l'extrieur et l'intrieur et inverse-ment. Tout le trafic devait transiter par le Poste de commandement des rseaux (PCR) install l'tat-major, dot lui aussi d'un matriel semblable celui indiqu plus haut. Quant au matriel utilis pour l'intrieur, il n'tait pas, cette fois-ci, encore adquat. A ce sujet, je voudrais rappeler ici que ce n'tait pas faute de batteries que les postes navaient pas fonc-tionn mais bien parce que celles utilises taient trop grandes, trop lourdes et d'un genre un peu spcial : elles taient en cadmi-um nickel au lieu dtre en plomb. Et puis il fallait les recharger aprs utilisation, ce qui consti-tuait un norme problme pour un poste mobile en campagne.Encore une fois donc, le matriel n'tait pas le bon. Les appareils (des RCA-marine conus pour les bateaux de plaisance) avaient trois dfauts principaux : 1) ils taient prrgls par un systme de quartz ; 2) ils ne comportaient que trois

    frquences toujours encombres par d'autres missions ; 3) leur porte n'excdait pas au plus, 20 kilomtres.Une caisse en bois de 1m de haut sur 90 cm de profondeur tait confectionne pour rece-voir l'appareil et ses accessoires (antenne, micro, manipulateur...) Ajoutez cela la batterie avec son poids et son volume et vous avez l un ensemble tout fait intransportable et difficilement mobile. Ce qui, encore une fois, ne rpondait ni aux exigences de la mission, elle-mme, ni celles de la gurilla.

    1-Abdelhafid Boussouf, 2- Hadj Saphar, 3- Ali Kafi, en compagnie des cadres du MALG

  • 19N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DU MALG

    Aprs plusieurs mois de sjour dans leurs affectations respec-tives, et aprs de multiples aven-tures, tantt rocambolesques, tantt hroques, les oprateurs furent rappels avec leur matriel ltat-major de la Wilaya V.Par la force des choses, le rseau intrieur tait devenu non oprationnel, trimball dos de mulet ou enfoui dans des caches souterraines, le matriel avait, lui aussi, subi des dommages. Il devint dfinitivement rform. Entre-temps, certains dentre nous avaient pay de leur vie cette premire tentative. Les jeunes Attar dit Farid, Zenagua et Abdelouafi tombrent au champ dhonneur. Ah ! sils avaient voulu abandonner leur lourd matriel pour fuir, ils seraient peut-tre en-core en vie. Mais la ferme volont de ne rien laisser lennemi et le courage incroyable de vouloir lui cacher notre entreprise leur avaient cot la vie. Que Dieu ait piti de leur me. Ce fut ensuite

    au tour de Abdelkrim Dib dit Abdelmoumne de tomber au champ d'honneur (jeus le triste honneur de capter le message ennemi annonant son martyr). A son sujet, je voudrais confirmer ici le rcit du frre Ghaouti con-cernant Abdelmoumne. En effet, cest au moment o il assurait son service d'coute qu'il apprit la mort de son pre. Stoquement, il n'en continua pas moins de prendre le message jusqu' la fin. Boussouf, Ghaouti et moi-mme tions prsents. Nous avions pour habitude, et un peu aussi par curiosit, de lire par-dessus l'paule de l'oprateur les infor-mations qui tombaient. C'est ainsi que nous vmes des gouttes de larmes tomber une une sur la feuille de papier. Boussouf retira doucement le casque des oreilles de Abdelmoumne et le remit Ghaouti qui continua d'assurer lcoute. Nous le primes par les paules et entreprmes de le consoler. Il nous regarda avec

    des yeux durs mais encore pleins de larmes et nous dit d'une voix basse, mais dtermine : Je le vengerai c'tait mon pre. On nous raconta plus tard qu'il tint parole avant de mourir. Cern de toutes parts par les soldats colonialistes, il se battit et mou-rut courageusement. Aprs avoir puis toutes les munitions et lanc son ultime grenade qui fit des dgts, Abdelmoumne prit une pierre dune main et slana vers lennemi lui laissant croire quil allait lancer une autre gre-nade. Une rafale de mitraillette le faucha. Gloire lui !A Tlemcen, y a-t-il une rue qui porte le nom de Abdelkrim Dib dit Abdelmoumne et des autres chouhada cits plus haut ? Ils sont tous de Tlemcen, pourtant.

    Safar, Hadj Abderrahmane Ber-rouane

    Abderrahmane Berrouane dit Saphar et Abdelkader Bouzid dit Abou-El-Fath ( au centre de la photo) au milieu d'officiers du MALG

  • 21N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DU MALG

    Le commandant Mohamed Boudaoud dit Mansour

    LAlgrien qui a dit NON Yves Courrire

    Lhistoire de la Rvolution algrienne appartient aux Algriens. Faisant sien ce concept, le com-mandant Mohamed Boudaoud dit Mansour rvle quil a refus quatre reprises de recevoir lhistorien-ralisateur franais, Yves Courrire, qui la sollicit plusieurs reprises avant la ralisation de son film-documentaire La guerre dAlgrie. Ce moudjahid de la premire heure, natif du village Taourga et de parents originaires du village Azrou-Bwar, dans la commune de Mizrana, demeure convaincu, lore de la clbration du 50e anniversaire de lindpendance, que lhistoire de la Rvolution algrienne appartient aux Algriens et cest eux, acteurs, de lcrire pour que les gnrations ve-

    Proche collaborateur de Boussouf et de Boumediene, le commandant Mohamed Boudaoud, officier suprieur de l'ALN et responsable de larmement et ravitaillement gnral pour la rgion Ouest durant la Rvolution de libration nationale, a longuement contribu doter lALN dune industrie darmement et dans lorganisation des rseaux dachat darmes au profit de la Rvolution.

    Par Salim Houra

    Le commandant Mohamed Boudaoud, directeur logistique ouest, faisant visiter un atelier darmement au colonel Boussouf en compagnie de L'Hocine Youcef

  • 22 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DU MALG

    nir apprennent les vnements rels. Une histoire faite par des hommes ayant consacr leur vie au service dun idal. Officier suprieur de l'ALN et responsable de larmement et ravitaillement gnral pour la rgion Ouest durant la Rvolution de libration nationale, Mohamed Boudaoud a travaill directement avec les principaux chefs histo-riques dont le colonel Boussouf, colonel Lotfi. N en 1926, Mohamed Boud-aoud a milit ds son jeune ge en 1944 dans son village natal Taourga au sein du PPA. En 1946, il rejoint Alger o il a con-tinu militer au sein du MTLD jusqu' 1947, anne o il rejoint

    l'Organisation secrte et paramili-taire (OS), qui formait des sous-officiers pour le dclenchement de la Rvolution arme. En 1950, l'activit de l'OS sus-pendue, en raison de l'arrestation de responsables et de mili-tants, Mohamed Boudaoud reprend son activit militante au dclenchement de la rvolution en Tunisie, ensuite au Maroc. Ayant intgr les services de ren-seignement du FLN Alger, Mo-hamed Boudaoud est mandat en 1955 par le colonel Ouamrane, chef de la wilaya IV, pour se ren-dre au Maroc avec pour mission de se procurer des armes pour les envoyer la rgion IV. Arriv au Maroc, point d'armes

    du fait que les Marocains ve-naient peine de recouvrer leur indpendance sous le rgne de Mohammed V. Au fait, les Marocains hsitaient encore du fait quils ne faisaint pas confi-ance aux Franais , souligne Mohamed Boudaoud. Aussi se met-il s'organiser Casablanca, Mekns, Rabat et former des cellules du FLN. Nous avons collect un million de centimes que nous avons envoy au colo-nel Ouamrane par le biais d'un agent de liaison. Arriv Alger, il a remis cette somme Ouam-rane, et ce dernier lui a dit : Tu diras Mohamed Arezki (on me nommait ainsi en ce temps-l), nous ne voulons pas d'argent,

    Atelier darmement. De g. dr. : Abdelhafid Boussouf, Mohamed Boudaoud, directeur logistique ouest, Lebsir Aziz (premier plan)

    De g dr : Mosteghanemi dit commandent Rachid, Mohamed Boudaoud directeur logistique ouest, Ali Kafi, colonel W II, colonel Lotfi, Abdelhafid Boussouf, Lamine Khne

  • 23N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DU MALG

    Accroupis de g. dr. : Abderrahmane Berreouane, dit Saphar, Houari Boumediene, Mohamed Boudaoud, au milieu de combattants de lALN

    mais des armes. Avant que l'agent de liaison ne revienne d'Alger, Boudiaf, qui ignorait tout de cette mission, avait appris qu'il y avait une organisation qui s'est constitue au Maroc. Or,

    cette rgion dpendait de lui et il a demand d'aller le voir Ttouan , rvle le responsable du MALG. Ayant appris lobjet de la mission, Boudiaf intime lordre Mohamed Boudaoud de

    continuer son travail de rcupra-tion d'armes au Maroc tout en lui prcisant : Ouamrane je men charge. Entre-temps, Bou-diaf a mis en contact Mohamed Boudaoud avec Si Mabrouk (colonel Lotfi) et Boumediene. Sa mission entame, il russit prendre contact avec l'Arme de libration du Maroc pour le transfert de djounoud, du moins les militaires incorpors dans l'arme franaise et qui avaient dsert et combattu avec l'Arme de libration marocaine, ainsi que les Algriens et autres volontaires qui voulaient combattre dans les rangs de la Rvolution. Ceux-l ont t transfrs vers la Wilaya V An Safra, sous la responsabil-it, alors du colonel Lotfi. Aprs le dtournement de l'avion qui transportait Boudiaf, At Ahmed,

  • 24 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DU MALG

    Lacheraf, Ben Bella et Khider, le commandant Boudaoud travailla directement avec Boussouf, chef de la Wilaya V. En 1958, il pren-dra la tte de l'armement et du ravitaillement gnral l'chelle nationale. En 1960, aprs lviction de Mahmoud Cherif, alors ministre de l'Armement au sein du gouvernement provisoire, du fait que le ministre de Mah-moud Cherif a t noyaut par les Franais , Mohamed Boudaoud sera ensuite directement sous les ordres de Boussouf, qui a repris l'armement en plus des services de transmission gnrale. Parmi les faits darmes du com-mandant Mohamed Boudaoud, on citera le rapatriement depuis le port de Cadix (Espagne) en 1956 dun bateau contenant 70 tonnes dexplosifs, dtonateurs et de cordons bifores que les Ma-rocains avaient achets aupara-vant. Lindpendance proclame, les Marocains prirent attache

    avec Boudiaf pour lui proposer le chargement. Ce dernier chargea Boudaoud de rapatrier de Cadix (Espagne) le bateau en ques-tion. La marchandise transita par Hassinia (Maroc) le 21 dcembre 1956. Vingt tonnes ont t ainsi achemines le 22 dcembre Alger par des camions de fruits et lgumes. Une autre cargaison a t affecte Alger deux jours plus tard. Mais Alger, le contact ntait pas au rendez-vous. Ben-khedda et son groupe tant alors obligs de prendre la fuite, aussi la marchandise fut renvoye son lieu denvoi. Lautre fait marquant a eu lieu lorsque le colonel Boumediene demanda au commandant Mo-hamed Boudaoud de lui pro-curer au moins deux bazookas pour commettre des attentats et faire comprendre aux Fran-ais que la rvolution continue. Pour ce faire, jai sollicit mes amis marocains qui ont mis

    profit le voyage de Mohamed V en Egypte pour les faire en-trer dans des valises diploma-tiques , rvle le commandant Mohamed Boudaoud qui a longuement contribu doter lALN dune industrie darmement et dans lorganisation des r-seaux dachat darmes au profit de la Rvolution en implantant cinq units de fabrications darmements au Maroc. Dans cette entreprise, il y avait aussi un certain Messaoud Zeggar dit Rachid Casa. A lindpendance, ses units ont russi fabriquer 10 000 mitraillettes dont 5 000 montes et 200 mortiers. Au MALG, Mohamed Boudaoud a t apprci pour ses qualits, dont un dvouement toute preuve au point de mriter la totale confiance de Boussouf. Aujourdhui, il garde encore la mme dtermination et la mme fougue.

    S. H.

    De g. dr. : Abderrahmane Berreouane dit Saphar, Dahou Ould Kablia, Abdelmadjid Bouabdellah, Mohamed Boudaoud, gauche de la photo

  • 25N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DU MALG

    Mohamed Lemkami

    La passion mue en raisonMohamed Lemkami est n un 1er dcembre 1932, au village de Khmis de la tribu de Beni Senouss, en pleine montagne quelque 45 km au sud-ouest de la ville de Tlemcen. Ce village 1200 m daltitude fait partie dune srie de petits bourgs situs de part et dautre de la rivire qui porte le nom de Oued Khmis, lun des principaux affluents de la Tafna. Cette belle valle trs encaisse, dont les paysans subsistent de petits jardins tags, avait donn non seulement de nombreux soldats larme franaise en 1914 et en 1939, pour se librer de loccupation allemande, mais aussi de nombreux ouvriers, miniers, du btiment et du textile dans le nord et lest de la France, tout comme de nombreux combattants de la lutte de libration nationale entre 1954 et 1962. Cet espace o la vie est trs rude ma influenc par ses valeurs de rigueur, de sagesse, de respect des autres et surtout de la volont de lutter en permanence.

    Mohamed Lemkami, de son nom de guerre Abbas, est fils du meunier le plus respect de la rgion qui avait pour devise faire le bien et oublier. Sa grand-mre, Hadja Fatma rcitait le Coran dans sa totalit, ce qui prouve, comme il nous le dit, que dantan, tous, ntaient pas aussi analphabtes quon veuille bien nous le faire croire, mais pour beaucoup fins lettrs en arabe. Il garde de son enfance, dans cette minuscule contre, o il ny avait pas

    dcole jusquau milieu des an-nes 1930, ni de dispensaire, ni de mdecin, pas dinfirmerie, ni eau, ni lectricit o les jeunes nus pieds, t comme hiver, la boule zro, continuaient apprendre le Coran, ds laube, chez le Taleb et plus tard par-alllement lcole publique , un souvenir mu.Mohamed Lemkami a pour aeul

    Sidi Ali Belkacem Ouzeroual, personnage vnr, membre de la zaoua El Kadiria, enterr Lemkam, au sud dOujda au Ma-roc. Sidi-Ali Belkacem Ouzeroual

    a combattu les forces coloniales et fait partie de la smala de lEmir Abdelkader. Cest dire que depuis fort longtemps les enfants de cette valle magnifique, enclave, mure entre de hautes parois rocheuses, laquelle il reste fortement attach connue par un grand nombre de dirigeants de lpoque pour y avoir t protgs, hbergs, nourris et qui aujourdhui semblent lavoir oubli , ont pris une part ac-tive et hroque aux vnements marquants de notre histoire. Grce aux sacrifices de Si Ali

    Par Lela Boukli

  • 26 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DU MALG

    son pre, Mohamed Lemkami, qui chappe miraculeusement la misre, la faim, aux pi-dmies de toutes sortes qui sabattent sur la rgion, sera non sans fiert, aprs de brillantes tudes au collge de Slane Tlemcen, le premier bachelier de son village. Il y sera affect en tant quinstituteur stagiaire au cours de lanne scolaire

    1954-1955, puis Zoudj Bghal, o, ds son arrive, il se met superviser lorganisation civile du FLN dans les Beni Ouass-ine. Fin 1955, il rejoint le maquis en zone I, wilaya V. De 1959 1962, il fait partie du MALG. Il occupera lindpendance dif-frents postes au ministre du Commerce. On lui doit la mise sur pied des organismes de la

    Pharmacie centrale algrienne qui donneront plus tard nais-sance des units de production. Priode exaltante, avoue-t-il, o, comme toujours se donnant fond, il sest panoui. Dput de la premire lgislature en 1977 durant deux mandats passs lAPN, il sera nomm ambassa-deur en Albanie. De l, il suit le dveloppement conomique et

    Mohamed Lemkami, 2e assis , partir de la gauche

    De g. dr. : Dahou Ould Kablia, Mohamed Lamkami, Lakhdar, et Nouredine Yazid Zerhouni

  • 27N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DU MALG

    social de lAlgrie, les meutes doctobre 1988, les premires rvoltes albanaises Avec sa compagne de toujours, Zehor

    ne Kahia Tani avec qui il partage une grande complicit 52 ans de mariage cette anne , il suit depuis Tirana les vnements

    aussi marquants quangoissants, tels que la victoire du FIS lors des communales et au premier tour des lgislatives, linterruption du processus lectoral, lassassinat du Prsident Boudiaf Sa carrire sachve, fin 1992 avec la fermeture de lambassade dAlgrie Tirana, que remplac-era une reprsentation ouverte par le FIS pour acheminer les je-unes Algriens vers la Tchtch-nie et do passeront les armes pour les maquis du GIA. Aprs une longue vie de militan-tisme et dexercice de respons-abilits, en 2004, il publie ses m-moires aux Editions Anep, sous le titre Les hommes de lombre. Tmoigner de mon vcu, moi pour qui la libert, la vrit, la dig-nit et le respect dautrui ne sont pas de vains mots, est un devoir de mmoire, comme dailleurs pour tout acteur des gnra-tions des annes 1920, 1930,

    La prparation du journal Combat en 1956, le premier journal de la rvolution algrienne de la wilaya V. De dr. g. : El Gazi Mohammed, Mohamed Lemkami, Djilali et Mme Mchiche Fatima, pouse du colonel Lotfi

    Alger le 26 m ars 1965. Nourdine Delleci, ministre du Commerce, venant de Moscou o il a sign un accord commercial. A sa droite, Mohamed Lemkami, chef de cabinet au ministre du Commerce

  • 28 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DU MALG

    1940 lintention de toutes les gnrations post-indpendante, sevres de la connaissance de lhistoire, toute lhistoire de leur pays. Il y raconte son enfance dans le contexte dune Algrie sous la colonisation franaise ; sa scolarisation dans des con-ditions difficiles ; son itinraire qui lui permit de croiser dautres petits Algriens qui deviendront dillustres personnages plus tard, comme lcrivain Mohammed Dib, Sid-Ahmed Ghozali o encore Rda Malek, tous deux assumer-ont un moment de leur vie, les fonctions de Premiers ministres dans lAlgrie indpendante. Mohamed Lemkami raconte comment il fera ses premires classes au sein du mouvement nationaliste grce aux scouts musulmans qui le familiarisent avec les ides du Parti du peuple algrien (PPA-MTLD). Comment il se retrouve, de par sa fonction dinstituteur et dobservateur priv-ilgi, naturellement au service du FLN auquel il fournit au dbut des renseignements importants pour monter des oprations de gurilla. Comment, intgr un

    peu plus tard au sein dunits combattantes oprant dans le pays ou partir de la frontire algro-marocaine, son parcours croise celui des dirigeants mili-taires comme Abdelhafidh Bous-souf, futur patron du MALG, ou encore celui de Houari Boume-diene, futur chef dEtat-major de lArme des frontires, de Si Lotfi, futur colonel de la Wilaya V. En somme, dans le renseigne-ment, nous avons tous appris sur le tas, sur le terrain, par la lecture et lanalyse. Avec tous ses inconvnients parfois difficile-ment supportables, la clandes-tinit stait avre pour nous une grande cole. Elle nous avait permis de parfaire notre forma-tion, dapprendre la matrise de soi, la patience, lendurance et le travail bien fait. Ctait l, la vraie cole de Boussouf. De ces hros immortels. Dans lombre et lanonymat, ces

    trs nombreux jeunes, des ex-collgiens, des ex-mdersiens et beaucoup dtudiants univer-sitaires, avaient volontairement dsert leur scolarit et leurs tudes pour rejoindre les rangs

    de larme de libration nation-ale, avaient donn le meilleur deux-mmes parfois jusquau sacrifice suprme et apport une contribution honorable la glorieuse lutte arme. Ceux de ma gnration ont certainement accompli leur devoir en assumant des responsabilits historiques durant la guerre de libration na-tionale et des missions exaltantes au cours de la premire phase ddification nationale. A prsent, faisons confiance nos jeunes, comme nous avions bnfici de la confiance de chefs peine plus gs que nous. Le temps est arriv pour nous de laisser la place nos cadets. Cest le meil-leur service que nous puissions rendre notre pays. Mohamed Lemkami, qui garde de ses dbuts ses valeurs de rigueur, de sagesse, de respect des autres et surtout de la vo-lont de lutter en permanence, publiera le premier semestre 2012 aux Editions Dahlab la deuxime dition de son livre, revue et complte.

    L. B.

    76e Confrence de lUnion Interparlementaire (Buenos Aires 6-11 octobre 1986).Mohamed Lemkami, prsident de la Confrence sa droite un membre du secrtariat de lUIP

  • 30 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DE LA RVOLUTION

    Zohra Bitat ne Drif

    Si ctait refaire, je le referais

    De lcole coranique de son Tiaret natal lun des plus pres-tigieux lyces de lpoque, le lyce Fromentin, la bataille dAlger, aux prisons, aux voitures cellulaires, aux grves de la faim Cette fille de chorfa de la tribu des Kraiches, sur les flancs du majestueux Ouarsenis par son pre et de la zaoua Moulay Sidi Driss par sa mre, donne un avant-got du caractre volontaire des Algriennes, en faisant un pied de nez ses geliers depuis la prison de Toulouse. Avec laide de ses avocats et alors quelle est condamne mort, puis perptuit, elle passe entoure de gardiennes avec succs lexamen final de sa seconde anne de droit, la Sorbonne, o aprs dpres ngociations, elle arrive les mains menottes sous bonne escorte. Rien ne prdestinait Zohra Bitat ne Drif, deuxime dune fratrie de 8 frres et surs, ladolescence, quelle a connue. Cette figure emblmatique de la lutte des femmes durant la guerre de libration, pouse dun historique de la Rvolu-tion, a connu lambiance confine du harem de ces milieux traditionnels et conservateurs dantan do elle est issue. Les femmes de la famille navaient aucun contact avec lex-

    trieur. On vivait certes, cte cte, mais sans jamais se rencontrer. Zohra a port le voile lge de 11 ans, mais a eu la chance davoir des parents qui rvaient dune autre vie pour leurs trois filles. En opposition avec la socit, ils permettent la petite fille, qui fantasmait sur les cheveux et jupes courtes des petites franaises, elle qui portait des nattes et des robes longues, de faire des tudes, linstar de ses frres. Elle aura fait du chemin depuis. Dpute en 1962 de la premire Assemble constituante, avocate durant 30 ans, elle est aujourdhui, vice-prsidente du Snat.

    De sa ligne de merab-ten, Zohra a gard la gnrosit des filles de grandes tentes . Elle a grandi dans les immenses proprits familiales, parmi les moutons et les chevaux ceux de Tihert la lionne, capitale du premier Etat musulman du Maghreb sont rputs mon-dialement , sous lil bienveillant de son pre, Ahmed Drif. Ouvert, parfait bilingue, il a pass 7 ans la medersa de Sidi Boumediene Tlemcen, puis au lyce Bencheneb, avant de faire des tudes universitai-res Alger. Il embrasse une carrire

    dans la magistrature, devient cadi/notaire et rgle les problmes de cette socit stratifie, patriarcale et stable, trs organise ou sinterp-ntrent les couches les plus diver-ses dindignes qui choisissent la juridiction spciale de la mahkama pour se dfendre. Ds lenfance, on a conscience que nous sommes chez nous et que ces nsara, ces roumis, ont usurp notre terre. Cest Vialar o mon pre tait cadi que je d-couvre un monde diffrent qui me fascine, un monde qui faisait partie de notre univers quon dcouvre travers lenseignement et la lecture.

    Les chansons de geste, Roncevaux, Roland qui souffle dans son cor, pour avertir son empereur quils sont attaqus par les sarrasins, ces flons, ces tratres ! Je nai jamais pens que ces sarrasins, ctaient nous. Il a fallu que mon pre rtablisse chaque leon, dans mon esprit, la vrit. Mais sept ans de latin formatent une tte dadolescente. Au lyce, elle doit sadapter une autre manire de vivre. Dormir dans un lit avec des draps, troquer la meda par une table, la main par une fourchette, les doigts par un couteau A dcouvrir ces roumis de lintrieur. Eux ne

    Par Lela Boukli

  • 31N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DE LA RVOLUTION

    faisaient pas cet effort, les seules femmes quils connaissaient ctaient les Fatma qui faisaient le mnage chez eux. Les populations rendues ltat de btes vivaient pratique-ment dans lesclavage. Il y avait chez nous aussi lapartheid avec ces ghettos misreux et ce Germain qui, au moment des vendanges, ouvrait grand le portail laube et jetait sur une foule, qui se battait pour une journe de travail, laveuglette en riant, les scateurs amoncels sur son balcon. A mesure quon avance dans lge, on dcouvre les injus-tices, la Seconde Guerre mondiale et ces scnes pouvantables : des mres, courant et hurlant pieds nus: Rendez-nous nos enfants emme-ns contraints faire une guerre qui ntaient pas la leur ; les vnements de 1945 avec leurs cortges darres-tations, de tortures ; la chute de Din Bin Phu ; le Maroc et la Tunisie qui commenaient bouger Une conscience politique stait forme. Il y avait une effervescence palpable dans la socit en attente de quel-que chose. Flash-back. Zohra, les yeux dans le vague, reprend : Le 1er novembre 1954, mon frre tout excit arrive avec les journaux dAlger en criant Tartgouha ! Targtouha ! (1) Ctait le dbut de la fin pour eux. Jtais tudiante. Samia Lakhdari, une ca-marade de la premire heure et moi-mme, avions des discussions inter-minables sur la situation du pays ; on ne voulait pas monter au maquis, mais on savait, quon pouvait tre utiles. Un tudiant fait parvenir nos chefs, inconnus lpoque, notre dsir, et le moment venu, on a t incorpores aux groupes arms. Ar-rive la bataille dAlger, on dcouvre dans la clandestinit la disproportion des forces en prsence et les mtho-des employes par la France, ce pays des droits de lHomme. On mesure la ralit sur le terrain ; leurs mthodes nazies. Ces prdateurs abattaient sans aucun tat dme, jusque dans les maisons, pour frapper lesprit

    des gens. On a russi parce que la population nous portait au prix de sa vie, de ses biens Je suis arrte en mme temps que notre chef Yacef et emmene la Villa Nador, un centre de torture, en face du lieu o javais t interne durant 7 ans, le lyce Fro-mentin. Jai t juge puis mise en prison. En mai 1958, les pieds-noirs crent les Comits de salut public et redoublent leurs exactions : Ils sont dans nos prisons, on les nourrit, il faut les tuer. Beaucoup dentre nous sont relchs, enlevs par des commandos leur sortie de prison pour disparatre aussitt. Cest alors que le gouvernement franais dcide de nous transfrer en France. On est entass dans les cales dun bateau dispatch Marseille aux Baumettes et de l, la nuit dans un train en par-tance pour Toulouse. On devient des numros. On ne sait pas ce qui nous attend. Lpreuve la plus difficile en prison tait lexcution des frres la guillotine juste au-dessous des dortoirs. On savait que ctait fini aux bruits des balais, nettoyant les traces du sang des justes. Je suis envoye Paris o je retrouve les autres surs. En 1958, de Gaulle, qui prend le pou-voir, gracie tout le monde. On passe de la condamnation mort, per-ptuit, sans aucun assouplissement puisque les Franais ne nous recon-naissaient pas le statut de prisonniers politiques. Fin 1960, grves illimites de la faim dans toutes les prisons de France jusqu lobtention de nos revendications. Il me prend alors

    lide folle de passer ma deuxime anne de droit. Mes avocats se d-mnent et obtiennent mon transfert Frnes au quartier des nourrices o je reois de lAssociation des tu-diants Paris les polycopies. Face au refus de luniversit de droit de laisser sortir les sujets, Simone Veil, directrice des affaires pnitentiaires lpoque, tranche et ordonne son administration de mescorter jusqu la Sorbonne o, mise dans une petite pice, je compose durant 4 heures entoure de gardiennes.Je dcouvre Paris travers des grilla-ges. 1960-1961, conscients quil fallait se prparer relever les dfis de lAlgrie indpendante, on sorganise, mettant nos connaissances et notre argent en commun pour mieux vivre notre vie carcrale. Libre aprs les accords dEvian de la prison centrale de Frnes, mon pre vient me cher-cher. Le FLN a organis notre trans-fert sur Tunis. En juin, je rentre au pays pour voter le rfrendum. Nous repartions du nant. Je pense hon-ntement, lorsque je me souviens ce qutait en 1954 le peuple et ce que nous sommes aujourdhui, quon a fait un pas incommensurable. Les choses sacquirent avec le temps et la formation. Les nouvelles gnra-tions ont une double responsabilit : continuer le dveloppement et rester extrmement vigilants pour ne pas perdre leur indpendance et leur souverainet si durement acquises.

    L. B.

    -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------(1) Tartgouha : Ils lon faite clater.

  • 32 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DE LA RVOLUTIONOuda Zoulikha Yamina, ne Echab

    La bravoure faite femme

    Dtermination et colre sont dcelables dans ce regard de femme, au temprament de feu, que le destin a propulse un jour sur les devants de la scne et dont la trajectoire mrite dtre connue.Son histoire a inspir Assia Djebar qui en a fait un livre La femme sans spulture o elle mle fiction et ralit. Des universitaires

    notamment aux USA ont fait le dplacement jusqu Cherchell pour faire de ce symbole du refus du mpris de lhomme, de son ex-ploitation, de son avilissement, un objet dtude. Cette femme a t trs tt marque par le mode de vie des familles indignes, sans ressources, sans maris parce quenrles de force par larme coloniale pour dfendre un pays qui ntait pas le leur. Les femmes navaient pas dautre alternative qutre la Fatma au service de colons usurpateurs de terres, injustes et cruels, pour la plupart, pour nourrir leurs familles. Ce ne sera pas le cas de La Zoulikha qui devient, fait unique dans lALN, responsable politico-militaire de la ville de Cherchell. Elle succde au chahid Belkacem Alioui, ex-prsident de lquipe de football du Mouloudia de Cherchell. Fonction quelle assumera avec bravoure, comme en tmoigne, mu aux larmes, son responsable Ahmed Ghebalou, mdersien, responsable politique de la rgion de Cherchell, fortement marqu par les capacits dendurance, dorganisation et de commande-ment de cette femme. Jusquau jour fatal o elle rejoint son poux, Si Larbi, et son fils Habib, fida dans la rgion de Blida, tous deux excuts par larme franaise sans jugement. Martyrs du devoir, 17 proches de cette famille se sont sacrifis pour que vive lAlgrie libre et indpendante, libre dune tutelle impose par les armes, dans le sang et les larmes.Pa

    r L

    ela

    Bou

    kli

  • 33N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DE LA RVOLUTION

    Qui est Zoulikha Yamina, ne Echab ?Elle est ne un 7 mai 1911 Hadjout dune famille aise, pre gros propritaire terrien, conseiller municipal, pr-sident du comit de patronage dEcoles dindignes. Il encourageait les Algriens sinstruire. Elle grandit dans la ville de Cherchell, pouse 16 ans, Larbi Ouda, maqui-gnon de son tat avec qui elle fonde une famille. Elle a cinq enfants quelle impliquera plus tard dans laRvolution, mais naura pas la chance de les voir grandir. Ce sera sa fille ane qui fera en son absence office de maman. Parlant un franais chti, cette femme impres-sionne par sa dtermination dfendre ses convictions.En 1954, lors du tremblement de terre dEl Asnam, o elle rendra visite sa fille, elle prend violemment a parti les autorits quelle estime trop lentes porter secours aux victimes algriennes, tout comme elle nhsite pas, en 1957, aprs lexcution de son poux, intendant au sein de lALN, captur avec sur lui la somme de 300.000 francs, faire, accompagn dun avocat, irruption au commissa-riat jusquau bureau du tristement clbre commissaire Coste, sous le commandement du non moins clbre lieutenant-colonel Grard Le Cointe, mort rcemment en tant que gnral, dans la gloire en France, la conscience tranquille. Elle y lance des mots qui auraient pu lui co-ter la vie : Non contents davoir tu de sang-froid mon poux, vous lui avez aussi vol largent de ses enfants. Curieusement, elle obtient gain de cause et rcupre la somme et ses objets personnels. Cet argent, fruit des cotisations, sera remis lorganisation sous la barbe de ce commissaire, qui ne se remettra jamais davoir t berne par une Fatma .Elle a alors 46 ans, un ge o les mres de famille de lpoque soccupent de leur foyer. Mais La Zoulikha la rvolte est une femme obstine, ayant de lexprience et du caractre et vouant une passion effrne son peuple. Elle engage la lutte et la poursuit inlassablement dans les maquis de Hazer et dans Cherchell enclave dans ses murailles, garde par une arme en alerte. Elle sillonne les pistes pour faire le relais avec lOrganisation installe dans des caches ou dans des petites maisons en ville. Dans le combat urbain, elle organise le rseau de femmes et dhommes, mettant en place les moyens pour faire acheminer la logistique aux maquis. Les contacts se font par des jeunes adolescentes de 12 14 ans, dont sa fille, encore en vie. Les jeunes filles insouponnables vont de cache en cache, avec des nes et des poteries dans lesquelles sont cachs nourriture, habillement et armes.Elle est flicite par Abane Ramdane en personne, no-tamment pour linfirmerie monte par ses rseaux, quil considre mieux quipe que celle de Tlemcen, rfren-ce lpoque, et par Boualem Benhamouda, ex-ministre et alors commissaire politique du secteur.

    Eschab Brahim pre de Zoulikha

    Zoulikha et son fils Lahbib petit

  • 34 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DE LA RVOLUTION

    Dbut 1957, le rseau FLN de Cherchell est dcouvert et les membres arrts. La Zoulikha senfuit et rejoint le maquis o elle est volontaire pour activer dans le secteur des Oudayne.Elle mobilise la population et organise les relais pour les combattants en transmettant les orientations et informa-tions dans Cherchell malgr le danger.On rapporte quelle garda jusqu sa mort un mouchoir trem-p par elle du sang encore chaud de deux moudjahidine, Abdelrrahmane Youcef Khodja et Ali Alliche, gs de 26 ans, alors quils passaient par un poste relais et auxquels elle avait servi le caf deux minutes avant. Elle fuit et verra ses enfants pour la derrire fois. Elle dira son fils Habib, port disparu et revenu bless d'Indochine en 1955, qui, devant se marier avec sa cousine, avait achet pour l'occasion une chambre coucher : Monte au maquis, tu te marieras l'indpendan-ce. Comme ci celle-ci tait pour le lendemain.Le sort veut quelle soit prise lors dun ratissage sans prc-dent, un 15 octobre 1957. Allioui est tu sur-le-coup, Brahim Ouda, un parent, senfuit bless, il sera gorg plus tard par les militaires ; La Zoulikha est faite prisonnire.Les Franais jubilent, montent une vritable mise en scne, ramnent de force les populations des alentours afin quils voient leur hrone, attache un blind, humilie.Il nen est rien. La Zoulikha la tte haute, harangue, dune voix ferme, la foule : Mes frres, soyez tmoins de la faibles-se de larme coloniale qui lance ses soldats arms jusquaux dents contre une femme. Ne vous rendez pas. Continuez votre combat jusquau jour o flottera notre drapeau natio-nal, sur tous les frontons de nos villes et villages. Montez au maquis ! Librez le pays ! Le capitaine tente de la faire taire. Mprisante, elle crache au visage de ses tortionnaires. Elle sera torture 10 jours durant, sans jamais donner un nom et excute le 25 octobre 1957. Son corps sera retrouv en 1984 aprs le tmoignage dun paysan qui dit avoir trouv le corps dune femme sur une route et lavoir enterr Marceau. Il les guide jusqu une tombe. Elle avait toujours ses menottes aux mains. Elle est enterre aujourdhui au cimetire des chouhada de Mena-ceur.Si les parents Ouda et leur an furent un exemple denga-gement patriotique, leur petit dernier est un exemple de loyaut envers lEtat algrien indpendant, libre et souverain.Gnral la retraite, cadet sorti de lcole de Kola, puis de l'cole d'officiers de Saint-Cyr Cotquidan, il se consacrera corps et me, au pril de sa vie, la lutte contre un autre dan-ger qui menaait lAlgrie, les hordes terroristes. Legs pro-bable de cette mre son fils, souvenir du mouchoir imbib du sang encore chaud des chouhada gard jalousement par cette hrone que fut La Zoulikha, afin que nul noublie les sacrifices consentis pour que vive lAlgrie souveraine et libre.

    L. B.

    Lahbib ( g.) et un de ses amis, tous deux martyrs de la Rvolution

    Lahbib fils de Zoulikha (jeune homme)

  • 35N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DE LA RVOLUTION

  • 37N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DE LA RVOLUTION

    Le rve dimplanter travers villes et villages des clubs sportifs pour contrer lordre colonial a trs tt germ dans les esprits des nationalistes algriens. Les lments les plus actifs des partis politiques de lpoque (MTLD, oulmas, PCA, UDMA, Scouts musulmans) y faisaient partis. Pour beaucoup, ctait le

    moyen idal pour accompagner et intgrer lessor du mouvement national et sa cristallisation au sein de la jeunesse. Tous taient acquis cette ide. Les embch-es dresses par ladministration coloniale, loin de les dcourager, ne fit que renforcer leur dter-mination trouver au plus vite un terrain dexpression pour une jeunesse exclue, o elle pourrait

    incarner ses idaux de libert, de fraternit et de justice.

    Lide de crer un club sportif acquise, il fallait lui trouver une dnomination. Le choix des membres fondateurs se porta naturellement sur le sigle : Mou-loudia Sport de Cherchell (MSC) en rfrence et en hommage son an dAlger, doyen des clubs

    Les martyrs du Mouloudia Sportif cherchellois

    Lemblme de toute une jeunesse

    Par Lela Boukli

    Le nom des frres Ali et Mahieddine Bendifallah, de Tayeb Benmokadem, Mohamed Bouamrani (membre fondateur et militant de lOS), Lakhdar Bouchema, Mohamed Djemai, Mohamed Fendjel, Ahmed Noufi, Yahia Rebzani, Tayeb Roumani, Nour Eddine Sadoun, Abderrahmane Youcef Khodja, Abdelkader Youns, Abdelkader Zegrar, morts pour lindpendance, est grav dans la mmoire des Cherchellois, comme reste vivant le souvenir de Belkacem Allioui, dirigeant du club, tomb lui aussi au champ dhonneur. Ils ont constitu lossature du premier commando du maquis de Cherchell.

  • 38 Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47 .

    HISTOIRE DE LA RVOLUTION

    musulmans, le MCA.Ainsi, naquit le MSC, fort de ses idaux et principes, qui russit, malgr les obstacles dresss par lordre colonial, non seule-ment survivre mais plus encore stendre. Ces athltes r-sistrent toutes les oprations de charme et deviendront de vail-lants combattants de larme de libration nationale. Lun des membres fondateurs du Mouloudia de Cherchell, le militant Mustapha Sadoun, qui a sillonn les maquis de la Wilaya IV sans relche, a t dsign, loccasion de ses 90 ans en 2008, membre dhonneur de ladite wilaya. Une reconnaissance par ses pairs de cet homme effac et exemplaire qui avait form des gnrations de militants la cause nationale.Les bases tant jetes, les membres du premier bureau sattelrent trouver des fonds, indispensables la bonne marche du club pour la saison

    sportive officielle 1947/1948. Des soires artistiques et des rencontres amicales furent or-ganises. Fouella fut dlgu provisoirement pour la prpara-tion technique des joueurs. Les entranements se faisaient lamphithtre, dans des terrains vagues ou sur les plages envi-ronnantes. Les officiers Lonard et Lancrenon, responsables du stade, leur interdisaient lentre, hormis le dimanche en prenant soin toutefois de maintenir les vestiaires ferms. Par contre, la Csarienne, formation pied-noir soutenue arbitrairement par une population europenne aise et une commune qui ap-pliquait scrupuleusement le code de lindignat, bnficiait non seulement du stade, mais dentraneurs militaires spciali-ss, sans compter lapport de soldats y voluant et la subven-tion consquence alloue alors que le MSC en tait prive.

    Cloisons impermables donc entre ces deux associations locales : la Csarienne, club de loccupant qui tentait par tous les moyens dannihiler toute tenta-tive visant regrouper les jeunes au sein du Mouloudia, club de loccup, qui leur ouvrait grand les bras.Le Mouloudia fut agr malgr

    tout par la sous-prfecture de Bli-da et affili la ligue dAlger pour la saison sportive 1948/1949.Il dbuta le championnat en 3e

    division, constitue de plusieurs groupes. Le MSC fit partie du 1er groupe avec lASGD (Gouraya-dupleix), lOMAEA (Amr El Ain), lAST (Attatba) Fouka entre autres, et occupa malgr son inexpri-ence une place honorable. Il abandonna son maillot de fortune, blanc, pour endosser son nouvel quipement, vert et rouge, iden-tique celui de son an, le MCA, conformment larticle 3 du statut rgissant lassociation.Le club assagi prit conscience

  • 39N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    HISTOIRE DE LA RVOLUTION

    de lui-mme, quun nouveau style de vie soffrait lui. Beaucoup de jeunes, tmoins dinjustices flagrantes quotidiennes, allrent spontanment vers ce mouve-ment lallure rvolutionnaire. Fa-vorisant lpanouissement de la personnalit individuelle, il devint le centre par excellence pour les loisirs de louvrier, de lemploy, du jeune dsoeuvr, qui retrou-vaient ainsi joie de vivre et dignit.

    1947/1956 Ainsi donc, la ville de Cherchell tait dote dun nouveau club musulman et cela malgr la forte opposition manifeste quelques annes auparavant par le maire de la ville Vichard et la multipli-cation des efforts des autorits locales lliminer radicalement, conscientes du danger quil pou-vait reprsenter pour elles. Elles allrent jusqu offrir la fin de chaque saison sportive de fortes sommes dargent aux joueurs, is-sus de familles modestes. Peine perdue. Ctait compter sans la volont des pionniers du MSC, encadrs par des militants de divers partis politiques clandes-tins lpoque, qui tenaient bon, malgr le manque de pcule, linterdiction de stade adquat, labsence dencadrement quali-fiLes menaces, les licenciements abusifs neurent pas de prise sur les joueurs algriens qui avaient pour mot dordre : Rester muet aux provocations et redoubler defforts. Les Moussouni, Zegrar, Bekhti qui achetaient leurs propres quipements, feu Tareb El An-ouar, regrett prsident, jeune militant du MTLD, rsistrent lopration de charme de Bare-taud qui aurait fait limpossible

    pour les voir troquer le sigle MSC pour celui de CS Souilamas. Noureddine, Mezaghrani Mr-ouane, vedettes dans lquipe chrie des colons, firent linverse, optant pour le Mouloudia ds sa cration. Le Mouloudia dbuta donc en 3e division et accda en 2e aprs cinq annes de luttes et dinlassables efforts, sous la hou-lette de Chrif-Slimane et plus tard de Maadoudou. Continuant sur sa lance, il fut sacr cham-pion de 2e division en 1957 avec sa tte feu Tareb El Anouar et les joueurs : Mohamed Ben-hamouda, Slimane Kadour-Chrif, Abdelkader Bekhti, Allel Mous-souni, Ali Benchrifa, Noureddine Souilamas, Ali Bendifallah, Smain Kebilene.

    Anne 1955/1956Les idaux du 1er Novembre

    1954 commenaient gagner villes et campagnes. Au sein du Mouloudia sopra alors une profonde mutation. Les membres du 1erbureau furent remplacs et le

    caf de Belkacem Alioui sera le nouveau sige. Pour la premire

    fois, dirigeants, joueurs, support-ers et adhrents, forts de cet es-prit dquipe, formrent la grande famille du MSC qui rejettera toute forme dasservissement. Un appel fraternel fut lanc alors tous les musulmans voluant au sein de la Csarienne, qui se retrouva dans le mme groupe cette anne-l, rallier les rangs du Mouloudia. Nombreux furent ceux qui y rpondirent positive-ment. Le match Mouloudia-Cs-arienne mit aux prises ultras et musulmans. La haine qui couvait durant ces dernires annes explosa au grand jour. Depuis, des slogans nationalistes firent leur apparition et les chants pa-triotiques fusrent des poitrines des supporters, nayant cure des autorits doppression, chaque rencontre. La peur changea de camp. Toutes activits sportives cessrent lappel du Front de libration national. La majorit de la composante du MSC rejoignit les maquis, de la Wilaya IV. Beau-coup sont tombs en martyr la fleur de lge.

    L. B.

    Dans notre prochain numro, vous trouverez une contribution indite du commandant Lakh-dar Bouchama (1931-1960), vieille connaissance du colonel Si MHamed Bouguerra, o il narra le Combat de Tatouilt-aot 1958 quil intitula Tatouilt ou le souvenir

  • 41N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    EL-DJAZAR DE L'INTERIEUR

    LAlgrie vient de raliser une avance remarquable dans sa lutte contre la falsification des documents et sa souscription vouloir harmoniser sa dmarche aux normes internationales, notamment celles prescrites par l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) pour scuriser ce document de voyage, qu'est le passeport, et rejoint

    Rformes de ltat civil

    LAlgrie tablit son passeport biomtriquePar Brahim Bensefia

    Dans le cadre des grandes rformes structurelles touchant les structures et les missions de lEtat et lconomie du pays, engages par le Prsident de la Rpublique, Abdelaziz BOUTEFLIKA, le ministre de l'Intrieur et des Collectivits Locales a lanc le grand chantier de la modernisation de l'Administration Cen-trale et des Collectivits Locales par la mise en place progressive d'un Systme National d'Identification Scurise. Le passeport biomtrique a t remis par Daho Ould Kablia, ministre de lIntrieur et des Collectivits locales, son dtenteur lors dune crmonie de prsentation au centre de production de titres et documents scuris Alger

    De g. dr. ; Brahim Djeffal, chef de cabinet du ministre de lIntrieur et des Collectivits locales, le gnral-major Ahmed Boustilla, commandant de la Gendarmerie nationale, le gnral-major Abdelghani Hamel, directeur gnral de la Sret nationale, et Dahou Ould Kablia, ministre de lIntrieur et des Collectivits locales, lors de la remise du premier passeport biomtrique algrien

  • 42Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47.

    EL-DJAZAR DE L'INTERIEUR

    ainsi le cercle restreint des pays (seulement 70 travers la plante) qui ont dj compost ce genre de document. Faut-il souligner que des pays comme l'Inde, pays de l'informatique, de la Chine ou de l'Afrique du Sud, n'ont pas encore engag d'oprations de ce genre. La crmonie de remise du premier passeport biomtrique, prside par Dahou Ould Kablia, ministre de l'Intrieur et des Col-lectivits locales, au-del de sa symbolique, constitue la concr-tisation du volet modernisation de l'administration du pays, un des axes importants contenus dans le programme du prsident de la Rpublique, Abdelaziz Bouteflika. Ce moment, vritable tournant dans cette marche vers le progrs, est donc arriv aprs que les pouvoirs publics eurent consenti de gros investissements infrastructurels, techniques et

    de formation dans la ressource humaine.La crmonie de remise a eu lieu au Centre national de pro-duction des titres et documents scuriss d'El Hamiz. Un sige qui tmoigne de cette avance remarquable de notre pays dans la ralisation dinfrastructures adquates et dans sa qute de lharmonisation de ses docu-ments et titres qui, dsormais, rpondent aux normes interna-tionales de scurit. Nombre de personnalits taient prsentes pour marquer cet v-nement majeur dans lhistoire du pays, dont le gnral-major Ab-delghani Hamel, directeur gnral de la sret nationale, le gnral-major Ahmed Boustilla, comman-dant de la gendarmerie nation-ale, Mustapha Lahbiri directeur gnral de la Protection civile, Abdelkader Ouali, secrtaire g-nral du ministre de l'Intrieur

    et des Collectivits locales et des reprsentants de diffrents ministres dont notamment celui de l'Enseignement suprieur et de la Recherche scientifique.Le passeport biomtrique lec-tronique est un titre de voyage individuel de nouvelle gnra-tion, lisible la machine, qui ressemble au livret du passeport actuel mais intgrant des tech-niques de scurit de dernires technologies et contenant une puce lectronique dans laquelle sont stocks les renseignements du titulaire, sa photo numrique, ses empreintes, sa signature numrise et les donnes rela-tives au titre du voyage. Il est considr biomtrique par le fait quil renferme une photo nor-malise et des empreintes digi-tales servant lauthentification du dtenteur du document grce des techniques de reconnais-sance automatique . LAlgrie a

    Abdelkader Ouali, secrtaire gnral du ministre de lIntrieur et des Collectivits locales, remettant un citoyen son passeport biomtrique

  • 43N 47 . El-Djazar.com . Fvrier 2012.

    EL-DJAZAR DE L'INTERIEUR

    adopt la mthode la plus usite universellement et considre jusqu prsent comment la plus fiable, savoir lempreinte digitale comme lment dauthentification biomtrique.

    Le ministre de lIntrieur et des Collectivits locales a mis en valeur les comptences algri-ennes qui ont, a-t-il soulign, su sapproprier les logiciels vitant ainsi au pays de recourir au savoir-faire tranger surtout quil sagissait dune opration de souverainet et de traitement de donnes touchant la vie prive des nationaux. Loption dun projet clef en mains confi un intgrateur telle quadopte par la quasi-totalit des pays, a t carte par le ministre de l'Intrieur et des Collectivits locales ds le dpart. Dans ce cadre, le choix adopt a t de prendre en charge la conception de lensemble du dispositif mis en uvre pour ce projet et son intgration technologique exclu-sivement par des comptences algriennes et ce afin, entre au-

    tres, dassurer une indpendance dans la gestion des plateformes techniques, de prserver les bases de donnes contre tout risque dusage ou de manipula-tion incompatibles avec lintrt national. Les quipements de dernire gnration acquis rpondent aux exigences de la partie algrienne qui, entre-temps, avait pris soin de raliser linfrastructure ad-quate ce genre doprations et de former sa ressource humaine capable de relever le dfi et dont le montant total sest chiffr 3,5 milliards de dinars. Un quipe-ment qui permet de raliser 6 000 passeports/jour et datteindre les 10 000 si deux quipes sont mises en place. Une cadence qui se rpercutera immanquablement sur la rapidit de remise de ce document de voyage dans des dlais dune trois semaines, que ce soit pour les nationaux ou pour nos compatriotes rsidant ltranger.Le Centre national de production des titres et documents scuri-ss, qui constitue aujourdhui le

    centre nvralgique et le passage obligatoire puisquil centralise les oprations de traitement et de production dans la dlivrance du passeport biomtrique et plus tard dautres documents, abrite les quipements matriels et logiciels dont nous pouvons citer les sous-systmes de comparaison automatique des empreintes digitales AFIS, celui de gestion et de production et de personnalisation des passeports biomtriques ainsi que celui de gestion des certificats lectron-iques, 870 stations denrlement biomtriques et 800 quipements de dlivrance, deux chanes de personnalisation automatique et une autre semi-automatique, une chane de personnalisa-tion manuelle et de contrle de qualit, les e-cover acquis pour la constitution de la premire anne de production et enfin un film holographique (laminat) . Ces quipements ont t acquis auprs de socits amricaines, hollandaises, allemandes, su-isses et franaises.Pour sentourer de toutes les pr-

    Sige du Centre national de production des titres et documents scuriss

  • 44Fvrier 2012 . El-Djazar.com . N 47.

    EL-DJAZAR DE L'INTERIEUR

    cautions et donner les meilleurs gages de succs cette opra-tion et en plus de la formation de la ressource humaine et de la ralisation de cette importante infrastructure (et la mise en place dun centre secondaire dans le sud du pays), le ministre de l'Intrieur et des Collectivits locales a mis en uvre 675 plate-formes logicielles au niveau des structures concernes, savoir les circonscriptions administra-tives et daras en attendant celles destines aux postes consulaires qui sont en voie de dploiement.Une nouvelle technologie suscite gnralement des apprhen-sions quant la crdibilit dun tel document. Ace sujet, Ab-delkader Ouali, secrtaire gnral du ministre de l'Intrieur et des Collectivits locales, confiera que