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Centre collaborateur de l’OMS
CYCLE DE MASTERE EN ADMINISTRATION SANITAIRE ET SANTE PUBLIQUE
FILIERE : Management des Organisations Sanitaires
PROMOTION (2011-2013)
Mémoire de fin d’études
Juillet 2013
ENSP, Rue Lamfadel Cherkaoui, Madinat Al Irfane, Rabat Tél. : (212) 05.37.68.31.62 - Fax (212) 05.37.68.31.61 - BP : 6329 - Rabat -
Email : [email protected] - Site Web : www.sante.gov.ma/departement/inas/index.asp
Gouvernance hospitalière :
Cas du centre hospitalier régional
Souss-Massa-Draa
(CHR-SMD)
ELABORE PAR :
EL KARTA Boubaker
ENCADRE PAR :
Dr YAHYA Aziz
Royaume du Maroc Ministère de la Santé
École Nationale deSanté Publique
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1
Table des matières Résumés
Liste des figures
Liste des abréviations
I- Introduction
II- Méthode
II-1- Présentation générale de l’étude
II-2- Présentation du lieu d’étude
II-3- Population à l’étude
II-4- Méthodes et instruments de collecte des données
III- Résultats
III-1- Acteurs en jeu dans la gouvernance du CHR-SMD
III-2- Pouvoir des acteurs
III-3- Analyse du pouvoir de décision
IV- Discussion
Références
Annexes
2
Résumé
Au Maroc, les établissements hospitaliers publics font partie intéressante de
l’architecture du système de l’offre de soins. Du fait qu’ils sont ouverts sur leur
environnement, leur gouvernance devient une question assez complexe ; d’autant plus que
cette gouvernance est l’une des variables qui explique les bonnes ou mauvaises
performances de ces hôpitaux. L’étude des aspects qui touchent au pouvoir de prise de
décision dans ces établissements revêt donc une importance cruciale dans la
compréhension de leur gouvernance. Pour ce faire, nous avons mené une étude qualitative
descriptive au niveau du centre hospitalier régional Souss-Massa-Draa (CHR-SMD). Trois
aspects de la prise de décision sont investigués : la forme juridique, le jeu des acteurs et la
typologie du pouvoir au sein du CHR-SMD.
Les résultats de cette étude ont révélé que le pouvoir de décision exercé par les
dirigeants du CHR-SMD est lié à des niveaux national, régional et local avec un degré de
contrôle faible sur les ressources qui sont à leur disposition. Aussi, l’étude a démontré que
les acteurs qui interviennent dans la prise de décision sont multiples et ont des rôles et des
méthodes d’implication très variés, par fois même contradictoires. La dite investigation a
déterminée aussi que le pouvoir au niveau du CHR-SMD est de type concentré, interne,
désigné avec répartition claire des responsabilités.
L’amélioration de la gouvernance hospitalière passe par des ajustements
réglementaires, manageriels et de formation.
Mots clés : gouvernance – hôpital – décision – pouvoir
3
Abstracts
In Morocco, public hospitals are considered interesting part of the healthcare
system architecture. Their openness on the environment has made their governance more
complex. Especially, this governance explains good or bad performance of these hospitals.
Study of decision power aspects of these hospitals became then relevant in understanding
their governance. For this issue, we conducted a descriptive qualitative study at the
regional hospital Souss-Massa-Draa (SMD-RHC). Three aspects of the decision are
explored: legal form, actors and type of the power within SMD-RHC.
Results revealed that the decision-making power exercised by SMD-RHC leaders is
related to national, regional and local levels with a weak degree of control. Moreover,
results showed the multiplicity of the actors involved in the decision-making with various
and paradox roles. Furthermore, they underlined nature of the power within SMD-RHC,
classified concentrated, internal with clear responsibilities division.
Hospital governance improvement goes through regulatory, managerial and training
adjustments.
Keywords: Governance - Hospital – Decision-Power
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5
Liste des graphiques
Figure n°1 : Liens décisionnels entre le CHR-SMD et les différentes instances
nationales……………………………………………………………………….
p13
Figure n°2 : Liens décisionnels entre le CHR-SMD et les différentes instances
régionales……………………………………………………………………….
p15
Figure n°3 : les acteurs locaux externes au CHR-SMD et leur influence sur la
décision hospitalière……………………………………………………………
p17
6
Liste des abréviations
AMO Assurance maladie obligatoire ASC association de la société civile B.O Bulletin Officiel CDT Confédération démocratique du travail CHU Centre hospitalier universitaire
CRO Centre régional d’oncologie
CDP Centre de diagnostic polyvalent
CMDP conseil des médecins, des dentistes et des pharmaciens,
CE comité d’établissement
CG comité de gestion
CSE comité de suivi et évaluation CLIN comité de lutte contre les infections nosocomiales,
CII conseil des infirmiers et des infirmières CSE Comité de suivi et évaluation CHP Centre hospitalier provincial DCO directeur du centre d’oncologie DO décisions opérationnelles DS décisions stratégiques EMRO Bureau régional du moyen orient de l’OMS GTZ Gesellschaft Technische Zusammenarbeit IFCS Institut de formation aux carrières de santé INAS Institut national d’administration sanitaire MS Ministère de la santé NTIC Nouvelles techniques de l’information et de la communication OCDE Organisation de Coopération et de développement Economique OMS Organisation mondiale de la santé OG Organisations gouvernementales ONG Organisations non gouvernementales PAA pôles des affaires administratives,
PAM pôles des affaires médicales
PEH Projet d’établissement hospitalier
PhH service de pharmacie hospitalière
PNUD Programme des nations unies pour le développement
PSI, pôle des soins infirmiers
7
RAMED Régime d’assistance médicale aux économiquement démunis RIH Règlement Intérieur des Hôpitaux SAA service d’admission et d’accueil SEGMA Service de l’Etat géré d’une manière autonome UGTM Union générale des travailleurs marocains
UMT Union marocaine des travailleurs
8
I- INTRODUCTION
L’hôpital est un élément clé de tout système de santé. Mais, il est l’une des
organisations les plus complexes (Denis JL et Champagne G, 1990)1. La multiplicité des
acteurs qui y interviennent (Mintzberg, 1986)2, les nombreux défis auxquels ils sont et la
diversité des missions et objectifs qu’ils doivent atteindre soumis (Mordelet, 2006)3, font
de la gouvernance des hôpitaux une problématique assez complexe pour la comprendre et
pour la pratiquer (Belghiti Alaoui et al, 2003)4.
Cette complexité tient en fait à deux aspects. Le premier est lié à l’hôpital lui-même en tant
qu’organisation ouverte sur son environnement. Et le deuxième, au concept même de la
gouvernance dont les limites sont insaisissables.
L’hôpital, en tant qu’organisation, est composé de l’agencement de trois sous-
systèmes qui sont en interaction (Contandriopoulos AP, Denis JL, Touati N, Rodriguez R,
2001)5 : (1) le sous-système collectif de représentations et de valeurs qui a attrait aux
croyances, sentiments et des schémas d’interprétation facilitant et/ou aggravant la
communication et la coordination entre les acteurs, (2) le sous-système de gouverne
composé de règles de gestion, de financement et d’information et (3) le sous-système
clinique relatif à la prise en charge des patients. Et comme tout organisation, l’hôpital se
caractérise par trois dimensions (Crozier M et Freidberg E, 1977)6: (1) le discours
managérial qui définit les valeurs, la mission et la philosophie de l’organisation, (2) les
structures formelles ou la matérialité de l’organisation composée de l’organigramme, la
technologie et les procédures et (3) les structures informelles profondes qui résultent de
l’interaction des acteurs entre eux et entre les autres dimensions. En se limitant, rien qu’à
ce premier aspect, nous pouvons d’ores et déjà dire que l’hôpital est une arène soumise à
des réglementations rigoureuses et ou se croise plusieurs acteurs (internes et externes),
ayant des intérêts et des pouvoirs différents, et par fois divergeant. Gouverner une telle
institution revient donc à ramer dans l’incertitude et faire face à des problèmes de tous
genres qui peuvent survenir à tout moment.
Le deuxième aspect de cette problématique relève du concept même de la
gouvernance qui, de part sa genèse au sein des entreprises privées, présente des difficultés
quant à l’étude de son objet et des domaines de son application. Plusieurs auteurs et
plusieurs institutions de divers horizons ont essayé d’encadrer ce concept. Le résultat étant
une multitude de définitions, d’approches et d’outils. Les dits auteurs ont pratiquement
9
tous signalé les notions suivantes, comme objet de l’étude de la gouvernance : les acteurs
et leurs rôles, les intérêts en présence, l’exercice du pouvoir, la prise de décision, la
performance de l’organisation, partenariat public-privé, la transparence, la réglementation,
la participation des clients et l’allocation et la gestion des ressources. Il va sans dire que,
l’étude de la problématique de la gouvernance hospitalière revient à étudier toutes ses
notions. Dans cette étude, nous allons s’intéresser à l’investigation du pouvoir de décision
dans les hôpitaux publics marocains à travers l’examen du cas du CHR-SMD. Le pouvoir
de décision se conçoit selon deux dimensions : 1) le pouvoir de prise de décision et 2) le
pouvoir de contrôle de l’exercice de la décision prise. Cette dernière dimension a comme
thématiques les aspects de l’évaluation de la décision, les études d’impacts, les audits, les
contrôles et bien d’autres disciplines éparses. Notre étude, se focalisera sur la première
dimension ; et nous pensons qu’une étude relative à la deuxième dimension sera d’une
utilité scientifique importante pour compléter le socle.
Signalons d’ores et déjà, que peu d’études sont consacrées à la décision dans les milieux de
santé, et encore moins, en milieu hospitalier. Il est donc pertinent de faire le point sur les
définitions, les typologies et les caractéristiques des décisions en matière de santé.
La décision est pour Lalande (1972)7 la « terminaison normale de la délibération, dans un
acte volontaire ». La décision comprend donc les termes de délibération et de choix. À ses
deux notions, Mélèse.J (1979)8 ajoute la variable de « …l’information partielle ». Les deux
définitions touchent donc aux aspects méthodologiques de la prise de décision. Nizard.J
(1986)9 propose une définition plus complète. En plus des comportements de la
délibération et du choix dans une situation d’information partielle, Nizard met l’accent sur
l’objet de la décision qui n’est que l’action pour résoudre un problème : « c’est une ligne
d’action consciemment choisie parmi un certain nombre de possibilités, dans le but de
réduire une insatisfaction perçue face à un problème ; ce choix suppose un traitement
d’informations selon des critères de choix et une volonté de réalisation. ». À l’issu de cette
analyse, nous pouvons donc définir la décision comme étant un choix, parmi d’autres, fait
sur la base d’informations incomplètes, dans le but d’agir pour résoudre un problème réel.
Par rapport aux typologies de la décision en santé, deux classifications sont citées par la
littérature. Tabuteau.D (2009)7 distingue six types de décision en santé avec les champs
d’action de chacune : (1) les décisions individuelles, (2) les décisions de politique de santé,
(3) les décisions d’action sanitaire, (4) les décisions de régulation du système de santé, (5)
10
les décisions « micro-sanitaire » et (6) les décisions à externalités sanitaire (pour plus
d’information, voir le tableau en annexe 1).
La deuxième typologie des décisions sanitaires est proposée par un ensemble d’auteurs
(Ansoff.I, 1989 ; Simon.H.A, 1983 ; Porter.M, 1986)10-11-12. Ses derniers distinguent sept
types de décisions selon trois critères (voir annexe 2). Dans cette étude, nous nous
intéressons à la décision « micro-sanitaire » selon le critère de la durée.
À quoi sert une décision ? À cette question cruciale et légitime, plusieurs auteurs
ont répondu qu’elle sert les intérêts du celui qui la prend. Par extrapolation, la décision en
santé publique vise à gérer la dualité entre intérêt général et intérêt individuel du
bénéficiaire des prestations de santé et par là, participer à la concrétisation du modèle
sociétal souhaité par la communauté : « …le développement d’une société solidaire ou tous
jouissent de la sécurité, de la liberté, de l’égalité des chances, du respect de leur dignité et
de la justesse sociale,… » (Préambule de la constitution marocaine, 2011)13. Au niveau de
l’hôpital public14, la décision doit donc cibler la concrétisation des missions de l’hôpital
public marocain qui sont : 1) mission de soins, 2) mission économique et managériale, 3)
mission de santé publique et 4) mission de développement professionnel.
La problématique de la prise de décision au niveau des hôpitaux, surtout publics,
relève d’une problématique beaucoup plus grande qui est celle des crises et des mutations
des systèmes publics et voir même de l’Etat. En effet, la montée du néolibéralisme, de la
mondialisation et l’apogée des nouvelles technologies de l’information de la
communication (NTIC) ont fait que les acteurs autres que l’Etat (secteur privé,
associations, ONG,…) se sont positionnés comme parties prenantes et partenaires dans les
décisions qui concernent les politiques publiques (Yahyaoui Y, 2005)15. Cette situation a
engendré un échec accablant du management public qui se traduit sous les caractéristiques
suivantes (Mohamed Froui, 2004)16: (1) multiplicité des objectifs, (2) horizon temporel
(court termisme), (3) résistance aux changements en raison des procédures, (4)
mécanismes d’incitation et d’intéressement limités, (5) lenteur du processus décisionnel,
(6) communication et transparence variable, (7) insuffisance de responsabilisation et (8)
cloisonnement du processus décisionnel et participation limitée des ayants droits. Dans le
domaine des systèmes de santé, il faut noter que la problématique de leur gouvernance est
apparue depuis le début des années quatre vingts avec des contres performances sanitaires
par rapport aux investissements qui leur sont accordés (Riadh Zghal, 2004)17. Depuis lors,
nombreux pays ont essayé d’introduire de nouvelles approches et nouveaux outils
empreints aux firmes privées pour les appliquer aux secteurs publics à la recherche de
11
l’efficience et de l’efficacité des politiques publiques à l’instar des projets réussis des
entreprises privées. Autonomie, décentralisation, comptabilité, accréditation, budget
programme, contrôle de gestion, audit et bien d’autres approches et outils issus de la
culture d’entreprises privées, ont donc fait leurs apparitions dans le management des
systèmes et des organisations de santé publique, et surtout en milieu hospitalier (Belghiti
Alaoui A, 2005)18. De sa part, l’OMS dans le modèle des quatre fonctions, proposé en
2000 (OMS, 2000)19 sous le vocable de « l’administration générale » (stewarship), comme
celui des six blocs de 2007, a positionné la fonction de la gouvernance des systèmes de
santé comme étant une fonction supérieure dévolue aux ministères de la santé.
Au Maroc, l’introduction du concept de la gouvernance sanitaire en général, ou tout
au moins de certains de ses principes, et la gouvernance hospitalière en particulier a été
faite à travers l’évolution de l’histoire du système de santé marocain (Lhassane Bouziani,
1999 ; Wajih Maazouzi, 2005; Belghiti Alaoui A, 2002)20-21-22. Ces applications ont pris
plusieurs formes : autonomie des CHU, l’extension des statuts SEGMA pour les autres
hôpitaux, réforme hospitalière, réforme de financement, formation des managers en
administration sanitaire, promulgation de lois et d’arsenal juridiques et réglementaires
importants. Ces différentes interventions ont impacté positivement les performances du
système de santé marocain (amélioration de l’espérance de vie, amélioration de l’accès aux
soins, amélioration de la couverture médicale de base,…). Malgré ses progrès notables,
plusieurs dysfonctionnements persistent dont la faible performance des établissements
hospitaliers (Belghiti Alaoui A, 2002)22. Une des causes explicatives de ces contres
performances est constituée par la mauvaise gouvernance hospitalière (OMS-EMRO,
2009)23. En effet, plusieurs auteurs ont pointé du doigt la fonction de gouvernance
hospitalière comme étant une problématique assez complexe et qui explique les faibles
performances de ses institutions. Claveranne JP, Pascal C et Piovesan D24 dans leurs
analyses de la fonction de la gouvernance hospitalière en France ont soulevé quatre grand
dysfonctionnements majeurs : 1) le directoire de l’hôpital n’assume pas ces fonctions
stratégiques, 2) dans un hôpital on trouve plusieurs centres de décision, 3) la direction de
l’hôpital a un contrôle très limité sur les ressources et 4) les usagers se plainent de
l’inorganisation de la prise en charge, de la qualité et de la sécurité des soins. Dans son
analyse de la gouvernance de l’hôpital au sein des pays de l’OCDE, Mordelet (2006)3
constate que l’exercice du pouvoir au sein des hôpitaux est parcellaire et de nombreux
12
acteurs internes et externes interviennent dans les décisions qui concourent à la
gouvernance de l’hôpital.
Dans les hôpitaux publics marocains, hors les CHU et hôpitaux militaires,
l’exercice de la gouverne en leur sein, est assez disparate. Malgré l’encadrement de cet
exercice par des interventions réglementaires (règlement intérieur des hôpitaux, décret de
l’organisation hospitalière), le pouvoir qui concerne l’hôpital est entre les mains de
plusieurs acteurs.
Au niveau du CHR-SMD, les constations faites lors de notre stage (une durée de six
mois) sont dans le même ordre d’idée. La prise de décision au niveau du CHR-SMD fait
appel à des niveaux différents et à des institutions variées.
Au niveau national, l’affectation et la mobilisation des ressources humaines, l’octroi de la
subvention financière de l’Etat, la dotation en médicaments et bien d’autres ressources au
CHR-SMD sont entre les mains des instances ministérielles centrales25. Au niveau régional
et local, le pouvoir qui concerne l’hôpital est partagé entre plusieurs centres. En plus du
pouvoir important dont le directeur de l’hôpital est investi26 (article 1 du RIH 2011), le
délégué du ministère de la santé détient un pouvoir décisionnel important sur l’hôpital à
travers sa présidence du comité de gestion hospitalière (article n°22, RIH 2011). Le
directeur régional a aussi un pouvoir sur l’hôpital via sa force de nomination des chefs de
pôles, de départements et de services relevant des hôpitaux de sa région27. À l’intérieur de
l’hôpital, malgré la représentation des différentes forces professionnelles au sein des
instances de concertation (le CMDP pour le corps médical et le CII pour le corps des
infirmiers) (articles n°16 à 19, RIH 2011), les syndicats professionnels continuent à exercer
leur pouvoir informel sur l’hôpital à travers les multiples grèves et la non-adhésion aux
décisions du directeur. Certaines associations détiennent un pouvoir important au sein de
l’hôpital à travers les services qu’elles financent (jardinage, dialyse, équipements,…). Sur
le plan politique, les présidents des collectivités territoriales28 (communes urbaines, conseil
provincial, conseil régional) et les parlementaires de la province et/ou de la région ont un
mot à dire sur le fonctionnement des hôpitaux publics dans la mesure où ils sont des
représentants de la population qui les a élus pour satisfaire leurs besoins, entre autres, celui
de la santé. Les présidents des collectivités territoriales impactent aussi l’hôpital via leurs
attributions consignées dans la charte communale (la gestion des déchets hospitaliers, achat
de certains équipements). Les médias aussi constituent une composante importante et
peuvent demander des comptes et enquêter sur les situations de mauvaise gouvernance
13
hospitalière. Les fournisseurs de l’hôpital aussi jouent un rôle important dans la
gouvernance hospitalière dans la mesure où ils peuvent se retrouver en situation de
monopole (cas de fournisseur de l’oxygène et probablement pour la collecte et le
traitement des déchets hospitaliers).
Qui a donc le pouvoir de décision à l’hôpital ? Quels sont les acteurs qui rentrent en jeu
dans la prise de décision et quels sont leurs rôles ? Quel modèle de bonne gouvernance
faudrait-il instaurer pour une meilleure prise de décision ? Telles sont les questionnements
que nous nous proposons d’étudier dans cet essai.
L’objectif général de cette étude est de décrire la gouvernance de l’hôpital public marocain
à travers la fonction du pouvoir de décision. Ces objectifs spécifiques sont:
1. Identifier la forme juridique du CHR-SMD et par là qui a le pouvoir de décision et
qui contrôle les ressources;
2. Identifier les acteurs en jeu dans le CHR-SMD leur positionnement par rapport aux
instances de prise de décision et leur positionnement par rapport aux décisions
stratégiques et opérationnelles.
3. Diagnostiquer les caractéristiques générales du pouvoir de décision selon une
typologie bien définie.
4. Proposer des améliorations pour améliorer la prise de décision et à travers,
améliorer la gouvernance hospitalière.
Pour atteindre ces objectifs, nous avons opté pour l’utilisation d’un modèle d’analyse de la
gouvernance, proposé par la GTZ29 avec adaptation au contexte hospitalier (voir annexe 3).
La pertinence de cette étude vient du fait que la gouvernance est une fonction clé de
l’hôpital et qui conditionne, positivement et/ou négativement la réalisation de ses missions
et ses objectifs.
14
II- Méthode
II-1- Présentation générale de l’étude
Cette étude est à visée descriptive qualitative. Elle est descriptive du fait qu’on va
essayer de dresser un portrait de la gouvernance hospitalière au sein d’un centre hospitalier
régional. L’approche qualitative est justifiée par le fait qu’il s’agit d’étudier en profondeur
les interactions entre un ensemble d’acteurs, dans un contexte naturel, soumis à des
fluctuations et des contraintes nombreuses dans le but de comprendre cette complexité.
Pour ce faire, nous avons privilégié l’étude de cas.
Ce design est justifié du fait même de la complexité des processus en santé. Les relations
ne sont donc pas linéaires et sont fluctuantes et imprévisibles. En fait, l’exercice du
pouvoir décisionnel à l’intérieur de l’hôpital répond parfaitement à une intervention
complexe, qui selon Contandriopoulos et ces collaborateurs30 (2000) se caractérise par : (i)
des finalités multiples, difficiles à identifier, divergentes ; (ii) une organisation multi-
niveaux; (iii) un grand nombre d’activités mobilisant de nombreux acteurs interdépendants
; (iv) des dimensions multiples et parfois contradictoires et (v) un horizon temporel mal
défini.
II-2- Présentation du lieu d’étude
Le CHR-SMD31 fait partie des hôpitaux relevant du ministère de la santé (MS). Il
est composé de deux hôpitaux, un général dénommé « hôpital Hassan II », l’autre est
spécialisé, dénommé « hôpital d’oncologie ». Mis en service depuis 1966, l’hôpital Hassan
II d’Agadir était d’abord géré en mode régie. En 1998, le gouvernement de l’époque lui a
conféré le statut de service d’Etat géré d’une manière autonome (SEGMA). En 2011, sa
capacité litière est de l’ordre de 610 lits répartis entre 570 au niveau de l’hôpital général
Hassan II et 40 lits au centre d’oncologie32. Il couvre une population de plus de trois
millions d’individus répartie entre neuf provinces et préfectures de la région Souss-Massa-
Draa. La même année, le CHR-SMD compte 118 médecins dont 93 spécialistes, 322
infirmiers, toutes catégories confondues et 118 personnels administratifs. Pendant la
même année, le CHR-SMD a réalisé 115 842 journées d’hospitalisation, 37 420
admissions, un taux d’occupation moyen de l’ordre de 64,4 % et une durée moyenne de
séjour de 3,1 jours par patient.
15
II-3- Population à l’étude
La population cible de notre étude est constituée du CHR-SMD relevant de la
direction régionale du ministère de la santé à la région Souss-Massa-Draa. Les unités
d’analyse sont composées de deux catégories :
- Les textes juridiques et réglementaires régissant l’organisation et le fonctionnement
des hôpitaux publics au Maroc :
- Les acteurs intervenants dans le processus de prise de décision à l’hôpital :
• Les acteurs au niveau régional (le président du conseil régional, le
directeur régional de la santé) ;
• Les acteurs au niveau local (le délégué du ministère de la santé à la
préfecture d’Agadir Ida Outanane, le directeur, les chefs de pôles, les
présidents du CMDP et du CII du CHR-SMD, les présidents des bureaux
syndicaux des professionnels de santé représentés au sein du CHR-SMD,
les présidents d’association partenaires du CHR-SMD) et tout autre acteur
identifié à ce niveau.
Seuls seront inclus dans cette étude les textes et les acteurs qui participent
effectivement au processus décisionnel au sein de l’hôpital. Tous autres textes ou acteurs
participant faiblement à ce processus ne seront pas soumis à l’analyse.
Cette étude de cas s’est focalisée sur le CHR-SMD. Pour la sélection des textes
juridiques, le choix est porté sur les instruments cités en haut. D’autre textes peuvent être
inclus dans l’analyse quant il s’avère qu’ils interviennent dans le processus de décision.
Pour les acteurs, le choix est porté sur ceux internes et externes qui interviennent au
niveau CHR-SMD.
II-4- Méthodes et instruments de collecte de données
Le cadre d’analyse proposé pour cette étude spécifie les domaines à l’étude.
II-4-1- Forme juridique de l’hôpital :
a. Quel est le statut juridique de l’institution ?
Le statut juridique permet de déterminer qui a la propriété de l’institution et qui a le
pouvoir de décision. L’analyse des textes organiques (notamment les statuts) va permettre
d’identifier les différents organes de décision et leur rôle respectif. Le choix du statut sera
déterminant pour le type d’organisation, pour les modalités de prise de décision et donc
pour la gouvernance de l’hôpital.
Méthode et outils : analyse des textes réglementaires régissant les hôpitaux au Maroc.
16
b. Qui sont les propriétaires des ressources ?
Une analyse fine du bilan des ressources dont dispose le CHR-SMD permettra d’identifier
leur origine et ainsi repérer les acteurs influant au-delà de la tutelle officielle de l’hôpital.
Méthode et outils : analyse des bilans des ressources dont dispose le CHR-SMD en
utilisant une grille comportant les types de ressources, leurs origines et le degré de contrôle
de ses ressources (voir annexe 4). La grille est administrée aux responsables institutionnels
du CHR-SMD, à savoir le directeur du CHR-SMD, le directeur du centre d’oncologie
(CRO), le médecin responsable du centre de diagnostic polyvalent (CDP), les chefs de
pôles et les chefs de départements. Toutes les grilles ont été récupérées.
II-4-2- Pouvoir des acteurs sur les décisions stratégiques et opérationnelles
a. Quels sont les acteurs en présence ?
L’analyse de la gouvernance se limite souvent à l’étude des rapports entre les
acteurs clés de l’organisation que sont les dirigeants (direction). Toutefois, au-delà
de la sphère des dirigeants, il est important de cerner les autres catégories d’acteurs
internes ou périphériques à l’hôpital et jouant un rôle vis-à-vis de l’institution
étudiée. Il est possible de dresser une liste des différents acteurs intervenant dans la
vie de l’hôpital en distinguant les acteurs internes, externes et leur niveau
d’influence.
On peut s’interroger notamment sur la compréhension qu’ont les acteurs de leur
propre rôle dans l’institution, du niveau de partage de cette perception entre les
acteurs.
Méthode et outil : analyse des rôles de chaque acteur en usant d’une grille
d’acteurs, leurs rôles perçus et des mécanismes de leur implication dans l’hôpital
(voir annexe 5).
La grille est administrée à chaque acteur en lui demandant de décrire la perception
de son rôle vis-à-vis de la prise de décision au CHR-SMD et le mécanisme par
lequel il ou elle souhaite être impliqué dans ce processus.
38 grilles ont été administrées et 23 ont été récupérées soit un taux de 60 % des
répondants.
17
b. Quels acteurs pour quelles instances ?
Parmi l’ensemble des acteurs identifiés ci-dessus, il est important de distinguer
ceux qui sont représentés directement dans les instances (direction, pôles, comité de
gestion, comité d’établissement, CMDP, CII,...) et ceux qui ne le sont pas.
Méthode et outil : analyse des acteurs au sein des instances, leurs rôles et leurs
nomination. Pour ce faire, on usera de la grille d’acteurs et leurs rôles et des
procédures réglementaires régissant la nomination des responsables de l’hôpital et
des représentants des différentes catégories et instances.
c. Quels acteurs pour quelles décisions ?
Au-delà du profil des acteurs et de leur représentation dans les instances, il sera
intéressant d’analyser le rôle de chacun dans le processus de prise de décision en
distinguant les décisions d’ordre stratégique et les décisions relevant de la gestion.
Méthode et outil : analyse du pouvoir réel des acteurs en utilisant la grille de prise
de décision (voir annexe 6). La grille a été distribuée à chaque acteur identifié qui
note son degré de participation réel à la prise de décision par une croix, s’il est
faible, deux croix, s’il est moyen et trois croix, s’il est important.
Deux types de décisions ont été sélectionnés. Il s’agit de la décision stratégique qui
est définie comme étant une décision qui impacte l’hôpital sur le long terme (au
moins 3 ans). La catégorisation de ce type de décision a été faite en quatre sous
ensembles : choix de la vision et des missions du CHR, fixation des objectifs à long
terme, planification financière et amélioration de la performance du CHR-SMD.
La décision opérationnelle qui concerne les aspects liés à un poste, une activité ou
l’utilisation immédiate d’une ressource, a été catégorisée sous quatre sous
ensemble : gestion du personnel, gestion du matériel, supervision des activités et
résolution des conflits.
Le nombre de grilles qui ont été administrées est de 38 et le nombre des répondants
est de 21, soit un taux de répondant de 55 %.
Un pré test a été effectué auparavant sur quatre personnes dont deux professionnels
de santé et les deux autres sont des adhérents à des associations de la société civile.
L’objectif est de dresser un portrait de l’hôpital et de la répartition des pouvoirs en
son sein.
18
II-4-3- Analyse du pouvoir de décision
Les informations collectées à ce stade et la grille des prises de décision permettent
de qualifier l’hôpital sur la base d’une typologie des formes d’exercice du pouvoir.
Les principaux critères retenus sont :
- Pouvoir concentré ou pouvoir réparti entre les acteurs (en fonction de la
répartition des croix dans la grille des prises de décision) ;
- Pouvoir extérieur (chefs hiérarchiques, bailleur, Etat, associations) ou
intérieur (salariés, clients, syndicats des professionnels, associations
professionnelles, associations des malades,…);
- Pouvoir salarié / élus (répartition du pouvoir et des décisions entre acteurs
internes);
- Répartition confuse ou répartition claire des responsabilités (selon le degré
de facilité à remplir la grille).
19
III- Analyse des résultats
III-1- Acteurs en jeux dans la gouvernance du CHR-SMD
II1-1-1- Statut juridique du CHR-SMD
L’analyse des textes juridiques régissant les hôpitaux relevant du ministère de la
santé peut se faire selon plusieurs angles de vue (linguistique, sémantique, droit de
l’homme, systémique,…). Dans cette étude, nous allons nous focaliser sur l’analyse des
aspects qui concernent la prise de décision au sein de ces établissements.
En application des dispositions de la loi organique des finances33 le ministère des Finances
et le ministère de la santé ont décidé, par arrêté conjoint datant du 6 Juin 1998, d’attribuer
le statut d’un service d’Etat géré d’une manière autonome (SEGMA) au CHR-SMD. Le dit
statut est défini par la même loi (premier alinéa de l’article 16 bis) comme étant «… service
de l'Etat, non doté de la personnalité morale, dont certaines dépenses, non imputées sur
les crédits du budget général, sont couvertes par des ressources propres. L'activité de ces
services doit tendre essentiellement à produire des biens ou à rendre des services donnant
lieu à rémunération. ». Le deuxième alinéa du même article stipule que les SEGMA sont
crées par la loi de finance qui prévoit leurs recettes et fixe le montant maximum de leurs
dépenses. Les objectifs qui étaient derrière l’octroi de ce statut étaient d’introduire des
nouveaux outils et approches issus de la gouvernance d’entreprises privées dans les
hôpitaux publics afin d’améliorer leurs gestions et assoir une culture de résultats et de
reddition des comptes34. De cette première analyse, nous pouvons d’ores et déjà déduire
que le CHR-SMD, en tant que SEGMA, est crée par la loi de finance, elle-même décidée
par le parlement (article 75 de la constitution marocaine de 2011). En somme, le CHR-
SMD est sous la tutelle du parlement dans certaines décisions qui le concerne, notamment
sa création, la fixation de ces dépenses budgétaires et leur contrôle à postériori à travers les
commissions d’enquêtes que le dit parlement peut constituer à cet effet (article 67 de la
constitution marocaine de 2011). Du fait que le budget du CHR-SMD fait partie du budget
général de l’Etat, il est donc soumis aux mêmes règles qui régissent le contrôle de l’emploi
des fonds publics. De ce fait, toutes décisions budgétaires ou financières prises par le
CHR-SMD est sous le contrôle de la cour des comptes (3ém alinéa de l’article 147 de la
constitution marocaine de 2011) et de l’inspection générale des finances relevant du
ministère des finances35 .Aussi, le CHR-SMD est sous la tutelle du ministère de la santé25
et obéit donc à une hiérarchie administrative dans toutes ses formes. L’affectation de
20
ressources (financières, humaines) et leur utilisation en son sein sont sous le contrôle de
l’administration centrale du ministère de la santé.
En 2007, le gouvernement marocain a décrété la loi d’organisation hospitalière14. Cet
instrument juridique, premier en son genre dans l’histoire des hôpitaux publics au Maroc, a
consacré les objectifs énoncés ci-dessus en instituant deux volets importants :
- Les missions, les définitions et l’organisation des hôpitaux relevant du ministère
de la santé ;
- L’approche managériale basée sur la contractualisation avec les services
déconcentrés à travers l’institutionnalisation du projet d’établissement
hospitalier (PEH).
Cette loi a consacré aussi la tutelle du ministre de la santé en nommant le directeur, les
chefs de pôles, les chefs de départements et services sur proposition du directeur régional.
De cette analyse du premier groupe de textes réglementaires à caractère national, nous
pouvons schématiser les liens décisionnels qu’à le CHR-SMD avec les instances nationales
comme tel :
Figure n°1 : Liens décisionnels entre le CHR-SMD et les différentes instances nationales
CHR-SMD
Administration centrale du MS:
- création ou suppression;- nomination;- affectation des ressources;- contrôle de l’utilisation des ressources;- suivi et évaluation des performances.
Administration centrale du ministère des finances:
- inspection
Le parlement:- Attribution du statut SEGMA;-Attribution du budget;- Contrôle de l’exercice.
La cour des comptes:- contrôle de gestion;- audit.
: lien fonctionnel, : lien hiérarchique
Au niveau régional, le Wali, sous l’autorité du ministre de la santé, peut prendre des
décisions qui touchent directement au CHR-SMD en assurant la coordination des services
de santé et en veillant à leur bon fonctionnement (4ém alinéa de l’article 145 de la
21
constitution de 2011). Le conseil régional, de part ses attributions consignées dans le
dahir28 d’organisation de la région, peut aussi décider de certaines questions qui concernent
la santé en général et les hôpitaux en particulier (CHR-SMD, comme exemple) et ce à
travers : 1) des propositions sur des actions d’intérêt général, intéressant la région et
relevant de la fonction de l’Etat (3ém alinéa de l’article 6 du dit Dahir), 2) l’élaboration du
plan de développement économique et social et qui peu intéressé le CHR-SMD (3ém
alinéa de l’article 7 du dit dahir), 3) la réalisation et l’entretien des hôpitaux (2ém alinéa da
l’article 8 du dit dahir), 4) un avis sur la politique d’implantation des hôpitaux dans la
région (6ém alinéa de l’article 9 du dit dahir) et 5) l’étude des questions de santé à travers
la commission permanente (6ém alinéa de l’article 36 du dit dahir).
La direction régionale de la santé est aussi un acteur incontournable dans la décision qui
concerne le CHR-SMD. Déjà, la loi d’organisation hospitalière14 a précisé dans son article
11 que les directeurs d’hôpitaux sont nommés par le ministre, après avis du directeur
régional de la santé. En plus, la direction régionale, de part ses missions36 prescrites dans
l’arrêté du MS relatif aux attributions et à l’organisation des services déconcentrés est
responsable de la mise en œuvre de la politique du ministère de la santé dans la région
(article 2 du dit arrêté). En outre, les quatre services de la direction régionale assurent des
attributions qui ont attrait, entre autres, aux hôpitaux publics, notamment les dispositions
de l’article 5, 6 et 7 inhérent respectivement aux services de la programmation de l’offre de
soins et des ressources financières, des approvisionnements, des bâtiments, des
équipements et de la maintenance et des ressources humaines. La publication récente de
l’arrêté27 du ministre de la santé relatif à la délégation de signature au directeur régional du
ministère de la santé à la région Souss-Massa-Draa a renforcé le rôle de ce dernier en
matière de gestion des ressources humaines en niveau de la région en nommant les chefs
de pôles, des départements et des services hospitaliers.
En définitive, au niveau régional, les relations décisionnelles que le CHR-SMD peut avoir
avec les instances régionales peuvent être configurées comme telles :
Figure n°2 : Liens décisionnels entre le CHR-SMD et les différentes instances régionales
22
CHR-SMD
Le Wali:- coordination;- fonctionnement.
Le conseil régional:- proposition des actions;- intégration dans le projet de développement;- réalisation et entretien;- implantation;- études.
Instances centrales du ministère de la santé
Direction régionale de la santé:- proposition de nomination des directeurs d’hôpitaux;- programmation de l’offre de soins;- pilotage et coordination des actions sanitaires;- gestion des ressources financières;- nomination des chefs de pôles, départements et services hospitaliers;- mutation du personnel;- approvisionnement et disponibilité des médicaments et produits pharmaceutiques non médicamenteux;- suivi et maintenance des équipements, des bâtiments et du matériel biomédical.
: lien fonctionnel, : lien hiérarchique
En 2011 et en application du décret relatif à l’organisation hospitalière, le ministère
de la santé a publié l’arrêté portant règlement intérieur des hôpitaux26 (RIH) relevant du
ministère de la santé. Le dit arrêté consacre l’organisation et le fonctionnement des
hôpitaux du ministère de la santé, dont le CHR-SMD fait parti. L’étude de ces dispositions
reflète la volonté du ministère de la santé de clarifier les attributions de chaque acteur
interne et de simplifier le circuit de décision. La création et la spécification des attributions
des pôles, des instances d’appui et de concertation et des départements et services
hospitaliers a rendu le processus de prise de décision plus collégial et participatif (voir
annexe 7).
L’étude des attributions des différents acteurs internes (chapitre premier du RIH
2011) du CHR-SMD révèle que dans sa fonction du décisionnaire, le directeur est assisté
par les trois pôles de gestion et des instances d’appui et de concertation dont deux organes,
qui sont le comité de gestion présidé par le délégué et le comité d’établissement présidé par
lui-même, ayant des attributions délibérantes. Les autres instances ont plutôt des missions
consultatives. La composition de chaque instance dénote aussi l’importance accordée par le
législateur au rôle des deux organes cités ci-dessus et la place de la décision stratégique
dans la gestion du CHR. Le SAA, de part ses attributions, joue aussi un rôle important dans
23
la décision en fournissant l’information hospitalière au temps opportun. Le service de la
pharmacie hospitalière, à travers ses attributions, a aussi un rôle consultatif auprès du
directeur, surtout en matière de la gestion des médicaments et dispositifs médicaux.
Néanmoins, nous pouvons constater que le législateur n’a pas spécifié les modalités de
gestion des relations avec les instances syndicales en tant qu’acteur interne qui influence la
décision au niveau du CHR. En plus, les départements et services, lieu de production de
soin et de ce fait, ils concrétisent la mission fondamentale de l’hôpital, sont mis à l’écart
dans le processus décisionnel par le fait qu’ils ne sont représentés qu’au niveau des deux
conseils (CMDP et CII) et le RIH est muet sur les modalités de concertation avec le
directeur du CHR-SMD.
A l’échelle locale et externe de l’hôpital, le délégué du ministère de la santé à la
préfecture d’Agadir Ida Outanane se positionne comme un acteur incontournable dans le
processus de prise de décision hospitalière. À l’exception de la gestion des crédits affectés
au CHR-SMD, le délégué a le pouvoir sur tout autre volet concernant le CHR-SMD
(article 10 et 13 de l’arrêté n° 1363-11 précité)36. Dans le cadre de la contractualisation
externe, l’hôpital est appelé aussi à sous-traiter, pour acquérir certains biens ou satisfaire
certains services, avec des contractants externes qui sont tenus de fournir les biens ou de
prodiguer les services avec des normes spécifiées dans les cahiers de charge. Au niveau du
CHR-SMD plusieurs acteurs de ce genre agissent dans les domaines suivants : alimentation
des malades et du personnel, gestion des déchets de soins, fournitures de bureau, fourniture
de certains médicaments et dispositifs médicaux, fourniture de réactifs et produits de
laboratoire, gardiennage, jardinage, maintenance des équipements biomédicaux et des
installations techniques,…les décisions opérationnelles que prennent ses acteurs sont
évidement contrôlées par le directeur de l’hôpital et ajoutent de ce fait un certain degré
d’incertitude de la pertinence des décisions prises par ses concessionnaires. L’hôpital est
aussi appelé à nouer des relations de partenariat avec les organisations gouvernementales
(OG), les organisations non gouvernementales (ONG) et les associations de la société
civile (ASC) dans le but d’améliorer la qualité de la prise en charge des patients37. Pour ce
faire, ses partenaires œuvrent dans le domaine des biens et services suivants: la dialyse, le
jardinage, achats de certains équipements, aménagement de certains services, participation
à la prise en charge des malades,…). Les interventions de ses organismes et associations a
pour but la participation à la consécration de la démocratie participative et au
développement socio-économique dans notre pays. Les modalités de leurs interventions
ont attrait à l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation des décisions et des projets des
24
pouvoirs publics (article 12 de la constitution de 2011). Les médias (journaux, presse
électronique, radio, télévision) sont aussi des acteurs inévitables qui peuvent influencer les
décisions prises au niveau du CHR-SMD. Leur pouvoir tient à ce qu’ils peuvent enquêter,
critiquer, manipuler, approuver les décisions hospitalières et en fin les communiquer au
grand public.
Les influences de ces acteurs locaux et externes au CHR-SMD sur ces décisions sont
schématisées dans la figure ci-après :
Figure n°3 : les acteurs locaux externes au CHR-SMD et leur influence sur la décision
hospitalière
CHR-SMD
Délégué du MS:-supervision, coordination, contrôle et évaluation;- contribution et suivi des crédits d’investissements;- collecte et exploitation des informations;- gestion des ressources humaines;- promotion, mise en œuvre et évaluation des partenariats.
OG, ONG, associations:
- élaboration des décisions;- mise en œuvre des décisions;- évaluation des décisions.
Fournisseurs:
-fourniture des biens et services;- négociations.
Média:- enquête;- critiques;- approbation;- manipulation;- diffusion au grand public.
: lien fonctionnel, : lien hiérarchique, : lien informel
Au terme de cette analyse des textes réglementaires régissant soit directement ou
indirectement le processus de prise de décision, nous pouvons conclure que ce dernier est
très éclaté et est influencé par des acteurs nationaux, régionaux, locaux, internes et externes
au CHR-SMD.
III-1-2- Degré de contrôle des ressources
Dans cette rubrique nous allons analyser le degré de contrôle réel qu’ont les
responsables au niveau du CHR-SMD sur les ressources qui leurs sont affectées. Pour ce
faire, nous allons relater les résultats issus du remplissage de la grille estimative du niveau
de contrôle des ressources relevant du ministère de la santé et hors ministère.
25
A la lecture des résultats translatés dans cette grille (voir annexe 8), nous pouvons
constater que le degré de contrôle des ressources relevant du ministère de la santé par les
responsables du CHR-SMD est très faible par rapport aux autres ressources hors ministère.
D’autre part, sur l’ensemble des répondants sur le degré de contrôle des ressources du
ministère de la santé la totalité estime que le degré de contrôle exercé sur les ressources
humaines, matérielles et financières est très faible ; alors que celui exercé sur les
ressources humaines et matérielles hors ministère est plutôt moyen.
III-2- Pouvoir des acteurs
III-2-1- Les acteurs en présence
Au-delà des acteurs déjà identifiés au niveau des textes réglementaires, d’autres
acteurs sont en présence à l’intérieur et à l’extérieur du CHR-SMD. La perception de leurs
rôles et des mécanismes de leurs implications sont aussi une donnée importante à
connaitre.
Les résultats configurés dans le tableau en annexe 9, démontrent que les acteurs qui
interviennent dans l’institution du CHR-SMD sont nombreux. Les rôles perçus par ces
acteurs sont aussi divers que leur qualité et varient entre des rôles stratégiques et
opérationnels. Les mécanismes de leur implication dans le CHR-SMD vont de simple
réunion d’information et de sa collecte jusqu’au changement du statut de certains acteurs.
III-2-2- Positionnement des acteurs par rapport aux instances
La représentation ou non de ces acteurs au sein des instances de décision reflète
l’importance accordée à ces dernières dans le processus de prise de décision, à travers ses
attributions, la manière dont les membres sont désignés et leurs modalités de
renouvellement.
En effet, l’étude des attributions de chaque instance nous informe sur l’importance
accordée au comité de gestion, au comité de l’établissement et au CMDP. Ces dernières
ont des attributions d’ordre stratégique et qui ont un impacte sur l’ensemble du CHR-SMD.
Le CSE et le CLIN ont des attributions opérationnelles, alors que le CII a des attributions
les plus réduites et concernent l’appréciation de la qualité des soins infirmiers et la
contribution à la formation continue. Par rapport à la composition et la méthode de
désignation des membres de chaque instance, nous remarquons que dans la majorité des
cas les membres sont désignés de droit. Les seuls cas d’exception sont le CMDP dont la
grande partie de ces membres sont choisis par voie d’élection représentative et le CII dont
la moitié est désignée de droit et l’autre moitié par voie d’élection représentative. En ce qui
26
concerne les renouvellements des membres, il faut noter qu’aucune disposition de ce genre
n’est décrite. En plus de ce qui précède, l’analyse de cette dimension révèle les constats
suivants :
- Le directeur du CHR-SMD est membre de droit dans toutes les instances, sauf
le CII ;
- Le délégué du ministère de la santé est représenté uniquement dans deux
instances : CE et CG ;
- Le directeur régional n’est nullement représenté ;
- Les médecins et infirmiers chefs aux départements et services ne sont pas
représentés dans aucune des instances ;
- Les syndicats ou leurs représentants ne sont aucunement représentés ;
- Les autres acteurs ne sont pas représentés.
III-2-3- Positionnement des acteurs par rapport aux décisions
En plus de leurs rôles et de leurs représentations dans les instances, il est intéressant
d’analyser le rôle de chaque acteur dans le processus de prise de décision. L’appréciation
de cette réalité est faite selon la participation à la prise de deux grands types de décisions :
- Les décisions stratégiques ;
- Les décisions opérationnelles.
Les résultats de cette investigation relativement aux acteurs internes sont relatés dans la
grille de prise de décision en annexe 10 et 11.
D’une façon générale, les résultats des deux grilles nous renseignent sur le pouvoir
important des acteurs internes. A cette échelle, les acteurs de la direction (directeurs et
pôles de gestion) cumulent plus de pouvoir de décision par rapport aux acteurs internes, les
conseils et des départements. Les syndicats ne détiennent aucun pouvoir formel. A
l’échelle des acteurs externes, le délégué détient la plus forte concentration des pouvoirs de
décision, suivi de l’association des amis de l’hôpital.
Sur le plan transversal, on observe une grande concentration du pouvoir au niveau des
décisions opérationnelles par rapport aux décisions stratégiques. Ces dernières étant
l’apanage du délégué, du directeur du CHR-SMD, du chef du PSI et du chef du PAA.
III-3- Analyse du pouvoir de décision
La lecture des résultats des tableaux n°5 et n°6, nous renseigne aussi sur les
typologies des formes de l’exercice du pouvoir de décision au sein du CHR-SMD. En effet,
on peut qualifier de pouvoir de décision au niveau du CHR-SMD de type :
27
• Pouvoir concentré ;
• Pouvoir interne ;
• Pouvoir désigné par l’administration ;
• Répartition claire des responsabilités.
28
Discussion
Notre analyse a débouché sur plusieurs résultats intéressants. Notons d’abord que la
réglementation qui régit les hôpitaux publics est nombreuse et renvoie à des institutions et
des niveaux très différents. Dans l’arsenal juridique marocain, le pouvoir de décision au
sein de l’hôpital public est très éclaté et concerne des institutions variées en passant du
niveau national, régional et local et à l’intérieur de l’établissement hospitalier lui-même.
Cette situation, consciente ou inconsciente, engendre, pour le dirigeant de l’hôpital, une
multiplicité des centres de décisions. Ce résultat rejoint les constats faits par Claveranne
JP, Pascal C et Piovesan. D24 dans les hôpitaux Français et ceux de Mordelet (2006)3 dans
les hôpitaux de l’OCDE. La multiplicité des acteurs institutionnels intervenants dans le
processus de décision dans les hôpitaux publics rend aussi difficilement mesurable le
principe de responsabilité et la dissout entre les méandres des organigrammes. Cette
logique centraliste va aussi à l’encontre des objectifs de la décentralisation et de la
politique de proximité prônée par les organes de l’Etat.
Le faible degré de contrôle qu’exercent les décideurs au niveau du CHR-SMD sur
les ressources qui leurs sont affectées est aussi constat de cette étude. Cette perte de
décision sur l’utilisation des ressources peut être expliquée par l’existence, au sein du
CHR-SMD, d’autres forces formelles et surtout informelles qui interviennent dans le
processus de décision et qui font que les décisions prises aboutissent rarement. Nous
rejoignons donc le sous-système collectif de représentations et d’interprétations et le sous-
système de gouverne de Contandriopoulos et son équipe et la matérialité et les structures
informelles profondes existantes au niveau de chaque organisation de Crozier et Freidberg.
L’existence de cette situation de faible contrôle sur les ressources est donc normale au sein
du CHR-SMD. Ceci peut être dû à une insuffisance en formation des managers, et aussi
des autres acteurs, en matière de la réglementation et des jeux de pouvoirs dans les
organisations complexes, tel le CHR-SMD. L’absence de module droit en général et des
sous-modules ayant attrait à la gouvernance au niveau de l’INAS et dans d’autres
établissements de formation des professionnels de santé est un argument en faveur de cette
explication.
L’identification empirique des acteurs, de leurs rôles et des mécanismes de leur
implication qui rentrent en jeu dans le processus de décision au sein du CHR-SMD est le
troisième résultat de cette étude. La multiplicité des acteurs, la variété de leurs rôles et de
leurs mécanismes d’implication font de la prise de décision au sein du CHR-SMD une
29
fonction assez délicate et périlleuse. Ce constat rejoint celui de Mintzberg2, Yahyaoui15 et
Froui16. En effet dans un contexte de la démocratie citoyenne et participative consacrée par
notre constitution (article 1 et 12 de la constitution de 2011), nombreux acteurs se
positionnent comme partie prenante des décisions publiques. Les associations de la société
civile revendiquent clairement leur droit à l’élaboration, la mise en application et
l’évaluation des décisions publiques. Les syndicats des professionnels ne se contentent plus
du simple observateur de la scène publique. Ils veulent passer à l’action et participer
activement à l’élaboration et la mise en œuvre des décisions qui intéressent les
professionnels. A ce propos, malgré que le RIH a institutionnalisé la gestion des relations
avec les syndicats (article 2 du RIH), le directeur de l’hôpital ne dispose d’aucune
procédure à cet effet. Le travail fait individuellement par le directeur avec les différents
bureaux syndicaux relève de ces propres compétences et récolte, d’une façon
personnalisée, les résultats de son approche. C’est pour cette raison que les instances
syndicales revendiquent un programme de réunions structurées et veulent participer à la
prise de décision. Le CMDP revendique plus de représentativité au niveau stratégique de la
décision hospitalière et oppose donc à la bureaucratie administrative son pouvoir de
bureaucratie professionnelle à l’intérieur du CHR-SMD. Il est peut être temps de tirer des
enseignements riches sur les expériences réussies dans d’autres cieux et ouvrir les hôpitaux
publics marocains aux représentants d’autres acteurs externes au ministère de la santé.
Comme exemple à étudier, nous pensons au Fondation Trust en Angleterre, au Public
Company de la Suède ou aux expériences Espagnoles (Empresa Publica, Fundacion
Privada)3.
Par rapport à la répartition des pouvoirs de décision entre les instances
institutionnalisées par le RIH, force est de constater, de part leurs compositions et leurs
attributions, que le CE, le CG et le CMDP cumulent plus de pouvoir par rapport aux autres
instances. Cette distribution éclate le schéma de prise de décision et oblige les trois
instances à coordonner leur action en vue d’arriver à un consensus. Dans le cas contraire,
c’est un divorce qui s’annonce et qui engouffre l’hôpital dans des luttes interstitielles sous
des formes variées et qui n’ont rien à voir avec les missions de l’hôpital et des
professionnels de santé. L’étude de cette dimension a révélé aussi que les quasis majorité
des membres des instances sont nommés de droit par le législateur. Le CMDP et le CII font
exception avec une différence significative entre la méthode de constitution du premier par
rapport au deuxième.
30
Un autre résultat nous semble important. Il s’agit de l’exclusion du directeur régional de la
santé dans les instances. Nous pensons que c’est juste un oubli et que la présidence du CG
du CHR-SMD lui revient de fait dans un souci d’harmoniser entre les niveaux de soins et
de prévenir les incidents graves comme ceux survenus au CHP Edderak de Zagora et au
CHP Hassan premier de Tiznit au mois de Mai 2013 (2 décès maternels à cause de la non-
disponibilité des gynéco-obstétriciens).
Les médecins et infirmiers chefs des départements et services ne sont représentés dans
aucune des instances. Cette lacune peut avoir des conséquences négatives sur la qualité de
la décision prise du fait que ces acteurs peuvent sentir qu’ils ne sont concernés par cette
dernière. L’avènement, très prochainement, de la contractualisation interne au sein des
hôpitaux, peut être en faveur de l’institutionnalisation d’une instance regroupant les dits
acteurs ; d’autant plus, qu’ils se considèrent comme la raison d’être de l’hôpital ?
Les syndicats, les ASC ne sont nullement représentés dans aucune instance. Ce
positionnement entrave le principe de la démocratie participative et empêche l’ouverture
de l’administration de l’hôpital sur les acteurs internes et externes. Nous pensons aussi
qu’il est préférable d’octroyer, dans un premier pas, un statut d’observateurs aux acteurs
non institutionnels dans les différentes instances.
En ce qui concerne le positionnement des acteurs par rapport aux décisions, notre
étude a révélé que ce pouvoir est plus concentré et orienté vers les acteurs institutionnels
internes au CHR-SMD. Pour ceux de l’extérieur, le délégué du ministère de la santé
cumule un pouvoir important. Aussi, les décisions stratégiques sont l’apanage du directeur
du CHR-SMD et de l’administration de l’hôpital, mise à part le PAM. Cette situation
s’explique par l’hégémonie de la réglementation qui régie l’hôpital et ne laisse qu’une
faible marge aux manœuvres externes. Aussi, ce type de pouvoir est rencontré dans les
structures anciennes, ou les rôles de chacun sont déterminés par son histoire dans
l’organisation. C’est le cas notamment du PSI et du PAA qui ont cumulé un savoir le long
des années qu’ils ont vécu dans cette arène.
Les perspectives sur lesquelles s’ouvre cette étude peuvent être de quatre
catégories. Ces perspectives obéissent aux critères de la simplicité et de la faisabilité
d’application. En proposant ces recommandations, nous croyons aussi fermement que la
réussite du changement souhaité passe aussi par le partage des dites perspectives avec les
acteurs du ministère de la santé soit à l’échelle locale, régionale et nationale.
31
Perspectives réglementaires :
N’étant pas des juristes et à l’issu des résultats obtenus et de la discussion faite,
nous recommandons d’améliorer le règlement intérieur des hôpitaux en :
• Institutionnalisant la présidence du directeur régional de la santé sur le comité de
gestion ;
• Intégrant les médecins et les infirmiers chefs aux départements et services
hospitaliers dans le comité d’établissement ;
• Ouvrant la voie aux représentants des citoyens comme observateurs dans une
première étape.
Perspectives managerielles :
L’actuel RIH est élaboré dans une logique participative en essayant d’intégrer
toutes les forces et les cultures existantes au sein de l’hôpital public marocain. C’est pour
cette raison, que nous recommandons de:
• redynamiser les instances d’appui et de concertation dans leur délai et tenir à ce que
les décisions prises soient respectées et appliquées par tout un chacun;
• structurer les négociations avec les syndicats selon un planning annuel préétabli et
les impliquer dans tous les projets concernant l’hôpital;
• communiquer clairement en interne et en externe en mettant à la disposition des
acteurs toutes les informations qui ne sont pas régies par une procédure
réglementaire.
Perspectives de formation :
Nul doute que la formation dans son aspect initiale ou continue est un véritable
vecteur de changement, c’est pour cette raison que nous recommandons d’:
• intégrer des modules d’enseignement théorique et pratique relatifs à la sociologie
des organisations au sein des institutions de formation des cadres médicaux,
infirmiers et administrateurs ;
• élaborer et mettre en œuvre un programme de formation continue au sein du CHR-
SMD ciblant les aspects du management des organisations, surtout pour les cadres
médicaux.
32
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15. Yahyaoui Y.de la crise d’un monde de gouvernance ; in gouvernance et nouvelle
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16. Froui Mohamed, la problématique de la gouvernance dans le management public : cas
de la Tunisie et du Maroc ; 2004.
17. Riadh Zghal. Du gouvernement à la gouvernance : nouveaux défis lancés à l’Etat ;
revue marocaine d’audit et de développement, n°19, 2004.
18. Belghiti Alaoui A. Principes généraux de la planification stratégique à l’hôpital,
DHSA, Ministère de la santé, Rabat, Maroc ; 2005.
19. OMS, Rapport sur la santé dans le monde : pour un système de santé plus performant.
Genéve, 2000.
20. Lhassane Bouziani. La santé au Maroc, entre le service public et la profession libérale,
REMALD, 9, 1999.
33
21. Wajih Maazouzi. Gouvernance sanitaire au Maroc ; in Gouvernance et nouvelle gestion
publique au Maroc, revue Marocaine d’Audit et de Développement, n°6, 2005.
22. Belghiti Alaoui A. analyse des systèmes de santé : le modèle des cinq soucis majeurs :
application au cas du Maroc ; 2002.
23. OMS, document technique : Améliorer la performance des hôpitaux dans la région de
la méditerranée orientale, 2009.
24. Claveranne JP, Pascal C et Piovesan D. la gouvernance hospitalière à la croisée des
chemins ; in : traité d’économie et de gestion de la santé ; 2009.
25. Décret n° 2-94-285 du 17 joumada Il 1415 (21 novembre 1994) relatif aux attributions
et à l'organisation du ministère de la santé publique B.O N° 4286 - 18 rejeb 1415 (21-12-
94).
26. Arrêté du Ministère de la Santé n° 456-11 du 2 Rajeb 1431 (6 juillet 2010) portant
règlement Intérieur des Hôpitaux ; publié au Bulletin Officiel N° 5926 du 12 rabii II 1432
(17 Mars 2011).
27. Arrêté du ministre de la santé n° 13.1440 relatif à la délégation de signature du 2
Joumada I 1434 (2 Avril 2013), BO n° 6155 du 16 Rajab 1434 (27 Mai 2013).
28. Dahir n° 1-97-84 du 23 Kaada 1417 (2 Avril 1997) portant promulgation de la loi n°47-
96 relative à l’organisation de la région, BO n° 4470 du 24 Kaada 1417 (3 Avril 1997).
29. GTZ et col. Guide opérationnel d’analyse de la gouvernance dans une institution de
micro finance, CERISE-IRAM, 2005.
30. Contandriopoulos, A. P., Champagne, F., Denis, J. L., & Avargues, M. C. L’évaluation
dans le secteur de la santé: un cadre conceptuel, Revue d’épidémiologie et de Sante
Publique, vol. 48, no. 6, 2000.
31. Arrêté du ministère de la santé n° 719.08, fixant la liste des hôpitaux relevant du
ministère de la santé, BO n°5627 du 28 Rabiaa II, 5 Mai 2008.
32. Ministère de la santé, santé en chiffre 2011, édition 2012.
33. Dahir n° 1-98-138 du 7 chaabane 1419 portant promulgation de la loi organique n° 7-
98 relative à la loi de finances, B.O. 3 décembre 1998.
34. Arrêté du ministère des finances n° 6-87 du 14 Mai 1987 fixant l’organisation des
SEGMA relevant du ministère de la santé publique en matière financière et comptable.
35. Décret n° 2-03-04 du 2 juin 2003 modifiant et complétant le Décret n° 2-78-539 du 22
novembre 1978 relatif aux attributions et à l'organisation du Ministère des Finances.
34
36. Arrêté de la ministre de la santé n°1363-11 du 12 Joumada II 1432 (16 Mai 2011)
relatif aux attributions et à l’organisation des services déconcentrés du ministère de la
santé, BO n°5958 du 5 Chaabane 1432 (7.7.2011).
37. Circulaire du premier ministre n°7/2003, relative au partenariat entre l’Etat et les
associations, du 27 Juin 2003.
35
Annexes
Annexe 1
Les différentes décisions en santé et leurs champs d’action
Type de décision Champs d’action
Les décisions individuelles - Sociologie du colloque singulier ;
- Socioculturel des comportements en santé.
Les décisions de politique de santé
- Réglementation internationale (règlement
sanitaire international,…) ;
- Couverture médicale de base (AMO,
RAMED,…) ;
- Loi 34-09 (SROS,…).
Les décisions d’action sanitaire
- Incitative (en amont de l’intervention de police) ;
- Normative (normes techniques, référentiels,
recommandations,…) ;
- Impérative (obligations d’actions sanitaires,…) ;
- Injonctive (hospitalisation d’office,…).
Les décisions de régulation du système de santé
- Maitrise de l’activité (numerus clausus,
tarification des actes,…) ;
- Remboursement (taux et conditions de
remboursement des produits et prestations,…).
Les décisions « micro-sanitaires »
- Organisation (création des pôles, recrutement,
partenariat,…) ;
- Exploitation (exercice budgétaire,…) ;
- Promotion (débat public, publicité,…).
Les décisions à externalités sanitaires
- Décisions publiques à portée sanitaire (protection
de l’environnement, logement, code de la
route,…) ;
- Décisions industrielles ou économiques à
incidence sur la santé (implantation d’usine,
emplois à risques professionnels, diffusion de
produits à risques,…).
36
Annexe 2
Les types de décisions et leurs champs d’action selon trois critères
Critères Type de décision Champs d’action
La durée
stratégique toute l’organisation
Tactique une fonction de l’organisation
Opérationnelle un poste, une opération
Degré de répétition
Programmée plan d’action de l’organisation
Non programmée Les imprévus
Contexte du choix
Délibérée Réalisation des objectifs de
l’organisation
émergente Imposée par l’environnement
37
Annexe 3
Le modèle d’analyse de la gouvernance hospitalière adopté dans cette étude est
celui proposé par l’agence allemande de coopération technique GTZ et ses partenaires dans
l’analyse de la gouvernance d’une institution de micro finance. Ce choix a été dicté pour
plusieurs raisons : (1) il aborde la gouvernance de point de vu pouvoir décisionnel, qui est
notre cheval de bataille dans cette étude, (2) le modèle a une structure logique simple et
présente donc un intérêt méthodologique important pour aborder une question complexe à
partir d’un procédé simple et (3) ces auteurs ont clairement autorisé l’utilisation du modèle
pour l’analyse de la gouvernance au sein des autres institutions publiques ou privées ; c’est
donc un cadre global. Son utilisation passera obligatoirement par des adaptations au
contexte de l’hôpital. Notre modèle est structuré en trois parties :
1. La première concerne la forme juridique de l’hôpital en décrivant son statut à
travers les textes réglementaires le régissant et la propriété des ressources à travers la
détermination du degré de contrôles qu’ont les responsables du CHR-SMD sur les
ressources qu’ils sont censés maitrisés.
2. La deuxième partie concerne les acteurs en jeu dans le CHR-SMD : qui sont-ils ?
quel est leur positionnement par rapport aux instances de prise de décision ? et leur
positionnement par rapport aux décisions stratégiques et opérationnelles.
3. La troisième partie est réservée à un diagnostic des caractéristiques générales du
pouvoir de décision selon une typologie bien définie.
Gouvernance hospitalière
Forme juridique de l’hôpital:
- statut du CHR-SMD- propriété des ressources
Acteurs en jeu:- acteurs internes et externes- acteurs / instances- acteurs / décisions
Type de pouvoir:- centré / réparti- extérieur / intérieur- salarié / élu- confus / claire
38
Annexe 4
Grille d’analyse des ressources de l’hôpital, leurs origines et le degré de contrôle
exercer sur chaque ressource, destinée aux directeurs, chefs des pôles, chefs des
départements
Ressources
Origine
* Degré de
contrôle sur les
ressources du
ministère de la
santé
Origine
* Degré de contrôle
sur les ressources
hors ministère de
la santé
Ministère
de la santé
Impo
rtan
t
Moy
en
Fai
ble
Autres
(précise
r la
source) Impo
rtan
t
Moy
en
Fai
ble
Ressources
humaines
Ressources
matérielles
Ressources
financières
* Le degré de contrôle d’une ressource est estimé en mettant une croix sur l’une
des cases : Important, Moyen ou Faible, que vous juger réelle. Le nombre de
croix dans une case est égale au nombre d’acteurs ayant rempli cette grille.
39
Annexe 5
Grille d’analyse des acteurs, leurs rôles et leurs mécanismes d’implication dans le
processus de décision
Acteur clé
Rôle attendu
Mécanisme
d’implication
40
Annexe 6
Grille d’analyse de la prise de décision, destinée aux acteurs
Décisions Acteurs
Décisions stratégiques
Choix de la vision et des
missions du CHR ;
Fixation des objectifs à long
terme ;
Planification financière ;
Amélioration de la performance du CHR-SMD
Décision opérationnelles
Gestion du personnel ;
Gestion du matériel ;
Supervision des activités ;
Résolution des conflits
0
Annexe 7
Liens décisionnels entre le directeur et les différentes instances internes du CHR-SMD
Directeur CHR-SMD
PAM PSIPAA
CE
CSE
CMDPCII
Départements et services
CLIN
CG
Ph H
SAA
syndicats
: : lien fonctionnel, : lien hiérarchique
1
Annexe 8
Récapitulatif des résultats de contrôle qu’ont les décideurs du CHR-SMD sur les
ressources mises à leurs dispositions.
Ressources
Origine
* Degré de contrôle
sur les ressources
du ministère de
la santé
Origine
* Degré de
contrôle sur les
ressources hors
ministère de la
santé
Ministère
de la santé
Important Moyen Faible Autres
(préciser la
source)
Important Moyen Faible
Ressources
humaines XX
XXX
XXX
XXX
X
XXXXX
XXX
XXX
X
Ressources
matérielles
XXX
XXX
XXX
XXX
XXXX
XXX
XXX
X
X
Ressources
financières
XX
XXX
XXX
XXX
X
X
XXX
XXX
XXX
XX
2
Annexe 9
Perception du rôle des acteurs intervenants dans l’hôpital et de leurs mécanismes
d’implication
Acteur clé
Rôle perçu
Mécanisme d’implication
Conseil régional - Mise en application des conventions arrêtées ; - plaidoyer pour d’autres ressources.
- contrat de performance ; - réunion trimestrielle.
Délégation du MS - coordination ; - supervision ; - suivi et évaluation ; - facilitation
- réunion mensuelle ; - pilotage de la mise en application
Syndicats (CDT-UGTM-UMT) - plaidoyer pour le changement - réunions structurées et programmées ; - participation effective au processus de prise de décision;
ASC (association des amies de l’hôpital, ESTER, Tazanine, Ziara, association de la protection des consommateurs)
- mobilisation des ressources ; - communication externe
- réunion annuelle ; - implication dans les projets hospitaliers. - participation à la prise de décision.
Chefs des départements et services hospitaliers
- mise en œuvre des décisions prises ; - partenaire interne.
- réunion mensuelle programmée ; - représentation effective au niveau des instances décisionnelles.
Médias - information du public ;
- accès à l’information ; - couverture des événements.
Directeur du CHR-SMD Directeur du CRO Médecin responsable du CDP
- décision et implantation des changements - autonomie sur le contrôle des ressources
Les pôles de gestion - opérationnalisation des décisions ; - coordination, suivi et évaluation des décisions mises en œuvre.
- réunions de coordination ; - accompagnement des équipes opérationnelles.
CMDP - partenaire interne ; - plaidoyer pour l’acceptation des décisions ;
- institutionnalisation d’une position stratégique au sein de la direction.
CII - partenaire interne ; - information des pairs ; - plaidoyer pour l’acceptation des décisions.
- réunion d’information des pairs ; - élargissement des attributions.
3
Annexe 10
Grille de participation des acteurs internes dans la prise de décision
décisions
Acteurs internes
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
DS
DS1 xxx x x x xxx xx x x x x
DS2 xxx x x x xxx xx x x x x
DS3 xx x x x x xx x x x x
DS4 xxx x xx x xxx xxx x x x xx
DO
DO1 xxx xxx xxx xx xxx xx x x x xx
DO2 xxx xx x xx xxx x x x x xx
DO3 xxx xx x x xxx xx x x x xx
DO4 xxx xxx xx xxx xxx xx x x xxx xxx
1 : directeur CHR-SMD, 2 : directeur CRO, 3 : médecin chef du CDP, 4 : chef du PAM,
5 : chef du PSI, 6 : chef du PAA, 7 : CMDP, 8 : CII, 9 : syndicats, 10 : chefs de
départements.
4
Annexe 11
Grille de participation des acteurs externes dans la prise de décision.
décisions
Acteurs externes
11 12 13 14
DS
DS1 xxx x x x
DS2 xxx x xx x
DS3 x x x x
DS4 xxx x xx x
DO
DO1 x x x x
DO2 x x xx x
DO3 xx x xx x
DO4 xx x x x
11 : délégué, 12 : conseil régional, 13 : association des amis de l’hôpital, 14 :
association de la protection des consommateurs.