38
Efficacité de l'usage des TIC en enseignement et formation: Quelques résultats…beaucoup de questions Coordonnateur : Jean Ravestein UMR P3ADEF Discutant : Alain Mercier UMR P3 ADEF Les ingénieries didactiques utilisant les TIC ont rapidement évolué mais toujours en fonction, d’une part de la puissance, et, d’autre part, des possibilités sans cesse grandissantes des moyens de communication entre machines plutôt qu’en réflexion théorique sur ce qui changeait dans le rapport au savoir et à l’étude via les artefacts. La théorisation didactique tente aujourd’hui d’adapter ses propres modèles (système-temps- contrat) aux nouvelles situations d’apprentissage que génèrent l’usage des ordinateurs vus par les institutions éducatives comme « objets incontournables du milieu didactique », le e- learning constituant un exemple emblématique de cette problématique. Qu’en est-il de l’efficacité des dispositifs utilisant des machines ? C’est l’axe principal de réflexion de ce symposium. Les injonctions ministérielles avec la mise en place des B2i et C2i instituent les machines comme outils nécessaires aux apprentissages, mais aussi leur usage comme objet d’étude en tant que tel, dans une certaine ambigüité. A quelle aulne mesurer l’efficacité de ces outils et leur usage ? La mise en ligne permanente et architecturée des corpus de l’enseignement à partir d’un serveur constitue un premier pas vers la dévolution du temps de l’étude à l’apprenant. Un autre pas est aujourd’hui franchi par les plates-formes lorsque le système est « ouvert », c’est-à-dire qu’il accepte de se dégrader (Blogs et Wikis) ou de s’enrichir tout en maintenant clos le moteur qui structure ses liens. C’est une autre dévolution, celle des savoirs que l’on partage, ce qui génère de la coopération. Ainsi, la permanence et l’ouverture du système didactique redéfinissent en théorie la gestion du temps didactique institutionnel qui pourrait devenir plus synchrone avec le temps d’apprentissage de chaque étudiant puisque le choix des moments et des durées d’accès aux objets de savoir sont davantage « libres ». Le contrat didactique où habituellement l’assujettissement est lent, progressif, et correspond à des gestes professionnels particuliers de la part des enseignants serait-il donc un contrat significativement original dès qu’on utilise des dispositifs nouveaux utilisant des machines ?

Efficacité de l'usage des TIC en enseignement et … · 2014-04-01 · contrat) aux nouvelles ... Le contrat didactique où habituellement l’assujettissement est lent, progressif,

Embed Size (px)

Citation preview

Efficacité de l'usage des TIC en enseignement et formation: Quelques

résultats…beaucoup de questions

Coordonnateur : Jean Ravestein UMR P3ADEF

Discutant : Alain Mercier UMR P3 ADEF

Les ingénieries didactiques utilisant les TIC ont rapidement évolué mais toujours en fonction, d’une part de la puissance, et, d’autre part, des possibilités sans cesse grandissantes des moyens de communication entre machines plutôt qu’en réflexion théorique sur ce qui changeait dans le rapport au savoir et à l’étude via les artefacts. La théorisation didactique tente aujourd’hui d’adapter ses propres modèles (système-temps-contrat) aux nouvelles situations d’apprentissage que génèrent l’usage des ordinateurs vus par les institutions éducatives comme « objets incontournables du milieu didactique », le e-learning constituant un exemple emblématique de cette problématique. Qu’en est-il de l’efficacité des dispositifs utilisant des machines ? C’est l’axe principal de réflexion de ce symposium. Les injonctions ministérielles avec la mise en place des B2i et C2i instituent les machines comme outils nécessaires aux apprentissages, mais aussi leur usage comme objet d’étude en tant que tel, dans une certaine ambigüité. A quelle aulne mesurer l’efficacité de ces outils et leur usage ? La mise en ligne permanente et architecturée des corpus de l’enseignement à partir d’un serveur constitue un premier pas vers la dévolution du temps de l’étude à l’apprenant. Un autre pas est aujourd’hui franchi par les plates-formes lorsque le système est « ouvert », c’est-à-dire qu’il accepte de se dégrader (Blogs et Wikis) ou de s’enrichir tout en maintenant clos le moteur qui structure ses liens. C’est une autre dévolution, celle des savoirs que l’on partage, ce qui génère de la coopération. Ainsi, la permanence et l’ouverture du système didactique redéfinissent en théorie la gestion du temps didactique institutionnel qui pourrait devenir plus synchrone avec le temps d’apprentissage de chaque étudiant puisque le choix des moments et des durées d’accès aux objets de savoir sont davantage « libres ». Le contrat didactique où habituellement l’assujettissement est lent, progressif, et correspond à des gestes professionnels particuliers de la part des enseignants serait-il donc un contrat significativement original dès qu’on utilise des dispositifs nouveaux utilisant des machines ?

On peut en faire l’hypothèse car les métarègles, ordinairement tacites du contrat, sont ici à expliciter car elles n’ont pas été naturalisées par une longue fréquentation de tels dispositifs. Une facette du rôle du professeur est bien de gérer l’attente tacite des apprenants, l’enseignant est capable de déployer un programme, il entretient ainsi la motivation par une espèce de suspense, comme dans un récit, en fait, il gère une intrigue. Avec l’usage des machines et particulièrement en e-learning, une bonne part des fils de l’intrigue doit être construite par l’étudiant (que l’on suppose « autonome »), et tous n’en sont pas forcément capables (au plan psychologique, culturel et didactique) ce qui pose la problématique de l’équité dans la formation aux usages des TIC que certains politiques ont repris sous l’appellation « fracture numérique ». Une autre question découle de cette problématique de « fracture » : dans quelle mesure assiste-t-on à un affaiblissement de la dissymétrie professeur/étudiant, jusqu’alors en faveur du professeur, dans leurs rapports aux objets présents dans le milieu quand il s’agit de machines (savoirs et outils) et comment gérer la reconnaissance réciproque de la légitimité des savoirs avec l’utilisation de ressources extérieures au milieu (Internet), pour établir ce « système commun de signification » nécessaire au fonctionnement de tout contrat didactique ? La perméabilité du système didactique aux objets de savoirs qui ne sont pas produits par l’institution, savoirs informels, d’origine peu labellisée, selon des modes d’accès sans filtrage ni censure et qui n’ont pas subi de transposition, semble largement augmentée dès qu’on utilise l’Internet ou des dispositifs innovants comme le portfolio. Habituellement, les institutions disposent des repères, définissent des territoires et des règles du fonctionnement des jeux de communication dans ces territoires, elles sont des machines à créer du sens à l’action du sujet pour le sujet lui-même. Une questions essentielle nous est renvoyée ici : comment recréer de l’institution (didactique) lorsqu’on étudie, apprend, enseigne, en utilisant les TIC ?

Notre symposium reprendra ces questions en les illustrant par des recherches empiriques qui jalonneront nos réflexions théoriques qui aboutirons, nous l’espérons, à (re)poser de bonnes questions de recherches.

Colloque international « Efficacité & Équité en Éducation »

Symposium « Éthique et usage des TICE en éducation »

VALEUR ET EFFICACITE DE L ’ INTEGRATION DES TICE DANS L ’ENSEIGNEMENT

Teresa Assude & Catherine Loisy

UMR ADEF, Université de Provence & CREAD IUFM de Bretagne

Le socle commun des connaissances et des compétences apparaît comme l’ensemble minimum de connaissances et de compétences que les élèves doivent acquérir et partager en France, d’où le fait qu’il est présenté comme « le ciment de la nation ». De ce point de vue, ce socle est un cadre de référence qui est censé définir un espace équitable bâti à partir de sept piliers. L’un de ces piliers est la « maîtrise des techniques usuelles de l’information et de la communication » et nous pouvons lire que :

« La culture numérique implique l’usage sûr et critique des techniques de la

société de l’information. Il s’agit de l’informatique, du multimédia et de

l’internet, qui désormais irriguent tous les domaines économiques et sociaux.

Ces techniques font souvent l’objet d’un apprentissage empirique hors de l’école. Il appartient néanmoins à celle-ci de faire acquérir à chaque élève un ensemble de compétences lui permettant de les utiliser de façon réfléchie et plus efficace. »

De quelle efficacité s’agit-il ? Dans cette contribution, nous voulons aborder le problème de l’efficacité des technologies numériques dans l’enseignement à partir de la notion de « valeur ». Dans un première temps, nous aborderons cette notion de « valeur » en identifiant plusieurs types et en définissant un « modèle » qui nous permettra de parler d’efficacité en ce qui concerne l’intégration des technologies numériques dans l’enseignement et la formation. Nous présenterons ce modèle à partir de certains résultats d’un travail de recherche sur les usages des calculatrices à l’école primaire fait dans le cadre du projet GUPTEN (Genèses d’usages professionnels des technologies par des enseignants). Dans un deuxième temps, nous montrerons la pertinence de ce modèle en prenant un autre exemple de recherche de ce même projet concernant la mise en place de l’expérimentation du C2I2e (Certificat Informatique et Internet, niveau 2 enseignant) dans la formation des maîtres à l’IUFM.

1 – Changements, résistances et efficacité

Un certain nombre de travaux ont constaté qu’il existe un écart important entre la volonté politique et institutionnelle d’intégrer les technologies numériques à l’école et les pratiques effectives en classe. Nous nous sommes aussi intéressées à ce problème des difficultés d’intégration des technologies numériques. Dans le cadre du projet GUPTEN (Genèses d’usages professionnels des technologies par les enseignants), nous avons pris un cas particulier de technologies numériques : les calculatrices à l’école primaire. Ce choix était dicté par le paradoxe suivant : les calculatrices existent dans le curriculum officiel depuis vingt ans mais leur intégration dans les classes est encore minime. Pourtant, l’accès matériel, le coût et la prise en main de l’outil n’apparaissent pas comme des arguments empêchant les acteurs de développer leurs usages des calculatrices, nous pouvons donc considérer que ce n'est pas là que réside le problème. Pourquoi cette difficulté à intégrer dans les classes un outil technologique qui est très accessible du point de vue des conditions matérielles ? Du point de vue de l’institution, nous pouvons parler d’inefficacité pratique des injonctions officielles dans les pratiques de classe mais nous voulons savoir, du point de vue des acteurs, quelles étaient leurs rhétoriques à ce propos. Nos questions de recherche étaient :

- quels sont les discours des enseignants à propos de l’utilisation des calculatrices à l’école primaire ? Comment peut-on identifier des types de résistances à partir des différentes rhétoriques mises en avant dans ces discours ?

- quelles sont les pratiques évoquées par les stagiaires comme étant susceptibles d’être mises en œuvre dans leurs classes ?

- quels rapports entre ces discours et pratiques et la formation qui était dispensée à l’IUFM ? Comment les formateurs s’appuient-ils sur ces discours pour faire évoluer le rapport des enseignants aux technologies ?

Dans le cadre du projet GUPTEN, nous avons décidé de travailler avec des professeurs stagiaires du premier degré (PE2) et des professeurs d’école titulaires première année (T1) de l’académie d’Aix-Marseille. Pour aborder le problème du discours et des pratiques évoquées, nous avons élaboré un questionnaire avec des questions fermées et des questions ouvertes que nous ne présenterons pas ici. Nous avons passé ce questionnaire à 118 PE2 pendant l’année 2005/2006, à 104 PE2 et 27 T1 pendant 2006/2007.

Cette population de PE2, est convaincue de l’importance d’utiliser les calculatrices à l’école primaire (87% disent oui en 2005/2006, 81% en 2006/2007) mais il existe toutefois certains PE2 qui affirment que ce serait mieux d’introduire cet outil au collège (4% en 2005/2006, 17% en 2006/2007). Si cette importance est « acquise » (au moins dans le discours) il demeure toutefois un certain nombre d’eux qui considèrent que la calculatrice est un obstacle pour que l’élève apprenne à calculer (14% en 2005/2006, 25% en 2006/2007) et que la calculatrice est un bon moyen de calcul dans la vie de tous les jours mais pas à l’école (15% en 2005/2006, 17% en 2006/2007). Ce pourcentage est encore plus important pour opposer calcul mental et calcul instrumenté car 35% en 2005/2006, 54% en 2006/2007 affirment que cet outil est un obstacle au calcul mental. Pour 94% en 2005/2006, 67% en 2006/2007 d’entre eux, il ne faut pas utiliser la calculatrice à l’école de la même manière qu’on l’utilise dans la vie et 65% en 2005/2006, 50% en 2006/2007 considèrent qu’il ne faut pas utiliser une calculatrice durant l’apprentissage initial des techniques opératoires. Même si ces stagiaires pensent que les élèves apprennent à se servir de cet outil en dehors de l’école (47% en 2005/2006, 44% en 2006/2007), ils affirment que les enseignants doivent apprendre aux élèves à se servir d’une calculatrice (97% en 2005/2006, 96% en 2006/2007).

Presque 90% en 2005/2006 et 87% en 2006/2007 des stagiaires affirment qu’ils pensent utiliser la calculatrice dans leur pratique professionnelle. Nous ne savons pas ce qu’il en sera réellement mais il semble que les conditions existent pour générer des usages professionnels.

Nous avons mis en évidence une dialectique entre les changements et les résistances en ce qui concerne l’intégration des calculatrices à l’école primaire (Assude 2007). Les résistances ne sont pas forcément négatives et elles font partie des variables qu’on doit prendre en compte. Comme toute force appelle une réaction formant ainsi un système, de même tout changement induit une résistance formant ainsi un système qui permet de modéliser certaines des difficultés observées pour l’intégration. Nous avons identifié un certain nombre de résistances : des résistances personnelles et institutionnelles mais aussi des résistances symboliques, didactiques ou éthiques. Par exemple, en ce qui concerne les résistances symboliques nous avons évoqué les résistances liées aux rituels. Deux rituels apparaissent comme emblématiques des pratiques mathématiques à l’école primaire : le rituel des tables de multiplication et le rituel des techniques opératoires. Faire des mathématiques apparaît souvent, pour les parents et même pour certains enseignants, comme apprendre par cœur les tables de multiplication (le même phénomène ne se vérifie pas forcément par rapport aux tables d’addition) et apprendre les techniques opératoires. Or l’intégration des calculettes pour certains acteurs (parents ou enseignants) apparaît comme allant contre ces rituels.

Ces résultats apparaissent aussi dans le travail de Bruillard (1993) qui montrait déjà certaines des résistances personnelles des enseignants aux usages des calculatrices en

avançant des arguments du type : les calculettes empêchent les élèves d’apprendre à calculer ou d’apprendre à réfléchir. Un autre travail qui met aussi en évidence un certain nombre de résistances dans les usages des calculettes dans l’enseignement spécialisé est celui de Favre et Christinat (2007). Ces auteurs catégorisent les résistances évoquées par les enseignants de la manière suivante :

- celles qui concernent les gestes professionnels à accomplir en classe (par exemple « je n’ai pas eu de formation à l’usage de la calculette en classe et je ne sais pas quelles activités proposer aux élèves ») ;

- celles liées à l’outil lui-même (« La calculette rend les élèves passifs, dépendants. C’est comme les jeux vidéos. ») ;

- celles liées au savoir calculer des élèves (« Il faut que l’élève maîtrise les quatre opérations élémentaires avant de pouvoir utiliser la calculette », ou « Il faut que l’élève maîtrise le calcul mental avant de pouvoir utiliser la calculette ») ;

- celles liées à l’usage personnel de l’enseignant(e) (« J’ai fait toute ma scolarité jusqu’en 6ème sans calculette, ils peuvent le faire aussi. »

Ils mettent aussi en évidence d’autres types de résistances spécifiques à l’enseignement spécialisé, comme la difficulté de maniement de l’outil par des élèves handicapés ou le surcroît de travail.

Ces résistances, comme nous l’avons dit, ne sont pas forcément négatives mais dénotent une réaction au changement induit par l’introduction de ces technologies numériques. Le problème se pose alors : comment l’institution, à travers les pratiques des acteurs, peut devenir plus efficace dans l’intégration des technologies numériques ?

2 – Une ébauche de théorisation de la notion de « valeur »

Nous cherchons, à travers notre questionnaire, à identifier une rhétorique (des arguments pour ou contre) qui justifie l’usage ou non des calculatrices à l’école primaire. Ces justifications peuvent être vues comme des manières de théoriser les usages ou non usages des calculatrices. Un des arguments qui apparaît assez souvent dans les réponses aux questions ouvertes concerne la notion de valeur. Par exemple, un stagiaire affirme qu’il va utiliser la calculatrice dans sa pratique professionnelle à n’importe quel niveau de classe :

« Je pense qu’il est important d’utiliser la calculatrice à l’école primaire mais il faut bien choisir les situations dans lesquelles on l’utilise. On peut par exemple l’utiliser dans la résolution de problèmes pour alléger les calculs et permettre aux élèves de se centrer sur la procédure de résolution. »

Un autre affirme aussi :

« Faire que les élèves n’en deviennent pas dépendants mais qu’ils sachent l’utiliser à bon escient : comme outil de vérification ou comme aide pour aller plus vite (faciliter les calculs dans des problèmes avec beaucoup de nombres) ».

Ces exemples montrent que la valeur d’usage est vraiment importante ainsi que le fait d’envisager des situations d’enseignement et d’apprentissage où la calculatrice est mise en usage effectivement et efficacement. Pour le dire d’une manière empirique, ces arguments mettent l’accent sur ce qu’on gagne lorsqu’on utilise la calculatrice : est-ce que les élèves apprennent à calculer ? est-ce que les élèves apprennent à mieux calculer ? L’accent est donc mis sur une plus-value lors de l’usage des calculatrices. Voyons comment nous pouvons théoriser cette notion de valeur en prenant comme référence l’outil technologique « calculatrice » mais cela aurait pu être appliqué pour d’autres technologies numériques.

La valeur d’usage est un des facteurs importants dans les rhétoriques avancées. Nous entendons ici comme valeur d’usage des technologies numériques (sens économique du terme) comme la qualité de ces technologies fondée sur leur utilité. Ainsi la valeur d’usage des calculatrices à l’école primaire est sa qualité de calcul mais elle ne peut pas être fondée uniquement sur son utilité à calculer même si cela est essentiel. Cette seule utilité mise en avant se heurterait à des résistances liées à des oppositions entre différents moyens de calcul comme le calcul mental et le calcul posé. Par exemple, l’un des stagiaires donne comme argument pour utiliser la calculatrice « si l’objectif

est autre que de calculer (exemple chercher) ». Ainsi la valeur d’usage des calculatrice se fonde sur plusieurs types d’utilité : celle de calculer, celle de vérifier les résultats de calculs, celle de résoudre de problèmes, celle de travailler sur le système de numération. Donnons quelques exemples d’arguments pris dans les réponses au questionnaire : « vérifier ses résultats », « résolution de problèmes : pour que l’opération ne

soit pas un obstacle », « permettre de faire des problèmes difficiles ».

La valeur d’étude (en économie on parle de valeur travail) des technologies

numériques est la qualité de ce qu’elles permettent de produire pour l’étude d’une discipline scolaire (dans notre cas les mathématiques). Ainsi la valeur d’étude se fonde sur ce que la calculatrice permet de faire comprendre aux élèves : l’autonomie de l’élève dans l’étude par la possibilité d’autocorrection, la compréhension du sens des opérations, la compréhension du système de numération, l’aide à l’étude. Donnons encore quelques exemples : « soulager la surcharge cognitive liée à des calculs longs », « résoudre des problèmes sans connaître les techniques opératoires dans le but seul de comprendre le sens des opérations », « autocorrection », « palliatif aux calculs non maîtrisés ».

La valeur instrumentale des technologies est la qualité des facteurs qui permet leur

accès facilement (accès matériel mais aussi accès d’emploi). Cette valeur permet de dire que les élèves peuvent avoir facilement une calculatrice vu le prix modique de cet outil, et en plus l’accès à son emploi est aussi facile. Nous pourrions dire que la prise en main de l’outil se fait

facilement (les processus de genèse instrumentale ne sont pas très complexes). Nous n’avons pas beaucoup d’arguments qui vont dans ce sens, puisque comme nous l’avons déjà dit, notre choix pour les calculatrices à l’école primaire était fondé sur sa forte valeur instrumentale, accès matériel et prise en main faciles. Cet aspect ne se vérifie pas forcément en ce qui concerne d’autres types de calculatrices et pour d’autres niveaux d’enseignement (voir Trouche et Guin, 2002). Il y a toutefois des arguments qui mettent l’accent sur la rapidité des calculs fait avec la calculatrice ou sur le fait que les élèves doivent « savoir que ça existe et savoir l’utiliser ».

La valeur praxéologique des calculatrices est l’ensemble des praxéologies possibles

que l’on peut mettre en œuvre dans les classes. Cette valeur met en évidence qu’il est aisé de trouver des types de tâches à proposer en classe, que les techniques instrumentées par la calculatrice ont une existence institutionnelle et qu’il est possible de trouver des théorisations concernant ces praxis. Cette qualité concerne la viabilité de pouvoir mettre en œuvre des praxéologies instrumentées dans la classe. Par exemple, un stagiaire envisage de l’utiliser régulièrement dans les « calculs de moyennes (rituel météo en CM2 par exemple) ».

La valeur sémiotique et symbolique est la qualité des calculatrices fondée sur sa

dimension symbolique ou sémiotique. Ainsi les rituels normalement associés à ce que sont les mathématiques enseignées à l’école primaire peuvent évoluer en mettant en évidence la complémentarité des différentes moyens de calcul (par exemple). Dans une réponse au questionnaire, le stagiaire indique qu’il faut utiliser les calculatrices à partir de la sixième et indique : « à quoi cela peut bien leur servir dans la mesure où ils vont l’utiliser au collège ? ». Ou encore pour un autre : « Je l’utiliserai puisque mentionnée dans les programmes, mais sans doute très ponctuellement et uniquement pour des exercices dans lesquels je ne chercherai absolument pas à évaluer les connaissances en techniques opératoires ».

A partir de ces cinq valeurs, nous pourrions dire que la valeur ajoutée (V) d’une

calculatrice à l’école primaire est une fonction à cinq variables, avec S = valeur symbolique et sémiotique, I = valeur instrumentale, P = valeur praxéologique, E = valeur d’étude, U = valeur d’usage et R = Résistances :

V (S, I, P, E, U, R) = S * I * P * E * U* R de telle manière que les acteurs par une combinaison étroite de ces variables produisent une rhétorique qui va justifier leurs pratiques. Si les résistances sont trop fortes (ici au sens négatif), la valeur ajoutée va être négative et les acteurs vont justifier la non intégration des calculatrices en dévalorisant la valeur d’usage ou la valeur d’étude ne pouvant pas déprécier la valeur instrumentale. Nous sommes là dans les discours justificatifs des pratiques possibles et pas forcément dans les pratiques réelles. Ainsi nous pourrons faire l’hypothèse que l’efficacité potentielle de l’intégration des nouvelles technologies est liée à la valeur ajoutée telle que nous l’avons définie : plus cette valeur est positive plus cette intégration sera potentiellement efficace, au sens où elle produira les effets attendus par l’institution.

Dans notre cas des calculatrices, il existe des conditions favorables pour les usages de ces technologies : des conditions « matérielles » car les calculatrices sont des outils accessibles et disponibles, que les élèves peuvent avoir facilement : il y a un degré d’accessibilité matérielle qui est important (on n’a pas besoin de sortir de sa classe, etc.). Des conditions « utiles » qui permettent aux stagiaires d’attribuer une valeur d’usage ou d’étude à la calculatrice : ils attribuent une valeur à l’usage qu’on peut en faire, ce qu’on gagne en le faisant. Des conditions « praxéologiques » puisque ils ont une idée des emplois qu’on peut en

faire avec les élèves. Mais les résistances sont encore trop fortes dans l’institution elle-même et dans la société, comme nous avons pu le voir lors des débats sur l’enseignement des mathématiques à l’école primaire et vu l’évolution des programmes de l’enseignement primaire. Un exemple de ce recul est le fait suivant : il existe un document d’accompagnement sur les calculatrices qui montre bien les valeurs d’usage, d’étude et instrumentale des calculatrices. Or ce document, qui était une ressource importante en formation des maîtres et pour les enseignants, n’est plus disponible sur le site du Ministère de l’Education. En outre, dans les programmes de 2002, dans le cycle des apprentissages fondamentaux (cycle 2), il était fait explicitement référence au calcul instrumenté tandis que dans les nouveaux programmes, dans ce même cycle et dans la partie « Nombres et calcul », il n’y a pas de référence aux calculatrices mais, seulement sur le tableau des connaissances et compétences pour le CE1, il est écrit : « utiliser les fonctions de base de la calculatrice ». Cette notion de valeur, apparaît-elle dans d’autres contextes pour justifier de l’efficacité de l’intégration des nouvelles technologies dans l’enseignement ou la formation ? Nous voulons maintenant présenter un autre contexte pour voir si ce modèle est pertinent pour penser le problème de l’efficacité (au moins potentielle).

3 – Valeurs dans les discours des acteurs lors de l’expérimentation du C2I2e

L’autre contexte que nous allons présenter sans le développer (voir Assude et Loisy 2008) est celui de la phase d’expérimentation du C2i2e (Certificat Informatique et Internet de niveau 2, Enseignant). La recherche s'est intéressée aux effets de l’introduction du C2i2e sur la formation des stagiaires IUFM. Des questionnaires et des entretiens semi-directifs auprès des acteurs (formateurs ou acteurs institutionnels ayant affaire avec la mise en place de cette expérimentation) ont été faits (pour plus de détails voir Loisy, 2007). Nous allons utiliser certains des discours tenus dans ces entretiens qui corroborent l’importance de la notion de valeur.

La valeur d’usage des technologies revient souvent. Cette valeur, qui apparaît comme emblématique, est posée de cette manière par l’un des enquêtés : « Il faut que

chaque discipline s’empare de cette réflexion et se dise… voilà, en Français, en Histoire-Géo,

où est-ce qu’il y a un plus à utiliser l’informatique, ou l’audiovisuel numérique, ou la

recherche documentaire par rapport à ce qu’on faisait traditionnellement… ? Est-ce que ça

amène un plus d’utiliser un outil bureautique comme Excel ou comme Word, dans une classe

de Math ou dans une classe de Français ? »

Pour que les TICE s’intègrent, il faut convaincre l’enseignant de leur utilité « Si

on arrive à lui prouver que, à travers les TICE, on peut faire des choses qu’on ne pouvait pas

faire avant et qui amènent un réel gain d’apprentissage pour les élèves, on va gagner… les

profs réticents ». En conséquence, cela questionne la recherche sur les apprentissages : « Il s’agit de cerner les situations d’apprentissage d’élèves où l’emploi des TICE amène un

plus didactique au sens large ». « Bien sûr, il y a toujours la nécessité de maîtriser un

minimum de technique… mais surtout on doit s’attacher à ne pas s’en tenir à ce stade et à

toujours rattacher l’outil à une réflexion et à une action didactique et pédagogique : en quoi

tel ou tel logiciel ou site ou plate-forme permet-il une plus-value par rapport à d’autres

moyens comme le manuel ou un usuel papier ou un transparent… ? Et dans quelles

conditions et avec quels pré-requis ? »

La valeur praxéologique est aussi présente dans les discours de certains enquêtés. Par exemple par rapport aux sciences, il est dit que : « un logiciel de

simulation va apporter un plus dans la mesure où, nous n’avons, au lycée ou au collège, pas

la possibilité d’avoir le matériel pour faire des manipulations… avoir des logiciels qui

simulent des expériences faites dans des domaines non accessibles aux élèves peut amener

quelque chose que ne peut pas apporter le livre, le cahier, le rétroprojecteur classiques. » Ici, la qualité de la technologie est de pouvoir faire des simulations ce qui est très utile vues les conditions matérielles pour faire des expériences dans le lycée. On ne parle pas simplement de la valeur d’usage d’une technologie mais aussi de sa valeur praxéologique et de sa valeur d’étude, ce qu’elle permet de produire dans l’étude des sciences : « J’ai… une procédure qui consiste à faire prendre conscience que dans certaines

séances de TP, en particulier dans ma discipline, les TICE ont une importance, les TICE

amènent un plus que n’amènent pas… des outils plus ordinaires…»

La valeur d’étude apparaît aussi associée à la question du sens. Il ne s’agit pas cependant simplement d’utiliser des outils mais de les intégrer dans des situations didactiques dans lesquelles leur utilisation ait du sens, le plus important étant que les élèves apprennent « Je préfère quelqu’un qui s’intéresse à l’apprentissage mais n’utilise pas

l’ordinateur à quelqu’un qui met de l’informatique pour occuper les élèves sans se préoccuper

des apprentissages tout en ayant l’air de dire " voyez moi j’en fais" ». L’importance accordée au sens par les participants est conforme à ce qu’ont observé Mallein et Toussaint (1994) pour qui l’insertion sociale des technologies dépend moins des qualités techniques ou des performances de l’objet que des significations d'usage que les usagers projettent et construisent sur le dispositif technique.

Les valeurs instrumentale et symbolique sont moins citées par ces acteurs. Ils indiquent toutefois des résistances, par exemple des résistances personnelles de certains formateurs à s’investir dans la certification à cause d’un sentiment de manque de légitimité pour valider certains des items de ce certificat. Nous n’allons pas développer plus les arguments qui apparaissent dans les discours de ces acteurs mais nous allons discuter de ces données par rapport à la thématique de l’efficacité.

4 – Discussion

Il n’est pas facile de définir l’efficacité en éducation vue la complexité des facteurs qui

peuvent entrer en jeu ainsi que le point de vue qu’on peut prendre. Nous avons décidé d’aborder ce problème à partir d’un des piliers du socle commun des connaissances et des compétences qui est celui de la maîtrise des TIC. L’une des conditions pour que les élèves

puissent acquérir un ensemble de compétences à l’école qui permettent d’utiliser ces technologies numériques d’une manière plus réfléchie et efficace, est que ces technologies soient intégrées réellement dans les classes. Or cette condition n’est pas forcément vérifiée comme le montre un certain nombre de travaux de recherche, non seulement en France mais aussi au niveau international (Hoyles et Lagrange, 2008). Ainsi, il nous semble qu’il y a là une difficulté qui peut être vue comme une sorte d’inefficacité institutionnelle. Cette difficulté a été diagnostiquée et la mise en place d’un certain nombre de certifications pour les élèves ou étudiants mais aussi pour les enseignants est l’un des moyens pour essayer de changer cet état des choses.

Nous voulons discuter ici du lien entre efficacité potentielle et valeur de l’intégration des technologies numériques dans l’enseignement à travers la définition de différents types de valeur. En quoi l’efficacité potentielle d’une technologie peut-elle consister pour l’enseignement ? Une technologie numérique est potentiellement efficace pour l’enseignement et l’apprentissage si elle produit les effets attendus par l’institution, inefficace si elle n’a pas d’effet utile pour l’institution en question. Ainsi, cette définition nous renvoie aux attentes de l’institution qui sont précisées dans le B2i® et le C2i® mais ces attentes sont moins claires lorsqu’il s’agit de domaines disciplinaires comme les mathématiques. Ces attentes sont aussi assez « vagues » lorsqu’il s’agit de s’intéresser aux types de tâches et de techniques que les élèves doivent acquérir avec certains outils dans les disciplines scolaires (en particulier les mathématiques). Il y a une sorte d’injonction institutionnelle qui dit : « faites ce que vous voulez mais intégrez les technologies numériques ». Or l’intégration est un processus complexe et les ressources pour les enseignants sont essentielles pour que ceux-ci puissent savoir ce qu’ils peuvent faire avec ces technologies dans le domaine disciplinaire.

L’efficacité potentielle d’une certaine technologique dans le cadre de l’enseignement des disciplines implique la prise en compte d’un certain nombre de variables qui prennent des valeurs. Ce que nous avons appelé les différentes valeurs d’une technologie : valeur d’usage, valeur instrumentale, valeur d’étude, valeur praxéologique, valeur symbolique. L’efficacité potentielle sera alors définie comme une valeur ajoutée positive, telle que nous l’avons définie plus haut, de cette technologie dans l’enseignement d’une discipline scolaire. Il n’y a pas une seule manière d’être efficace, une seule manière d’avoir une valeur ajoutée positive. Par exemple, dans le cas des calculatrices à l’école primaire, ces artefacts ont une forte valeur instrumentale mais certains enseignants (par exemple ceux qui ne travaillent pas sur une ressource comme le document d’accompagnement sur les calculatrices) attribuent pluôt des valeurs négatives à la valeur d’usage ou à la valeur d’étude. Ainsi la valeur ajoutée est plutôt négative. Mais la valeur ajoutée négative peut venir aussi de fortes résistances.

Lorsqu’on s’intéresse à la question de l’efficacité potentielle de l’intégration des TIC pour l’enseignement il apparaît important que l’institution crée les conditions en termes de moyens (en formation, en termes de ressources) pour que les enseignants puissent y voir non seulement la valeur d’usage (qui apparaît dans les arguments comme essentielle) mais aussi les autres valeurs pour que les résistances soient amoindries et pour que la valeur ajoutée de ces technologies soit positive.

Références Assude T. (2007). Changements et résistances à propos de l’intégration des nouvelles

technologies dans l’enseignement des mathématiques au primaire. Informations,

Savoirs, Décisions et Médiations (ISDM), n°29, revue en ligne, isdm.univ-tln.fr/articles/num_encours.htm.

Assude T. & Loisy C. (2008), La dialectique acculturation/déculturation au cœur des systèmes de formation des enseignants aux TIC. Informations, Savoirs, Décisions et

Médiations (ISDM), n°32, revue en ligne, http://isdm.univ-tln.fr/PDF/isdm32/isdm32-assude.pdf.

Bruillard E. (1993). Quelques obstacles à l’usage des calculettes à l’école : une analyse. Grand N, 53, 67-78.

Favre J-M. & Tièche Christinat C. (2007.). La calculette : un outil médiateur de la relation ternaire dans l’enseignement spécialisé. In Floris R & Conne F, Environnements informatiques, enjeux pour l’enseignement des mathématiques (pp.95-118). Bruxelles : De Boeck.

Guin D & Trouche L (Eds) (2002). Calculatrices symboliques ; transformer un outil en un

instrument de travail mathématique : un problème didactique. Grenoble : La Pensée Sauvage.

Hoyles C. & Lagrange J.-B. (dir.) (2008), Mathematical Education and Digital Technologies: Rethinking the terrain, 17th ICMI conference, Hanoï.

Loisy C. (2007). Le C2i2e dans une formation professionnelle et universitaire des enseignants. Actes du colloque "Qu’est-ce qu’une formation professionnelle

universitaire des enseignants ? Enjeux et pratiques".

Mallein P., Toussaint Y. (1994). L’intégration sociale des technologies d’information et de communication. Une sociologie des usages. Technologies de l’information et

société, 4, 315-335.

Colloque international « Efficacité & Équité en Éducation »

Symposium « Éthique et usage des TICE en éducation »

L’interaction comme invariant des conditions d’efficacité des dispositifs d’apprentissage en ligne

Stéphane Simonian

UMR Education et Politiques (INRP - Université Lumière Lyon II)

Résumé

Nous comparerons deux dispositifs en ligne et à distance coordonnés par l’Institut des Sciences et Pratiques d’Education et de Formation (université Lumière Lyon 2) : la Licence Sciences Humaines et Sociales mention Sciences de l’Education et le MASTER 1 Sciences Humaines et Sociales mention Sciences de l’Education. Ces deux formations, bien que différentes par leurs activités d’apprentissage, leur public, leurs enseignements, nous permettent d’isoler des invariants explicatifs de l’efficacité de dispositifs en ligne et à distance. Ces invariants sont davantage « humains » (tutorat, activité collaborative) que techniques (plate-forme, outils de communication). Nous verrons également que l’organisation générale du dispositif de formation, qui dépent en partie de décisions politiques, est fondamentale. Il s’agit notamment de la possibilité de rémunérer tant les auteurs de cours que les tuteurs (décret du 6 juin 1984, arrêté du 17 janvier 1973 relatif à l’enseignement par correspondance) sachant que les tuteurs sont considérés comme des pilotes de l’activité et peuvent donc être différents des auteurs-experts de contenu de cours.

Introduction

Depuis l’an 2000, une convention a été signée entre l’Université Lumière Lyon 2, l’Université de Rouen et le CNED (Centre National d’Education à Distance) pour la mise en place d’une licence Sciences de l’Education à distance. Chaque année près de 700 étudiants suivent cette formation en Licence Sciences Humaines et Sociales

mention Sciences de l’Education. En 2002, une maîtrise entièrement en ligne, privilégiant le travail collaboratif, est créée. Aujourd’hui cette formation en MASTER 1 Sciences Humaines et Sociales mention Sciences de l’Education regroupe environ 60 étudiants par an. L’ensemble de ces formations intègre le campus numérique Forse (FORmation à distance en Sciences de l’Education) créé en 1997 et qui offre aujourd’hui à près de 1000 étudiants la possibilité de poursuivre des études en Sciences de l’Education, en Licence et en Master .

Lors de l’année universitaire 2007-2008, nous avons suivi parallèlement deux formations dans la perspective d’identifier, puis d’isoler, les invariants liés à l’efficacité de ces dispositifs en ligne et à distance (Simonian & Eneau, 2008 ; Simonian et al. 2007 ; Wallet, 2007) : la Licence Sciences Humaines et Sociales mention Sciences de l’Education et le MASTER 1 Sciences Humaines et Sociales mention Sciences de l’Education utilisant la plate-forme WebCT.

Nous avons comparé ces deux formations en fonction de critères d’efficacité liés aux dispositifs d’apprentissage en ligne et à distance (Boshier et al., 1997 ; Graham et al., 2000 ; Karsenti, 2006). Les différences constatées concernent essentiellement des questions pédagogiques et peu les questions techniques sachant que ces formations se différencient par de nombreux aspects (discipline enseignée, public apprenant, activité d’apprentissage, etc.). Suite à ces résultats, la question de l’efficacité de tels dispositifs ne peut pas uniquement reposer sur la spécificité des formations. L’efficacité de ces dispositifs semble dépendre essentiellement de variables organisationnelles et humaines. Les décisions politiques revêtent ici une importance particulière en permettant à l’enseignement à distance d’être reconnue au même titre qu’un enseignement en présentiel.

1- Evaluer des dispositifs en ligne et à distance

Dès 1997 Boshier et al. mettent en évidence des critères concernant l’efficacité de cours en ligne (attrayants, accessibles et degré élevé d’interactivité1). Ces auteurs indiquent d’ailleurs que la « e-education » ou la « e-formation » (Karsenti, 2006) permettent des apprentissages aussi efficaces que ceux acquis au cours d’une formation en présentiel. En 2000 et 2001, les études effectuées par l’Institue of Higher Education Policy corroborent les recherches de Boshier et de ses collaborateurs (1997) en précisant que les contenus de formation à distance dispensés par les universités sont de qualités similaires à ceux transmis en présentiel. Nous pouvons comprendre ce premier résultat par le fait que les contenus sont produits par des enseignants-chercheurs qui ont une expertise reconnue dans un domaine spécifique.

1 Cf. Simonian (2006) sur l’importance de l’interactivité

La qualité des contenus produits ne serait donc pas remise en question en fonction de la modalité d’apprentissage.

En revanche, les pratiques pédagogiques ne peuvent pas être complètement identiques entre une situation d’apprentissage à distance et une situation d’apprentissage présentiel. Le rapport de la Cyberformation paru en 2006 indique qu’il est nécessaire d’adapter les modèles pédagogiques aux technologies de l’éducation et qu’une application stricto sensu des pratiques pédagogiques existantes n’est pas suffisante. Ceci appuie la thèse que nous soutenons à savoir que « les

enseignants ne semblent pas avoir de vision concrète ni unifiée sur la question de savoir

comment les technologies peuvent et « doivent » être utilisées, ni sur les conséquences de

l’intégration de la distance, en particulier, pour l’apprentissage lui-même. » (Eneau et al., 2008). Mais, loin d’avoir une vision angélique de l’intégration et de l’usage des technologies de l’éducation, nous soutenons que de multiples difficultés sont présentes lors de la mise en œuvre d’une formation en ligne et à distance dans l’enseignement supérieur et, plus spécifiquement, à l’université. Nous aborderons ce point ultérieurement à travers l’exemple de la reconnaissance de l’enseignement à distance dans le statut de l’enseignant-chercheur.

2- Le cadre théorique : efficacité des pratiques pédagogiques en ligne et à distance

Karsenti (2006), en reprenant les travaux de Graham et al. (2000) mais aussi de Chickering et Gamson (1987), propose un tableau mettant en évidence « les conditions

d’efficacité des formations ouvertes et à distance ». Il différencie sept « facteurs » : 1) Accès/attrait ; 2) Interaction/communication ; 3) Contenu ; 4) Approche pédagogique ; 5) Ressources ; 6) Soutien ; 7) Pérennité technique. Nous reprendrons ces sept éléments comme base de discussion sur la mise en œuvre de nos formations à distance dans le campus FORSE en différenciant la formation en Licence SHS (Sciences Humaines et Sociales) mention Sciences de l’Education regroupant environ 400 étudiants et la formation en MASTER 1ère année SHS (Sciences Humaines et Sociales) mention Sciences de l’Education comptant environ 60 étudiants. Nous ne pourrons pas utiliser l’ensemble de ces sept facteurs car certains critères proposés méritent d’être affinés pour éviter une analyse trop subjective. Par exemple, pour le facteur accès/attrait, le deuxième critère est « attrayant et navigation conviviale ». Pour fournir une réponse objective, il nous faudrait interroger les étudiants en précisant ce que signifie « attrayant » et « navigation conviviale ». S’agit-il de l’interactivité du dispositif ? Ce critère dépend-il du niveau technique de l’apprenant ?...

Pour remplir le tableau sur les conditions d’efficacité des formations ouvertes et à distance (cf. tableau 1 ci-dessous), nous utiliserons le symbole + pour indiquer que le critère est respecté, le symbole − pour indiquer que le dispositif n’intègre pas ce

critère et NR (Non Réponse) pour préciser qu’il ne nous est pas possible de répondre objectivement à ce critère notamment pour raisons sémantiques et théorique.

Tableau 1 : Conditions d’efficacité des Formations Ouvertes et A Distance (Karsenti 2006)

Conditions d’efficacité

Critères Licence SHS MASTER 1 SHS

Dispositif simple et facile d’accès + + Accès/Attrait

Dispositif attrayant et navigation conviviale

NR NR

Interaction nombreuses favorisées par le dispositif entre formateur et l’apprenant

_ +

Interaction nombreuses favorisées par le dispositif tant entre les apprenants eux-mêmes

_ +

Interaction/

Communication

Outils de communication synchrones et asynchrones variés

+ +

Contenus validés par des experts du domaine

+ +

Contenu qui présente des attentes élevées à l’apprenant mais qui demeure équivalent à même un cours enseigné en présentiel

+ +

Contenu organisé pour en faciliter l’acquisition

+ +

Modalités d’évaluation permettant l’atteinte des compétences visées par les étudiants de même niveau que pour un cours semblable en présentiel

+ +

Contenu

Le cours présente des attentes (objectifs, buts ou finalités) claires et précises

+ +

Dispositif qui favorise la participation active de l’apprenant

_ +

Coopération ou collaboration entre les apprenants

_ +

Approche pédagogique

Dispositif qui favorise individualisation de l’enseignement

+ _

Dispositif qui favorise la motivation de l’apprenant (sentiment d’autodétermination, de compétence et d’affiliation)

NR NR

Grande quantité de ressources + + Ressources

Variété de ressources (documents, vidéos,sites internet,etc.)

+ +

Soutien technique et pédagogique pour les apprenants

+ +

Soutien technique et pédagogique pour les tuteurs

_ _

Formation de formateur NR NR

Sensibilisation des apprenants aux défis inhérents à l’apprentissage en ligne

_ _

Calendrier détaillé du déroulement du cours disponible pour l’apprenant

_ _

Soutien

Démarche méthodologique proposée à l’apprenant

NR NR

Pérennité et aspects

esthétiques

Evaluation Continue NR NR

Aspects esthétiques et droits intellectuels pris en compte dans l’élaboration du dispositif

+ +

Ces résultats mettent en évidence que la différence entre les deux dispositifs s’effectue essentiellement en termes d’interaction et d’approches pédagogiques ; ces deux facteurs étant interdépendant. Pour affiner cette différence, il semble pertinent de se référer aux « principes de base d’une pédagogie efficace » (Graham et al., 2000). Ces principes intègrent l’interaction dans l’approche pédagogique (ce qui semble d’ailleurs plus pertinent).

Nous utiliserons les mêmes codifications que précédemment pour identifier les « principes » mis en œuvre dans les deux dispositifs de formation.

Tableau 2 : Principes de base d’une pédagogie efficace (Graham et al. 2000)

Principes Licence SHS MASTER 1 SHS

Dispositif qui favorise les contacts entre étudiants

+ +

Dispositif qui favorise Coopération ou collaboration entre les apprenants (participation notée, petits groupes de discussion, groupe en fonction d’une tâche, etc.)

_ +

Dispositif qui favorise la participation active de l’apprenant (les étudiants travaille en fonction de projets)

_ +

Dispositif qui favorise des feed-back rapides

+ +

Effort consacré à la tâche (dates limites fixées pour les tâches et les travaux)

_ +

Des attentes élevées (tâches exigeantes) NR NR

Respect de la diversité des talents et de la diversité des façons d’apprendre

NR NR

La différence entre les deux dispositifs apparaît clairement par la pratique pédagogique mise en œuvre. Plus particulièrement le dispositif MASTER 1 SHS est axé sur une activité d’apprentissage collaborative au sein d’une démarche projet. L’importance de la dimension collaborative dans les dispositifs d’apprentissage à distance n’est pas nouvelle (Lumbroso, 1978). Néanmoins ces résultats confortent les travaux axés sur la construction d’une communauté d’apprenants (Henri et Lundgren-Kayrol, 2001 ; Legros et al., 2001 ; Ciussi, 2007) ainsi que les recherches orientées sur un scénario d’apprentissage collaboratif dont nous avons évoqué l’importance, dans une recherche précédente, en différenciant une approche axée sur la restitution d’un savoir d’une approche axée sur la production de savoir (Simonian et al., 2007). Cette dernière approche favorisant davantage le travail collaboratif et les interactions entre apprenant(s)-apprenant(s) et apprenant(s)-tuteur(s).

3- Discussion

Aux vus de ces résultats, la question qui se pose est la suivante : comment expliquer le manque d’une approche pédagogique collaborative en Licence SHS. Le premier élément de réponse concerne la variable quantitative liée aux nombres d’étudiants inscrits et aux personnes-ressources pouvant les accompagner (« tuteurs » ou ce que nous appelons « pilote de l’activité », Eneau et al., 2008 ; Simonian et Eneau, 2008). En effet, si en Licence près de 400 étudiants sont inscrits, mettre en œuvre un travail

collaboratif semble ardue notamment lorsque le nombre de tuteurs est limité (in

concreto le nombre est de 11) sachant que les tuteurs doivent détenir une certaine spécificité mais, dans le même temps, ne peuvent pas être des experts en tout (disciplinaire, technique, psychologie sociale pour développer la dimension socio-affective ; Audran et Simonian, 2003 ; Ciussi & Simonian, 2004). La tendance pour un effectif important serait d’effectuer des cours proches du papier (cours table des matières) favorisant un apprentissage individuel. En Master, il semblerait que 60 étudiants inscrits peuvent être plus aisément accompagnés et encadrés. Mais ce qui varie n’est pas le nombre de tuteur par étudiant mais le fait qu’un tuteur est expert d’une discipline et pilote une seule activité d’apprentissage dans une durée assez courte (deux mois environ). Les activités d’apprentissage collaboratives sont donc séquencées et s’enchaînent dans le temps de formation. Ceci permet aux étudiants de se repérer, de s’organiser et favorise dans le même temps un pilotage efficient de l’activité (Simonian et Eneau, 2008 ; Eneau et al. 2008). De ce point de vue, la semestrialisation qui réduit la durée des formations est un élément important à considérer et à mettre en œuvre dans ces dispositifs.

Ce qui semble également déterminant pour favoriser des pratiques pédagogiques efficientes en ligne et à distance tient à des modes d’apprentissage collaboratif. Favoriser les interactions dans une activité d’apprentissage nécessite :

- des scénarios pédagogiques qui prévoient des activités collaboratives limitées dans le temps et hybridées (« blended learning ») en débutant par une séance en présentiel puis en alternant distance et regroupement en présentiel ; ce qui permet de construire une confiance institutionnelle (Simonian et Eneau, 2008) : « dans les activités collaboratives en ligne, comme le montre l’exemple de notre

activité sur le Campus Forse, la constitution du collectif de travail, les interactions en

ligne et les outils de régulation de l’activité semblent déterminants pour l’acquisition,

l’échange et la production de savoirs. Au cœur de ces interactions, le rôle de la

confiance joue un rôle prépondérant : confiance établie, construite et renforcée par

l’institution, par les membres du collectif comme par le tuteur de l’activité, devenu un

véritable « pilote » de ces échanges ». - de mobiliser des ressources humaines (enseignants universitaires titulaires qui

pilotent des activités d’apprentissage dans une durée déterminée). La mise en œuvre d’activités collaboratives nécessite des ressources humaines importantes dont les enseignants universitaires sont, dans le cas présent, les premiers concernés. Pour accroître l’efficacité des formations universitaires en ligne, il est nécessaire d’inclure l’enseignement à distance notamment dans le statut de l’enseignant-chercheur.

4- Inclure l’enseignement en ligne dans le statut des enseignants à l’université

Proposer de nouvelles modalités d’enseignement suppose une double intention dans la perspective d’enrichir nos offres de formation (formation initiale et continue) : « capter » un public en activité professionnelle (formation « hybride » alternant enseignement en présence et enseignement à distance) ou éloignée géographiquement (formation à distance). Il est important de préciser que ce public se trouve, en partie, dans nos formations en présentiel (étudiants dispensés d’assiduité par exemple).

Néanmoins, la question à laquelle nous sommes confrontés concerne la rémunération des enseignants (auteur et/ou tuteur) dispensant leur activité à distance étant donné que la charge d’un enseignement universitaire est comptabilisée par les durées pour lesquelles l’enseignant est en présence des étudiants. En effet, les dispositions du Code de l’Education et du décret du 6 juin 1984 (Art. 7) indiquent que les obligations de service d’un enseignant universitaire servant de base à la rémunération statutaire (128 heures de CM ou 192 heures de TD) restent exclusivement verbales et présentielles. Il est à noter que la formation sans « face à face » n’est bien sûr pas prise en compte dans ce texte datant de 1984.

Par conséquent, les activités liées à la mise en ligne d’un cours sous forme numérisée, et plus généralement toutes les formes d’enseignement à distance, ne sont pas incluses dans les obligations de service de l’enseignant du supérieur. Cette impossibilité d’inclure l’enseignement à distance dans le service statutaire constitue en réalité un handicap pour le développement du E-learning dans nos universités : en effet, elle alourdit le nombre d’heures complémentaires de l’université qui développe de l’enseignement à distance.

La rémunération actuellement pratiquée pour les enseignants-chercheurs demeure la rémunération en heures complémentaires, notamment sur la base de l’arrêté du 17 janvier 1973 (toujours en vigueur) relatif à l’enseignement par correspondance.

Néanmoins, il est possible de rémunérer l’enseignant pour la création des ressources numériques dans le contexte d’une formation hybride ou à distance, au titre d’un contrat de louage de service. Cette rémunération ne concerne que la prestation de rédaction et de conception du cours ; elle n’opère en aucun cas la cession des droits de l’auteur sur sa création. Concrètement, le rédacteur signera un contrat de commande prévoyant une rémunération pour la création d’un contenu scientifique défini, lequel sera ensuite numérisé et scénarisé. Cette rédaction initiale des modules de formation est généralement quantifiée simplement en utilisant l’heure de cours présentiel comme référence. Il est également prévu une obligation de remise à jour du contenu à la charge de l’auteur, selon une fréquence et pour une durée définies par le contrat. Dans la mesure où le tuteur est le créateur d’une scénarisation originale, il est également auteur d’une partie de l’œuvre ; il s’agira donc d’une œuvre de collaboration où l’enseignant et le tuteur se partageront les

droits sur les heures d’enseignement. Il se peut aussi qu’un enseignant-chercheur assure les deux fonctions. En revanche, un enseignant exclusivement tuteur n’a aucune activité créatrice dans le produit de E-learning et ne peut revendiquer aucun droit d’auteur. Se pose alors la question de savoir comment rémunérer le tutorat.

Conclusion

L’efficacité des dispositifs en ligne et à distance repose essentiellement sur une activité d’apprentissage collaborative en favorisant la production de savoirs par les apprenants (et non la restitution de savoirs). La mise en place du scénario pédagogique collaboratif nous paraît inter-dépendant de la variable organisationnelle notamment par le passage à la semestrialisation qui fixe des échéances plus courtes dans le temps et donc « réduit » le temps d’apprentissage. Ici apparaît un paradoxe : si la réduction du temps d’apprentissage augmente la réussite aux examens des étudiants il peut, dans le même temps, augmenter les obstacles à l’apprentissage liés à la durée nécessaire à l’appropriation des savoirs (chronogenese des savoirs). Enfin, l’hybridation semble nécessaire pour favoriser des interactions constructives de connaissances.

L’enjeu de l’efficacité des technologies de l’éducation dépend aussi de preuves scientifiques faisant référence aux recherches en psychologie de l’éducation (socio-constructivisme, théorie de l’activité, action située, cognition distribuée ; Chaptal 2003). Pour aller encore plus loin, il s’agirait de « prédire » les effets éventuels de dispositifs sur l’apprentissage car évaluer des dispositifs en comparant, par exemple, enseignement à distance et enseignement en présence n’est pas suffisant et semble peu pertinent (Chaptal, 2003). Du point de vue méthodologique, la principale perspective est de savoir de quelle manière s’assurer de l’efficacité d’un dispositif en ligne et à distance sur des processus d’apprentissage visés (Simonian, 2006). La variable qui semble déterminante concerne, dans notre étude, les activités d’apprentissage collaborative et, d’une manière plus générale, la possibilité de développer l’approche socio-constructiviste.

Bibliographie Audran, J., Simonian, S. (2003). Profiler les apprenants à travers l'usage du forum, International Journal of Information Sciences for Decision Marketing, n° 18. (http://isdm.univ-tln.fr, consulté le 12 février 2008).

Boshier R, Mohapi M, Moulton G, Qayyum A, Sadownik L., Wilson M. (1997). Best and worst dressed web courses: Strutting into the 21st century in comfort and style. Distance Education - An International Journal, n°18, p. 36-49.

Chaptal, A. (2003). Efficacité des technologies éducatives dans l’enseignement scolaire, 2003, Edition Harmattan.

Ciussi, M. (2007). Du réseau à la communauté. Thèse de Doctorat en Sciences de l’Education, Université de Provence (http://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00129384, consulté en septembre 2008).

Chickering, A., & Gamson, Z. (1987). Seven principles of good practice in undergraduate education. AAHE Bulletin, n°39, p. 3-7.

Ciussi, M., Simonian, S. (2004). L’échange favorisé par l’organisation relationnelle de contenu, International journal of Information Sciences for Decision Marketing, n° 18. (http://isdm.univ-tln.fr, consulté le 12 février 2008).

Eneau,, J. ; Simonian, S. ; Simeone, A. (2008) TIC et enseignement supérieur : vers une nouvelle professionnalité enseignante ?, actes de colloque : Questions de pédagogie dans

l’enseignement supérieur, Brest, p. 267-274

Graham, C. ; Cagiltay, K. ; Craner, J, ; Lim, B ; Duffy,T.M. (2000). Teaching in a Web-based distance learning enviroment: An evaluation summary based on four courses. Center Research on Learning and Technology Technical Report, n° 13-00, Bloomington.

Henri, France ; Lundgren-Cayrol, Karin (2001). Apprentissage collaboratif à distance :

pour comprendre et concevoir les environnements d'apprentissage virtuels. Sainte-Foy (Québec, Canada) : Presses de l'Université du Québec.

Institute for Higher Education Policy (2000). Quality on the line: Benchmarks for success

in internet-based distance education. Washington.

Institute for Higher Education Policy. Quality on the line (2001). Benchmarks for

success in Internet-based Distance Education. IHEP, Washington.

Karsenti, T. (2006). Comment favoriser la réussite des étudiants d'Afrique dans les formations ouvertes et à distance (foad) : principes pédagogiques. TICE et

développement, 2 (9), p. 9-23.

Legros, D., Pudelko, B. & Crinon, J. (2001). Les nouveaux environnements technologiques et

l’apprentissage collaboratif. In J. Crinon & C Gautellier, (dir.), Apprendre avec le

multimédia

et Internet, Paris : Retz, p. 203-213.

Lumbroso, M. (1978). La formation des adultes préparant par correspondance l’examen

spécial d’entrée, Thèse de doctorat : Sciences de l’Education : Université Paris V.

OCDE (2006). La cyberformation dans l’enseignement supérieur, Edition OCDE.

Simonian S. et Eneau J. (2008). Modèle pédagogique et activités collaboratives en ligne : la confiance comme condition de facilitation des échanges, actes de colloque

CEMAFORAD (Disponible en format texte : http://cemaforad4.u-strasbg.fr/ (rubrique programme, consulté en septembre 2008 ; Disponible en format vidéo : http://www.canalc2.tv/ consulté en septembre 2008).

Simonian S. (2006). L’influence des structurations hypertextuelles des cours en ligne sur

trois variables du processus d'apprentissage (mémoriser, reproduire, généraliser) : le cas de

l'enseignement des statistiques en formation initiale, Thèse de Doctorat en Sciences de l’Education, Université de Provence.

Simonian, S., Ravestein, J., Audran, J. (2007). Conditions didactiques de la transformation d’une liste de diffusion en outil collaboratif, Distances et savoirs, Vol. 4 n° 4, p. 513-526.

Wallet, J. (2007.) Le Campus numérique FORSE, Pistes pour l’ingénierie de la formation à

distance. Rouen : PURH.

Colloque international « Efficacité & Équité en Éducation »

Symposium « Éthique et usage des TICE en éducation »

La place du portfolio dans la conception et l’implémentation d’une organisation didactique : problèmes ouverts

Caroline Ladage et Yves Chevallard

UMR P3 ADEF, Aix-Marseille université, INRP 1. Raisonner à rebours ? Le portfolio est un dispositif didactique qui, il y a peu d’années, a surgi tout à coup dans l’univers français de la formation, où il semble tomber du ciel sans prévenir, sauf pour ceux qui scrutent ce que le vent d’ouest s’apprête à nous apporter. Dans la théorie anthropologique du didactique, le portfolio est, à l’instar du cahier, du manuel, du journal (ou carnet) de bord, du spicilège ou du classeur, un type de dispositif. Un dispositif est ce qui, en association avec certains types de gestes (accomplis sur ce dispositif), compose une technique. Ces types de gestes répondent donc à la question : comment utilise-t-on les dispositifs de ce type ? Mais il ne suffit pas de répondre de façon formelle à cette question : encore faut-il savoir quel type de

tâches cette technique est censée servir, c’est-à-dire quelle fonction ce dispositif doit permettre d’assumer. À travers l’utilisation de ce dispositif, que vise-t-on ? Telle est alors la question qui se pose, même quand certains néo-utilisateurs du dispositif, saisis par la mode du moment, ne (se) la posent pas. Normalement, en vérité, la flèche du questionnement va en sens inverse : une fonction étant donnée, quel « organe », c’est-à-dire quel composé d’une structure (le « dispositif ») et d’un mode de fonctionnement (les « gestes »), faut-il créer ou mobiliser pour assurer cette fonction ? Comme il en va presque toujours lorsqu’une innovation s’impose à une société où elle n’est pas née, et cela sous le seul étendard d’un mot-emblème qui subsume tout (ici, portfolio), elle opère la greffe d’un organe dont la fonction est d’abord inconnue et dont le mode de fonctionnement est, pour cela, en grande partie mystérieux. C’est alors que, à la façon de Sherlock Holmes, il conviendrait de pratiquer l’art subtil de « raisonner à rebours » : “In solving a problem of this sort, the grand thing is to be able to

reason backwards”, fait dire Arthur Conan Doyle à son héros à la fin de A Study in

Scarlet (1887). On va voir que rien n’est moins assuré. 2. Le mot de portfolio et la chose : une ébauche d’enquête En français, le mot de portfolio n’apparaît que vers 1970, à titre d’importation depuis la langue anglaise (où le mot serait entré dès 1722), précise le Dictionnaire culturel en

langue française (2005). Selon la même source, le mot ne désignerait en français, à cette

date, qu’une « enveloppe rigide » – un « portefeuille » – « contenant des images photographiques (originaux ou reproduction), des estampes », mais aussi « ces images » elles-mêmes : le contenant et le contenu, donc, le même dictionnaire donnant pour unique exemple : Un portfolio d’œuvres d’un photographe. Dans l’édition 2006 du Robert de poche, « entièrement revue et enrichie », il y a bien une entrée portfolio, mais on y lit seulement ceci : « Série de photographies (dans un coffret…). » Nous sommes là loin du compte ! Que se passe-t-il donc du côté de la langue anglaise ? La plupart des dictionnaires de l’anglais distinguent aujourd’hui un même (petit) nombre d’emplois du mot, dont, par exemple, The American Heritage Dictionary

of the English Language (4e éd., 2000) propose l’explicitation suivante 2.

1a. A portable case for holding material, such as loose papers, photographs, or drawings. b. The materials collected in such a case, especially when representative of a person’s work: a photographer’s portfolio; an artist’s portfolio of drawings. 2. The office or post of a cabinet member or minister of state. 3. A group of investments held by an investor, investment company, or financial institution.

D’après le Online Etymology Dictionary, le mot portfolio, qui dérive de l’italien portafoglio, désigne d’abord simplement “a case for carrying loose papers”. Le sens de “collection of securities held”, c’est-à-dire le sens 3 recensé ci-dessus, apparaît vers 1930 seulement. Sur son site World Wide Words – dans lequel cet observateur du langage “writes on international English from a British viewpoint” –, Michael Quinion propose, à la date du 28 novembre 1998, un billet sur le mot portfolio qui commence par ces lignes.

The young man I was speaking to was clearly hugely enthusiastic about getting on in the world: “I’m determined to set myself up with a good portfolio,” he said. In years past, someone of his age with a portfolio would probably have been an art student, hawking his folder of drawings around from interview to interview. But these days, my young friend could be in one of several occupations that have nothing to do with art.

L’usage « artistique » du portfolio en constitue ainsi l’emploi par excellence : la plupart des dictionnaires de la langue anglaise, aujourd’hui encore, ne vont pas beaucoup plus loin dans l’évolution qui nous intéresse ici. On comprend bien sûr, en ce cas, la fonction d’un portfolio : l’objectif est de faire connaître à un client ou à un employeur potentiel, par exemple, ce que l’on fait et ce dont on est capable, que l’on soit photographe, peintre, architecte, etc. Ce qu’on nommera ensuite en anglais “a showcase portfolio”, « un portfolio vitrine », est ainsi “a set of pieces of creative work intended to demonstrate a person’s ability” pour le Compact Oxford English

2 Les extraits de dictionnaires de la langue anglaise cités ci-après s’obtiennent tous à partir du dictionnaire en

ligne OneLook Dictionary.

Dictionary, “a collection of drawings, documents, etc. that represent a person’s, especially an artist’s, work” pour le Cambridge International Dictionary of English, lequel propose cette illustration : “She’s trying to build up a portfolio of work to show during job interviews”. C’est de même “a set of pieces of creative work collected to be shown to potential customers or employers” pour le Free Dictionary, qui donne ces deux exemples : “the artist had put together a portfolio of his work” ; et : “every actor has a portfolio of photographs”. Et c’est ce sens-là que véhicule le mot de portfolio lorsque, vers 1970, il est importé en français – ou du moins dans le français des métiers artistiques. Que se passe-t-il ensuite ? Écrivant, ainsi qu’on l’a dit, à la fin des années 1990, Michael Quinion répond en ces termes.

… portfolio has shifted sense in the nineties. Now it can refer to the varied set of skills one possesses that makes one employable in the new, thrusting world of part-time work, short-term contracts and everyday redundancies. Not only do we no longer have a job for life, it has become more and more common for us not to be employees of a single company at all, but to hawk our skills around from place to place, picking up work like a hungry free-range chicken pecking for grain. The more skills one has, so the argument goes, the more one is likely to find some nourishing titbit even when times are hard.

Ce changement, qui survient au cours des années 1990, se traduit par l’apparition de la notion de career portfolio, à quoi fait écho l’idée d’une carrière constituée d’emplois divers, obtenus successivement (ou parfois simultanément) grâce à la riche diversité de son « portefeuille de compétences ». De là, en anglais, une série de néologismes (« carrière à portfolio », « travailleur à portfolio », « nomade à portfolio »), que l’auteur présente ainsi.

Nineties management-speak has coined a series of words to describe this situation. In addition to portfolio career, coined by Professor Charles Handy, and now a well established term, we have portfolio employment, portfolio worker and even portfolio nomad, which conjures up an image of peripatetic workers traipsing from workplace to workplace, carrying their portable employable skills with them.

La mobilité professionnelle croissante, les carrières faites d’une succession d’emplois et de métiers, tout cela est une donnée lourde qui explique l’émergence du portfolio ainsi entendu et qui lui donne sa fonction : le portfolio apparaît ici comme une solution possible à un problème nouveau, que le classique CV ne résout pas toujours de manière satisfaisante. À la même époque, pourtant, aux Etats-Unis, on voit s’imposer le portfolio dans le domaine de l’éducation et de la formation. Dans une liste de “references on Electronic Portfolios from recent dissertations and other sources” établie par Helen Barrett (2004), le nombre de références comportant le mot “portfolio” dans le titre varie au fil des années ainsi que le montre le tableau ci-après.

< 1990 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000 2001 2002 2003

2 4 9 12 11 13 25 37 39 42 21 13 22 15 6

On saisit à travers ces chiffres la progressive montée en puissance du mot-emblème, avec une soudaine poussée à partir de 1995, qui culmine vers 1998. Dans la réalité, et notamment dans la réalité industrielle et commerciale, l’acmé semble toutefois légèrement décalé dans le temps. Dans un article publié fin 2002, intitulé significativement The Electronic Portfolio Boom: What’s it All About? (Batson, 2002), l’auteur écrit ceci.

A year ago, companies I talked with had not even heard of ePortfolios. But at a focus session in October, sponsored by Educause’s National Learning Infrastructure Initiative (www.educause.edu/nlii/), we found out how far this market has come: A number of technology vendors and publishers are starting to offer ePortfolio tools. The focus session helped us all see the bigger picture. I came away saying to myself, “I knew it had grown, but I had no idea by how much!”

Pourtant, le problème lié à l’évolution de la structure du marché de l’emploi et que tente de résoudre le dispositif du portfolio ne se retrouve pas clairement dans le monde de la formation. En d’autres termes, au lieu de poser et d’étudier à nouveaux frais un problème « authentique », on recopie une solution, en cherchant alors quels

problèmes elle pourrait bien résoudre ! De là que ce qui était relativement clair tout à coup devienne flou et mouvant : le portfolio ne résoudrait-il pas tous les problèmes de formation, y compris ceux auxquels on n’avait pas encore songé ? Batson (2002) le souligne 3 : “The term ‘electronic portfolio,’ or ‘ePortfolio,’ is on everyone’s lips. We often hear it associated with assessment, but also with accreditation, reflection, student resumes, and career tracking.” Et d’ajouter : “It’s as if this new tool is the answer to all the questions we didn’t realize we were asking.” 3. L’attribution imaginaire de fonctions et ses effets Dans les années 2000, dans le monde anglophone, le portfolio devient une étoile de première grandeur. En même temps on assiste à sa désintégration conceptuelle. On peut en voir un symptôme dans le recours revendiqué à des métaphores, tel que le met en avant, sous le titre “Metaphors for Portfolios”, une page du site d’Helen Barrett, lauréate en octobre 2007 du “Lifetime Achievement Award for contribution to ePortfolio research and development” attribué par le European Institute for E-Learning (EifEL). On y lit ceci.

The purpose of this page is to share different metaphors that have been used to describe portfolios, for the purpose of helping to build a shared understanding

3 Un resume (ou résumé) est, en anglais d’Amérique du nord, un CV.

about the multiple purposes of portfolios. Below are brief quotes from various authors and resources on portfolios, to help us understand their multiple perspectives and purposes.

Sans doute y a-t-il, au départ, malentendu : les premières métaphores proposées par H. Barrett sur la page Web mentionnée sont celles du sonnet, du miroir et de la carte présentées et commentées dès 1994 par Mary Diez dans un article fameux intitulé “The portfolio: Sonnet, Mirror and Map” (Diez, 1996). Or la lecture de cet article montre un univers encore bien différent de celui que le big boom du e-portfolio va ensuite créer. Tout d’abord, de fait, le portfolio dont parle l’auteure n’est qu’un être de papier, à propos duquel une mystique éducative a davantage de mal à flamber. Ensuite, la première fonction qu’elle lui attribue, celle de « miroir », renvoie simplement à la réalité du showcase portfolio, rôle à l’origine fondateur mais qui sera bientôt regardé comme peu ou prou dépourvu de noblesse éducative. Surtout, c’est à cette fonction même de showcase, de « vitrine », parce qu’elle suppose, de la part de l’étudiant auteur du portfolio, un choix en même temps qu’elle lui donne à voir des témoignages de son activité, que doit de se développer la réflexion de cet étudiant sur ses apprentissages, fonction décisive aux yeux des promoteurs du e-portfolio. Et l’on peut en dire de même de la fonction de « carte », qui permet à l’étudiant de déterminer où il souhaitera aller ensuite, ce qui vaut au portfolio la dénomination de developmental portfolio. En fait, la biographie universitaire de l’auteure n’est sans doute pas étrangère au point de vue qu’elle avance : elle a d’abord enseigné l’anglais et la communication, précise-t-elle, “before moving into the role of teacher educator” ; or, comme le soulignera Batson (2002), “English departments and writing programs have been employing portfolios for 25 years or so”. Il existe ainsi une pratique ancienne, spécifique, de l’emploi didactique du portfolio, que Batson illustrera comme suit.

Here’s how I’ve used portfolios in my writing classes: Over the course of a semester, students would collect their graded papers in a folder. At week 10, I’d offer the students the option of re-writing three papers of the 10 they’d written, receiving a second grade on the assignment to average in to their score. Most students seized the opportunity. The educational value was their reflection on their own work, in becoming engaged once more in revising their papers. At the end of the semester—week 15—their last project was a second review and reconstruction of their portfolio: The students could “throw out” two of their papers. Secondly, they were required to write a paper about how they’ve changed as a writer, using their portfolios as a resource.

À partir de cet emploi vertueux du portfolio, la vogue des années 2000 va fabriquer un être protéiforme à la viabilité incertaine. Une différence essentielle entre l’usage du portfolio dans la formation (initiale ou continuée) des enseignants, des médecins ou des infirmières, et plus généralement dans la formation professionnelle, et son emploi dans les études générales est ainsi que, dans le premier cas, la personne en formation a, hors des murs de l’institution de formation, tout une activité « authentique » en tant que professionnel ou futur professionnel,

qui fournira une partie importante de sa matière à un portfolio éventuel. Dans le second cas, cette condition n’est en général pas réalisée : s’agissant de l’enseignement des mathématiques au secondaire (pour ne prendre que cet exemple), il faudrait que l’élève ait une activité mathématique suscitée par des institutions autres que la classe, ce qui n’est pas le cas en général. Il ne reste plus alors qu’à pousser à la création d’une telle activité mathématique extrascolaire, sans qu’on puisse toujours compter pour cela sur une institution autonome à laquelle l’élève serait invité à s’assujettir. Ce manque pratique va être compensé en théorie par la notion d’authentic assessment, d’évaluation « authentique », que, dans son Authentic assessment toolbox, Jonathan Mueller (2008) a pu définir ainsi : “A form of assessment in which students are asked to perform real-world tasks that demonstrate meaningful application of essential knowledge and skills.” Mais il s’agira évidemment, en bien des cas, d’activités « authentiques » transposées dans l’institution de formation. Ainsi la notion concrète de portfolio voit-elle son objet même vaciller. Il semble que le portfolio devienne alors, non plus un dispositif concrètement disponible, aux propriétés déterminées, mais le nom donné a priori à un dispositif potentiel supposé capable, ad libitum, de servir telles ou telles fonctions, didactiques ou autres : il se mue en une projection normative de ce qu’on souhaiterait, pour une raison ou une autre, voir advenir, sans pour autant qu’aient été dégagées les conditions concrètes sous lesquelles l’entité ainsi invoquée pourrait devenir cette réalité que l’on projette. Dans un billet posté sur le site de la Washington State University (WSU), Jayme K. Jacobson (2008) indique que “at WSU, we’ve been talking about eportfolios for the last 5 or 6 years” avant de décrire l’évolution de l’intérêt pour le dispositif du portfolio au cours de ces années, telle qu’il l’a vécue. Au départ, note-t-il, beaucoup d’institutions d’enseignement supérieur poussent en avant l’utilisation d’un CV en ligne, dispositif dont les défauts deviennent vite évidents : “We are all familiar with situations where a person ‘looks good on paper’ but the reality doesn’t match up and visa versa.” Que faire pour parer à de tels désagréments ? Employer un portfolio ! L’auteur ne cache rien de cette projection imaginaire sur un objet alors en vogue : “We started to ask how portfolios could capture a person’s problem solving strategies, collaborative style, and the ability to synthesize and integrate information.” Les étapes s’enchaînent: “Subsequently, there was a movement that pushed for portfolios to be used as a reflection of learning.” Ce changement – le passage d’un CV amélioré à un générateur de « réflexion » sur ses apprentissages – marque “the beginning of focusing on the process as opposed to the product, of moving beyond a showcase mentality”. La péjoration du “showcase portfolio” s’installe. On découvre même, à cette occasion, que les portfolios d’artistes n’étaient pas, ainsi qu’on le croyait jusqu’alors, de simples vitrines : il y a convergence entre ce portfolio traditionnel et celui que l’on a en vue, ainsi que l’auteur le souligne.

In fact, artist portfolios are much more of a learning platform than had been realized because they provide a space for dialogue among mentors, peers, and the artist to talk about what is working, what still needs work and what pieces

best demonstrate (and guide) the trajectory of the artist—and why those pieces do that.

Le portrait-robot que l’on brosse alors du portfolio s’enrichit incessamment : “Proponents of eportfolios, note l’auteur, then began to use the ‘collect, select, reflect, project’ terminology when it was observed that the selection process was, by its very nature, a prompt for reflection.” Mais les choses deviennent bientôt plus subtiles encore : aujourd’hui, poursuit-il, “eportfolio thinking is increasingly concerned with metacognition” ; le stade de la simple « réflexion » sur ses apprentissages est désormais dépassé, ce que l’auteur que nous suivons précise alors en ces termes.

Eportfolios are seen as a method for capturing and reflecting on process. This is a subtle but significant shift from the early days of eportfolio reflection because much of breakthrough learning takes place when things get confusing, when there is no clear path to the next step. Many artifacts from this stage are ugly, tangled, and unclear but it is important to capture them as part of the ‘aha’ moment—the before as well as the after—when something causes a person to question assumptions, to find new connections, or produce a novel solution. It is important because it teaches us more about the process of learning and it helps us to become self-propelled learners who can strategize when things get confusing.

La conclusion du billet vaut d’être citée. “What next?”, s’interroge l’auteur ; à quoi il répond : “Eportfolios are an emerging learning tool. It is unlikely that the evolution will stop here. How do we keep pushing and exploring the boundaries of this format?” L’invention de dispositifs (imaginaires) se poursuit. Le résultat de cet intense investissement du mot aura un effet sûr : l’enregistrement par les dictionnaires de sa buissonnante acception « académique ». C’est ainsi que, par exemple, le Merriam Webster’s Online Dictionary fait aujourd’hui figurer celle-ci en dernière position dans la suite des acceptions qu’il enregistre, tout en en réduisant fortement le déploiement sémantique engendré par la noosphère éducative, ainsi que le montre l’entrée reproduite ici.

portfolio

1: a hinged cover or flexible case for carrying loose papers, pictures, or pamphlets

2 [from the use of such a case to carry documents of state]: the office and functions of a

minister of state or member of a cabinet

3: the securities held by an investor: the commercial paper held by a financial house (as a

bank)

4: a set of pictures (as drawings or photographs) usually bound in book form or loose in a

folder

5: a selection of a student’s work (as papers and tests) compiled over a period of time and

used for assessing performance or progress 4. À pied d’œuvre, dans une situation ambiguë

La problématique qui s’est développée depuis le début des années 2000 a produit, sur un mode à la fois imaginaire et injonctif, une quantité respectable d’êtres de papier, parfois normalisés par des administrations d’État. C’est ainsi que, dans un document daté de mai 2002, intitulé « Portefolio [sic] sur support numérique », la Direction des ressources didactiques du ministère de l’Éducation du Québec, précisait ceci.

À un moment donné, on dénombrait différents types de portfolios. La littérature récente fait état de six genres de portfolios.

a) le portfolio de collection, où l’élève conserve certains travaux ;

b) le portfolio de réflexion, où il analyse sa façon de faire et des méthodes de travail ;

c) le portfolio d’appréciation, où l’élève jette un regard critique sur ses travaux ;

d) le portfolio de documentation, où l’élève est appelé à ramasser les documents qu’il

désire soumettre à l’appui du développement de ses compétences ;

e) le portfolio de communication avec ses parents, ses amis, ses coéquipiers, ses

professeurs ;

f) le portfolio d’évaluation, dans lequel il doit répondre aux exigences du Ministère ou de

la commission scolaire, toujours responsables de la certification. Bien entendu, une telle liste pourrait encore être étendue, au gré de l’imagination des groupes de travail qui s’affairent sur ce sujet. Pourtant, en sens inverse, note alors le document cité, « certains auteurs réduisent cette taxonomie à quatre types de portfolios », à savoir : a) le portfolio d’apprentissage ; b) le portfolio de développement personnel ; c) le portfolio d’appréciation ; d) le portfolio de recherche. Une telle réduction sémantique, en effet, semble inévitable si l’on veut pouvoir populariser l’usage du portfolio. Le même document, au reste, ajoute aussitôt que l’Association for supervision and curriculum development (ASCD) reconnaît, quant à elle, trois types de portfolios, auxquels le document du ministère québécois se limitera prudemment ensuite : a) le portfolio d’apprentissage ; b) le portfolio de présentation ; c) le portfolio d’évaluation. La situation qui résulte de l’investissement noosphérien sur la notion de portfolio réalisé au cours de ces années n’est toutefois pas la meilleure possible quand il s’agit, pour les équipes d’enseignants, de « passer à l’acte » en réponse à une invite devenue désormais insistante : « Faites-leur faire un portfolio ! » À propos de la formation des infirmières, ainsi, des auteurs (Spence & El-Ansari, 2004, cité par Butler, 2006) notent : “although portfolios have been considered central to nurse education at all levels… there is no unified understanding of the term in the literature or among practitioners.” Le type d’analyse que nous avons développé ici

n’est au demeurant pas étranger à certains observateurs et analystes. Dans la revue de la littérature brossée par Philippa Butler (2006), on lit par exemple ce qui suit 4.

Smith and Tillema (2003) worry about the long-term impact of portfolios. They argue that “a critical appraisal of the portfolio concept is now needed since, after its origination, the portfolio concept has now been expanded to a range of aims and includes so many functions that its features are becoming blurred or are even contradictory” (Smith & Tillema, 2003, p. 628). Challis (2005) goes even further than this, raising the possibility that electronic portfolios may be a ‘fad’ that will eventually become disreputable and then abandoned.

À bien des égards, la situation est donc ambiguë, ce dont certains étudiants ne sont pas dupes. Dans une étude citée par P. Butler (Tosh, Light, Fleming & Haywood, 2005), ainsi, un étudiant interrogé se récrie dans les termes suivants – qui, pour n’être pas définitifs, n’en sont pas moins incisifs.

In terms of promotion the problem is the people trying to explain it have probably never used it so in a way they have no clue what they are talking about, basically. To put it frankly – after listening to them you would be like, Okay so you as an outsider who never even used it is telling us we should do this because it is the best thing since sliced bread but you have never used it – you can’t find someone who did use it – you don’t have enough information to tell us how to use it – and now you’re telling us to use it and we’ll grade you on it – this kind of makes it hard for students to accept or appreciate it.

Qu’en est-il alors du côté français ? La vogue du portfolio n’a touché la France qu’assez récemment, en sorte que, dans un article présenté au congrès TICE Méditerranée 2004 (Nice, 26-27 novembre 2004), Carole Eyssautier-Bavay croyait pouvoir écrire, à propos du « portfolio de l’apprenant » : « Devant l’absence d’article de

synthèse sur le sujet, nous nous proposons de définir ce concept en nous appuyant sur les travaux existants et sur les principaux usages rencontrés. » Une certaine effervescence s’est manifestée au cours des années récentes. Soulignons d’abord que la First International Conference

on the ePortfolio organisée par l’EifEL s’est tenue en octobre 2003 à Poitiers 5. Au plan national, un séminaire s’est tenu à l’IUFM de Dijon les 18 et 19 mai 2005 sur le thème « Le portfolio numérique dans la formation : le cas du C2i enseignant », qui a réuni un grand nombre de personnes engagées plus ou moins fortement dans la diffusion du portfolio dans la formation des enseignants : à de rares exceptions (Bruillard, 2005), il s’est agi d’une célébration du e-portfolio dans une perspective nord-américaine. À la même époque, le site EducNet du ministère français de l’Éducation nationale propose un dossier intitulé Portfolio numérique dont l’essentiel de la substance est d’origine québécoise mais dont, hormis pour la page d’accueil, les

4 Le mot anglais fad désigne une manie, une lubie, un dada, un engouement (qui passera). 5 Voir le site de l’EifEL à l’adresse http://www.eife-l.org/publications/eportfolio/proceedings2/ep2003/.

dernières mises à jour remontent à 2005 (ou, pour l’une d’entre elles, à janvier 2006), ce qui semble marquer une (relative) décrue de l’intérêt 6. Comme on va maintenant le voir, il ne faudrait pas pour autant ignorer ce fait, déjà souligné pour la production académique de langue anglaise, que, très classiquement, la vogue du e-portfolio se propage comme une vague : par delà les cercles dirigeants et militants, le désir de portfolio frappe aujourd’hui la masse de ses usagers potentiels. 5. Des enquêtés sous influence ? Au début de l’année 2007-2008, nous avons pu interroger des étudiants de l’université de Provence inscrits en deuxième année du master professionnel de sciences de l’éducation « Formation et encadrement dans le secteur sanitaire et social ». Vingt-deux d’entre eux ont répondu au questionnaire reproduit ci-après.

1. Vous diriez qu’un portfolio de compétences, c’est : …

2. Avez-vous une expérience personnelle des portfolios ? Oui … Non … (Si NON passez à la

question 3.)

Si OUI : pourriez-vous décrire en quelques lignes :

2.1 En quoi elle a consisté ?

2.2 Quel est le contexte dans lequel vous avez eu cette expérience ?

2.3 La durée ?

2.4 Si vous avez déjà votre propre portfolio : a. Comment l’avez-vous bâti ? b. Quels ont été

les obstacles ? c. Quels bénéfices en avez-vous tiré ?

3. Estimez-vous pouvoir tirer des bénéfices d’un portfolio ? OUI … NON … Si OUI lesquels ?

4. D’après vous, les organisations (institutions, entreprises,…) peuvent-elles attendre des

bénéfices du portfolio ? OUI … NON … Si OUI, lesquels ? Si NON, pourquoi ?

5. Selon vous, quels sont les avantages et/ou les inconvénients d’un portfolio numérique ?

a. Donnez au moins quatre éléments en faveur d’un portfolio numérique.

b. Donnez au moins quatre inconvénients d’un portfolio numérique.

Sur les 22 répondants, 20 ont déclaré (à la question 2) n’avoir pas d’expérience personnelle des portfolios : en d’autres termes, ils ne pouvaient avoir en la matière que des praxéologies d’attente, anticipées. En l’espèce, la notion de portfolio ne leur était pas inconnue, en particulier dans sa version classique de showcase portfolio comme produit. Le portfolio est en effet décrit par 17 des enquêtés comme « un CV approfondi », permettant de présenter un bilan de compétences, et, pour quelques-uns d’entre eux, de donner à voir du même coup la dynamique personnelle et professionnelle que ce bilan sanctionne. Seuls 5 des 22 enquêtés évoquent la possibilité qu’un portfolio esquisse l’évolution éventuelle d’un portefeuille de compétences personnelles : comme l’écrit l’un d’eux, un portfolio est « un CV en

6 Voir le site EducNet à l’adresse http://www.educnet.education.fr/dossier/portfolio/default.htm.

plusieurs dimensions, c’est-à-dire où apparaît la progression et [qui] laisse place à l’évolution ». Deux d’entre eux – mais il s’agit là d’exceptions – évoquent ce en quoi on pourrait voir la fonction de « réflexion » du portfolio. L’un indique que le portfolio permet de « recueillir, traiter, formaliser à un instant précis la professionnalité, avec l’idée que cet objet est évolutif et qu’en le travaillant régulièrement il met en lumière le processus de professionnalisation ». L’autre précise qu’un portfolio, en retraçant « notre parcours professionnel », « est un moyen de mieux nous mettre à distance, nous donner du sens (quant aux périodes difficiles), à mieux cerner notre évolution en tant que professionnel ». Il ajoute : « Cela doit se rapporter à notre projet professionnel et mettre en valeur les compétences acquises et celles qui restent à acquérir… » Mais à aucun moment on ne voit apparaître un véritable usage réflexif touchant, non à la « professionnalité », mais aux apprentissages générateurs de cette professionnalité. En dépit d’une « théorie » des portfolios un rien désuète, les enquêtés vont répondre par un oui unanime à la question 3 : ils espèrent tous tirer des bénéfices d’un portfolio. L’un des répondants, féminisant le dispositif sur les bénéfices duquel on l’interroge, répond même : « Je ne sais pas car je ne sais pas à quoi elle sert, mais sûrement. » Cette foi de néophyte répond à la bonne nouvelle que porte la doxa des milieux professionnels fréquentés se décline pour l’essentiel en deux types d’arguments. Pour 12 des enquêtés, le bénéfice escompté est tourné vers soi, et alimente le rapport de soi à soi. Les réponses comportent souvent, alors, plus qu’une touche de narcissisme. Pour l’un des enquêtés, le portfolio doit « permettre de faire un retour sur soi ». Un autre énonce son attente ainsi : « réfléchir sur mes apprentissages, sur mes expériences, sur mon histoire ». Un autre encore dit son espoir en ces termes : « changer mon propre regard sur mes compétences ». Cet « idiotropisme » s’exprime sans façon : tel enquêté dit ainsi attendre du portfolio « la mise en évidence pour soi-même de compétences et la réflexion sur la manière de les présenter » (c’est nous qui soulignons). Ce même enquêté attend au reste du portfolio de véritables prouesses : la mise au jour « peut-être des compétences que l’on ne soupçonnait pas ». La dimension messianique affleure ; un enquêté laisse sa réponse inachevée, ouvrant sur une promesse qu’il renonce à formuler : « Il est intéressant, écrit-il, de s’arrêter et de faire le point des différentes compétences que l’on peut avoir. Peut-être est-ce un outil qui va »… La référence à soi n’est pas absente de 7 autres réponses qui, toutefois, mettent en rapport soi et autrui – en général un employeur potentiel. Un enquêté attend ainsi du portfolio qu’il lui permette de « prendre conscience de ses compétences et [de] pouvoir les “vendre” ». Un autre espère de même « la mise en valeur des éléments qui caractérisent mon parcours en vue d’intéresser un futur employeur, ou de poursuivre notre chemin professionnel (un moyen de faire un bilan) ». Des deux autres réponses non invoquées jusqu’ici, l’une est d’une sobriété peu interprétable (« Décrire mon parcours professionnel ») tandis que l’autre, unique en son genre, met l’accent sur ce que l’on peut apprendre (en dehors de savoirs « informatiques », aspect mentionné in fine par l’une des réponses passées en revue plus haut) par la pratique d’un portfolio : « Apprendre à

organiser, classer dans un même dossier des infos sur un thème, avec des méthodes communes, sur un travail, un projet, sur une personne. » À la question 4 – sur le caractère bénéfique ou non, pour les entreprises et les institutions, de l’usage du portfolio – trois enquêtés seulement disent ne pas savoir répondre ; mais tous les autres répondent affirmativement. (Faute de place, nous ne nous arrêterons pas davantage sur les arguments avancés.) La question 5, on le sait, était bifide : elle demandait de donner au moins quatre arguments plaidant pour le portfolio, ou plutôt pour le portfolio numérique, et quatre arguments en sa défaveur. Dans la plupart des réponses, c’est le fait d’un portfolio numérique qui a été pris en compte (par contraste avec un portfolio de papier). Dans le premier cas, notamment, le portfolio a donc toutes les qualités attribuées aux objets numériques : il est dynamique, interactif, multimédia (il y a « mise en adéquation possible du visuel et de l’écrit »), rapidement et facilement accessible, facilement et indéfiniment modifiable, économique ; il peut être plus aisément personnalisé (notamment dans son esthétique) et être communiqué par courrier électronique, etc. Dans le second cas, la même interprétation a prévalu : ici, ce que l’on craint surtout, c’est, du côté de l’auteur mais plus encore peut-être du côté de l’interlocuteur, employeur potentiel, un manque d’habitude dans le maniement d’un tel objet. Un enquêté qui déclare ne pas savoir « utiliser les techniques numériques » formule ainsi son inquiétude : « Si le destinataire n’est pas “ouvert” à ce genre de produit, il risque de nous mettre à la trappe ! » Il ajoute alors prudemment : « Il ne s’agit pas pour autant d’abandonner les supports écrits des lettres CV, LM ou encore communication verbale. » D’autres arguments à l’encontre du portfolio numérique sont classiquement ceux invoqués face à une réalité neuve, que l’on ne sait guère appréhender : l’un des enquêtés dit ainsi craindre la « rupture du face à face par une accroche trop forte au média » et redouter « l’uniformisation des portfolios », etc. Mais ici l’imagination semble moins fertile que pour plaider en faveur du portfolio numérique : alors que, sur les 4 × 22 = 88 réponses attendues à chacune des deux branches de la question 5, seulement 8 manquent à l’appel s’agissant des arguments pour, il en manque 20 s’agissant des arguments contre, alors même que l’on s’autorise à mobiliser l’éventualité de pannes électriques ou, plus radicalement, l’absence de matériel informatique… À ce tableau, ajoutons encore tel enquêté qui écrit, s’agissant des désagréments éventuels de l’usage des portfolios : « Je n’en vois aucun. » Si la bonne nouvelle a bien été entendue, sa réception se fait sur un fond d’inculture didactique qui masque les difficultés plus qu’elle n’aide à les résoudre. 6. Un problème didactique ouvert Dans le cas que l’on vient d’étudier, les enquêtés se réfèrent à une activité professionnelle et envisagent la création et l’emploi d’un portfolio numérique dans une double perspective : mieux se connaître soi-même au plan de ses compétences (et, plus rarement, de leurs évolutions possibles), d’une part, mieux toucher et davantage convaincre un employeur potentiel, d’autre part. Nous sommes loin, ici,

du portfolio comme dispositif didactique dans un contexte de formation générale. Constituer le portfolio comme tel, du double point de vue de l’économie et de l’écologie didactiques, reste aujourd’hui un problème ouvert, au double plan solidaire de la théorie et de l’ingénierie. Même si les travaux ne manquent pas (Butler, 2006), s’engager aujourd’hui dans l’usage du portfolio en formation, y compris dans un cadre de professionnalisation, demeure, qu’on le veuille ou non, une entreprise dont la conduite en temps réel relève encore bien davantage de la recherche que du simple souci formatif. 7. Références N. B. Toutes les adresses électroniques indiquées étaient valides le 28 septembre 2008. Barrett, H. C. (2004). References on Electronic Portfolios from recent dissertations and

other sources. http://electronicportfolios.com/ALI/eportfoliolit.pdf

Barrett, H. C. (2008, 26 septembre). Metaphors for Portfolios. Electronicportfolios.org. http://electronicportfolios.org/metaphors.html

Batson, T. (2002, 26 novembre). The Electronic Portfolio Boom: What’s it All About? Campus Technology. http://www.campustechnology.com/articles/39299/

Bruillard, É. (2005). Eportofolio authorship for teachers : considerations of flexibility and productive constraints. Conférence (en français) dans le cadre du Séminaire national « Le portfolio numérique dans la formation : le cas du C2i enseignant » (Dijon, 18-19 mai 2005). http://www.dijon.iufm.fr/static/tice/sem-port/p2conf.htm

Butler, P. (2006). A review of the literature on portfolios and electronic portfolios. Massey University College of Education. https://eduforge.org/docman/view.php/176/1111/ePortfolio%20Project%20Research%20Report.pdf

Challis, D. (2005). Towards the mature ePortfolio: Some implications for higher education. Canadian Journal of Learning and Technology, 31(3).

Conan Doyle, A. (1887). A Study in Scarlet. http://www.literature.org/authors/doyle-arthur-conan/study-in-scarlet/

Diez, M. (1996). The portfolio: Sonnet, Mirror and Map. In K. Burke (Éd.), Professional

Portfolios: A collection of articles (pp. 17-26). Arlington Heights : IRI/Skylight Training. http://eric.ed.gov/ERICDocs/data/ericdocs2sql/content_storage_01/0000019b/80/13/8d/4a.pdf

Eyssautier-Bavay, C. (2004). Le portfolio en éducation : concept et usages. Communication présentée au colloque TICEMéd 2004. Informations, savoirs,

décisions & médiations. Université de Toulon. [Revue en ligne] http://isdm.univ-tln.fr/PDF/isdm18/27-eyssautier.pdf

Jacobson, J. K. (2008). A short evolution of eportfolio thinking—Jayme’s take. WSU

program site. https://teamsite.oue.wsu.edu/progeval/eport/evolution/default.aspx

Ministère de l’Éducation du Québec. (2002, mai). Portefolio [sic] sur support numérique. http://www.meq.gouv.qc.ca/drd/tic/pdf/portfolio.pdf

Mueller, J. (2008). Authentic assessment toolbox. http://jonathan.mueller.faculty.noctrl.edu/toolbox/index.htm

Quinion, M. Portfolio. World Wide Words. http://www.worldwidewords.org/topicalwords/tw-por1.htm

Smith, K., & Tillema, H. (2003). Clarifying different types of portfolio use. Assessment

and Evaluation in Higher Education, 28(6), 625-648. Spence, W. & El-Ansari, W. (2004). Portfolio assessment: Practice teachers’ early

experience. Nurse Education Today, 24(5), 388-401. Tosh, D., Light, T. P., Fleming, K. & Haywood, J. (2005). Engagement with electronic

portfolios: Challenges from the student perspective. Canadian Journal of

Learning and Technology, 31(3).