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Bulletin de la Recherche Agronomique du Bénin (BRAB) Numéro spécial Technologie Alimentaire & Sécurité Alimentaire (TA&SA) – Décembre 2017 BRAB en ligne (on line) sur le site web http://www.slire.net ISSN sur papier (on hard copy) : 1025-2355 et ISSN en ligne (on line) : 1840-7099 57 Éducation en production de soja au nord-est du Bénin E. B. OGOUNIYI ADIMI 16 , C. F. J. DASSOUNDO-ASSOGBA 17 , A. T. KINKPE 17 et A. J. YABI 17 Résumé Le soja est une spéculation importante pour la sécurité nutritionnelle. Sa production est en pleine expansion au Nord-Est du Bénin. Mais il existe peu d’informations scientifiques sur elle dans la zone. Pour baliser le terrain à des recherches futures, cet article se propose de caractériser les producteurs de soja du Nord-Est du Bénin suivant leur éducation. Une Analyse Factorielle des Correspondances Multiples (AFCM) a été effectuée sur les données collectées auprès de 288 producteurs de soja de la zone. Des régressions logistiques ont été également spécifiées et estimées. Les résultats indiquent qu’il existe trois groupes de producteurs de soja suivant l’éducation dans le Nord-Est du Bénin : ceux ayant des Diplômes Académiques mais Non Formés sur les Techniques de production de soja (DANFT) qui représentaient 17 %, ceux Non Instruits et Non Formés sur les Techniques de production de soja (NINFT) qui représentaient 67% et ceux Instruits mais N’ayant pas de Diplôme Académique, Alphabétisés et Formés sur les Techniques de production de soja (INDAFT) qui représentaient 16%. L’appartenance d’un producteur à l’un ou l’autre de ces groupes est déterminée par plusieurs variables. Les parents instruits tendaient à instruire leur progéniture (DANFT et INDAFT). Ceux non instruits tendaient à ne pas instruire leur progéniture (NINFT). Le contact avec les services de vulgarisation tendaient à faciliter la formation sur les techniques de production de soja (INDAFT) le niveau d’instruction de ses parents/tuteurs, son propre sexe, sa localisation géographique, sa religion, son contact avec les services de vulgarisation, sa superficie de soja et sa perception des aléas climatiques comme contrainte à la production de soja. Ces résultats impliquent que pour une bonne maîtrise des itinéraires techniques de production de soja dans la zone, il faut sa bonne couverture par les services de vulgarisation. Mots-clés: Instruction, Formations sur les techniques de production, AFCM , Logit, Soja, Benin. Education in soya farming in North-Eastern Benin Abstract The Soya is an important crop for the nutritional security. Its production is increasing in North-East Benin. However, there is few scientific information on it in this area. To beacon the field for future researches, this paper aims atcharacterizing the soya farmers in that area of Benin as per their education. A Factorial Analysis of Multiple Correspondences (FAMC)of the data collected from 288 soya farmers in the area was done. Logistic regressions were also specified and estimated. Results point out that there are three education groups of soya farmers in the North-East Benin: those with Academic Diplomas but without training on soya farming technics (DANFT) (17%), those Non- Instructed and non-trained on soya farming technics (NINFT) (67%) and those Instructed but without academic Diploma, alphabetized and trained on soya farming technics (INDAFT) (16%). The membership of a soya farmer to any one of these groups is determined by several variables. The instructed farmers tended to instruct theirs kids (DANFT and INDAFT). Those without instruction tended to not instruct their kids (NINFT). The contact with extension services facilitated the training on the soya production technics (INDAFT). These results suggest that for a good mastering of the technics of soya production in the research area, the extension services should suitably cover it. Key words: Instruction, Training on farming technics, FAMC, Logit, Soya, Benin. 16 Esther Bossèdé OGOUNIYI ADIMI, Laboratoire d’Analyse Régionale et d’Expertise Sociale, 08 BP 0592 Cotonou, E-mail : [email protected], Tél. : (+229)95058866, République du Bénin 17 Ir. Cadoké Florent Jonas DASSOUNDO-ASSOGBA, Laboratoire d'Analyse et de Recherches sur les Dynamiques Economiques et Sociales (LARDES), Faculté d’Agronomie (FA), Université de Parakou (UP), BP 123, E-mail : [email protected], Tél. : (+229) 97412375, République du Bénin Ir. A. Thierry KINKPE, LARDES/FA/UP, BP: 123 Parakou, E-mail : [email protected], Tél. : (+229)96154808, République du Bénin Prof. Dr Ir. Afouda Jacob YABI, LARDES/FA/UP, BP: 123 Parakou, E-mail: [email protected], Tél. : (+229) 97320856/65455441, République du Bénin

Éducation en production de soja au nord-est du Bénin · To beacon the field for future ... considèrent chaque dimension ... les communes de N’Dali et Nikki ont été sélectionnées

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Éducation en production de soja au nord-est du Bénin

E. B. OGOUNIYI ADIMI16, C. F. J. DASSOUNDO-ASSOGBA17, A. T. KINKPE17 et A. J. YABI17

Résumé

Le soja est une spéculation importante pour la sécurité nutritionnelle. Sa production est en pleine expansion au Nord-Est du Bénin. Mais il existe peu d’informations scientifiques sur elle dans la zone. Pour baliser le terrain à des recherches futures, cet article se propose de caractériser les producteurs de soja du Nord-Est du Bénin suivant leur éducation. Une Analyse Factorielle des Correspondances Multiples (AFCM) a été effectuée sur les données collectées auprès de 288 producteurs de soja de la zone. Des régressions logistiques ont été également spécifiées et estimées. Les résultats indiquent qu’il existe trois groupes de producteurs de soja suivant l’éducation dans le Nord-Est du Bénin : ceux ayant des Diplômes Académiques mais Non Formés sur les Techniques de production de soja (DANFT) qui représentaient 17 %, ceux Non Instruits et Non Formés sur les Techniques de production de soja (NINFT) qui représentaient 67% et ceux Instruits mais N’ayant pas de Diplôme Académique, Alphabétisés et Formés sur les Techniques de production de soja (INDAFT) qui représentaient 16%. L’appartenance d’un producteur à l’un ou l’autre de ces groupes est déterminée par plusieurs variables. Les parents instruits tendaient à instruire leur progéniture (DANFT et INDAFT). Ceux non instruits tendaient à ne pas instruire leur progéniture (NINFT). Le contact avec les services de vulgarisation tendaient à faciliter la formation sur les techniques de production de soja (INDAFT) le niveau d’instruction de ses parents/tuteurs, son propre sexe, sa localisation géographique, sa religion, son contact avec les services de vulgarisation, sa superficie de soja et sa perception des aléas climatiques comme contrainte à la production de soja. Ces résultats impliquent que pour une bonne maîtrise des itinéraires techniques de production de soja dans la zone, il faut sa bonne couverture par les services de vulgarisation.

Mots-clés: Instruction, Formations sur les techniques de production, AFCM , Logit, Soja, Benin.

Education in soya farming in North-Eastern Benin

Abstract

The Soya is an important crop for the nutritional security. Its production is increasing in North-East Benin. However, there is few scientific information on it in this area. To beacon the field for future researches, this paper aims atcharacterizing the soya farmers in that area of Benin as per their education. A Factorial Analysis of Multiple Correspondences (FAMC)of the data collected from 288 soya farmers in the area was done. Logistic regressions were also specified and estimated. Results point out that there are three education groups of soya farmers in the North-East Benin: those with Academic Diplomas but without training on soya farming technics (DANFT) (17%), those Non-Instructed and non-trained on soya farming technics (NINFT) (67%) and those Instructed but without academic Diploma, alphabetized and trained on soya farming technics (INDAFT) (16%). The membership of a soya farmer to any one of these groups is determined by several variables. The instructed farmers tended to instruct theirs kids (DANFT and INDAFT). Those without instruction tended to not instruct their kids (NINFT). The contact with extension services facilitated the training on the soya production technics (INDAFT). These results suggest that for a good mastering of the technics of soya production in the research area, the extension services should suitably cover it.

Key words: Instruction, Training on farming technics, FAMC, Logit, Soya, Benin.

16 Esther Bossèdé OGOUNIYI ADIMI, Laboratoire d’Analyse Régionale et d’Expertise Sociale, 08 BP 0592 Cotonou, E-mail : [email protected], Tél. : (+229)95058866, République du Bénin 17 Ir. Cadoké Florent Jonas DASSOUNDO-ASSOGBA, Laboratoire d'Analyse et de Recherches sur les Dynamiques Economiques et Sociales (LARDES), Faculté d’Agronomie (FA), Université de Parakou (UP), BP 123, E-mail : [email protected], Tél. : (+229) 97412375, République du Bénin

Ir. A. Thierry KINKPE, LARDES/FA/UP, BP: 123 Parakou, E-mail : [email protected], Tél. : (+229)96154808, République du Bénin

Prof. Dr Ir. Afouda Jacob YABI, LARDES/FA/UP, BP: 123 Parakou, E-mail: [email protected], Tél. : (+229) 97320856/65455441, République du Bénin

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INTRODUCTION

Au Bénin comme dans la plupart des pays d'Afrique subsaharienne, l'agriculture est le secteur le plus important en ce qui concerne la création de richesse et d’emploi (MAEP, 2014). Pourtant, 36,2% de la population béninoise vivent en dessous du seuil de pauvreté (INSAE, 2011). Cette population est à 70% agricultrice (INSAE, 2015). Au nord-est du Bénin, le soja est une nouvelle filière en cours de développement pour faire face à cette situation de pauvreté. Selon les statistiques agricoles des dix dernières années (MAEP, 2014), le rendement moyen du soja tourne autour de 500 kg/ha. Ces niveaux de rendement obtenus sont très inférieurs au rendement potentiel de 3 t/ha (Agnoro, 2008). Ainsi, le rendement actuel est six fois plus faible que le rendement potentiel. Il se pose donc le problème de la faible productivité du soja.

Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce fait. Il s’agit du capital humain de l’agriculteur, le niveau de la pluviométrie et des intrants, les équipements et les matériels utilisés (Tolens, 2004 ; Herdeschee et al., 2012 ; Chausse et al., 2012). Le premier facteur qui influence l’usage des autres est sans doute la capacité de l’homme à combiner de façon harmonieuse les autres facteurs, autrement dit son éducation (Kaboré, 2011 ; Mushagalusa, 2015). La culture du soja étant moins exigeante en facteur de production (terre, main d’œuvre, capital), le facteur susceptible d’influencer en grande partie la productivité est l’éducation (Biaou, 2011).

L’éducation est une notion multidimensionnelle qui prend en compte l’éducation formelle (instruction), l’éducation non formelle et celle informelle (Montandon, 2004). De plus, dans la société, ces diverses formes d’éducation interagissent pour donner la compétence à l’individu au travail. Ainsi, l’éducation devrait être toujours considérée comme une variable composite. Cependant, la plupart des auteurs considèrent chaque dimension séparément (Chernichovsky, 1985 ; Lloyd et Blanc, 1996 ; Pilon et Clévenot, 1996 ; Kaboré (2003) ; Basile et Soumaré, 2004 ; Egg et Wade, 2006 ; Blein et al., 2008 ; Kaboré, et al., (2015) Mushagalusa et al., (2015). Mais, est-elle considérée ainsi dans le secteur agricole ?

Dans le secteur agricole, l’éducation a été abordée de diverses manières par les auteurs. Les auteurs tels que Jamison et Lau (1982) ; Philipps et Marbble (1986) et Chou et Lau (1987) ont mis l’accent sur le niveau d’Education Formelle (EF) tandis que Maclure (1997) a fait remarquer que l'Education Non Formelle (ENF) aussi est étroitement liée la performance agricole. Il vient que les diverses dimensions de l’éducation ont été souvent considérées de façon isolée dans la littérature. Ainsi, le caractère composite de l’éducation demeure peu exploré. Ce constat général est valable dans le secteur agricole du Bénin et particulièrement dans la filière soja au Nord-Est du Bénin.

Pour mieux comprendre le gap entre le rendement réel et celui potentiel du soja, il devient donc nécessaire d’explorer le niveau d’éducation de ses producteurs dans toutes ses dimensions. Qu’est ce qui caractérise alors l’éducation des producteurs de soja du Nord-Est du Bénin ? Cette question est celle traitée dans cet article. Il vise donc à caractériser l’éducation des producteurs de soja dans une approche holistique et à identifier ses déterminants. Les résultats pourraient permettre de mieux orienter les renforcements de capacité de ces producteurs pour une amélioration du rendement de soja.

MATERIELS ET METHODES

Zone de recherche

Cette recherche a été menée au Nord-Est de la République du Bénin qui représente la plus grande zone de production de soja du Bénin (MAEP, 2014). Elle est située entre 9° et 12° latitude Nord et 2° et 4° longitude Est (Figure 1). Cette zone est constituée des départements du Borgou et de l’Alibori.

Le volume de production de soja des cinq dernières années constitue le principal critère de choix des communes. Dans chaque département, les deux communes plus productrices ont été sélectionnées. Ainsi, les communes de N’Dali et Nikki ont été sélectionnées dans le Borgou et celles de Kandi et Banikoara dans l’Alibori. De même, dans chaque commune, deux villages ont été sélectionnés suivant les mêmes critères (Figure 1).

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Figure 1. Carte de la zone de recherche

Échantillonnage et base de données

L’unité d’observation de la recherche est le chef d’exploitation producteur de soja. Dans chaque village, trente-six producteurs ont été sélectionnés de façon complètement aléatoire (288 au total). En effet, à l’échelle du village, les producteurs de soja ont été premièrement recensés. Ensuite, leur liste a été soumise à la table des nombres aléatoires pour l’échantillonnage. Les données ont été collectées en deux étapes. La première consistait à collecter les données qualitatives et d’ordre général en focus group. La deuxième étape a consisté à approfondir ces données à l’aide de questionnaire structuré auprès de chaque chef d’exploitation échantillonné.

Les données ont été collectées à la fois sur le chef d’exploitation et ses parents ou tuteurs (lors de son jeune âge). Les données collectées sur le chef d’exploitation sont relatives à ses caractéristiques socioéconomiques et démographiques, aux formations reçus sur la production de soja et à son exploitation de soja. Les données collectées sur ses parents ou tuteurs sont relatives au sexe, au niveau d’instruction et aux principales activités du chef de ménage où a grandit le producteur.

Éducation et théorie du capital humain

Selon Dewey (1916), l’éducation est «l'inculcation des connaissances et des aptitudes par un groupe professionnel spécialisé (les enseignants) dans les institutions spécialisées (les écoles, collèges et universités)». Le sens de l’éducation sera élargi par Durkheim (1922) qui énonce que « l'éducation est l'action des adultes sur les jeunes pour leur transmettre des connaissances, des aptitudes et des comportements jugés nécessaires pour une communauté particulière. Ainsi, le champ de l’éducation a connu des évolutions notables dans le temps. Il est passé d’un processus de transfert de connaissances à celui d’enrichissement permanent des savoirs, savoir-faire et savoir être.

De ces définitions qui montrent l’évolution du champ de l’éducation, elle est perçue comme un facteur de réalisation de soi et d’éclosion des potentialités individuelles, un facteur de cohésion sociale et un facteur de développement économique et social car permettant de développer le capital humain (Delors, 1996). Elles amènent à englober sous le concept de l’éducation, trois types d’éducation complémentaire que sont le formel, le non formel et l’informel (Montandon, 2004). L’éducation formelle est celle dispensée dans un contexte organisé et structuré (Hart, 2013). Selon Arrow, (1973), l’éducation non formelle peut prendre des formes variables selon les spécificités de l’activité et le niveau de formation initiale et reste un processus d’apprentissage continu. Enfin, l’éducation informelle découle des expériences de la vie quotidienne liées au travail, à la famille ou aux loisirs et

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qui possède la plupart du temps un caractère non intentionnel de la part de l’apprenant mais qui comportent un important élément d’apprentissage (Hart, 2013).

Selon (Marshall, 1998), la théorie du capital humain déclare que la famille (caractéristiques de l’individu et celle des parents) joue un rôle déterminant dans le choix éducatif de l’individu. Le même auteur indique que l’éducation formelle (instruction) dépend plus des parents ou tuteurs. Par contre, les autres dimensions de l’éducation dépendent plus de l’individu lui-même et de son environnement. Ainsi, l’éducation est fonction des caractéristiques des parents ou tuteurs et de celles de l’individu et de son environnement. C’est cette approche théorique qui a guidé cette recherche.

Analyse Factorielle des Correspondances Multiples (AFCM) de l’éducation des producteurs de soja

L’Analyse Factorielle des Correspondances Multiples (AFCM) a été utilisée pour caractériser le niveau d’éducation des producteurs de soja. Pour cela, les variables nominales telles que le niveau d’instruction du producteur de soja (niveau primaire et niveau secondaire et plus), le diplôme obtenu (CEP, BEPC), son alphabétisation (alphabétiser ou non alphabétiser), sa formation en technique de production de soja (formation sur au moins une phase de l’itinéraire technique de production de soja), sa formation sur la gestion de son exploitation (formation ou non sur la gestion de la trésorerie de son exploitation de soja) et participation aux visites d’échange (participation aux visites d’échange ou non). L’AFCM a permis de mettre les variables en groupes réduits et homogènes diminuant ainsi la complexité de l’analyse des différentes relations existantes. Les estimations ont été faites à l’aide du logiciel R.

Tableau 1. Liste des variables qualitatives, modalités et significations ayant servi à la réalisation de l’Analyse Factorielle des Correspondances Multiples (AFCM)

Variables qualitatives Modalité Signification

Niveau primaire du producteur

Prim+ et Prim- Prim+= Avoir le niveau primaire, Prim-= na pas avoir le niveau primaire

Niveau secondaire et plus

NS+ et NS- NS+=Avoir le niveau secondaire et plus, NS-=Ne pas avoir le niveau secondaire et plus

CEP CEP+ et CEP- CEP+= Avoir le CEP, CEP-= Ne pas avoir le CEP

BEPC BEPC+ et BEPC- BEPC+= Avoir le BEPC, BEPC-=Ne pas avoir le BEPC

Alphabétisation ALPH+ et ALPH- ALPH+=Avoir été alphabétisé, ALPH-= Ne pas avoir été alphabétisé

Formation technique en production de soja

FTA+ et FTA- FTA+= Formé sur les techniques de production de soja ; FTA-=Non Formé sur les techniques de production de soja

Formation sur la gestion de l’exploitation

FG+ et FG- FG+= Formé sur la gestion de l’exploitation, FG-= Formé sur la gestion de l’exploitation

Participation à une visite d’échange

VE+ et VE- VE+= avoir participé à au moins une visite d’échange sur la production de soja, VE-= Ne avoir jamais participé à un visite sur la production de soja

Source : Données d’enquête des auteurs, 2016

Modélisation des déterminants de l’éducation des producteurs de soja

L’approche théorique retenue permet de déduire que l’éducation d’un individu est fonction de ses propres caractéristiques et de celles de ses parents ou tuteurs. Ainsi, on a :

( ) (1)

avec EDUij= groupe d’éducation j (combinaisons des différentes dimensions de l’éducation cité plus haut) auquel appartient le producteur de soja i, CIi=Caractéristiques du producteur de soja i et de son environnement, CPi= Caractéristiques des parents ou tuteurs du producteur de soja i et de son environnement

Pour Pilon et Clévenot (1996) et Mushagalusa et al., (2015), le niveau d’éducation formelle influence positivement l’éducation formelle des individus. Lorsque le chef deménage est un homme, l’individu a plus de chance d’être scolariser que lorsque le chef de ménage est une femme (Chernichovsky, 1985 ; Lloyd et Blanc, 1996 ; Pilon et Clévenot, 1996). Selon Kaboré (2003), l’activité principale exercée par

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les parents peut aussi influencer l’éducation des enfants et peut varier selon le type d’activité exercée (chefs de ménage, cadres moyens ou supérieurs, professions libérales, agriculteurs, éleveurs).

Plusieurs auteurs ont mis en exergues les caractéristiques de l’individu pouvant influencer son éducation. Pour Chabi et al., (2015), les hommes ont plus de chance d’être scolarisés que les femmes. Pour Kobiané (2001), l’ethnie joue un rôle assez important sur la décision des parents de scolariser leur enfant et l’influence peut varier d’une ethnie à un autre. Selon Nganawara (2016), les individus chrétiens ont plus de chance d’être scolarisé que les individus de religion musulmane. La religion musulmane a un impact négatif sur la scolarisation de l’individu. La commune de résidence est un facteur important de la scolarisation de l’individu parce que les communautés avec de mauvaises installations sanitaires, les installations scolaires de mauvaise qualité, les familles peuvent être moins enclins à investir dans l'éducation de leurs enfants (Holmes, 2003).

Selon Biaou et al., (2016), le contact avec les services de vulgarisation a un impact positif sur la décision du producteur de se faire former sur les techniques de production.

Les contraintes majeures limitant la production agricole sont les aléas climatiques, la faible productivité et la non maîtrise des techniques de production qui peuvent conduire le producteur à se faire former sur les techniques de production (Kaboré et al., 2015). Les producteurs qui font une extension des surfaces cultivées ont tendance à moins se faire former sur les techniques de production à cause de leur objectif principal qui est focalisé sur la production et non le rendement (Basile et Soumaré, 2004 ; Egg et Wade, 2006 ; Blein et al., 2008).

La variable EDUij est une variable dichotomique qui prend la valeur 1 lorsque le producteur i appartient au groupe d’éducation j et 0 si non. Ainsi, la régression logistique est le modèle convenable (Doucouré,2001).

Dans le cadre de cette recherche, le logit binaire a été utilisé et a permis d’identifier les facteurs déterminants l’appartenance des producteurs de soja au groupe d’éducation (Hurlin, 2003).

En appliquant le modèle théorique de l’équation (1) et la formule mathématique du logit au cadre empirique de cette recherche, (l’appartenance à un groupe d’éducation par producteurs de soja) est présentée comme suit :

( )

[ ( )]

où i indique le ième

producteur de soja (i=1,…,288) ; Pi est la probabilité que le producteur de soja i appartienne au groupe d’éducation j ; е est le symbole de l’exponentiel ; CPi est le vecteur des variables exogènes caractéristiques des parents du producteur i; CIi est le vecteur des variables exogènes caractéristiques du producteur i. Les Cii et les CPi inclus dans les modèles ont été retenus après le test de multicollinearité. est une constante et les ij sont des coefficients associés aux variables exogènes caractéristiques des parents du producteur i lorsqu’il appartient au groupe j, et les sont les coefficients associés aux variables exogènes caractéristiques du producteur i et de son environnement lorsqu’il appartient au groupe j. Les estimations ont été faites à l’aide du logiciel STATA 13. Des méthodes d‘estimation robuste ont été utilisées pour corriger les éventuelles hétéroscédasticités

RESULTATS

Caractérisation de l’éducation des producteurs de soja du nord-est du Bénin

Les résultats de l’Analyse Factorielle des Correspondances Multiples (AFCM) indiquent que les deux premières dimensions factorielles permettaient d’expliquer 48,72% de l’inertie (Tableau 2). Elles ont donc été retenues.

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Tableau 2. Pouvoir explicatif des AFCM

Paramètres Dim1 Dim2 Dim3 Dim4 Dim5 Dim6 Dim7 Dim8

Variance 0,25 0,23 0,15 0,12 0,11 0,09 0,04 0,01

% de variance 25,54 23,18 14,54 11,93 10,63 8,71 4,33 1,14

% de variance cumule 25,54 48,72 63,26 75,20 85,82 94,53 98,86 100

Dim= Dimension

Source : donnée d’enquête des auteurs, 2016

Répartition des producteurs de soja du nord-est du Bénin en groupes plus ou moins homogènes suivant leur éducation

Les figures 2et 3 montrent respectivement la représentation graphique du regroupement des variables et celle des individus sur les deux premières dimensions. La superposition de ces deux figures permet d’observer trois regroupements. Le premier regroupement est caractérisé par des producteurs instruits ayant des Diplômes Académiques (CEP ou BEPC et plus) mais n’ayant aucune Formation sur les Techniques de production du soja (DANFT). Le deuxième regroupement est caractérisé par des producteurs Non Instruits, non alphabétisés, Non Formés sur les Techniques de production du soja, non formés sur la gestion de l’exploitation et n’ont jamais effectué de visite d’échange (NINFT). Le troisième regroupement est caractérisé par les producteurs Instruits mais N’ayant aucun Diplôme académique, Alphabétisés, Formés sur les Techniques de production de soja, formés sur la gestion de l’exploitation et ayant participé à des visites d’échanges (INDAFT).

Figure 2. Représentation graphique des regroupements des variables d’éducation sur les deux premières dimensions

Source : donnée d’enquête des auteurs, 2016

-2 -1 0 1 2

-0.5

0.0

0.5

1.0

1.5

Dim 1 (25.54%)

Dim

2 (

23

.18

%)

Prim-Prim+

NS-

NS+

CEP-

CEP+

BEPC-

BEPC+

ALPH-

ALPH+

FTA-

FTA+

FG-

FG+

VE-

VE+

DANFT NINFT

INDAFT

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Figure 3. Représentation graphique des regroupements des producteurs sur les deux premières dimensions

Source : Données d’enquête des auteurs, 2016

Répartition des producteurs de soja du nord-est du Bénin suivant leurs groupes d’éducation et leur communes

Le test d’Independence Khi2 de Pearson effectué a présenté une valeur Khi

2 de 45,95 (degré de

liberté 6) significative au seuil de 1%. Ainsi, la répartition des producteurs de soja selon leur groupe d’éducation variait avec la localisation géographique de ces derniers (Figure 4).

Les producteurs NINFT étaient les plus répandus dans la zone d’étude (193 producteurs soit 67 %). Ils étaient plus représentés dans le département de l’Alibori (commune de Kandi et Banikoara). Ce résultat montre que le niveau d’éducation formelle(instruction) reste faible en milieu rural. Cependant, le département du Borgou était en avance sur celui de l’Alibori.Les producteurs ayant des diplômes académiques (DANFT) étaient plus nombreux dans la commune de N’Dali (département du Borgou) que dans les autres communes. De même, les producteurs ayant été instruits mais non diplômés et ayant été formés sur les techniques de production du soja et alphabétisés (INDAFT) sont plus

-1.5

-1.0

-0.5

0.0 0.5 1.0 1.5 2.0

-0.5

0.0

0.5

1.0

1.5 Factor map

Dim 1 (25.54%)

Dim 2 (23.18%)

20

63 78

167

168 208

224 244 245

256

42

120

147 148

149

170 172 194

220

228

278 11

102

218 254 3 36 46 59 136 158 227

22 235

77

252

6 49

107 226

279 12

180

156 157 21 111 31 4

165 238

17

23 24

26 29 32

33 55 80 81 85 94 97 98 103 105 115

126 129 130 135

138 139 141 142 143 144 150 151 152 155 159 161 162 166 171 173 174 175 178 179 181

182

183

184 185 186 188 190

191 192

193 195 196 197 198 199 200 201 203

204

206 207

209

210 211 212

213

214

215

216

217

230 231 232 233 234 239

240

243 246 247 248 249 250 255

258

263 264 265

268 270

277

280

282

283

284 285 286 287 288

9 5

28

2 35 52 54

76

82 86 95 99

106

112

123

125

128 133

134 140 187 202 205 262

30 43 45

121 131 154 176

177

189

237 241

242

251 253 259

261 266 267 7 27

41

58 60

62

67 153 163

164

225 229

257 269

272 276

13

16

18 40 87 91 116

169

34 47

61

100

104 110 219 236 53

56 57

127

275 83 108

160

221 222

260 271 273 274 281 8 19

10

51 145 146 37 44 50

64 68 72 74 90

122 137 73

113

114 117

119 132

48

39

69

70

75

38

65 66

71 88

92 93 96

101 109 118

1 89

124

79 84

223

15

14 25

Groupe1

Groupe 2 Groupe 3

DANFT

NINFT

INDAFT

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nombreux dans les communes du Borgou. Ceci s’explique par la présence, dans ce département de projets dont les actions sont centrées sur les formations sur les techniques de production du soja et sur la gestion des exploitations agricoles. Aussi, l’auto organisation des producteurs de ce département sous l’impulsion de l’Union Nationale des Producteurs de Soja (UNPS) a-t-elle conduit à ce résultat.

Figure 4. Répartition des producteurs de soja du Nord-Est du Bénin suivant leur groupe d’éducation et leur commune

Source : Données d’enquête des auteurs, 2016

Déterminants de l’appartenance des producteurs de soja du Nord-Est du Bénin aux différents groupes d’éducation

Les résultats d’estimations des modèles sont consignés dans le Tableau 3. Les trois modèles sont globalement significatifs au seuil de 1%. Environ 19% des variations de l’appartenance au groupe des producteurs de soja ayant des Diplômes Académiques mais Non Formés sur les Techniques de production de soja (DANFT) sont expliquées pas les variations des variables explicatives introduites dans le modèle. De même, 22% des variations de l’appartenance au groupe des producteurs de soja Non Instruits etNonFormés sur les Techniques de production de soja (NINFT) sont expliquées par les variations des variables explicatives du modèle. Aussi 38% des variations de l’appartenance au groupe des producteurs de soja Instruits mais N’ayant pas deDiplôme Académique, qui sont Alphabétisés et Formés sur les Techniques de production de soja (INDAFT) sont expliquées par les variations des variables explicatives introduites dans le modèle.

Les variables déterminant significativement l’appartenance d’un producteur de soja à l’un ou l’autre des trois groupes étaient le niveau d’instruction de ses parents ou tuteurs, son propre sexe, sa localisation géographique (commune), sa religion, son contact avec les services de vulgarisation, la perception par lui des aléas climatiques comme étant une contrainte de la bonne marche de la production du soja et la superficie qu’il emblave pour le soja. Cependant, le signe et les effets marginaux de ces variables variaient suivant le groupe.

L’instruction des parents ou tuteurs du producteur de soja augmentait sa chance d’avoir des diplômes académiques ou au moins d’être instruits.Et la probabilité qu’il fasse partie du groupe des producteurs de soja DANFT augmentait significativement de 0,25 et celle qu’ils appartiennent au groupe des INDAFT augmentait de 0,29. Par contre, sa chance de faire partir du groupe des producteurs de soja NINFT diminuait approximativement 0,25.

12 13

19

6

57 58

34

44

3 1

19 22

0

10

20

30

40

50

60

Banikoara Kandi N'Dali Nikki

Effe

ctifs

Communes

Diplômés Académiques mais Non Formés sur les Techniquesde production du soja (DANFT)

Non Instruits et Non Formés sur les Techniquesde production du soja (NINFT)

Instruits mais Non Diplômés, Alphabetisés et Formés sur les Techniquesde production du soja (INDAFT)

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Tableau 3. Résultats d'estimation des modèles de déterminants d'appartenance des producteurs aux groupesd’éducation

Variables Statistiques1

Déterminants de l’appartenance aux groupes d’éducation des producteurs de soja2

Diplômés académiques (DANFT) mais non formés

Non Instruits (NINFT) et non formés

Instruits mais non diplômés et ayant reçu l’alphabétisation et des formations

(INDAFT)

sur les techniques de production du soja

Coefficients Effets

marginaux Coefficients

Effets marginaux

Coefficients Effets

marginaux

Liées aux parents/tuteurs du producteur de soja

Sexe masculin 79,51 0,09 (0,51) 0,01 (0,06) 0,18 (0,37) 0,03 (0,06) -0,42 (0,48) -0,04 (0,04)

Niveau d’instruction primaire 5,21 2,15 (0,70)*** 0,25 (0,08)*** -1,52 (0,88)* -0,25 (0,14)* _ _

Niveau d’instruction secondaire 3,13 0,26 (0,93) 0,03 (0,11) -1,52 (0,99) -0,25 (0,16) 3,43 (1,19)*** 0,29 (0,10)***

Agriculteur 89,58 -0,70 (0,54) -0,08 (0,06) 0,86 (0,55) 0,14 (0,09) -0,55 (0,90) -0,05 (0,08)

Liées au producteur de soja et son exploitation

Sexe masculin 68,75 1,15 (0,43)*** 0,13 (0,05)*** -1,08 (0,36)*** -0,18 (0,06)*** 0,47 (0,59) 0,04 (0,05)

Commune de Banikoara (Alibori) 43,38 0,75 (0,71) 0,09 (0,08) 0,57 (0,48) 0,09 (0,08) -1,44 (0,78)* -0,12 (0,07)

Commune de Kandi (Alibori) 43,38 0,97 (0,69) 0,11 (0,08) 1,23 (0,55)** 0,20 (0,08)** -4,54 (1,00)*** -0,39 (0,09)***

Commune de N’Dali (Borgou) 43,38 2,02 (0,60)*** 0,23 (0,07)*** -0,83 (0,40)** -0,13 (0,06)** -0,24 (0,50) -0,02 (0,04)

Groupe socio-culturel Bariba 92,36 0,84 (0,99) 0,10 (0,11) -0,17 (0,62) -0,03 (0,10) -0,62 (1,05) -0,05 (0,09)

Religion Musulmane 93,06 -1,44 (0,60)** -0,17 (0,07)** 1,03 (0,57)* 0,17 (0,09)* -0,31 (0,71) -0,03 (0,06)

Contact avec les services de vulgarisation 38,19 -0,31 (0,40) -0,04 (0,05) -1,23 (0,33)*** -0,20 (0,05)*** 2,68 (0,51)*** 0,23 (0,04)***

Contrainte de faible productivité 12,28 0,37 (0,53) 0,04 (0,06) -0,23 (0,49) -0,04 (0,08) -0,52 (0,78) -0,04 (0,07)

Contrainte de non maîtrise des itinéraires techniques 1,05 -0,30 (0,92) -0,03 (0,11) 0,21 (1,04) 0,03 (0,17) _ _

Contrainte d’aléas climatiques 10,53 0,55 (0,55) 0,06 (0,06) -1,03 (0,44)** -0,17 (0,07)** 0,67 (0,52) 0,06 (0,04)

Superficie de soja emblavée (ha) 2,28 (2,76) -0,26 (0,14)* -0,03 (0,02)* 0,14 (0,07)** 0,02 (0,01)** -0,01 (0,08) -0,00 (0,01)

Constantes _ -2,08 (1,49) _ 0,12 (1,06) _ -1,32 (1,69) _

Nombre d’observations 285 285 285

Khi2 de Wald 43,88*** (ddl=15) 51,63*** (ddl=15) 51,63*** (ddl=13)

R2 ajusté (%) 19 22 38

1 : moyenne (écart-type) pour la superficie de Soja et pourcentage pour les autres variables (qualitatives) ; 2 : les valeurs entre parenthèses sont les erreurs-types ; ***, **, * : significatifs respectivement au seuil de 1%, 5% et 10% ; ddl : degré de liberté

Source : Données d’enquête des auteurs, 2016

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Un plus grand nombre de producteurs de soja de sexe masculin appartenaient au groupe des DANFT (probabilité augmentant de 0,13) tandis que les productrices appartenaient plus au groupe des NINFT (probabilité augmentant de 0,18). Ainsi, dans la zone de recherche, le producteur de sexe masculin avait plus de chance d’avoir des diplômes académiques.

Les producteurs de soja du département de l’Alibori tendaient à appartenir au groupe de NINFT et à ne pas appartenir à celui des INDAFT. Par contre ceux du département du Borgou tendaient à appartenir au groupe des DANFT et à ne pas appartenir à celui des NINFT. Ainsi, les producteurs de soja du département du Borgou avaient plus accès à l’instruction et à la formation sur les techniques de production du soja. Cela s’explique par le fait que le Borgou est le premier producteur de Soja au Bénin tandis que dans l’Alibori c’est maintenant que la production de soja est en train d’émerger.

Les producteurs du groupe socio-culturel Bariba appartenaient plus au groupe de NINFT et moins à celui des DANFT. Beaucoup d’entre eux n’avaient donc ni de diplômes académiques ni été formés sur les techniques de production de soja.

Le contact avec les services de vulgarisation favorisait l’appartenance des producteurs de soja au groupe des INDAFT et défavorisait l’appartenance au groupe des DANFT. Ainsi, l’accès aux services de vulgarisation favorisait l’accès aux formations pratiques sur les techniques de production de soja. Ce qui est normale, étant donné que les services de vulgarisation détiennent les informations sur les meilleures techniques de production de soja disponibles.

Les producteurs de soja du Nord-Est du Bénin qui percevaientles aléas climatiques comme contrainte à la bonne marche de la production du soja, tendaient à ne pas faire partir du groupe de NINFT. Plus précisément, la probabilité qu’ils appartiennent à ce groupe diminuait significativement de 0,17. Bien que n’étant pas significatif, la probabilité pour que ces producteurs fassent partie des groupes de DANFT et INDAFT augmentait. Ainsi, les producteurs de soja percevant les aléas climatiques comme une menace à la culture de soja ont tendance à être formés, soit sur le plan théorique (DANFT) ou sur le plan pratique (INDAFT).

Les producteurs ayant de grandes superficies de soja avaient tendance à ne pas appartenir au groupe des DANFT mais à appartenirà celui des NINFT. Lorsque la superficie emblavée pour le soja par un producteur augmente de un ha, la probabilité pour qu’il fasse partie du groupe des DANFT diminue de 0,03 et celle d’appartenir au groupe des NINFT augmente de 0,02. Ainsi, beaucoup de grands producteurs de soja non pas reçu de formations théoriques ou pratiques pour sa production.

DISCUSSION

Les résultats obtenus mettent en exergue la caractérisation et les déterminants des différents groupes d’éducation. Les principaux déterminants de l’éducation des producteurs de soja sont le niveau d’instruction de leurs parents ou tuteurs, leur propre sexe, leur localisation géographique (commune), leur religion, leur contact avec les services de vulgarisation, leur perception des aléas climatiques en tant que contrainte à la production du soja et la superficie qu’ils emblavent pour le soja. Ces résultats sont conforment à la théorie du capital humain qui sous-tend que l’éducation d’un individu est fonction des caractéristiques de ses parents et de leur environnement et des caractéristiques de l’individu lui-même (Marshall, 1998).

Ils confirment ceux de plusieurs chercheurs mais infirment aussi ceux d’autres. Pour ce qui est de l’influence de l’éducation des parents sur celui des enfants, (Holmes, 2003) a montré que l'éducation des parents est associée positivement à l’éducation des enfants au Pakistan. Nganawara (2016), a montré également que, plus le chef de ménage est instruit, plus les chances que les enfants soient scolarisés sont meilleures. Il est vraisemblable qu’un parent, ayant un niveau d’éducation élevé, soit plus enclin à investir dans l’éducation de son enfant (Chabi et al.,2015).

Des travaux antérieurs viennent également confirmer les résultats selon lequel, le sexe de l’individu a une influence positive sur son éducation. Ainsi, selon Kabore et al.,(2003), les hommes ont plus de chance d’être éduquer que les femmes. Pilon et Yaro, (2001) explique en disant qu’une plus forte implication des filles dans les travaux domestiques, dans la garde des plus jeunes enfants ; la crainte des parents que les filles scolarisées ne s’émancipent trop et notamment refusent le futur mari choisi par la coutume ; le risque de grossesse chez les filles pubères ; la perception d’une non-utilité de l’école pour les filles.

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En ce qui concerne la religion comme facteur déterminants de l’éducation, Nganawara (2016) a montré qu’au Cameroun sur le plan national et quel que soit le sexe, les enfants des chefs de ménage catholiques sont plus scolarisés que les enfants des chefs ménages musulmans. Pour Chabi et al., (2015), la faible scolarisation d’une zone géographique se mesure par son inadéquation à la réalité islamique. Ce qui confirme les résultats de cet article.

La commune de résidence du producteur comme déterminant, (Holmes, 2003) a montré que les communautés avec de mauvaises installations sanitaires, les installations scolaires de mauvaise qualité, les familles peuvent être moins enclins à investir dans l'éducation de leurs enfants.

Les résultats de cette recherche mettent également en exerguent la perception des aléas climatiques en tant que contrainte comme étant déterminant dans l’appartenance d’un producteur à un groupe d’éducation. Ces résultats obtenus confirment ceux de Kaboré et al., (2015) qui ont trouvé que l’une des contraintes majeures limitant la production agricole sont les aléas climatiques, et peut conduire le producteur à se faire former sur les techniques de production.

L’éducation telle que vu par les auteurs (Durkheim, 1922 ; Delors, 1996 ; Montandon, 2004 et Gilles, 2007) a trois dimensions : l’éducation formelle (instruction), l’éducation non formelle (formation sur les techniques de production par exemple) et l’éducation informelle (expérience acquise au travail). Cet article a bien pris en compte les deux premières dimensions. La troisième dimension étant difficile à cerner n’a pas été convenablement prise en compte dans l’article. Elle pourrait être mieux considérée dans les recherches futures.

CONCLUSION

L’objectif de cet article est de caractériser les producteurs de soja du Nord-Est du Bénin suivant leur éducation. L’Analyse Factorielle des Correspondances Multiples (AFCM) effectuée a permis de constituer trois groupes plus ou moins homogènes de producteurs. Le premier groupe est constitué des producteurs ayant des Diplômes Académiques mais Non Formés sur les Techniques de production de soja (DANFT). Les producteurs Non Instruits et Non Formés sur les Techniques de production de soja (NINFT) se retrouvent dans le second groupe. Le dernier groupe est composé des producteurs Instruits mais Non diplômés, ayant été Alphabétisés et Formés sur les Techniques de production de soja (INDAFT).

L’analyse des déterminants de l’appartenance à chacun de ces groupes révèle que les parents instruits ont tendance à avoir des descendants instruits. Les femmes sont un peu défavorisées par rapport aux hommes en matière d’instruction (DANFT, NINFT et INDAFT). La relation avec les services de vulgarisation favorise l’accès aux formations sur les techniques de production du soja (INDAFT). Les producteurs qui perçoivent les aléas climatiques comme contraintes à la production de soja essayent d’accéder aux formations sur les techniques de production de cette spéculation. Les grands producteurs de soja sont majoritairement Non Instruits et Non formés sur les techniques de production du soja (NINFT).

Ces résultats indiquent qu’à long terme, l’amélioration du niveau d’instruction dans le Nord-Est du Bénin passe par la scolarisation massive des enfants aujourd’hui. De plus, un bon niveau technique des producteurs de soja requière une bonne couverture du territoire par les services de vulgarisation. Aussi, ces différents groupes d’éducation devraient-ils avoir de l’influence sur la qualité de gestion et par ricochet sur la productivité de la production de soja dans cette région du Bénin.

REMERCIEMENTS

Les auteurs remercient le Laboratoire d’Analyse Régionale et d’Expertise Sociale, de même que la Coopération Suisse pour avoir financé cette recherche. Ils remercient aussi les lecteurs anonymes pour leurs remarques et suggestions pertinentes ayant permis d’améliorer la qualité scientifique du travail.

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