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lA MARCHE La déambulation est une activité complexe qui intéresse non seulement les articulations du membre inférieur mais la totalité du corps. La marche normale dépend d’un juste équilibre entre plusieurs facteurs : la résistance du squelette du membre inférieur, l’intégrité des articulations du pied, de la cheville, du genou, de la hanche, de la colonne vertébrale et du membre supérieur, de la valeur fonctionnelle des structures tendino-musculaires, des différents constituants du système nerveux périphérique et central, des mécanismes réflexes, des centres de coordination du mouvement et de leur régulation volontaire, de l’état général du sujet, de son équilibre, de ses motivations. La marche est une succession de mouvements cycliques répétitifs avec des déplacements s’effectuant dans les 3 plans de l’espace, avec une consommation énergétique minimum. Toutes les atteintes des structures ostéo- articulaires, musculaires, neurologiques, périphériques ou centrales vont retentir sur la marche avec mise en œuvre de mécanismes compensateurs. L’analyse de la marche a fait l’objet de très nombreux travaux et les méthodes se sont diversifiées au fur et à mesure du développement des technologies. La plupart de ces techniques sont encore complexes du domaine du laboratoire et peu utilisées par le clinicien. Le développement des méthodes ambulatoires rend plus accessible au clinicien ces techniques d’évaluation qualitatives et quantitatives de la marche normale et de ses troubles, et permet d’orienter et d’évaluer la prise en charge thérapeutique. Christian Mansat LETTRE D’INFORMATION (3 numéros par an) avril 2004 N°11 L A L E T T R E Historique Sous l’Antiquité,Gallien publie De motu muscularum ;il est considéré comme le père de la médecine du sport.La renaissance révolutionne ce domaine de la connaissance :Borelli fut le premier à appliquer aux êtres vivants les lois mécaniques découvertes par Galilée « De motu animalium,1685 » ; il est considéré comme le fondateur de la biomécanique. Editorial Editorial : Ch. Mansat 1 Historique 1 Le cycle de la marche normale : R. Darmana 2 Evaluation clinique de la marche : quels outils pour le kinésithérapeute ? : J. Bergeau 3 Mesure de la locomotion par une méthode accélérométrique : E. Barrey 3 L’analyse quantifiée de la marche en application clinique : B. Dohin 4 Apport de l’évaluation de la marche chez des patients déprimés : T. Hergueta, F. Delgado, D. Schoëvaërt, Y. Lecrubier 5 La marche. Méthodes de laboratoire : Y. Mohammad, E.M. Laasse 6 Sémiologie clinique des différentes marches pathologiques chez l’enfant : P. Lebarbier 7 Locometrix ® : pour une mesure ambulatoire quantifiée de la qualité de la marche : B. Auvinet, E. Barrey 8 Le pied du marcheur de grand fond : Paris/Colmar, une légende en marche ! : Cl. Huertas 11 Opinion : Ch. mansat 12 Brèves, bibliographies 3, 5, 7 SOMMAIRE Une autre étape majeure survient au XIX ème siècle : Muybridge réalise la première mesure du mouve- ment grâce à des séquences photographiques de chevaux à différentes allures « The horse in motion, 1882 » ; Jules-Etienne MAREY crée le premier laboratoire de biomécanique (la station physiologique) et pose les principes fondamentaux de l’analyse quantifiée de la locomotion. Jules-Etienne MAREY décrit la complémentarité des analyses cinétiques et dynamiques :lors d’une communication à l’Académie des Sciences,Marey et Demeny écrivaient,dès 1885,en parlant du saut de pied ferme : « L’intelligence de ce mécanisme suppose à la fois la notion de cinématique et la notion de dynamique du saut,c’est-à-dire la connais- sance du mouvement et celle des forces d’action ». A partir des années 70 les connaissances sur la physiologie de la marche,se sont diversifiées en relation avec les évolutions techniques. Toutes les méthodes d’analyse en ont bénéficié, cinématique,accélérométrie,dynamomètre,gonio- métrie,électromyographie (Pélissier J.,Brun V. 1994) La physiologie de la marche est mieux connue (Grossiord A.1981,Gras P .1996) La sémiologie clinique des troubles de la marche a été étudiée en rhumatologie, en orthopédie (Ducroquet E.1965,Nater B.1997) et en neurologie (Brissaud R. 1895). Cette analyse sémiologique de la marche a été un peu délaissée par le clini- cien qui a privilégié compte tenu des impor- tantes améliorations des diverses techniques, l’imagerie. Etablir un lien entre la physiologie de la marche et l’activité du clinicien nécessi- te des méthodes ambulatoires simples qui viennent en complément de l’exa- men clinique pour juger d’un trouble de l’équilibre,d’un défaut de locomotion, de l’action des différents traitements propres (Bessou P .,1988). L’objectif des méthodes accéléro- métriques (Auvinet B., Barrey E. 1997) est de mettre à la disposition du clinicien un outil de quantifi- cation ambulatoire pouvant être employé en routine. Homme qui marche, bronze d’Alberto Giacometti

Editorial lA MARCHE qui intéresse non seulement les ... · plantaire de 5°-10°,le genou et la hanche fléchis-sent pour amortir le choc,respectivement de 8-12° et 3-5°.En quittant

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lA MARCHELa déambulation est une activité complexequi intéresse non seulement lesarticulations du membre inférieur mais latotalité du corps. La marche normaledépend d’un juste équilibre entre plusieursfacteurs :■ la résistance du squelette du membre

inférieur,■ l’intégrité des articulations du pied, de

la cheville, du genou, de la hanche, de lacolonne vertébrale et du membresupérieur,

■ de la valeur fonctionnelle des structurestendino-musculaires,

■ des différents constituants du systèmenerveux périphérique et central, desmécanismes réflexes, des centres decoordination du mouvement et de leurrégulation volontaire,

■ de l’état général du sujet, de sonéquilibre, de ses motivations.

La marche est une succession demouvements cycliques répétitifs avec desdéplacements s’effectuant dans les 3 plansde l’espace, avec une consommationénergétique minimum.Toutes les atteintes des structures ostéo-articulaires, musculaires, neurologiques,périphériques ou centrales vont retentir surla marche avec mise en œuvre demécanismes compensateurs.L’analyse de la marche a fait l’objet de trèsnombreux travaux et les méthodes se sontdiversifiées au fur et à mesure dudéveloppement des technologies. Laplupart de ces techniques sont encorecomplexes du domaine du laboratoire etpeu utilisées par le clinicien.Le développement des méthodesambulatoires rend plus accessible auclinicien ces techniques d’évaluationqualitatives et quantitatives de la marchenormale et de ses troubles, et permetd’orienter et d’évaluer la prise en chargethérapeutique.

Christian Mansat

L E T T R E D ’ I N F O R M A T I O N ( 3 n u m é r o s p a r a n ) avr i l 2004

N°11

L A L E T T R E

HistoriqueSous l’Antiquité,Gallien publie De motu muscularum ;il est considéré comme le père de la médecinedu sport.La renaissance révolutionne ce domaine de la connaissance :Borelli fut le premier à appliqueraux êtres vivants les lois mécaniques découvertes par Galilée « De motu animalium,1685 » ; il estconsidéré comme le fondateur de la biomécanique.

Edi tor ia l

Editorial : Ch. Mansat 1Historique 1Le cycle de la marche normale : R. Darmana 2Evaluation clinique de la marche : quels outils pour le kinésithérapeute ? : J. Bergeau 3Mesure de la locomotion par une méthode accélérométrique : E. Barrey 3L’analyse quantifiée de la marche en application clinique : B. Dohin 4Apport de l’évaluation de la marche chez des patients déprimés : T. Hergueta, F. Delgado, D. Schoëvaërt, Y. Lecrubier 5

La marche. Méthodes de laboratoire : Y. Mohammad, E.M. Laasse 6Sémiologie clinique des différentes marches pathologiques chez l’enfant : P. Lebarbier 7Locometrix® : pour une mesure ambulatoire quantifiéede la qualité de la marche : B. Auvinet, E. Barrey 8Le pied du marcheur de grand fond : Paris/Colmar, une légende en marche ! : Cl. Huertas 11Opinion : Ch. mansat 12Brèves, bibliographies 3, 5, 7

SOM

MA

IRE

Une autre étape majeure survient au XIXème siècle :■ Muybridge réalise la première mesure du mouve-ment grâce à des séquences photographiques dechevaux à différentes allures « The horse in motion,1882 » ;■ Jules-Etienne MAREY crée le premier laboratoirede biomécanique (la station physiologique) et poseles principes fondamentaux de l’analyse quantifiéede la locomotion.

Jules-Etienne MAREY décrit la complémentaritédes analyses cinétiques et dynamiques :lors d’unecommunication à l’Académie des Sciences,Mareyet Demeny écrivaient,dès 1885,en parlant du sautde pied ferme : « L’intelligence de ce mécanismesuppose à la fois la notion de cinématique et lanotion de dynamique du saut,c’est-à-dire la connais-sance du mouvement et celle des forces d’action ».A partir des années 70 les connaissances sur laphysiologie de la marche,se sont diversifiées enrelation avec les évolutions techniques.

Toutes les méthodes d’analyse en ont bénéficié,cinématique,accélérométrie,dynamomètre,gonio-métrie,électromyographie (Pélissier J. ,Brun V.1994)La physiologie de la marche est mieuxconnue (Grossiord A.1981,Gras P.1996)

La sémiologie clinique des troubles de la marchea été étudiée en rhumatologie, en orthopédie(Ducroquet E.1965,Nater B.1997) et en neurologie

(Brissaud R.1895).Cette analyse sémiologiquede la marche a été un peu délaissée par le clini-cien qui a privilégié compte tenu des impor-

tantes améliorations des diverses techniques,l’imagerie.

Etablir un lien entre la physiologie de lamarche et l’activité du clinicien nécessi-te des méthodes ambulatoires simplesqui viennent en complément de l’exa-men clinique pour juger d’un trouble del’équilibre,d’un défaut de locomotion,de l’action des différents traitementspropres (Bessou P.,1988).

L’objectif des méthodes accéléro-métriques (Auvinet B., Barrey E.1997) est de mettre à la dispositiondu clinicien un outil de quantifi-

cation ambulatoire pouvant êtreemployé en routine.

Homme qui marche,bronze d’Alberto Giacometti

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Le cycle de la marche normaleS'ils n'étaient utilisés que pour marcher,les membres inférieurs seraient de conception moinscomplexe et la locomotion serait une fonction cinématique plus simple.Mais ils offrent unnombre infini de modes de déplacements au corps humain comme l'escalade,la course oula reptation et pour rendre disponibles toutes ces options simultanément,leur conception adu être très sophistiquée.La locomotion,si elle n'utilise qu'une partie des possibilités offertespar le système doit cependant l'utiliser avec sa complexité.

de la force inertielle produite par la masse et lavitesse du sujet.Le pied est alors en rotationexterne de 5-10°,le tibia franchit la verticale,serabat sur le pied pour créer une flexion dorsa-le de 10° environ, le genou et la hanche sontparvenus en extension.Le membre contro-laté-ral effectue son passage vers l'avant,son mouve-ment pendulaire induit une force inertielle delévitation qui réduit l'effort exercé par le piedporteur sur le sol d'environ 20% du poids ducorps ;■ le double appui de propulsion qui dure 10%du cycle,les deux pieds sont à nouveau simul-tanément en contact avec le sol,le pied porteurpousse en arrière et latéralement pour faireprogresser le corps vers l'avant et vers le piedcontro-latéral qui devient receveur.Cette pous-sée se produit en même temps qu'un pivote-ment sur la première tête métatarsienne ; il endécoule un début de flexion plantaire et de rota-tion externe du pied qui seront maximales endébut de phase oscillante.Le genou est en exten-sion (5-10°),la hanche est également en exten-sion,voire en hyper-extension (–5 à –10°).Lepied contro-latéral se pose sur le talon.Certains auteurs [1] intègrent ici l'initialisationde l'oscillation en tant que quatrième sous-phasede la phase d'appui.

La locomotion est organisée en cycles demouvements des membres inférieurs,ces cyclessont reproductibles et symétriques.A l'intérieurde ces cycles,les mouvements relatifs des diffé-rentes composantes bassin,fémurs,tibias,piedssont également reproductibles et symétriques.La description du cycle de marche peut s'arrê-ter aux seuls membres inférieurs mais les memb-res supérieurs et la ceinture scapulaire ont égale-ment des mouvements,combinés avec ceuxdes membres inférieurs,cycliques et symétriquesaussi.Le cycle de marche correspond spatialement àune enjambée ou 2 pas ; selon son activité,unindividu en produit quotidiennement entre 4100et 5800 [2].Sa description peut présenter desdifférences de détails selon les auteurs mais elletend aujourd'hui vers une définition uniqueadmise par tous.Par convention, le cycle demarche normale débute lorsque le talon d'unpied se pose et se termine lorsque ce mêmetalon se pose à nouveau de manière consécu-tive sur le sol ; il comprend deux phases essen-tielles qui sont la phase d'appui et la phaseoscillante,il dure environ 1 seconde (figure 1).

La phase d'appui dure 60% ducycle et comprend trois sous-phases :■ le double appui de réception qui dure 10%du cycle.Les deux pieds sont en contact avecle sol, le pied qui atterrit se pose entièrementpendant que le pied contro-latéral quitte progres-sivement le sol.C'est pendant cette période ques'effectue le transfert du poids du corps augmen-té de l'effet dynamique,du pied d'appui contro-latéral vers le pied receveur.Celui-ci est en rota-tion externe d'environ 10° par rapport à la direc-tion de déplacement, la réception se produitsur le bord postéro-externe du talon.La chevilleest d'abord en flexion neutre puis en flexionplantaire de 5°-10°,le genou et la hanche fléchis-sent pour amortir le choc,respectivement de 8-12° et 3-5°.En quittant le sol par l'avant pied,lepied contro-latéral dirige le mouvement du corpsvers l'avant et vers le côté ;■ la position plantigrade qui dure 40% du cycleet qui intervient immédiatement après que cetransfert ait été accepté.Un seul pied est encontact avec le sol,le corps qui était en arrièredu pied receveur progresse vers l'avant du fait

La phase oscillante dure 40% du cycle et peutaussi être divisée en trois sous-phases non repré-sentées sur la figure 1 :■ l'oscillation initiale, le pied est décollé dusol, il est en rotation externe maximale (envi-ron 20°),la cheville est en flexion plantaire maxi-male (10-20°),le genou est en flexion maxima-le (60-70°),la hanche fléchit.Le membre oscillantva croiser le membre porteur ;■ l'oscillation intermédiaire, le pied tournevers l'intérieur,la cheville réduit sa flexion plan-taire,le genou débute une extension,la hanchetend vers sa flexion maximale. Le membreoscillant croise le membre porteur ;■ l'oscillation terminale,le pied est en légèrerotation externe (environ 10°),la cheville est enflexion neutre, le genou tend vers l'extensionmaximale, la hanche a atteint sa flexion maxi-male (30°).Le membre oscillant se pose sur lesol.

Le cycle est terminé,le suivant commence.

● R.DarmanaINSERM U455,Hôpital Purpan,31052 Toulouse cedex 03

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1 cycle

phase d'appui phase oscillante

double appuide réception

double appuide propulsion

Figure 1 : représentation schématiquedu cycle de marche et de sesprincipales phases et sous-phases

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N° 11 - PAGE 3 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

Evaluation clinique de la marche :quels outils pour le kinésithérapeute ?

Pour l’examen de la marche,le kinésithérapeutea recours à :

1) l’écoute du patient :relaté spontané et inter-rogatoire pour rechercher des informations surla quantité et la qualité de la marche au momentde la prescription de kinésithérapie

2) l’observation de la station debout,des trans-ferts et de la marche du patient :observation dela posture et des mouvements lors de la marchespontanée et lors de la marche sur commande(sur piste de marche,en extérieur,dans les esca-liers,…).Mais comment transcrire cette infor-mation ? Si le kinésithérapeute veut décrire uneattitude posturale particulière ou une boiterieà la marche de la manière la plus impartiale,une photo le fera toujours mieux qu’un texte(avec lequel il va soit énoncer des évidences,soit courir le risque d’écrire des bêtises).Certainsappareils photo numériques permettent égale-ment d’enregistrer des séquences vidéo cour-tes.En outre,un long bilan écrit n’est pas attrac-tif aux yeux du médecin ou du confrère kiné-sithérapeute qui poursuit le traitement : il nesera pas lu. Même si ces photos ne sont pastoujours de grande qualité,elles atteignent leurbut :attirer l’attention du médecin ou du confrè-re.Le bilan est aussi une publicité pour le profes-sionnel de santé : il devient plus attrayant avecdes photos,tant vis-à-vis du patient que du méde-cin ou du confrère.La photo peut être montréeen temps réel au patient pour qu’il compared’une séance à une autre,vérifie l’évolution desa marche et renforce ainsi sa motivation.

3) la mesure à l’aide de tests cliniques validés,�ce qui permet de comparer les valeurs aux repè-res connus.La photo ou l’enregistrement vidéonumériques permettent une meilleure cotationque le simple examen visuel (le test pouvant êtrevisualisé plusieurs fois) ; la performance avantl’intervention du kinésithérapeute (score initial)peut être comparée avec celle de fin de traite-ment (score final) pour décider en particulierde l’arrêt ou de la poursuite des séances de kiné-sithérapie.

4) l’interprétation des éléments cliniquespour formuler son diagnostic kinésithéra-pique. Un score fonctionnel global peut êtreutilisé pour « classer » le patient :■ Bilan des incapacités du membre inférieur(Foot and ankle severity scale) de 0 (pas d’in-capacité) à 6 (incapacité totale)■ Catégories de déambulation (FunctionalAmbulation Categories) de 0 (non fonction-nelle) à 5 (parfaitement fonctionnelle)

● Jacques Bergeau,Kinésithérapeute enseignant,Grenoble

Test cliniques

a. mesures d’angles grâce à un logiciel qui auto-matise les mesures sur image (par exemple lelogiciel Imapix®).

b.Test des « dix mètres de marche :nombre depas » (sujets jeunes allure rapide :8-10 ; sujetsâgés : 12-14 ; sujets pathologiques : 13-25).

c.Test des « dix mètres de marche : chrono-métrage » (hommes : 5-10 s,moyenne 7,6 s ;femmes : 6-12 s,moyenne 8 s).

d.Test « up & go chronométré », test d’équilib-re, de pivotement et de rapidité (risque dechute si > 15 s)

e.Durée de l’« appui unipodal » sans appui,testd’équilibre (trouble si < 5 sec)

f.Test de « Tinetti »,13 items pour l’équilibre et9 items pour la marche :■ Initiation de la marche,marche en ligne etvirage,■ Hauteur,longueur,largeur,symétrie et régu-larité du pas,■ Stabilité du tronc(anomalies = risque de chute)

g.Test des « six minutes de marche »,testd’endurance à l’effort Hommes : distance en mètres parcourue en6 minutes : [7,57 x taille (cm)] – [5,02 x âge]– [1,76 x poids (kg)] – 309 Limite inférieure de la normale : distancecalculée - 153 mètresFemmes : distance en mètres parcourue en 6minutes : [2,11 x taille (cm)] – [2,29 x poids(kg)] – [5,78 x âge] + 667Limite inférieure de la normale : distancecalculée - 139 mètres

h.« Vitesse de marche confortable » hommes60-69 ans : 1,59 m/s ± 0,24 ;femmes 60-69 ans : 1,44 m/s ± 0,25 ;hommes 70-79 ans : 1,38 m/s ± 0,23 ;femmes 70-79 ans : 1,21 m/s ± 0,26).

Mesure de la locomotionpar une méthodeaccélérométrique

Une technique de mesure du mouvement originaleDès la fin du XIXème siècle,le physiologiste J.-E.MAREY avait établi les bases des deux typesd’analyse de la locomotion humaine ou anima-le : l’analyse dynamique qui s’intéresse auxcauses du mouvement (forces,moments,accé-lérations) et l’analyse cinématique qui décritles caractéristiques du mouvement (trajectoi-res,angles articulaires).De nos jours,les métho-des cinématiques sont largement utilisées aulaboratoire de biomécanique car elles sont trèsanalytiques et descriptives.Par contre,leur miseen œuvre reste encore coûteuse et limitée dansleurs applications cliniques.Pour envisager des applications pratiques etobtenir une information plus synthétique surles mouvements locomoteurs,une méthoded’analyse dynamique qui utilise des capteursd’accélérations fixés sur le corps a été mise aupoint à la Station de Génétique Quantitative etAppliquée (INRA Jouy).Lorsqu’une force agitsur un corps,elle provoque une variation devitesse de ce dernier pendant un intervalle detemps : cette variation est par définition l’ac-célération.Ainsi,grâce à un capteur d’accélé-ration placé à proximité du centre de gravité,il est possible de déterminer les forces quisoutiennent et propulsent le corps.Les avantages de cette méthode sont nomb-reux :■ elle est adaptée à la mesure ambulatoire dansdes conditions normales d’activité du patientet de l’athlète,■ elle peut s’appliquer à un grand nombre desujets en raison de sa facilité d’emploi et de sarapidité de mise en œuvre,elle est accessibleà toutes les analyses de la locomotion,qu’ellessoient animales ou humaines.L’appareil d’analyse accélérométrique de lalocomotion, initialement développé pour lecheval (Equimetrix®), est maintenant utilisépour d’autres applications notamment dans ledomaine médical et sportif.L’enregistrementde la locomotion d’un quadrupède équivautpour notre système de mesure à enregistrerdeux bipèdes synchronisés.Il était donc faciled’adapter la méthode pour analyser la marcheet la course humaine (Locometrix®).Le déve-loppement de toutes ces applications,réaliséesinitialement au Département de GénétiqueAnimale de l’INRA,a été confié sous licenceexclusive à la Société CENTAURE METRIX,lauréate du concours du Ministère de la recher-che et des technologies en 2001.

● Eric Barrey,INRA

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N° 11 - PAGE 4 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

L’analyse quantifiée de la marche enapplication clinique.

Depuis plus d’un siècle l’homme s’est penché très attentivement sur son mode de locomotionpréférentiel : la marche.Or cette activité,aussi banale qu’elle puisse paraître,est d’une grandecomplexité mécanique et dynamique.

Le médecin,dans sa pratique clinique,a décritnombre de « marches » perturbées ou patho-logiques,mais pressentant que ses yeux ne suffi-raient pas à appréhender complètement laréalité des anomalies, il a cherché des outilspouvant l’aider dans l’analyse précise de lamécanique de la marche et de là du mouve-ment en général.C’est la volonté et la nécessité de mieuxcomprendre la marche qui est à l’origine del’évolution des outils d’aide à l’analyse dumouvement humain.Aujourd’hui des systèmes dits « intégrés » d’ana-lyse quantifiée du mouvement (AQM) sont à ladisposition des chercheurs et des cliniciens.Ils associent :systèmes optoélectroniques,plates-formes de force,vidéo,électromyographie etparfois dispositifs de mesure de la consomma-tion énergétique Ces examens seront toujourscouplés à un examen clinique et parfois à desquestionnaires fonctionnels spécifiques desexplorations menées.Toutes les données recueillies (spatio-tempo-relles,cinématiques,cinétiques et de coût éner-gétique) permettent d’appréhender la globali-té du mouvement au niveau du système effec-teur qu’est le système musculo - squelettique.Quelles peuvent être les applications des outilssophistiqués dont dispose actuellement le méde-cin et à quels objectifs peuvent ils répondre ? La première application est la compréhen-sion du mouvement et ce sont les applicationschez l’individu sain.La seconde est l’analysedes répercussions d’une maladie sur lemouvement.La troisième est d’évaluer lesconséquences d’un traitement soit en simu-lant celui-ci (par exemple dans le cas d’un projetchirurgical) soit en analysant les effets du trai-tement.Enfin,ce peut être l’évaluation desthérapeutiques réalisées afin d’en comparerles résultats et d’en mesurer l’efficacité.C’est le physiologiste ou le médecin qui peuventutiliser ces outils afin d’aller plus avant dans lacompréhension du mouvement humain.Il estsouvent aidé par un ingénieur,capable de fairefonctionner et évoluer pour lui ces machinescomplexes que sont devenues les systèmesoptoélectroniques intégrés.Chez l’adulte les études menées concernent,la marche normale et la marche perturbée (pardes obstacles,par des conditions inhabituelles :port de chaussures,de charges sur le dos,gros-sesse...).La marche du sujet âgé est l’objet de nomb-

reux travaux.En effet,l’altération des capacitéssensorielles et motrices lors du vieillissementet les pathologies associées perturbent la marcheet le mouvement.A l’autre extrémité de la vie, la maturationneurologique et motrice de l’enfant deman-de du temps.On sait aujourd’hui un peu mieuxgrâce à l’AQM,comment évolue l’acquisitionde la marche chez l’enfant,quelle est l’influen-ce de sa maturation neurologique et celle desa progression vers la morphologie adulte.Le comportement du corps humain dans sonenvironnement est étudié afin d’optimiser laconception des instruments qu’il utilise.Parexemple, les études de chocs en automobileréalisées par l’INRETS,bénéficient de l’utilisa-tion de système d’analyse du mouvement.Le sport enfin,à l’heure où il faut optimiser aumaximum le geste ou en réduire le risque,estun vaste champ d’études du mouvement dansnombre de disciplines.Profitant de la meilleure connaissance dumouvement normal, l’analyse du mouvementdans les situations pathologiques prend un autreintérêt.Les perturbations du mouvement aidentà comprendre certains mécanismes physiopa-thologiques primaires ou secondaires.Les pathologies du système nerveux et senso-riel sont évidemment concernées au premierplan. Chez l’adulte ce sont les séquelles d’ac-cidents neurologiques vasculaires ou trauma-tiques,centraux ou périphériques,mais aussi lespathologies dégénératives ou héréditaires(maladie de Parkinson,sclérose en plaque,neuro-pathies périphériques,myopathies…).Chez l’en-fant ce sont les pathologies neuro – musculai-res (infirmité motrice cérébrale,myopathies,myéloméningocèles,neuropathies…) (fig.1).Si la marche a été (et est encore) largementétudiée, les atteintesdu membre supérieursont de plus en plusl’objet d’explorations,en partie à cause del’amélioration desperformances dessystèmes.

L’appareil ostéo - articulaire et ses patholo-gies représentent la seconde grande indi-cation d’AQM. Chez l’adulte ce sont les patho-logies dégénératives et inflammatoires ( arthro-se,polyarthrite..) mais aussi la traumatologieosseuse ou ligamentaire,de l’adulte jeune (voiredu sportif) ou du sujet âgé,enfin les amputa-tions.Chez l’enfant ce sont les anomalies congé-nitales (malformations des membres inférieurs,pied bot varus équin…),les troubles statiques(déformations des pieds,inégalités de longueurdes membres inférieurs,déviations axiales desmembres…),enfin les déviations vertébrales(scoliose…).L’AQM est aussi un outil d’aide à la décisionmédicale.En matière de traitement chirurgical,la simulation de gestes chirurgicaux par desblocs nerveux,des injections de toxine ou desorthèses peut aider à préciser l’indication d’ungeste chirurgical définitif.

Enfin,à l’heure où les pratiques médicalesse doivent de faire la preuve de leur effica-cité,les systèmes d’AQM deviennent des instru-ments d’évaluation :évaluation de traitementsmédicaux (maladie de Parkinson,toxine botu-lique dans la spasticité ou les dystonies) (fig.2),évaluation des traitements par rééducation,des programmes d’entraînement (thérapeu-tiques ou préventifs) pour les pathologies neuro-logiques,et les pathologies dégénératives del’appareil locomoteurs (arthrose,polyarthrite…).De même des prothèses ou des orthèses peuventêtre évaluées et améliorées (amputés,infirmesmoteurs,scoliose…).

L’évaluation du résultat de traitements chirur-gicaux est également une indication fréquen-

Figure 1 :Patient IMC diplégiquepréparé pour unenregistrement parsystème intégré avecEMG de surface.

Figure 2: Exemple de courbe decinématique objectivant l’action de latoxine botulique sur la flexion-extensiondu Genou (en bleu la courbe aprèsinjection).

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te :en orthopédie adulte (prothèse de hancheou de genou,ligamentoplasties,ostéosynthèsede fracture ou résection tumorale des memb-res),en orthopédie pédiatrique (chirurgie multi-sites de l’infirme moteur cérébral,chirurgie despathologies congénitales :pied bot varus équin,luxation congénitale de hanche ou chirurgiede la scoliose…) ;ou en neurochirurgie,(chirur-gie de la maladie de Parkinson,rhizotomies…).

L’AQM a donc pris une place de taille dans lapratique médicale et est probablement appe-lée à la renforcer.Les prochaines années verrontprobablement se préciser les indications depratique clinique courante.L’accès aux labo-ratoires sera alors certainement difficile car cestechniques demandent du temps pour leur réali-sation et leur interprétation.La constitutiond’équipes performantes (médecins et ingé-nieurs) est nécessaire à court terme pour queces futures unités d’application clinique fonc-tionnent normalement.

L’interprétation efficace des données nécessi-te une solide formation en biomécanique.Lamanipulation de ces machines impose la colla-boration d’ingénieurs motivés par les applica-tions cliniques et acceptant leurs contraintes.Un travail important reste à faire pour faciliterla lisibilité des résultats par le clinicien nonspécialiste et pour sélectionner les donnéesutiles en application clinique.Les voies de déve-loppement futures sont certainement l’AQM dumembre supérieur et du rachis,mais il resteencore beaucoup à faire dans les premiersdomaines d’application.

● Dr Bruno Dohin,Service de chirurgie orthopédiquepédiatrique Pr R.Kohler,Hôpital Ed.Herriot,Lyon 69437 cedex03.Laboratoire debiomécanique et de modélisation humaine,LRE32,Université Claude Bernard Lyon.

N° 11 - PAGE 5 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

La marche en chiffres■Alternance de phase d’appui (60%) et de phase

oscillante (40%)■Longueur des pas en moyenne 1,40 (demi-pas 70 cm)■Vitesse de marche entre 2 et 7 km / heure, elle dimi-

nue avec l’âge• moyenne 10 secondes pour 10 mètres• 110 pas par minute• 80 m par minute

■Consommation d’oxygène 10ml / kg / minute • décubitus 3,5 ml / kg / minute• station debout 5 ml / kg / minute

■La dépense énergétique aérobie de l’ordre de 5Kcal / minute pour une vitesse de 5 km / heure.L’équivalent calorique d’un litre d’oxygène consommé est de 5Kcal

■1 heure de marche 300 Kcalla course entre 12 et 25 Kcal / minutetravail pénible entre 5 et 20 Kcal / minute

Apport del’évaluation de la

marche chez des patients

déprimésDepuis l’antiquité, on sait que l’équilibrepsychomoteur est perturbé au cours des trou-bles psychiatriques. Dans la dépression, onobserve un ralentissement global. Il est utilede pouvoir quantifier objectivement ces modi-fications motrices et de pouvoir les suivre soustraitements. La marche semble être un bonmodèle car elle est cliniquement modifiée lorsd’un Episode dépressif,elle est liée à l’évolu-tion des systèmes nerveux et musculo-sque-lettique, elle peut être étudiée à différentsniveaux du système nerveux central, elle estmodulée par le système monoaminergique,elle est bien étudiée sur le plan physiologique.Sloman et Lemke,plus récemment,ont confir-mé, à l’aide de méthodes complexes que lamarche était significativement modifiée aucours d’un Episode dépressif. Nous avonsmontré,à l'aide d'un analyseur mono-caméra,ne nécessitant la pause d’aucun matériel,chezdes patients hospitalisés présentant un Episodedépressif, filmés « à l’insu »,à « vitesse norma-le » et à « vitesse rapide » que tous les para-mètres étudiés étaient significativement modi-fiés quelles que soient les modalités d’enre-gistrement. La vitesse et la longueur du pasétaient,en moyenne, réduites d’environ 20%.Nous avons par ailleurs mis en évidence uneévolution hétérogène de ces paramètres après3 semaines de traitement par antidépresseuravec une tendance à la normalisation de lavitesse et une longueur du pas qui restait,elle,strictement inchangée,plus courte d’environ15 % par rapport aux témoins.L’analyse de lamarche permet de progresser dans l’étude dela physiopathologie de la dépression,mais peutaussi contribuer au suivi clinique des patients,en particulier chez ceux présentant des formesrécidivantes et à l’évaluation des nouveauxtraitements.

●T.Hergueta,F.Delgado,D.Schoëvaërt,Y.Lecrubier,Hôpital de la Salpétrière,Paris

Analyse de la marche humaine dans lapratique hospitalière par une méthodeaccélérométriqueB. Auvinet – D. Chaleil – E. Barrey, Revue Rhumatologue1999, 66 (7-9), 445 –457Ce travail fait le point sur les différentes méthodesd’analyse de la marche :• analyse cinésiologique, qui fait appel à l’électro-myographie, permet de comprendre les actionsmusculaires au cours de la marche.• Analyse cinématique qui utilise des enregistrementsvidéos et des systèmes opto-électronique, informentsur la biomécanique des mouvements. Le locomètrede Paul Bessou est bien adapté à l’étude de la marche, • Analyse cinétique qui fait une étude des forces quiinterviennent dans le mouvement. Il existe plusieursappareils de mesure, les semelles baro-podomé-triques, les plates-formes de forces et les accéléro-mètres, • Les avantages de cette dernière méthode sont expo-sés avec des études comparatives dans une popula-tion témoin et pathologique.

Runners’s stride analysis : comparaison ofKinematic and Kinetic analysis under fieldconditionsB. Auvinet et Coll., Science et Sport 2002, 17- 92 - 94Cette étude a pour but d’objectiver chez 7 athlètes lacorrespondance entre l’enregistrement cinématogra-phique de la course et le signal d’accélération avec lesystème locométrix. Cette technique qui mérite d’êt-re développée apporte des informations utiles à l’ath-lète et à son entraîneur sur l’efficacité de sa foulée.

L E S I T E

www. observatoire-du-mouvement. com

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La marcheMéthodes de laboratoire

L’analyse quantifiée de la marche (AQM) est un examen complémentaire permettant d’enregistrerles données cinématiques,cinétiques et électromyographiques.

ciel d’animation,de reproduire le déplacementdes différents segments corporels (Fig.2).

●Les plate-formes de forces mesurent les3 composantes de la force d’appui ainsi quele couple de cette force par rapport au centre

de la plate-forme (fig.3)●Le système d’enregistrementEMG permet d’enregistrer àl’aide d’électrodes de surfa-ce l’activité électrique desmuscles, leur période decontraction rapportée aucycle de marche (Fig.4).

A l’issu de l’examen, le logi-ciel Polygon (Vicon – OxfordMetrics) permet de fournir surCD l’ensemble des résultats :l’enregistrement vidéo,le kiné-gramme, les paramètresspatiaux temporels,cinéma-tiques,cinétiques et les tracésEMG.Ces méthodes ont leurs limi-tes qu’il faut égalementconnaître.

Limites liées au matériel ■ Calcul des coordonnées3DLe calcul des coordonnées3D des marqueurs nécessiteque chaque marqueur soit «vu » par au moins 2 caméras.L’utilisation d’aides de marche(déambulateur,tierce person-ne,…) risque de masquer lesmarqueurs et ne permet pas

le calcul précis des paramètres cinématiques.■ Mesure des forces d’appui et calcul desparamètres cinétiquesLes dimensions des plate-formes de forces sonthabituellement choisies en fonction du type depatient à analyser (adulte ou enfant).Il faut obte-nir un appui monopodal sur chacune des plate-formes de forces.L’utilisation d’aides de marchefausse l’enregistrement des forces d’appui.L’absence de mesures des forces d’appui nepermet pas le calcul des paramètres cinétiques(moments,puissances).■ Enregistrement EMGLes électrodes habituellement utilisées sont desélectrodes de surface qui présentent l’avantaged’être non invasives mais ne permettent d’en-registrer que les muscles superficiels.En plus,chez les petits patients, les risques de diapho-nie ou « cross talk » sont fréquents et perturbentla qualité des enregistrements.

D’autres problèmes sont liés au modèle decalcul des centres articulaires et au nombre demarqueurs.Pour le pied par exemple, l’utilisa-tion de 3 marqueurs ne permet pas de carac-tériser les mouvements du pied dans les 3 plansou même dans le plan sagittal où la mesurepeut-être faussée par la cassure située au niveaude l’articulation tarso-métatarsienne.

Limites liées au patient Chez l'enfant trop jeune,non coopérant ou inca-pable de se déplacer sans aide le long du couloirde marche,les mesures non reproductibles nepeuvent documenter une évaluation quantita-tive fiable des paramètres de la marche.Enfin, les mesures peuvent se révéler impréci-ses quand le repérage des points anatomiquesest délicat ou quand le mouvement de la peauentraîne un déplacement important et noncontrôlé des marqueurs (sujets obèses).

Malgré ces limites,ces systèmes d’analyse de lamarche en 3 dimensions, toujours associés àl’examen clinique,ont permis d’accomplir desprogrès incontestables dans la compréhensionde la marche normale et de ses troubles.Par exemple,une anomalie d’amplitude arti-culaire en phase oscillante peut avoir plusieurscauses : Raideur articulaire,rétraction ou acti-vité musculaire anormale (clinique + cinéma-tique + EMG).

En phase d’appui,les anomalies de positionne-ment des articulations adjacentes modifient laposition du vecteur force par rapport au centrede rotation de l’articulation et peut entraîner unmoment et un mouvement anormaux (ciné-tique).Il s’agit également d’une méthode d’évaluationobjective et reproductible qui aide à la décisionthérapeutique et à l’évaluation des résultats.

● Y.MOHAMMAD,Médecin MPR,E.M.LAASSEL,Docteur IngénieurCRF BOIS LARRIS –60260 LAMORLAYE

Les dimensions idéales de la salle d’examensont 14 mètres de long par 7 mètres de large.Lepatient doit atteindre sa vitesse de croisière avantd’arriver à la zone d’enregistrement,située aumilieu,et s’arrêter sans être obligé de freiner.

La réalisation de cet examen nécessite un équi-pement sophistiqué :●Systèmes de caméra vidéoet magnétoscope permet-tant l’enregistrement dudéplacement de face,profil et dessus de façonsimultanée avec visuali-sation au ralenti ou arrêtsur image.

●Système d’analyse dumouvement en 3 dimen-sions dont le principe repose sur l’utilisationde marqueurs rétro-réfléchissants positionnéssur des repères anatomiques précis et filmésà l’aide de caméras infra-rouges (Fig.1).Ledéplacement des marqueurs sera reconstruiten 3 dimensions permettant,à l’aide d’un logi-

Fig.3 : Kinégramme avec le déroulementdes appuis sur la plate forme de force

Fig.2 : Cinématique normale

Fig.4 :Tracé EMG,En rouge timing de contraction physiologique.Activité anormale des triceps en phase oscillante.

Fig.1

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poliomyélite ne se voit presque plus en France.La myéloméningocèle est également moinsfréquente.L’Infirmité Motrice Cérébrale (IMC)reste la cause la plus habituelle.L’hémiplégiqueet le diplégique ont une marche caractéristiquebien connue des spécialistes.Là plus qu’ailleursl’AQM est indispensable à l’analyse des défor-mations et aux choix thérapeutiques.4. Les maladies neuro-musculaires,et enparticulier les myopathies,se révèlent par unemarche dandinante,une fatigabilité,et des chutesfréquentes.

Les troubles de la marche de l’enfant peuventsouvent être reconnus cliniquement. Lesexamens complémentaires seront surtout à viséeétiologique.Il faut faire une place particulièreà l’analyse quantifiée de la marche qui est unexamen objectif, reproductible, indispensablepour comprendre des anomalies complexesdes troubles de la locomotion.

● Dr.Pierre LEBARBIERCentre Paul Dottin (ASEI) Ramonville St-Agne

Sémiologie clinique des différentesmarches pathologiques chez l’enfant

Les troubles de la marche,bénins ou sévères,sont des motifs fréquents de consultation enorthopédie pédiatrique.La sémiologie clinique des différentes marches pathologiques del’enfant est caractérisée par deux types de signes :■ Des signes d’alerte non spécifiques,qui vont permettre d’affirmer la nature et l’importancedu trouble de la marche■ Des signes cliniques,plus discrets,qu’il faut rechercher pour préciser la cause du trouble

1. Les affections post-traumatiques. Lesséquelles de traumatismes des membres infé-rieurs de l’enfant peuvent se traduire par uneboiterie,conséquence d’une douleur transitoi-re ou d’une inégalité de longueur non compen-sée. Il faut individualiser la pathologie desapophyses observées dans le cadre de lapratique du sport qui peuvent entraîner uneboiterie à cause de la douleur qu’elles peuventengendrer : Osgood Schlatter, Sever, Kohler,etc.2. Certaines affections orthopédiquespeuvent entraîner des troubles de la marche austade de début ou de séquelles.- La synovite aiguë transitoire et l’ostéo-chondrite primitive de la hanche (OPH)commencent par une boiterie d’apparitionbrutale.La limitation de la rotation interne dela hanche est habituelle.- L’épiphysiolyse survient chez le grand enfantet peut se traduire par une boiterie et une rota-tion externe du membre atteint,associées à uneéventuelle douleur dans les formes aiguës.- Les inégalités de longueur des membres infé-rieurs peuvent entraîner une boiterie quandleur valeur est importante.La bascule du bassintraduit le retentissement sus-jacent.Des signescliniques spécifiques orienteront vers l’étiolo-gie.- Les anomalies de rotation des membresoccupent une place importante dans les trou-bles de la marche de l’enfant.Il n’y a ici pas dedouleur ni de boiterie mais des anomalies deposition des genoux et/ou des pieds à la marche.L’exagération de l’antéversion fémorale (CoxaAntétorsa),banale chez le jeune enfant,se traduitpar des pieds et des genoux en rotation inter-ne.Dans la torsion tibiale interne isolée,seulsles pieds sont « en dedans ».Dans la « triple défor-mation » les genoux sont « en dedans » quandles pieds sont dans « l’axe » ou quand les piedssont « en dehors ».- Les rhumatismes inflammatoires et princi-palement l’arthrite chronique juvénile (ACJ)sont plus rares .Ils entraînent une boiterie asso-ciée à des signes inflammatoires des articula-tions atteintes.3. Les affections neurologiques centralesou périphériques se traduisent par des marchescaractéristiques en fonction de l’étiologie.La

Les signes cliniques d’alerte.Ils sont au nombre de trois,souvent associés :la boiterie, la douleur et les déformations desmembres.Ils doivent orienter vers une étiologiequi demande à être confirmée par des argu-ments cliniques retrouvés à l’examen1. La boiterie. C’est le signe d’appel majeurque l’on ne peut décrire sans faire référence aulivre de Ducroquet.2. La douleur n’est pas un signe fréquent.Ellen’est jamais isolée et est le plus souvent un signed’accompagnement des autres symptômes.Onla retrouve dans les affections traumatiques,fracture de fatigue ou fracture minime entraî-nant une impotence fonctionnelle relative,dansles troubles de croissance,conséquences de lamicro-traumatologie sportive,ou dans les épiphy-siolyses aiguës de l’adolescent.3. Les déformations. Elles peuvent être dyna-miques ou fixées,toucher un membre ou lesdeux, siéger à la hanche, au genou ou à lacheville.Elles peuvent être primitives ou secon-daires,adaptation sus ou sous jacentes de ladéformation primitive.Elles peuvent siéger dansles trois plans de l’espace frontal,sagittal ou hori-zontal.On peut retrouver une hypo ou hyper-trophie d’un membre ou d’un de segments,desflexums ou des recurvatums,des équins oudes talus,des valgus ou des varus et des trou-bles rotationnels qui se traduisent par desanomalies de position des genoux et des pieds.L’analyse de ces déformations, souvent asso-ciées,est complexe.Si l’examen clinique estcapital dans ce domaine il sera complété effi-cacement par l’analyse quantifiée de la marche(A.Q.M.).4. L’examen clinique. Il doit être rigoureuxet méthodique pour préciser la cause du trou-ble de la marche : examen articulaire pourapprécier la mobilité et la stabilité des diffé-rentes articulations,examen vasculaire qui peutorienter vers certaines étiologies dans le cadredes inégalités de longueur,mais surtout examenneurologique étape obligatoire de tout bilanétiologique d’une anomalie de la marche d’unenfant.

Signes cliniques étiologiques.Au terme de ce bilan clinique,plusieurs gran-des étiologies peuvent être individualisées.

Huit critères d’analyse de la marche (E. Viel)• Attitude pendant la marche• Variabilité de la démarche• Equilibre et pertes d’équilibre soudaines• Netteté de la pose du talon au sol• Extension de la hanche préservée ou non• Synchronie entre le membre supérieur et inférieur• Distance mesurée entre les pieds en appui• Durée du double contact

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cranio-caudale, les évènements remarquablesde la marche sont bien identifiés : contact dutalon,pied à plat (correspondant à la mise encharge maximale),décollement du pied contro-latéral,passage à la verticale,poussée à l’appui(Fig.2).La courbe d’accélération médio-latéra-le sert à identifier le côté à l’appui.

L’appareillageLe capteur est composé de 3 accéléromètresdisposés perpendiculairement.Ce capteur estappliqué en région lombaire médiane par l’in-termédiaire d’une ceinture semi-élastique quise fixe autour de la taille du sujet (Fig.1).Lesaxes des capteurs sont cranio-caudal,antéro-postérieur et médio-latéral.Un boîtier d’enre-gistrement recueille les accélérations mesuréesà la fréquence de 100 Hz.Les données,transfé-rées sur un ordinateur,peuvent être analyséesimmédiatement ou transférées vers un serveur,via Internet,pour une analyse à distance.

Le test de marcheLe sujet effectue,dans un couloir rectiligne,à savitesse de confort,un aller et retour, sur unedistance de 30 mètres.L’analyse porte sur 19 à20 foulées de marche stabilisée.La vitesse demarche est mesurée au chronomètre.

Les courbes d’accélérationL’analyse du signal en fonction du temps recons-titue les courbes d’accélération cranio-cauda-le,médio-latérale et antéro-postérieure en rela-tion avec les mouvements temporo-spatiaux dela marche.A partir de la courbe d’accélération

Locometrix® : pour une mesureambulatoire quantifiée

de la qualité de la marcheLa marche est une activité essentielle pour l’homme,dans la mesure où elle conditionne sonindépendance.La dégradation de la marche est non seulement prédictive et symptomatiquede situations à forte dépendance : démences non-Alzheimer,états dépressifs mais conduitparfois aussi le sujet âgé à la chute.C’est un problème de santé publique majeur par sesconséquences de morbidité et de mortalité,à l’échelon individuel,et de coût de santé publique,à l’échelon de la nation.

Les indices cliniques de la dégradation de lamarche restent subjectifs,ce qui rend comptede l’importance des recherches entreprisespour mettre au point des outils d’analyse quan-tifiée de la marche,utilisables en pratique ambu-latoire,non seulement par les cliniciens maisaussi par tous les intervenants impliqués dansla prise en charge des patients en situation dedégradation de la marche.Ceci nous amène àprésenter le concept de qualité de la marche,évalué par une nouvelle chaîne de mesure :Locometrix®.

Locometrix® : une méthode d’analyseambulatoire de lamarcheLes méthodes d’analyse de la marche peuventêtre regroupées en deux grandes catégories :cinématiques et dynamiques.Locometrix® estune méthode de nature dynamique,basée surl’enregistrement des accélérations tri-axiales enrégion lombaire médiane (proche du centre degravité de l’homme en position debout).

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Fig.1 (A et B) : Positionnement et situationdu capteur accélérométrique.Les accéléromètres inclus dans unmoulage sont appliqués sur la régionlombaire médiane par l’intermédiaired’une ceinture semi-élastique fixée autourde la taille du sujet ; les accéléromètres selocalisent en regard du disque L3-L4.

Fig.2 :Accélérations lombairesinstantanées

Variables mesuréesL’enregistrement des accélérations à proximitédu centre de gravité apporte une informationglobale sur la résultante des mouvements etleur coordination qui aboutissent au déplace-ment du centre de gravité.La diversité des métho-des de traitement du signal fournit une infor-mation analytique sur les composantes princi-pales de la marche.

Les variables mesurées sont les suivantes :■Vitesse de marche,■ Fréquence des cycles de marche (cadence),■ Longueur des pas,■ Symétrie des demi-pas droit et gauche (indi-

ce de symétrie globale),■ Régularité temporo-spatiale des cycles de

marche (elle exprime la variabilité de lamarche),

■ Déplacement vertical : c’est l’estimation desdéplacements de la région lombaire entre lespoints les plus hauts et plus bas,

■ Activités mécaniques selon les 3 axes.L’activitémécanique cranio-caudale mesure la brady-kinésie du sujet (ralentissement du mouve-ment dans son amplitude et dans sa fréquen-ce).Les activités mécaniques cranio-caudaleet médio-latérale quantifient les instabilitésdynamiques correspondantes,

■ Economie de marche : la somme des 3 activi-tés mécaniques est corrélée à la consomma-tion d’oxygène qui,rapportée à la vitesse demarche,permet de calculer le coût énergétique,

■ Contraintes subies par les membres inférieurs :la mesure du module d’énergie du signal dansles hautes fréquences fournit,à partir du signalcranio-caudal, un indice sur les forces decontrainte survenant sur chacun des memb-res inférieurs.

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Validation de la méthodeL’excellente reproductibilité intra et inter obser-vateurs de ces différentes variables autorise l’ap-plication de cette méthode au domaine clinique.

La marche du sujet âgé sain et actifL’analyse d’une population témoin de 282 sujetssains et actifs (144 femmes,138 hommes),adul-tes et âgés de 20 à 98 ans,a permis de définir desnormes et de connaître les caractéristiques dela dégradation de la marche du sujet liées à l’âge.

Certaines variables sont indépendantes du sexeet de l’âge :■ la symétrie des demi-pas,■ la régularité des cycles de marche,■ la fréquence des cycles de marche (elle est

identique chez l’homme et chez la femmelorsqu’elle est rapportée à la taille du sujet),

■ l’activité mécanique médio-latérale.

D’autres variables sont influencées par le sexeet l’âge :■ la vitesse de marche :indépendamment de la

taille,l’homme marche plus vite que la femme ;la vitesse de marche diminue de manière signi-ficative chez l’homme à partir de 50 ans etchez la femme à partir de 60 ans ;

■ la longueur du pas : celle-ci est plus grandechez l’homme que chez la femme ; l’évolu-tion de la vitesse de marche est fortementcorrélée à la réduction de la longueur du pas ;

■ l’accélération lors de la poussée du pied àl’appui est moins importante chez la femmeque chez l’homme ; elle diminue significati-vement chez l’homme à partir de 50 ans etchez la femme à partir de 60 ans ;elle est liéeà la diminution de la force musculaire

Ainsi,la dégradation précoce de la marche,indé-pendamment du sexe et de l’âge,peut être quan-tifiée par la mesure de la fréquence des cyclesde marche (corrigée par la taille de l’individu),de la symétrie des pas,de la régularité des fouléeset de l’activité mécanique médio-latérale.

Applications cliniquesTrois applications cliniques ont été validées :lamaladie de Parkinson,la coxarthrose et la gonar-throse,le risque de chute des sujets âgés ;deuxautres sont en cours d’étude (dépression et fibro-myalgie).

a) La maladie de ParkinsonL’analyse de la marche de 22 patients atteintsde maladie de Parkinson récemment diagnos-tiquée (de novo),en comparaison avec un grou-pe témoin,a confirmé,d’une part,que les patientsréduisent leur vitesse de marche par un raccour-cissement de la longueur du pas associée à unediminution de la cadence et a montré,d’autrepart,que la diminution de la régularité des pasainsi que de l’activité cranio-caudale étaient lesvariables les plus fortement corrélées au scoremoteur mesuré par l’échelle d’évaluationUPDRS.Ces deux variables ont été reconnues

les plus pertinentes,pour la quantification desperturbations de la marche stabilisée à un stadeprécoce chez les patients atteints de la maladiede Parkinson et pour en suivre l’évolution soustraitement.

b) Coxarthrose et gonarthroseLes mécanismes d’adaptation biomécaniquesobservés chez les patients coxarthrosiques etgonarthrosiques en laboratoire sont retrouvésen ambulatoire par la méthode Locometrix®.Ainsi,les courbes d’accélération cranio-cauda-les confirment les différences d’adaptationfondamentales entre ces deux affections :

■ la coxarthrose s’accompagne d’un pic de miseen charge accru du côté homolatéral (a),suivid’une flexion seconde du genou plus impor-tante (b),puis d’un appui monopodal allégé

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(c),et enfin une réduction de la poussée àl’appui (d) (Fig.3) ;

■ la gonarthrose reporte l’appui du côté contro-latéral avec des pics de mise en charge (a’)et d’appui monopodal (c’) plus importants(Fig.4).

Par ailleurs,à partir d’une population de 28patients coxarthrosiques (indice moyen deLequesne : 9 ± 4),comparée à un groupe desujets témoin appariés,il a été mis en évidenceque les variables « symétrie » et « régularité »quantifiaient au mieux le degré de la boiterie.Locometrix® permet aussi de quantifier lasurcharge mécanique homolatérale à chaqueappui chez le patient coxarthrosique.Cette mesu-re fait appel au traitement du signal par la métho-de dite des ondelettes (mesure du module

d’énergie du signal en fonction de safréquence et de sa localisation) quiillustre parfaitement cette surchargemécanique homolatérale du côtécoxarthrosique :exemples 1 et 2.Cettemesure,riche d’informations,acces-sible en ambulatoire,est un véritablefacteur pronostic pour la coxarthro-se et permettra,aux rééducateurs etaux kinésithérapeutes,d’adapter leursstratégies thérapeutiques.

Exemple 1 :symétrie :83%régularité :91%

Coxarthrose bilatérale plusmarquée à droite,bien tolérée,indice de Lequesne à 5,chezun homme de 51 ans.

Fig.3 :Coxarthrosedroite

Indice de Lequesne : 5

Fig.4 :Gonarthrosedroite

Indice de Lequesne : 8.5

a

b d

c

D D D D

a’c’

Courbe d’accélération cranio-caudale :mise en charge légè-rement accentuée (a),flexionseconde du genou à l’appuiplus marquée (b),pic d’appuimonopodal nettement dimi-nué (c) du coté pathologique.

L’analyse par la méthode des onde-lettes objective une onde de chocpathologique de haute fréquenceet d’intensité nettement plus élevéedu coté pathologique.

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Exemple 2 :symétrie :49%régularité :33%

Coxarthrose bilatérale évoluée :stade 3 à droite,2 à gauche,indi-ce de Lequesne à 15,chez unhomme de 66 ans.

c) Risque de chute du sujet âgéDe très nombreux indices et tests cliniquessont en relation avec le risque de chute du sujetâgé (test de Tinetti,appui monopodal…).Cesdifférents tests évaluent les aptitudes d’équili-bre et de marche du sujet âgé sans pour autantapporter une mesure quantifiée de la dégra-dation de la marche.Parmi les anomalies ducycle de marche,certaines sont prédictives durisque de chute ; ainsi en est il de la variabili-

té du pas (HAUSDORFF et al. 1997,MAKI 1997)et des instabilités antéro-postérieure et médio-latérale (CHOU 2003).Cette variabilité et cesinstabilités, indécelables lors de l’examenclinique,nécessitent le recours aux mesuresinstrumentales.Une étude préliminaire,réalisée avec la métho-de Locometrix®,comprenant 30 sujets âgés sainset actifs et 20 sujets âgés chuteurs,a montré quela perte de la régularité des foulées était trèsfortement corrélée au risque de chute (p<0,001) ;ce qui rend l’utilisation de cette méthode,pouridentifier les sujets âgés ayant un risque accrude chute,plus que simplement utile.

d ) Autres applications médicales :dépressionet fibromyalgie

Les troubles de la marche sont une des carac-téristiques centrales de la dépression.Mesureret quantifier la marche chez ces patients aide-ra non seulement à une meilleure analyse dela physiopathologie de la dépression mais vaaussi permettre un suivi objectif de l’évolutionsous traitement.La fibromyalgie est une entitéclinique ; il devient possible d’y rattacher unequantification objective par la mesure desanomalies de la marche (résultats soumis àpublication).

ConclusionCette nouvelle méthode ambulatoire d’analy-se de la marche ouvre la possibilité d’adjoind-re à la consultation une analyse biomécanique

de la marche.Son excellente reproductibilitéautorise son utilisation clinique.C’est une tech-nique simple et rapide dans sa mise en œuvre,elle n’est pas invasive et ne nécessite pas d’en-vironnement expérimental particulier,hormisun couloir rectiligne suffisamment long.

La diversité et la complémentarité des variablesde la marche la rendent utile pour l’évaluationdes thérapeutiques,des programmes de réédu-cation et de réhabilitation dans des domainesaussi variés que la maladie de Parkinson, lacoxarthrose,la gonarthrose et la dégradation dela marche du sujet âgé.

● B.Auvinet1,E.Barrey2

1 :Hôpital de Laval,53015 Laval Cedex.2 :Laboratoire des interactions gènes etentraînement (LIGE),Université d’Evry,BâtMaupertuis,91025 Evry Cedex

Courbe d’accélération cranio-caudale :pic de mise en charge accru du coté leplus atteint,désorganisation importantedu cycle de marche.

L’analyse par la méthode des ondelettes objectiveune onde de choc pathologique de haute fréquen-ce et d’intensité particulièrement élevée,prépon-dérante du coté atteint mais existant aussi du cotécontro-latéral.

*Locometrix® est une marque déposéeCentaure Metrix (www.locometrix.com).Cette technologie,issue des recherchesINRA,est sous licence exclusive.

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■ Les hématomes sous-unguéaux sont relati-vement rares car la plupart des marcheurs ontdepuis bien longtemps des ongles « rudi-mentaires » à force d’avoir été traumatisés. Ils’agit donc d’une pathologie que l’on rencon-tre plus souvent sur les épreuves sélectivesque sur la compétition elle-même.Le traite-ment passe par une évacuation à la seringuede la collection sanguine en ponctionnantentre l’ongle et son lit,et le soulagement estinstantané.

■ Les atteintes cutanées se matérialisent par desphlyctènes d’importance variable mais souventconsidérable.En fonction de la qualité de lapréparation préalable de la peau du pied (trai-tement à l’acide picrique ou citrique associé àl’application préventive de topiques anti-échauf-fement),les ampoules apparaîtront à partir de100 ou 150 Km de marche,souvent au niveaudes orteils avant de toucher l’arrière-pied.Ellesdevront être évacuées à la seringue,désinfec-tées à l’éosine aqueuse (qui possède un pouvoirtannant) en conservant l’épiderme décollé,etrecouvertes de tulle gras fixé au collodion rici-né.Plus les kilomètres défilent et plus la patho-logie cutanée sera sévère,entraînant des échauf-fements qui décollent l’épiderme jusqu’à unphénomène de brûlures de marche qui condui-sent parfois à l’abandon.En règle générale,c’estl’atteinte du talon postérieur qui est la plus redou-tée car elle pousse le marcheur à tenter de courirsur l’avant-pied, ce qui est disqualifiant enmarche athlétique.

Devant de tels tableaux cliniques,même le podo-logue le plus averti s’interroge sur la capacitéet la volonté de ces athlètes à continuer l’appuiet la marche.Si moins d’une dizaine d’entre euxatteignent Colmar,on a tout lieu de penser quesans l’aide d’une assistance podologique impor-tante,ce chiffre serait revu à la baisse.

Le pied du marcheur de grand fond :Paris/Colmar, une légende en marche !

On l’appelle « La Doyenne » parce que c’est la plus ancienne épreuve de marche athlétiquedu monde ;c’est aussi la plus importante et surtout la plus folle,voire inhumaine puisque 30marcheurs sont sélectionnés en cours d’année pour participer à une marche de 535 kilomètres.Il s’agit de PARIS/COLMAR [3].

Créée en 1926 pour célébrer les exploits des« Poilus de 14/18 »,elle est devenue célèbre sousle nom de PARIS/STRASBOURG avant de deve-nir en 1981 PARIS/COLMAR.Cette marche quiréunit les meilleurs marcheurs d’endurance dumonde s’effectue pendant 3 jours et 3 nuitsconsécutifs,voire 4 nuits pour les derniers arri-vants à Colmar.Il n’y a que 2 arrêts obligatoi-res :l’un de 3 heures après 230 kilomètres parcou-rus et l’autre d’1 heure après 440 kilomètres demarche ! Tout arrêt supplémentaire de plus de10 minutes prive à coup sûr le marcheur d’unclassement sur l’épreuve.Les meilleures années,8 à 10 marcheurs seulement sur les 30 du départpourront atteindre Colmar.

Une épreuve féminine est venue se greffer auPARIS/COLMAR en 1989.Les féminines partentde CHALONS EN CHAMPAGNE et rallierontCOLMAR en empruntant le même parcours queles hommes ;elles seront une douzaine et effec-tueront 360 kilomètres avec 2 arrêts obligatoi-res,le premier de 2 heures et l’autre d’1 heure…

A noter enfin que cette épreuve épuisante s’ef-fectuera à l’allure moyenne de 8 à 9 Km/h,cequi prouve que la marche athlétique ne peut seconfondre avec une promenade de santé !Devant de tels chiffres,on peut comprendre quel’hyper sollicitation des pieds de nos marcheursinduise une pathologie spécifique que l’on nerencontrera nulle part ailleurs,en dehors peut-être de certains grands raids (Raid Gauloises,Raid de l’Atlas,etc.) qui connaissent une gran-de vogue aujourd’hui.

La pathologie rencontrée est essentiellementmicro-traumatique ; elle est due à la longueur

de l’épreuve (entre 65 et 80 heures non stop) età l’extrême répétition du geste.C’est certaine-ment le pied qui souffre le plus au cours de cetteépreuve où l’on rencontre d’une part des attein-tes musculo-tendineuses et d’autre part et surtoutune pathologie cutanée impressionnante .

LA PATHOLOGIE MUSCULO-TENDINEUSEPour le marcheur averti du PARIS/COLMAR,c’estla ténosynovite du tibial antérieur, la tendino-pathie du tibial postérieur ou pire encore lesyndrome de loge tibial antérieur qui sont leplus souvent rencontrés.■ La ténosynovite du tibial antérieur est la

plus fréquente et l’examen clinique met enévidence une tuméfaction importante de larégion péri-malléolaire interne qui précèdede plusieurs heures parfois les signes fonc-tionnels.Ce sont eux cependant qui condui-ront à une impotence fonctionnelle partiellequi est source d’abandon.Cette pathologiesurvient le plus souvent après plus de 200 km.de marche.

■ La tendinite du tibial postérieur est moinsfréquente mais elle correspond générale-ment à une attitude valgisante du calcaneus.Nous l’avons rencontrée plusieurs fois lorsde démarche antalgique pour éviter un appuipostéro-externe du talon rendu douloureuxpar la présence d’une grosse phlyctène.Ladouleur part de l’insertion basse du musclesur le tubercule de l’os naviculaire et irradiedans le mollet.

■ Le syndrome tibial antérieur est bien moinsfréquent mais ses conséquences sont parfoiscruelles si sa reconnaissance est trop tardive.Le début peut se confondre avec la tendino-pathie du muscle tibial antérieur évoquéeprécédemment,mais c’est l’hypoesthésie dupied qui sera froid avec abolition fréquentedu pouls pédieux qui imposera l’arrêt immé-diat de la marche suivi d’une fasciotomieprécoce avant l’installation des signes neuro-logiques déficitaires.

LA PATHOLOGIE CUTANEEElle est pratiquement toujours présente à desdegrés divers.Il s’agit d’une pathologie de conflitavec la chaussure qui touche pratiquement100% des athlètes.Les stades de gravité varienten fonction de 2 critères essentiels : le kilomé-trage parcouru d’une part et la préparation cuta-née spécifique du pied en amont de la compé-tition d’autre part.

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La lettre de l’Observatoire du Mouvement est une publication de

L’Observatoire du MouvementSud Radio - 4,place Alfonse-Jourdain

31071 Toulouse Cedex 7Téléphone : 05 61 44 90 46

Directeur de la publication : Etienne AndréConception et réalisation : JB Conseil - 05 63 70 71 51

Impression : SIAN° ISSN : 1628-6898

Dépôt légal : avril 2004

L A L E T T R E

Conseil d’administrationPrésident : Christian MansatSecrétaire Général : Michel MudetConseil scientifiquePrésident : Michel MansatSecrétaire : Etienne AndréSciences fondamentales : H. Cousse, J. -P. Bali, P. Valdiguié, J. -P. Pujol, D. MitrovicTraumatologie et sports : G. Saillant, F. Bonnel, D. RivièreHématologie : R. BierméRhumatologie : F. Blotman, M. Waldburger, E. Vignon, J. Rodineau, B. MazièresGériatrie : Y. Rolland, C. JeandelPodologie : C. HuertasKinésithérapie : A. LapêtrePsychiatrie : P. Most

Prochains numéros de l’Observatoire du Mouvement :

Lettre n°12 : Mécanobiologie

Lettre n°13Fibromyalgie II

OpinionDe très nombreuses incertitudes persistent dans l’éva-luation symptomatique et structurale des traitements anti-arthrosique, symptomatiques d’action lente , dont la plupartrevendiquent un effet structuro-modulateur sans qu’il yait d’effet corrélé net entre ces deux actions.La plupart des tests utilisés dans les études cliniques sontsurtout qualitatifs donc subjectifs et soumis à de nombreu-ses variables compte tenu de la durée des traitements.Les principaux critères retenus dans les études sont aunombre de 5 :• l’échelle visuelle analogique de Huskinsson, générale-ment préférée à l’échelle verbale de Likert• les indices algo-fonctionnels pour la hanche et le genou,souvent préférés à l’auto-questionnaire de WOMAC • l’amélioration globale selon le jugement du patient quiutilise une échelle verbale en 8 items, et sur degré desatisfaction• l’évaluation de l’amélioration globale selon le jugementdel’investigateur avec une échelle verbale• la consommation d’antalgiques ou d’anti-inflammatoi-res non stéroidiensLes indices de qualités de vie (IQV) sont de plus en plusintégrés dans les études cliniques en particulier dans l’ar-throse. La confusion vient de l’existence de nombreuxmodèles rendant les études comparatives très incertai-nes.Les études des structuro-modulateur portent essentiel-lement sur la mesure de l’interligne articulaire.L’évolution de l’arthrose est lente et variable d’un sujet àl’autre, les paramètres pouvant intervenir dans l’évalua-tion de cette mesure sont nombreux avec plusieurs varian-tes, ce qui rend leur interprétation difficiles et contesta-bles. « Il apparaît actuellement qu’aucune technique demesure n’est réellement satisfaisante pour les études destructuro-modulation dans l’arthrose » (Brandt KD, J.Rheunmatol 2002).Par ailleurs, comme le précisent P. Richette et T. Bardin(Revue du Rhumatologue 2004-71) « Quels bénéficescliniques un patient peut-il tirer d’une épargne radiolo-gique de quelques dixièmes de millimètres de hanched’interligne après 3 ans de prise médicamenteuses ? »Les récents travaux sur la physiopathologie de l’arthrose(cf. lettre sur les GAG) démontrent de toute évidence lapriorité de la cible chondrocytaire avec un versant anabo-lique et catabolique et pour être plus précis anti-anabo-

lique. Cela permet de clarifier le mécanisme de déclen-chement du processus arthrosique, de son évolution etde clarifier l’impact probablement multi-factoriel de laprise en charge de l’arthrose.D’autres outils d’évaluation seront nécessaires pour jugerdes effets thérapeutiques :• les marqueurs biologiques de l’arthrose (CTX-II PrMazières B)• l’IRM doit permettre de visualiser et de quantifier lecartilage et les autres structures intéressées par le proces-sus arthrosique comme l’os sous-chondral et trabeculai-re en particulier l’œdème osseux.L’analyse quantifiée de la marche du patient arthrosiquepar une méthode accélérométrique ( Dr Auvinet B) faitprobablement partie de ces méthodes d’avenir. C’est uneméthode simple et rapide non invasive qui permet d’éva-luer et de quantifier les troubles de la marche à partir dequelques variables simples : la vitesse du pas, la perte desymétrie du demi-pas, sa régularité et les modificationsde l’onde de choc au niveau de la région lombaire. Cesmodifications qualitatives et quantitatives doivent permet-tre d’évaluer l’évolution des arthroses du membre infé-rieur sous traitement. Nous attendons beaucoup de cesméthodes d’évaluation quantitatives dans la coxarthroseet la gonarthrose traitées tout particulièrement par l’aci-de hyaluronique.Cette méthode d’évaluation de la marche (Locométrix®)peut être utilisée en dehors de l’arthrose dans d’autresdomaines :• le risque de chute chez les sujets âgés à l’origine de laplupart des fractures de l’extrémité supérieure du fémurdont on connaît la gravité• la maladie de Parkinson avant et après traitement• le suivi de l’obèse pour le calcul de ses dépenses éner-gétiques• l’intérêt du port de semelles orthopédiques amortis-santes dans la gonarthrose et la coxarthrose, et aprèsimplantation de prothèses totales dont on connaît lesconséquences lors de l’activité physique sur les structu-res osseuses • la modification de la marche chez les sujetsFibromyalgiques (ralentissement de la marche, de lalongueur du pas, de sa régularité et diminution de l’acti-vité verticale). Ces modifications sont assez proches deceux observées chez les sujets dépressifs.

Cette équipe podologique se compose de 15podologues qui se répartissent entre les postesd’arrêts obligatoires et les 2 ambulances quisuivent l’épreuve nuits et jours du départ à l’ar-rivée à Colmar.

Les soins prodigués sont des soins d’urgencequi doivent être effectués très rapidement car lemarcheur répugne à s’arrêter,ne pensant qu’auchronomètre ! Une spécificité de ces soins rési-de aussi du fait qu’aucun pansement tradition-nel ne peut être proposé à ces athlètes car nonseulement ils ne tiendraient pas,mais encore ilsprovoqueraient des frictions supplémentaires.Eosine aqueuse,tulle gras,vernis chirurgicaux,collodion riciné et topiques anti-échauffementsseront de règle tout au long de l’épreuve.

Quoique la « marche athlétique » soit une disci-pline olympique,l’exploit physique exception-nel et l’immense courage de ces athlètes de trèshaut niveau qui,rappelons-le,sont les meilleursmarcheurs au monde,n’ont d’égal que l’ano-nymat injuste qui les entoure tant il est vrai quesur le plan médiatique,des “années-lumières”séparent le vainqueur du PARIS/COLMAR decelui du TOUR DE FRANCE cycliste,de ROLLANDGARROS ou de tout autre épreuve de prestige !

● Claude HuertasDirecteur de l’Institut de Formation enPédicurie-Podologie de Toulouse,CHU Purpan,31059 TOULOUSECo-Responsable du D.U.de Podologie duSport de l’Université Paul Sabatier –TOULOUSE

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