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1 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
Le rôle de l’éducation pour
prévenir la radicalisation
Résumé
Les établissements scolaires sont des institutions clés
pour renforcer la résilience et empêcher les jeunes
d’’être attirés par des organisations et des idéologies
radicales. De plus, les enseignants sont souvent parmi
les premiers à repérer des signes éventuels de
radicalisation et sont des interlocuteurs majeurs pour
les personnes concernées (c’est-à-dire les individus
eux-mêmes, leurs proches et amis).
En acceptant cette responsabilité, les enseignants
doivent traiter des questions cruciales qui peuvent
contribuer au processus de radicalisation et aborder les
inquiétudes et les revendications exploitées par la
propagande religieuse radicale et de l’extrême-droite.
Ils doivent sentir qu’ils disposent des moyens d’agir et
de responsabiliser les élèves en tenant compte des
éléments suivants.
Ce document d’analyse a été
préparé par Götz Nordbruch
2 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
• Tout élève ’est susceptible de se
radicaliser.
• L’enseignement devrait favoriser
l’identification des élèves à la société et
refléter la diversité des élèves dans les
différents milieux biographiques,
culturels et religieux.
• Encourager la participation des élèves
dans les établissements en tenant
compte de leurs intérêts, en les
soutenant et en les aidant à faire des
choix: il s’agit d’un moyen d’éviter la
frustration et l’aliénation et d’encourager
les élèves à avoir des liens avec
l’établissement.
• Les établissements devraient armer les
élèves face à la discrimination et la
marginalisation et les inciter à avoir une
réflexion critique sur les questions
controversées et sensibles (identité,
religiosité, rôles de l’homme et de la
femme, conflits internationaux).
• Pour prévenir la radicalisation, des
procédures claires, des structures de
soutien efficaces et des réseaux locaux
solides sont indispensables: ils devraient
être mis en place avant tout cas
d’extrémisme violent. Les enseignants
doivent former leurs collègues à
l’utilisation de ces procédures, structures
et réseaux.
Introduction (1)
Les ’établissements scolaires sont des acteurs clés
pour prévenir la radicalisation. Ils promeuvent les
valeurs communes et la pensée critique et
permettent aux élèves de développer les
aptitudes élémentaires nécessaires pour se
débrouiller dans la vie ainsi que les compétences
sociales qui sont essentielles pour une
citoyenneté active au sein des sociétés
démocratiques (prévention générique). Éduquer
en enseignant les valeurs démocratiques et
donner la capacité aux jeunes de comprendre et
de prendre en main leur vie dans des milieux
sociaux pluralistes est crucial pour renforcer leur
capacité de résistance face à la polarisation
sociale et à la radicalisation.
Pourtant, les établissements ne développent pas
seulement les aptitudes de communication,
cognitives et comportementales nécessaires à la
vie démocratique; elles sont aussi des lieux où les
premiers signes de radicalisation peuvent être
constatés et où les premières mesures peuvent
être mises en place (prévention secondaire).
Dans de nombreux cas, les enseignants sont les
premiers à prendre conscience des changements
d’apparence, de pensée et de comportement et à
apporter des conseils et un soutien aux jeunes
dans leur quête d’orientation.
Donner les moyens d’agir aux enseignants en tant
qu’individus et aux écoles en tant qu’institutions
est une condition préalable à l’autonomisation
(1) Ce document s’appuie sur le Manifeste du RSR en faveur de l’éducation.
3 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
des élèves face aux propositions des idéologies et
des milieux radicaux (violents).
Contexte: responsabiliser les
élèves, les enseignants et les
établissements scolaires
Les écoles jouent un rôle prépondérant dans la
prévention de la radicalisation et de l’extrémisme
violent pour plusieurs raisons.
• L’extrémisme violent ne se limite pas aux
individus marginaux. Des études ont
rendu compte que les combattants
étrangers d’Europe ayant rejoint les
organisations djihadistes en Syrie et en
Irak (2) appartiennent à des milieux
sociaux extrêmement divers. De plus,
l’âge des personnes qui rejoignent ces
organisations a fortement chuté, avec
des élèves de 13, 14 ou 15 ans qui en font
déjà partie. De récents rapports sur des
attaques violentes perpétrées contre des
réfugiés en Allemagne et dans d’autres
pays révèlent également un nombre
croissant d’auteurs n’ayant aucun
(2) Pour une évaluation des nombres et des profils des «combattants étrangers» dans différents pays européens, voir Van Ginkel B. et Entenmann E. (2016). Le phénomène des combattants étrangers dans l’Union européenne. Profils, menaces et politiques. Le Centre international de lutte contre le terrorisme – La Haye, 7(2). Dans une présentation rapide des recherches sur les facteurs d’intérêt et de désintérêt, Magnus Ranstorp évoque un «kaléidoscope de facteurs, qui crée des combinaisons individuelles infinies» qui pourraient encourager l’extrémisme violent (Ranstorp, M. (2016), Les causes profondes de l’extrémisme violent, document d’analyse du RSR, 04/01/16, p. 1).
antécédent dans des groupes d’extrême
droite (3). Les opinions extrémistes ne se
limitent donc pas à certains milieux
sociaux et antécédents scolaires, mais
elles s’expriment à travers différents
segments de la société. L’extrémisme se
retrouve également dans les salles de
classe et touche la vie en communauté
dans les cours d’école et sur les campus.
• Cela ne concerne pas uniquement le
soutien explicite envers les idéologies
extrémistes. Plus important encore, les
enseignants et les établissements
scolaires font régulièrement face aux
inquiétudes et aux revendications
«ordinaires» des jeunes, qui sont de plus
en plus exploitées par la propagande
extrémiste religieuse ou d’extrême
droite: des inquiétudes liées à l’identité,
à l’immigration, à la dimension de genre,
aux conflits sociaux et économiques, à la
discrimination et à la marginalisation
sociale, mais aussi aux conflits
internationaux qui occupent une place
prépondérante dans la propagande
extrémiste, quelles que soient les
idéologies. La propagande extrémiste
’traite les problèmes qui sont souvent
controversés dans la société, et donc
parmi les élèves.
• Les réseaux sociaux aggravent encore
l’impact de ces thèses dans les salles de
classe et les cours d’école. Les réseaux
sociaux sont devenus des modes de
(3) ‘Jäger warnt vor ‚Turbo-Radikalisierung’, Der Westen, http://www.derwesten.de/politik/jaeger-warnt-vor-turbo-radikalisierung-id11978219.html, 5 juillet 2016.
4 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
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communication importants pour les
discours haineux, la radicalisation et les
’appels à la violence, des éléments qui,
par le passé, restaient confinés à un
public limité de camarades et de groupes.
Ici encore, les établissements scolaires
devaient offrir des espaces permettant
d’aborder les difficultés connexes et de
proposer des récits alternatifs et plus
convaincants que ceux que les
organisations extrémistes élaborent (4).
• Alors que la plupart des spécialistes
conviennent de la nécessité de contester
la radicalisation dans le milieu scolaire,
les définitions de la «radicalisation» et de
ce qui doit être exactement prévenu
divergent souvent. En fait, les
établissements sont sensées offrir des
espaces sécurisés pour que les élèves se
forgent des opinions et des convictions et
les expriment, même si ces opinions
défient les normes généralement
acceptées. Il est essentiel d’offrir des
espaces sûrs aux étudiants qui
permettent d’explorer les idées et leurs
propres limites afin d’établir un dialogue
avec «ceux qui se sentent exclus» (5).
Toutefois, aucun consensus n’existe sur
la façon de définir les limites dans
lesquelles ces opinions sont acceptables.
Alors que le discours haineux est
(4) Voir Gagliardone I., Gal D., Alves T., et Martinez G. (2015). Lutter contre le discours de haine en ligne. Éditions UNESCO, Paris, p. 46-52. (5) RSR/EDU (2016), «Document ex post: les chefs d’établissement et la prévention de la radicalisation. Définir les conditions d’un environnement sûr et démocratique. Réunion du RSR EDU, 19-20 avril 2016», Amsterdam, p. 4.
illégal dans les États membres de l’UE,
les stratégies de prévention dans des
pays comme la France, le Royaume-
Uni ou le Danemark se sont
longtemps concentrées sur
l’extrémisme violent. Dans ces pays,
même les déclarations explicites en
faveur de l’idéologie néo-nazie ou
djihadiste restent protégées par la
liberté d’expression. Dans les autres
États membres, l’extrémisme est défini
de façon plus large et inclut des
déclarations ou des activités qui
n’impliquent pas nécessairement ’le
recours à des moyens illégaux. ’Dans
cette perspective, ’on entend par
extrémisme ’la remise en cause de l’ordre
constitutionnel établi ou la violation des
normes socialement acceptées. Pour les
critiques, cette conception de
l’extrémisme représente une menace
considérable pour les droits
fondamentaux, car elle soutient l’action
engagée par l’État contre les apparences,
les comportements et les opinions soi-
disant extrémistes, qui relèvent par
ailleurs des libertés civiles (6). Certains
font valoir que les établissements
scolaires risquent de perdre leur qualité
de lieux sûrs, où les élèves se sentent
libres d’explorer leurs opinions et
d’exprimer leurs inquiétudes et leurs
revendications.
(6) Williams. R. (2015), «Les chefs d’établissement tirent la sonnette d’alarme sur la nouvelle obligation de protéger les élèves de l’extrémisme», Guardian, 9 juin.
5 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
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• Dans plusieurs pays de l’UE, une
législation récente impose aux
établissements scolaires (ainsi qu’aux
autres services de garde d’enfants) de
signaler les cas de radicalisation. Au
Royaume Uni, ils doivent avoir un rôle de
protection explicite ou «tenir compte de
la nécessité d’empêcher les personnes
d’être attirées par le terrorisme»(7). Des
règlements similaires ont été mis en
œuvre en France (8). L’obligation de
signaler les cas possibles de
radicalisation concerne une fois de plus
le rôle des écoles comme lieux sûrs. Cela
vaut également pour les universités: la
liberté de ces établissements serait
limitée par des tentatives d’imposer des
valeurs et des normes soi-disant
consensuelles comme limites aux
recherches et au débat universitaires. Les
stratégies de prévention posent donc un
dilemme: tandis que les écoles et les
établissements d’enseignement
devraient prendre les mesures
nécessaires pour prévenir la
radicalisation et l’extrémisme violent, ces
obligations légales pour détecter et
signaler les personnes suspectes peuvent
entrer en conflit avec les normes et les
principes éducatifs fondamentaux de
l’éducation civique.
(7) Article 26 de la loi de 2015 sur la lutte contre le terrorisme et la sécurité, cité par me gouvernement de sa Majesté (2015), orientations révisées quant à l’obligation de prévention : pour l’Angleterre et le pays de Galles, Londres, p. 2. (8) Le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (2014), Prévenir la radicalisation des jeunes, Paris.
Relever les défis actuels liés au
renforcement de la résilience et
de la prévention
Les enseignants et les établissements scolaires
sont bien placés pour prévenir la radicalisation et
les idéologies extrémistes violentes, mais
plusieurs défis importants doivent être abordés.
a) La formation des enseignants
En principe, les enseignants sont bien placés pour
promouvoir les valeurs démocratiques et gérer
les conversations difficiles en classe. Pourtant,
compte tenu de la polarisation croissante et des
phénomènes «nouveaux» tels que l’extrémisme
religieux, de nombreux enseignants expriment
des préoccupations quant au manque de
connaissances et de compétences qui permettent
d’apporter des réponses nuancées. Il est crucial
de prévoir des ressources substantielles
(financement, temps et formateurs qualifiés)
pour la formation pour sensibiliser et favoriser la
compétence des enseignants en vue de renforcer
la résilience face à la radicalisation, détecter les
éventuels signes d’extrémisme (violents) et nouer
un dialogue avec les jeunes. La formation devrait
répondre aux attentes suivantes.
• Ne pas réinventer la roue
Le terme de radicalisation n’est apparu
que récemment dans les débats
universitaires et éducatifs. Le phénomène
n’est, cependant, pas complètement
nouveau. Les enseignants ont été formés
pour favoriser la résilience, fournir de
multiples perspectives et encourager
l’autoréflexion chez les élèves tout en
renforçant l’acceptation des différences
6 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
sociales, culturelles et religieuses. De
même, ils ont acquis les compétences
nécessaires pour contester la prétention
à affirmer la vérité absolue et lutter
contre l’expression de la haine et les
appels à la violence (c’est-à-dire dans le
cadre de l’éducation sur la diversité,
l’éducation à la citoyenneté et les
approches visant à lutter contre les
préjugés) (9). La formation des
enseignants devrait s’appuyer sur ces
compétences existantes et identifier les
similitudes avec d’autres formes
d’expression antidémocratique (c’est-à-
dire homophobes ou antisémites) ou un
comportement difficile (c’est-à-dire un
discours haineux ou des actes de
harcèlement) que les enseignants
pourraient déjà connaître et auxquels ils
ont fait face par le passé. Plutôt que
d’ajouter simplement une autre séance
de formation sur la «radicalisation» (en
plus des nombreuses formations que les
enseignants sont tenus de suivre), la
prévention de la radicalisation devrait
faire partie intégrante de la formation
professionnelle.
• Les enseignants et les établissements
scolaires pourraient être «une partie
du problème»
Les enseignants jouent un rôle majeur
pour façonner les opinions et les
comportements des élèves. Cela signifie
(9) RSR/EDU (2016), «Document ex post: donner les moyens d’agir aux enseignants et les soutenir. Le rôle pédagogique nécessite du temps et une formation. Réunion du groupe de travail RSR EDU, 24-25 avril 2016», Amsterdam, p. 2
également qu’ils peuvent influencer
négativement le développement des
élèves. Par exemple, les établissements
ne sont pas des zones neutres exemptes
de stéréotypes racistes et de
discrimination. En réalité, des études ont
rendu compte de la discrimination et du
ressentiment vécus communément par
les élèves issus de l’immigration ou
d’origine musulmane dans les
’établissements scolaires (10). Ces
expériences pourraient compromettre
l’identification de ces élèves à la société
et contribuer éventuellement au
développement d’attitudes et de
comportements radicaux (11) La
formation des enseignants devrait
sensibiliser à la diversité culturelle et
religieuse et encourager les enseignants
à accepter les différences. Cela
comprend également l’acceptation des
différentes croyances religieuses et des
différents modes de vie qui pourraient
remettre en question les valeurs et les
convictions des enseignants.
• Engager un dialogue, ne pas
espionner les élèves
Les enseignants demandent souvent des
directives concrètes sur les signes et les
indicateurs permettant de détecter les
jeunes attirés par des idéologies ou des
(10) Voir, par exemple, Amnesty International (2012), Choix et préjugés. La discrimination envers les musulmans en Europe, Londres. (11) Lyons-Padilla S., Gelfand M. J., Mirahmadi H., Farooq M., et van Egmond M. (2015). Appartenir à nulle part : risque de marginalisation et de radicalisation des immigrants musulmans. Behavioral Science & Policy, 1(2), p. 1-12.
7 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
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groupes radicaux. Mais il n’existe pas de
liste de vérification proposant des
réponses claires. S’il existe certains traits
(exprimés dans la pensée, l’apparence et
le comportement) caractéristiques des
personnes radicalisées, aucun d’entre eux
(ni même une combinaison de plusieurs
de ces traits’) ne devrait être considéré
comme une preuve définitive. Au lieu de
fournir des listes de vérification, la
formation devrait inciter les professeurs à
engager un dialogue avec les élèves pour
découvrir les ’raisons qui motivent les
changements d’apparence et d’attitude:
s’agit-il d’un signe de protestation contre
les injustices (réelles ou perçues), une
provocation visant les parents, les
enseignants et la société? Ou est-ce, en
effet, une idéologie qui implique une
rupture avec la société, une
revendication de la vérité suprême et la
dévaluation et la déshumanisation des
autres? Ce dialogue avec les élèves est
différent de l’«espionnage» car il reflète
un intérêt pour la vie personnelle des
élèves et devrait faire partie de toute
relation élève-enseignant (12).
(12) Pour obtenir un résumé des indicateurs inclus dans l’outil de formation officiel mis au point pour les fonctionnaires en France, consultez le Secrétariat général du Comité Interministériel de prévention de la délinquance (2015), Prévention de la radicalisation. Kit de formation, Paris, p. 60-66. Pour une évaluation aux multiples facettes, voir ufuq.de (2016), Protestation, provocation ou propagande? Guide pour prévenir l’idéologie salafiste dans les écoles et les centres pour jeunes, Berlin, p. 25-32.
b) Renforcer la résilience,
représenter la diversité, apprendre la
démocratie en classe
Le processus de radicalisation implique des
changements cognitifs, comportementaux,
communicatifs et émotionnels; par conséquent,
la prévention par l’éducation devrait également
lutter à différents niveaux. Il est important d’être
conscient de la diversité des idées et des
approches qui peuvent servir à sensibiliser et
renforcer la résilience face à la radicalisation dans
l’enseignement scolaire, comme indiqué ci-
dessous.
• Conflits et compromis
«Pour bénéficier de la démocratie, il faut l’apprendre et l’explorer» (13). Ce constat est essentiel compte tenu de la polarisation sociale croissante. Pourtant, l’apprentissage de la démocratie ne peut se limiter à une acquisition de connaissances, c’est-à-dire de faits concernant la Constitution («nous devons leur enseigner nos valeurs!»). Au lieu de cela, il faut une prise de conscience – et une appréciation – du pluralisme, des différences et des controverses en tant que principes fondamentaux de la société moderne. La démocratie consiste à gérer les différences et à gérer la controverse. L’un des messages fondamentaux que les élèves devraient apprendre est que «dans notre société, les conflits et le compromis représentent la règle, et non l’exception».
• Améliorer les compétences sociales
pour s’impliquer dans la société
(13) RSR/EDU (2016), «Document ex post: les chefs d’établissement et la prévention de la radicalisation. Définir les conditions d’un environnement sûr et démocratique. Réunion du groupe de travail RSR EDU, 19-20 avril 2016», Amsterdam, p. 3.
8 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
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La prévention comprend
l’amélioration des compétences
sociales et la résilience des élèves, le
renforcement de leur confiance en
eux-mêmes et le fait de leur
permettre de prendre position,
d’interagir et de ’communiquer de
manière constructive avec les autres.
Cela implique également des
dimensions psychophysiques qui
peuvent être résolues par le sport, la
musique ou le théâtre. Le fait de
reconnaître son potentiel ainsi que
ses limites, d’être conscient de ses
émotions et de savoir comment les
exprimer facilite la participation des
autres individus et la gestion des
relations sociales difficiles. Il est peu
probable que l’on développe des
attitudes de confrontation et que l’on
ait recours à la violence.
Bonnes pratiques: les outils de résilience
Bounce
«Une formation psychophysique précoce
pour les jeunes (vulnérables) afin de
renforcer leur résilience face aux
influences radicales et de sensibiliser
l’environnement social du jeune» (14).
• Mettre en pratique la démocratie
L’«école démocratique» idéale considère
les élèves comme des participants actifs
dans l’établissement. La démocratie en ce
(14) Voir http://www.bounce-resilience-tools.eu en ligne.
sens ne se limite pas à la politique, mais
implique une participation active au
quotidien, y compris la scolarisation et
l’éducation. Impliquer les étudiants dans
les structures institutionnelles leur
permet de faire l’expérience de la
démocratie, de formuler leurs intérêts et
de discuter pour les défendre et
d’assumer la responsabilité de leurs
choix. La participation active sert à
renforcer l’identification à son
environnement social et à prévenir
l’aliénation. Le fait d’exprimer son
opinion et de s’impliquer dans son
environnement éducatif réduit les risques
de rompre avec ces environnements et
de remettre en cause leur légitimité.
Cependant, on oublie souvent de
mentionner que les institutions
démocratiques confient aux élèves plus
de pouvoir. Encourager les élèves à faire
l’expérience de la démocratie nécessite
donc une reconnaissance de leurs points
de vue et intérêts par l’établissement,
même dans les cas où cela pourrait
nécessiter un changement institutionnel.
Bonnes pratiques: une école et un
quartier paisibles’
«Une démarche scolaire globale pour les
écoles élémentaires. Elle vise à ce que
l’école devienne une communauté
démocratique dans laquelle les enfants et
les enseignants apprennent à résoudre
les conflits d’une manière constructive et
dans laquelle les enfants peuvent
exprimer leurs opinions. Les élèves sont
impliqués et apprennent à être
9 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
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responsable du climat social au sein de la
collectivité» (15).
Bonnes pratiques: Schule ohne
Rassismus — mit Schule Courage/Écoles
sans racisme, écoles avec courage
«Un projet géré pour et par les élèves. Il
permet aux enfants et aux jeunes de
prendre une part active à la vie de leur
établissement scolaire et de s’opposer à
toute forme de discrimination,
d’intimidation et de violence. Nous
sommes le plus grand réseau
d’établissements scolaires en Allemagne,
avec plus de 2 000 établissements et près
d’un million d’élèves» (16).
• Représenter les minorités
Les programmes d’études et les
manuels scolaires se sont
considérablement améliorés ces
dernières décennies. Toutefois, ils ne
représentent souvent pas exactement
les identités et les biographies diverses
qui composent la plupart des classes à
Lisbonne, à Copenhague ou à Milan.
Trop souvent, les flux migratoires ne sont
abordés que dans le contexte des
conflits, qu’ils soient sociaux, culturels ou
religieux. Par conséquent, les migrations
ne sont’ pas considérées comme une
caractéristique normale de la plupart des
sociétés européennes, mais plutôt
comme un problème et un sujet de
(15) Voir http://www.stichtingvreedzaam.nl en ligne. (16) Voir http://www.schule-ohne-rassismus.org en ligne.
préoccupation. Ceci s’applique également
à la représentation de l’Islam et des
musulmans dans les sociétés
européennes. Même dans les manuels
récents, l’islam est souvent mentionnée
principalement dans le contexte de
l’histoire médiévale, sans aucun lien avec
la vie sociale qui existe aujourd’hui à
Paris, Berlin ou Madrid’’ (17). Les élèves
musulmans se sentiront peu ou pas
représentés par ces références à l’histoire
primitive de l’islam ou à l’écriture
islamique. Il est essentiel de représenter
la diversité des biographies dans les
«salles de classe mondialisées» pour
permettre aux élèves de s’identifier à leur
école, et par extension, à la société. Cela
ne signifie pas que toutes les histoires et
perspectives représentées dans une salle
de classe peuvent être racontées; une
représentation nécessite souvent de faire
des choix. À cet égard, l’histoire du
massacre des musulmans de Bosnie à
Srebrenica en 1995 est un exemple qui
est rarement utilisé, mais qui ajouterait
des perspectives importantes aux récits
développés dans la plupart des
programmes et des manuels scolaires.
Les souvenirs de Srebrenica continuent
de marquer l’identité des musulmans
européens, pourtant, l’histoire de
Srebrenica est rarement abordée dans les
cours d’histoire. Dispenser des cours sur
(17) Georg Eckert Institut – Leibniz Institut – für
internationale Schulbuchforschung (2011), Keine
Chance auf Zugehörigkeit? Schulbucher europäischer
Länder halten Islam und modernes Europa getrennt,
Brunswick, p. 3.
10 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
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Srebrenica dans les établissements
allemands, autrichiens ou français
véhiculerait une leçon importante:
«votre histoire compte».
• Changer de perspectives sur l’histoire
européenne
La représentation implique également
de raconter l’histoire coloniale
européenne comme l’histoire
mondiale, notamment sous l’angle des
sociétés colonisées. Des récits
apologétiques de la domination coloniale
européenne se retrouvent encore dans
de nombreux programmes nationaux.
Non seulement ces derniers sont
historiquement faux, mais ils ajoutent
également une certaine légitimité à une
propagande religieuse extrême qui
instrumentalise l’histoire européenne de
la violence coloniale pour provoquer des
appels à la revanche.
Bonnes pratiques:
Zwischentöne/Nuances – matériel
pédagogique pour la diversité en classe
«La plateforme ’web met à disposition
des modules d’enseignement qui
représentent et reflètent cette diversité.
Compte tenu des controverses publiques
au sujet de l’islam et de l’immigration,
ces sujets se prêtent à des processus
d’apprentissage étroitement liés aux
conditions de vie et à stimuler la prise de
décision et les compétences de
négociation des élèves (18).
(18) Voir http://www.zwischentoene.info/english.html en ligne.
• Offrir des récits inclusifs du «nous» Le
manque de représentation peut susciter
des conflits dans les salles de classe et
aliéner les jeunes, comme l’illustre
peut-être le mieux la controverse
provoquée par l’attaque qui a eu lieu
à Paris à l’encontre du journal Charlie
Hebdo en janvier 2015. Au lendemain
de l’attaque, les débats en classe (pas
seulement en France) ont souvent été
marqués par la confrontation: Un
groupe (qui comprenait souvent le
professeur) insistait sur «Je suis
Charlie», tandis qu’un autre, souvent
composé d’élèves issus de
l’immigration ou musulmans,
répondait «Je ne suis pas Charlie» ou
«Je suis musulman». Les rapports de
différents pays européens indiquent
l’importance croissante de ces discours
du «nous» contre «eux», reflétant ainsi
une polarisation croissante de la société.
Les salles de classe offrent un cadre
idéal pour contester ces discours et
encourager l’auto-identification des
élèves en tant que français et
musulman, allemand et turc ou
néerlandais et marocain.
L’introduction de modèles qui
représentent des biographies diverses
permet de contester les
revendications à des identités
collectives homogènes et peut fournir
des alternatives inclusives. Les élèves
doivent être conscients qu’ils ne sont
pas obligés de choisir entre être
11 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
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«Charlie» et «musulman». «Être
citoyen et musulman» est en effet
une option viable.
Bonnes pratiques: complexité intégrative de la pensée «Les pressions sociales, émotionnelles et politiques peuvent conduire à une «vision tronquée», une simplification excessive des valeurs, de la pensée et de l’identité qui rend les jeunes vulnérables à la pensée manichéenne des extrémistes. Les interventions de la complexité intégrative favorisent une évolution de la mentalité grâce à l’élargissement des valeurs, de la réflexion et de la complexité de l’identité sociale à travers l’apprentissage par l’action, des exercices en groupe et des documents multimédias » (19).
Bonnes pratiques: Dialog macht Schule/Dialogue à l’école «Nous partons de leurs histoires personnelles et des problèmes tirés de leurs expériences dans leurs environnements spécifiques... Ils peuvent discuter de sujets et de problèmes tels que les droits fondamentaux et les droits de l’homme, l’identité, la religion, l’intimidation, le harcèlement et le racisme et les comprendre d’une nouvelle manière. L’objectif est de leur montrer les chances et les moyens de participer à
(19) Voir http://www.ictcambridge.org en ligne.
une démocratie et de les expérimenter dans des activités communes» (20).
• Aborder les conflits et encourager
l’engagement
Les facteurs politiques, y compris les
revendications qui ’s’articulent autour
des conflits, peuvent aussi constituer des
facteurs de radicalisation. En dépit de
cela, de nombreux enseignants hésitent à
enseigner l’histoire d’Israël et de la
Palestine à leurs élèves ou à aborder les
guerres actuelles en Syrie et en Irak.
Certes, il s’agit de questions
controversées qui peuvent être abordées
sous différents angles, avec des
revendications conflictuelles et des
réponses faciles. Néanmoins, les jeunes
sont conscients de ces conflits et sont
constamment exposés à l’actualité et à la
(dés)information provenant des fronts et
les réseaux sociaux ’’ne font qu’ajouter
une autre dimension aux événements
survenant à Alep, à Beyrouth ou dans la
bande de Gaza. Aborder ces conflits
dans les établissements scolaires, ce
n’est pas privilégier les connaissances
et l’information, mais plutôt un
’espace pour exprimer des émotions, de
la colère et des frustrations. Pour
beaucoup d’élèves, la classe est le seul
endroit où il est possible de partager ces
sentiments, de connaître d’autres points
de vue et d’élaborer des stratégies pour
surmonter les émotions et les notions de
«victimisation éternelle» (émotions
exploitées par la propagande des
(20) Voir http://www.dialogmachtschule.de/ en ligne.
12 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
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mouvances extrémistes d’inspiration
religieuse). Évidemment, les
établissements scolaires ne peuvent pas
mettre fin aux guerres, et les élèves ne
peuvent pas mettre un terme aux
injustices mondiales, mais, les
établissements peuvent motiver les
élèves à exprimer leurs préoccupations,
apporter leur point de vue aux débats
publics ou mener des actions caritatives
pour soutenir les civils dans les pays
déchirés par la guerre. Ils ne changeront
pas le monde à court terme, mais ils
apprendront à s’engager, à faire
entendre leur voix et à gérer les
revendications relatives à la politique
(mondiale).
• Donner aux élèves les moyens de
lutter contre la discrimination
Les attaques racistes et les expériences
de discrimination peuvent être
instrumentalisées dans la propagande
d’inspiration religieuse. Par exemple, la
propagande djihadiste peut prétendre
que les «infidèles» mènent une guerre
contre tous les musulmans. Dans cette
perspective, les expériences de
discrimination et d’hostilité des élèves
sont les expressions d’un conflit plus
large qui n’implique pas les individus,
mais plutôt le groupe (les «infidèles»
contre l’oumma). Selon les extrémistes
religieux, la seule option viable dans ce
cas est la solidarité entre la communauté
mondiale des musulmans. En abordant
les expériences de discrimination et de
racisme dans la salle de classe et en
explorant les possibilités d’y répondre,
les instrumentalisations extrémistes
de la victimisation peuvent être
contestées: si le racisme est un
problème grave dans les sociétés
européennes, les victimes du racisme
ne sont pas sans défense. Leur donner
les moyens de réagir et de défendre leurs
droits constitue un aspect important de
la prévention.
• Promouvoir la diversification des rôles
attribués à chaque sexe
L’extrémisme de droite et l’extrémisme
religieux promeuvent des rôles rigides
pour chaque sexe, qui reposent sur un
supposé ordre naturel ou divin (21). Ces
rôles attribués à chaque sexe sont
attrayants parce que leur absence
d’ambiguïté décharge les femmes – et les
hommes – de faire des choix parmi les
différentes possibilités proposées dans
les sociétés modernes (choisir d’être une
mère en suivant ou non une carrière
professionnelle, être une famille
monoparentale, être parent au foyer, ou
reporter ces décisions, etc.).
L’autonomisation des femmes et des
hommes pour faire des choix sur les
rôles attribués à chaque sexe
implique qu’ils puissent avoir à
défendre ces choix lorsqu’ils sont en
désaccord avec leurs camarades, leur
famille ou leur environnement social,
mais cela implique également
l’acceptation de ces choix, même en
(21) Voir RAN issue paper ‘The Role of Gender in
Violent Extremism’ en ligne.
13 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
contradiction avec leurs propres
attentes (c’est-à-dire un mode de vie
religieux conservateur).
c) Nouvelles approches pour lutter
contre la radicalisation
La prévention de la radicalisation s’appuie sur
différentes approches et expériences ayant fait
leurs preuves dans les tentatives passées pour
renforcer la résilience et lutter contre
l’extrémisme. Cependant, de nouvelles
approches peuvent aussi se révéler utiles pour
adopter les stratégies actuelles dans les
contextes et les problèmes actuels.
• Les camarades comme exemples à
suivre
L’éducation par les camarades est une
stratégie efficace pour nouer le dialogue
avec les jeunes et encourager l’esprit
critique. Les approches d’éducation par
les camarades sont de plus en plus
utilisées dans l’éducation civique pour
créer des environnements
d’apprentissage non hiérarchisés dans
lesquels les questions d’identité, de
justice ou de religion peuvent être
abordées. Conduites par des camarades
formés comme animateurs bien
informés, ces discussions sont marquées
par une ambiance plus ouverte et moins
conflictuelle. Dans de nombreux cas, les
camarades sont choisis non seulement en
fonction de leur âge, mais aussi de leur
origine ethnique, culturelle ou religieuse
de manière à ce qu’elle soit semblable à
celle des élèves. En tant qu’exemples à
suivre «authentiques», ils facilitent
l’identification et encouragent la
participation aux discussions sur des
questions controversées.
Bonnes pratiques: AKRAN, programme
d’échanges entre camarades contre les
préjugés
Programme d’échanges entre camarades
pour qualifier des jeunes musulmans en
tant qu’éducateurs de leurs camarades
(22).
• Utiliser les médias en ligne pour nouer
le dialogue avec les élèves
Les médias en ligne jouent un rôle clé
dans la propagation des idéologies
extrémistes. Dans le même temps, la loi
limite l’utilisation des réseaux sociaux
comme outil d’enseignement dans
certains pays de l’UE. Néanmoins, les
experts s’accordent sur la nécessité de
contester l’extrémisme (violent) en
favorisant l’éducation aux médias et en
sensibilisant les jeunes aux stratégies et
aux contenus en ligne de la propagande
extrémiste. Des études récentes sur le
rôle des médias en ligne pour la
prévention ont mis en évidence
l’importance des «messages alternatifs»
qui fournissent d’autres lectures des
problèmes sociaux, politiques et religieux
potentiellement controversés. L’objectif
de ces messages lorsqu’ils sont
utilisés dans un cadre éducatif n’est
pas principalement de contester les
revendications extrémistes ou de
déconstruire leurs postulats. Ils visent
(22) Voir http://www.kiga-berlin.org/ en ligne.
14 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
plutôt à fournir des récits «nouveaux»
pour favoriser l’esprit critique sans
imposer certains points de vue et
convictions (contrairement aux
«contre-discours»).
Bonnes pratiques: Was postest Du?
L’éducation civique avec de jeunes
musulmans en ligne Développer des
approches éducatives civiques en ligne
pour nouer le dialogue avec de jeunes
musulmans sur les réseaux sociaux et
encourager le débat et la réflexion sur
des questions liées à l’identité, la
religion et l’appartenance (23).
• Utiliser des récits de première main
La prévention de l’extrémisme violent de
droite repose souvent sur des
témoignages de formateurs et de
survivants. Ces témoignages, qui sont des
comptes rendus de première main de
personnes précédemment impliquées
dans des activités d’extrême droite ou
déjà victimes de violences liées à
l’extrême droite, apportent des
éclairages importants qui pourraient
aider à délégitimer les idéologies et les
pratiques de ces organisations. Des
témoignages similaires de formateurs et
de survivants des organisations
extrémistes religieuses ont récemment
pu être utilisés en classe. Encore une
fois, l’authenticité de ces opinions
(23) Voir http://www.ufuq.de/was-postest-du-ansaetze-der-politischen-bildung-mit-jungen-muslim_innen-online en ligne.
stimule les débats sur la légitimité des
revendications impliquées et remet en
cause l’autodétermination héroïque des
organisations extrémistes.
Bonnes pratiques: dialogue extrême «Une série de courts métrages décrivent les histoires personnelles de Canadiens et d’Européens profondément touchés par l’extrémisme violent: un ancien membre de l’extrême droite au Canada, une mère de Calgary dont le fils a été tué alors qu’il combattait pour l’État islamique en Syrie, un jeune travailleur et ancien réfugié somalien, un ancien membre de la Force volontaire d’Ulster dont le père a été tué par l’IRA, et un ancien membre du groupe islamiste britannique désormais interdit Al Muhajiroun»(24).
• Aborder les préoccupations et les
questions religieuses
Au sein de l’UE, le statut de l’éducation
religieuse, tant dans les écoles publiques
que privées, varie considérablement d’un
État membre à l’autre’. La plupart des
experts conviennent que l’éducation
religieuse peut être un moyen important
de favoriser la sensibilisation
interreligieuse et interculturelle et
d’encourager une réflexion critique sur
les enseignements religieux et les
traditions. Toutefois, cet enseignement
ne devrait pas se limiter à l’éducation
religieuse axée sur la foi au sens strict. Au
lieu de cela, les intérêts religieux et les
préoccupations doivent être abordés
dans les différentes disciplines scolaires
(24) Voir http://extremedialogue.org/ en ligne.
15 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
qui s’appuient sur l’univers des étudiants
(Lebensweltbezug). Discuter des
préoccupations religieuses («Y a-t-il une
vie après la mort?», «Quel est le sens de
la vie?», «Qui doit respecter un juste
milieu entre les valeurs et les normes
religieuses et non religieuses?») dans les
conversations n’ayant pas trait à la
religion renforce l’identification à
l’institution et étaie les connaissances
religieuse de tous les élèves,
indépendamment de leur orientation
religieuse. Ces conversations ne visent
pas à renforcer les croyances religieuses,
mais à traduire les préoccupations
connexes aux questions éthiques
pertinentes pour tous: élèves croyants et
non croyants.
Bonnes pratiques: «Comment voulons-nous vivre? Courts métrages et ateliers sur l’islam, le racisme antimusulman, l’islamisme et la démocratie » «Ils encouragent les débats sur les préoccupations religieuses des jeunes dans des environnements pédagogiques hétérogènes et fournissent un espace pour réfléchir aux questions liées aux normes, aux valeurs, à l’identité et à la participation. En tant qu’interventions menées avant et en début de radicalisation, elles visent à favoriser l’identification en tant que musulmans allemands» (25).
d) Définir les procédures, construire
des réseaux (26)
(25) Voir http://www.ufuq.de/teamer_innen-workshops-wie-wollen-wir-leben/ en ligne. (26) Voir RAN policy paper ‘Developing a local prevent framework and guiding principles’ en ligne.
Bien qu’il n’existe aucune façon unique
d’identifier les processus de radicalisation, des
structures transparentes et des procédures
claires sont essentielles pour obtenir des
réponses suffisantes et durables. Ces structures
et procédures sont indispensables pour tous les
établissements ’scolaires, et les enseignants
doivent être formés pour les suivre. Ces
procédures varieront selon les pays, les niveaux
d’éducation, les groupes d’âge et les stades de
radicalisation. Mais elles doivent toutes fournir
des réponses claires aux questions suivantes:
Comment évaluer les éventuels cas de
radicalisation? Qui est responsable de quoi et
quand? À qui faire le signalement? Qui
impliquer? Comment assurer le suivi? Outre ces
procédures, il est essentiel d’établir des
structures de soutien efficace pour les
enseignants afin qu’ils fournir des conseils
compétents et un soutien psychologique. Non
moins important est le soutien public et politique
pour l’établissement qui aborde le cas de
l’extrémisme au sein de ses murs. Trop souvent,
les établissements sont réticents à prendre des
mesures contre les cas de radicalisation,
craignant une mauvaise publicité et une
diminution du nombre d’élèves. Il est donc
encore plus important d’encourager les écoles à
définir des procédures de vérification avant
l’apparition de cas possibles de radicalisation.
Cela concerne également la construction de
réseaux avec d’autres établissements afin de
permettre des réponses holistiques et à multiples
facettes, si nécessaire. En fait, alors que les
établissements sont des acteurs clés de ces
réseaux, les programmes de travail des jeunes,
les services sociaux, les collectivités locales et la
police sont d’autres acteurs essentiels pouvant
intervenir auprès des jeunes radicalisés. Ici
encore, les travaux de prévention contre la
radicalisation ne doivent pas tout réinventer.
16 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
Dans la plupart des pays, des réseaux et des
partenariats entre les établissements, les
organisations non gouvernementales (ONG), les
centres pour jeunes, les institutions locales et les
forces de police existent déjà. Dans de tels cas,
les programmes de prévention contre
l’extrémisme (violent) devraient s’appuyer sur
les contacts existants et tirer parti de la
confiance et de la coopération qui sont établies.
Recommandations
• Les enseignants et les établissements ne
doivent pas réinventer la roue pour
élaborer des stratégies efficaces de
prévention. Ils bénéficient d’une vaste
expérience concernant la gestion de
situations et de conflits difficiles, ce qui
peut servir de point de départ utile pour
prévenir la radicalisation.
• Les établissements et les enseignants
pourraient reproduire les
discriminations et les stéréotypes. Les
enseignants devraient être
encouragés à réfléchir de manière
critique à leurs propres attitudes et à
reconsidérer les messages qu’ils
transmettent à leurs élèves.
• Tout élève ’est susceptible de se
radicaliser. Les enseignants ont donc
une responsabilité particulière pour
déceler les premiers signes ’d’isolement
et de distanciation et y répondre de
manière appropriée. Ils devraient être
formés aux procédures pertinentes et
aux structures de réponse pour les cas
d’extrémisme (violent).
• L’enseignement est un moyen efficace
pour favoriser l’identification des élèves
à la société: il devrait refléter la diversité
des élèves et leurs différentes origines
biographiques, culturelles et religieuses
et offrir des récits inclusifs alternatifs au
«nous contre eux». Cela comprend la
représentation de l’histoire des
migrations en tant que facette
«standard» de l’histoire européenne
moderne.
• La démocratie ne vise pas avant tout à
connaître la Constitution. Elle repose
plutôt sur l’expérience selon laquelle les
intérêts de chacun sont importants et
qu’ils sont représentés dans le débat
public. Encourager la participation des
élèves dans les établissements
scolaires est un moyen de favoriser
les liens avec l’institution et de
prévenir la frustration et l’aliénation.
• Les établissements offrent le cadre
idéal pour donner aux élèves les
moyens de lutter contre la
discrimination et la marginalisation et
pour favoriser l’esprit critique sur des
questions controversées et sensibles
(identité, religiosité, rôles des sexes et
conflits internationaux). Même si ces
sujets peuvent donner lieu à des
émotions fortes et à des débats intenses,
les établissements permettent aux élèves
’de se confronter à des points de vue et à
des expériences variés avec lesquels ils
ne seraient pas en contact ailleurs.
Donner aux élèves des messages
alternatifs est un moyen de contester
des réponses faciles et des
17 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
revendications idéologiques promues par
des acteurs extrémistes violents.
• L’utilisation des réseaux sociaux, les
témoignages de première main et les
camarades se sont révélés des stratégies
importantes pour nouer le dialogue avec
les élèves, changer les perspectives et
offrir d’autres récits que la propagande
extrémiste.
• Des procédures claires, des structures de
soutien efficaces et des réseaux locaux
solides sont essentiels pour traiter les
cas de radicalisation. Cependant, il faut
du temps pour créer et entretenir ces
réseaux. Il est important de créer ces
structures avant tout cas d’extrémisme
violent et d’informer et de former les
enseignants à la façon de les utiliser.
18 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
Annexe
Ressources pédagogiques sélectionnées et
guides de l’enseignant sur la radicalisation
Arktos npo (2014), Bounce up. Formation des
formateurs, Louvain. (Disponible en anglais,
français, néerlandais, allemand; URL:
http://www.bounce-resilience-
tools.eu/sites/default/files/content/download/fil
es/bounce_up_-_tool_train_the_trainer.pdf)
Jamieson, A. et Flint J. (2015), Radicalisation et
terrorisme. Manuel de l’enseignant pour aborder
l’extrémisme. Âges: 11-14 ans, Bedfordshire.
Keen E. et Georgescu M. (2014), Connexions:
manuel pour la lutte contre le discours haineux
en ligne par l’éducation aux droits de l’homme,
Conseil de l’Europe: Budapest. (Disponible en
anglais et français; URL:
http://www.coe.int/de/web/no-hate-campaign)
Schule ohne Rassismus – Schule mit Courage
(2016), Lernziel Gleichwertigkeit für die
Grundstufe, Berlin.
Sklad M. et Park E. (2016), Éducation pour des
sociétés sûres et démocratiques. Manuel de
l’instructeur pour les compétences civiques et
sociales pour les adolescents UCARE, Middelburg.
(Disponible en anglais et allemand; URL:
http://www.ucr.nl/academic-
program/Research/Terra%20II/Pages/U-CaRe-
curriculum.aspx)
TerRA (2014), Outils TerRA. Approche
communautaire de la radicalisation. Manuel pour
les enseignants et les animateurs socio-éducatifs,
Amsterdam/Madrid. (Disponible en anglais et
allemand; URL: http://terratoolkit.eu/wp-
content/uploads/2014/09/TERRATOOLKIT_FULL_
PRINT_web_27.pdf)
ufuq.de (2016), Protestation, provocation ou
propagande? Guide pour prévenir l’idéologie
salafiste dans les écoles et les centres pour
jeunes, Berlin. (Disponible en anglais et allemand;
URL:
http://www.ufuq.de/Preventing_radicalisation.p
df)
ufuq.de (2016), Was postest Du? Politische
Bildung mit jungen Muslim_innen online.
Hintergründe, Erfahrungen und Empfehlungen
für die Praxis in sozialen Netzwerken und
Klassenräumen, Berlin. URL:
http://www.ufuq.de/pdf/Was_postest_du_ufuq_
Publikation_Onlineversion.pdf)
Organisation des Nations Unies pour l’éducation,
la science et la culture (2016), Guide des
enseignants sur la prévention de l’extrémisme
violent, Paris. URL:
http://unesdoc.unesco.org/images/0024/002446
/244676e.pdf)
Publications du RSR sur l’éducation et la
prévention
• Réseau de sensibilisation à la
radicalisation (2016), Collection du RSR.
Prévenir la radicalisation conduisant au
terrorisme et à l’extrémisme violent.
Approches et pratiques, Amsterdam.
URL: http://ec.europa.eu/dgs/home-
affairs/what-we-
do/networks/radicalisation_awareness_n
etwork/ran-best-
practices/docs/ran_collection-
approaches_and_practices_en.pdf)
• Réseau de sensibilisation à la
radicalisation et groupe de travail
Prévention (2015), «Manifeste pour
l’éducation: autonomisation des
éducateurs et des établissements
19 Réseau de sensibilisation à la radicalisation
DOCUMENT D’ANALYSE DU RSR
12/12/2016
scolaires», Amsterdam. URL:
http://ec.europa.eu/dgs/home-
affairs/what-we-
do/networks/radicalisation_awareness_n
etwork/docs/manifesto-for-education-
empowering-educators-and-
schools_en.pdf)
• Réseau de sensibilisation à la
radicalisation et groupe de travail
Éducation (2015), «Document ex post:
Réunion de démarrage du groupe de
travail RSR EDU, 25-26 novembre 2015»,
Amsterdam. URL:
http://ec.europa.eu/dgs/home-
affairs/what-we-
do/networks/radicalisation_awareness_n
etwork/about-ran/ran-
edu/docs/ran_edu_ex_post_paper_25-
26_november_prague_en.pdf)
• Réseau de sensibilisation à la
radicalisation et groupe de travail
Éducation (2016), «Document ex post:
donner les moyens d’agir aux enseignants
et les soutenir. Le rôle pédagogique
nécessite du temps et une formation.
Réunion du groupe de travail RSR EDU
24-25 février 2016», Amsterdam. URL:
http://ec.europa.eu/dgs/home-
affairs/what-we-
do/networks/radicalisation_awareness_n
etwork/about-ran/ran-
edu/docs/ran_edu_empowering_and_su
pporting_teachers_gothenborg_24-
25022016_en.pdf)
• Réseau de sensibilisation à la
radicalisation et groupe de travail
Éducation (2016), «Document ex post: les
chefs d’établissement et la prévention de
la radicalisation. Définir les conditions
d’un environnement sûr et
démocratique. Réunion du groupe de
travail RSR EDU 19-20 février 2016»,
Amsterdam. URL:
http://ec.europa.eu/dgs/home-
affairs/what-we-
do/networks/radicalisation_awareness_n
etwork/about-ran/ran-
edu/docs/ex_post_paper_ran_edu_antw
erp_19-20_04_2016_en.pdf)
• Réseau de sensibilisation à la
radicalisation et Institut pour le dialogue
stratégique (2015), «Document d’analyse
du RSR 01/10/2015: contre-récits et
récits alternatifs, Amsterdam. URL:
https://ec.europa.eu/home-
affairs/sites/homeaffairs/files/what-we-
do/networks/radicalisation_awareness_n
etwork/ran-
papers/docs/issue_paper_cn_oct2015_e
n.pdf)
• Réseau de sensibilisation à la
radicalisation (2016), «Document
d’analyse du RSR 04/01/2016: les causes
profondes de l’extrémisme violent»,
Amsterdam. URL:
https://ec.europa.eu/home-
affairs/sites/homeaffairs/files/what-we-
do/networks/radicalisation_awareness_n
etwork/ran-
papers/docs/issue_paper_root-
causes_jan2016_en.pdf)
• Réseau de sensibilisation à la
radicalisation (2016), «Document
d’analyse du RSR: développer un réseau
local de prévention et principes
directeurs, Amsterdam. (URL:)