192
Étude réalisée par le Les personnes âgées et la ville Rapport final Mai 2007 Observatoire Régional de l’Habitat et de l’Aménagement Cette étude a été financée dans le cadre de l’ORHA par : Direction Régionale de l’Equipement Nord - Pas-de-Calais et a été réalisée par : Les personnes âgées et la ville Rapport final Août 2006 1, rue Norbert Segard - BP 109 59016 LILLE cedex -Tél 03 20 13 40 60 ORHA - Observatoire Régional de l’Habitat et de l’Aménagement Association de la loi 1901 44, rue deTournai - BP 259 59019 Lille cedex -Tél 03 20 13 48 80 Direction Régionale de l’Equipement Nord - Pas-de-Calais 44, rue deTournai - BP 259 59019 Lille cedex -Tél 03 20 13 48 80 SCH - Communication & Marketing SCH COUV 050970:SCH COUV 050970 5/06/07 19:04 Page 1

DirectionRégionale Les personnes âgées etla ville€¦ · 2. Les actions mises en place par les professionnels de la ville en faveur de la mobilité des personnes âgées de plus

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É t u d e r é a l i s é e p a r l e

Les personnesâgées et la ville

Rapport finalMai 2007

O b s e r v a t o i r e R é g i o n a l d e l ’ H a b i t a t e t d e l ’ A m é n a g e m e n t

Cette étude a été financéedans le cadre de l’ORHA par :

Direction Régionalede l’EquipementNord - Pas-de-Calais

et a été réalisée par :

Les personnesâgées et la ville

Rapport finalAoût 2006

1, rue Norbert Segard - BP 10959016 LILLE cedex -Tél 03 20 13 40 60

ORHA - Observatoire Régionalde l’Habitat et de l’AménagementAssociation de la loi 190144, rue deTournai - BP 25959019 Lille cedex -Tél 03 20 13 48 80

Direction Régionale del’Equipement Nord - Pas-de-Calais44, rue deTournai - BP 25959019 Lille cedex -Tél 03 20 13 48 80 S

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SCH COUV 050970:SCH COUV 050970 5/06/07 19:04 Page 1

I

SOMMAIRE

INTRODUCTION 1

CHAPITRE 1 LE VIEILLISSEMENT : APPROCHE STATISTIQUE DE LA DEMOGRAPHIE 5

1. Le vieillissement de la population 7 1.1. Evolution et tendance 7

1.1.1. Mortalité et espérance de vie chez les plus de 60 ans 7 1.1.2. Le vieillissement de la population régionale : localisation et ampleur 9

1.2. Un vieillissement qui s’amplifiera dans les années à venir 17

2. Les caractéristiques sociodémographiques de la population âgée 22 2.1. Les grandes caractéristiques générales 22 2.2. Le niveau de vie 24

2.2.1. Activité et revenu 24 2.2.2. Le patrimoine immobilier 27

Conclusion 29

CHAPITRE 2 LA POPULATION DES 60 ANS ET PLUS : VIEILLISSEMENT, HABITAT ET MODE DE VIE 31

1. Les théories sociologiques du vieillissement 34 1.1. Les théories du vieillissement 34

1.1.1. le désengagement réciproque 34 1.1.2. La déprise 35 1.1.3. Le vieillissement, un processus relationnel 36

1.2. La prédominance d’une explication théorique du vieillissement 37

2. Le cadre de vie 38 2.1. Un impensé urbain 38

2.1.1. Une réflexion sur le périurbain en région Rhône-Alpes 38 2.1.2. Une approche européenne plus que nationale 39

2.2. Séniorité, cadre de vie et localisation 40 2.2.1. Les plus de soixante ans en milieu rural 40 2.2.2. L’habitat périurbain 40 2.2.3. L’habitat urbain 41

3. Les pratiques culturelles 42 3.1. L’âge au centre des pratiques culturelles 43 3.2. La sociabilité informelle et formalisée 43

3.2.1. Les relations avec autrui 44 3.2.2. L’engagement associatif 44

3.3. La télévision et l’intérêt pour le monde 45 3.3.1. Loisir passif - loisir actif 45 3.3.2. La télévision et les modes de vie 46

3.4. Les nouvelles technologies pierre d’angle de la modernité 46

Conclusion 49

II

CHAPITRE 3 LES PERSONNES DE PLUS DE 60 ANS : PRATIQUES URBAINES, EXPRESSION ET CITOYENNETE 51

1. Trois dimensions pour la constitution d’un cadre de référence 53

2. Les informations empiriques : enseignements et limites 55 2.1. Choix des sites et âges de la vie 55 2.2. Moyens d’accès et constitutions des groupes 56 2.3. Aspects déclarés et latents de ces absences 57

2.3.1. Les raisons objectives 57 2.3.2. Des attitudes de réticences 58 2.3.3. Les raisons de ces réticences 58

3. Les résultats obtenus 59 3.1. Typologie du ménage, habitat et déplacement : non-retour ou rupture ? 59

3.1.1. Habitat individuel en propriété 60 3.1.2. Habitat en logement adapté dans le parc social 61

3.2. Politiques vieillesse et initiatives locales 62 3.2.1. Autonomie et indépendance attendues des bénéficiaires des politiques vieillesse 62 3.2.2. Les conditions de vie des personnes âgées de 65 ans et plus 63 3.2.3. L’inquiétude devant l’avenir 64

4. Citoyenneté et participation civique : une zone à défricher 65 4.1. La participation ne disparaît pas quand l’âge augmente 65 4.2. Le Conseil des Sages de Grande-Synthe 66

Conclusion 70

CHAPITRE 4 LES CONDITIONS DE LOGEMENTS DES PERSONNES DE 60 ANS ET PLUS 71

1. Les personnes âgées à domicile 73 1.1. Les personnes de plus de 60 ans sont massivement propriétaires 73 1.2. Un phénomène de sous-occupation qui tend à s’accroître avec l’âge 76 1.3. Un confort sanitaire encore insuffisant 77 1.4. Une population âgée très largement satisfaite de son cadre de vie 78

2. Les trajectoires résidentielles des plus de 60 ans 79 2.1. Une faible mobilité résidentielle 79 2.2. Une tendance au vieillissement sur place dans les zones périphériques 80

Conclusion 81

CHAPITRE 5 PROJECTIONS DE LA DEMANDE DE MISE EN INSTITUTION DE LA PART DES PERSONNES AGEES : ESTIMATION A PARTIR DE L’ENQUETE HID 83

1. Les personnes âgées en institution 85 1.1. La cohabitation intergénérationnelle : un phénomène peu répandu dans la région 86 1.2. Un âge moyen d'entrée en maison de retraite de 85 ans 86

2. Matériel et méthode 88 2.1. Modéliser des projections de demande à partir de données nationales 88 2.2. Quelles alternatives méthodologiques ? 90

3. Résultat des projections 92 3.1. Les étapes du modèle de projection infrarégionale 92

III

3.2. Résultat des projections par EPCI 96

Conclusion 100

CHAPITRE 6 RELATION ENTRE LES PLUS DE 60 ANS ET L’HABITAT : LE POINT DE VUE DES PROFESSIONNELS, LES EXPERIENCES 101

1. L’habitat des personnes âgées : perception et représentations des professionnels de la ville 103 1.1. Des attentes différenciées en matière d’habitat 103 1.2. ″Rester en relation avec les autres″ ne signifie pas nécessairement ″habiter avec les autres″ 104 1.3. Une reconnaissance croissante de l’intergénérationnel 104 1.4. Le béguinage : un « produit intermédiaire à la mode » 105 1.5. Une connaissance limitée des attentes de personnes âgées 106

2. Les principes urbanistiques et architecturaux du concept de béguinage 107 2.1. Développer des projets à « configuration humaine » répondant aux besoins de proximité 107 2.2. Offrir un lieu de vie sécurisé 108 2.3. Des logements adaptables de petite taille 109 2.4. La présence de services : des avis non tranchés 110

3. Le développement de projets urbains intergénérationnels : l’exemple de la commune de Pulnoy 111

Conclusion 114

CHAPITRE 7 LA MOBILITE DES PERSONNES AGEES : UNE ANALYSE DES ENQUETES DEPLACEMENT DE LA REGION NORD PAS-DE-CALAIS 115

1. Méthodologie 117

2. Qui sont les personnes âgées aujourd’hui ? 119 2.1. Sexe et âge de la population étudiée. 119 2.2. Les revenus 120 2.3. Le niveau d’instruction 122 2.4. L’habitat 124

3. Les relations des personnes âgées aux transports 125 3.1. Usage des modes de transport mécanisés 125 3.2. Possession de la voiture 127

3.2.1. Le taux d’équipement des ménages 127 3.2.2. L’incidence sur l’usage des principaux modes 127

3.3. Permis de conduire et usage de la voiture 129 3.4. Abonnement et usage des transports en commun 130 3.5. Les opinions des personnes âgées 132

4. Les déplacements des personnes âgées 133 4.1. Les fréquences de déplacement ? 133 4.2. Quels motifs de déplacement ? 133 4.3. Quels modes de déplacement ? 135

Conclusion 138

CHAPITRE 8 RELATION ENTRE LES PLUS DE 60 ANS ET LES DEPLACEMENTS ET TRANSPORTS : LE POINT DE VUE DES PROFESSIONNELS, LES EXPERIENCES 139

1. La mobilité des personnes âgées : perception et représentations des professionnels de la ville 141

IV

1.1. La motorisation des personnes âgées de plus de 60 ans : un facteur défavorable à la fréquentation des transports collectifs 141 1.2. Une priorité aux jeunes et aux actifs 142 1.3. Les plus de 60 ans : une population regroupée sous le vocable "Personne à Mobilité Réduite" 142

2. Les actions mises en place par les professionnels de la ville en faveur de la mobilité des personnes âgées de plus de 60 ans 144

2.1. Offrir des transports publics accessibles 144 2.2. Proposer des transports collectifs sûrs 145 2.3. Une tarification préférentielle pour les plus modestes 146 2.4. Favoriser l’appropriation fonctionnelle des transports collectifs 147 2.5. Des études prospectives et des sondages pour définir les habitudes de déplacement et les attentes et besoins des personnes âgées 148

3. Le développement des services de transport à la demande : l’exemple de l’association spam 150

Conclusion 154

CONCLUSION 155

BIBLIOGRAPHIE 165

ANNEXES 171

V

Liste des cartes : Carte 1 : Evolution de la population de plus de 60 ans entre 1990 et 1999 à l’échelle des communes de la région Nord-Pas-de-Calais .................................................................................................12 Carte 2 : Proportion de la population de plus de 60 ans dans la population totale à l’échelle des communes de la région Nord-pas-de-Calais en 1999...........................................................................13 Carte 3 : Proportion de la population de plus de 60 ans dans la population totale à l’échelle des 15 principaux EPCI de la région en 1990................................................................................................16 Carte 4 : Proportion de la population de plus de 60 ans dans la population totale à l’échelle des 15 principaux EPCI de la région en 1999................................................................................................16 Carte 5 : Evolution (en points) de la part des plus de 60 ans à l’échelle des 15 principaux EPCI de la région entre 1990 et 1999 .............................................................................................................17 Carte 6 : Evolution entre 1999 et 2015 de la population âgée de plus de 60 ans à l’échelle des EPCI..............................................................................................................................................................20 Carte 7 : Proportion de la population de plus de 60 ans dans la population totale en 2015 à l’échelle des EPCI. .............................................................................................................................................20 Carte 8 : Evolution (en points) de la part des 60 ans et plus entre 1999 et 2015 à l’échelle des EPCI..............................................................................................................................................................21 Carte 9 : Evolution de la population âgée en institution (selon l’hypothèse moyenne) entre 2005 et 2015 à l’échelle des principaux EPCI de la région..........................................................................99

Liste des graphiques : Graphique 1 : Evolution du nombre de décès dans la région Nord-Pas-de-Calais entre 1990 et 2004....................................................................................................................................................................8 Graphique 2 : Evolution du nombre des plus de 60 ans entre 1975 et 2020 dans le Nord-Pas-de-Calais......................................................................................................................................................11 Graphique 3 : Evolution du nombre des plus de 75 ans entre 1975 et 2020 dans le Nord-Pas-de-Calais......................................................................................................................................................11 Graphique 4 : Evolution de la part des plus de 60 ans entre 1975 et 2020 dans le Nord-Pas-de-Calais ..............................................................................................................................................................11 Graphique 5 : Evolution de la part des plus de 75 ans entre 1975 et 2020 dans le Nord-Pas-de-Calais ..............................................................................................................................................................11 Graphique 6 : Evolution entre 1990 et 1999 de la répartition par statut d’occupation de la population âgée du Nord-Pas-de-Calais.........................................................................................................73 Graphique 7 : Répartition des 60-74 ans et des 75 ans et plus par statut d’occupation en 1999 à l’échelle régionale..................................................................................................................................75 Graphique 8 : Pyramide des âges des personnes interrogées. Distribution différenciée selon le sexe. .............................................................................................................................................................. 119 Graphique 9 : Pyramide des âges des personnes interrogées. Distribution différenciée selon le sexe et la zone de résidence (dense et moins dense). ......................................................................... 119 Graphique 10 : Les revenus des personnes interrogées selon l’âge. ..................................................... 120 Graphique 11 : Les revenus des personnes interrogées selon l’âge et la zone de résidence............ 121 Graphique 12 : Dernier établissement scolaire fréquenté à plein temps selon le sexe........................ 122 Graphique 13 : Dernier établissement scolaire fréquenté à plein temps selon l’âge............................ 123 Graphique 14 : Dernier établissement scolaire fréquenté à plein temps selon l’âge et la zone de résidence (dense ou moins dense). ........................................................................................................ 123 Graphique 15 : Les types d’habitat selon les zones de résidences......................................................... 124 Graphique 16 : Usage des mode de transport. En semaine (du lundi au vendredi), avec quelle fréquence utilisez-vous la voiture conducteur, la voiture passager, le réseau urbain, pour vous déplacer dans les agglomérations ? .......................................................................................... 125 Graphique 17 : Usage des mode de transport selon la zone de résidence (dense, moins dense). En semaine (du lundi au vendredi), avec quelle fréquence utilisez-vous la voiture

VI

conducteur, la voiture passager, le réseau urbain, pour vous déplacer dans les agglomérations ? ............................................................................................................................................. 126 Graphique 18 : Taux d’équipement en voiture des ménages selon la zone de résidence (dense ou moins dense). ................................................................................................................................ 127 Graphique 19 : Usage des modes de transport selon la motorisation. ................................................... 128 Graphique 20 : Usage des modes de transport selon la motorisation et la zone de résidence (dense ou moins dense) ................................................................................................................................. 129 Graphique 21 : La possession du permis de conduire selon le sexe, l’âge et la zone de résidence (dense ou moins dense)............................................................................................................... 129 Graphique 22 : La possession du permis d’un abonnement TC selon le sexe, l’âge et la zone de résidence (dense ou moins dense). ........................................................................................................ 130 Graphique 23 : Usage des modes selon la possession d’un abonnement TC. ..................................... 131 Graphique 24 : Usage des modes selon la possession d’un abonnement TC selon la zone de résidence (dense ou moins dense)............................................................................................................... 131 Graphique 25 : Opinion des personnes âgées et des moins de 60 ans sur les risques encouru lors des déplacements. ................................................................................................................... 132 Graphique 26 : Les motifs de déplacement selon le sexe et l’âge. ......................................................... 134 Graphique 27 : Les motifs de déplacement selon l’âge et la zone de résidence (dense et moins dense).................................................................................................................................................... 135 Graphique 28 : Les modes de déplacement selon le sexe et l’âge. ........................................................ 135 Graphique 29 : Les modes de déplacement selon l’âge et la zone de résidence (dense et moins dense).................................................................................................................................................... 136

Liste des tableaux : Tableau 1 : Evolution de l’espérance de vie à la naissance dans la région Nord-Pas-de-Calais entre 1990 et 2004 ...................................................................................................................................8 Tableau 2 : Gérontocroissance et vieillissement des zones d’étude entre 1999 et 2020 .......................18 Tableau 3 : Gérontocroissance et vieillissement à l’échelle des 15 principaux EPCI de la région entre 1999 et 2020 .................................................................................................................................19 Tableau 4 : Répartition des ménages dont la personne de référence a plus de 60 ans à l’échelle des EPCI en 1999...............................................................................................................................23 Tableau 5 : Mode cohabitation à l’échelle régionale des plus de 60 ans en 1999...................................24 Tableau 6 : Population active régionale par sexe, âge et type d’activité en 1999 ...................................25 Tableau 7 : Age du titulaire du contrat de location des logements gérés par les organismes HLM et les SEM ..................................................................................................................................................75 Tableau 8 : Age des occupants des logements gérés par les organismes HLM et les SEM .................76 Tableau 9 : Migrations résidentielles de la population régionale de plus de 60 ans entre 1990 et 1999........................................................................................................................................................80 Tableau 10 : Répartition de la population des ménages de 60 ans et plus par type d’hébergement (collectif ou autonome) en 1999 ...........................................................................................87 Tableau 11 : Répartition de la population des ménages collectifs de 60 ans et plus par type d’hébergement en 1999.....................................................................................................................................87 Tableau 12 : % de la population vivant en institution selon le sexe et la classe d’âge dans l’enquête HID.......................................................................................................................................................91 Tableau 13 : Estimation des probabilités de niveau d’étude par un modèle logistique polytomique (catégorie de référence = niveau d’études supérieures) .......................................................93 Tableau 14 : Estimation de la probabilité d’être en institution à partir de l’enquête HID.........................94 Tableau 15 : Hypothèse de prévalence de l’institutionnalisation avec ou sans calage régional............96 Tableau 16 : Projection d’effectif de personnes en institution par EPCI – Simple extrapolation à partir de l’enquête HID....................................................................................................................................96 Tableau 17 : Projection d’effectif de personnes en institution par EPCI – Avec calage régional selon l’hypothèse basse.....................................................................................................................97

VII

Tableau 18 : Projection d’effectif de personnes en institution par EPCI – Avec calage régional selon l’hypothèse moyenne ...............................................................................................................97 Tableau 19 : Projection d’effectif de personnes en institution par EPCI – Avec calage régional selon l’hypothèse haute......................................................................................................................98 Tableau 20 : récapitulatif des enquêtes ménages existantes de la région............................................. 117 Tableau 21 : Fréquences journalières de déplacements des personnes de plus de 60 ans. ............. 133

INTRODUCTION

3

Même si la région Nord Pas-de-Calais reste une des plus jeunes régions de France, elle n’échappe pas au phénomène de vieillissement général de la population. Selon les projections Omphale réalisées par l’INSEE, les personnes de 60 ans et plus représenteront près du quart de la population régionale en 2020. Inéluctable, incontournable, le vieillissement de la population pose des questions de société majeures et suscite des interrogations sur les conséquences urbaines de ce phénomène. Les problèmes posés par l'hébergement et la prise en charge des personnes âgées vont en effet se renforcer avec l'évolution démographique et l'allongement de la durée de la vie. Tout un dispositif est aujourd’hui mis en place pour répondre à ces besoins et attentes. Ces réponses sont structurées par un partage des compétences entre plusieurs institutions, ce qui entraîne dans de nombreux cas une discontinuité dans la prise en charge des personnes âgées. Au-delà du logement et de l’hébergement des personnes âgées, il est un domaine où le phénomène du vieillissement est encore assez peu exploré, c’est celui du rapport à la ville, et de la manière dont est prise en compte ou non cette population dans les choix d’aménagement, d’urbanisme et d’habitat. L’augmentation attendue du nombre et du poids relatifs des 60 ans et plus va obliger les acteurs de la ville à faire évoluer leurs interventions et à adapter leurs politiques en matière d’habitat, de transports et de services. C’est sur ce thème que l’ORHA a lancé une étude qu’elle a confiée au CRESGE. Les objectifs de ce travail sont multiples et peuvent être déclinés ainsi : - actualiser d’une part, la connaissance de l’importance de la population âgée et

des ménages âgés en région Nord Pas-de-Calais et d’autre part, la situation résidentielle des personnes âgées, en tenant compte de l’adaptation des différents segments de l’offre à l’évolution de l’état de santé des personnes ;

- préciser les localisations, et les modalités de localisation des personnes âgées dans le tissu urbain. Autrement dit, il s’agit d’éclairer au mieux les choix des localisations et des changements de localisation liés à l’avancée en âge ainsi que les interactions avec les choix de statut d’occupation ;

- évaluer le degré de prise en compte du vieillissement de la population dans les politiques d’aménagement de la ville, en illustrant ;

- préciser les contours de la problématique du vieillissement des citadins. La méthodologie employée pour cette étude s’est appuyée sur deux approches : une approche quantitative et une approche qualitative. L’approche quantitative consiste en l’exploitation et l’analyse de données statistiques issues de différentes sources dont notamment :

- le recensement général de la population de 1999 (1990 pour les évolutions) ; - les projections Omphale réalisées par l’INSEE ; - l’enquête nationale logement (ENL) de 2001 (échantillon régional) ; - l’enquête handicaps-incapacités-dépendances (HID) ; - les enquêtes ménages déplacements réalisées ces dernières années dans

plusieurs villes de la région en se centrant sur les personnes âgées de plus de 60 ans.

4

L’approche qualitative se fonde, quant à elle, sur différentes investigations dont : - une recherche et une analyse bibliographique ; - des entretiens auprès de professionnels de la ville : des services de plusieurs

municipalités, des sociétés d’exploitation de transports et des architectes-urbanistes ;

- des focus group avec des personnes âgées de 65 ans et plus, en milieu urbain, à Calais et en zone périurbaine, au sud de Lille, à Phalempin ;

- l’analyse d’expériences, dans la région Nord-Pas-de-Calais, à Grande-Synthe et dans le Douaisis, à Nancy et à Liège en Belgique.

Ce rapport final comporte huit chapitres. Le premier chapitre s’attache à la question du vieillissement et de la gérontocroissance1 sous l’angle démographique et géographique. Les deuxième et troisième chapitres abordent la question du vieillissement sous l’angle sociologique en s’intéressant aux comportements des personnes âgées dans différents domaines de leur vie quotidienne, et en mettant en valeur leur point de vue et une expérience de citoyenneté. Les quatrième, cinquième et sixième chapitres s’intéressent à la question du logement et de l’habitat et plus particulièrement les conditions d’habitat de la population de 60 ans et plus, une estimation des besoins en hébergement à horizon 2010 et 2015, le point de vue de professionnels sur le thème de l’habitat et une expérience dans ce domaine. Les septième et huitième chapitres sont consacrés à la question des déplacements et des transports avec une analyse des résultats des enquêtes déplacements, puis une présentation du point de vue des professionnels et d’une expérience.

1 Ce vocabulaire est défini dans la première partie.

CHAPITRE 1

LE VIEILLISSEMENT : APPROCHE STATISTIQUE

DE LA DEMOGRAPHIE

7

Ce premier chapitre qui rend compte des résultats des exploitations statistiques a pour objet d’appréhender différents aspects liés au vieillissement, aux conditions de vie des personnes âgées et aux évolutions qui caractérisent cette tranche d’âge.

Dans la section 1, sont exposées des données démographiques permettant de situer l’ampleur du vieillissement de la population à l’échelle régionale et infrarégionale2.

La section 2 présente une série de tendances socio-économiques que l’on observe chez la population âgée du Nord-Pas-de-Calais. Plusieurs thèmes y sont abordés : les aspects sociodémographiques, le niveau de vie, le patrimoine immobilier.

1. LE VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION

Les grandes tendances en matière de vieillissement qui sont exposées dans cette section résultent de l’exploitation d’une part des données du Recensement général de la population de 1999 (1990 pour les évolutions) et d’autre part, des projections Omphale à l’horizon 2020 réalisées par l’INSEE.

1.1. Evolution et tendance

1.1.1. MORTALITE ET ESPERANCE DE VIE CHEZ LES PLUS DE 60 ANS

Une nette diminution des décès

Selon les données provisoires de l’État civil, environ 34 300 décès sont survenus en 2004 dans la région, soit 7% de moins qu’en 2003. Ce recul équivaut à celui enregistré en France.

Cette baisse de la mortalité en 2004 n’est pas imputable aux « décès anticipés » en 2003 du fait de la canicule puisque le Nord-Pas-de-Calais a été relativement épargné par cette vague de chaleur : les décès sont en effet restés stables entre 2002 et 2003 dans la région (+ 141 décès entre ces deux dates).

2 L’on s’intéresse ici plus particulièrement aux zonages géographiques suivants : les bassins d’habitat, les 15 principaux EPCI et la typologie des territoires réalisée par l’ORHA.

8

Graphique 1 : Evolution du nombre de décès3 dans la région Nord-Pas-de-Calais entre 1990 et 2004

35 684

36 660

34 300

36 519

35 043

36 471

36 172

33 00033 50034 00034 50035 00035 50036 00036 50037 000

1990 1995 2000 2001 2002 2003 2004

Nb

de d

écès

Nb Décès

Source : Insee – Etat civil, estimations de population.

Une espérance de vie en forte augmentation

En quatorze ans, l’espérance de vie4 à la naissance de la population régionale s’est accrue de plus de trois ans. Ainsi, en 2004, l’espérance de vie à la naissance des hommes s’élève à 73 ans et demi, soit un gain d’un an par rapport à 2003 ; dans le même temps, celle des femmes atteint 82 ans, soit une progression de plus d’une année par rapport à 2003. Cette amélioration permet de réduire un peu l’écart avec le niveau national. Celui-ci reste néanmoins important puisque qu’il est de trois ans pour les hommes et deux ans pour les femmes. Les niveaux régionaux sont aujourd’hui comparables à ceux de la France dix ans plus tôt.

Tableau 1 : Evolution de l’espérance de vie à la naissance dans la région Nord-Pas-de-Calais entre 1990 et 2004 Nord-Pas-de-Calais France

métropolitaine Hommes Femmes Hommes Femmes 1990 69,9 79,0 72,7 80,9 1995 70,9 79,9 73,9 81,9 2000 72,0 80,6 75,2 82,8 2001 72,5 80,8 75,4 82,9 2002 72,2 80,6 75,7 83,0 2003 72,6 80,8 75,8 82,9 2004 73,6 82,1 76,7 83,8

Source : Insee – Etat civil, estimations de population.

3 Les décès de 2002 et de 2003 ont été estimés à partir des résultats quasi définitifs de l’état civil et d’enquêtes auprès des communes. Tous les événements de 2004 ont été évalués à partir d’une extrapolation de l’enquête démographique auprès d’un échantillon de grandes villes (enquête « Villes ») pour la France métropolitaine. Ce sont des chiffres provisoires.

4 L’espérance de vie à la naissance, ou durée moyenne de vie, est la moyenne des âges au décès d’une génération fictive soumise aux conditions de mortalité de l’année. (Définition INSEE)

9

1.1.2. LE VIEILLISSEMENT DE LA POPULATION REGIONALE : LOCALISATION ET AMPLEUR

Près d’un habitant sur quatre dans les espaces à dominante rurale a 60 ans ou plus

Dans le Nord-Pas-de-Calais, la part des personnes âgées de plus de 60 ans dans la population totale est très largement supérieure dans les communes à dominante rurale5 à celle observée dans l’ensemble des communes à dominante urbaine. En 1999, 23% de la population des communes à dominante rurale est âgée de 60 ans et plus (18,6% dans les espaces à dominante urbaine), soit 2,4 points de plus qu’en 1975 (augmentation identique à l’échelle des communes à dominante urbaine).

Une gérontocroissance et un vieillissement continus depuis 1982 à l’échelle de la région

De 1975 à 1999, à l’exception de la période intercensitaire (1975 – 1982) où l’on note une baisse de la population de plus de 60 ans due aux effets de la classe creuse de la Première Guerre mondiale, la région Nord-Pas-de-Calais a enregistré une gérontocroisssance6 continue. La population âgée de plus de 60 ans est ainsi passée de 646 453 personnes en 1975 à 722 751 personnes en 1999, soit un taux d’accroissement annuel moyen de 0,5%. L’augmentation du nombre de personnes âgées ne s’est pas fait au même rythme pour toutes les classes d’âge. La population des 75 ans et plus a, contrairement à la population des plus de 60 ans, connu une

5 L’espace à dominante rurale est constitué par l’ensemble des communes n’appartenant pas à l’espace à dominante urbaine. Parmi elles, on distingue : - le pôle rural est une commune ou unité urbaine offrant 2 000 à moins de 5 000 emplois et dont le nombre d’emplois offerts est supérieur ou égal au nombre de résidants actifs ; - les communes sous faible influence urbaine sont des communes où 20% ou plus des résidants actifs travaillent dans un pôle urbain ou une couronne périurbaine ; - les communes sous influence des pôles ruraux sont des communes rurales et des petites unités urbaines, n’étant ni pôle rural, ni sous faible influence urbaine, et dont 20% ou plus des résidants actifs travaillent dans des pôles ruraux ; - le rural isolé est formé de l’ensemble des communes rurales et des unités urbaines appartenant à l’espace à dominante rurale, n’étant ni pôle rural, ni sous faible influence urbaine, ni sous influence des pôles ruraux. L’espace à dominante urbaine est constitué par les communes appartenant aux pôles urbains et aux couronnes périurbaines ainsi que les communes multipolarisées. Le pôle urbain est une unité urbaine offrant 5 000 emplois ou plus n’appartenant pas à la couronne périurbaine d’un autre pôle urbain. La couronne périurbaine est constituée de communes dont au moins 40% des résidants actifs ont un emploi dans un pôle urbain. On parle de communes multipolarisées quand au moins 40% des résidants actifs d’une commune ont un emploi dans plusieurs pôles urbains (sans atteindre ce seuil avec un seul d’entre eux). (Définition INSEE). 6 La gérontocroissance se définit comme l’augmentation du nombre de personnes âgées dans la population (la diminution du nombre de personnes âgées étant dénommée gérontodécroissance). Elle est essentiellement sensible à l’augmentation de l’espérance de vie et aux flux migratoires. (Définition de Gérard-François Dumont, professeur à l’Université Paris IV, directeur de la revue Population & Avenir).

10

croissance continue de 1975 à 1999. Cette tranche de population est ainsi passée de 180 901 personnes en 1975 à 306 886 personnes en 1999, soit un taux d’accroissement annuel moyen de 2,2%.

Cette gérontocroissance continue s’est en outre accompagnée d’un vieillissement7 de la population. Alors que la population de plus de 60 ans représentait 16,9% de la population totale en 1975, elle atteint 18,4% de la population en 1999, soit une augmentation de 1,5 point. De même, alors que la population de plus de 75 ans représentait 4,6% de la population régionale en 1975, elle atteint 7,6% de la population en 1999, soit une augmentation de 3 points.

Les premiers résultats du recensement annuel de la population de 2004 estiment la population âgée de plus de 60 ans à 696 414 personnes, soit 17,7% de la population régionale. Ce résultat provisoire de la première vague du "recensement tournant" conduit en 2004 doit néanmoins être pris en compte, selon les démographes François Héran et Laurent Toulemon, de façon partielle, dans l'attente d'une confirmation par les vagues suivantes et des conclusions de l’évaluation de la qualité de la collecte du nouveau recensement menée par l’instance indépendante réunissant des élus locaux et des statisticiens8.

7 Le vieillissement peut se définir comme l’accroissement du rapport du nombre de personnes âgées à la population totale. (Définition de Gérard-François Dumont, professeur à l’Université Paris IV, directeur de la revue Population & Avenir). 8 Héran F. & Toulemon L., Que faire quand la population recensée ne correspond pas à la population attendue ?, in Populations et Sociétés, n°411, avril 2005.

11

Graphique 2 : Evolution du nombre des plus de 60 ans entre

1975 et 2020 dans le Nord-Pas-de-Calais

800 717

968 146

696 414

722 751670 892

625 364

646 453

0

200 000

400 000

600 000

800 000

1 000 000

1 200 000

1975 1982 1990 1999 2004 2010 2020

Nb

de p

ers.

Pers >60 ans

Source : INSEE, RGP 1975 à 2004 & Projections Omphale

Graphique 3 : Evolution du nombre des plus de 75 ans entre

1975 et 2020 dans le Nord-Pas-de-Calais

226 451

306 886

303 604250 766

209 847

180 901

0

50000

100000

150000

200000

250000

300000

350000

1975 1982 1990 1999 2010 2020

Nb

de p

ers.

Pers >75 ans

Source : INSEE, RGP 1975 à 2004 & Projections Omphale

Graphique 4 : Evolution de la part des plus de 60 ans entre

1975 et 2020 dans le Nord-Pas-de-Calais

23,9

19,8

17,7

18,4

17,215,9

16,4

0,0

5,0

10,0

15,0

20,0

25,0

30,0

1975 1982 1990 1999 2004 2010 2020

Part

des

60 a

ns e

t + (%

)

Pers >60 ans

Source : INSEE, RGP 1975 à 2004 & Projections Omphale

Graphique 5 : Evolution de la part des plus de 75 ans entre

1975 et 2020 dans le Nord-Pas-de-Calais

5,8

7,67,56,4

5,3

4,6

0,0

1,0

2,0

3,0

4,0

5,0

6,0

7,0

8,0

1975 1982 1990 1999 2010 2020

Part

des

75 a

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Pers >75 ans

Source : INSEE, RGP 1975 à 2004 & Projections Omphale

12

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1999

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P 19

90 -

1999

14

Un phénomène de gérontocroissance également observable dans les différents territoires de la région

L’ensemble des 15 principaux EPCI de la région a enregistré une augmentation du nombre de personnes âgées entre 1990 et 1999, augmentation qui ne s’est toutefois pas faite au même rythme dans les différents territoires. Certains EPCI ont connu une gérontocroissance supérieure à la moyenne régionale (+7,8% entre 1990 et 1999). Il s’agit des Communautés urbaines de Dunkerque et de Arras ainsi que des Communautés d’agglomération de Saint-Omer, du Cambrésis et du Boulonnais qui ont connu une augmentation à deux chiffres. La Communauté urbaine de Lille, les Communautés d’agglomération de l’Artois, de Valenciennes métropole et de Lens-Liévin ont, quant à elles, enregistré une augmentation inférieure à la moyenne régionale.

Si l’on considère les caractéristiques du système urbain des territoires, l’on constate également un accroissement de la population âgée de plus de 60 ans, pour l’ensemble des territoires. Cet accroissement a cependant été nettement plus marqué pour les zones touristiques, le périurbain résidentiel et les zones de banlieue résidentielle et mixte. Si les centres et les pôles urbains ont connu une augmentation de leur population de plus de 60 ans, cette augmentation demeure très faible au regard de celle observée à l’échelle régionale (respectivement + 0,7% et + 0,9% entre 1990 et 1999).

Un vieillissement plus marqué dans les espaces ruraux et touristiques

Les communes à dominante rurale et touristique présentent une proportion de personnes âgées de plus 60 ans nettement supérieure à celle observée à l’échelle régionale où 18,7% de la population est âgée de plus de 60 ans. Ainsi, en 1999, les personnes de 60 ans et plus représentent 26,5% de la population des pôles ruraux et 23% de la population des zones touristiques9.

Ce vieillissement des zones rurales se trouve accéléré par le double phénomène de métropolisation qui conduit, via la polarisation des jeunes adultes dans les métropoles, à un rajeunissement de ces territoires et de contre-urbanisation qui se caractérise, selon Laurence Thomsin10, par une situation migratoire par laquelle les ménages quittent volontairement la ville pour la campagne, sans pour autant entretenir de relations quotidiennes avec la zone urbaine. En 1999, la population de plus de 60 ans ne représentait ainsi que 17,2% de la population des pôles urbains, 17,8% de la population des centres et 17,7% de la population du périurbain (périurbain résidentiel et périurbain mixte). Ce phénomène de métropolisation se trouve en outre confirmé par une part des personnes âgées dans le territoire de Lille Métropole Communauté Urbaine (LMCU) inférieure à la moyenne régionale : 16,4% de la population est âgée de plus de 60 ans.

9 Les zones touristiques comprennent les zones ruralo-touristiques (20,3% de la population est âgée de plus de 60 ans), les zones touristiques de catégorie 1 (28,6%) et les zones touristiques de catégorie 2 (21,6%).

10 Chercheur qualifié du F.N.R.S., Institut des Sciences Humaines et Sociales, Université de Liège

15

Les communes minières11 connaissent, elles aussi, à un moindre degré, un vieillissement relativement prononcé. Les personnes âgées de 60 ans et plus atteignent 20,6% de la population (soit 116 818 personnes) en 1999, soit 4,6 points de plus qu’en 197512. Ainsi, dans les territoires des Communautés d’agglomération d’Artois Com, de Lens Liévin ou encore du Douaisis, territoires fortement marqués par le passé minier, la part de la population de plus de 60 ans atteint respectivement 21%, 20,4% et 20,2% de la population totale.

Contrairement aux bassins d’habitat de Hesdin, Saint-Pol-sur-Ternoise, Le Quesnoy, Aire-sur-la-Lys, Béthune, Cambrai et la Côte d’opale qui affichent un vieillissement prononcé de leur population, les bassins d’habitat de Lille et Roubaix Tourcoing ainsi que la Communauté urbaine de Dunkerque et les Communautés d’agglomération de Saint-Omer et du Calaisis se caractérisent, quant à eux, par une population relativement jeune : la part de la population de plus de 60 ans dans ces territoires est inférieure à la moyenne régionale.

Si l’on considère l’évolution du vieillissement des territoires infrarégionaux, la situation apparaît contrastée. En, effet si la part des plus de 60 ans a augmenté dans l’ensemble des territoires, l’ampleur de cette augmentation varie d’un territoire à l’autre. Tandis que la Communauté urbaine de Lille (+ 0,3 point) et la Communauté d’agglomération du Calaisis (+0,8 point) ont enregistré une augmentation de la part des plus de 60 ans inférieure à la moyenne régionale (+ 1,2 points), les Communautés urbaines de Dunkerque, de Arras ainsi que les Communautés d’agglomération du Cambrésis, de Maubeuge Val de Sambre et de Hénin-Carvin affichent, quant à elles, une augmentation supérieure (entre + 2 et +2,9 points) à la moyenne régionale.

11 Les communes minières sont les communes qui ont possédé sur leur territoire un puits d’extraction houillère. (Définition INSEE) 12 INSEE Nord-Pas-de-Calais, Vieillissement de la population dans le bassin minier du Pas-de-Calais, Profils, Hors série n°1, 2000.

16

Carte 3 : Proportion de la population de plus de 60 ans dans la population totale à l’échelle des 15 principaux EPCI de la région en 1990

Source : INSEE, RGP 1990

Carte 4 : Proportion de la population de plus de 60 ans dans la population totale à l’échelle des 15 principaux EPCI de la région en 1999

Source : INSEE, RGP 1999

17

Carte 5 : Evolution (en points) de la part des plus de 60 ans à l’échelle des 15 principaux EPCI de la région entre 1990 et 1999

Source : INSEE, RGP 1990 – 1999

1.2. Un vieillissement qui s’amplifiera dans les années à venir

Près d’un million de personnes de plus de 60 ans en 2020

En se fondant sur un scénario ayant pour hypothèse un prolongement des tendances actuelles en termes de mortalité, de solde migratoire et de fécondité, l’INSEE estime que la part des personnes de plus de 60 ans dans la population atteindrait 19,8% en 2010 (soit 800 717 personnes) et 23,9% (soit 968 146 personnes) en 2020. Cette accélération du vieillissement s’explique par l’arrivée progressive à l’âge de 60 ans à partir de 2006 des générations nombreuses issues du baby-boom. La population âgée croîtra alors d’environ 1% par an entre 1999 et 2010 et de 1,7% par an entre 2010 et 2020.

Une accélération de la gérontocroissance dans les zones d’études13 à partir de 2010

Entre 1999 et 2010, à l’exception de la zone d’étude de Bruay qui se caractérise par une légère gérontodécroissance (avec un taux de croissance annuel moyen de la

13 Les zones d’étude sont cadrées sur les bassins d’habitat de l’ORHA atteignant la taille suffisante admise par l’INSEE pour la projection de la population. Trois zones supplémentaires sont utilisées dans l’aire de l’ancien Bassin Minier : Bruay, Hénin-Carvin et Denain qui font respectivement partie des bassins d’habitat de Béthune, Lens et Valenciennes.

18

population de plus de 60 ans de - 0,5%), l’ensemble des zones d’études de la région enregistrera, selon les données des projections Omphale, une gérontocroissance, qui se manifestera néanmoins avec des intensités variées. Tandis que les taux de croissance annuels moyens des plus de 60 ans des zones d’étude de Dunkerque, de Saint-Omer, de la Côte d’Opale et de Arras seront supérieurs à la moyenne régionale, ceux des zones d’étude de Denain, de Lens Liévin, de Douai et de Hénin Carvin, seront, quant à eux largement inférieurs à la moyenne régionale.

De 2010 à 2020, toujours selon les projections Omphale, le phénomène de gérontocroissance devrait s’accélérer dans l’ensemble des zones d’étude de la région, à des rythmes là encore différents. Les zones d’étude de Saint-Omer, de la Côte d’Opale, de Calais et de Boulogne enregistreront des taux de croissance annuels moyens des plus de 60 ans largement supérieurs à la moyenne régionale. Les zones d’étude de Bruay, Cambrai, Maubeuge, Denain et Roubaix-Tourcoing afficheront, quant à elles, des taux de croissance annuels moyens des plus de 60 ans inférieurs à la moyenne régionale.

Cette gérontocroissance s’accompagnera en outre d’un vieillissement significatif de l’ensemble des zones d’étude de la région. Les bassins d’habitat de la Côte d’Opale, de Dunkerque, de Maubeuge et de Arras constituent les zones d’étude qui connaîtront le vieillissement de leur population le plus marqué. A l’inverse, les zones d’étude de Bruay, de Denain, de Lille, Roubaix-Tourcoing et Lens-Liévin enregistreront, entre 1999 et 2020, une augmentation de la part des plus de 60 ans inférieure à la moyenne régionale.

Tableau 2 : Gérontocroissance et vieillissement des zones d’étude entre 1999 et 2020

Bassins d'habitat

Pop > 60 ans en

1999 (nb)

Part des > 60 ans en 1999

(%)

TCAM* 1999-

2010 (%)

TCAM* 2010-

2020 (%)

Part des > 60

ans en 2020

Evolution part

>60ans 1999 -

2020 (en points)

Roubaix-Trcg 68617 16,4 1,0 1,4 21,0 4,7 Lille 137266 15,7 1,2 1,9 20,2 4,5 Dunkerque 43600 15,9 2,0 1,9 25,8 9,9 Douai 48891 19,6 0,5 1,5 25,4 5,7 Valenciennes 53222 18,7 0,7 1,6 24,1 5,4 Cambrai 22385 20,4 0,7 1,3 26,8 6,4 Maubeuge 24988 18,0 1,2 1,3 27,3 9,3 Arras 19728 17,8 1,8 1,8 26,3 8,5 Lens-Liévin 52030 19,3 0,3 1,6 24,1 4,8 Béthune 23438 19,5 0,9 1,7 26,5 7,1 St-Omer 14727 16,2 2,0 2,5 25,3 9,1 Calais 21980 16,5 1,2 2,2 22,4 5,9 Boulogne 28514 18,4 1,2 2,0 24,6 6,2 Côte d'Opale 13516 20,9 1,9 2,3 31,3 10,3 Denain 14674 19,3 0,2 1,4 22,5 3,1 Hénin-Carvin 24821 18,4 0,5 1,5 25,0 6,6 Bruay 23859 23,8 -0,5 1,0 26,3 2,6 Reste Nord 37864 20,6 0,8 1,5 27,6 7,0 Reste PDC 45724 22,4 0,6 1,8 28,4 5,9

Région 719844 18,0 1,0 1,7 23,9 5,9 Source : INSEE, RGP 1999 & Projections Omphale

* TCAM : Taux de croissance annuel moyen

19

Les quinze principaux EPCI de la région seront, eux aussi, concernés par ces phénomènes de gérontocroissance et de vieillissement de la population entre 1999 et 201514 ; néanmoins, l’ampleur de ces phénomènes varie d’un EPCI à l’autre.

Ainsi, tandis que les Communautés urbaines de Dunkerque et de Arras et les Communautés d’agglomération de Saint-Omer, de Boulogne, de Maubeuge Val de Sambre et du Calaisis affichent des taux de croissance annuels moyens supérieurs à 1,5%, ceux des communautés d’agglomération de Lens-Liévin, de la Porte du Hainaut, du Douaisis et de la Communauté de communes de l’Est Douaisis sont inférieurs à 1%.

Concernant l’évolution du vieillissement des EPCI entre 1999 et 2015, les Communautés urbaines de Dunkerque et de Arras ainsi que les Communautés d’agglomération de Maubeuge Val-de-Sambre, de Saint-Omer, de Cambrai et de Hénin Carvin enregistreront une augmentation de la part des plus de 60 ans de plus de 5 points par rapport à 1999. Pour les Communautés d’agglomération de Lens-Liévin, de la Porte du Hainaut, de Artois Com ainsi que LMCU et la Communauté de communes de l’Est Douaisis, cette hausse sera moins élevée, comprise entre + 2 et + 3 points par rapport à 1999.

Tableau 3 : Gérontocroissance et vieillissement à l’échelle des 15 principaux EPCI de la région entre 1999 et 2020

EPCI Pop > 60 ans

en 1999 (nb)

Part des > 60 ans en 1999

(%)

TCAM 1999-2015 (%)

Part des > 60 ans en 2015

(%)

Evolution part

>60ans 1999 -

2015 (en points)

LMCU 172 572 15,8 1,2 18,4 2,6 CALL 49 194 19,7 0,6 21,9 2,2 CAHC 22 868 18,3 1,1 22,9 4,7 CA Val métropole 35 795 18,3 1,2 22,0 3,7 CAPH 28 463 19,8 0,7 21,9 2,1 CA Artois 41 732 20,3 0,8 23,2 2,9 CU Dunkerque 32 996 15,8 2,2 22,9 7,0 CA Douaisis 29 708 19,6 0,9 22,9 3,4 CCED 14 017 19,5 1,0 22,6 3,0 CA Maubeuge Val de Sambre 17 987 17,6 1,5 23,8 6,2 CU Arras 16 029 18,2 1,6 23,0 4,8 CA Cambrai 11 369 20,2 1,2 25,1 4,9 CA Boulogne 22 274 18,2 1,6 22,4 4,2 CA Calaisis 16 208 16,5 1,5 20,0 3,5 CA Saint-Omer 10 597 16,3 2,3 22,3 6,1

Source : INSEE, RGP 1999 & Projections Omphale

14 Les résultats des projections de population réalisées à l’échelle des quinze principaux EPCI de la région ne sont disponibles qu’à l’horizon 2015.

20

Carte 6 : Evolution entre 1999 et 2015 de la population âgée de plus de 60 ans à l’échelle des EPCI.

Source : INSEE, RGP 1999 & projections Omphale

Carte 7 : Proportion de la population de plus de 60 ans dans la population totale

en 2015 à l’échelle des EPCI.

Source : INSEE, Projections Omphale

21

Carte 8 : Evolution (en points) de la part des 60 ans et plus entre 1999 et 2015 à l’échelle des EPCI.

Source : INSEE, RGP 1999 & projections Omphale

22

2. LES CARACTERISTIQUES SOCIODEMOGRAPHIQUES DE LA POPULATION AGEE

Cette deuxième section aborde les principales caractéristiques socioéconomiques de la population âgée (statut matrimonial et niveau de vie). Les résultats présentés sont issus principalement de deux sources statistiques : le RGP de 1999 et Filocom 2003 (1997 pour les évolutions).

2.1. Les grandes caractéristiques générales

Une population en grande partie féminine

Du fait de l’écart d’espérance de vie à la naissance entre hommes et femmes15, les femmes forment une partie relativement importante de la population aînée. En 1999, 56,5% de toutes les personnes de 60 à 74 ans étaient des femmes. La proportion des femmes est encore plus élevée dans les catégories d’âge avancé. En 1999, les femmes comptaient pour 62,9% de toutes les personnes âgées de 75 à 79 ans, et 72,9% des 80 ans et plus.

Dans un tiers des ménages régionaux, la personne de référence a 60 ans ou plus

En 1999, dans le Nord-Pas-de-Calais, dans 491 894 ménages, la personne de référence est une personne de 60 ans ou plus. Ces ménages représentent ainsi un tiers de l’ensemble des ménages de la région (33,7% à l’échelle nationale).

A l’échelle infra-régionale, des disparités demeurent quant au poids des ménages âgés. Le territoire des Communautés urbaines de Lille, Dunkerque et de Arras ainsi que des Communautés d’agglomération du Calaisis et de Saint-Omer, qui se caractérisent par une population relativement jeune, affichent une proportion de ménages âgés inférieure à la moyenne régionale. A contrario, le territoire des Communautés d’agglomération de Lens-Liévin, de la Porte du Hainaut, de l’Artois, du Douaisis ainsi que la Communauté de communes de l’Est Douaisis présentent, quant à eux, une part de ménages âgés nettement supérieure à la moyenne régionale.

15 Notons que ce déséquilibre a lentement tendance à se résorber : la différence d’espérance de vie à la naissance entre les hommes et les femmes a sensiblement diminué entre 1990 et 2004, passant de 9,1 ans à 8,5 ans.

23

Tableau 4 : Répartition des ménages dont la personne de référence a plus de 60 ans à l’échelle des EPCI en 1999

Ménages dt pers réf > 60 ans

Ménages dt pers réf 60-74 ans

Ménages dt pers réf 75ans et + Territoires Total

ménages Nb % Nb % Nb % LMCU 410 027 115 606 28,2 72 373 17,7 43 233 10,5CALL 92 413 34 481 37,3 22 015 23,8 12 466 13,5CAHC 44 966 16 127 35,9 10 358 23,0 5 769 12,8CA Val Métropole 74 177 24 790 33,4 15 840 21,4 8 950 12,1CAPH 52 433 19 542 37,3 12 745 24,3 6 797 13,0CA Artois 77 772 28 950 37,2 17 656 22,7 11 294 14,5CU Dunkerque 76 652 22 823 29,8 15 380 20,1 7 443 9,7CA Douaisis 56 355 20 428 36,2 13 074 23,2 7 354 13,0CCED 21 174 7 886 37,2 5 057 23,9 2 829 13,4CA Maubeuge Val de Sambre 37 858 12 693 33,5 8 297 21,9 4 396 11,6CU Arras 35 821 10 958 30,6 6 929 19,3 4 029 11,2CA Cambrésis 22 738 7 803 34,3 4 995 22,0 2 808 12,3CA Boulonnais 46 775 15 320 32,8 9 592 20,5 5 728 12,2CA Calaisis 37 613 11 475 30,5 7 126 18,9 4 349 11,6CA St-Omer 23 931 7 160 29,9 4 696 19,6 2 464 10,3

Région 1 491 693 491 894 33,0 312 227 20,9 179 667 12,0 France métropolitaine 23 810 161 8 026 256 33,7 4 915 551 20,6 3 110 705 13,1

Source : INSEE, RGP 1999

Au-delà de 80 ans, une large majorité des personnes vit seul

Les personnes seules sont le plus souvent des personnes âgées : en 1999, 52,9% d’entre elles ont 60 ans ou plus. De même, parmi les ménages dont la personne de référence a plus de 60 ans, 43,5% sont composés d’une personne seule. Aux âges les plus avancés, cette proportion est encore plus forte. Ainsi, tandis que 34,2% des ménages dont la personne de référence a entre 60 et 74 ans sont composés d’une personne seule, ce taux est de 53,2% chez les 75-79 ans et de 67,5% chez les 80 ans et plus.

Les femmes âgées, qui ont tendance à vivre plus longtemps que leur conjoint, sont plus nombreuses à vivre seules. En 1999, 79,9% des personnes de plus de 60 ans vivant seules sont des femmes (84,6% pour les 80 ans et plus).

24

Tableau 5 : Mode de cohabitation à l’échelle régionale des plus de 60 ans en 1999

Enfant d'un couple

Enfant d'une fam. monopar/

Part d'un couple sans

enfant

Part d'un couple av

enfant

Part dans famille

monopar. Hors famille Vit seul

Nb % Nb % Nb % Nb % Nb % Nb % Nb %

TOTAL

60-74 ans 113 0,02 1 459 0,3 278 061 56,7 62 858 12,8 21 414 4,4 21 440 4,4 105 231 21,5 490 576Femme 69 0,03 722 0,3 136 796 49,7 25 422 9,2 17 892 6,5 14 627 5,3 79 983 29,0 275 511Homme 44 0,02 737 0,3 141 265 65,7 37 436 17,4 3 522 1,6 6 813 3,2 25 248 11,7 215 065

75-79 ans 0 0,0 13 0,0 60 421 46,8 5 741 4,4 5 201 4,0 8 107 6,3 49 533 38,4 129 016Femme 0 0,0 5 0,0 26 776 33,2 2 214 2,7 4 418 5,5 6 233 7,7 41 097 50,9 80 743Homme 0 0,0 8 0,0 33 645 69,7 3 527 7,3 783 1,6 1 874 3,9 8 436 17,5 48 273

80 ans et + 0 0,0 0 0,0 27 111 26,4 2 301 2,2 4 861 4,7 13 250 12,9 55 082 53,7 102 605Femme 0 0,0 0 0,0 9 945 13,7 700 1,0 4 158 5,7 11 061 15,3 46 626 64,3 72 490Homme 0 0,0 0 0,0 17 166 57,0 1 601 5,3 703 2,3 2 189 7,3 8 456 28,1 30 115

Ensemble pop 1 162 185 29,6 247 869 6,3 735 650 18,7 1 128 620 28,7 147 181 3,7 111 134 2,8 396 941 10,1 3 929 580

Femme 543 752 26,8 109 845 5,4 367 825 18,1 564 310 27,8 127 170 6,3 60 499 3,0 254 821 12,6 2 028 042Homme 618 613 32,5 138 024 7,3 367 825 19,3 564 310 29,7 20 011 1,1 50 635 2,7 142 120 7,5 1 901 538

Lecture : 56,7% des personnes âgées entre 60 et 74 ans résident dans leur logement avec leur conjoint (part de couples sans enfant). Evidemment, la part des personnes de cet âge qui occupent le même logement que leurs parents (enfant d’un couple ou d’une famille monoparentale est extrêmement faible.

Source : INSEE, RGP 1999

2.2. Le niveau de vie

2.2.1. ACTIVITE ET REVENU

La population âgée en activité : une situation marginale

En 1999, la région Nord-Pas-de-Calais compte 20 966 personnes actives16 de 60 ans et plus, soit 2,9% de cette classe d’âge (un peu plus de 4% en 1990). La répartition par sexe de la population active âgée reste équilibrée : 50,9% sont des femmes et 49,1% des hommes.

Le taux d’activité17 décroît rapidement à partir de 60 ans. Alors qu’il s’élève à 55,2% pour l’ensemble de la population, il n’est que de 9,8% pour les 60-64 ans (14,9% au niveau national) et de 0,8% pour les 65 ans et plus.

Parmi les âgés actifs, 18 870 personnes ont effectivement un emploi. Le taux de chômage18 est de 12,6% chez les personnes âgées, taux largement en dessous de la moyenne tous âges confondus (17,7%).

16 Sont considérées actives les personnes ayant un emploi et les chômeurs. Sont classées dans la seconde catégorie les personnes qui se sont déclarées chômeurs ou sans emploi sauf si elles ont déclaré explicitement par ailleurs ne pas rechercher du travail. 17 Le taux d'activité est le rapport entre le nombre d'actifs (actifs occupés et chômeurs) et la population totale correspondante (définition de l’INSEE). 18 Le taux de chômage est le pourcentage de chômeurs dans la population active (actifs occupés + chômeurs).

25

Tableau 6 : Population active régionale par sexe, âge et type d’activité en 1999

Pop active Taux d'activité Ayant un emploi Chômeurs Taux de

chômage Fce Npdc Fce Npdc Fce Npdc Fce Npdc Fce Npdc 60-64 ans 404 948 16 571 14,9 9,8 362 898 14 475 42 050 2 096 10,4 12,6

Femme 200 839 8 536 14,2 9,5 180 437 7 413 20 692 1 123 10,3 13,2Homme 204 109 8 035 15,5 10,3 182 751 7 062 21 358 973 10,5 12,1

65 ans et + 113 321 4 395 1,2 0,8 113 321 4 395 0 0 0,0 0,0Femme 52 842 2 139 0,9 0,6 52 842 2 139 0 0 0,0 0,0Homme 60 479 2 256 1,5 1,0 60 479 2 256 0 0 0,0 0,0

Ensemble 26 542 481 1 676 442 55,2 52,5 23 055 202 1 372 633 3 401 611 296 638 12,8 17,7Femme 12 172 992 730 317 48,7 43,8 10 346 979 579 864 1 824 387 150 316 15,0 20,6Homme 14 369 489 946 125 62,3 62,1 12 708 223 792 769 1 577 224 146 322 11,0 15,5

Source : INSEE, RGP 1999

Une augmentation du niveau de vie moyen des plus de 60 ans

Entre 1975 et 2001, le niveau de vie19 des personnes vivant dans un ménage âgé a augmenté de 40% hors inflation20. En 2002, les personnes de 60 ans ou plus disposent ainsi, selon l’enquête des revenus fiscaux de la DGI, d’un niveau de vie annuel moyen de 16 343€ (versus 17 879€ pour les 18-59 ans). Alors qu’en 1975 les plus âgés disposaient d’un niveau de vie de 11% inférieur à celui des plus jeunes21, l’écart s’est réduit à 9% en 2002. Pour Olivier Guillemin et Catherine Rougerie22, cet écart serait même probablement moindre si l’on tenait compte de l’ensemble des revenus du patrimoine, plus importants en moyenne chez les ménages âgés. Par ailleurs, les ménages âgés sont plus souvent propriétaires sans charge de remboursement de leur logement ; cela contribue également à réduire les écarts de niveau de vie dans la réalité.

Si le niveau de vie d’ensemble des personnes âgées en France s’est accru ces trois dernières décennies, la croissance de celui-ci depuis ces dix dernières années apparaît néanmoins inférieure à celle observée pour le reste de la population. Entre 1996 et 2002, au niveau national, selon les enquêtes des revenus fiscaux menées par la DGI, les personnes âgées de plus de 60 ans ont enregistré une augmentation de 6,3% de leurs revenus déclarés tandis que les 18-59 ans ont, quant à eux, vu leurs revenus déclarés augmenter de 13,7%.

19 Le niveau de vie est égal au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d'unités de consommation (uc). Le niveau de vie est donc le même pour tous les individus d'un même ménage. Les unités de consommation sont calculées selon l'échelle d'équivalence dite de l'OCDE modifiée qui attribue 1 uc au premier adulte du ménage, 0,5 uc aux autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 uc aux enfants de moins de 14 ans. (définition de l’INSEE) 20 INSEE, Les personnes âgées, Edition 2005, 131p. 21 INSEE, Edition 2005, Op. Cit. 22 INSEE, Edition 2005, Op. Cit.

26

Une progression de la pauvreté chez les plus de 60 ans23

La pauvreté a légèrement baissé en France entre 1996 et 2000. En 1996, le seuil de pauvreté monétaire relative24 s’élève à 545€ par mois et par unité de consommation, versus 579€ en 2000, soit une augmentation de plus de 6%. Par ailleurs, si 7,2% de la population vivaient dans des ménages disposant d’un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté en 1996, ils ne sont plus "que" 6,5% en 2000. La baisse de la pauvreté a surtout concerné les actifs et les jeunes. En revanche, les retraités et les autres inactifs ont été progressivement distancés et représentent une part croissante de la population pauvre. Ainsi, à l’échelle nationale, alors que les retraités et inactifs de 60 ans ou plus représentaient 10,5% des personnes vivant sous le seuil de pauvreté en 1996, ils en représentent 12,6% en 2000.

Signalons également que la pauvreté touche davantage les femmes les plus âgées. En 2002, selon l’enquête sur les revenus fiscaux menée par la DGI, 6,1% des femmes de plus 75 ans vivent sous le seuil de pauvreté alors que ce taux n’est que de 3,5% chez les hommes de plus de 75 ans.

Des niveaux de vie contrastés au sein de la population de plus de 60 ans

Les personnes âgées de 60-69 ans disposent en moyenne de revenus supérieurs à leurs aînés (70 ans et plus). En 2002, au niveau national, alors que les personnes âgées de 60-69 ans déclarent en moyenne un revenu annuel de 16 986€ par an, les plus de 70 ans déclarent un revenu moyen de 15 816€ par an (soit 1 170€ de moins que leurs cadets). De même, les personnes âgées de 60-69 ans ont enregistré un plus fort accroissement de leurs revenus que celles âgées de plus de 70 ans. Alors que les revenus déclarés par les 60-69 ans ont augmenté de 7,6% entre 1996 et 2002, celui des 70 ans et plus n’a augmenté que de 5,5% (soit 2,1 points de moins que leurs cadets). Cette différence dans les niveaux de vie des plus de 60 ans s’explique, en partie, par l’augmentation des salaires : les salaires des générations "les plus anciennes" sont inférieurs à ceux des générations "les plus jeunes". Les personnes qui ont atteint l’âge de la retraite ces dernières années bénéficient, par conséquent, en moyenne de ressources supérieures à celles de leurs aînés. Ainsi, dans le Nord-Pas-de-Calais, lors de l’Enquête nationale logement (ENL) 2001, tandis que 7,6% des 60-74 ans disposent d’un revenu annuel total inférieur à 6 586€, ils sont 10,4% chez les plus de 75 ans (10,5% à l’échelle nationale).

23 INSEE Première, De 1996 à 2000, la pauvreté relative baisse puis se stabilise, n° 942 – Décembre 2003. 24 Un individu est considéré comme pauvre lorsqu'il vit dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté. L'Insee mesure la pauvreté monétaire de manière relative : le seuil est déterminé par rapport à la distribution des niveaux de vie de l'ensemble de la population ; l'Insee le fixe à 50% du niveau de vie médian.

27

2.2.2. LE PATRIMOINE IMMOBILIER

Un taux de détention de patrimoine immobilier plus élevé chez les ménages âgés

Les ménages âgés, du fait même de l’accumulation de capital dans le temps, sont les plus susceptibles de posséder un patrimoine immobilier. Ainsi, selon l’enquête Patrimoine conduite en 2003, tandis que 60,5% des ménages français possèdent un patrimoine immobilier, ce taux s’élève à 74,2% chez les 60-70 ans. De même, alors que 55,7% des ménages français possèdent une résidence principale et 17,7% au moins un autre logement, cette proportion s’élève respectivement à 69,5% et 24,5% chez les 60-70 ans.

Si les personnes âgées détiennent davantage un patrimoine immobilier que l’ensemble des ménages, il convient toutefois de préciser que les 70 ans et plus possèdent en moyenne moins de patrimoine immobilier que leurs cadets. Ce constat est à corréler à la fin du cycle de vie, période où les personnes âgées, le plus souvent vers l’âge de 70 ans, transmettent ou vendent, pour une partie d’entre elles, leur bien immobilier. Ainsi, 65,2% des ménages de 70 ans et plus possèdent un patrimoine immobilier.

Plus du tiers des propriétaires de résidences principales sont âgés de plus de 60 ans

En 2003, selon la source Filocom, les personnes de plus de 60 ans constituent 37% des propriétaires de résidences principales (36,1% en 1997). A l’échelle des zones touristiques de catégorie 1 où 28,6% de la population a plus de 60 ans, ils représentent même jusqu’à 51,6% des propriétaires de résidences principales. De même, ils représentent plus de 40% des propriétaires de résidences principales dans la Communauté d’agglomération de Cambrai, de Maubeuge Val-de-Sambre, du Boulonnais, du Douaisis et de la Porte du Hainaut.

Plus de 45% des propriétaires de résidences secondaires sont des personnes de plus de 60 ans

Les personnes âgées de plus de 60 ans représentent une très large part des propriétaires de résidences secondaires du Nord-Pas-de-Calais. En 2003, 45,7% des propriétaires de résidences secondaires sont des personnes de plus de 60 ans (43,3% en 1997).

Les territoires ruraux et touristiques apparaissent comme des espaces attractifs pour les plus de 60 ans : 54% des propriétaires de résidences secondaires situées dans les pôles ruraux sont des personnes âgées de plus de 60 ans, 51% dans les zones touristiques de catégorie 1, 47,8% dans les zones touristiques de catégorie 2 et 47,1% dans les poches rurales. Soulignons également que dans la Communauté d’agglomération du Boulonnais, un propriétaire de résidence secondaire sur deux est âgé de plus de 60 ans.

28

Quatre propriétaires de logements vacants sur 10 sont des personnes de plus de 60 ans

Les personnes âgées de plus de 60 ans constituent une part importante des propriétaires de logements vacants. En 2003, à l’échelle de la région, 42,5% des propriétaires de logements vacants sont des personnes de plus de 60 ans (41,6% en 1997).

A l’échelle infrarégionale, des disparités quant à la part des plus de 60 ans parmi les propriétaires de logements vacants demeurent. Ainsi, 49,9% des propriétaires de logements vacants situés dans le périurbain résidentiel et 46,3% de ceux localisés dans le périurbain mixte sont des personnes de plus de 60 ans. De même, les plus de 60 ans représentent respectivement 47,6% et 45,1% des propriétaires de logements vacants situés dans les pôles ruraux et les poches rurales.

A l’échelle des EPCI, il convient de préciser le poids important des personnes âgées propriétaires de logements vacants : ils constituent plus de 47% des propriétaires de logements vacants dans les Communautés d’agglomération de Cambrai et du Douaisis ainsi que dans la Communauté de communes de l’Est Douaisis.

Les personnes de plus de 60 ans sont rarement des bailleurs

Si l’on considère les résultats de l’ENL de 2001, les personnes âgées semblent peu contribuer à l’offre locative. En effet, à peine un ménage sur dix possède à la fois sa résidence principale et au moins un autre logement mis en location (tendance également observable à l’échelle nationale). Les personnes âgées s’avèrent ainsi peu réactives aux incitations fiscales à l’investissement locatif.

Précisons enfin que le taux élevé de détention de patrimoine immobilier évoqué plus haut s’explique principalement par le pourcentage élevé de propriétaires occupants chez les personnes âgées de 60 ans et plus.

29

CONCLUSION

Avec 722 751 personnes âgées de 60 ans et plus en 1999, soit 18,4% de la population régionale, le Nord-Pas-de-Calais n’échappe pas au phénomène de gérontocroissance (augmentation du nombre de personnes âgées dans la population) et de vieillissement (augmentation de la part des 60 ans et plus) de la population observée à l’échelle nationale. Cette gérontocroissance et ce vieillissement de la population, continus depuis 1982 à l’échelle de la région, ne se manifestent cependant pas de façon homogène à l’intérieur du territoire régional ; ainsi :

- Le phénomène de gérontocroissance est davantage prononcé dans les zones touristiques, le périurbain résidentiel et les zones de banlieue résidentielle et mixte ;

- Le vieillissement de la population est plus marqué dans les espaces ruraux et touristiques et dans les EPCI ayant un passé minier.

Si l’on considère les projections Omphale réalisées par l’INSEE, ces phénomènes de gérontocroissance et de vieillissement de la population s’amplifieront dans les années à venir, la population de 60 ans et plus représentera ainsi 968 146 personnes en 2020, soit 23,9% de la population régionale. A l’échelle infrarégionale, ces phénomènes se manifesteront néanmoins à des degrés différents.

Du fait de l’écart d’espérance de vie à la naissance entre hommes et femmes, ces dernières forment une partie relativement importante de la population aînée, leur proportion étant encore plus élevée dans les catégories d’âge avancé. De même, les ménages dont la personne de référence est âgée de 60 ans et plus représentent un tiers de l’ensemble des ménages de la région, la proportion de ménages dont la personne de référence est âgée de 60 ans et plus étant plus élevée dans les EPCI ayant un passé minier. Par ailleurs, la part des ménages dont la personne de référence est âgée de 60 ans et plus, composés d’une personne seule, est plus élevée dans la population des 60 ans et plus ; au-delà de 80 ans, l’on constate qu’une large majorité des personnes vit seul ; les femmes âgées, ayant tendance à vivre plus longtemps que leur conjoint, sont plus nombreuses à vivre seule.

Si le niveau de vie d’ensemble des personnes âgées de 60 ans et plus en France s’est accru ces trois dernières décennies, la croissance de celui-ci depuis ces dix dernières années apparaît néanmoins inférieure à celle observée pour le reste de la population. L’on observe même une progression de la pauvreté chez les plus de 60 ans, les retraités et les autres inactifs ayant été progressivement distancés par les actifs et les jeunes et représentant une part croissante de la population pauvre, les femmes les plus âgées restant les plus touchées par la pauvreté.

Au sein de la population de 60 ans et plus, les niveaux de vie demeurent contrastés. En effet, les personnes âgées de 60-69 ans disposent en moyenne de revenus supérieurs à leurs aînés (70 ans et plus). Cette différence dans les niveaux de vie des 60 ans et plus s’explique, en partie, par l’augmentation des salaires : les salaires des générations "les plus anciennes" sont inférieurs à ceux des générations "les plus jeunes". Les personnes qui ont atteint l’âge de la retraite ces dernières années

30

bénéficient, par conséquent, en moyenne de ressources supérieures à celles de leurs aînés.

Du fait même de l’accumulation de capital dans le temps, le taux de détention de patrimoine immobilier reste plus élevé chez les ménages âgés ; toutefois, les 70 ans et plus possèdent en moyenne moins de patrimoine immobilier que leurs cadets. Ce constat est à corréler à la fin du cycle de vie, période où les personnes âgées, le plus souvent vers l’âge de 70 ans, transmettent ou vendent, pour une partie d’entre elles, leur bien immobilier. Pour illustrer ce taux de détention de patrimoine immobilier plus élevé, l’on peut retenir les indicateurs suivants :

- Plus du tiers des propriétaires de résidences principales sont âgés de plus de 60 ans.

- Les personnes âgées de plus de 60 ans représentent 45% des propriétaires de résidences secondaires du Nord-Pas-de-Calais ; les territoires ruraux et touristiques apparaissant comme des espaces attractifs pour les plus de 60 ans.

- Quatre propriétaires de logements vacants sur 10 sont des personnes de plus de 60 ans.

CHAPITRE 2

LA POPULATION DES 60 ANS ET PLUS :

VIEILLISSEMENT, HABITAT ET MODE DE VIE

33

Ce deuxième chapitre examine les éléments caractéristiques de l’habitat des personnes de 60 ans et plus. L’allongement de l’espérance de vie s’accompagne d’une amélioration de l’état de santé des personnes âgées. Depuis 1981, l’allongement de l’espérance de vie sans incapacité a été supérieur à celui de l’espérance de vie : ainsi, d’après une enquête effectuée par l’INSEE et l’IRDES (Institut De Recherche en Economie de la Santé), l’espérance de vie en bonne santé a progressé de 3 ans entre 1981 et 1991 contre 2,5 ans pour l’espérance de vie. Deux conséquences s’en dégagent ainsi : l’état de santé et le cumul des handicaps.

L’état de santé des 60 ans et plus

L’enquête HID (Handicap-incapacités-dépendances) effectuée par l’INSEE depuis 1998 estime le nombre de personnes dépendantes âgées de plus de 60 ans en s’appuyant sur deux grilles d’évaluation de la dépendance : la grille Colvez et la grille AGGIR (Autonomie gérontologique groupe iso-ressources). Selon la première, on dénombre 230 000 personnes de plus de 60 ans confinées au lit ou au fauteuil ainsi que 400 000 ayant besoin d’aide pour la toilette ou l’habillage. Selon la seconde, environ 530 000 personnes âgées de plus de 60 ans sont classées dans les groupes iso-ressources 1 à 3 de la grille AGGIR qui correspondent aux degrés de dépendance les plus élevés.

Le cumul des handicaps pour les plus de 80 ans

Alors que la plupart des personnes gardent leur mobilité jusqu’à l’âge de 70 ans, au-delà, une part d’entre elles perd progressivement son autonomie. L’handicap physique se cumule avec d’autres handicaps et leur développement survient en grande majorité chez des femmes qui vivent seules et qui de ce fait ont des revenus plus faibles25. La capacité à faire face à ces handicaps est liée à l’importance et à la disponibilité de l’environnement familial et social.

Ces données sociodémographiques appellent des explications plus théoriques dont on ne peut faire en général l’économie, moins encore quand on étudie les aspects urbains, des pratiques des groupes d’âge considérés. Ces aspects théoriques débouchent sur le mode de vie dont les conditions d’habitat représentent un élément déterminant pour un groupe d’âge qui vit de l’accumulation privée ou institutionnelle des avantages qu’il a auparavant acquis. Dans une première partie, la réflexion porte sur la notion de personnes âgées elle-même et examine sur le plan sociologique les approches théoriques du vieillissement. On se propose d’aborder dans une seconde partie, quelques éléments sur la question plus générale des rapports que les personnes de 60 ans et plus entretiennent avec la ville en considérant les modes de vie à partir de deux directions de réflexion : la première sur ce que nous apprend la pensée urbaine pour le groupe d’âge de 60 ans et plus, et la seconde sur les demandes que forme ce groupe d’âge concernant l’environnement urbain. La troisième partie traite des pratiques culturelles liées au mode de vie de ce groupe d’âge à partir de la sociabilité informelle et formalisée, la télévision, et enfin les

25 A ces tranches d’âge, la population féminine avait un taux d’activité plus faible que la population masculine, la femme (étant mariée et mère de famille) se dégageait du travail pour élever les enfants. Elle ne dispose donc souvent que d’une pension de réversion.

34

nouvelles technologies. En conclusion, on dégage les idées centrales des trois domaines ainsi abordés, celui des théories du vieillissement, celui du cadre de vie dans ses relations avec l’habitat et celui des pratiques culturelles.

1. LES THEORIES SOCIOLOGIQUES DU VIEILLISSEMENT

La réflexion théorique qui a prévalu sur le vieillissement a pris trois formes dont la première, celle du désengagement réciproque apparue aux USA, a connu une notoriété plus importante tant elle correspondait aux idées qui prévalaient dans les années soixante aux Etats-Unis. Nous allons rappeler ces théories dans un premier temps en soulignant la prédominance que l’on observe aujourd’hui.

1.1. Les théories du vieillissement

1.1.1. LE DESENGAGEMENT RECIPROQUE

La théorie du désengagement réciproque a été développée par les chercheurs américains pour rendre compte des relations entre la personne qui vieillit et le système social dont elle fait partie26. L’ouvrage de E. Cumming et W. Henry, préfacé par T. Parsons, s’inscrit dans le courant fonctionnaliste dominant à cette époque aux USA27. Fondée sur une enquête empirique auprès de personnes de 50 à 90 ans, « tous en bonne santé et jouissant d’une indépendance financière », leur thèse rend compte du vieillissement normal en montrant qu’il s’accompagne d’un désengagement réciproque, de la personne qui vieillit et des autres membres du système social dont elle fait partie. Cette explication passe par la diminution de leurs rôles sociaux, la baisse des interactions sociales et un changement de nature des relations sociales centrées plus fortement sur les relations affectives et se dégageant des solidarités professionnelles. D’après ses auteurs, le désengagement présente quatre caractéristiques. Il est réciproque, parce que la personne âgée dont les capacités diminuent se tourne vers elle-même, et que le système social lui retire les rôles sociaux qu’il lui avait octroyés. Il est fonctionnel parce qu’il répond au renouvellement des générations, les jeunes étant plus informés et mieux formés, et que le système social se prémunit ainsi des conséquences qu’un décès accidentel peut produire. Il est irréversible parce que le désengagement une fois mis en œuvre, rend de nouveaux contacts plus difficiles ce qui peut accélérer le vieillissement. Il est universel enfin et moins accentué chez les femmes que chez les hommes : selon le modèle parsonien, les rôles féminins sont plus centrés sur le champ socio émotionnel (famille, couple) et les rôles masculins socio instrumentaux (ressources, travail, professionnalité) centrés sur le champ professionnel ; or les changements portant, à cette période de la vie, sur le secteur professionnel, les hommes doivent donc modifier l’orientation instrumentale de leur activité. Cette théorie du désengagement justifiant l’exclusion des personnes âgées du marché du travail,

26 CARADEC V. Sociologie de la vieillesse et du vieillissement, Paris éd Nathan, 2002. 27 CUMMING E., HENRY W., Growing Old. The process of disengagement, New York, Basic Books, 1961.

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encourage de ce fait la démission des politiques publiques en la matière sans tenir compte du vécu des 60 ans et plus, dont bon nombre sont encore en activité aux USA. Cette théorie a fait pour cette raison l’objet de différentes critiques.

1.1.2. LA DEPRISE

A l’encontre de cette approche, Serge Clément et Marcel Druhle, développent le concept de déprise qui aborde le vieillissement en tant que processus28. La déprise est un processus « de réaménagement de la vie inauguré par une sorte d’amoindrissement de l’impulsion vitale, comme si les individus constataient : on ne peut plus suivre ». La personne abandonne alors certaines activités et certaines relations, parfois remplacées par d’autres, qui demandent moins d’effort. Les personnes qui vieillissent concentrent leur énergie sur certaines activités : c’est un principe d’économie des forces, une volonté de se ménager, de ne plus faire que ce qui a du sens pour soi. Il s’agit d’un abandon progressif de certaines activités antérieures, une tendance à se mettre en retrait. Cependant, la déprise n’est pas générale, on réorganise ses activités en abandonnant certaines pour se concentrer sur d’autres ; elle n’est pas fonctionnelle, c’est un processus qui se construit avec d’autres, mais sous des formes différentes, comme, par exemple, l’enseignant qui fait du soutien scolaire ; elle n’est pas irréversible, le veuvage rend possible une reprise de projets comme réaction au chagrin du décès du conjoint. D’autres auteurs parlent d’optimisation sélective avec compensation29.

La déprise, qui se centre plus sur le vécu des sujets, prend ses distances avec la doctrine fonctionnaliste considérée comme trop éloignée de la pratique, pour adopter une approche constructiviste et compréhensive de la vieillesse. Commentant les travaux de Clément et Druhle, N. Keruhel dans son rapport « Vieillissement et habitat » conclut ainsi : « on peut ainsi devenir vieux sans être vieux : on peut subir dans son corps des changements mais en même temps refuser d’être vieux… »30. Cette théorie correspond à une approche plus récente qui prend acte des apports de ce que la première a révélé comme un abandon progressif de certaines activités antérieures en proposant une explication différente de la vieillesse : celle-ci n’évolue pas vers un nouvel équilibre entre personne âgée et système social, mais se définit comme une succession de déprises.

La déprise apparaît ainsi comme une transaction biographique, une négociation de la personne âgée avec elle-même qui entraîne une manière de réorganiser sa vie en fonction des relations qui s’instaurent avec les proches, relations qui s’inscrivent dans une trajectoire relationnelle.

28 CLEMENT S., MANTOVANI J., MEMBRADO M., Vieillissement et Espaces urbains, modes de spatialisation et formes de déprise, CIEU(CNRS-UTM) et CJF INSERM 94-06, septembre 1995. 29 BALTES P., L’avenir du vieillissement d’un point de vue psychologique : optimisme et tristesse. In J. Dupâquier L’espérance de vie sans incapacité, Paris PUF, 1997. 30 KERUEL N., Vieillissement et habitat, PUCA, Rapport final, décembre 2001.

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1.1.3. LE VIEILLISSEMENT, UN PROCESSUS RELATIONNEL

Un dernier courant de recherches voit le vieillissement comme un processus relationnel. On sait que l’identité sociale se transforme à partir de deux formes de transactions, la transaction biographique ou négociation avec soi-même, et la transaction relationnelle ou négociation à partir des réactions à l’image de soi renvoyée par autrui. Le vieillissement est ainsi le produit des interactions humaines à travers la pratique quotidienne, remarques sur la lenteur des personnes âgées, interrogations sur leur capacité à agir, manque de patience et d’attention des médecins ou de l’environnement à leur égard ; parfois même a contrario, des gestes de politesse comme céder sa place à des personnes âgées, éveillent leur attention. Ces interactions conduisent les personnes âgées à être confrontées à une nouvelle image de soi. La personne s’interroge sur son identité, ce qui entraîne une nouvelle définition de soi. Les interactions ne sont pas qu’humaines : elles s’effectuent par la médiation de certains objets matériels, comme l’utilisation d’une canne, le recours à la téléalarme, qui sont autant de marqueurs de la vieillesse qui suscitent des transactions avec autrui.

La négociation avec ses enfants d’un téléphone sans fil plutôt que la téléalarme, éviter de nouvelles interactions désagréables, réduire les contacts sociaux, ou tenter de se conformer au modèle de la personne active, autant d’exemples de transactions qui traduisent l’impact de ce processus relationnel. L’espace public devenant source d’angoisse et d’anxiété, les personnes âgées limitent leurs sorties et préfèrent la quiétude de leur espace privé : on comprend mieux dès lors le repli sur l’espace domestique au cours de l’avancée en âge. Ce processus est ainsi en relation directe avec l’espace selon une dialectique espace privé / espace public, le premier comme refuge, le second comme risque et/ou danger.

Ces trois approches théoriques, celle plus ancienne du désengagement réciproque et celles plus récentes de la déprise et de la vieillesse comme processus relationnel sont en relation directe avec notre objet. La première gère plus particulièrement le champ de la vieillesse dans ses relations avec les responsabilités professionnelles et sociales dans une conception classique qui n’a pas intégré le phénomène jusque là discret, mais important, de l’allongement de la période de vie et des conditions de santé. Les deux autres plus récentes sont à la fois sensibles à l’homogénéité artificielle des plus de 60 ans comme catégorie pertinente et aux modèles de relations qui caractérisent cette dernière période de la vie. L’approche interactionniste dont elles se réclament débouche logiquement sur une réflexion centrée sur le cadre de vie, à partir des rapports avec autrui dans l’espace public autant que dans l’espace domestique et privé. Alors que ces théories semblaient nous éloigner de notre objet appréhendé sur le plan sociodémographique, elles recentrent l’analyse à partir d’un moment nouveau de la dialectique espace privé / espace public.

La bibliographie récente sur l’explication théorique du vieillissement montre la diffusion d’un paradigme gérontologiste en opposition au paradigme âgiste. Le premier s’exprime par la théorie du vieillissement réussi, qui présente la vieillesse dans la continuité de ce que l’on a été, le second se traduit par la théorie du désengagement réciproque qui présente la vieillesse comme un processus autonome, inéluctable, universel et par là négatif.

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1.2. La prédominance d’une explication théorique du vieillissement

La théorie du vieillissement réussi présente la vieillesse comme un processus relationnel fondé sur une double transaction, transaction avec soi-même et transaction avec autrui. Selon cette théorie, le vieillissement repose sur l’activité que l’on s’impose autant que sur le sentiment que l’on nourrit vis-à-vis de soi et vis-à-vis du monde, à l’origine du sentiment d’être ou de ne pas être vieux31. Cette référence parcourt la bibliographie récente et repose sur la modification des représentations concernant la vieillesse qui remontent à une quinzaine d’années et qui a vu l’émergence d’un nouvel âge de la vie « s’intercaler entre le passage à la retraite et la vieillesse »32.

La séniorité apparaît comme une période de la vie qui s’insère entre le moment où l’individu peut/doit faire valoir ses droits à la retraite et celui où apparaissent les premiers signes de vieillissement « entre travail, retraite et vieillesse, le grand écart » comme le présente l’ouvrage de Anne-marie Guillemart33. Prenant acte de la seniorité, Agathe Gestin relève que l’émergence de ce nouvel âge caractérisé par de nouveaux rapports au temps, à l’espace et au corps, pose en d’autres termes les modèles de la masculinité et de la féminité « dans la dernière partie du parcours de vie » : elle entreprend d’en explorer les différents aspects dans un article qu’elle intitule « Temps, espaces et corps à la retraite : des paradoxes à penser »34. L’émergence récente du genre jusque là invisible dans les travaux sur la fin de vie participe à la constitution d’un nouveau champ de recherche jusqu’ici délaissé.

La vieillesse, quant à elle, se manifeste par des comportements qui illustrent ce que certains auteurs décrivent sous le terme de déprise35 : baisse de l’utilisation des appareils techniques, démotorisation relative et progressive, et baisse d’écoute de la télévision. Cette déprise résulte de quatre déclencheurs : « la fatigue et le manque d’envie qui traduisent la baisse de l’énergie vitale, les interactions avec autrui, les difficultés physiques et la disparition de certaines opportunités d’engagement ». La déprise ouvre ainsi la réflexion sur une nouvelle conception de la vieillesse qui tourne le dos au paradigme ancien de l’âgisme.

Pour illustrer cette théorie du vieillissement comme processus relationnel, Vincent Caradec oppose deux manières de se définir par rapport à la vieillesse, sous la forme de deux idéaux types. Le premier se définit par l’impression de ne pas se sentir vieillir. Certes l’âge est là, mais ne marque aucune rupture avec ce que l’on a été, donc avec le passé, alors que l’avenir qui se profile risque d’être très différent de ce que l’on est aujourd’hui. Le second idéal type au contraire, se construit sur la conscience d’être déjà vieux dans l’antichambre de la mort, donc sur une

31 CARADEC V., Vieillir après la retraite, Paris éd PUF, Sociologie d’aujourd’hui, 2004. 32 GAULLIER X., La deuxième carrière. Âges emplois, retraites, Paris seuil, 1988. 33 GUILLEMART A-M., LEGARE J., ANSART P. et alii, Entre travail, retraite et vieillesse, le grand écart. Paris éd. L’harmattan 1995. 34 GESTIN A., Temps, espaces et corps à la retraite : des paradoxes à penser in l’Homme et la société, dossier Vieillissement 2003, 1-2 n° 147-148, p 169-190. 35 MANTOVANI C. et alii, Les produits techniques dans les échanges entre les vieilles personnes, leur entourage et les service d’aide à domicile, Rapport pour la Mire et la CNAV, 1999.

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discontinuité par rapport à ce que l’on a été et sur une continuité avec ce que l’on sera ; il y a donc, dit l’auteur, dans chaque cas continuité et discontinuité. Dans le premier idéal type du sujet qui ne vieillit pas, il y a continuité avec ce que l’on a été, et discontinuité avec ce que l’on sera, alors que pour le second idéal type, il y a discontinuité avec ce que l’on a été et continuité avec ce que l’on sera : parce que l’on est déjà entré dans la vieillesse qui s’achèvera par la mort.

2. LE CADRE DE VIE

Définie d’une manière générale, la socialité urbaine se présente sous trois aspects associés et complémentaires : une dimension morphologique ou spatiale au travers de l’habitat, une dimension institutionnelle reposant sur les politiques sociales en direction de la population, et une dimension politique ou civique qui débouche sur une pratique de la citoyenneté. Concernant les personnes âgées de 60 ans et plus, la socialité urbaine ou l’urbanité présente des accentuations particulières sur ses trois dimensions constitutives pour l’analyse des dimensions spatiales qui caractérisent le cadre de vie. La bibliographie récente sur la dimension spatiale et la localisation fait apparaître la situation particulière de cette classe d’âge.

2.1. Un impensé urbain

La pensée urbaine ne s’est pas intéressée aux questions que posent les 60 ans et plus. Cet âge de la vie n’est pas perçu en tant que tel, associé qu’il était à la vieillesse à partir de termes comme repli, précaution, maladie ou dépendance. Les vieillards n’ont pas été un moteur dans la réflexion et la réalisation dans le champ urbain. Alors que la France construisait les logements sociaux (1954-1984), les personnes âgées vivaient encore dans les hospices. Les seules initiatives avaient pour nom foyers-logements. C’est après 1981 que la question mérita une réflexion plus approfondie. La situation actuelle, importance des départs en retraite autour de 60 ans des papys boomers, allongement de l’espérance de vie directement lié au mode de vie contemporain, est donc nouvelle et rend compte partiellement de cette absence de conceptualisation.

2.1.1. UNE REFLEXION SUR LE PERIURBAIN EN REGION RHONE-ALPES

Les observations faites depuis la fin de la dernière décennie font état d’une nouvelle représentation de la vieillesse opposée à la prudence et à la précaution36. Il faut donc inventer un nouveau terme pour parler des plus de 60 ans et faire éclater cette période de la vie des individus. Dans une étude sur le périurbain, le Centre d’Etudes Techniques de l’Equipement (CETE) de la région Rhône-Alpes propose de parler de séniorité pour cet âge que les auteurs découpent en trois périodes : un premier vieillissement sous le signe de l’autonomie et de la liberté (60-70 ans) ; à partir de 70 ans, émerge un imaginaire de précaution qui recherche une politique urbaine de services et une offre de logements plus adaptée ; à partir de 85 ans, enfin commence le grand âge qui se caractérise par une adaptation à tout prix à une

36 CREDOC, L’évolution des représentations et des comportements des seniors depuis 20 ans en France, Collection des rapports N°C129, juin 1999.

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situation de fragilité37. L’étude du CREDOC relève une augmentation des biens d’équipement, TV couleur (97% chez les 70 ans et plus), magnétoscope (36%), lave-vaisselle (22%) et voiture (53%). Cette classe d’âge dispose ainsi d’un équipement domestique de bonne qualité permettant de tirer parti de la vie dans l’habitat périurbain qui est en général centré sur le domicile.

Deux constations ressortent de ces réflexions : d’abord une relation entre cadre de vie et localisation qui s’effectue dans le prolongement du mode de vie que les personnes ont connu durant la période d’activité, ensuite une relation très forte entre les dimensions qualitatives de ce mode de vie, comme par exemple vis-à-vis de la technologie, de l’utilisation du temps libre ou du réinvestissement dans de nouvelles activités38. La réflexion doit donc se prolonger dans cette direction.

2.1.2. UNE APPROCHE EUROPEENNE PLUS QUE NATIONALE

La situation française n’est pas exceptionnelle. Des observations semblables sont faites dans d’autres pays et l’on citera ici l’exemple de la Suisse qui, « à l’instar des autres pays européens, amorce une profonde évolution de la composition par âge de sa population »39. L’originalité de la problématique développée au forum de Neufchâtel est de mettre en regard « milieu urbain et société de longue vie » considérant le développement durable comme intégrant la consommation supplémentaire de sol. A ce titre, la Suisse est concernée par le vieillissement puisque de 15% aujourd’hui, les personnes âgées de 65 ans et plus représenteront 23% de la population en 2030. Or la Suisse présente un développement territorial marqué par l’étalement urbain, une mobilité qui repose largement sur l’automobile, et des typologies de logements prévues pour des familles : la question de l’adéquation de la structure du cadre bâti à celle de la population se trouve donc posée.

La réflexion suisse souligne que des évolutions sont déjà amorcées. Les auteurs citent le concept de polycentralité ou la mise en place de pôles mixtes et compacts reliés à des systèmes de transports publics performants comme principe « prometteur pour répondre aux besoins ». Ce principe se décline selon deux orientations, l’adaptation de l’offre de logements et de nouveaux concepts de résidences pour personnes âgées.

L’adaptation de l’offre de logements concerne la flexibilité des immeubles en vue de prévoir les prochains cycles de rénovation et viser une mixité dans les tailles d’appartement. Ceci complété par le développement des services à domicile permettrait de libérer des logements plus grands en maintenant en ville les personnes âgées (les plus de 70 ans si on se réfère à l’étude du CETE de Lyon)40.

37 CETE de Lyon, Importance et conséquences du vieillissement de la population. Février 2005, Direction régionale de l’équipement, Rhône-Alpes. Cette étude porte sur le périurbain dans une région précise. Mais les enseignements qui s’en dégagent sont de portée générale et sont utiles pour notre propos en Région Nord Pas-de-Calais. 38 CARADEC V., Générations anciennes et technologies nouvelles, in Gérontologie et société N° spécial, 2001, p. 71-91. 39FORUM ECOPARC 2005, Vieillir en ville ?, Février 2005. 40 Cette comparaison est établie par nous.

40

De nouveaux concepts de résidence pour personnes âgées qui s’adressent plus particulièrement aux plus de 85 ans, devraient venir compléter les équipements médicaux sociaux (EMS) traditionnels et les auteurs citent une expérience danoise, celle des habitats groupés sécurisés comme alternative entre maintien à domicile classique et EMS. Cette expérience est à rapprocher de ce que l’on voit se réaliser en France sous le terme de « Domicile collectif »41. L’insistance est ainsi portée sur une démarche prospective et créatrice en matière d’habitat alors qu’on ne peut pas encore retirer toutes les conséquences de la gérontocroissance.

La situation suisse est différente de celle du Nord Pas-de-Calais, mais elle relativise la question en élargissant le champ d’exploration. Il faut noter que des travaux français sont cités en référence dans les bibliographies suisses notamment dans la liaison entre développement durable et gérontocroissance.

2.2. Séniorité, cadre de vie et localisation

L’appréciation sur le cadre de vie varie évidemment selon le lieu d’habitation. Il convient donc d’examiner la localisation que l’on décline en trois habitats différents : l’habitat rural en sachant que le Nord Pas-de-Calais est essentiellement une région urbaine, un habitat périurbain dont on connaît peu de choses, et enfin l’habitat urbain plus développé dans la région.

2.2.1. LES PLUS DE SOIXANTE ANS EN MILIEU RURAL

Plus de la moitié des personnes âgées de plus de 60 ans, habitant la campagne apprécient leur cadre de vie dans la mesure où ils échappent à la fois au bruit, à la pollution et au vandalisme. Le principal objet d’insatisfaction est l’absence de commerces ou de transports en commun. En zone rurale, 12 % des personnes âgées de plus de 60 ans, surtout des femmes, ne disposent ni de véhicule personnel, ni de transport en commun. Par ailleurs, le sentiment d’insécurité est très peu répandu chez les personnes âgées habitant en zone rurale. Ils sont de fait moins exposés que les plus jeunes à des cambriolages ou à des agressions et prennent en conséquence moins de précautions pour assurer leur sécurité personnelle.

2.2.2. L’HABITAT PERIURBAIN

L’habitat périurbain s’est construit surtout à partir des années soixante-dix et se trouve conjugué avec la génération des papys boomers à propos de qui on a vu se constituer le concept de senior.

Le senior ne quitte pas son lieu de résidence, il vit au contraire chez lui, dans un logement confortable, souvent individuel : la mobilité résidentielle est faible d’autant plus que le logement individuel est créateur de liens sociaux42. Les seniors vivent donc dans le logement qu’ils ont aménagé et dont ils jouissent d’autant plus qu’ils sont souvent dynamiques. Pour les populations urbaines, comme pour les ménages habitant le périurbain, cette stabilité dans le logement se maintient jusqu’au moment

41 WALLEZ P., Proximité, vie associative et capital social, le cas de l’hébergement collectif des personnes âgées. p 89-100 In Pensée plurielle 2004, 1. De Boeck 42 CRETEIL, IUP Paris XII, Quels choix résidentiels pour demain ?, 2005, 50p.

41

où les préoccupations de santé prennent le pas sur la volonté de vivre chez soi, comme on l’observe chez les personnes âgées de 80 ans et au-delà, autonomes jusque-là.

Les professionnels de l’immobilier se fondant sur les achats de logements effectués, pensent au contraire à un marché de retour vers le centre, soit la ville centre, soit une autre ville ou vers le bourg. Ces achats portent sur de petits logements, sans donner lieu pourtant à une offre spécifique en matière d’équipement du logement. Cependant, rapportée aux ménages stables durant la période intercensitaire (1990-1999), cette demande, bien qu’elle constitue un marché, n’entraîne pas une transformation de la stratégie résidentielle.

En fait deux logiques sont à l’œuvre, celle de la renaissance et d’une mobilité lointaine sous l’influence de l’héliotropisme qui attire les seniors avant 70 ans vers le sud et l’ouest. A partir de 70 ans, une seconde logique apparaît, celle du repli qui rejoint ainsi les représentations classiquement associées à la vieillesse et donne du sens aux théories récentes comme la déprise et le vieillissement comme processus. Cependant le périurbain n’est en aucun cas vécu comme défavorable mais plutôt comme un milieu de vie à part entière.

Enfin, il faut dépasser le seul examen des chiffres et replacer l’habiter dans une perspective anthropologique. Celle-ci situe l’habiter et l’habitable du côté de la permanence, de la proximité, de l’interconnaissance et de l’appartenance aux lieux. Cette représentation accentue ainsi la stabilité plutôt que l’hypothèse d’un retour au centre.

2.2.3. L’HABITAT URBAIN

Dans les villes de province, la part des personnes âgées de plus de 60 ans qui portent un regard favorable sur leur cadre de vie est aussi élevée qu’en milieu rural : 39 % d’entre elles déclarent n’être préoccupées par aucun problème et qu’il ne manque rien dans leur quartier. A localisation et type d’habitat identiques, les personnes âgées ont un mode de vie qui les expose moins aux problèmes d’insécurité (parce qu’elles sortent moins, prennent moins les transports en commun et fréquentent moins certains équipements où l’on peut être agressé). Toutefois, les personnes âgées vivant en ville sont plus nombreuses à évoquer les problèmes d’insécurité. Elles ont été un peu plus souvent victimes que leurs homologues de la campagne d’un vol ou d’une agression, mais beaucoup moins que les plus jeunes, habitant en ville.

En conséquence, le sentiment d’insécurité est plus répandu chez les personnes âgées de plus de 60 ans habitant en ville qui prennent plus de précaution pour protéger leurs biens et se protéger elles-mêmes. Cependant elles développent un sentiment d’insécurité plus faible que ne le laisse entendre le discours ambiant.

L’étude du CREDOC déjà citée considère que chez les 60 ans et plus on assiste à la diffusion de biens d’équipements domestiques ou de comportements de consommation favorisant l’autonomie (diffusion de la télévision, du magnétoscope, du lave-vaisselle, de la voiture, accroissement des départs en vacances). Cependant, l’examen plus attentif des courbes renforce la distinction qui s’établit entre les 60-69 ans et les 70 ans et plus. Dans l’avenir, l’effet d’âge lié au

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vieillissement de la population montre que cette diffusion ne va pas se poursuivre au-delà et donc que le resserrement sur le domicile et l’importance de la proximité va croître.

En conclusion, la relation au cadre de vie est indissociable du mode de vie. Dans l’analyse de la déprise, Vincent Caradec prend en compte la démotorisation, qui se manifeste progressivement pour se réduire aux courses et enfin cesser après 70 ans par l’abandon de l’automobile43. Cette approche illustre la distinction qui apparaît après 70 ans. En matière de services, G. Cavallier oppose les deux strates des 60-69 ans et les plus de 70 ans en distinguant les services marchands pour les seniors solvables (tourisme, voyages, loisirs, biens d’équipement) et les services d’aide à la personne pour les 75 ans et plus qui imposent de cerner les demandes pour répondre aux besoins, de "faire avec" plutôt que "faire pour". Ceci impose de solvabiliser l’offre pour maintenir une équité minimale dans les soins et services aux personnes âgées44. Poursuivant nos investigations bibliographiques, la socialité urbaine se caractérise par les pratiques culturelles qu’il faut aborder maintenant.

3. LES PRATIQUES CULTURELLES

Les pratiques culturelles sont connues par des enquêtes qui se succèdent régulièrement depuis 1973 sur les pratiques culturelles des français45. Elles sont complétées par les travaux menés par l’Insee sur les questions qui ont trait à la sociabilité dans le cadre de l’étude des conditions de vie.

43 CARADEC V., Vieillir après la retraite approche sociologique du vieillissement, Paris Ed. Puf, 2004. p.111 et suivantes. 44 CAVALLIER G., Anticiper le vieillissement in Villes et vieillir, Paris 2003, Ed. La documentation française, p 245-255. 45 « Les pratiques culturelles des français », enquête du DEPS, reposent sur des sondages représentatifs de la population des 15 ans et plus, parce que les jeunes sont des consommateurs souvent novateurs et sensibles aux modes et aux pratiques culturelles et parce que les comportements évoluent selon l’âge. La taille de l’échantillon est de 2 000 en 1973, 3 984 en 1981, 5 000 en 1989, 3 000 en 1997 ; construit par quota selon les variables sexe, âge (7 groupes décennaux), PCS du chef de ménage (7 groupes). Le dépouillement est effectué systématiquement selon ces variables auxquelles s’ajoutent la PCS de l’interviewé, le diplôme de fin d’études, la situation de famille, le nombre de personnes au foyer, l’activité de la femme, la taille de l’agglomération de résidence. A cela s’ajoutent les données apportées par l’Insee lors de l’enquête permanente sur les conditions de vie des ménages. Les résultats utilisés ici portent sur les 65 ans et plus, soit le dernier groupe d’âge.

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3.1. L’âge au centre des pratiques culturelles

Dans la population française, l’espace des loisirs organise les pratiques culturelles selon quatre dimensions dont on peut préciser le nom et les pôles entre lesquels chaque dimension se trouve tendue46. Les variables qui rendent compte de ces dimensions du loisir, associent rapport de sorties à l’extérieur (espace public / privé), rapport à la culture (moderne/classique), âge des intéressés (avant 30 ans et après 65 ans), division sexuelle au travers des loisirs. L’opposition la plus forte se manifeste entre des loisirs hors de chez soi (les sorties sous différentes formes) et une attitude de repli sur l’espace domestique. La culture des loisirs vers l’extérieur a une préférence plus forte chez les hommes (71%) que chez les femmes (67%) et décroît systématiquement avec l’âge, passant de 91% chez les 15-19 ans à 50% chez les 65 ans et plus. Cependant si leur préférence va aux loisirs hors domicile, la culture de sortie, sortir le soir, week-end, restaurant, vacances, est aussi la plus faible vis-à-vis des autres tranches d’âge.

Par contre si les 65 ans et plus ne manquent pas de temps, ils ont toujours quelque chose à faire (56%) c’est dire s’ils sont actifs. Ces observations confortent la pertinence de l’émergence du concept de séniorité pour les 60-69 ans. Ajoutons que globalement les influences dominantes en termes de pratiques culturelles sont observables chez les 65 ans et plus : différences selon les CSP (distinction des cadres et professions intellectuelles supérieures), impact de l’habitat sur les pratiques, consommation différente selon le lieu de résidence. Les ressources faibles, la culture scolaire moins forte, une offre culturelle moins dense ou plus éloignée, exercent donc une influence sur les pratiques culturelles dans le sens d’une moindre modernité, d’une localisation au domicile ou d’un retrait sur le domicile.

La variation des pratiques culturelles selon l’âge est donc au centre de la problématique du vieillissement. Dans cette analyse pour les 60 ans et plus, on s’intéresse à la sociabilité, aux relations avec autrui, et aux pratiques culturelles liées aux communications, télévision et nouvelles technologies.

3.2. La sociabilité informelle et formalisée

La sociabilité constitue une dimension de la vie sociale et relationnelle que les politiques sociales liées à l’émergence du troisième âge ont développé de manière systématique. En opposition avec une conception de la vieillesse marquée par la pauvreté et certaines formes de relégation, l’image des retraités s’est modifié à partir des années 60 et 70, avec l’émergence d’une conception heureuse et active pour les retraités rapidement considérés comme jeunes retraités. Cette sociabilité s’est

46 Ces quatre dimensions sont dénommées et se tendent sur deux pôles :

- Dimension 1 : Rapport cultivé à l’extérieur : rapport cultivé à l’extérieur / réclusion chez soi - Dimension 2 : Rapport à la modernité : sorties d’adolescents scolarisés / domesticité cultivée - Dimension 3 : Division sexuelle du loisir : rapport féminin à l’extérieur / masculin à l’extérieur - Dimension 4 : Rapport modéré à l’extérieur : niveau moyen de sorties / repli chez soi

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manifestée par les loisirs, les voyages et les relations sociales mais aussi par la vie des clubs (du troisième âge) et la pratique associative. Ce sont ces deux champs qu’il faut examiner, celui des relations avec autrui et celui de la vie associative.

3.2.1. LES RELATIONS AVEC AUTRUI

Les relations avec autrui, famille, ami, collègue, voisin, commerçant sont très influencées par l’activité professionnelle. La retraite, quelquefois annoncée par la préretraite voit donc les relations avec le milieu du travail diminuer à partir de 55 ans et chuter entre 55 et 65 ans. Une compensation s’effectue avec le milieu familial durant cette période et se développe encore plus entre 65 et 70 ans : les relations avec autrui sont associées cette fois aux petits enfants. Selon une étude de l’Insee47, deux modalités affectent les relations avec autrui : d’une part, les contacts se réduisent parce que les réseaux de relations s’amenuisent plutôt que par une rigidité comportementale due à la vieillesse, et d’autre part, les contacts deviennent moins personnels en restant plus sous l’influence du couple et de son réseau amical. Le réseau amical est donc en relation directe avec la situation familiale et la situation conjugale dont le veuvage qui concerne plus le sexe féminin est toujours une épreuve.

3.2.2. L’ENGAGEMENT ASSOCIATIF

L’engagement associatif, pratique de sociabilité formalisée, est actuellement bien connu depuis le centenaire de la création de la loi qui régit la vie associative votée en 1901. Deux âges de la vie témoignent d’une vie associative plus intense comme en témoignent les réponses à la question : « participe à au moins une association ? » : au voisinage de la quarantaine on obtient 45% de participation ce que l’on explique par l’existence des associations de parents d’élèves ; entre 60 et 69 ans 51%, entre 70 et 79 ans 47%, on explique ces résultats par la fin de l’activité professionnelle. La participation à deux associations est fréquente. Cette participation forte s’explique :

- par l’augmentation du temps libre liée au départ des enfants et à la cessation de l’activité professionnelle lors du départ à la retraite qui suit ;

- par le champ très vaste de l’activité associative, allant de l’altruisme à l’aspiration aux loisirs en passant par l’affirmation identitaire fondée sur l’âge ;

- par les formes d’engagement qui mobilisent du temps pour des adultes qui disposent de temps libre ; d’autant que des associations spécialisées sur le troisième âge drainent 15% des adhésions.

La vie associative est favorisée par le sexe, les hommes participent plus souvent parce que certaines associations sont plutôt masculines du fait du travail, des activités militaires etc. Mais les femmes plus jeunes, sont plus présentes que dans la génération précédente. Enfin, l’activité associative s’accompagne d’occasions de rencontres, sorties, contacts amicaux, qui révèlent une bonne insertion sur le plan social. Il y a convergence entre vie associative, participation électorale, croyance religieuse. Ces participants sont actifs et responsables.

47 La sociabilité des personnes âgées. Insee première, N°644, 1999.

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3.3. La télévision et l’intérêt pour le monde

Si l’activité associative est typique de l’action à l’extérieur du logement, l’activité culturelle domestique emblématique est l’écoute de la télévision ou plus largement d’une action qui repose sur l’équipement audio-visuel. Celui-ci s’est développé ces dernières années, donnant lieu à une culture de l’écran et au boom musical, qui renforcent une culture domestique.

Longtemps on a considéré cette pratique comme significative d’une culture jeune. Depuis les interprétations se sont modulées. Il est vrai que les jeunes sont les premiers à réagir aux nouveaux médias ou aux innovations techniques, mais les seniors les rattrapent : la durée d’écoute de la télévision augmente jusque 85 ans : elle passe de 24 h hebdomadaires chez les 55-59 ans à 32 heures dans la tranche d’âge 80-84 ans, pour atteindre encore 22 heures par semaine chez les 85 ans et plus.

3.3.1. LOISIR PASSIF - LOISIR ACTIF

Ces pratiques suivent l’équipement domestique et l’appropriation de pratiques acquises durant la jeunesse qui se maintiennent avec l’âge. Les retraités, les inactifs, les moins diplômés constituent les publics des français qui ont une écoute de la TV de plus de trente heures par semaine et c’est ce qui fait dire que la télévision et son environnement, lecteur CD, télécommande, sont plutôt considérés comme une attitude culturelle passive. En ce qui concerne les émissions, les plus de 65 ans préfèrent « Thalassa », « L’instit », « Perdu de vue » et s’opposent par là aux publics plus jeunes. On doit rappeler que la télévision donne lieu à des usages différents que l’on peut résumer à partir de trois concepts : lien social ou compagnie par la présence des personnages ou d’autres individus interviewés, connaissance sous le double aspect de l’information pour se tenir au courant et de la découverte donc de l’apprentissage, enfin du spectacle fondé sur une double participation intellectuelle et ou émotionnelle48. Le lieu de résidence joue sur l’audience de la télévision : elle est plus forte en milieu rural et plus faible dans l’agglomération parisienne, mais surtout semble-t-il parce que l’offre culturelle est plus riche à Paris et plus proche des citoyens en banlieue.

L’écoute de la radio est plutôt considérée comme un loisir actif. Mais en ce qui concerne l’écoute des musiques, on reste fidèle aux choix de sa jeunesse. Les plus jeunes associent musiques et sorties, galas, concert rock, tournées de chanteurs. Les plus de 65 ans se comportent différemment compte tenu du niveau social et culturel plus modeste privilégiant l’écoute à domicile. Si 41 % des 65 ans et plus reconnaissent que la TV leur manquerait beaucoup s’ils en étaient privés pendant deux mois, 21% disent qu’ils n’en manqueraient pas du tout. Cette variation amène à envisager l’hypothèse d’une typologie des modes de vie pour cerner la place de la TV au lieu de la considérer comme une pratique homogène.

48 CARADEC V., Vieillesse et télévision. Diversité des modes de vie et des usages in Regards croisés sur les pratiques culturelles sous la direction de O. Donnat, Paris, Ed. La documentation française, 2003. L’auteur définit cette fonction de lien social comme une fonction de compagnie qu’il assimile à une présence importante pour les personnes seules et qu’il qualifie de degré zéro de l’écoute.

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3.3.2. LA TELEVISION ET LES MODES DE VIE

A partir d’une enquête qualitative auprès des plus de 75 ans, Vincent Caradec dégage trois modèles du rapport à la télévision49 qui rend compte à la fois de sa place importante dans la vie et de l’attachement variable à la télévision.

Premier modèle : la télévision au cœur de l’existence. Ce modèle caractérise des personnes ayant un fort attachement à la TV, donc avec un temps d’écoute hebdomadaire de 30 heures et plus et une faible variation saisonnière. La télévision est donc au centre de leur existence, même si le temps d’écoute est plus faible.

Deuxième modèle : la télévision maintenue à la lisère de l’existence. Là encore la variation saisonnière est faible, mais le temps d’écoute est faible et maintenu volontairement faible. La télévision est perçue dans ce cas comme le symbole de la passivité voire d’accepter de devenir vieux. La réaction est donc sélective et consiste à garder l’écoute de la télévision dans des usages définis (en soirée par exemple ou pour certaines émissions).

Troisième modèle : une importance variant au gré des circonstances. La variation de l’écoute est contenue non par principe mais au gré des circonstances, soit des productions télévisuelles, soit de la vie quotidienne et des activités alternatives. L’écoute peut alors augmenter (en hiver) ou diminuer (en été) et rester contenue sans faire l’objet d’une condamnation systématique.

La déprise peut entraîner le repli sur l’espace domestique qui par ailleurs se trouve favorisé par l’écoute de la télévision sans que cette écoute soit à la fois nécessaire et apparaisse comme une fatalité des pratiques culturelles chez les 65 ans et plus. La typologie que propose Vincent Caradec en fournit un argument. Ceci laisse le champ libre à des pratiques qui se développent sur d’autres champs comme la vie associative ou l’activité sociale dans le cadre du bénévolat.

Cependant au-delà de 85 ans, la déprise se fonde sur la lassitude, liée à la répétition des « séries ou des saisons » que l’on finit par connaître par cœur, ce qui émousse la curiosité et le plaisir. La répétition des scènes stressantes, d’horreur ou de violence, traduit une indifférence que la personne attribue souvent au vieillissement. Ainsi la déprise témoigne d’une diminution de l’intérêt pour le monde à la fois sur le plan cognitif, ne plus vouloir connaître, et affective, accepter les scènes de violence à l’écran.

3.4. Les nouvelles technologies pierre d’angle de la modernité

Les techniques de communication restées stables jusqu’à ces dernières années se répartissaient entre l’écrit et le parlé, et le domaine privé et le domaine professionnel sans qu’il y ait de grandes modifications. Cette répartition s’organisait entre la communication immédiate (orale) et la communication différée. Les nouvelles technologies ont modifié ces répartitions en jouant sur le temps, la distance, et la nature de la communication par l’ordinateur, le courrier électronique et internet. Il faut donc savoir utiliser le fax, le mobile, l’ordinateur et internet. La séparation

49 CARADEC V., Vieillesse et télévision. Diversité des modes de vie et des usages, Op. cit.

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professionnel / privé n’est plus aussi forte, puisque l’équipement individuel peut être de même nature que l’équipement professionnel.

Sur le champ des nouvelles technologies, deux discours sont aux prises qui présentent des arguments que l’on ne peut pas éliminer. Le premier s’organise sur la résistance au changement dont les 65 ans et plus font état : refus du traitement de texte, refus de l’ordinateur, du portable et/ou d’internet. Le second s’appuie sur des exemples d’usages par les jeunes retraités du répondeur téléphonique, du portable, du numérique, d’internet.

Pratique professionnelle : facteur d’explication de résistance et/ou d’incitation. L’adoption de nouveaux moyens de communiquer nécessite un apprentissage et affecte en premier lieu le contexte professionnel. Celui-ci est donc en position de favoriser le désir d’apprendre ou d’utiliser ces techniques : la bureautique, par exemple, fera adopter l’utilisation de l’ordinateur et par là l’utilisation d’internet si le besoin s’en fait sentir50. Une activité manuelle éloignée des applications de l’informatique peut dévaloriser ou dissuader son utilisation. On comprend que dans ces conditions, l’identité professionnelle joue dans les deux sens : le champ professionnel sous l’angle de l’identité est un facteur explicatif de freins au changement ou d’adoption de ces nouvelles technologies.

L’usage pour des raisons d’engagement associatif et/ou familial. Le contexte ajoute à ces incitations, son poids spécifique créant des utilités qui tiennent à son mode de vie : activités personnelles orientées vers des pratiques esthétiques (photos, voyages), engagement associatif, relations affectives dans le cadre familial, toutes ces occasions vont favoriser le développement, l’apprentissage, voire le dépannage dans ces activités orientées vers de nouvelles technologies. Il s’agit non plus d’identité, mais de l’utilisation de dispositifs favorisant l’échange et l’activité déployée par la personne de 65 ans et plus, dans le cadre familial : utilisation du courrier électronique pour garder des relations avec des enfants résidant au loin, d’internet pour élargir les horizons individuels etc.

Les relations sociales suscitées par les nouvelles technologies. Ces dispositifs sont utiles et pratiques pour autant qu’ils soient maintenus en bon état de fonctionnement. Ils suscitent le plus souvent des relations suivies pour se documenter, apprendre à s’en servir, se faire dépanner sans mobiliser un service après-vente. La sphère familiale est aussi un champ de médiation pour ce genre de service : importance des enfants et des petits enfants. Dans la mesure où les nouvelles technologies s’insèrent dans le mode de vie elles donnent lieu à des appropriations spécifiques en relation avec le réseau de relations privées ou familiales dans lequel évoluent les personnes âgées de 65 ans et plus. Donc il n’est pas possible de dégager une norme applicable à l’ensemble du groupe

50 Après son veuvage, D a repris un travail pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Ce travail lui a imposé de passer à l’ordinateur et à l’âge de la retraite, elle a continué d’utiliser l’ordinateur qu’elle possédait. Ses activités associatives l’ont amenée à participer à la réalisation de journaux et de documents internes qui ont rendu indispensable un équipement informatique complet, ordinateur, imprimante, scanner et autant pour ses activités que pour ses petits-enfants elle a pris un abonnement à internet.

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d’âge constitué par les 65 ans et plus, qu’elle soit celle du frein aux innovations ou celle de l’emballement pour ces innovations51. Il serait artificiel de poser la question des relations entre le vieillissement et les nouvelles technologies en la réservant uniquement au cercle des intimes et des personnes âgées de 65 ans et plus. Il faut aussi y introduire les actions et initiatives institutionnelles prises cette fois au plan collectif, habitat et services.

51 LEGRAND M. et PENIN F. (sous la direction de), Seniors et nouvelles technologies, Nancy, 2004.

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CONCLUSION

Le vieillissement de la population représente un enjeu important du fait de l’augmentation du poids démographique de la population âgée depuis 60 ans observée ces dernières années et qui se renforcera au cours des prochaines décennies. Les perspectives démographiques sont la résultante de tendances lourdes qui agissent de manière continue comme l’allongement de la durée de la vie et de phénomènes conjoncturels comme l’arrivée à l’âge de 60 ans des générations nombreuses issues du baby-boom. Cette évolution démographique a des effets contrastés : allongement de la vie sans incapacité lié à une amélioration globale de l’état de santé des personnes âgées d’une part, le poids relativement important de la population âgée dépendante d’autre part.

Les théories du vieillissement prennent en compte ces modifications, comme l’exposé l’a montré en mettant l’accent de plus en plus fortement, sur la déprise et sur une conception du vieillissement comme processus relationnel. De ce fait on assiste à la prédominance du paradigme gérontologiste sur le paradigme âgiste plus ancien.

Globalement, la situation des personnes âgées s’améliore par rapport aux décennies précédentes. Il faut en fait distinguer l’évolution de la situation des individus au fur et à mesure de leur avancée en âge et les évolutions que l’on peut observer entre les générations qui se succèdent. Que l’on considère le niveau de revenus ou les conditions de logement, les personnes qui atteignent l’âge de 60 ans connaissent une situation qui est en générale moins favorable que lorsqu’elles étaient encore en activité : le revenu est la plupart du temps moins élevé. Mais ceci est atténué par l’amélioration globale des conditions de vie et les personnes âgées d’aujourd’hui sont mieux loties que celles d’hier en bénéficiant d’un équipement souvent au niveau de celui de la moyenne de la population. En matière d’habitat ce groupe d’âge n’a pas fait l’objet d’une définition précise en matière d’urbanisme et l’on a parlé d’un impensé urbain. Cette situation n’est pas propre à la France dans la mesure où elle correspond à une situation plus générale en Europe tout au moins, et peut-être dans l’ensemble des pays développés.

Les pratiques culturelles sont sensibles à l’âge, et l’influence des facteurs observables dans les autres catégories sociales, niveau de diplôme, CSP, capital culturel, lieu de résidence se fait sentir chez les personnes âgées de 65 ans et plus. Le concept de séniorité évoqué plus haut prend ici tout son sens parce qu’il souligne la nécessite de distinguer les moins de 75 ans et les plus de 75 ans comme nous le ferons dans la chapitre suivant. On a voulu insister sur les points qui apportent le plus de diversité ; celle-ci dépend des individus, du milieu familial qui prend le relais de l’influence du milieu professionnel quand celle-ci s’amenuise avec la retraite, et des pratiques collectives dans la vie associative par exemple. A la vie associative qui se développe à l’extérieur en écho à la pratique de sortie, répond l’influence de la télévision qui est étudiée chez les 75 ans et plus et qui témoigne d’une diversité quant aux usages et quant aux modèles d’audience. Cette diversité apparaît également dans le recours aux nouvelles technologies vis-à-vis desquelles les plus de 65 ans ne sont pas systématiquement hostiles mais au contraire réagissent sous l’influence de différents facteurs, identité professionnelle, usages liés au contexte, médiations familiales.

CHAPITRE 3

LES PERSONNES DE PLUS DE 60 ANS : PRATIQUES URBAINES, EXPRESSION

ET CITOYENNETE

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Le thème des réflexions de ce troisième chapitre, repose sur la confrontation des points de vue de la population âgée de 60 ans et plus avec les données générales qui ressortent des études et recherches menées sur ce groupe d’âge en matière d’habitat et de mode de vie. Cette approche plus empirique précède l’analyse de la position des professionnels appelés à intervenir sur la question de l’habitat des personnes de ce groupe d’âge qui sera abordée dans les chapitres suivants. La socialité que l’on définit par les capacités de cohérence et de cohésion d’une société concrète, comporte deux données, celle d’un devenir donc d’une histoire et celle d’un domaine donc d’un espace qui fondent structurellement l’urbanité. Dans le cadre de la présente recherche portant sur les personnes âgées et la ville, le concept d’urbanité semble en mesure de rendre intelligible les pratiques observées empiriquement. En effet, il se présente sous trois dimensions complémentaires : une dimension morphologique ou spatiale qui rend compte de l’habitat, une dimension institutionnelle reposant sur les politiques sociales en direction de la population et une dimension politique ou civique qui débouche sur une pratique de la citoyenneté. Localisation, capital social, participation définissent la socialité urbaine des personnes âgées de 65 ans et plus, sur les trois dimensions qui lui sont constitutives. Les rapports des personnes âgées de 60 ans et plus avec la ville reposent sur ces trois dimensions qui prennent une valeur variable selon le mode de vie comme nous l’avons illustré dans le chapitre précédent ; la démographie et la législation imposent des variations comme on peut le constater aujourd’hui avec le vieillissement de la population et avec la prise en charge de la dépendance. La première partie examine la constitution d’un cadre de référence en relation avec notre approche théorique ; la seconde définit la méthode employée ; la troisième présente les démarches empiriques menées auprès des personnes âgées de 65 ans et plus, leurs limites et leurs résultats. La conclusion en dégage des perspectives à approfondir dans la suite de l’étude.

1. TROIS DIMENSIONS POUR LA CONSTITUTION D’UN CADRE DE REFERENCE

Le cadre de référence mobilisé pour la collecte et l’analyse des données empiriques est construit en réunissant les trois dimensions générales que nous avons exposées dans l’introduction du chapitre. Les personnes âgées de 65 ans et plus présentent des caractéristiques qui témoignent, dans leurs pratiques de la ville, d’une urbanité qu’il convient maintenant de préciser de façon spécifique.

La dimension morphologique ou spatiale constitue la première dimension de ce cadre de référence dans laquelle les relations avec la ville des personnes âgées de 65 ans et plus prennent du sens. Notre démarche y trouve une traduction concrète à partir de l’habitat : un habitat intra muros, expression préférable à celle de centre-ville qui n’est pas toujours exacte in stricto sensu, et un habitat périurbain défini comme

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un espace rural situé dans l’attraction d’un centre urbain. Cette dimension spatiale se double de connotations sociales qui dépendent du statut socioprofessionnel que les individus ont occupé dans leur période d’activité, et qui exerce une influence sur le réseau relationnel et les pratiques familiales, ou implique des conséquences particulières sur la vie quotidienne des personnes âgées de 65 ans et plus.

Deux aspects interfèrent à partir du concept d’étendue ou de distribution dans l’espace géographique : le premier concerne le logement, le second les déplacements. Le choix effectué par les ménages dans la localisation de leur logement détermine les contraintes en matière de déplacements, tant sur le plan des moyens (automobile ou transports en commun) qu’en ce qui concerne les besoins et les possibilités. La continuité avec la période antérieure de la vie est plus facilement assurée quand le logement est identique, même si le rapport nombre de personnes logées / taille de l’habitation évolue vers une situation de sous-occupation. Quand le maintien dans le logement devient difficile, la personne vit un moment crucial, véritable tournant dans la vie. Les uns et les autres abordent ce passage avec prudence. Si certaines situations sont plus agréables à vivre à un moment donné, rien n’est plus assuré sur le long terme.

Les déplacements se situent au centre des préoccupations de chaque personne sous des formes différentes, soit qu’on utilise encore un véhicule automobile, que l’on recoure aux transports en commun ou que l’on se déplace à pied pour ceux qui ne conduisent plus. Selon les moyens utilisables, le rayon d’action des déplacements s’en trouve affecté et de ce fait retentit sur le style de vie des personnes concernées. S’il ressort que la possession d’un véhicule ne résout pas d’emblée tous les problèmes de circulation personnelle, l’absence de véhicule soulève la question des déplacements et la possibilité de les assurer.

La deuxième dimension, institutionnelle, s’appuie directement sur les politiques menées en direction des 65 ans et plus, retraités (si l’on prend la référence de l’activité), développant une sociabilité spécifique, de fait ou formalisée (si l’on fait référence aux pratiques associatives). Pour deux raisons cette dimension est au centre de notre réflexion. D’une part, elle retentit sur les services utilisés par cette population et créés pour elle par les politiques. Ces services utilisés dépendent en fait des conditions financières des personnes concernées. D’autre part, elles sont relatives aux relations sociales qui se sont constituées dans la période précédente et fonctionnent comme un capital social52. Rapportée à la personne, la dimension institutionnelle est définie par des données acquises durant la vie de l’individu qui, avec la retraite, se prolongent au-delà de la vie professionnelle d’une manière qui mériterait d’être approfondie tant elle est sujette à variation.

52 BOURDIEU P., Le capital social notes provisoires in Actes de la recherche en sciences sociales, n°31, Janvier 1980, p 2-3. Les critères que cette note provisoire énonce sont la possession d’un réseau de relations, qui traduit l’appartenance à un groupe, doté de liaisons stables. Le volume de capital social, dépend de l’étendue du réseau qui fait l’objet d’un travail destiné à l’entretenir et à produire les profits matériels et symboliques qu’il procure.

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Les ressources et le statut social constituent une première donnée : ils ont une influence compréhensible sur l’habitat et les relations sociales qui s’y trouvent associées. Les revenus relevant de la retraite et du patrimoine sont en référence directe avec les dispositions prises auparavant par le truchement du mode de vie. Celui-ci s’exprime dans l’habitat d’autant plus facilement que le périurbain favorise l’accession qui, outre son aspect pratique de constitution d’un patrimoine immobilier, s’avère sur le plan symbolique une manière d’extérioriser son appartenance à un groupe social par les choix qu’il traduit : appartenance à la société urbaine, souci de s’en tenir éloigné tout en se rapprochant d’un mode de vie qui présente tous les avantages techniques. Les ressources renforçant les avantages statutaires relient le métier et la position sociale qu’il confère. Les relations et le capital social constituent une seconde donnée : souvent acquis pendant la vie professionnelle, ils sont actifs pendant la retraite. Les réseaux de relations, le crédit social, l’influence sont de ce point de vue à prendre en compte pour cerner leur interaction avec la position sociale. Cette dimension institutionnelle de l’urbanité peut rendre intelligible certains comportements qui apparaissent à cette période de la vie.

La troisième dimension, qualifiée de politique ou civique, traite plus précisément du mode d’engagement que les citoyens âgés de 65 ans et plus assurent dans le fonctionnement de la cité et que les instances politiques locales attendent d’eux : en effet l’activité et la participation à la vie sociale sont deux facteurs qui concourent à un maintien du dynamisme, même si la théorie du vieillissement qui tend à se développer est celle du «vieillissement comme processus relationnel ». Dans ce champ, on reprendra les données liées aux consommations et aux formes de participation sociale en relation avec les projets d’aménagement, d’activité socioculturelle que certaines collectivités tentent de développer.

Le cadre ainsi tracé, l’exposé de la méthodologie suivie permet d’engager l’analyse des résultats obtenus.

2. LES INFORMATIONS EMPIRIQUES : ENSEIGNEMENTS ET LIMITES

Deux variables ont été prises en compte dans la construction du cadre empirique mobilisé pour cette recherche : la première caractérise l’habitat, la seconde l’âge de la vie des personnes contactées.

2.1. Choix des sites et âges de la vie

La dimension morphologique se traduit par la prise en compte de deux situations pertinentes relevées dans le rapport intermédiaire n°1 qu’il nous a semblé

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intéressant d’opposer53 : l’habitat en ville, donc intra muros, renvoie à une expression de l’étendue définie par la densité, la concentration de la population avec les conséquences qui en découlent quant aux moyens de transport et aux possibilités de circuler ; l’habitat en périurbain renvoie quant à lui à une autre expression de l’étendue, celle de paysages proches du rural, souvent en transformation au fil des recensements et dans la région Nord-Pas-de-Calais, surtout depuis 1982. Elle implique une concentration de services en ville et donc éloignés du lieu de résidence, complétée d’initiatives locales propres à faire jouer un rapport de proximité. Nous avons choisi d’une part Calais comme site intra muros pour sa physionomie de ville centre qui exerce son attraction sur sa périphérie, et d’autre part la Communauté de communes de Carambault en périphérie de Lille. Il s’agit dans cette opposition de mettre en évidence l’effet structurel de l’assortiment de produits et de services proposés aux 65 ans et plus.

L’émergence de la séniorité a été prise en compte sous la forme d’une distinction entre deux périodes de la vie, les 65-79 ans pour traduire la séniorité, et la période de 80 ans et plus comme expression du vieillissement. Dans le chapitre 2, nous avions opposé deux idéaux types : le premier de ne pas se sentir vieillir, qui correspond à la tranche d’âge 65-79, et le second d’être vieux, dans l’antichambre de la mort, qui correspond à la tranche d’âge des 80 ans et plus. Ces deux périodes reposent sur l’hypothèse implicite que la continuité avec le passé risque d’être plus forte chez les 65-79 ans que chez les 80 ans et plus. Dans ces conditions, le cahier des charges que réclament les seniors, ou le mode d’emploi de la vie sociale qui est le leur, est plus proche de celui qu’ils ont connu en tant qu’habitant citoyen. Quant aux 80 ans et plus, ils sont toute proportion gardée, dans une situation fortement marquée par des caractéristiques personnelles ou individuelles observables dans cette période biographique. Les besoins s’éloignent de la période antérieure, et donc feront l’objet de modifications qui s’orienteront vers des demandes nouvelles auprès des pouvoirs publics.

2.2. Moyens d’accès et constitutions des groupes

La méthode utilisée est celle des focus group, constitués selon les variables spatiales et temporelles sur Calais et sur le site de la Communauté de communes de Carambault. Le relais utilisé pour constituer les groupes a été le CCAS de Calais pour sa connaissance des personnes de 65 ans et plus et le Centre local d’information et de coordination gérontologique (CLIC) EOLIS. La question de la motorisation a été prise en compte à la fois pour des raisons théoriques mais aussi pour des raisons pratiques : la participation des membres à nos réunions (les focus group) étant conditionnée à leur possibilité de se déplacer dans la ville ou dans l’intercommunalité. Le tableau ci-dessous rassemble ces données.

53 Le rapport intermédiaire n°1 présentait une approche statistique du vieillissement sur le plan démographique et sur celui de l’habitat. Ces données connues ont guidé notre choix des sites présentés dans ce chapitre 3. On retrouvera ces données présentées sous une forme plus adéquate dans le chapitre qui suit.

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Constitution des focus group

Site intra muros Périurbain (Communauté de communes de Carembault)

Relais CCAS EOLIS 65 ans à 79 ans Aucun participant Motorisés hommes

Non motorisées femmes 80 ans et plus Non motorisés mixtes Motorisé homme

Non motorisées femmes

Ce tableau appelle les commentaires suivants :

1) Les foyers résidences gérés par le CCAS sont attribués aux personnes candidates à un studio qui ne sont pas motorisées. Passant par ce canal, nous n’avons pas eu de personnes de 65 ans et plus motorisées sur Calais. La réunion regroupait trois personnes, deux femmes et un homme, avec plusieurs défections de dernière minute. 2) Le groupe de 65-79 ans n’a réuni personne à notre grande déconvenue. Les personnes sollicitées nous ont dit ne pas voir ce qu’elles pouvaient apporter à l’étude que nous entreprenions. 3) La constitution des groupes en périurbain a présenté moins de difficultés mais n’a pas rencontré l’audience souhaitée : les réticences rencontrées sont diverses et leur examen mérite attention. Les groupes étaient toujours ou masculins ou féminins.

2.3. Aspects déclarés et latents de ces absences

Ces absences ont des raisons objectives, qui nous semblent révélatrices d’une attitude de réticence versant non-dit de cette absence de fait.

2.3.1. LES RAISONS OBJECTIVES

La première raison tient à la santé : plusieurs personnes ne sont pas venues du fait de la maladie survenue en une période de grand froid. Cette fragilité physique éclaire la situation des personnes de 65 ans et plus, dont l’état de santé n’est plus celui des tranches d’âge précédentes. La maladie, ou le suivi médical sous la forme de rendez-vous pris et que l’on ne peut déplacer, sont ainsi une cause d’absence.

La seconde raison est celle des déplacements : vacances, voyages ou déplacements en famille. La période retenue a été involontairement celle des vacances d’hiver en février. A notre insu, le moment choisi a freiné la participation.

Enfin, les contacts pris par téléphone ont été confondus par du démarchage à domicile, entraînant de ce fait le refus de donner suite à nos contacts, les références proposées n’ont pas suffi à lever ces réticences. Ces trois raisons participent du mode de vie des 65 ans et plus et fonctionnent comme une contrainte de leur situation. Pour nous résumer, sur les quatre rencontres que nous avons organisées,

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trois personnes ont participé à Calais, et huit personnes à Phalempin. Nous avons réalisé par ailleurs, deux entretiens individuels auprès de personnes qui n’étaient pas libres aux jours et dates de réunions, mais qui, par compensation de leur absence, ont accepté de nous recevoir en entretien individuel.

2.3.2. DES ATTITUDES DE RETICENCES

L’exposé des objectifs de notre étude n’avait suscité aucune interrogation particulière. Inévitablement, la question qui est venue aux lèvres des participants a été de savoir quelles conséquences cela pouvait avoir, et si leurs desiderata seraient pris en compte. A notre réponse que cette étude ne susciterait qu’indirectement des retombées, le scepticisme des présents montrait bien qu’ils n’étaient pas vraiment convaincus qu’il y en ait. Au cours des séances de travail, plusieurs réactions se sont manifestées.

Sur le site de Calais, la consigne présentait les raisons pour lesquelles le CRESGE souhaitait avoir leur point de vue et s’achevait en présentant les thèmes qui nous intéressaient : le logement et ce qui s’y rattache ; les services, commerces et équipements de proximité ; les espaces publics et leur aménagement ; les transports. Nous achevions cette courte présentation en précisant : « C’est vous qui allez dire par où commencer, en choisissant ce qui est le plus important pour vous. Si cela vous est égal, on vous propose alors un ordre des questions ». Il semblait que le point de départ le plus évident était celui du logement. Mais dans le groupe mixte, les femmes ont demandé à un homme de parler le premier sous le prétexte qu’il était un ancien syndicaliste. Celui-ci a débuté en exprimant son contentement par rapport à son logement, son studio dans le foyer ; elles ont répondu « oui c’est bien sauf les douches ». Le jugement oui c’est bien est apparu comme une sorte d’appréciation obligée qui traduit le rapport qu’elles entrevoyaient au travers de cette réunion : une sorte de jugement implicite de l’action des élus qu’il leur était difficile de contester à cause de la difficulté, à Calais, d’avoir un studio dans un foyer résidence. En fait, cette attitude exprime leur dépendance sous-jacente : ils ne décident plus, et dans le foyer logement, ne contrôlent rien de l’organisation générale. La comparaison avec la relation locataire-bailleur a été plusieurs fois évoquée.

A Phalempin, les participants ont fait part, en premier lieu, de leur incrédulité quant à la suite qui serait donnée par les élus : si l’idée était bonne, elle ne serait pas suivie d’effet. Le contraste est fort sur ce site entre les propriétaires habitant en maison individuelle et les locataires bénéficiaires des politiques sociales. Un thème est abordé par ces derniers, celui de l’isolement et de la solitude.

2.3.3. LES RAISONS DE CES RETICENCES

Les réticences que nous avons évoquées proviennent directement d’une attitude qui prend acte de la dépendance des 65 ans et plus et qui s’exprime dans leurs représentations de la vie sociale, notamment vis-à-vis des élus locaux vers lesquels ils développent une attitude ambivalente.

Une seconde explication peut être retenue. Elle s’appuie sur les travaux récents que nous avons évoqués. Certaines personnes ne se sentent pas vieux au sens propre du terme, et poursuivant leur vie dans la continuité de ce qu’ils ont connu, ils ne voient aucune différence notable concernant les relations qu’ils entretiennent avec

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leur cadre de vie. Ils ne s’estiment pas concernés par l’objet de notre questionnement. Cette explication illustre l’attitude selon laquelle on ne veut pas vieillir.

D’une manière analogue, mais cette fois au titre de la déprise, les premiers symptômes du vieillissement se sont déjà manifestés et certaines personnes âgées se centrent sur elles-mêmes, considérant l’espace de la ville comme une donnée qui leur échappe de plus en plus. Cette deuxième version nous fait basculer sur le versant du désintérêt, soit parce que ce n’est pas encore le moment, soit parce que cela ne vaut déjà plus la peine. La question se pose alors de savoir quel indicateur nous permet de saisir le moment de ce basculement.

Ainsi, les difficultés rencontrées sur les deux sites d’étude, illustrent la complexité de la situation des intéressés en ce qui concerne la prise en compte de leurs besoins. Ils ne sont pas habitués à être consultés et les politiques vieillesse se décident sans leur point de vue. Le rapport avec la cité est donc de fait un rapport qui se réduit à leur participation électorale. Pour avancer dans l’analyse, l’examen des données collectées va nous occuper maintenant et sera en mesure de compléter ces premières réflexions.

3. LES RESULTATS OBTENUS

La question de l’habitat est en relation directe avec la typologie du ménage, selon qu’il est constitué d’une personne seule ou d’un couple et que ce ménage est valide ou affligé d’un handicap affectant plus ou moins la mobilité. Notre approche ressort fortement du croisement de ces deux variables qui se déclinent alors sur le plan de l’habitat, par l’opposition d’une part des propriétaires de maison, et d’autre part des locataires du parc social, autonome ou spécifique pour personnes âgées, comme les foyers résidences. La question des déplacements est ainsi doublement tributaire de l’habitat et de la santé susceptible de réduire la motricité et donc de favoriser les utilisations de l’espace. Ces trois aspects constituent la première partie. La seconde aborde les politiques sociales dénommées habituellement sous le terme de politiques vieillesse : celles-ci se développent autour de l’autonomie et de l’indépendance, du changement de logement, du coût et de la solitude et rejaillit sur l’utilisation des services. La troisième aborde la pratique des espaces publics, la participation à la vie sociale et les modalités en usage vis-à-vis de cette catégorie d’âge.

3.1. Typologie du ménage, habitat et déplacement : non-retour ou rupture ?

Le ménage des personnes qui ont participé à nos focus group présente une typologie simple et fréquente chez les personnes âgées de 65 ans et plus : il s’agit de personnes vivant seule (le veuvage ajoute ses effets au divorce ou au célibat) ou de personnes vivant en couple. Les enfants qui constituent la famille directe, ont déjà pris leur indépendance, et vivent éloignés, parfois géographiquement, de leurs parents. La seconde variable en composition avec la forme du ménage est l’existence ou l’apparition d’une réduction de la motricité pour des raisons diverses,

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accident, maladie ou vieillissement. Ces ménages se répartissent selon deux manières d’habiter, maisons en propriété, logement locatif, fruits des politiques sociales. Nous allons examiner ces deux modalités sous le double aspect de leurs caractéristiques et de leurs conséquences.

3.1.1. HABITAT INDIVIDUEL EN PROPRIETE

Tous les ménages habitant en périurbain sont propriétaires de maisons individuelles : trois personnes de sexe masculin ont participé au groupe de Phalempin (65 à 79 ans) en périurbain et motorisés, et vivent en couple ; de la même tranche d’âge mais non motorisée suite à un accident qui l’empêche de conduire, une femme veuve vit seule ; enfin un homme (80 et plus) qui conduit encore, habite une commune rurale voisine, ancien élu, ancien commerçant dont l’épouse est handicapée. Ces cinq ménages sont de classe moyenne supérieure54.

Ces ménages habitant en périphérie de Lille55 occupent des maisons prévues pour des couples avec enfants qui sont maintenant devenues trop vastes : leur entretien pose la question des charges. Le couple plus âgé a changé de logement, en prenant un plain-pied pour faciliter la vie de l’épouse handicapée. Les quatre autres n’ont pas encore changé, mais s’interrogent et prévoient de le faire, plus ou moins forcés par la situation, mais aussi dans l’espoir de valoriser un bien immobilier tout en restant dans leur commune et dans leur cadre de vie. Le point de vue critique sur le logement s’appuie sur l’argument de la taille au regard des charges financières et de l’entretien d’un logement trop vaste. La propriété entraînant une évidente satisfaction, la question de l’équipement du logement est abordée sous l’angle des travaux incombant au propriétaire et les tracas qu’ils occasionnent. L’attachement à ce type d’habitat est pourtant très fort et le changement qu’ils anticipent provoque une discontinuité forte dans leur itinéraire résidentiel qu’ils appréhendent ou refusent encore d’envisager.

Le fait de vivre à l’extérieur de Lille rend indispensable une voiture, encore deux pour l’un d’entre eux. Mais par ailleurs, la proximité et les difficultés de stationnement à Lille, ville-centre, leur font souvent préférer les transports en commun, métro, train, vélo, à la voiture pour les courses. Le fait d’être en bonne santé rend possible une maison éloignée d’un centre, mais ils savent que cette période aura une fin et n’imaginent pas de demander un foyer logement. Ils s’orientent vers un logement individuel plus petit. L’apport de la comparaison entre les trois premiers et les deux derniers cas, fait apparaître avec une grande acuité la question du périurbain quand les difficultés de se mouvoir (quelles qu’en soient les raisons, maladie, accidents) obèrent la maîtrise de la proximité et rend nécessaire une aide pour le déplacement.

54 Cadre supérieure, cadre intermédiaire, commerçants, professeur. 55 Gruson, Ronchin, Phalempin, Bachy.

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3.1.2. HABITAT EN LOGEMENT ADAPTE DANS LE PARC SOCIAL

En opposition à ces cinq biographies se situent cinq autres cas de milieux populaires et de catégories intermédiaires56 qui occupent un logement adapté pour personnes âgées, soit en gestion HLM, soit en béguinage, soit en foyer résidence. Il s’agit toujours de petits logements, studio ou F2, dont les titulaires sont locataires, non motorisés, isolés dans les cinq cas considérés.

Le fait que ces logements relèvent d’une politique prévue pour cette catégorie d’âge, fait passer au second plan l’importance du statut locatif et son corollaire, à savoir la transparence de la gestion. Qui en effet gère les résidences, c’est-à-dire à qui s’adresser en cas de mécontentement ou simplement de réclamations ? Comment se répartissent les compétences et les responsabilités entre le CCAS, la municipalité, l’office d’HLM ou la société de gestion ? Ces questions que les intéressés se posent ne trouvent pas de réponse claire auprès des institutions qui préfèrent les éluder.

Les critiques suscitées par le logement sont celles que l’on retrouve dans le logement social sous les formes d’un habitat spécifique ou d’un habitat social et semblent le résultat du rapport locataire-bailleur. La taille ou la surface du logement est ainsi évoquée dans la mesure où, réduite, elle empêche d’héberger un parent ne fût-ce que pour une nuit, et pèse sur la vie sociale. L’équipement est aussi critiqué : les sanitaires, les WC trop bas, l’absence de douche dans les salles de bains. L’entretien général qui nécessite une réhabilitation et une remise aux normes échappe ainsi complètement aux interventions des ménages et surtout aux femmes seules. Enfin, la gestion générale de la résidence est aussi mise en cause : que faire si un résident (80 ans et plus) est victime d’un malaise la nuit ? Le logement en soi allège les charges pour l’individu ou le couple, mais son fonctionnement peut encore être amélioré.

Trois femmes ont une mobilité réduite (l’une d’entre elles est handicapée à 80%), les deux autres n’ont plus de voiture. Si trois d’entre elles de 80 ans et plus habitent un foyer logement intra muros tandis que les deux autres habitent en périurbain, tous ces locataires sont placés dans une situation identique, obligés de disposer d’un moyen de transport, public ou privé : la différence liée à l’habitat ne joue pas sur les déplacements quotidiens qui sont de fait limités au quartier en ville et au bourg en périurbain.

En ville, les déplacements sont certes facilités par l’existence de transports urbains ; ceux-ci, étant absents à la campagne, sont ainsi tributaires des initiatives municipales qui passent par des services spécialisés et donc souvent limités dans leur champ d’action ou dans le nombre des bénéficiaires.

Trois conditions d’utilisation de l’espace ressortent de cette analyse : - Les couples vivant en maison en périurbain gèrent leur vie quotidienne d’une manière identique à ce qu’ils faisaient dans les années antérieures, à condition

56 Employés, commerçant faisant les marchés, personnel administratif moyen, ouvrier.

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d’avoir gardé la possibilité de se déplacer d’une manière autonome (vélo, voiture, transports en commun) ; - Etre propriétaire en périurbain et avoir une mobilité réduite rend la situation difficile compte tenu des services et des équipements à disposition des personnes de 65 ans et plus dans cet environnement ; - L’avantage d’habiter en ville dans un habitat spécifique oblige les personnes âgées de 65 ans et plus à une consommation de l’espace qui peut tirer partie de la richesse de services intra muros dans un rayon limité.

La capacité de se déplacer est ainsi apparue comme une donnée essentielle. L’amoindrissement de cette capacité apparaît comme un point de non-retour dans l’utilisation de l’espace et sous certaines conditions comme une rupture avec la période de vie antérieure. Il semble que l’indicateur de ce basculement entre vieillir dans la continuité de la période antérieure et entrer dans une phase qui voit se réduire le champ d’action et d’intérêt soit la capacité de se déplacer. Fonctionne-t-il comme un point de non-retour, comme une rupture avec la période antérieure ? Pour répondre à cette question, il faut considérer les politiques mises en œuvre par les collectivités locales et les pouvoirs publics.

3.2. Politiques vieillesse et initiatives locales

Quand les échanges traitent de la vie quotidienne, les thèmes de l’autonomie et de l’indépendance sont au centre des réflexions des 80 ans et plus. L’autonomie se manifeste par la capacité de gérer sa vie quotidienne sans intervention extérieure et donc de disposer des services de droit commun comme tous les autres citoyens ; l’indépendance traduit la possibilité de vivre selon ses préoccupations personnelles.

3.2.1. AUTONOMIE ET INDEPENDANCE ATTENDUES DES BENEFICIAIRES DES POLITIQUES VIEILLESSE

Le groupe de propriétaires encore motorisés, utilise à sa convenance l’équipement commercial local ou l’hypermarché : il dispose d’une marge de liberté plus grande que les autres et donc d’une autonomie plus forte. Considérant cette situation comme normale, ils la considèrent comme acquise. Les autres bénéficiaires des politiques d’habitat adaptées aux personnes plus âgées la revendiquent d’autant plus fortement qu’elle peut se réduire : « les personnes handicapées ne peuvent plus faire leurs courses, et mangent en bas au restaurant » ; de la même façon les difficultés de marcher et de se déplacer nécessitent l’appel à l’aide d’une tierce personne, aide ménagère, ou parente, fille, vivant à proximité. L’équipement commercial et sa facilité d’accès est donc un aspect qui montre toute son importance.

Pour les individus qui habitent en résidences, en béguinage ou dans des HLM adaptés, cette double revendication est très forte parce qu’elle constitue un champ où ils gardent leur statut d’adulte qu’ils ont connu leur vie durant : le choix qu’ils ont fait d’entrer en résidence les confronte à un règlement qui leur impose des règles et des contraintes : d’où leurs revendications. Ils veulent choisir de préparer leurs repas

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ou d’aller manger au restaurant de la résidence, d’aller faire leurs courses et de faire sa cuisine comme elles le faisaient chez elles, de trouver dans le quartier ou au centre du bourg les magasins de proximité. Cette revendication s’exprime selon la définition des rôles sociaux qui suivent la norme dominante : pour les femmes préparer le repas, faire les courses etc. en se conformant aux prescriptions habituelles des rôles sociaux, comme le signale une des personnes interrogées : « quand le couple est en bonne santé il y a une organisation complémentaire entre eux ». L’autonomie, pour le groupe de locataires, passe ainsi par l’utilisation de l’équipement de proximité plus fourni et diversifié en ville qu’au bourg. Il faut tenir compte, disent-ils, du mouvement général qui fait disparaître les petits commerces, de la part de plus en plus grande et de plus en plus visible des hypermarchés ou des supermarchés avec les conséquences que la situation de monopole local exerce sur les prix. Ces données leur échappent comme à tous les citoyens.

3.2.2. LES CONDITIONS DE VIE DES PERSONNES AGEES DE 65 ANS ET PLUS

Dans ces conditions, comment procèdent les personnes non motorisées ? Elles se font conduire par leur aide ménagère parfois même si cela n’est pas autorisé, ou font appel à un voisin, ou encore demandent au minibus du CCAS de les conduire. Pour les personnes à mobilité réduite, la question d’une aide pour circuler est un vrai problème dont la solution dépend des initiatives locales. Le jardin, les espaces verts immédiats sont les seules ressources évoquées.

Dans un autre domaine, l’animation de la vie sociale est une demande qui est souvent exprimée. Pour les unes (celles qui habitent un logement banalisé) les dimanches sont « mortels » parce qu’il n’y a pas assez d’animation en ville comme l’affirme l’une d’entre elles pour qui « le dimanche est le jour le plus triste ». Ceux qui vivent en ville se plaignent de la difficulté d’utiliser cinémas, théâtre, ou salles de concert, parce que les transports en commun cessent leur service vers 20 heures. Où sont les avantages culturels en milieu urbain ? Ne reste ainsi que les promenades le long de la plage pour les habitants de Calais quand le temps le permet. Quel avantage en périurbain ? Le bois de Phalempin, éloigné du bourg, n’a pas bonne réputation et les femmes n’en ont pas parlé.

Au foyer logement, le lieu de rencontre ferme après 17 heures 30, ce qui rend impossible sa fréquentation. L’indépendance qui s’affirme dans leur espace privé, le logement, les dissuade de recevoir voisins ou amis de peur de susciter « jalousies, racontars ou cancans ». De la même manière, les échanges avec le voisinage, les relations comme le porte-à-porte sont peu prisés. La raison semble provenir de pratiques existant en milieu populaire, de garder son quant-à-soi, hormis pour le cas de relations personnelles valorisées. Sinon l’habitus dominant hérité de la période antérieure qui se traduit par le chacun chez soi, renforce alors la solitude.

La vie sociale et familiale est également une caractéristique à relever : elle n’est pas favorisée par l’éloignement des enfants qui concerne la plupart des personnes rencontrées. Ces relations qui ne sont pas inexistantes, sont distantes et supposent la préparation d’un voyage, d’un déplacement de plusieurs semaines, utilisant des moyens de transports exceptionnels, TGV, avion, voiture encore. Ce sont des

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périodes de vacances qui sont en rupture avec le quotidien. Dans les situations rencontrées, les enfants qui sont proches aident rarement leurs parents.

La participation à la vie sociale prend deux formes idéales typiques : la vie associative qui est le fait d’un habitus acquis dans la période antérieure et que l’on a rencontré plus fréquemment chez les hommes que chez les femmes : cet habitus est celui du militant, du syndicalisme, de la participation sportive, athlétisme, vélo, chasse, etc. ou de l’activité solidaire. La seconde forme est celle des activités de loisirs qui est moins répandue que ce à quoi on pouvait s’attendre : elle suppose des choix, des modalités relationnelles, des investissements psychologiques. La vie relationnelle est aussi sous l’influence de l’âge : l’habitus militant-associatif résiste bien chez les adhérents, l’adhésion festive est parfois boudée parce que trop populaire.

3.2.3. L’INQUIETUDE DEVANT L’AVENIR

La question de l’avenir est sous le double signe de l’incertitude et de l’argent : les maisons de retraites sont chères, comment payer de telles sommes ? Sous-jacente, se pose la question de la santé, dont les participants rencontrés ont déjà l’expérience : la maladie pour les personnes handicapées, le suivi indispensable pour des affections chroniques et la mort pour le veuvage.

De cet examen des conditions de vie, quatre aspects ressortent :

- Les problèmes de circulation et de déplacement ont une double fonction : une fonction symptomatique, parce qu’il révèlent les modifications subjectives qu’affrontent les individus ; et une fonction institutionnelle de besoins auxquels les institutions ont seules la possibilité de répondre. Un suivi minutieux va donc déboucher sur des demandes et des services à mettre en place, à étendre ou à améliorer ;

- Les politiques existantes répondent aux besoins des personnes concernées mais sans créer des conditions optimales pour leur vie actuelle : sur le plan du logement, des loisirs ou de la vie sociale ;

- La question de l’aménagement des espaces publics qui permet de favoriser l’accès à des lieux dans la ville, les passages piétonniers ou protégés est à examiner ;

- Enfin la question de l’avenir et de l’inquiétude qu’il suscite semble un champ qu’il serait indispensable d’aborder selon des services spécifiques à mettre en place. Mais ceci nous amène à évoquer la dimension civique des pratiques sociales des personnes âgées de 65 ans et plus qui fait l’objet de la troisième partie.

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4. CITOYENNETE ET PARTICIPATION CIVIQUE : UNE ZONE A DEFRICHER

Sous cette rubrique deux questions sont abordées : la première concerne l’absence ou les insuffisances d’attention apportée à la reconnaissance des personnes âgées de 65 ans et plus en leur qualité de citoyens. La seconde question présentera une initiative observée dans une commune du nord, la constitution d’un Conseil des sages.

4.1. La participation ne disparaît pas quand l’âge augmente

La participation à la vie de la cité recouvre plusieurs formes dans une démocratie. En ce qui concerne les personnes âgées de 65 ans et plus, les élus de quelque niveau qu’ils se situent (local, régional ou national) n’ont garde de l’oublier lors des échéances électorales. Mais cette considération qui reste dans la logique démocratique ne peut se réduire à considérer cette classe d’âge comme un public captif. Il ne l’est pas et la prestance que gardent les seniors est là pour nous en convaincre. Cependant, la sous-information et l’impossibilité dans laquelle on les tient en matière de droits, de participation et de concertation tend à réduire leur participation civique, alors qu’il souhaiteraient pouvoir donner leur avis et manifester leurs questions, voire leurs critiques comme tout citoyen éclairé. Les formes prises par l’application des politiques publiques vont parfois à l’encontre de cette exigence en matière de droits, de logement, d’activité.

La participation et l’expression des 65 ans et plus demeurent aujourd’hui peu spontanées : certaines personnes de ce groupe d’âge, semblent déprécier leur opinion au point de ne pas accorder d’intérêt à son expression et donc, par un curieux phénomène d’autocensure, de ne pas l’exposer, laissant le plus souvent le soin de le faire à des porte-parole, élus municipaux, responsables associatifs, militants syndicaux. Ainsi, dans le cadre du focus group organisé à Calais, les femmes ont demandé à un homme de parler le premier sous le prétexte qu’il était un ancien syndicaliste, qui plus est représentant des locataires au Conseil d’administration d’un office d’HLM. Ailleurs, dans des focus group à Phalempin, ce sont des militants associatifs, d’anciens élus municipaux qui ont participé à ces réunions : leur présence rentrait dans ce qu’ils considéraient devoir faire, alors que des personnes se sentaient moins concernées. Ce phénomène de porte-parole est affirmé dans les conditions de prises de paroles pour les personnes de cet âge. Mais revenons à notre exemple.

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4.2. Le Conseil des Sages de Grande-Synthe

ORIGINE DU CONSEIL DES SAGES - Une volonté politique … : en mars 1994, Monsieur Demarthe, maire (PS) de Grande-Synthe de 1993 à 2001, s’inspire du Conseil des Sages mis en place à Saint Coulitz (dans le Finistère) par le maire Kofi Yamgnane57, « une personnalité pour qui Monsieur Demarthe avait beaucoup d’admiration » pour créer un Conseil des Sages à Grande-Synthe. Monsieur Demarthe souhaite ainsi « faire appel à la compétence et à l’expérience des anciens de manière à intégrer leurs remarques dans les prises de décision58 ». - … qui perdure dans le temps en dépit des changements politiques : l’élection municipale de 2001 qui a vu l’arrivée de Monsieur Damien Carême (DVG) à la tête de la municipalité n’a en effet pas remis en cause l’existence du Conseil des Sages même si son utilité a dans un premier temps été réinterrogée : « Monsieur Carême était jeune et ne voyait pas trop à quoi pouvait servir un Conseil des Sages, donc il a voulu nous rencontrer, il a réfléchi et il a vu qu’en réalité c’était pas si mal et jamais plus nous n’avons eu de problème ».

OBJECTIFS - Etre un relais entre la population et la municipalité : « Faire remonter les

demandes de n’importe quel citoyen », « le Conseil de Sages, on ne reste pas uniquement cantonné aux personnes âgées, on s’ouvre à toute la population »

- « Donner des avis sur divers projets et dossiers élaborés par la Ville de Grande-Synthe ainsi que sur les évènements de la vie communale59 » - Etre une force de propositions : « formuler des propositions et vœux dans le respect de l’objet statutaire60 » - Valoriser l’image de Grande-Synthe : « à l’extérieur, chez les dunkerquois par exemple, une réputation d’insécurité s’attache à Grande-Synthe, mais moi j’aime défendre ma ville. Et comme notre Conseil est actif et vivant, on parle de nous en bien dans les communes voisines »

57 Kofi Yamgnane, ancien Ministre de l’Intégration a mis en place le premier Conseil des Sages en 1989. Au Togo, d’où il est originaire, les anciens se réunissent sous l’arbre à palabres dès qu’une décision importante doit être prise. Kofi Yamgnane a ainsi transposé cette tradition dans sa commune. Il existe aujourd’hui plus de soixante Conseils de ce type en France. Aucune règle n’est imposée : les Sages peuvent ainsi s’appeler « aînés » ou « anciens », de même le mode de désignation et la durée du mandat varient selon les communes. 58 Discours de monsieur Demarthe lors du Conseil municipal du 8 décembre 1993. 59 Article 2 des statuts de l’association des Sages de la Ville de Grande-Synthe. 60 Article 2 des statuts de l’association des Sages de la Ville de Grande-Synthe.

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COMPOSITION - Association déclarée régie par la loi de 1901, le Conseil des Sages est

composé de 35 membres élus par leurs pairs pour une durée six ans et renouvelés par tiers tous les deux ans ; les sortants restant indéfiniment rééligibles. Trois conditions sont à remplir pour soumettre sa candidature au vote des pairs : avoir plus de 60 ans, résider dans la commune depuis au moins cinq ans, ne remplir aucune fonction politique au sein de la Municipalité : « la qualité de membre de l’association est incompatible avec celle de membre du Conseil municipal61 », « nous ne sommes liés à aucun parti politique, nous ne souhaitons pas faire de politique active ! ». Compte tenu de l’engouement des personnes âgées pour participer au Conseil des Sages et de la nécessité de « trouver du sang neuf », 12 personnes ont été cooptées.

- Profil sociodémographique des Sages : La répartition par âge des Sages est la suivante : 14 personnes âgées de 60-70 ans, 19 personnes âgées de 70-80 ans et 2 personnes âgées de plus de 80 ans. Les hommes sont surreprésentés : ils sont au nombre de 28 versus 7 femmes. Les hommes vivent le plus souvent en couple, les femmes quant à elles vivent majoritairement seules (une seule femme vit encore en couple). L’ensemble des Sages est membre d’autres associations (communales ou non). Seuls deux membres sont issus de l’immigration : « nous sommes ouverts à tous mais il y a parfois la barrière de la langue ».

FINANCEMENT - Les cotisations des adhérents (2€/an). - Une subvention de la Municipalité qui met également à la disposition du

Conseil des Sages un bureau au sein de la Maison des associations.

FONCTIONNEMENT - Les 35 membres se répartissent dans cinq ateliers de réflexion qui se réunissent au moins une fois par mois. La composition de ces groupes repose sur le volontariat, « des personnes font parfois partie de plusieurs ateliers, cela n’est pas un problème s’ils se sentent l’âme de faire plusieurs choses » - Les cinq ateliers thématiques sont les suivants : - Urbanisme et Environnement : atelier qui suscite le plus d’engouement de la part des Sages (13 participants) : « parfois, l’urbanisme, on est obligé d’en pousser un peu dehors, parce que là il y a trop de demandes, c’est fort demandé ! », « les gens se sentent fortement concernés par ces problèmes de voirie et d’environnement »

61 Article 4 des statuts de l’association des Sages de la Ville de Grande-Synthe.

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- Fonction sociale dans la Ville : 10 participants - Intergénération, Sports, Loisirs : 10 participants - Communication : 9 participants - Santé : atelier qui recense le moins de participants (8 participants) : « la santé, c’est pas gai, on assiste par exemple à des réunions sur la maltraitance des personnes âgées, tout ça c’est pas gai ! » - Pour se tenir informer de la vie de la commune et alimenter ainsi les réflexions du Conseil, certains Sages siègent dans les Conseils d’administration des grandes associations de Grande-Synthe.

COMPETENCES - Se concerter : dans le cadre des ateliers de réflexion, les membres du Conseil des Sages échangent leur point de vue sur les thèmes de la vie quotidienne (5 thèmes). - Informer : le Conseil des Sages a un rôle d’information non seulement auprès de la population âgée mais également auprès de la Municipalité

Auprès de la population âgée : rédaction du journal semestriel ″La Chouette″ diffusé dans les principaux équipements publics de la ville, site internet, permanences sur la maladie d’Alzheimer, organisation de forums. Auprès de la Municipalité, et plus spécialement auprès des services techniques municipaux : dysfonctionnements urbains repérés (dégradation de voirie, trottoirs surélevés…). - Animer : organisation de randonnées pédestres et d’ateliers sportifs intergénérationnels (tennis de table, tennis), signalons toutefois que « l’intergénérationnel sur le plan sportif c’est un peu maigre : on fait du tennis de table, de la marche mais les adhérents il n’y en a pas beaucoup : les jeunes restent entre eux et les adultes sont encore moins accessibles ».

- Accompagner les jeunes : tutorat dans les écoles primaires et le collège de la ville : « au départ, on a eu une opposition des professeurs qui ont dit "oui, on a supprimé les emplois jeunes, ce n’est pas pour prendre des vieux maintenant" mais aujourd’hui le tutorat, l’aide aux devoirs fonctionnent bien ». Un projet de partenariat avec la Maison de l’Initiative est en cours de réflexion et porte sur l’accompagnement professionnel de jeunes synthois à la recherche d’un emploi ; les Sages auraient pour mission d’assurer un suivi des jeunes en entreprise et de leur faire partager leur expérience. « On sent encore des réticences de certains professionnels à faire appel à nous ».

- Proposer : une fois par an, le Conseil des Sages rencontre le Maire pour débattre avec lui des projets en cours et lui formuler des propositions. Cet avis reste consultatif : « nous n’avons pas de pouvoir de décision » néanmoins « s’il avait donné un avis favorable à quelque chose et que dans les faits, il n’y a rien eu de concret, on lui rappelle ». Parmi les propositions émises par le Conseil des Sages et concrétisées, l’on peut citer la réalisation de six circuits pédestres accessibles à tous et qui permettent une découverte des différents quartiers de la ville. Ce projet s’est appuyé sur des marches exploratoires organisées par le Conseil des Sages en compagnie des

69

services techniques de la Ville, de l’Association des Paralysés de France et d’une association de malvoyants, ce qui a permis de procéder à une lecture collective des dysfonctionnements et de dresser un diagnostic partagé des améliorations à apporter pour rendre ces circuits accessibles à tous.

LES PROJETS - Maintenir la dynamique du Conseil des Sages. - Projet de partenariat avec la Maison de l’Initiative pour accompagner les jeunes synthois dans leur insertion professionnelle.

CONTACT : Mme Ledeux, Présidente du Conseil des Sages

EVALUATION :

• Une volonté affirmée des Sages de participer à la vie de la Cité Le sentiment d’appartenance à la commune est fortement présent chez les Sages et suscite une réelle volonté de concourir à la dynamisation de la vie de la commune. Cette forme de participation à la vie communale permet en outre aux Sages d’éviter l’isolement et l’ennui, de s’enrichir mais également et surtout d’être acteur de la ville et par là même d’« être des citoyens à part entière et non pas des personnes à part ! ».

• Une expression non corporatiste Est-il préférable de mettre en place des instances spécifiques, réservées aux personnes âgées dans notre cas, ou des instances plurielles ?. Cette question est récurrente dans le débat autour de la démocratie participative. Dans le cas présent, le Conseil des Sages semble éviter la dérive la plus souvent observée dans les instances consultatives spécifiques : loin de se cantonner aux seules questions de la vieillesse, le Conseil des Sages a une approche résolument intergénérationnelle (accompagnement des jeunes dans leur insertion professionnelle entre autres).

• Un partenariat avec la Municipalité qui demeure limité et fragile Si les changements politiques à la tête de la Municipalité n’ont pas remis en cause l’existence du Conseil des Sages, son rôle, voire son utilité, semblent s’être amoindris si l’on considère le nombre de rencontres avec la Municipalité (une rencontre par an, deux à trois rencontres auparavant).

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CONCLUSION

Les pratiques urbaines des personnes âgées de 60 ans et plus s’organisent sur deux champs. Le premier est assez bien maîtrisé par les 60-79 ans dans la continuité de la vie avant la retraite avec des aménagements conjoncturels liées aux modifications du mode de vie général ou du fait de l’évolution de la santé ; ce premier champ se place sous le signe de la maîtrise, de l’indépendance et de l’autonomie. Le second champ est celui du changement dont les intéressés anticipent plus ou moins bien la venue, qui souvent se manifeste par une réduction de leur autonomie ou de leur marge de manœuvre et qui caractérise les plus de 80 ans ; il se place sous le signe de la contrainte à leur autonomie voire, à l’extrême, sous le signe de la dépendance. Ces changements surviennent à des moments variables : l’entrée en établissement par exemple s’effectue vers l’âge de 80 ans62 : il dépend donc fortement des individus en relation avec leur statut social. Nous avons mis en évidence l’indicateur du changement d’un champ à l’autre par la réduction de la motricité ou de la capacité de se déplacer.

Les formes d’habitat, propriétaire en périurbain ou locataire au bourg ou dans la ville centre (associées au statut social CSP) exercent une influence sur l’autonomie des personnes et sur leurs attentes en ce qui concerne leur indépendance relative. Dans toute la mesure du possible ils trouvent dans leurs propres capacités les moyens d’affirmer leur volonté de vivre cette autonomie. Quand ils ne le peuvent pas, ils recherchent auprès des institutions les moyens de garder indépendance et liberté de décision : la question de la relégation est apparue sous des formes voilées. Leur vie sociale est influencée par le capital social ou relationnel. Les collectivités locales peuvent améliorer facilement la vie sociale pour ces personnes, sans vraiment le réaliser. Il y a donc une insatisfaction vis-à-vis de ces collectivités.

Le domaine le moins exploré et le plus insatisfaisant concerne la participation civique des personnes âgées de 60 ans et plus. L’on a relevé deux obstacles : le premier est un phénomène d’autocensure, le second la pratique des porte-parole, comme si la vieillesse se traduisait par un affaiblissement des capacités civiques de l’individu. Sur le plan du fonctionnement sociopolitique local, des initiatives existent : le Conseil des sages à Grande-Synthe évoqué dans ce chapitre et l’expérience de Pulnoy qui sera décrite chapitre 5.

62 WALLEZ P Proximité, vie associative et capital social : le cas de l’hébergement collectif des personnes âgées p89-100 in Mondes associatifs et modalités de construction du lien social Pensée plurielle 2004/1 N°7

CHAPITRE 4

LES CONDITIONS DE LOGEMENTS

DES PERSONNES DE 60 ANS ET PLUS

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Ce chapitre s’attache à analyser les conditions de logement des personnes âgées. Dans un premier temps, il fournit des informations sur l'état du parc immobilier que les ménages ordinaires (ménages résidant dans un logement autonome) occupent ainsi que sur les principales caractéristiques du cadre de vie. Dans un deuxième temps, il s’attache à décrire les trajectoires résidentielles de la population âgée. Ce chapitre s’appuie sur l’exploitation de l’enquête nationale logement (ENL) conduite en 2001 sur un échantillon national de 47 000 logements, représentatifs du stock de logements en France à l’époque. Environ 3,4% (soit 1 105 ménages) sont des ménages du Nord-Pas-de-Calais dont la personne de référence a plus de 60 ans.

1. LES PERSONNES AGEES A DOMICILE

1.1. Les personnes de plus de 60 ans sont massivement propriétaires

Lors du recensement général de la population, la répartition par statut d’occupation de la population âgée de plus de 60 ans est la suivante : 64,5% des personnes de plus de 60 ans sont des propriétaires, 27,4% sont des locataires et 8,1% sont des personnes logées gratuitement.

Graphique 6 : Evolution entre 1990 et 1999 de la répartition par statut d’occupation de la population âgée du Nord-Pas-de-Calais

9,3 8,1

29,4 27,4

61,3 64,5

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

1990 1999

PropriétairesLocataires Logés gratuit

Source : INSEE, RGP 1990 & 1999

Comme l’atteste le graphique ci-dessus, la propriété est très largement développée chez la population régionale de plus de 60 ans. En 2003, selon la source Filocom, 67% des personnes âgées de plus de 60 ans (hors hébergées en institution) sont propriétaires (soit 334 481 personnes). Cette proportion demeure nettement plus élevée que celle observée pour l’ensemble des classes d’âge (57%).

La part des personnes âgées propriétaires a considérablement augmenté au cours de ces dix dernières années (+ 5,7 points entre 1990 et 2003). Lors du recensement général de la population en 1990, 61,3% des plus de 60 ans sont propriétaires. En 1999, la proportion est passée à 64,5% et, en 2003, à 67%.

74

Un certain nombre de facteurs ont contribué à la croissance de la part des propriétaires chez les plus de 60 ans. La hausse du niveau de vie, le développement des services d’aide ménagère et des soins infirmiers à domicile ainsi que l’augmentation de l’espérance de vie sans incapacité63 ont en effet permis à un nombre croissant des propriétaires de plus de 60 ans de se maintenir dans leur logement.

A l’échelle infrarégionale, l’on constate des différences quant au poids des personnes âgées parmi les propriétaires. Ainsi, la population âgée constitue plus de 40% des propriétaires dans les territoires suivants : les Communautés d’agglomération de Cambrai, de Maubeuge Val de Sambre, de la Porte du Hainaut, de Valenciennes Métropole, du Boulonnais et du Douaisis ainsi que la Communauté urbaine de Arras. De même, la population âgée représente plus de 75% des propriétaires dans les zones touristiques, les zones périurbaines résidentielles et mixtes, les poches rurales et les banlieues résidentielles.

De moins en moins de propriétaires lorsqu’on avance en âge

La proportion de propriétaires augmente avec l'âge de la personne de référence mais décline après 70 ans tandis qu'augmente la proportion de locataires et de logés gratuitement. Ainsi, en 1999, alors que 68,1% des personnes âgées entre 60 et 74 ans sont propriétaires, cette part diminue à 64,8% chez les personnes âgées de plus de 75 ans. A contrario, tandis que 25% des 60-74 ans sont locataires, cette proportion est de 28,1% chez les 75 ans et plus.

Cette évolution résulte à la fois, selon Christelle Minodier et Christelle Rieg64, d'un effet d'âge et d'un effet de génération. À sa première installation, le ménage est jeune et le plus fréquemment locataire ; il cherche ensuite à devenir propriétaire et en fin de cycle de vie, il transmet son bien immobilier ou le vend. L'effet génération est, quant à lui, lié aux comportements collectifs de chacune des cohortes dictés notamment par le contexte économique et social.

63 Deux estimations de l’espérance de vie sans incapacité ont été effectuées à partir des données des enquêtes décennales sur la santé et les soins médicaux de 1980 et 1991. Elles ont fourni une réponse optimiste en montrant sur dix ans une diminution non seulement relative mais également absolue de la durée moyenne de vie vécue sans incapacité. L’espérance de vie sans incapacité a ainsi, durant la période 1981-1991, progressé de 3 ans pour les hommes et de 2,6 ans pour les femmes, contre 2,5 ans pour l’espérance de vie totale. (DREES, Les personnes âgées dans les années 90 : perspectives démographiques, santé et mode d’accueil in Etudes et Résultats, n°40 – Novembre 1999) 64 Minodier C. & Rieg C., Le patrimoine immobilier des retraités in INSEE Première, n°984 – Septembre 2004.

75

Graphique 7 : Répartition des 60-74 ans et des 75 ans et plus par statut d’occupation en 1999 à l’échelle régionale

68,164,8

2528,1

6,9 7,1

0

10

20

30

40

50

60

70

80

60-74 75 ans et plus

%

PropriétairesLocatairesLogés gratuitement

Source : INSEE, RGP 1999

Une répartition homogène des locataires âgés par secteur locatif

En 1999, plus d’un tiers des personnes de plus de 60 ans ne sont pas propriétaires : 27,4% sont des locataires et 8,1% sont des personnes logées gratuitement.

La répartition des locataires âgés demeure équilibrée entre le secteur locatif privé et le secteur locatif social : en 2003, selon la source Filocom, 52,1% des locataires de plus de 60 ans (soit 80 625 personnes) sont logés dans le secteur locatif social et 47,9% dans le secteur locatif privé (soit 73 991 personnes).

Le secteur locatif social régional accueille davantage de personnes âgées que le secteur locatif social à l’échelle nationale. En 2003, selon l’enquête d’occupation du parc social, 24,1% des titulaires d’un contrat de location d’un logement géré par un organisme HLM ou une Société d’économie mixte (SEM) sont âgés de plus de 65 ans (20,6% à l’échelle nationale) et 24,1% des occupants des logements gérés par un organisme HLM ou une SEM ont plus de 65 ans (20,6% à l’échelle nationale). Signalons enfin que la part des personnes âgées de plus de 65 ans dans le secteur locatif social régional a légèrement diminué entre 1999 et 2003 (-1,7 point).

Tableau 7 : Age du titulaire du contrat de location des logements gérés par les organismes HLM et les SEM

Moins de 30 ans 30-64 ans > 65 ans RGP 1999 (%) OPS 2003 (%) RGP 1999 (%) OPS 2003 (%) RGP 1999 (%) OPS 2003 (%)Nord-Pas-de-Calais 16,5 11,6 62,7 59,4 25,8 24,1

Nord 12,5 16,4 62,8 58,6 24,7 25,1Pas-de-Calais 9,8 16,8 62,5 61,2 27,7 22,1

France métropolitaine 11,4 13,8 72 73,4 26,51 20,6Source : CRESGE, Rapport présentant les résultats de l’enquête d’occupation du parc social 2003, mars 2004.

76

Tableau 8 : Age des occupants des logements gérés par les organismes HLM et les SEM Moins de 30 ans 30-64 ans > 65 ans RGP 1999 (%) OPS 2003 (%) RGP 1999 (%) OPS 2003 (%) RGP 1999 (%) OPS 2003 (%)Nord-Pas-de-Calais 11,6 16,5 62,6 59,4 25,7 24,1

Nord 12,5 16,4 62,7 58,6 24,7 25,1Pas-de-Calais 9,8 16,8 62,5 61,2 27,7 22,1

France métropolitaine 11,4 13,8 62,1 65,6 26,51 20,6Source : CRESGE, Rapport présentant les résultats de l’enquête d’occupation du parc social 2003, mars 2004.

La très grande majorité des personnes âgées réside en maison individuelle

La part des personnes âgées résidant en maison individuelle dans la région reste très largement supérieure à celle observée à l’échelle nationale. Lors de l’ENL de 2001, 74,8% des 60-74 ans résident dans des maisons individuelles versus 68,7% à l’échelle nationale. Cette caractéristique s’explique par l’importance de l’habitat individuel dans le parc privé65 et le parc locatif social de la région66.

Si une très large majorité des personnes âgées de plus de 60 ans vit en maison individuelle, cette proportion diminue néanmoins régulièrement avec l’âge. Ainsi, lors de l’ENL de 2001, tandis que 74,8% des 60-74 ans occupent des maisons individuelles, ce taux est de 71,4% lorsqu'il s'agit des personnes de plus de 80 ans. A contrario, la part en logement collectif augmente avec l'âge. Cette situation peut être corrélée au statut d’occupation des personnes de plus de 80 ans, celles-ci étant plus nombreuses que leurs cadets à être locataires. Or, les logements locatifs restent majoritairement des logements collectifs.

1.2. Un phénomène de sous-occupation qui tend à s’accroître avec l’âge

L’espace disponible par personne augmente au fur et à mesure du départ des enfants et ne diminue pas en fin de vie du fait du départ des enfants du domicile familial et le coût que peut représenter un grand logement. Ainsi, les situations de sous-peuplement67 sont plus fréquentes chez les personnes âgées que dans le reste

65 Au RGP de 1999, 73,7% des résidences principales de la région sont des résidences principales de type maison individuelle contre 56,8% à l’échelle nationale. 66 En 2003, selon l’enquête du parc locatif social, 44% des logements du secteur locatif social de la région sont des logements de type maison individuelle contre 13% à l’échelle nationale.

67 Mode de calcul de l’indice de peuplement (INSEE) : 1. Calcul du nombre de pièces nécessaires au ménage (MNOI) de façon normative en comptant : - une pièce de séjour pour le ménage, - une pièce pour chaque personne de référence d'une famille, - une pièce pour les personnes hors famille non célibataires ou les célibataires de 19 ans et plus, - et pour les célibataires de moins de 19 ans :

o une pièce pour deux enfants s'ils sont de même sexe ou ont moins de 7 ans, o sinon, une pièce par enfant.

2. Codification de l’indice de peuplement :

77

de la population. En 1999, alors que pour l’ensemble de la population régionale, le nombre moyen de personnes par pièce est de 0,62 personne, il n’était que de 0,45 pour les personnes de 60 -74 ans et de 0,39 pour les personnes âgées de 75 ans et plus. Précisons ici qu’en 1999, 67,9% des personnes âgées de plus de 60 ans dans la région occupaient un logement comportant au moins quatre pièces. Rappelons en outre que ces ménages sont constitués pour une large part de personnes seules, ce qui leur fait disposer ainsi d'un espace de vie très satisfaisant.

Cette situation de sous-peuplement est également observable lors de l’ENL 2001, puisque 83,8% de la population de plus de 60 ans est concernée par une situation de sous-peuplement.

La sous-occupation par des ménages âgés affecte particulièrement le parc social, alors que les logements spacieux y sont aussi en nombre insuffisant. La moitié des personnes âgées louant en HLM sous-occupent leur logement (elles disposent d’au moins une pièce en trop au sens de l’INSEE)68. Les bailleurs sociaux souhaiteraient les faire déménager vers des logements plus petits afin d’optimiser la gestion de leur parc. Cependant, aux réticences de ce public à quitter son domicile peuvent s’ajouter les entraves liées à la réglementation applicable aux bailleurs sociaux. En cas de déménagement au sein du parc HLM, le locataire est en effet contraint de se présenter à nouveau devant la commission d’attribution, sans disposer d’un droit de priorité, sauf pour des logements adaptés. Cette situation reste toutefois à nuancer et dépend très fortement de la politique de mutation mise en place par les bailleurs, ceux-ci pouvant choisir de favoriser la mutation interne des personnes âgées, et permettre ainsi une meilleure occupation de leur parc de logements. Enfin, il convient de signaler que les personnes âgées, souvent entrées de longue date dans le parc social, paient des loyers relativement faibles pour de grands appartements. Un déménagement vers un logement plus petit mais plus récent peut donc engendrer une hausse du loyer que la personne âgée refusera.

1.3. Un confort sanitaire encore insuffisant

Lors de l’ENL de 2001, 22,6% de la population régionale âgée de plus de 60 ans (12,9% à l’échelle nationale) vit dans des logements sans le tout confort sanitaire, c’est-à-dire sans eau ou seulement avec l’eau courante, sans WC intérieurs ou sans installation sanitaire. Cet inconfort s’explique, en grande partie, par l’ancienneté des logements dans lesquels vivent les plus de 60 ans. La grande majorité des logements sans confort sanitaire sont antérieurs à 1948, et les personnes âgées occupent plus souvent ces logements. En 1999, 45,4% de la population âgée de plus de 60 ans réside dans un logement construit avant 1948.

Relation entre le nombre de pièces d'habitation - y compris la cuisine de 12 m2 et plus et les pièces annexes utilisées par le titulaire du logement, en dehors des pièces professionnelles – (HNPH1) et le nombre de pièces nécessaires au ménage (MNOI). HNPH1 > MNOI + 2 = Sous-peuplement très accentué HNPH1 = MNOI + 2 = Sous-peuplement prononcé HNPH1 = MNOI + 1 = Sous-peuplement modéré HNPH1 = MNOI = Peuplement normal HNPH1 = MNOI - 1 = Surpeuplement modéré HNPH1 < MNOI - 1 = Surpeuplement accentué 68 Ecole nationale d’administration, Séminaire relatif au Logement, Le logement des personnes âgées, Groupe n°14, Juillet 2005, 95p.

78

Au sein de la population de plus de 60 ans, l’on constate également que la proportion de personnes vivant sans le confort minimum s’élève avec l’âge. Ainsi, 21,4% des 60-74 ans sont dans ce cas contre 28% pour les personnes de 80 ans et plus. Cette situation s’explique par le fait qu’à chaque âge, les générations les plus récentes occupent moins souvent des logements sans confort sanitaire que les générations qui les ont précédées.

Si le confort sanitaire de certains logements occupés par des personnes de plus de 60 ans s’avère encore aujourd’hui insuffisant, le confort en termes d’équipements reste aussi, quant à lui, à améliorer. 40,5% des personnes de plus de 60 ans interviewées lors de l’ENL 2001 résident dans un immeuble ne disposant pas d’un ascenseur.

1.4. Une population âgée très largement satisfaite de son cadre de vie

Si 76,3% des personnes de plus de 60 ans ont qualifié de satisfaisantes, voire très satisfaisantes, leurs conditions de logement lors de l’ENL 2001, elles ont encore été plus nombreuses à déclarer être satisfaites de leur cadre de vie. En effet, lors de cette même enquête, 94,4% des personnes interviewées ont déclaré se plaire dans leur quartier.

Une accessibilité par les transports en commun jugée suffisante

Une très large majorité des personnes de plus de 60 ans semble porter un regard positif sur les conditions d’accessibilité en transport en commun de leur quartier. Lors de l’ENL 2001, ils sont 64,8% à les qualifier de "bonnes" tandis que "seulement" 10,8% les trouvent "médiocres". Concernant l’accessibilité, il convient de préciser ici qu’une part non négligeable des ménages composés d’une personne d’au moins 60 ans n’est pas motorisée. En 1999, 41,3% de ces ménages ne disposent d’aucune voiture, ce taux s’élève à 60,9% chez les ménages composés d’une personne âgée d’au moins 75 ans.

Un sentiment d’insécurité relativement peu développé

Le sentiment d’insécurité apparaît relativement peu répandu chez les plus de 60 ans. Lors de l’ENL de 2001, ils sont 61,7% à déclarer que la sécurité de leur quartier est "bonne" et seulement 8,8% à la qualifier de "médiocre". L’on peut tenter d’expliquer ce constat par la permanence du cadre vie des personnes âgées ; rappelons que lors de l’ENL, 71,1% des plus de 60 ans occupent leur logement depuis plus de douze ans.

Ce faible sentiment d’insécurité est également perceptible dans le faible nombre d’équipements de sécurité du logement. 63,7% des plus de 60 ans interviewés lors de l’ENL ne disposent d’aucun équipement de sécurité pour leurs logements ou pour se protéger elles-mêmes et 32,3% d’un seul équipement de sécurité.

79

2. LES TRAJECTOIRES RESIDENTIELLES DES PLUS DE 60 ANS

2.1. Une faible mobilité résidentielle

Une très large majorité de la population âgée régionale fait le choix résidentiel de maintenir son statut d’occupation. Lors de l’ENL69, 94,2% des plus de 60 ans qui sont propriétaires en 2001 l’étaient également en 1997. De même, 88,6% des plus de 60 ans qui sont locataires occupaient déjà ce statut en 1997. Un léger mouvement de la propriété vers la location peut être observé : 5,6% des personnes de plus de 60 ans propriétaires en 1997 sont devenues locataires en 2001. L’accession à la propriété s’avère, quant à elle, quasi inexistante à partir de 60 ans : 1,6% des personnes propriétaires en 1997 et 1,1% des personnes locataires en 1997 occupent le statut d’accédant à la propriété en 2001. Les contraintes d’accès à l’emprunt après 60 ans peuvent expliquer, en partie, ce dernier constat. Ces contraintes limitent en effet la capacité des plus de 60 ans à acquérir des biens immobiliers, dans la mesure où il est alors difficile de souscrire l’assurance décès invalidité imposée par les établissements de crédit.

Le souhait de déménagement diminue avec l’âge

Aux âges avancés de la vie, les déménagements sont moins nombreux. En 1999, dans le Nord-Pas-de-Calais, 80,9% des personnes de 60-74 ans et 79,1% des 75 ans et plus occupent le même logement qu’en 1990. De même, en 1999, 89,9% des 60-74 ans et 88,7% des 75 ans et plus résident dans la même commune qu’en 1990 (tendance également observable lors du recensement de 199070). En effet, plus l’âge augmente, plus le désir de changer de logement diminue. Lors de l’ENL 2001, seuls 10% des personnes de plus de 60 ans interviewées ont émis le souhait de changer de logement, et ce taux chute à 4,8% chez les plus de 80 ans. Plusieurs facteurs expliquent cette faible mobilité. Elle est tout d’abord liée au taux élevé de personnes âgées propriétaires, puisque la propriété est un frein à la mobilité résidentielle. De plus, les retraités souhaitent rester dans leur quartier et conserver les relations sociales nouées autour de leur lieu de vie. Ils souhaitent enfin demeurer dans le logement qu’ils occupent parfois depuis plusieurs décennies. Signalons, à cet égard, que lors de l’ENL, 71,1% des plus de 60 ans occupent leur logement depuis plus de douze ans.

La recherche d’un logement plus petit semble constituer un facteur explicatif majeur dans le désir de déménager. En effet, 68,2% des personnes de plus de 60 ans qui ont déclaré désirer changer de logement occupent une maison individuelle ; or ce type de logement offre en moyenne une superficie habitable plus importante que les logements collectifs. Ce choix d’un logement plus petit peut résulter de différents motifs : les enfants ont quitté le domicile familial, ces personnes recherchent la compagnie de personnes de leur âge, elles doivent désormais composer avec un

69 La répartition par statut d’occupation de la population régionale de plus de 60 ans lors de l’ENL 2001 est la suivante : 54,4% sont des propriétaires, 28,5% sont des locataires et 3,1% sont des accédants à la propriété. 70 En 1990, dans le Nord-Pas-de-Calais, 79,6% des personnes de 60-74 ans et 78,2% des 75 ans et plus occupaient le même logement qu’en 1982. De même, 89,9% des 60-74 ans et 88,8% des 75 ans et plus résidaient dans la même commune qu’en 1982.

80

revenu fixe ou encore elles s’inquiètent de leur état de santé. L’attachement à la commune de résidence reste fort même chez les personnes souhaitant déménager : lors de l’ENL, 58,4% des personnes qui étaient dans ce cas envisagent un déménagement à l’intérieur de la commune.

2.2. Une tendance au vieillissement sur place dans les zones périphériques

Les discours sur la mobilité résidentielle future des personnes de 60 ans et plus se fondent aujourd’hui principalement sur deux hypothèses : l’une envisageant un retour des personnes de 60 ans et plus dans le centre des agglomérations, la seconde sur une stabilité résidentielle des personnes de 60 ans et plus. Si les nombreux écrits sur le vieillissement de la population n’apportent aucune confirmation évidente à l’hypothèse d’un retour au centre des villes massif ou systématique de la part des seniors qui ont investi, et en quelque sorte créé le périurbain dans les années 70, les chiffres du recensement général de la population laisseraient entendre que le vieillissement sur place dans les communes périphériques est l’hypothèse la plus vraisemblable. En effet, lors du RGP de 1999, 81,9% des personnes résidant dans le périurbain résidentiel et 83,9% de ceux résidant dans le périurbain mixte en 1999 occupent le même logement en 1990.

Tableau 9 : Migrations résidentielles de la population régionale de plus de 60 ans entre 1990 et 1999

Territoires

Pop 60-74 rés ds

même log en 1999

Pop 75 ans et + rés ds même log en 1999

Pop 60 ans et + rés ds même log en 1999

Part 60-74 rés ds

même log en 1999

Part 75 et + rés

ds même log en 1999

Part 60 et + rés

ds même log en 1999

Centre 53 880 32 464 86 344 74,5 74,7 74,6Pôle urbain 38 606 21 003 59 609 75,7 74,3 75,2Pôle secondaire 32 016 16 130 48 146 81,0 75,8 79,2

Villes - centres

Pôle rural 1 377 917 2 294 70,7 63,2 67,5Banlieue résidentielle 10 497 5 210 15 707 80,0 76,0 78,6Banlieue mixte 57 760 26 018 83 778 81,3 77,3 80,0Banlieue industrielle 40 899 18 264 59 163 83,3 81,9 82,9

Zones périphériques

denses

Conurbation indus 46 074 20 039 66 113 85,1 82,9 84,4Périurbain résidentiel 3 596 1 276 4 872 83,1 78,8 81,9Périurbain mixte 73 185 33 095 106 280 84,3 83,0 83,9

Zones rurales aire attraction

agglo Poche rurale 8 009 4 065 12 074 84,2 87,9 85,4Ruralo_touristique 1 000 482 1 482 82,4 78,0 80,9Zone touristique 1 952 652 1 604 59,8 68,8 63,1

Zones touristiques

Zone touristique 2 2 126 1 071 3 197 74,9 83,0 77,4 Hors bassin d'habitat 32 931 17 761 50 692 83,1 87,1 84,5

Région 402 908 198 447 601 355 80,9 79,1 80,3Source : INSEE, RGP 1990 et 1999

81

CONCLUSION

D’une manière générale, les conditions de logement des personnes de 65 ans et plus se sont améliorées depuis les trente dernières années en France et également dans le Nord-Pas-de-Calais. Néanmoins, certaines caractéristiques distinguent les personnes âgées du reste de la population :

- Les personnes de 60 ans et plus sont massivement des propriétaires. Même si la proportion de ménages âgés propriétaires diminue avec l’âge suite à la transmission ou à la vente du bien immobilier, la hausse du niveau de vie, le développement des services d’aide ménagère et des soins infirmiers à domicile ainsi que l’augmentation de l’espérance de vie sans incapacité ont permis à un nombre croissant des propriétaires de plus de 60 ans de se maintenir dans leur logement. Les locataires se répartissent, quant à eux, de manière équilibrée entre le secteur locatif social et le secteur locatif privé.

- Les personnes âgées de la région résident davantage en maison individuelle que leurs homologues à l’échelle nationale. Ce constat s’explique par l’importance de l’habitat individuel dans le parc privé et le parc locatif social du Nord-Pas-de-Calais.

- Les situations de sous-peuplement sont plus fréquentes chez les personnes âgées que dans le reste de la population. Cette sous-occupation par des ménages âgés affecte en outre plus particulièrement le parc social, alors que les logements spacieux y sont aussi en nombre insuffisant.

- L’inconfort sanitaire demeure relativement important et s’explique, en grande partie, par l’ancienneté des logements dans lesquels vivent les plus de 60 ans. De plus, l’on constate que la proportion de personnes vivant sans le confort minimum s’élève avec l’âge ; cette situation s’explique par le fait qu’à chaque âge, les générations les plus récentes occupent moins souvent des logements sans confort sanitaire que les générations qui les ont précédées.

Si l’on considère la mobilité résidentielle des personnes de 60 ans et plus, celle-ci demeure relativement faible : en 1999, dans le Nord-Pas-de-Calais, près de 80% des personnes de 60 ans et plus occupent le même logement qu’en 1990. De même, le souhait de déménagement diminue avec l’âge, ce constat témoigne là encore du souhait des 60 ans et plus à résider sur place. Plusieurs éléments peuvent expliquer cette faible mobilité résidentielle. Elle est tout d’abord liée au taux élevé de personnes âgées propriétaires, ce qui est un frein à la mobilité résidentielle. De plus, les retraités souhaitent rester dans leur quartier et conserver les relations sociales nouées autour de leur lieu de vie. Ils souhaitent enfin demeurer dans le logement qu’ils occupent parfois depuis plusieurs décennies. Lorsqu’un déménagement est envisagé par des ménages âgés de 60 ans et plus, celui-ci est dans une très large majorité des cas tourné vers un logement plus petit. Ce choix d’un logement plus petit peut résulter de différents motifs : les enfants ont quitté le domicile familial, ces personnes recherchent la compagnie de personnes de leur âge. Elles doivent désormais composer avec un revenu moindre ou encore elles s’inquiètent de leur état de santé.

CHAPITRE 5

PROJECTIONS DE LA DEMANDE DE MISE EN INSTITUTION

DE LA PART DES PERSONNES AGEES : ESTIMATION A PARTIR DE L’ENQUETE HID

85

L’objectif de ce chapitre est d’estimer les besoins en hébergement en institution pour les personnes âgées de la région Nord-Pas-de-Calais. Cette évaluation des besoins est réalisée sur base d’une méthodologie inspirée des travaux actuels conduits par l’INSEE dits des petits domaines (interpolation de résultats tirés d’études nationales à des niveaux géographiques inférieurs) à partir d’une exploitation des données de l’enquête nationale Handicaps-Incapacités-Dépendance (HID) de l’INSEE.

Cette méthodologie consiste en la recherche de l’effet net (toutes choses égales par ailleurs) de l’âge, du sexe et de la région sur la probabilité d’être en institution sur base d’un modèle économétrique. Les résultats des estimations sont appliqués aux données des projections démographiques à horizon 2005, 2010 et 2015 à l’échelle des EPCI. Il convient de préciser que nous devons retenir de ces résultats moins les valeurs absolues que l’évolution du nombre de personnes âgées en institution entre 2005 et 2010 ou 2005 et 2015.

Avant d’exposer les résultats de cette estimation des besoins en hébergement en institution, nous apportons dans la première section, quelques éclairages sur les conditions de logements des ménages collectifs71 âgés.

1. LES PERSONNES AGEES EN INSTITUTION

La très grande majorité des personnes âgées vivent à domicile

Selon un sondage réalisé en 2005 par la Sofres pour la Fédération Hospitalière de France, neuf retraités sur dix déclarent vouloir rester le plus longtemps possible à domicile. Cette volonté massivement affichée de rester chez soi transparaît clairement dans les résultats du recensement général de la population de 1999 où 96,7% des personnes de 60 ans et plus dans la région vivent chez elles (95,5% à l’échelle nationale). Cette proportion des personnes âgées vivant à domicile diminue cependant sensiblement avec l’âge. Tandis que 98,7% des 60-74 ans vivent à domicile, ce taux tombe à 87,4% lorsqu’il s’agit des personnes âgées de 80 ans et plus. Cette part reste cependant plus élevée que celle observée à l’échelle nationale où "seulement" 84,2% des personnes âgées de 80 ans et plus vivent à domicile.

71 La population des ménages collectifs est constituée d'un regroupement de catégories diverses. Elle comprend les membres de certaines collectivités - communautés religieuses, étudiants logés en cité universitaire, travailleurs logés en foyer, personnes vivant en maison de retraite, détenus, personnes en traitement en hôpital psychiatrique ou dans les établissements de soins ou de convalescence. (Définition INSEE)

86

1.1. La cohabitation intergénérationnelle : un phénomène peu répandu dans la région

Pour une très large majorité de la population de plus de 60 ans, les enfants ont quitté le domicile familial : en effet, lors de l’ENL 2001, pour 89% des ménages de 60 ans et plus, aucun enfant ne réside avec ses parents.

Cette caractéristique est également valable dans l’autre sens dans la mesure où seuls 16,4% des personnes de plus de 60 ans logées gratuitement l’étaient par leurs familles. Cette part reste très largement inférieure à celle observée à l’échelle nationale où 58,4% des personnes de plus 60 ans logées gratuitement l’étaient par leur famille. Ce constat peut s’expliquer, en partie, par la forte population d’ayants droit dans la région : en 1999, 6,9% de la population régionale âgée de 60-74 ans et 10,1% des 75 ans et plus est logée gratuitement versus 3,4% et 7,1% à l’échelle nationale.

1.2. Un âge moyen d'entrée en maison de retraite de 85 ans

Les personnes âgées souhaitent vivre le plus longtemps possible dans leur cadre de vie habituel. Parmi les personnes de 60 ans et plus, seulement 3,3% vivent dans des structures pour personnes âgées (4,5% à l’échelle nationale) : maisons de retraite, hôpitaux de long séjour, centres d'hébergement pour personnes âgées. Les personnes y entrent le plus souvent quand elles ne peuvent rester seules chez elles, quand leur degré de dépendance s'élève (GIR 1-2)72. Les personnes âgées ne peuvent pas toujours, quel que soit leur souhait, vivre seules chez elles. Pour beaucoup de personnes en perte d'autonomie, les services de soins à domicile peuvent être une solution. Pour d'autres, le maintien à domicile peut se révéler inadapté, notamment lors de problèmes d'ordre médical, social ou psychologique. Le développement de dépendances physiques et psychologiques amène ainsi, au-delà de 85 ans, un nombre croissant de personnes à faire le choix des structures d’hébergement spécialisé. Les personnes les plus susceptibles de vivre en établissement sont celles du groupe d’âge le plus avancé, et surtout des femmes. En 1999, c’était le cas de 14,5% des femmes de 80 ans et plus, contre 7,7% des hommes.

72 Le Groupe Iso-Ressources (GIR) correspond au niveau de dépendance décliné de 1 à 6 par ordre décroissant de gravité. La dépendance est définie aujourd’hui comme l’incapacité d’une personne à assurer seule les quatre actes élémentaires de la vie quotidienne, à savoir : se nourrir, faire sa toilette, s’habiller et se déplacer (notamment pour faire ses courses). La dépendance est dite lourde lorsque la personne ne peut accomplir seule trois de ces quatre actes élémentaires.

87

Tableau 10 : Répartition de la population des ménages de 60 ans et plus par type d’hébergement (collectif ou autonome) en 1999

60-74 ans 75-79 ans 80 ans et + France NPC France NPC France NPC Nb % Nb % Nb % Nb % Nb % Nb %

Pop mén. collectifs 124 089 1,6 6 257 1,3 74 507 3,4 3 876 2,9 368 610 15,8 14 884 12,6

Femme 54 900 1,3 3 212 1,1 50 052 3,9 2 683 3,2 299 331 18,7 12 408 14,5Homme 69 189 1,6 3 045 1,4 24 455 2,8 1 193 2,4 69 279 9,4 2 476 7,7

Pop mén.ordinaires 7 839 523 98,4 491 376 98,7 2 091 013 96,6 128 984 97,1 1 968 752 84,2 102 931 87,4

Femme 4 242 781 98,7 276 622 98,9 1 239 978 96,1 80 345 96,8 1 302 610 81,3 73 086 85,5Homme 3 596 742 98,1 214 754 98,6 851 035 97,2 48 639 97,6 666 142 90,6 29 845 92,3

TOTAL 7 963 612 100,0 497 633 100,0 2 165 520 100,0 132 860 100,0 2 337 362 100,0 117 815 100,0Femme 4 297 681 100,0 279 834 100,0 1 290 030 100,0 83 028 100,0 1 601 941 100,0 85 494 100,0Homme 3 665 931 100,0 217 799 100,0 875 490 100,0 49 832 100,0 735 421 100,0 32 321 100,0

Source : INSEE, RGP 1999

Parmi ces personnes vivant en collectivité, une très large majorité (73%, soit 18 271 personnes) réside en maison de retraite73. L’hospitalisation de longue durée74 arrive en seconde position (17,3%, soit 4 329 personnes). La vie dans les communautés religieuses concerne, quant à elle, 5,3% des personnes âgées (soit 1 322 personnes).

Tableau 11 : Répartition de la population des ménages collectifs de 60 ans et plus par type d’hébergement en 1999

60-74 ans 75-79 ans 80 ans et plus France NPC France NPC France NPC Nb % Nb % Nb % Nb % Nb % Nb % Maisons de retraite 61 612 49,7 3 743 59,8 52 227 70,1 2 757 71,1 300 738 81,6 11 771 79,1Hôpitaux long séjour 16 522 13,3 1 148 18,3 11 255 15,1 706 18,2 50 463 13,7 2 475 16,6Communautés religieuses 16 786 13,5 636 10,2 8 689 11,7 299 7,7 13 431 3,6 387 2,6Centres d'hébergement 2 799 2,3 179 2,9 553 0,7 89 2,3 1 684 0,5 226 1,5Autres collectivités 26 370 21,3 551 8,8 1 783 2,4 25 0,6 2 294 0,6 25 0,2

Total 124 089 100,0 6 257 100,0 74 507 100,0 3 876 100,0 368 610 100,0 14 884 100,0Source : INSEE, RGP 1999

73 Les maisons de retraite sont des établissements d’accueil comportant des services collectifs et assurant l’entretien complet des résidents. Initialement conçus pour l’accueil de personnes valides, elles hébergent aujourd’hui essentiellement des personnes présentant un certain degré de dépendance (Schéma gérontologique du Nord 2002-2006). Selon l’enquête EHPA 2003, l’on recense 290 maisons de retraite, soit une capacité totale d’accueil de 18 867 lits dont 66,6% dans le département du Nord. 74 Les unités de soins longue durée sont des établissements ou des sections d’établissement destinés à assurer l’hébergement des personnes âgées n’ayant plus leur autonomie de vie et dont l’état nécessite une surveillance médicale constante et des traitements d’entretien. Ce sont des structures sanitaires, intégralement médicalisées (Schéma gérontologique du Nord 2002-2006). Selon l’enquête EHPA 2003, elles représentent 4 341 lits dans la région, dont 60,4% sont localisés dans le département du Nord.

88

2. MATERIEL ET METHODE

2.1. Modéliser des projections de demande à partir de données nationales

Soit gX , la structure par âge et sexe de la population présente dans une zone géographique g donnée. La répartition, à un moment donné, de la population de la zone géographique peut être considérée comme le produit de la probabilité instantanée d’être en institution, d’une part, et d’un ensemble de caractéristiques sociodémographiques et médicales de la population ( )giX ,,1 , de caractéristiques culturelles et sociales de l’environnement de l’individu corrélées à la structure d’âge et de sexe ( )giX ,,2 ou non ( )giX ,,3 , ainsi que des structures économiques et sociales g ( )gX ,4 , d’autre part.

Nous considérerons, par la suite, que le vecteur ( )giX ,,1 des caractéristiques sociodémographiques et médicales de l’individu peut se résumer à une fonction de l’âge ( )iy et du sexe ( )iz de l’individu et qu’il est indépendant des caractéristiques de l’écosystème dans lequel évolue ce dernier, de sorte que : ( )iigi zyXX ,1,,1 = .

Une telle hypothèse revient à considérer que la probabilité d’être en institution est influencée pour partie par des variables biologiques liées au sexe et à l’âge qui déterminent la nécessité de recourir à un mode d’hébergement adapté. Il est à noter que cette approche s’avère pertinente au regard des connaissances biomédicales et épidémiologiques qui démontrent une liaison stricte entre le niveau de dépendance et l’âge des individus (Cf. figures 1 et 2).

89

Figure 1 : Niveau de dépendance de la population masculine selon l’âge et le sexe

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

% d

e la

pop

ulat

ion

60-69 ans 70-79 ans 80-89 ans 90-99 ans 100 ans & +

Classe d'âge

Confiné au lit ou au fauteuil Besoin d'aide pour toilette et habillage Besoin d'aide pour sortir Autre Source : INSEE – Enquête HID.

Figure 2 : Niveau de dépendance de la population féminine selon l’âge et le sexe

0%

10%

20%

30%

40%

50%

60%

70%

80%

90%

100%

% d

e la

pop

ulat

ion

60-69 ans 70-79 ans 80-89 ans 90-99 ans 100 ans & +

Classe d'âge

Confiné au lit ou au fauteuil Besoin d'aide pour toilette et habillage Besoin d'aide pour sortir Autre Source : INSEE – Enquête HID.

Le vecteur ( )giX ,,2 reprend les caractéristiques de l’individu qui, comme le niveau d’étude, sont influencées par la structure d’âge et de sexe de la population. Celles-ci

90

sont données par une relation de type : ( )gigigi ZXxX ,,,12*

,,2 ,= , où giZ , reprend l’ensemble des variables autres que l’âge et le sexe.

Le vecteur ( )giX ,,3 reprend, pour sa part, l’ensemble des variables ayant trait à l’écosystème dans lequel évolue l’individu et dont on considère qu’elles sont peu influencées par l’âge et le sexe de ce dernier. Ces variables peuvent avoir trait à son revenu et au capital social dont il dispose. Ainsi, le revenu, le nombre de liens entretenus avec la famille ou d’autres personnes, l’intégration dans des groupes sociaux (associations, etc.) et la proximité d’infrastructures telles que les services publics entrent dans cette catégorie.

Le quatrième vecteur ( )gX ,4 est supposé indépendant des caractéristiques de l’individu et déterminé au niveau géographique de référence de l’étude. Cela ne signifie pas que les caractéristiques de la population de la zone géographique gP

= ∑

∈gii n’influe pas sur le vecteur ( )gX ,3 , mais que les décisions prises au niveau

géographique sont relativement indépendantes des caractéristiques d’un individu pris isolément. Le vecteur ( )gX ,3 réfère aux structures économiques et sociales de la zone géographique, ainsi qu’à l’offre locale de structures. Ces facteurs seront approximés, dans la suite du travail, par un ensemble de variables indicatrices de la région d’appartenance.

La répartition entre domicile et institution dans une zone géographique est donnée, compte tenu des hypothèses posées, par la relation suivante :

( ) ( ) ( ) gggi

giggigi

gigigigi

iiig XpXpXpzypI ,4,4,,3,3,,3*

,,2,,,2,1 .....,. +++= ∑∑∑∈∈∈

βα , où gi,α et gi,β

représentent la répartition des caractéristiques individuelles relevant, respectivement, du vecteur ( )giX ,,2 et du vecteur ( )giX ,,3 dans une zone géographique g donnée.

Nous appellerons par la suite ( )ggigi pppp ,3,,2,,1 ,, , le vecteur des probabilités instantanées d’être en institution dans une zone géographique donnée.

2.2. Quelles alternatives méthodologiques ?

Une première approche consiste à considérer que seules les caractéristiques socio-démographiques et médicales de l’individu influent sur la mise en institution. Une telle approche considère que le vecteur des probabilités instantanées se résume par

( )0,0,,1 ipp , ce qui ramène à appliquer la structure nationale par âge et sexe de la domiciliation (institution ou domicile) à la structure d’âge et de sexe de la population de la zone géographique g (Cf. tableau 1).

91

Tableau 12 : % de la population vivant en institution selon le sexe et la classe d’âge dans l’enquête HID

Classe d’âge Hommes Femmes France entière 60-74 ans 75-79 ans 80 ans & +

1,3% 3,4%

10,2%

1,0% 3,4% 19,7%

Nord – Pas-de-Calais 60-74 ans 75-79 ans 80 ans & +

1,3% 2,6%

10,6%

1,0% 2,6% 20,3%

Source : INSEE – Enquête HID.

Une seconde approche vise à estimer économétriquement les paramètres associés aux quatre vecteurs de variables influant le fait d’être en institution à partir des informations à notre disposition.

Bien que plus complexe à mettre en œuvre, cette méthode a pour avantage, par rapport à la simple interpolation de la structure d’hébergement selon l’âge et le sexe, d’introduire des données contextuelles aux zones géographiques, ce qui permet de mieux s’ajuster aux caractéristiques locales.

Ces estimations seront fondées sur les résultats de l’enquête Handicaps – Incapacités – Dépendance de l’INSEE, conduite en 1998 pour ce qui est de l’institution et en 1999 pour ce qui relève du domicile.

Les projections des besoins d’institutions seront réalisées à partir des projections de population par âge et sexe au niveau infrarégional fournies par le système OMPHALE.

92

3. RESULTAT DES PROJECTIONS

3.1. Les étapes du modèle de projection infrarégionale

Le modèle économétrique servant à estimer les probabilités régionales et infrarégionales de mise en institution est construit en deux temps :

• un premier temps durant lequel une équation de niveau d’études est estimé par un modèle logistique polytomique pour lequel les variables explicatives sont l’âge, le sexe, l’origine sociale du père et la région d’appartenance ;

• un second temps durant lequel les probabilités de niveau d’étude estimées à l’étape précédente sont injectées dans un modèle logistique cherchant à estimer la probabilité instantanée d’être en institution en fonction de l’âge, du sexe, du statut matrimonial, du lieu de naissance, du nombre de soutiens financiers, du revenu mensuel total et de la région d’appartenance.

La première équation obtenue (Cf. tableau 2) montre l’existence d’une différence régionale significative en matière de niveau d’études. On notera, à cet égard, que la région Nord – Pas-de-Calais se caractérise, par rapport à la région Ile-de-France (région de référence de la modélisation) par une surreprésentation des niveaux d’étude primaire et collège (BEPC, BEP, CAP).

La modélisation de la probabilité instantanée de se trouver en institution (Cf. tableau 3) montre un effet significatif de la structure d’âge et de sexe, notamment dans les âges les plus élevés, ainsi que du niveau d’étude, évalué par la probabilité estimée lors de l’étape précédente. On note également une surreprésentation de l’institutionnalisation dans le Nord – Pas-de-Calais (odd ratio = 1,616, p < 0,001), toujours par rapport à l’Ile-de-France.

93

Tableau 13 : Estimation des probabilités de niveau d’étude par un modèle logistique polytomique (catégorie de référence = niveau d’études supérieures)

Niveau d’études primaires Niveau BEPC, BEP, CAP Niveau baccalauréat Variable OR Variable OR Variable OR Constante 17,66 (c) Constante 3,604 (c) Constante 1,800 (c) Age et sexe Homme 60 – 74 ans 1,517 (c) Homme 60 – 74 ans 0,976 Homme 60 – 74 ans 0,975 Femme 60 – 74 ans 3,356 (c) Femme 60 – 74 ans 1,321 (b) Femme 60 – 74 ans 1,668 (c) Homme 75 – 79 ans 4,046 (c) Homme 75 – 79 ans 0,962 Homme 75 – 79 ans 2,309 (c) Femme 75 – 79 ans 1,000 Femme 75 – 79 ans 1,000 Femme 75 – 79 ans 1,000 Homme 80 ans & + 3,186 (c) Homme 80 ans & + 0,707 (a) Homme 80 ans & + 1,676 (c) Femme 80 ans & + 7,078 (c) Femme 80 ans & + 0,775 (a) Femme 80 ans & + 2,702 (c) CSP du père Inactif ou inconnu 1,000 Inactif ou inconnu 1,000 Inactif ou inconnu 1,000

Agriculteur 0,329 (c) Agriculteur 0,734 Agriculteur 0,446 (c) Indépendant 0,067 (c) Indépendant 0,411 (c) Indépendant 0,398 (c) Cadre, profession intellectuelles sup

0,007 (c) Cadre, profession intellectuelles sup

0,098 (c) Cadre, profession intellectuelles sup

0,199 (c)

Prof intermédiaire 0,021 (c) Prof intermédiaire 0,233 (c) Prof intermédiaire 0,322 (c) Employé 0,140 (c) Employé 0,832 (c) Employé 0,685 (a) Ouvrier 0,554 (c) Ouvrier 1,703 (c) Ouvrier 0,753 Région Ile de France 1,000 Ile de France 1,000 Ile de France 1,000 Champagne Ardenne 4,711 (c) Champagne Ardenne 2,010 (b) Champagne Ardenne 1,729 (a) Picardie 3,866 (c) Picardie 1,701 (a) Picardie 1,667 (a) Haute Normandie 2,525 (c) Haute Normandie 1,552 (a) Haute Normandie 0,816 Centre 2,225 (c) Centre 1,388 (a) Centre 1,028 Basse Normandie 4,556 (c) Basse Normandie 2,030 (a) Basse Normandie 1,331 Bourgogne 1,992 (c) Bourgogne 1,561 (a) Bourgogne 0,902 Nord PdC 2,500 (c) Nord PdC 1,732 (b) Nord PdC 1,037 Lorraine 2,899 (c) Lorraine 1,624 (b) Lorraine 1,206 Alsace 1,402 (a) Alsace 1,428 (a) Alsace 1,029 Franche Comté 2,399 (c) Franche Comté 1,413 Franche Comté 1,078 Pays de la Loire 2,310 (c) Pays de la Loire 1,612 (b) Pays de la Loire 1,071 Bretagne 2,005 (c) Bretagne 1,353 (a) Bretagne 0,980 Poitou Charentes 2,330 (c) Poitou Charentes 1,276 Poitou Charentes 1,338 Aquitaine 1,181 (c) Aquitaine 0,892 Aquitaine 0,904 Midi Pyrénées 1,925 (c) Midi Pyrénées 1,242 Midi Pyrénées 0,880 Limousin 1,632 (b) Limousin 1,128 Limousin 0,878 Rhone Alpes 1,670 (c) Rhone Alpes 1,187 Rhone Alpes 0,996 Auvergne 1,927 (c) Auvergne 1,330 Auvergne 1,306 Languedoc Roussillon 0,923 Languedoc Roussillon 0,758 (b) Languedoc Roussillon 0,977 PACA 1,681 (c) PACA 1,072 PACA 1,329

Pseudo-R2 Cox & Snell = 0,258 Pseudo-R2 Nagelkerke = 0,299 Pseudo-R2 McFadden = 0,15

NB : (a) significatif au seuil de 5%, (b) significatif au seuil de 1%, (c) significatif au seuil de 0,1%.

94

Tableau 14 : Estimation de la probabilité d’être en institution à partir de l’enquête HID Intervalle de confiance à

95% Variables Odd ratio

Minimum Maximum

p

Données démographiques Homme de 60 à 74 ans Femme de 60 à 74 ans Homme de 75 à 79 ans Femme de 75 à 79 ans Homme de 80 ans & + Femme de 80 ans & +

0,852 0,605 0,844 1,000 7,058 6,344

0,712 0,497 0,637

- 5,312 4,724

1,019 0,738 1,118

- 9,378 8,519

0,080 <0,001

0,237 -

<0,001 <0,001

Catégorie socioprofessionnelle Inactif ou inconnu Agriculteur exploitant Indépendant Cadre, prof intellectuelles sup Profession intermédiaire Employé Ouvrier

1,000 0,112 0,068 0,094 0,084 0,076 0,218

- 0,089 0,053 0,069 0,066 0,062 0,180

- 0,143 0,087 0,127 0,107 0,094 0,264

- <0,001 <0,001 <0,001 <0,001 <0,001 <0,001

Lieu de naissance France Hors France en UE Hors UE

1,000 0,675 0,696

- 0,292 0,421

- 1,563 1,149

- 0,359 0,156

Statut matrimonial Célibataire Vit en couple A vécu en couple

1,000 0,080 0,352

- 0,070 0,312

- 0,093 0,399

- <0,001 <0,001

Nombre de soutiens financiers En provenance de la famille En dehors de la famille

1,156 1,422

1,073 1,238

1,245 1,633

<0,001 <0,001

Niveau d’étude (estimé à l’étape précédente)

Prob Sans diplôme, CEP Prob BEPC, BEP, CAP Prob Bac Prob études supérieures

1,000 86,804

65187,924 0,005

- 27,112

10761,279 0,002

- 277,920

394884,773 0,014

- <0,001 <0,001 <0,001

Revenu mensuel < 450F par mois [450F-950F[ [950F-1450F[ [1450F-1950F[ [1950F-2950F[ [2950F-3950F[ [3950F-4950F[ [4950F-6700F[ [6700F-8500F[ [8500F-10500F[ [10500F-13000F[ [13000F-16500F[ [16500F-21500F[ [21500F-29500F[ [29500F-37500F[ 37500 & +

1,000 1,059 0,646 0,480 0,509 0,388 0,353 0,297 0,250 0,180 0,132 0,106 0,059 0,060 0,069 0,066

- 0,527 0,355 0,278 0,350 0,279 0,254 0,215 0,180 0,128 0,092 0,071 0,037 0,033 0,031 0,029

- 2,128 1,176 0,829 0,739 0,538 0,492 0,411 0,348 0,252 0,190 0,158 0,095 0,109 0,153 0,150

- 0,872 0,153 0,008

<0,001 <0,001 <0,001 <0,001 <0,001 <0,001 <0,001 <0,001 <0,001 <0,001 <0,001 <0,001

95

Intervalle de confiance à

95% Variables Odd ratio

Minimum Maximum

P

Région Ile de France Champagne Ardenne Picardie Haute Normandie Centre Basse Normandie Bourgogne Nord PdC Lorraine Alsace Franche Comté Pays de la Loire Bretagne Poitou Charentes Aquitaine Midi Pyrénées Limousin Rhone Alpes Auvergne Languedoc Roussillon PACA Constante

1,000 1,278 1,803 1,504 1,791 2,957 1,358 1,616 2,063 1,078 0,801 1,557 1,579 0,813 1,883 2,946 0,787 2,232 1,139 0,368 2,364 7,241

- 0,961 1,318 1,092 1,372 2,123 1,032 1,257 1,569 0,828 0,601 1,246 1,261 0,619 1,497 2,285 0,566 1,820 0,860 0,296 1,860

- 1,698 2,465 2,071 2,339 4,120 1,788 2,077 2,713 1,402 1,069 1,948 1,979 1,070 2,370 3,799 1,093 2,736 1,509 0,458 3,004

- 0,092

<0,001 0,012

<0,001 <0,001

0,029 <0,001 <0,001

0,578 0,132

<0,001 <0,001

0,139 <0,001 <0,001

0,153 <0,001

0,364 <0,001 <0,001 <0,001

Pseudo-R2 Cox & Snell = 0,436 Pseudo-R2 Nagelkerke = 0,582

Ces estimations nous permettent de caler les estimations de prévalence de la mise en institution selon la classe d’âge et le sexe tirées de l’enquête nationale HID sur les spécificités régionales du Nord – Pas-de-Calais telles qu’elles transparaissent dans la variable indicatrice propre à cette région. Ainsi, si nous prenons comme référentiel la prévalence de l’institutionnalisation des femmes âgées de 75 à 79 ans vivant en Ile-de-France (1,93%), nous obtenons les estimations de prévalence par âge et sexe de l’institutionnalisation telles que décrites dans le tableau 4 75.

75 Ces estimations sont obtenues par l’application au taux de référence du résultat du produit entre l’odd ratio associé à chaque tranche d’âge et de sexe, d’une part, et l’odd ratio spécifique à la variable indicatrice de la région, d’autre part.

96

Tableau 15 : Hypothèse de prévalence de l’institutionnalisation avec ou sans calage régional Avec calage régional Structure d’âge et de sexe Hypothèse

HID Hyp moyenne Hyp minimale Hyp maximale Homme de 60 à 74 ans Femme de 60 à 74 ans Homme de 75 à 79 ans Femme de 75 à 79 ans Homme de 80 ans & + Femme de 80 ans & +

1,3% 1,0% 3,4% 3,4%

10,2% 19,7%

2,67% 1,90% 2,65% 3,14%

22,13% 19,89%

1,74% 1,21% 1,55% 2,44%

12,95% 11,52%

4,11% 2,97% 4,50% 4,03%

37,79% 34,33%

3.2. Résultat des projections par EPCI

Tableau 16 : Projection d’effectif de personnes en institution par EPCI – Simple extrapolation à partir de l’enquête HID

Année de projection EPCI comportant plus de 50 000 hab. 2005 2010 2015

CA de Boulogne CA de Calais CA de Saint-Omer CA de l’Artois CA de Carvin CA de Lens-Liévin CA d’Arras CA de Maubeuge CA de Cambrai CA de la Porte du Hainaut CA de Valenciennes CA de Douai CCED CA de Dunkerque CA de Lille

1 079 785 503

1 991 1 049 2 277

815 805 547

1 254 1 674 1 365

642 1 495 8 276

1 242 907 613

2 249 1 244 2 685

965 956 650

1 482 1 980 1 622

774 1 817 9 442

1 389 1 006

718 2 381 1 364 2 905 1 077 1 060

732 1 651 2 177 1 801

849 2 147

10 270

97

Tableau 17 : Projection d’effectif de personnes en institution par EPCI – Avec calage régional selon l’hypothèse basse

Année de projection EPCI comportant plus de 50 000 hab. 2005 2010 2015

CA de Boulogne CA de Calais CA de Saint-Omer CA de l’Artois CA de Carvin CA de Lens-Liévin CA d’Arras CA de Maubeuge CA de Cambrai CA de la Porte du Hainaut CA de Valenciennes CA de Douai CCED CA de Dunkerque CA de Lille

836 609 400

1 518 810

1 732 639 639 423 974

1 291 1 059

496 1 189 6 447

965 707 487

1 717 955

2 028 760 754 498

1 144 1 526 1 248

595 1 439 7 375

1 086 786 571

1 842 1 054 2 208

854 843 563

1 275 1 685 1 392

656 1 702 8 086

Tableau 18 : Projection d’effectif de personnes en institution par EPCI – Avec calage régional selon l’hypothèse moyenne

Année de projection EPCI comportant plus de 50 000 hab. 2005 2010 2015

CA de Boulogne CA de Calais CA de Saint-Omer CA de l’Artois CA de Carvin CA de Lens-Liévin CA d’Arras CA de Maubeuge CA de Cambrai CA de la Porte du Hainaut CA de Valenciennes CA de Douai CCED CA de Dunkerque CA de Lille

1 379 1 004

657 2 501 1 331 2 849 1 054 1 050

697 1 601 2 124 1 742

816 1 949

10 630

1 593 1 167

802 2 843 1 578 3 357 1 259 1 243

823 1 889 2 522 2 065

985 2 366

12 192

1 797 1 301

944 3 051 1 747 3 668 1 418 1 394

934 2 115 2 793 2 312 1 088 2 810

13 397

98

Tableau 19 : Projection d’effectif de personnes en institution par EPCI – Avec calage régional selon l’hypothèse haute

Année de projection EPCI comportant plus de 50 000 hab. 2005 2010 2015

CA de Boulogne CA de Calais CA de Saint-Omer CA de l’Artois CA de Carvin CA de Lens-Liévin CA d’Arras CA de Maubeuge CA de Cambrai CA de la Porte du Hainaut CA de Valenciennes CA de Douai CCED CA de Dunkerque CA de Lille

2 285 1 665 1 086 4 146 2 200 4 713 1 750 1 733 1 155 2 646 3 515 2 884 1 349 3 214

17 622

2 644 1 939 1 329 4 729 2 622 5 586 2 095 2 062 1 370 3 137 4 190 3 434 1 638 3 912

20 256

2 988 2 163 1 567 5 076 2 908 6 120 2 363 2 315 1 558 3 525 4 652 3 856 1 814 4 663

22 295

99

Car

te 9

: Ev

olut

ion

de la

pop

ulat

ion

âgée

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inst

itutio

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100

CONCLUSION

Le présent exercice a consisté à mesurer les effets propres de la structure économique et sociale de la région Nord-Pas-de-Calais sur l’entrée en institution.

L’originalité de l’approche a consisté en effet dans l’estimation de risques d’entrée en institution ne dépendant pas uniquement de la structure par âge et par sexe de la population et de son évolution dans le temps.

L’introduction de variables environnementales spécifiques à la région a ainsi permis de montrer, sur base d’estimations économétriques fondées sur l’enquête Handicaps-Incapacités-Dépendance de l’INSEE, que le taux d’institutionnalisation par sexe et âge est supérieur à la moyenne nationale dans les classes d’âge des 60 à 74 ans et des 80 ans et plus, de manière plus accentuée chez les hommes.

La pression escomptée en termes de places en hébergement pour personnes âgées qui est tirée de nos estimations aboutit, en conséquence, à des niveaux supérieurs à ce qui serait attendu par le biais de projections assises sur la simple extrapolation de données nationales, qui constitue actuellement l’approche la plus couramment usitée dans ce genre d’exercice.

CHAPITRE 6

RELATION ENTRE LES PLUS DE 60 ANS ET L’HABITAT :

LE POINT DE VUE DES PROFESSIONNELS, LES EXPERIENCES

103

L’habitat constitue une préoccupation de l’ensemble de la population et comme tout à chacun, la population âgée de plus de 60 ans a besoin de se sentir bien dans son ″chez-soi″. Habiter, ce n’est pas seulement, comme le souligne Georges Cavalier, président de la Fédération nationale des centres PACT ARIM, disposer d’un toit, d’un hébergement, d’un domicile, c’est surtout investir un lieu, pouvoir vivre pleinement la ville. L’habitat détermine en effet très largement les modes de vie, la capacité de nouer des relations sociales et d’accéder aux aménités urbaines. Ce chapitre s’attachera par conséquent à analyser le discours des professionnels de la ville sur les relations habitat - personnes de plus de 60 ans, et à décrire l’adaptation de l’habitat à la demande de cette population, ainsi que les produits mis en place.

1. L’HABITAT DES PERSONNES AGEES : PERCEPTION ET REPRESENTATIONS DES PROFESSIONNELS DE LA VILLE

1.1. Des attentes différenciées en matière d’habitat

Pour les acteurs rencontrés, l’âge est loin de constituer le seul facteur déterminant dans les choix résidentiels et dans les modes d’habiter de la population de plus de 60 ans. D’autres facteurs s’avèrent, selon eux, davantage influencer le comportement et les attentes des plus de 60 ans en matière d’habitat. Les professionnels de la ville identifient ainsi quatre facteurs principaux. Le décès du conjoint demeure celui le plus fréquemment cité : « entre 60 et 75 ans, je ne considère pas les personnes âgées comme des usagers atypiques. A 75 ans, c’est le seuil où l’on commence à penser différemment, c’est lié au décès des hommes, c’est là où la majorité des couples se retrouvent seuls », « je pense que la question du logement se pose principalement, en deux temps, le premier, celui du départ des enfants et le deuxième, au moment du décès du conjoint ». Le deuxième élément le plus souvent cité est la perte d’autonomie : « c’est au moment où les capacités physiques de la personne diminuent qu’elle commence à réfléchir à changer de logement ». Les aménités recherchées par les plus de 60 ans quant au cadre de vie apparaissent également comme un élément déterminant : « « il y a une proportion de gens qui font le choix de rester dans les grandes villes parce qu’ils s’y sentent peut-être un peu moins isolés, après il y a ceux qui font le choix de venir s’installer dans des communes touristiques et notamment en bord de mer, d’autres, ceux qui aiment plus le calme, vont aller habiter à la campagne. Après ça c’est un choix, cela va dépendre des personnes ». Enfin, l’arrêt de l’activité et le passage à la retraite sont, eux aussi, dans une moindre mesure, évoqués comme des facteurs influençant les choix résidentiels : « au moment de la retraite, certaines personnes peuvent envisager de déménager pour changer de ville ou de région par exemple ».

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1.2. ″Rester en relation avec les autres″ ne signifie pas nécessairement ″habiter avec les autres″

Si les choix résidentiels et les modes d’habiter ne sont pas identiques pour l’ensemble de la population de plus de 60 ans, une constante est toutefois relevée par les professionnels de la ville. La population de plus de 60 ans souhaite maintenir un lien social avec le reste de la population : « elles veulent rester en relation avec les autres », « les personnes âgées ne veulent pas être qu’entre elles !, souvent elles nous disent, je ne veux pas être avec des vieux alors que ces personnes ont parfois plus de 75 ans ». Il convient néanmoins de signaler que ce souhait de rester en contact avec l’ensemble de la population ne se traduit pas de façon homogène au sein des plus de 60 ans. Si les discours de la plupart des professionnels de la ville associent ″rester en contact avec″ au fait d’″habiter avec″, la réalité apparaît toutefois plus contrastée. Certains acteurs soulignent en effet que ce souhait de maintenir un lien avec le reste de la population ne signifie pas systématiquement ″habiter avec les autres″ et citent comme exemple les immeubles locatifs sociaux dédiés de fait aux personnes âgées : « on voit parfois des situations où la majorité des locataires d’un immeuble sont des personnes âgées, eh bien les demandes des personnes âgées se porteront davantage sur cet immeuble, elles y trouveront un rythme de vie qui leur correspond ». Certaines communes ont intégré cet élément et développent ainsi des projets d’équipement intergénérationnel, c’est notamment le cas de la ville de Grande-Synthe.

1.3. Une reconnaissance croissante de l’intergénérationnel

La notion de mixité intergénérationnelle est récurrente chez les acteurs interviewés. Chacun d’entre eux affirme en effet une volonté de développer celle-ci : « il faut bâtir l’avenir sur l’intergénérationnel ». Si, comme nous l’avons évoqué précédemment, certaines communes envisagent la question de l’intergénérationnel dans son acceptation la plus large (équipement intergénérationnel de la ville de Grande-Synthe), une grande majorité des acteurs semble limiter cette notion au plan spatial ; il s’agit avant tout pour eux de ne pas spécialiser les territoires urbains en fonction des âges. Ainsi, la tendance, déjà considérable dans les pays anglo-saxons mais encore peu présente en France, à constituer des territoires privatisés et à mettre en place par conséquent, une ségrégation forte par la création de communautés sélectives constituées d’individus aux profils identiques semble totalement rejetée par les acteurs rencontrés.

Cette volonté de favoriser une cohabitation intergénérationnelle semble davantage marquée dans les communes confrontées au vieillissement de leur population et au déficit de jeunes et de personnes actives, comme pour Villeneuve d’Ascq, Le Touquet et Grande-Synthe. Pour ces communes, la question de l’intergénérationnel apparaît alors davantage comme une opportunité d’attirer des ménages d’actifs avec enfants. Les propos tenus par certains interlocuteurs sont, à ce titre, révélateurs : « ma première réaction quand je vous ai eu au téléphone, ça a été : eh bien, je n’ai pas envie de faire grand-chose pour les personnes âgées parce que j’en ai trop. Par contre, on a un fort volet aménagement pour faire venir de la population jeune », « concrètement en terme d’aménagement, il n’y a pas véritablement de projet à

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destination des personnes âgées », « les personnes âgées même quand leurs logements sont devenus trop grands, elles restent, je suppose donc qu’elles y sont bien ».

1.4. Le béguinage : un « produit intermédiaire à la mode »

Le béguinage, semble constituer, à l’heure actuelle, le produit logement le plus développé en faveur des personnes âgées. Les architectes-urbanistes constatent en effet une recrudescence des demandes des maîtres d’ouvrage - quasi exclusivement des bailleurs sociaux et des communes - pour ce type de produit : « depuis cinq ans, nous avons réalisé une dizaine de béguinages mais on sent une nette accélération de la demande de la part des maîtres d’ouvrage depuis quelque temps ». Différents éléments expliquent, selon les acteurs rencontrés, cet engouement pour le béguinage. Tout d’abord, ce dernier représente un « produit intermédiaire qui manquait » : « avant il y avait une carence en termes d’offre entre le moment où la personne était dans l’incapacité de rester dans son logement pour des raisons variées (présence d’étage, entretien…) et le moment de l’entrée en maison médicalisée », « pour beaucoup de communes et de maîtres d’ouvrage, c’est le chaînon manquant entre l’habitation et la maison de retraite médicalisée, c’est ce qui manque entre le moment où les personnes ne sont plus forcément aptes à entretenir leur logement mais pas encore assez dépendantes pour aller en maison de retraite ». Le béguinage permet en outre de recréer une offre en grands logements (les personnes âgées intégrant le béguinage libèrent le plus souvent des logements sous-occupés) tout en favorisant une migration résidentielle sur la commune pour les personnes âgées qui le souhaitent : « les personnes âgées sont contentes car ce sont souvent des gens qui vivent déjà ensemble dans le même quartier et donc là ils vont pouvoir continuer à vivre à proximité car oui, je ne l’ai pas dit mais les gens qui vont emménager dans ces logements sont quasiment tout le temps des gens qui vivent déjà dans la commune ». La ″manne électorale″ que représentent les personnes âgées est également avancée par certains acteurs pour expliquer ce fort développement des béguinages : « pour les villes et les politiques, le béguinage, c’est quand même un produit qu’ils mettent en avant dans leur programme de réalisations, ce sont des gens qui votent encore et ils font partie d’une tranche d’âge d’électeurs qui est loin d’être négligeable ». Précisons enfin que certains acteurs ont également mis en avant l’atout que pouvait représenter un projet de béguinage dans la création de programmes de logements locatifs sociaux : « le béguinage en plus, ça a un aspect vendeur. Dans une commune quand vous voulez vendre un projet de logements sociaux, c’est toujours plus facile quand vous proposez d’y créer aussi un béguinage ».

Si certains acteurs affirment que « le béguinage, c’est la twingo du logement locatif, il a tout d’une grande !, il ne présente que des avantages », d’autres insistent néanmoins sur le fait que « le béguinage est à la mode mais il faut faire attention aux effets pervers. Le béguinage n’est pas le produit miracle comme souvent on le présente », et précisent : « dans un béguinage, il ne faut pas trop en faire, sous peine de trop l’étiqueter MAPAD ou EHPAD ; parfois certains béguinages sont en fait

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des maisons de retraite déguisées ». D’autres acteurs s’interrogent sur la place de la mixité tant revendiquée par les communes : « en ce moment, il y a une recrudescence pour ce type de projet même si on parle plutôt de mixité. La mixité c’est alors plutôt une juxtaposition d’éléments communautarisés qu’une vraie mixité ».

Si une majorité des projets des communes et des bailleurs sociaux en faveur des personnes âgées repose sur le concept de béguinage, les communes du Touquet et de Grande-Synthe ont, quant à elles, développé d’autres types de projets. La commune du Touquet a ainsi opté pour la réalisation, en centre-ville, d’une résidence-services privée de 40 logements (T2 et T3) en copropriété. Signalons, à ce titre, que pour maintenir cette fonction d’accueil des personnes âgées, la Ville du Touquet, en accord avec le promoteur du projet, a introduit des contraintes juridiques : « les résidents sont obligés d’utiliser les services proposés (infirmière, médecin, restauration) dont les charges sont très élevées. Ainsi, en cas de décès du propriétaire, cette contrainte permettra que l’appartement soit racheté par une personne âgée ». La ville de Grande-Synthe a, quant à elle, souhaité développer un programme intergénérationnel. Ce projet de 28 logements locatifs sociaux composés de T2 et T3 semi-individuels, implantés en centre-ville et en cours de construction, accueillera des personnes âgées et des jeunes ménages.

1.5. Une connaissance limitée des attentes des personnes âgées

La connaissance fine des attentes de la population de plus de 60 ans en matière d’habitat semble aujourd’hui encore limitée : « aujourd’hui dans la conception des béguinages, je pense que c’est plus de la navigation à vue, on conçoit un peu par ouï-dire, par retour d’expériences mais je ne pourrais pas vous dire ce que souhaitent les personnes âgées ». Cette connaissance s’avère d’autant plus difficile que les acteurs envisagent de possibles changements dans les besoins et attentes des générations futures : « on reste très prudent dans nos concepts car on ne sait pas comment vont vieillir les générations actuelles ».

Enfin, il convient de signaler que la connaissance des attentes des personnes de plus de 60 ans en matière d’adaptation de leur logement semble quasi inexistante, aucun interlocuteur n’ayant fait référence à cette problématique. L’on peut ici supposer que certains professionnels de la ville préfèrent proposer aux personnes âgées un ″nouveau logement adapté″, plutôt que ″d’adapter le logement existant″, cette pensée faisant l’impasse sur le souhait d’une très large majorité des personnes âgées de rester le plus longtemps possible dans leur logement.

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2. LES PRINCIPES URBANISTIQUES ET ARCHITECTURAUX DU CONCEPT DE BEGUINAGE

Le béguinage constitue, comme nous l’avons évoqué précédemment, le produit logement le plus développé actuellement en faveur des personnes âgées. Cette section a pour objet de présenter les principes urbanistiques et architecturaux mis en avant par les professionnels de la ville et sur lesquels ils fondent leur conception du béguinage.

2.1. Développer des projets à « configuration humaine » répondant aux besoins de proximité

Le premier point sur lequel insiste l’ensemble des professionnels de l’habitat rencontrés est celui de la taille du béguinage, des « projets de petite taille à configuration humaine ». Ces unités de vie sont ainsi composées la plupart du temps de 12 à 20 logements : « en général, on ne dépasse pas douze à quinze logements, au-delà on peut estimer que l’on commence à concentrer et donc à trop à montrer que l’on veut concentrer les personnes âgées au même endroit, ce qui n’est pas forcément flatteur pour eux ». Si ce seuil demeure fondamental pour éviter l’écueil du "ghetto de vieux", il est également appliqué dans un souci de rentabilité économique : « en dessous de vingt logements, c’est souvent un problème de rentabilité économique par rapport au terrain, vingt logements c’est un bon équilibre entre coût économique et résultat urbanistique ». Enfin, le dernier argument avancé pour justifier ce seuil réside dans la nécessité d’insérer ces projets de béguinage dans un tissu urbain existant : « une quinzaine de logements, cela permet de ne pas trop consommer de terrain et donc de pouvoir les insérer dans un tissu urbain préexistant de telle manière à permettre aux personnes âgées de pouvoir accéder facilement à pied aux commerces de proximité ».

La notion de proximité tient en effet, pour l’ensemble des acteurs interviewés, un rôle majeur non seulement pour faciliter l’accès des personnes âgées aux aménités urbaines mais aussi pour « leur donner conscience qu’ils font encore partie de la vie sociale de la ville et qu’on ne les met pas à l’écart ». Les acteurs insistent en effet sur le fait que « le béguinage, c’est un projet dans la ville, on ne doit surtout pas le mettre à l’écart ! ». Cette proximité s’avère ainsi d’autant plus importante que « les personnes âgées sont des personnes très sensibles à la perte du lien social », « s’il y a bien des personnes qui ne sont pas gênées par la présence d’une fenêtre sur une voie passante, c’est bien les personnes âgées ». La proximité est entendue, par les professionnels de la ville, dans son acceptation la plus large. Il s’agit de permettre facilement l’accès non seulement aux commerces mais aussi aux espaces verts : « les situer à proximité des espaces publics comme les squares de quartier ou les placettes, par contre il n’y a pas nécessairement un souci de dédier des espaces publics aux personnes âgées. Les espaces publics sont par essence des lieux de brassage ». Concernant la proximité des commerces, l’on peut ici citer l’exemple d’un projet où, en raison d’une faible offre commerciale, une borne pour commerçant

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ambulant a été installée à l’entrée du béguinage. Le dernier élément évoqué, quant à cette nécessité de proximité, est celui de l’accessibilité en transport en commun : « c’est un élément fondamental ! et les maîtres d’ouvrage l’ont compris, ce critère est presque toujours pris en compte par les maîtres d’ouvrage ».

Si l’insertion dans la ville est primordiale dans la réussite des projets de béguinage, certains architectes-urbanistes déplorent toutefois le fait que certains élus n’aient pas pris conscience de cette nécessité : « dans une commune, on s’est battu contre la commune sans gagner d’ailleurs, où leur projet de béguinage pour personnes âgées était relégué en fond de lotissement, c’est-à-dire qu’il donne sur une impasse et il est éloigné de tous les services de la commune. Bon il y a un bois à côté mais je pense que les personnes âgées préfèrent marcher jusqu’au bois, cela leur fait une promenade et profiter de tous les services sans problème plutôt que de devoir tous les jours se taper la route à pied jusqu’à la première boulangerie-pâtisserie mais bon notre avis n’a pas été pris en compte et la commune est restée sur son idée première. Le cas de cette position pour les personnes âgées me paraît complètement rédhibitoire ».

2.2. Offrir un lieu de vie sécurisé

Pour l’ensemble des acteurs rencontrés, la notion de sécurité est essentielle dans la conception des béguinages : « il est nécessaire que les personnes âgées se sentent en sécurité ». Cette sécurité est toutefois prise en compte à des échelles différentes et revêt des formes variées. La configuration même du béguinage et des logements constitue, aux yeux des acteurs, très certainement l’élément majeur de cette problématique de la sécurité. Pour favoriser ce sentiment de sécurité, le principe de "vu et être vu" apparaît comme incontournable pour les architectes-urbanistes. Le béguinage est ainsi le plus souvent conçu de manière à permettre la covisibilité : « ce sont souvent des logements en mitoyenneté, c’est-à-dire des bandes de logements qui sont organisées de manière à permettre la covisibilité au niveau des entrées et des logements, c’est-à-dire que ce sont souvent des formes en U ou en C, des formes qui permettent à chacun de pouvoir voir depuis sa fenêtre ce qui se passe chez le voisin et de savoir en même temps que le voisin a un œil sur vous donc chacun est chez soi mais chacun a le sentiment de pouvoir voir et être vu ». Ce principe du "vu et être vu" est également appliqué au logement : « il y a souvent de grandes baies vitrées comme ça non seulement la personne âgée peut observer ce qui se passe à l’extérieur mais en cas d’incident et/ou de chutes, la personne peut être vue et l’on peut venir lui porter secours et ça, ça rassure beaucoup les personnes âgées ». Concernant la conception du logement, il convient également de signaler que ce sont toujours des logements de plain-pied : « ce sont toujours des ensembles de plain-pied pour éviter l’escalier ».

Toujours dans ce souci de favoriser le sentiment de sécurité, une large majorité des béguinages sont aujourd’hui conçus comme des espaces fermés et cela principalement pour trois raisons : « le renforcement de la sécurité, éviter que l’animal de compagnie des personnes âgées ne s’enfuit et faciliter l’entretien (assuré le plus souvent par la collectivité locale) ». Si certains maîtres d’ouvrage préfèrent s’appuyer sur une présence humaine : « le béguinage n’est pas systématiquement

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fermé physiquement par une grille, parfois les maîtres d’ouvrage prévoient la présence d’un gardien », les architectes-urbanistes constatent néanmoins une tendance lourde, notamment de la part des élus, à favoriser la fermeture physique des béguinages : « les élus et maîtres d’ouvrage ont très souvent tendance à vouloir une grille mais la sécurité est aussi et surtout psychologique et c’est en cela que la notion de "vu et être vu" est importante et la forme des béguinages joue un rôle majeur ». Face à cette tendance, certains soulignent toutefois que cette sécurité poussée à l’extrême peut d’une part être source d’isolement et que d’autre part, elle ne correspond pas forcément aux attentes de la population de ces béguinages : « Concernant la volonté de vivre ou non dans un espace fermé, je pense que le social joue beaucoup, j’ai tendance à penser que la sociabilité est liée à la catégorie sociale. Les personnes âgées aisées vont rechercher davantage la sécurité, les personnes âgées plus modestes rechercheront plus le lien social ».

La question des espaces extérieurs, et notamment la circulation interne, est aussi évoquée comme étant un élément participant au sentiment de sécurité. Ainsi, « une attention particulière est toujours portée au cheminement piéton et également à la signalétique ». La circulation automobile est de même parfois interdite au sein du béguinage : « certains maîtres d’ouvrage interdisent la circulation automobile à l’intérieur du béguinage et ne souhaitent pas la présence de garages ». Concernant cette question, il convient de noter que certains architectes-urbanistes regrettent l’absence de garages attenants dans certains béguinages, ceux-ci pouvant servir d’espace de rangement : « ces personnes occupaient le plus souvent un grand logement et quand elles arrivent dans le béguinage, elles souhaitent pouvoir garder leurs meubles, et la taille des logements ne le permet pas toujours »

2.3. Des logements adaptables de petite taille

Compte tenu de l’entretien que nécessite un logement et considérant que la difficulté à réaliser cet entretien apparaît comme un des éléments poussant les personnes âgées à intégrer un béguinage, les logements proposés sont toujours de petite taille : « comme cela s’adresse à un public âgé, il n’y a pas besoin que ce soit de grands espaces parce qu’il y a le problème de l’entretien ». Si la taille de ces logements peut varier du T2 au T3, les architectes-urbanistes constatent néanmoins une tendance lourde à développer dorénavant davantage des T3 : « Récemment, on a travaillé avec un bailleur social qui nous a dit que la politique est de faire du type 3 car le type 2 a peu de succès parce que les personnes âgées étaient déçues de ne pas pouvoir recevoir. De plus le type 3 fonctionne pour un couple alors qu’un type 2 ne fonctionne absolument pas pour un couple. Mais bon cette politique du T2 ou T3 n’est pas encore homogène chez les différents bailleurs. Je pense que ce bailleur est dans le juste et qu’effectivement le type 2 n’est pas adapté pour les personnes âgées sauf pour certaines d’entre elles », « en fait, c’est étudié par rapport au fonctionnement des personnes âgées mais aussi c’est pensé pour pouvoir être recyclé pour d’autres personnes parce que si on faisait que des T2 cela restreindrait de façon importante les possibilités de recyclage de ce produit », « le T3 c’est le produit idéal pour le promoteur, il n’y a pas de prise de risque ; le risque c’est s’ils formalisent le béguinage qui dans la forme et dans son orientation est trop axé pour

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des personnes âgées, cela va rebuter les gens à y aller mais actuellement c’est pas le cas »

Enfin, il convient de signaler que le niveau de handicap apparaît pour les architectes-urbanistes plus discriminant que l’âge : « dans l’aménagement des logements, ce qui compte le plus pour moi, ce n’est pas l’âge des futurs locataires mais leur niveau de handicap ». Ainsi, chacun d’entre eux intègre les contraintes réglementaires liées aux personnes à mobilité réuite76 dans la conception des logements et produisent ainsi des logements adaptables77 ou adaptés78.

2.4. La présence de services : des avis non tranchés

Les situations en termes de services proposés (médecins, infirmières …) sont variées. L’on constate ainsi trois situations : certains projets ne disposent pas de services, dans d’autres ils sont obligatoires et enfin, une troisième situation, où des services collectifs sont à la disposition des locataires sans qu’ils soient tenus d’y faire appel : « ils peuvent recourir s’ils le souhaitent à des services extérieurs ». Parmi les acteurs rencontrés, certains s’interrogent aujourd’hui sur la nécessité de proposer ou non une offre de services en complément du logement : « aujourd’hui, certains nous disent il faut leur offrir une palette de services afin qu’en fonction de leurs besoins, qui ne sont jamais les mêmes d’une personne à l’autre, chacun puisse choisir, à chaque instant le service dont il a besoin ». Deux arguments sont le plus souvent mis en avant pour justifier cette réflexion, d’une part le coût élevé que représentent ces services, un coût qui reste à la charge du locataire et d’autre part, le profil des occupants de ces béguinages qui sont avant tout des personnes autonomes : « pour moi le béguinage, c’est bien ça, un ensemble de maisons sans pôle de services, après on passe dans la maison de personnes âgées ».

76 L’adaptabilité du logement fait l’objet d’une réglementation. Le principe d’adaptabilité des logements a pour objet de rendre possible l’utilisation d’une unité de vie par des personnes handicapées après réalisation de travaux aussi simples que possible. Depuis le décret d’application de 1980, tous les logements neufs situés en rez-de-chaussée des immeubles ne comprenant pas d’ascenseur et la totalité des logements neufs lorsque l’immeuble est équipé d’un ascenseur doivent être accessibles et adaptables (à faible coût) pour des personnes se déplaçant en fauteuil roulant. Notons que la législation en vigueur ne concerne ni les logements existants ni les personnes âgées. 77 Sont considérés comme adaptables tous les logements qui intègrent a priori la notion de handicap (circulations, hauteur des équipements électriques, câblage pour des installations domotiques, équipements modulables et évolutifs …) et qui permettent ainsi de réaliser l’adaptation à la situation spécifique du futur occupant sans travaux conséquents (sans remise en cause de la structure ni des gaines et réseaux communs) 78 Sont considérés comme adaptés les logements ayant fait l’objet d’aménagements spécifiques en vue de son occupation par une personne déjà identifiée. Ils permettent ainsi à la personne en situation de handicap d’avoir une vie quotidienne facilitée.

111

3. LE DEVELOPPEMENT DE PROJETS URBAINS INTERGENERATIONNELS : L’EXEMPLE DE LA COMMUNE DE PULNOY

Même si, comme le soulignent les professionnels de la Ville, les attentes des personnes âgées en matière d’habitat ne sont pas homogènes, une très large majorité d’entre eux insistent cependant sur la volonté des plus de 60 ans d’être intégrés à la vie de leur commune. Pour répondre à cette demande, certaines communes ont engagé des politiques Habitat axées sur la mixité intergénérationnelle. C’est le cas notamment de la commune de Pulnoy, dont nous allons présenter ici le projet de quartier intergénérationnel.

PULNOY : L’EXPERIENCE D’UN QUARTIER INTERGENERATIONNEL

ORIGINE DU PROJET

- Le vieillissement de la population de Pulnoy : conséquence du phénomène de périurbanisation, la commune de Pulnoy, située dans la périphérie Est de Nancy, a connu dans les années 1970 une évolution démographique conséquente faisant passer sa population de 176 habitants dans les années 1970 à 4 400 au recensement de 2004. Cette expansion urbaine, qui a provoqué le développement d’importantes zones pavillonnaires, s’est traduite dès la fin des années 1990 par l’arrivée massive d’une même classe d’âge à la retraite.

- Un projet d’habitat spécifique destiné aux seniors : pour répondre aux éventuels besoins et attentes en matière d’habitat de cette population à la retraite, la Municipalité a ainsi envisagé de réaliser un programme de logements destinés aux personnes âgées. Toutefois, « avant d’aller trop loin dans la définition du projet, il était important qu’on recueille l’avis de la population sur un tel projet ».

METHODOLOGIE

- Enquête par questionnaire auprès de la population de la commune : afin d’évaluer la faisabilité de ce projet, et notamment les besoins et la demande, la Ville de Pulnoy a souhaité recueillir l’avis de l’ensemble des habitants de la commune : « il était important d’interroger l’ensemble de la population et non seulement les ménages de plus de 60 ans, qui sont les plus directement concernés. Cela permet aux personnes qui souhaitent rapprocher leurs parents âgés résidant ailleurs de pouvoir également faire part de leur avis ». Avec l’appui de l’Agence d’urbanisme de Nancy, une enquête a ainsi été menée en février 2000 par voie de questionnaire auprès des 1 600 ménages de la commune (7% de retour), « certains questionnaires

112

ont même été transmis à des proches vivant dans d’autres communes » (8% des ménages ayant répondu). Les trois principaux thèmes abordés par le questionnaire étaient les suivants : l’avis et le souhait du ménage par rapport au projet, un descriptif du logement occupé et les caractéristiques socioéconomiques du ménage.

Les conclusions de cette enquête ont confirmé qu’« il y avait un gisement potentiel de demande pour un habitat adapté pour des personnes âgées » : 45% des ménages ayant répondu à l’enquête (soit 52 ménages) se sont révélés intéressés par le projet. Cette enquête auprès de la population a en outre permis de connaître plus précisément les attentes par rapport à ce projet (taille des logements, statut d’occupation souhaité …).

LES PRINCIPES FONDATEURS DU PROJET

- Proposer aux personnes âgées des réponses logement adaptées et graduées : pour faciliter la migration résidentielle des personnes âgées qui le souhaitent au sein de la commune, le projet urbain propose, sur une superficie de 8 hectares, un « ensemble démultiplié de solutions logements adaptés quels que soient l’âge et le niveau de handicap et de dépendance » : - un habitat pavillonnaire adapté : 20 maisons individuelles de plain-pied (T2 ou T3) en locatif social. Il convient de signaler que pour maintenir cette vocation d’accueil des personnes âgées dans le temps, un protocole d’accord a été signé entre la Ville et le bailleur. Lorsqu’un de ces logements se libère, en l’absence d’un candidat âgé, le bailleur s’engage à laisser un délai de deux mois à la Ville pour trouver et proposer un locataire âgé ; - une résidence-services privée pour personnes âgées composée de 37 logements (T2 à T5 avec parkings souterrains) en locatif et en accession ; - un EHPAD79, localisé au cœur du quartier, et regroupant 81 lits permanents (dont 12 lits en CANTOU80), 3 lits d’hébergement temporaire et 3 places d’accueil de jour.

- Favoriser la mixité intergénérationnelle et sociale : « afin d’éviter l’écueil de la création d’une zone gérontologique », la Municipalité a développé un programme fondé sur le principe de mixité intergénérationnelle regroupant : - 37 logements collectifs en locatif social (PLUS) ; - 7 logements individuels en accession sociale ; - 4 maisons de ville adaptées pour les personnes handicapées, en accession ou en locatif social ; - 64 parcelles à bâtir (individuel libre en accession) ; - une crèche multi-accueil.

79 EHPAD : Etablissement d’Hébergement pour Personnes Agées Dépendantes. 80 Les Centres d’Activités Naturelles Tirées d’Occupations Utiles (CANTOU) sont des unités de soin spécialisées dans l’accueil de personnes désorientées (maladie d’Alzheimer notamment).

113

- Offrir des services de proximité : consciente que « la qualité de vie exige un environnement adapté », la Municipalité a porté une attention particulière à la problématique de l’accessibilité. Ce secteur résidentiel, situé à proximité immédiate du centre-ville, est desservi par un arrêt de bus. L’accès aux commerces et aux services a également été intégré dans le projet : une boulangerie est implantée en rez-de-chaussée des logements collectifs et les habitants de ce nouveau quartier peuvent accéder au réseau gérontologique et au réseau de soins de l’EHPAD (intervenants médico-sociaux et sociaux, services d’aide à domicile …). Enfin, la salle polyvalente de l’EHPAD est accessible (pendant certains créneaux horaires) aux habitants de ce secteur résidentiel.

LES PARTENAIRES - Appui technique et méthodologique : l’Agence de Développement et d’Urbanisme de l’Aire Urbaine du Grand Nancy (ADUAN) et la Communauté Urbaine du Grand Nancy ; - Partenaires financeurs : Conseil Général, CRAM, Bailleur social, CAF ; - Partenaires privés : promoteurs immobiliers.

CONTACT : M. Royer, Maire de Pulnoy, Vice-président de la Communauté urbaine du Grand Nancy et Conseiller Général.

EVALUATION

• Une réponse Logement adaptée à l’ensemble de la population

Même si une évaluation du projet apparaît aujourd’hui prématurée (l’ensemble des logements prévus n’ayant pas encore été tous livrés - résidence-services et parcelles en lots libres-), le quartier intergénérationnel semble néanmoins avoir apporté une réponse adaptée aux besoins de la population pulnéenne âgée mais également aux besoins des jeunes ménages, plusieurs éléments le confirment. Tout d’abord, concernant la population âgée, l’ensemble des logements locatifs de plain-pied sont aujourd’hui occupés et les locataires expriment volontiers leur satisfaction. En effet, lors de notre visite sur le site, plusieurs occupants nous ont déclaré : « on est vraiment bien ici, je ne bougerais pour rien au monde ! ». De même, si la résidence-service n’est pas encore construite, « les demandes affluent : il y a 100 demandes pour 40 places ». Les besoins en matière de logement des jeunes ménages apparaissent, eux aussi, satisfaits : « l’enquête avait révélé des demandes latentes en accession pour les jeunes ménages, et on a répondu à ces demandes dans le projet avec les parcelles à bâtir ».

114

CONCLUSION

Selon un sondage réalisé en 2005 par la Sofres pour la Fédération Hospitalière de France, neuf retraités sur dix déclarent vouloir rester le plus longtemps possible à domicile. Si ce phénomène a clairement été énoncé lors des entretiens conduits auprès des professionnels de la ville, ces derniers ont également mis en exergue d’autres spécificités concernant les attentes et besoins des personnes de 65 ans et plus en matière d’habitat.

Tout d’abord, les attentes des personnes de 65 ans et plus en matière d’habitat ne sont pas homogènes. De nombreux facteurs influencent les attentes et les besoins des 65 ans et plus. Ainsi, selon l’âge mais surtout le statut matrimonial, le degré d’autonomie, les aménités recherchés, les attentes apparaissent différenciées ; certaines personnes recherchant à éviter l’isolement et la proximité des services, d’autres préférant un cadre de vie plus calme.

Si les attentes des 65 ans et plus en matière d’habitat sont déterminées par divers critères, les professionnels de la ville insistent néanmoins sur une caractéristique commune aux 65 ans et plus : le souhait de maintenir un lien social intergénérationnel. C’est ainsi que l’on constate une reconnaissance croissante de l’intergénérationnel dans les projets menés par les professionnels de la ville ; toutefois, cette question de l’intergénérationnel est envisagée, selon son acceptation, sous différentes formes. Certaines communes, comme celle de Pulnoy, s’appuient sur une acceptation large de l’intergénérationnel et développent des projets urbains qui reposent sur un objectif de mixité intergénérationnelle et sociale. D’autres acteurs de la ville, constatant que les personnes de 65 ans et plus souhaitent "rester en relation avec les autres" mais pas nécessairement "habiter avec les autres", favorisent davantage les projets de béguinages, c’est-à-dire l’émergence de petites unités de vie composées le plus souvent de 12 à 20 logements et destinées exclusivement aux personnes de 65 ans et plus. Si de nombreux acteurs envisagent le béguinage comme le produit intermédiaire, le « chaînon manquant entre l’habitation et la maison de retraite médicalisée », certains insistent toutefois sur les effets pervers de ce type de produit : certains promoteurs et/ou élus s’appuyant sur des principes qui pourraient aller à l’encontre des attentes des 65 ans et plus et notamment les besoins de proximité géographique et d’échanges intergénérationnels. Les discours et débats des professionnels de la ville sur le béguinage témoignent, pour certains de leur propre aveu, d’une certaine méconnaissance des attentes des 65 ans et plus et de la difficulté pour ces mêmes acteurs de se projeter dans l’avenir compte tenu des incertitudes pesant sur les modifications et les changements de comportement qui peuvent être attendus pour les générations futures.

CHAPITRE 7

LA MOBILITE DES PERSONNES AGEES :

UNE ANALYSE DES ENQUETES DEPLACEMENT DE LA REGION NORD PAS-DE-CALAIS

117

La question posée est celle de la mobilité des personnes âgées du Nord-Pas-de-Calais et des moyens actuels et à venir à mettre en œuvre pour satisfaire leurs besoins et maintenir leur qualité de vie. Une connaissance pointue des modes de vie et des déplacements de cette population dans les agglomérations de la région s’impose donc. La description sociodémographique de la population interrogée, âgée de plus de 60 ans, se fera à travers la composition du ménage, le degré d’instruction et les revenus. Nous nous pencherons ensuite sur les potentialités d’utilisation de la voiture et des transports collectifs, et sur les habitudes de déplacements.

1. METHODOLOGIE

Les enquêtes ménages déplacements sont réalisées dans des agglomérations de plus de 100.000 habitants. Nous étudions donc une population vivant en ville ou en milieu périurbain.

Comme pour l’étude du CERTU81, et pour disposer d’un échantillon suffisamment important, nous avons globalisé les informations disponibles : les six enquêtes réalisées dans les agglomérations de Béthune, Douai, Dunkerque, Lille, Maubeuge et Valenciennes. Compte tenu des premières conclusions à ce stade de notre réflexion, et en complément des travaux déjà réalisés sur le sujet, nous distinguerons les ménages résidant en milieu urbain des autres.

Tableau 20 : récapitulatif des enquêtes ménages existantes de la région. Périmètre Enquête et exploitation Echantillon Autorité

Béthune Disponible (2004) 2502 ménages Syndicat Mixte d’Etudes pour le SCOT de l’Artois

Agglomération de Douai Disponible (1996) 1500 ménages Syndicat des transports du Douaisis

Communauté urbaine de Dunkerque et communes périurbaines

Disponible (1991, 2003) 2000 ménages Communauté Urbaine de Dunkerque

Arrondissement de Lille Disponible (1976, 1987, 1998) 5100 ménages Lille Métropole

Communauté Urbaine

Maubeuge Disponible (2004) 2048 ménages Agglomération de Maubeuge et Val de Sambre

Arrondissement de Valenciennes Disponible (1985, 1997) 2500 ménages Valenciennes -Métropole

81 La mobilité des personnes âgées. Analyse des enquêtes ménages déplacements. Rapport d’étude. Collection du CERTU.

118

Dans ces exploitations spécifiques sur les déplacements des personnes âgées, on a fait explicitement la différence entre les personnes résidant en zone urbaine des autres. Cette motivation est nécessaire pour des mises en parallèle avec les aspects qualitatifs de l’étude mais elle s’appuie aussi sur les différences générales que l’on peut constater sur les déplacements selon les lieux d’habitation. C’est pourquoi on présente en annexe les principaux résultats de l’exploitation de l’enquête nationale sur les déplacements urbains de 199382.

Pour différencier les communes de référence (très urbaines et moins urbaines), nous avons été placés devant un problème de non-concordance des définitions :

- La définition des zones centrales est laissée à la discrétion des maîtres d’œuvre de l’enquête. La notion de ville centre est plus ou moins étendue selon les enquêtes et il est difficile d’en tirer un élément descriptif commun. Dans l’agglomération lilloise, seules Lille, Roubaix et Tourcoing sont définies comme des communes centres alors que presque toute la Communauté Urbaine de Dunkerque l’est.

- Les classements des communes homogènes au niveau national comme le ZAU INSEE n’est pas utilisable. Presque toute la zone CETE de Lille ou de Béthune (cartes disponibles en annexe) couvre des territoires en zone urbaine au contraire de Dunkerque.

Il a fallu concevoir un zonage adapté permettant de différencier les communes les plus urbaines (souvent les mieux desservies par les transports en communs) des autres dans les cinq enquêtes en question. Très concrètement, nous avons procédé comme suit :

- Pour Béthune, le zonage CETE ne permettait pas un découpage fin. On a choisi de repérer les zones centrales par les villes de Bruay et de Béthune puis d’y ajouter les contours CETE les plus immédiats.

- Pour Douai, on étend la typologie CETE. Les communes les plus urbaines sont identifiées par les communes centres et les communes les plus proches.

- Pour Dunkerque, on retient la typologie CETE (les communes les plus urbaines comprennent presque toutes les communes de la CUD).

- Pour Lille, on étend la typologie CETE. Les communes identifiées comme les plus urbaines sont identifiées comme les communes centres (Lille, Roubaix, Tourcoing et Villeneuve d’Ascq, Armentières), les communes les plus proches et les communes situées sur les grands axes urbains.

- Pour Maubeuge et Valenciennes, on étend la typologie CETE. Les communes les plus urbaines sont identifiées par les communes centres et les communes les plus proches.

82 Interactions entre transports et urbanisation en milieu urbain, Sabine KAZMIERCZAK, Eric FLINOIS et Hubert JAYET, rapport au Service d’Etudes Techniques des Routes et Autoroutes (SETRA). Juillet 2001.

119

2. QUI SONT LES PERSONNES AGEES AUJOURD’HUI ?

2.1. Sexe et âge de la population étudiée.

Les enquêtes ménages déplacement (EMD) s’intéressent aux ménages vivant dans un logement ordinaire. Les personnes en institution sont donc exclues.

Graphique 8 : Pyramide des âges des personnes interrogées. Distribution différenciée selon le sexe.

0 5000 10000 15000 20000 25000 30000 35000 40000 45000

60-64

65-69

70-74

75-80

80+

FEMMES

HOMMES

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

Graphique 9 : Pyramide des âges des personnes interrogées. Distribution différenciée selon le sexe et la zone de résidence (dense et moins dense).

0 5000 10000 15000 20000 25000

60-64

65-69

70-74

75-80

80+Femmes-Moins Dense

Hommes-Moins Dense

Femmes-Dense

Hommes-Dense

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

120

De manière générale, on observe à chaque tranche d’âge une surreprésentation des femmes sur les hommes. Cette surreprésentation n’augmente pas significativement avec l’âge. Comme l’enquête sur les déplacements ne représente pas exactement la population, on en conclut donc que les femmes se déplacent moins. Cette hypothèse est confirmée dans les paragraphes portant sur les fréquences.

L’option qui a été prise, en référence aux premiers résultats de l’étude et à l’organisation des focus groupes, qui consiste à partager les personnes interrogées en fonction du niveau d’urbanisation permet de fournir un résultat très intéressant : dans notre région, la surreprésentation des femmes est globalement moins importante dans les zones plus urbaines. Ce phénomène est d’autant plus visible entre 65 et 79 ans. Cette donnée importante doit être mise en parallèle avec les autres, notamment celles portant sur les revenus.

2.2. Les revenus

Le revenu est une variable importante à observer car il détermine le taux de motorisation des ménages.

Graphique 10 : Les revenus des personnes interrogées selon l’âge.

0%

10%

20%

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100%

60-64 65-69 70-74 75-80 80+

30.000 € etplus

De 20.000 àmoins de30.000 €

De 10.000 àmoins de20.000 €

Moins de10.000 €

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

Plus on avance en âge, plus la part des ménages ayant des revenus supérieurs à 10.000€ ou supérieurs à 20.000€ par an diminue. Ceci s’explique naturellement par la plus forte représentation des femmes et des ménages d’une seule personne.

Encore une fois la distinction entre les zones de résidence est riche d’enseignement. Si la distribution des revenus selon l’âge entre zone dense et moins dense est sensiblement la même entre 60 et 75 ans, il existe un réel fossé après 75 ans. A

121

partir de 75 ans, le poids des ménages ayant de faibles ressources (moins de 10.000€) est très élevé dans les zones moins denses. On peut penser à une plus forte représentation des personnes allocataires du minimum vieillesse liée à l’activité agricole ou à l’inactivité des femmes.

Néanmoins, la distribution des revenus pour la tranche d’âge la moins élevée (entre 60 et 64 ans) laisse penser que ces écarts de ressources se réduiront dans les années à venir. La hausse des prix immobiliers et l’attrait général pour les aménités environnementales ont, et vont encore, spatialement redistribuer les ménages dans l’espace urbain et périurbain modifiant de fait les comportements de mobilité.

Graphique 11 : Les revenus des personnes interrogées selon l’âge et la zone de résidence.

0%

10%

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50%

60%

70%

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100%

60-64DENSE

60-64MOINSDENSE

65-69DENSE

65-69MOINSDENSE

70-74DENSE

70-74MOINSDENSE

75-80DENSE

75-80MOINSDENSE

80+DENSE

80+MOINSDENSE

30.000 € etplus

De 20.000 àmoins de30.000 €

De 10.000 àmoins de20.000 €

Moins de10.000 €

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

122

2.3. Le niveau d’instruction

Graphique 12 : Dernier établissement scolaire fréquenté à plein temps selon le sexe.

0%10%20%

30%40%50%

60%70%80%

90%100%

Femmes Hommes

Supérieur

Secondaire

Primaire

Apprentissage

Pas d'études

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

D’après les travaux menés au niveau national, en matière de mobilité générale des personnes, le niveau d’instruction est encore plus déterminant que le revenu. Ces travaux montrent que la mobilité est différente chez les femmes et chez les hommes. Les femmes se déplacent beaucoup moins et la répartition des modes de transport diffère suivant le sexe.

Au niveau régional, on trouve les mêmes différenciations des niveaux d’instruction selon le sexe et l’âge. Les femmes de plus de 60 ans ont très rarement réalisé des études supérieures et presque 60% d’entre elles ont arrêté leurs études en primaire contre moins de 50% des hommes.

Le poids des personnes ayant arrêté leurs études très tôt est d’autant plus important que l’âge augmente. Ce phénomène observable par l’effet de seuil après 80 ans, s’explique pour partie par le poids des femmes chez les personnes plus âgées mais pas uniquement.

L’écart des niveaux de formation entre les personnes âgées de plus de 80 ans et celles âgées de 60 à 64 ans est frappant. A cet âge le poids des personnes ayant poursuivi leurs études au moins jusqu’au secondaire dépasse les 50%.

L’augmentation générale du niveau d’instruction et plus particulièrement l’augmentation du poids relatif des personnes ayant mené des études supérieures, aussi bien chez les hommes que chez les femmes, nous conduisent aussi à envisager des changements importants dans les comportements de déplacements.

123

Graphique 13 : Dernier établissement scolaire fréquenté à plein temps selon l’âge.

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60-64 65-69 70-74 75-80 80+

SupérieurSecondairePrimaireApprentissagePas d'études

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

L’observation des mêmes informations différenciées selon la zone de résidence (dense et moins dense) est riche d’enseignements. On montre en effet que les personnes résidant dans les zones moins denses sont moins formées. Les personnes ayant poursuivi des études supérieures sont largement plus représentées dans les zones plus urbaines. Cet écart est d’ailleurs d’autant plus notable que l’on avance en âge.

Graphique 14 : Dernier établissement scolaire fréquenté à plein temps selon l’âge et la zone de résidence (dense ou moins dense).

0%

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60-64Dense

60-64 Moinsdense

65-69Dense

65-69Moinsdense

70-74Dense

70-74Moinsdense

75-80Dense

75-80Moinsdense

80+Dense

80+Moinsdense

SupérieurSecondairePrimaireApprentissagePas d'études

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

124

Néanmoins, on note que ces écarts sont considérablement réduits chez les personnes âgées de 60 à 64 ans. Ce constat corrobore les conclusions déjà évoquées quant aux revenus : l’augmentation des niveaux d’instruction, chez les hommes et surtout chez les femmes, la nouvelle distribution spatiale des personnes ayant des revenus plus élevés et un niveau d’instruction plus important dans les zones moins denses va modifier les comportements de déplacements tant en volume qu’en termes de distance.

2.4. L’habitat

Au niveau national, le CERTU montre que les personnes vivant en habitat collectif se déplacent plus. Cette différence doit être reliée à la zone de résidence. Dans les zones plus urbaines, les logements en immeubles collectifs sont plus représentés et c’est aussi dans ces zones que les personnes sont les plus mobiles. Les comportements de mobilité relèvent sans doute plus de la densité urbaine et des équipements immédiatement accessibles que du type de l’habitat même si l’on peut envisager que le fait de résider dans une maison correspond à une gamme de loisirs à domicile : jardinage, bricolage…

Enfin, il faut envisager que de nouveaux comportements puissent se dessiner dans les années à venir, avec la multiplication des « doubles résidences ».

Graphique 15 : Les types d’habitat selon les zones de résidences.

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Dense Moins dense

CollectifIndividuel

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

125

3. LES RELATIONS DES PERSONNES AGEES AUX TRANSPORTS

3.1. Usage des modes de transport mécanisés

Les seniors sont majoritairement peu familiers d’un mode de transport en particulier. Les principaux modes sont la voiture passager, la voiture conducteur et le bus urbain. L’usage quotidien se remarque surtout pour les conducteurs de voiture. Quand on peut conduire, on conduit souvent.

L’usage fait des réseaux urbains de transports en commun par les personnes de plus de 60 ans dans les agglomérations de notre région est sensiblement le même qu’au niveau national. Ceci n’est pas le cas de l’usage de la voiture (conducteur ou passager). Les personnes interrogées utilisant au moins deux fois par semaine la voiture comme conducteur sont 1,5 fois relativement plus nombreuses dans notre région. On constate un écart presque aussi important pour l’utilisation de la voiture comme passager. Les personnes de plus de 60 ans dans notre région sont donc de grands utilisateurs de la voiture.

Graphique 16 : Usage des modes de transport. En semaine (du lundi au vendredi), avec quelle fréquence utilisez-vous la voiture conducteur,

la voiture passager, le réseau urbain, pour vous déplacer dans les agglomérations ?

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20%

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100%

VP Passager VP Conducteur Réseau urbain

Jamais

Excep-tionnellement

Deux fois parmois

Deux fois parsemaine

Tous les jours

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

Les personnes résidant dans les zones plus denses n’ont pas de comportements très différenciés des autres en matière d’utilisation de la voiture. C’est un résultat très important. Malgré la facilité d’utilisation des transports en commun (TC) dans

126

les zones les plus denses et notamment des TC en modes fixes pour l’agglomération de Lille, les personnes de plus de 60 ans continuent d’avoir un usage assez intensif de la voiture.

Notons cependant les écarts d’utilisation des TC selon les zones de résidences. Les personnes résidant dans les communes les plus éloignées des centres utilisent vraiment très rarement les transports en communs sans doute parce qu’ils sont moins commodément accessibles.

Graphique 17 : Usage des modes de transport selon la zone de résidence (dense, moins dense). En

semaine (du lundi au vendredi), avec quelle fréquence utilisez-vous la voiture conducteur, la voiture passager, le réseau urbain, pour vous déplacer dans les agglomérations ?

0%

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VP PassagerDense

VP PassagerMoins dense

VPConducteur

Dense

VPConducteurMoins dense

Réseau UrbainDense

Réseau UrbainMoins dense

JamaisExceptionnellementDeux fois par moisDeux fois par semaineTous les jours

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

127

3.2. Possession de la voiture

3.2.1. LE TAUX D’EQUIPEMENT DES MENAGES

Graphique 18 : Taux d’équipement en voiture des ménages selon la zone de résidence (dense ou moins dense).

30,00%

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50,00%

60,00%

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80,00%

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60-64 65-79 70-74 75-79 80+

DenseMoins dense

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

Le taux d’équipement des ménages est la part des ménages possédant au moins une voiture. Contrairement à beaucoup d’autres variables observées, mais aussi comme le laissent supposer les usages des modes de transport, on ne peut pas véritablement opposer les personnes résidant en zone dense des autres. On peut seulement noter un moindre équipement des ménages de moins de 75 ans dans les zones moins denses alors que ces dernières sont aussi les moins en mesure d’utiliser les transports en commun.

3.2.2. L’INCIDENCE SUR L’USAGE DES PRINCIPAUX MODES

La motorisation a un impact direct sur les habitudes d’utilisation des différents modes. Plus les seniors possèdent de voitures, plus ils l’utilisent comme conducteurs. Inversement, leur fréquence d’utilisation des transports en commun diminue fortement avec la motorisation.

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Graphique 19 : Usage des modes de transport selon la motorisation.

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aucune voiture 1 voiture 2 voitures et plus Ensemble

Voiture conducteurVoiture passagerRéseau urbainAutre

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

Posséder un ou plusieurs véhicules conditionne fondamentalement l’usage des modes de transport, que la personne réside ou non dans la ville dense (que l’on considère le cas du conducteur ou du passager). Nous pouvons seulement noter une plus grande proportion de personnes ne possédant pas de véhicule et se faisant accompagner dans les zones moins denses. La difficulté à disposer d’un transport en commun adapté ou peut-être d’une meilleure solidarité intergénérationnelle peuvent l’expliquer.

Posséder un véhicule limite de fait et de manière radicale l’usage des transports en commun. La voiture est donc « préférée » par les personnes âgées comme par les actifs. Aussi, les ménages utilisant le plus les TC n’ont pas de voiture. L’usage des TC est d’autant plus important que les personnes résident dans des zones denses. Ces derniers résultats renforcent l’idée que ce type de transport n’est utilisé que s’il remplit des conditions d’accessibilité et d’intensité (dessertes, cadencements, confort…) importantes, conditions présentes uniquement dans les zones urbaines plus denses.

Nous vérifierons par la suite sur des échantillons restreints de l’agglomération lilloise (qui dispose d’un réseau en mode fixe), l’impact de la qualité du réseau TC sur les comportements des personnes aux âges plus avancés.

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Graphique 20 : Usage des modes de transport selon la motorisation et la zone de résidence (dense ou moins dense)

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Aucune voiture 1 voiture 2 voitures et plus

VC DenseVC Moins denseVP DenseVP Moins denseRU DenseRU Moins dense

(VC pour voiture conducteur, VP pour voiture passager et RU pour réseau urbain)

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

3.3. Permis de conduire et usage de la voiture

Graphique 21 : La possession du permis de conduire selon le sexe, l’âge et la zone de résidence (dense ou moins dense)

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60-64 65-69 70-74 75-80 80+

Femmes-Dense

Hommes-Dense

Femmes-Moinsdense

Hommes-Moinsdense

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

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La possession du permis de conduire varie fortement selon le sexe. Elle décroît avec l’âge pour les femmes. Il existe certes une forte disparité homme femme, mais elle va se réduire. Il y a un effet de génération qui peut annoncer des taux de possession du permis de plus en plus importants pour les femmes. Chez les générations plus jeunes la possession du permis de conduire est aussi importante chez les femmes que chez les hommes. A l’avenir les courbes se rejoindront, modifiant d’autant les comportements de mobilité.

3.4. Abonnement et usage des transports en commun

Au niveau national, les enquêtes ont montré que la gratuité des abonnements des TC est déterminante. On note que globalement les femmes ont un taux d’abonnement plus élevé. Le taux d’abonnement augmente avec l’âge sauf après 80 ans. C’est un âge charnière.

Graphique 22 : La possession d’un abonnement TC selon le sexe, l’âge et la zone de résidence (dense ou moins dense).

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60-64 65-69 70-74 75-79 80+

Femmes-Dense

Hommes-Dense

Femmes-Moinsdense

Hommes-Moinsdense

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

Il faut néanmoins souligner le cas des hommes de plus de 80 ans résidant en zone urbaine. Ces personnes ont un taux d’abonnement très important. Dans notre région et après 80 ans, les hommes résidant en zone urbaine maintiennent une mobilité certaine en utilisant plus les transports en commun.

La possession d’un abonnement TC augmente considérablement l’usage du réseau urbain. Le mode mécanisé de transport principal des personnes possédant un abonnement TC est le réseau urbain. La communication sur les possibilités offertes

131

par les réseaux urbains, comme les avantages tarifaires pour les personnes âgées sont sans doute des actions à valoriser pour diminuer l’usage de la voiture par les ménages les plus urbains. Ces ménages utilisent en effet relativement plus que les autres les réseaux urbains même quand ils ne disposent pas d’abonnement.

Graphique 23 : Usage des modes selon la possession d’un abonnement TC.

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Avec abonnement Sans abonnement Ensemble

Voitureconducteur

Voirturepassager

Réseauurbain

Autre

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

Graphique 24 : Usage des modes selon la possession d’un abonnement TC selon la zone de résidence (dense ou moins dense).

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45,00%

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Avec abonnement Sans abonnement Ensemble

VC DenseVC Moins denseVP DenseVP Moins denseRU DenseRU Moins dense

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

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3.5. Les opinions des personnes âgées

Les questions concernent non pas les difficultés réellement rencontrées par les personnes interrogées mais le jugement accordé aux problèmes qui se posent dans l’agglomération. L’insécurité routière et les difficultés de circulation sont ainsi des thèmes récurrents d’insatisfaction.

De manière générale, les plus de 60 ans ont une opinion moins marquée que le reste de la population : les « sans-opinion » sont relativement plus nombreux.

Les personnes âgées estiment plus que le reste de la population que les dangers des déplacements à pied sont importants. Il semble néanmoins que l’insécurité des déplacements à pied soit plutôt sous-estimée. Avec les déplacements à vélo et en deux-roues motorisées, c’est un des problèmes qui est le moins souvent cité comme plus important.

Graphique 25 : Opinion des personnes âgées et des moins de 60 ans sur les risques encourus lors des déplacements.

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moinsde 60ans

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moinsde 60ans

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moinsde 60ans

plusde 60ans

moinsde 60ans

plusde 60ans

moinsde 60ans

plusde 60ans

Circulation Risquesd'accident

Pollutionauto

Stationnement Transports encommun

Déplacementà pied

Déplacementà vélo

Déplacementsen 2 rouesmotorisés

Plutôt importantPas d'opinionPlutôt pas important

opinion age

Données

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

133

4. LES DEPLACEMENTS DES PERSONNES AGEES

4.1. Quelles fréquences de déplacement ?

Tableau 21 : Fréquences journalières de déplacements des personnes de plus de 60 ans. Dense Moins dense Femmes Hommes Ensemble Femmes Hommes Ensemble Voiture 1,04 0,99 1,02 0,66 0,69 0,68 Marche 1,13 2,09 1,51 1,22 2,03 1,56 Transports en commun

0,14 0,11 0,13 0,06 0,04 0,05

Deux-roues 0,03 0,06 0,04 0,10 0,15 0,12 Autre 0,01 0,01 0,01 0,02 0,03 0,02 Total 2,35 3,26 2,72 2,06 2,94 2,43

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

Les personnes résidant en ville se déplacent plus. Nous aurions pu penser que cette plus grande mobilité était imputable à la proximité aux services et qu’elle relève de la marche. Il n’en est rien. Les personnes résidant en zone plus urbaine se déplacent plus en voiture. Il s’agit, ne l’oublions pas, de personnes aux revenus et aux qualifications plus élevés. La motorisation et l’usage de la voiture ne dépendent donc pas de la qualité et des modes alternatifs offerts mais des moyens financiers et sans doute aussi des habitudes acquises dans la période d’activité.

Les déplacements à pied sont aussi nombreux en zone dense qu’en zone moins dense. Mêmes s’ils ne représentent pas un nombre important de déplacements, ceux utilisant les transports en commun sont nettement plus nombreux dans les zones plus denses. Notons enfin que les hommes, quelle que soit la zone de résidence, se déplacent plus que les femmes. On verra dans les sous-sections suivantes que leurs motifs sont plus diversifiés.

4.2. Quels motifs de déplacement ?

Le principal motif relève des achats, loin devant les visites, les loisirs et la promenade. 2/3 des trajets « achats » concernent les petits et moyens commerces. Les hypermarchés attirent en majorité des personnes se déplaçant en voiture.

La variation du poids des motifs selon l’âge et selon le sexe doit être reliée à la fréquence des déplacements. Avec l’âge et quel que soit le sexe, on voit que le poids

134

relatifs des achats augmente. Les déplacements « indispensables » sont de plus en plus représentés parce que les personnes se déplacent moins.

Il y a une disparité des motifs entre les sexes. Les hommes se déplacent plus pour les loisirs et les accompagnements.

Graphique 26 : Les motifs de déplacement selon le sexe et l’âge.

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femme homme

achatssantédémarcheloisirs restoPromenade, leche vitrinevisiteaccompagnement

sexe Données

motif

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

Les répartitions des motifs de déplacement selon la zone de résidence sont différentes. La principale différence tient aux motifs d’achats.

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Graphique 27 : Les motifs de déplacement selon l’âge et la zone de résidence (dense et moins dense).

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dense moins dense

achatssantédémarcheloisirs restoPromenade, leche vitrinevisiteaccompagnement

zone Données

motif

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

4.3. Quels modes de déplacement ?

Graphique 28 : Les modes de déplacement selon le sexe et l’âge.

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Somme60-64

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femme homme

Marche TC Voiture passager Voiture conducteur

Sexe Données

Mode

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

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Dans les années 80, on a montré que la marche perdait du terrain, les deux-roues s’effondraient, les TC résistaient. Le troisième âge forme une catégorie de marcheurs plus importante que le reste de la population au détriment de la voiture. La voiture est le deuxième mode utilisé. La part des TC est beaucoup plus importante dans les villes où le réseau dispose de lignes en site propre. Le site propre est plus performant mais il y aussi un effet qualité de réseau d’ensemble.

Les Enquêtes Ménages Déplacement réalisées dans notre région montrent la grande différence entre les sexes. Les hommes, quel que soit leur âge, utilisent plus la voiture comme conducteur. Ceci doit directement être relié à la possession du permis de conduire mais pas seulement. Quand les personnes vivent encore en couple, la place du passager revient le plus souvent la femme.

Si l’on considère la voiture en général, conducteur et passager, on note que l’usage des réseaux urbains est plus intensif chez les femmes et plus particulièrement quand elles ont entre 75 et 79 ans. La marche demeure même à plus de 80 ans, le principal mode de transport des femmes. Ce n’est le cas pour les hommes qu’après 80 ans. Il va de soi que la question de la sécurité des déplacements à pied est plus aiguë pour les âges les plus élevés.

Graphique 29 : Les modes de déplacement selon l’âge et la zone de résidence (dense et moins dense).

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dense moins dense

Marche TC Voiture passager Voiture conducteur

Zone Données

Mode

Source : EMD Nord-Pas-de-Calais 1996 à 2004. CETE.

La densité de la zone de résidence détermine fortement les poids relatifs des modes de déplacement des personnes. Si la marche devient avec l’âge un mode dominant,

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c’est aussi un mode plus urbain. La proximité à la plupart des équipements induit de fait ce type de comportement que l’on pourrait d’ailleurs retrouver chez les actifs (pour les déplacements qui n’ont pas de rapport avec leur activité professionnelle). D’ailleurs, l’usage de la marche ne varie pas beaucoup entre 60 et 80 ans chez les personnes résidant en zone plus urbaine.

Même si leur poids relatif est peu important, les transports en commun sont nettement plus utilisés dans les zones denses. Comme pour la marche, l’usage de ce mode relève plus de sa « disponibilité » que de préférences. En zone urbaine le poids des réseaux urbains comme de la voiture en général (conducteur et passager) ne varie pas beaucoup entre 60 et 80 ans. On doit seulement souligner une inflexion à partir de 80 ans qui est, on l’a déjà souligné, le fait des hommes.

138

CONCLUSION

Le travail réalisé sur ces six enquêtes régionales montre que les personnes de plus de 60 ans résidant dans la région ont globalement des comportements semblables à ceux observés au niveau national mais quelques particularités méritent d’être soulignées.

Des éléments communs nous permettent de dessiner les tendances d’une évolution probable des comportements de mobilité :

- Les déplacements des personnes de plus de 60 ans dépendent directement des comportements de mobilité qu’elles avaient étant actives. Il existe donc une corrélation forte entre l’intensité des déplacements, niveau de revenu, niveau d’éducation, possession du permis de conduire, et disposition d’un ou plusieurs véhicules. L’entrée dans le quatrième âge diminue fortement les déplacements. Les femmes se déplacent moins. Néanmoins, quand les personnes peuvent encore conduire, elles conduisent souvent.

- Des modifications importantes des variables déterminant les déplacements nous permettent d’envisager certaines évolutions concernant le nombre des déplacements. L’augmentation du poids des personnes ayant fait des études supérieures et la généralisation de la possession du permis de conduire quel que soit le sexe devraient augmenter le nombre de déplacements.

- Des modifications importantes des variables déterminant les déplacements nous permettent d’envisager certaines évolutions concernant les trajets. La périurbanisation et l’attrait général pour les aménités environnementales ont entraîné une nouvelle distribution des ménages selon les revenus. La présence de ménages aux revenus plus élevés résidant dans des zones moins urbaines va modifier les comportements de déplacements tant en volume qu’en termes de distance.

Les particularités : - Les personnes de plus de 60 ans de notre région sont de plus grands

utilisateurs de la voiture. - Malgré la facilité d’utilisation des transports en commun dans les zones les

plus denses et notamment des TC en modes fixes pour l’agglomération lilloise, les personnes de plus de 60 ans continuent d’avoir un usage intensif de la voiture.

- Les hommes de plus de 80 ans sont des utilisateurs de TC. L’utilisation des TC demeure généralement une alternative pour les personnes qui sont des conducteurs moins sûrs.

CHAPITRE 8

RELATION ENTRE LES PLUS DE 60 ANS ET LES DEPLACEMENTS ET TRANSPORTS :

LE POINT DE VUE DES PROFESSIONNELS, LES EXPERIENCES

141

La mobilité est un facteur important des conditions d’une bonne qualité de vie pour les personnes âgées : elle permet de maintenir les liens sociaux, d’avoir des activités de loisirs. La difficulté à se déplacer qu’éprouve toute personne âgée en perte partielle d’autonomie est un important facteur d’exclusion. En effet, moins un individu est mobile, plus il éprouve des difficultés à s’insérer socialement. Comme le rappelle Georges Cavalier, Président de la Fédération nationale des centres PACT-ARIM, le potentiel de mobilité des personnes âgées est un élément central de leur capital social83. Il est donc essentiel de promouvoir la mobilité des personnes âgées, de leur permettre de mieux se déplacer et d’accéder ainsi plus facilement aux commerces, aux services, aux loisirs… Ce chapitre s’attachera donc à cerner le discours des offreurs de transport84 sur la mobilité des personnes âgées de plus de 60 ans, leurs représentations et leurs perceptions, et à analyser les actions mises en œuvre par ces mêmes acteurs pour encourager et faciliter leurs déplacements.

1. LA MOBILITE DES PERSONNES AGEES : PERCEPTION ET REPRESENTATIONS DES PROFESSIONNELS DE LA VILLE

1.1. La motorisation des personnes âgées de plus de 60 ans : un facteur défavorable à la fréquentation des transports collectifs

Pour l’ensemble des acteurs rencontrés, il est incontestable que l’usage de la voiture particulière va croissant chez les plus de 60 ans qui prennent en effet volontiers le volant et sont de plus en plus fréquemment motorisés. Au début des années 1980, un peu plus de la moitié des 65 ans et plus n’avaient pas de voiture ; dès 2010, ils devraient être moins d’un quart à en être dépourvus85. Le fort développement de la motorisation des personnes de plus de 60 ans est avancé comme le frein majeur à la fréquentation des transports collectifs par les plus de 60 ans : « compte tenu de l’accroissement de cette population et de notre volonté d’augmenter la fréquentation, il faut qu’on arrive à amener cette clientèle au transport en commun, ce qui n’est pas une chose évidente car ce sont des gens qui avant avaient peu le permis de conduire et aujourd’hui elles ont le permis de conduire et une voiture ».

83 Cavalier G., Mobilité et accessibilité : un double défi in Institut des Villes, Villes et vieillir, La Documentation Française, 2004. 84 Par offreur de transport, nous entendons tout acteur intervenant dans la définition de la politique Transport d’un territoire (les autorités organisatrices de transport) et/ou intervenant dans l’exploitation d’un réseau de transport (les exploitants de transports, les associations). 85 Cavalier G., 2004, Op. Cit.

142

1.2. Une priorité aux jeunes et aux actifs

La motorisation des plus de 60 ans représente donc un facteur peu favorable aux transports collectifs. Si cela peut apparaître comme une raison supplémentaire de s’intéresser à leurs habitudes en matière de déplacement, afin de les inciter à utiliser ce mode de transport, la fréquentation de ces derniers par les plus jeunes et les actifs semble constituer un axe stratégique davantage prioritaire. Différents arguments sont avancés par les offreurs de transport pour tenter d’expliquer ce constat. Tout d’abord, pour certains offreurs de transport, « quelqu’un qui viendra au transport en commun avant l’âge de 60 ans, il va prendre une habitude, il va avoir un intérêt réel et on le reverra quand il aura l’âge de 60 ans ». Les offreurs de transport s’appuient ainsi sur le fait qu’avec l’âge, la personne évolue mais elle reste ce qu’elle a toujours été dans ses habitudes personnelles, comme dans ses comportements sociaux. Le second argument le plus souvent évoqué tient davantage au budget et plus spécialement au resserrement des finances : « il y a une enveloppe budgétaire, on essaie de faire pour tous, d’être à l’écoute des besoins de chacun mais on doit opérer des choix, on ne se concentre pas uniquement sur les seniors ». Le troisième argument le plus fréquemment cité par les offreurs de transport repose sur le fait que les plus de 60 ans ne souhaitent pas être stigmatisés, être "considérés à part" : « les personnes âgées ne doivent faire l’objet d’aucune forme de stigmatisation, elles n’ont pas envie d’être traitées de façon différente ». La SNCF avance enfin, quant à elle, le fait que la population âgée de plus de 60 ans ne constitue qu’une très faible part des usagers du TER : « 80% du trafic TER est le fait des actifs et des scolaires ».

1.3. Les plus de 60 ans : une population regroupée sous le vocable "Personne à Mobilité Réduite"

Si le développement de la motorisation est clairement identifié et mentionné par les offreurs de transport comme une tendance lourde, ceux-ci s’accordent également pour mettre en exergue les disparités de mobilité entre les plus de 60 ans, disparités corrélées à la capacité de déplacement et donc le plus souvent86 à leurs capacités physiques et motrices. Ainsi, la plupart des offreurs de transport ont tendance à regrouper, dans la définition de leur stratégie de développement, la clientèle de plus de 60 ans sous le vocable "Personne à Mobilité Réduite". A titre d’exemple, lors d’un entretien, l’interlocuteur a commencé son discours en précisant : « on ne va pas parler spécifiquement des personnes âgées mais des personnes qui peuvent éprouver des difficultés à se déplacer ». L’argument avancé pour expliquer ce regroupement des plus de 60 ans sous l’appellation "Personne à Mobilité Réduite" réside dans le fait que les améliorations réalisées pour faciliter l’accessibilité à ces personnes permettent d’accueillir dans de bonnes conditions l’ensemble des personnes de tous âges à mobilité réduite : « on est très attentif aux personnes à mobilité réduite parce que si on est accessible pour elles, en même temps on l’est pour les personnes âgées ». Précisons à cet égard que les personnes âgées

86 L’on précise ici "le plus souvent" dans la mesure où une personne peut n’éprouver aucune difficulté physique à se déplacer, mais le fait qu’elle réside dans un territoire où l’offre en transports en commun est peu développée voire inexistante et que cette personne soit de plus dépourvue du permis de conduire ou d’une voiture peut limiter ses capacités de déplacement.

143

représentent les deux-tiers des personnes à mobilité réduite87. Si les discours des offreurs de transport sont essentiellement fondés sur la notion de défaut de capacité motrice, ils ne sont néanmoins pas dépourvus de toute référence à l’âge. C’est ainsi que, généralement, les offreurs de transport définissent trois classes d’âge correspondant chacune à des capacités de déplacement différentes : « dans les seniors, il y a plusieurs tranches, il y a les moins de 75 ans, ce sont des gens qui peuvent se déplacer facilement, ce sont de jeunes retraités qui sortent de l’activité et qui se déplacent encore facilement, les 75-80 ans, les gens qui peuvent encore se déplacer mais avec plus de difficultés et il y a ceux qui ne peuvent plus se déplacer, le plus souvent les personnes de plus de 80 ans ».

87 Cavalier G., 2004, Op. Cit.

144

2. LES ACTIONS MISES EN PLACE PAR LES PROFESSIONNELS DE LA VILLE EN FAVEUR DE LA MOBILITE DES PERSONNES AGEES DE PLUS DE 60 ANS

2.1. Offrir des transports publics accessibles

Dans un souci de favoriser l’accès aux transports en commun à tous et notamment aux personnes à mobilité réduite et par conséquent aux personnes de plus de 60 ans, les offreurs de transport portent une attention particulière sur les améliorations fonctionnelles réalisées sur le réseau de transport collectif, et notamment sur la conception des véhicules (plancher surbaissé) et sur l’agencement des stations et des points d’arrêt et d’attente.

Le Service commercial de Transpole déclare ainsi qu’« aujourd’hui 80% du réseau est accessible et non polluant ». Le métro et le tramway sont entièrement accessibles, les véhicules sont équipés de plancher bas, des ascenseurs et des escalators sont présents dans les stations de métro. En outre, des places signalisées par un autocollant sont réservées aux personnes à mobilité réduite. Si le métro et le tramway sont complètement accessibles, tel n’est pas le cas des lignes de bus de la métropole lilloise. Aujourd’hui, un tiers du parc des bus sont à plancher bas et seuls quelques arrêts ont été surélevés pour permettre un accès de plain-pied aux véhicules. Pour renforcer la lisibilité des lignes de bus accessibles, Transpole indique depuis peu aux arrêts de bus et sur les fiches horaires, les lignes de bus entièrement accessibles aux personnes à mobilité réduite. Si aujourd’hui, l’ensemble des lignes de bus ne leur est pas accessible, Transpole projette néanmoins de rendre progressivement accessible l’ensemble du réseau : « toutes les lignes ne sont pas accessibles aux personnes à mobilité réduite, cela le sera au fur et à mesure du renouvellement du parc de véhicules ». Signalons à ce titre, que cette mise en accessibilité des réseaux de transports collectifs est d’autant plus incontournable qu’elle est imposée par le législateur. La loi du 11 février 2005 sur l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées impose en effet dans les articles 19 et 45 que « tout matériel roulant, renouvelé ou acquis, doit être accessible » et que « dans un délai de dix ans à compter de la publication de la loi, les services de transports collectifs doivent être accessibles ».

La reconfiguration et la modernisation des réseaux de transport apparaissent comme des facteurs clés dans la mise en accessibilité des systèmes de transport. Dans le cas de Transpole, c’est ainsi la mise en service des bus au gaz qui occasionne la mise en accessibilité de l’ensemble du réseau de bus. Pour le Syndicat Mixte des Transports du Douaisis, il s’agit de la mise en service du tramway, prévue pour le début de l’année 2008 qui suscite le renforcement de l’accessibilité du réseau. Actuellement, sur les 800 points d’arrêt du réseau de bus, seuls 30 sont accessibles aux personnes à mobilité réduite ; toutefois, un projet d’équipement de 200 points d’arrêt est prévu pour accompagner l’arrivée du tramway.

145

Pour favoriser l’utilisation des transports collectifs par les personnes âgées, l’ensemble des maillons de la chaîne des déplacements doit être accessible. Le trajet du domicile jusqu’à l’arrêt de l’autobus, du tramway ou de la gare ferroviaire peut se révéler dissuasif par ses aménagements peu sécurisants. Il est par conséquent particulièrement important de garantir l’accessibilité de la chaîne complète de déplacement, notamment par une conception des rues, des trottoirs adaptée aux personnes âgées. La Ville de Liège a pris conscience de cette nécessité et a créé en 1998, à l’initiative de l’Echevin des Services sociaux, de la famille et de la lecture publique de proximité, une Agence conseil en accessibilité, Accessplus, composée d’un technicien en accessibilité, d’une assistante sociale, d’une coordinatrice et d’un secrétaire. Parallèlement à sa fonction sociale88, l’agence Accessplus remplit également une mission d’« expert technique ». Le technicien en accessibilité est ainsi chargé de rendre un avis sur tous les permis de construire et les projets d’aménagement ou de réaménagement de la voirie (construction de la nouvelle gare TGV des Guillemins, aménagement de voiries en piétonniers et des places du centre de Liège, aménagement des boulevards de la Sauvenière et d’Avroy …). En cas d’avis défavorable, le porteur du projet est tenu d’apporter les modifications nécessaires pour rendre le projet conforme aux réglementations en vigueur.

2.2. Proposer des transports collectifs sûrs

Si les offreurs de transports portent une attention particulière à l’accessibilité, la sécurité constitue également un élément important de leur politique. Si l’ensemble des personnes, quel que soit leur âge, accordent une importance au thème de la sécurité, certains offreurs de transport soulignent néanmoins que la sensibilité des personnes de plus de 60 ans à ce sujet apparaît plus marquée : « les personnes âgées ont envie de sécurité, de se sentir en sécurité, de pouvoir être informées si besoin et plus qu’un actif ». Le renforcement de la sécurité est le plus souvent envisagé sous l’angle de l’amélioration du relationnel, ce qui se traduit le plus souvent par une présence humaine d’agents de surveillance plus importante, notamment pour Transpole.

Mais plus encore que l’âge, les offreurs de transport insistent sur la fréquence d’utilisation comme facteur déterminant le sentiment de sécurité dans les transports en commun : « quelqu’un qui utilise souvent le métro se sent plus en confiance parce qu’il a une bonne connaissance, quelqu’un qui n’utilise qu’occasionnellement le métro va déjà être stressé par le fait d’y aller, et de ce fait-là il est déjà moins en confiance », « souvent les gens qui ont peur, ce sont les gens qui ne sont pas clients », « lors de l’étude qu’on a menée il y a deux ans, sur les plus de 60 ans, cela

88 Accessplus a pour objectif non seulement d’apporter un regard d’expert sur tout projet de construction ou d’aménagement de l’espace public mais également :

Informer et orienter les personnes en situation de handicap sur tous les aspects de la vie quotidienne (accès à l’emploi, accès à la culture …) ;

Assurer le relais de l’information entre les travailleurs sociaux, les personnes handicapées et les autorités communales ;

Soutenir les actions entreprises par les partenaires institutionnels et associatifs en faveur des personnes handicapées ;

Mener des actions de sensibilisation au handicap vers un public le plus large possible.

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se constate, les non-clients sont plus pessimistes que nos clients sur tout ce qui est sécurité dans les transports, c’est dû à la méconnaissance, à la non-connaissance du produit, ils lisent le journal et les faits divers ».

Les offreurs de transport ont constaté à la suite de ce renforcement de la présence humaine « un écho positif de la part de toutes les personnes, tous âges confondus, de la présence de personnel dans les stations de métro ».

2.3. Une tarification préférentielle pour les plus modestes

Les pratiques de mobilité ne dépendent pas que de l’aptitude physique et du désir de bouger, elles sont également contraintes par le niveau de ressources. Conscients de cette contrainte, les offreurs de transport ont la plupart du temps mis en place une tarification préférentielle en faveur des plus de 60 ans. Plutôt que de leur accorder une gratuité générale et systématique, la politique adaptée par les offreurs de transport est de solvabiliser les plus modestes. Deux critères sont par conséquent utilisés par les offreurs de transport : l’âge et les ressources.

Si l’on considère le critère "âge", la majorité des tarifications préférentielles s’adresse à des personnes âgées de plus de 65 ans, c’est le cas notamment pour la carte Adagio proposée par Transpole ou encore la carte Or proposée par le Syndicat Mixte des Transports du Douaisis (SMTD). Les offreurs de transport avancent principalement deux raisons pour expliquer ce "seuil" de 65 ans, d’une part la motorisation de plus en plus développée chez les plus de 60 ans : « on ne peut pas les capter à la fin de leur vie active, ils ont le permis et la voiture » et d’autre part, les restrictions budgétaires : « l’âge de 60 ans a été proposé mais le Syndicat Mixte des Transports n’a pas souhaité abaisser l’âge pour obtenir la carte pour profiter de tarifs réduits. Il y a une enveloppe budgétaire et il y a des choix à faire ». Concernant la carte Senior proposée par la SCNF, il convient de signaler que celle-ci peut être obtenue dès l’âge de 60 ans et que, contrairement aux exemples que nous allons développer ci-dessous, l’obtention de celle-ci n’est soumise à aucun critère de ressources.

Comme l’âge, les ressources conditionnent le plus souvent l’obtention de tarifs préférentiels. L’on constate cependant une diversité de politiques tarifaires préférentielles. Nos divers entretiens nous permettent de relever d’ores et déjà deux types de politique. Une première qui consiste à ne cibler que les personnes âgées les plus modestes, c’est le cas de la carte Or du SMTD qui limite les tarifs réduits aux personnes non imposables et qui respectent le barème de ressources fixé par le SMTD. Précisons ici que ce barème de ressources a été mis en place par le SMTD en raison du nombre important de personnes percevant des rentes pour incapacité permanente causée par la silicose : « on est dans le bassin minier et il y avait des revenus notamment les rentes silicose qui constituent des revenus élevés mais qui ne sont pas intégrés dans les revenus imposables, donc nous on a recalculé la globalité des ressources imposables ou non ». La gratuité n’est pas appliquée, la carte Or coûte 40 euros et donne droit à un nombre illimité de trajets.

La deuxième politique tarifaire préférentielle observée consiste, quant à elle, à proposer des tarifs réduits pour l’ensemble de la population âgée de plus de 65 ans,

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c’est l’exemple de la carte Adagio de Transpole. Depuis 2006, trois critères de ressources ont ainsi été retenus par Transpole : ″être non imposable″, ″payer moins de 300 euros d’impôts″ et ″payer plus de 300 euros d’impôts″. Ces trois critères donnent lieu à trois gammes tarifaires différentes89 :

- les personnes non imposables bénéficient de la gratuité hors restriction horaire,

- les personnes payant moins de 300 euros d’impôts : tickets hebdomadaires et mensuels à 50% et l’abonnement annuel à 95€, aucune restriction horaire

- les personnes payant plus de 300 euros d’impôts : tickets hebdomadaires et mensuels à 50% et l’abonnement annuel à 190€ (95€ pour le conjoint), aucune restriction horaire.

Si les politiques tarifaires préférentielles varient selon les offreurs de transport, une tendance peut toutefois être relevée. Une priorité à solvabiliser les plus modestes est en effet clairement identifiable. Il convient cependant de préciser que si l’on considère le confort d’usage, la priorité semble davantage portée sur les "plus favorisés", ceux-ci n’étant soumis à aucune restriction horaire contrairement aux plus modestes. Pour certains offreurs de transport, cette restriction horaire ne constitue pas une réelle contrainte : « quand on est une personne âgée, on peut toujours choisir son heure de déplacement, ils peuvent adapter leur départ en fonction du bus ».

2.4. Favoriser l’appropriation fonctionnelle des transports collectifs

Les innovations technologiques occupent de plus en plus le champ de la vie quotidienne, et notamment dans les réseaux urbains (billettique, matériel roulant tel que le tramway, le VAL), les personnes âgées sont parfois réservées face à ces innovations. Ainsi, pour éviter qu’elles ne délaissent les transports collectifs en raison de ces avancées technologiques et pour accroître le confort d’usage, certains offreurs de transport ont mis en place un accompagnement humain pour favoriser l’acceptation et l’utilisation des nouvelles technologies dans les transports collectifs. Deux exemples peuvent à cet égard être cités, celui de Transpole et celui du Syndicat Mixte des Transports du Douaisis.

Lors de l’extension de la ligne 2 du VAL sur les communes de Tourcoing et Roubaix, Transpole a développé une « démarche préventive » auprès de l’ensemble des maisons de retraite de ces communes. Une salariée de Transpole s’est ainsi rendue dans les maisons de retraite de Roubaix et Tourcoing pour expliquer aux personnes résidant dans ces structures collectives comment utiliser les distributeurs automatiques de tickets et a même parfois également accompagné les personnes qui le souhaitaient lors d’un "trajet test" : « les personnes étaient habituées avec leur

89 Précisons ici que la redéfinition de la gamme tarifaire de Transpole en 2004 s’est accompagnée d’une augmentation conséquente du prix de l’abonnement (de +137,5% jusqu’à +375%) qui a suscité de nombreuses réactions de la part des plus de 60 ans concernés.

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bus et elles n’étaient pas trop rassurées de prendre le métro et en plus, prendre le métro pour elles c’était quand même quelque chose d’assez impressionnant ». Cette démarche a « très très bien été perçue parce qu’en fait pour quelqu’un qui n’a jamais pris le métro, il n’y a pas de conducteur bon maintenant il y a du personnel dans les stations qui peuvent vous renseigner ». Dans le cadre de la mise en place du Taxitub, service de transport à la demande que nous analyserons plus loin dans ce rapport, le Syndicat Mixte des Transports du Douaisis (SMTD) a également développé au sein des maisons de retraite un accompagnement humain. Une fois par mois ou à la demande, une salariée du SMTD propose aux résidents des maisons de retraite une formation à la réservation et au fonctionnement du Taxitub.

2.5. Des études prospectives et des sondages pour définir les habitudes de déplacement et les attentes et besoins des personnes âgées

La nécessité de connaître, de manière plus fine, les modes de vie, les attentes des personnes âgées est de plus en plus ressentie par les offreurs de transport comme un préalable incontournable à la définition d’une politique Transport adaptée aux besoins des plus de 60 ans : « Le meilleur moyen de favoriser l’usage des transports en commun par les plus de 60 ans est de tenir compte de leurs attentes ». Les offreurs de transport souhaitent ainsi privilégier les projets qui reposent sur le support d’un vécu connu et éprouvé plutôt que ceux dont la pertinence repose sur des spéculations.

Parmi les professionnels de la ville rencontrés, deux d’entre eux ont réalisé des enquêtes spécifiques quantitative et qualitative auprès des plus de 60 ans, il s’agit de l’exploitant de réseau Transpole et de la Ville de Nancy.

En juin 2003, Transpole a confié à un cabinet d’étude le soin de mener une enquête qualitative (10 entretiens semi-directifs) auprès des plus de 60 ans afin d’évaluer non seulement les profils de déplacements des plus de 60 ans, mais également les actions engagées par Transpole ainsi que son image auprès de cette clientèle. « C’est la seule cible par exemple sur laquelle on a été aussi loin dans l’analyse pour connaître leurs besoins, pour mieux connaître leurs déplacements, c’est une cible qu’on a approfondie ». De même, la Ville de Nancy par l’intermédiaire de l’Office nancéen des personnes âgées (ONPA)90 a lancé en mai 2005 une étude sur les déplacements des plus de 60 ans résidant en foyers-logements (525 questionnaires auto-administrés). Cette étude avait un double objectif, identifier les besoins et attentes des plus de 60 ans et réfléchir à la mise en place d’un système de transport adapté à cette cible en complément des moyens existant sur le réseau de transport de Nancy. Les conclusions de cette étude ont abouti à la mise en place d’un

90 Association déclarée, régie par la loi de 1901, l’Office nancéen des personnes âgées a pour objectifs de :

• promouvoir et coordonner toutes les initiatives concernant les seniors, notamment en exerçant un rôle général d'animation et d'information ;

• rechercher des moyens d'action propres à satisfaire des besoins nouveaux ; • assurer une liaison permanente entre les divers interlocuteurs intéressés par ces publics ; • informer les seniors et leurs familles (réalisation de colloques, entretien personnalisé ...).

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transport collectif à la demande pour les foyers-logements, système de transport qui sera assuré par la Connex (exploitant du réseau de transport de Nancy) via un minibus.

Si ces études et sondages auprès des plus de 60 ans sont perçus comme des éléments incontournables pour repérer et comprendre les attentes des plus de 60 ans, et pour les amener au transport collectif, certains offreurs de transport précisent, voire pour certains regrettent, qu’en raison du coût de ces études et des restrictions budgétaires, cette phase d’analyse est très souvent écartée : « bon il aurait fallu faire une étude derrière pour voir comment les gens (référence aux personnes âgées) ont évolué sur les titres achetés, malheureusement on n’avait pas de budget pour pouvoir le faire ».

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3. LE DEVELOPPEMENT DES SERVICES DE TRANSPORT A LA DEMANDE : L’EXEMPLE DE L’ASSOCIATION SPAM

Les transports en commun, même rendus accessibles, ne peuvent répondre à tous les besoins des personnes âgées, notamment celles qui résident loin des stations ou des arrêts de bus. Les acteurs qui se sont très certainement les premiers intéressés à cette problématique sont les communes, notamment par l’intermédiaire des centres communaux d’action sociale (CCAS). L’on peut ici citer l’exemple de la commune du Touquet qui depuis 1990 propose aux personnes âgées de plus de 60 ans un service de transport à la demande limité au territoire de la commune. Ce service de transport gratuit et accessible sans condition de ressources permet ainsi aux plus de 60 ans, et plus encore aux femmes âgées de plus de 80 ans (80% des usagers), de se rendre au marché ou encore chez le médecin. Si ce service présente un intérêt certain : « on a une forte demande, on fait entre 80 et 85 interventions par mois, c’est énorme ! », une critique est toutefois émise quant au confort et à l’accessibilité du véhicule utilisé (une Renault Mégane) : « le confort est moyen ».

Afin de desservir et désenclaver les quartiers les plus excentrés mais également pour éviter de mobiliser des autobus sur des lignes régulières peu fréquentées, le Syndicat mixte des transports du douaisis (SMTD) a lui aussi développé un service de transport à la demande, le Taxitub. Ce service non spécifique aux personnes de plus de 60 ans et qui s’appuie sur le réseau de taxis du territoire fonctionne sur réservation (au moins une heure avant le déplacement) et selon des horaires et des itinéraires prédéfinis (21 lignes), le Taxitub réalise ainsi des trajets de point d’arrêt à point d’arrêt. Si, comme nous venons de l’évoquer avec l’exemple de la commune du Touquet, la solution du transport à la demande est bien accueillie par les personnes âgées, le service Taxitub reste, quant à lui, essentiellement utilisé par les scolaires. Si le prix ne peut être réellement envisagé comme un frein à l’utilisation du Taxitub dans la mesure où le tarif est identique à celui d’un ticket de bus, le fait de se déplacer jusqu’à un arrêt de bus apparaît quant à lui davantage comme une contrainte. Cette hypothèse semble vérifiée si l’on considère la forte utilisation du service de transport à la demande mis en place par l’association de Service, de Proximité et d’Accompagnement à la Mobilité (association SPAM) dont nous allons ici exposer plus en détail le fonctionnement.

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L’ASSOCIATION SPAM : UN SERVICE DE TRANSPORT A LA DEMANDE

ORIGINE DU PROJET - Des besoins de déplacement et d’accompagnement non satisfaits : en

mars 2004, Madame Tinelli, alors au chômage, « s’est rendu compte que les différents services qu’elle rendait autour d’elle, et bien elle a vu dans un magazine économique qu’elle pouvait en faire un métier », décide de créer l’association de Service de Proximité et d’Accompagnement et de Mobilité (SPAM) pour pallier à ces carences et améliorer ainsi le quotidien des personnes âgées.

LES OBJECTIFS - Proposer des « solutions alternatives de déplacement » : apporter une

nouvelle réponse aux besoins de déplacement : « les personnes âgées quand elles font appel à nous, bien souvent c’est parce qu’elles ne peuvent pas prendre le bus », et notamment par un accompagnement personnalisé : « avec les personnes âgées, on a plus le côté humain, social, on reste avec les gens ». - Permettre aux personnes âgées de conserver toute leur autonomie : si l’association ne ciblait au départ que les personnes âgées, par souci de rentabilité, le public a été élargi aux personnes ayant de faibles revenus engageant des démarches d’insertion sociale et professionnelle, aux jeunes souhaitant se rendre à des activités périscolaires et aux personnes ayant un handicap physique et/ou mental : « au départ, la cible, c’étaient les personnes âgées mais ça s’est avéré que ça ne pouvait pas fonctionner seulement qu’avec elles, les personnes âgées se déplacent surtout en milieu de journée, ça n’aurait pas été rentable, c’est dommage de parler de rentabilité pour une association loi 1901 mais enfin il faut que ça tourne ».

TERRITOIRE D’INTERVENTION - Deux territoires d’interventions : la Communauté de Communes de l’Est du Douaisis (CCED) et la Communauté d’Agglomération de la Porte du Hainaut (CAPH) : ces territoires ont été choisis en fonction du « lieu de résidence des porteuses de projet » et en raison d’une « offre de transports publics inadaptée voire inexistante » (points de desserte trop éloignés, fréquences insuffisantes).

PARTENAIRES (liés au déplacement des usagers âgés) - Appui technique et méthodologique : CCED, CAPH, CCAS, CRAM - Subventions : le Fonds Social Européen (FSE) dans le cadre des aides

apportées aux microprojets associatifs : « sans le FSE, on aurait eu du mal à démarrer », la Caisse d’Epargne, la Fondation de France - Aide à la communication : Centres locaux d’information et de coordination gérontologique (CLIC) de Valenciennes et de Denain

PROFILS DES ADHERENTS AGES - Une augmentation conséquente du nombre d’adhérents : entre le 1er mars 2004 et le 31 octobre, le nombre d’adhérents a augmenté de façon significative, passant de 30 à 95 adhérents. Les personnes âgées, qui représentent

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un tiers des adhérents, sont majoritairement des femmes seules âgées de plus de 75 ans qui vivent encore à domicile. - Les habitudes de déplacement des usagers âgés : il s’agit essentiellement de déplacements individuels et concentrés dans le temps (entre 10h et 16h). Les rythmes de déplacement sont irréguliers et les motifs de déplacement sont essentiellement liés aux achats, aux loisirs et aux démarches administratives et de santé.

TARIFICATION - Cibler les plus modestes : « on a choisi de faire des prix bas pour toucher un maximum de classes sociales mais surtout les classes sociales ouvrières, pour les autres classes sociales, il y a des entreprises franchisées qui font la même chose », « avant nous, les personnes utilisaient le taxi mais ça reste un service coûteux pour l’usager » : - Adhésion à l’association (5€/an) - Accompagnement véhiculé : 1€ de prise en charge + 0,65€/km (0,75€/km les week-end et jours fériés), ce tarif est dégressif en fonction du nombre de personnes présentes dans le véhicule - Accompagnement humain : 3€ pour ¼ d’heure, 10€/heure : « les personnes âgées ne font pas toujours appel à nous dans un objectif d’accompagnement, par exemple, on va chercher certaines personnes âgées et on les dépose au foyer des personnes âgées et on vient les rechercher le soir »

LE PERSONNEL ROULANT - Deux salariées dont une à temps plein et une à quart-temps - Un personnel qualifié : capacité professionnelle de transport des

personnes, diplôme d’Etat d’Auxiliaire de Vie Sociale (DEAVS), formation sur le transport des personnes à mobilité réduite organisée par la Semurval91

LES VEHICULES - Deux véhicules : un Expert de 9 places et un Renault Scénic de 5 places

LES PROJETS - Adaptation et développement du parc de véhicules : « notre Expert est un véhicule trop haut, on ne peut pas prendre de personnes âgées, bien souvent les personnes âgées quand elles font appel à nous c’est parce qu’elles ne peuvent plus prendre le bus, elles ne peuvent plus monter les marches »

CONTACT : Mme Wattremez et Mme Tinelli, salariées de l’association SPAM

91 SEMURVAL : Société des Transports en Commun de l'Agglomération de Valenciennes

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EVALUATION

• Une réponse à des besoins et des attentes non satisfaits

Le service de transport à la demande et d’accompagnement mis en place par l’association SPAM remplit non seulement une mission de transport mais également une réelle fonction sociale :

- renforcer l’autonomie des personnes âgées : notamment en leur permettant de se déplacer quand elles le souhaitent et sans dépendre de leur famille : « il y a des personnes âgées qui ont de la famille mais la famille, bien souvent c’est "on verra ça demain" » ;

- créer du lien social : « les personnes âgées apprécient de pouvoir entretenir des relations conviviales avec nous, elles nous connaissent » ;

- apporter une forme de sécurité : « les personnes âgées que je transporte ne voudraient plus revenir en arrière. Elles sont trop contentes d’avoir de la compagnie, elles se sentent en sécurité car bien souvent elles ne sont plus sûres d’elles, plus sûres de leur physique », « avant nous, elles faisaient appel au taxi, mais déjà le coût et en dehors de ça, quand on a fini de faire les courses, il faut rappeler le taxi, il arrive quand il arrive, et elles sont seules pour faire leurs courses, nous on les accompagne, ça les rassure, c’est pareil pour les rendez-vous chez le médecin ».

• Une qualité de l’accessibilité qui reste à améliorer

Garantir l’accessibilité, ce principe demeure fondamental en ce qui concerne la problématique des déplacements et des transports. Si l’association SPAM permet aux personnes âgées une accessibilité à un service de transport, une critique peut toutefois être émise sur le matériel roulant utilisé. Ainsi, le véhicule Expert offre une qualité limitée en termes d’accessibilité (marche à monter), l’association semble s’être néanmoins saisie de ce dysfonctionnement dans la mesure où une adaptation de ce véhicule est prochainement envisagée.

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CONCLUSION

Se déplacer est à la fois un besoin et une nécessité ; c’est un acte essentiel pour préserver une bonne qualité de vie. Afin d’éviter l’isolement et la solitude, il est nécessaire pour les personnes de 65 ans et plus de conserver un degré de mobilité élevé alors même que cette mobilité régresse avec l’âge. Face à ce défi de maintien de la mobilité des 65 ans et plus, le rôle des transports collectifs apparaît déterminant. Le public des 65 ans et plus n’apparaît cependant pas privilégié dans les politiques menées par les offreurs de transport, les priorités en matière de stratégie de développement apparaissant davantage axées sur le public des jeunes et des actifs, et des personnes à mobilité réduite. Plusieurs arguments sont avancés par les offreurs de transport pour tenter d’expliquer ces choix.

Tout d’abord, la motorisation des 65 ans et plus est un facteur défavorable à leur fréquentation des transports collectifs. Ce public étant de plus en plus fréquemment motorisés, préfère l’usage de la voiture particulière.

Concernant le choix orienté vers les jeunes et les actifs, les offreurs de transport soulignent l’importance des habitudes de déplacement acquises tout au long de la vie : « quelqu’un qui viendra au transport en commun avant l’âge de 60 ans, il va prendre une habitude, il va avoir un intérêt réel et on le reverra quand il aura l’âge de 60 ans ». Le resserrement des finances ainsi que la volonté des 65 ans et plus de ne pas être stigmatisés sont également des facteurs mis en avant par les offreurs de transport pour justifier des stratégies de développement adoptées.

Concernant le public des personnes à mobilité réduite, les offreurs de transport insistent sur le fait que les améliorations réalisées pour faciliter l’accessibilité à ce public permettent d’accueillir dans de bonnes conditions l’ensemble des personnes de tous âges à mobilité réduite. Si ce discours reste fondé et légitime, les besoins en matière de déplacement des 65 ans et plus, et plus spécifiquement des personnes de 80 ans et plus, se distinguent néanmoins de ceux des personnes à mobilité réduite notamment en termes d’accompagnement humain. Certains CCAS ou associations, comme l’association de Service, de Proximité et d’Accompagnement à la Mobilité (SPAM), développent ainsi des solutions alternatives de déplacement dont la principale innovation réside dans l’accompagnement personnalisé proposé aux 65 ans et plus.

CONCLUSION

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L’une des expressions démographiques de la société industrielle et urbaine actuelle se manifeste par le poids de plus en plus grand des personnes de 60 ans et plus. Deux processus à l’œuvre rendent visible en France ce développement : l’allongement de l’espérance de vie, et la sortie de la période d’activité des générations nées après la deuxième guerre mondiale. Par son importance démographique, ce nouvel âge de la vie provoque des conséquences sur la structure sociale elle-même comme en témoigne dans la littérature contemporaine la création de nouvelles catégories, les seniors 60-69 ans, les personnes âgées de 70 à 79 ans, le grand âge 80 ans et plus. Loin d’être exceptionnel à la population française, ce phénomène est général à tous les pays développés. Notre étude sur les personnes âgées et la ville examine, dans la région Nord-Pas-de-Calais, les relations entre le vieillissement de la population et les pratiques en matière de localisations spatiales. Plusieurs entrées ont été examinées : démographiques, mode de vie, logement… Si les unes concernent la population âgée, les autres portent sur les réponses aux demandes qu’elle exprime. Cette conclusion se propose dans une première partie, de dégager d’une manière transversale les données présentées dans cette étude autour de six thèmes : le changement de paradigme que produit la gérontocroissance, l’habitat et le logement des 60 ans et plus, le mode de vie, l’entrée en institution, les déplacements et enfin le point de vue des techniciens et des élus ; dans une seconde partie on regroupe les enseignements de cette étude autour de quelques préconisations.

I. LES PERSONNES DE PLUS DE 60 ANS ET LA VILLE

Deux idées s’imposent dans cette recherche : le renouvellement des théories explicatives à propos du vieillissement, et malgré les connaissances accumulées, on compte encore beaucoup d’ignorance. Il faut tenir ensemble des mouvements contradictoires pour prolonger la connaissance de ce nouvel âge qui commence à 60 ans.

1. GERONTOCROISSANCE ET CHANGEMENT DE PARADIGMES

L’augmentation du nombre de personnes âgées dans la population ou gérontocroissance, s’accompagne d’un changement de représentation de la structure sociale. Les phénomènes qui en sont la cause, la diminution des décès par âge et l’augmentation de l’espérance de vie, s’accompagnent également d’un changement dans le mode de vie, augmentation des ressources, développement de nouvelles pratiques culturelles entre autres modifications : on en trouve les constats statistiques dans le chapitre 2. Il a été nécessaire de nommer autrement les catégories d’âge concernées auquel correspond la fortune récente du terme de senior. Mais derrière ce symptôme, on observe un changement de paradigme : le paradigme âgiste a cédé la place au paradigme gérontologiste qui donne lieu à d’autres explications du comportement de la personne âgée de 60 ans et plus. De nouveaux modèles théoriques ont ainsi vu le jour (chapitre 2) chargés de donner du sens aux observations empiriques effectuées. Les représentations de cette

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population âgée de 60 ans et plus se sont modifiées, attirant à elles des pratiques nouvelles sur le plan culturel et social en relation avec le cadre de vie urbain.

Que retenir de ce changement de paradigme ? D’abord que se mettent en place des modalités qui s’attirent. On observe l’attraction entre le statut de propriétaire, la localisation en périurbain, le type de logement individuel et l’importance reconnue au transport individuel en automobile d’une part, et corrélativement l’attraction entre le statut de locataire, la localisation intra-muros, le logement collectif de petite taille le plus souvent et le recours au transport collectif d’autre part. Ensuite, ces deux ensembles s’opposent en même temps qu’ils se complètent : l’avancée en âge, la réduction du périmètre d’évolution, les questions de mobilité, l’accroissement des charges du logement sont autant de possibilités de transitions d’un univers à l’autre comme nous le montrons dans le troisième chapitre. La question de la mobilité et des possibilités de se déplacer sont au centre de la vie des personnes âgées de 60 ans et plus, ce qui retentit sur l’équipement vicinal, de proximité, l’usage des équipements urbains, commerciaux, culturels et sanitaires. Enfin, le passage de l’habitat individuel à l’établissement collectif est corrélatif de l’avancée en âge rendant quelque peu caduque l’opposition propriétaires-locataires, indice d’une opposition entre classes sociales.

2. HABITAT ET LOGEMENT, UNE SEDENTARITE CERTAINE DES 60 ANS ET PLUS

La période des trois dernières décennies se caractérise en France par l’importance des politiques de construction en faveur de l’habitat individuel en même temps que l’on voyait se développer l’habitat en banlieue, et l’habitat en périurbain déjà mentionné. Le Nord-Pas-de-Calais n’échappe pas à ce mouvement général.

- Les personnes âgées de 60 ans et plus sont massivement propriétaires (64.5%) avec des variations infrarégionales fortes (de 40% à 75%) (chapitre 4). On observe une chute après 70 ans, soit par la vente de son bien soit par sa transmission ;

- Les locataires se répartissent d’une manière équilibrée entre le locatif social ou le locatif privé ;

- La très grande majorité est logée en logement individuel (74,8% des 60-74 ans, contre 68,7% au niveau national) ;

- Le phénomène de sous-occupation tend à s’accroître avec l’âge ; - Le confort sanitaire est encore insuffisant mais la population des 60 ans et

plus est satisfaite de son logement parce qu’il est accessible par les transports en commun et que le sentiment d’insécurité est peu développé.

La mobilité résidentielle est faible dans la population régionale, le vieillissement s’effectue sur place puisque, entre les deux recensements de population de 1990 et 1999, plus de 80% des plus de 60 ans occupaient le même logement. Ces chiffres caractérisent la population de moins de 80 ans parce qu’au-delà la situation est plus nuancée. En effet, au-delà de 80 ans, se pose la question de l’entrée en établissement.

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3. LA DEMANDE EN INSTITUTION : TENTATIVE DE PROJECTION

Un sondage réalisé en 2005 par la Sofres auprès des retraités montre que 9 retraités sur 10 voulaient rester le plus longtemps possible à domicile. Dans la région, en 1999, 96,7% des personnes âgées de plus de 60 ans vivent chez elles, contre 95,5% au niveau national. La cohabitation intergénérationnelle est peu développée dans la région. La vie chez soi diminue cependant avec l’âge puisque le pourcentage de personnes vivant à domicile est de 87,4% au-delà de 80 ans. Ceci s’explique par le fait que dans certaines zones une proportion d’ayants droit est encore en vie, et disparaîtra progressivement. L’on observe enfin l’entrée en maison de retraite à 85 ans en moyenne. Comment, dans ces conditions, prévoir cette demande d’entrées en institution ? La comparaison entre les régions en France montre une surreprésentation des entrées en institution dans la région par rapport à la moyenne nationale. Fort de cette observation, l’entrée en institution fait l’objet de l’analyse menée dans le chapitre 5 à partir de deux approches :

- la première considère que seules les caractéristiques sociodémographiques et médicales de l’individu influent sur la mise en institution : les variables sexe et âge sont privilégiées ;

- la seconde approche considère que, outre les variables de sexe et d’âge de l’individu, certaines variables propres à l’écosystème sont à prendre en compte qui dépendent du revenu, du capital social, de la vie associative, de la proximité des services publics à titre d’exemple ; que les variables de sexe et d’âge sont aussi à prendre en compte avec les caractéristiques économiques et sociales de la zone géographique. Cette seconde approche permet de mieux ajuster l’entrée en institution aux caractéristiques locales. Les pages 79 à 85 du rapport présentent le calcul et les tableaux n°16 à n°19, les résultats.

La seconde approche plus exigeante propose trois hypothèses, basse, moyenne, haute. La cartographie présentant l’hypothèse moyenne, souligne la nécessité de prendre en compte les caractéristiques locales pour définir les objectifs en matière de « besoins de places en institution » à partir de 75-79 ans. La surreprésentation caractéristique au Nord-Pas-de-Calais, est fortement accentuée dans la Communauté urbaine de Dunkerque, la communauté d’agglomération de Saint-Omer, avec un niveau plus faible de demande probable (dans les anciens bassins industriels miniers et sidérurgiques de Douai, Lens, Valenciennes et Maubeuge) et avec un niveau de moindre demande dans la zone centrale et le Calaisis. On en retient la nécessité d’une approche plus localisée par zone géographique.

4. LES DEPLACEMENTS ET LES TRANSPORTS

La région se caractérise par une forte utilisation de l’automobile. Plusieurs facteurs convergent pour en favoriser l’usage : le fait de garder les mêmes pratiques après 60 ans, ce qui s’inscrit dans les enseignements que les théories du vieillissement nous apportent ; plusieurs variables telles que l’augmentation du niveau d’éducation, l’importance des revenus, la possession du permis de conduire, la disposition d’un ou de plusieurs véhicules, associent leurs effets pour maintenir et peut-être augmenter la propension à utiliser les moyens de déplacements individuels. Par conséquent, l’utilisation de la voiture reste fort jusqu’à 80 ans et plus, période charnière où l’usage diminue du fait de contre-indications ou parce que l’individu ne se sent plus à l’aise ou en sécurité en voiture.

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On soulignera trois remarques : - L’usage de la voiture est lié à l’habitat : il est plus accentué dans le

périurbain, secteur d’habitat qui a été très attractif pour des ménages à revenus élevés, souvent pourvus d’un diplôme supérieur et disposant de plusieurs véhicules ;

- Les motifs de déplacements sont divers mais les deux tiers relèvent d’achats qui se situent dans la proximité, les hypermarchés étant fréquentés par les ménages pourvus de véhicules ; ce motif de déplacement devient de plus en plus important avec l’âge ;

- Après 80 ans la situation change, et le recours aux transports en commun caractérise les hommes de plus de 80 ans, alors qu’à cet âge les femmes tendent à moins se déplacer.

5. LE POINT DE VUE DES PROFESSIONNELS

La réflexion urbaine commence à s’ouvrir aux demandes des 60 ans et plus et les points de vue des professionnels concernés ont fait l’objet d’une analyse dans les chapitres 6 et 8 à propos desquels trois remarques sont à retenir.

Il y a une reconnaissance de l’intergénérationnel mais peu de ménages acceptent la cohabitation. Elle correspond en effet à des périodes difficiles en matière de logement dont la construction durant les trente glorieuses a permis de sortir. Habiter chez les autres n’est donc plus être chez soi et cela ne devient possible que par obligation.

Le béguinage semble une solution adaptée mais qui peut provoquer des effets pervers : il répond à un besoin de proximité mais en fait peut atteindre l’objectif inverse, celui d’une mise à l’écart de la ville par la concentration, c'est-à-dire entre « vieux », ce que ne souhaite pas la majorité des gens. Pour l’éviter il faut des conditions foncières favorables et une politique incitative de la part des collectivités locales qui repose sur une analyse plus serrée des besoins en matière de logements pour les personnes de 60 ans et plus.

Dans le domaine des transports, la cécité aux spécificités des questions qui se posent aux personnes de 60 ans et plus provient d’une assimilation réductrice de cet âge à une autre cible, les personnes à mobilité réduite. Commode, une telle réduction ignore que les plus de 60 ans ne sont pas des personnes handicapées : la face cachée de cette assimilation rapide se manifeste dans la méconnaissance des besoins en matière de déplacements dans la ville, qui conditionnent pourtant une bonne insertion de ce groupe d’âge. Plusieurs pistes apparaissent pourtant dans la réponse à des besoins spécifiques liés au quotidien, à la santé et dépassant le niveau local ou communal. Il y a en la matière un champ à explorer.

161

II. QUELLES APPLICATIONS RETIRER DE CES ENSEIGNEMENTS ?

Nos préconisations s’orientent autour de trois axes essentiels : - organiser et diffuser une information claire sur le vieillissement et ses

conséquences en matière d’habitat et d’aménagement pour mobiliser les différents partenaires concernés ;

- améliorer et organiser la connaissance des besoins des 60 ans et plus en matière d’habitat et de mobilité ;

- favoriser les démarches prospectives et créatrices.

Axe 1 : Organiser et diffuser une information claire sur le vieillissement et ses conséquences en matière d’habitat et d’aménagement pour mobiliser les différents partenaires concernés

La capitalisation et la circulation de l'information sont des problèmes structurels, amenant trop souvent chacun à tâtonner et à refaire ses expériences alors même que des références validées (ou des constats d'échec) existent ailleurs. Pour bénéficier d'une information fiable, à des références concrètes, adaptées - ou adaptables - à leur contexte, les acteurs ont besoin d’une part, d'accéder à une information opérationnelle, c’est-à-dire une information qui apporte des éléments pour la résolution des problèmes rencontrés et d’autre part, d'échanger. Cette information opérationnelle peut se définir comme une information collectée à partir de l'action, qui donne des indications d'ordre méthodologique, technique et économique, restituées à partir d'une expérimentation en réel. L'objectif est de pouvoir répondre à des questions très concrètes que posent les problèmes rencontrés sur le terrain dans le cadre de l'activité quotidienne.

Action 1 : Développer une action de sensibilisation auprès des élus

La réalisation d’une action de sensibilisation auprès des élus sur ce sujet apparaît déterminante non seulement pour susciter le débat et les échanges autour de la problématique du vieillissement de la population mais également pour leur apporter l’information nécessaire à la définition de leurs stratégies et de leur action. Les collectivités doivent en effet prévoir dès aujourd'hui les aménagements urbains, équipements et services dont elles auront besoin demain en raison du vieillissement de leur population. Cette action de sensibilisation pourrait prendre la forme d’une demi-journée d’étude durant laquelle seraient exposées des expériences de prise en compte du vieillissement dans différents domaines, et plus spécialement dans le domaine de l’habitat (notamment la prise en compte du vieillissement dans la définition et le suivi d’un Programme Local de l’Habitat (PLH)) et des transports.

162

Action 2 : Mettre en œuvre une action d’information auprès des techniciens

Intervenant tant en conception qu’en maîtrise de chantier pour des opérations d'investissement ou de fonctionnement, les techniciens jouent un rôle majeur dans le fonctionnement des collectivités territoriales, c’est pourquoi leur sensibilisation à la problématique du vieillissement de la population apparaît tout aussi importante que celle des élus. Ainsi, parallèlement à l’action menée en direction des élus, une action d’information auprès des techniciens des collectivités territoriales pourrait être engagée ; elle pourrait s’appuyer sur la mise en place d’une demi-journée d’étude pendant laquelle seraient présentées les grandes tendances sociodémographiques actuelles et à venir (augmentation de l’espérance de vie sans incapacité, augmentation du nombre de ménages …) et l’impact du vieillissement sur les besoins globaux en logements. L’objectif étant d’interpeller les techniciens sur l’ampleur du vieillissement de la population et de les amener à intégrer cette problématique dans leur rôle de conseil et d’accompagnement des élus dans la définition et la mise en œuvre des politiques d’aménagement.

Axe 2 : Améliorer et organiser la connaissance des attentes et besoins des 60 ans et plus en matière d’habitat et de mobilité

Les différents entretiens menés auprès des professionnels de la ville dans le cadre de cette étude ont montré que la connaissance des besoins et des attentes des 60 ans et plus demeure aujourd’hui très lacunaire, et plus spécialement dans le domaine de l’habitat. Pour cerner au mieux les pratiques des 60 ans et plus, les évolutions et ainsi mieux anticiper, l’amélioration et une meilleure organisation de la connaissance des attentes et besoins s’avèrent indispensables.

Action 1 : Favoriser et promouvoir la citoyenneté des 60 ans et plus

Le point de vue des 60 ans et plus tient une place fondamentale dans la connaissance des besoins et attentes de cette population. Or, notre étude a démontré que la participation et l’expression des 60 ans et plus demeurent aujourd’hui peu spontanées : certaines personnes de ce groupe d’âge, semblent déprécier leur opinion au point de ne pas accorder d’intérêt à son expression et donc de ne pas l’exposer. Face à cette situation d’autocensure et compte tenu du souhait de certaines personnes de 60 ans et plus d’être davantage consultées, il apparaît indispensable de développer des processus favorisant l’expression de cette population et la prise en compte de leur parole. Les échanges prévus dans le cadre des actions d’information et de sensibilisation auprès des élus et techniciens permettraient, à ce titre, d’avancer des pistes de réflexion quant aux actions et outils à développer pour favoriser l’expression et par là même la citoyenneté des 60 ans et plus.

163

Action 2 : Renforcer et élargir les relations partenariales des acteurs intervenant dans le champ du vieillissement de la population

Le développement d’un dispositif de connaissance des attentes et besoins des 60 ans et plus doit s’accompagner d’un renforcement de la coordination avec les différents partenaires et ceci pour favoriser l’émergence d’une connaissance globale et partagée de la situation des 60 ans et plus. Le développement d’une vision commune suppose ainsi une meilleure concertation et coordination entre les différentes partenaires intervenant non seulement dans le champ des politiques spécifiques liées aux personnes de 60 ans et plus (Conseils généraux, les Centres Locaux d’Information et de Coordination Gérontologique (CLIC) …), mais également d’élargir le système partenarial aux acteurs agissant notamment dans les domaines de la santé, de l’habitat (Association Régionale de l’Habitat (ARH), gestionnaires d’établissements d’hébergement privés, architectes-urbanistes …), des services à la personne (associations spécialisées dans les services à la personne) et des transports-déplacements (offreurs de transport …). Ce partenariat élargi permettrait en outre de valoriser et de rationaliser les données disponibles détenus par chacun des partenaires en s’appuyant sur les dispositifs d’observation existants (observatoire de l’habitat au niveau des régions, départements ou agglomérations, observatoire social de la DRASS …) et éviter ainsi un cloisonnement des connaissances.

Axe 3 : Favoriser les démarches prospectives et créatrices

Si la présente étude a montré que la classe d’âge des 60 ans et plus ne représente pas une classe d’âge homogène, l’analyse des politiques et actions menées en faveur des 60 ans et plus a, a contrario, mis en avant une certaine tendance à la standardisation et à la normalisation des projets en faveur de ce public, le fort développement des béguinages en étant l’exemple le plus frappant. Dès lors se pose la question des pratiques professionnelles et de la mise en œuvre de démarches prospectives et créatrices comme axe incontournable d’une politique innovante et adaptée aux besoins et attentes hétérogènes des 60 ans et plus.

Action 1 : Réviser et renouveler les pratiques professionnelles

Le renouvellement des pratiques des professionnels de la ville réside dans de solides fondements théoriques qui leur permettront de développer de nouvelles approches des problématiques du vieillissement et d’anticiper et percevoir les comportements émergents. Pour ce faire, un effort vis-à-vis des approches interdisciplinaires et intersectorielles s’impose. Il apparaît ainsi fondamental de diffuser et d’échanger les connaissances issues des recherches des différentes disciplines en lien avec le vieillissement. Cette démarche, déjà mentionnée dans l’axe 2 « Améliorer et organiser la connaissance des attentes et besoins des 60 ans et plus en matière d’habitat et de mobilité », permettra la construction et le partage des connaissances ainsi que la requalification des représentations des attentes et besoins des personnes de 60 ans et plus et suscitera, par conséquent, une diversification des actions et projets et une réflexion non plus uniquement axée sur

164

les produits nouveaux à développer mais également sur les services à développer pour accompagner le vieillissement.

Le renouvellement des pratiques des professionnels de la ville réside également dans les formes d’actions qu’ils peuvent développer. Ainsi, les professionnels de la ville se doivent d’adopter de nouvelles approches dans le processus de conception et de réalisation de leurs projets. Si ces nouvelles approches restent à préciser au regard des débats qui auront lieu dans le cadre des échanges interdisciplinaires et intersectoriels, certaines d’entre elles peuvent néanmoins, compte tenu des analyses et entretiens conduits pour la présente étude, être d’ores et déjà mentionnées :

- l’émergence de démarches participatives dans la conception des projets et cela dans le but d’abandonner la logique de l’offre et adopter ainsi une logique de demande ;

- la prise en compte de la haute qualité environnementale (HQE) dans les projets ;

- le développement de l’évaluation des projets, ceci pour apprécier non seulement leur adéquation avec les attentes et besoins des 60 ans et plus mais également pour tester les possibilités de réplication des expériences dans d’autres contextes.

Action 2 : Soutenir les initiatives innovantes

Dans ce processus de renouvellement des pratiques des professionnels, les élus politiques ont un rôle capital à jouer. Ces derniers, compte tenu de leur pouvoir décisionnel dans les politiques et les projets d’aménagement, constituent des acteurs clés pour impulser et accompagner le renouvellement des pratiques des professionnels. Plusieurs pistes d’actions pour les élus peuvent, à ce jour, être avancées pour favoriser ce changement :

- valoriser les innovations dans le processus de décision et de financement ; - favoriser la réalisation d’opérations pilotes et susciter ainsi un

élargissement de l’offre de types de logements ; - se détacher de la logique actuelle qui veut que, pour être autorisé et

financé, un projet doit rentrer dans un certain nombre de cases préétablies, ce qui favorise un certain immobilisme et freine par conséquent l’émergence de projets innovants adaptés aux besoins et attentes des personnes âgées.

Enfin, il convient de préciser que ces nouvelles pratiques de la part des élus résident également dans de nouvelles approches du vieillissement qui reposent elles aussi sur de solides fondements théoriques, c’est en ce sens que nous rappelons ici l’importance de l’axe 1 mentionné précédemment « organiser et diffuser une information claire sur le vieillissement et ses conséquences en matière d’habitat et d’aménagement pour mobiliser les différents partenaires concernés ».

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ANNEXES

173

Annexe 1 : Liste des acteurs rencontrés

Les offreurs de transport M. Delporte, Chef de Service du Syndicat Mixte des Transports du Douaisis (SMTD) ; Mme Dumoulin, Service Etude de Transpole ; Mme Chiarel, Service Action commerciale de Transpole ; M. Paque, Directeur des études, Service Marketing de la SNCF ; Mme Wattremez, Salariée de l’association Service Proximité Accompagnement et Mobilité (SPAM) ; M. Auguste, Direction commerciale des transports collectifs (TEC), Ville de Liège.

Les architectes-urbanistes M. Naudin, Agence S, Wasquehal ; M. Decroix, Scénario Acte 2, Saint-Laurent Blangy ; M. Damiens, Liévin.

Les collectivités locales Mme Lesein, Directrice Générale Adjointe, Développement Urbain et Politique de la Ville, Ville de Grande-Synthe ; Mme Brulin, Responsable Service Urbanisme, Ville Le Touquet ; Mme Ficheux, Responsable Service Logement, Ville Le Touquet ; M. Coucke, Responsable Service Urbanisme, Ville de Villeneuve d’Ascq ; M. Charbaux, Conseiller municipal chargé de la mise en place du PDU, Ville de Villeneuve d’Ascq ; M. Royer, Maire de Pulnoy ; Mme Horras, Directrice Service Actions sociales, Ville de Nancy ; Mme Bajolet, Vice-présidente de l’Office nancéen des personnes âgées (ONPA) ; M. Marneffe, Echevin des Services sociaux, de la Famille et de la Lecture de Proximité, Ville de Liège ; Mme Stouten, Coordinatrice du Service AccessPlus, Ville de Liège.

Les organismes de logement social M. Couplet, Responsable Direction Immobilière, Pas-de-Calais Habitat ; M. Wroblewski, Direction Clientèle Qualité, Service Marketing, Pas-de-Calais Habitat.

Les associations Mme Ledeux, Présidente du Conseil de Sages, Ville de Grande-Synthe ; M. Depriester, Membre du Conseil de Sages, Ville de Grande-Synthe ; M. Duprez, Membre du Conseil de Sages, Ville de Grande-Synthe.

174

Annexe 2 : Exploitation nationale des déplacements urbains de 1993

Le principal intérêt de l’enquête du Ministère de l’Equipement, du Logement et des Transports sur les déplacements est (dans son volet courte distance) de fournir une image complète des déplacements de toute nature. Cette enquête permet de relier les caractéristiques des ménages, les lieux de résidence aux déplacements.

Elle permet donc de déterminer dans quelle mesure les choix d’une localisation et les caractéristiques des ménages modifient toutes choses égales par ailleurs la fréquence des déplacements, leurs distances, et la fréquence d’utilisation de la voiture particulière. Elle permet également pour un individu sélectionné au sein du ménage, de connaître de manière détaillée l’ensemble des déplacements effectués la veille, au cours du dernier week-end, et lors des déplacements à longue distance réalisés au cours des trois mois précédents.

L’enquête transport possède à sa création un zonage global. On distingue 5 zones : la ville centre, la banlieue intérieure, la banlieue extérieure, les villes petites et moyennes, le rural. Ce zonage n’est pas très fin. On peut y adapter le ZAU et son complément rural grâce à une grille fournie par l’INRA de Dijon.

Globalement, nous pouvons dire que les habitants des communes multipolarisées et des communes périurbaines ont des comportements de déplacement assez semblables, et que les ruraux sous faible influence urbaine ont des comportements de déplacement assez semblables aux résidents des zones périurbaines.

Toutes zones confondues, et quel que soit le motif ou le mode de déplacement, le nombre moyen journalier de déplacements par semaine est de 5. Ce nombre moyen est maximum dans la ville centre et, au contraire, les individus les moins mobiles sont les habitants des bassins entièrement ruraux. Plus généralement, le nombre moyen de déplacements par semaine croît sensiblement lorsqu'on s'éloigne de la ville centre. La distance moyenne est minimale en ville centre et maximale en rural profond. La distance moyenne croît significativement lorsqu'on s'éloigne de la ville centre.

175

Tableau A2. 1 : Nombre de déplacements quotidiens moyen par zone. Nombre moyen de

déplacements Rapport à la moyenne Distance moyenne parcourue

en km Pôles urbains 5,27 1,02 6,57 Couronnes périurbaines 5,09 0,98 10,03 Communes multipolarisées 4,78 0,92 11,39 Rural sous faible influence urbaine

4,92 0,95 9,58

Pôles ruraux 5,48 1,06 7,24 Périphérie des pôles ruraux 5,34 1,03 10,18 Rural isolé 4,87 0,94 9,85

Source : Enquête transport et communication 1993-94.

Tableau A2. 2 : Distance moyenne parcourue selon le motif par zone (km). Pôles

urbains Couronnes

périurbainesCommunes

multipolariséesRural sous

faible influence urbaine

Pôles ruraux

Périphérie des pôles

ruraux

Rural isolé

Moyenne

Enfants 3,91 7,10 6,18 7,42 4,34 8,19 7,90 5,07 Commerces 3,77 7,82 9,43 7,87 4,37 7,75 7,95 5,11 Soins médicaux 5,73 10,67 14,26 14,91 7,69 13,18 21,35 8,47 Démarches administratives

4,78 9,92 17,08 12,14 8,79 3,77 16,37 7,15

Visites 8,75 9,52 13,79 8,61 10,06 8,95 10,81 9,24 Accompagnement 4,61 6,95 7,38 7,30 6,38 6,03 9,08 5,63 Loisirs 6,60 8,83 9,77 10,04 6,32 8,56 9,78 7,39 Motifs Professionnels 9,20 14,09 13,73 11,64 9,07 14,07 9,95 10,40 Tous motifs confondus 6,57 10,03 11,39 9,58 7,24 10,18 9,85 7,66

Source : Enquête transport et communication 1993-94.

Les distances les plus faibles sont parcourues par les habitants des pôles car ils résident dans les zones qui concentrent les services et les emplois. Au contraire, et pour les mêmes raisons, les déplacements les plus longs sont parcourus par les périurbains et les habitants de la périphérie des pôles ruraux. Quelles que soient les zones de résidence, les trajets les plus courts sont liés à l’accompagnement des enfants et aux achats. Pour les autres motifs, comme les démarches administratives, le travail, la destination du pôle urbain ou rural s’impose. De par leur choix résidentiel à distance des centres d’activité, les ménages périurbains ont des trajets domicile-travail bien plus longs. Notons d’ailleurs que parce ce qu’elles constituent l’essentiel des trajets, les navettes domicile-travail portent la distance moyenne des trajets réalisés par les périurbains.

176

Tableau A2. 3 : Durées des déplacements moyens par motif et par zone (temps donné en minute).

Pôle urbain

Couronnes périurbaines

Communes multipola-

risées

Rural sous faible

influence urbaine

Pôles ruraux

Périphé-rie des pôles

ruraux

Rural isolé

Moyenne

Enfants 16 18 17 18 13 15 19 17 Commerces 13 14 15 13 10 12 14 13 Soins médicaux 17 18 18 24 17 14 27 19 Démarches administratives

17 16 27 18 16 10 19 18

Visites 19 16 20 14 16 16 16 18 Accompagne-ment

12 12 12 11 12 11 13 13

Loisirs 19 21 19 20 19 16 20 20 Motifs professionnels

21 23 22 17 15 17 15 21

Tous motifs confondus

17 18 18 16 14 15 16 16

Source : Enquête transport et communication 1993-94.

Tableau A2. 4 : Répartition des déplacements selon le mode de transport utilisé.

Marche à

pied Deux-roues Conducteur

Transport en commun

ou autres

Moyenne en minute

Pôle urbain 22,59% 3,49% 65,85% 8,06% 17 Couronnes périurbaines 12,35% 3,59% 78,74% 5,31% 18 Communes multipolarisées 12,10% 4,36% 79,64% 3,91%

19

Rural sous faible influence urbaine 15,35% 3,35% 77,41% 3,90%

16

Pôles ruraux 22,79% 5,09% 70,43% 1,68% 14 Périphérie des pôles ruraux 9,31% 3,19% 86,25% 1,25%

15

Rural isolé 18,23% 4,00% 74,53% 3,24% 16 Toutes zones confondues 20,64% 3,59% 68,09% 7,69%

16

Source : Enquête transport et communication 1993-94.

Les habitants des pôles urbains ont des déplacements plus courts en termes de distance parcourue mais pas en termes de temps. La vitesse des trajets réalisés en voiture est un facteur important de la périurbanisation. La voiture est le mode de transport le plus utilisé, la marche à pied arrivant en seconde position. Elle est surtout pratiquée dans les pôles parce que les services offerts y sont plus concentrés dans l’espace.

La voiture est un moyen de transport privilégié. Le choix de son utilisation dépend toutefois du motif de déplacement. En voiture, on accompagne moins ses enfants mais on se rend plus au travail. La voiture est le mode le plus utilisé pour les trajets

177

liés aux soins médicaux, aux visites, à l’accompagnement et aux motifs professionnels.

Tableau A2. 5 : Fréquence d’utilisation de la voiture selon le motif par zone.

Pôles

urbains Couronnes

périurbainesCommunes

multipolarisées

Rural sous faible influence urbaine

Pôles ruraux

Périphérie des pôles

ruraux Rural isoléEnfants 37,37% 49,10% 45,74% 52,30% 41,72% 81,25% 49,64% Commerces 60,56% 81,79% 84,09% 80,91% 67,69% 84,03% 72,38% Soins médicaux 67,65% 86,92% 90,63% 90,72% 70,73% 88,24% 82,05% Démarches administratives 60,14% 84,11% 66,67% 69,44% 78,05% 66,67% 91,80% Visite 71,92% 75,91% 84,62% 72,75% 79,84% 74,68% 75,79% Accompagnement 80,88% 89,82% 79,87% 87,25% 82,91% 88,73% 89,72% Loisirs 59,87% 69,94% 74,00% 69,67% 60,37% 76,47% 68,01% Motifs professionnels 74,42% 88,40% 88,66% 85,32% 77,55% 96,39% 79,35% Tous motifs confondus 65,85% 78,74% 79,64% 77,41% 70,43% 74,53% 68,09%

Source : Enquête transport et communication 1993-94.

Tableau A2. 6 : Répartition des déplacements selon la zone d’origine et la zone de destination.

Zone de destination Zone de

destination Zone d'origine

Pôles urbains

Couronnes périurbaines

Communes multipolarisées

Rural sous Faible

Influence urbaine

Pôles ruraux

Périphérie des pôles

ruraux

Rural isolé

Pôle urbain 89,15% 5,57% 1,13% 2,23% 0,57% 0,21% 1,13% Couronnes périurbaines 35,12% 56,89% 1,80% 3,60% 0,93% 0,17% 1,49% Communes multipolarisées

25,09% 6,80% 61,90% 3,57% 0,94% 0,26% 1,45%

Rural sous faible influence urbaine

17,70% 4,33% 1,39% 65,25% 3,15% 0,67% 7,53%

Pôles ruraux 6,31% 1,60% 0,59% 4,66% 69,06% 9,51% 8,27% Périphérie des pôles ruraux

8,29% 1,82% 0,50% 4,64% 34,66% 42,95% 7,13%

Rural isolé 8,77% 1,56% 0,55% 7,07% 4,82% 1,47% 75,76% Toutes zones confondues

64,19% 9,95% 2,89% 7,94% 5,26% 1,45% 8,33%

Source : Enquête transport et communication1993-1994.

Dans une large majorité, les déplacements sont internes aux zones. Les personnes effectuant la majorité de leurs déplacements à l’intérieur de leur zone d’origine résident plutôt dans les pôles urbains (89% des cas), dans les pôles ruraux (70% des cas) ou dans le rural isolé (presque 76% des cas). Lorsqu’ils sortent de leur zone, les habitants du pôle urbain et des couronnes périurbaines tendent à se déplacer dans l’espace à dominante urbaine. Les périurbains « s’organisent » autour des pôles urbains auxquels ils sont rattachés.

178

Tableau A2. 7 : Distance moyenne parcourue selon la zone (km). Nb

d’observationsMoyenne Ecart type Minimum Maximum

Pôle urbain 23733 6,50 10,81 0,00 100,00 Couronnes périurbaines 4954 10,00 12,94 0,00 100,00 Communes multipolarisées 1287 10,84 15,10 0,00 100,00 Rural sous faible influence urbaine

3251 9,48 13,06 0,00 100,00

Pôles ruraux 1898 7,12 12,99 0,00 100,00 Périphérie des pôles ruraux 739 10,12 14,47 0,00 100,00

Rural isolé 3292 9,80 14,16 0,00 100,00 Source : Enquête transport et communication 1993-94.

La distance moyenne des trajets dépend à la fois du lieu de résidence et des modes généralement utilisés. Les trajets les plus courts sont réalisés par les résidents des pôles urbains compte tenu de la proximité aux équipements. Les personnes ayant les distances moyennes de déplacements les plus élevées sont les résidents des communes périurbaines et de la périphérie des pôles. Ces ménages sont plus éloignés des principaux équipements mais sont aussi très mobiles : des ménages actifs et ayant des enfants.

Tableau A2. 8 : Distance moyenne parcourue par déplacement et par mode de transport (distance donnée en kilomètre).

Nb d’observations

Moyenne Ecart type Minimum Maximum

Marche à pied 9190 0,77 0,85 0,00 10,00 Deux-roues 1598 3,80 6,48 0,10 90,00 Conducteurs 30223 9,53 12,97 0,10 100,00 Taxi ou ramassage 519 12,62 11,80 0,50 90,00 Transport en commun sauf train

2747 9,12 11,54 0,20 100,00

Train ou TGV 146 28,86 21,66 1,00 97,00 Bateau 3 12,00 8,66 7,00 22,00 Autres 19 4,17 3,27 0,30 10,00

Source : Enquête transport et communication 1993-94.

Le choix du mode de transport dépend de la distance à parcourir. Globalement, nous pouvons dire que les individus utilisent des moyens de transport d’autant plus lourds que les distances à parcourir sont longues. Ainsi, les distances moyennes sont plus longues quand on utilise le train.

Notons et insistons sur la distance des navettes domicile-travail. Ce type de trajet est en moyenne le plus long alors qu’il est quotidien. Toute la question de

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la périurbanisation, c’est-à-dire de la distribution géographique des logements et des activités s’exprime ici en quelques chiffres.

Tableau A2. 9 : Distance moyenne parcourue par déplacement et par motif (distance donnée en kilomètre).

Nb d’observations

Moyenne Ecart type Minimum Maximum

Enfants (crèche ou école) 4276 5,05 8,50 0,00 90,00 Commerces 8371 5,08 7,98 0,00 100,00 Soins médicaux 1288 8,45 12,60 0,10 100,00 Démarches administratives 961 7,10 12,21 0,00 96,00 Visites parents ou amis 4661 9,22 14,19 0,00 100,00 Accompagnement 4699 5,58 9,27 0,00 99,00 Vacances Loisirs 7052 7,27 12,63 0,00 100,00 Motifs Professionnels 13137 10,25 13,65 0,00 100,00

Source : Enquête transport et communication 1993-94.

Les tableaux qui suivent permettent d’établir des comparaisons entre le comportement des habitants de chaque zone et le comportement général pour mieux apprécier l’ampleur des différences entre zones. En moyenne 9,59% des déplacements sont consacrés aux enfants. Les habitants de l’espace à dominante urbaine se déplacent plus pour ce motif que les habitants de l’espace à dominante rurale. Les couronnes périurbaines se distinguent par une proportion des déplacements consacrés aux enfants plus élevée (1,3 fois plus).

Les déplacements motivés par les visites font apparaître une différence entre l’espace à dominante urbaine et espace à dominante rurale. Ce motif est plus représenté chez les ruraux. Nous avons montré que dans les zones rurales, les personnes inactives sont plus représentées. Le Tableau A2. 12 met en avant l’importance relative des personnes sans activité professionnelle et des déplacements motivés par les visites dans les zones rurales.

Tableau A2. 10 : Répartition des déplacements selon le motif par zone. Enfants Commerces Soins

médicauxDémarches

administrati-ves

Visites Accompa-gnement

Loisirs Motifs profes-sionnels

Pôle urbain 9,55% 19,23% 2,99% 2,34% 9,88% 10,76% 15,63% 29,61% Couronnes périurbaines

12,33% 17,40% 2,62% 2,16% 9,47% 11,30% 13,56% 31,15%

Communes multipolarisées

9,69% 19,83% 2,40% 1,58% 10,74% 11,57% 15,03% 29,15%

Rural sous faible influence urbaine

9,33% 19,46% 2,98% 1,10% 13,63% 10,83% 15,68% 26,98%

Pôles ruraux 8,56% 18,86% 2,15% 2,15% 13,03% 10,45% 16,96% 27,84% Périphérie des pôles ruraux

4,44% 20,00% 2,36% 1,25% 10,97% 9,86% 16,53% 34,58%

Rural isolé 8,43% 18,35% 2,38% 1,86% 12,61% 9,80% 16,70% 29,86% Toutes zones confondues

9,59% 18,83% 2,89% 2,16% 10,47% 10,55% 15,88% 29,63%

Source : Enquête transport et communication 1993-94.

180

Tableau A2. 11 : Rapport à la moyenne des proportions de déplacement selon le motif par zone.

Enfants Commerces Soins médicaux

Démarches administratives

Visites Accompa-gnement

Loisirs Motifs professionnels

Pôles urbains 1,00 1,02 1,03 1,08 0,94 1,02 0,98 1,00 Couronnes périurbaines

1,29 0,92 0,91 1,00 0,90 1,07 0,85 1,05

Communes multipolarisées

1,01 1,05 0,83 0,73 1,03 1,10 0,95 0,98

Rural sous faible influence urbaine

0,97 1,03 1,03 0,51 1,30 1,03 0,99 0,91

Pôles ruraux 0,89 1,00 0,74 1,00 1,24 0,99 1,07 0,94 Périphérie des pôles ruraux

0,46 1,06 0,82 0,58 1,05 0,93 1,04 1,17

Rural isolé 0,88 0,97 0,82 0,86 1,20 0,93 1,05 1,01 Source : Enquête transport et communication 1993-94.

Tableau A2. 12 : Représentation des personnes à la retraite ou non actives dans chaque zone.

Retraités ou Non-actifs

Rapport à la moyenne

Proportion des déplacements pour

le motif visite

Rapport à la

moyenne Pôle urbain 34,21 1,00 9,88 0,94 Couronnes périurbaines 30,81 0,90 9,47 0,90 Communes multipolarisées 31,21 0,91 10,74 1,03 Rural sous faible influence urbaine 38,97 1,14 13,63 1,30 Pôles ruraux 33,25 0,97 13,03 1,24 Périphérie des pôles ruraux 26,20 0,77 10,97 1,05 Rural isolé 35,60 1,04 12,61 1,20 Toutes zones confondues 34,19 1,00 10,47 1,00

Source : Enquête transport et communication 1993-94

Nous avons remarqué que les déplacements s’organisent de manière différente dans l’espace à dominante urbaine et dans l’espace à dominante rurale. Dans l’espace à dominante urbaine, les flux de déplacements convergent vers les pôles urbains. Dans l’espace à dominante rurale, l’organisation est plus hétérogène. La proportion des déplacements vers les pôles urbains n’est pas négligeable.

Le tableau suivant croise motif et zone de destination. Les habitants des pôles ruraux sont ceux qui « sortent » le moins. Les soins médicaux, les visites, et les motifs professionnels sont les motifs qui les amènent le plus à quitter leur zone d’origine. Cela dit, ils ne « dépassent » pas les couronnes périurbaines.

181

Tableau A2. 13 : Répartition des déplacements selon la zone de destination et les motifs (toutes zones d’origine confondues).

Pôles urbains

Couronnes périurbaines

Communes multipo-larisées

Rural sous faible influence urbaine

Pôles ruraux

Périphérie des pôles

ruraux

Rural isolé

Total

Enfants 66,34% 12,04% 3,10% 7,42% 4,25% 0,61% 6,24% 100 Commerces 65,61% 8,87% 2,78% 7,88% 5,74% 1,23% 7,89% 100 Soins médicaux 72,28% 8,76% 2,27% 5,14% 4,21% 0,93% 6,40% 100 Démarches administratives 75,51% 8,50% 1,36% 3,17% 5,10% 0,68% 5,67% 100 Visites 56,85% 11,22% 3,45% 11,56% 5,39% 2,01% 9,53% 100 Accompagnement 64,99% 10,63% 3,03% 7,51% 5,22% 1,29% 7,33% 100 Loisirs 61,84% 9,75% 3,11% 8,69% 4,98% 1,85% 9,78% 100 Motifs professionnels 64,58% 9,57% 2,68% 7,20% 5,51% 1,62% 8,84% 100 Tous motifs confondus 64,19% 9,95% 2,89% 7,94% 5,26% 1,45% 8,33% 100

Source : Enquête transport et communication 1993-94.

On remarque qu’après les couronnes périurbaines, quel que soit le motif, la zone qui accueille les habitants de ces pôles est le rural sous faible influence urbaine. Les périurbains se dirigent vers les pôles urbains. Les motifs liés aux enfants restent largement satisfaits dans la zone d’origine.

Les soins médicaux et les démarches administratives sont des services qui nécessitent de se rendre dans les pôles. Les pôles urbains concentrent aussi les emplois : une proportion importante des périurbains (presque 50% des habitants des couronnes périurbaines et 34% des habitants des communes multipolarisées) travaillent « en ville ».

Tableau A2. 14 : Répartition des déplacements selon le mode utilisé et le motif de déplacement.

Marche à pied Deux-Roues Conducteur Transport en commun ou autre

Total

Enfants 32,76% 4,16% 40,34% 22,74% 100% Commerces 28,33% 3,19% 64,98% 3,5% 100% Soins médicaux 19,08% 1,32% 71,22% 8,38% 100% Démarches administratives

22,18% 4,04% 63,73% 10,05% 100%

Visite 17% 5,59% 72,36% 5,05% 100% Accompagnement 15,44% 0,98% 81,54% 2,04% 100% Loisir 28,21% 4,45% 60,76% 6,58% 100% Motifs Professionnels 10,93% 3,6% 76,69% 8,78% 100% Tous motifs confondus. 20,64% 3,59% 68,09% 7,69% 100%

Source : Enquête transport et communication 1993-94.

L’ORHA créé par l’Etat et le Conseil Régional Nord - Pas-de-Calaiss’est fixé comme objectifde mettre en place et gérer un système d’information régulier, pertinent, efficace etde constituer une plate-forme permanente au service des partenaires locaux et régionauxtant publics que privés concernés par les problèmes de l’habitat et de l’aménagement.

Constitué en association de la loi de 1901, l’ORHA met en oeuvre :• deux ateliers thématiques :- habitat- aménagement et développement durable

• quatre groupes de réflexion sur :- le logement social- l’armature urbaine régionale- le renouvellement urbain- le phénomène de périurbanisation

• deux plate-formes d’échanges :- des observatoires locaux- des SIG

à partir desquels s’effectue l’animation du réseau des partenaires régionaux et locaux.Les données, enquêtes, travaux, débats de ces ateliers sont publiés dans Les Cahiersde l’ORHA, revue semestrielle qui fait également le point des différentes initiatives etde l’actualité régionale de l’habitat et de l’aménagement et du développement local.

Membres de l’ORHA• Coprésidents- l’Etat, représenté par le Préfet de Région,- le Conseil Régional Nord - Pas-de-Calais, représenté par le Président du Conseil Régional• Vice-présidents- l’Association Régionale pour l’Habitat- le Conseil Régional des Notaires• Trésorier- l’Union Régionale des PACT

Autres membres de l’ORHA• l’Agence Nationale pour l’Amélioration de l’Habitat (ANAH)• la Chambre Régionale de la Propriété Immobilière (UNPI)• le Crédit Foncier de France (CCF)• Entenial• la Direction Régionale de la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC)• la Direction Régionale de l’INSEE• l’Ecole d’Architecture de Lille et des régions Nord• l’Etablissement Public Foncier du Nord - Pas-de-Calais (EPF)• la Fédération Nationale des Promoteurs Constructeurs (FNPC)• la Fédération Régionale du Bâtiment (FRB)• l’Union Régionale des CIL (URCIL)• la Société Civile de Gestion du Patrimoine Immobilier des HBNPC (SOGINORPA)• la Mission d’Aménagement et du Développement du Bassin Minier• les Agences de Développement et d’Urbanisme de Lille Métropole,de Flandres-Dunkerque, de la Sambre et de la région de Saint-Omer

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