5EMES ASSISES DE LA SOLIDARITEINTERNATIONALE EN BRETAGNE

DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ET SOLIDARITE INTERNATIONALE,AGIR ENSEMBLE AU NORD ET AU SUD

SYNTHESE DU PARCOURS 2 : COMMENT LE NUMÉRIQUE PARTICIPE AUDÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE DES PAYS DU SUD?

Rappel de la problématique proposée

Le numérique a profondément bouleversé les sociétés et les économies des pays du Nord. Qu'en est-il dans les pays du Sud, notamment les plus pauvres, où les difficultés d'accès (manque d'infrastructures, problèmed'accès à l'énergie, cherté des technologies) pourraient laisser penser que la « fracture numérique » estparticulièrement prononcée ? Le numérique est-il réellement moins présent dans les économies du Sud ?L'appropriation n'y est-elle pas plutôt différente, selon des modalités et des logiques spécifiques et quipourraient inspirer davantage le Nord ?L'objectif de ce parcours thématique est de :• permettre aux participants d'avoir une vision plus concrète, plus approfondie et actualisée de la façondont les pays du Sud se sont appropriés le numérique et le mettent à contribution pour leurdéveloppement économique.• mettre en avant l'intérêt du numérique en tant que facilitateur par sa dimension « réseau » qui peutpermettre de sauter certains paliers dans la trajectoire de création d'entreprise : permettre auxacteurs du sud de faire connaître leurs projets, identifier et contacter des partenaires, obtenir desfinancements (crowdfunding).• montrer l'intérêt de prendre en compte la façon spécifique dont les acteurs du Sud s'approprient lenumérique et comment s'appuyer sur ces pratiques/usages pour construire des projets dedéveloppement économique plus pertinents/efficaces.• montrer le potentiel du secteur numérique pour des projets conjoints d'ONG et d'entreprises dans ledomaine du développement économique et de l'entrepreneuriat.

Animation Emilie Dumain, ONG Defi

Intervenants 1. Manéré OUEDRAOGO, ONG Rongead2. Thierry BARBAUT, Agence des Micro Projets3. Pierre BERTHOU, FuturSkill Digital4. Sandrine LE CALVEZ, Groupe Orange

Rapporteur Sonia SCOLAN CASI Bretagne

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SESSION DU MATIN

• Table ronde « Rôle et importance du numérique dans le développement économique des pays duSud ». Participants : Manéré OUEDRAOGO, ONG Rongead, Thierry BARBAUT, Agence des MicroProjets

• Témoignages « Ce qui se fait déjà au Sud, quelle plus-value apportée par le numérique ? »

◦ Manéré OUEDRAOGO, ONG Rongead - présentation du service N'Kalo d'information sur lemarché des filières agricoles (http://www.anacarde.com/)

◦ Pierre BERTHOU, FuturSkill Digital – présentation de la plateforme informatique de formation àdistance pour le développement économique de communautés à Madagascar (en partenariatavec l'ONG DEFI et l'entreprise malgache Jojopil) ; témoignage vidéo de l'entreprise Jojopil.

◦ Sandrine LE CALVEZ, Groupe Orange – L’engagement d’Orange pour l’entrepreneuriat local enAfrique : la stratégie Orange 4 Development

SESSION DE L'APRES-MIDI

• Exposé sur l'état des lieux du numérique au Sud et le rôle du numérique pour favoriser undéveloppement économique inclusif - Thierry BARBAUT, Agence des Micro Projets

• « World Café » (débat créatif et collaboratif) sur le numérique dans les projets de développementéconomique au Sud

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LES EXPERIENCES PRESENTEES OU TEMOIGNAGESIntervenant 1 Manéré OUEDRAOGO, ONG Rongead

PrésentationContexte, démarche, thématiques

L’ONG Rongead intervient en Afrique de l’Ouest sur des actions en lien avec l’énergie etl’environnement et le développement de marchés de produits agricoles. Le projet N'KALO iciprésenté vise à favoriser l'insertion des organisations professionnelles agricoles d'anacardedans le commerce international en améliorant le revenu des producteurs par une meilleuregestion des risques de commercialisation, dans un contexte international marqué parl’instabilité des prix agricoles et l’augmentation de la demande internationale.

Les matières agricoles anacarde et sésame sont vendues essentiellement aux indiens et leurprix fluctuent fortement: deux producteurs qui le même jour vendent la même quantité peuvent ne pas obtenir le même revenu. Une conséquence de cette fluctuation est que les commerçants investissent peu dans le développement de la filière car le risque de perte existe.

Pour permettre aux acteurs d’avoir plus de visibilité sur l’information et être en mesure de négocier, un service d'information et d'accompagnement a été développé sur téléphone portable.

Pour les acteurs abonnés au service, un bulletin hebdomadaire sur le marché de ces filières est envoyé sous forme de SMS comprenant des informations sur les prix, les tendances, et les actualités, favorisant ainsi la prise de décision des acteurs. . Par ailleurs, grossistes, organisations de producteurs et transformateurs sont mis en en relation et conseillés dans la contractualisation. N kalo signifie « je suis informé ».

Eléments de réussite à retenir

Le service n’Kalo est accessible sous forme d'abonnement payé via le téléphone. Le service compte 6000 abonnés collectifs et 600 individuels au Sénégal, 10000 abonnés au Sénégal et 30000 abonnés en Côte d’Ivoire grâce au partenariat développé avec Orange.

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La transparence permet d’éviter de nombreux conflits car tout le monde est informé.

Difficultés et contraintes rencontrées

Il est difficile de mesurer la satisfaction liée à l’utilisation de l’outil sauf à prendre en compte les réabonnements. Il est évalué un gain de 60000 FCF par hectare de sésame pour ceux qui reçoivent les infos N’kalo.

Propositions, bonnes pratiques, conseils

Une dynamique se dégage actuellement au sud et beaucoup d'actions de solidarité en lien avec le numérique sont appuyées par le nord.« Pour changer d'échelle, le taux de pénétration du téléphone est un avantage ».

Intervenant 2 Thierry BARBAUT, Agence des Micro Projets

PrésentationContexte, démarche, thématiques

L’Agence des Micro projets gère des médias dédiés à l'Afrique et un site internet composé de870 correspondants qui permet de véhiculer une image positive, de croissance et d’initiativesaxées autour du numérique et du digital.En terme de communication et de stratégie, l'Agence des micro-projets valorise les actionsportés par des locaux en partenariat avec des associations françaises.

Eléments de réussite à retenir

« Les innovations du Sud soutenues par le nord ont un très bon taux de réussite. ils ont un effet démultiplicateur. L’idée est également de cartographier ces projets afin qu’ils soient visibles par tous ».

Difficultés et contraintes rencontrées

La difficulté majeure est un problème de communication du monde des ONG et de la solidarité internationale. Comment est dépensé tout cet argent ? Pourquoi tout cet argent alors que l’Afrique connaît une croissance du PIB de 4% ?« Le premier défi c'est les infrastructures, c'est être connecté. en Afrique, il n’y a pas d'ADSL et il y a très peu d'ordinateur ; c'est par le téléphone mobile qu'on communique : moins cher et moins gourmands en électricité ».

Propositions, bonnes pratiques, conseils

Il faut s'ouvrir, voyager et comprendre et s'inspirer des expériences locales. Le mobile banking aide aussi la solidarité et on peut s'inspirer de cela pour développer des choses en Europe.« Il est évident et constaté au quotidien que l'accès à internet et au digital numérique est essentiellement un accèsà de l'information. Ceci est primordial pour le développement en Afrique. L’Europe dispose du capital humain et financier ; l’Afrique, c'est la jeunesse ; l’enjeu c’est de faire jouer ces deux continents ensemble en partenariat gagnant-gagnant .Aujourd’hui deux tiers à trois quart de la croissance en Afrique se fait sur la base du numérique. Il serait illusoire decroire que l'Europe est en avance.

Intervenant 3 Pierre BERTHOU, FuturSkill Digital

PrésentationContexte, démarche, thématiques

Futur Skill développe le e-learning et des logiciels qui permettent de faire de la formation àdistance.Le e-learning est la création de relation pédagogique entre enseignants et étudiants distance.Il s'agit de mettre du contenu (vidéo, doc, quizz) en ligne sur une plate-forme. Cesplateformes permettent également de mettre en relation les personnes qui travaillent enFrance avec les interlocuteurs dans les autres pays sur de la pédagogie, des échanges.Dans le cadre du partenariat avec DEFI, nous fournissons nos outils gracieusement et des

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collaborateurs aident l'association en bénéficiant de créneaux sur leur temps de travail. Le but de l’opération est d’apporter du contenu aux enseignants afin de démultiplier l’impact de l’apprentissage.

Eléments de réussite à retenir

L’internet reste peu développé en Afrique. Le projet de formation des enseignants porté par Défi devait se développer dans un village en périphérie de Ouagadougou où il n’ y avait ni internet, ni électricité. Le challenge était de permettre l’acheminement malgré tout de contenu vidéo.Il a été développé un outil de connexion, le Raspberry Pi constitué d’un écran, d’un clavier et d’un système d'exploitation linux avec lequel il est possible de se connecter (40 euros).L’appareil est tout petit et donc consomme peu d’énergie et est alimenté au solaire. Une première expérimentation est actuellement lancée et financée.L’objectif maintenant est de mettre du contenu sur le réseau et d’assurer des traductions. Le souhait est d’entraîner d'autres dirigeants pour essaimer dans d'autres villages si l’expérimentation est positive.

Propositions, bonnes pratiques, conseils

« Quand on fait des choses dans le cadre d'une entreprise, la volonté du dirigeant est indispensable pour entraînerles autres. L’intérêt est de faire du projet un projet d’entreprise qui va donner du sens : en effet, une entreprise est composée d'individus et on à tous besoin, particulièrement aujourd’hui, de davantage de sens dans nos actions ; il est nécessaire d’avoir des choses en commun autres que la rentabilité immédiate ».

Intervenant 4 Sandrine LE CALVEZ, Groupe Orange

PrésentationContexte, démarche, thématiques

Orange 4 Development développe des services pour les pays émergents et l’Afrique del’Ouest.Orange c’est aussi 110 millions de clients en Afrique répartis dans 20 pays pour un total de22000 salariés.Le terrain de croissance est extrêmement fort.L’objectif de Orange 4 Development est de favoriser l’inclusion numérique des territoires enmettant la technologie au service du développement.

Orange développe un bouquet de produits et services adaptés au marché local et en lien avec les technocentres mis en place localement. Le dispositif N’Kalo fait partie des outils développés. On peut également citer la synthèsevocale pour que les illettrés puissent accéder à l’information.Orange apporte également son soutien aux entrepreneurs africains en open innovation, participe à des incubateurs (structure indépendante qui permet à des starts-up ou de petits entrepreneurs de se faire aider pour développer leur idée ou leur entreprise). Le Challenge API permet a des entreprises ou développeurs d'accéder aux infrastructures techniques Orange, aux serveurs d'envoi de SMS, aux technologies USSD qui permet d'accéder à l'info depuis un mobile via le # très utilisé en Afrique (accès à facebook, aux SMS, à internet).

Eléments de réussite à retenir

Le big data dans les pays émergents peut être extrêmement positif dans les pays avec peu de données statistiques à disposition des ministères pour éclairer leurs choix de développement. Orange met dans ce cadre à disposition ses données clients et les itinéraires d'appel et organise un concours ouverts aux équipes scientifiques partout dans le monde (donc l’Afrique) afin de proposer une utilisation de ces données qui soit un outil technique d’aide audéveloppement. 150 projets ont été soumis et 60 propositions retenues avec des applications dans le domaine du transport et de l’urbanisation, de la santé, du bien-être, de la mise en place de statistiques nationales, dans la gestion de l'énergie...Trois projets vont être lancés: la création de proxy de statistiques nationales pour mieux caractériser la pauvreté auSénégal ; dans le domaine de la santé: amélioration de modèle épidémiologique pour la malaria et la schistosomisis ; dans le domaine agricole: amélioration de la sécurité alimentaire en anticipant l'évolution du prix de certaines denrées dont le mil.

Difficultés et contraintes rencontrées

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Faute d’infrastructure, il est difficile de connecter au réseau mobiles un maximum de population. Dans certains pays d’Afrique de l’ouest, la population est fortement rurale, très éloignée des capitales ou des grandes villes. Une réflexion a donc été menée sur des infrastructures low cost comme des relais d’antennes dans les villages conçus pour être très économiques et pour être déployés très facilement à un coût très modéré

LES ECHANGES : QUESTIONS – REPONSESLes questions suscitées ... et les réponses

Quelle place à la culture locale ? Le Développement ne passe-t-il pas par la prise de conscience de l'identité culturelle?

Sandrine Le Clavez« Ceux qui travaillent dans le technocentre d'Abidjan sont des locaux .On s'efforce de travailler avec des designers et graphistes locaux. On associe des sons qui ont une signification locale à certaines fonctions de téléphone. On met en place des centres de test client sur tous les territoires ».

Manéré Ouedraogo« Utiliser les langues locales est souhaité mais au Burkina Faso il y en a plus de 60 ; il est donc difficile de les prendre en compte. On développe des outils en français car c’est la langue la plus communément parlée »

L'après-midi était consacrée à une animation de world-café autour des 2 questions suivants :- En quoi, d'après vous, le numérique peut-il permettre le rapprochement ONG/Entreprises ?- En quoi les innovations numériques (du Nord et du Sud) favorisent-elles la diversification et la pertinence des projets ?

LES ECHANGES : CITATIONSCitations à retenir de l'atelier

Auteur Citation

Luc Dedessus Le Moustier - Repta

Pour nous, l'introduction de l'outil numérique bouleverse notre vision linéaire du développement et nous fait perdre nos repères.La notion de temps spécifique à la culture africaine n'est plus tout à fait vraie : on est dans l'immédiateté.Cela a été une vraie révolution lorsque tous les producteurs maliens ont pu avoir la même information sur le cours du coton.

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A la faculté de Rennes il existe un secteur universitaire chargé d'observer les usages du numérique.

Thierry Barbaut Aujourd’hui le monde entier profite de la révolution digitale numérique.Il faut sortir des clichés: ce sont souvent les plus âgés, plus patients, qui s’approprient le mieux les processus de dématérialisation ou d’immédiateté. les jeunes sont plus impatients.

Tosoa Mandran (partenaire Defi en vidéo)

Le partenariat entre Défi et futur skill permet l’apprentissage à distance dans les communes enclavées. Plutôt que d’amener du personnel, il est plus facile de diffuser les formations numériques et de les rendre accessibles aux centres de formation.Les villageois peuvent consulter des vidéos de vulgarisation de techniques agricoles accessibles à la demande; ils peuvent s’arrêter et revenir en arrière ce qui facilite la compréhension du contenu de formation.Le Rasperry Pi fonctionne avec très très peu d'énergie. La technologie n'est pas très importante. La plus value est vraiment sur l’accessibilité à du contenu.

En Afrique aujourd’hui il n’y a que 12% de smartphones d’où l’usage massif de SMS

LA SYNTHESE DU PARCOURSLes élémens importants à mettre en avant

De nouveaux emplois et métiers sont créés au Sud en lien direct avec les nouvelles technologies :- Installation de nouvelles technologies dans les villages → besoins de techniciens- Des locaux sont embauchés dans les technocentres de Orange à Aman et à Abidjan- Pour le système Nkalo, un réseau d’analystes collecte les infos pour ensuite produire un message qui prend

en compte les risques commerciaux du moment.- beaucoup de sites européens se remplissent depuis Madagascar et l’Afrique en général ; les assistants

virtuels, les centres d'appel, les secrétaires médicales recrutent beaucoup en Afrique. Orange a ouvert un centre de formation pour ces nouveaux métiers.

- des métiers de liseurs et tapeurs de SMS sont créés (pour les femmes et hommes qui utilisent les services mais sont analphabètes).

Les nouveaux outils s’utilisent donc même par les analphabètes ou conduisent à l’alphabétisation (Luc DedessusLe Moustier, REPTA) :Orange a conduit au Niger il y a quelques années un projet d'alphabétisation classique des femmes. Leur situation d’analphabètes ne leur posait pas de problème et le programme a échoué. Ces mêmes femmes, avec l’arrivée du téléphone portable ont voulu apprendre à écrire et à lire pour pouvoir lire et envoyer des SMS. On est sur un renversement de la demande, le rapport à l'alphabétisation est modifié.

La mondialisation s’installe via les nouvelles technologies :L’écoute de musique sur les MP3 est très nouveau en Afrique (Manéré Ouedraogo). Ce n’était pas culturel, La facilité du téléchargement rend désormais la pratique commune. Un transistor à puces a même été développé qui intègre une carte SD sur laquelle on met des chansons mp3 qui se vendent au marché.

Le numérique améliore le quotidien des gens- Trois millions de migrants burkinabés résidents en côte d’ivoire veulent rester en contact avec la famille au

pays : l’envoi de SMs est plus facile que se rendre à une poste et moins cher que le timbre. Le transfert d'argent via le mobile est également moins cher que les transferts western union et est plus rapide.

- dans le domaine agricole, un producteur peut recevoir sur son téléphone des messages en image sur l'itinéraire technique de la production d'une variété, la météo, les évolutions attendues du marché, autantd’informations nécessaires à un développement optimal

- dans les écoles en brousse, les élèves ont peu de cahiers et de manuels. Aujourd'hui, les professeurs, élèves et parents reçoivent par SMS des pdf avec le contenu du cours.

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- une femme enceinte peut s'abonner et recevoir tous les jours des conseils sur sa grossesse, pour suivre le poids de son enfant.

- Un dossier de demande de subvention, une publication, quand ils sont numérisés peuvent être envoyés à beaucoup de personnes et les destinataires peuvent les recevoir sur leur téléphone mobile en pdf et sms.

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Facilitation graphique du parcours thématiquepar Guillaume Lagane