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HAL Id: tel-01058661 https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01058661 Submitted on 27 Aug 2014 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Détection portale des nutriments et contrôle de l’homéostasie énergétique par l’axe nerveux intestin-cerveau Filipe De Vadder To cite this version: Filipe De Vadder. Détection portale des nutriments et contrôle de l’homéostasie énergétique par l’axe nerveux intestin-cerveau. Endocrinologie et métabolisme. Université Claude Bernard - Lyon I, 2014. Français. <NNT: 2014LYO10113>. <tel-01058661>

Détection portale des nutriments et contrôle de l'homéostasie

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  • HAL Id: tel-01058661https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01058661

    Submitted on 27 Aug 2014

    HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

    Larchive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestine au dpt et la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publis ou non,manant des tablissements denseignement et derecherche franais ou trangers, des laboratoirespublics ou privs.

    Dtection portale des nutriments et contrle delhomostasie nergtique par laxe nerveux

    intestin-cerveauFilipe De Vadder

    To cite this version:Filipe De Vadder. Dtection portale des nutriments et contrle de lhomostasie nergtique par laxenerveux intestin-cerveau. Endocrinologie et mtabolisme. Universit Claude Bernard - Lyon I, 2014.Franais. .

    https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-01058661https://hal.archives-ouvertes.fr

  • N dordre 113-2014 Anne 2014

    THESE DE LUNIVERSITE DE LYON

    Dlivre par

    LUNIVERSITE CLAUDE BERNARD LYON 1

    ECOLE DOCTORALE BMIC

    DIPLOME DE DOCTORAT

    (arrt du 7 aot 2006)

    soutenue publiquement le 30 juin 2014

    par

    M. DE VADDER Filipe

    TITRE :

    Dtection portale des nutriments et contrle de lhomostasie nergtique par laxe nerveux intestin-cerveau

    Directeur de thse : M. Gilles MITHIEUX

    JURY : Mme Agns BERNET, prsidente du jury

    M. Christophe MAGNAN, rapporteur M. Herv BLOTTIRE, rapporteur M. Patrice CANI, examinateur M. Franois LEULIER, examinateur M. Gilles MITHIEUX, directeur de thse

  • UNIVERSITE CLAUDE BERNARD - LYON 1

    Prsident de lUniversit

    Vice-prsident du Conseil dAdministration

    Vice-prsident du Conseil des Etudes et de la Vie Universitaire

    Vice-prsident du Conseil Scientifique

    Directeur Gnral des Services

    M. Franois-Nol GILLY

    M. le Professeur Hamda BEN HADID

    M. le Professeur Philippe LALLE

    M. le Professeur Germain GILLET

    M. Alain HELLEU

    COMPOSANTES SANTE

    Facult de Mdecine Lyon Est Claude Bernard

    Facult de Mdecine et de Maeutique Lyon Sud Charles Mrieux

    Facult dOdontologie

    Institut des Sciences Pharmaceutiques et Biologiques

    Institut des Sciences et Techniques de la Radaptation

    Dpartement de formation et Centre de Recherche en Biologie Humaine

    Directeur : M. le Professeur J. ETIENNE

    Directeur : Mme la Professeure C. BURILLON

    Directeur : M. le Professeur D. BOURGEOIS

    Directeur : Mme la Professeure C. VINCIGUERRA

    Directeur : M. le Professeur Y. MATILLON

    Directeur : M. le Professeur P. FARGE

    COMPOSANTES ET DEPARTEMENTS DE SCIENCES ET TECHNOLOGIE

    Facult des Sciences et Technologies

    Dpartement Biologie

    Dpartement Chimie Biochimie

    Dpartement GEP

    Dpartement Informatique

    Dpartement Mathmatiques

    Dpartement Mcanique

    Dpartement Physique

    Dpartement Sciences de la Terre

    UFR Sciences et Techniques des Activits Physiques et Sportives

    Observatoire des Sciences de lUnivers de Lyon

    Polytech Lyon

    Ecole Suprieure de Chimie Physique Electronique

    Institut Universitaire de Technologie de Lyon 1

    Institut Universitaire de Formation des Matres

    Institut de Science Financire et d'Assurances

    Directeur : M. le Professeur F. DE MARCHI

    Directeur : M. le Professeur F. FLEURY

    Directeur : Mme le Professeur H. PARROT

    Directeur : M. N. SIAUVE

    Directeur : M. le Professeur S. AKKOUCHE

    Directeur : M. le Professeur A. GOLDMAN

    Directeur : M. le Professeur H. BEN HADID

    Directeur : Mme S. FLECK

    Directeur : Mme la Professeure I. DANIEL

    Directeur : M. C. COLLIGNON

    Directeur : M. B. GUIDERDONI

    Directeur : M. P. FOURNIER

    Directeur : M. G. PIGNAULT

    Directeur : M. C. VITON

    Directeur : M. A. MOUGNIOTTE

    Administrateur provisoire : M. N. LEBOISNE

  • 1

    La science, mon garon, est faite d'erreurs, mais d'erreurs qu'il est bon de commettre, car

    elles mnent peu peu la vrit.

    Jules Verne, Voyage au centre de la Terre

    Le gras, cest la vie !

    Karadoc de Vannes

  • 2

    Remerciements

    Tout dabord, je souhaite remercier Gilles Mithieux, qui ma accueilli dans son unit, ce qui a dmarr

    une trs belle histoire scientifique et humaine. Je garderai toujours le souvenir des entretiens interminables dans

    le bureau, des discussions parfois animes (vive les souris axniques !), mais galement des moments partags

    autour dune mousse, qui nous ont fait rigoler plus dune fois (cher congrs de Heidelberg).

    Ma gratitude va galement Agns Bernet, Herv Blottire, Christophe Magnan, Patrice Cani et

    Franois Leulier, pour avoir accept de juger cette thse. En particulier, je remercie Patrice Cani et Agns Bernet

    pour avoir suivi mon travail lors des comits de suivi de thse. Je remercie de mme Gabriel Lepousez et Ccile

    Viollet, qui mont offert ma premire opportunit de me confronter la science dans un laboratoire et mont

    form dans les techniques de neurosciences, ainsi qu Hans-Rudi Berthoud, chez qui jai fait un stage

    scientifiquement trs enrichissant.

    Je voudrais galement remercier Fredrik Bckhed et Petia Kovatcheva, dont le travail en collaboration a

    permis la publication de mon deuxime article. Tack Fredrik de maccueillir dsormais dans son laboratoire en

    Sude pour poursuivre ma carrire scientifique.

    Merci galement Chantal Watrin, Jrme Honnorat, Armelle Paquet et Nicolas Gadot, qui ont

    toujours mis ma disposition le matriel ncessaire mes expriences.

    Je souhaite galement remercier les membres de lunit 855, pour leur accueil, aide, rires, discussions

    scientifiques et bons moments lors de ces annes. Merci Carine chirurgien du tonnerre et Adeline

    toujours dispo pour aider , avec qui jai partag mon bureau et qui mont aid acqurir mes (quasi-

    inexistantes) capacits de chirurgien. Merci mes co-thsardes Jennifer je ne sais pas contenir mon rire ,

    Daisy il est fou ce type , Aude plus fort que moi tu meurs , Julie brune mais blonde , Sylvie la

    poisse , et Flore oh le pauvre , ainsi qu mon seul co-thsard Julien bande de PQ pour les moments

    passs avec vous dans la rigolade ; moments partags avec Blandine je ris presque aussi fort quAude , Anne

    Titanne , Fanny jai une thorie diffrente sur ce film , Nicolas 86 , dont les post-it immortels ornent

    dsormais nos bureaux. Merci aussi Amandine je rle mais sans me fcher , qui a t bien plus quune

    collgue, Fabienne chocolate lover et Maud je ne peux arrter de courir . Enfin, merci tous ceux que

    jai cotoys ces annes : Marie-Ange, Anne Delorme et Anne Stefanutti, Armelle, Jean-Andr, Marta, Monika,

    Aya La liste est longue !

    Merci tous les amis qui sont venus me voir Lyon pendant la thse : Diego, Pol, Agathe, Julien, Imen

    et Florent, Vincent. Merci galement tous ceux qui se sont dplacs pour la soutenance. Votre prsence des

    moments parfois difficiles a t prcieuse. Et merci Pinouz pour mavoir montr quune vie de doctorant nest

    pas une vie monacale, mais bien des annes de moments lgendaires (et de bars introuvables !).

    Je voudrais tmoigner tout mon amour et ma reconnaissance ma famille : Maman, je te dois tout, plus

    que je ne pourrais crire. De todo corazn, muchas gracias por haber sido y seguir siendo la mejor. Shonke,

    merci dtre un frre exceptionnel et les mots me manquent pour le dire. Votre prsence (malgr la distance) et

    votre ducation mont permis datteindre ce point. Je vous suis reconnaissant jamais.

    Enfin, je ne peux conclure sans remercier Amandine, qui a t mes cts pendant cette thse. Merci de

    me soutenir sans faille, mme dans les dcisions difficiles impliquant ma carrire et notre futur. Il est difficile de

    dire en quelques lignes toute ma gratitude. Merci tout simplement davoir toujours t l pour moi.

  • 3

    Abrviations

    ACTH : Adrenocorticotropic hormone, hormone corticotrope

    AGCC : Acide gras chane courte

    AgRP : Agouti-related peptide

    AMPK : AMP-activated protein kinase, kinase active par lAMP

    Angplt4 : Angiopoietin-like protein 4

    AP : Area postrema

    ARC : Arcuate nucleus, noyau arqu

    CART : Cocaine- and amphetamine-regulated transcript, transcrit rgul par la cocane et les

    amphtamines

    CCK : Cholcystokinine

    DMN : Dorsal medial nucleus, noyau dorso-mdian

    dmnX : Noyau moteur du nerf vague

    DVC : Dorsal vagal complex, complexe dorsal vagal

    FFAR : Free fatty acid receptor, rcepteur des acides gras libres

    FXR : Farnesoid X Receptor

    F-1,6-BPase : Fructose-1,6-bisphosphatase

    GIP : Glucose-dependent insulinotropic peptide, peptide insulinotrope dpendant du glucose

    GLP-1 : Glucagon-like peptide 1

    GLP-2 : Glucagon-like peptide 2

    GHS-R : Growth-hormone-secretagogue receptor, rcepteur au scrtagogue de lhormone de

    croissance

    G6Pase : Glucose-6-phosphatase

    IMC : Indice de masse corporelle

    LPL : Lipoprotine lipase

    MOR : Mu-opioid receptor, rcepteur -opiode

    MSH : Melanocyte-stimulating hormone, hormone mlanotrope

    mTOR : Mammalian target of rapamycin

    LHA : Lateral hypothalamic area, hypothalamus latral

    NAcc : Noyau accumbens

    NGI : Noglucogense intestinale

    NO : Monoxyde dazote

    NPY : Neuropeptide Y

  • 4

    NTS : Nucleus of the solitary tract, noyau du tractus solitaire

    OLETF : Otsuka Long-Evans Tokushima Fatty

    OMS : Organisation Mondiale de la Sant

    PBN : Parabrachial nucleus, noyau parabrachial

    PEG : Production endogne de glucose

    PEPCK : Phosphonolpyurvate carboxykinase

    Pi : Phosphate inorganique

    PIG : Production intestinale de glucose

    POMC : Pro-opiomlanocortine

    PVN : Paraventricular nucleus, noyau paraventriculaire

    PYY : Peptide YY

    SGLT3 : Sodium/glucose transporter 3, transporteur de glucose et de sodium 3

    SNP : Systme nerveux priphrique

    TMA : Trimthylamine

    TMAO : Trimthylamine-N-oxyde

    VIP : Vasoactive intestinal peptide, peptide vasoactif intestinal

    VLDL : Very low-density lipoprotein, lipoprotine trs faible densit

    VMN : Ventral medial nucleus, noyau ventro-mdian

    VTA : Ventral tegmental area, aire tegmentaire ventrale

    5-HT : 5-hydroxytryptamine (srotonine)

  • 5

    Table des matires

    AVANT-PROPOS .................................................................................................................... 7

    DONNES BIBLIOGRAPHIQUES .................................................................................... 10 1. LA PRODUCTION ENDOGNE DE GLUCOSE ...............................................................11

    1.1 Les voies mtaboliques de production ............................................................................................... 11 1.1.1. La glycognolyse ....................................................................................................................... 11 1.1.2. La noglucogense ..................................................................................................................... 12

    1.2 Rles complmentaires des organes producteurs de glucose dans lhomostasie glucidique ........... 13 1.2.1. Le foie ........................................................................................................................................ 13 1.2.2. Le rein ........................................................................................................................................ 13 1.2.3. Lintestin .................................................................................................................................... 14

    2. LAXE INTESTIN-CERVEAU ET LE CONTRLE DE LA PRISE ALIMENTAIRE ..15 2.1 Innervation de lintestin par le systme nerveux priphrique (SNP) ............................................... 15

    2.1.1. Linnervation vagale .................................................................................................................. 15 2.1.2. Linnervation sympathique ........................................................................................................ 16 2.1.3. Le systme nerveux entrique .................................................................................................... 16

    2.2 Les hormones gastro-intestinales et la rgulation de lhomostasie nergtique ............................... 17 2.2.1. La ghrline ................................................................................................................................. 18 2.2.2. La cholcystokinine ................................................................................................................... 18 2.2.3. Le peptide YY ............................................................................................................................ 19 2.2.4. Le glucagon-like peptide-1 (GLP-1) .......................................................................................... 20 2.2.5. Le glucose-dependent insulinotropic peptide (GIP) .................................................................. 21 2.2.6. La srotonine .............................................................................................................................. 21

    2.3 La dtection des nutriments et le contrle de la prise alimentaire par le systme nerveux hpato-portal ........................................................................................................................................................... 22

    2.3.1. La dtection des nutriments ....................................................................................................... 22 2.3.2. Le glucose portal et la sensation de satit ................................................................................ 23 2.3.3. Mcanismes molculaires de dtection du glucose portal ......................................................... 23

    2.4 Contrle central de la prise alimentaire ............................................................................................. 24 2.4.1. Intgration des signaux par lhypothalamus et le tronc crbral ............................................... 24 2.4.2. Lhypothalamus ......................................................................................................................... 25

    2.4.2.1. Les noyaux impliqus dans la prise alimentaire ................................................................. 25 2.4.2.2. Les neurotransmetteurs associs ........................................................................................ 26

    2.4.3. Le tronc crbral ........................................................................................................................ 27 2.4.3.1. Le complexe dorsal vagal ................................................................................................... 27 2.4.3.2. Le noyau parabrachial ........................................................................................................ 28

    2.4.4. Le choix alimentaire : la rcompense et laversion .................................................................... 28 2.4.4.1. La rcompense .................................................................................................................... 29 2.4.4.2. Laversion ........................................................................................................................... 30

    3. LES RGIMES RICHES EN PROTINES ET LE RLE DES RCEPTEURS -OPIODES DANS LA SATIT ...................................................................................................31

    3.1 Les effets mtaboliques des rgimes riches en protines ................................................................... 31 3.1.1. Satit et induction de la thermogense ..................................................................................... 31 3.1.2. Contrle de lhomostasie glucidique ........................................................................................ 32 3.1.3. Mcanismes centraux activs par les rgimes hyperprotiques ................................................. 33

    3.2 La rgulation de la balance nergtique par les rcepteurs -opiodes (MOR) ................................. 33 3.2.1. Les rcepteurs -opiodes centraux ............................................................................................ 33 3.2.2. Les rcepteurs -opiodes priphriques .................................................................................... 34

    3.3 Les peptides opiodes ......................................................................................................................... 34 3.3.1. Les opiodes endognes ............................................................................................................. 34 3.3.2. Les opiodes provenant de la protolyse : une connexion entre la digestion protique et les MOR ?... ................................................................................................................................................... 35

    3.4 La noglucogense intestinale, lien entre digestion protique et satit ............................................ 36 4. INTERACTIONS FONCTIONNELLES ENTRE LE MICROBIOTE INTESTINAL ET LE MTABOLISME DE LHTE LORS DES RGIMES RICHES EN FIBRES SOLUBLES .......................................................................................................................................37

    4.1 Microbiote intestinal et nutrition ........................................................................................................ 37 4.1.1. Dveloppement et composition du microbiote intestinal ........................................................... 37

  • 6

    4.1.2. Modulation de la composition du microbiote par lalimentation ............................................... 38 4.2 Mtabolisme bactrien dans lintestin ................................................................................................ 39

    4.2.1. Contrle microbien du mtabolisme des acides biliaires ........................................................... 39 4.2.2. Mtabolisme microbien de la choline ........................................................................................ 40 4.2.3. Mtabolisme microbien des polysaccharides ............................................................................. 41

    4.2.3.1. Les polysaccharides non solubles ...................................................................................... 41 4.2.3.2. Lutilisation de substrats provenant de lhte .................................................................... 41 4.2.3.3. Le mtabolisme des acides gras chane courte (AGCC) ................................................. 42

    4.3 Le microbiote intestinal et le mtabolisme de lhte ......................................................................... 44 4.3.1. Microbiote et obsit .................................................................................................................. 44 4.3.2. Le microbiote intestinal et la rcolte dnergie .......................................................................... 45 4.3.3. Microbiote intestinal et lipogense de novo .............................................................................. 46

    4.4 Les AGCC et leurs effets bnfiques lors des rgimes riches en fibres ............................................. 46 4.4.1. Les rgimes riches en fibres ....................................................................................................... 46 4.4.2. Les AGCC et leur rle sur le mtabolisme ................................................................................ 47 4.4.3. Les rcepteurs des AGCC et leur rle dans le mtabolisme ...................................................... 49

    RSULTATS .......................................................................................................................... 51 Duraffourd, C., De Vadder, F., et al. (2012) Cell 150, 377-388. .......................................................52 De Vadder, F., et al. (2014) Cell 156, 84-96. .....................................................................................74 De Vadder, F., et al. En prparation ..................................................................................................96

    DISCUSSION GNRALE ................................................................................................ 109

    TRAVAUX PERSONNELS ................................................................................................ 115

    RFRENCES BIBLIOGRAPHIQUES ........................................................................... 118

  • 7

    AVANT-PROPOS

  • 8

    Lobsit correspond, selon la dfinition de lOrganisation Mondiale de la Sant

    (OMS), une accumulation excessive de graisses prsentant un risque potentiel pour la

    sant . Une personne ayant un indice de masse corporelle (IMC) suprieur ou gal 30 est

    considre comme obse, alors que le surpoids est dfini par un IMC suprieur 25.

    Considre comme un phnomne pidmique par lOMS depuis 1997, on estimait en 2008

    quil existait plus d'1,4 milliard dadultes en surpoids, parmi lesquels 500 millions taient

    obses. Lobsit rsulte dune drgulation entre dpenses et apports nergtiques, avec la

    balance penchant nettement vers ces derniers.

    Chaque anne, 2,8 millions de personnes au moins meurent des consquences du

    surpoids ou de lobsit, avec une prvalence presque double entre 1980 et 2008. Problme

    autrefois rserv aux pays revenu lev, lobsit existe aussi dsormais dans les pays

    revenu faible ou intermdiaire. lchelle mondiale, 44% du diabte, 23% des cardiopathies

    ischmiques et 7 41% de certains cancers peuvent tre imputs au surpoids et lobsit. La

    complication majoritaire associe lobsit est le diabte de type 2, dfini par une glycmie

    jeun suprieure ou gale 126 mg/dL (soit 7,0 mmol/L) et/ou une hmoglobine glyque

    (HbA1c) suprieure 6,5%. Cette maladie sinstaure par le dveloppement dune rsistance

    laction hypoglycmique de linsuline, compense dans un premier temps par une hyper-

    insulinmie permettant le maintien dune glycmie normale (Martin et al., 1992; Warram et

    al., 1990). Le passage ltat diabtique est caractris par une diminution de la scrtion

    dinsuline par le pancras et une augmentation de la production hpatique de glucose (Clore et

    al., 2000; Magnusson et al., 1992).

    Parmi les recommandations pour combattre lpidmie, il a t convenu que la

    promotion dune alimentation saine et de lexercice physique reste la priorit pour les tats

    membres de lOMS (Plan daction 2008-2013 pour la Stratgie mondiale de lutte contre les

    maladies non transmissibles). Dans ce contexte particulier, la relation lenvironnement

    alimentaire constitue une question dtude essentielle. Chez lHomme, cette relation implique

    des facteurs aussi bien externes (culturels, socio-conomiques) quinternes (physiologiques et

    psychologiques). Ceci multiplie les stratgies de recherche et daction visant rduire la

    prvalence de lobsit, en particulier par lducation alimentaire. Le risque de devenir obse

    est considrablement amoindri en diminuant les apports en lipides, en limitant la

    consommation de sucres rapides et en rduisant la teneur en sel des aliments. Il est

  • 9

    particulirement recommand de consommer davantage de fruits et lgumes, ainsi que de

    lgumineuses, de crales compltes et de fruits secs.

    Une amlioration de la qualit de lalimentation constitue donc un moyen efficace de

    prvention et lutte contre lobsit et les maladies mtaboliques associes. Parmi les divers

    rgimes reconnus pour leurs effets bnfiques, nos tudes ont particulirement port sur les

    rgimes riches en protines et les rgimes riches en fibres solubles. Ces rgimes sont connus

    pour leurs effets bnfiques chez lHomme (Larsen et al., 2010; Mendeloff, 1977), mais les

    mcanismes associs ces amliorations restaient jusqualors mal connus.

    Dans la premire partie de ce manuscrit figure une introduction bibliographique qui

    dcrit tout dabord la rgulation de la production endogne de glucose dans les organes

    producteurs (foie, rein et intestin) ; ensuite sont prsents les mcanismes connus de

    communication entre lintestin et le cerveau contrlant la prise alimentaire. Les effets des

    rgimes voqus prcdemment sont dcrits par la suite partir de donnes bibliographiques.

    Dans la deuxime partie sont prsents les deux articles publis pendant mon doctorat,

    qui proposent des mcanismes physiologiques rendant compte des amliorations

    mtaboliques lors des rgimes riches en protines et en fibres solubles (Duraffourd et al.,

    2012; De Vadder et al., 2014). Ces tudes portent particulirement sur le rle cl de la

    production intestinale de glucose dans les amliorations observes. Un troisime article

    (soumis ce jour) propose un mcanisme dactivation de la NGI par les neurones entriques

    lors des rgimes prcdemments voqus.

    Enfin, dans une troisime partie, une discussion gnrale analyse les rsultats de ces

    articles en rapport avec dautres donnes publies et ouvre sur les possibilits de poursuite de

    ces tudes.

  • 10

    DONNES BIBLIOGRAPHIQUES

  • Figure 1. Lquilibre glycmique dans lorganisme.

    La glycmie est maintenue stable une valeur autour de 1 g/L. Lors dun dsquilibre (hypo- ou hyperglycmique),

    lorganisme adapte sa rponse, ramenant la glycmie vers lquilibre.

    (Illustration ralise avec laide de Servier Medical Art)

  • 11

    1. LA PRODUCTION ENDOGNE DE GLUCOSE

    La concentration plasmatique de glucose est finement rgule par lorganisme autour

    dune valeur de 1 g/L (soit 5,56 mmol/L). Le glucose est la source principale dnergie pour

    les cellules de lorganisme, permettant notamment le fonctionnement des hmaties, du

    cerveau et des muscles contraction rapide. Lquilibre glycmique (Figure 1) est notamment

    le rsultat dune balance entre :

    la consommation de glucose par les organes et le stockage nergtique sous forme de

    glycogne (glycognogense) et de triglycrides (lipogense),

    les apports alimentaires de glucose et la production endogne de glucose dautre part.

    La production endogne de glucose (PEG) permet lapport de glucose lors dpisodes

    hypoglycmiques non compenss par un apport exogne. Elle est possible par deux voies

    mtaboliques : la glycognolyse dans le foie et la noglucogense dans le foie, le rein et

    lintestin (Croset et al., 2001; Rajas et al., 1999).

    1.1 Les voies mtaboliques de production

    1.1.1. La glycognolyse

    La glycognolyse (Figure 2) est le processus permettant la libration de glucose

    partir des stocks de glycogne endogne. Alors que le muscle utilise son stock de glycogne

    pour un apport dnergie in situ, le foie fournit le glucose ncessaire au fonctionnement de

    lorganisme.

    La glycogne phosphorylase clive le glycogne par addition dun phosphate (Pi) pour

    former du glucose-1-phosphate selon lquation :

    Glycognen+1 + Pi -> glycognen + glucose-1-phosphate

    Le glucose-1-phosphate libr par cette dgradation peut tre converti en glucose-6-

    phosphate par la phosphoglucomutase. Le clivage phosphorolytique du glycogne est

    nergtiquement avantageux car le sucre libr est dj phosphoryl. La phosphorylase ne

    peut cliver les branchements du glycogne : une enzyme dbranchante double activit

    (glucosyltransfrase et -1,6 glucosidase) remodle le glycogne pour la dgradation par la

    phosphorylase (Figure 2).

  • Figure 2. La glycognolyse.

    La dgradation du glycogne est le rsultat de 3 ractions catalyses, chez les Mammifres, par deux enzymes : une

    glycogne phosphorylase et une enzyme dbranchante double activit (en vert dans la figure).

  • 12

    La glycognolyse hpatique est majoritairement dclenche lorsque lorganisme a

    besoin de produire du glucose court terme. En effet, les rserves de glycogne hpatique

    spuisent aprs environ 24 h de jene chez lHomme et 12 h chez la souris (Nilsson, 1973).

    1.1.2. La noglucogense

    La noglucogense correspond la production de novo de glucose partir de

    prcurseurs endognes non glucidiques (Figure 3). Bien que cette voie soit prsente dans trois

    organes diffrents, il existe une slectivit des organes pour les substrats.

    Dans le foie, les substrats principaux sont le lactate et lalanine (Benoy et Elliott,

    1937). Ces deux molcules sont converties en pyruvate par respectivement la lactate

    dshydrognase et lalanine transaminase. Le pyruvate est par la suite converti en

    oxaloactate par la pyruvate carboxylase.

    Dans le rein et lintestin, le prcurseur principal identifi est la glutamine (Croset et

    al., 2001; Stumvoll et al., 1998, 1999), qui est dabord transforme en glutamate puis

    en -ctoglutarate par la glutamate dshydrognase (dans le rein) ou lalanine

    transaminase (dans lintestin). Cette dernire molcule est transforme lors du cycle

    du Krebs, fournissant in fine de loxaloactate, utilisable lors de la noglucogense.

    Le glycrol provenant de lhydrolyse des triglycrides peut tre, en moindre mesure,

    galement utilis dans les trois organes (Bowman, 1970; Cochrane et Ottaway, 1970;

    Croset et al., 2001). Il est converti en glycrol-3-phosphate puis en dihydroxyactone

    phosphate lors de la noglucogense.

    Chez la plupart des ruminants, le substrat principal de la noglucogense est le

    propionate, produit lors de la fermentation des fibres solubles par les bactries

    commensales intestinales (Aschenbach et al., 2010; Landau et al., 1993). Le

    propionate est dabord converti en propionyl-coA puis en mthylmalonyl-coA dans la

    mitochondrie. Cette dernire molcule est convertie en succinyl-coA par la

    mthylmalonyl-coA mutase.

    La plupart des tapes de la noglucogense sont les ractions inverses de celles de la

    glycolyse. Cependant, dans la glycolyse, trois ractions sont fortement exergoniques et donc

    irrversibles. Elles sont remplaces dans la noglucogense par des ractions

    thermodynamiquement plus favorables. Ces ractions font intervenir des enzymes spcifiques

    de la PEG, donc des cibles cls de sa rgulation. Il sagit de la phosphonolpyruvate

  • Figure 3. Les voies de la noglucogense chez les Mammifres.

    Les substrats noglucogniques sont indiqus en rouge, les enzymes spcifiques de la voie en vert. Les ractions couples

    des coenzymes redox/ATP sont indiques avec des flches bleues. Les flches vertes indiquent la navette malate/aspartate,

    permettant lexport de loxaloactate dans le cytosol.

  • 13

    carboxykinase (PEPCK), qui transforme loxaloactate en phosphonolpyruvate, la fructose-

    1,6-bisphosphatase (F1,6BPase), qui transforme le fructose-1,6-bisphosphate en fructose-6-

    phosphate, et la glucose-6-phosphatase (G6Pase), qui transforme le glucose-6-phosphate en

    glucose. Ce systme de contrle permet une inhibition rciproque de la glycolyse et la

    noglucogense, et donc vite la formation de cycles futiles.

    Contrairement la PEPCK et la F1,6BPase, exprimes dans un grand nombre de

    tissus, lexpression de la G6Pase est restreinte trois organes : le foie, le rein et lintestin

    (Rajas et al., 1999). Cette spcificit confre ces trois organes la capacit de produire du

    glucose par la noglucogense.

    Ces organes nont cependant pas la mme importance ni le mme rle dans le

    maintien de lhomostasie glucidique.

    1.2 Rles complmentaires des organes producteurs de glucose dans lhomostasie

    glucidique

    1.2.1. Le foie

    Le foie est le seul organe pouvant mobiliser la fois la glycognolyse et la

    noglucogense. Il est gnralement considr comme le principal producteur de glucose

    jeun. Lors dun jene court, le foie utilise principalement ses rserves de glycogne et, si le

    jene se prolonge, la noglucogense devient majoritaire partir principalement de lactate et

    dalanine (Nordlie et al., 1999). A ltat post-absorptif (5 6h aprs la fin dun repas), le foie

    est responsable de prs de 80% de la PEG (Figure 4).

    Une trop forte induction de la production hpatique de glucose prsente des effets

    dltres sur lorganisme. En effet, lors du diabte de type 2, la noglucogense hpatique est

    fortement induite (Clore et al., 2000; Magnusson et al., 1992). De mme, la surexpression de

    la G6Pase hpatique chez le rat est responsable dun dsquilibre de lhomostasie glucidique

    (Trinh et al., 1998).

    1.2.2. Le rein

    A ltat post-absorptif, le rein est responsable de 15 20% de la PEG chez le rat

    (Mithieux et al., 2006) et de 5 20% chez lHomme (Cersosimo et al., 1999; Ekberg et al.,

    1999).

  • Figure 4. Les parts respectives de chaque organe producteur de glucose lors de ltat post-absorptif et le jene

    prolong.

    (Illustration ralise avec laide de Servier Medical Art)

  • 14

    Cependant, lors du jene prolong, la part de la production rnale de glucose est

    drastiquement augmente chez le rat et lHomme (Ekberg et al., 1999; Mithieux et al., 2006)

    (Figure 4). De faon intressante, le rein est galement lorgane majeur de la PEG ltat

    post-absorptif lors des rgimes riches en protines (Pillot et al., 2009). Dans ces conditions,

    une redistribution de la PEG est observe, avec une diminution de la part hpatique au profit

    des parts rnale et intestinale (pour le rein : 15-20% en rgime standard contre environ 45%

    en rgime riche en protines).

    1.2.3. Lintestin

    Depuis environ 15 ans, lintestin a t identifi comme un organe producteur de

    glucose (Croset et al., 2001). Il exprime en effet la PEPCK et la G6Pase, localises dans la

    partie suprieure des villosits intestinales (Rajas et al., 1999, 2000). La G6Pase est

    galement localise dans les cryptes, o le nouvel pithlium est form (Rajas et al., 2007).

    La part de lintestin dans la PEG est faible lors des priodes post-absorptives (Figure

    4), mais monte 20%, voire 35% lors du jene prolong chez le rat (Croset et al., 2001;

    Mithieux et al., 2004a, 2006). Une induction similaire de la production intestinale de glucose

    (PIG) a galement t dmontre dans deux autres conditions : lors dun rgime enrichi en

    protines (Mithieux et al., 2005) et aprs une chirurgie bariatrique de type by-pass gastrique

    (Troy et al., 2008). Chez le rat nourri avec un rgime riche en protines, la PIG reprsente

    environ 20% de la PEG post-absorptive. Dautre part, aprs un by-pass gastrique, une

    augmentation de lexpression de la G6Pase et de la PEPCK a t observe dans le jjunum et

    lilon.

    Linduction de la PIG se traduit par une libration de glucose dans la veine porte, qui

    collecte le sang provenant de lintestin. A ltat nourri post-absorptif, le glucose libr par la

    PIG est dtect par un capteur portal qui transmet le signal au cerveau (Delaere et al., 2012,

    2013), activant en retour un arc rflexe central responsable dune augmentation de la

    sensibilit priphrique linsuline et de la sensation de satit. Ces amliorations sont

    particulirement observes lors des rgimes riches en protines (Mithieux et al., 2005; Pillot

    et al., 2009). Le rle jou par la PIG dans la satit initie par les rgimes enrichis en

    protines a t confirm rcemment. En effet, les souris invalides spcifiquement pour la

    sous-unit catalytique de la G6Pase (G6pc) dans lintestin sont insensibles aux amliorations

    observes lors de ces rgimes (Penhoat et al. 2011). De mme, le signal glucose portal induit

  • 15

    par une augmentation de la PIG est responsable de lamlioration du profil glycmique de

    souris ayant subi une intervention de type by-pass gastrique (Troy et al., 2008).

    2. LAXE INTESTIN-CERVEAU ET LE CONTRLE DE LA PRISE

    ALIMENTAIRE

    2.1 Innervation de lintestin par le systme nerveux priphrique (SNP)

    Du point de vue anatomique, le SNP peut tre divis en trois rseaux interconnects :

    le rseau parasympathique port par les nerfs vagues

    le rseau sympathique port en particulier par le nerf splanchnique

    le rseau entrique situ dans la paroi gastro-intestinale.

    Chacun des rseaux comporte des composantes effrentes (motrices) et affrentes

    (sensorielles). Par convention, les appellations systme sympathique et systme

    parasympathique sont rserves aux fibres effrentes, tandis que les affrences sont

    dsignes par le nerf qui les porte (ex : affrences vagales).

    2.1.1. Linnervation vagale

    Les nerfs vagues (nerfs crniens X) sont des nerfs mixtes; presque toutes les

    neurofibres motrices sont des effrences parasympathiques. Les neurofibres motrices

    parasympathiques desservent le cur, les poumons et les viscres abdominaux, et elles

    contribuent la rgulation de la frquence cardiaque, de la respiration et de lactivit du

    systme digestif. Les nerfs vagues transmettent aussi des influx sensitifs provenant des

    viscres thoraciques et abdominaux, des barorcepteurs de la crosse de laorte, des

    chmorcepteurs de la crosse de laorte et des glomus carotidiens (chmorcepteurs pour la

    respiration) et des calicules gustatifs de la partie postrieure de la langue.

    Les deux nerfs vagues (ventral et dorsal) fournissent des neurofibres au cou et aux

    plexus nerveux, qui desservent pratiquement tous les organes des cavits thoracique et

    abdominale (Berthoud, 2004; Furness, 2012). Les axones pr ganglionnaires des nerfs vagues

    mergent principalement des noyaux dorsaux et ambigus du bulbe rachidien et font synapse

    avec des ganglions terminaux situs dans les parois de lorgane cible. Lorsque les principaux

    troncs des nerfs vagues atteignent lsophage, leurs neurofibres sentremlent et forment les

  • Figure 5. Linnervation du tractus gastro-intestinal par le systme nerveux autonome.

    Le systme nerveux sympathique est indiqu en vert, le parasympathique en rouge.

    (Illustration ralise avec laide de Servier Medical Art)

  • 16

    troncs vagaux antrieur et postrieur, qui contiennent chacune des neurofibres provenant des

    nerfs vagues. Ces troncs descendent ensuite le long de lsophage jusque dans la cavit

    abdominale, et ils mettent des neurofibres par lintermdiaire du plexus aortique abdominal

    (form par un certain nombre de petits plexus - par exemple cliaque, msentrique suprieur

    et hypogastrique - attachs laorte abdominale) avant de donner des ramifications aux

    viscres abdominaux (Figure 5). Les nerfs vagues innervent le foie, la vsicule biliaire,

    lestomac, lintestin grle, les reins, le pancras et la moiti proximale du gros intestin (le

    rectum tant innerv par les nerfs splanchniques pelviens).

    2.1.2. Linnervation sympathique

    Linnervation sympathique de labdomen est assure par des neurofibres pr

    ganglionnaires provenant de T5 (5me nerf thoracique) L2 (2me nerf lombaire), qui

    empruntent certains nerfs splanchniques et font synapse principalement dans le ganglion

    cliaque et msentrique suprieur (Furness, 2012). La plupart des neurofibres pr-

    ganglionnaires partir de T5 vers le bas font synapse dans des ganglions prvertbraux. Ces

    neurones pntrent dans les troncs sympathiques, en sortent sans faire synapse et forment les

    nerfs splanchniques. Comme tous les nerfs spinaux, les nerfs splanchniques sont mixtes (i.e.

    contiennent des fibres motrices sympathiques et des fibres sensitives). Les nerfs

    splanchniques se joignent un certain nombre de plexus enchevtrs qui forment lensemble

    du plexus aortique abdominal. Ce plexus nerveux complexe contient plusieurs ganglions:

    cliaque, msentrique suprieur et msentrique infrieur, appels suivant les artres

    auxquels ils sont associs. Les neurofibres issues de ces ganglions atteignent habituellement

    leurs organes cibles en compagnie des artres qui les desservent. Elles desservent lestomac,

    les intestins (sauf la moiti distale du gros intestin), le foie, la rate et les reins (Figure 5).

    2.1.3. Le systme nerveux entrique

    Le tube digestif possde son propre rseau nerveux interne form par les neurones

    entriques. Ces neurones sont troitement interconnects et entretiennent dintenses

    communications grce auxquelles ils assurent ainsi la rgulation de lactivit du systme

    digestif. Les deux principaux plexus nerveux intrinsques (ganglions relis par des voies

    nerveuses non mylinises) des parois du tube digestif, soit le plexus sous-muqueux et le

    plexus myentrique, sont composs en grande partie de neurones entriques semi-autonomes

  • Figure 6. Anatomie du systme nerveux entrique.

    A. Localisation du systme nerveux entrique (reprsent par les plexus dAuerbach, myenteric plexus, et de Meissner ou

    sous-muqueux, SMP), (Furness, 2012).

    B. Relation du systme nerveux entrique avec les affrences autonomes, (Furness et al., 1998). La plupart des affrences

    intrinsques et extrinsques qui innervent lintestin projettent vers la lamina propria de la muqueuse. Celles-ci incluent des

    fibres affrentes vagales provenant du ganglion infrieur du nerf vague, des affrences spinales des ganglions spinaux

    dorsaux, et des neurones intrinsques (AH, after-hyperpolarizing) localiss dans les plexus entriques. Il existe galement

    une classe S de neurones mcanosenseurs dans le plexus myentrique qui ne projette pas vers la muqueuse.

  • 17

    (Furness, 2012) (Figure 6).

    Le plexus sous-muqueux, ou plexus de Meissner, fait partie de la sous-muqueuse. Il

    est compos de neurones sensoriels et de neurones moteurs. Ce plexus contient

    uniquement des fibres parasympathiques et rgit lactivit des glandes et des muscles

    lisses de la muqueuse.

    Le plexus myentrique, ou plexus dAuerbach, plus dvelopp, se trouve entre les

    couches circulaire et longitudinale de la musculeuse. Les neurones de ce plexus

    constituent le principal rseau nerveux de la paroi du tube digestif et en rgissent la

    motilit.

    Le systme nerveux entrique est reli au systme nerveux central par des neurofibres

    viscrales affrentes et par des branches sympathiques et parasympathiques du systme

    nerveux autonome, qui pntrent dans la paroi de lintestin et forment des synapses avec les

    neurones des plexus intrinsques. Ainsi, les neurofibres du systme nerveux autonome

    exercent galement une rgulation extrinsque sur la digestion par lintermdiaire darcs

    rflexes longs. De faon gnrale, laction du systme parasympathique accrot la motilit et

    la scrtion deau, dlectrolytes et de protines, alors que celle du systme sympathique

    inhibe lactivit digestive.

    Les ganglions entriques, qui sont largement indpendants, sont bien plus que de

    simples relais du systme nerveux autonome, comme cest le cas dans les autres systmes. En

    effet, le systme nerveux entrique contient plus de 100 millions de neurones, soit davantage

    que la moelle pinire.

    2.2 Les hormones gastro-intestinales et la rgulation de lhomostasie nergtique

    Le tractus gastro-intestinal est lorgane endocrine le plus grand de lorganisme. Il

    libre plus de 20 hormones diffrentes qui influencent un nombre de processus

    physiologiques et agissent sur les tissus tels que les glandes exocrines, le muscle lisse et le

    systme nerveux priphrique (Figure 7). La plupart de ces peptides sont sensibles au contenu

    nutritif du tube digestif. Les sensations court terme de faim et satit sont en grande partie

    rgules par des changements coordonns dans les concentrations dhormones gastro-

    intestinales circulantes (Berthoud, 2008; Murphy et Bloom, 2006). Le message est alors

    transmis par la circulation sanguine ou les affrences vagales en fonction de la localisation

    dans lorgane (Figure 8).

  • Figure 7. Localisation des lieux de scrtion des hormones gastro-intestinales et leurs fonctions putatives majeures.

    Ces hormones signalent la priphrie et au systme nerveux central, permettant la rgulation dun certain nombre de

    processus physiologiques.

    (Illustration ralise avec laide de Servier Medical Art)

  • 18

    2.2.1. La ghrline

    La ghrline est une hormone peptidique libre dans la circulation par lestomac,

    dcouverte en tant que ligand endogne du rcepteur scrtagogue de lhormone de

    croissance (growth-hormone-secretagogue receptor, GHS-R). La ghrline est compose de 28

    acides amins et est modifie de faon post traductionnelle par laddition dun groupe

    octanoyl la srine localise en position trois. Cette acylation est ncessaire pour la liaison au

    GHS-R et pour traverser la barrire hmato-encphalique (Kojima et Kangawa, 2005). A ce

    jour, la ghrline est le seul facteur gastro-intestinal dcrit qui est capable daugmenter

    lapptit. La concentration de ghrline circulante est augmente par le jene, et dcrot aprs

    un repas (Janssen et al., 2011b; Kamegai et al., 2000). Ladministration centrale ou

    priphrique de ghrline acyle augmente fortement la prise alimentaire. Ces effets valent

    souvent lappellation de la ghrline comme hormone de la faim (Kojima et Kangawa,

    2005).

    Les modles de signalisation anormale par la ghrline montrent des phnotypes

    complexes lis lhomostasie nergtique. Les souris dficientes pour le gne de la ghrline

    ou pour son rcepteur sont rsistantes lobsit induite par un rgime riche en graisses et en

    sucres. Les souris dficientes en ghrline ont galement une prfrence alimentaire modifie,

    favorisant la graisse comme source dnergie par rapport aux souris sauvages (Cummings,

    2006). Ladministration dantagonistes GHS-R a pour effet de rduire la prise alimentaire

    chez des souris (Cummings, 2006). Dautres tudes ont montr que les souris diabtiques

    invalides pour la ghrline ont une hyperphagie attnue (Dong et al., 2006), et que la perte

    de ghrline rduit le diabte chez les souris ob/ob (Sun et al., 2006).

    Le gne qui code pour la ghrline code galement pour un autre peptide appel

    obestatine. Des tudes ont montr que ladministration centrale ou priphrique du peptide

    rduisait la prise alimentaire et la prise de poids (Zhang et al., 2005). Cependant, des tudes

    postrieures ne soutiennent pas lide dun rle de lobestatine dans le contrle de la prise

    alimentaire (Gourcerol et al., 2006; Nogueiras et al., 2007).

    2.2.2. La cholcystokinine

    Dans lintestin proximal, lipides et protines induisent la scrtion de cholcystokinine

    (CCK) par les cellules I. La CCK est libre en postprandial depuis le duodnum et le

    jjunum. Cette scrtion active les affrences vagales via le rcepteur CCK1 (Moriarty et al.,

  • Figure 8. Dtection des nutriments dans lintestin grle et le clon et scrtion dhormones gastro-intestinales (adapt

    de Berthoud, 2008).

    (Illustration ralise avec laide de Servier Medical Art)

  • 19

    1997; Smith et al., 1985). Les antagonistes CCK1 augmentent la prise alimentaire chez le rat

    et lHomme, et le rat Otsuka Long-Evans Tokushima Fatty (OLETF), dficient en rcepteur

    CCK1, est hyperphagique et obse, suggrant un rle physiologique de la CCK dans le

    contrle de la prise alimentaire (Bi et Moran, 2002). Cependant, la perfusion continue de

    CCK na pas dinfluence sur la prise alimentaire aprs 24 h, et bien que ladministration

    intermittente rduise la prise alimentaire de faon aigu, cet effet est compens par une

    augmentation de la prise alimentaire entre les injections (Crawley et Beinfeld, 1983; West et

    al., 1984, 1987). Certaines tudes montrent que la CCK ne peut pas activer les circuits vagaux

    aux concentrations physiologiques circulantes, suggrant que les actions de la CCK sur la

    prise alimentaire rsultent dune action plutt paracrine ou neurocrine quendocrine (Moran,

    2000).

    2.2.3. Le peptide YY

    Le peptide YY (PYY) est une hormone intestinale proche du neuropeptide Y (NPY).

    Les deux peptides prsentent un motif structural PP et exercent leurs effets travers la famille

    de rcepteurs Y. Le PYY entier se lie avec la mme affinit tous les rcepteurs Y.

    Cependant, la plupart du PYY circulant est la forme tronque du ct N-terminal, PYY3-36,

    qui se lie prfrentiellement au rcepteur Y2R.

    Le PYY est scrt par les cellules L de lintestin distal (ilon et surtout clon). Sa

    scrtion est augmente suite un repas et est rduite par le jene. Une administration aigu

    de PYY3-36 rduit la prise alimentaire chez les rongeurs et les humains (Batterham et al.,

    2002). Cependant, le stress peut rduire la prise alimentaire de base, ce qui peut limiter leffet

    des agents anorexignes. Ladministration priphrique de PYY3-36 ne rduit pas la prise

    alimentaire chez les rongeurs qui ne sont pas acclimats aux conditions exprimentales, ou

    lors dun changement denvironnement (Abbott et al., 2006; Halatchev et al., 2004). Le

    rcepteur Y2R sert probablement dintermdiaire des effets anorexignes du PYY3-36, car ils

    sont attnus par les antagonistes Y2R (Abbott et al., 2005a) et abolis chez les souris

    invalides pour le gne Y2r (Batterham et al., 2002).

    Les individus obses ont une sensibilit normale aux effets anorexignes du PYY3-36,

    et les taux circulants de PYY ne sont pas augments chez les obses, contrairement aux taux

    de leptine (Batterham et al., 2003), ce qui suggre que la libration de PYY nest

    probablement pas implique dans ltiologie de lobsit.

  • 20

    2.2.4. Le glucagon-like peptide-1 (GLP-1)

    Le mme type cellulaire qui produit le PYY produit galement un grand prcurseur

    protique appel proglucagon. Celui-ci subit un nombre de modifications post-

    traductionnelles, dont plusieurs clivages aboutissant des peptides dactivit biologique, tels

    que le glucagon, le glucagon-like peptide-1 (GLP-1), le glucagon-like peptide-2 (GLP-2) et

    loxyntomoduline.

    Le GLP-1 existe sous plusieurs formes, mais la forme circulante la plus commune est

    la forme GLP-17-36. Le GLP-1 est libr dans la circulation aprs un repas et est une puissante

    incrtine : son administration centrale ou priphrique stimule fortement la scrtion

    dinsuline. Ladministration intracrbroventriculaire de GLP-1 rduit drastiquement la prise

    alimentaire chez les rongeurs, et ladministration priphrique inhibe lapptit chez les

    rongeurs et lHomme (Drucker, 2006).

    La salive du monstre de Gila, Heloderma suspectum, un lzard venimeux, contient un

    peptide appel exendine-4, qui est un puissant agoniste du rcepteur du GLP-1. Une forme

    tronque du peptide, lexendine 9-39, agit comme antagoniste comptitif sur le mme

    rcepteur. Une administration intracrbroventriculaire aigu dexendine 9-39 augmente la

    prise alimentaire, et une administration chronique augmente la prise de poids. Il semble donc

    que la signalisation priphrique par le GLP-1 intervienne dans les mcanismes

    physiologiques qui rduisent lapptit et la prise alimentaire suite un repas. Cependant, la

    prise alimentaire et le poids des souris invalides pour le rcepteur du GLP-1 ne sont pas

    modifis (Drucker, 2006).

    Le GLP-1 et le PYY ont la particularit dtre clivs rapidement dans la circulation

    par la dipeptidyl peptidase IV (Eberlein et al., 1989; Mentlein et al., 1993), ce qui participe

    la complexit des mcanismes associs ces facteurs. Dans le cas du GLP-1, son clivage

    provoque son inactivation, ce qui suggre que la fixation du peptide intestinal aux affrences

    vagales abdominales (Kakei et al., 2002; Nakagawa et al., 2004) est le support majeur de ses

    effets physiologiques.

    Dans le cadre dun by-pass gastrique, une augmentation de la scrtion du GLP-1 est

    observe (Shah et al., 2014). Cependant, il ne semble pas que cette scrtion soit responsable

    de la perte de poids, mais serait associe une amlioration de la scrtion dinsuline (Troy et

    al., 2008).

  • 21

    2.2.5. Le glucose-dependent insulinotropic peptide (GIP)

    Le GIP est un peptide 42 acides amins libr par les cellules K du duodnum aprs

    lingestion des aliments (Buchan et al., 1978; Carr et al., 2008). Les souris invalides pour le

    rcepteur du GIP sont rsistantes lobsit lorsquelles sont nourries avec un rgime riche en

    graisses (Miyawaki et al., 2002). Les explications de ce phnotype sont peu claires. Il est

    probable que la rsistance lobsit soit le fait dun effet du GIP sur le mtabolisme des

    adipocytes, via des effets sur la lipolyse notamment (Timper et al., 2013).

    Contrairement aux hormones prcdentes, le GIP ne semble pas impliqu dans la

    modulation de la prise alimentaire.

    2.2.6. La srotonine

    La majorit (environ 90%) de la srotonine (5-HT) de lorganisme est synthtise,

    stocke et libre partir dune population de cellules entroendocrines appeles cellules

    entrochromaffines (Mawe et Hoffman, 2013). Les premires tentatives pour enregistrer

    lactivit des affrences extrinsques de lintestin se sont rvles infructueuses jusquaux

    annes 1950. Une tude a alors dmontr que les fibres sensorielles quiescentes innervant

    lestomac et lintestin pouvaient tre actives par une infusion vasculaire de phnyldiguanide

    (Paintal, 1954). Cet agent a t par la suite identifi comme un puissant agoniste du rcepteur

    de la srotonine 5-HT3.

    Les affrences vagales du tractus gastro-intestinal suprieur sont actives par la

    scrtion de 5-HT dans lintestin. Des tudes pharmacologiques et immunohistochimiques ont

    dmontr que les affrences vagales dans la muqueuse intestinale expriment le rcepteur 5-

    HT3 (Glatzle et al., 2002; Hillsley et Grundy, 1998). De plus, linfusion de solutions

    hyperosmotiques ou de produits de dgradation des glucides dans le lumen du duodnum

    induit la libration de 5-HT par les cellules entrochromaffines, agissant sur les rcepteurs 5-

    HT3 et stimulant ainsi les affrences vagales (Zhu et al., 2001). La prsence de glucose dans

    le lumen stimule galement la libration de 5-HT, et active un rflexe vago-vagal qui inhibe la

    vidange gastrique (Raybould et al., 2003). Ces stimuli rsultent aussi en une scrtion

    pancratique. La rponse inhibitrice gastrique et la scrtion pancratique sont sensibles aux

    antagonistes des rcepteurs 5-HT3 (Li et al., 2000). Les signaux de satit en provenance de

    lintestin impliquent de mme la libration de 5-HT : la suppression de la prise alimentaire

    par les lipides fait appel une action conjointe des rcepteurs 5-HT3 et CCK1 (Savastano et

  • Nature des affrences :

    Vagale ventrale

    Vagale dorsale

    Spinales

    Figure 9. Innervation affrente de la zone hpato-portale (Berthoud, 2004).

    Les affrences spinales sont relies aux ganglions dorsaux des vertbres thoraciques T7 T13 (seuls les extrmes sont

    reprsents par souci de clart).

    Lpaisseur des traits (axones) et le diamtre des points (extrmits sensorielles) reprsentent labondance relative de

    linnervation.

    La reprsentation centrale na pas t dtermine par rapport la zone hpato-portale mais illustre les zones associes des

    informations viscrales en gnral.

  • 22

    Covasa, 2007). Chez lHomme, linhibition des rcepteurs 5-HT3 augmente le volume

    dingestion dun repas liquide (Janssen et al., 2011a), suggrant un rle des rcepteurs 5-HT3

    et de la signalisation par les affrences vagales dans le contrle des sensations de faim et de

    satit.

    Bien que peu dtudes aient t faites sur lactivation des fibres affrentes spinales par

    la 5-HT, des tudes in vivo et ex vivo montrent que les affrences spinales expriment le

    rcepteur 5-HT3 dans les terminaisons priphriques. Des tudes sur la distension colorectale

    chez le rat ont montr que lalostron, un antagoniste 5-HT3, inhibe les rponses rflexes et

    limmunoractivit c-Fos dans la corne dorsale de la moelle pinire (Kozlowski et al., 2000).

    2.3 La dtection des nutriments et le contrle de la prise alimentaire par le systme

    nerveux hpato-portal

    2.3.1. La dtection des nutriments

    La zone hpato-portale possde une triple innervation priphrique assure par les

    deux branches du nerf vague et le nerf splanchnique (Berthoud, 2004) (Figure 9). La branche

    hpatique commune est par ailleurs la voie de circulation des neurofibres vagales ventrales

    qui innervent galement une partie de lestomac, le pancras et le duodnum. La veine porte

    est donc en position idale pour dtecter une grande partie des informations nutritionnelles

    issues des repas, avant que les nutriments ne soient mtaboliss par le foie.

    Bien que les nutriments soient capables dinduire des rponses post-absorptives

    influenant la prise alimentaire et le mtabolisme aprs le passage dans le foie (Lutz et al.,

    2001; Trayhurn et Wood, 2005), seule la rgion hpato-portale est expose lensemble des

    signaux issus de lalimentation, et tous les autres organes reoivent ces informations aprs

    une utilisation partielle des nutriments dans le foie, cur et poumons.

    De plus, les effets mtaboliques des hormones gastro-intestinales sont abolis par

    lablation chirurgicale du nerf vague abdominal. Laugmentation de la prise alimentaire et de

    la scrtion dhormone de croissance, dont la ghrline est le mdiateur, sont abolis par une

    vagotomie (Date et al., 2002). Cest galement le cas des effets de satit initis par la CCK

    (Smith et al., 1985), le GLP-1 et le PYY (Abbott et al., 2005b). De plus, les effets

    hypoglycmiants du GLP-1 font intervenir les rcepteurs localiss dans le systme nerveux

    priportal. Ainsi, lors dune inhibition de la signalisation du GLP-1 dans la veine porte, les

    amliorations de lhomostasie glycmique sont attnues (Vahl et al., 2007).

  • 23

    Une augmentation des taux de lipides, protines et glucose, peu de temps aprs

    lingestion dun repas, active les neurones localiss dans la paroi de la veine porte (Breen et

    al., 2011; Delaere et al., 2012; Rasmussen et al., 2012), altrant ainsi lapptit et le flux de

    glucose produit par le foie. Ces mcanismes pourraient tre lorigine des effets rapides sur la

    faim et la rgulation de la glycmie observs aprs un by-pass gastrique chez les rongeurs

    (Breen et al., 2012; Troy et al., 2008).

    2.3.2. Le glucose portal et la sensation de satit

    Le flux dapparition du glucose dans la veine porte lors de la digestion dun repas

    riche en glucides (environ 50% des apports caloriques) est lev. Il reprsenterait une deux

    fois lquivalent de la PEG totale (Delaere et al., 2012).

    Les tudes initiales sur leffet de la perfusion de glucose en veine porte ont t

    effectues avec des flux gaux la PEG (Tordoff et al., 1989). Dans ces conditions, la

    perfusion de glucose induit des rponses physiologiques et comportementales complexes

    telles quune diminution de la prise alimentaire, une modification de la prfrence alimentaire

    et une modification de lactivit lectrique des affrences hpato-portales vagales et spinales

    associe un changement de lactivit des neurones hypothalamiques impliqus dans le

    contrle de la faim (Delaere et al., 2010). Cependant, la perfusion des flux nettement

    infrieurs (environ un sixime un tiers de la PEG) est suffisante pour initier la fois une

    diminution de la prise alimentaire et une activation des rgions centrales contrlant

    lhomostasie nergtique (Delaere et al., 2013; Mithieux et al., 2005). Bien que les deux flux

    de glucose portal puissent reprsenter ce qui a lieu en priode post prandiale, plusieurs tudes

    ont dmontr que larrive de glucose en veine porte ne dtermine pas la fin dun repas en

    cours mais conditionne plutt la taille du repas suivant (Baird et al., 1997). Ceci suggre

    fortement une relation entre dtection du glucose portal et satit. En accord avec cette

    hypothse, la rgion portale est un lieu crucial de la dtection dune hypoglycmie transitoire

    (Saberi et al., 2008), semblable la transition entre un tat nourri et un tat post-absorptif.

    2.3.3. Mcanismes molculaires de dtection du glucose portal

    Si lon considre le glucose comme une molcule porteuse dun signal, le mcanisme

    le plus simple de dtection est celui de la fixation un rcepteur cellulaire. Rcemment, une

    tude a permis de discriminer parmi trois mcanismes distincts (Figure 10):

  • Figure 10. Trois modles de dtection du glucose par les neurones de la veine porte.

    A. Le modle classique de dtection par Glut 2 et la glucokinase (d'aprs Thorens et Larsen, 2004).

    B. Modle de dtection par les rcepteurs du got (d'aprs Depoortere, 2014).

    La fixation dun compos au got sucr sur le dimre T1R2/T1R3 active la protine G couple (gustducine), et active la

    phospholipase C 2 (PLC2). Celle-ci dissocie le phosphatidylinositol-4,5-biphosphate (PIP2) en diacylglycrol et inositol-

    1,4,5-triphosphate (IP3). La fixation de celui-ci sur son rcepteur induit la libration de calcium par le rticulum

    endoplasmique, activant le canal cations transient receptor potential member 5 (TRPM5), conduisant la dpolarisation de

    la cellule.

    C. Modle de dtection dans la cellule entrochromaffine intestinale (d'aprs Freeman et al., 2006).

    La fixation de glucose SGLT3 induit lentre de 2 Na+, conduisant la scrtion de srotonine (5-HT) via lentre de Ca

    2+.

    (Illustration ralise avec laide de Servier Medical Art)

  • 24

    la dtection via le transporteur faible affinit Glut 2, coupl la phosphorylation du

    glucose par la glucokinase et possiblement responsable de la scrtion de glucose

    stimule par linsuline dans les cellules pancratiques (Thorens et Larsen, 2004) ;

    les rcepteurs intestinaux du got, qui rpondent aux mmes stimuli que ceux de la

    langue (sucr, sal, acide, amer et umami) et qui peuvent coordonner la libration

    dhormones impliques dans lhomostasie nergtique (Depoortere, 2014) ;

    et le cotransporteur glucose/sodium 3 (SGLT3), un rcepteur (et non transporteur) de

    glucose, responsable des scrtions stimules par le glucose dans les cellules

    entrochromaffines (Freeman et al., 2006).

    Un grand nombre darguments suggre un rle cl de SGLT3 par rapport Glut2 et les

    rcepteurs du got dans la dtection de lapparition du glucose portal de faibles flux

    physiologiques. En effet, la dtection de glucose portal est inhibe par la phlorizine (un

    inhibiteur spcifique des protines de la famille des SGLT), alors que la perfusion de 3-O-

    mthylglucose (un analogue du glucose non phosphorylable), qui est capable de se lier

    SGLT3 active le systme de dtection du glucose portal (Delaere et al., 2012). Il semblerait

    donc que SGLT3 soit la molcule implique dans la dtection du signal glucose portal.

    Alors que la rgion portale est innerve par les voies vagale et spinale (Berthoud,

    2004), la dtection de glucose portale nest pas altre par une ablation chirurgicale du nerf

    vague (Delaere et al., 2012). Ceci suggre que le signal port par le glucose portal peut tre

    relay par les fibres affrentes des voies vagale et spinale.

    2.4 Contrle central de la prise alimentaire

    Le contrle physiologique de la prise alimentaire implique un grand nombre de

    rgions crbrales et de neurotransmetteurs. En particulier, lhypothalamus, le tronc crbral

    et les rgions cortico-limbiques (impliques dans les circuits de rcompense) occupent une

    place centrale (Berthoud, 2002).

    2.4.1. Intgration des signaux par lhypothalamus et le tronc crbral

    Lhypothalamus et le tronc crbral sont les rgions historiquement les plus tudies

    par rapport au contrle de la prise alimentaire et du mtabolisme nergtique. Ces deux

    rgions contiennent des organes circumventriculaires (minence mdiane et area postrema

  • Figure 11. Schma des voies affrentes relatives au contrle de la prise alimentaire (Berthoud, 2002).

    Le long du canal alimentaire, les affrences nerveuses transmettent au tronc crbral des informations de diffrentes natures :

    M = mcaniques (Ms = tension ; Mf = toucher), T = gustatives, Temp = thermiques, C = chimiques.

    Abrviations : BST, noyau du lit de la strie terminale; CeA, noyau central de lamygdale ; Hyp, hypothalamus ; IML, noyau

    intermdiolatral (neurones pr-ganglionnaires sympathiques) ; Mot, noyau oral moteur du tronc ; NTS, noyau du tractus

    solitaire ; PBN, noyau parabrachial ; S5, noyau sensoriel principal du nerf trijumeau ; RVLM, bulbe rachidien ventrolatral

    rostral.

  • 25

    AP) qui possdent des capillaires fnestrs et une permabilit plus grande que les autres

    structures isoles de la circulation par la barrire hmato-encphalique (Duvernoy et Risold,

    2007; Ganong, 2000). A proximit de ces zones, les neurones sont susceptibles de dtecter les

    hormones et les nutriments dans la circulation des concentrations suprieures celles

    mesures dans le cerveau. Le tronc crbral, quant lui, est le sige de lintgration des

    informations nerveuses issues du SNP, notamment les affrences gustatives (via le nerf

    glosso-pharyngien, ou nerf crnien IX) et les affrences vagales (Figure 11). Il constitue un

    centre intgrateur des informations, relayes par la suite au reste du cerveau, et

    particulirement lhypothalamus.

    2.4.2. Lhypothalamus

    Dans les annes 1940 et 1950, des expriences de lsion avaient suggr un rle

    globalement anorexigne et catabolique de certaines aires hypothalamiques (Anand et

    Brobeck, 1951; Brobeck et al., 1943). Depuis ces travaux, lidentification des

    neurotransmetteurs dans ces noyaux a confirm le rle central de lhypothalamus, mais a

    surtout rvl une grande diversit neuronale.

    2.4.2.1.Les noyaux impliqus dans la prise alimentaire

    Lhypothalamus des Mammifres est constitu de plus de 40 noyaux histologiquement

    distincts, sous-diviss en sous-noyaux (Figure 12). La zone pri-ventriculaire est

    principalement implique dans la dtection des signaux sanguins et lorganisation et le

    contrle des rponses endocrines. La zone mdiane est essentiellement compose de grands

    noyaux (noyau dorso-mdian DMN, noyau ventro-mdian VMN) qui reoivent des

    informations sensorielles et sont fortement interconnects avec le reste de lhypothalamus.

    Cette zone est implique dans lorganisation des comportements adaptatifs. La zone latrale

    (LHA) possde un systme de communication intra- et extra-hypothalamique et peut tre

    dfinie comme linterface entre les rgions plus mdianes et les rgions cortico-limbiques

    dune part, et entre les systmes moteurs somatique et autonome dautre part. Le noyau

    paraventriculaire (PVN) de lhypothalamus reprsente un microcosme lintrieur de

    lhypothalamus, dans le sens o plusieurs sous-noyaux sont connects aux trois systmes

    effecteurs : le systme endocrine (groupes magnocellulaires), le systme autonome et le

    systme comportemental (groupes parvocellulaires) (Berthoud, 2002).

  • Figure 12. Organisation anatomique et fonctionnelle de lhypothalamus et du complexe dorsal vagal (DVC) (d'aprs

    Berthoud, 2002).

    Carte fonctionnelle de lhypothalamus et du DVC avec les lments de dtection humorale et nerveuse.

    Abrviations : AP, area postrema ; ARC, noyau arqu de lhypothalamus ; dmnX : noyau moteur dorsal du nerf vague ;

    DMN/VMN, noyaux dorso-mdian/ventro-mdian de lhypothalamus ; LHA, hypothalamus latral ; NTS, noyau du tractus

    solitaire ; PVN, noyau paraventriculaire de lhypothalamus.

    Les rcepteurs la ghrline (GHS-R), au GLP-1 (GLP1-R), la leptine (LepR), la CCK (CCK1), linsuline (InsR) et aux

    NPY/PYY (Y1R/Y2R/Y5R) sont indiqus.

  • 26

    De nombreuses tudes depuis une vingtaine dannes ont vis identifier les

    populations neuronales hypothalamiques qui contiennent des neurotransmetteurs et rcepteurs

    spcifiques dimportance cruciale dans le comportement alimentaire et le dveloppement de

    lobsit. Parmi les noyaux hypothalamiques, le noyau arqu (ARC) occupe un rle

    intgrateur, avec des connections la zone latrale, le tronc crbral et le systme cortico-

    limbique entre autres (Guan et al., 2001; Li et al., 1999) (Figure 12).

    2.4.2.2.Les neurotransmetteurs associs

    Plusieurs populations neuronales ont t identifies dans lhypothalamus, sur la base

    de leur contenu en neurotransmetteurs. Dans lARC, deux populations neuronales principales

    rpondent rapidement aux informations nutritionnelles. Lune exprime le gne de la pro-

    opiomlanocortine (POMC) et le transcrit rgul par la cocane et les amphtamines (CART),

    et induit un effet anorexigne (Boston et al., 1997). La forme active de POMC est le rsultat

    de son clivage en plusieurs neuropeptides, parmi lesquels la -endorphine, la corticotropine

    (ACTH) et les hormones mlanotropes et (- et -MSH) (Cone, 2005). - et -MSH

    exercent leur effet anorexigne par la liaison aux rcepteurs MC4R et MC3R (Adan et al.,

    1994). Contrairement aux neurones POMC/CART, lautre population de neurones de lARC

    co-exprime le neuropeptide Y (NPY) et lAgouti-related peptide (AgRP) et induit un effet

    orexigne (Ollmann et al., 1997). Tout comme PYY, NPY se fixe aux rcepteurs Y1R, Y2R

    et Y5R (Bouali et al., 1995; Gerald et al., 1996; Lopez-Valpuesta et al., 1996). Ces neurones

    sopposent laction des neurones POMC/CART notamment par leffet antagoniste de

    lAgRP sur les rcepteurs MC3/4R (Ollmann et al., 1997). Les neurones NPY/AgRP et

    POMC/CART de lARC expriment de multiples rcepteurs aux hormones. La leptine (Glaum

    et al., 1996; Hkansson et al., 1996), les glucocorticodes (Hisano et al., 1988) , linsuline et

    les mtabolites tels que le glucose (Lynch et al., 2000; Muroya et al., 1999) ont directement

    accs lARC par leurs rcepteurs spcifiques.

    Lhypothalamus est par ailleurs fortement impliqu dans dautres fonctions

    physiologiques que la prise alimentaire. Les comportements sexuels, la soif, la temprature

    corporelle et la dfense immunitaire sont par exemple rguls dans diverses parties de

    lhypothalamus.

    Lhypothalamus joue un rle crucial dans le contrle de la prise alimentaire et la

    rgulation de la balance nergtique, mais lexplication actuelle nest plus compatible avec

    une hypothse simple de deux centres, lun responsable de la faim et lautre de la satit. Il est

  • 27

    aujourdhui clair que des signaux internes ont accs aux noyaux hypothalamiques par diverses

    routes : les rcepteurs dhormones, les senseurs de mtabolites et les voies nerveuses

    affrentes. Cette information sur ltat interne est traite lintrieur de lhypothalamus et est

    lorigine deffecteurs autonomes et endocrines-hypophysaires par des voies bien dcrites.

    Ce qui reste incompris est la faon dont une telle information interagit avec

    linformation externe et cognitive au niveau de structures tlencphaliques comme le cortex.

    En particulier, chez lHomme, linitiation dun repas dmarre souvent sans un signal clair de

    dpltion nergtique, comme un ordre excutif dmarrant dans le cortex (Berthoud, 2002).

    Ainsi, mme en prsence de signaux de satit et de rserves nergtiques remplies, il est

    possible que le cortex et le systme limbique puissent se superposer au contrle exerc par

    lhypothalamus.

    2.4.3. Le tronc crbral

    Le tronc crbral contient de nombreuses voies sensitives et motrices en provenance et

    destination des viscres. Lintgration des signaux sur ltat nergtique de lorganisme a

    galement lieu dans cette rgion de lencphale. Le complexe dorsal vagal (DVC) et le noyau

    parabrachial (PBN) sont les deux structures les plus tudies relativement au contrle de la

    prise alimentaire et la rgulation de lhomostasie nergtique.

    2.4.3.1.Le complexe dorsal vagal

    Le complexe dorsal vagal est compos du noyau du tractus solitaire (NTS), de larea

    postrema (AP) et du noyau dorsal moteur du nerf vague (dmnX). Depuis le dbut des annes

    1990, des tudes ont montr que le tronc crbral caudal est capable dorganiser certains

    aspects du comportement alimentaire en absence dinformations hypothalamiques (Flynn et

    al., 1991; Grill et al., 1998; Williams et al., 2000). Hormis lARC, le NTS est une des seules

    rgions du cerveau possder une population de neurones POMC, et le NTS et dmnX ont la

    concentration la plus leve de MC4R dans lencphale (Mountjoy et al., 1994). Linjection

    de ligands MC3/4R dans le NTS et le 4me ventricule est aussi efficace pour moduler la prise

    alimentaire que linjection dans lhypothalamus et le 3me ventricule (Williams et al., 2000).

    Le DVC exprime galement fortement le rcepteur la leptine (Buyse et al., 2001). Une autre

    similarit avec lhypothalamus est la possibilit de lAP (et certaines parties trs vascularises

    du NTS) de dtecter des hormones circulantes et dautres facteurs. Ainsi, linformation des

  • Figure 13. Schma simplifi des communications nerveuses autonomes impliques dans la balance nergtique (d'aprs

    Berthoud, 2002).

    A. Communications vagales-parasympathiques vers les principales cibles impliques dans la balance nergtique. Les

    neurones pr-ganglionnaires sont localiss dans les noyaux moteur dorsal (dmnX) et ambigu (AMB) du nerf vague, et dans le

    noyau salivaire (SAL).

    B. Communications spinales-sympathiques vers les principales cibles impliques dans la balance nergtique. Les neurones

    pr-ganglionnaires sont localiss dans la colonne intermdio-latrale le long de la moelle pinire.

    Abrviations : AP, area postrema ; ARC, noyau arqu de lhypothalamus ; AV3V, aire antro-ventrale du troisime

    ventricule ; DMN, noyau dorso-mdian de lhypothalamus ; DVC, complexe dorsal vagal ; LC, locus cruleus ; LHA,

    hypothalamus latral ; NTS, noyau du tractus solitaire ; PAG, matire grise pri-aqueductale ; PBN, noyau parabrachial ;

    PVN, noyau paraventriculaire de lhypothalamus ; VLM, bulbe rachidien ventrolatral ; VMN, noyau ventro-mdian de

    lhypothalamus.

    Les neurotransmetteurs impliqus dans la transmission du signal sont indiqus en vert : A, adrnaline ; Ach, actylcholine ;

    NA : noradrnaline ; NO, monoxyde dazote ; VIP, peptide intestinal vasoactif ; 5-HT, srotonine.

  • 28

    hormones gastro-intestinales a accs directement au NTS (Figure 12) par lintermdiaire de

    rcepteurs dans lAP et les nombreuses projections de lAP au NTS. De plus, tout comme

    dans lhypothalamus, le NTS possde des neurones sensibles au glucose (Ritter et al., 2000).

    Enfin, le NTS est connect avec dautres acteurs importants du contrle de la prise

    alimentaire et la rgulation de la balance nergtique (Figure 13). Bien quil ny ait pas de

    projections directes du NTS au cortex, il existe de nombreuses connections poly-synaptiques

    via le PBN, le thalamus et lamygdale. Le cortex reoit galement les informations du NTS

    via les systmes dexcitation du tronc crbral tels que le noyau du raph et le locus cruleus

    (Berthoud, 2002).

    2.4.3.2.Le noyau parabrachial

    Le PBN, localis dans le pont dorsal, intgre plusieurs informations sensorielles telles

    que le got (Spector, 1995) , les informations mcano- et chimio-viscrales (Baird et al.,

    2001) et la douleur (Gauriau et Bernard, 2002) via des connections rciproques avec le tronc

    crbral, le diencphale et le cerveau antrieur. Les parties mdiane et latrale du PBN

    reoivent des affrences viscrales des parties caudale et rostrale du NTS respectivement

    (Figure 11). Ces rgions du PBN ont leur tour des projections vers de nombreux noyaux

    hypothalamiques tels que le PVN, lARC, le VMN et le LHA (Li et al., 1999).

    Les projections descendantes du PBN ont leur origine dans la partie la plus latrale et

    sont diriges vers le NTS latral et la moelle pinire (Figure 13).

    Daprs la localisation stratgique et les connections anatomiques du NTS et du PBN,

    ces structures font partie du circuit processeur central qui contrle la prise alimentaire et

    lhomostasie nergtique.

    2.4.4. Le choix alimentaire : la rcompense et laversion

    Hormis un contrle purement homostatique bas sur ltat nergtique de

    lorganisme, les prfrences alimentaires sont galement influences par des facteurs

    dpendant notamment de deux processus physiologiques, rcompense et aversion, dont le

    support neuro-anatomique est le systme cortico-limbique (cf. discussion la fin du

    paragraphe 2.4.2).

  • Figure 14. Composantes centrales de la notion de rcompense (Berthoud et Morrison, 2008).

    Sont indiques les rgions impliques ainsi que les grandes fonctions et les neurotransmetteurs utiliss.

    Abrviations : ARC, noyau arqu de lhypothalamus ; BNST, noyau du lit de la strie terminale ; DA, dopamine ; GABA,

    acide -aminobutyrique ; GLU, glutamate ; LH, aire hypothalamique latrale ; MCH, hormone concentratrice de mlanine ;

    NA, noradrnaline ; NTS, noyau du tractus solitaire ; PVN, noyau paraventriculaire de lhypothalamus ; VLM, bulbe

    rachidien ventrolatral ; VTA, aire tegmentaire ventrale.

  • 29

    2.4.4.1.La rcompense

    Depuis de nombreuses annes, des tudes montrent que la transition entre la faim

    prcdant un repas et la sensation de rassasiement est altre chez les sujets obses,

    notamment par rapport la nourriture riche en lipides (Covasa, 2010; Little et Feinle-Bisset,

    2011). Une composante cl de ces dfauts pourrait venir daltrations dans le systme de

    rcompense (Berridge, 2009; Berthoud et Morrison, 2008). En effet, la nourriture est lune

    des rcompenses ncessaires et intenses. Trois diffrentes composantes ont pu tre isoles de

    cette notion de rcompense tire dune consommation daliments : le plaisir hdonique

    (liking), la motivation manger (wanting) et lapprentissage (learning) (Berridge, 2009). Ces

    composantes font intervenir un rseau complexe qui permet lassociation entre les trois

    (Figure 14).

    Le plaisir hdonique et la motivation ont des substrats neuro-anatomiques diffrents.

    Dune part, le plaisir fait intervenir des systmes tels que les systmes opiodes et

    GABAergiques, et des structures anatomiques telles que les relais gustatifs du PBN comme le

    suggrent des tudes sur des rats dcrbrs ayant got une solution sucre (Grill et Norgren,

    1978). Dautre part, la motivation consommer de la nourriture repose sur les systmes

    dopaminergiques mso- et tlencphaliques, ainsi que sur des structures prosencphaliques

    comme le noyau accumbens (NAcc), le pallidum ventral et lamygdale (Berridge et al., 2010).

    Le rcepteur -opiode (MOR) joue un rle crucial dans ces systmes de plaisir.

    Linjection locale de lagoniste DAMGO dans le NAcc induit une prise alimentaire vorace,

    particulirement de nourriture palatable riche en sucres et en graisses (Kelley et al., 2002;

    Will et al., 2003). Cette augmentation de la prise alimentaire semble tre due une

    augmentation du plaisir hdonique, puisque les injections de morphine dans cette mme

    rgion augmentent le nombre de ractions affectives positives (Pecia et Berridge, 2005),

    alors que linjection dantagonistes rduit la consommation dune boisson sucre (Kelley et

    al., 1996). Contrairement ce qui est couramment admis, le systme mso-limbique

    dopaminergique naffecte pas le plaisir des stimuli mais est crucial pour la mobilisation du

    comportement moteur pour obtenir des stimuli plaisants, ce qui constitue un systme

    diffrent, celui de la motivation manger (Berridge et Robinson, 2003).

    La motivation manger, bien que gnralement consquence du plaisir, constitue un

    lment distinct de la valeur hdonique. Cette distinction des substrats repose principalement

    sur des recherches concernant la dpendance aux drogues, o les stimuli noffrent souvent pas

    de plaisir mais sont pourtant trs dsirs. La motivation repose sur un aspect conscient

  • 30

    explicite et un aspect inconscient implicite. La motivation na pas de composante affective de

    rcompense. Son attribution transforme des informations sensorielles (vue, odeurs, sons) en

    des rcompenses dsires et attirantes (Berridge et Robinson, 2003). Des projections

    dopaminergiques de laire tegmentaire ventrale (VTA) vers le NAcc (le systme mso-

    limbique) sont la composante cruciale du systme de motivation inconsciente (Dayan et

    Balleine, 2002; Kaczmarek et Kiefer, 2000; Wyvell et Berridge, 2000). Le systme mso-

    limbique est intimement connect des lments du systme de rgulation mtabolique

    (Figure 14). La leptine et linsuline peuvent agir directement sur des neurones

    dopaminergiques mso-limbiques pour moduler la motivation manger (Fulton et al., 2006;

    Hommel et al., 2006). La leptine peut galement indirectement moduler les neurones

    dopaminergiques mso-limbiques travers son action sur le LHA, dont les neurones orexine

    ont des projections vers la VTA (Harris et al., 2005).

    2.4.4.2.Laversion

    La premire tape face la nourriture dans un environnement donn est le processus

    dapprentissage qui permettra la distinction entre ce qui est bnfique et ce qui ne lest pas.

    Laversion gustative conditionne (conditioned taste aversion) est le processus de mmoire et

    dapprentissage gustatif le mieux caractris. De nombreuses tudes ont lucid les structures

    participant dans ce processus, les neurotransmetteurs et rcepteurs associs ainsi que les voies

    de signalisation intracellulaires (Berman et Dudai, 2001; Desmedt et al., 2003).

    Laversion gustative conditionne fait intervenir des structures nombreuses et

    intgratives. Tout comme les voies de perception viscrale et post-absorptive, elle fait

    intervenir le PBN, le NTS, le LHA et le cortex insulaire (Berthoud et Morrison, 2008).

    Linteraction entre alimentation, mtabolisme et aversion est vidente en ce qui concerne la

    perception sensorielle. Cependant, le contenu nutritif du repas peut tre source daversion

    indpendamment des proprits gustatives (gnralement plus agrables pour les sucres et les

    graisses). Un exemple bien tudi est celui de laversion un rgime carenc en un acide

    amin, o la dtection du dsquilibre plasmatique par le cortex piriforme antrieur induit un

    dtournement du rgime en question et la prfrence envers une autre source compensatoire

    quand elle est disponible (Gietzen, 1993).

    Quil sagisse daversion ou de rcompense, il existe des systmes inns et acquis qui

    peuvent se renforcer ou sopposer dans le contrle de la prise alimentaire. De faon

  • 31

    intressante, la perfusion de glucose dans la veine porte active les rgions responsables des

    circuits de rcompense. Tout comme le glucose portal, les rgimes riches en protines

    semblent activer les mmes cibles centrales (Delaere et al., 2013; Mithieux et al., 2005).

    Contrairement aux rgimes riches en protines, les rgimes riches en graisses et en sucres

    rapides nactivent pas lexpression de la protine c-Fos (un marqueur reconnu dactivation

    neuronale) dans les rgions corticales (Delaere et al., 2013).

    3. LES RGIMES RICHES EN PROTINES ET LE RLE DES

    RCEPTEURS -OPIODES DANS LA SATIT

    3.1 Les effets mtaboliques des rgimes riches en protines

    3.1.1. Satit et induction de la thermogense

    Lorsque lon considre les diffrents effets inducteurs de satit des macronutriments,

    les protines sont les nutriments qui coupent le plus la faim, alors que les lipides sont ceux qui

    la coupent le moins (Eisenstein et al., 2002; Latner et Schwartz, 1999; Pullar et Webster,

    1977; Raben et al., 2003). Une relation possible entre la perception de la satit et les effets

    mtaboliques lis labsorption des macronutriments a t tablie dans une situation

    contrle de 24h dans une chambre mtabolique. Des volontaires ont t nourris avec des

    rgimes diffrents rgimes isocaloriques isovolumiques de compositions variables : un rgime

    riche en protines et riche en glucides (30% des calories provenant des protines, 60% des

    glucides, 10% des lipides) et un rgime riche en lipides (60% des calories provenant des

    lipides, 30% des glucides, 10% des protines). La satit tait alors plus leve chez les

    individus ayant reu le rgime riche en protines et en glucides. De plus, une augmentation de

    la dpense nergtique a t observe chez le groupe nourri avec le rgime riche en protines

    (Westerterp-Plantenga et al., 1999).

    Ces observations sont cependant dpendantes de la source de protines. Lapport de

    protines animales induit, par exemple, une augmentation de 2% de la dpense nergtique

    par rapport aux protines vgtales (Mikkelsen et al., 2000). De mme, une diffrence dans la

    satit induite par les protines a pu tre observe entre les protines de lactosrum et la

    casine. Le lactosrum induit une plus forte satit que la casine, associe une

    augmentation de la scrtion de CCK et GLP-1 (Boirie et al., 1997; Hall et al., 2003).

  • 32

    Chez le rat, les protines sont galement plus efficaces que les glucides pour rduire

    lapptit (Bensad et al., 2002, 2003). Un autre effet des rgimes riches en protines concerne

    le choix des macronutriments. Ainsi, des rats Wistar ayant le choix des macronutriments du

    sevrage la maturit choisissent spontanment une nourriture riche en protines et en lipides

    (Jean et al., 2002).

    3.1.2. Contrle de lhomostasie glucidique

    Les effets bnfiques des protines sur lhomostasie glucidique sont connus depuis

    bientt un sicle. En 1922, le Dr. MacLean a remarqu que lorsquun homme diabtique,

    ayant une glycmie jeun de 280 mg/dL, tait nourri avec 250 g de viande (soit environ 50 g

    de protines), ceci ne produisait pas daugmentation de la glycmie, contrairement lide

    rpandue lpoque que les protines taient hyperglycmiques par leurs effets sur la

    noglucogense (MacLean, 1922).

    Les effets insulinotropes des acides amins et des protines ont t dcrits pour la

    premire fois dans les annes 1960 (Pallotta et Kennedy, 1968), et ont depuis t confims

    chez des sujets sains (Nuttall et al., 1985) ou diabtiques de type 2 (Nuttall et al., 1984). La

    perfusion combine de glucose et des acides amins chane branche leucine et argini