DANS LA MÊME SÉRIE : Sophie Adriansen Roland Garrigue · 2017-12-06 · Une pièce sombre, une formule oubliée et une poudre qui promet Chapitre p. 44 Chapitre 4 Une séance de

Sophie Adriansen

Roland Garrigue

Un dragon bien trop gros1

Direction éditoriale : Paola GriecoDirection artistique et maquette : Florence Boudet et Marie RébulardSuivi éditorial et maquette : Caroline MerceronCorrection : Romain AllaisIllustrations : Roland Garrigue

Gulf stream éditeur, Nantes 2017ISBN : 978-2-35488-533-5Loi 49-956 du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse.www.gulfstream.fr

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DANS LA MÊME SÉRIE :

2. Un banquet plein de surprises

SOMMAIRE

Les personnages p. 6

Chapitre 1 Un château fort, un dragonneau de garde

et un écu encombrant p. 11

Chapitre 2Un destrier pas facile, une cavalière étonnante

et un camarade magicien p. 26

Chapitre 3Une pièce sombre, une formule oubliée

et une poudre qui promet p. 44

Chapitre 4Une séance de pose, une poule pas si petite

et un dragonneau qui disparaît p. 60

Chapitre 5Une ombre imprévue, un dragon gigantesque

et une épée à retrouver p. 75

Chapitre 6Un rendez-vous aux latrines, un passage secret

et un dragon malheureux p. 90

Chapitre 7Un passage pas si secret, un chevalier vantard

et une cascade surprenante p. 106

Chapitre 8Un chevalier mouillé, une épée noyée et une formule d’antidote à déchiffrer

p. 124

Chapitre 9Un miroir magique, un dragonneau plus si gros

et un château inaccessible p. 139

Chapitre 10Un jour pourri, une proposition inattendue

et une partie d’échecs et paf ! p. 154

Solutions des énigmes et des jeux p. 167

LES PERSONNAGESLES PERSONNAGES

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LucienFils du forgeron du château, Lucien est rêveur et très maladroit. Il se dit que tout cela changera lorsqu’il sera devenu chevalier : enfin il sera fort et admiré de tous. Mais l’apprentissage se révèle bien plus compliqué que ce qu’il imaginait. Et cette Hermine, qui réussit du premier coup la moindre des choses qu’il essaye péniblement de faire, l’agace au plus haut point !

HermineÉprise de liberté, Hermine est la fille du roi. Sauf qu’elle rêve de devenir chevalière. Elle en a les compétences ! Surtout, elle n’a aucune envie de rester au château et de porter des robes, les habits les moins pratiques du monde pour partir à l’aventure. Elle vit l’apprentissage de chevalier par procuration grâce à Lucien… et y ajoute son grain de sel !

LES PERSONNAGESLES PERSONNAGES

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EnguerrandDe l’âge de Lucien et Hermine, il fait son apprentissage de chevalier tout près du château et retrouve ses camarades pour jouer. Fils d’un magicien, il s’essaye souvent à la sorcellerie… mais ses réalisations créent plus de problèmes que de solutions !

SylvestreChevalier en charge de la formation de Lucien, il déchante vite en voyant le niveau de son apprenti. Pour lui, devenir chevalier est une affaire sérieuse ! Très fidèle à son roi, il n’aime pas perdre du temps à plaisanter.

GédéonDragonneau de garde, il est posté à l’entrée du château qu’il a pour mission de surveiller. Mais il aime aussi mettre son nez dans les affaires des autres, et y aller de ses commentaires... souvent anachroniques.

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CHAPITRE 1Un château fort, un dragonneau de garde

et un écu encombrant

Le plus grand jour de sa vie. Voilà ce que doit être cette journée pour Lucien, tout le monde autour de lui ne cesse de le lui répéter. Car c’est aujourd’hui que Lucien démarre sa formation pour devenir chevalier.

— C’est une grande responsabilité, chevalier ! l’a prévenu son père.

— Nous sommes tellement fiers de toi ! s’est émue sa mère.

— Tu n’y arriveras jamais, a persiflé son frère Pierrick.

C’est que Pierrick est jaloux. Il aurait rêvé de devenir chevalier mais, en tant qu’aîné, il sera forgeron comme son père, tandis que Lucien est promis à un autre destin depuis bien avant sa naissance. C'est un

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chapitrE 1LUCIEN ET HERMINE, APPRENTIS CHEVALIERSe x e m p l a i r e p ro m ot i o n n e l

lors de son anniversaire la surprise avait été totale. L’Ancêtre a appris à Lucien comment déplacer ses seize pièces sur les cases du plateau ; et il lui a si bien expliqué les règles que le garçon a souvent capturé le roi de son grand-père.

La seconde passion de Lucien, rêver, ne demande aucun matériel, même si le garçon préfère pour cela s’asseoir sur la grosse pierre plate plantée depuis au moins un siècle derrière la maison. De cette position particulière, il peut observer le paysage, les arbres très verts de cette forêt qu’on nomme pourtant Forêt-Noire, au loin le donjon du château qui l’attend, et laisser son esprit s’envoler. Car Lucien est doté d’un pouvoir magique qu’ont tous les enfants à la naissance, mais que la plupart d’entre eux abandonnent en devenant des adultes : l’imagination.

Seulement voilà : jouer aux échecs, ce n’est pas un métier, et rêver ne mène nulle part, comme le répètent le père et la mère de Lucien. Alors Lucien va entreprendre cette formation de chevalier. Et qui sait ?

cadeau que le roi a fait au forgeron il y a des années en remerciement de son aide. Ainsi, Lucien va servir le roi, c’est comme ça. .

Assis sur la charrette de son père, le garçon est en route pour le château. Il ne s’en souvient guère : il n'y est pas revenu depuis qu'il vit chez ses grands-parents, il se force à se réjouir mais il n’y arrive pas. On ne lui a pas demandé son avis, pas plus qu’à Pierrick. Ce n’est pas que Lucien aurait préféré travailler à la forge ; à vrai dire, si on lui avait posé la question, le garçon aurait répondu tout autre chose.

Lucien n’aime guère les activités physiques ; il n’aime guère les combats ; il n’aime guère être entouré d’individus nombreux ; et il n’est pas sûr de parvenir à monter sur le dos d’un cheval. Dans la vie, Lucien a deux passions : rêver et jouer aux échecs.

Son grand-père, surnommé l’Ancêtre, lui a offert un jeu d’échecs l’année dernière, pour ses six ans : un plateau et des pions en bois qu’il avait fabriqués lui-même en secret. Lucien ne s’était aperçu de rien, et

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Lucien a beau tourner la tête de tous les côtés, il ne voit personne. Qui a bien pu prononcer ces mots ?

— C’est moi, Bertrand le forgeron, répond le père de Lucien.

Mais à qui s’adresse-t-il donc ? Lucien se tord le cou et il aperçoit enfin le… la… la chose qui émet cette voix. Il s’agit d’un minuscule dragon blanc et rouge, qui a l’air bien déterminé à ne pas laisser entrer n’importe qui dans le château.

— Je vois bien que c’est toi, Bertrand, mais qui est cet enfant sur ta charrette ? Je ne l’ai jamais vu ici. Que vient faire cette créature au château ?

— Sacré Gédéon, tu as l’œil ! Cette créature, comme tu dis, est mon fils Lucien, qui démarre dès aujourd’hui son apprentissage de chevalier auprès de Sylvestre. C’est donc un futur page que je transporte sur ma charrette.

— Parfait, alors allez-y ! autorise Gédéon.Lucien ne fait aucun commentaire, mais intérieu-

rement il se demande ce qu’aurait pu faire ce minus-cule dragon s’il avait voulu les empêcher d’entrer. Mordre le bras de son père, peut-être, ou alors se

il pourrait devenir fort, sûr de lui et admiré de tous. Les chevaliers sont acclamés et respectés, et Lucien n’a jamais entendu parler d’un garçon qui n’aurait pas réussi sa formation après l’avoir entamée.

Voilà ce que se dit Lucien en avançant sur le chemin qui le conduit au château. Il n’est jamais entré à l’intérieur, il ne l’a observé que de loin. Le château a été construit sur une colline rocheuse, les murailles qui l’entourent suivent les formes irrégulières des rochers qui font la particularité du relief de la région. Le père de Lucien vient tous les jours ou presque au château avec sa charrette ; pour lui, tout ceci est parfaitement normal. Mais pour Lucien l’instant est impressionnant. Le château qui se dresse devant lui est immense et imposant, ses plus hautes tours s’élèvent à des dizaines de mètres au-dessus du sol. Le père de Lucien dirige sa charrette vers l’entrée, située en contrebas. On dirait que la voiture à deux roues connaît le chemin par cœur.

— Halte-là ! Qui va là ? demande une voix surgie de nulle part.

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glisser dans une roue de la charrette pour la stopper ? En tout cas, face à un homme grand et fort comme le père de Lucien, il aurait eu beau cracher des petites flammes, il n’aurait guère enflammé que la mous-tache du forgeron.

— Et quand il sera page, n’oubliez pas d’aller à l’imprimerie ! ajoute Gédéon en crachotant des étincelles de joie.

— Qu’est-ce que c’est, une imprimerie ? demande Lucien à son père.

Celui-ci secoue la tête en signe d’ignorance et se tourne vers l’animal pour obtenir l’explication.

— Une invention qui n’existe pas encore, pour écrire mécaniquement sur les pages des livres. Bonne journée !

On a levé la herse. En passant, Lucien remarque qu'elle se termine par des pointes en fer qui doivent décourager les petits malins qui voudraient passer sans autorisation. Il repère un lambeau d’étoffe couleur chamois coincé sous l’une des pointes : visiblement, un visiteur a failli se faire embrocher.

— À quoi sert ce ridicule dragon posté à l’entrée ? demande Lucien à son père lorsque la charrette s’est suffisamment éloignée des oreilles de la créature.

— Gédéon est le dragonneau de garde du château, explique le père de Lucien. Il surveille les allées et venues des visiteurs, et donne l’alerte si besoin. Mais ne t’avise pas de dire devant lui qu’il est ridicule : il pourrait très mal le prendre. Je ne connais pas dragonneau plus susceptible que Gédéon !

— Susceptible ? répète Lucien, qui n’est pas tout à fait sûr du sens de ce mot.

Mythe ou réalité ?Parmi ces animaux,

lesquels ont vraiment existé ?

dragon mammouth centaure dahu griffon dodo oiseau de feu licorne

monstre du Loch Ness glyptodon

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retourne pour mieux observer le mur d’enceinte. Celui-ci est orné d’un chemin de ronde couvert. Le château est bien gardé. Dans l’ombre de la tour, Lucien distingue une silhouette ; il s’agit certainement du propriétaire des yeux qui l’ont observé quelques instants plus tôt.

— Et voilà, le chargement est arrivé à destination ! s’exclame le père de Lucien. Fils, descends donc de là.

Lucien s’exécute et saute à terre. Trois autres garçons de son âge sont regroupés autour d’un grand et fier chevalier. Lucien ne connaît aucun d’entre eux.

— Allez, je file, annonce son père à Lucien. Bon courage, fils, et n’oublie pas de faire honneur à notre famille !

Le père de Lucien disparaît derrière une grande porte en bois zébrée de métal. C’est la forge, c’est ici qu’il travaille, utilisant son enclume et son marteau pour façonner selon les ordres du roi des épées et des boucliers, des bijoux et des clefs, des chaînes et des étriers... Dans la forge, le feu est toujours allumé, c’est la règle. Le père de Lucien travaille ici depuis

— Oui. Il se vexe d’un rien. Mais même ça, il vaut mieux ne pas le lui dire !

Pendant ce temps, la charrette a avancé de plusieurs mètres. Lucien contemple le spectacle qui se déploie devant lui. La porte principale du château a été creusée dans une haute tour ; impossible pour Lucien de ne pas penser au jeu d’échecs. Mais cette tour-là est bien trop lourde pour être déplacée horizontalement ou verticalement. Elle est percée de meurtrières. Fines ouvertures dans la pierre, les meurtrières permettent de lancer des projectiles et de voir sans être vu. Et Lucien a justement l’impression d’avoir été observé. Il pourrait le jurer, il a senti une paire d’yeux se poser sur lui, assis sur la charrette. Mais à qui appartient-elle ? Impossible de le savoir, les pierres du château fort savent mieux que les humains garder les secrets. Une seule certitude : ce ne sont pas les yeux de Gédéon. Par-dessus son épaule, Lucien voit le dragonneau de garde interpeller le propriétaire d’une autre charrette qui tente à son tour d’entrer au château.

De l’autre côté de la porte, c’est la cour. Lucien se

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— Je suis Sylvestre ; c’est moi qui vais m’occuper de ton apprentissage, annonce le chevalier. Bienvenue parmi nous.

Lucien est impressionné par la haute stature de l’homme en armure. Deviendra-t-il vraiment comme ça lui aussi, un jour ? Grand, fort et habillé de fer ? À cet instant, la chose lui paraît impossible. Baissant la tête, Lucien constate que l’homme est chaussé de souliers de métal se terminant par un éperon qui pointe à l’arrière du talon. Aux pieds du chevalier reposent son casque et son bouclier.

— Bien, puisque tout le monde est arrivé, nous allons pouvoir démarrer. Nous allons commencer la leçon à l’extérieur du château. Toi, Enguerrand, tu porteras mon casque, et toi, Lucien, tu te chargeras de mon écu.

Le dénommé Enguerrand s’empare du heaume, qui sert à protéger la tête lors des combats, et il emboîte le pas au chevalier que suivent déjà les deux autres garçons dont Lucien ne connaît pas les prénoms. Lucien observe l’objet resté au sol afin de déterminer

toujours, tout comme son père auparavant, et le père de son père également. Tout comme Pierrick y travaillera bientôt.

Dans la cour se trouvent aussi les écuries et l’auberge, le potager, le poulailler, les enclos pour les bêtes, ainsi que les greniers dans lesquels sont stockés la paille séchée, le foin et le grain. Mais c’est en son centre que le chevalier réunit ses troupes, à côté du puits dans lequel on puise l’eau nécessaire aux hommes et aux animaux.

— Tu dois être Lucien, le fils de Bertrand ? demande le chevalier en voyant le garçon s’approcher.

L’homme porte une armure au-dessus de sa cotte de mailles. La ceinture qu’il a passée autour de sa taille retient une épée. Ses jambes sont protégées par des cuissardes et des genouillères de métal.

— C’est moi, affirme timidement Lucien.Au même moment, deux porcs de petite taille

traversent la cour en grognant. Le plus petit d’entre eux passe entre les jambes de Lucien, qui sursaute.

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par quel côté l’attraper. Bombé vers l’extérieur, fait de bois, de lanières de cuir et de bandes de fer, l’écu, l’autre nom du bouclier, sert à protéger le chevalier. Si Lucien en a déjà admiré, en revanche il n’en a jamais porté. Or l’écu est presque aussi grand que lui ! Entre ses dimensions et son poids, plus de deux kilos, l’objet n’est pas facile à manier. Et il est encore moins facile de courir avec lorsqu’on veut rattraper le petit groupe qui a disparu sans attendre Lucien.

Dans sa précipitation, le garçon se prend les pieds dans la courroie qui sert à passer le bouclier sur l’épaule. Il s’étale de tout son long au beau milieu de la cour. Heureusement que Sylvestre et les autres sont déjà loin ! Même Gédéon, à son poste à l’entrée du château, semble ne pas l’avoir vu. Ouf ! Si on ne l’a pas vu, il n’a pas à se sentir ridicule.

Mais soudain, un grand éclat de rire fend l’atmosphère :

— Quel maladroit ! Tu commences bien… Crois-tu vraiment que tu deviendras chevalier si tu n’arrives même pas à porter un simple écu ?

Lucien se relève. Zut, du coup il se sent quand même ridicule. Il a un peu mal au coude, mais rien de grave. Il espère surtout que le bouclier n’est pas abîmé. Il ne faudrait pas qu’il commence son apprentissage en s’attirant les foudres de Sylvestre. Puis il se redresse afin de savoir qui se moque de lui comme ça.

Cot cot cot ? Sylvestre porte une cotte de mailles. Associe chacun

de ces homophones à sa définition :

cote • • vêtement

côte • • mesure ou valeur

cotte • • os ou littoral

ÉNIGME JEUXLUCIEN ET HERMINE, APPRENTIS CHEVALIERS

e x e m p l a i r e p ro m ot i o n n e l

Pour découvrir qui rit de Lucien, remets dans l’ordre les lettres de ces neuf éléments qui font partie

de l’équipement indispensable à tout chevalier. Les dessins te mettront sur la piste… De haut en bas, les lettres des carrés jaunes te donneront un indice

sur la personne moqueuse !Ensuite, continue ta lecture.

27

chapitrE 2

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haut et tu étais vraiment trop drôle !Du doigt, la fille désigne l’une des fenêtres du logis

qui donne sur la cour. Lucien l’observe rapidement. Elle est habillée aussi richement que si elle était la fille d’un seigneur. Comme si elle avait lu dans ses pensées, elle s’incline en une petite révérence et se présente :

— Je suis Hermine, la fille du roi.La fille du… quoi ? Lucien chasse de son esprit

l’image d’un plateau d’échecs sur lequel Hermine se tient sur la case voisine de celle occupée par le roi. Impressionné, il l’imite et tente une révérence maladroite :

— Je suis Lucien, le fils du forgeron. Mais je n’ai pas trop de temps, je dois rejoindre Sylvestre. C’est mon premier jour de…

— … d’apprentissage pour devenir chevalier, je sais. Si tu savais ce que je donnerais pour être à ta place ! Mais comment veux-tu que je porte un écu avec une robe longue ? Enfin bref… Ne te mets pas en retard, et salue Sylvestre de ma part !

Lucien prend congé de la fille du roi et, armé du

CHAPITRE 2Un destrier pas facile, une cavalière étonnante

et un camarade magicien

Lucien cligne des yeux à deux reprises. Il n’y a plus personne dans la cour. Aurait-il rêvé ? Il est pourtant sûr d’avoir entendu cette voix, une voix féminine, d’ailleurs… Il reprend l’écu de Sylvestre, heureusement en parfait état, et s’apprête à rattraper les autres apprentis chevaliers lorsque la même voix l’arrête :

— Tu ne t’es pas fait mal, au moins ?Cette fois, Lucien n’a pas rêvé. Il se retourne. Derrière

lui se tient une fille de son âge vêtue d’une longue robe verte et coiffée de grandes boucles rousses.

— Non, ça va, répond Lucien, vaguement grognon.— Je ne voulais pas avoir l’air de me moquer de toi

mais je n’ai pas pu résister ! Je t’ai observé depuis là-

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bouclier qui ne lui appartient pas, il part rejoindre le chevalier. Mais cette fois il marche vite tout en se gardant bien de courir : il a retenu la leçon.

Gédéon monte la garde à l’extérieur de la porte. Il n’a pas bougé depuis que Lucien est passé avec son père.

— Pas doué avec un écu ! Qu’est-ce que ça donnera avec les euros, je me le demande ! commente Gédéon en crachotant des étincelles de joie.

— Qu’est-ce que c’est, les euros ? interroge Lucien.Le dragonneau fait un petit mouvement avec ses

ailes minuscules.— Une monnaie qui n’existe pas encore !Lucien se souvient des propos de son père, qui a

affirmé que le dragonneau de garde du château se vexait facilement. Il préfère ne pas poser davantage de questions. Mais il a beau plisser les yeux – sa technique pour voir encore plus au loin –, il n’aperçoit nulle trace de Sylvestre et de la petite troupe de futurs chevaliers. Même Enguerrand, le garçon chargé du casque, a filé depuis belle lurette.

Devinant ses pensées, Gédéon le renseigne :

— Ils sont partis par là, sur la droite. Tu devrais les trouver derrière le grand arbre.

Lucien file dans la direction que lui a indiquée le dragonneau. Tandis qu’il accélère encore un peu, il repense à Hermine. C’est un sacré événement, d’avoir rencontré la fille du roi ! Et qu’a-t-elle dit ? Qu’elle aimerait être à sa place à lui, Lucien, fils du forgeron et futur page… C’est plutôt incroyable. Lucien, lui, ne détesterait pas échanger sa place avec la sienne. Comme s’ils étaient deux pions posés sur deux cases voisines. Une inversion, ni vu ni connu, hop ! Quand

Un écu ou deuxLe mot écu désigne à la fois un bouclier

et une monnaie. Comment nomme-t-on les mots qui ont plusieurs significations ?

◊ des paronymes ◊ des synonymes ◊ des homonymes ◊ des antonymes

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lourde, très lourde armure. On choisit alors un destrier, dressé spécialement pour la guerre. C’est un cheval de grande valeur. Pour la parade et les cérémonies, on monte un palefroi ; pour porter un message urgent, un coursier, le cheval le plus rapide. Le sommier est le robuste cheval utilisé pour transporter les armes et les bagages du chevalier. Mais quel est le point commun entre tous ces chevaux ? interroge Sylvestre.

— Ils ont tous quatre pattes ! s’exclame Tanguy, le plus petit des apprentis chevaliers.

— Ils ont tous une queue ! propose Flavien, le plus grand d’entre eux.

— Ils se changent tous en licornes si on leur fait manger de l’herbe de cacatoès ! affirme Enguerrand, le troisième garçon.

Sylvestre et les trois autres garçons le regardent bizarrement. Lucien prend alors la parole :

— Il faut monter dessus !Il regrette aussi ses mots. Ne vient-il pas de dire la

chose la plus évidente, la plus bête qui soit ? Mais le visage de Sylvestre se fend d’un large sourire.

on est la fille du roi, on doit avoir tout le temps qu’on veut pour jouer aux échecs et rêver.

Gédéon a dit vrai : derrière le grand arbre, Sylvestre se tient debout. Les trois garçons lui font face. Lucien les rejoint :

— Lucien, on ne doit pas traîner en route, d’accord ? Devenir chevalier est une affaire sérieuse. Pas de temps à perdre. Et écoutez-moi bien, je n’aime pas me répéter.

Lucien dépose l’écu aux pieds du chevalier en baissant la tête. Il n’est pas fier de lui. Il en oublie même de mentionner Hermine et son bonjour à transmettre.

— Bon, commençons, reprend Sylvestre. Et nous allons commencer par le commencement : pas de chevalier sans cheval. C’est la base. Mais un chevalier ne monte pas n’importe quel cheval. Les chevaux sont différents selon les situations : pour galoper sur le champ de bataille ou pour participer aux tournois, il faut un cheval costaud, capable de supporter non seulement le poids du chevalier, mais aussi celui de sa

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grimpé sur Carpette, assis au milieu de la selle en cuir rouge, les rênes à la main, le dos bien droit. Tout cela ne lui a pris qu’une seconde.

— À vous !Chaque garçon s’attribue un animal. Le cheval qui

revient à Lucien a été baptisé Bergamote. Flavien, Enguerrand et Tanguy parviennent à imiter Sylvestre sans effort. « Ça n’a pas l’air si difficile », pense Lucien en les voyant faire. Mais à cet instant le cheval qu’il s’apprête à monter tourne la tête vers lui et lui jette un regard mauvais. Lucien croit même apercevoir de la fumée qui sort de ses naseaux. Ce cheval semble le détester ! Lucien ne lui a pourtant rien fait. Cette idée le pétrifie sur place.

Voyant que Lucien a toujours les pieds sur terre, contrairement à ses camarades, Sylvestre, chevauchant Carpette, s’approche.

— Eh bien ! Les choses ne se passent pas comme tu veux ? Tu glisses le pied gauche dans l’étrier, tu prends appui à l’aide de tes bras et tu chevauches ta monture. À toi de jouer !

— Oui ! Exactement ! Et ce sera notre première leçon : l’équitation. Aujourd’hui, nous apprendrons à monter à cheval. Enfin, vous apprendrez ! Car moi je sais déjà le faire et, sans vouloir me vanter, je fais ça plutôt bien.

De derrière un bosquet, Sylvestre fait apparaître Carpette, son fidèle destrier. C’est un cheval gris, portant une selle rouge maintenue par une sangle qui passe sous le poitrail de l’animal. Le cheval à la belle robe grise est suivi de quatre autres compagnons à quatre pattes, bruns cette fois-ci, et plus petits. Il y a une monture pour chaque enfant.

— Un chevalier passe sa vie à cheval, explique Sylvestre. Il s’agit donc de savoir grimper sur votre monture, mais aussi d’y rester des heures, précise-t-il en flattant le flanc de Carpette. Admirez… pardon, regardez-moi et prenez exemple !

Dans un geste souple, Sylvestre place son pied gauche dans un étrier et prend appui avant de propulser son corps vers le haut et de passer son autre jambe par-dessus le cheval. Le voilà fièrement

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Lucien obéit, il glisse son pied dans l’étrier, prend appui à l’aide de ses bras et… il retombe lourdement sur le sol.

— Tu dois t’élancer davantage, conseille Sylvestre.Lucien recommence, mais cette fois il s’appuie si

fort qu’il bascule et s’étale de tout son long de l’autre côté du cheval.

Sylvestre s’agace :— Écoute, tu dois t’entraîner. Un chevalier qui

n’arrive pas à monter à cheval, ça ne peut pas marcher. Ton apprentissage ne peut pas démarrer si tu n’y parviens pas. Et je ne tiens pas à ce que le groupe prenne du retard. Nous allons dans la clairière, juste derrière. Rejoins-nous dès que tu peux.

Carpette tourne les sabots, Sylvestre sur son dos. Les trois autres chevaux lui emboîtent le trot. Resté seul, Lucien réessaye de monter Bergamote. Déterminé à ne pas être toujours à la traîne et à cesser de se faire remarquer, il prend appui avec force et, cette fois encore, se retrouve le nez dans l’herbe. Le fils du forgeron est proche du découragement.

— Psssttt !Lucien relève le nez. Elle ne sent pas mauvais,

cette herbe. Parmi les odeurs de la nature, celles des végétaux sont les préférées de Lucien. Il trouve que ce sont des odeurs qui aident à rêver.

— Psssttt !Lucien voit une forme verte remuer devant lui.

Serait-ce un arbre qui bouge ? De l’herbe gigoteuse ? Non ! C’est à nouveau la longue robe d’Hermine. Visiblement, elle l’a suivi jusqu’ici.

— Tu ne dois prendre qu’un demi-élan, dit-elle en s’approchant. Dès que tu arrives à la hauteur de ta

Un cheval, des chevauxAs-tu bien écouté Sylvestre ?

Retrouve la fonction de chaque cheval :

destrier • • parade palefroi • • tournoi coursier • • voyage

sommier • • messages urgents

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Il a dit ça comme ça, à vrai dire Lucien n’y connaît pas grand-chose en filles de roi, Hermine est la première qu’il rencontre, mais il lui semble que les filles de roi sont plutôt destinées à rester sagement au château.

— Ce que doivent faire les filles de roi m’intéresse encore moins ! Je t’ai déjà dit que je rêverais d’être à ta place ! Mais « chevalière », ça n’existe même pas. Mon destin à moi est de rester à m’ennuyer au château pendant que d’autres ont la chance de parcourir le monde et de vivre des aventures à dos de cheval ! Les robes sont les habits les moins pratiques du monde pour partir à l’aventure… soupire-t-elle. Enfin bref. Essaye à nouveau, et souviens-toi bien de ce que je t’ai dit.

Lucien obéit. Il mobilise toutes ses forces pour se propulser sur le cheval, et une fois là-haut il relâche tout. Miracle ! Il retombe lourdement, mais cette fois c’est sur la selle violette, et non plus dans l’herbe verte. Ouf !

— Merci, Hermine ! lance-t-il de sa position

monture, tu relâches tout pour ne pas aller plus loin. Je te montre, si tu veux.

— D’accord, répond Lucien en recrachant les quelques brins d’herbe qu’il a dans la bouche.

Hermine sépare en deux les pans de sa longue robe puis, dans un geste encore plus souple que celui de Sylvestre, place un pied dans un étrier et propulse son corps vers le haut avant de passer son autre jambe par-dessus le cheval. La voilà fièrement grimpée sur Bergamote, assise au milieu de la selle en cuir violette, les rênes à la main, le dos bien droit. Tout cela ne lui a pris qu’une seconde.

— Normalement, les filles doivent garder les deux jambes du même côté. On appelle ça « monter en amazone ». C’est comme ça que les dames montent les haquenées lors des tournois, pendant que les hommes montent des palefrois ou des destriers. Mais moi, ce que doivent faire les filles ne m’intéresse pas.

— Où as-tu appris à monter à cheval ? questionne Lucien, épaté. Les filles de roi ne font pas ça, d’ordinaire.

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mais les arbres qui l’entourent en étouffent le bruit, si bien que nombre d’habitants ignorent son existence. L’eau qui en coule est d’une pureté incroyable et forme un rideau que le soleil fait miroiter. Cela ressemble à l’idée que les jeunes pages se font du paradis.

Sylvestre descend de son cheval ; les enfants posent à leur tour le pied à terre.

— J’autorise une sieste de quelques minutes dans l’herbe, annonce le chevalier, le temps que nos bêtes s’abreuvent.

Les garçons ne se font pas prier. À peine Lucien s’est-il étendu qu’il croit avoir une hallucination : un arc-en-ciel apparaît sous ses yeux.

— Tu ne rêves pas, déclare Sylvestre, croisant son regard surpris. Il s’en forme ici plusieurs fois par jour. Je compte d’ailleurs sur vous pour que ce havre de paix reste secret. Il est important que les chevaliers aient un endroit pour se reposer.

Comme les autres, Lucien promet. Lorsque Sylvestre a parlé d’une cascade, le fils du forgeron ne s’attendait à rien d’aussi exceptionnel.

dominante, en veillant bien à ne pas lâcher les rênes. Je n’oublierai pas ton conseil.

— Bonne chance, répond Hermine. Et salue Sylvestre de ma part !

Satisfait, Lucien laisse Bergamote le guider jusqu’à la clairière voisine, où Sylvestre fait une démonstra-tion en tournant sur lui-même avec Carpette.

Apercevant Lucien, il cesse sa danse équestre.— Parfait, puisque tout le monde est là, en route pour

les écuries ! Mais d’abord, nous allons passer par la cas-cade : nos chevaux apprécieront un rafraîchissement.

Lucien fait confiance à sa monture : Bergamote a l’air de connaître le chemin. Et c’est tant mieux, car l’apprenti chevalier aurait bien du mal à se concentrer sur la route. Il s’agit d’une part de rester en selle, et d’autre part d’admirer le paysage. Et Lucien en prend plein la vue : ce qu’il découvre lui coupe le souffle. Au beau milieu de la forêt se trouve un coin où l’herbe est plus verte qu’ailleurs. S’élève de l’endroit une chantante mélodie : la cascade est juste là, au détour d’un gros arbre. C’est l’une des plus hautes de la région,

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— Ton père ? Il est herboriste ? interroge Lucien.— En quelque sorte… dit Enguerrand, un soupçon

de mystère dans le ton. Tu voudrais voir son laboratoire ? Nous sommes libres après la toilette des chevaux.

En effet, Sylvestre a indiqué que c’était la dernière leçon de cette première journée déjà riche en émotions, et il n’est vraiment pas tard. Rien n’empêche Lucien d’accepter la proposition d’Enguerrand.

— C’est loin ? demande-t-il.— Non. Nous vivons juste de l’autre côté du château,

indique Enguerrand.— Alors c’est d’accord.En quittant l’écurie, Lucien tombe nez à nez avec

Hermine.— C’était bien, la balade ? s’intéresse-t-elle.— Oui, c’était bien, confirme Lucien.— Pfff, quelle chance tu as, soupire Hermine. Où

vas-tu maintenant ?Lucien fait les présentations et explique qu’il

accompagne Enguerrand. Mais il ne dit rien de l’herbe

La pause achevée, la troupe, en file indienne, suit le chevalier jusqu’aux écuries du château. Là, Sylvestre montre aux quatre garçons comment nettoyer les sabots des chevaux, les peigner, brosser leur robe et en retirer les poils morts.

— Il est capital de prendre soin de sa monture, indique Sylvestre.

Lucien se retrouve à brosser le pelage de Bergamote à côté d’Enguerrand, qui peigne Romance. Il en profite pour l’interroger :

— Dis donc, tout à l’heure, tu as parlé d’une herbe spéciale qui changerait les chevaux en licornes… C’était une plaisanterie, pas vrai ?

— Pas du tout, répond Enguerrand le plus sérieusement du monde. Si tu fais manger de l’herbe de cacatoès à ton cheval, il devient licorne. Si tu ne me crois pas, je peux te le prouver.

— Ah oui ? Et comment ? demande encore Lucien. Où trouve-t-on cette herbe magique ?

— Chez moi ! affirme Enguerrand. Mon père en fabrique.



supposée transformer les chevaux en licornes. Il ne veut pas paraître à nouveau ridicule devant la fille du roi, il l’a suffisamment été pour aujourd’hui. D’autant qu’Hermine a l’air de connaître bien des choses. Alors si Enguerrand a dit vrai, on verra. Mais tant que Lucien n’en a pas la preuve de ses yeux, il préfère ne pas risquer d’entacher son image.

— Je peux venir avec vous ? demande la demoiselle.

Hermine s’est emmêlé les cheveux ! Avant de partir à la découverte de l’atelier de cet herboriste pas

comme les autres, aide-la à se dépêtrer des deux autres princesses en trouvant à qui appartient

chaque natte, puis poursuis ta lecture.

45

chapitrE 3

44

que la forge du forgeron ne contient de poissons ailés. Le père d’Enguerrand doit fabriquer des potions pour soigner les vieilles gens, et Enguerrand doit lui aussi avoir beaucoup d’imagination, voilà tout. Il pourrait devenir un bon camarade, songe Lucien. Flavien et Tanguy, les deux autres apprentis chevaliers, lui ont à peine adressé la parole ; il n’est pas certain de bien s’entendre avec ces deux-là. Mais Enguerrand a commencé par raconter des sornettes pour l’attirer jusqu’à sa maison, et Lucien ne trouve pas que ce soit un mauvais début pour une amitié.

Enguerrand entre dans la maison dont la porte est ouverte. Une femme s’affaire dans la première pièce. Les fourneaux sont en action, un fumet peu agréable s’échappe d’une petite marmite au couvercle cabossé. La table en bois qui occupe le centre de la pièce est re-couverte d’oignons de toutes les tailles et de toutes les couleurs. Certains sont à moitié pelés, d’autres sont coupés en deux, laissant voir un cœur garni de cercles concentriques rouges, violets, jaunes, orange…

CHAPITRE 3Une pièce sombre, une formule oubliée

et une poudre qui promet

De prime abord, la maison d’Enguerrand est semblable à n’importe quelle autre. De second abord aussi : à l’extérieur, aucune plante grimpante à visage de chat ne court sur les murs, aucune herbe maléfique ne pousse dans le jardin, aucun oiseau à deux têtes ne s’envole à leur approche, aucun lièvre à rayures ne déguerpit à leur arrivée. Lucien, habitué à laisser son esprit cavaler comme un cheval sans chevalier, a beaucoup d’imagination. Quand Enguerrand a parlé d’une herbe aux pouvoirs extraordinaires, il a envisagé mille choses. Il a eu bien raison de tenir sa langue devant Hermine : l’endroit a l’air tout à fait normal, et certainement que le laboratoire de l’herboriste ne renferme pas plus d’herbe de cacatoès

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la plupart du temps aux regards. Enguerrand ouvre la marche, Lucien suit. Hermine referme la porte derrière eux.

Il fait si sombre que Lucien croit d’abord avoir pénétré à l’intérieur d’une cave. Tout juste aperçoit-il une forme qui bouge un peu dans l’obscurité. En revanche, ses oreilles sont à la fête : autour de lui, ça siffle et ça crépite, ça tintinnabule et ça glougloute. Une masse liquide est réchauffée à gros bouillons.

Progressivement, les yeux des enfants s’habituent à l’obscurité. En réalité, la pièce est pourvue de deux fenêtres, mais des rideaux sombres et épais ont été tirés devant les vitres afin d’empêcher la lumière du jour d’entrer. Rien n’éclaire le lieu, sinon les reflets étranges du liquide bouillonnant dans le chaudron qui trône au centre de la pièce. Sont réunis ici plus d’alambics que Lucien n’en a jamais comptés. C’est un véritable parcours de tubes de verre qui partent du chaudron central et mènent le liquide pour un voyage qui va jusqu’au plafond de la salle avant de redes-cendre dans différentes carafes et flacons.

— Mère, je vais voir père au laboratoire avec mes nouveaux amis ! lance Enguerrand sans s’arrêter.

— Très bien, très bien, répond sa mère. Tiens, profites-en pour lui demander des oignons verts et bleus. Je lui en ai commandé spécialement, et il m’a fait un assortiment de toutes les couleurs. Je ne veux pas utiliser n’importe quoi pour ma recette. Je prépare une nouvelle tarte, avec de la crème et des oignons. J’ai besoin d’oignons verts et d’oignons bleus exclusivement.

— Entendu, acquiesce Enguerrand.Enguerrand s’arrête devant l’un des murs de la

pièce. Ce n’est qu’à ce moment précis que Lucien remarque qu’une porte y a été percée. Elle est si basse qu’il faudra qu’il se baisse légèrement s’il veut entrer. Et un adulte se trouve de l’autre côté ? Considérant la petite hauteur, Lucien espère pour lui qu’il ne mesure pas la même taille que Sylvestre ; sinon c’est à quatre pattes qu’il a dû avancer pour passer ! Enguerrand actionne la poignée. La porte est d’un bois teinté de la même couleur que celle des pierres avec lesquelles la maison a été bâtie ; voilà pourquoi la porte échappe

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— Promis ! s’exclame Enguerrand, ravi, en s’empa-rant de la fiole que lui tend son père. Oh, et j’allais oublier : mère aurait aussi besoin d’oignons… Quelle couleur a-t-elle précisée, déjà ?

— Bleus, répond Lucien.— Et verts, ajoute Hermine.— C’est ça : des oignons bleus et verts pour la recette

qu’elle est en train de préparer, confirme Enguerrand.— Que cuisine-t-elle ? demande son père.Enguerrand réfléchit en se grattant le menton :— Une tarte, je crois. Avec de la crème et des oi-

gnons. Mais elle ne veut que des verts et des bleus.— Miam ! Très bien, je m’y mets tout de suite.— Oh, Enguerrand ! le retient son père. Dis à ta

mère de rajouter du lard, dans sa recette. Je suis sûr que ce sera encore meilleur.

— Entendu, répond Enguerrand.Lucien et Hermine échangent un regard amusé : elle

est étonnante, cette famille dans laquelle le père et la mère ont besoin de leur fils pour se parler, alors qu’ils se tiennent chacun de part et d’autre d’un même mur !

— Un labyrinthe pour potion magique, murmure Hermine, fascinée.

Lucien est tenté de le penser également. À présent, les enfants y voient comme en plein jour. Il flotte dans l’air quelque chose de bizarre…

— Eh bien, les enfants ! s’exclame une voix. C’est gentil de venir me faire une petite visite.

Apparaît un homme barbu qui ne peut être autre que le père d’Enguerrand. Malgré l’absence de chapeau sur son crâne, il correspond tout à fait à la représenta-tion que Lucien se fait d’un herboriste-magicien.

— Père, je voudrais une touffe d’herbe de cacatoès pour impressionner mes nouveaux amis ! annonce Enguerrand.

— Je n’ai pas d’herbe de cacatoès en ce moment, mon garçon. Tu sais qu’il faut de la plume farcie pour en fabriquer – et en ce moment, impossible de s’en procurer, ce n’est pas la saison. En revanche, j’ai préparé ce matin un flacon d’eau des pattes. Attention, tu sais que c’est à manipuler avec précaution : ne te trompe pas dans la formule qui accompagne son utilisation.

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la testerons ensemble. D’accord ?Lucien et Hermine acceptent, mais c’est avec moins

d’enthousiasme que la première fois qu’ils retournent dans la pièce en passant par la porte basse. Le père d’Enguerrand n’est plus là ; sa mère non plus n’est plus dans la cuisine, mais elle a été remplacée par une bonne odeur d’oignons caramélisés.

Enguerrand allume une petite bougie pour y voir

Enguerrand décide de faire sa démonstration de-vant la maison. Il verse à terre quelques gouttes du liquide contenu dans le flacon, puis se concentre :

— Trois petits cochons pendus au plafond ! s’ex-clame-t-il.

Hermine et Lucien observent fixement le sol : rien ne se passe.

— Ça ne doit pas être la bonne formule, réalise Enguerrand. Attendez !

« Une souris verte qui courait dans l’herbe ! lance-t-il cette fois.

Toujours rien. Hermine hausse discrètement les sourcils. Lucien, lui, commence à douter sacrément des talents de son camarade.

— Je ne me souviens plus de la formule, admet celui-ci.

— Qu’est-ce qui doit se passer, normalement ? de-mande Lucien.

— Eh bien… Je ne sais plus non plus, avoue Enguerrand. J’ai une idée : allons choisir tous les trois une potion dans le grimoire, je la préparerai et nous

D’accord, pas d’accordOn n’accorde jamais les couleurs lorsque

l’adjectif est un nom Sauras-tu repérer les adjectifs invariables ?

un oignon brun > des oignons brun_ un oignon marron > des oignons marron_ un oignon jaune > des oignons jaune_ un oignon citron > des oignons citron_ un oignon orange > des oignons orange_ un oignon rouge > des oignons rouge_ un oignon turquoise > des oignons turquoise_ un oignon kaki > des oignons kaki_

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Hermine montre quelques signes d’impatience.— Ça va être long ? demande-t-elle à Enguerrand.

Parce que je viens de me souvenir que j’ai une séance de peinture au château tout à l’heure…

Lucien ne masque pas son intérêt :— Tu prends des cours de peinture ? questionne-t-il.— Pas tout à fait… réplique Hermine, soudain éva-

sive. On pourrait peut-être se retrouver au château avec ta poudre et la tester sur…

— Gédéon ! propose Lucien.— Super idée ! applaudissent Hermine et Enguerrand.Lucien est très satisfait de sa trouvaille.— D’accord, poursuit Enguerrand, on se revoit au

château tout à l’heure. Tu auras fini ta peinture ?— Oui, ça ne prend guère de temps mais… je ne

peux pas manquer le début, indique Hermine, mys-térieuse. Ni la fin.

— Lucien, tu restes ? demande le fils de l’herbo-riste.

— J’ai promis à mon père de passer à la forge pour lui raconter le début de mon apprentissage…

plus clair. De sous une table, il tire un lourd grimoire, qu’il commence à feuilleter.

— Herbe de cacatoès, philtre de grenouilles, eau des pattes, poudre arc-en ciel… énonce-t-il tout haut.

— Qu’est-ce que c’est, la poudre arc-en-ciel ? l’in-terrompt Hermine. J’aime bien ce nom !

Enguerrand approche la bougie pour lire la des-cription :

— Un peu de poudre arc-en-ciel donnera« À l’animal ou à l’objet de votre choix« La couleur, l’allure, et cætera« De ce qui à côté de lui il y a.C’est pour changer de couleur, traduit-il.— Ça a l’air amusant, commenta Hermine. Tu peux

faire ça ?— Bien sûr, répond Enguerrand. Je peux tout faire.

Je m’y mets tout de suite.Il s’active afin de rassembler le matériel et les in-

grédients. Mais il ne parvient pas à retenir plus de deux éléments à la fois, aussi il ne cesse de revenir au grimoire, bougie en main.

5554


Enguerrand cache comme il peut sa déception de préparer seul la poudre magique.

— Alors, rendez-vous dans la cour du château ! conclut-il.

Lucien et Hermine reprennent guillerettement la direction du château. Lucien n’est pas peu fier de s’être fait dès son premier jour deux nouveaux amis, et pas des moindres : un apprenti magicien et la fille du roi, rien que ça. Même si, pour ce qui concerne Enguerrand, rien n’est encore certain. Pour l’instant, il paraît être davantage apprenti que magicien.

À proximité du château, Lucien aperçoit Sylvestre. Il est encombré de grands éléments, mais à cette di-tance l’apprenti est bien incapable d’identifier le char-gement du chevalier.

— Salut, Sylvestre ! lance Hermine.Le chevalier rejoint les enfants. — Bonjour, Hermine. Je vois que tu as fait la

connaissance de l’un de mes pages ! sourit Sylvestre.Lucien constate que le chevalier porte sous un bras

un destrier de bois, et sous l’autre un mannequin

taillé dans le même matériau.— À quoi cela va-t-il servir ? interroge-t-il.— À vous entraîner au combat ! C’est au pro-

gramme des prochains jours de formation… explique Sylvestre.

— Quelle chance ! commente Hermine.— On va monter sur un cheval de bois ? s’étonne

Lucien.— Oui, et avec ta lance tu tenteras de faire tom-

ber le mannequin. Le bois est idéal pour s’entraîner.

De l’art !Au Moyen Âge, les arts n’étaient pas

les mêmes qu’aujourd’hui. Dans cette liste, identifie ceux qu’on considérait comme

des arts à l’époque de Lucien et Hermine :

peinture grammaire musique géométrie sculpture architecture orfèvrerie équitation maniement des armes

astronomie chasse danse échecs

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— Un procédé multicolore qui n’existe pas encore, fanfaronne Gédéon.

Les deux enfants s’éloignent, riant sous cape du bon tour qu’ils joueront bientôt à l’impertinent dragonneau.

— Bon, je file, annonce Hermine en arrivant près du puits qui trône au milieu de la cour du château. La peinture m’attend ! À tout à l’heure.

Tandis qu’elle se dirige vers l’escalier qui mène aux chambres de la famille royale, Lucien traverse la cour jusqu’à la forge. Il a beau avoir envie de raconter ses exploits à son père, il préférerait suivre sa nouvelle amie et découvrir ce qu’elle ne veut pas raconter… Car il a un doute : la princesse n’aurait-elle pas trouvé n’importe quel prétexte pour revenir au château ? Mais si elle n’en a que faire, pourquoi aurait-elle demandé à Enguerrand de préparer de la poudre arc-en-ciel ?

Et puis on aime beaucoup le bois, par ici, ajoute le chevalier en désignant la forêt derrière les enfants. D’ailleurs, lorsque ce château a été construit, il était lui aussi en bois !

Hermine et Lucien saluent le chevalier et pour-suivent leur route : le château n’est plus qu’à quelques pas. Aucun guetteur ne se montre, en revanche le dragonneau de garde est fidèle au poste. Hermine, pensant à ce qui va arriver, décide de dire une blague

— Ouvre grand tes oreilles, prévient-elle Lucien.Le petit dragon vole au-devant des deux enfants.— Dis-moi, Gédéon, comment vas-tu ? Tu vois la

vie en rose ? pouffe la fille du roi.Lucien se retient d’éclater de rire.— Je vois la vie en Technicolor ! répond l’animal

dans un battement d’ailes.Sûr de son succès, il tournoie sur lui-même.— Qu’est-ce que c’est, « Technicolor » ? demande

Lucien, curieux.Il s’était pourtant promis de ne pas entrer dans le

jeu du dragonneau, mais c’est plus fort que lui.



« Imprimerie », « euros », « Technicolor »… Gédéon, l’étrange dragonneau de garde, a pour habitude

de parler de choses qui n’existent pas encore. Et toi, sauras-tu déceler les anachronismes dans ce dessin ?

Trouves-en au moins sept avant de continuer ta lecture et de découvrir ce dont parle Hermine

lorsqu’elle évoque la peinture.

61

chapitrE 4

60

Elle n’en peut plus ! Pourquoi son époux ne souhaite-t-il pas, comme les autres, un cheval, un animal de compagnie ou un manteau brodé de pierreries ? Des portraits de la reine, il y en a partout, accrochés dans les chambres et les couloirs.

Et puis, surtout, un portrait, cela demande du temps, beaucoup de temps. Cela représente des heures et des heures de pose, à tenter de rester im-mobile, même si une mouche vient voler autour de du visage ou qu’un invisible et diabolique génie vous donne envie de se gratter le bout du nez. Le peintre est charmant, ce n’est pas le problème, et ses tableaux sont plutôt avantageux, rien à dire à ce niveau-là, mais à force c’est vraiment lassant !

— Chaque nouveau portrait de vous est différent, fait remarquer le roi. Et puis, vous embellissez d’an-née en année, alors je pense que le prochain sera par-ticulièrement réussi.

Le roi fait son flatteur… En réalité, le plus beau cadeau que puisse lui faire la reine, c’est la tranquillité. Pendant qu’elle pose pour le peintre, elle ne le fatigue

CHAPITRE 4 Une séance de pose, une poule pas si petite

et un dragonneau qui disparaît

Il règne une grande agitation à l’étage du château. C’est aujourd’hui le jour où, comme chaque semaine, le peintre installe son matériel dans la chambre de la reine. Ce sera bientôt l’anniversaire du roi et, selon son habitude, la reine s’y est prise en avance pour lui poser la question fatidique :

— Mon bel ami, quel cadeau vous ferait plaisir pour la fête à venir ?

Et selon son habitude, le roi a répondu :— Ma douce, rien ne m’enchanterait plus les yeux

et le cœur qu’un beau portrait de vous.— Encore ! s’est exclamée la reine, lassée.Depuis qu’elle est mariée au roi, celui-ci réclame

chaque année le même cadeau d’anniversaire.

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chapitrE 4 LUCIEN ET HERMINE, APPRENTIS CHEVALIERSe x e m p l a i r e p ro m ot i o n n e l

c’est Hermine. La reine a jugé qu’il n’était pas trop tôt pour que sa fille fasse l’apprentissage de l’immobilité.

— Mais j’ai mille autres choses à faire ! a tenté de protester la princesse.

— Quand on est la fille du roi, on ne fait pas tout selon son bon plaisir, a tranché la reine.

Et hop ! Une robe impeccable, des boucles bien peignées, et interdiction formelle de bouger. Au cours de la première séance, Hermine a souffert le martyre. À l’arrière-plan, debout deux mètres derrière sa mère environ, elle se sentait inutile, pourtant le peintre l’a reprise à l’ordre au premier de ses mouvements. À la fin de la séance, qui lui a paru interminable, la princesse avait des crampes, un torticolis et des hal-lucinations : pendant l’heure qui a suivi la séance de torture, elle a cru avoir en permanence le peintre dans son champ de vision, alors que le brave homme était toujours à l’étage, rangeant son matériel en pré-vision de la fois suivante.

Les crampes ont réveillé Hermine dans la nuit, tant et si bien que la princesse, implorant la lune de

pas avec ses questions sur les menus des prochains banquets ou avec des propos sans intérêt au sujet de ses demoiselles de compagnie. Alors, de nouveaux tableaux, il en veut bien à longueur d’année ! La reine se trouve exposée partout aux murs, c’est le prix à payer. Le jour où l’un de ses conseillers a soufflé au roi cette possibilité, il a eu une bien brillante idée…

Comme les années précédentes, la reine s’est mon-trée incapable de refuser au roi le cadeau qu’il de-mandait. Elle a donc fait venir le peintre ; mais elle a mis une condition :

— Qu’il y ait un peu d’originalité, pour une fois.Le roi était d’accord.— Libre à vous et au peintre d’imaginer toutes les

fantaisies que vous voulez ! a-t-il répondu.C’est ainsi qu’il a été décidé que, cette année, la

reine ne serait pas seule sur son portrait. Hermine poserait elle aussi. L’artiste a approuvé :

— La mère et la fille, ce sera si touchant ! Nul doute que le roi appréciera grandement.

Il y en a une à qui on n’a pas demandé son avis :

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fé de carottes et reprend sa place d’origine. Quand le peintre lève son pinceau et annonce qu’il en a ter-miné pour la journée, ni lui ni la reine ne peuvent imaginer qu’Hermine n’est pas restée tout du long à leurs côtés.

Et c’est précisément ce qu’elle est en train de faire : après avoir sagement posé de trop longues minutes, la princesse installe l’épouvantail qui trompera le peintre et elle quitte la chambre de sa mère par une porte dérobée. Elle se presse, car elle est impatiente de retrouver Enguerrand et Lucien comme prévu. Ils vont en faire voir de toutes les couleurs à Gédéon, ça promet d’être hilarant !

calmer ses souffrances, s’est fait une promesse : elle trouverait une solution, n’importe quoi, mais elle ne subirait pas cette souffrance chaque semaine.

Depuis, les séances de pose se déroulent tou-jours de la même façon : Hermine entre, embrasse sa mère, salue la demoiselle de compagnie qui ac-compagne celle-ci ainsi que le peintre, et va prendre place à l’endroit qui lui est dévolu. Lorsque le roi vient voir si tout se passe bien, au bout de dix minutes en-viron (c’est le moyen qu’il a trouvé pour encourager son épouse à continuer de poser), Hermine profite de l’agitation pour mettre à sa place un sac de grains vêtu de sa robe bleue et surmonté d’un bouquet de jeunes carottes d’un orangé profond.

D’où il est installé, derrière son chevalet à l’autre bout de la pièce, le peintre, qui n’est plus tout jeune, ne fait pas la différence. Quant à la reine, elle a interdic-tion de tourner la tête. Et pour ce qui est de la demoi-selle de compagnie, celle-ci a juré qu’elle ne dirait rien.

Hermine revient comme si de rien n’était en fin de séance, déménage discrètement le sac de grains coif-

Trois sacs de grainsLequel de ces sacs de grains est le plus léger ?

◊ A : 4 x 10 kg ◊ B : 3 x 13 kg ◊ C : 2 x 20 kg

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La poule est blanche ; elle devrait devenir terreuse comme le chemin et, si elle fait quelques pas, verte comme l’herbe tendre ou brune comme les troncs des arbres ! Enguerrand fait attention au sens du vent et prend une pincée de poudre qu’il fait tomber sur le volatile.

— J’ai entendu, j’ai entonnoir, géant tout court !, énonce-t-il en consultant son grimoire.

Lorsqu’il a commencé à aider son père, Enguerrand s’est étonné de ces formules bizarres qui n’ont pas toujours grand-chose à voir avec la potion et ses pouvoirs. À présent, cela lui semble parfaitement normal.

Sauf que… la poule ne devient ni verte ni brune ni couleur de terre. Elle reste blanche, fait un bond et re-tombe sur ses pattes quelques mètres plus loin. Rien n’a changé. Enfin, presque rien. Enguerrand n’avait pas l’impression que la poule était si grosse, quelques instants auparavant.

Il reprend le grimoire. Pour une meilleure efficacité, utiliser une grande quantité de poudre, lit-il.

Pendant ce temps, Enguerrand, tout content de lui, referme soigneusement le couvercle du pot contenant la précieuse poudre arc-en-ciel. Il s’agit de ne pas en perdre en chemin. Il a emporté avec lui son grimoire pour ne pas se tromper dans la formule. Tant pis si le livre est lourd et encombrant, le jeune chevalier magicien ne veut pas risquer de passer deux fois de suite pour un débutant auprès de ses nouveaux camarades.

Enguerrand n’est pas pressé : il lui a finalement fal-lu très peu de temps pour préparer la poudre magique. Certainement que Lucien n’a pas encore raconté à son père tout ce qu’il a à lui dire, et que la fille du roi n’en a pas encore terminé avec cette histoire de peinture.

Enguerrand aperçoit une poule qui avance sur le chemin. Elle est seule ; elle s’est certainement échap-pée du poulailler du château car celui-ci n’est plus très loin, Enguerrand en voit les hautes tours qui se dessinent sur le ciel bleu.

— C’est l’occasion de tester ma poudre avant de leur en mettre plein les yeux ! dit Enguerrand pour lui-même.

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— Lucien, tu es prêt ? lance-t-elle, avant d’ajouter : Bonjour, Bertrand.

— Bonjour, demoiselle, répond le forgeron, son marteau dans une main et ses tenailles dans l’autre. Va, mon fils, dit-il à l’attention de Lucien.

— Ne perdons pas de temps, allons voir Gédéon ! commande Hermine, sautillant de joie.

Le dragonneau n’a pas bougé.— Faites-lui la conversation le temps que je le sau-

poudre ! dit Enguerrand.Trop impatiente de voir le dragonneau bleuir ou

verdir, Hermine ne se fait pas prier.— Dis-moi, Gédéon, n’as-tu pas vu entrer un visi-

teur bizarre, tout à l’heure ? susurre-t-elle.— À part une grosse poule, non, rien à signaler,

rapporte le petit dragon. Tiens, on dirait que le vent se lève, constate-t-il en observant le ciel.

Pendant ce temps, Enguerrand, qui a posé son pot au sol, lâche une belle poignée de poudre en direc-tion de l’animal blanc et rouge. Il se prépare à réciter la formule.

— Voilà l’explication ! murmure Enguerrand. Je n’ai pas pris assez de poudre dans ma main. J’ai bien fait de m’entraîner : je ne commettrai pas deux fois la même erreur…

Il retrouve dans la cour Hermine, assise à l’ombre du puits.

— Que fais-tu par terre ? lui demande Enguerrand.— Je me cache ! Je ne suis pas supposée être là.— Ah bon ? Mais où devrais-tu être ? À la peinture,

c’est ça ?— Exactement, confirme la princesse. Mais ce se-

rait trop long de t’en dire plus. J’ai à peu près une heure de libre devant moi, ensuite il faudra que j’y retourne, je ne peux vraiment pas t’expliquer mais c’est comme ça. Allons chercher Lucien, veux-tu ?

— D’accord.— Tu as bien la poudre arc-en-ciel ?— Oui ! assure Enguerrand en brandissant son pot.

Et j’ai même apporté le grimoire.Mais Hermine ne l’écoute plus, elle est déjà à l’en-

trée de la forge.

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fois, pour être sûr.Lucien et Hermine se sont immobilisés, guettant le

premier changement. Hélas, rien ne se passe.— Ce n’est pas instantané ? se renseigne la fille du roi.— Normalement, c’est rapide, indique Enguerrand.Le vent se lève pour de bon, et voilà qu’une nou-

velle bourrasque fait disparaître Gédéon.— Ben, où est-il passé ? demande Lucien.C’est inexplicable. C’est comme si le dragonneau

s’était envolé sans que personne ne le remarque.— Tu es sûr que tu n’as pas prononcé la formule

qui rend invisible ? s’agace Hermine. Montre-nous ton grimoire…

Obéissant, Enguerrand tend le gros livre ouvert à la bonne page.

— En effet, il semblerait que tu aies fait tout ce qu’il faut, constate Hermine. Mais… attends ! On dirait que les pages sont collées !

Lucien et Enguerrand s’approchent de la princesse et découvrent à leur tour que la page sur laquelle l’apprenti magicien a lu les instructions est effectivement collée

— J’ai entendu, j’ai entonnoir, géant tout court !, énonce-t-il à nouveau.

— Qu’as-tu entendu ? demande Gédéon.— Tu as un entonnoir ? demande Lucien, avant

de comprendre qu’il s’agit de la formule associée à la poudre.

À cet instant, une bourrasque fait s’envoler tout le contenu du pot. Le dragonneau se met à tousser avec force ; il est entièrement couvert de poudre.

— Mieux vaut trop de poudre que pas assez, se dit Enguerrand avant de répéter la formule une nouvelle

De toutes les couleursBleu donne bleuir, vert donne verdir…

Sur le même principe, compose les verbes correspondant à chaque couleur :

rose > jaune > blanc > noir >

chapitrE 4

72

LUCIEN ET HERMINE, APPRENTIS CHEVALIERSe x e m p l a i r e p ro m ot i o n n e l

— Je vous laisse voir ce qui cloche, je dois remon-ter à ma peinture, annonce Hermine.

avec la précédente.— Donc ce n’est pas de la poudre arc-en-ciel que

tu as fabriquée ! s’exclame Hermine. Qu’est-ce que ça peut être ?

— Décollons les pages pour le savoir, propose Lucien.

Enguerrand s’y emploie soigneusement afin de ne rien déchirer. S’il ne rapporte pas le grimoire en bon état, son père ne voudra plus jamais qu’il s’en serve.

Tous trois déchiffrent le nom et la description de la mixture qu’Enguerrand a en réalité préparée :

Poudre de géant.La poudre de géant permettraÀ tout et à n’importe quoiDe devenir mille fois plus grand.— C’est pour grandir, traduit Enguerrand.— Merci, on avait compris, réplique Hermine.— Mais quelque chose m’échappe, avoue

Enguerrand. Si Gédéon est devenu gigantesque, où a-t-il pu passer ? On dirait qu’il y a eu un problème quelque part…

La fille du roi vient de trouver un message codé destiné au roi. Elle abandonne ses camarades en

pleine interrogation. Où est Gédéon ? Tu le découvriras après avoir aidé Hermine à déchiffrer le message

qu’elle vient de trouver.

75

ÉNIGME JEUX

CHAPITRE 5 Une ombre imprévue, un dragon gigantesque

et une épée à retrouver

Dans la chambre de la reine, Hermine reprend sa place comme si de rien n’était après avoir fait dispa-raître l’épouvantail en robe bleue derrière un rideau. Exceptionnellement, le roi, qui a pourtant assisté au début de la séance, vient à nouveau voir si tout se passe bien. Hermine est remontée à l’étage juste à temps !

— Ce tableau va être encore plus beau que tous les autres, affirme-t-il en connaisseur.

Le peintre lève soudain son pinceau.— Bien, nous en avons terminé pour aujourd’hui. Je

n’ai pas vu le temps passer, mesdames, mais j’ai dû traî-ner. Regardez dehors, il fait déjà nuit noire, déclare-t-il.

Le code est inscrit au dos de la main d’un des conseil-lers du roi : « Ici, sept geais ont douze ailes ! »

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nous tomber sur la tête ?— Pas vraiment, mère… répond Hermine d’une

voix si faible que personne ne l’entend.Car le spectacle qui s’offre à elle dépasse tout ce

qu’elle aurait pu imaginer. Une gigantesque masse s’est bel et bien approchée du château, jusqu’à en boucher les ouvertures, avant de s’en écarter un peu. Sauf qu’il ne s’agit pas d’un géant mais… Non, c’est trop incroyable pour être vrai.

— Alors ? s’impatiente le roi en rejoignant Hermine.— Il y a… Il y a un dragon géant qui vole autour du

château, balbutie celle-ci.Elle ne ment pas. Ce dragon est blanc et rouge, et

Hermine sait parfaitement de qui il s’agit : Gédéon, grossi mille fois par l’action de la poudre de géant d’Enguerrand. Mais comment expliquer ça à son père ?

— Diablerie ! s’exclame justement le roi.Il cligne trois fois des yeux dans l’espoir que la vi-

sion disparaisse, mais celle-ci persiste, et pour cause : ce n’est pas une vision.

— Nous sommes attaqués par un dragon ! rugit-il.

— N’importe quoi ! J’étais dehors il y a cinq mi-nutes, il ne fait pas du tout nuit noire ! s’exclame Hermine.

La reine la regarde de travers.— Que dis-tu, Hermine ? Tu perds la tête, ma fille…

Tu ne pouvais pas être dehors il y a cinq minutes puisque tu étais ici, avec moi…

— Pardon, mère, se reprend sa fille. Je voulais dire : j’ai regardé dehors il y a cinq minutes.

Le peintre a pourtant raison : la pièce s’est assom-brie. Elle est éclairée par les portes restées ouvertes mais les fenêtres, qui offrent une superbe vue sur la forêt en lisière de laquelle a été construit le château, sont bouchées, comme si un géant avait fermé d’in-visibles volets ou plaqué son dos contre le mur exté-rieur du château.

Et puis d’un coup, la lumière revient. Hermine se précipite à la fenêtre.

— Que vois-tu, ma fille ? interroge sa mère, pani-quée, mais trop occupée à ramasser ses jupes pour pouvoir la rejoindre. Est-ce que le ciel a décidé de

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s’engouffre dans l’escalier qui descend à la cour. Elle doit trouver Enguerrand. Il existe forcément un antidote à cette poudre de malheur. Quel nul, cet apprenti magicien ! Rien de tout cela ne serait arrivé s’il avait préparé sa gentille poudre arc-en-ciel comme prévu.

Hermine se promet de ne plus lui faire confiance à l’avenir.

Elle aperçoit justement le fils de l’herboriste du côté du poulailler. Il est avec Lucien, et tous deux ob-servent avec étonnement une poule bien plus grosse que toutes les autres.

— Enguerrand, c’est la catastrophe ! s’écrie Hermine en rejoignant ses deux camarades.

— Quoi ? demande Enguerrand.— Tu as vu cette énorme poule ? intervient Lucien.— Plus tard ! s’écrie Hermine. Par ta faute,

Enguerrand, Gédéon est devenu gigantesque, plus grand que le château, et mon père croit qu’il s’agit d’un dragon normal qui veut l’attaquer ! Il va réunir ses hommes pour le combattre, c’est affreux…

Qu’on prévienne immédiatement les meilleurs de mes hommes et tous mes chevaliers. Il va falloir se défendre, et nous n’allons pas nous laisser faire, foi de moi.

— Père, je crois que ce dragon, c’est Gédéon ! tente d’expliquer sa fille.

— Fille, ne dis pas de sottises, l’arrête le roi, agacé. Gédéon est grand comme un caniche, il n’a rien à voir avec ce puissant dragon qui a décidé de s’en prendre à mon château.

— Vous ne le reconnaissez pas ? insiste Hermine. Blanc et rouge, comme ça…

— Tais-toi, Hermine, je t’en prie ! la supplie sa mère.

Hermine en est persuadée, Gédéon n’a aucune intention d’attaquer le château, puisqu’il en monte la garde depuis des années avec loyauté. Mais comment le faire comprendre au roi si celui-ci ne le reconnaît même pas ? Le père d’Hermine ne croit pas à la magie, c’est bien connu…

Il faut trouver une solution, et vite. Hermine

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— C’est de la sorcellerie ! crie une femme avant de s’évanouir, laissant échapper le panier plein de pommes qu’elle tenait en main.

Mais personne ne s’occupe d’elle. Le château est en ébullition. Les soldats du roi se réunissent au milieu de la cour, tandis que les chevaliers surgissent de toutes parts. En haut des tours apparaissent des guetteurs que rejoignent les soldats. Derrière les palissades en bois qui coiffent le mur d’enceinte, les archers se préparent à tirer sur l’ennemi.

— Je n’ai jamais vu autant d’armes ! s’exclame Lucien, ébahi.

— Moi non plus ! renchérit Enguerrand.Hermine hausse les épaules. Depuis qu’elle est

princesse, le château a été attaqué à de nombreuses reprises. Alors les armes, elle les connaît toutes. Les lances et les épées ne l’impressionnent plus, pas davantage que les poignards et les arbalètes, les arcs et les flèches, les haches et les masses d’armes. Une chose est différente cette fois, et pas n’importe laquelle : l’ennemi. D’habitude, Hermine se fiche de

À cet instant, une ombre voile la cour. Les trois enfants, mais aussi toutes les personnes présentes, les serviteurs et les paysans venus apporter du foin, les femmes qui lavent le linge et celles qui tirent l’eau du puits, les cuisiniers, les jardiniers et les ouvriers, lèvent la tête pour voir ce qui masque ainsi le soleil. Même les animaux interrompent leur mouvement et se tordent le cou. Une créature ailée passe devant le soleil. Même à contre-jour, il n’est pas difficile de constater qu’elle est rouge et blanc. La forme du dragon se découpe avec précision sur le bleu du ciel.

Lumière !En combien de temps la Terre

fait-elle le tour du soleil ?

1 jour 1 semaine

1 mois 1 an

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Ce n’est pas rendre malade Gédéon qui les intéresse.Dans les airs, la lutte a commencé. Les archers ont

pointé leurs arcs en direction du dragon et les flèches fusent. D’autres soldats tentent de viser l’animal avec de grosses pierres rondes. Agile, Gédéon évite les pro-jectiles par ses mouvements d’ailes.

Les trois enfants se sont mis un peu à l’écart pour observer la scène. Hermine continue son énumération :

— Parfois, les soldats renversent aussi des pots d’eau bouillante et les attaquants sont brûlés vifs !

— Ils ne vont pas le faire ? s’inquiète Lucien.— Je ne pense pas, s’avance Hermine. Ni lancer des

pots enflammés.À peine a-t-elle achevé sa phrase qu’un pot d’ar-

gile enflammé vole dans les airs. Il passe à seulement quelques centimètres d’une aile de Gédéon avant de retomber lourdement et de plonger dans les douves qui bordent un côté du château. Gédéon, voulant cla-mer son innocence, décliner son identité et assurer aux soldats et aux chevaliers qu’il n’est absolument pas en train d’attaquer le château, lui qui au contraire

savoir que l’ennemi sera blessé ou tué. Cette fois, il n’est pas question qu’il arrive malheur à l’innocent Gédéon.

— Préparez les projectiles ! ordonne une voix pro-venant d’une des hautes tours.

— Qu’est-ce qu’ils utilisent, comme projectiles ? demande Lucien.

Il a l’impression de vivre en accéléré sa formation de chevalier. Les armes, les projectiles, bientôt le combat… Il en oublierait presque que tout ce remue-ménage n’a lieu que dans le but d’abattre Gédéon.

— Ils tirent des flèches avec leurs arcs, ils lancent aussi des pierres, énonce Hermine. Parfois, ils en-voient également des cadavres d’animaux.

— Des cadavres d’animaux ? répète Lucien. Pour quoi faire ?

— Pour répandre des maladies… explique la fille du roi. C’est très efficace !

— Quels animaux ? demande Enguerrand.— Généralement des moutons, précise Hermine.

Mais je ne pense pas qu’ils s’en servent aujourd’hui.

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postés en hauteur ont un mouvement de recul.— Il riposte, il faut l’abattre ! hurle l’un d’entre eux.Et les soldats s’acharnent de plus belle. En bas, les

trois camarades sont horrifiés.— Il faut qu’on trouve un moyen de tirer Gédéon

d’affaire ! s’exclame Enguerrand. Après tout, c’est de notre faute s’il se retrouve dans cette situation.

Hermine et Lucien se tournent vers lui :— De ta faute, tu veux dire ! le reprennent-ils d’une

même voix. Rien de tout cela ne serait arrivé si tu ne t’étais pas trompé de formule, rappelle Hermine.

— Je ne me suis pas trompé, rectifie Enguerrand, les pages du grimoire étaient collées, c’est différent.

— Peu importe ! proteste Hermine. Par ta faute, Gédéon est en danger. Notre dragonneau est parfois pénible, d’accord, il a son caractère, certes, mais il ne mérite absolument pas que des dizaines de soldats s’en prennent à lui en même temps.

En tentant à nouveau de s’expliquer, le malheu-reux Gédéon met le feu à l’une des palissades de bois. Les archers qui se tenaient derrière, surpris, bon-

a choisi de passer sa vie à le protéger des assaillants, ouvre la bouche. Mais à la place des paroles sincères et rassurantes qu’il pensait en faire sortir jaillissent de longues flammes orangées. Celles-ci n’ont plus rien à voir avec les étincelles que crachotait le dragon-

neau lorsqu’il avait fait un bon mot, ni avec les toutes petites flammes dont Lucien avait pensé, lors de sa première rencontre avec Gédéon, qu’elles n’auraient guère enflammé que la moustache de son forgeron de père. Ces flammes-là sont immenses, elles font deux ou trois fois la taille du dragon déjà gigantesque et elles viennent lécher le mur d’enceinte. Les soldats

Quel phénomène !Associe chaque état à la forme

qui correspond :

liquide • • glace solide • • vapeur gazeux • • eau

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l’épaisseur du mur d’une courtine extérieure. Dans l’escalier qui y mène, la petite équipée croise le che-valier Sylvestre.

— Ah ! Lucien, Enguerrand, vous tombez bien. Ne vous éloignez pas, je vais avoir besoin de vous. Figurez-vous qu’un énorme dragon attaque le châ-teau. Tout le monde doit être mobilisé pour le vaincre.

Lucien et Enguerrand se glacent d’effroi. Tous deux pensent la même chose : Sylvestre ne va tout de même pas leur demander de se battre contre Gédéon ? Ce serait terrible…

— Rejoignez Flavien et Tanguy qui sont déjà dans la cour, je redescends très vite. Juste le temps que je retrouve mon épée… Bon sang, quel bazar ! Aidez-moi !

À cet endroit ont été rassemblées plusieurs épées, et Sylvestre, dans son affolement, peine à identifier la sienne. Enguerrand et Lucien n’ont pas le choix : ils doivent obéir à leur chevalier. Hermine leur fait discrètement signe pour leur indiquer qu’elle monte

dissent, et l’un d’entre eux, dans la bousculade, bas-cule dans la cour du château.

— Ma jambe ! hurle-t-il en se tenant le genou.Mais personne ne lui prête plus d’attention qu’à la

femme qui s’était évanouie un peu plus tôt. Celle-ci, ayant retrouvé ses esprits, est d’ailleurs en train de ramasser ses pommes qui ont roulé un peu partout avant de courir se mettre à l’abri.

— Je sais ! dit soudain Hermine. Allons aux la-trines !

Enguerrand et Lucien la regardent, stupéfaits. Aux latrines ? Pourquoi Hermine décide-t-elle soudain d’aller aux toilettes ?

— J’ai la solution pour sauver Gédéon ! ajoute Hermine sans laisser le temps aux deux garçons hé-bétés de rétorquer quoi que ce soit. Suivez-moi ! or-donne-t-elle.

Les latrines sont situées dans l’une des cour-tines du château, ces murailles qui relient les tours entre elles. Celles vers lesquelles Hermine entraîne Lucien et Enguerrand ont été construites dans



aux latrines, et qu’ils devront la rejoindre dès que possible. La mort dans l’âme, Lucien et Enguerrand entreprennent d’aider Sylvestre à remettre la main sur l’épée avec laquelle il compte combattre leur dragonneau de garde préféré…

À première vue, les épées se ressemblent toutes… Pourtant, à y regarder de plus près, elles vont toutes

par paires, sauf celle de Sylvestre qui est unique. Identifie l’épée du chevalier avant de poursuivre

ta lecture et de découvrir le sort qui attend ce pauvre Gédéon…

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chapitrE 6

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de son cheval l’adversaire sans le blesser. Quant à embrocher un ennemi, à cheval sur Carpette lancé au galop… ce n’est encore jamais arrivé. Finalement, c’est peut-être aujourd’hui que Sylvestre va connaître son heure de gloire. Il s’imagine déjà face au dragon écumant et rugissant, visant si bien que l’animal rendrait l’âme dans un hurlement qu’on entendrait dans toute la forêt et jusqu’aux vallées environnantes. Partout, on acclamerait Sylvestre en héros, et pour le récompenser le roi ferait dorer le pommeau de son épée à l’or fin.

Et puis, on le prierait de s’économiser, de ne pas gaspiller ses talents en sottises, et on cesserait de lui demander de former des gamins incapables de monter à cheval du premier coup, comme ce fils de forgeron.

Mais rien de tout cela n’est possible tant que Sylvestre ne remet pas la main sur son épée. Il s’en sé-pare rarement, sauf… quand il va aux latrines. Quelle malchance d’avoir eu envie d’y aller au moment pré-cis où un dragon décidait d’attaquer le château !

CHAPITRE 6 Un rendez-vous aux latrines, un passage secret

et un dragon malheureux

Comme tout bon chevalier, Sylvestre se sépare rarement de son épée. C’est l’élément le plus important, et le plus symbolique, de son équipement. Jamais il n’oubliera la cérémonie d’adoubement au cours de laquelle il l’a reçue : le roi en personne la lui a remise. C’est ce jour-là qu’il a officiellement été fait chevalier.

L’épée est le plus souvent rangée dans son four-reau, l’étui fait pour qu’on l’y glisse. C’est l’arme pré-férée de Sylvestre ; il sait qu’elle l’accompagnera toute sa vie, et qu’il l’aura avec lui lorsqu’il mourra. L’épée est un signe de noblesse, elle symbolise la force, le courage et la loyauté du chevalier envers son roi.

Mais Sylvestre est plus familier de la lance. Il a déjà pris part à de nombreuses joutes, faisant chuter

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grande vitesse. Finalement, la solution est vite trouvée – merci Lucien.

— Moi aussi ! s’exclame Enguerrand.— Quoi, toi aussi ? demande Sylvestre, qui a remis

son épée en place.— Moi aussi, il faut que j’aille aux latrines. J’irai juste

après Lucien, et je vous rejoins ensuite, promet-il.— Ma parole, c’est une maladie ! enrage Sylvestre.Mais il n’ose rien dire de plus ; après tout, lui-

même revient des latrines… Il emprunte donc l’es-calier qui descend à la cour, tandis que Lucien et

— Ce n’est pas celle-ci ? demande Lucien, en pré-sentant au chevalier une épée au pommeau rutilant.

Sylvestre s’approche pour l’observer de plus près.— Si, c’est elle ! confirme-t-il tout en se promet-

tant de revoir un peu son jugement sur Lucien. Plus de temps à perdre à présent, le combat nous attend. Suivez-moi !

Lucien réfléchit rapidement. Comment faire pour rejoindre Hermine là-haut, où elle dit avoir la solu-tion pour sauver Gédéon, alors que Sylvestre lui or-donne de le suivre pour tuer le dragon ?

— Je ne peux pas ! s’exclame Lucien.— Et pourquoi ça ? demande Sylvestre, surpris.— Il faut… Il faut que j’aille aux latrines. C’est pres-

sant. Urgent, même. Je ne serai bon à rien tant que je n’y serai pas allé.

— Oui, bon, épargne-moi les détails, tu veux ! l’in-terrompt Sylvestre. File, et retrouve-nous en bas dès que tu as terminé. Enguerrand, allons-y.

Lucien est content de son improvisation, mais c’est Enguerrand qui maintenant fait tourner son cerveau à

Légendaires épéesAttribue chacune de ces épées célèbres

à son propriétaire :

Excalibur • • chevalier Roland Durandal • • Charlemagne Almace • • roi Arthur Joyeuse • • archevêque Turpin

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s’enfonce de quelques millimètres, puis se bloque.— Eh bien ? s’impatiente Enguerrand, prenant à

son tour appui contre le mur.Hermine garde le silence. Tout à coup, un méca-

nisme s’enclenche dans le mur et l’endroit sur lequel Enguerrand est appuyé se met à pivoter. Surpris, le garçon en perd l’équilibre et s’étale de tout son long sur le sol.

— Un passage secret ! s’exclame Lucien, ébahi.— Exactement, confirme Hermine. Je connais tous

ceux du château, c’est ma spécialité. Il y a ceux qui permettent de gagner du temps, des raccourcis en quelque sorte, et ceux qui permettent d’aller là où personne ne va. Celui-ci appartient à la deuxième catégorie.

— Et où mène-t-il ? interroge Lucien.— Au seul endroit où l’on va pouvoir communiquer

avec Gédéon sans risquer de recevoir nous aussi des projectiles, déclare Hermine. Allons-y, on a déjà assez perdu de temps comme ça avec cette histoire d’épée.

Lucien et Enguerrand lui emboîtent le pas. Derrière

Enguerrand gravissent les marches qui mènent aux latrines. Hermine les attend devant la porte.

— On doit vraiment aller là-dedans ? s’inquiète Enguerrand, qui déteste cette petite pièce froide dans laquelle il faut s’asseoir sur un trou percé au-dessus du vide pour faire ses besoins – sans parler de l’odeur Rien que d’y penser, il en a les narines qui piquent.

— Pas là-dedans, non, mais là.Hermine désigne le mur qui fait face à la porte des

latrines. Lucien ne comprend pas ce qu’elle veut dire. On ne peut pas aller dans le mur ; et, contrairement à la maison d’Enguerrand, il ne voit là la découpe d’au-cune porte.

Hermine s’agenouille et compte les pierres à partir du sol.

— Neuf, dix, onze !Elle s’arrête, gardant la main sur la onzième pierre.— Vous êtes prêts ? demande-t-elle aux deux garçons.Enguerrand et Lucien hochent la tête sans savoir

à quoi s’attendre. Hermine pose sa main bien à plat sur la pierre, puis pousse de tout son poids. La pierre

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tandis qu’Enguerrand, qui ferme la marche, reprend son souffle.

— Maintenant, voilà ! fait Hermine.À nouveau, elle compte les pierres, mais à l’hori-

zontale cette fois-ci, non plus à la verticale comme en face des latrines. À nouveau, l’une d’elles s’enfonce, puis un déclic retentit. Cette fois, c’est une trappe qui s’ouvre au-dessus des têtes des enfants, à deux mètres environ de la dernière marche de l’escalier.

— On y est presque ! commente Hermine.Lucien en reste bouche bée. Il est fasciné.— Mais comment va-t-on grimper là-haut ? ques-

tionne Enguerrand.D’un creux entre les pierres, Hermine tire une

corde ; celle-ci est suspendue à l’ouverture au-dessus de leurs têtes, et elle descend jusqu’au sol.

— Vous savez grimper à la corde ? demande-t-elle. Bien sûr, que vous savez, ajoute-t-elle sans attendre la réponse des concernés. Vous êtes de futurs chevaliers.

Et hop ! Hermine s’agrippe à la corde et, en un rien de temps, elle disparaît par la trappe.

la porte cachée se trouve un escalier à vis extrême-ment étroit. Dès que les trois camarades s’y sont en-gagés, le mur se referme derrière eux.

— Euh… On pourra ressortir, j’espère ? s’inquiète Enguerrand.

— Évidemment ! Quand on sait ouvrir un passage secret dans un sens, on sait aussi l’ouvrir dans l’autre, le rassure Hermine, qui se garde bien de révéler où elle a appuyé pour déclencher la fermeture de la porte.

Lucien et Enguerrand ont quelques difficultés avec l’escalier : les marches, irrégulières, sont parfois si étroites que leurs pieds n’ont pas la place de s’y poser en entier. À tout moment, ils redoutent de chuter. Ce qui n’aide pas, c’est l’absence de lumière. Depuis que la porte s’est refermée dans un claquement un peu inquiétant, l’escalier n’est plus éclairé que par une vague lueur provenant des hauteurs. Hermine, visi-blement habituée à emprunter ce passage, ne paraît pas gênée. Elle a pris de l’avance sur les garçons, et s’impatiente sur la dernière marche de l’escalier.

— Et maintenant ? demande Lucien en la rejoignant,

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est accroché ! Mais comment faire maintenant ? S’il décolle les mains, il est certain de retomber, et, s’il décolle les pieds, il ne va pas davantage grimper. En attendant, la corde se balance sous le poids du page, et Lucien se cogne contre le mur une première fois, puis une deuxième, puis… Au quatrième choc, n’en pouvant plus, il lâche tout.

— Tu parles d’un futur chevalier, bougonne-t-il en se retrouvant pour la seconde fois de suite assis par terre. Je n’y arriverai jamais…

Sans compter qu’il commence à avoir mal aux fesses !

— Alors, ça vient ?Le visage d’Hermine apparaît par la trappe.— Ne me dis pas que tu n’as jamais fait ça avant !

s’exclame-t-elle. Bon, voici ma technique : tu at-trapes la corde avec les deux mains au-dessus de ta tête, puis tu l’enroules autour d’une de tes jambes. Tu prends appui sur la marche en corde que tu viens de former pour placer tes bras encore plus haut, tu défais ta jambe et tu recommences plus haut sur la

— À toi, dit Enguerrand à Lucien.— Non, toi d’abord, rétorque celui-ci.— Comme tu voudras, fait Enguerrand dans un

haussement d’épaules.Et hop ! il s’agrippe à la corde lui aussi et, en un

rien de temps, il disparaît à son tour par la trappe. Lucien saisit la corde. Il place ses mains en hauteur, comme il a vu les deux autres le faire, et décolle les pieds du sol. Patatras ! Il retombe lourdement sur les fesses. Il attrape à nouveau la corde, en plaçant ses mains moins haut cette fois, et d’un bond soulève ses deux pieds, qu’il joint autour de la corde. Hourra, il

Aux chiottes !Dans cette liste, quels sont les noms ou

expressions qui ne désignent pas les toilettes ?

latrines W-C petit coin arrière-cuisine cabinets

commodités sanitaires cave trône panier percé

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— Qu’est-ce qu’on fait là ? demande Lucien après avoir fait un tour complet sur place.

Hermine est en train de faire de grands gestes.— Il faut que Gédéon nous rejoigne ! crie celle-ci.

Imitez-moi !Enguerrand et Lucien lèvent à leur tour les bras en

direction du dragon. Enfin, celui-ci les aperçoit. D’un coup d’ailes, il arrive à leur hauteur.

— Pose-toi ici ! lui dit Hermine. C’est le seul en-droit du château que les projectiles ne peuvent pas atteindre. Nous allons réfléchir ensemble et trouver une solution pour te tirer d’affaire.

Gédéon obéit.— Je ne… commence-t-il, en même temps qu’une

flamme sort de sa gueule.— Stop ! l’interrompt Hermine. Tu ne dois nous

parler qu’en regardant de l’autre côté, d’accord ? Sinon, tu vas nous carboniser.

— D’ailleurs, ça sent un peu le cochon grillé, vous ne trouvez pas ? intervient Lucien.

En effet, quelques longs cheveux roux de la fille du

corde. Et ainsi de suite ! C’est très simple.Lucien s’exécute. C’est vrai que ce n’est pas si com-

pliqué. Il n’avait absolument pas remarqué qu’Her-mine, puis Enguerrand, enroulaient la corde autour d’un de leurs pieds pour monter. Lucien parvient très vite à la trappe. Là, il se hisse à l’extérieur à la force des bras. Il n’est pas peu fier de son exploit ! Tout juste sent-il une légère chaleur au creux de ses mains : la corde a échauffé ses paumes.

Ni Hermine ni Enguerrand ne l’applaudissent. Lucien se résout donc à regarder autour de lui. Et voi-ci où il est arrivé : sur le toit du château. Du moins… quelque chose comme ça. Sur une surface plate en haut d’une tour, au moins. Il se trouve sur une dalle de pierres de forme rectangulaire qui domine le châ-teau et les environs. La vue est à couper le souffle. Même la forêt paraît riquiqui vue d’ici. Ce serait un point de vue très agréable si l’atmosphère n’était pas chargée des bruits des projectiles qui fusent et des rugissements du dragon qui se défend. Plus bas, le combat continue de faire rage.

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faisais que monter tranquillement la garde, comme d’habitude, je ne sais pas ce qui s’est passé, je me suis mis à grandir, grandir, grandir, comme Alice avec ses biscuits… Sauf que moi je n’ai rien mangé, rien mangé du tout…

— Qui est Alice ? intervient Lucien.— L’héroïne d’un livre qui n’existe pas encore, san-

glote Gédéon, à qui les événements ne font pas ou-blier ses bonnes habitudes. Enfin bref, comme je ne sais pas ce qui s’est passé, je ne vois pas comment arranger les choses…

— Nous on sait ce qui s’est passé ! s’exclame Hermine.Enguerrand lui fait les gros yeux. — Mais on ne le dit pas ! ajoute-t-il aussitôt.Il murmure à l’intention d’Hermine :— On ne peut rien dire devant Gédéon ! Hermine, surprise, lui adresse un regard inter-

rogateur. Lucien ne voit pas non plus où le fils de l’herboriste-magicien veut en venir.

— C’est à cause de Sylvestre… explique Enguerrand. Si Gédéon lui répète, nous sommes fichus…

roi crépitent encore sur le dessus de son crâne. Lucien coupe court à l’incendie capillaire en tapotant sur la tête d’Hermine.

— Merci, fait celle-ci, à peine reconnaissante.Lucien remarque alors que le dragon s’est posé au

milieu d’une flaque. Étonnant ! Il n’a pas plu dans la région depuis plusieurs jours…

— Oh, mais tu pleures ? réalise-t-il tout à coup.Deux larmes coulent sur les joues de l’animal. Des

larmes gigantesques, comme tout le reste.— Ils veulent me tuer, rugit doucement Gédéon,

cette fois en direction de la forêt. Alors que je ne

Hisse et hausseQue hausse-t-on ? Que hisse-t-on ?

• les épaules hausser • • les voiles • les sourcils hisser • • le ton • le drapeau



Qu’est-ce que Sylvestre vient faire là-dedans ? Retrouve les mots de la liste dans ces mots masqués. Les cinq lettres restantes te donneront le nom de ce qui pose problème à Sylvestre. Ensuite, poursuis vite ta lecture…

Raye dans le tableau les mots figurant sur la liste. Ceux-ci peuvent apparaître à l’horizontale, à la

verticale ou en diagonale, et une même lettre peut être utilisée plusieurs fois.

AILEARMEARTBAI

BOUCLIERCHÂTEAU CHEVAL

DRAGONNEAU ÉCRU

ENGUERRANDÉPÉE

FORGEGARDE

GÉDÉONHEAUMEHERBE

HERMINELUCIEN

LUNEMIELMUROURS

PONT LEVISROI

SOLDATTOUR

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chapitrE 7

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CHAPITRE 7 Un passage pas si secret, un chevalier vantard

et une cascade surprenante

— Sylvestre est contre la magie, explique Enguerrand. Il a dit que, si on y croyait, on ne pouvait pas devenir un bon chevalier.

C’est vrai. Lucien se souvient des paroles pronon-cées par Sylvestre au tout début de leur apprentissage, lorsque la bande se trouvait encore dans la cour du château.

— Alors, si on apprend au château que c’est moi qui ai transformé Gédéon, je pourrai dire adieu à ma formation, c’est certain. Je préfère que ça reste entre nous, c’est d’accord ?

Lucien et Hermine hochent la tête.— Il faudra tout de même bien qu’on lui fasse re-

trouver sa taille normale… fait remarquer Hermine.

Il existe un antidote pour chaque formule, n’est-ce pas ? ajoute-t-elle.

Enguerrand ne répond rien. Gédéon a cessé de san-gloter et cherche à écouter leur conversation. Les trois enfants se taisent. À ce moment-là, un projectile en-flammé passe au-dessus de leur tête, manquant d’at-teindre Gédéon.

— Je croyais que cet endroit était inaccessible aux projectiles ? s’étonne Lucien, paniqué.

Il cherche vainement du regard un endroit où se réfugier.

— Normalement il l’est ! dit Hermine. Il faut mettre Gédéon à l’abri.

Elle réfléchit rapidement avant de se tourner vers le dragon rouge et blanc.

— Gédéon, dis-moi, tu vois où se trouve la cascade ?— Celle où on a emmené boire les chevaux ? de-

mande Lucien.— Oui, celle-ci. Alors, tu sais où elle est ?Le dragon fait oui de la tête. Ses yeux sont à nou-

veau en train de se remplir de larmes. Le sol de la

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dalle est trempé, et de l’eau goutte lentement par la trappe restée entrouverte.

— Halte-là ! crie soudain une voix.Horreur ! Par la trappe apparaît le visage, rouge de

colère et d’efforts, de… Sylvestre !— Je vais l’avoir, ce maudit dragon, s’écrie-t-il en

se hissant tout entier sur la dalle.Le voici debout. D’un geste assuré, il tire son épée

de son fourreau, prêt à combattre. Le dragon s’est redressé. Les enfants font trois pas en arrière.

— File, Gédéon ! fait Lucien en tentant de murmurer le plus fort possible pour que Sylvestre ne l’entende pas mais que l'intéressé reçoive bien son message.

Message reçu ! Le dragon déploie ses ailes, man-quant faire valser Hermine au loin dans sa précipita-tion, et le voici qui s’élève au-dessus de la dalle.

— Rhaaa ! voilà qu’il m’échappe, hurle Sylvestre, en colère. Il part en direction de la forêt ! Je dois le rattraper.

Et il se précipite vers la trappe. Sa course est in-terrompue par une dernière grosse larme lâchée par Gédéon avant qu’il ne s’envole pour de bon. Surpris,

Sylvestre lève les yeux au ciel, mais il ne fait pas le rapprochement entre cette énorme quantité d’eau et l’animal ailé. Du coup, il ne comprend pas comment de la pluie peut tomber par un jour aussi ensoleillé.

— Me voilà trempé, j’ai l’air ridicule, grogne-t-il pour lui-même. Quant à vous, vous ne m’avez pas obéi. Je m’occuperai de votre cas quand j’aurai réglé le sort de ce dragon de malheur, ajoute-t-il en s’adres-sant cette fois à Enguerrand et Lucien, avant de dis-paraître par l’ouverture.

— Justement, on a essayé d’attraper Gédéon ! piaille Enguerrand pour sa défense.

Mais Sylvestre est déjà trop loin pour l’entendre. Et heureusement ! Enguerrand est tellement affolé qu’il n’a pas réalisé qu’il prononçait le prénom du dragonneau…

— Nous devons aller à la cascade, déclare Hermine. Et vite ! Il ne faut pas que Gédéon recroise Sylvestre, ou un autre chevalier armé… Redescendons !

Elle s’engouffre dans la trappe, suivie par ses deux camarades.

— Que crois-tu qu’on risque ? s’inquiète Enguerrand

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tandis qu’il s’accroche à la corde et saute souplement sur la plus haute marche de l’étroit escalier.

— Oh, pas grand-chose, assure Hermine. Vous ris-quez d’être renvoyés, rien de plus.

— D’être renvoyés ? répète Enguerrand. Mais ce se-rait catastrophique ! L’apprentissage vient seulement de commencer !

Lucien ne participe pas à la conversation, trop concentré qu’il est à tenir la corde. Il desserre un peu les mains, mais il ne bouge pas d’un millimètre. Comment ont fait les deux autres pour descendre aussi rapidement ? Ils sont déjà bien plus bas dans l’escalier, il ne peut plus le leur demander. Il desserre les mains davantage, et le voici qui dégringole. Il se retrouve une nouvelle fois assis par terre. Il a à nouveau un peu mal aux fesses, mais au moins il a réussi cette épreuve. Il espère ne plus avoir à grimper à la corde de sitôt.

Il rattrape Hermine et Enguerrand, qui l’attendent en bas de l’escalier, devant la porte. Quelque chose préoccupe Lucien.

— Comment Sylvestre a-t-il fait pour arriver jusqu’à nous, là-haut ? Nous avions emprunté un passage secret, pourtant…

— Oui. Mais je ne suis pas la seule à connaître l’exis-tence des passages secrets, hélas, regrette la princesse.

D’ailleurs, Sylvestre n’a même pas pris la peine de re-fermer cette porte ! Le passage a pu être découvert par le premier imbécile se rendant aux latrines !

D’un mouvement un peu brusque, la fille du roi appuie sur une pierre précise afin de déclencher le mécanisme dans l’autre sens. La porte se fond à

À la cordeDes cordes sont composées de plusieurs

morceaux mis bout à bout. Laquelle est la plus longue ?

A : 30 cm + 1 m + 53 cm B : 98 cm + 89 cm + 9 cm C : 2 m + 12 cm

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nouveau dans le mur ; impossible désormais de deviner ce qui se cache derrière.

— Mais ! réalise Lucien. On a laissé la trappe ou-verte, là-haut ; et la corde pendouille !

— Ah oui, flûte ! râle Hermine. Pas le temps de re-monter, je m’occuperai de ça plus tard.

Et, remontant les pans de sa robe pour ne pas ris-quer de chuter, elle dévale les escaliers qui conduisent à la cour du château.

— Pas étonnant que les passages secrets soient connus si personne ne prend garde à refermer les portes et les trappes ! marmonne Lucien en accélé-rant le rythme pour ne pas se laisser distancer.

Dans la cour, l’activité normale commence à re-prendre. Voyant arriver son fils, Bertrand, le forgeron, qui était sorti de sa forge, s’approche de lui d’un pas vif.

— Vous avez bien fait de rester à l’intérieur, dit-il, encore affolé. Un dragon a attaqué le château. Mais grâce au chevalier Sylvestre, il est reparti.

— « Grâce au chevalier Sylvestre » ? répètent Lucien, Hermine et Enguerrand d’une même voix.

Décidément, le chevalier sait arranger les histoires à sa manière…

— Oui, raconte le père de Lucien. Il l’a chassé, et le dragon a pris la direction de la forêt. Sylvestre y est parti aussi pour lui régler définitivement son compte. Ah, quel valeureux chevalier, cet homme-là ! Vous avez de la chance de l’avoir comme formateur, c’est moi qui vous le dis !

— Mouais…, commente Hermine.— En tout cas, riche première journée pour toi, pas

vrai, fiston ? ajoute encore Bertrand en ébouriffant les cheveux de son fils. Allez, je retourne à la forge, le travail m’appelle.

Descendus des tours et des murs d’enceinte, les soldats du roi discutent avec les serviteurs qui constatent les dégâts : des pierres sont tombées ici ou là, des morceaux de palissade en bois jonchent le sol, sans compter les quelques blessés qu’il faut prendre en charge. Cependant, personne n’est par-faitement tranquille. Sylvestre a beau avoir chassé le dragon, selon ses dires, rien n’affirme que l’animal et

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les dangereuses flammes qu’il produit ont été éloi-gnés durablement du château. Après tout, le dragon peut décider de revenir quand ça lui chante.

L’animation permet aux enfants de traverser la cour sans qu’on ne leur pose de questions. Ils atteignent le pont-levis. Rien n’indique la direction qu’a prise le chevalier vantard. Soudain, Lucien aperçoit une forme à l’entrée de la forêt. Il reconnaît la tunique de Flavien, qui fait la formation avec Enguerrand et lui.

— Pssstt ! Sais-tu par où est parti Sylvestre ? lui demande-t-il de loin.

— Par là ! affirme Flavien en désignant un point de la forêt. Je vais le retrouver, Tanguy est avec lui. Vous venez ?

— Oui, oui, on arrive ! ment Lucien.Puis il court pour rattraper Hermine et Enguerrand,

qui ont déjà avancé sur le chemin qui conduit à la cascade.

— C’est bon, Sylvestre ne devrait pas nous embêter, il cherche Gédéon de l’autre côté ! annonce-t-il une fois qu’il est arrivé à leur niveau.

Ils atteignent rapidement la cascade que Sylvestre a fait découvrir à Lucien, Enguerrand et leurs camarades.

— Je croyais que cet endroit n’était connu que des chevaliers… fait remarquer Enguerrand. Enfin, c’est ce que Sylvestre nous a dit.

— C’est exact, confirme Hermine. Mais je suis la fille du roi, et je connais tout ce que connaissent les chevaliers.

— Comment ça se fait ? interroge Lucien tandis qu’ils foulent l’herbe épaisse.

— Je me tiens prête pour le jour où les dames pour-ront faire la formation de chevalier. Ce jour-là, j’aurai de l’avance, et je deviendrai la première chevalière ! annonce fièrement Hermine. L’assurance de la prin-cesse laisse les garçons sans voix.

Lucien regarde autour de lui. Ne manque-t-il pas quelque chose au décor ? La raison même pour la-quelle ils sont venus jusqu’ici ?

— Où est Gédéon ? demande-t-il à ses camarades.Hermine et Enguerrand regardent autour d’eux.

De toute évidence, l’énorme dragon n’est pas là.

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— À moins qu’il ne soit redevenu petit ? hasarde Lucien. Qu’il ait retrouvé sa taille normale ?

— Est-ce que l’effet de la poudre a une durée limi-tée ? demande la fille du roi en se tournant vers le fils du magicien.

— Euh… non, je ne crois pas… bafouille ce dernier.— Ah, Gédéon, où es-tu ? se lamente Hermine

d’une voix forte.

— Ici.— Hein ?Les trois amis se regardent. Qui leur fait une

blague ? En tout cas, elle est de mauvais goût.— Je suis là, entend-on encore.Pas de doute, c’est bien Gédéon. Les enfants ont

reconnu ses intonations. Mais d’où vient la voix ? Impossible d’en identifier la provenance. Et les trois camarades ont beau se tordre le cou, ils n’aperçoivent pas le moindre bout d’aile rouge et blanche.

— Mais où ça, « là » ? demande Lucien. On ne te voit pas !

— Je suis dans la cascade.— Dans la cascade ? répètent-ils tous les trois, in-

crédules. Mais comment ça ? ajoute Lucien.— Je suis derrière le rideau d’eau, explique le dragon.C’est vrai que, à y prêter davantage attention,

Lucien réalise que la voix a une tonalité inhabituelle ; elle résonne étrangement, comme si Gédéon parlait depuis l’intérieur d’un tonneau ou d’une église.

— Mais comment as-tu fait pour te retrouver là ?

Étonnante chevalièreLe mot chevalière n'est pas l'équivalent féminin

de chevalier mais figure pourtant bien dans le dictionnaire ! De quoi s’agit-il ?

• de l’épouse du chevalier

• d’une bague sur laquelle sont gravées des armoiries

• d’une tunique dont on habille les chevaux pour certaines parades

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interroge Hermine.— Je suis allé dans l’eau, dit Gédéon.— Et il y a assez de place pour toi de l’autre côté ?

Tu n’es pas à l’étroit ? questionne encore Lucien.La cascade est certes haute, mais Gédéon est tout

de même énorme.— Oh oui, il y a bien plus de place qu’il n’en faut,

affirme Gédéon.Un grand espace à l’abri des regards, derrière le

rideau d’eau ! Les enfants sont stupéfaits. Lucien observe la princesse du coin de l’œil. Voilà quelque chose qu’Hermine ne savait pas. Comme quoi, la fille du roi a beau connaître tout ce que connaissent les chevaliers, il existe des choses qu’elle ignore.

— Rejoignez-moi ! propose alors le dragon.— En passant dans l’eau ? s’écrie Enguerrand.— Eh bien, oui ! Vous n’allez pas fondre, vous n’êtes

pas en barbe à papa ! claironne Gédéon, toujours in-visible.

— En barbapa-quoi ? demande Enguerrand.— Non, rien, c’est une sucrerie qui n’existe pas encore.

Quelle que soit la situation, Gédéon ne perd pas son goût des bons mots. Mais le moment n’est vrai-ment pas idéal pour plaisanter. Sylvestre le cherche dans la forêt, alors il peut débarquer n’importe quand.

— Mais je ne sais pas nager… avoue Enguerrand.Pour atteindre le rideau derrière lequel se trouve

Gédéon, il faut traverser toute la surface du bassin, plus long et large que la chambre du roi, et l’eau y est assez profonde, pas besoin d’être un spécialiste pour s’en rendre compte.

— Moi non plus, déclare Lucien.Les deux garçons se tournent alors vers Hermine.

Peut-être qu’elle, qui est si particulière, si différente, si talentueuse, si expérimentée…

— Et moi non plus, soupire celle-ci en secouant la tête.

— Mais regardez ! s’écrie soudain Lucien.À force d’observer la chute d’eau, il a fini par re-

marquer quelque chose d’étonnant au niveau des pierres qui affleurent à la surface : en passant de l’une à l’autre, on peut atteindre l’extrémité du ri-

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deau d’eau sans se tremper. Du moins si l’on prend suffisamment d’élan.

— Je crois que j’ai la solution ! s’exclame-t-il en désignant de l’index ce chemin de roches.

À cet instant, il y a du mouvement du côté de la forêt. Sylvestre apparaît, sur le dos de son cheval, son épée tranchante dressée devant lui comme s’il s’apprêtait à affronter l’ennemi.

— Alors, vous venez ? demande Gédéon.— Tiens, vous voilà ! s’exclame Sylvestre. Vous

semblez continuer d’ignorer que le premier devoir d’un page, c’est d’obéir à son chevalier… Tant pis pour vous ! Mais à qui parlez-vous ? Qui venons-nous d’entendre ?

— C’est le moment d’y aller ! annonce Hermine à Lucien et à Enguerrand. Allez, on file.

Et sans plus attendre, elle sautille d’un rocher à l’autre comme l’a conseillé Lucien, et elle disparaît derrière le rideau d’eau.

Enguerrand l’imite. Hop, hop, hop ! Le chevalier cligne des yeux pour être certain qu’il ne rêve pas.

Non contente de produire des arcs-en-ciel, la cas-cade avale les enfants ! Entre ça et ce dragon plus gros qu’il n’en a jamais vu, Sylvestre commence à en avoir assez de cette journée. Depuis qu’il a entamé la formation de ces petits chevaliers, tout va de travers.

Lucien s’élance à son tour sur les roches luisantes. Mais, si elles sont luisantes, c’est qu’elles sont glis-santes, et avec la maladresse de Lucien… Plouf ! C’est la chute. Agrippé à une grosse pierre, Lucien jette un œil par-dessus son épaule. Aura-t-il le temps de se remettre sur pied avant d’être rattrapé par Sylvestre, qui s’avance déjà vers lui ?



Pour savoir si Lucien va pouvoir échapper à Sylvestre, retrouve l’ombre du chevalier parmi celles-ci.

Ensuite, continue ta lecture…

125

chapitrE 8

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CHAPITRE 8 Un chevalier mouillé, une épée noyée et une formule d’antidote à déchiffrer

Lucien est trempé, ses mouvements sont moins aisés. Mais la peur donne des ailes, et il parvient à se hisser sur le rocher à la force des bras. Sylvestre, lui, a choisi de passer en plein milieu. Il a ordonné à Carpette de descendre dans l’eau, et il avance dans le bassin que la cascade a formé au fil des années. La queue du cheval est déjà dans l’eau. Et l’eau doit être froide, car Carpette progresse lentement. Le cheval hésite. Lucien en profite pour continuer. Plus que trois rochers… Hop, hop, hop ! Ça y est, il est de l’autre côté ! Et ce qu’il découvre est incroyable : il se trouve à l’intérieur d’une grande grotte, d’une hauteur surprenante, comme si on avait creusé le plus possible au cœur de la roche afin d’obtenir un maximum

d’espace où se réfugier une fois le rideau d’eau franchi. Enguerrand, Hermine et Gédéon regardent Lucien,

étonnés.— Comment peux-tu être aussi mouillé ? demande

la fille du roi. En passant sous le rideau d’eau, je n’ai reçu que quelques gouttes.

Et c’est vrai que ni Enguerrand ni elle ne semblent avoir été en contact avec de l’eau.

Lucien hausse les épaules. Pour une fois, ils se pas-seront d’explication.

— Sylvestre arrive ! se contente-t-il d’annoncer.Tous tentent de regarder au travers du rideau d’eau.

C’est étonnant. Lorsqu’on est à l’extérieur de la cascade, on ne distingue rien du tout, mais, lorsqu’on est passé de l’autre côté, on voit le bassin et la lisière de la forêt comme au travers d’une plaque de verre. Cette cascade est décidément surprenante… Mais ce qu’ils voient ne les rassure guère : Sylvestre est désormais au milieu du bassin. Carpette a de l’eau jusqu’à la croupe. « Pas de chevalier sans cheval », a dit le formateur d’Enguerrand et de Lucien. Il semblerait que même

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Carpette ait retenu la leçon !— Il va venir ici… redoute Lucien, qui imagine déjà

la pire des punitions : son renvoi du château, et la fin de sa formation de chevalier le jour même où celle-ci a commencé.

Sa voix résonne d’une façon métallique, comme s’il se trouvait à l’intérieur d’une grosse cloche.

— Ça m’étonnerait, affirme Hermine. Son cheval semble vouloir faire demi-tour.

Elle dit vrai. Carpette, qui a désormais de l’eau jusqu’au garrot, a décidé de rebrousser chemin. Le bas-sin est trop profond pour l’animal. Quant à Sylvestre, il a beau pester, il n’a pas d’autre choix que de rester sur sa monture. Tout chevalier qu’il est, lui non plus ne sait pas nager.

— Ce qu’il lui faudrait, c’est un sous-marin ! com-mente Gédéon, retrouvant le sourire en crachant une belle flamme que le rideau d’eau éteint instantanément.

— Qu’est-ce que c’est, un sous-marin ? répète Lucien.— Une invention aquatique qui n’existe pas encore,

répond le dragon.

Lucien ne relève pas. Il a autre chose à faire que penser à ce qui n’existe pas encore ; c’est presque par politesse qu’il a posé la question. Quant à Gédéon, il ne semble pas réaliser que, si ça continue comme ça, c’est lui qui n’existera bientôt plus.

Pendant ce temps, à l’extérieur, Carpette atteint l’herbe verte et laisse sa robe s’égoutter tranquillement.

— Ouf, on est sauvés ! s’exclame Enguerrand.— Oui, enfin pour le moment, tempère Lucien. Il

faudra bien sortir d’ici à un moment ou à un autre. Mais… qu’est-ce qu’il fabrique ?

Tandis que Carpette s’ébroue toujours sur l’herbe, Sylvestre est pris de panique.

— Mon épée, mon épée ! s’écrie-t-il.Il fait trois tours sur lui-même avant de se rendre à

l’évidence : il ne l’a plus.— Malheur, elle est tombée dans l’eau… réalise-t-il.

Viens, ma Carpette, il faut y retourner.Disant cela, il pousse le cheval, ses deux mains sur

le flanc de la bête, pour que Carpette replonge dans le bassin. Mais l’animal ne l’entend pas de cette oreille.

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Plantant fermement ses jambes dans l’herbe, il indique clairement sa volonté de ne pas bouger d’un sabot. Sylvestre insiste, mais rien à faire : Carpette ne consent à bouger que quand Sylvestre se décide à reprendre la direction du château. Sans son épée.

— Vous avez vu ? fait observer Enguerrand. Sylvestre a noyé son épée !

— Enguerrand, ce n’est pas le plus important, gronde Hermine. Il faut que tu trouves l’antidote à ta poudre afin que Gédéon retrouve une apparence normale.

— L’antidote ? Mais je ne suis pas au courant…— Pas possible ! râle Hermine. Et tu veux devenir

magicien ?

Enguerrand est perdu.— Bon, reprend Hermine, puisque c’est à moi de

tout faire, allons-y : où est le grimoire ? J’imagine que les formules des antidotes s’y trouvent.

— Je ne sais pas, avoue Enguerrand.— Tu ne sais pas quoi ? s’agace Hermine. Où est

le grimoire ? Ou si les formules des antidotes s’y trouvent ?

— Euh… les deux, répond Enguerrand. Je n’ai jamais eu besoin d’antidote, et je ne sais pas ce que j’ai fait du grimoire.

— Quand et où t’en es-tu servi pour la dernière fois ? insiste Hermine.

Enguerrand réfléchit rapidement.— Eh bien, tout à l’heure, lorsque j’ai prononcé la

formule après avoir envoyé la poudre sur Gédéon, je l’avais, c’est sûr. Puis je l’ai posé à côté de la herse car j’ai été distrait par quelque chose, mais je ne sais plus quoi…

— Cette poule bien plus grosse que les autres ? suggère Lucien.

Un plat de pattesDans cette liste, trouve les animaux

qui sont dotés de sabots :

cheval vache bison chevreuil

rhinocéros cerf girafe élan

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— C’est ça ! s’exclame Enguerrand. Le grimoire doit toujours être là-bas. J’y cours !

Et, oubliant totalement où il est, il fonce sur le ri-deau d’eau et plonge dans la cascade, tandis que ré-sonne un « plouf » retentissant.

Gédéon éclate de rire. Après avoir bu la tasse, Enguerrand s’accroche au plus proche rocher et sou-rit timidement :

— Oups ! fait-il…— Je peux t’emmener jusqu’au château, propose

alors le dragon en tournant la tête vers la paroi de la grotte pour ne pas risquer de brûler les enfants. Vous emmener tous les trois, même, si vous voulez.

La paroi de la grotte se colore de marques charbon-neuses. Hermine regarde Gédéon en plissant le front:

— Tu veux risquer de te faire tuer ? Te jeter à nou-veau dans la gueule du loup ? Tu as déjà oublié tes larmes de tout à l’heure ?

À ces mots, Gédéon sent la tristesse monter à nouveau brusquement en lui. C’est vrai qu’on ne veut plus de lui au château désormais. Du moins,

tant qu’il fait cette taille. Le dragon n’a plus du tout envie de rire.

— C’est bon, je m’occupe du grimoire, intervient Enguerrand. Je fais au plus vite.

Et il disparaît une nouvelle fois derrière le rideau d’eau, en prenant soin cette fois-ci de passer sur le côté, là où les rochers peuvent le mener sans en-combre jusqu’à l’herbe verte.

— Dis, Gédéon… commence Lucien après un bref moment pendant lequel on n’entend plus résonner que l’eau tombant de la pleine hauteur de la cascade.

— Oui ?— Est-ce que tu pourrais plonger dans le bassin

et retrouver l’épée de Sylvestre, pendant ce temps ? demande-t-il.

Gédéon interroge Hermine du regard.— C’est bon, il n’y a pas de danger, déclare celle-ci

en haussant les épaules.Elle ne voit pas ce que Lucien veut faire avec l’épée

de Sylvestre, lui qui a déjà eu du mal à porter l’écu du chevalier au démarrage de sa formation, mais ils

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n’ont pas grand-chose à faire en attendant le retour d’Enguerrand.

Gédéon est si gros qu’il n’a pas besoin de mettre la tête sous l’eau pour atteindre l’épée. Dès que sa patte a frôlé le morceau de métal, il n’a qu’à se pencher pour la ramasser.

De derrière le rideau d’eau, Lucien le regarde faire. Il en a un peu marre de tout ça. Il aimerait sortir de cette grotte dont l’écho incessant lui fait mal à la tête. Et c’est pire encore quand Gédéon fait irruption, secouant ses ailes trempées pour les sécher plus rapidement et lâchant l’épée de Sylvestre sur le sol dans un fracas assourdissant.

À l’extérieur, Enguerrand est déjà de retour, le gri-moire sous le bras.

— Je ne vais pas retourner derrière le rideau d’eau, annonce-t-il en parlant fort pour se faire entendre, le grimoire est ancien, il ne doit pas être mouillé.

Lucien trouve son camarade soudain bien précau-tionneux pour quelqu’un qui a laissé traîner un long moment son grimoire à même le sol, mais il saute

sur l’occasion.— On arrive ! — Et moi ? s’inquiète Gédéon.Hermine réfléchit, puis déclare :— Toi aussi. Je ne crois pas que Sylvestre ait l’in-

tention de revenir tout de suite, et il n’y a personne d’autre dans les parages. Et il faudra bien que tu prennes l’antidote.

Gédéon considère Hermine et Lucien.— Vous vous accrochez ?— Hein ? fait Lucien.— Accrochez-vous chacun à une aile ! Nous serons

de l’autre côté en un rien de temps.Lucien regarde la fille du roi. Un sourire gour-

mand se forme sur son visage tandis que ses yeux se mettent à briller.

— D’accord ! s’exclame-t-elle.Lucien hoche la tête à son tour. Si Hermine dit oui,

c’est qu’il n’y a pas de risque. Il prend soin de récupé-rer au préalable l’épée de Sylvestre, chancelle un peu sous son poids – il l’a saisie d’une seule main et il ne

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l’imaginait pas si lourde – et s’accroche à l’aile droite de Gédéon, puisque Hermine a déjà choisi la gauche.

— Prêts ? demande le dragon.— Prêts ! répondent les deux enfants en chœur.— Alors c’est parti !Gédéon s’élance, bat des ailes une première fois,

franchit le rideau d’eau, bat des ailes une seconde

fois au-dessus du bassin de la cascade, et se pose sur l’herbe verte, à côté d’Enguerrand et de son grimoire. Lucien n’a même pas eu le temps d’être mouillé.

Hermine saute à terre.— Alors, cet antidote ? demande-t-elle aussitôt à

Enguerrand.Celui-ci est embarrassé.— À vrai dire, bafouille-t-il, je n’ai jamais eu à en

préparer… Mais je crois que tous les antidotes figurent à la fin du grimoire…

— Eh bien, regarde donc ! s’impatiente Hermine.Pendant ce temps, Lucien saute à son tour sur l’herbe

mais, déséquilibré par le poids de l’épée de Sylvestre, il s’étale sur le sol, près de la patte de Gédéon.

Les trois camarades tournent les pages du grimoire jusqu’à la fin du livre. En effet, le dernier chapitre an-nonce : Antidotes. C’est un chapitre très court, com-posé d’une seule page, et cette page est… incompré-hensible !

— C’est du chinois ! s’esclaffe le dragon, jetant un œil par-dessus l’épaule d’Enguerrand.

Masculin ou féminin ?Les enfants cherchent l’antidote… Mais quel est le genre de ce mot ?

Associe chaque terme à ce qui correspond :

antidote • armoire • • masculin automate • autoroute • • féminin après-midi • oasis • • masculin et féminin manteau • météorite • réglisse •

chapitrE 8

136

LUCIEN ET HERMINE, APPRENTIS CHEVALIERSe x e m p l a i r e p ro m ot i o n n e l

— Attention ! s’écrie Hermine.Une flamme a atteint le coin du grimoire, noir-

cissant le bord de la reliure. Enguerrand fait les gros yeux au dragon.

— Il est vraiment temps que tu retrouves ta taille normale et que tu arrêtes de brûler tout ce qui est à ta portée, soupire la petite princesse.

— Ça ne va pas être facile si on n’arrive même pas à déchiffrer la formule pour obtenir l’antidote… fait remarquer Lucien.

Aide Lucien, Hermine et Enguerrand à déchiffrer la formule qui permettra à Gédéon de reprendre une apparence normale, avant de continuer ta lecture…

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ÉNIGME JEUX

CHAPITRE 9 Un miroir magique, un dragonneau plus si gros

et un château inaccessible

Ça y est ! Le grimoire a livré ses secrets. La libéra-tion de Gédéon est proche.

— C’est facile, finalement, commente Lucien, qui s’attendait à ce qu’il faille préparer une obscure potion à base de bave d’escargot bouillie, d’oignons frits de toutes les couleurs ou de brisures d’ailes de papillon.

— Oui, enfin il faut avoir le miroir magique en question, fait observer Hermine. Tu sais ce que c’est ? demande-t-elle à Enguerrand.

Enguerrand se gratte le sommet de la tête.— Chez nous il y a bien un miroir, mais je ne sais

pas s’il est magique, finit-il par dire.— Eh bien, va le chercher, ordonne Hermine, qui

ne veut plus perdre une seule minute.

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— C’est que… il est accroché au mur, et bien ac-croché. On ne peut pas l’enlever, explique le fils du magicien.

— À l’intérieur de la maison ? se fait préciser Lucien.— Oui, confirme Enguerrand.— Alors c’est à nous d’y aller, déclare-t-il.

Enguerrand, peux-tu nous guider par un chemin sur lequel on ne risque pas de croiser qui que ce soit ?

— Oui, d’accord, fait Enguerrand.— Moi, je connais le meilleur des chemins pour ne

croiser personne, déclare Gédéon.Trois visages surpris se tournent vers lui.— Tu sais où est ma maison ? s’étonne Enguerrand.— Tu peux nous mener sur ce chemin ? demande

Hermine.— S’agit-il d’un véritable chemin ? interroge Lucien,

qui croit avoir deviné ce que Gédéon a en tête.— Non, pas vraiment ! avoue le dragon, qui ne

peut éviter de noircir les troncs des arbres les plus proches. Je vous propose de passer par les airs !

— Je le savais ! s’exclame Lucien.

Tenant toujours l’épée de Sylvestre, il s’accroche à l’aile du dragon. Hermine en fait de même de l’autre côté. Quant à Enguerrand, après avoir ramassé le gri-moire, il grimpe sur le dos de Gédéon et s’agrippe à son cou. C’est parti !

Ils sont en un rien de temps devant la maison d’En-guerrand. Gédéon se pose en douceur dans la petite clairière qui jouxte la bâtisse. La porte est ouverte.

— Prends garde à ne rien faire brûler, surtout ! avertit Enguerrand.

— Je vais faire attention, promet Gédéon.La conversation a attiré l’attention des parents

d’Enguerrand, attablés en cuisine où ils dégustent une tarte à la crème, au lard et aux oignons verts et bleus. Ça sent diablement bon ! Ils avalent la dernière bouchée avant de sortir voir avec qui parle leur fils, dont ils ont reconnu la voix.

— Aaaah !La mère pousse un cri de stupeur en découvrant

Gédéon. Elle est habituée aux bestioles en tous genres, son mari n’étant pas le dernier pour faire des

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expérimentations, mais elle n’a jamais vu de dragon aussi gros. Quant au père, il ne s’étonne même pas. Il a compris sur-le-champ que son fils avait eu un petit souci avec une formule.

— Père, commence Enguerrand, nous venons pour redonner à ce dragon sa taille normale. D’ordinaire, c’est un dragonneau minuscule, qui paraît tout à fait inoffensif, presque ridicule et…

Enguerrand s’interrompt. Gédéon a ouvert grand les narines. C’est vrai que le dragon est des plus sus-ceptibles.

— … et c’est le dragonneau de garde du château ! poursuit Lucien, volant une nouvelle fois au secours de son camarade.

— Que lui as-tu donné pour qu’il devienne si gros ? demande le magicien. De l’huile de mammouth ?

— Non, de la poudre de géant. Mais par erreur ! se justifie Enguerrand. Je voulais fabriquer de la poudre arc-en-ciel mais les pages du grimoire étaient collées, et sans le faire exprès je me suis trompé de formule…

Pour illustrer ses propos, il tend le grimoire à son père.

— Bon, je retourne à mon tricot de toiles d'araignée, intervient la mère d’Enguerrand, qui ne s’intéresse guère aux histoires de magie de son mari et de son fils.

— Mais nous avons réussi à déchiffrer la for-mule de l’antidote ! annonce fièrement Hermine, qui s’impatiente. Il nous faut juste le miroir ma-gique. Enguerrand nous a dit qu’il était à l’intérieur. Pourriez-vous nous le décrocher ?

Et la fille du roi fait son plus beau sourire, celui qu’elle utilise quand elle veut être sûre qu’on ne lui dira pas non.

Pluriels composésSais-tu écrire correctement ces mots au pluriel ?

Un arc-en-ciel > des

Un chef-d’œuvre > des

Un rouge-gorge > des

Un timbre-poste > des

Un cerf-volant > des

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— Impossible ! Le miroir n’est pas accroché au mur… C’est le mur qui a été construit autour de ce miroir !

Du doigt, le père d’Enguerrand désigne une forme ovale, en haut du mur de la cuisine. Lucien et Hermine passent la tête par la porte pour constater ses dires.

— Mais alors comment allons-nous faire ? panique Hermine. Gédéon ne peut pas entrer dans votre cui-sine, il est bien trop gros.

Le dragon fait plus ou moins la même taille que la maison du magicien.

— Juste la tête, observe Lucien. Juste la tête, avec son long cou, ça passera, et il atteindra le miroir. Ensuite, il n’y aura plus qu’à dire la formule. Je suis sûr que c’est possible. Enguerrand, qu’en penses-tu ? On essaye ?

Le père magicien approuve d’un signe de tête.— C’est malin, ça, petit ! Bravo !Les oiseaux qui passent à cet instant-là au-dessus

de la clairière assistent à un bien curieux spectacle : il y a là un dragon qui porte une maison à la place de la tête.

À l’intérieur de la cuisine, c’est le branle-bas de combat. Malgré ses précautions, Gédéon heurte des tas d’objets, de la vaisselle, un meuble, que tous, les enfants d’un côté et les parents d’Enguerrand de l’autre, se précipitent pour rattraper avant la chute. Le dragon parvient enfin à positionner sa tête face au miroir. C’est un miroir tout ce qu’il y a de plus classique, même si, à y regarder de plus près, il ne reflète rien d’autre que le sujet qui s’en approche. Pas de décor, pas de lumière, aucun autre visage, aucune autre silhouette.

— J’y suis ! dit Gédéon.Il murmure afin de limiter les dégâts ; malgré tout,

le miroir crépite un instant sous les petites flammes sorties de la gueule du dragon.

— Chut ! ordonne Enguerrand. Ne dis plus un mot tant que je n’ai pas prononcé la formule. Si tu brûles quoi que ce soit ici, je n’aurai plus jamais le droit de faire de la magie !

Attrapant le grimoire, il l’ouvre à la page des antidotes. Prononcer la formule à l’envers. Quelle était

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la formule de la poudre de géant, déjà ? Enguerrand revient en arrière dans le grimoire. Il trouve enfin la page.

— Vérifie bien qu’elle n’est collée à aucune autre, cette fois ! recommande Hermine.

Pour faire plaisir à Hermine, Enguerrand vérifie. Il lit la formule et se souvient des mots prononcés un peu plus tôt dans la journée. Pas de risque d’erreur cette fois. Il s’agit simplement de la dire à l’envers.

— Géant tout court, j’ai entonnoir, j’ai entendu !, s’exclame-t-il d’une voix nette.

Un éclair traverse alors la cuisine, si rapidement que Lucien, Hermine, Enguerrand et ses parents s’aplatissent au sol et baissent la tête. Lorsqu’ils la relèvent, surprise ! Il n’y a plus trace de dragon dans la pièce.

— Gédéon ? appelle Hermine.— Gédéon ? reprennent Lucien et Enguerrand en

chœur.— Bon, je vous laisse vous amuser, les enfants,

commente le père d’Enguerrand en disparaissant par

la minuscule porte qui mène à sa pièce à mixtures et autres bouillons.

— Oui, et si vous pouviez vous amuser ailleurs que dans ma cuisine, ça m’arrangerait, ajoute la mère d’Enguerrand en réorganisant la vaisselle.

Soudain, elle fait un bond.— Aaaah, qu’est-ce que c’est que ça ?Le couvercle cabossé d’une de ses marmites a bougé.

Elle le soulève et y découvre la tête d’un petit dragon rouge et blanc.

— Ouh, mais je vais te faire cuire avec le reste de mes oignons, toi ! se réjouit-elle en se frottant les mains. Il me fallait justement un oiseau pour ma recette.

Elle n’a pas reconnu le dragon qui emplissait sa cuisine quelques instants auparavant.

— Non, mère, intervient Enguerrand, pas question de le faire cuire ! C’est le dragonneau de garde du château.

— Oh. Alors, déguerpissez et emmenez-le avec vous ! Allez, du vent, de l’air !

Et elle les chasse d’un grand coup de torchon.

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— Un oiseau, un oiseau, répète Gédéon, vexé qu’on l’ait pris pour un vulgaire volatile. Elle n’a pas les yeux en face des trous, ma parole !

Une fois dehors, les trois camarades forment un cercle autour du dragon redevenu petit.

— Eh bien, constate Lucien, il n’y a plus qu’à re-tourner au château, à présent !

— Je pars devant, on se retrouve à l’entrée ! an-nonce Gédéon avant de s’élever au-dessus de la cime des arbres en quelques battements d’ailes et de sortir du champ de vision des enfants.

— Allons-y nous aussi ! dit Hermine.Lucien ramasse l’épée de Sylvestre.

— Qu’elle est lourde ! réalise-t-il à nouveau.— Je peux la porter, si tu veux, propose Enguerrand.

J’ai les mains libres maintenant que je n’ai plus le grimoire.

Lucien accepte la proposition avec enthousiasme.Et tous les trois s’en vont en courant en direction

du château.Quelle incroyable première journée de chevalier !

pense Lucien en cavalcadant pour tenter de ne pas se laisser distancer par Hermine et Enguerrand. Il a l’im-pression d’avoir vécu plus de choses aujourd’hui que depuis qu’il est né. Il ne s’attendait pas à tant d’événe-ments en arrivant au château sur la charrette de son père ce matin. Justement, il aperçoit l’entrée. Gédéon est à son poste, comme si de rien n’était, comme s’il n’était pas devenu énormissime et n’avait jamais été pourchassé par les chevaliers et les serviteurs du roi.

— Halte-là, qui va là ? demande le dragonneau se-lon son habitude.

— Enfin, Gédéon, c’est nous, tu le vois bien ! ré-pond Hermine.

En cuisineTrouve les deux intrus dans cette liste de verbes qui

appartiennent au vocabulaire de la cuisine :

arroser battre beurrer carapater chemiser dorer écailler enfourner poster râper

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Ils se sont quittés seulement quelques minutes… La poudre de géant aurait-elle des effets secondaires insoupçonnés ? Rendrait-elle amnésique ?

— Hermine, tu peux passer, déclare Gédéon. En re-vanche, vous autres, ce n’est pas possible.

C’est à Lucien et à Enguerrand que s’adresse le dra-gonneau.

— Hein ? Quoi ? s’écrient les deux garçons, stupé-faits. Mais pourquoi ?

— Ordre supérieur, affirme Gédéon.Et de l’aile, il désigne trois silhouettes qui se tiennent

dans l’ombre du mur d’enceinte, derrière la herse. — Ordre supérieur ? Mais de quoi, de qui ? insiste

Enguerrand.— De moi, répond une des silhouettes.Lucien reconnaît la voix de Sylvestre. Deux servi-

teurs du roi l’entourent, barrant le passage.— Votre apprentissage de chevalier s’arrête là. Votre

comportement d’aujourd’hui est déplorable, vous n’avez fait preuve d’aucune loyauté à mon égard. Tant pis, je trouverai d’autres pages, poursuit le chevalier.

Rentrez chez vous.Lucien et Enguerrand se regardent, catastrophés.

Hermine leur jette des œillades désolées. Sylvestre s’aperçoit alors qu’Enguerrand tient à la main une épée qui ressemble fortement à la sienne…

— Enguerrand ! Est-ce mon épée que tu as là ?Depuis que son arme chérie est tombée dans l’eau,

à la cascade, Sylvestre a l’impression de n’être plus qu’un demi-chevalier.

— Oui, je… commence le fils du magicien.— Tu l’as repêchée ! Voilà qui est digne d’un fu-

tur chevalier ! Tu peux réintégrer la formation. Allez, viens par ici.

Sylvestre ne laisse pas à Enguerrand l’opportunité de rétablir la vérité et d’expliquer qu’il ne fait que por-ter depuis quelques minutes l’épée dont Lucien s’est chargé auparavant.

— Et moi ? miaule Lucien, désormais seul aux cô-tés de Gédéon.

— Toi ? répète Sylvestre. Adieu !Et il tourne les talons.



Quel ennui ! La formation de Lucien s’arrête alors qu’elle vient à peine de commencer… N’y a-t-il plus

aucun espoir qu’il retourne au château ? Tu le sauras après avoir colorié les numéros ci-contre. Le résultat

te mettra sur la piste de ce qui pourra peut-être sauver Lucien… Ensuite, poursuis ta lecture !

155

chapitrE 10

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CHAPITRE 10 Un jour pourri, une proposition inattendue

et une partie d’échecs et paf !

Dans le fond, ce n’est pas si terrible que la forma-tion de chevalier s’arrête pour Lucien ; il n’est visible-ment pas fait pour cela. Ce qui l’ennuie, c’est de déce-voir ses parents. Il se souvient des mots de son père : « C’est une grande responsabilité, chevalier ! », et de ceux de sa mère : « Nous allons être tellement fiers de toi ! » Ce qui l’ennuie encore plus, c’est de donner raison à Pierrick, son frère aîné, qui avait prédit que Lucien n’y arriverait jamais.

Et puis, une question se pose : que va-t-il devenir, s’il n’est pas chevalier ? Il devra certainement travail-ler avec son père à la forge, comme Pierrick. Forgeron, ça ne lui dit rien de bon. À choisir, il aime encore mieux chevalier.

En particulier depuis qu’il a fait la connaissance d’Enguerrand, et surtout d’Hermine. Justement, celle-ci réapparaît sur le pont-levis. Puisque Lucien ne peut plus entrer au château, c’est elle qui vient à sa rencontre. L’espoir envahit soudain le fils du forgeron.

— Écoute, je suis désolée, je n’ai rien pu faire. J’ai demandé à mon père que tu puisses continuer, mais il dit que c’est à Sylvestre de décider, et Sylvestre ne veut rien savoir.

— Merci quand même, soupire Lucien, déçu.Ainsi, il ne deviendra jamais fort, sûr de lui et ad-

miré de tous. Il ne sera jamais acclamé et respecté. Jusqu’ici, Lucien n’avait jamais entendu parler d’un garçon qui n’aurait pas réussi sa formation après l’avoir entamée. C’est désormais chose faite : il est le premier. Quel affront pour sa famille ! Quelle honte pour lui ! Ce devait être le plus grand jour de sa vie, en fait c’est le plus petit. Et le plus pourri !

— Je dois y aller, annonce Hermine. Ma mère m’at-tend, elle a décidé de jouer aux échecs et elle compte

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sur moi pour lui apprendre les règles, ajoute-t-elle en soupirant.

— Tu sais jouer ? demande Lucien dont le visage s’éclaire.

Décidément, cette fille est incroyable. Si ça conti-nue, il va lui demander très officiellement s’il peut devenir son meilleur ami.

— Non, justement, avoue Hermine, et c’est bien le problème. Il va falloir que j’invente n’importe quoi…

— Mais je sais jouer, moi ! s’écrie Lucien. J’ai reçu un jeu d’échecs en cadeau l’année dernière pour mon anniversaire. L’Ancêtre m’a appris les règles, et j’ai tel-lement progressé que je gagne presque à chaque fois.

Lucien exagère, mais pas tant que ça.— Qui est l’Ancêtre ? interroge Hermine en haus-

sant un sourcil.— Mon grand-père, indique Lucien.— Attends voir une seconde, réfléchit la fille du roi.

Tu saurais apprendre à jouer à quelqu’un d’autre ?— Oui, répond Lucien du tac au tac.Il ne l’a jamais fait, mais ce n’est pas parce qu’on

n’a jamais fait les choses qu’on ne sait pas les faire. Et puis, il sent qu’il tient là un moyen de retourner au château autrement que pour travailler à la forge…

— Ne bouge pas de là, d’accord ? fait Hermine. Je reviens tout de suite.

Elle file dans la cour avant de s’engouffrer dans l’escalier qui mène à l’étage royal.

En attendant, Lucien fait les cent pas devant Gédéon.— Pas de bol, hein ? lance celui-ci.— Tu es ingrat, réplique Lucien. Sans nous, tu n’au-

Des chiffres et des lettresLucien fait les 100 pas…

Complète avec des chiffres ou des nombres ces autres expressions :

Faire les ______ coups Couper les cheveux en _____

Se mettre sur son _____ Nager entre ______ eaux Couper la poire en ______

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rais jamais retrouvé ta taille normale.Le dragonneau crache des miniflammes de rire.— Tu plaisantes ou quoi ? Sans vous, je n’aurais ja-

mais quitté ma taille normale !Flûte ! Le dragonneau de garde a raison. Lucien au-

rait mieux fait de se taire.— C’est toi qui devrais t’estimer heureux ! reprend

Gédéon. À une autre époque, on t’aurait envoyé à la guillotine !

— Qu’est-ce que c’est, la guillotine ? demande Lucien.— Une punition qui n’existe pas encore, siffle

Gédéon.Hermine revient en courant, les pans de sa longue

robe volant au vent. Elle s’arrête devant Lucien.— Écoute-moi bien, annonce-t-elle. J’ai réussi à

convaincre ma mère de te laisser lui enseigner les échecs. Elle m’a promis que, si tout se passait bien, elle donnerait ordre que tu réintègres l’apprentissage de chevalier auprès de Sylvestre.

Sauvé ! Lucien est sauvé ! Il a envie de sauter au cou d’Hermine et de la prendre dans ses bras pour la

remercier ; mais il n’en fait rien, évidemment.— Oh, merci, merci !— Cependant, il y a une condition, précise la fille du

roi.— Laquelle ? demande Lucien en jetant un œil à

Gédéon, qui ne perd pas une miette de la conversation.Il a peur de voir tout espoir de retourner au château

s’envoler à nouveau.— Tu devras la laisser gagner, dit-elle à voix basse

pour que le dragonneau n’entende pas.— Ouf ! soupire Lucien, soulagé. J’accepte la mission !Et, suivant Hermine, il salue Gédéon d’un signe de

tête et franchit le pont-levis.

On introduit Lucien dans la chambre de la reine. Lucien, très intimidé, se donne du mal. La reine est habituée à jouer aux dames, elle mélange les règles des deux jeux. Avec patience, le page explique le dé-placement de chaque pièce sur le plateau de soixante-quatre cases blanches ou noires : horizontalement ou verticalement pour la tour, en diagonale pour le fou,

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suivant un parcours en forme de « L » pour le cava-lier, toujours vers l’avant pour les pions… Vient enfin le moment de faire une vraie partie. Lucien transpire plus qu’en portant l’écu de Sylvestre ou qu’en tentant de monter sur le dos de Bergamote, car demander de perdre à quelqu’un qui sait jouer et qui aime gagner est une punition atroce.

Le jour commence à tomber lorsque la reine s’ex-clame enfin :

— Échec et paf !— … et mat ! corrige Lucien d’une petite voix.Mais la reine ne l’entend pas, toute à sa joie d’avoir pris

la pièce maîtresse de son adversaire et formateur alors

Les jeux du Moyen ÂgeDans cette liste, trouve les trois jeux qui n’étaient

pas déjà pratiqués à l’époque d’Hermine et Lucien :

jeu de dames jeu d’échecs balle billes châteaux de sable poupée cerceau cerf-volant

jeu de dés jeu de pions bataille navale

qu’elle jouait aux échecs pour la toute première fois.— Qu’on fasse savoir au roi que la reine sait jouer

aux échecs ! claironne-t-elle. Dorénavant, je ferai en-voyer au cachot quiconque osera dire que c’est un jeu réservé aux hommes.

Et elle se lève en fredonnant : « J’ai pris le roi, j’ai pris le roi… »

— Euh… et moi ? ose demander Lucien.Il craint que les deux serviteurs de la reine, qui ne le

quittent pas des yeux depuis son autorisation excep-tionnelle de revenir au château, ne le fichent dehors dès que la souveraine aura le dos tourné.

— Tu veux rester ? demande la reine, sur le point de s’engager dans le couloir aux murs décorés de portraits d’elle.

— Oui ! s’exclame Lucien.— Tu vas rester ! affirme la reine. N’est-ce pas ? ajoute-

t-elle à l’intention des deux serviteurs, qui opinent du chef.

Sauvé ! Lucien est sauvé ! Il va pouvoir continuer à apprendre à devenir chevalier auprès de Sylvestre,

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l’honneur de sa famille ne sera pas entaché, Pierrick lui-même ne saura jamais que son frère a failli échouer. Lucien a envie de sauter au cou de la reine, ou à celui d’Hermine, qui a assisté à toute la partie en lui adressant des clins d’œil à chaque fois que Lucien permettait à la reine de prendre de l’avance – mais il n’en fait rien, évidemment.

— Oh, merci, merci ! se contente-t-il de dire.— Cependant, il y a une condition, avertit la reine.— Laquelle ? demande Lucien en jetant uj regard in-

quiet à Hermine.Pourquoi personne, ici, ne peut annoncer de bonne

nouvelle sans y mettre une condition ?— Que tu viennes faire une partie avec moi chaque

soir des sept prochains jours ! s’exclame la reine en bat-tant des mains. Je préviendrai Sylvestre, ajoute-t-elle.

Lucien acquiesce. Il est d’accord, puisqu’il n’a pas le choix. Il transpire encore un peu à l’idée qu’il devra se forcer à perdre pendant encore une semaine, mais, puisque c’est le prix à payer pour avoir le droit de rester au château, il prendra sur lui.

Hermine lui saisit la main.— Viens, allons annoncer la bonne nouvelle à

Enguerrand ! Il est du côté des écuries.Lucien se laisse entraîner par la fille du roi en

pensant à la folle journée qu’il vient de vivre, encore plus incroyable que tout ce qu’il aurait pu imaginer. « Jouer aux échecs, ce n’est pas un métier », lui ont si souvent répété son père et sa mère. Il n’empêche que ça peut permettre de se sortir d’une situation compli-quée. Quand il racontera ça à son grand-père, l’Ancêtre sera drôlement fier de lui !

Dans le couloir qui mène au grand escalier, Lucien interroge Hermine :

— Pourquoi y a-t-il autant de portraits de ta mère accrochés ici ?

— Eh bien… Je crois que le moment est venu que je t’explique pour quelle histoire de peinture je me suis absentée tout à l’heure…

Et elle lui raconte tout. Lucien écoute son récit et le reçoit comme une belle preuve de confiance. La fille du roi a décidément plus d’un tour dans son sac !



Lucien et Hermine retrouvent Enguerrand. Celui-ci ignore tout du marché conclu entre la reine et Lucien. Il saute de joie en apprenant que Lucien va poursuivre avec lui sa formation de chevalier.

— Pourquoi dansez-vous ? demande Gédéon qui, en entendant les exclamations enthousiastes des enfants, a volé jusqu’à eux.

Les trois camarades ont entamé une ronde dans la cour du château.

— Parce qu’on va former le premier club de petits chevaliers ! claironne Hermine.

— Qu’est-ce que c’est, un « club » ? interroge le dra-gonneau de garde, qui déteste rester dans l’ignorance.

— Un mot qui n’existe pas encore ! s’exclament en chœur les trois amis, hilares.

Les aventures de Lucien au château ne sont pas près de s’arrêter…

Fin ! (ou presque : découvre pourquoi page suivante)

Pour cette fois, les choses se sont arrangées ! Mais Lucien n’est pas au bout de ses peines… Découvre

quelle sera sa prochaine aventure (ou plutôt sa prochaine mésaventure) en reprenant ce livre

depuis le départ : une lettre s’est cachée dans chacune des illustrations de début de chapitre. Relève-les

une à une et reporte-les ici, dans l’ordre, afin d’en savoir plus !

Ce qui attend Lucien bientôt, c’estun __ __ __ __ __ __ __ __ __ __ !

SOLUTIONSDES ÉNIGMES ET DES JEUX

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Mythe ou réalité ?dragon mammouth centaure dahu griffon dodo oiseau de feu licorne

monstre du Loch Ness glyptodon

Cot cot cot ? cote • • vêtement

côte • • mesure ou valeur

cotte • • os ou littoral

SOLUTIONS — CHAPITRE 1

Celle qui se moque est… la princesse en personne !


Un écu ou deuxdes paronymes des synonymes

des homonymes des antonymes

Un cheval, des chevaux destrier • • parade palefroi • • tournoi coursier • • voyage sommier • • messages urgents

Ouf ! Hermine est libérée…


Autant d’anachronismes, c’est tout de même un peu fort !

D’accord, pas d’accorddes oignons bruns des oignons marron_ des oignons jaunes des oignons citron_ des oignons orange_ des oignons rouges des oignons turquoise_ des oignons kaki_

De l’art !TOUS !

peinture grammaire musique géométrie

sculpture architecture orfèvrerie équitation maniement des armes

astronomie chasse danse échecs

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Trois sacs de grains◊ A : 4 x 10 kg

◊ B : 3 x 13 kg

◊ C : 2 x 20 kg

De toutes les couleursrose > rosir

jaune > jaunir blanc > blanchir

noir > noircir

« Ici, sept geais ont douze ailes ! » signifie

que 7 = G et 12 = L. Pour déchiffrer le message,

il faut donc remplacer les chiffres par des lettres.


Quel phénomène ! liquide • • glace solide • • vapeur gazeux • • eau

Lumière !1 jour

1 semaine 1 mois 1 an

Heureusement qu’il n’y a pas deux épées comme

celle de Sylvestre ! Elle se trouve juste devant Lucien,

avec deux pointes de chaque côté de la lame.


Légendaires épées Excalibur • • chevalier Roland Durandal • • Charlemagne Almace • • roi Arthur Joyeuse • • archevêque Turpin

Aux chiottes !latrines W-C petit coin arrière-cuisine cabinets commodités sanitaires

cave trône panier percé

Hisse et hausse • les épaules hausser • • les voiles • les sourcils hisser • • le ton • le drapeau

Ce qui pose problème à Sylvestre, c’est… la magie !

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À la cordeA : 30 cm + 1 m + 53 cm B : 98 cm + 89 cm + 9 cm C : 2 m + 12 cm

Étonnante chevalière • de l’épouse du chevalier

• d’une bague sur laquelle sont gravées des armoiries

• d’une tunique dont on habille les chevaux pour certaines parades

Sans l’ombre d’un doute, la silhouette de Sylvestre est

la n° !


Un plat de pattesTOUS ! cheval vache bison chevreuil

rhinocéros cerf girafe élan

Masculin ou féminin ? antidote • armoire • • masculin automate • autoroute • • féminin après-midi • oasis • • masculin et féminin manteau • météorite • réglisse •

Pour déchiffrer la formule de l’antidote,

il suffit de la lire dans un miroir…

ou dans le bassin de la cascade !

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Pluriels composésdes arcs-en-ciel

des chefs-d’œuvre des rouges-gorges des timbres-poste des cerfs-volants

En cuisinearroser battre beurrer

carapater chemiser dorer écailler enfourner

poster râper

Les échecs peuvent-ils vraiment sauver Lucien ?


Des chiffres et des lettresFaire les 400 coups

Couper les cheveux en 4 Se mettre sur son 31 Nager entre 2 eaux Couper la poire en 2

Les jeux du Moyen Âgejeu de dames jeu d’échecs balle billes

châteaux de sable poupée cerceau cerf-volant jeu de dés jeu de pions

bataille navale

La prochaine aventure (ou plutôt la prochaine

mésaventure) de Lucien : un BANQUET FOU !

Achevé d’imprimé en juin 2017par Printcorp, en France,

pour le compte de Gulf stream éditeur31, rue Alfred-Riom

44100 Nantes

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DANS LA MÊME SÉRIE : Sophie Adriansen Roland Garrigue · 2017-12-06 · Une pièce sombre, une formule oubliée et une poudre qui promet Chapitre p. 44 Chapitre 4 Une séance de