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MUSEE CARNAVALET DOSSIER DOCUMENTAIRE CLASSES CULTURELLES DE LA VILLE DE PARIS CYCLE HISTOIRE DE PARIS Dossier réalisé par Marie-Hélène GIULY au service d’action culturelle du musée Carnavalet, sous la direction de Monsieur Christian GROS

CLASSES CULTURELLES DE LA VILLE DE PARIS · 2013-12-19 · 3 Dossier documentaire - Classes culturelles de la Ville de Paris Cycle Histoire de Paris Bibliographie : Séance 2 au musée

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MUSEE CARNAVALET

DOSSIER DOCUMENTAIRE

CLASSES CULTURELLES DE LA VILLE DE PARIS

CYCLE HISTOIRE DE PARIS

Dossier réalisé par Marie-Hélène GIULY au service d’action culturelle du musée Carnavalet, sous la direction de Monsieur Christian GROS

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Dossier documentaire - Classes culturelles de la Ville de Paris Cycle Histoire de Paris

Le présent dossier a pour objet de vous accompagner dans la mise en place de votre projet pédagogique sur l’histoire de Paris. Il ne s’agit pas à proprement parler d’un prolongement des informations que vous apportera la conférencière, mais d’une proposition de pistes pour élargir avec vos élèves la découverte des différentes périodes qui ont marqué l’histoire de la capitale. Le dossier suit l’ordre des séances avec la conférencière. Nous commençons directement à partir de la seconde séance, puisque la première est une introduction au parcours. Voici la liste des thématiques qui sont proposées : Séance Séance avec la conférencière Ouverture proposée 2 Bercy et les premiers habitants de Paris. Découverte du site de Lutèce 3 Paris médiéval : la crypte et l’île de la

Cité. Notre Dame de Paris, lecture architecturale d’une cathédrale gothique.

4 Le Marais : le quartier des précieuses ridicules.

Le Marais, exemple de prise de conscience patrimoniale au 20ème siècle.

5 Le quartier des Invalides. Un Hôpital militaire : construction et règlement.

6 la vie dans les demeures bourgeoises et aristocratiques aux XVIIème et XVIIIème siècles.

Etre pauvre à Paris aux XVIIème et XVIIIème siècles. La vie dans les rues.

7 La Révolution Française. Vandalisme et découverte de la notion de patrimoine national.

8 L’Opéra et le style Napoléon III. La vie dans le Paris d’Haussmann : un immeuble Haussmannien et les grands magasins.

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Bibliographie : Séance 2 au musée Carnavalet : Carnavalet, Musée de l’Histoire de paris, Beaux-Arts Magazine Hors-série, 1994. Carbonnières P. de, Lutèce Paris ville romaine, Découverte Gallimard, 1997. Musée Carnavalet, Le premier village de Bercy, il y a 6000 ans. Les découvertes archéologiques, Paris musées, 2000. Un dossier a été réalisé au service pédagogique du musée Carnavalet dans le cadre de propositions de visite dans Paris sur le thème de Paris au temps de Lutèce. Séance 3 sur l’île de la Cité : Beaumont – Maillé L., Guide du Paris médiéval, Hazan 1997. Le parvis de Notre Dame. Archéologie et Histoire, 1624 – 2002, Paris-musées, éditions des musées de la ville de Paris, 2002. Fleury M., Kruta V., La Crypte archéologique du parvis de Notre-Dame, Editions Faton, 2001. Gaxotte P., Christ Y., L’île Saint Louis, l’île de la cité. Le quartier de l’ancienne université. L’édition d’Art, H. Piazza, 1974 Crépin-Leblond T., Paris, la Cathédrale Notre-Dame de Paris, coll. Cathédrales de France, Centre des monuments nationaux, éditions du patrimoine, 2000 Finance L. de, La Sainte-Chapelle. Le Palais de la Cité, Caisse nationale des monuments historiques, éditions du patrimoine, 1999 [propose notamment une analyse détaillée de l’iconographie des vitraux] Séance 4 dans le Marais : Gady, A., Le Marais, guide historique et architectural. Editions Carré, 1994 [Un chapitre assez complet sur comment lire l’architecture]. Musée Carnavalet, Le Marais, Age d’or et renouveau, Ville de paris, 1963. Délégation à l’action artistique de la ville de Paris, La Rue des Francs Bourgeois au Marais, Collection Paris et son patrimoine, 1992. Le Marais, mythe et réalité, catalogue de l’exposition du 30 avril au 30 août 1987, à l’Hôtel de Sully. Pissard éditeur, 1987. Action artistique de la ville de Paris, Académie d’Architecture, De la Place Royale à la Place des Vosges, Collection Paris et son patrimoine, 1996. [Etudes et monographies sur les Hôtels de la Place des Vosges.] Séance 5 aux Invalides : Invalides Musée de l’Armée. L’Hôtel des Invalides et le tombeau de Napoléon, Paris Musées – Musée de l’Armée, 2003. Muratori – Phillip A., Histoire des Invalides, Perrin, 189, 2001 (réed). Séance 6 au Musée Carnavalet : Carnavalet, Musée de l’Histoire de paris, Beaux-Arts Magazine Hors-série, 1994. Et pour proposer un contre point : Trassard F., Casali D., Auger A., La vie des Français au temps du Roi-Soleil, Larousse, 2002. Lacour C., Les petits métiers à Paris au XVIIe siècle, Paris musées, 1997. Farge A., Vivre dans la rue à Paris au XVIIIe siècle, Folio Histoire, 1992. Mercier L.S, Tableaux de Paris, tomes I et II, Mercure de France, 1994. Bourguinat E., Les rues de Paris au XVIIIème siècle: le regard de L.S. Mercier, Paris Musées, 1999 Une exposition sur « Les rues de paris de Paris au XVIIIe siècle : le regard de Louis-Sébastien Mercier » a eu lieu au musée Carnavalet du 17 mars au 2 juin 1999. Vous pouvez consulter le dossier de presse ainsi qu’une brochure réalisée par le musée dans le cadre de l’exposition.

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Séance 7 au Musée Carnavalet : Carnavalet, Musée de l’Histoire de paris, Beaux-Arts Magazine Hors-série, 1994. Dubois R., 1798, la Révolution française racontée aux enfants, Enfance heureuse, 1987. P. Nora (dir), les lieux de mémoire, Quarto, Gallimard, 1997. L. Réau, M. Fleury, G.M. Leproux, Histoire du vandalisme, Robert Laffont, 1994. Un dossier documentaire a été réalisé à l’action culturelle du musée Carnavalet sur le thème de la Révolution Française. Séance 8 à l’Opéra : Carmona M., Haussmann, Fayard, 2000. Loyer F. de (dir), Autour de l’Opéra, , collection Paris et son patrimoine, Action artistique de la ville de Paris, 1995. Landau B., Monod C., Lohr E., les Grands Boulevards, un parcours d’invention et de modernité, collection Paris et son patrimoine, Action artistique de la ville de Paris, 2000. H. Zola, Pot-Bouille, 1882 [édition folio 1982, préface d’A. Fermigier] H. Zola, Au Bonheur des Dames, 1883 [édition folio 1995, préface de J. Gaillard] Des dossiers pédagogiques ont été réalisés à l’action culturelle du musée Carnavalet. Liste des dossiers pédagogiques : La Vie à la cour. 3 dossiers : Faste et héritage napoléonien, Les Tuileries. La vie culturelle et le pouvoir impérial. La politique. 3 dossiers : les expositions universelles, l’Armée, les opposants au régime. Paris. 3 dossiers : le théâtre, le Paris d’Haussmann, l’Opéra Garnier. Un dossier général sur le Second Empire accompagne chacun d’entres eux. Chaque dossier comporte une chronologie, une sélection d’œuvres du musée, la biographie d’une personnalité marquante, une présentation historique, un texte ou des citations de contemporains, une bibliographie. Sélection de sites Internet : Le site du musée Carnavalet : www.carnavalet.paris.fr La visite d’autres musées parisiens peuvent compléter le propos de ce programme, vous les trouverez sur le portail culturel de la Ville de Paris : www.culture.paris.fr, rubrique « musées ». www.histoire-en-ligne.com : présente des textes historiques tels le réquisitoire contre Marie-Antoinette, propose également des parcours thématiques, tels les ponts de Paris ou le métro parisien. www.paris-pittoresque.com : un site majoritairement consacré à la vie quotidienne à Paris jusqu’au au XXème siècle. Des textes et de nombreuses images à télécharger. www.parisrama.com : des plans de Paris à différentes époques à télécharger, une petite histoire des transports parisiens et un catalogue d’images anciennes sur les différents quartiers. http://erra.club.fr : Cours d’histoire géographie en ligne par des enseignants de collège. http://www.culture.gouv.fr/culture/infos-pratiques/fiches/fiche14.htm : concerne la loi Malraux sur les secteurs sauvegardés. http://www.u-picardie.fr/~patrick/Cathedrale/Glossaire/ : un glossaire illustré très clair sur les cathédrales. Le site de la Bibliothèque Nationale de France (www.bnf.fr) propose différents dossiers pédagogiques qui compléter ce document, notamment : « Paris », « les cathédrales de Villard de Honnecourt » ou « l’enfance au Moyen-Age ». [On accède aux dossiers pédagogiques de la BNF par la rubrique « offre culturelle et éditions ».] Séance 2 au musée Carnavalet.

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Nous vous proposons d’approfondir avec votre classe la découverte de Lutèce. Voici donc quelques textes vous permettant de mieux cerner l’importance de cette ville située au croisement de plusieurs voies de circulations majeures. Vous trouverez également une chronologie. « Dès le commencement du printemps, il convoque, selon l’usage qu’il avait institué, l’assemblée de la Gaule […]. Il transporte l’assemblée à Lutèce, ville des Parisiens. Ceux-ci confinaient avec les Sènones et avaient anciennement formé un seul état avec eux ; mais ils paraissaient être étrangers au complot. » Jules César, De bello gallico, VI, 3, Garnier-Flamarion (trad. M. Rat). « Tandis que tout ceci se passait chez César, Labienus, laissant les renforts, récemment arrivées d’Italie, à Agedincum1 pour y garder les bagages, s’était dirigé, à la tête de quatre légions, vers Lutèce, ville des Parisiens bâtie sur une île de la Seine. La nouvelle de son approche fit accourir de nombreux combattants des cités voisines. On confia le commandement suprême à l’Aulerque Camulogène qui bien que très affaibli par l’âge fut jugé digne de cet honneur à cause de sa connaissance exceptionnelle de l’art militaire. Ayant repéré un marais continu qui affluait à la Seine2 et qui en rendait l’accès difficile de ce côté, Camulogène fixa son choix sur cette position et résolut de barrer là le passage aux nôtres. Labienus commença par faire avancer les mantelets et par se frayer un chemin en comblant le marais de fascines et de claies. Ayant trouvé l’entreprise trop difficile de ce coté, il sortit en silence de son camp à la troisième veille, reprit la route qu’il avait suivie et vint à Metlosedum3. C’est une place fortifiée située dans une île de la Seine, comme nous l’avons dit un peu plus haut à propos de Lutèce. Là, il mit la main sur une cinquantaine de bateaux et les assemblant en hâte, organisa le transport de ses troupes. La terreur et la surprise dont furent saisis les habitants (un grand nombre des leurs étaient partis à la guerre) lui permirent de s’emparer de la place sans combat. Après avoir rétabli le pont coupé par l’ennemi au cours des journées précédentes, Labienus fit passer ses légions et se dirigea vers Lutèce en longeant le fleuve. Les ennemis en sont informés par les réfugiés de Metsolédum. Alors ils incendient Lutèce, coupent les ponts de la ville, quittent le marais et vont camper sur l’autre bord de la Seine aux environs de Lutèce, face au camp de Labienus4 » Jules César, La guerre des Gaules, Historiens de la République, t.1, La Pléiade (traduction de G. Walter). « J’étais alors en quartiers d’hiver auprès de ma chère Lutèce : les Celtes appellent ainsi la petite ville des Parisii. C’est un îlot jeté sur le fleuve qui l’enveloppe de toutes parts ; des ponts de bois y conduisent des deux côtés ; le fleuve diminue ou grossit rarement ; il est presque toujours au même niveau, été comme hiver ; l’eau qu’il fournit est très agréable et très limpide à voir et à qui veut boire. Comme c’est une île, les habitants sont forcés de puiser l’eau dans le fleuve. L’hiver y est très doux à cause de la chaleur, dit-on, de l’océan, dont on n’est pas à plus de neuf cents stades, et qui peut-être, répand jusque-là quelque douce vapeur : or il paraît que l’eau de mer est plus chaude que l’eau douce. Que ce soit cette cause ou quelque autre qui m’est inconnue, le fait n’en est pas moins réel : les habitants de ce pays ont de plus tièdes hivers. Il y pousse de bonnes vignes, et quelques-uns se sont ingéniés d’avoir des figuiers, en les entourant pendant l’hiver comme d’un manteau de paille ou de tout autre objet qui sert à préserver les arbres des injures de l’air. » Julien, Misopogon, tomeII. éd. Hertlein.

1 Sens 2 Les marais de l’Essonne 3 Melun 4 Le camp de le Labienus se situait probablement à l’emplacement de Saint-Germain-l’Auxerrois et celui des Gaulois à Saint-Germain-des-Prés.

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Vue de Lutèce, réalisation Laurent Renou, 1983, maquette, inv. PM 117, musée Carnavalet

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Chronologie Histoire de Lutèce Histoire de Gaule IIIème siècle : Installation d’une population celte ; Formation de la cité des Parisii

IIème siècle : Frappe de monnaie 53 av. J.C : Convocation des peuples de Gaule par César 52 av. J.C : Les Parisii se joignent au soulèvement. Bataille de Lutèce et défaite contre les troupes de Labienus

52 av. J.C : Révolte de Vercingétorix 50 av. J.C : Défaite et réddition de Vercingétorixà Alésia 43 av. J.C : Fondation de Lyon, longtemps capitale de Gaulle. 15-13 av. J.C : Organisation des trois nouvelles provinces gauloises de l’empire : lyonnaise, Belgique et Aquitaine Ier siècle de notre ère : Révoltes (Florus chez Trévires, Sacrovir chez les Eduens) 48 : Discours de l’empereur Claude (né à Lyon) en faveur des notables gaulois, qui sont admis au Sénat romain 58 : Incendie de Lyon 68-70 : Révolte de Vindex et Sabinus 77 : Affichage du cadastre d’Orange

Ier au IIIème siècle de notre ère : Lutèce se développe sur le modèle romain Contexte : pax romana

IIème siècle : Siècle des Antonins, apogée de l’Empire. Période de paix marquée par de nombreuses constructions et un essor économique. Voyage de l’empereur Hadrien 177 : Persécutions à Lyon, contre les chrétiens (Blandine) 196 : Lutte d’Albinius et de Septime Sévère pour le pouvoir. Sac de Lyon

Vers 250 : Evangélisation et martyre de Denis, premier évêque de la cité (?)

IIème siècle : Insécurité et révoltes, notamment contre le fisc (Bagaudes) 260-275 : « empire gaulois » (Postumus) 275-300 : Constructions d’enceintes autour de la ville (incursions germaniques)

Fin du IIIème siècle : Menace barbare sur Lutèce et insécurité dans la région Vers 300 : La ville se concentre principalement dans l’île de la Cité, à l’abri des remparts

IVème siècle : Du fait des incursions des Francs, Alamans et Saxons, Lutèce joue un rôle stratégique important avec son statut de carrefour économique. Des troupes y cantonnent fréquemment 360 : Le César Julien, qui affectionne Lutèce y est proclamé Auguste. La même année il y convoque un concile 365-366 : Séjour de l’empereur Valentinien Ier

IVème siècle : Installation de troupes auxiliaires, mercenaires et fédérées, souvent d’origine barbare, dans le nord 307 : Trêves, capitale des Gaules 370-390 : Martin évangélise les campagnes 395-396 : Arles, capitale des Gaules

Vème – Vème siècles : Les généraux Aetius, Egidius et Syagrius tentent successivement de maintenir la romanité dans la région comprise entre la Somme et la Loire, le plus souvent avec l’aide des Francs (Childéric puis Clovis). Lutèce se trouve au cœur du dispositif de défense. Le christianisme s’y développe. 451 : Attila menace Lutèce. Geneviève anime la résistance. Elle meurt en 502.

Vème siècle : Installation de troupes auxiliaires, mercenaires et fédérées, souvent d’origine barbare, dans le nord 451 : Invasion des Huns 453 : Attila et les Huns sont vaincus par Aetius aux Champs Catalauniques 486 : Clovis, fils de Childéric, vainqueur de Syagrius à Soissons 496 (?) : Baptême de Clovis

508 : Clovis fait de Lutèce (Paris) sa capitale

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Séance 3 sur l’île de la Cité. Nous vous proposons d’approfondir la découverte de l’architecture médiévale à travers une analyse de la Cathédrale Notre-Dame Ainsi, vous trouverez dans ce dossier des illustrations de Notre-Dame sous différents angles, une chronologie qui retrace la première phase de construction de la cathédrale, ainsi qu’un glossaire sur les cathédrales médiévales.

Vue Latérale de la Cathédrale de Paris, côté méridional, Ransonnette et Chapuis, 1833, inv. TOPO GC019, musée Carnavalet

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Portail de l’Eglise Notre Dame de Paris, rue Notre Dame, anonyme, inv. TOPO PC079A, musée Carnavalet

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Chronologie XIIe siècle 1160 Début des travaux par l’évêque Maurice de Sully. 1177 Achèvement du chœur et de son double bas-côté mais pas de la couverture. 1179 19 mai : consécration du chœur par le légat du Saint-Siège. 1185 17 janvier : office pontifical pour le chœur entièrement livré. 1196 Mort de Maurice de Sully. La nef est terminée à l’exception des premières travées.

Travail de la toiture. XIIIe siècle 1208 Achèvement de la façade avec les trois portails. Sculpture de la porte de la vierge. 1210 Elévation de la première travée double de la nef et des travées correspondantes des

bas-côtés. 1220 Façade jusqu’à l’étage de la rose. La grande façade s’élève jusqu’à la base de la

galerie à jour. 1225 Construction de la rose occidentale et des baies des tours qui les flanquent. 1230 Sculpture de la porte du Jugement. Chapelle de la nef. 1235-1250 Troisième chapelle de la nef. 1236 Elévation de la tour sud. Salle pour agrandir le trésor. 1240 Chapelle Saint-Michel. Elévation de la tour nord. 1241 Le légat du Saint-Siège Eudes défend de recevoir les sans-abris la nuit dans les

grandes salles des tours. 1245 Achèvement des tours et de la galerie haute entre les deux tours. 1250 Construction de la rose du transept nord ; commencement du croisillon nord par Jean

de Chelles. 1252 Deuxième chapelle au nord de la nef dédiée à Saint-Georges et Saint-Blaise. 1254 Chapelle Saint-Eustache. 1258 Pose de la première pierre du croisillon sud. 1265 Chapelle Sainte-Anne (première au sud de la nef). 1266 Troisième chapelle au nord de la nef. 1267 Construction de la petite porte Rouge, sous la fenêtre de la troisième travée du chœur. 1270 Construction de la rose du transept sud. 1288 Construction en cours de la chapelle Saint-Jean-Baptiste et Sainte-Madeleine à l’est de

la porte Rouge. 1291-1304 Construction des trois chapelles d’axe du chœur par Pierre de Chelles et Jean Ravy

(Saint-Louis, Saint-Rigobert, Saint-Nicaise). XIVe siècle 1310 Construction des trois chapelles du chœur côté sud, dédiées à Saint-Etienne, Saint-

Crépin et Saint-Jacques. 1312 Construction de trois chapelles du chœur côté nord, dédiées à Sainte-Foy, Saint-

Europe, et à la Décollation de Saint-Jean-Baptiste. 1316 Construction des trois chapelles suivantes côté sud, dédiées à Saint-Pierre, Saint-Paul

et Saint-Rémi. 1318 Construction des chapelles du côté nord, dédiées à Sainte-Ferréol et Saint-Férutien,

Saint-Michel, Saint-Martin et Sainte-Anne. 1320 Achèvement de la ceinture des chapelles qui enveloppent la cathédrale. 1333-1338 Achèvement des nouvelles chapelles du chœur, des piliers surmontés de clochetons et

d’épis qui les flanquent. Etablissement d’un pinacle au croisillon sud. 1351 Achèvement du chœur. XVIIIe siècle 1310 Construction d’un maître-autel pour répondre au vœu de Louis XIII.

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Les cathédrales : glossaire Abside ou Chevet : Extrémité arrondie ou polygonale de la nef, généralement orientée, c'est à dire dirigée vers l'est (l'Orient). Autour de l'abside principale viennent se greffer des absides secondaires, appelées absidioles ou chapelles rayonnantes. Absidiole : abside secondaire greffée sur l'abside principale (aussi appelée chapelle rayonnante). Arc : Courbe dessinée par la voûte ou la partie supérieure d'une ouverture. Arcade : Ensemble formé d'un arc et de ses supports. Arcature : Série d'arcades juxtaposées qui jouent un rôle décoratif. Arc-boutant : Arc partant d'un contrefort , qui enjambe le bas-côté pour transmettre les poussées de la voûte centrale à un organe vertical, la culée, qui sert aussi de contrefort aux voûtes des bas-côtés. Il peut être à double volée (pour enjamber en deux fois un bas-côté double) et à double étage (pour recevoir les poussées à deux hauteurs différentes). Assise : désigne une rangée de pierre dans une construction. Bandeau : Moulure rectiligne horizontale. Barlong : De forme rectangulaire. Bas-côtés : Nefs latérales d'une église. Synonyme: collatéraux. Cathédrale: Du latin cathedra : siège épiscopal. L'église cathédrale est l'église principale d'un diocèse, où se trouve le trône de l'évêque. Claveau : Pierre taillée en forme de coin composant l'appareillage d'un arc. Clef de voûte : Claveau placé au sommet de la voûte, à la rencontre des nervures de l'ogive. Chapiteau : Pierre taillée et sculptée surmontant une colonne ou un pilastre et recevant la retombée des arcs. Chevet : cf. « abside ». Chœur : Partie de l'église généralement réservée au clergé. Dans les églises françaises, le choeur se situe généralement après la croisée du transept, dans le chevet. Collatéraux : Synonyme de Bas-côtés. Contrefort : Bloc de maçonnerie en saillie sur un mur pour le renforcer à l'endroit des poussées. Culée : Massif de maçonnerie qui, par sa masse, neutralise les poussées transmises par un arc-boutant. Déambulatoire : Galerie de circulation faisant le tour du choeur, sur laquelle s'ouvrent souvent les chapelles rayonnantes. Façade : Coté de l'église où se trouve l'entrée principale. Gâble : Motif ornemental triangulaire, souvent ajouré, surmontant les fenêtres, les portes, ou placé à la base des clochers. Hucher : (ou Huchier) Artisan qui travaille le bois (pourrait être assimilé aux menuisiers de nos jours) Jouée : Cloison latérale, généralement sculptée en bas-relief, d'une rangée de stalles. Jubé : Clôture monumentale, en général surmontée d'une galerie, séparant le choeur de la nef dans certaines églises et servant aux lectures et chants liturgiques. Lierne: Nervure supplémentaire renforçant la croisée d'ogive. Linteau : Traverse horizontale en pierre qui ferme le haut d'une baie ou d'une porte. Miséricorde : Support placé sous le siège mobile d'une stalle d'église, et qui permet de s'asseoir légèrement. Nef : Partie de l'église comprise entre la façade et le choeur. Son nom vient de la ressemblance avec la nef renversée d'un bateau. Ogive : Nervure diagonale qui renforce et soutient la voûte. Piédroit : Montants verticaux encadrant un portail. Pilastre : Pilier rectangulaire en faible saillie, engagé dans le mur. Le pilastre cannelé, copié sur les monuments antiques, a un décor de sillons parallèles creusés verticalement. Pinacle : Pyramide ou cône couronnant un support vertical. A une double fonction: architecturale (son poids consolide le support) et décorative (son dessin, souvent décoré, donne de l'élégance à l'ensemble). Porche : Construction placée devant la façade de l'église. En bois ou en pierre, elle sert à protéger les fidèles, ainsi que les sculptures, des intempéries.

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Portail : entrée principale et monumentale de l'église. Rosace : Motif ornementale en forme de rose. Rose : Grande baie circulaire décorant les façades d'églises pour éclairer l'intérieur. Stalles : sièges dans lesquels prenaient place les chanoines lorsqu'ils se réunissaient au choeur pour dire et chanter offices, prières, psaumes... Tierceron : Nervure supplémentaire qui relie la lierne au départ des ogives. Transept : Galerie transversale d'une église qui coupe la nef en donnant à l'église la forme symbolique d'une croix. Travée : Portion de la nef comprise entre deux supports. Triforium : Série de baies ajourées ou d'arcatures aveugles situées sur les murs latéraux d'une nef. Trumeau : Pilier supportant le linteau d'un portail en le divisant en deux baies. Tympan : Espace compris entre le linteau et l'arc d'un portail; celui est fréquemment sculpté. Voussure : Arc d'un portail retombant sur un piédroit. Ymagier (ou entailleur) : Artisan sculpteur (sur bois ou même sur pierre…).

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Séance 4 dans le Marais. La séance avec la conférencière porte sur le quartier du Marais au temps des précieuses ridicules. En complément de cette séance, nous vous proposons d’aborder avec votre classe une vision plus transversale de ce quartier. De la fin des années 50 au début des années 60, il fut au cœur d’une véritable bataille idéologique qui aboutit à la prise en compte du patrimoine urbain dans la politique d’aménagement des villes. La Marais fut le premier des secteurs sauvegardés mis en place suite à la loi du 4 août 1962. Nous vous proposons dans ce dossier différents documents relatifs à la rénovation du patrimoine urbain dans un secteur précis du Marais ; l’îlot sis entre la rue des jardins-Saint-Paul et la rue Saint-Paul. Vous pourrez aborder avec vos élèves à la fois :

−−−− la densité du tissu urbain originel −−−− la diversité du patrimoine urbain présent dans le Marais (le plus important vestige du rempart

de Philippe Auguste est situé de l’autre côté de la rue des jardins-Saint-Paul)

E

N � S O

Plan de Turgot, détail incluant la Bastille, la place des Vosges (…), XVIIIème s., CAR 17710, musée Carnavalet

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Plan de Turgot, détail montrant l’îlot sis entre la rue des jardins-Saint-Paul et la rue Saint-Paul, musée Carnavalet [agrandissement du détail précédent]

Vue de l'église Saint-Paul sur le Sud et la rue des jardins-Saint-Paul, (avant les travaux), anonyme, 1er juillet 1942, gélatino-bromure

d'argent, Ph 20262, musée Carnavalet

Vue de l'église Saint-Paul sur le Sud et la rue des jardins-Saint-Paul, (après les travaux),

anonyme, 9 septembre 1948, gélatino-bromure d'argent, Ph 20263, musée Carnavalet

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La tour Montgomery, l’une des deux tours fortifiées de la poterne Saint-Paul, vestiges de l’enceinte de Philippe Auguste, Eva Riaux, 2006, musée Carnavalet

La place des Vosges, E. Gossin, vers 1900, épreuve au gélatino-bromure d'argent, musée Carnavalet

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Séance 5 au Invalides. En complément de la visite du quartier des Invalides avec la conférencière nous vous proposons d’approfondir la découverte de cet établissement à travers l’étude du règlement de l’hôpital. Voici donc une gravure représentant les Invalides sous l’Ancien Régime, une chronologie de sa construction et une évocation de la condition des pensionnaires de l’Institution.

Vue et perspective des Invalides à Paris, Aveline, XVIIème s., gravure, inv. TOPO PC121B, musée Carnavalet L’entrée aux Invalides Les premiers invalides arrivent à partir du 1er octobre 1670 dans la maison louée au sieur d’Herval, rue du Cherche-Midi, près du carrefour de la Croix-Rouge, en attendant la construction de l’hôtel dans la plaine de grenelle, où ils seront reçus quatre ans plus tard. Le premier gouverneur, Lemaçon d’Ormoy a tenu un registre des entrées très fourni, dont il se servait pour remplir le « roolle », registre des réceptions qui est présenté au ministre. Lemaçon d’Ormoy était prévôt général des bandes et du régiment des gardes françaises ayant, à Paris et dans ses faubourgs, des pouvoirs spéciaux de police et de juridiction sur le militaire, les déserteurs et les vagabonds. Voici quelques extraits du registre des entrées :

André Chaveau dit La Fontaine, âgé de 72 ans, ancien soldat du régiment d’Orléans, « admis au prêt le 1er avril 1670, agréé par les administrateurs et reçus à l’Hôtel le 1er octobre. Il est décédé le 2 novembre suivant après avoir été assisté spirituellement et corporellement durant une longue maladie depuis sa réception. »

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Mathias Lecoeur, dit La Fouine, âgé de 59 ans, sergent au régiment de Champagne où il a servi 20 ans, suivant certificat du 7 août, « estropié en beaucoup d’endroits, examiné, jugé très digne d’entrer, a été reçu le 1er octobre, mort le 30 décembre 1670. » Estienne Faure, dit Faure, âgé de 32 ans, soldat au régiment du roi, et auparavant de Royal-Vaisseaux, « ayant une main coupée à la suite d’une blessure au siège d’Ypres, a été examiné, agréé : est rentré […] ledit Faure, insolent au dernier point, a demandé à servir sergent au régiment de Rambures ce qui lui a été accordé ; est sorti le 17 octobre 1671. François Chevallier, âgé de 33 ans, ayant eu le bras emporté d’une bombe au siège de Candie, a été admis ; « ce soldat ivrogne, blasphémateur et grand fripon, mais aussi fort brave, a demandé à sortir pour le régiment d’Anjou, ce qui lui a été accordé d’autant plus facilement que sans la considération qu’il est tout à fait estropié il aurait été chassé de l’Hôtel. »

Parmi ceux qui reprennent ainsi du service, la plupart « se sont bien gouvernés », néanmoins, ceux qui demandent à se retirer, qui désertent ou qui ne rentrent pas de congé sont aussi nombreux. D’autres demandent à se retirer.

François Baugé, dit La Croix, entré en août 1671, à l’âge de 55 ans, déserte en novembre ; « ce fripon s’en est allé de l’Hôtel et y a volé ce qu’il a pu, il mérite s’il est attrapé plutôt les galères qu’autre chose ». La mauvaise conduite, l’ivrognerie ou l’indiscipline d’un grand nombre de soldats estropiés, les feront renvoyer aussi bien de l’hôtel de la rue du Cherche-Midi, que de celui de la plaine de Grenelle. Jean Macé, dit Saint Laurent, âgé de 60 ans, ancien moine-lai de l’abbaye de Montpéroux, tailleur de sa profession, en raison de ses « continuels blasphèmes et des insolences très souvent réitérés, ayant été puni de prison dix ou douze fois, a été chassé de l’Hôtel le 7 septembre 1672 sur ordre de M. de Louvois » Charles Lefèvre, dit Saint-Bonnet, âgé de 54 ans, ancien caporal au régiment de gardes, marié à Paris, est congédié en 1680 « après avoir eut les fers et la fleur de lis à la main de l’exécuteur pour avoir été saisi à la porte chargé de linge qu’il avait dérobé dans la garde-meubles de l’Hôtel où il travaillait depuis longtemps ».

Les conditions d’admission : Toutes les candidatures, d’ailleurs, n’aboutissent pas : la règle exige en effet dix ans de service au moins pour qu’un soldat ou cavalier soit accueilli. Il faut être « absolument hors d’état de servir, soit par sa trop grande vieillesse ou caducité, soit par ses blessures ou maladie incurable ». En cas de doute certains ne sont admis qu’ « à guérison pour huit mois », avant d’être admis « pour toujours ». Les protestants sont admis comme les autres dans l’Hôtel jusqu’à la révocation de l’édit de Nantes en 1685. Ils ne sont ensuite tolérés qu’à la condition d’abjurer dans l’église Saint-Louis. Ceux qui s’y refusent sont expulsés. A partir de 1710 des pensions sont créées pour les Suisses de la religion prétendue réformé qui se retirent en leur pays. Les troupes de la marine ne sont pas acceptées. La plupart des marins sont en effet mariés, et il leur faudrait donc abandonner leur famille qui réside « sur les côtes maritimes ». Colbert a prévu pour eux un régime de pension, financé par le prélèvement sur les gages et appointements, et sur les épaves et prises de guerre. Les artilleurs ne sont hébergés qu’à partir de la Régence, et à partir de 30 ans de service. Les invalides des corps privilégiés, comme la Maison du Roi, auront le pas sur les autres. A égalité de grade, ils bénéficieront de la classe supérieure, car la hiérarchie de corps détermine aussi celle de rang. Cependant, les conditions d’admission deviennent bientôt plus sévères. En 1710, pour entrer aux Invalides, il faut sortir d’un régiment, avoir servi au moins vingt ans sans interruption, ou bien souffrir de blessures, mutilations ou infirmité incurable subie à l’occasion du service et mettant absolument hors d’état de porter les armes.

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Après des débuts difficiles, le succès de l’institution s’affirme : entre 1676 et 169 près de 6000 soldats demandent à intégrer les Invalides, de 1690 à 1705 ils sont plus de 10 000. La place vient donc à manquer.

Les conditions d’hébergement : Une fois admis, chacun reçoit un habit avec « camisole de chamois », chapeau noir, bas gris, chaussures, linge de corps (chemises, caleçons, cottes de nuit, bonnet de laine pour dormir), un peigne, une cuiller de buis et un couteau. L’habit d’officier coûte 25 livres et 10 sols, celui de soldats 21 livres et 10 sols. L’Hôtel se fournit chez le sieur Porcher, marchand drapier à Paris. Les pensionnaires sont répartis dans des chambres de quatre à six lits. Ce mobilier est en chêne et est garnis d’une paillasse piquée, d’un matelas de crin, d’un traversin de plume et de deux couvertures de laine. Les officiers logent dans des chambres par deux ou trois. Ils ont des lits « à hauts piliers » avec paillasse, matelas de crin, traversin comme les soldats, mais leurs couvertures sont de meilleure qualité et ils disposent d’ « un tour de lit de serge de Mouy jaune ou verte ». Le reste du mobilier des chambres est composé d’armoires de chêne, de tables et de banc. Elles sont éclairées à l’aide de chandeliers de cuivre ; seules, celles des officiers sont chauffées. Les hommes peuvent circuler librement dans l’Hôtel, se tenir dans les chambres ou dans l’un des huit poêles (chauffoirs) où sont installés tables et bancs. Deux poêles sont réservés aux fumeurs. Les invalides doivent tenir leurs chambres propres : devant chaque porte on place un panier où sont déposées les ordures qu’enlèvent les « servants de corridors ». Le règlement de 1670 l’impose car « la propreté est la chose la plus essentielle pour conserver la santé dans tout l’Hôtel et le garantir de la vermine ». Aussi, par compagnie, aux ordres du major, un sergent est chargé de surveiller les chambres et reçoit du gouverneur trente sols chaque mois pour cela. Le règlement interdit aux invalides de conserver dans les chambres des denrées, du vin et d’y manger. Ils ne peuvent pas davantage y faire provision de tabac dont le commerce est sévèrement prohibé dans l’Hôtel. Un contrôle fréquent est exercé par les aides-majors et par le prévôt. Le principe de responsabilité collective est de règle : celui qui ne dénonce pas un camarade fautif est puni comme lui. Parmi les équipements sanitaires, à part les installations des infirmeries avec bains pour malades, à défaut de salles d’eau, nous trouvons « aux coins des cours [des] robinets qui coulent souvent pour nettoyer les odeurs des urines, qui tombent dans les conduits des ruisseaux ». Il existe, en outre – ce qui est une nouveauté – des lieux d’aisance avec sièges à l’usage des soldats, sur la façade principale de l’Hôtel » Le règlement. Le règlement intérieur de 1710, qui complète celui de 1676, comporte quarante-huit articles. Il ne s’agit en fait généralement que des interdictions en vigueur dans l’établissement, et des sanctions qui y sont assorties. Ce règlement avait pour but de corriger la mauvaise conduite de officiers tout comme des sergents, cavaliers, soldats ou dragons, pour manquement au devoir religieux, pour blasphème, querelle ou ivrognerie, pour libertinage, désordres divers comme « mendicité dans la ville ou faubourg de Paris, voire dans l’Hôtel lui-même ». Des mesures ont dû être prises pour s’opposer aux dégradations, empêcher les dégradations aux rideaux, garnitures de lit des officiers ou la « perte » de leur argenterie. Il est interdit qu’aux fenêtres soient mis « aucunes caisses ou pots de fleurs, pot de chambre, cruches ou même murailles par l’eau qui en dégoutte », et risque de causer des accidents. Des dispositions sont arrêtées pour lutter contre les dégâts causés dans l’Hôtel où les pensionnaires écrivent sur les murs des corridors, portes, passages, escaliers, y font des « figures déshonnêtes avec charbon, craie ou autrement ». Par mesure de sécurité, il est interdit de fumer ailleurs que dans les poêles, d’avoir du feu ; seuls les officiers conservent leur épée. Il est défendu de recevoir, d’héberger dans les chambres des étrangers et même des membres de sa famille ou de les traiter aux dépends de la maison, d’accoster les curieux

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qui visitent l’Hôtel et de leur demander quelque chose. Les religieux des ordres mendiants ne peuvent y venir chercher aumône. Les vagabonds, mêmes enfants, sont éloignés des abords de l’Hôtel par les archers. Certains pensionnaires sont mariés. Ils ne peuvent dormir dans leur famille que deux soirs par semaine, puis trois jours à partir de 1710, et jamais le samedi à cause de l’office du dimanche matin. La misère des familles d’handicapés est très grande, ce qui les incite à ne pas se marier. Si toutefois ils le souhaitent, ils doivent obtenir l’autorisation du gouverneur et se soumettre à une enquête du curé de la paroisse. Extraits de : Les Invalides, trois siècles d’Histoire, Paris, 1974.

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Chronologie de la construction de l’Hôtel des Invalides : 1671 14-15 mars : Louvois passe le marché de la construction de l’hôtel royal des Invalides

avec l’architecte Libéral Bruant et l’entrepreneur Pipault. 30 novembre : pose de la première pierre.

1674 Octobre : achèvement des bâtiments principaux, à l’exception de l’église, de l’infirmerie et du logement des prêtres.

1675 Décoration de l’intérieur des bâtiments. 1676 Mars : Louvois, mécontent de Libéral Bruant, convoque le jeune architecte Jules

Hardouin–Mansart. Il est séduit par son projet d’église (8 avril). 14 novembre : marché de construction du « choeur de l’église » (église des soldats).

1677 24 février : Signature du marché des fondations de l église. 30 décembre : marché de maçonnerie allant des fondations à la grande corniche.

1678 Construction des chaires dans l’église des soldats. 1679 25 mars : marché : édification du buffet d’orgues confiée à Germain Pilon.

29 mars : marché de construction des infirmeries. 12 mai : commande du mécanisme de l’orgue au facteur du roi, Alexandre Thierry.

1687 23 mars : marché pour la construction du reste du dôme. 1689 11 mars : Jules Hardouin-Mansart prend l’avis de ses confrères de l’Académie

d’Architecture sur la solidité de la charpente du dôme. 1690 Décembre : achèvement du dôme.

12 décembre : marché pour la dorure. 1692 7 juillet : Jules Hardouin-Mansart invite ses confrères à visiter l’édifice. 1701 13 février : marché du pavage du dôme. 1706 28 août : Louis XIV inaugure le dôme. 1708 11 mars : mort de Jules Hardouin-Mansart, il est remplacé par son beau-frère Robert de

Cotte. 1730 Construction des bâtiments de la boulangerie du côté ouest du dôme. 1735 14 juillet : mort de Robert de Cotte. 1747 –1750 Jules de Cotte succède à son père. Il dirige la construction des bâtiments des officiers

(« aile Robert de Cotte ») et des ouvriers. 1813 6 février : devis pour la pose d’un paratonnerre sur la flèche du dôme.

Mars – mai : restauration et redorure du dôme, adjudication s pour l’échafaudage et pour la dorure.

1842 Début des travaux d’aménagement du tombeau de Napoléon dans l’église du dôme par l’architecte Visconti. (fin des travaux en 1861).

1903 - 1905 Construction d’un bâtiment en U, « à la Mansart », à l’angle sud-Ouest de l’aire générale. 1937 Redorure du dôme. 1957 8 décembre : inauguration des grande sorgues restaurées. 1967-1969 Dégagement des douves devant le parvis de l’église du dôme. 1970-1972 Creusement d’une douve devant le musée de l’Ordre de la libération, le long du

boulevard de la Tour-Maubourg. 1972-1974 Démolition du mur d’enceinte remplacé par une grille, le long du boulevard des

Invalides. 1975 Démolition des bâtiments édifiés en 1903-1905. 1976 Travaux de rénovation de l’Institution nationale des Invalides (aile ouest). 1978 Rénovation des ailes est et sud de l’Institution nationale des Invalide. 1980 Reconstitution du jardin de l’Intendant. 1980-1989 Poursuite des travaux de rénovation et restauration des toitures de l’hôtel des Invalides. 1989 Juillet : inauguration de la redorure du dôme. Modernisation des illuminations. 1989-1993 Travaux du nouveau musée des Plans-Reliefs 1992-2005 Rénovation du musée de l’Armée.

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Séance 6 : au Musée Carnavalet. La séance avec la conférencière porte sur la demeure bourgeoise et aristocratique aux XVIIème et XVIIIème siècles. En contrepoint nous vous proposons d’aborder en classe quelle pouvait être la vie des pauvres à Paris à la même époque. Vous pouvez notamment aborder le contraste entre le luxe et le raffinement des intérieurs que les enfants ont découvert pendant la visite, et le chaos qui règne dans les rues. Vous trouverez ci-joint trois extraits des écrits de Louis-Sébastien Mercier, grand chroniqueur parisien de la fin du XVIIIe siècle, et des représentations de marchands de rues. Chapitre CCCLXXIX, Cris de Paris Non, il n’y a point de ville au monde où les crieurs et les crieuses de rue aient une voix plus aigre et plus perçante. Il faut les entendre élancer leur voix par-dessus les toits ; leur gosier surmonte le bruit et le tapage des carrefours. Il est impossible à l’étranger de pouvoir comprendre la chose ; le Parisien lui-même ne la distingue jamais que par la routine. Le porteur d’eau, la crieuse de vieux chapeaux, le marchand de ferraille, de peaux de lapin, la vendeuse de marées, c’est à qui chantera sa marchandise sur un mode haut et déchirant. Tous ces cris discordant forment un ensemble, dont on a point d’idée lorsqu’on ne l’a point entendu. L’idiome de ces crieurs ambulants est tel, qu’il faut en faire une étude pour bien distinguer ce qu’il signifie. Les servantes ont l’oreille beaucoup plus exercée que l’académicien, parce qu’elles savent distinguer du quatrième étage, et d’un bout de la rue à l’autre, si l’on crie des maquereaux ou des harengs frais, des laitues ou des betteraves. Comme les finales sont à peu près du même ton, il n’y a que l’usage qui enseigne aux doctes servantes à ne point se tromper, et c’est inexplicable cacophonie pour tout autre.

Le Mercier : « Au public je suis nécessaire », Bonnart, gravure, inv. G 4699, musée Carnavalet

Marchande de tisane, Carle Vernet, gravure, inv. G 4383, musée Carnavalet

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Chapitre XXXIX, Gare ! Gare ! Gare les voitures ! Je vois passer dans un carrosse le médecin en habit noir, le maître à danser dans un cabriolet, le maître en fait d’armes dans un diable5, et le prince court à six chevaux ventre à terre, comme s’il était en rase campagne. L’humble vinaigrette se glisse entre deux carrosses, et échappe comme par miracle. Elle traîne une femme à vapeurs, qui s’évanouirait dans la hauteur d’un carrosse. De jeunes gens à cheval gagnent impatiemment les remparts, et sont de mauvaise humeur, quand la foule pressée, qu’ils éclaboussent, retarde un peu leur marche précipitée. Les voitures et les cavalcades causent un nombre d’accidents, pour lesquels la police témoigne de la plus parfaite indifférence. J’ai vu la catastrophe du 18 mai 17706, occasionnée par la foule des voitures qui obstruèrent la rue, unique passage ouvert à l’affluence prodigieuse du peuple qui se portait en foule à la triste illumination des Boulevards. J’ai manqué d’y perdre la vie ; Douze à quinze cents personnes ont péri le même jour, ou des suites de cette presse effroyable ; J’ai été renversé trois fois sur le pavé à différentes époques, et sur le point d’être roué tout vif. J’ai donc un peu le droit d’accuser le luxe barbare des voitures. Il n’a reçu aucun frein, malgré les réclamations journalières. Les roues menaçantes qui portent orgueilleusement le riche, n’en volent pas moins rapidement sur un pavé teint du sang des malheureuses victimes qui expirent dans d’effroyables tortures, en attendant la réforme qui n’arrivera pas, parce que tous ceux qui participent à l’administration roulent carrosse, et dédaignent conséquemment les plaintes de l’infanterie. Le défaut de trottoirs rend presque toutes les rues périlleuses. Quand un homme qui a un peu de crédit est malade, on répand du fumier devant sa porte, pour rompre le bruit des carrosses ; et c’est alors surtout qu’il faut prendre garde à soi. Jean-Jacques Rousseau7, renversé en 1776 sur le chemin de Ménilmontant par un énorme chien danois qui précédait un équipage, resta sur la place, tandis que le maître de la berline le regardait étendu avec indifférence. Il fut relevé par des paysans, et reconduit chez lui boiteux et souffrant beaucoup. Le maître de l’équipage ayant appris le lendemain quel était l’homme que son chien avait culbuté, envoya un domestique pour demander au blessé ce qu’il pouvait faire pour lui : Tenir désormais son chien à l’attache, reprit le philosophe, et il congédia le domestique. Quand un cocher vous a moulu tout vif, on examine chez le commissaire si c’est la grande ou petite roue. Le cocher ne répond que de la petite ; et si vous expirez sous la grande roue, il n’y a point de dédommagements pécuniaires pour vos héritiers8. Puis il est un tarif pour les bras, les jambes, les cuisses ; et c’est un prix fait d’avance. Que faire ! Bien écouter quand on crie, gare ! gare ! Mais nos jeunes Phaétons9 font crier leurs domestiques de derrières le cabriolet. Le maître vous renverse, puis le valet s’égosille, et se ramasse qui peut. Chapitre LXXXV, Le Faubourg Saint-Marcel C’est le quartier où habite la populace de Paris la plus pauvre, la plus remuante et la plus indisciplinée. Il y a plus d’argent dans une seule maison du faubourg Saint-Honoré que dans tout le faubourg Saint-Marcel, ou Saint-Marceau, pris collectivement. C’est dans ces habitations éloignées du mouvement central de la ville, que se cachent les hommes ruinés, les misanthropes, les alchimistes, les maniaques, les rentiers bornés, et aussi quelques sages studieux, qui cherchent réellement la solitude, et qui veulent vivre absolument ignorés et séparés des

5 Grands chariots à deux ou quatre roues pour les « grands fardeaux », utilisés surtout par les charpentiers selon le dictionnaire de Trévoux, 1771. 6 En vérité le 30 mai 1770 7 Dans Rêveries, Rousseau raconte lui-même cet accident survenu le 24 octobre 1776. 8 La grande roue était placée à l’arrière, « le cocher ne répond que de la petite », comme dans nos contrats d’assurances actuels. 9 « Chaise roulante fort propre, qui n’est ordinairement que pour une personne, qui est tirée par un cheval, et qui va fort vite. On l’appelle ainsi par allusion à Phaéton, qui voulu conduire le char du Soleil, parce que ce sont des jeunes gens ou des petits-maîtres qui se servent de cette sorte de voitures, qui le mènent eux-mêmes, et qui courent souvent grand risque. C’est ce qu’on nomme aujourd’hui cabriolet. » Trévoux.

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quartiers bruyants des spectacles. Jamais personne n’ira les chercher à cette extrémité de la ville. Si l’on fait un voyage dans ce pays-là, c’est par curiosité ; rien ne nous y appelle ; il n’y a pas un seul monument à y voir ; c’est le peuple qui n’a aucun rapport avec les parisiens, habitants polis des bords de la Seine. Ce fut dans ce quartier que l’on dansa sur le cercueil du diacre de Paris10, et que l’on mangea de la terre de son tombeau, jusqu’à ce qu’on eût fermé le cimetière :

De part le roi, défense à Dieu De faire miracle en ce lieu

Les séditions et les mutineries ont leur origine cachée dans ce foyer de la misère obscure. Les maisons n’y ont point d’autre horloge que le cours du soleil. Ce sont des hommes reculés de trois siècles par rapport aux arts et aux mœurs régnantes. Tous les débats particuliers y deviennent publics ; et une femme mécontente de son mari, plaide sa cause dans la rue, le cite au tribunal de la populace, attroupe les voisins, et récite la confession scandaleuse de son homme. Les discussions de toute nature finissent par de grands coups de poing ; et le soir on est raccommodé, quand l’un des deux a eut le visage couvert d’égratignures. Là, tel homme enfoncé dans un galetas, se dérobe à la police et aux cents yeux de ses argus, à peu près comme un insecte se dérobe aux forces réunies de l’optique. Une famille entière occupe une seule chambre, où l’on voit les quatre murailles, où les grabats sont sans rideaux, où les ustensiles de cuisine roulent avec les vases de nuit. Les meubles en totalité ne valent pas vingt écus ; et tous les trois mois les habitants changent de trou, parce qu’on les chasse faute de payement du loyer. Il serrent ainsi, et promènent leurs misérables meubles d’asile en asile. On ne voit point les souliers dans ces demeures ; on n’entend le long des escaliers que le bruit des sabots. Les enfants y sont nus et couchent pêle-mêle. C’est un faubourg qui, le dimanche, peuple Vaugirard et ses nombreux cabarets ; car il faut que l’homme s’étourdisse sur ses maux : c’est lui surtout qui remplit le fameux salon de gueux. Là dansent sans souliers, et tournoyant sans cesse, des hommes et des femmes, qui, au bout d’une heure, soulèvent tant de poussière, qu’à la fin on ne les aperçoit plus. Une rumeur épouvantable et confuse, une odeur infecte, tout vous éloigne de ce salon horriblement peuplé, et où, dans des plaisirs faits pour elle, la populace boit un vin aussi désagréable que tout le reste. Ce faubourg est entièrement désert les fêtes et les dimanches. Mais quand Vaugirard11 est plein, son peuple reflue au Petit-Gentilly, aux Porcherons et à la Courtille12. On voit le lendemain devant les boutiques de marchands de vins, les tonneaux vides, et par douzaines. Ce peuple boit pour huit jours. Il est, dans ce faubourg plus méchant, plus inflammable, plus querelleur, et plus disposé à la mutinerie, que dans les autres quartiers. La police craint de pousser à bout cette populace ; on la ménage, parce qu’elle est capable de porter aux plus grands excès13.

10 François Pâris, fils d’un conseiller au parlement devint diacre en abandonnant fortune et carrière et s’installa dans une simple maison du bas de la rue Mouffetard pour se livrer à la charité envers les pauvres du faubourg. Après sa mort, le 1er mai 1727, sa tombe fit l’objet d’un véritable culte. Une « société de convulsionnaires » se mis en place. A partir de 1731 les scènes de convulsions firent place à de véritables violences subies volontairement ce qui conduisit la police à fermer le cimetière le 27 janvier 1733, alors que l’archevêque de Paris interdisait le culte du diacre Pâris. Par dérision, une main anonyme apposa l’inscription mentionnée par Mercier. 11 L’urbanisation de ce secteur a été lente, la population aisée des quartiers Saint-germain et des Invalides, répugnant à se déplacer plus au sud, loin des remparts. Ce relatif éloignement maintenait le gros village de Vaugirard à l’abri d’un éventuel recul des barrières fiscales et en faisait ainsi un lieu de débits de boisson recherché. 12 Le quartier des Porcherons, encore rural et en voie d’urbanisation, au sud de la butte Montmartre. Situé hors les barrières, il bénéficiait lui aussi de l’exemption fiscale sur les vins. La Courtille était un nouveau quartier populaire en construction dans les années 1780, au pied du plateau de Belleville, dans le prolongement du faubourg du Temple. Situé en dehors des barrières de Paris, il était particulièrement connu pour ses guinguettes. Il y eut une véritable révolte des marchands de vin et restaurateurs en 1786, quand on décida d’inclure ce quartier, avec celui des Porcherons, dans l’enceinte de Paris. 13 Les travaux de Haïm Burstin (1983) ont montré que la vision que Mercier proposait du faubourg Saint-Marcel était quelque peu déformée. Certes, il était bien le lieu de concentration de la population flottante, des mendiants, des petits métiers. Mais le faubourg Saint-Marcel était avant tout un quartier d’artisans modestes, mais ayant pignon sur rue : brasseurs, tanneurs, métiers de l’ameublement, du textile et surtout imprimeurs-relieurs et fondeurs de caractères. La pauvreté de ce faubourg était pourtant bien réelle : en janvier 1789, il reçut à lui seul 23% des 100 000 livres que le roi offrit pour le soulagement des pauvres de Paris pendant cet hiver si rigoureux. Sa population totale s’élevait à 60-65000 habitants, ce qui en faisait le quartier le plus peuplé de Paris.

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Séance 7 sur la Révolution Française. Nous proposons d’aborder un aspect original de la Révolution française : son rôle essentiel dans la construction d’un sentiment patrimonial national. Vous trouverez donc dans ce document des illustrations d’époque sur le vandalisme révolutionnaire, des références de textes législatifs révolutionnaires, ainsi que des illustrations et descriptions du musée des Monuments français d’Alexandre Lenoir.

la violation des caveaux des rois dans la basilique de Saint-Denis en octobre 1793, H. Robert, huile sur toile, inv. P 1477, musée Carnavalet

La salle d’introduction au musée des Monuments Français aux petits augustins, J.L. Vauzelle, 1804, huile sur toile, inv. P 2074, musée Carnavalet

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Le 28 fructidor an II de la République, l'abbé Grégoire proclamait devant la Convention dans son rapport resté célèbre " sur les destructions opérées par le vandalisme et sur les moyens de les réprimer qu'une horde de brigands ont émigré ; mais les arts n'émigrent pas. Comme nous, les arts sont enfants de la liberté ; comme nous, ils ont une patrie, et nous transmettrons ce double héritage à la prospérité". L'abbé Grégoire écrit ainsi : "De toutes parts, on faisait main basse sur les livres, les tableaux, les monuments qui portaient l'empreinte de la religion, de la féodalité, de la royauté ; elle est incalculable, la perte d'objets religieux, scientifiques et littéraires.[...] Cependant tels furent les excès auxquels on se porta qu'enfin il fut possible de faire entendre utilement ma voix et l'on consentit au Comité d'Instruction Publique à ce que je présentasse à la Convention un rapport contre le vandalisme. Je créai le mot pour tuer la chose".

La circulaire Roland : « Paris le 3 novembre 1792, l'An 1er de l'Egalité et de la République Aux corps administratifs Vous avez dû recevoir, Messieurs, le décret qu'a rendu le 24 octobre la Convention nationale, relatif à la vente du mobilier qui se trouve dans les maisons ci-devant royales et religieuses et dans celles des émigrés. Les vues de la Convention en me chargeant spécialement de cette vente doivent vous faire sentir de plus en plus que rien de ce qui peut concourir à la prospérité publique n'échappe à sa sollicitude. Si son but n'eût été simplement que de retirer un produit matériel de ces objets, elle eût abandonné ce soin aux administrations des biens nationaux; mais elle a senti que ce serait appauvrir, avilir la République que de la dépouiller des objets précieux dont les artistes en tous genres ont enrichi la France; Et ces objets précieux, vous le savez, étaient pour ainsi dire réservés aux fortunés possesseurs de ces maisons ci-devant royales et religieuses et à ces vils opulents qui ont désertés la Patrie. C'est donc dans cet esprit qu'il faut combiner cette opération délicate; et préalablement à la vente d'aucun objet, il est indispensable, messieurs que conformément à la loi, l'inventaire de tous les objets quelconques qui se trouveront sous les scellés, soit scrupuleusement fait; et le triage de tous ceux qui paraîtront dignes d'être conservés, tels que les tableaux, dessins et statues des bons maîtres; les morceaux d'histoire naturelle, les pierres gravées, bijoux de prix ou de goût, les livres rares, modèles de machines ou tous autres relatifs aux arts; les porcelaines, les tapis, l'argenterie même, lorsque la main d'œuvre paraîtrait d'un prix supérieur à sa valeur intrinsèque; en un mot tout ce qui peut par la réunion et la conservation, entretenir parmi nous l'amour des arts et des talents et devenir, dans des temps plus paisibles, un motif d'émulation pour les citoyens qui s'adonneraient à la culture, un appât pour la curiosité, pour l'admiration des étrangers, et un monument glorieux qui puisse attester à la postérité, que le Peuple français en abattant ces chefs-d'œuvre de l'idolâtrie qui lui rappelaient l'image des tyrans, a respecté même au milieu des agitations d'une révolution sans exemple, tout ce qui doit perpétuer l'honneur des arts et des lettres, et la gloire d'une nation sensible et éclairée. Cet examen et ce choix, Messieurs, demandent autant de sagacité que de scrupule, et il est à désirer que vous y appeliez quelques citoyens dont les lumières et les connaissances puissent féconder votre zèle. Vous voudrez bien sans délai, me faire passer un état explicatif des différents objets qui auront mérité d'être conservés; et d'après le rapprochement de ces états; on jugera de ce qui paraîtrait convenable de classer dans le Muséum ou dans la bibliothèque nationale, de ceux dont on pourrait former dans les départements, des espèces de sections de ces deux grands monuments; et enfin de ceux dont la vente serait préférable en prenant les précautions nécessaires pour la rendre profitable, c'est-à-dire en l'annonçant à l'avance par les papiers publics tant en France que dans l'étranger, et en joignant une notice raisonnée des objets de ces ventes. Ensuite vous procéderez et sans le moindre délai, à la vente de tout ce qu'on peut regarder comme choses usuelles, et vous en ferez verser au fur et à mesure, le produit dans la caisse du receveur de chaque district. Dans tout ceci, Messieurs, nous ne devons agir que comme de bons économes: nous devons faire pour la Nation ce que ferait pour lui le citoyen industrieux, et mettre dans toutes ces opérations de l'ordre, de la fidélité et de la publicité.

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Vous voudrez bien communiquer ces dispositions de ma lettre aux administrations de votre département, afin qu'elles aient à s'y conformer, et faire marcher cette opération sous un mode général dans toute la République. Le ministre de l'Intérieur. signé Roland. » "Tous ces objets précieux qu'on tenait loin du peuple, ou qu'on ne lui montrait que pour le frapper d'étonnement et de respect, toutes les richesses lui appartiennent. [...] Vous n'êtes que les dépositaires d'un bien dont la grande famille a le droit de vous demander des comptes". Instructions sur la manière d'inventorier et de conserver, dans toute l'étendue de la République, tous les objets qui peuvent servir aux arts, aux sciences et à l'enseignement, 1794. « Que d’âmes ont pris dans ce musée l’étincelle historique, l’intérêt des grands souvenirs, le vague désir de remonter les âges ! (…) Je me rappelle encore l’émotion, toujours la même et toujours vive, qui me faisait battre le cœur quand, tout petit, j’entrais sous ces voûtes sombres et contemplais ces visages pâles, et que j’allais et cherchais, ardent et anxieux, craintif, de salle en salle et d’âge en âge.» Michelet, Le Peuple, 1846. « Il y a deux choses dans un édifice : son usage et sa beauté. Son usage appartient au propriétaire, sa beauté à tout le monde, à vous, à moi, à nous tous. Donc, détruire, c’est dépasser son droit. [ … ] S’il faut une loi, répétons-le, qu’on la fasse. » Victor Hugo, Guerre aux démolisseurs, 1825.

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Séance 8 : Paris au XIXème siècle. La séance avec la conférencière porte sur l’Opéra Garnier et le style Napoléon III. En complément de cette séance, nous vous proposons d’aborder avec votre classe deux autres thèmes, tous les deux en lien avec les bouleversements sociaux que connaît Paris sous le Second Empire et dans la foulée des grands travaux Haussmanniens. La photographie et l’extrait de Pot-Bouille d’Emile Zola vous permettront d’aborder la répartition des classes sociales dans un immeuble moderne sous le Second Empire La gravure suivante et l’extrait du Bonheur des Dames vous permettront d’évoquer la révolution commerciale et sociale que représente l’apparition des grands magasins.

Boulevard des Capucines, Achille Quinet, fin 19e siècle, tirage sur papier albuminé, PH 9181, musée Carnavalet

« Il tournait le tête, comme s’il eut sondé les murs, de son œil d’architecte.

− Mon cher, vous allez voir, elle est tout à fait bien… Et habitée rien que par des gens comme il faut !

Alors, montant avec lenteur, il nomma les locataires. A chaque étage, il y avait deux appartements, l’un sur la rue, l’autre sur la cour, et dont les portes d’acajou verni se faisaient face. D’abord, il dit un

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mot de M. Auguste Vabre : c’était le fils aîné du propriétaire ; il avait pris, au printemps, le magasin de soierie du rez-de-chaussée, et occupait également tout l’entresol. Ensuite, au premier, se trouvaient, sur la cour l’autre fils du propriétaire, M. Théophile Vabre, avec sa dame, et sur la rue, le propriétaire lui-même, un ancien notaire de Versailles, qui logeait du reste chez son gendre, M. Duveyrier, conseiller à la cour d’appel.

− Un gaillard qui n’a pas quarante-cinq ans, dit en s’arrêtant Campardon, hein ? c’est joli ! Il monta deux marches, et, se tournant brusquement, il ajouta :

− Eau et gaz à tous les étages. Sous la haute fenêtre de chaque palier, dont les vitres bordées d’une grecque, éclairaient l’escalier d’un jour blanc, se trouvait une étroite banquette de velours. L’architecte fit remarquer que les personnes âgées pouvaient s’asseoir. Puis, comme il dépassait le second étage sans nommer les locataires :

− Et là ? demanda Octave, en désignant la porte du grand appartement. − Oh ! là, dit-il, des gens qu’on ne voit jamais, que personne ne connaît… La maison s’en passerait volontiers. Enfin, on trouve des taches partout…

Il eut un petit souffle de mépris.

− Le Monsieur fait des livres, je crois. Mais, au troisième, son rire de satisfaction reparut. L’appartement sur la cour était divisée en deux : il y avait là Mme Juzeur, une petite femme bien malheureuse, et un monsieur très distingué, qui avait loué une chambre, où il venait une fois par semaine, pour des affaires. Tout en donnant des explications, Campardon ouvrait la porte de l’appartement.

− Ici, nous sommes chez moi, reprit-il. Attendez, il faut que je prenne votre clef… Nous allons monter d’abord à votre chambre, et vous verrez ma femme ensuite.

Pendant les deux minutes qu’il resta seul, Octave se sentit pénétré par le silence grave de l’escalier. Il se pencha sur la rampe, dans l’air tiède qui venait du vestibule, il leva la tête, écoutant si aucun bruit ne tombait d’en haut. C’était une paix morte de salon bourgeois, soigneusement clos, où n’entrait pas un souffle du dehors. Derrière les belles portes d’acajou luisant, il y avait comme des abîmes d’honnêteté.

− Vous aurez d’excellent voisins, dit Campardon, qui avait reparu avec la clef : sur la rue, les Josserand, toute une famille, le père caissier à la cristallerie Saint-Joseph, deux filles à marier ; et, près de vous, un petit ménage d’employés, les Pichon, des gens qui ne roulent pas sur l’or, mais d’une éducation parfaite…Il faut que tout se loue, n’est-ce pas ? même dans une maison comme celle-ci.

A partir du troisième, le tapis rouge cessait et était remplacé par une simple toile grise. Octave en éprouva une légère contrariété d’amour-propre. L’escalier, peu à peu, l’avait rempli de respect ; il était tout ému d’habiter une maison si bien, selon l’expression de l’architecte. Comme il s’engageait, derrière celui-ci, dans le couloir qui conduisait à sa chambre, il aperçut, par une porte entr’ouverte, une jeune femme debout devant un berceau. Elle leva la tête, au bruit. Elle était blonde, avec des yeux clairs et vides ; et il n’emporta que ce regard très distinct, car la jeune femme, tout d’un coup rougissante, poussa la porte, de l’air honteux d’une personne surprise. Campardon s’était tourné pour répéter :

− Eau et gaz à tous les étages, mon cher. Puis, il montra une porte qui communiquait avec l’escalier de service. En haut, étaient les chambres des domestiques. » E. Zola, Pot-Bouille, 1882.

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« Bien qu’elle connût déjà la nouvelle installation, Mme Desforges s’était arrêtée, saisie par la vie ardente qui animait ce jour-là l’immense nef. En bas, autour d’elle, continuait le remous de la foule, dont le double courant d’entrée et de sortie se faisait sentir jusqu’au rayon de la soie : foule encore très mêlée, où pourtant l’après-midi amenait d’avantage de dames, parmi les petites bourgeoises et les ménagères ; beaucoup de femmes en deuil, avec leurs grands voiles ; toujours de nourrices fourvoyées, protégeant leurs poupons de leurs coudes élargis. Et cette mer, ces chapeaux bariolés, ces cheveux nus, blonds ou noirs, roulaient d’un bout de la galerie à l’autre, confus et décolorés au milieu de l’éclat vibrant des étoffes. Mme Desforges ne voyait de toutes parts que les grandes pancartes, aux chiffres énormes, dont les taches crues se détachaient sur les indiennes vives, les soies luisantes, les lainages sombres. Des piles de rubans écornaient les têtes, un mur de flanelle avançait un promontoire, partout les glaces reculaient les magasins, reflétaient les étalages avec des coins de public, des visages renversés, des moitiés d’épaule et de bras ; pendant que, à gauche, à droite, les galeries latérales ouvraient des échappées, les enfoncement neigeux du blanc, les profondeurs mouchetées de la bonneterie, lointains perdus éclairés par le coup de lumière de quelque baies vitrée, et où la foule n’était plus qu’une poussière humaine. Puis, lorsque Mme Desforges levait les yeux, c’était le long des escaliers, sur les ponts volants, autour des rampes de chaque étage, une montée continue et bourdonnante, tout un peuple en l’air, voyageant dans les découpures de l’énorme charpente métallique, se dessinant en noir sur la clarté diffuse des vitres émaillées. De grands lustres dorés descendaient du plafond ; un pavoisement de tapis, de soies brodées, d’étoffes lamées d’or, retombait, tendait les balustrades de bannières éclatantes ; il y avait, d’un bout à l’autre, des vols de dentelles, des palpitations de mousseline, des trophées de soieries, des apothéoses de mannequins à demi vêtus ; et , au-dessus de cette confusion, tout en haut, le rayon de la literie, comme suspendu, mettait des petits lits de fer garnis de leurs matelas, drapés de leurs rideaux blancs, un dortoir de pensionnaires qui dormaient dans le piétinement de la clientèle, plus rare à mesure que les rayons s’élevaient davantage.

− Madame désire-t-elle des jarretières bon marché, dit un vendeur à Mme Desforges, en la voyant immobile. Tout soie, vingt-neuf sous.

Elle ne daigna pas répondre. Autour d’elle, les propositions glapissaient, s’enfiévraient encore. Pourtant elle voulut s’orienter. La caisse d’Albert Lhomme se trouvait à sa gauche ; il la connaissait de vue, il se permit un sourire aimable, sans hâte aucune au milieu du flot de factures qui l’assiégeait ; pendant que, derrière lui, Joseph, se battant avec la boite à ficelle, ne pouvait suffire à empaqueter les articles. Alors, elle se reconnut, la soie devait être devant elle. Mais il lui fallut dix minutes pour s’y rendre, tellement la foule augmentait. En l’air, au bout de leurs fils invisibles, les ballons rouges s’étaient multipliés ; ils s’amassaient en nuages de pourpre, filaient doucement vers les portes, continuaient à se déverser dans Paris, et elle devait baisser la tête sous le vol des ballons, lorsque de tout jeunes enfants les tenaient, le fil enroulé à leurs petites mains.

− Comment ! madame, vous vous êtes risquée ! » E. Zola, Au Bonheur des Dames, 1883

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Magasins du Bon Marché. Façades sur les rues de Sèvres et Velpeau, Fichot, Sweeton-Tilly, inv. TOPO PC 117D, musée Carnavalet

La place de l'Opéra, anonyme, vers 1900, photographie sur papier albuminé, musée Carnavalet