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Chirurgie esthétique et histoire J. Glicenstein a,b a Hôpital Américain de Paris, 63, boulevard Victor-Hugo, 92200 Neuilly, France b 63, boulevard des Invalides, 75007 Paris, France Résumé L’histoire de la chirurgie esthétique est liée à celle du XX e siècle. Les premières interventions autorisées par les progrès de l’anesthésie et de l’asepsie sont la correction des oreilles décollées par Ely, puis la rhinoplastie par voie endonasale par Roe. Le premier chirurgien à se spécialiser et à publier des livres sur le sujet est C. C. Miller, qui est considéré par certains comme un précurseur et par d’autres comme un charlatan. Avant la 1 re guerre mondiale, la chirurgie esthétique est peu pratiquée, les publications sont rares. La première guerre mondiale est à l’origine de la création d’unités de chirurgie maxillofaciale, rendues nécessaires par le nombre effroyable de blessés de la face, lié à la guerre des tranchées. Beaucoup de ceux qui seront les grands noms de la chirurgie plastique : Blair, Davis, Léon Dufourmentel, Virenque, et surtout Morestin et Gillies opèrent dans ces unités. Après la 1 re guerre mondiale, les chirurgiens américains se regroupent au sein de sociétés savantes, privilégiant le développement de la spécialité de chirurgie plastique, laissant souvent la chirurgie esthétique aux mains de charlatans. En France, plusieurs chirurgiens font preuve d’une grande créativité : Suzanne Noël, Passot, Bourguet, Dartigues et décrivent des techniques qui ont inspiré les interventions modernes. Le procès Dujarier jette un discrédit sur la chirurgie esthétique française, mais n’empêche pas la création de la première Société Française de Chirurgie Plastique en 1930. La 2 e guerre mondiale entraîne de nouvelles orientations. Le centre d’East Grinstead en Angleterre avec Gillies et Mc Indoë est à l’origine, pendant et après la guerre, de nombreuses vocations. Après la guerre, les sociétés nationales et internationales de chirurgie plastique, les revues, se multiplient. La Société Française de Chirurgie Plastique naît en 1952. © 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Abstract The history of aesthetic surgery is linked to that of the 20th century. The first operations allowed by the progress of anesthesia and asepsis are the correction of “proeminent ears” by Ely then rhinoplasty with endonasal incision by Roe. Considered by some as a precursor and a quack by others, C.C. Miller was the first surgeon to specialize and write books on the subject. Before world war I, aesthetic surgery was seldom practiced and publications were few. The war was at the origin of several units of maxillo-facial surgery created for the huge number of casualties with face trauma due to trench warfare. Many of those who will become great names in plastic surgery operated in these units: Blair, Davis, Léon Dufourmentel, Virenque, Morestin and Gillies. After the war, American surgeons were regrouped in scientific societies. Plastic surgery was privileged and aesthetic surgery was lifted for “quacks”. In France, several surgeons such as Suzanne Noël, Passot, Bourguet, Dartigues showed an important creativity and described several techniques that inspired recent ones. The Dujarier case discredited French aesthetic surgery but did not stop the creation of the first French Society of Plastic Surgery in 1930.World war II led to new orientations. In England, the East Grinstead center with Gillies and Mc Indoe during and after the war was at the origin of many vocations. After the war, many national and international societies of plastic surgery started to appear. The French Society of Plastic Surgery was born in 1952. © 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Mots clés : Chirurgie esthétique ; Histoire Keywords: Plastic surgery; Aesthetic surgery; History “The longer you look back, the further you can look forward”. W. Churchill L’histoire de la chirurgie plastique commence, il y a plus de 2000 ans en Inde, avec les premières reconstructions nasales pratiquées par des potiers, tel que le rapporte le livre de Sushruta [1]. Celle de la chirurgie esthétique est liée au XX e siècle, bien que le concept ait déjà été défini par J. F. Dieffenbach (1792–1847). Les tentatives chirurgicales Adresse e-mail : [email protected] (J. Glicenstein). Annales de chirurgie plastique esthétique 48 (2003) 257–272 www.elsevier.com/locate/annpla © 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. doi:10.1016/J.ANPLAS.2003.08.002

Chirurgie esthétique et histoire

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Chirurgie esthétique et histoire

J. Glicenstein a,b

a Hôpital Américain de Paris, 63, boulevard Victor-Hugo, 92200 Neuilly, Franceb 63, boulevard des Invalides, 75007 Paris, France

Résumé

L’histoire de la chirurgie esthétique est liée à celle du XXe siècle. Les premières interventions autorisées par les progrès de l’anesthésie etde l’asepsie sont la correction des oreilles décollées par Ely, puis la rhinoplastie par voie endonasale par Roe. Le premier chirurgien à sespécialiser et à publier des livres sur le sujet est C. C. Miller, qui est considéré par certains comme un précurseur et par d’autres comme uncharlatan. Avant la 1re guerre mondiale, la chirurgie esthétique est peu pratiquée, les publications sont rares. La première guerre mondiale està l’origine de la création d’unités de chirurgie maxillofaciale, rendues nécessaires par le nombre effroyable de blessés de la face, lié à la guerredes tranchées. Beaucoup de ceux qui seront les grands noms de la chirurgie plastique : Blair, Davis, Léon Dufourmentel, Virenque, et surtoutMorestin et Gillies opèrent dans ces unités. Après la 1re guerre mondiale, les chirurgiens américains se regroupent au sein de sociétés savantes,privilégiant le développement de la spécialité de chirurgie plastique, laissant souvent la chirurgie esthétique aux mains de charlatans. EnFrance, plusieurs chirurgiens font preuve d’une grande créativité : Suzanne Noël, Passot, Bourguet, Dartigues et décrivent des techniques quiont inspiré les interventions modernes. Le procès Dujarier jette un discrédit sur la chirurgie esthétique française, mais n’empêche pas lacréation de la première Société Française de Chirurgie Plastique en 1930. La 2e guerre mondiale entraîne de nouvelles orientations. Le centred’East Grinstead en Angleterre avec Gillies et Mc Indoë est à l’origine, pendant et après la guerre, de nombreuses vocations. Après la guerre,les sociétés nationales et internationales de chirurgie plastique, les revues, se multiplient. La Société Française de Chirurgie Plastique naît en1952.

© 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS.

Abstract

The history of aesthetic surgery is linked to that of the 20th century. The first operations allowed by the progress of anesthesia and asepsisare the correction of “proeminent ears” by Ely then rhinoplasty with endonasal incision by Roe. Considered by some as a precursor and a quackby others, C.C. Miller was the first surgeon to specialize and write books on the subject. Before world war I, aesthetic surgery was seldompracticed and publications were few. The war was at the origin of several units of maxillo-facial surgery created for the huge number ofcasualties with face trauma due to trench warfare. Many of those who will become great names in plastic surgery operated in these units: Blair,Davis, Léon Dufourmentel, Virenque, Morestin and Gillies. After the war, American surgeons were regrouped in scientific societies. Plasticsurgery was privileged and aesthetic surgery was lifted for “quacks”. In France, several surgeons such as Suzanne Noël, Passot, Bourguet,Dartigues showed an important creativity and described several techniques that inspired recent ones. The Dujarier case discredited Frenchaesthetic surgery but did not stop the creation of the first French Society of Plastic Surgery in 1930. World war II led to new orientations. InEngland, the East Grinstead center with Gillies and Mc Indoe during and after the war was at the origin of many vocations. After the war, manynational and international societies of plastic surgery started to appear. The French Society of Plastic Surgery was born in 1952.

© 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS.

Mots clés : Chirurgie esthétique ; Histoire

Keywords: Plastic surgery; Aesthetic surgery; History

“The longer you look back, the further you can lookforward”.

W. Churchill

L’histoire de la chirurgie plastique commence, il y a plusde 2000 ans en Inde, avec les premières reconstructionsnasales pratiquées par des potiers, tel que le rapporte le livrede Sushruta [1]. Celle de la chirurgie esthétique est liéeau XXe siècle, bien que le concept ait déjà été défini parJ. F. Dieffenbach (1792–1847). Les tentatives chirurgicalesAdresse e-mail : [email protected] (J. Glicenstein).

Annales de chirurgie plastique esthétique 48 (2003) 257–272

www.elsevier.com/locate/annpla

© 2003 Publié par Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS.doi:10.1016/J.ANPLAS.2003.08.002

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à visée purement esthétique étaient essentiellement destinéesà corriger les nez ensellés, bien souvent stigmate de la syphi-lis. Dieffenbach utilisait des incisions externes destinées àdiminuer le volume du nez [2]. Cependant, la découverte del’anesthésie par Morton en 1846, puis les travaux de Pasteuret de Lister permettent d’envisager des interventions nonnécessaires pour sauver une vie ou rétablir une fonctionessentielle.

Ce sont deux chirurgiens américains, Ely et Roe, quipratiquent les premières interventions esthétiques. Ely, unjeune chirurgien otorhinolaryngologiste, est l’auteur de lapremière otoplastie [3]. Le 1er mars 1881, Edward T. Elyopère, au Manhattan Eye and Ear Hospital de New York, ungarçon de 12 ans dont les oreilles très décollées suscitent lesmoqueries. Ely n’opère que l’oreille droite, excisant un crois-sant de peau et de cartilage comprenant la peau de la faceantérieure. Satisfait du résultat, il pratique la même interven-tion sur l’oreille gauche, le 19 avril suivant. L’intervention alieu chaque fois sous anesthésie générale à l’éther. Le résultatest considéré comme très satisfaisant (Fig. 1). John O. Roede Rochester (1848–1915) pratique lui les premières rhino-plasties endonasales, dont il présente les résultats à la SociétéMédicale de l’État de New York le 1er février 1887 [4].L’intervention a lieu par voie endonasale avec éventuelle-ment décollement muqueux. Roe excise le « tissu excéden-taire » cartilagineux de nez camus. Il donne peu de détailstechniques sur l’intervention elle-même pratiquée sous anes-thésie locale. L’article comprend les gravures de 2 sur 5 cas(Fig. 2). Les résultats de profil sont tout à fait satisfaisants. En1891, Roe publie un 2e article où il traite cette fois des bossesnasales opérées par voie endonasale. C’est dans cet articleque l’on trouve la 1re photographie du résultat d’une rhino-plastie [5].

Jacques Joseph, de Berlin, publie quelques années après ladescription de la technique de rhinoplastie par voie externeavec excision de peau, cartilage et os en bloc sous formed’une résection en pointe de flèche [6]. En 1904, cependant iladopte la voie d’abord « intranasale » et compte déjà43 rhinoplasties [7].

Pour Blair D. Rogers [8,9], Roe est bien le père de lachirurgie correctrice du nez par voie endonasale, et nonJacques Joseph qui est resté beaucoup plus célèbre par sespublications dans ce domaine.

1. Les débuts de la chirurgie esthétique

Jusqu’au début du XXe siècle la chirurgie esthétique estpratiquement inconnue, et les tentatives de Ely, Roe et Josephrestent isolées. Cependant, deux changements importantsapparus dans la société occidentale et en particulier auxÉtats-Unis permettent son apparition [10].

Les mouvements d’émancipation féminine se dévelop-pent dans les pays occidentaux, en particulier aux États-Uniset en Angleterre.

Outre le droit de vote qu’elles revendiquent, les féministescritiquent la morale rigide de l’Ère Victorienne.

La société de consommation apparaît, favorisée par larelative prospérité des premières années du XXe siècle etl’essor de la production industrielle. Prendre soin de soi, desa beauté, rejeter la condition féminine traditionnelle, qui faitdes femmes de plus de trente ans de vieilles femmes, cela faitpartie des revendications des femmes en voie d’émancipa-tion.

Aux États-Unis et dans une moindre mesure en Europe secrée une industrie de la beauté. En 1890, il y avait 9000 coif-feurs aux États-Unis, ils sont 36 000 en 1907. On dénombre

Fig. 1. Première otoplastie par ET Ely (1881) [3]. A : résultat de face (seulel’oreille droite a été opérée) ; B : résultat de dos.

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alors 25 000 manucures et 30 000 esthéticiennes. Partout,s’ouvrent des Instituts de Beauté (beauty parlors). Ceux-ciont un succès extraordinaire. Helena Rubinstein, ElisabethArden fondent des empires. De nombreux charlatans, méde-cins ou non, profitent de l’engouement d’une fraction de plusen plus importante de la population féminine pour tout ce quicache les imperfections et les traces du vieillissement, tout cequi embellit.

Une nouvelle technique a un succès foudroyant : l’injec-tion sous la peau d’un dérivé de la vaseline : la paraffine.C’est un autrichien, Gersuny, qui, ravi par les résultats obte-nus par l’injection de paraffine dans le scrotum pour rempla-cer un testicule absent, préconise la technique pour de multi-ples applications [11], en particulier pour la correction desnez « ensellés », des rides, des cicatrices etc. La vague desinjections de paraffine se répand rapidement à travers lemonde et persiste jusqu’aux années 1950.

Malheureusement, les inconvénients, les complications etles catastrophes même apparaissent peu à peu. La paraffinemigre à travers les tissus, forme des nodules et des fistules detraitement très difficile, laissant des séquelles irrémédiables.

Dans les premières années du XXe siècle, quelques méde-cins choisissent de corriger les imperfections du visage et ducorps par des interventions chirurgicales. Ces interventionspratiquées plus ou moins clandestinement suscitent la répro-bation des chirurgiens « sérieux ».

Charles C. Miller (1880–1950) [12]. Il est considérécomme le père de la chirurgie esthétique, mais aussi commeun charlatan, le premier sans doute d’une longue liste de

praticiens qui associent une certaine compétence techniqueet un sens commercial avéré.

Né en 1880, diplômé d’une école de Médecine de Louis-ville au Kentucky en 1902, Miller s’installe dès 1903 àChicago. Il écrit avec beaucoup de facilité et dès 1906 publieun premier article sur les poches palpébrales [13]. Un peuplus tard, un autre article montre une photographie, « sansdoute la première dans l’histoire de la médecine » [9], surl’excision cutanée des plis palpébraux [14].

La même année, Miller publie le premier livre de chirurgieesthétique, régulièrement réédité jusqu’en 1925 [15]. Rogerscite 40 publications de Miller, dont une trentaine en 1907 et1908. Miller, dans la dernière version de son ouvrage en 1925(Fig. 3), décrit des interventions portant sur toutes les partiesdu visage et illustre de nombreux schémas : poches palpébra-les, bosse nasale, pointe nasale volumineuse, sténose nari-naire, lèvres épaisses, sillons nasogéniens accentués, ridesfrontales, oreilles décollées etc.

Bien qu’ayant préconisé l’utilisation de la paraffine, ils’aperçoit vite des inconvénients de la méthode [16].

Fig. 2. Premières rhinoplasties par voie endonasale par JO Roe (1887) [4].

Fig. 3. Premier livre de chirurgie esthétique. Cosmetic Surgery deC.C. Miller [15]. Édition de 1925.

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Signalons parmi ses publications un article sur la sectionsous-cutanée du muscle corrugator pour supprimer la rideinter-sourcilière en 1908... [17].

Miller ne publie aucun article entre 1908 et 1923, puisaprès 1926 [9,12]. Cette période de sa vie est assez mysté-rieuse, Miller aurait possédé 4 « drugstores » où des nonmédecins travaillaient plus ou moins clandestinement. On l’amême accusé de trafic de drogue [10–12]. Son intérêt pour lachirurgie esthétique semble avoir diminué, bien que son livreait été réédité et qu’il ait publié en 1927 une éphémère revuede chirurgie plastique, peut-être la première, (Dr. CharlesConrad Miller’s Review of Plastic and Esthetic Surgery)dont il ne reste malheureusement plus d’exemplaire [10].

Bien que complètement marginal, C. Miller peut êtreconsidéré comme le premier chirurgien esthétique, et mêmecomme un visionnaire. Il prévoyait que le public s’intéresse-rait de plus en plus à tout ce qui peut atténuer les disgrâces etles signes de vieillissement. Il se moquait des médecins« sérieux » qui méprisaient les premières tentatives de chi-rurgie esthétique et refusaient de publier ses articles [10].

Frederic S. Kolle (1871–1929). Ce chirurgien, d’origineallemande mais pratiquant à New York, publie dès 1911 unvolumineux ouvrage bien documenté sur la chirurgie esthé-tique intitulé « Plastic and Cosmetic Surgery » [9,18], danslequel on trouve les premières photos avant–après d’un pa-tient opéré d’oreilles décollées [8]. Kolle s’intéresse particu-lièrement au traitement des rides palpébrales, opérant sépa-rément les paupières supérieures et inférieures.

Il est un fervent partisan des injections de paraffine, enparticulier pour le traitement des rides glabellaires.

Eugen Holländer (1867–1932). Ce chirurgien allemand,élève de James Israël, l’auteur de la première greffe osseusenasale [19], estime dans un article publié l’année de sa mortavoir pratiqué une intervention de lifting dès 1901 sur unefemme polonaise ayant énormément insisté (Holländer seprétend victime de la « persuasion féminine ») [20]. Lapatiente lui aurait fourni un dessin précis d’excision cutanéepré-auriculaire pour atténuer les sillons nasogéniens. Quel-ques années plus tard, Holländer décrit ses résultats dans lechapitre intitulé « chirurgie cosmétique » d’un manuel decosmétique [21]. Il décrit sa technique d’excision de frag-ments cutanés dans la région précapillaire et derrièrel’oreille. Devant les résultats insuffisants obtenus par cetteméthode, Holländer allongea progressivement son incisionpour aboutir à un dessin continu pré- et rétro-auriculaire,mais sans décollement.

Aucun schéma ni photographie n’est indiqué dans l’arti-cle.

Erich Lexer (1867–1937). Erich Lexer, un fameux chi-rurgien allemand, aurait pratiqué dès 1906 une interventionde lifting sur une actrice. C’est du moins ce qu’il affirme dansun livre paru en 1931 [9,22]. Cette actrice avait l’habitude demettre en tension la peau de son visage par des bandelettesadhésives et aurait demandé à Lexer de supprimer l’excès depeau ainsi formé. Dans son livre, Lexer décrit la technique :incision en S passant devant et derrière l’oreille avec excision

complémentaire au niveau du front, décollement et fixationpar des points profonds dans la région mastoïdienne et tem-porale. Il critique aussi les interventions limitées (mini-lift)aux résultats transitoires.

Jacques Joseph (1865–1934). Jacques Joseph avait dès ledébut du XXe siècle acquis une notoriété internationale enpratiquant des rhinoplasties, bien que n’étant pas l’initiateurde la technique. Comme les deux autres chirurgiens alle-mands Holländer et Lexer, il raconte, dans un article publiéen 1921, comment il a pratiqué un lifting dès 1912. Il insistesur l’intérêt social de ce type d’intervention, sa patiente âgéede 48 ans ayant perdu sa situation en raison d’un vieillisse-ment prématuré. Des photographies montrent l’améliorationobtenue [9,23].

Avant la guerre de 1914, il n’y a pas d’article ou de livreindiquant que des chirurgiens français aient pratiqué desinterventions à visée purement esthétique.

Passot, dans un article de 1919 [24], précise qu’il a vupratiquer cette intervention par son maître Samuel Pozzi, undes plus grands chirurgiens français du début du siècle, maisil n’en n’est fait aucune mention dans les publications de cedernier [25]. Passot juge le résultat excellent mais il doit fairelui-même une légère retouche. Il dit avoir vu égalementl’opération exécutée par Thierry de Martel (un des pionniersde la neurochirurgie en France), par Morestin et par MmePertat, c’est-à-dire Suzanne Noël.

Celle-ci, dans son célèbre ouvrage « La chirurgie esthéti-que, son rôle social » [26], décrit avec candeur ses débuts dechirurgien esthétique : « En 1912, une de nos grandes artis-tes1 revient d’Amérique après une triomphale tournée et tousles journaux racontèrent comment à la suite d’une interven-tion pratiquée dans le cuir chevelu, elle avait retrouvé unejeunesse surprenante. Ce récit me frappa beaucoup, et surmon propre visage, j’essayai avec les doigts de pincer la peauen divers endroits et en différents sens, pour en rectifier lesplis. Je fus étonnée des résultats qu’on pouvait obtenir (...). Jefis aussi des expériences sur des lapins vivants, préalable-ment anesthésiés, la peau du lapin étant d’une finesse etd’une élasticité comparable à celle de la peau humaine. Ainsirenseignée, j’allais trouver l’artiste en question (...). Notrevedette fut séduite par mes explications, et je dois dire qu’ellefut une de mes premières clientes (...) ».

La première guerre mondiale interrompt l’essor de lachirurgie esthétique.

2. La première guerre mondiale

Si la chirurgie plastique est pratiquée occasionnellementdepuis longtemps, c’est lors de la première guerre mondialequ’elle prend un développement considérable.

Jusque-là, le traitement des traumatismes de la face,n’était pas un chapitre majeur de la chirurgie. La guerre des

1 Il s’agit très probablement de Sarah Bernhardt. À noter que SuzanneNoël était encore Externe des Hôpitaux, n’ayant été nommée Interne desHôpitaux de Paris qu’en 1913 !

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tranchées met au premier plan ces blessures. Dans les tran-chées, la face et le cou des soldats, protégés seulement parleur casque, sont particulièrement exposés. Très vite, desmilliers de blessés de la face sont transportés dans les hôpi-taux de campagne et doivent être traités par des chirurgienssans aucune expérience de ce genre de lésions. Devant l’af-flux des blessés et la complexité des traumatismes, des cen-tres spécialisés sont créés : au Val-de-Grâce, à Paris, Hyppo-lite Morestin (1869–1919), déjà connu par ses nombreuxtravaux en chirurgie plastique (sur la réduction progressivedes difformités, la voie d’abord aréolaire, les plasties en Zdans les brides cicatricielles, les greffes cartilagineuses etc.)dirige un service actif qui attire des chirurgiens étrangers. Leplus connu est Harold Gillies (1882–1957), un otorhinola-ryngologiste originaire de Nouvelle-Zélande. Morestin, quirefuse d’être secondé par des dentistes, lui ferme la porte desa salle d’opération après un premier contact qui éblouitGillies [27]. Celui-ci fonde avec sir Arbuthnot Lane, le fa-meux centre de Chirurgie Réparatrice du Queen Mary’sHospital à Sidcup dans le Kent en Angleterre. Dans ce centre,de nombreuses techniques de chirurgie reconstructive sontélaborées, rassemblées dans le fameux ouvrage de Gillies[28].

Une unité américaine est également organisée par Kazan-jian [29]. Elle comprendra Ferris Smith et Vilray Blair. Leséquipes françaises avec Morestin, Sébileau, Léon Dufour-mentel, Virenque prennent en charge les « Gueules Cas-sées ». De nombreux médecins ayant participé aux forma-tions militaires de chirurgie maxillofaciale se reconvertirontaprès la guerre dans la chirurgie esthétique. Morestin, le plusrespecté, le père de la chirurgie plastique française, meurt dessuites de la « grippe espagnole » en 1919.

3. L’entre-deux guerres

Après la fin de la première guerre mondiale, en Europe etaux États-Unis, se manifeste le désir d’oublier les annéesd’angoisse. C’est une période de liberté intellectuelle et artis-tique. En Europe, le développement de la chirurgie plastiqueest essentiellement consacré à la réhabilitation des « GueulesCassées ». La chirurgie esthétique démarre modestement,encore critiquée par la morale courante. Aux États-Unis,deux orientations s’opposent : la création de la spécialité dechirurgie plastique, avec la formation de sociétés savantes, etle développement de la chirurgie esthétique favorisé par laconsommation de masse. Comme le raconte E. Haiken [10],en 1927, Hazel Rawson Cades, une des rédactrices du maga-zine « Woman’s home companion », publie un article intitulé« Any girl can be good looking » — un manifeste du bonaspect, de la bonne présentation de chaque femme. « Il n’y apas de choix. Toute femme doit avoir la meilleure apparencepossible ». Le cinéma devient la distraction préférée, et lesvedettes des modèles auxquels il faut ressembler. Ce change-ment d’état d’esprit est exploité par un grand nombre depraticiens américains qui y voient une importante source deprofit.

Bien que la chirurgie des blessés de la face se soit déve-loppée d’une manière considérable pendant et après la pre-mière guerre mondiale, la chirurgie plastique n’est admisenulle part comme une vraie spécialité chirurgicale.

Le premier, John Stage Davis plaide pour sa reconnais-sance [30]. Très vite, les chirurgiens et otorhinolaryngologis-tes ayant acquis une grande expérience pendant la guerrecherchent à se différencier des « cosméticiens » commeMiller, qu’ils considèrent — souvent à juste titre — commedes charlatans. Alors qu’en France, en Allemagne, la chirur-gie esthétique est pratiquée par des praticiens ayant traitépendant la guerre des « gueules cassées », la plupart deschirurgiens américains qui ont travaillé avec Gillies et Ka-zanjian, aux États-Unis, prennent leurs distances avec lachirurgie esthétique, préférant se consacrer à la chirurgieréparatrice, regroupés dans une société savante élitiste fon-dée le 8 août 1921 au Chicago Athletic Club, l’AmericanAssociation of Plastic Surgery (AAPS), la plus ancienne dessociétés de chirurgie plastique. À titre anecdotique, signalonsqu’à la même époque était désignée la première « MissAmerica ».

Très vite, apparaît ce qui caractérise encore la chirurgieesthétique à notre époque : innovations techniques souventconçues en Europe puis se développant considérablementaux États-Unis, méthodes d’« information » à visée commer-ciale prenant le chemin inverse.

Les années 1920 (roaring twenties ou « années folles »)sont celles de la description des techniques de chirurgieesthétique dont certaines sont toujours pratiquées : rhinoplas-tie par voie endonasale [7], lifting cervicofacial d’abordlimité [24,26] puis étendu avec incision continue, décolle-ment et même plicature des plans musculo-aponévrotiques[32], blépharoplastie par voie conjonctivale [32], plastiemammaire à cicatrice courte ou verticale [33,44,45].

Dès les premiers ouvrages traitant de la chirurgie esthéti-que, les auteurs insistent sur ses bénéfices psychologiques.Suzanne Noël l’exprime dans son livre [26] : « La chirurgieesthétique m’apparut alors comme un véritable bienfait so-cial permettant aussi bien aux hommes qu’aux femmes deprolonger leurs possibilités de travail d’une manière inespé-rée ». Elle cite avec un mélange de candeur et d’optimisme lecas de personnes ayant eu leur vie transformée par la chirur-gie esthétique. « Partout », dit-elle « il faut de la jeunesse etde la beauté » [26].

En Europe, la chirurgie esthétique reste dans l’ombre de lachirurgie des « gueules cassées ». Elle est destinée à desprivilégiés ou à des excentriques. Elle n’est possible que dansles très grandes villes, car les interventions doivent se faireavec la plus grande discrétion.

Aux États-Unis, les idées évoluent. L’arrivée de millionsd’immigrants qui souhaitent s’intégrer et souvent faire dispa-raître leurs caractères ethniques, la mystique de la réussite àtout prix, la lutte contre le complexe d’infériorité (le livred’Adler a un succès extraordinaire) sont des facteurs dudéveloppement considérable de la chirurgie esthétique entreles deux guerres mondiales.

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De nombreux praticiens américains formés dans de dou-teuses Écoles de Médecine (celles-ci ne sont pas réglemen-tées) expérimentent toutes les facettes du « faire savoir ».L’annonce de la rhinoplastie d’une célèbre chanteuse et ve-dette des Ziegfeld follies, Fanny Brice, en 1923, a un énormeretentissement et lance la carrière du plus célèbre des charla-tans américains, Henry J. Schireson, dont il sera questionplus loin.

Les premiers livres à la gloire des chirurgiens paraissent :Maxwell Maltz est particulièrement prolifique. Il écrit « TheMagic Scalpel », « New faces New Futures » et d’autreslivres et articles d’autopromotion. John H. Crum, un autrecharlatan, publie « The making of a beautiful face ». Desdizaines de livres, des milliers d’articles, de conférences sontconsacrés à la chirurgie esthétique.

Les publicités pour des centres spécialisés (de simplescabinets médicaux) apparaissent dans l’annuaire des télépho-nes.

En 1932, Crum opère, à l’Hôtel Roosevelt de New Yorkdevant plus de mille femmes participant au Congrès despropriétaires d’Institut de Beauté (10), une femme assassin,en assurant que l’intervention va modifier — dans le bonsens — sa personnalité. Les policiers ont du mal à contenirl’enthousiasme des spectatrices dont quatre s’évanouissent...

À la fin des années 1920, la situation est très différente enEurope et aux États-Unis.

En Europe, les articles traitant de la chirurgie esthétiquesont publiés par des revues médicales et chirurgicales sérieu-ses.

En France, la plupart des opérateurs sont des chirurgiens,comme Passot, ou des spécialistes de la tête et du cou commeLéon Dufourmentel, Virenque, Bourguet ; Dartigues est gy-nécologue, Suzanne Noël dermatologue, mais a assisté deMartel et connu et admiré Morestin.

En Allemagne, le chirurgien le plus prestigieux est Jac-ques Joseph.

En Angleterre, Gillies ne croit pas beaucoup au dévelop-pement de la spécialité.

Aux États-Unis, le clivage est complet entre les chirur-giens reconstructeurs formés avec Gillies et Kazanjian :Blair, Davis, Ivy, Webster qui pensent à développer et àréglementer la chirurgie plastique, à créer une formation(Board) — ils pratiquent peu la chirurgie esthétique et nepublient guère sur le sujet — et les chirurgiens autodidactesqui attirent une population de consommateurs désireux des’embellir.

3.1. Aux États-Unis : pionniers de la Chirurgie plastiqueet charlatans

Vilray P. Blair (1871–1955) est certainement celui qui ale plus contribué au développement de la chirurgie plastiqueaux États-Unis. Issu d’une famille implantée aux États-Unisdepuis le XVIIe siècle, il représente l’Amérique tradition-

nelle conservatrice [34]. Après une vie aventureuse, il publieen 1912 son premier ouvrage « Surgery and diseases of theMouth and Jaws ». C’est la réputation qu’il acquiert en cedomaine qui lui vaut d’être désigné comme Consultant Chefen chirurgie maxillofaciale du corps expéditionnaire Améri-cain en 1918. Il rejoint Sir Harold Gillies à Sidcup en Angle-terre, s’entoure de dentistes et de collaborateurs formés danscette double discipline comme Robert H. Ivy. Après la fin dela guerre, Blair consacre son activité à la chirurgie maxillo-faciale et à la chirurgie plastique générale. Sur ses 198 publi-cations, aucune cependant ne concerne la chirurgie esthéti-que pure. Le nom de V. P. Blair est lié à la fondation de lapremière société de chirurgie plastique : l’American Associa-tion of Plastic Surgeons en 1921, et plus tard l’AmericanBoard of Plastic Surgery, destiné à opposer aux médecinspeu scrupuleux pratiquant sans formation de la chirurgieesthétique, un corps de praticiens sérieux ayant eu une édu-cation chirurgicale contrôlée.

John Davis (1872–1946), formé également à la chirurgieplastique pendant la 1re guerre mondiale, partage le mêmepoint de vue : la chirurgie esthétique n’est qu’une partie de lachirurgie plastique. Il publie le premier traité complètementconsacré à ce sujet « Plastic Surgery » en 1919. Il estime quela chirurgie esthétique « n’a que peu de place dans le cadre dela chirurgie plastique dont l’objectif principal est la correc-tion des vraies disgrâces ». La chirurgie esthétique est peu oupas pratiquée au John Hopkins Hospital de Baltimore où iloccupe la 1re chaire de chirurgie plastique aux États-Unis etprobablement dans le monde [10].

Jérome P. Webster (1888–1974) incarne un point de vuemoins rigide. Bien que formé par Vilray P. Blair, et membrede l’AAPS, il pratique des interventions de chirurgie esthéti-que comme les rhinoplasties au Columbia Presbiterian Hos-pital de New York mais il consacre beaucoup d’énergie àdébarrasser la spécialité des charlatans. Plusieurs autres pra-ticiens comme James B. Brown, Ferris Smith et quelquesautres définiront les critères des futurs plasticiens.

Jacques W. Maliniak (1889–1976) s’oppose en touspoints à Vilray P. Blair. Il est né à Varsovie, a fait ses études deMédecine à Nancy et Paris, apprend la chirurgie plastiqueavec Morestin et Joseph. Il arrive aux États-Unis en 1923, ets’établit à New York en 1925, en pratique privée. Il n’est pasadmis comme membre de l’AAPS, club limité à un petitnombre de praticiens triés sur le volet. Il crée un petit servicespécialisé à New York et pense que l’ensemble des chirur-giens pratiquant sérieusement la chirurgie plastique de-vraient se réunir dans une société qui permettrait d’échangerleurs expériences. Malgré les réticences des membres del’AAPS, il crée en 1931 l’American Society of PlasticReconstructive Surgery, l’ASPRS, devenue récemmentl’ASPS. Maliniak ouvre plusieurs services de chirurgie plas-tique à NewYork, et écrit plusieurs livres dont l’un destiné augrand public « Sculpture in the living ». Dans les dernièresannées de sa vie, Maliniak se consacre à l’enseignement ausein de l’ASPRS (Educational foundation).

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Création du « Board of Plastic Surgery »Pour les chirurgiens regroupés au sein de l’AAPS et en

particulier Blair, il était nécessaire de créer un certificat(Board) définissant les critères nécessaires à l’exercice de lachirurgie plastique. Les discussions furent vives avant dedécider qui était chirurgien, ou qui était charlatan (« quack »).Des praticiens déjà très connus, comme Maliniak et JosephE. Sheehan (1885–1951), furent l’objet de vives opposi-tions. Sheehan avait travaillé avec Gillies à Sidcup, puis avaitpris des fonctions hospitalières à New York. En 1925, il estl’un des invités du Pr. Lemaitre, chef de service à l’HôpitalSt-Louis à Paris, qui organise le premier « InternationalClinic of otorhinolaryngology and faciomaxillary surgery »[27]. Mais il est aussi la vedette involontaire d’un premierprocès où il lui est reproché d’avoir « défiguré » une actricelors d’un lifting en ne lui précisant pas au préalable l’empla-cement des cicatrices ; en plus son train de vie fastueuxsuscite des jalousies.

La première réunion de l’American Board of PlasticSurgery a finalement lieu le 2 février 1938 à Galveston auTexas. Onze des quinze premiers membres du « Board » yassistent. Maliniak et Sheehan seront admis en 1941.

Au début de la 2e guerre mondiale, il existe donc auxÉtats-Unis deux sociétés savantes, l’une élitiste, l’autre plusouverte et un collège de formation. Il n’y a cependant que60 spécialistes, et un seul Professeur de chirurgie plastique :John S. Davis. Il faudra attendre plus de 30 ans pour que secréent en France les mêmes structures.

En Europe, la chirurgie esthétique se développe plus viteque la chirurgie réparatrice. Au début de la 2e guerre mon-diale, il n’existe que 4 chirurgiens plasticiens en GrandeBretagne (Gillies, Mowlem, Kilner et Mc Indoe) et Gilliesestime que cela est suffisant...

En France et en Allemagne, les « gueules cassées » conti-nuent à être opérées dans les hôpitaux militaires mais à Paris,seul sans doute Léon Dufourmentel (1884–1957) pratiquela chirurgie réparatrice et esthétique dont il décrit les techni-ques dans de nombreux articles et ouvrages dont « La chirur-gie des téguments et des formes » [35].

3.2. Les chirurgiens « esthétiques » françaisde l’entre-deux guerres2

Raymond Passot (1886–1933), dans son ouvrage « Lachirurgie esthétique pure » (36), a décrit lui-même son itiné-raire. Interne de Morestin en 1911, j’essayai de le pousser àdécrire ses procédés (de chirurgie esthétique) ; il me répon-dit... que l’opinion médicale n’y était pas préparée ».

Il publie dès 1919 un article sur « la correction des rides duvisage », le premier sur le sujet dans la presse médicalefrançaise [24]. Dans son livre 12 ans plus tard, il fait état de2500 interventions « pour rides du visage » !

Il plaide pour la spécialisation exclusive. Dans sonouvrage, on trouve décrites des interventions de rajeunisse-ment du visage, de plastie mammaire, d’abdominoplastie,des lambeaux du cuir chevelu pour calvitie, de reconstructionmammaire (Fig. 4).

Raymond Passot meurt prématurément à 47 ans.Julien Bourguet (1876–1952) a une formation d’ophtal-

mologiste, d’otorhinolaryngologiste et d’anatomiste à Tou-louse et Montpellier, et apprend les rhinoplasties avec J. Jo-seph à Berlin (37).

Bourguet, quelques mois après Passot, publie à l’Acadé-mie de Médecine une technique de lifting comprenant undécollement sous-cutané et une lipectomie cervicale [37-38].Par la suite il décrit de nombreux perfectionnements techni-ques comme la section des muscles peauciers, dont il fait unedescription anatomique, l’alcoolisation de la branche fron-tale du nerf facial [39].

En 1924, il décrit les « hernies graisseuses » de l’orbite etpréconise leur ablation par voie conjonctivale [40]. Bourguetillustre son livre d’impressionnantes photos avant–après(Figs. 5, 6).

Suzanne Noël (1878–1954) est sans doute le plus singu-lier des chirurgiens esthétiques. Jeune bourgeoise, elle com-

2 Les biographies de J. Bourguet (37), M. Virenque (42), L. Dartigues(44) par J. Vrebos, et celle de S. Noël (41) sont parues dans les Annalesde chirurgie plastique esthétique.

Fig. 4. Traitement de la calvitie par R. Passot [36]. A : autoplastie longitu-dinale ; B : autoplastie « transversale ».

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mence à trente ans des études de Médecine et est nomméebrillamment à l’Internat des Hôpitaux de Paris en 1913. Ellechoisit la dermatologie.

Interne à l’Hôpital Saint-Louis, elle va voir opérer Mores-tin. Éblouie, elle choisit de pratiquer la chirurgie esthétique.Féministe convaincue, elle estime que la chirurgie esthétiquea un « rôle social ». Son livre [26] publié en 1926 a un grandsuccès. Elle pratique dans son cabinet la chirurgie ambula-toire. Les photographies où l’on voit une opérée se peignant

et buvant une tasse de thé ont été reproduites dans de nom-breux ouvrages [8,9,26,41] (Fig. 7). Suzanne Noël est uneauthentique pionnière de la chirurgie esthétique, mais ellen’a pratiqué que des interventions limitées. Elle n’a pasparticipé à la fondation de la première société française dechirurgie plastique en 1930.

Maurice Virenque (1888–1946) est chirurgien de forma-tion, Interne des Hôpitaux de Paris [42]. Pendant la guerre de1914–1918, il travaille avec Delagenière et traite les « gueu-

Fig. 5. Résultats opératoires de Bourguet [39] : rhinoplastie.

Fig. 6. Résultats opératoires de Bourguet [39] : poches palpébrales.

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les cassées » qu’il continuera à opérer jusqu’à la 2e guerremondiale [43]. Il pratique également la chirurgie esthétique,et en particulier les liftings. Comme l’a montré Vrebos (42),Virenque est un des premiers chirurgiens, avec Bourguet, àavoir pratiqué des points de fixation profonde (Fig. 8).

Louis Dartigues (1869–1940) est chirurgien et gynécolo-gue, ancien Interne des Hôpitaux de Paris [44]. La plupart deses publications portent sur la chirurgie mammaire. Il publieune technique de plastie à cicatrice verticale [45], une mas-topexie par voie axillaire et l’amputation mammaire avecgreffe libre des mamelons [46], technique déjà décrite parThorek [47]. Il est un des fondateurs de la première SociétéFrançaise de Chirurgie Plastique en 1930, collaborateur de laRevue de Chirurgie Plastique fondée en 1931 (Fig. 9).

Charles Claoué (1897–1957) est otorhinolaryngologiste,formé à Bordeaux. Il est l’un des fondateurs de la 1re SociétéFrançaise de Chirurgie Plastique dont il devient le secrétairegénéral. Il pratique surtout la chirurgie esthétique de la face(nez et liftings) mais publie aussi une technique de plastiemammaire [48].

3.3. En Allemagne, le « roi » Joseph

Jacques Joseph (1865–1934) a été pendant un demi-sièclele plus connu des chirurgiens « esthétiques », celui quiassocie, selon la formule, le savoir faire et le faire savoir.Formé en orthopédie, Joseph opère dès 1896 un jeune garçonde ses oreilles décollées, et en 1898 pratique une rhinoplastie[6,49,50]. Comme l’a montré Rogers [8,9], c’est Roe et non

Joseph qui est le « père » de la rhinoplastie par voie endona-sale. Les premières interventions de Joseph comprenaientune excision cutanée. Joseph est nommé Professeur de Chi-rurgie plastique à Berlin en 1918. Sa réputation s’étend aumonde entier et son livre en plusieurs volumes fait la sommede ses travaux [51].

Outre Lexer et Hollander, d’autres chirurgiens allemandspublient des travaux remarquables sur la chirurgie esthétiquemammaire. Kautsch [52-53] décrit la première interventionpéri-aréolaire avec pédicule postérieur (mais avec nécrose dusein), Lotsch [54] une réduction mammaire avec transposi-tion du mamelon, Eugène Hollander une méthode oblique oulatérale [55] ; Schwarzmann [56] pense que le mamelon etl’aréole sont vascularisés par le réseau dermique et décrit ladésépidermisation ; enfin Biesenberger [57] publie en 1931un livre où il fait la description des différentes techniquesalors utilisées. Sa méthode de plastie mammaire avec décol-lement de la peau et enroulement glandulaire sera la techni-que de plastie mammaire de référence jusqu’aux années1960.

À la fin des années 1920 la plupart des interventionsactuellement pratiquées : blépharoplastie, lifting, rhinoplas-tie, plastie mammaire de réduction, abdominoplastie, chirur-gie de la calvitie par lambeau avaient été décrites, et il n’estpas faux d’affirmer que seules des améliorations (souventimportantes) ont été apportées depuis. Seules la liposuccion,l’augmentation mammaire par prothèse en silicone et lesgreffes capillaires ont été proposées après la 2e guerre mon-diale.

Le rôle des chirurgiens français a été très important, celuides chirurgiens américains plus modeste jusqu’en 1930.Parmi ceux-ci, Bettmann [31] et Hunt [58] ont décrit destechniques de lifting, Thorek [46] la greffe libre du mamelon.

Il est à signaler que certains chirurgiens de l’entre-deuxguerres s’intéressèrent aussi au rajeunissement par greffe detesticule de singe selon la méthode de Voronoff [44,58].

3.4. Après les succès, les procès

Le 25 février 1926, une jeune femme, MademoiselleGeoffre, consulte le docteur Louis Dujarier [59], sur lesconseils d’un médecin endocrinologue parce que ses jambessont déformées par une « hyperplasie graisseuse diffuse ».Elle souhaite créer sa propre maison de couture et la model’oblige à porter des robes courtes. Aucun traitement n’estpossible. La jeune femme supplie le chirurgien de l’opérer,menaçant même de se suicider si l’opération était refusée.Dujarier la fait hospitaliser le lendemain même, à l’ancienHôpital Beaujon à Paris, pour l’opération qu’il compte prati-quer sur les deux jambes et qu’il estime rapide, facile et sansrisque. L’intervention est un désastre.

Le Docteur Dujarier, un chirurgien des Hôpitaux re-nommé, ne peut fermer la plaie, insiste, la suture sous tensionextrême. Une gangrène s’installe et Dujarier est obligé le29 mars d’amputer la jambe de l’infortunée MademoiselleGeoffre pour sauver sa vie. La veille de l’intervention muti-lante et salvatrice, Mademoiselle Geoffre s’était mariée et

Fig. 7. Chirurgie ambulatoire chez S. Noël [26]. A : après l’intervention delifting l’opérée se peigne ; B : avant de partir, elle boit une tasse de thé !

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était devenue Madame Le Guen. Les époux Le Guen portentplainte. Le procès en 1929 est retentissant et fait la une desjournaux. Dans un article publié en première page du « Fi-garo » du 4 mars 1929, Léon Dufourmentel montre « quellesdangereuses conséquences entraînerait... (la condamna-tion)... si elle était acceptée ». Il prend vigoureusement posi-tion pour la chirurgie plastique et esthétique, craignant« l’absurdité d’un jugement qui empêcherait toute chirurgiede malformations ou de disgrâces congénitales ou acciden-telles ». Malheureusement, celui-ci est très sévère pour le

chirurgien et pour la chirurgie esthétique. Il condamne le faitd’opérer sans nécessité (donc la chirurgie esthétique), intro-duisant l’obligation d’un délai de réflexion et mettant encause l’absence d’appréciation du risque opératoire. Le juge-ment rendu en appel le 12 mars 1931 modifie celui de 1929. Ilinsiste essentiellement sur l’évaluation du risque, la nécessitéd’un consentement éclairé, mais accepte la légitimité de lachirurgie esthétique. Le jugement eut un grand retentisse-ment. Un « patron » de chirurgie avait opéré gratuitementdans son service hospitalier. Sa cupidité ou son désir de

Fig. 8. Lifting selon Virenque [42]. A : incision et décollement cutané ; B : mise en place de points de fixation profonds ; C : les points profonds sont serrés.

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gloriole n’était pas mis en cause. Mais, le discrédit jeté sur laspécialité fut énorme.

La chirurgie plastique et esthétique disparut presque com-plètement des Hôpitaux Publics pendant plus de 20 ans.Seuls, quelques chirurgiens et otorhinolaryngologistes nonhospitaliers continuèrent à pratiquer la chirurgie esthétique.

Peu de temps après l’intervention malheureuse de Duja-rier, éclate aux États-Unis un drame presque identique. Sa-dye Holland, une jeune femme aux jambes déformées parune incurvation inesthétique, accepte l’opération que lui pro-pose le Docteur Schireson de Chicago. Celui-ci, célèbre pouravoir opéré quelques vedettes (et l’avoir fait savoir), est restécomme le type du charlatan que l’on trouve un peu partout

dans le monde et qui pratique la chirurgie esthétique à grandrenfort de publicité [10]. Il continue une carrière lucrative,malgré son absence de formation, et de multiples interdic-tions d’exercer. Il écrit des livres d’autopromotion, paie unattaché de presse destiné à recruter des clientes dans lesmilieux artistiques (500 dollars par mois et 25 % de commis-sion sur toute intervention). L’intervention est catastrophiqueet il faut amputer les deux jambes. La conduite de Schiresonest sévèrement condamnée par la presse et un film « Falsefaces » en 1932 retrace l’histoire de Sadye Holland avec uneconclusion différente. Dans le film, la malheureuse opéréetue le vaniteux chirurgien lors de son procès...

La réputation de la chirurgie esthétique est encore plusaltérée lorsqu’on apprend en 1934 que l’ennemi public no 1,aux États-Unis, John Dillinger a subi une intervention dechirurgie esthétique modifiant les traits de son visage (unerhinoplastie et un lifting). J. Edgar Hoover, le directeur duFBI met alors en garde les chirurgiens plasticiens et lesmenace de sanctions s’ils opèrent les criminels [60].

L’image du chirurgien plasticien, « magicien, capable deredonner un visage humain aux disgraciés », laisse place peuà peu à celui d’un médecin dévoyé comme on peut le voirdans le film « Dark Passage » (en France, les Passagers de laNuit) de Delmer Daves avec Humphrey Bogart.

Aux États-Unis comme en Europe, il devient nécessairede donner de la chirurgie esthétique une image plus honora-ble.

3.5. Vers une éthique de la chirurgie esthétique

La situation au moment du déclenchement de la 2e guerremondiale est très différente aux États-Unis et en France. Leschirurgiens américains se sont regroupés en 2 sociétés dechirurgie plastique (le groupe plus restreint de l’AAPS, seraformé de membres issus de l’ASPRS), un certificat (Board)de chirurgie plastique est créé ; des services spécialisésapparaissent. Rien de tel n’existe en France. Les professeursde chirurgie envisagent avec beaucoup de réticences les spé-cialisations chirurgicales. Le 30 avril 1930, un groupe dechirurgiens et spécialistes décide de fonder la 1re SociétéFrançaise de Chirurgie Plastique (nommée Société Scientifi-que Française de Chirurgie Réparatrice Plastique et Esthéti-que). Elle se réunit pour la 1re fois le 6 juin 1930 et sonpremier Congrès a lieu les 3 et 4 octobre de la même année.

Les premiers Président et Secrétaire Général sont LouisDartigues et Charles Claoué. La Société se réunit en mai etoctobre 1931, octobre 1932, mai 1933 [44], octobre 1933.Une revue de Chirurgie plastique de langue française appa-raît en 1931 à l’initiative de M. Coelst de Bruxelles. Cette« Revue de Chirurgie plastique » prend en 1936 le nom de« Revue de Chirurgie Structive ». C’est une revue importanteà laquelle sont associés des chirurgiens du monde entier(Fig. 10). Notons que parmi les collaborateurs on trouveAuguste Lumière, Rethi de Budapest qui y publie sa voied’abord columellaire dans les rhinoplasties en 1933 ; Esser,auteur du premier lambeau en îlot ; Sanvenero Rosselli deMilan qui fonde de son côté « Chirurgica Plastica » en Italie,

Fig. 9. Plastie mammaire avec cicatrice verticale pure par L. Dartigues [45].A : incision ; B : résection – modelage glandulaire ; C : résultat.

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Burian de Prague, les principaux chirurgiens plasticiens fran-çais de l’époque, plusieurs américains dont Maliniak, desAnglais etc.

La revue publie les comptes rendus de la Société Fran-çaise et... de la Société Américaine. Une revue française, « laRevue Française de Chirurgie Réparatrice, Plastique et Es-thétique » paraît en 1932. En 1936, une Société Européennede Chirurgie Structive est créée. Son premier Congrès a lieu àBruxelles, avec Coelst, Sanvenero Rosselli, Esser et les an-glais Gillies et Kilner. Le 2e congrès a lieu à Londres en 1937,le 3e à Milan en 1938. Le niveau scientifique de ces congrès aété considéré comme excellent [27]. Un 4e congrès prévu àParis en 1939 ne peut se tenir à cause du déclenchement de la2e guerre mondiale.

À la veille de celle-ci, les chirurgiens qui pratiquent lachirurgie esthétique essaient de « moraliser » sa pratique.Charles Claoué, dans son petit livre « La chirurgie réparatricedans ses rapports avec la jurisprudence » [61], propose defaire signer au futur opéré une feuille de conditions opératoi-res dans laquelle figurent un devis détaillé et une formule deconsentement éclairé.

4. La 2e guerre mondiale

Elle interrompt le développement de la chirurgie esthéti-que, mais favorise celui de la chirurgie réparatrice.

Les blessures de guerre ne ressemblent pas à celle de la 1re

guerre mondiale. Les traumatismes sont plus diffus, attei-gnent toutes les parties du corps. Il y a de nombreux brûlés,des pertes de substance des parties molles découvrant les oset nécessitant des recouvrements par lambeaux.

Des centres de chirurgie plastique sont créés en Grande-Bretagne dont le plus prestigieux sera celui de East Grins-tead au Sud de Londres avec Archibald Mc Indoë et HaroldGillies dont les blessés, les « guinea pigs », garderont unattachement qui persiste encore chez les derniers survivants.

À East Grinstead et dans les autres centres, on perfec-tionne les greffes osseuses et cutanées, les lambeaux tubulés.De nombreux chirurgiens, qui seront les plus brillants prati-ciens de la 2e moitié du siècle, passent par ces centres pen-dant et après la guerre.

À la fin de la guerre, deux centres spécialisés sont installésà l’Hôpital Léopold Bellan à Paris et à l’Hôpital Foch àSuresnes avec John Marquis Converse, Maurice Aubry, PaulTessier, Gaston Duchet et le Médecin Général Ginestet.

Aucun renseignement ne nous est parvenu sur la pratiquede la chirurgie esthétique en France pendant la guerre. Lespraticiens d’avant-guerre sont en fin de carrière comme Vi-renque et Léon Dufourmentel. Dartigues meurt en 1940.

5. Après la 2e guerre mondiale

L’histoire de la chirurgie esthétique passe par trois pério-des : une période de reconnaissance jusqu’au début desannées 1970, une période d’affirmation pendant les vingtannées suivantes, et enfin un passage dans le « domainepublic ».

5.1. Les années d’après guerre

La chirurgie plastique, reconnue aux États-Unis, presqueignorée en Europe se développe rapidement. Comme après la1re guerre mondiale, la réhabilitation des brûlés et blessésnécessite l’emploi de nouvelles techniques. De jeunes chirur-giens européens comme Paul Tessier, Daniel Morel Fatio,Claude Dufourmentel, Maurice Pierre, Félix Lagrot vont seperfectionner auprès de Gillies et Mc Indoe en Angleterre,Webster et J.M. Converse (qui a travaillé en France à la fin dela guerre) aux États-Unis. Ils décident en 1952 de former unenouvelle Société Française de Chirurgie Plastique Recons-tructive. (SFCPR). Le mot esthétique, sans doute considérécomme futile, n’est pas mentionné. Onze chirurgiens se réu-nissent le 3 décembre 1952 : M. Aubry, Bregeat, G. Ginestet,J. Gosset, M. Iselin, F. Lagrot, R. Merle d’Aubigné, D. MorelFatio, P. Petit, R. Tubiana.

Quelques mois plus tard, le 28 septembre 1953, ils orga-nisent le premier congrès de Chirurgie plastique, présidé parMaurice Aubry. Les sujets traités sont « la chirurgie d’ur-

Fig. 10. Revue de Chirurgie Plastique. Cette revue internationale prendrapar la suite le nom de « Revue de Chirurgie Structive ».

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gence maxillofaciale, un symposium sur les brûlés, les trans-plantations cutanées ». Aucun sujet ne concerne la chirurgieesthétique.

Dans le monde entier, des sociétés nationales se créent. En1955, a lieu à Stockholm le premier congrès de l’IPRS(International Plastic and Reconstructive Surgery) regrou-pant les sociétés nationales. Depuis, un congrès internationalse réunit tous les 4 ans. Des revues spécialisées apparaissentégalement : Plastic Reconstructive Surgery en 1946, le Bri-tish Journal of Plastic Surgery en 1947, les Annales de Chi-rurgie Plastique en 1956 (Fig. 11).

Les membres de la SFCPRE créent un syndicat de défenseprofessionnelle en 1968 et un Collège d’Enseignement avecexamen probatoire en 1978. Une compétence en Chirurgieplastique est établie en 1971.

Au début des années 1970, avec la création de services dechirurgie plastique, la spécialité est admise dans les hôpitauxet la chirurgie esthétique commence à y être enseignée. Elleperd peu à peu son caractère « honteux ». Elle ne représentequ’une partie de l’activité des chirurgiens plasticiens. Raressont ceux qui la pratiquent à titre exclusif et les autodidactesrestent peu nombreux.

L’organisation du congrès international de 1975 à Parissous l’impulsion de Roger Mouly, Secrétaire Général de la

SFCPRE et de l’IPRS, apparaît comme la consécration de laspécialité.

5.2. La chirurgie esthétique s’individualise

Au début des années 1970, plusieurs chirurgiens plasti-ciens français renommés sont invités à participer à la popu-laire émission de télévision « les dossiers de l’écran ». Aprèsprojection d’un film, un débat s’installe entre les téléspecta-teurs et les invités. Ce soir là, il s’agit du « Miroir à deuxfaces » d’André Cayatte, avec Michèle Morgan et Bourvil, etle thème est la « Chirurgie Esthétique ». Les chirurgiensessaient de centrer le débat sur les accidents, les brûlures, lesmalformations .... Les téléspectateurs n’ont en cure. Ce quiles intéresse ce sont les liftings, les rhinoplasties. L’émissiona un grand retentissement. Les responsables de l’ORTF, puisceux des chaînes de télévision, en sont conscients et ilsmultiplieront par la suite les émissions.

Aux États-Unis où, avec la montée des classes moyennes,l’augmentation du niveau de vie, la diffusion de plus en plusgrande de la télévision, la chirurgie esthétique est devenue unphénomène social, l’American Society of Aesthetic PlasticSurgery est créée en 1967. Une société internationale(ISAPS) apparaît en 1970. En France, il faut attendre 1990pour que soit créée la SOFCEP3 par des chirurgiens plasti-ciens tous membres de la SFCPRE, devenue en 1994 laSOFCPRE — Société Française de Chirurgie Plastique Re-constructrice et Esthétique.

Jusqu’aux années 1960, les techniques chirurgicales utili-sées étaient à peu près les mêmes que dans les années 1930.

À partir du milieu des années 1960, les techniques seperfectionnent, s’affinent, bien que l’on fasse souvent duneuf avec du vieux. Pour les rhinoplasties, Passot utilisaitdéjà des greffes cartilagineuses prélevées sur la cloison [36],Rethi utilisait dès 1933 la voie columellaire [62]. La « désé-pidermisation péri-aréolaire » décrite par Schwartzmann en1930 [56], est la clé de nombreuses techniques de plastiemammaire. Les abdominoplasties existaient depuis Kelly en1910 [63]. La technique d’otoplastie décrite par Mustardé en1963 ressemble beaucoup à celles de Luckett [64] et Mores-tin [65] publiées au début du siècle. La voie d’abord trans-conjonctivale des blépharoplasties est celle de Bourguet en1924 [40]. Enfin, Passot traitait dès 1920 les calvities parlambeaux de cuir chevelu [36].

Une étape importante dans l’histoire des liftings est fran-chie en 1974. Paul Tessier choisit comme thème du congrèsde la SFCPRE « Retour aux sources », c’est-à-dire aux basesanatomiques de la chirurgie plastique. Il demande à sesélèves F. Firmin, J. Le Pesteur, V. Mitz, M. Peyronie, M.Quilichini et A. Thion, de décrire le système musculaireaponévrotique superficiel de la face. V. Mitz et M. JannyPeyronie sont chargés de l’étudier au niveau des joues et de larégion parotidienne. Ils publient leur travail dans Plastic andReconstructive Surgery [66]. L’article a un grand retentisse-

3 SOFCEP : Société Française des Chirurgiens Esthéticiens Plasticiens.

Fig. 11. Premier numéro des Annales de Chirurgie Plastique. Deux précé-dents numéros étaient parus dans le cadre de la « Semaine des Hôpitaux —Annales de Chirurgie ».

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ment et ouvre la voie aux liftings « profonds ». Le rôle desstructures profondes avait déjà été envisagé par Bourguet[37-38], Virenque [42], Prévot [67] qui estimait en 1931 que« la pseudo-aponévrose parotidienne peut... être employéecomme agent de traction... ; dans les interventions plastiquesportant sur la face », et surtout Skoog [68]4

Deux nouvelles interventions révolutionnent la chirurgieesthétique puisque s’attaquant à des problèmes non résolusau début des années 1960 : l’augmentation mammaire et letraitement des dépôts graisseux modifiant la silhouette. Ellesdeviennent rapidement les opérations les plus populaires auxÉtats-Unis.

L’histoire de l’augmentation mammaire a été détailléedans plusieurs articles [69-70].

Jusqu’à la 2e guerre mondiale, peu de femmes se plai-gnaient de la petite taille de leurs seins. Seules les ptôses etles vraies hypoplasies étaient l’objet de consultation. Lescanons de la beauté semblaient privilégier les seins de vo-lume modéré : tableaux, statues, photographies des revuesdéshabillées très en vogue dans les années d’avant guerre nemontrent jamais de fortes poitrines. C’est pendant la guerreavec les « pin-up girls » qu’affichaient les G. I., avec le film« the Out-law » où Jane Russel montrait un décolleté avanta-geux qui affola les ligues de vertu, qu’apparaît le mythe de la« sweater girl » dont les formes abondantes devinrent unmodèle pour beaucoup de femmes.

Après les échecs des transplantations graisseuses ou der-mograisseuses et de nombreuses tentatives de mise en placede divers matériaux (dont le verre, le celluloïd, différentesmatières plastiques), la mise au point par F. Gerow et T.Cronin d’une prothèse formée d’une enveloppe de silicone etcontenant un gel de la même matière est un progrès considé-rable. La première intervention est pratiquée en mars 1962.Madame Timnie Jean Lindsay en est la bénéficiaire.

L’histoire des prothèses mammaires en silicone pendantles quarante années suivantes est riche de péripéties. La plusdramatique est la crise qui éclate en 1991 aux États-Unis etqui aboutit à une interdiction de l’utilisation (provisoire enFrance, mais persistant aux États-Unis) des prothèses conte-nant un gel de silicone [69,71,72].

Au contraire des autres interventions dont la conceptionest ancienne, la liposuccion introduit un nouvel élément quiva changer dans l’esprit du public, l’idée de ce que doit être lachirurgie esthétique. Comme l’a expliquéY.G Illouz dans sonlivre [73], Schrudde pratiquait des curetages graisseux à lacurette tranchante dès 1964, Fischer avait eu l’idée de l’aspi-ration en 1976, Kesselring et Meyer avaient associé curetageet aspiration en 1976. Mais c’est Illouz qui, en 1977, a l’idéed’utiliser une canule mousse et de faire des tunnels séparés.

La simplicité apparente de la liposuccion a une consé-quence redoutable. Dans tous les pays, de très nombreuxmédecins (et même des auxiliaires médicaux) pensent pou-voir pratiquer la technique d’autant que celle-ci, largement

présentée par les médias, a une popularité croissante. Bienque, dans ces conditions, des complications graves et mêmemortelles d’interventions de liposuccion pratiquées dans descabinets médicaux soient publiées, des médecins généralis-tes ou spécialistes comme des dermatologues, des gynécolo-gues, des phlébologues y voient une source de revenus etfavorisent l’émergence de techniques non chirurgicales, ano-dines seulement en apparence.

5.3. La chirurgie esthétique entre dans le « domainepublic »

Cent ans après les premières tentatives de C. C. Miller, lachirurgie esthétique semble s’être imposée dans le mondeentier.

Après la deuxième guerre mondiale, elle a pris un déve-loppement considérable au Japon, puis dans les autres paysd’Asie du sud-est et en Amérique du sud. Le nombre d’inter-ventions s’est accru d’une manière vertigineuse aux États-Unis et en Europe. Joseph en 1908 faisait état de 43 rhino-plasties ; 370 968 ont été pratiquées en 2001 aux États-Unispar les chirurgiens qualifiés. Ceux-ci avaient opéré cetteannée-là un million et demi de patientes... Ce nombre consi-dérable d’interventions doit être mis en balance avec les6 millions d’actes non chirurgicaux (peeling, laser, microder-mabrasion, injection de toxine botulique...).

La chirurgie esthétique s’est considérablement modifiéedepuis une dizaine d’années.

De plus en plus de jeunes chirurgiens plasticiens ayantreçu une excellente formation pratiquent de manière prépon-dérante ou exclusive la chirurgie esthétique, y associant denombreux actes non chirurgicaux. De plus, trois nouveauxéléments interviennent : la demande de plus en plus précisedes opérés, souvent trop et mal informés par les médias, laconcurrence des « médecins esthétiques » qui n’hésitent pasà pratiquer des actes chirurgicaux comme la liposuccion,enfin les méthodes de marketing généralisées dont bien peuse dispensent.

Le présent et l’avenir ne sont pas le sujet de cet article.Il est probable qu’au XXIe siècle les cicatrices seront de

moins en moins acceptées, les complications chirurgicales demoins en moins tolérées, l’exigence du public de plus en plusgrande.

La chirurgie esthétique restera t–elle « chirurgicale » ?

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