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gestion | fiscalité 32 OptionBio | vendredi 26 octobre 2012 | n° 479 L orsqu’un chèque est remis à l’encaissement, le banquier doit, en règle générale, créditer sans tarder le chèque sur le compte du bénéficiaire. S’il ne procède pas à son inscription en compte immédiatement, il a l’obligation d’en prévenir son client, faute de quoi il engagerait sa responsabilité, sauf stipulations contractuelles contraires ou circonstances particulières. Mais il ne saurait être tenu pour fautif si des chèques tirés par son client étaient rejetés, le ban- quier ne pouvant pas être à l’origine du rejet des chèques et du préjudice en résultant dès lors que le chèque remis à l’encaissement n’aurait pu, faute de provision au jour de la remise à l’encaissement, permettre en tout état de cause le décaissement des sommes correspondant aux chèques rejetés. En l’espèce, le gérant d’une société avait remis un chèque de 32 000 € à l’encaissement sur le compte de la société dans une banque ; le même jour, la banque avait inscrit son montant sur un compte d’attente après avoir été avisée par la banque du tireur qu’il était dépourvu de provision et avait rejeté deux chèques émis par la société dont le montant cumulé de 31 681 € ajouté au découvert existant excédait l’autorisation de découvert. Reprochant à la banque de lui avoir causé un préjudice en n’ayant pas inscrit le montant du chèque de 32 000 € sur son compte courant, la société lui avait réclamé des dommages-intérêts. La Cour de cassation a refusé de faire droit à sa demande. Le banquier auquel un chèque est remis à l’encaissement, s’il ne procède pas à son inscription en compte immédiatement, a l’obligation d’en prévenir son client, faute de quoi il engagerait sa responsabilité, sauf stipulations contractuelles contraires ou circonstances parti- culières. Mais la faute de la banque ne pouvait pas être à l’origine du rejet des chèques et du préjudice en résultant dès lors que le chèque de 32 000 € n’aurait pu, faute de provision au jour de la remise à l’encaissement, permettre en tout état de cause le décaissement des sommes correspondant aux deux chèques rejetés. | Déclaration d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’in- térêts en relation avec cet article. Note *Cass. com. 19 juin 2012 n° 11-17.061 (n° 703 F-PB), Sté Le Bistrot des clercs c/Banque populaire des Alpes. Chèque remis à l’encaissement – inscription en compte Un arrêt de la Cour de cassation du 19 juin 2012* stipule qu’un banquier qui ne procède pas immédiatement à l’inscription en compte d’un chèque remis pour encaissement a l’obligation d’en prévenir son client, sauf circonstances particulières ou stipulations contractuelles contraires. © FOTOLIA Cession d’actions : le pacte d’associés n’est pas transféré automatiquement à l’acquéreur Attention quand vous acquérez des actions, ou des parts sociales, le pacte d’associés conclu entre le cédant et d’autres actionnaires ne vous est pas automatiquement transféré. Après quelques hésitations jurisprudentielles, la Cour d’appel de Versailles vient de rendre un arrêt clair*. D eux actionnaires détenant à parts égales environ 90 % des actions d’une société anonyme depuis de nombreuses années avaient conclu un pacte par lequel chacun s’in- terdisait d’acquérir seul les actions détenues par un minoritaire. Une douzaine d’années plus tard, l’un des deux actionnaires avait augmenté sa par- ticipation dans le capital de la SA sans respecter le pacte. Une filiale de l’autre actionnaire, qui avait acquis de celui-ci les actions objet du pacte, avait agi en responsabilité contractuelle contre l’actionnaire ayant augmenté sa participation en faisant valoir que le pacte lui avait été transmis par le seul effet de la cession des actions. La cour d’appel de Ver- sailles a jugé au contraire que la filiale ne pouvait pas se prévaloir du pacte au motif que l’acquéreur de parts sociales, ou d’actions, ne succède pas de plein droit aux obligations personnelles résultant pour le cédant de conventions extrastatutaires. Le pacte ayant été conclu plusieurs années après l’entrée du cédant dans le capital de la SA sans que cela ait modifié la situation de parité existant à l’origine, la filiale ne démontrait pas en quoi ce pacte constituait le complément nécessaire et indissociable des actions acquises, de sorte qu’il lui aurait été transmis comme un accessoire de celles-ci. La filiale ne pouvait pas non plus tirer argument du maintien, pendant 40 ans, de la parité capita- listique entre les actionnaires de la SA signataires du pacte pour agir en responsabilité car, même si les parties avaient respecté la parité durant cette période, cette circonstance n’interdisait pas à l’une d’elles d’acquérir les actions d’un action- naire minoritaire : les statuts de la SA prévoyaient que la cession des actions entre actionnaires était libre ; la parité, même tacitement acceptée pen- dant de nombreuses années, n’était pas inscrite dans les statuts ou consentie dans une conven- tion extrastatutaire ; elle n’avait pas vocation à se maintenir naturellement pendant toute la durée de la SA. | Déclaration d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’in- térêts en relation avec cet article. GÉRARD GUEZ Avocat à la Cour, Paris [email protected] Note * CA Versailles 22 mai 2012 n° 11/04433, 12e ch., SA Veolia Propreté c/SA Sita France. © DR

Chèque remis à l’encaissement – inscription en compte

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gestion | fiscalité

32 OptionBio | vendredi 26 octobre 2012 | n° 479

Lorsqu’un chèque est remis à l’encaissement, le banquier doit, en règle générale, créditer sans tarder le chèque sur le compte du

bénéficiaire. S’il ne procède pas à son inscription en compte immédiatement, il a l’obligation d’en prévenir son client, faute de quoi il engagerait sa responsabilité, sauf stipulations contractuelles contraires ou circonstances particulières.Mais il ne saurait être tenu pour fautif si des chèques tirés par son client étaient rejetés, le ban-quier ne pouvant pas être à l’origine du rejet des chèques et du préjudice en résultant dès lors que le chèque remis à l’encaissement n’aurait pu, faute de provision au jour de la remise à l’encaissement, permettre en tout état de cause le décaissement des sommes correspondant aux chèques rejetés. En l’espèce, le gérant d’une société avait remis un chèque de 32 000 € à l’encaissement sur le compte de la société dans une banque ; le même jour, la

banque avait inscrit son montant sur un compte d’attente après avoir été avisée par la banque du tireur qu’il était dépourvu de provision et avait rejeté deux chèques émis par la société dont le montant cumulé de 31 681 € ajouté au découvert existant excédait l’autorisation de découvert. Reprochant à la banque de lui avoir causé un préjudice en n’ayant pas inscrit le montant du chèque de 32 000 € sur son compte courant, la société lui avait réclamé des dommages-intérêts. La Cour de cassation a refusé

de faire droit à sa demande. Le banquier auquel un chèque est remis à l’encaissement, s’il ne procède pas à son inscription en compte immédiatement, a l’obligation d’en prévenir son client, faute de quoi il engagerait sa responsabilité, sauf stipulations contractuelles contraires ou circonstances parti-culières. Mais la faute de la banque ne pouvait pas être à l’origine du rejet des chèques et du préjudice en résultant dès lors que le chèque de 32 000 € n’aurait pu, faute de provision au jour de la remise à l’encaissement, permettre en tout état de cause le décaissement des sommes correspondant aux deux chèques rejetés. |

Déclaration d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’in-térêts en relation avec cet article.

Note*Cass. com. 19 juin 2012 n° 11-17.061 (n° 703 F-PB), Sté Le Bistrot des clercs c/Banque populaire des Alpes.

Chèque remis à l’encaissement – inscription en compteUn arrêt de la Cour de cassation du 19 juin 2012* stipule qu’un banquier qui ne procède pas immédiatement à l’inscription en compte d’un chèque remis pour encaissement a l’obligation d’en prévenir son client, sauf circonstances particulières ou stipulations contractuelles contraires.

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Cession d’actions : le pacte d’associés n’est pas transféré automatiquement à l’acquéreur

Attention quand vous acquérez des actions, ou des parts sociales, le pacte d’associés conclu entre le cédant et d’autres actionnaires ne vous est pas automatiquement transféré. Après quelques hésitations jurisprudentielles, la Cour d’appel de Versailles vient de rendre un arrêt clair*.

Deux actionnaires détenant à parts égales environ 90 % des actions d’une société anonyme depuis de nombreuses années

avaient conclu un pacte par lequel chacun s’in-terdisait d’acquérir seul les actions détenues par un minoritaire. Une douzaine d’années plus tard, l’un des deux actionnaires avait augmenté sa par-ticipation dans le capital de la SA sans respecter le pacte.Une filiale de l’autre actionnaire, qui avait acquis de celui-ci les actions objet du pacte, avait agi en responsabilité contractuelle contre l’actionnaire ayant augmenté sa participation en faisant valoir que le pacte lui avait été transmis par le seul effet de la cession des actions. La cour d’appel de Ver-sailles a jugé au contraire que la filiale ne pouvait pas se prévaloir du pacte au motif que l’acquéreur de parts sociales, ou d’actions, ne succède pas de plein droit aux obligations personnelles résultant pour le cédant de conventions extrastatutaires.

Le pacte ayant été conclu plusieurs années après l’entrée du cédant dans le capital de la SA sans que cela ait modifié la situation de parité existant à l’origine, la filiale ne démontrait pas en quoi ce pacte constituait le complément nécessaire et indissociable des actions acquises, de sorte qu’il lui aurait été transmis comme un accessoire de celles-ci.La filiale ne pouvait pas non plus tirer argument du maintien, pendant 40 ans, de la parité capita-listique entre les actionnaires de la SA signataires du pacte pour agir en responsabilité car, même si les parties avaient respecté la parité durant cette période, cette circonstance n’interdisait pas à l’une d’elles d’acquérir les actions d’un action-naire minoritaire : les statuts de la SA prévoyaient que la cession des actions entre actionnaires était libre ; la parité, même tacitement acceptée pen-dant de nombreuses années, n’était pas inscrite dans les statuts ou consentie dans une conven-

tion extrastatutaire ; elle n’avait pas vocation à se maintenir naturellement pendant toute la durée de la SA. |

Déclaration d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’in-térêts en relation avec cet article.

GÉRARD GUEZ Avocat à la Cour, Paris

[email protected]* CA Versailles 22 mai 2012 n° 11/04433, 12e ch., SA Veolia Propreté c/SA Sita France.

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