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ADRAO/ UNIVERSITÉ DE BOUAKÉ CARACTERISATION SEMI DETAILLEE DES BASSINS VERSANTS DANS LA ZONE AGRO-CLIMATIQUE DE BOUNDIALI : CONTRAINTES SOCIO- ECONOMIQUES A L’ADOPTION DES TECHNOLOGIES RIZICOLES. COULIBALY SOSSON LASSINA

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ADRAO/ UNIVERSITÉ DE BOUAKÉ

CARACTERISATION SEMI DETAILLEE DES BASSINS VERSANTS DANSLA ZONE AGRO-CLIMATIQUE DE BOUNDIALI : CONTRAINTES SOCIO-ECONOMIQUES A L’ADOPTION DES TECHNOLOGIES RIZICOLES.

COULIBALY SOSSON LASSINA

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TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION GENERALE.

CADRE THEORIQUE

I- PROBLÉMATIQUE

1- Contexte de l’étude2- Synthèses de quelques travaux de recherche3- La question du transfert et de l’adoption des technologies4- Justification du choix de la zone d’étude5- Position du problème6- Objectifs de l’étude7- Hypothèses

II- MÉTHODOLOGIE

1- Définition de l’unité statistique 1-1. Champ géographique 1-2. Champ sociologique 2- Echantillonnage 3- Processus de l’enquête 4- Technique de collecte des données 4-1. La recherche documentaire 4-2. L’observation 4-3. Le questionnaire 4-5. Interviews de groupes 5- Méthode d’analyse

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CADRE DESCRIPTIF ET ANALYTIQUE

CHAPITRE I : PRESENTATION DU MILIEU PHYSIQUE

1- Climat2- Végétation et sol

CHAPITRE II : CARACTERISATION DE L’ENVIRONNEMENT SOCIO-CULTUREL

1- Historique de la répartition des terres 1-1. Poundiou 1-2. Katièrè 1-3. Fonondara 2- Régime foncier

3- Accès au foncier 3-1. Au niveau interne a- La famille b- Le village 3-2. Au niveau externe

4- Les valeurs culturelles 4-1. Le poro ou le système éducatif Sénoufo 4-2. Le mariage 4-3. Les funérailles 4-4. L’héritage

CHAPITRE III : ORGANISATION SOCIALE ET TECHNIQUE DU TRAVAIL

1- Occupation des terres 1-1. Cultures de rente 1-2. Cultures vivrières

2- Techniques de fertilisation 2-1. Engrais organique naturel 2-2. Engrais chimique 2-3. La jachère

3- Répartition des tâches agricoles4- Modes de culture

4-1. La culture manuelle 4-2. La culture attelée 4-3. La culture motorisée à travers le projet de semi-motorisation àFonondara

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5- La rotation coton/riz6- Relation Agriculture-Elevage

6-1. Association agriculture-élevage 6-2. Conflit agriculteurs-éleveurs

7- Organisation de la main d’oeuvre 7-1. Poundiou 7-2. Katièrè 7-3. Fonondara

8- Calendrier agricole

CHAPITRE IV : CARACTERISATION DE L’ENVIRONNEMENT SOCIO-ECONOMIQUE

1- Les données du marché 1-1. Accès au marché des intrants a- Accès physique b- Accès à crédit 1-2. Mode de paiement et d’utilisation des intrants dans les cultures 1-3. Disponibilité des intrants 1-4. Objectifs de production des différentes cultures 1-5. Accès au marché des produits agricoles 1-6. Prix des produits agricoles et leur saisonnalité 1-7. Conservation et stockage des produits agricoles 1-8. Transport des produits agricoles

2- La riziculture de bas-fond 2-1. La pratique de la riziculture de bas-fond 2-2. Itinéraire technique de la culture du riz de bas-fond 2-3. Le choix des variétés de riz 2-4. Accès des femmes aux intrants 2-5. La main d’oeuvre utilisée dans la culture du riz de bas-fond 2-6. Outils de travail utilisés par les femmes

3- Organisation de la vente du riz4- Difficultés liées à la pratique de la riziculture

4-1. Le riz pluvial 4-2. Le riz de bas-fond

5- Homogénéité des marchés6- Impact des cultures de rente sur la riziculture

7- La question de l’aménagement des bas-fonds

CHAPITRE V : LE CONTEXTE INSTITUTIONNEL

1- Les structures d’intervention en milieu rural 1-1. CIDT 1-1-1. Rôle et objectif

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1-1-2. Vulgarisation 1-2. ANADER 1-2-1. Rôle et objectif 1-2-2. Vulgarisation

2- Difficultés liées à la vulgarisation 3- Les infrastructures sanitaires et éducatifs

3-1. Accès aux soins de santé 3-2. Centres scolaires 4- Accès au crédit 3-1. Les institutions financières 3-2. Les organisations paysannes 3-2-1. gvc et union des gvc 3-2-2. Tontines ou associations féminines

CONCLUSION GENERALE

1- Intérêts et limites de la méthodologie2- Résumé de l’étude3- Résultats

3-1. Contraintes 3-2. Potentialités

4- Recommandations

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-Ahoyo Adjovi (N.R), “Economies de systèmes de production intégrant la culture de riz ausud du Benin: potentialités , contraintes et perspectives”; serie: development economicsand policy -edited by franz heidhues , 1996, p 8 .

2-Mendez del Villar, cité par Ahoyo Adjovi (N.R) in “Economies des systèmes de production intégrant la culture de riz au sud du Benin : potentialités,contraintes et perspectives” 1996, p 7.

3-Hirsch (R.D),“ Le riz et les politiques rizicoles en Côte d’Ivoire (1960-1993) ” Caisse Française de Développement , octobre 1993, p 9 .

4-Randolph (T),Gaye (M); “Tendances rizicoles en AFRIQUE SUB-SAHARIENNE: synthèses des statistiques sur la production, l’importation et la consommation du riz (1990-1992) ” ; ADRAO 1996 .

5- op cit Mendez del Villar, cité par Ahoyo Adjovi (N.R), 1996 p 9.

6-op cit Randolph (T),Gaye (M); ADRAO 1996

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INTRODUCTION GENERALE

La croissance démographique accélérée et la forte urbanisation queconnaissent les pays en Afrique sub-saharienne font que ceux-ci sont confrontésau problème de la satisfaction de leurs besoins alimentaires .Le continent Africain est devenu l’un des principaux pôles d’importation de rizavec environ un quart des importations mondiales; tandis que sa productionrizicole atteint à peine 1,5% de la production mondiale (Ahoyo Adjovi ,1996 )1.Avec un tel déséquilibre, constitué par une demande alimentaire supérieure à laproduction, l’auto-approvisionnement apparaît comme l’une des principalesproblématiques en Afrique (Mendez del villar, cité par Ahoyo Adjovi, 1996 )2.

En Côte d’Ivoire, la consommation du riz a connu une évolutionsignificative depuis l’indépendance; faisant de ce produit une denrée alimentairede base. De 33 kg par tête d’habitant en 1960 (Hirsch, octobre 1993)3; laconsommation du riz est passée à 67 kg entre 1990 et 1992 (Randolph et Gaye,1996)4. Cette demande excessive classe la Côte d’Ivoire dans la catégorie des paysà dépendance rizicole avec un taux d’auto- approvisionnement inférieur à 60 % (Mendez del Villar, cité par Ahoyo Adjovi, 1996 )5.

En effet, avec une production de 687.000 tonnes de paddy, le pays a importéen moyenne annuelle 458.000 tonnes de riz entre 1990 et 1992 pour satisfaire sademande nationale (Randolph et Gaye, 1996 )6.

Toutes ces importations coûtent chères à l’Etat, faisant ainsi de l’auto-approvisionnement en riz un enjeu important de la politique agricole ivoirien-ne. Les paysans pendant longtemps ont pratiqué des cultures extensives,itinérantes et sur brûlis dans le but d’accroître le rendement et d’assurer l’auto-

7-FAO, "Etude de l’impact de la dévaluation du f.cfa sur la compétitivité des productions rizicoles dans les pays de l’UEMOA", rapport N 107/1994 Annexe 5 Côted’Ivoire p 1.

8-Le Bassin Versant est un agro-écosystème constitué par les fonds de valléeset des plaines d’innondation qui peuvent être submergées pendant une partie del’année (bas-fonds proprement dit) les franges hydromorphes ainsi que les pentes etles plateaux contigues qui concourent à l’alimentation hydrique du bas-fonds .

9-Une étude semi-détaillée est une étude basée sur des enquêtes et desinventaires de terrain le long des transects, portant sur l’environnement physique,la végétation et l’utilisation des terres dans les bassins versants d’une sous-unitéagro-écologique donnée.

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suffisance en riz (FAO, 1994 )7. Cette absence ou la non utilisation de technologieappropriée pour la gestion des terres a pour conséquence immédiate ladétérioration de l’environnement. Il apparaît donc que les systèmes de productiontraditionnelle ne sont plus adaptés aux besoins alimentaires actuels de plus enplus croissants .

C’est donc pour pallier ce déficit alimentaire que des politiques rizicoles ontété mises sur place à travers la création de structures d’encadrement et desinstituts de recherche chargés de mettre à la disposition des acteurs du milieurural de nouvelles technologies pour améliorer leurs rendements .

Cependant, on note l’existence de tout un ensemble de technologiesadaptées mis au point par les organismes de recherche. Aussi, serait-on tenté dese demander si ces technologies sont utilisées efficacement par les paysans; si nonpourquoi ou encore quelles sont les contraintes à l’adoption de ces technologies ?

C’est en clair cette interrogation qui justifie l’objet de notre étude portantsur l’identification et la description des Bassins Versants8 dans la zone agro-climatique de Boundiali dans le but de relever les contraintes socio-économiquesà l’adoption des technologies rizicoles

L’étude mise en place par l’Association pour le Développement de laRiziculture en Afrique de l’Ouest (ADRAO ), de par sa spécificité ( étude semidétaillée)9, se donne pour tâche de dégager au niveau socio-économique lesfacteurs institutionnels et communautaires susceptibles de constituer une entraveà l’adoption des technologies générées par la recherche.

Aussi, tout au long de notre travail, nous nous appuierons essentiellementsur des entités plus larges telles que les groupements communautaires, lesinstitutions et les individus clés; qui de par leurs actions et leurs positions dansla communauté, peuvent constituer des centres de décision capables d’avoir unequelconque influence sur l’ensemble de la population dans ses choix et d’impulserles changements majeurs .

10-I Ndabalishye- l’Innovation technique en agriculture: création et transfert- Seminaire Université de Bouaké 1997.

11-Rashid-Noah (A.B), "Aménagement et misse en valeur des bas-fonds pour la production rizicole", ADRAO 1995.

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LE CADRE THÉORIQUE

I- PROBLÉMATIQUE 1- le contexte de l’étude

L’étude initiée par le Département d’Economie de Production del’Association pour le Développement de la Riziculture en Afrique de l’Ouest(ADRAO) s’effectue en partenariat avec le Département d’Anthropologie et deSociologie de l’Université de Bouaké et en particulier la filière socio-économie dudéveloppement rural.

Le thème de l’étude est ainsi libellé : " CARACTERISATION SEMIDETAILLEE DES BASSINS VERSANTS DANS LE ZONE AGRO-CLIMATIQUE DE BOUNDIALI : CONTRAINTES SOCIO-ECONOMIQUES AL’ADOPTION DES TECHNOLOGIES RIZICOLES".

Par "caractérisation semi-détaillée", l’on entend dans le cadre de cette étude,l’identification et la description des principaux facteurs communautaires quiinfluent sur les paysans dans l’adoption des technologies rizicoles.

Notre thème émane d’un projet global portant sur une étude comparativedes bassins versants entre les zones de Boundiali, Danané, Gagnoa et Touba ausujet des contraintes et des potentialités dans l’adoption des technologies rizicoles.Pour ce faire, une caractérisation- diagnostic devra être faite dans chaque zonedans le but d’identifier les meso facteurs pouvant constituer un entrave àl’adoption de ces technologies. L’étude s’inscrit donc dans le cadre du transfert etde l’adoption des technologies en agriculture.

En effet, face à l’écart de rendement entre la technologie proposée par larecherche et la productivité en milieu paysan (Ndabalishye,1997)10, il nousapparaît important d’apprécier le rôle de la recherche agricole afin d’évaluer sonapport dans l’accroissement de la production à travers l’adoption des techniquesqu’elle génère. Ce projet a été mis en place à cause de la nécessité pour l’ADRAOd’effectuer des études d’impact de la recherche agricole sur la production agricole.

De fait, en tant qu’organisme inter-gouvernemental de recherche, l’ADRAOa pour mandat de mener des activités de recherche rizicole, de formation etcommunication pour la région ouest-africaine . Elle tente à travers ses actionsd’améliorer et stabiliser les conditions de vie des ménages des petits paysans touten contribuant à l’accroissement de la sécurité alimentaire (Rashid-Noah (A.B),1995)11. Il apparaît donc indispensable pour cette structure d’entreprendre des

12Les méso-facteurs sont les facteurs qui interviennent au niveau de la communauté, de la regionou de la sous-préfecture .

13-L’étude macro vise à identifier et à décrire les grandes zones agro-écologiques d’Afrique de l’ouest, à partir des informations existantes.

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études sur les contraintes à l’adoption des technologies si elle veut parvenir à sesobjectifs.

Dans ses activités de recherche, l’ADRAO mène des études pour mettre aupoint de nouveaux systèmes de culture, des techniques de gestion de la fertilité dessols, de lutte contre les ennemis du riz et de nouvelles variétés de riz à hautrendement et mieux adaptées aux conditions biophysiques. Toute cettetechnologie ayant un objectif productiviste; elle devrait être adoptée par lespaysans. Cependant, l’attitude de ceux-ci face à ces innovations reste dansl’ensemble variable. Aussi, de façon générale, les chercheurs ont toujours essayéde comprendre cette attitude des paysans en se limitant aux variables classiquesliées aux caractéristiques de l’exploitant, de l’exploitation et de la technologieproposée.

Toutefois, les initiateurs de ce projet pensent qu’au delà de ces variablesclassiques, il existe des meso-facteurs12 qui ne sont pas bien connus et qui peuventconstituer une entrave à l’adoption des technologies. Ce sont donc ces meso-facteurs que nous tenterons d’identifier à travers notre étude.

2- La synthèse de quelques travaux de recherche

Le transfert d’une technologie nécessitant au préalable une connaissanceapprofondie du milieu pour lequel elle est destinée; l’ADRAO individuellement ouen partenariat avec d’autres organismes de recherche à effectuer des études decaractérisation à l’échelle détaillée, semi détaillé et macro.

C’est donc dans ce cadre qu’en 1990, l’ADRAO a initié conjointement avecl’Institut International d’Agriculture Tropicale (IITA), le Départementd’Agronomie; section science des cultures tropicales de l’Université Agricole deWageningen (WAU) et du Centre de Recherche Intégrée sur les Terres, les Solset l’Eau(SC-DLO); le projet “caractérisation des agro-écosystèmes de cultures duriz en Afrique de l’Ouest ”. Cette étude MACRO13 avait pour but final dedévelopper des technologies de gestion des sols, des eaux et des cultures en vued’une utilisation intensive et durable des bas-fonds à l’attention des petitsexploitants des systèmes de culture du riz dans la sous région. A la fin de ce projet,des secteurs clés représentatifs (en ce qui concerne les bas-fonds ) ont étésélectionnés dans certains pays de la sous-région. S’agissant de la Côte d’Ivoire,on peut citer les secteurs de Boundiali, de Gagnoa, de Touba auxquels Danané futajouté récemment. Pour les initiateurs de ce projet, il était question de développer

14-W.Andriesse, L.O.Fresco, N.Van Duivenbooden et P.N.Windmeijer, “caractérisation multi-échelle des agro-écosystèmes de bas-fonds en Afrique de l’Ouest ”, Netherland Journal of Agriculture Science, 1994, p 159-160 .

15-A.B.Rashid-Noah; “Aménagement et mise en valeur des bas-fonds pour la production rizicole” ; ADRAO , 1995, p 6.

16-Becker (L) et Diallo (R), “Caractérisation et classification des écosystèmes rizicoles de la Côte d’Ivoire ” ADRAO , 1992 .

17-Windmeijer (P.M), Van Duivenbooden (N) et Andriesse (W), “Caractérisation semi- détaillée des vallées interieures en Côte d’Ivoire ”, SC-DLO, Wageningen, décembre 1994.

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en plus des cultures rizicoles de l’écosystème de plateau, celles des bas-fonds envue de leur utilisation plus efficace .

C’est dans ce contexte qu’il a été mis en place le "Programme ContinuumRiz Pluvial/Riz de Bas-Fonds" dans le but de combiner l’étude de ces différentsécosystèmes.

En effet, les bas-fonds constituent une importante écologie de production deriz avec un potentiel de production élevé du fait d’une plus grande disponibilité eneau . Cependant , malgré leur nombre important en Afrique de l’Ouest (estimésentre 22 et 52 millions d’hectares) (Andriesse et al, 1994 )14, et leurs capacités deproduction, les bas-fonds ne sont pas utilisés efficacement de sorte que le potentielde production maximum n’est pas toujours atteint (Rashid-Noah,1995)15. Danscette situation de faible valorisation des terres inondables, une réelle connaissancedu milieu s’avère nécessaire pour mettre en place des techniques rizicoles mieuxadaptées à l’environnement .

En 1992, BECKER et DIALLO ont effectué au compte de l’ADRAO une“Caractérisation et classification des écosystèmes rizicoles de la Côte d’Ivoire”. Cesauteurs ont fait l’identification et la description détaillée des systèmes rizicoles auniveau national afin de permettra aux chercheurs de mettre au point destechniques rizicoles améliorées et plus adaptées aux besoins des paysans etconditions du pays (Becker et Diallo, 1992 )16.

En outre, le Centre de Recherche Intégrée sur les Terres, les Sols et lesEaux (SC-DLO) en collaboration avec l’ADRAO, a effectué une étude sur lesvallées intérieures en Côte d’Ivoire. Celle-ci a permis d’apporter un complémentd’informations à la description actuelle de l’environnement physique et del’utilisation des terres des systèmes de bassins versants (Windmeijer et al1994 )17.

On note également que l’ADRAO possède une base de données trèsdétaillées sur les paysans de Boundiali, Gagnoa et Touba à partir des enquêtesmenées de 1992 à 1995. Celle-ci fourni des informations sur les caractéristiques

18-IRRI: Institut International de Recherches sur le Riz.

19-op cit I.Ndabalishye, Université de Bouaké, 1997.

20-R. Boudon ,

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des exploitations (les superficies des différents cultures , leur localisation) et desexploitants(démographie, âge, sexe, ethnie, niveau d’instruction).

Cependant, toute cette série de caractérisations s’est surtout focalisées surl’aspect biophysique de l’environnement; c’est-à-dire la morphologie des bassinsversants, la géologie des sols (la fertilité chimique, la toxicité ferreuse, lescaractères physiques, l’infiltration et la perméabilité ), l’hydrologie, le climat et lavégétation.

Notre apport consistera à présent à porter une analyse sociologique surl’environnement des paysans, leur comportement et la gestion des ressources desorte à mieux cerner leur attitude vis à vis des bas-fonds et des techniquesrizicoles modernes.

En effet, les nouvelles technologies rizicoles ne peuvent être adoptées qu’enfonction des conditions biophysiques, socio-culturelles et socio-économiques dumilieu. Les stratégies de recherche et de développement ne doivent donc pasprendre en compte uniquement les facteurs climatiques, hydrologiques ouédaphiques (facteurs liés au sol et qui ont une influence profonde sur la répartitiondes êtres vivants ); mais également la démographie, le régime foncier,l’organisation du travail, les marchés, les risques en matière de santé et les diversfacteurs socio-économiques pouvant influer sur les paysans dans l’adoption destechnologies.

3-La question du transfert et de l’adoption des technologies.

Elle est un sujet majeur de préoccupation depuis de longues années. Eneffet, dès 1965 , l’IRRI18 s’interrogeait déjà sur l’origine de la différence entre lesrésultats obtenus en station de recherche et ceux enregistrés chez les paysans.Cette différence fut d’ailleurs baptisée "yield gap" ou écart de rendement(Ndabalishye, 1997)19.

Face à la complexité de la question de l’adoption des technologies, desauteurs et des centres de recherche ont tenté de comprendre le comportement despaysans et de prévoir leurs réactions.

Aborder le sujet de l’adoption des technologies en milieu rural, c’est poserle problème de la variabilité de l’attitude des paysans face à ces innovations.Mais au delà de ce problème, il s’agit de comprendre la logique paysanne qui guideces derniers dans leurs choix.

Pour Boudon (R)20, ce qui est important dans l’analyse sociologique, c’estla compréhension des actions de l’individu. Car en effet, les individus ont debonnes raisons de faire ce qu’il font. S’ils décident de ne pas adopter telle ou telle

21-P.M.Bosc, P.Calkin, J-M.Yung; “Développement et Recherche Agricole dans les PaysSahéliens et Soudaniens d’Afrique” Les synthèses du CIRAD P 10-17

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technologie proposée; ils ont des raisons suffisantes qu’il faut chercher à identifier.En tant qu’individus conscients, les choix effectués par les paysans proviennentd’un calcul rationnel basé sur leurs intérêts et profits économiques. Il serait doncutile voire indispensable d’associer les paysans aux prises de décisions. Cetteassociation des paysans aux projets s’explique par le fait qu’ils ne doivent plus êtreconsidérés comme de simples sujets mais plutôt comme des acteurs dudéveloppement; de telle sorte qu’ils adhèrent aux innovations et aux projets misen place.

Boudon nous permet de comprendre qu’il n’est plus question de transférern’importe quelle innovation technique aux paysans sans tenir compte de leurs avisou de leurs besoins immédiats.Le paysan à travers un calcul rationnel, sait où se situent ses intérêts. Pour doncéviter l’échec de tout transfert de technologies, des études doivent être faites encollaboration avec les paysans de sorte à mettre au point des techniques quicoïncident avec leurs besoins.

Ainsi donc, par rapport à notre thème de recherche, nous tenterons desavoir si les technologies rizicoles présentes rentrent dans le cadre despréoccupations agricoles des paysans. Ceux-ci sont-ils plus portés sur la culturedu riz ou sur celle d’autres produits ?

C’est la place de choix occupée par la riziculture dans la zone qui vacertainement orienter les paysans vers les techniques qui s’y rattachent . Toutefois, le manque d’intérêt pour une culture ne saurait constituer la raisonsuffisante de l’inutilisation de ses techniques. D’autres facteurs sont à considérer.

En effet, comme le font remarquer Bosc, Calkin et Yung in “Développementet Recherche Agricole dans les Pays Sahéliens et Soudaniens d’Afrique”21; laréaction des paysans aux propositions de recherche est variable. A la réponsebinaire (adoption globale ou refus global), s’ajoutent trois réactions intermédiaires.D’abord l’adoption réservée, seulement une minorité des paysans adoptent lechangement ou ils l’adoptent à un niveau en dessous des recommandations;ensuite l’adoption détournée, où le paysan adopte la technologie mais pas pour lesraisons escomptées. Il attribut une autre fonction à la technologie et enfinl’adoption sélective ou partielle à travers laquelle le paysan n’adopte pas tout le"paquet technologique" qui lui est proposé mais seulement certains éléments.

Pour ces auteurs, différents facteurs expliquent dans l’ensemble cetteattitude des paysans face à ces innovations.Parmi ceux-ci, on peut citer l’absence de débouchés rémunérateurs pour lesproduits, le coût élevé des intrants nécessaires à la technologie, la question de lasécurité foncière, le problème de la main d’oeuvre et les valeurs socio-culturelles.

Bosc (P.M), Calkin (P) et Yung (J-M) identifient les diverses réactionspossibles des paysans et les raisons qui s’y rapportent. Ceci élargit notre champd’investigation quant à la recherche des contraintes se rapportant à l’objet de

22-Groupe de Travail Coopération Française ; “Les Interventions en Milieu Rural ” , Ministère de la Coopération et du Développement , 1989

23-op.cit- I.Ndabalishye,Université de Bouaké, 1997

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notre étude. Parmi les raisons évoquées, on note entre autre la sécurité foncièreet les valeurs socio-culturelles des paysans. Il s’agira donc pour nous de porterune analyse sur ces facteurs pour voir dans quelle mesure ils pourraientconstituer une entrave à l’adoption des technologies rizicoles dans la zone deBoundiali.

Selon le Groupe de Travail Coopération Française dans "Les Interventionsen Milieu Rural"22, on est amené à faire de façon générale dans le milieu rural undouble constat :

Le premier c’est que les paysans adoptent les techniques qui répondent àleurs objectifs ou priorités comme par exemple la recherche de la sécuritéalimentaire, l’occupation maximale de l’espace ou l’augmentation de leurtroupeau; et le second provient du fait que l’adoption par les producteursd’innovations techniques, économiques et sociales ne résulte pas de la seuleapplication d’une méthode de vulgarisation, si performante soit-elle. De nombreuxautres facteurs entrent en jeu et notamment l’existence ou l’absence d’unenvironnement socio-économique incitatif et sécurisé.

Ndabalishye (I) dans "l’Innovation Technique en Agriculture: création ettransfert"23 partage cet avis pratiquement car selon lui, l’entrave à l’innovationpeut être d’ordre technique, économique, social ou culturel. Mais il va plus loinpour dire que "la technologie fait corps avec le peuple qui l’a mise au point" desorte qu’il est difficile pour un peuple d’adopter une technologie venant d’ailleurs.C’est en cela qu’il dit qu’un "transfert pur et simple sous d’autres cieux peut êtrevoué au sort comparable à celui que l’organisme réserve à tout corps étranger".Cependant, l’auteur fait remarquer que tout transfert de technologies n’est pasessentiellement voué à l’échec à condition d’arriver à les apprivoiser pour lesintégrer dans la civilisation hote.

Le Groupe de Travail Coopération Française et Ndabalishye à travers leursdifférents écrits, font en quelque sorte le résumé des deux précédents; à ladifférence que le dernier nous apprend qu’une technologie même si elle est rejetéeau départ, peut être transformée (apprivoisée) et adoptée.

De façon générale, tous ces auteurs nous ont donné un aperçu des raisonsmajeures qui pourraient empêcher les paysans à adopter les technologies qui leursont proposées.

Le choix de ceux-ci ou leur attitude n’est pas le fait du hasard, ils onttoujours des raisons suffisantes qui soutiennent leur comportement. Les différentsfacteurs mentionnés par ces auteurs constituent pour nous un guide dansl’orientation de nos investigations. Il nous permettent d’avoir une vue beaucoup

24-op cit-W.Andriesse, L.O.Fresco, N.Van Duivenbooden et P.N.Windmeijer; 1994 p170

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plus large sur les éléments devant être pris en compte dans l’identification descontraintes à l’adoption des technologies rizicoles.A l’analyse de ces facteurs, l’on constate que ces auteurs n’ont pas fait cas desfacteurs éducatifs, sanitaires, infra-structurels ou encore institutionnels. Ceux-cine doivent pourtant pas être occultés car pouvant déterminer le choix des paysans.Cette limite devra être comblée au cours de l’étude dans la zone de Boundiali.

4- justification du choix de la zone d’étude.

Notre zone d’action est un bassin versant défini par l’ensemble des terresde versant et de bas-fonds. Ce bassin versant est situé dans la région de Boundialiau nord-ouest de la Côte d’Ivoire.Boundiali a été retenu comme zone d’étude car elle est l’un des sitesd’expérimentation de l’ADRAO ; donc par conséquent mieux disposée à accueillirune telle étude. Cette zone fait parti des secteurs clefs sélectionnés en Côte d’Ivoirepar l’ADRAO à cause de leur représentativité en ce qui concerne les bassinsversants et les bas-fonds.

5- Position du problème.

A Boundiali, le riz n’est pas une culture de rente bien que le milieu naturelse prête à sa pratique intensive. C’est plutôt la culture du coton qui est laprincipale source de revenu. Le riz dont 8o% est produit sur lesplateaux(Andriesse et al, 1994)24 sert surtout à la consommation de telle sorte quela quantité réservée à la vente est pratiquement nulle. En outre, l’on constateégalement que dans cette zone seules les femmes qui ont atteint un âge avancécultivent dans les bas-fonds. Les hommes et les jeunes femmes sont sur lesplateaux. C’est dans un tel contexte que la production rizicole n’atteint pas desquantités élevées de sorte à permettre une grande commercialisation du riz.

De façon générale, un environnement se prête à la riziculture lorsque les ressources édaphiques et hydriques sont disponibles en quantité suffisante etquand la fertilité du sol ne fait pas défaut. Dans l’écosystème pluvial, la culture duriz dépend en grande partie de l’eau de pluie. Mais avec sa situation en zone desavane guinéenne, Boundiali a une seule saison des pluies concentrée sur unepériode d’environ quatre mois. Ce qui fait que la riziculture pluviale ne peutfournir qu’une seule production dans l’année.

Mais à côté de cette insuffisance due essentiellement aux conditionsédaphiques et hydriques, Boundiali possède un autre écosystème pouvant luipermettre d’accroître sa production rizicole annuelle. Cet écosystème est le Bas-Fond.

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Les bas-fonds du fait de leur potentiel hydrique élevé permettent uneutilisation intensive et durable avec deux productions rizicoles annuelles.Cependant, l’on constate que cette entité n’est pas utilisée de façon efficace de tellesorte que seule un catégorie de femmes y cultivent .

Face donc à cette situation une interrogation s’impose : Pour quelles raisonsseule une frange de la population féminine exploite les bas-fonds ?

L’analyse de cette attitude des paysans est importante pour comprendre etexpliquer la logique de leur choix en rapport avec leurs objectifs et leurscontraintes quant à l’adoption des techniques rizicoles.La présente étude cherche à comprendre pourquoi est-ce que les paysans nes’intéressent pas dans leur grande majorité à la culture du riz de bas-fonds etn’utilisent pas les techniques rizicoles modernes.

De part le mandat de recherche rizicole de l’ADRAO, les résultats de notreétude permettront d’obtenir des informations utiles à la compréhension descomportements des paysans liés aux facteurs meso, de sorte à guider les décideurset les chercheurs vers les priorités de ceux-ci et à la mise au point de nouvellestechnologies mieux adaptées à l’environnement socio-économique. Ce type derecherche concerne la recherche-action où encore la recherche développement.

Une telle étude ne serait possible si dès le départ nous ne nous sommes pasfixés des objectifs à atteindre.

6- Objectifs de l’étude

L’objectif recherché à travers cette étude est l’identification des mesofacteurs socio-économiques qui influent sur les paysans dans l’adoption destechnologies rizicoles.

Cet objectif global se subdivise en deux objectifs spécifiques qui consistentà:-Identifier les stratégies adoptées par les paysans dans la gestion des ressources.-présenter les déterminent socio-économiques susceptibles d’avoir un impact surla production rizicole.

7- Hypothèses

Pour mener à bien cette étude nous avons formuler un certain nombred’hypothèses.

A partir des constats effectués sur le terrain, l’on pourrait dans un premiertemps affirmer que la disponibilité d’autres sources de revenus empêche l’adoptionde la riziculture en tant que culture de rente.

En effet, le coton et l’anacarde constituent les principales sources derevenus des paysans (même si la culture de l’anacarde est beaucoup plus récente).Ceux-ci dans leur grande majorité pratiquent la culture du coton qui présentecertainement des avantages.

25-Le bassin versant est un agro-écosystème contitué par les fonds de vallée et des plainesd’inondation qui peuvent être submergées pendant une partie de l’année (bas-fonds proprement dit),les franges hydromorphes ainsi que les pentes et plateaux contigues qui concourent à l’alimentationhydrique du bas-fonds.

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Partant de la position des femmes dans la société traditionnelle Sénoufo,(elle n’a pas de pouvoir de décision et a un rôle de productrice et de reproductrice),il ne serait pas risqué d’affirmer dans un second temps que le non contrôle desmoyens de production par les femmes freine le développement de la riziculture debas-fonds. Elles ne peuvent en effet disposer à leur guise des moyens nécessairesà la mise en valeur efficace des bas-fonds.

Vue également la frange de la population féminine (les vieilles femmes)cultivant dans les bas-fonds, nous pouvons dire aussi que celles-ci ne peuvent pasmettre en valeur de façon optimale cette entité (bas-fonds) du fait de leur âgeavancé.

Ces hypothèses ne sauraient constituer une liste exhaustive, il existecertainement d’autres facteurs qui représentent des contraintes pour les paysansdans l’adoption des technologies rizicoles.

Nous tenterons de les identifier tout au long de notre étude et pour ce faire,nous nous sommes posés les interrogations suivantes:Quels sont les objectifs de production du riz?Comment les femmes accèdent-t-elles au foncier?Quelles sont les difficultés liées à la pratique de la culture du riz et les avantagesdes différentes sources de revenus?

II- MÉTHODOLOGIE 1- Définition de l’unité statistique

1-1. Champ géographique

Cette étude s’effectue dans le département de Boundiali au nord-ouest dela Côte d’Ivoire et plus précisément dans le Bassin Versant25 de Poundiou. La ville de Boundiali constitue un important carrefour dans le nord. Elle se situeau croisement de l’axe Korhogo-Odienné et de l’axe Tingrele-Seguela avec uneliaison direct sur Mankono. Notre zone d’étude se compose des villages dePoundiou, Katièrè et Fonondara. Ce bassin versant est situé à 5 km de la voiereliant Korhogo à Boundiali et de là; à 19 km du chef lieu de département.

1-2. Champ sociologique

Les villages du Bassin Versant de Poundiou sont peuplés en grandemajorité de Sénoufo. Les allogènes sont trés peu avec la présence de quelquesMalinké à Poundiou et à Fonondara et d’un petit campement d’éleveurs Peuhl

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approximité de Katièrè. Quelques éleveurs Peuhl (très peu) résident à Fonondara.Aucun allochtone ne vit dans ces villages.Nous nous intéresserons aux paysans cultivant dans ce bassin versant qu’ilssoient autochtones ou allogènes et hommes ou femmes.

2- Echantillonnage

L’échantillonnage est la technique qui consiste à choisir la partie pourreprésenter le tout. Il s’agira donc pour nous de prélever un petit nombred’individus appelé échantillon, appartenant à l’univers de l’enquête ou populationet sur lesquels portera notre enquête. Pour que ce petit nombre d’individus puisseeffectivement représenter le tout, il faut qu’il soit choisit de telle sorte qu’ilcontienne toutes les caractéristiques de la population de départ.Concernant notre étude, nous avons choisit un échantillon de 30 personnes surl’ensemble des trois villages; soit 10 individus par village.

Ce nombre a été retenu pour l’échantillon car en plus du questionnaireindividuel, nous avons procédé à des interviews de groupe au niveau chaquevillage .

Toutefois, lors des enquêtes, nous n’avons pas pu interroger le nombred’individus prévus. En effet, à Poundiou il n’existe qu’un seul allogène résidentque nous avons interrogé au lieu de trois. L’absence d’allogènes à Katièrè nous aconduit à interroger le chef d’un campement de Peuhl situé près du village. Parmiles allogènes que nous avons interviewer à fonondara, il y avait un éleveur Peuhl.

La technique qui nous a permis de choisir notre échantillon est la méthodedes choix raisonnés. Nous avons opté pour cette méthode parce que nous nedisposons pas d’une base de sondage; c’est-à-dire la liste exhaustive des paysans,leurs activités et leur position dans la communauté de sorte à identifier les acteursclefs capables d’influer sur l’ensemble de la population dans ses prises de décision.C’est donc à partir d’un raisonnement que nous avons choisi les personnessusceptibles de faire partir de notre échantillon.

Celles-ci sont réparties de la façon suivante :-2 femmes autochtones-3 hommes allogènes-3 jeunes autochtones-2-hommes autochtones

3- Processus de l’enquête

Il s’agit d’une enquête directe qui va s’effectuer en différentes étapes. Desdonnées secondaires seront recueillies sur la population et les infrastructures. Unquestionnaire sera administré aux acteurs clés (les personnes qui occupent uneposition de meneur et capables d’impulser des changement dans la communauté).Des interviews de groupes comportant au moins quinze personnes seront réaliséesavec une assemblée villageoise; qui regroupe tout le monde sans distinction de

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sexe, d’âge et d’ethnie; avec des groupes spécialisés tels que les groupementsféminins, les associations de jeunes les groupements de producteurs et le conseildes anciens. Nous aurons des entretiens avec les responsables des structuresgouvernementales et les Organisations Non Gouvernementales(ONG) quiinterviennent dans le milieu rural.

A Fonondara, un questionnaire spécial sera adressé à certains paysanspour aborder la question d’un projet de semi-motorisation.

4- Techniques de collecte des données

4-1. La recherche documentaire

Elle nous a conduit à visiter le centre de documentation de l’ADRAO, lesbibliothèques de l’ORSTOM d’Abidjan (petit bassam) et de l’Université de Bouakéainsi que les documentations des structures gouvernementales où nous noussommes rendus (ANADER et CIDT).

Cette recherche documentaire nous a permis de glaner plusieurs typesd’informations portant sur :-les travaux de recherche de l’ADRAO,-la question du transfert et de l’adoption des technologies en milieu rural,-l’organisation socio-culturel et la gestion du foncier en pays Sénoufo et enfin,-les actions des structures étatiques et non étatiques qui interviennent en milieurural.

4-2. L’observation

Elle a consisté à résider pendant 45 jours dans les différents villages de lazone de Boundiali; soit deux semaines par village avec de brefs séjours àBoundiali qui nous permettaient de faire le point de l’enquête et de relever leséventuelles insuffisances. Tout au long de cette période, nous avons établi desliens d’amitié avec les populations paysannes de sorte à obtenir le maximumd’informations sur l’objet de notre étude et à observer directement l’organisationdes paysans dans la gestion des ressources.

4-3. Le questionnaire

Le questionnaire administré individuellement aux femmes et aux hommesest venu concrétiser la technique de l’observation. Il a porté à la fois sur desaspects touchant le paysan individuellement, tels que; le mode d’organisation deses cultures, les techniques utilisées, son accès au marché, ses difficultés et sur desaspects communautaires tels que le régime foncier, le système familial etl’héritage.

Dans le but de venir en appui aux techniques déjà réalisées, des entretiensont été nécessaires.

26-ANADER: Agence National d’Appui au Dévellopement Rural

27-CIDT: Compagnie Ivoirienne pour le Développement du Textile

28-Windmeijer (P.N), Van duivenbooden (N) et Andriesse (N) -caractérisation semi détailléedes vallées intérieures en Côte d’Ivoire- sc-dlo, Wageningen, décembre 1994.

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4-4. Les entretiens

Ces entretiens nous ont permis de rencontrer les responsables de l’ANADER26, la CIDT27, l’Union des GVC de Boundiali et leurs conseillés agricolesinstallés dans les villages. Nous avons parlé des actions de ces différentesstructures dans la zone de Boundiali, les objectifs recherchés et les difficultésqu’elles rencontrent au cours de leurs actions.

4-5. Interviews de groupes

A travers ces interviews de groupes, nous voulons susciter la discussionentre les paysans concernant certains sujets dans le but de saisir les différentsavis de ceux-ci sur les points pouvant être l’objet d’accord et de divergence.Ces informations étant ainsi glaner, il s’agit pour nous à présent de précéder àleur analyse.

5- Méthode d’analyse

Cette étude se veut à la fois descriptive et analytique. Il s’agit pour nous defaire une caractérisation(identification et description) physique et socio-économique de l’environnement. Celle-ci sera suivie d’une analyse dans le but dedéceler les différents facteurs pouvant constituer des contraintes et despotentialités à l’adoption des technologies rizicoles.

LE CADRE DESCRIPTIF ET ANALYTIQUE

CHAPITRE I : PRÉSENTATION DU MILIEU PHYSIQUE

1-Climat (sources)28

La zone de Boundiali appartient à un climat tropical caractérisé par deuxgrandes saisons :-Une saison des pluies (un régime de pluies monomodal) concentrée sur unepériode de quatre mois allant de Juin à Septembre.

29-Daubrey (A), Akassey (R.P)- le guide de l’agriculteur en Côte d’Ivoire- éditions prat/europaParis 1992 p25

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-Une saison sèche couvrant le reste de l’année et qui se particularise parl’Harmattan; un vent sec et desséchant qui souffle dans la région en décembre. La pluviométrie facteur prépondérant qui conditionne et rythme les activitésagricoles est assez faible dans la région. Les précipitations annuelles atteignent1440 mm d’eau de pluie. Le mois d’Août est le plus pluvieux.

2-Végétation et sol (sources)29

Boundiali se trouve dans la zone de savane guinéenne. On y rencontrequelques forêts claires avec de grands arbres tels que le baobabe et le néré.La fertilité des sols favorables à la mise en culture est déterminée essentiellementpar leurs propriétés physiques en particulier la profondeur et la texture (capacitéde rétention de l’eau). Les sols cultivables au nord de la Côte d’Ivoire issus degranites ou de schistes sont des sols remaniés-modaux. Les propriétés chimiquesde ces sols sont très variables.

Dans la région de Boundiali, les sols remaniés-modaux issus de schistes sonttrès gravillonnaires, mais ont une teneur élevée en argile. Le potentiel de fertilitéest moyen à médiocre. Les cultures vivrières et de coton sont possibles.En position de replat et de pente inférieure, des sols profonds assez argileux ontun potentiel de fertilité beaucoup plus élevé et sont très recherchés pour la culturedu coton, mais leur extension est toujours limitée.

CHAPITRE II : CARACTERISATION DE L’ENVIRONNEMENTSOCIO- CULTUREL

1- Historique de la répartition des terres

1-1. PoundiouLe village a été crée par un chasseur du nom de Soro Tchornan. Il a ensuite

fait appel à deux de ses amis; Ngozie et Tagnan pour habiter avec lui. C’est ainsique les terres du village ont été divisées en trois parties. Mais par la suite,d’autres familles sont venues s’installées à Poundiou. Au fur et à mesure qu’ellesvenaient, on leur attribuait des terres; ce qui a fait que Poundiou compteaujourd’hui douze (12) familles chefs de terres. Dans cette répartition initiale desterres, les bas-fonds qui entouraient le village ont été réservés au chef du villageet ce sont ses descendants qui gèrent aujourd’hui tous les bas-fonds du village.Les personnes qui désirent cultiver dans les bas-fonds font la demande au près dela famille du fondateur du village

1-2.katièrè

30-Coulibaly (S), "Le paysan Sénoufo", NEA Abidjan, 1978, p 113.

31-Delafosse (M), cité par Coulibaly (s)- op cit- 1994 p114.

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La répartition des terres s’est faite entre le fondateur Katièrè (un chasseur)et les deux premières familles qui se sont installées dans le village . Tous les bas-fonds du village ont été conservés par le chef du village. D’autres familles sontvenues par la suite, mais elles n’ont pas eu de terres à elles. Les trois familles chefsde terres leur on accordé des terres pour cultiver uniquement et elles n’ont pas dedroit de propriété sur ces terres.

1-3.FonondaraFonondara au départ était un campement crée par un chasseur forgeron du

nom de Kponipari. Ce campement est devenu par la suite un village avec l’arrivéed’autres familles. Kponipari a fait de son fils aîné le chef du village car ses activitésne lui permettent pas de rester en place. A la mort du père, le fils a procédé aupartage des terres entre les différentes familles présentes. Celles qui venaientaprès recevaient de petites parcelles. Dans cette répartition des terres, il n’y a paseu de distinction entre les plateaux et les bas-fonds. Les treize familles chefs deterres conservaient les bas-fonds qui s’y trouvaient et en devenaientautomatiquement propriétaires.

2-Régime foncier

Le régime foncier en vigueur dans notre zone d’étude est de type coutumier.Les autochtones ont accès à la terre par le biais du droit coutumier traditionnel.Selon celui-ci, l’individu accède à la terre à l’intérieur de sa famille. La familledans le milieu Sénoufo désigne le lignage.

Ce mode d’accès est complété par l’emprunt qui ne constitue pas pourautant une entrave au respect des valeurs traditionnelles régissant le régimefoncier. Le sénoufo considère la terre comme une divinité (Coulibaly ,1978)30. Ellene constitue pas une simple matière d’où l’on peut extraire diverses ressources,mais une sorte d’être vivant, une matière animée, habitée par un souffle divin quiest l’objet d’actes sacrificatoires et de vénérations à travers l’entité que représentela terre.

Elle revêt ainsi le statut d’une puissance surnaturelle dont on ne peuts’approprier comme un vulgaire objet. C’est en cela qu’un proverbe de la Côted’Ivoire dit que "ce n’est pas l’homme qui possède la terre, c’est la terre qui possèdel’homme"31. Dans ces conditions, il serait facile de comprendre l’attitude duSénoufo face à cette entité "divine".

Même si la terre revêt un telle importance, il est possible d’y avoir accès.Comment cela s’effectue-t-il et qui en a droit?

32-La famille ici se refère à la famille matrilinéaire.

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3- Accès au foncier

Dans l’ensemble, le mode d’accès au foncier est le même dans les villages denotre site avec néanmoins quelques points de divergences. Le mode d’accès n’estpas le même selon qu’on soit un homme ou une femme.Nous allons considérer différents niveaux pour voir comment cela s’effectue.

3-1. Au niveau interne a- la famille 32

Il y a un chef de terres dans les différentes familles qui possèdent des terres.A l’intérieur de celles-ci, c’est le plus âgé des hommes qui devient chef de terres.Le statut de chef de terres est réservé d’emblée aux hommes. A Poundiou, Katièrèet à Fonondara, en aucun cas une femme ne peut être chef de terres. Pour ceshommes, la terre est une entité sacrée autour de laquelle il ne doit y avoir desdisputes au risque de provoquer de graves malheurs dans le village. C’est pourcette raison que la gestion des terres d’une famille est toujours confiée auxhommes.

S’il n’y a plus d’hommes dans une famille après la mort du chef de terres, lesanciens du village se réunissent et confient la gestion des terres de cette familleà une autre famille qui a le même nom ou des liens proches avec cette dernière.

Mais si ce chef de terres doit prendre des décisions concernant les terres quilui sont confiées, il doit demander au préalable l’accord des vieilles femmes de cettefamille. A la naissance d’un garçon, ce dernier restera avec le vieux pourapprendre comment gérer les terres et au moment ou il sera capable de le faire, ildeviendra chef des terres de sa famille.

A l’intérieur de la famille tout le monde (homme, femme et jeune) peutaccéder à la terre. Il n’y a pas de moment précis pour cela; dès que l’individu sesent capable de cultiver, il sollicite une parcelle au près du chef de terres et on lalui accorde. Aucune distinction n’est faite selon les différents écosystèmes et laqualité de la terre. Le pourvoyeur de terre choisit lui même la parcelle qu’il désirmettre en valeur à condition qu’elle ne soit pas une terre sacrée. Au niveau de lafamille, le mode d’accès à la terre est l’héritage pour les hommes. La femme nepeut hériter de la terre; elle y accède par emprunt soit au sein de sa proprefamille, soit celle de son mari ou encore par un autre membre du village.Toutefois, elle n’a pas de droit de propriété sur la parcelle qu’elle exploite mais toutsimplement un droit d’usage.

b-Le villageIl n’y a pas de chef de terres au niveau de chaque village. Néanmoins, le

chef du village est considéré comme tel à titre symbolique dans la mesure où c’estson ancêtre qui a reparti les terres entre les différentes familles. C’est également

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lui (le chef) qui tranche les litiges fonciers car il connaît les délimitations des terresdes différentes familles. Mais malgré ses attributs, le chef du village ne peutpermettre l’accès aux terres d’une famille à un membre du village. Il doitnécessairement avoir l’approbation du chef de terres de cette famille. L’individuqui sollicite la terre doit s’adresser au chef de terres en lui apportant un morceaude bois ou de la farine de maïs. La terre est accordée gratuitement et aucunerémunération en nature ou en espèce n’est exigée en retour.

En outre, il est possible pour les paysans d’accéder aux terres des villagesvoisins pour cultiver en apportant du bois ou de la farine de maïs au chef de terres.

Le mode de cession des terres dans le village se fait essentiellement paremprunt aussi bien au niveau des femmes que des hommes. Il existe dans lesvillages certaines familles qui ne possèdent pas de terres; elles sont donc obligéesd’en emprunter pour cultiver. De même une famille peut avoir des terres; mais dufait de leur éloignement ou de l’épuisement de celles-ci; ils profèrent en emprunteraux autres pour les mettre en valeur.

3-2.Au niveau externeL’accès au foncier à ce niveau se fait également par emprunt. Les allogènes

s’adressent au chef de terres en lui apportant un morceau de bois ou de la farinede maïs et cette cession n’est pas suivit d’une quelconque rémunération.

Cependant, ceux-ci ne peuvent en aucun cas devenir propriétaires deterres. Le droit d’usage dont-ils bénéficient leur permet de pratiquer des culturesvivrières et des cultures de rente; mais s’agissant des cultures pérennes(anacarde), ils doivent d’abord avoir l’accord du propriétaire de la terre. Lesenfants des allogènes ne peuvent pas en outre hériter des terres exploitées parleurs parents. Toutefois, ils peuvent continuer de les exploiter s’ils en font lademande au propriétaire.

En somme, la terre n’est pas objet de vente du fait de la valeur sacrée quelui accorde ces populations et aussi de leur désir de la conserver. Elle est prêtéesans exigences matérielles ou financières. Les femmes y accèdent essentiellementpar emprunt et les hommes par héritage ou emprunt. Les allogènes obtiennent laterre par emprunt.

4- Les valeurs culturelles

4-1. Le Poro ou le système éducatif Sénoufo

Le poro est une institution initiatique des Sénoufo.Il a pour rôle laformation de l’individu dans sa communauté.

L’éducation du Sénoufo se fait à deux niveaux:Le milieu familial et le milieu villageois ou communautaire.

A l’intérieur de la famille, l’éducation se subdivise en deux; il y a celle quiest effectuée par la cellule familiale dès les premières années jusqu’à l’âge de huitan. Pendant cette période l’enfant est confié à la mère. La seconde phase de cette

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formation familiale est effectuée par les membres de la famille matrilinéaireélargie ou nérigbaha. Ceux-ci apprennent à l’enfant les valeurs de la morale, del’amour familiale, des doctrines religieuses, les travaux domestiques et agricoleset l’histoire de sa communauté. C’est à partir de vingt ans qu’intervient l’éducationcommunautaire composée par un ensemble d’initiations appelées Poro.

Il se compose de plusieurs échelons et se caractérise surtout parl’enseignement de la cosmogonie et de la mythologie de la création. Les jeunesgens apprennent aussi à être les défenseurs de la communauté.

Cette formation a pour base le bois sacré et elle constitue pour le sénoufo lefondement de la tradition. C’est le passage obligé pour tout individu voulants’affirmer dans sa communauté.

4-2. Le mariage

Il constitue le premier acte social que les jeunes posent après le cycle deformation communautaire. Sa pratique est obligatoire car il est à la base de laprocréation. En effet, le Sénoufo considère l’homme comme une richesse; plus ona d’enfants plus on est riche et bien vu dans sa communauté. C’est pour cetteraison que la stérilité est perçue comme un malheur pour l’individu qui en souffre.

Il existe trois formes d’union en pays Sénoufo:-la femme demandée; c’est la jeune fille que les parents de l’époux ont choisie dèsson jeune âge et pour laquelle ils ont rempli certaines formalités jusqu’à cet âge.La femme reste au sein de son matriclan. Le mari s’y rend la nuit et en repart aupetit matin. Les enfants de cette union appartiennent au matriclan de leur mère.-la femme donnée; c’est celle que le mari reçoit en guise de reconnaissance deservices rendus. Dans un tel mariage, la femme rompt avec son propre matriclanet s’intègre définitivement dans celui de son époux. -la femme appelée; c’est la femme avec laquelle le mari a vécu clandestinementavant le mariage. Celle-ci peut rester au sein de son matriclan ou rejoindre larésidence de son époux.

Le mariage est valorisé dans la société Sénoufo de telle sorte que les jeunessont appelés très tôt à se marier et à fonder une famille. Dès qu’un jeune garçonobtient une fiancée choisie par ses parents maternels, il est tenu d’aider lesparents de celle-ci dans les travaux champêtres et de leur offrir des cadeaux detemps en temps jusqu’à l’âge nubile de la fiancée. Il fait appel à ses amis (grouped’entraide) pour cultiver dans le champ de sa belle famille.

4-3.Les funérailles

Ce sont les rites accomplis pour conduire le défunt jusqu’à sa dernièredemeure. Le Sénoufo y attache une grande importance car pour lui l’homme estun être sacré. Il est immortel; après son décès, le défunt va dans le pays desancêtres (koubélékaha) où il continue à vivre et veille sur ceux qui sont restés surterre. Toutes les dispositions doivent être prises pour que le défunt soit bien

33-D’après le dictionnaire LAROUSSE COMPACT (édition Paris mai 1995 p.992), le systèmeMatrlinéaire est un "système de filiation et d’organisation sociale qui ne prend en compte quel’ascendance maternelle".

34-Coulibaly (S)-op.cit, p.123.

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accueilli par ses prédécesseurs. Aussi, un ensemble d’actes doivent être respectésscrupuleusement lors des obsèques au risque de voir le défunt refoulé par lesancêtres. Les funérailles sont également le lieu de réjouissance au cours duquelles parents du défunt dépensent énormément dans le but de préserver l’honneurde la famille.

4-4.L’héritage

Pour comprendre l’héritage en pays sénoufo, il faut se référer au systèmefamilial de ce groupe ethnique. En effet, l’organisation interne des Sénoufo reposesur le système matrilinéaire33 qui décide de l’appartenance familiale de l’individu.Le choix de ce régime pour le Sénoufo s’explique par le fait que tout enfant, quelqu’il soit a obligatoirement du sang de sa mère dans ses veines; par contre, rien neprouve qu’il en a de son père. Il était donc nécessaire de trouver un critère sûrpour reconnaître les membres d’une famille. C’est ainsi que la consanguinité(l’appartenance à un ancêtre commun), la descendance en ligne matrilinéaire a étéreconnue et adoptée comme étant le critère d’appartenance à une même famille(Coulibaly S, NEA abidjan 1978)34.

Dans ce système, on accorde une prépondérance à la lignée de la femme ence qui concerne la succession. Ainsi, chaque individu est membre de la famille desa mère, de sa grande mère, des frères et des soeurs de sa mère et de ceux de sagrande mère, des enfants de ses soeurs. Ce groupe constitue son lignage et c’estuniquement en son sein qu’il peut hériter. C’est ainsi qu’un enfant ne pourra pashériter des terres de son père car il n’appartient pas à la même famille que cedernier. Mais il pourra par contre hériter de ses oncles maternels.

Ce mode de succession matrilinéaire qui pendant longtemps a régil’héritage en pays Sénoufo ne fait pas aujourd’hui l’unanimité au sein despopulations.

En effet, sur les trois villages que nous avons visité, un présentait les signesde cette divergence concernant le mode d’héritage. Celle-ci émanaitessentiellement des jeunes. A Poundiou, les jeunes que nous avons interrogéaffirment que les terres qu’ils exploitent seront héritées par leurs enfants et nonleurs neveux comme le veut la tradition. Ils expliquent cette nouvelle attitude parle fait que les comportements changent actuellement. Auparavant, les neveuxtravaillaient avec leurs oncles et lorsque celui-ci décédait, ce sont eux qui parconséquent héritaient des terres de ce dernier. Mais aujourd’hui, ce comportementtend à disparaître et de plus en plus, ce sont les enfants qui cultivent avec leurpère et les neveux en font autant de telle sorte que ces jeunes pensent qu’il est plus

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juste que les enfants qui ont cultivé avec leur père héritent des biens de celui-cilorsqu’il n’est plus vivant. Cet avis n’est pas partagé par les adultes; car pour euxcela briserait la notion de famille en pays sénoufo. L’enfant n’appartient pas à lafamille de son père et par conséquent il ne peut pas hériter des terres de ce dernier.L’individu doit toujours hériter à l’intérieur de sa famille qui est celle de sa mèreet cette tradition selon les adultes doit être maintenue. Ce changement d’attitudedes jeunes vis à vis du mode d’héritage serait dû à l’introduction de la culture del’anacardier dans la région.

L’anacarde étant une culture de rente qui se fait sur plusieurs années, lesjeunes conçoivent difficilement qu’après de longues années de dures labeurs avecleur père, une autre personne viennent hériter du fruit de cet effort.

CHAPITRE III : ORGANISATION SOCIALE ET TECHNIQUE DU TRAVAIL

1-Occupation des terres

1-1.Cultures de rente

La principale culture de rente est le coton. Il occupe les plus grandesparcelles et est pratiqué par la quasi totalité des paysans. Cette prédominance dela culture du coton s’explique par le fait qu’en plus de ses autres avantages (nousles évoquerons plus tard), elle est la principale source d’accès aux intrants pour lesautres cultures. Ce qui bien entendu fait d’elle la culture motrice de la zone.

A côté de la culture du coton, il y a l’anacarde, qui au fil des annéescommence à être beaucoup pratiquée par les paysans.L’anacarde (culture pérenne) n’utilise pas d’engrais et ne nécessite pas uneattention particulière. En outre, il à un prix d’achat relativement élevé et la ventes’effectue au village.

Ces cultures de rente sont pratiquées par les Hommes, mais à Fonondara,cette situation tend à changer. Certaines femmes (très peu) ont commencé à cultiverl’anacarde, mais elles ne sont pas pour autant propriétaires de terres.

Les terres qu’elles mettent en valeur appartiennent à leur famille et ellespratiquent ces cultures au nom de leurs jeunes enfants. Ce choix des femmes pour la culture de l’anacarde s’explique par le fait quecontrairement au coton qui nécessite beaucoup de travaux (selon les paysans),l’anacarde se cultive avec une relative facilité et n’a pas besoin d’engrais.

Même si dans l’ensemble il n’est pas interdit officiellement aux femmes depratiquer les cultures pérennes, elles ne le font pratiquement pas car pour leshommes, si les femmes s’adonnent aux cultures de rente elles n’auront plus le tempsde les aider comme auparavant. La femme participe à tous les travaux agricolesde son mari et étant donné que sa contribution en milieu rural est importante, sonabsence signifierait une baisse certaine de la production agricole.

35-A Katièrè, il n’y a pas d’allogènes.

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Dans les villages35 de Poundiou et de Fonondara, les allogènes que nousavons rencontré pratiquent les cultures vivrières et les cultures de rente. Ils nepeuvent faire de cultures pérennes qu’avec l’accord du propriétaire de la terre.Celles-ci étant considérées comme un signe de propriété, les autochtones acceptentdifficilement que les allogènes la pratique. Mais après avoir vécu pendantlongtemps dans un village, quelques rares allogènes obtiennent l’autorisation defaire des cultures pérennes. Cependant, ils ne sont pas propriétaires de terres.Lorsqu’ils décèdent, leurs enfants héritent des champs et non de la terre et le jouroù ils désirent partir, le champ revient au propriétaire de la terre.

1-2.Cultures vivrières

Les cultures vivrières qu’on retrouve beaucoup dans cette zone sont parordre d’importance (en fonction des superficies occupées) le riz, le maïs, l’igname,le sorgho et le mil. Ces cultures sont pour la plupart pratiquées sur les plateaux àl’exception du riz qui est surtout cultivé les bas-fonds.

La culture du riz de bas-fonds est pratiquée par les vieilles femmes. Celles-civont dans les bas-fonds généralement sur l’autorisation de l’époux.

Les femmes accèdent à cette terre soit à l’intérieur de la famille de l’époux,soit leur propre famille ou encore avec une autre famille du village. Les femmesobtiennent les bas-fonds sur une simple demande et sans aucune contrepartie. Ellescultivent également l’arachide, le maïs et les maraîchères (gombo, tomate,aubergine, piment...). Ces cultures concernent l’ensemble des femmes et nonspécifiquement les vieilles.

Les jeunes femmes ne cultivent pas dans les bas-fonds. Elles aident leurépoux dans leurs champs sur les plateaux où elles ont également des champsindividuels.

Les hommes pratiquent la culture du maïs en champ pur à cause del’ombrage que provoque celle-ci du fait de sa grande taille. Le maïs cultivé enassociation empêche les autres cultures de bien se développer car elles ne reçoiventpas suffisamment de lumière. Il existe plusieurs associations de cultures. Le riz-igname et le riz-sorgho sont les plus fréquentes. Pour les paysans, ces associationssont bénéfiques pour plusieurs raisons. Elles ont l’avantage de procurer différentesrécoltes, l’utilisation des mêmes intrants et le travail est moins fatiguant. Le riz estsemé entre les buttes d’igname, on prend la terre autour de la butte pour couvrirle riz et lorsqu’il pleut, l’eau reste autour de la butte. Concernant l’association riz-sorgho, les graines sont semées ensemble.

Notons que l’association riz-maïs se pratique également, mais le maïs estsemé en petite quantité pour ne pas gêner le riz.. 2-Techniques de fertilisation

2-1.Engrais organique naturel

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Bien que la pratique de l’élevage soit très développée dans la région, lespaysans de notre site utilisent très peu l’engrais organique naturel et pour preuve,sur trente personnes interrogées seules quatre utilisent ce type de fertilisant soit13,33%. Parmi ceux-ci, il y a trois allogènes et un autochtone. Cette situations’explique par plusieurs raisons :

d’abord, les paysans (de notre zone d’étude) ne sont pas éleveurs de bovinsdans leur grande majorité. Il ont certes des boeufs mais ceux-ci n’excèdent pas deuxpaires et il servent surtout à la traction. Il est donc difficile pour eux de réunir labouse nécessaire à la mise en place d’une fosse fumière qui a également besoind’une longue période de préparation et d’attention.

Ensuite, la vulgarisation de cette technique de fertilisation effectuée par lesconseillers agricoles de la CIDT et de l’ANADER n’a pas atteint le maximum depaysans. Certains affirment que les conseillers agricoles n’ont pas terminé leurformation dans la mesure où ils leur ont appris comment faire les fosses, y mettrela litière et les déjections animales; mais ceux-ci ne sont pas revenus pour leurapprendre comment rependre le fumier avec les différentes doses d’application surles parcelles.

Et enfin, ceux qui ont pu bénéficier de toute la formation affirment qu’il sepose à eux le problème du transport du fumier vers les champs.

En effet, les doses recommandées par ces structures sont de 5 t/ha pour uneannée, 10 t/ha pour deux ans et 15 t/ha pour trois ans.

Malgré l’excellente source d’humus que constitue le fumier, les paysanspréfèrent utiliser un autre type de fertilisant: l’engrais chimique.

2-2.L’engrais chimique

Cette forme de fertilisation est la plus utilisée par les paysanscomparativement à l’engrais organique. En effet, avec le concours de la CIDT, lespaysans (ceux qui cultivent le coton) accèdent à cet intrants à crédit. En outre, sonutilisation est relativement facile par rapport au fumier car il ne nécessite pas unepréparation préalable (la mise dans la fosse fumière et son l’arrosage). La relativefacilité d’accès des paysans à l’engrais chimique explique son adoption par ceux-ci.

Cependant, cet engrais est utilisé de façon insuffisante par rapport auxdifférentes cultures. Plusieurs raisons expliquent cette attitude des paysans; nousles évoquerons dans une autre partie.Mais bien avant ces deux formes de fertilisation, une autre forme existait et ellecontinue d’être appliquée par les paysans. 2-3.La jachère

Elle consiste à abandonner la terre sans y cultiver pour la laisser se reposerde sorte qu’elle puisse se reconstituer naturellement par la renaissance de sesdifférentes composantes. La jachère est une vieille pratique culturale qui esttoujours d’actualité. Cependant, ce qui a changé, c’est le temps qui lui est accordé.

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Autrefois, le temps de jachère était plus long du fait de l’abondance des terres et dela faible importance numérique des populations qui en outre ne pratiquaient pasbeaucoup de cultures. Ce qui est tout à fait le contraire de la situation actuelle oùchaque paysan essaie de pratiquer le plus de cultures.

Les champs familiaux qui existaient autrefois, avec à leur tête les chefs deterres qui étaient les chefs d’exploitation; ont disparu de nos jours.L’arrivée de la culture du coton, destinée à générer des revenus, a provoqué chezles paysans le désir d’avoir leur propre parcelle et surtout les jeunes qui veulentleur autonomie.

Cette séparation des paysans des champs familiaux peut entraîner uneémulation de ceux-ci qui en rivalisant améliorent leurs situations.

De plus en plus, les paysans évitent de s’éloigner du village pour cultiver àcause de la présence massive des boeufs des éleveurs Peuhl qui pourraient détruireleurs champs impunément. Pour cette raison, ils préfèrent se rapprocher davantagedu village. Mais étant donné qu’il y a peu de terres proches du village, ils sontobligés de réduire le temps de jachère.

3-Répartition des tâches agricoles

Traditionnellement, une répartition des tâches agricoles existe. Elle se faitsuivant le sexe, l’âge et la culture.

De façon générale, les activités nécessitant beaucoup d’effort physique sontréservées aux hommes. Ce sont entre autre le défrichage, l’abattage des arbres, ledessouchage, le buttage et le billonnage. La femme par contre participe plus auxactivités qui demandent une plus grande attention et qui s’exécutentminutieusement; telles le semis, le désherbage, la récolte et le transport desproduits au village. Elles sont plus présentes dans les activités vivrières que danscelles des cultures de rente telles que le coton et l’anacarde. Les femmes tiennentle foyer et par conséquent, elles se doivent d’accorder une plus grande attention àtout ce qui rentre dans l’alimentation de la famille.

Mais au delà de ce rôle de la femme qui est dû essentiellement à son statut,les femmes ne pratiquent pas les cultures de rente parce que les hommes ne leurpermettent pas de le faire. Même si l’interdiction n’est pas exprimée ouvertement,elle se fait de façon implicite, réduisant ainsi ses possibilités d’émancipationéconomique.

En effet, les femmes sont des actives familiales agricoles; elles participent àtous les travaux champêtres du mari et que les jours de repos (lundi et vendredi)pour se rendre dans leur propre champ. Ces jours sont insuffisants pour mettre enplace efficacement une culture de rente. En plus des jours de repos, les femmesprofitent des jours où l’époux reste au village pour se rendre dans leur champindividuel.

Dans cette répartition des tâches agricoles, les enfants interviennent surtoutpendant les activité de surveillance des champs contre les animaux ravageurs, larécolte et quelque fois pour le transport des produits agricoles.

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4- Modes de culture

4-1. Culture manuelle

Cette pratique domine encore dans la zone de Boundiali et elle se caractérisepar une faible superficie des exploitations et des cultures itinérantes sur brûlis. Lagrande partie des travaux est exécutée manuellement en fonction des tâches et descultures. Toutes les activités sont faites manuellement excepté les labours. Il sonteffectués généralement avec les boeufs (traction animale) ou les tracteurs. Lesactivités telles que les semis , les désherbages et les récoltes se font manuellement; de même que les buttes et les billons .

Dans les bas-fonds , les femmes font les labours à la main à l’aide d’une petitepioche qui leur sert à creuser la terre et à casser les pierres . Celles qui en ont lesmoyens louent les boeufs (12.000 f.cfa par hectare) pour effectuer les labourslorsque le bas-fonds est encore sec ou elles utilisent ceux du mari ou de l’un de leursenfants. 4-2.Culture attelée

Ce mode de culture a été introduit en Côte d’Ivoire dans les années 50. Maisc’est en 1970 que la traction animale va prendre véritablement son essor dans lenord du pays et plus précisément dans les départements de Ferkéssédougou,Korhogo, Boundiali et Odienné.

Ce projet fut initié par la Compagnie Française pour le Développement desFibres Textiles (CFDT) qui sera par la suite remplacée en 1974 par la CompagnieIvoirienne pour le Développement du Textile (CIDT).

Cette innovation technique a été mise en place dans le but de soutenir laculture du coton qui venait d’être introduite dans la région. Elle a été un succèsselon les chiffres du tableau (voir tableau). Tous les paysans interrogés, àl’exception de ceux qui possèdent un tracteur, pratiquent la traction animale pourau moins l’une de leurs cultures. Cela est dû au fait que les initiateurs de ce projetl’ont soutenu à travers l’octroi de boeufs CA (culture attelée), de charrues à créditet également les défrichements subventionnés qu’ils faisaient pour les paysans.

Toutefois, il existe des paysans qui ne possèdent pas de boeufs de traction ;ceux-ci en louent chez les autres paysans pour leurs labours. La location s’élève à12.000 f.cfa par hectare pour toutes les cultures .

Le projet de boeufs CA de 1970 a été à la base de la mise en place du projetde semi-motorisation dans certains villages.

Fonondara a bénéficié de ce nouveau projet en 1982 dans le but d’encouragerles meilleurs producteurs de coton.

L’introduction de la traction animale dans la région a eu pour conséquencel’agrandissement des superficies cultivées par les paysans. Grâce à cette innovationtechnique, les paysans font plusieurs cultures. Tous ceux que nous avons interrogépratiquent au moins quatre cultures chacun. Toutefois, la traction animale ne peut

36-Ndabalishye (I), Agriculture Vivrière Ouest-Africaine à travers le cas de la Côte D’ivoire,Idessa, 1995 P77.

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intervenir pendant toutes les opérations culturales; d’où la nécessité d’une maind’oeuvre.

Tableau: Taux de préparation des sols selon le mode de culture. CIDT campagne 92/93

Mode deculture

Culturemanuelle

Cultureattelée

Tracteur Total

Superficie(ha)

226000 194962 6750 463712

Pourcentage

56 42 2 100

Source: CIDT, Rapport annuel 92/93

4-3.Culture motorisée à travers le projet de semi-motorisation à Fonondara

Les premiers programmes de motorisation ont vu le jour à partir de 1965. Pour unequestion stratégique, ils ont été accompagnés par la création de structuresspécialisées telles que:-la MOTORAGRI, chargée des défrichements et des aménagements en milieu rural.-la COMACI-CIMA, pour l’expérimentation, l’adoption, les études et essais dematériels (NDABALISHYE I, Agriculture Vivrière Ouest -Africaine à travers le casde la Côte D’ivoire; IDESSA, 1995)36 .

La motorisation comporte deux volets; l’une est dite intermédiaire et l’autreconventionnelle. La différence entre ces différentes motorisations porte sur lapuissance des tracteurs.

Parler de motorisation dans notre zone, c’est se référer au projet de semi-motorisation ou motorisation intermédiaire dont ont bénéficié les départements deBoundiali et de Ferkéssédougou en 1978.

Ce projet a été initié par la CIDT, et a démarré par la mise au point d’unpetit tracteur appelé BOUYER conçu spécialement pour les zones cotonnières.Il avait un effectif de vingt (20) machines et sur les trois villages de notre site, seulFonondara en a bénéficié par la réception de cinq (5) tracteurs.

Cette motorisation intermédiaire avait pour but d’encourager les meilleursproducteurs de coton.

Elle a été adressée aux paysans du projet boeufs CA (culture attelée) de 1973qui ont eu un bon rendement. En plus de cette condition, le paysan devait être chef

37-op cit Ndabalishye (I), Idessa 1995, P79.

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de famille et autochtone; car celui-ci devait avoir des enfants ou des personnes pourl’aider à travailler. Chaque paysan a reçu en plus du tracteur Bouyer, unecharette, la charrue, le semoir, les pulveriseurs et les herses. Tout ce matérielrevenait à cinq millions de f.cfa que le paysan devait rembourser sur une périodede cinq ans(5) pour ceux qui ont reçu leurs machines les premiers et sur sept ans(7)pour les derniers. Cette différence dans le délai de remboursement est due au faitque les responsables de la CIDT ce sont rendu compte que les paysans n’arrivaientà respecter les modalités de remboursement qui prévoyaient un million de F. cfaaprès chaque vente de coton. Face donc à cette situation ils ont décidé dereéchelonner la dette des paysans. Le projet était destiné à la fois au coton et auxvivriers qui devaient servir à la nourriture de la famille. Mais le remboursementétait prélevé uniquement sur le coton à la vente. En plus de l’argent de la machine,le paysan remboursait l’argent des intrants et les frais d’entretien de la machinequi était effectués par la CIDT.

N’étant pas chef de famille, les femmes n’ont pas bénéficié de ce projet.Cependant, elles ont la possibilité d’utiliser les machines pour leurs travauxchampêtres soit par le biais de leur mari soit par celui d’une personne étrangère.

Depuis le début du projet jusqu’en 1989, la CIDT a fait état d’un effectif de251 tracteurs dans l’unité agricole du NORD ( NDABALISHYE ,1995)3 7 . Si cenombre paraît élevé, il ne traduit pas toutefois la réalité sur le terrain. En effet,sur les cinq machines dont disposait Fonondara, seules trois fonctionnentactuellement. C’est dire qu’il n’existe que trois tracteurs dans tout le bassin versantde Poundiou et ce nombre n’a pas connu une évolution depuis la mise en place duprojet. Cela dénoterait soit de la mauvaise répartition des engins dans le Nord, soitde l’absence de motivation de la part des paysans à l’égard de ces tracteurs. Maisétant donné que ces engins sont à la disposition des paysans qui peuvent lesacheter à la CIDT, la première explication paraît la plus plausible. Plusieursraisons peuvent être évoquer pour comprendre cette situation :

D’abord, les coûts d’investissement et de fonctionnement de la machine sontélevés. L’entretien du tracteurs est effectué puis facturé par la CIDT et lesremboursements sont prélevés sur l’argent du coton. Tout cela revientexcessivement cher au paysan et à cela il faut ajouter le prix des intrants, . Ensuite,on note également la présence de la culture attelée qui offre beaucoup d’avantages.Parmi ceux-ci, on peut citer son niveau de technicité peu sophistiqué; ce qui la rendaccessible à tous y compris les enfants, son coût relativement bas et un netteamélioration des rendements.

Et enfin, la faible puissance de la machine Bouyer qui se traduit par untravail lent et une faible profondeur des labours.Toutefois, ces raisons ne constituent pas un obstacle suffisant à l’utilisation destracteurs par les paysans. Certes, ils n’en possèdent pas dans leur grande majorité,mais ils les utilisent assez fréquemment surtout lorsqu’ils sont en retard à traversdes locations.

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Pendant les périodes de labours, les propriétaires de tracteurs de la régionsillonnent les différents villages avec leurs engins qu’ils mettent au service despaysans. Le coût des prestations est de 25.000 f.cfa par hectare pour toutes lescultures.

Le projet de semi-motorisation à Fonondara pourrait-être considéré commeun succès dans la mesure où tous les bénéficiaires ont pu amortir leur tracteur.Parmi ceux-ci, un a abandonné sa machine à cause des pannes et l’autre a vendula sienne du fait des coûts d’entretien élevés. Les trois derniers continuent àcultiver avec leur tracteur. Même si dans l’ensemble la mise en place des tracteursMI (motorisation intermédiaire) a connu une évolution rapide dans le Nord, celle-ciest demeurée insignifiante par rapport à celle des boeufs CA (traction animale).Toutefois, ce mode de culture ne demeure pas moins pratiqué car de plus en plus lespaysans s’y adonnent.

5-Rotation coton/riz

Cette technique culturale montre une fois de plus l’importance de la culturedu coton dans notre zone. Celles-ci serait en effet comparable à un engin entraînantderrière lui d’autres engins que sont les autres cultures céréalières. La culture ducoton permet aux agriculteurs d’obtenir par le biais du crédit de campagne, desintrants pour sa culture et à travers elle celle d’autres cultures. Tous les hommesque nous avons interviewer, à l’exception des deux éleveurs Peuhl, pratiquent laculture du coton. Il font également tous la rotation coton/riz. Cette techniqueconsiste à cultiver le riz sur l’ancienne parcelle de coton après chaque récolte. Lapratique de la rotation permet au riz de profiter des arrières effets de la fertilisationqui a servi à la culture du coton. Selon les paysans, après la récolte du coton , ilreste dans le sol une partie des intrants qui ont permis la mise en place de cedernier. Lorsque le riz est cultivé sur cette même parcelle, il n’a plus besoind’engrais pour avoir un bon rendement. C’est pour cette raison que tous pratiquentla rotation coton/riz.

Mais au delà de cette technique, la question que l’on pourrait se poser est desavoir si cette rotation permet effectivement au riz d’atteindre son meilleurrendement. Si tel était le cas, pourquoi est-ce que le riz n’est pas produitsuffisamment de sorte à commercialiser une grande partie de la récolte dans cettezone ? Dans le cas contraire, qu’est ce qui justifie la poursuite de cette pratique ?

A l’analyse des informations recueillies au près des paysans, la pratique dela rotation permet certes au riz d’avoir une production relativement élevé sansl’utilisation d’engrais. Mais c’est plutôt pour une question de moyens financiers queceux-ci ont opté pour cette pratique.

En effet, face à la cherté des intrants, il est difficile pour les paysans d’enprendre pour toutes les cultures. A la vente du coton tous les intrants donnés àcrédit sont comptabilisés et retranchés sur l’argent du coton. De sorte qu’à la find’une campagne certains paysans se retrouvent sans argent après leremboursement des intrants. D’autres par contre n’ayant pas pu rembourser leur

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dette, voient celle-ci reéchelonner à la campagne suivante par les structuresprêteuses des intrants. C’est donc pour éviter ce genre de situations que lespaysans préfèrent pratiquer la rotation coton/riz.

6- Relation Agriculture-Elevage

La question du rapport Agriculture-Elevage fait ressortir l’idée decomplémentarité et d’échange entre ces deux activités; même si à un niveau plusélevé l’agriculture doit intégrer l’élevage. Toutefois, cette collaboration est loind’être parfaite dans la mesure où elle est entachée de nombreux conflits qui sont lesrésultats de la difficile cohabitation entre les différents acteurs de ces milieux.

6-1. Association Agriculture-Elevage

L’association Agriculture-Elevage doit être vue en terme d’échange etd’apport réciproque. En effet, la fumure organique à partir des déjections animalesest une excellente source d’humus et d’éléments fertilisants capables d’améliorerle niveau de rendement des exploitations. De même que l’agriculture permet devaloriser certains sous-produits agricoles pour l’alimentation du bétail. Ce sont par exemple les tiges de céréales, les fanes d’arachide et les graines decoton.

La pratique de l’élevage bovin constitue en outre une source de revenussupplémentaires pour le paysan à travers la vente du lait et de la viande desanimaux.

Cependant, bien que l’élevage bovin soit une activité traditionnelle dans leNord de la Côte d’Ivoire, beaucoup de paysans de notre zone ne la pratiquent pasfaute de moyens financiers. Sur l’ensemble des hommes autochtones interrogés,seuls 26,66% d’entre eux pratiquent l’élevage.

Un seul autochtone pratique l’élevage bovin à l’opposé des allogènesd’origine Malinké qui sont tous éleveurs de boeufs à l’exception d’un seul.L’élevage de porcs et de cabris est beaucoup développé. Contrairement aux boeufs,ces animaux n’ont pas besoin d’une grande surveillance car errant dans le villagela plupart du temps et en outre, ils sont très souvent utilisés pour les sacrifices (lesinitiations au Poro et les sacrifices propiatoires...) et comme moyen d’échange pourla location des jeunes en tant que main d’oeuvre.

Les paysans vendent des animaux pour acheter le sel, du savon ou du pétrolepour rémunérer la main d’oeuvre; d’où l’importance de l’élevage qui contribue dansune certaine mesure au développement des cultures. Il en est de même égalementpour l’agriculture lorsqu’elle permet au paysan d’acheter des animaux pouragrandir son parc.

Mais au delà de cet apport réciproque, il existe des divergences entreagriculteurs et éleveurs.

6-2. Conflit Agriculteurs-Eleveurs

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Les conflits entre agriculteurs et éleveurs sont très anciens. Ils opposent lesPeuhl qui sont des éleveurs nomades et les paysans Sénoufo. Ces conflits sociauxn’ont pas encore trouvé de solutions effectives jusqu’à présent.Il s’agit en effet des nomades Peuhl qui pendant leurs déplacements traversentsouvent les champs des paysans avec leurs troupeaux transhumants qui saccagentles cultures. Ces destructions peuvent également être causées par des boeufs placéssous le gardiennage d’un berger très souvent Peuhl.Ce comportement maladroit des Peuhl provoque par conséquent la colère despaysans Sénoufo dont la réaction se solde par des affrontements souventmeurtriers.

Néanmoins, pendant un moment, une tentative de solution avait étéappliquée par l’Etat par l’intermédiaire de l’ex-SODEPRA qui a mis en place unprogramme de sédentarisation des éleveurs Peuhl dénommé "opération zébu".Cette opération s’est soldée par un échec car elle n’a pas pris en compte lecomportement sociologique du Peuhl qui loin d’être un sédentaire est plutôt unnomade.

Ces différends se poursuivent toujours. Lors de nos enquêtes, nous en avonsété témoin sur notre site.

A Poundiou, un paysan s’est plaint au chef du village pour la destruction deson champ de coton. Il en était de même à Fonondara où deux paysans exigeaientréparation pour la destruction de leurs champs de riz.

Selon les paysans, leurs plantations sont fréquemment saccagées par lesboeufs des Peuhl. Même s’ils sont pour la plupart dédommagés, les paysans sontloins d’être satisfaits car il est difficile de quantifier avec exactitude la valeur réelledes dégâts. Les paysans se sentent donc toujours perdant dans le règlement de cesconflits. Il se trouve aussi des situations où le Peuhl ne se reconnaissant pascomme auteur des faits qui lui sont reprochés, refuse par conséquent dedédommager le plaignant et très souvent on en arrive à des affrontementssanglants.

Dans la plupart des cas, les conflits sont réglés à l’amiable par le chef duvillage mais après de longues discussions.

L’importance de plus en plus croissante des éleveurs Peuhl errant avec leurstroupeaux de boeufs dans la région constitue selon les paysans une menace pourleurs champs. C’est pour cette raison que beaucoup d’entre eux évitent de trops’éloigner du village pour cultiver.

Cependant, il se pose à ceux-ci le problèmes de l’insuffisance des terresproches du village qui dans la plupart des cas ont été assez exploitées. Pourrésoudre cette question, les paysans réduisent le temps de jachère

7-Organisation de la main d’oeuvre

La main d’oeuvre constitue un important outil de travail. Elle est beaucoupdéveloppée dans la zone de Boundiali et se compose essentiellement d’autochtones.Ceux-ci forment en réalité des groupes d’entraide qui apportent leur soutien aux

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uns et aux autres à titre de solidarité pendant les travaux champêtres. Les joursde culture des groupes d’entraide constituent des moments de fête où les paysanscultivent au rythme des Balafons et mangent ensemble.

Même si l’organisation de la main d’oeuvre dans les village de notre site estsensiblement pareille, celle-ci présente toutefois quelques divergences.

7-1.Poundiou

Il n’existe pas de groupe d’entraide fixe fonctionnant de façon permanente.Pendant les différentes périodes de culture (les labours, les désherbages ou lesrécoltes), les jeunes se rassemblent pour former des groupes d’entraide. Ilstravaillent dans le champ de chaque membre et ne bénéficient pas d’unequelconque rémunération. Cependant, le propriétaire du champ donne de lanourriture aux membres du groupe à midi.

Cette main d’oeuvre peut être sollicitée par une personne étrangère augroupe. Ce dernier peut donner à manger aux membres du groupe au champ et lesoir au village il tue un animal (porc ou cabri) et donne à nouveau de la nourritureaux jeunes avec de la boisson ( tchapalo) et on danse le Balafon.

Le travail peut-être aussi rémunéré en espèce; mille francs cfa (1000 f.cfa)par jour et par personne s’il s’agit de faire des buttes ou des billons. Pour les désherbages et les récoltes, ils reçoivent cinq cent francs cfa (500 f.cfa) parjour et par personne. Les hommes ne pratiquent pas le désherbage du riz car ilstrouvent que le travail est lent et fatiguant. Il est réservé aux femmes.

Les femmes sont également organisées en groupe d’entraide. Le travail sefait de façon rotative pour chaque membre. Celle qui reçoit le groupe donne àmanger aux autres. Si la femme le désir, le groupe peut venir travailler dans lechamp de son époux à son nom. Il est en outre possible pour une personneextérieure de solliciter l’aide du groupe. Dans ce cas, la rémunération est faite soiten nature soit en espèce. En espèce, elles reçoivent chacune deux-cent cinquantefrancs cfa (250 f.cfa) par jour pour les semis, les désherbages et les récoltes.

Lorsque la rémunération est faite en nature, on leur donne soit un grosmorceau de savon, soit un litre de pétrole, soit environ 2 kg de sel ou encore 5 à 6bottes de riz par personne. L’argent reçu est utilisé directement par chaque membredu groupe; il n’existe pas de caisse commune dans laquelle l’argent est gardé.

Les paysans font aussi appel à la coopérative scolaire en tant que maind’oeuvre. Celle-ci concerne les élèves du CE2 (cours élémentaire deuxième année),du CM1 (cours moyen première année) et du CM2 (cours moyen deuxième année)qui vont travailler dans les champs uniquement pour la récolte du coton les joursde repos. Les enfants reçoivent deux cent francs cfa chacun et cent francs cfa decette somme est versée dans la caisse de la coopérative pour ses activités.

7-2.Katièrè

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La main d’oeuvre à Katièrè, tout comme à Poundiou, est essentiellementbasée sur les groupes d’entraide qui sont constitués par les paysans. Il en existedeux au niveau des jeunes. Le premier se compose de quinze (15) membres et lesecond de dix (10) .Ils se réunissent pour s’entraider soit dans leur propre champ, soit dans celui deleurs parents ou d’un autre habitant du village. Les rassemblement se fontpériodiquement en fonction des différentes opérations culturales. C’est ainsi queles passages se font pendant les labours, les buttages, les billonnages et les récoltes.Le groupe n’intervient pas lors des désherbages qui sont surtout réservés auxfemmes du fait de leur lenteur d’exécution. Le travail du groupe pour les membresest gratuit. Toutefois, le propriétaire du champ donnera à manger aux travailleursà midi.

Lorsqu’une personne extérieure fait appel aux jeunes, elle peut soit leurdonner à manger au champ et au village avec un animal qu’il tuera; soit il leurdonnera de l’argent en espèce. Les billonnages et buttages varient entre huit centet mille francs cfa (800 et 1000 f.cfa) par jour et par personne. Les désherbages etles récoltes coûtent cinq cent francs cfa (500 f.cfa).

Pour les femmes, il existe trois groupes d’entraide. Leurs prestations sonttrès souvent demandées pour les semis, les désherbages et les récoltes. Ellesreçoivent chacune deux cent francs par jour pour ces travaux. La rémunérationpeut-être aussi du savon, un litre de pétrole, du sel ou quatre bottes de riz.Ce sont les femmes et jeunes qui forment les groupes d’entraide. Il n’en existe pas chez les adultes.

7-3.Fonondara

A Fonondara, les groupes d’entraide sont beaucoup plus développés. Il enexiste douze (12) au sein du village au niveau des hommes. Dix (10) groupes sontrepartis par deux (2) entre les cinq (5) quartiers du village et les deux autresappartiennent à tout le village. Les groupes appartenant aux quartiers secomposent de jeunes ayant 25 ans et moins. Les groupes (2) de l’ensemble duvillage ont en leur sein des personnes plus âgées. Les femmes ont accès à cesdifférents groupes.

Le travail se fait en rotation dans le champ de chaque membre lors desopérations de buttage, de billonnage et de récolte. L’individu qui reçoit le groupedonne à manger à tout le monde. Il n’y a pas une autre forme de rémunérationdans ce cas.

Si une personne non membre du groupe demande que celui-ci lui vienne enaide, il a la possibilité de donner soit de la nourriture au champ et au village auxmembres du groupe avec du porc ou du cabri, soit de donner de l’argent en espèce.Pour la dernière option, les buttes et les billons sont rémunérés à mille francs cfa(1000 f.cfa) par jour et par individu. Le désherbage s’effectue à trois cent francs cfa(300 f.cfa) et la récolte coûte deux cent ou deux cent cinquante francs cfa (200 ou250 f.cfa) selon qu’il s’agisse du riz ou du coton.

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Au niveau des femmes, il existe deux groupes d’entraide. L’un appartientaux femmes âgées et l’autre aux jeunes femmes mariées. Ces deux groupes sontpermanents contrairement à celui des jeunes filles qui se regroupent uniquementpour le désherbage du coton, de l’arachide et du riz. Lorsque les opérations derécolte arrivent, celles-ci se séparent et s’insèrent dans les groupes des jeunesgarçons. Ceci parce que lorsqu’elles sont ensembles pendant les récoltes, les jeunesfilles travaillent moins; passant leur temps à causer entre elles.

Au sein du groupe, les femmes s’entraident gratuitement; mais pour l’aideextérieure elles reçoivent trois cent francs cfa (300 f.cfa) pour le désherbage, deuxcent francs cfa (200 f.cfa) pour la récolte du riz et deux cent cinquante francs cfa(250 f.cfa) pour les autres récoltes.

Contrairement à la zone forestière où la main d’oeuvre est surtout constituéeen grande partie par les allogènes, notre zone présente la particularité de travailleravec les autres membres du village en plus de la main d’oeuvre familiale.

Ceci est un avantage considérable dans la mesure où, partant des liens desolidarité qui existent entre les habitants, c’est toute une mobilisation qui se créeautour de celui qui fait appel à un groupe pour lui venir en aide.

En outre, ce dernier a la latitude de choisir lui même le mode de paiement decette main d’oeuvre qui peut se faire soit à travers la nourriture qu’il donne augroupe, soit en nature, soit en espèce. Les paysans ont également la possibilité desolliciter les services des groupes d’entraide des villages voisins (à la fois situés àl’intérieur et hors du bassin versant de Poundiou) et les modes de paiement restentles mêmes.

Dans les trois villages de notre zone, les prix sont sensiblement les mêmes( voir tableau ) à la différence qu’à Fonondara, on note une présence massive desgroupes qui pour la plupart sont permanents. Cette situation s’explique par le faitque ce village était parmi les grands producteurs de coton de la région dans lesannées 70; raison pour laquelle d’ailleurs il a bénéficié du projet de semi-motorisation. Très tôt, les paysans ont pris l’habitude de s’organiser pour travaillerensemble.

A Poundiou et à Katièrè par contre, les acteurs se retrouvent à des momentsprécis et s’organisent pour constituer des groupes d’entraide.

La mise en place des groupes s’effectue de façon spontanée et il n’y a pas deconditions particulières pour y accéder. Ce qui est demandé à chaque individu; c’estl’amour du travail, le respect et la disponibilité à chaque fois que les membres seréunissent.

La relative facilité d’obtention d’une main d’oeuvre disponible et bon marchéconstitue un atout majeur pour chaque paysan dans la mise en place des cultures.Celui-ci peut pratiquer à la fois plusieurs cultures et mettre en valeur de grandessurfaces dans le but d’accroître son rendement agricole; car il peut bénéficier à toutmoment des services des groupes d’entraide.

Tableau: Rémunération en espèce ( F.CFA) de la main d’oeuvre par sexe et par activités agricoles

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Poundiou Katiere Fonondara

Femme Homme Femme Homme Femme Homme

Laboursbillons/buttes

* 1000 * 800 à1000

* 1000

Entretiens 250 500 200 500 300 300

Récoltes 250 500 200 500 250 250/200le riz

*Ne le fait pas.Source: Enquêtes d’Octobre 1997.

8- Calendrier agricole

Il prend en compte plusieurs cultures. Dans le cadre de cette étude, nousavons décidé de retenir le coton et l’anacarde pour les cultures de rente et le riz(pluvial et bas-fonds), le maïs, l’igname et l’arachide pour les vivriers.

Le labour du champ de coton se fait en avril-mai. La date du semis estgénéralement fixée par la cidt, il débute à la mi mai et se poursuit jusqu’en juin. Apartir du jour du semis jusqu’au troisième jour après, les herbicides doivent êtreappliqués (avant la germination des plants). L’utilisation des herbicides couvre lamême période que celle du semis, mais seulement débute quelques jours après (troisjours au maximum). Deux semaines après le semis, on effectue le démariage (le trides pieds du coton pour ne garder que deux pieds dans chaque trou). L’engrais npkest utilisé juste à la suite du démariage. Un mois après le début du semis, lepremier sarclage a lieu et à la suite de celui-ci, les traitements pesticidescommencent et sont repris chaque deux semaines (il est conseillé environ cinqtraitements jusqu’à la récolte). Le second sarclage se fait à partir de la mi-juilletet il est suivi immédiatement par l’application de l’engrais urée et du rebillonnage.On effectue un dernier sarclage un mois avant le début des récoltes (octobre-novembre). -Durant tout le mois de mai, les paysans labourent le champ de maïs. Entre ledébut de juin et la mi-juillet, ce sont les semis. Les herbicides sont appliqués troisjours plus tard. Le premier sarclage se fait de juillet jusqu’à la mi-août, suivi del’engrais npk. Pendant le mois d’octobre, on fait un autre sarclage et on appliquel’engrais urée avant la récolte (décembre-janvier).

La construction des buttes d’igname se fait de septembre à octobre. Enfévrier, on vient faire le brûlis et le désherbage. La plantation a lieu tout justeaprès; c’est-à-dire de mars à avril. L’entretien se fait durant les mois de juin, juilletet août. La première récolte s’effectue en septembre et la seconde entre décembreet janvier.

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-La préparation du sol pour la culture de l’anacarde se fait de janvier àfévrier. Entre février, mars et avril, on fait la trouaison, le rebouchage et lepiquetage. Les deux mois qui suivent sont consacrés au semis. Le nettoyage se faiten juin-juillet et en décembre-janvier. Le fumure est appliqué entre mars et avril.C’est dans la période de avril à juin que l’anacarde est récolté.

-Le riz pluvial est semé de mai jusqu’à la mi-juin; mais avant on effectue lelabour en avril. Les herbicides sont utilisés dans la même période du semis.L’engrais npk est appliqué de la mi-mai à la mi-juillet; il est suivi de deux sarclagesjusqu’en septembre. Pendant ce mois on utilise l’engrais urée.

-La préparation du sol pour le riz de bas-fond a lieu de février à mars. Le rizest semé de mars en avril et durant cette même période, on applique les herbicides.Ces femmes font généralement trois sarclages avant la récolte (octobre-décembre).

CHAPITRE IV : CARACTERISATION DE L’ENVIRONNEMENT SOCIO-ECONOMIQUE

1-les données du marché

1-1.Accès au marché des intrants

Les villages de Poundiou, Katièrè et Fonondara ne possèdent pas de marchéquotidien. Ils ont deux jours de repos dans la semaine qui correspondent égalementaux jours de marché. Pendant ces jours, les marchands viennent de partout ets’installent sur la place publique pour vendre ou acheter.

Le village de Katièrè ne possède pas de marché, ses habitants se déplacentvers les villages de Poundiou et de Fonondara.On retrouve sur ces marchés des produits alimentaires, des ustensiles de cuisine,des pièces de rechange pour la réparation des vélos et des mobylettes, effetsvestimentaires et des outils de travail. Ces marchés ne sont pas vastes et neprésentent pas une gamme assez variée de produits. Pour donc accéder aux intrants et à d’autres produits, les paysans se déplacent versle marché de Boundiali.

1-1-1.Accès physique

Le marché de Boundiali est Situé à environ vingt cinq kilomètres (25 km) duBassin Versant de Poundiou. Dix neuf kilomètres (19 km) de cette voie est bituméeet les six kilomètres (6 km) partant des villages jusqu’à la voie principale sontessentiellement des pistes impraticables en saison des pluies. Les paysans s’yrendent soit à vélo, soit en mobylette ou encore en voiture (les voitures enprovenance de korhogo pour boundiali).

Mais il sont très peu les paysans qui se rendent à Boundiali pour acheter desintrants.

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Ce sont surtout des personnes qui n’ont pas fait du coton ou qui ont desintrants mais en quantité insuffisante de sorte qu’ils sont obligés d’en acheter poursatisfaire leur besoin.

L’insuffisance des intrants des paysans serait dû à plusieurs raisons; maisles plus importantes concernent d’abord l’insuffisance des stocks déposés par lesstructures fournisseuses des intrants auprès des paysans; et ensuite,l’augmentation des superficies prévues par les paysans.

Ce sont des cas de force majeur qui conduisent les paysans à se rendre aumarché pour acheter des intrants en argent cash. Ils préfèrent un autre moded’accès : le paiement à crédit.

1-1-2. L’accès à crédit

Il s’effectue avec la CIDT depuis sa création en 1974.

Chargée de la production et de la commercialisation du coton graine, la cidtmotive les paysans à maximiser la production cotonnière à travers l’octroid’intrants à crédit, la mise en place de projets tels que les boeufs CA, l’octroi decharrues, de tracteurs et les défrichements subventionnés. La pratique de la culturedu coton est la condition pour avoir accès aux intrants à crédit. La cidt a toujoursmis les engrais, les herbicides et les pesticides à la disposition des paysans. Maisà la création de l’union des GVC (du département de Boundiali) en juillet 1983; leschoses vont changer.

En 1984, l’union va prendre en compte la fourniture des herbicides auxpaysans. Mais pour les gvc non affilés à l’union, la cidt continue de fournir lesherbicides. Ce changement est survenu parce que les paysans jugent les prixpratiqués par la cidt très élevés. L’objectif de l’union des gvc est d’arriver à uneautonomie des paysans vis à vis de la cidt en fournissant à ceux-ci les intrants etle matériel de culture à des prix moins élevés. Auparavant, les pesticides étaientdonnés gratuitement aux paysans; mais après la dévaluation, ils sont devenuspayants.

La fourniture des intrants par la CIDT et l’union des GVC s’effectue à crédit.C’est le GVC de chaque village qui sert d’intermédiaire entre les paysans et lesfournisseurs des intrants.

Dans le courant du mois de septembre et d’octobre, le gvc fait un plan decampagne (au cours duquel on demande à chaque paysans le nombre de superficiequ’il souhaiterait faire) pour déterminer le nombre d’engrais, d’herbicides et depesticides que chaque paysans va utiliser en fonction des superficies des culturesqu’il désir faire. Le comptable du GVC établit les listes de leurs besoinsprévisionnels qu’il envoie à la cidt et à l’union des gvc. A partir de novembre, la cidtet l’union adressent leurs bons de commande aux différentes firmes fabricantesd’intrants qui livrent les produits au plus tard fin mars. Après les différenteslivraisons, la mise en place des intrants auprès des paysans s’effectueimmédiatement (avril). C’est la cidt et l’union des gvc qui déposent les intrants dans

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les magasins de stockage des différents gvc qui se chargent de les distribuer auxpaysans.

Les prix des intrants sur les marchés sont sensiblement les mêmes que ceuxpratiqués par les structures fournisseuses à crédit.

Tous ces produits ont connu une augmentation des prix après la dévaluation.Il est possible pour les paysans d’échanger les engrais, les herbicides et lespesticides entre eux en cas de besoin. Lorsqu’un paysans n’a pas un intrant et qu’unautre en possède, ils se rendent tous les deux au bureau du gvc où le comptableprocédera à un transfert de crédit au nom de l’emprunteur.

Ceci permet aux paysans d’accéder rapidement aux intrants à crédit et sansêtre obligés de se rendre au marché.

Dans leur ensemble, les paysans accèdent aux semences de riz entre eux.Cela se passe à travers un échange, une rémunération en nature (avec cinq à sixbottes de riz) lorsque la personne sert de main d’oeuvre ou par achat. L’accès à cessemences ne se fait pas essentiellement à l’intérieur des villages. Lorsque lespaysans se déplacent dans les villages voisins, ils achètent ou font des échanges desemences avec les autres paysans. C’est ce qui explique pourquoi dans le bassinversant de Poundiou, il y a beaucoup de variétés de riz dont les paysans ignorentl’origine. Les variétés que l’on retrouve surtout sur les plateaux sont l’iguapé et lemorobrékan.

A la création de la cidt, cette structure fournissait des semences de riz et demaïs à crédit aux paysans par l’entremise du gvc; et prélevait le remboursementà la vente du coton. La variété de riz proposée est l’iguapé; son sac de 25 kg coûte6.875 f.cfa et celui de 50 kg s’élève à 13.750 f.cfa.S’agissant du maïs, le sac de 25 kg revient à 5.375 f.cfa.

Les semences de riz ne sont plus disponibles en quantité suffisante à présent.Les sociétés semencières qui fournissaient la cidt ont été dissoutes. Pour donccombler ce vide, la cidt va sélectionner certains paysans; chargés de multiplier lessemences de riz qu’elle achète et met à la disposition d’un plus grand nombre.

Cependant, les faibles moyens de production des paysans et leur nombrelimité ne leur permettent pas d’atteindre le rendement de ces sociétés semencières;d’où le manque permanent de semences à mettre à la disposition des paysans.

1-2. Mode de paiement et d’utilisation des intrants dans les cultures.

L’ensemble des intrants (engrais, herbicides, pesticides, semences de riz etde maïs et le matériel de culture) fournit par la cidt et l’union des gvc est donné àcrédit. Mais pour y avoir accès, le paysan doit obligatoirement pratiquer la culturedu coton.

Lorsqu’un actif agricole a besoin d’intrants, il le fait savoir au gvc pendantle plan de campagne. Le comptable du gvc établit le dû du paysans qui seraretranché sur son argent à la vente du coton. Mais si ce dernier est dansl’incapacité d’honorer entièrement ses dettes, du fait de leur valeur très élevée, il

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paye une partie de l’argent et la somme restante est reportée à la prochaine ventedu coton (l’année prochaine).

Les paysans utilisent les intrants modernes en fonction des cultures et deleur capacité de production cotonnière.Parmi les engrais, nous avons l’urée et le npk qui sont utilisés dans toutes lescultures. Les pesticides concernent uniquement le coton et les herbicides varientsuivant les différentes cultures de même que les prix des intrants (voir tableau).

La cidt conseille aux paysans d’utiliser par hectare quatre sacs d’engrais npket un sac d’engrais urée. Pour les herbicides, il faut quatre boîtes ou bidons parhectare. Ce dosage est le même pour les pesticides.Les paysans dans leur grande majorité prennent les intrants pour le coton. Lesengrais servent d’abord au coton et s’il y a du reste, ils sont utilisés dans le champde maïs.

L’engrais n’est pas utilisé pour le riz car il est pratiqué en rotation avec lecoton. Les herbicides sont pris pour le coton, le maïs et le riz. Mais les paysans nerespectent pas toujours les doses d’application recommandées par la cidt car lesremboursements reviennent chers.

En effet, en nous référant aux prix des intrants et aux dosages, un paysanaura à débourser pour un hectare de coton; 49.500 f.cfa pour les engrais (urée etnpk). L’herbicide cotodon coûtera 24.320 f.cfa et les six traitements de pesticidepolytrine reviendront à 22.020 f.cfa.

En somme, le paysan remboursera 95.840 f.cfa à la cidt et à l’union des gvcpour les intrants pris pour seulement un hectare de coton.

Les paysans interroges trouvent que les prix des intrants sont très élevésmême si l’accès se fait à crédit. Après le remboursement, le paysan se retrouve avectrès peu d’argent. C’est pour cette raison d’ailleurs qu’il utilise des techniques tellesque la rotation coton/riz ou encore la réduction de la superficie des champs pourréduire le nombre d’intrants à utiliser.

Face à l’importance du coton en tant que culture de rente; donc principalesources de devises, celle-ci bénéficie d’une plus grande attention quant àl’utilisation des intrants. Les autres cultures telles que le riz et le maïs sontreléguées au second rang. Elles reçoivent les restes d’intrants du coton ou lorsqu’ilsen prennent (intrants) pour celles-ci, les doses d’application ne sont pas toujoursrespectées.

Dans une telle situation, l’on serait tenté de se demander si les intrants sonttoujours présents au moment où les paysans en on besoin; en un mot s’ils sontdisponibles.

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Tableau: Prix des intrants en f.cfa pour la campagne 1997/1998

produits cultures dose/ha prix/unitéaucomptant

prix/unité àcrédit

urée toutescultures

1 sac/ha 7975 8800

npk toutescultures

4 sacs/ha 9350 10175

cotodonplus 500EC

coton 4 boîtes/ha 5230 6080

primagram500 SC

maïs 4bouteilles/ha

4550 5300

rifit extra500 EC

riz 4 boîtes/ha 7650 8900

bellater maïs 4 bidons/ha 5950 5060

ronstar 25 riz 4 boîtes/ha 7500 8460

cotogard500 SC

coton 4bouteilles/ha

5230 6080

polytrine coton 4 boîtes/ha/traitement

840 915

Source: Enquêtes d’ octobre 1997

1-3.Disponibilité des intrants

Selon les responsables des structures fournisseuses des intrants aux paysans(la cidt et l’union des gvc) et ceux des gvc des différents villages, les intrants sontdéposés dans les villages en fonction de leurs périodes d’utilisation.

Etant utilisés en première position, les herbicides arrivent entre avril et mai;puis suivent les engrais entre la fin du mois de mai et début juin. Enfin lespesticides arrivent en dernière position autour de juin-juillet.

Les intrants sont déposés au village dans les magasins de stockage desdifférents gvc avant leur moment d’utilisation.

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Mais pour les paysans, les intrants ne sont pas toujours disponibles dans lamesure où ils n’arrivent qu’en début des cultures.

Au delà de ce fait, les difficultés majeures que rencontrent les paysans quantà l’approvisionnement en intrants portent sur l’insuffisance et le retard de ceux-ci.

En effet, aux dires des paysans, la cidt ne fournit plus les semences de rizcomme dans le passé. Ils s’approvisionnent entre eux à travers des échanges ou desachats avec les anciennes variétés de riz.

S’agissant des engrais, des herbicides et des pesticides; leur fréquenteinsuffisance et retard provoquent des désagréments chez les paysans tant auniveau du respect des superficies prévues que de celui du respect du calendrier descultures.

Lorsque les paysans n’ont pas les quantités d’intrants qu’ils ont demandés,soit ils réduisent les superficies de leurs champs, soit ils les conservent mais sanstoutefois respecter les doses d’application préconisées par les conseillers agricoles,soit ils en prennent avec d’autres paysans ou en achètent au marché.

Il n’y a pas de vendeurs d’intrants installés au village. Mais pendant lesjours de marché, certains marchands proposent des intrants.Dans leur ensemble, les paysans choisissent l’une des deux premières options àcause du prix élevé des intrants (surtout lorsqu’ils sont payés cash).

Toutes ces difficultés constituent une entrave à la maximisation de laproduction agricole.

Nonobstant ce fait, il serait important de connaître les objectifs des paysansquant à la production des cultures; car ceux-ci peuvent justifier le niveau derendement de ces cultures.

1-4.Objectifs de production des différentes cultures

Les objectifs de production concernent ici les cultures vivrières.Les paysans produisent les vivriers dans le but de les consommer. Parmi ceux-ci,l’arachide est plus l’objet de vente que de consommation. Cette culture est surtoutpratiquée par les femmes et constitue leur principale source de revenus.

Les cultures telles que le riz, le maïs, l’igname, le sorgho et le mil sontproduites pour la consommation familiale. Mais lorsqu’ils en ont suffisamment ouen cas de difficultés (maladie, scolarisation des enfants...), les paysans vendent unepartie de leur production de riz ou de maïs. Ce sont de faibles quantités qui sont très souvent l’objet de vente.

Pour les paysans, le riz ne doit pas être vendu car il constitue l’un desaliments de base de la famille. Aussi, lorsqu’ils produisent le riz ce n’est pas dansle but de le commercialiser. Ce sont des contraintes financières qui obligent lespaysans à vendre le riz. Cette vente s’effectue après la récolte au moment où lepaysan est confronté à des difficultés.

La production rizicole est fonction des objectifs du paysan car de façongénérale, ce sont les cultures de rente qui occupent les plus grandes parcelles

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contrairement aux vivriers. La culture du riz présent l’avantage d’être plus facileà cultiver par rapport au coton (au dire des paysans); toutefois, elle ne bénéficie pasde l’encadrement d’une société spécialisée (comme dans le cas de la cidt pour lecoton) pouvant faciliter l’accès aux intrants et garantir l’achat de la productionrizicole à un prix élevé et homologué.

Face donc à cette insuffisance, la pratique de la culture du riz ne bénéficieplus d’un engouement de la par des paysans pouvant faire d’elle une culture derente. Ils se contentent donc de produire tout juste pour l’autoconsommation.

Les objectifs de production du riz de bas-fond sont les mêmes que ceux du rizpluvial. Les femmes produisent le riz de bas-fonds pour leur propre consommationou pour compléter la production de la famille. Elles vendent également des bottesde riz pour acheter des ustensiles de cuisine, des condiments ou des effetsvestimentaires.

Les vivriers dans leur ensemble sont destinés à priori à l’autoconsommation;mais il arrive que certains paysans en mettent sur le marché en cas de besoinfinancier.

1-5.Accès au marché des produits agricoles

Les principales cultures de rente (coton et anacarde) sont commercialiséesà l’intérieur de chaque village.

S’agissant du coton, chaque gvc en place s’occupe de son achat. Au départ,c’est la cidt qui achetait le coton. Mais à l’arrivée des organisations paysannes,cette tâche a été dévolue à ces organisations.

Le gvc a son équipe qui pèse la production de chaque paysan, fait les calculset déduit le net à payer à chaque paysan en tenant compte des intrants et dumatériel agricole pris éventuellement par le paysan. Le comptable du gvc établittrois factures identiques qui sont transmises à la cidt, à l’union des gvc et ladernière reste au gvc. Après vérification des calculs, la cidt fait le virement aucompte de l’union des gvc après avoir retranché ce que les paysans lui doivent.L’union à son tour prélève les crédits des herbicides octroyés aux paysans ettransmet le net à payer des paysans au gvc qui se charge paiement de chaquepaysan. Au moment de l’achat du coton, la cidt envoie un contrôleur sur place quise charge d’identifier la qualité du coton.

En effet, il existe deux qualités de coton. La première est appelée premierchoix; c’est un coton très blanc et propre. La seconde est le deuxième choix; il estun peu sale et comporte des impuretés dues aux mauvais traitements et au manqued’attention de la part du paysan. Le prix du coton est fixé en fonction de son choix.

La vente de l’anacarde s’effectue également au village. Les détaillantsDioula sillonnent les villages à partir des récoltes pour acheter l’anacarde. Le prixd’achat croît de la récolte jusqu’à la pénurie.

Les cultures vivrières (riz, maïs et arachide) sont achetées dans chaquevillage par les détaillants. Mais certains paysans (ceux des autres villages) vont envendre à Fonondara les jours de marché. Il y a des paysans qui font le commerce;

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ils achètent les cultures avec les autres paysans et les conservent jusqu’à ce qu’ilsaient une quantité élevée ou en cas de pénurie pour les revendre au marché deBoundiali.

Parmi les trois gvc, seul celui de Fonondara achète en plus du coton, le rizet le maïs aux paysans. Les autres ne le font pas faute de moyens financiers. (nousreviendrons sur l’achat du riz par le gvc dans la partie portant sur l’organisationde la vente du riz).

1-6. Prix des produits agricoles et leur saisonnalité

Hormis le coton, toutes les autres cultures ont des prix qui varient de larécolte jusqu’à la vente de celles-ci.

Le prix d’achat du coton est fixé à chaque campagne et il peut varier d’uneannée à une autre. Pendant la campagne 1995/1996, le coton premier choix coûtait170 f.cfa le kg et le second, 130 f.cfa le kg. La campagne suivante (1996/1997), lepremier choix a été acheté à 180 f.cfa le kg tandis que le deuxième coûtait 140.Pour la campagne présente, le premier choix est revenu 200 f.cfa et le second à 170f.cfa le kg.

La vente du coton débute habituellement à la fin du mois d’octobre et sepoursuit jusqu’en mai. Mais cette année, elle n’a commencé qu’à la mi-novembreparce que les paysans ont refusé de vendre leur coton à cause du différend qui lesa opposé à la cidt au sujet du contrôle de la qualité du coton.

La cidt a décidé cette année qu’après la pesée du coton par le gvc, le contrôleva s’effectuer désormais à l’usine (de la cidt) en présence d’un représentant du gvcet non plus au village comme dans le passé. Les responsables de la cidt ont constatéque les contrôleurs étaient victimes de sévices conduisant parfois à des pertes devies humaines de la part de certains paysans mécontents. Après de nombreuses discussions, les paysans ont enfin accepté la décision de la cidtet ont leur production cotonnière sur le marché.

Le prix du riz vendu au village est fixé par les paysans. Il est fonction de lagrosseur de la botte et de l’abondance du riz sur le marché.Les cultures telles que le maïs et l’arachide ont des prix d’achat qui sont fixés parles acheteurs. Ces prix sont également guidés par la saisonnalité des produits.

Ce sont les marchands qui fixent de même le prix d’achat de l’anacarde.Mais il est surtout guidé par la dureté du fruit de l’anacardier.Lorsque le paysan prend le temps de le sécher, il a un prix élevé; mais s’il est vendutout juste à la récolte le prix est bas car il est encore frais et a une masse élevée àla pesée.

Dans la plupart des cas, les prix des produits agricoles sont fixés en fonctionde leur saisonnalité. Ils connaissent une augmentation en période de pénurie (voirtableau). Mais pour les paysans, ces prix sont insuffisants comparés auxinvestissements physiques et financiers que nécessitent la mise en place descultures.

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Tableau: Prix des produits agricoles selon leur saisonnalité (en f.cfa)

cultures saisonnalité

anacarde riz (f.cfa parbotte)

maïs (sacde 70 kg)

arachide(sac de 90kg)

abondance fev-mars-avril 50f/kg

oct-nov-déc50 à 75

déc-jan-fev5500 à6000

oct à jan18.500

pénurie juin-juillet 275 f/kg

avril-mai-juin 100 à125

juillet-août10.000 à11.000

juin-juillet27.500

Source: Enquête octobre 1997

1-7. Conservation et stockage des produits agricoles

Le lieu de conservation et de stockage diffère selon les cultures. Dans le passé, toutes les cultures étaient conservées au champ; mais à présent, lespaysans tendent à abandonner cette pratique pour des raisons que nousévoquerons un peu plus loin.

L’igname est conservée au champ dans une cabane à l’abri du soleil. Elle yreste et à chaque fois que le paysan en a besoin pour son alimentation, il transportedes tubercules au village.Le maïs, le riz et l’arachide sont également gardés au champ mais tout juste letemps qu’ils sèchent après avoir été exposés au soleil sur de grands appatams. Ilssont par la suite transportés au village pour être mis au grenier ou dans la maisonou encore vendus (surtout l’arachide). Lorsque ces cultures ne sont pas bienséchées, elles sont à nouveau étalées au soleil au village à l’abri des animauxdomestiques.

La conservation du riz se fait sous forme de bottes et toujours en paddy. Ilest mis en meule pour le stockage. Les bottes sont superposés de sorte à former uncône. La récolte ainsi conservée peut rester intacte pendant plus de deux ans,l’altération ne portant sensiblement que sur le goût du grain.A la récolte du coton et de l’anacarde, ces cultures sont transportées au village. Lecoton est mis dans des bâches et conservé à l’intérieur des maisons jusqu’à la vente.

L’anacarde par contre est selon le gré du paysan soit vendu à la récolte, soitil est séché et mis en vente par la suite. Il existe des magasins de stockageappartenant aux gvc dans chaque village; mais ceux-ci sont réservés au coton(pendant la période de la vente) et aux autres cultures que le gvc achète(fonondara).

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Comme nous l’avons fait remarquer au début de cet intitulé, les paysans neconservent plus leurs cultures au champ. La venue massive des éleveurs Peuhldans le bassin versant de Poundiou a contraint ceux-ci à abandonner cettepratique. En effet, les boeufs de ces éleveurs nomades constituent une menace pourles cultures qui sont gardées au champ. Les animaux peuvent manger toute larécolte des paysans en leur absence.

Il y a également les feux de brousse que provoquent les peuhl en brûlant lesherbes en saison sèche. Cette pratique a pour but de permettre aux herbes de viterepousser pour que les boeufs aient de quoi à brouter. Mais ces feux représententun danger pour les récoltes car périodes de sécheresse, le feu se repend vite et ilpeut faire des dégâts.

A ces éleveurs, il faut aussi ajouter le développement du vol des culturesdans la région. Ces actes sont commis selon les paysans par les trafiquants etbandits venant des grandes villes.

Bien que la vente de la majeur partie des cultures s’effectue au village,certains paysans écoulent leurs produits sur d’autres marchés.

1-8. Transport des produits agricoles

Le transport des produits agricoles se fait à deux niveaux: Il y a celui qui s’effectue du champ vers le village et du village vers les lieux devente.

Ce sont surtout les femmes qui s’occupent du transport des cultures duchamp au village. Elles le font à pieds et sont très souvent aidées dans cette tâchepar les enfants. Les hommes le font également mais à un niveau beaucoup plusréduit à l’aide des vélos et des mobylettes. Le transport des cultures sur le marchéde fonondara par les paysans des autres villages se fait avec les mêmes moyens detransport. Les femmes qui vont vers ces marchés se font aider par leur époux ouleurs enfants. Mais généralement, elles commercialisent leurs produits sur place.

Les paysans qui s’adonnent au commerce utilisent les mobylettes pourécouler leurs marchandises sur le marché de Boundiali. Quand les produits sontbeaucoup, ils s’associent entre eux et louent une bâchet qui vient chercher lescultures au village. Le coût du transport est évalué en fonction du nombre de sacs.Un sac est payé à 500 f.cfa. Les paysans qui exercent cette activité ne sont pasnombreux. Ils préfèrent vendre leurs cultures au village à cause du coût dutransport qu’ils jugent élevé.

C’est le mauvais état des routes qui justifie ce prix du transport. La routereliant les villages (environ 6 km pour le premier village Poundiou) à la voieprincipale est faite essentiellement de piste impraticable en saison pluvieuse. Iln’existe pas de voitures de transport (des hommes ou des marchandises) entre lesvillages et la ville de Boundiali. Les paysans-commerçants sont donc obligés enchercher à Boundali pour l’écoulement de leurs marchandises.

Les différentes caractéristiques liées au marché ne tendent pas à favoriserune maximisation de la production rizicole. L’absence de certains avantages tels

38-Ndabalishye I, op-cit, Idessa 1995, p185

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que le bon état des routes, le prix des produits agricoles, le prix des intrants et leurdisponibilité annihile tout éventuel objectif de commercialisation des cultures despaysans.

2- La riziculture de bas-fonds

Cette appellation est appliquée au riz cultivé dans les basses terresconstamment humides et passagèrement submergées en périodes pluvieuses. Ellefut introduite en Côte d’Ivoire dans les années 10 par les autorités coloniales(Ndabalishye I, 1995. p185)38 . Cette forme de riziculture se pratique dans le bassin versant de Poundiou à causede la forte présence de bas-fonds dans la zone. Toutefois, la riziculture de bas-fondsn’est pas l’apanage de tous les paysans.

2-1. La pratique de la riziculture de bas-fonds

Comme nous l’avons fait remarquer au début de cette étude, le riz de bas-fonds est surtout pratiqué par une partie de la population dans le bassin versantde Poundiou. Celle-ci est composée essentiellement des vieilles femmes ayantatteint l’âge de la ménopause.

Lors de nos enquêtes, nous n’avons pas trouvé de jeunes femmes et d’hommesdans les bas-fonds. Lorsque la femme se marie, elle aide son époux dans ses champset sollicite un champ individuel sur le plateau dans lequel elle fait de l’arachide oudes cultures légumières. Pendant tout ce temps, le mari lui interdit de cultiverdans les bas-fonds. C’est à partir d’un certain âge (autour de 45 ans) que la femmeaura la possibilité de demander un bas-fonds pour cultiver du riz.

Généralement, lorsque cette période arrive (le départ de la femme dans lebas-fonds), l’époux est devenu vieux et ne cultive pratiquement plus. Les enfantsayant grandi le remplacent au champ.

L’interdiction de l’accès aux bas-fonds aux jeunes femmes par les hommesrépond à un problème de gestion de la main d’oeuvre. La femme est une activefamiliale agricole importante. Elle aide le mari dans tous ses champs et participepratiquement à tous les travaux champêtres . Sa contribution est énorme dans laréussite des cultures et son absence aurait très certainement un impact su lerendement agricole familiale. C’est pour cette raison que l’homme refuse que safemme aille cultiver dans le bas-fonds pendant qu’il cultive encore. Elle n’auraitpas le temps suffisant pour l’aider pleinement.

Pour les hommes, leur absence dans les bas-fonds s’explique par la pénibilitéet la lenteur des activités liées à la culture du riz de bas-fonds. Les hommes ontl’habitude de cultiver vite et sur de grandes parcelles; ce qui n’est pas le cas dansla riziculture de bas-fonds.

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Face donc à cela, il serait important de savoir comment se fait la mise en place duriz de bas-fonds.

2-2. Itinéraire technique de la culture du riz de bas-fonds

La conduite de cette culture peut se résumer en quatre grandes phases :-La préparation du sol-L’installation de la culture-L’entretien de la culture-La récolte

La préparation du sol se fait manuellement et elle consiste en un piochagedu sol à l’aide de la petite daba. Les femmes creusent le sol et cassent les boulesd’argile avec cet outil. Elles arrachent les racines des mauvaises herbes à la main.Cette préparation débute dans le mois de février dans les conditions d’assec. Le labour mécanisé est aussi pratiqué à l’aide de boeufs de traction qu’elles louentou empruntent à un membre de la famille.

L’installation de la culture se fait par semis direct ou par repiquage :*le semis direct est effectué à la volée sur des sols secs et les femmes utilisent

des variétés de riz à cycle long. Le semis direct consiste à épandre manuellementà la surface du sol des graines de riz qui sont ensuite enfouies dans le sol avec lapetite daba. Le semis se fait en mars et se poursuit souvent jusqu’en avril lorsqueles pluies n’ont pas encore débuté. Selon les femmes, cette technique est très rapideet nécessite peu de main d’oeuvre; mais elle en exige beaucoup au moment dudésherbage.

Lorsque les femmes sont en retard et que la saison des pluies à commencé,elles font des pépinières à côté du bas-fonds et quelque temps après (environ deuxmois) elles vont repiquer les plants dans le bas-fonds.

*le repiquage consiste à transplanter sur une surface humide des plants deriz issus d’une pépinière. La pépinière est une petite surface où sont semées lesgraines de riz. Les femmes font les pépinières avec des variétés de riz à cycle courtet le repiquage s’effectue en mai-juin. Celles qui sèment plus tôt ne peuvent pasutiliser des variétés de riz à cycle court car le riz sera mûr autour de août-septembre en pleine saison pluvieuse où ily a beaucoup d’eau dans les bas-fonds.La récolte ne peut pas se faire car le riz est couvert d’eau.

L’entretien de la culture comprend en principe le traitement herbicide,l’apport d’engrais et le désherbage manuel.

Dans le système traditionnel de culture du riz, les herbicides et les engraisne sont pas utilisés. Sur l’ensemble des femmes interrogées individuellement, 17%utilisent les engrais et les herbicides ensemble; 33% font usage des herbicidesuniquement et 50% d’entre elles n’utilisent aucun intrant (voir graphique). Celas’explique par le mode d’accès des femmes aux intrants et leur coût élevé.

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Ce sont les femmes qui ont fait le semis direct (en mars-avril) qui appliquentles herbicides car en ce moment, les bas-fonds sont secs. Les autres par contre nepeuvent pas le faire à cause de la présence de l’eau.

Les femmes font le désherbage manuel. Il consiste à l’arrachage à la maindes mauvaises herbes entre le plans de riz. C’est une opération assez contraignantequi s’effectue sur une longue période. On peut comptabiliser trois désherbages dansl’ensemble. Un premier désherbage a lieu en mai-juin et il concerne les femmes quiont fait le semis direct; mais cette opération n’est pas effectuée par les femmes quiont utilisé les herbicides car les bas-fonds ne contiennent pas assez d’herbes en cemoment.

Au mois d’août, il y a un autre désherbage pour toutes les femmes et enfinle troisième a lieu en octobre avant les récoltes.

La récolte débute en octobre et se poursuit jusqu’en décembre. Elle estréalisée à l’aide d’un couteau. Les femmes coupent les panicules de riz (avec unepartie de la tige) les regroupe et le attachent pour former des bottes de riz. Le rizsera par la suite séché, battu et vanné.

2-3. Le choix des variétés de riz

Les variétés traditionnelles de riz de bas-fonds dominent encore dans lebassin versant de Poundiou. Ce sont les femmes qui choisissent qu’elles vontcultiver. Leur choix est guidé par la productivité de la variété. Elles accèdent auxsemences de riz par des échanges avec d’autres femmes du même village ou desvillages voisins. Lorsqu’elles apprennent qu’une variété a un fort rendement, ellesessaient d’en obtenir.

Les variétés qu’on retrouve surtout dans les bas-fonds sont le "katchali", le"tchounon" et le "nomblegnougolo".

La prédominance des variétés traditionnelles de riz de bas-fonds nous amèneà nous interroger sur le mode d’acquisition des intrants par les femmes.

2-4. Accès des femmes aux intrants

Les femmes accèdent aux intrants par achat cash ou par emprunt. Elles lesachètent soit au marché soit avec certains paysans. Les prix pratiqués sont lesmêmes que ceux de la cidt et de l’union des gvc. L’emprunt se fait à l’intérieur dela famille avec l’époux ou un enfant (s’il cultive du coton).

Le taux d’utilisation des intrants par les femmes dans les bas-fonds estmoyen (50%) car elles ne peuvent pas les obtenir à crédit. Leur source de revenusest limité; l’arachide qui est leur principale source de devises est pratiquée par peude vieilles femmes. Seules 33% des femmes interrogées cultivant dans les bas-fondscontinuent de pratiquer la culture de l’arachide sur les plateaux. Au fur et à mesureque les femmes vieillissent, elles abandonnent les autres cultures pour se consacreruniquement à la culture du riz de bas-fonds. Ceci parce que le riz sert à laconsommation et elles préfèrent assurer leur sécurité alimentaire que de pratiquer

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des cultures pouvant rapporter éventuellement des devises. Cette absence derevenus fait que les femmes n’investissent pas beaucoup dans les intrants dans leurgrande majorité.

Lorsque les femmes empruntent les intrants, les apports (au niveau descultures) se font plus en fonction des quantités reçues que des superficies cultivées.Elles n’appliquent pas les doses recommandées par les conseillers agricoles. Parmiles intrants utilisés, les femmes achètent surtout les herbicides. Ceux-ci permettentde réduire la pression des mauvaises herbes et par la même occasion le tempsconsacré au désherbage. Cette opération est considérée par les femmes comme laplus contraignante et nécessite par la même occasion une certaine organisation.

2-5. La main d’oeuvre utilisée dans la culture du riz de bas-fonds

La main d’oeuvre intervenant dans la culture du riz de bas-fonds estessentiellement composée de femmes. Celles-ci s’organisent entre elles pourconstituer des groupes d’entraide. Le travail se fait gratuitement dans les champsdes unes et des autres de façon rotative.

La majeure partie des opérations culturales est exécutée par le grouped’entraide; à l’exception de la préparation du sol pour laquelle très souvent lesfemmes ont recours aux boeufs de traction du mari ou elles les louent pour effectuerle labour (12.000f.cfa/ha). Les services du groupe d’entraide ne sont certes pasrémunérés; mais la femme qui les autres membres du groupe leur donne à mangerau champ.

Les jeunes filles sont aussi sollicitées en tant que main d’oeuvre dans les bas-fonds. Leur rémunération est faite en espèce ou en nature.

Cette forme d’entraide chez les femmes permet de résoudre dans une certainemesure le problème de la main d’oeuvre.

Etant dans les bas-fonds, les femmes ne bénéficient que de l’aide leurs filleset/ou petite filles en tant que main d’oeuvre familiale. La stratégie adoptée par lesfemmes à travers l’organisation des groupes d’entraide non rémunérés entre elles;répond au besoin d’assurer efficacement la conduite de la culture du riz de bas-fonds. Ne disposant pas de revenus suffisants pour accéder aux intrants et nepouvant pas bénéficier non plus d’une main d’oeuvre masculine (familiale etextérieure); les femmes sont donc contraintes de s’associer pour s’entraidermutuellement.

2-6. Outils de travail utilisés dans les bas-fonds

La maîtrise des moyens de production est un facteur essentiel dedéveloppement d’une culture. Elle permet aux acteurs ou actrices de disposer àtout moment et à leur guise ; des éléments indispensables à conduite de leurculture. Cela est d’autant plus important qu’il constitue pour le paysan une sourcede motivation capable d’influer positivement sur son rendement agricole.

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Les outils de travail utilisés dans les bas-fonds appartiennent aux femmes.Le nombre limité de ceux-ci facilite leur accès aux femmes. Ils sont fabriqués parles forgerons du village; ce qui bien entendu les rend plus accessibles tant auniveau de la distance que du prix d’achat.Le matériel de culture des femmes dans les bas-fonds peut être reparti en troissuivant les différentes phases de la culture du riz :

-lors de la préparation du sol, les femmes utilisent une longue daba en formede pioche pour creuser le sol et casser les boules d’argile. Il n’y a pas un outil spécialpour le semis. Ils se font à la volée et les femmes se servent de l’outil du désherbagepour couvrir les graines de riz.

-pour l’entretien des cultures, le désherbage est effectué à l’aide d’une petitedaba; moins longue que la première et étroite.

-la dernière phase qui est la récolte est faite à l’aide d’un couteau qu’ellesutilisent pour couper les panicules de riz.

. Toutefois, l’accès difficile des femmes aux intrantset la pratique de la riziculture de bas-fonds par seulement les vieilles femmesfreinent ce développement.

3- Organisation de la vente du riz

Le riz n’est pas l’objet d’une commercialisation particulière comparativementaux autres vivriers sur l’ensemble des trois villages. Certes, le gvc de fonondaraachète le riz aux paysans; mais cela s’effectue dans un but social et non lucratif.

En effet, cette organisation paysanne achète le riz blanc (décortiqué) auxpaysans à 150 ou 175 f.cfa le kg selon les périodes. Pendant les périodes de soudure,ce même riz est revendu aux paysans à 200 f.cfa le kg.

Cette pratique a pour but de venir en aide à certains paysans qui après avoirvendu leur riz se retrouvent sans nourriture à l’approche des nouvelles cultures.La vente du riz au gvc se fait de façon occasionnelle, car c’est lorsque les paysanssont confrontés à des problèmes d’argent qu’ils le font. En outre, la quantité venduen’est pas beaucoup parce que le paysans veut toujours assurer sa sécuritéalimentaire en riz; même s’il arrive des moments où après en avoir vendu, il n’aplus de riz pour son alimentation. Mais toujours est-il que ce dernier essaie deminimiser au maximum le risque de se retrouver dans une situation de pénurie deriz.

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Contrairement au riz acheté par le gvc, celui que les paysans des troisvillages vendent aux détaillants est en botte et en paddy. Le volume des bottes deriz diffère aussi bien que son prix.

En période d’abondance, la botte de riz coûte 50 F et lorsque celle-ci a unvolume élevé, elle devient 75 F.CFA. Lorsqu’il y a pénurie, la botte de 50 F revientà 100 F et celle de 75 F à 125 F.CFA.

Il n’existe pas une variabilité des prix du riz en fonction des écosystèmes. Leriz du plateau et celui du bas-fonds ont les mêmes prix d’achat; les paysans ne fontaucune distinction quant à la provenance du riz.

La vente du riz ne bénéficie pas d’une organisation sur l’ensemble des troisvillages; même si à Fonondara le gvc achète le riz, cela ne se fait pas à une grandeéchelle. Chaque paysan vend son riz à qui il veut et où il le désir. Cette ventedispersée ne favorise pas la fixation d’un prix d’achat élevé pouvant encourager laproductivité.

Les détaillants marchandent avec les paysans et arrivent généralement àimposer leurs prix dans la mesure où ils savent que les paysans ne vendent le rizque lorsqu’ils ont des besoins d’argent.

4- Les difficultés liées à la pratique de la riziculture

Les problèmes rencontrés par les paysans dans la conduite de la culture duriz sont abordés par ordre d’importance.

4-1. Le riz pluvial

-Le désherbage; il constitue la contrainte majeure des paysans sur le plateau.L’effet des adventices s’il n’est pas maîtrisé peut se traduire souvent par une pertetotale de la production rizicole.L’abondance des mauvaises herbes conduit les paysans à se déplacer sans cesse àla recherche de nouvelles parcelles. Il se pose alors aux paysans, le problème desterres disponibles et de la main d’oeuvre.

-La sécheresse; elle s’est beaucoup développée ces dernières années.L’absence de la pluie a fait que la dernière production rizicole était mauvaisecomparativement à celle des années antérieures.

-Les termites et les oiseaux granivores; on les retrouve beaucoup dans larégion. Ce sont tous des déprédateurs; les premiers mangent les racines des plants

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de riz et détruisent ainsi la culture tandis que les seconds mangent les graines deriz.

4-2. Le riz de bas-fonds

-La préparation du sol; elle apparaît pour les femmes comme l’une desopérations les plus contraignantes de la culture du riz. Le travail à la pioche quiconsiste à creuser le sol et à casser les boules d’argile est supporté difficilement parles femmes du fait de leur âge avancé.

-Le désherbage est aussi contraignant dans la riziculture de bas-fonds. C’esttrès souvent à la main que les femmes arrachent les racines des mauvaises herbes.La présence permanente de l’eau et la faible utilisation des herbicides par lesfemmes favorisent la pression des adventices et du coup, le temps consacré audésherbage.

-La non-maîtrise de l’eau par les femmes provoque chez celles-ci desdifficultés dans les dates de semis lorsqu’elles sont en retard; de même qu’elle rendle traitement herbicide difficile car l’eau entraîne les produits.

-Les sangsues; ce sont des vers qu’on trouve dans les bas-fonds. Ils absorbentle sang des exploitantes à travers les pores des pieds.Les sangsues ne constituent pas une contrainte majeure à l’exploitation des bas-fonds car les femmes s’en plaignent qu’à un très faible niveau.

Le problème de la préparation du sol rencontré par les femmes dans les bas-fonds nous amène à nous interroger sur l’efficacité des outils utilisés par celles-ci.En effet, les efforts physiques que nécessite l’utilisation de la petite daba ne sontpas favorables à la mise en valeur de grandes parcelles de riz.La récolte souffre en outre de lenteurs en raison de l’utilisation par les femmes ducouteau pour couper les panicules de riz. Cet outil ne permet pas de faire rapidement de grandes récoltes à condition d’avoir une main d’oeuvreabondante. 5- Homogénéité des marchés

La pratique des mêmes cultures par les paysans de notre zone d’étudeconduit à une homogénéité des productions dans ce petit espace agraire.Les possibilités internes d’échange sont donc réduites ainsi que la couverture directde tous les besoins des paysans. Ils ne peuvent effectuer de transactions entre euxcar possédant les mêmes produits. Il apparaît donc indispensable pour ceux-ci dediversifier leurs cultures d’un village à un autre dans le but d’assurer unecomplémentarité inter-village susceptible de favoriser l’approvisionnement et lacommercialisation des cultures.

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La possibilité de vente des cultures entre paysans de différents villagesconstitue un facteur pouvant stimuler l’accroissement de la production.

6- Impact des cultures de rente sur la riziculture

Parmi les cultures de rente pratiquées dans la zone, le coton est la principalesource de revenus. Son ancienneté, la compatibilité des intérêts des paysans avecles objectifs poursuivis par les politiques nationales et sa structure d’encadrement,ainsi que les avantages liés à la pratique de cette culture ont contribué à la réussitede son développement.

En effet, le coton bénéficie de certains avantages qui rendent sa pratiqueplus aisée et plus profitable comparativement aux autres cultures.Tout d’abord, l’achat du coton est garanti par la cidt qui s’occupe de cette culture.Son prix est homologué et connaît une constante augmentation depuis la campagne1993-1994. La cidt met à la disposition des paysans cultivant le coton des intrantsà crédit. Cette mesure est l’une des raisons essentielles qui fait convergerpratiquement tous les paysans vers le coton. La raison qui explique cela est le prixélevé des intrants.

A travers la pratique de la culture du coton, les paysans ont la possibilitéd’obtenir également des intrants à crédit pour les autres cultures. La pratique dela rotation coton/riz permet aux paysans de réduire le nombre des intrants qu’ilsprennent et leur coût par la même occasion. Les paysans ne rencontrent aucunedifficulté de transport car la vente du coton s’effectue au village et c’est la cidt quis’occupe du transport des cultures.

Même si pour la plupart des paysans le coton ne permet pas de couvrir tous

les besoins (car ils pratiquent une autre culture de rente qui est l’anacarde et ilscommercialisent souvent certains vivriers), la contribution des revenus tirés decette culture se situe au premier niveau de toutes les dépenses effectuées par ceux-ci. C’est grâce au coton que la majorité des paysans ont pu acquérir des biensmatériels.

qui débutent avec les labours, ensuitele semis, le traitement herbicide, le démariage, l’application de l’engrais npk, lepremier sarclage, les traitements insecticides chaque deux semaines jusqu’à cinqà six traitements, le second sarclage, l’application de l’engrais urée, le rebillonnage,le troisième sarclage et enfin la récolte), les paysans n’envisagent pas l’abandonner.

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La culture de l’anacarde bien qu’étant récente, s’est beaucoup développée.Elle a un prix d’achat qui est élevé (environ 275 F/kg), sa commercialisation nenécessite pas de moyens de transport car la vente s’effectue au village et c’est uneculture pérenne qui ne nécessite pas assez de travaux.

Toutes ces cultures du fait des atouts qu’elles présentent, incitent les paysansà les adopter et à maximiser leur rendement.

7- La question de l’aménagement des bas-fonds

Les bas-fonds exploités par les femmes sont de type traditionnelle. Ils n’ontété l’objet d’aucun aménagement.

L’une des approches fondamentales permettant l’amélioration du potentielde production de cet écosystème consiste à maîtriser parfaitement l’eau dans lesbas-fonds, en construisant des ouvrages de contrôle et d’irrigation de l’eau avec unegestion rigoureuse de ceux-ci.

L’objectif de l’exploitation des bas-fonds étant surtout alimentaire, lesfemmes n’investissent pas dans leur aménagement. La raison de cette attitudeémane essentiellement de l’âge avancé des exploitantes qui recherchent plutôt àassurer leur sécurité alimentaire qu’à générer des devises. A cela il faut ajouterégalement la quasi inexistence de source de revenus de ces femmes.L’aménagement d’un bas-fonds nécessite des moyens financiers et une maind’oeuvre qualifiée.

Pour sa mise en valeur, un défrichement préalable doit être effectué. Toutela végétation est enlevée durant la saison sèche. Les arbres sont abattus etdésouchés; ce qui suppose l’utilisation d’un treuil.

La construction des structures de contrôle de l’eau comportera une digue detête (elle est munie d’une structure de contrôle qui bloque l’écoulement de l’eau àpartir du sommet du bas-fond et l’achemine vers les canaux périphériques et le

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drain central), des canaux et digues périphériques et un drain principal. Tous cesouvrages doivent être réalisés par des techniciens.

CHAPITRE V : CONTEXTE INSTITUTIONNEL

1- Structures d’intervention en milieu rural

1-1. La CIDT 1-1-1. Rôle et objectifs

La Compagnie Ivoirienne pour le Développement du Textile a été crée en1974 après la suppression de la Compagnie Française pour le Développement desFibres Textiles.

La cidt à pour mandat la production et la commercialisation du coton graine.Elle cherche à maximiser la production cotonnière à travers la

modernisation des exploitations agricoles par l’introduction de la culture attelée etde la motorisation. Cette structure met également à la disposition des paysans lessemences de coton, les intrants et le matériel agricole. A travers toutes ses actions, la cidt recherche une amélioration du niveau de vie despaysans.

1-1-2. La vulgarisation

La cidt forme des conseillers agricoles qui sont installés dans les villages etqui s’occupent de la vulgarisation de tout ce que la compagnie veut mettre à ladisposition des paysans. Les conseillers servent de courroie transmission entre larecherche et les paysans; ils bénéficient pour cela d’une formation rigoureuse.

La vulgarisation porte surtout sur les techniques de culture du coton carchaque année pratiquement, la cidt envoie de nouvelles variétés de coton. Celles-cisont beaucoup exigeantes et ont besoin d’une attention particulière. Les conseillersont donc pour tâche d’apprendre aux paysans les techniques à suivre pourmaximiser leur production.Un autre volet de la vulgarisation concerne les techniques de fabrication de lafumure organique.

Le fumier est un mélange de bouse et de paille en décomposition sous l’actionde la chaleur, de l’humidité et en présence de l’air. Il doit être régulièrement arroséet protégé contre le soleil (sous un arbre ou recouvert d’un feuillage) et il doit êtreaussi retourné régulièrement. Le fumier améliore la structure du sol pour qu’il garde ses éléments riches. Celaamplifie l’effet des engrais et permet de réduire la quantité utilisée. Les agents de

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la cidt n’encadrent plus les paysans sur les techniques de culture du riz car elle nefournit pratiquement plus de semences de riz.

La cidt a mis à la disposition de certains paysans (ceux qui en avaientacheté) à ses débuts des variétés de riz telles que; iguapé, IAC, idessa 10 et bouaké189. Elle encadrait ceux-ci sur les techniques de culture de ces variétés. Actuellement les paysans ne demandent plus de semences, ils préfèrent procéderà des échanges entre eux.

L’action des agents au niveau des vivriers porte surtout sur les dates desemis pour que les paysans puissent cultiver le coton et faire la répartition desdifférentes cultures suivant leurs différents cycles de telle sorte qu’ils ne soient paschargés lors des récoltes.

La vulgarisation d’une technique se déroule de façon pratique. Les paysanssont sensibilisés (informés) et les volontaires sont retenus pour faire partie desgroupes cibles devant recevoir la formation. 1-2. L’ANADER

1-2-1. Rôle et objectifs

L’Agence Nationale d’Appui au Développement Rural a été créée en 1993dans le cadre de la restructuration du dispositif d’appui au monde rural. Sacréation a entraîné en début 1994 la dissolution des sociétés de développement;cidv, satmaci et sodepra.

L’anader est une structure unique polyvalente intégrant l’agriculture,l’élevage, la foresterie, la gestion des ressources naturelles et la technologie posterécolte. Elle est dotée d’un statut de saccade mixte avec un important soutienfinancier de l’Etat. L’anader devra par la suite évoluer progressivement vers uneprise en charge de son fonctionnement par les organisations professionnellespaysannes.

L’agence contribue à la promotion du monde rural par laprofessionnalisation des producteurs agricoles. Pour ce faire, elle élabore un cadrecontractuel avec les instituts de recherche afin de mieux assurer le transfert desacquis de la recherche et la mise au point des innovations technologiques reflétantune profonde compréhension des méthodes permettant aux agriculteurs d’accroîtreleurs revenus et leurs productivités.L’anader tente également de bâtir un processus de recherche-développement quis’appuie sur les paysans et les vulgarisateurs (agents de l’anader) commepartenaires dans l’identification des thèmes techniques (contraintes rencontréespar les paysans) afin de les soumettre à la recherche. L’ensemble des actions menées par l’anader sont mises en oeuvre à travers lavulgarisation.

1-2-2. La vulgarisation

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Elle permet aux paysans de maîtriser le fonctionnement de leursexploitations afin d’atteindre de meilleurs rendements grâce aux techniquesproposées par la recherche.

L’agence possède des conseillers agricoles installés dans les zones. Ilsreprésentent le maillon de contacte avec les paysans auprès desquels ils doiventvulgariser les techniques de culture.

Les tâches des conseillers agricoles consistent précisément à créer desgroupes de contact, faire les diagnostics et élaborer les thèmes techniques quidébouchent sur la vulgarisation.

Les techniques proposées ne sont pas établies à l’avance. C’est à partir deréunirons avec les paysans que l’agent de l’anader constitue les groupes de contact.

A travers des discussions et/ou la visite des exploitations, il relève lesproblèmes rencontrés par les paysans. Après ce diagnostic, il met au point unthème technique ( avec l’accord des membres du groupe) qui fera l’objet d’unevulgarisation.

La formation des paysans sur une technique se fait de façon pratique enprésence des membres du groupe de contact à partir d’une date fixée en communaccord. On choisit une exploitation (unité de démonstration) sur laquelle latechnique est présentée et chaque membre du groupe ira par la suite la reprendresur son exploitation.

Les paysans ainsi encadrés, le conseiller agricole passera dans les différentesexploitations des paysans pour contrôler l’application exacte des enseignementsdispensés.

Les techniques ayant fait l’objet de vulgarisation dans la zone au niveau dela culture du riz portent sur :-le semis en poquet-la lutte contre les termites-le désherbage chimique-l’application du composte sur les parcelles-le repiquage en ligne-le sarclage

L’agent de l’anader encadre également certaines femmes pour les cuturesmaraîchères.

1-3. Les difficultés liées à la vulgarisation

Les problèmes majeurs dont souffre la vulgarisation peuvent être répartisen deux groupes:

1-3-1. problèmes internes aux paysansIls concernent :

-le non respect des dates de démonstration fixées avec les paysans pour lavulgarisation.

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-le refus des paysans, pour des raisons mystiques, d’accepter la présence de certainsmembres du groupe de contact sur leurs exploitations.-le changement incessant de parcelle par les paysans; ce qui pose le problème dedistance et oblige le conseiller agricole à toujours reconstituer de nouveaux groupesde contact.

-le nombre élevé des cultures pratiquées par les paysans ne leur permet pas demaîtriser les techniques enseignées et d’avoir le temps pour intégrer les groupes decontact.

Il existe d’autres contraintes qui n’émanent pas des paysans.

1-3-2. problèmes externes aux paysansParmi ceux-ci, on peut citer :

-l’existence de plusieurs structures et projets de vulgarisation concurrents sur lemême espace.

-la multiplicité des stratégies et méthodes d’intervention de ces structures.

-l’élévation des coûts d’encadrement.

-le faible taux de couverture des exploitants agricoles ( effectif réduit desvulgarisateurs face à une forte population paysanne).

-l’absence d’une formation agricole de base de certains vulgarisateurs qui nemaîtrisent pas les techniques vulgarisées.

2- Infrastructures sanitaires et éducatifs

2-1. Accès aux soins de santé

Les villages du bassin versant de Poundiou ne bénéficient pas d’un centrede santé. Lorsque les paysans sont malades, ils se rendent à Boundiali (ville) pourse faire soigner. Les maladies dont ils soufrent généralement sont le paludisme etles maux de tête. Les femmes particulièrement se plaignent de douleurs au dos.Le déplacement dans un centre de santé suppose une incapacité pour le paysan àse rendre au champ pour cultiver. En effet, les paysans préfèrent se traiter traditionnellement au village. Maislorsque le mal persiste au point d’être alité, ils se rendent à l’hopital.Cette attitude des paysans pourraît se justifier par deux raisons :

-Dans un premier temps, il y a la distance séparant le village de l’hopital quifait environ 26 km. Il n’existe aucun moyen de transport public pouvant conduire

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les malades à l’hopital. Ceux-ci sont obligés de se faire transporter à mobylette surdes routes non bitumées et difficilement praticables en saison pluvieuse.

-La seconde raison émane du coût élevé des médicaments. Les paysans nedisposent pas d’argent de façon permanente; il leur est donc difficile de se rendre àl\hopital lorsqu’ils n’en disposent pas. Il sont très souvent obligés en cas demaladies graves de vendre une partie de leur production rizicole pour acheter lesmédicaments à la pharmacie.

Le manque de moyens financiers des paysans voulant se rendre à l’hopitalinflue nécessairement sur les travaux champêtres car lorsqu’ils sont maladesgravement, ils ne vont pas au champ.

2-2. Les centres scolaires

Il existe des écoles primaires à Poundiou et à Fonondara; Katièrè n’enpossède pas. Les enfants en âge d’être scolarisés se rendent dans les deux premiersvillages.

L ‘absence d’une école à Katièrè fait que le nombre d’enfants scolarisés esttrès faible comparativement à celui de Poundiou et Katièrè.

Les écoles d’enseignement secondaire se trouvent à Boundiali. Les jeunescollégiens et lycéens (qui ne sont d’ailleurs pas nombreux) se déplacent vers la ville(boundiali) où ils restent pendant l’année scolaire et reviennent au village lors desconjés et vacances.

Sur l’ensemble des villages, jeunes déscolarisés reconvertis à l’agriculturesont nombreux et ont pour la plupart le niveau scolaire primaire. Ils cultivent àleur propre compte et aident leurs parents dans leurs champs. Ces jeunes fontpartie des groupes d’entraides et ce sont eux surtout qui tiennent la comptabilitédes gvc.

3- Accès au crédit

3-1. Institutions financières

L’institution financière qui a toujours accordé des prêts aux paysans est l’ex-BNDA.

Mais depuis la suppression de cette banque, l’accès au crédit des paysans esttrès limité voire inexistant. Certes, il existe une banque (SIB) à Boundiali mais lerefus répété de celle-ci d’accorder des prêts à certains paysans a découragél’ensemble des agriculteurs, qui ne s’adressent plus à une banque pour obtenir unprêt.

Lorsque les paysans ont besoin d’argent, ils s’accordent entre eux des prêtssans intérêts.

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Il faut noter également l’existence d’une structure d’accès au crédit qui estla coopec (coopératives d’épargne et de crédit). Elle accorde des prêts aux paysans,mais à condition d’avoir un fonds de garantie dans le réseau des coopec. C’est àtravers cette strcture que le gvc de Fonondara obtient des crédits pour l’achat desvivriers (riz et maïs ) aux paysans. L’argent octroyé est remboursé avec un tauxd’intérêt de 7%.

Mais la condition d’accès au crédit (le placement préalable d’un fonds degarantie) empêche les paysans de s’adresser à cette structure car ils n’épargnentpas. Quant ils ont de l’argent, les paysans préfèrent faire des réalisation ou legarder à la maison.

Il existe une autre voie d’accès aux prêts qui s’offre à eux et qui est celle desorganisations paysannes.

3-2. Les organisations paysannes

3-2-1. Le gvc et l’union des gvc

Ces organisations paysannes accordent des prêts sans intérêts à leursmembres et le remboursement est garanti par la culture du coton à la vente.

3-2-2. Les tontines ou associations feminines

La tontine n’existe que à Fonondara. Les femmes des autres villages ne sesont pas encore organisées pour mettre en place des associations de ce genre.

Il existe deux tontines à Fonondara au sein desquelles les femmes seregroupent et cotisent de l’argent périodiquement. La première est plus petite, lesfemmes versent 200 F.cfa chaque lundi dans la caisse. Lorsque l’argent atteind unesomme importante, elles la partage à part égale entre elles.

La seconde tontine a une portée un peu plus importante, car les cotisationss’élèvent à 1.000 F.cfa par mois pendant la saison sèche (après la vente descultures) et elles redescendent à 100 F.cfa chaque vendredi lorsque la saison despluies débute.

Ces associations n’empruntent pas de crédits car elles n’ont aucune activitélucrative.

Toutefois, la dernière tontine envisage actuellement acheter un moulinqu’elle va gérer avec ses membres. C’est pour cette raison qu’elle accorde des prêtsavec intérêts à ses adhérents. Les crédits octroyés ne sont pas importants, pour unemprunt de 5.000 F.cfa, la personne rembourse 6.000 F.cfa et pour 10.000 F.cfa,c’est 12.000 F.cfa; soit des intérêts de 1.000 et 2.000 F.cfa.

Lorsque les intérêts atteindrent une somme élevée, les femmes comptentdemander un prêt pour acheter le moulin.

En somme, les paysans accèdent difficlement au crédit car n’ayant plus debanque à eux. Les autres structures telle que la coopec leur impose des conditionsqui ne leur permettent d’effectuer des emprunts. Quant aux organisations

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paysannes, leurs modalités de remboursement s’effectuant une seule fois surl’argent du coton; n’arrangent pas les paysans. A la vente du coton, lorsque lepaysan aura remboursé l’argent des intrants, des éventuels matériels agricoles etdes crédits, il risque de se retrouver sans argent. Les paysans préfèrent donceffectuer des emprunts entre eux sans s’adresser aux structures officielles.

CONCLUSION GENERALE

1- Intérêts et limites de la méthodologie

A travers cette étude, nous avons montré qu’au délà des contraintesindividuelles, il existe des facteurs communautaires qui influent sur lespaysans dans l’adoption des technologies.Pour aboutir à cela, nous sommes partis à la fois d’une caractérisation semi-détaillée de l’environnement socio-culturel et socio-économique despaysans.

En nous fondant sur une desciption préalable, nous avons analyséle mode de gestion des ressources naturelles, humaines et financières et enconsidérant tout ceci comme un ensemble finalisé par les objectifs deproduction des agriculteurs.

La méthode du questionnaire ouvert et des interviews de groupesnous est apparu comme une technique efficace car elle nous a permis deconfronter les informations glanées individellement et collectivement; desorte à déceler les divergences entre celles-ci.

Les données obtenues auprès de certains paysans sont souvent peufiables car ceux-ci ne maîtrisant pas leurs sujets ou faisant de la retentiond’informations; il est par conséquent nécessaire de les prendre avecbeaucoup de réserve.

Toutefois, les interviews de groupes nous ont permis de limiterquelque peu cette lacune; dans la mesure où elles créaient de longuesdiscussions entre les paysans à propos de certains sujets pour aboutir plustard à des réponses consensuelles. Il est quelques fois nécessaire de revenirsous une autre forme sur des questions déjà discutées, pour chercher àétablir la cohérence entre les réponses car les écarts peuvent êtreimportants.

La pérode à laquelle nous avons effectué nos enquêtes (octobre-novembre qui correspond aux activités de récolte) a rendu quelque peudifficile l’obtention des informations recherchées. Les paysans étantsurtout préoccupés par leurs travaux, avaient très peu de temps à nousconsacrer.

Une des limites de notre méthodologie a été l’échantillonnage.L’effectif réduit et l’inexistence d’allogènes dans certains villages (Poundiouet Katièrè) ne nous a pas permis de respecter l’échantillon des individus à

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intérroger prévu au départ. Nous n’avons donc pas pu intérroger le mêmenombre d’allogènes dans les trois villages.

2- Résumé de l’étude

Au terme de cette étude, il ressort différents éléments qui nous ontguidé dans notre analyse.

Le bassin versant de Poundiou n’est pas une zone de grandeaffluence humaine. Il n’existe pas une pression démographique pouvantconduire à une pression foncière. Les migrations concernent surtout lesélèves et quelques rares paysans qui se sont déplacés vers d’autres zones dela Côte d’Ivoire; les uns pour les études et les autres à la recherche dutravail. Les allogènes paysans sont en nombre insignifiant dans la zone;ce sont surtout les éleveurs Peulh que l’on y rencontre.

Les paysans tirent leurs principales sources de revenus dans lescultures du coton et de l’anacarde. Les vivriers (riz, maïs, igname) serventsurtout à la consommation.

Les allogènes cultivent le coton mais ne font l’anacarde qu’avecl’accord du propriétaire de la terre.

L’arachide est davantage cultivé par les jeunes femmes mariées(dans leur champ individuel sur les plateaux); le riz de bas-fond est réservéaux vieilles femmes.

Le marché se trouve à environ 26 kilomètres des villages, les routessont de mauvaises qualités et il n’existe pas de moyens de transport public.

L’absence d’un centre de soins de santé amène les paysans à serendre à Boundiali lorsq’ils veulent aller à l’hopital. Les infrastructuresscolaires se limitent à deux écoles primaires.

Le régime foncier est de type traditionnel et il est régit par le systèmematrilinéaire.L’individu hérite de son oncle maternel. Les femmesn’héritent pas des terres, mais elles en on accès. La terre n’est pas l’objet devente; les allogènes peuvent avoir accès aux terres, sur une simpledemande, pour cultiver mais ne peuvent devenir propriétaires. Les femmesobtiennent les bas-fonds à l’intérieur de leur famille, celle de leur époux ouavec une autre famille du village. L’accès à la terre se fait gratuitement àtous les niveaux.

La cidt et l’anader interviennent auprès des paysans en leur donnantdes intrants et du matériel agricole à crédit (cidt) et en achetant aussi laproduction cotonnière. La vugarisation fait également partie des actionsde ces structures; mais elle est surtout effectuée par l’anader car la cidtaccorde la priorité de ses actions à la culture du coton. L’anader intervientdans toutes les cultures; à l’exception du coton.

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L’accès au crédit bancaire pour les paysans est pratiquementimpossible depuis la suppression de la bnda. N’ayant pas de fonds degarantie dans les coopératives d’épargne et de crédit, les paysans nes’adressent pas à ces structures pour obtenir un prêt. Les organisationsprofessionnnelles agricoles ne sont sollicitées que quelques fois; les paysanspréfèrent s’octroyer des prêts entre eux au village.

3- Résultats

3-1. les contraintes majeures

De nombreuses contraintes tendent à freiner la maximisation de laproduction rizicole.

L’insuffisance de la main d’oeuvre, qui certes est bien organisée etbon marché à travers les groupes d’entraide; mais celle-ci ne permet pas desatisfaire les besoins des paysans dont les cultures et les superficies ontaugmenté. A cela il faut ajouter l’inexistence de main d’oeuvre extérieureau village (allogènes).

La cherté des intrants ne permet pas aux paysans d’y accéder enquantité suffisante pour toutes les cultures. Face à cela, soit ils pratiquentla rotation coton/riz (pour réduire la quantité d’intrants à utiliser), soit nerespectent pas les doses d’application recommandées.

Les difficultés d’accès au marché liées au mauvais état des routes età l’absence de moyens de transport public, réduisent les volontés decommercialisation.

L’inaccessibilité des jeunes femmes mariées au bas-fond diminue lepotrentiel de production de cette entité. Les hommes font obstacle à leurdépart dans les bas-fonds car elles constituent une aide familiale agricoletrès active. Mais au délà de cet apport de la femme, il faut retenir qu’avecl’introduction de la culture attelée, les cultures se sont multipliées et lessuperficies se sont agrandies. La présence de la femme est donc devenueindispensable auprès de l’époux sur le plateau.

L’existence d’autres sources de revenus (coton et anacarde) avecleurs avantages attirent davantage les paysans vers ces cultures que laculture du riz. Ils investissent plus d’argent dans ces cultures (pour l’achatdes intrants).

L’absence d’outils adéquats pour défricher et préparer les sols necontribue pas au développement de la riziculture. Le défrichement et lapréparation se rélèvent extrêmement ardus pour les femmes surtoutlorsqu’il y a des arbres à déssoucher et qu’il faut en outre creuser le sol àl’aide d’une petite daba.

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Les difficultés liées à la diffusion des innovations technologiques(vulgarisation) font que les paysans n’accèdent pas véritablement à celles-cipour une utilisation optimale.

Les femmes, qui, dans maints de systèmes de production, fournissentl’essentiel de la main d’oeuvre, ne peuvent hériter de la terre en tant quepropriétaires. Cela ne les incite guère à produire plus que ce qui nécessaireà leur propre subsistance et/ou à celle de la famille.

L’accès limité des femmes aux capitaux et la rareté de leurs sourcesde revenus freinent les investissements dans la riziculture en ce quiconcerne l’achat des intrants et l’aménagement éventuel des bas-fonds.

3-2. Les potentialités

La riziculture bénéficie toutefois de certains atouts pouvantaméliorer son rendement.

La culture du riz bénéficie des intrants liés à la culture du coton. Lapratique de la rotation coton/riz permet à ce dernier de profiter des restesde fertilisants utilisés dans le coton. Cette technique permet au riz d’obtenirun niveau de rendement acceptable.

La pratique du semis à la volée permet aux paysans de semerrapidement et de réduire la main d’oeuvre.

L’existence des groupes d’entraide communautaires (même si s’ilssont insuffisants) avec des modalités de rémunération avantageuses créeune saine émulation pendant les travaux et favorise la mise en place descultures.

4- Recommandations

Les propositions d’amélioration du rendement rizicole, à traversl’adoption technologies liées à la culture du riz, découlent des contraintesrencontrées par les paysans.

Face à l’absence d’une structure d’Etat chargée de l’achat du riz, lesorganisations paysannes doivent s’organiser pour acheter le riz auxpaysans à des prix élevés de sorte à les encourager à produire davantagede riz.

La vulgarisation de variétés de riz modernes auprès de certainspaysans pour la multiplication des semences qu’on mettra à la dispositiond’un plus grand nombre d’agriculteurs.

Une meilleure vulgarisation et une bonne utilisation des techniquesde fabrication de la fumure organique permettrait d’accroître l’action del’engrais chimique.

Les femmes étant les principales productrices de riz de bas-fond, ilserait nécessaire de les encadrer davantage et de leur apprendre lestechniques de maîtrise de l’eau dans les bas-fonds.

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