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1 Dossier n° 38/S/12 Session du 25 février 2013 ROYAUME DU MAROC LE CHEF DU GOUVERNEMENT CONSEIL DE LA CONCURRENCE ـــــ ا رــــــ اــــــ AVIS DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE N° 33/13 CONCERNANT LA LIBERATION DES PRIX DES PRODUITS PHARMACEUTIQUES VETERINAIRES

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Dossier n° 38/S/12

Session du 25 février 2013

ROYAUME DU MAROC

LE CHEF DU GOUVERNEMENT

CONSEIL DE LA CONCURRENCE

ا�ـ�ـ�ـ��ـ�ـ�المـمـلـكـة �ـــ�ـــ� ا��ــ� �ــــ�ر

مـجـلـس الـمـنـافـسـة

AVIS DU CONSEIL DE LA CONCURRENCE N° 33/13

CONCERNANT LA LIBERATION DES PRIX DES

PRODUITS PHARMACEUTIQUES VETERINAIRES

2

Le Conseil de la Concurrence considère que:

Suite à la lettre de l’Association Nationale des Sociétés Pharmaceutiques Vétérinaires

(ANPV), enregistrée sous le n°38/S/12 en date du 4 avril 2012, par laquelle il demande l’avis

du Conseil de la Concurrence au sujet de la libération des prix des produits pharmaceutiques

vétérinaires,

- En application du Dahir n°1-00-225 du 5 juin 2000 portant promulgation de la loi n°06-99

sur liberté des prix et de la concurrence. (BO du 6 juillet 2000),

- Du Décret n° 2-00- 854 du 22 joumada II 1422 (17 septembre 2001) pris pour l’application

de la loi n° 06-99 précitée. (BO du 4 octobre 2001),

- De l’arrêté n° 3.16.12 du Chef du Gouvernement (25 avril 2012) portant nomination de la

Rapporteure, Mme Anissa LAZRAK, auprès du Conseil de la Concurrence ;

- Du règlement intérieur du Conseil de la Concurrence,

- De la décision de désignation de la Rapporteure, Mme Anissa LAZRAK, par le Président du

Conseil de la Concurrence en date du 8 mai 2012,

- Et après l’audition de la Rapporteure précitée et la consultation du rapport qu’elle a établi

à ce sujet ainsi que le débat qui a porté sur le dossier en question durant la session du

Conseil tenue le 25 février 2013,

- Et attendu que les membres du Conseil ont considéré que le dossier était complet, ont

délibéré le jour même de la session du 25 février 2013,

Et après délibération, le Conseil de la Concurrence a formulé l’avis suivant :

3

Sommaire

I. Les données générales concernant la demande d’avis ........................................................ 5

1. Présentation de la demande d’avis par l’ANPV .............................................................. 5

2. Appréciation de la recevabilité de la demande ................................................................ 5

2.1. Qualité d’agir ............................................................................................................... 6

2.2. Intérêt d’agir ................................................................................................................ 6

3. Nature et objet de la saisine ................................................................................................ 6

II. Actes d’instruction .............................................................................................................. 6

III. L’analyse du marché du médicament vétérinaire ............................................................... 7

1. Le marché de référence ................................................................................................... 7

2. Le fonctionnement du secteur du marché vétérinaire ..................................................... 8

L’homologation .................................................................................................................. 8

La mise sur le marché ......................................................................................................... 8

La distribution .................................................................................................................... 8

3. L’offre du marché ............................................................................................................ 9

Les opérateurs .................................................................................................................... 9

Le chiffre d’affaires .......................................................................................................... 10

Les catégories de produits ................................................................................................ 11

4. La demande ................................................................................................................... 14

5. Le cadre juridique .......................................................................................................... 15

IV. Position des différents acteurs concernant la demande de l’ANPV.................................. 16

1. La partie saisissante : l’Association Nationale des Sociétés Pharmaceutiques Vétérinaires .......................................................................................................................... 16

2. Le Ministère de l’Agriculture ........................................................................................ 17

3. Le Ministère de la Santé ................................................................................................ 19

4. L’Ordre National des Vétérinaires ................................................................................ 19

5. Les éleveurs ................................................................................................................... 20

Le secteur avicole ............................................................................................................. 20

L’élevage ovin et caprin ................................................................................................... 21

6. Le Ministère des Affaires Générales et de la Gouvernance .......................................... 21

4

V. Analyse concurrentielle..................................................................................................... 22

1. La concurrence sur le marché des médicaments vétérinaires........................................ 22

2. Le prix du médicament vétérinaire sur le marché ......................................................... 22

2.1. Le non respect du prix réglementé sur le marché ...................................................... 23

2.2. Les réductions sur les PPM .................................................................................... 23

2.3. Les limites du système de fixation des prix des médicaments vétérinaires ........... 24

VI. Conclusions ....................................................................................................................... 25

Le marché des médicaments vétérinaires est concurrentiel : ........................................... 25

Le prix des médicaments vétérinaires est en réalité libre sur le marché : ........................ 25

Le mode de fixation des prix a des impacts négatifs sur l’offre : .................................... 25

La libération des prix est indépendante du système de contrôle sur les médicaments : ... 26

VII. Recommandation .............................................................................................................. 26

ANNEXE 1 : ACTES D’INSTRUCTION ............................................................................... 27

ANNEXE 2 : DEMANDE D’AVIS ET POSITION DE L’ANPV .......................................... 29

ANNEXE 3 : POSITION DU DEPARTEMENT DE L’AGRICULTURE ............................. 34

ANNEXE 4 : POSITION DU CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE NATIONAL DES VETERINAIRES ..................................................................................................................... 36

5

I. Les données générales concernant la demande d’avis

1. Présentation de la demande d’avis par l’ANPV

Le Conseil de la Concurrence a été sollicité par l’Association Nationale des Sociétés Pharmaceutiques Vétérinaires (ANPV) afin d’émettre son avis sur la libération des prix des médicaments vétérinaires souhaitée par l’association et ce, conformément aux dispositions de la Loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence.

Cette demande d’avis a été appuyée par plusieurs arguments :

• La libération des prix serait conforme aux dispositions de la Loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence qui prévoyait le maintien de la réglementation des prix de certains produits et services pour une période transitoire de 5 ans après la promulgation de la Loi par le Dahir N°1-00-225 du 5 juin 2000, mais la décision a été reportée sans cesse par les pouvoirs publics ;

• L’application de cette disposition de la Loi permettrait d’adapter la législation à la réalité du terrain. En effet, selon la partie demanderesse, les prix des médicaments vétérinaires sont négociés librement sur le marché ;

• Le médicament vétérinaire est davantage considéré par les professionnels comme un intrant de la production animale et devrait être considéré comme tous les autres intrants.

Il est à rappeler qu’en date du 11 mai 2010, le Conseil de la Concurrence a reçu une saisine sur les possibilités de libération des quinze produits et services qui demeurent régulés par les pouvoirs publics, y compris les médicaments à usages vétérinaire.

En application du principe de la liberté des prix consacré par la loi 06-99 telle qu’elle a été modifiée et complétée par la loi 30-08 qui stipule que les prix des biens, produits et services figurant sur la liste objet de la demande d’avis, demeurent fixés par l’administration jusqu’en 2014, et considérant que les délais impartis à la mise en évidence de l’avis en question étaient relativement courts, le Conseil avait proposé au Premier Ministre de maintenir en l’état la réglementation des prix de ces biens en s’engageant à mettre à profit la période transitoire (jusqu’en 2014) pour la réalisation d’une étude portant sur les possibilités de libération des prix des produits et services en question.

Dans ce cadre, le Conseil a réalisé et présenté en 2012 une première étude sur les produits subventionnés dans le cadre de la compensation. Une seconde étude est en cours concernant les professions libérales réglementées. Les autres produits et services réglementés devraient faire l’objet de prochaines études.

2. Appréciation de la recevabilité de la demande

La demande d’avis de l’ANPV s’inscrit dans le cadre de l’article 15 §3 de la loi n° 06-99 qui prévoit que le Conseil de la Concurrence peut être consulté par les organisations professionnelles, dans la limite des intérêts dont ils ont la charge, sur toute question de principe concernant la concurrence.

Ainsi, conformément à ces dispositions, trois conditions doivent être remplies pour pouvoir saisir le Conseil de la Concurrence dans le cadre de l’article 15 susmentionné. Il faut d’abord que le saisissant ait la qualité d’organisation professionnelle ; ensuite, il faut que la saisine porte sur une question de principe concernant la concurrence ; enfin, la saisine doit être introduite dans la limite des intérêts dont l’organisation a la charge.

6

2.1. Qualité d’agir

L’ANPV est une association professionnelle, régie par les dispositions du Dahir N°1-58-376 du 3 joumada I- 1378 (15 novembre 1958) , modifié et complété par le Dahir N°1-73-283 du 6 rabie I- 1393 (10 avril 1973), réglementant le droit d’association. Elle regroupe des personnes morales exerçant la profession de fabricant ou d’importateur de produits pharmaceutiques vétérinaires. L’ANPV représente 18 sociétés pharmaceutiques qui réalisent près de 90% du chiffre d’affaires global du secteur qui compte 22 sociétés au total.

Sa demande d’avis a été introduite par une lettre signée par son Président et accompagnée du récépissé de dépôt auprès des autorités locales, de son statut et de la liste de ses membres.

L’ANPV dispose ainsi de la qualité de saisir le Conseil de la Concurrence.

2.2. Intérêt d’agir

Parmi les prérogatives définies dans son statut, l’ANPV doit assurer et défendre les intérêts économiques de ses adhérents et contribuer au maintien du respect des lois et règlements régissant ou susceptibles de régir la profession.

L’objet de la demande d’avis de l’ANPV est ainsi conforme à ses prérogatives et partant, l’intérêt d’agir est confirmé.

3. Nature et objet de la saisine

Le Conseil de la Concurrence est consulté par l’ANPV sur une question de principe concernant la concurrence dans le secteur du médicament vétérinaire, à savoir la liberté des prix, et par conséquent le traitement de cette demande d’avis s’inscrit dans le cadre de l’article 15§3 précité.

II. Actes d’instruction

Le traitement de cette demande d’avis a nécessité la tenue de plusieurs réunions de travail avec des acteurs du secteur :

• La partie saisissante, l’Association Nationale des Sociétés Pharmaceutiques Vétérinaires, représentée par Dr Lamraoui, Président, et Dr Hamdoun, Membre.

• Des représentants des départements ministériels concernés : - Ministère des Affaires Générales et de la Gouvernance, Direction des Prix et de la

Concurrence : M. Riach et Mme Benali - Ministère de la Santé, Direction des Médicaments et de la Pharmacie : Dr Bouazza,

Directeur - Ministère de l’Agriculture et de la Pêche Maritime, Office National de la Sécurité

Sanitaire des Produits Alimentaires (ONSSA) : Dr Ait Sidi Yahia, Division de la Pharmacie et des Intrants Vétérinaires Dr Grini, Service de l’Enregistrement et des Inspections

7

• Des sociétés pharmaceutiques vétérinaires : - Société de Productions Biologiques et Pharmaceutiques Vétérinaires

(BIOPHARMA) : Dr Zahi, Responsable de la Réglementation Technique, Dr Hammouchi, Service de la Mise en Forme Pharmaceutique

- Société IPV Santé Animale : Dr Deddi, Vétérinaire Responsable - Un responsable commercial dans une société pharmaceutique vétérinaire qui a requît

l’anonymat

• Des vétérinaires : - Ordre National des Vétérinaires : Dr Amaqdouf, Vice-Président, Dr Mouahid,

Coordonnateur de la commission Pharmacie - Un vétérinaire opérant dans le secteur de l’aviculture ayant requit l’anonymat

• Des associations d’éleveurs : - Association Nationale Ovine et Caprine (ANOC) : Dr Abidi - Fédération Interprofessionnelle du Secteur Avicole (FISA) : Dr Assimi, Vice-

Président, M. Jerrari, Directeur, M. Fadil, Secrétaire Général, Dr Zerouali, Conseiller

La liste globale de ces actes d’instruction est présentée en annexe 1.

III. L’analyse du marché du médicament vétérinaire

1. Le marché de référence

Le médicament vétérinaire est défini par la Loi N°21-80 relative à l'exercice, à titre privé, de la médecine, de la chirurgie et de la pharmacie vétérinaires, comme étant « toute substance, composition, préparation extemporanée ou spécialité, présentées comme possédant des propriétés curatives ou préventives à l'égard des maladies animales ainsi que tout produit pouvant être administré à l'animal en vue d'établir un diagnostic médical ou de restaurer, corriger ou modifier ses fonctions organiques ».

Les médicaments vétérinaires commercialisés au Maroc sont issus de la production locale ou de l’importation.

Le marché de produits pertinent dans cette demande d’avis concerne ainsi tous les produits pharmaceutiques vétérinaires, tels que définis par la Loi, qu’ils soient issus de la production locale ou de l’importation.

S’agissant du marché géographique, il est défini comme étant le territoire sur lequel les entreprises concernées sont engagées dans l’offre de biens et services en cause et sur lequel les conditions de concurrence sont homogènes.

Dans la présente demande d’avis, la question de concurrence examinée est celle de la fixation des prix des produits pharmaceutiques vétérinaires qui concerne de manière homogène les produits vendus sur tout le territoire national.

Par conséquent, le marché géographique pertinent est le marché national.

8

2. Le fonctionnement du secteur du marché vétérinaire

Le fonctionnement du secteur du médicament vétérinaire comprend plusieurs phases.

L’homologation

La première est l’homologation, qui aboutit à l’autorisation de mise sur le marché (AMM) et à la fixation du prix public marocain (PPM). Cette phase est sous la tutelle de départements ministériels assurant l’encadrement et le contrôle du médicament :

o Le Ministère de la Santé publique, qui délivre les AMM de tous les médicaments (humains et vétérinaires) selon un dispositif juridique, et qui assurait, conjointement avec le Ministère de l’Agriculture, la fixation du PPM des médicaments vétérinaires jusqu’en 20101.

o Le Ministère de l’Agriculture, à travers l’Office National de Sécurité Sanitaire des Aliments (ONSSA) qui délivre conjointement les AMM avec le Ministère de la Santé, et qui assure le contrôle du circuit des médicaments vétérinaires.

La mise sur le marché

La seconde phase est celle de la fabrication ou de l’importation des médicaments vétérinaires. Actuellement 22 sociétés pharmaceutiques vétérinaires (SPV) opèrent sur le marché par la production et / ou l’importation de médicaments vétérinaires.

La distribution

Deux modes de distribution coexistent : la vente en gros, à travers le réseau des grossistes, et la vente au détail par le biais des ayants droit définis par la loi.

• Les grossistes, qui sont tenus d’être pharmaciens, assurent la distribution en gros des médicaments vétérinaires. Il existe une trentaine de grossistes opérant dans le secteur du médicament humain et vétérinaire, et un seul spécialisé dans le médicament vétérinaire. Les grossistes assurent la distribution de près de 30% des médicaments vétérinaires (en termes de valeur), dont 15% à travers les pharmacies et 15% via les vétérinaires.

• Les ayants droit autorisés pour la distribution du médicament vétérinaire : la Loi 21-80 du 18 févier 1981 relative à l’exercice, à titre privé, de la médecine, de la chirurgie et de la pharmacie vétérinaire, stipule que la préparation extemporanée, la détention en vue de leur cession aux utilisateurs et la délivrance au détail à titre gratuit ou onéreux, des médicaments vétérinaires sont réservées :

o Aux pharmaciens d'officine (… sur…) présentation d'une ordonnance établie conformément à la législation en vigueur par un docteur vétérinaire autorisé à exercer, ou par un vétérinaire inspecteur d'Etat ;

Actuellement, il y aurait environ 10.000 pharmacies d’officine2 opérant dans le secteur privé qui s’approvisionnent auprès des grossistes. Toutefois, selon l’ANPV, ces officines n’assurent la distribution que de 15% des médicaments vétérinaires en termes de valeur.

1 La publication du Décret N°2-10-412 du 30 septembre 2010 a limité le pouvoir de fixation des prix de ce Ministère aux produits pharmaceutiques et actes et services médicaux réalisés dans le secteur médical privé destiné à la médecine humaine (voir partie réservée au cadre juridique dans le présent rapport) 2 Rapport « Le secteur pharmaceutique marocain : réalités sur le prix des médicaments et intérêt du secteur », Association Marocaine de l’Industrie Pharmaceutique, 2010

9

o Aux docteurs vétérinaires autorisés à exercer, à titre privé, la médecine et la chirurgie vétérinaires, sans tenir officine ouverte dans les lieux d'exercice de leur profession, à domicile ou dans celui de leurs clients, à condition que le médicament soit administré par le vétérinaire lui-même ou sous sa responsabilité ;

Les vétérinaires sont près de 8003 opérant dans le secteur public et le secteur privé, assurant un maillage adéquat du territoire selon l’Ordre National des Vétérinaires et selon les associations d’éleveurs contactées. Les vétérinaires assurent la distribution de 70% des médicaments vétérinaires en valeur, dont 55% proviennent directement des sociétés pharmaceutiques vétérinaires et 15% des grossistes.

o Aux services techniques et organismes soumis à la tutelle du ministère de l'agriculture et de la réforme agraire et placés sous la responsabilité d'un vétérinaire inspecteur d'Etat ; ces services procèdent à des campagnes de prophylaxie préventives ou dans des cas d’épidémies et s’approvisionnent essentiellement en vaccins.

o Aux départements vétérinaires de l'Institut agronomique et vétérinaire Hassan II et aux établissements d'enseignement supérieur agronomique et vétérinaire pour le traitement des animaux admis en consultation ou hospitalisés.

3. L’offre du marché

Les opérateurs

L’offre en médicaments vétérinaires est assurée par la production locale et l’importation de médicaments. Les principales sources d’importation sont la France, l’Allemagne, l’Espagne, le Royaume Uni et la Belgique.

Le nombre de sociétés pharmaceutiques vétérinaires est de 22, dont 9 sont des fabricants, importateurs et distributeurs, et 21 importateurs et distributeurs. Les principales multinationales du secteur sont représentées, soit directement par les filiales, soit indirectement à travers des distributeurs. Par ailleurs, une des sociétés du secteur, BIOPHARMA, est une société anonyme à capital public soumise au droit privé. Elle a été créée en 1985, assurant essentiellement la production de vaccins pour répondre à la demande lors des campagnes de prophylaxie ou en sous-traitance pour d’autres laboratoires.

L’effectif de ces sociétés a connu une croissance importante au cours des vingt dernières années passant de 4 en 1990 à 22 en 2010, sous l’effet de la hausse de la demande liée au développement des élevages au Maroc, notamment avicoles.

Cependant, comme le montre le graphe suivant, 4 sociétés réalisent à elles seules plus de 55% du chiffre d’affaires du secteur, en lien essentiellement avec leur contribution à la production et la distribution de vaccins qui sont les produits les plus onéreux. Ces entreprises sont aussi les plus anciennes opérant dans le secteur.

3 Selon l’ANPV

10

Parts de marché des sociétés de produits pharmaceutiques vétérinaires4

Source : ONSSA

Le chiffre d’affaires

Le chiffre d’affaires global réalisé par le secteur est de 619 millions de dirhams et connait un rythme significatif de croissance, en lien avec le développement des unités de production locale.

En effet, comme le montre le tableau ci-dessous, le chiffre d’affaires a augmenté de 15% sur la période 2006-2009, essentiellement grâce au développement de la production locale de plus de 23%, alors que les importations n’ont progressé que de 9%. La production locale contribue ainsi à près de 45% au chiffre d’affaires du secteur.

On note également une avancée des exportations de médicaments vétérinaires de plus de 56% sur la période, mais celles-ci restent relativement peu importantes.

4 Les noms des différentes sociétés figurant sur ce graphe n’ont pu être obtenus ni auprès de l’ONSSA qui a réalisé l’étude ni auprès de la partie demanderesse qui n’a pas fournit les parts de marché des sociétés affiliées à l’association.

17,80%

17%

13,60%7,30%

6,60%

6,10%

3,40%

4,80%

6,10%

4,00%

3,00%3,40%

2,50%

1,80% 1,70%0,50% 0,20% 0,10% 0,00%

A

B

C

D

E

F

G

H

I

J

K

L

M

N

11

Evolution du chiffre d’affaires de la pharmacie vétérinaire (millions de dirhams)

Chiffre d’affaires (millions de dirhams) Années 2006 2007 2008 2009 2009/2006

Chiffre d’affaires réalisé sur la vente locale à

partir de la production nationale

165 169 180 204 23,6%

Chiffre d’affaires réalisé sur la vente locale des

produits importés

357 368 368 390 9,2%

Chiffre d’affaires réalisé sur la vente à

l’exportation de la production nationale

16 18 23 25 56,2%

Chiffre d’affaires total 538 555 571 619 15%

Source : ONSSA

Les catégories de produits

Les médicaments vétérinaires peuvent être subdivisés en 6 principales classes thérapeutiques : les vaccins, les anti-infectieux, les antiparasitaires, les vitamines et sels minéraux, les anti-inflammatoires et les hormones. Les deux premières catégories représentent 66% du chiffre d’affaires global du secteur.

0

50

100

150

200

250

300

350

400

450

2006 2007 2008 2009

Chiffre d'affaires sur la production locale Chiffre d'affaires sur les importations

Chiffre d'affaires sur les exportations

Répartition du chiffre d’affaires du secteur des médicaments vétérinaires par classe

L’évolution du chiffre d’affaires par classe thérapeutique montre que ce sont les connaissent l’évolution la plus importante, essentiellement du fait du développement du secteur avicole. En effet, la part du vaccin dans le chiffre d’affaires global est passée de 39% en 2006 à 44% en 2009, ce qui les productions de rente5.

Evolution du chiffre d’affaires des médicaments vétérinaires par classe thérapeutique

Vaccins

Anti-infectieux

Antiparasitaires

Vitamines et sels

minéraux

Anti-inflammatoires

Hormones

Total

5 Elevages de rente : activité d’élevage d’animaux en vue de la production de denrées alimentaires ou de produits destinés à l’industrie.

Anti-infectieux

22%

Anti-parasitaires

22%

Vitamines et sels

minéraux

8%

12

Répartition du chiffre d’affaires du secteur des médicaments vétérinaires par classe thérapeutique 2009)

L’évolution du chiffre d’affaires par classe thérapeutique montre que ce sont les connaissent l’évolution la plus importante, essentiellement du fait du développement du

En effet, la part du vaccin dans le chiffre d’affaires global est passée de 39% , ce qui dénote de la priorité accordée à la médecine préventive dans

Evolution du chiffre d’affaires des médicaments vétérinaires par classe thérapeutique2006 2007 2008

211 230 235

133 130 132

Antiparasitaires 123 131 135

Vitamines et sels

52 43 45

inflammatoires 15 17 19

4 4 5

538 555 571 Source

ité d’élevage d’animaux en vue de la production de denrées alimentaires ou de produits

Vitamines et sels Anti-inflammatoires

3%

Hormones

1%

Répartition du chiffre d’affaires du secteur des médicaments vétérinaires par classe

Source : ONSSA

L’évolution du chiffre d’affaires par classe thérapeutique montre que ce sont les vaccins qui connaissent l’évolution la plus importante, essentiellement du fait du développement du

En effet, la part du vaccin dans le chiffre d’affaires global est passée de 39% à la médecine préventive dans

Evolution du chiffre d’affaires des médicaments vétérinaires par classe thérapeutique 2009

275

134

136

49

20

5

619 Source : ONSSA

ité d’élevage d’animaux en vue de la production de denrées alimentaires ou de produits

Vaccins

44%

13

Globalement, l’offre est constituée de 1472 spécialités pharmaceutiques6 vétérinaires appartenant aux différentes classes thérapeutiques et aux diverses catégories d’animaux à traiter. Le nombre de ces spécialités autorisées a connu une croissance continue au cours des dernières années, puisqu’il n’était que de 185 en 1986.

Par ailleurs, l’offre de médicaments vétérinaires est caractérisée par une forte substituabilité, puisque pour chaque pathologie il existe différentes molécules et diverses formes de médicaments, disponibles auprès de plusieurs opérateurs. Pour chaque principe actif, en moyenne 15 sociétés disposent d’au moins un médicament, et le nombre moyen de médicaments disponibles sur le marché et d’au moins 10 par principe actif.

Le tableau suivant illustre cette substituabilité pour les principales molécules médicamenteuses.

Nombre de sociétés pharmaceutiques vétérinaires et de spécialités autorisées pour quelques principes actifs

Principe actif Nombre de sociétés pharmaceutiques vétérinaires offrant ce principe actif

Nombre de spécialités pharmaceutiques autorisées par établissement

Albendazole 17 53 Ivermectine 17 53 Levamisol 14 32 Amoxicilline 17 37 Colistine 17 62 Enroflaxine 14 23 Erythromycine 11 17 Oxytétracycline 19 69 Dihydrostreptomycine 12 22 Vaccin contre l’entérotoxémie

17 36

Vaccin contre la Gumboro 11 52 Source : ONSSA

De plus, les différentes sociétés pharmaceutiques vétérinaires proposent de larges gammes de médicaments pour les différents types d’élevage, multipliant l’offre disponible pour les éleveurs.

6 Une spécialité pharmaceutique est un « médicament préparé à l'avance, présenté sous un conditionnement particulier et caractérisé par une dénomination spéciale

14

4. La demande

La demande en produits pharmaceutiques vétérinaires est fortement liée au secteur de l’élevage de rente, principale source de cette demande, puisqu’il consomme près de 80% des médicaments vétérinaires.

En effet, l’élevage est une activité qui joue un rôle socioéconomique significatif, assurant une part importante de l’emploi rural et 27,1% du PIB agricole sur la période 2008-20107. Il constitue par ailleurs une trésorerie et une source de revenus aux petits exploitants, et une véritable industrie pour les grandes unités de production animale. Il contribue également à la production de certains intrants alimentaires et non alimentaires pour l’industrie.

Actuellement, la demande en médicaments vétérinaires est constituée des segments suivants :

• Les structures avicoles, qui représentent plus de 45% de la consommation de médicaments vétérinaires :

o 3,3 millions de poules pondeuses o 380 millions de poussins type chair par an o 20 millions de poussins type ponte par an o 15 millions de poussins dindonneaux par an

• Les élevages bovins : 3 millions de têtes • Les élevages ovins et caprins : 23 millions de têtes • Les équidés : 1,6 million de têtes • Les camélidés : 180.000 têtes • L’apiculture : 360.000 ruches • Les animaux domestiques.

Le Plan Maroc Vert a donné une dimension encore plus importante à ce secteur appelé à répondre à une demande intérieure croissante en produits d’origine animale. Le Plan a ainsi fixé une stratégie spécifique à ce secteur basée sur l'encouragement et la modernisation des techniques de production animale et l'intensification de l'encadrement sanitaire en vue de mieux contrôler les maladies transmissibles à l’homme.

Ainsi, la demande en médicament vétérinaire, qui a augmenté de 15% entre 2006 et 2009, est-elle appelée à s’accroître davantage pour accompagner ce développement tant dans la préservation des élevages que pour l’amélioration de leur qualité, et les dispositifs de contrôle des normes de production, de distribution et d’utilisation sont renforcés au niveau de l’Office National de Sécurité Sanitaire des Aliments depuis le début des années 2000.

La demande nationale en médicaments vétérinaires est couverte à 75% en termes de volume8 et à 37% seulement en termes de chiffre d’affaires par la production nationale. Cependant, la croissance plus importante de la part de la production locale (26% entre 2006 et 2009) dans la consommation globale (+15% entre 2006 et 2009) traduit une orientation vers le développement de l’industrie locale, ce qui représente un potentiel d’augmentation des investissements et des emplois dans ce secteur et une réduction de la dépendance des importations.

7 Ministère des Finances, Direction des Etudes et des Prévisions Financières : « Rapport Economique et Financier accompagnant le projet de Loi des Finances 2012 », 2011. 8 Cette évaluation, effectuée par l’ONSSA, est très approximative du fait de la difficulté d’additionner des unités très disparates.

15

L’évolution de la production locale a également permis une hausse des exportations. En effet, même si celles-ci n’atteignent que 25 millions de dirhams en 2009, elles ont augmenté de plus de 56% depuis 2006.

5. Le cadre juridique

Le médicament vétérinaire est régi par un dispositif juridique qui réglemente les différents segments, à savoir l’homologation, la production ou l’importation, la fixation du prix, la distribution et l’utilisation. Ce dispositif est, en plusieurs points, similaire à celui régissant le médicament à usage humain.

Tout d’abord la loi n° 17-049 du 7 décembre 2006 portant code du médicament et de la pharmacie définit le cadre de l’importation, de la fabrication et de la distribution du médicament auprès des pharmacies. Cette loi ne fait pas de distinction entre le médicament à usage vétérinaire et celui à usage humain. Les autorisations de mise sur le marché des médicaments obéissent aux règles édictées par cette loi et sont délivrées conjointement par les Ministères de la Santé et de l’Agriculture dans le cas des médicaments vétérinaires10., conformément aux dispositions de la circulaire interministérielle conjointe n°l/94 relative à la constitution du dossier d'AMM des spécialités pharmaceutiques vétérinaires. La loi 17-04 prévoit également la fixation des prix des médicaments (à usage humain et vétérinaire) par l’Administration nonobstant tout autre texte réglementaire.

Il est à noter que les médicaments font partie de la liste des produits et services dont les prix sont réglementés selon les dispositions de la Loi 06-9911 sur la liberté des prix et de la concurrence, telle que modifiée par la Loi 30-0812 du 4 janvier 2010. Cette disposition législative qui constitue une exception au principe de la liberté des prix prévue par ladite loi, était une disposition transitoire qui devait s’achever en 2006. La loi 17-04 sus citée a permis de maintenir la réglementation des prix des médicaments par l’Administration, et plus précisément par le Ministère de la Santé, et non par la commission interministérielle des prix comme il est d’usage pour les produits et services dont les prix sont réglementés.

La fixation du prix par les autorités intervient après la demande de cadre de prix par les laboratoires pharmaceutiques, conformément aux dispositions de l’Arrêté N°465-69 du 18 septembre 1969 fixant, en vue de leur homologation, le mode de calcul des prix des spécialités pharmaceutiques à usage humain ou vétérinaires fabriqués et conditionnés au Maroc, et de l’Arrêté N°107-69 du 18 septembre 1969 fixant le mode de calcul des prix des spécialités pharmaceutiques d’origine étrangère admises à l’importation.

Toutefois, dès 2010, le Décret N°2-10-41213 portant délégation de pouvoir au Ministre de la Santé en vue de fixer les prix des produits pharmaceutiques et actes et services médicaux réalisés dans le secteur médical privé, ne fait pas mention des médicaments vétérinaires, ce qui a créé un vide juridique en matière de fixation des prix et constitue un frein à la mise sur le marché de nouveaux médicaments vétérinaires.

9 Promulguée par le Dahir n° 1-06-151 du 30 chaoual 1427 (22 novembre 2006) et publiée dans le Bulletin Officiel N° 5480 du 15 kaada 1427 (7-12-2006) 10 La circulaire interministérielle conjointe n°l/94 relative à la constitution du dossier d'AMM des spécialités pharmaceutiques vétérinaires 11 Promulguée par le Dahir n° 1-00-225 du 2 rabii I 1421 (5 juin 2000) et publiée dans le Bulletin Officiel N° 4810 du 6 juillet 2000 12 Promulguée par le Dahir n° 1-09-237 du 18 moharram 1431 (4 janvier 2010) et publiée dans le Bulletin Officiel N° 5814 du 3 rabii I 1431 (18 février 2010) 13 Décret N°2-10-412 du 21 chaoual 1431 (30 septembre 2010) publié dans le Bulletin Officiel N°5884 du 12 kaada 1431 (21-10-2010)

16

D’autres textes législatifs ont trait au médicament vétérinaire et à son utilisation. Tout d’abord la Loi 21-80 relative à l’exercice, à titre privé, de la médecine, de la chirurgie et de la pharmacie vétérinaire14 et son décret d’application15, ainsi que de la Loi n° 49-9916 relative à la protection sanitaire des élevages avicoles, au contrôle de la production et la commercialisation des produits avicoles, qui a imposé des règles précises d’utilisation des médicaments, notamment les antibiotiques, dans les élevages avicoles.

La réglementation existante en matière de production, importation, distribution et utilisation du médicament vétérinaire vise à garantir la santé, la productivité et la préservation du cheptel national pour assurer la sécurité du consommateur tout en préservant l’environnement. Ces considérations, soumises à un dispositif de contrôle, sont indépendantes de la procédure de fixation des prix.

IV. Position des différents acteurs concernant la demande

de l’ANPV

Les réunions organisées avec les différents opérateurs du secteur ont permis de dégager les positions des différentes parties concernant la libération des prix des médicaments vétérinaires. Il s’agit de la partie saisissante, des départements ministériels en charge de la question, à savoir le Ministère de l’Agriculture et le Ministère de la Santé, les vétérinaires, à travers leur représentation professionnelle, l’Ordre National des Vétérinaires, et les principaux utilisateurs à travers deux groupements professionnels, la Fédération Interprofessionnelle du Secteur Avicole (FISA) et l’Association Nationale Ovine et Caprine (ANOC).

Le Ministère des Affaires Générales et de la Gouvernance a été également consulté du fait qu’il a déjà traité de la question de la libération des prix des médicaments vétérinaires en 2006, c'est-à-dire à la date prévue par la loi 06-99 pour la fin de l’encadrement des prix, par l’ANPV, partie saisissante dans l’actuelle demande d’avis, puis en 2010.

1. La partie saisissante : l’Association Nationale des Sociétés Pharmaceutiques Vétérinaires

L’ANPV a sollicité l’avis du Conseil de la Concurrence sur la libération des prix des médicaments vétérinaires et ce, conformément aux dispositions de la Loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence.

Cette demande d’avis17 a été appuyée par plusieurs arguments :

• La période transitoire pour le maintien de la réglementation des prix de cinq ans prévue par la Loi 06-99 à sa publication est achevée depuis 2006, mais la décision est reportée sans cesse par l’administration.

14 Promulguée par le Dahir n° 1-80-340 du 17 safar 1401 (25 décembre 1980) et publiée dans le Bulletin Officiel N° 3564 du 12 rabia II 1401 (18-02-1981) 15 Décret N° 2-82-541 du 29 Joumada I 1403 (15 Mars 1983) pris pour l'application de la loi 21-80 relative à l'exercice à titre privé de la médecine, de la chirurgie et de la pharmacie vétérinaires 16 Promulguée par le Dahir n° 1-02-119 du 1 rabii Il 1423 (13 juin 2002) et publiée dans le Bulletin Officiel N°5036 du 27 joumada 1423 (15-09-2002) 17 La position de l’ANPV, contenue dans la demande d’avis, est jointe en annexe 2.

17

• Le médicament vétérinaire est soumis à un cadre juridique et réglementaire, notamment concernant la fixation des prix, identique à celui du médicament humain. Or, selon l’ANPV, le médicament vétérinaire est différent de celui à usage humain, notamment par la finalité de son usage et son mode d’utilisation. Il est considéré comme un facteur de production dans les élevages de rente ou comme un intrant.

• La lourdeur administrative liée aux demandes de cadres de prix ne permet pas de répondre rapidement et efficacement aux besoins des éleveurs, particulièrement dans le cas de la mise sur le marché de nouvelles molécules ou dans le cas d’épidémies.

• Le système actuel de fixation des prix a favorisé le développement d’un marché parallèle échappant à tout contrôle et constituant un risque majeur en matière de santé publique.

Selon l’ANPV, la libération des prix des médicaments vétérinaires n’aurait aucun impact sur la qualité et la disponibilité des médicaments vétérinaires, qui sont régies par des dispositifs réglementaires stricts indépendants du prix.

En outre, la libération des prix devrait contribuer à améliorer les relations entre les différents acteurs (sociétés pharmaceutiques – vétérinaires – éleveurs) pour les concentrer davantage sur les considérations professionnelles, loin du marchandage qu’ils subissent actuellement, garantissant un encadrement sanitaire efficient et économique.

Enfin, la libération des prix des médicaments vétérinaires permettrait d’adapter la législation à la réalité du terrain, le marché des médicaments vétérinaires étant soumis, selon la partie demanderesse, à la loi de l’offre et de la demande ;

2. Le Ministère de l’Agriculture

De par ses attributions en matière de promotion de la production animale, de l’encadrement des productions et de garantie de la sécurité sanitaire le Ministère de l’Agriculture constitue un acteur important dans le secteur du médicament vétérinaire.

Dès 2004, ce Département18 s’est positionné en faveur de la libération des prix du médicament vétérinaire et en avait fait la demande auprès de la commission interministérielle des prix à la demande des professionnels. Du fait que 80% des médicaments vétérinaires sont utilisés pour les élevages de rente (production de viande), ils peuvent être considérés comme un outil de production, dont les prix devraient être libres à l’instar des autres intrants.

En mars 2010, lors de la création de la Commission des prix du médicament au niveau du Ministère de la Santé, le Ministre de l’Agriculture a rappelé sa position en faveur de la libération des prix des médicaments vétérinaires. Ce Département a en outre réalisé en 2010 une étude sur la concurrence pour la libération du prix du médicament vétérinaire.

Sur la base des conclusions de cette étude et de la réflexion engagée au sein du Département, le Ministre de l’Agriculture a confirmé sa politique en introduisant en octobre 2012, auprès du Chef du Gouvernement, une demande de délégation de pouvoir au Ministre de l’Agriculture pour la fixation des prix des produits pharmaceutiques à usage vétérinaire et ce, dans l’attente de l’aboutissement du projet de libération des prix. Cette délégation de pouvoir permettrait de traiter les demandes de cadres de prix en instance déposées par les sociétés pharmaceutiques vétérinaires.

18 La position du Département de l’Agriculture est présentée en annexe 3.

18

Selon le Ministère de l’Agriculture, la libération des prix des médicaments vétérinaires devrait entériner une réalité de prix libres sur le marché, et aura des répercussions positives :

• Sur la qualité des produits : le système actuel de fixation des PPM sur une base comparative constitue un frein à la recherche et à l’innovation. La suppression de ce système favorisera les investissements et la créativité, donc la diversification et l’amélioration de l’offre.

• Sur le renforcement de la loyauté de la concurrence entre les opérateurs : le système d'encadrement des prix actuel est virtuel et ne garantit pas la loyauté de la concurrence. La libération du prix du médicament vétérinaire entraînera une libération de la marge qui sera favorable à l'éleveur et au consommateur marocain. En Europe, il est aujourd'hui reconnu que la loyauté de la concurrence dans le domaine du médicament vétérinaire est née de la libération des prix dans les années 1970.

• Sur la relation entre vétérinaires praticiens et éleveurs : actuellement, le niveau des marges sur le prix des médicaments entre en compte dans le choix du vétérinaire par l’éleveur, même si ce critère est moins prépondérant que la compétence ou la disponibilité. A ce niveau, la libération des prix des médicaments permettra d’assurer :

o un meilleur encadrement sanitaire des élevages; l'éleveur recherchera le meilleur encadrement vétérinaire sans être désorienté par une pratique de remises anarchiques l'entraînant à la recherche du prix le plus bas ;

o une meilleure utilisation du médicament vétérinaire. Le choix sera orienté par le praticien (choix du produit, dosage et durée du traitement) et non par un souci d'économie ;

o une production de meilleure qualité en termes de résidus de médicaments vétérinaires.

• Sur le contrôle et la traçabilité des médicaments, en contribuant à réduire le marché parallèle.

Par ailleurs, le Ministère de l’Agriculture considère que la réglementation des prix est indépendante de celle relative aux normes de qualité, d’efficacité et d’innocuité des médicaments vétérinaires, ainsi que des règles de fabrication, d’importation, de distribution, de stockage et d’utilisation de ces produits et qui font l’objet de systèmes de contrôle stricts par les pouvoirs publics.

Ainsi, la libération des prix ne saurait se traduire par une réduction de la qualité, garantie par des normes de contrôle en vigueur dans le secteur, ni par des ruptures de stock ou des problèmes de disponibilité, la législation garantissant une répartition géographique suffisante des ayants droit (pharmaciens d’officine et vétérinaires) ainsi que des stocks de sécurité pour les différentes catégories de produits.

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3. Le Ministère de la Santé

En ayant une responsabilité partagée avec le Ministère de l’Agriculture (ONSSA) dans la délivrance des autorisations de mise sur le marché, et dans la fixation des prix jusqu’en 2010, le Ministère de la Santé joue un rôle majeur dans le secteur du médicament vétérinaire.

Le Département de la Santé, et plus particulièrement la Direction de la Pharmacie et du Médicament, considère tout d’abord que la distribution des médicaments vétérinaires devrait être limitée aux pharmacies d’officine, sur prescription des médecins vétérinaires, conformément aux dispositions légales. Le représentant du Ministère estime également que la libération du prix des médicaments vétérinaires pourrait impacter la traçabilité de ces produits dans le système de distribution actuel ouvert aux vétérinaires praticiens.

Cependant, ce Département serait favorable à la libération des marges de distribution (actuellement fixées à 10% pour les grossistes et à 30% pour les détaillants) ou même des prix si les systèmes de contrôle étaient renforcés pour assurer la bonne utilisation et la préservation de la qualité tant des médicaments que des produits issus de l’élevage pour la consommation humaine.

4. L’Ordre National des Vétérinaires

Le Conseil National de l’Ordre National des Vétérinaires consulté sur sa position par rapport à la libération des prix des médicaments vétérinaires s’y est déclaré favorable, à condition de respecter certaines mesures d’accompagnement pour une libération des prix objective et raisonnée, et ce au regard de la spécificité du médicament vétérinaire.

Selon les représentants des vétérinaires praticiens19 , la spécificité de l’utilisation du médicament vétérinaire, notamment l’obligation de sa traçabilité soulève la question des résidus au niveau des denrées alimentaires d’origine animale.

Les mesures d’accompagnement proposées par l’Ordre National des Vétérinaires sont les suivantes :

• La mise en place de prix de référence à établir de concert entre cette instance et l’Administration et qui comprennent :

o le prix de revient, qui permet de garantir la qualité de conservation et d’utilisation des médicaments et de ne pas compromettre la qualité des soins par des pratiques commerciales et mercantiles.

o Le prix conseillé, tenant compte d’une marge raisonnable du vétérinaire et ou du pharmacien, dont il peut céder partie ou totalité à son client.

• L’adoption d’une plus grande transparence dans les transactions par l’affichage du prix conseillé sur les emballages des médicaments et l’établissement de factures détaillées lors des transactions

• l’instauration d’un Conseil de suivi de la nouvelle politique des prix du médicament vétérinaire, qui serait composé de l’Administration, des représentants des vétérinaires et des sociétés pharmaceutiques, et qui serait en charge de l’évaluation de la nouvelle politique des prix et de sa cohérence avec les dispositions liées à la concurrence.

19 La position des représentants du Conseil National de l’Ordre National des Vétérinaires a été aapuyée par un courrier officiel de cette instance, présenté en annexe 4.

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5. Les éleveurs

Les éleveurs sont les principaux consommateurs des médicaments vétérinaires (seulement 2% de la consommation environ est destinée aux animaux de compagnie). Dans le cadre de cette demande d’avis, deux catégories d’éleveurs ont été consultés, la Fédération Interprofessionnelle du Secteur Avicole, qui regroupe différents segments de production avicole, et l’Association Nationale Ovine et Caprine qui regroupe plus de 10.000 éleveurs répartis sur l’ensemble du territoire national. L’Association Nationale des Eleveurs Bovins et l’Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, contactés à plusieurs reprises, n’ayant pas répondu aux demandes de rendez-vous, nous n’avons pu recueillir leurs positions sur la présente demande d’avis.

Le secteur avicole

Le secteur avicole absorbe près de 45% de la consommation globale de médicaments vétérinaires, essentiellement pour des traitements préventifs (vaccins) acquis par le biais généralement des vétérinaires praticiens auxquels les élevages sont liés par contrat selon les dispositions de la Loi 49-99 du 15 septembre 2002 qui régit le secteur. Cette loi a en outre définit le cadre d’utilisation des médicaments vétérinaires (obligation des prescriptions, limitation du recours aux antibiotiques à titre préventif…) pour assurer la traçabilité de la filière et maîtriser les résidus médicamenteux dans la production animale.

Le niveau de consommation n’est ainsi pas lié au niveau des prix des médicaments, puisque leur utilisation est strictement encadrée par la loi. Actuellement, les éleveurs estiment que les médicaments vétérinaires représentent entre 3 et 6% du prix de revient de la production. Les prix d’acquisition auprès des vétérinaires sont en deçà de 40 à 45% du PPM, sauf pour les vaccins, pour lesquels les remises sont généralement inférieures.

Concernant la FISA, si le PPM constitue une base de référence pour les systèmes de prise en charge médicale dans le cas des médicaments à usage humain, il n’en est pas de même pour le médicament vétérinaire. En effet, ils jugent les médicaments vétérinaires avant tout comme des intrants, ayant un rôle économique, qui devrait être soumis à la même loi du marché que les autres intrants. Selon les professionnels de l’aviculture, la libération des prix serait un facteur de productivité par la réduction des coûts et l’amélioration de l’offre et de la relation entre l’éleveur et le vétérinaire praticien.

En effet, la fixation des prix limite la mise sur le marché de produits innovants et plus compétitifs, elle limite donc le choix des produits pour les éleveurs. De plus, le PPM est souvent plus élevé que dans les pays limitrophes où ils sont parfois subventionnés, ce qui favorise la contrebande et parfois la contrefaçon. La libération des prix permettrait ainsi leur alignement sur la réalité des prix au niveau international et contribuerait à réduire le marché parallèle.

La FISA estime également que la libération, dans un contexte de forte concurrence entre les sociétés pharmaceutiques et de la substituabilité des produits que chaque établissement propose, ne devrait pas induire de hausse des prix, mais plutôt l’alignement des prix officiels sur ceux plus bas pratiqués actuellement sur le marché.

Cette baisse des prix ne devrait pas se traduire par une baisse de la qualité ou une surconsommation des médicaments vétérinaires, du fait de dispositifs et de règles de contrôle des conditions de fabrication, de transport, de stockage et de délivrance des médicaments vétérinaires indépendante du niveau des prix.

21

S’agissant de la relation éleveurs / vétérinaires praticiens, elle est actuellement basée sur la compétence et la disponibilité du vétérinaire, mais également sur le niveau des rabais par rapport au PPM accordés à l’éleveur sur les médicaments. Les honoraires du vétérinaire (acte, médicaments, application…) sont intégrés dans la marge entre le prix d’acquisition des médicaments auprès du laboratoire et le prix de cession à l’éleveur.

La libération des prix des médicaments pourrait nécessiter une modification du mode de rémunération des vétérinaires et orienter davantage la relation éleveurs / vétérinaires vers l’accompagnement et le conseil que vers la revente de médicaments.

L’élevage ovin et caprin

La consommation en médicaments vétérinaires est différente dans l’élevage ovin et caprin par rapport à l’aviculture car il s’agit de systèmes de production moins intensifs. De plus, il faut distinguer les campagnes de prophylaxie préventives, en général menées en partenariat avec les pouvoirs publics dans les cas des maladies contagieuses ou à risque économique, et les traitements ponctuels de certains cheptels ou parties de certains éléments qui sont à la charge de l’éleveur. Dans ce cas, le coût d'usage du médicament vétérinaire doit tenir compte de la valeur économique de l'animal traité. Mis à part les animaux à haut potentiel génétique, l'éleveur ne peut supporter des coûts de traitement élevés, qui accusent un impact négatif sur la productivité de son élevage.

Or, dans le cas des élevages non intensifs, le pouvoir de négociation des éleveurs face aux vétérinaires est limité, particulièrement pour les petits éleveurs.

L’ANOC partage la position de la FISA sur la libération des prix des médicaments vétérinaires, qui va entériner légalement la situation actuelle et qu’elle juge en faveur des éleveurs par l’amélioration de l’offre potentielle et la réduction des prix.

6. Le Ministère des Affaires Générales et de la Gouvernance

Le Ministère des Affaires Générales et de la Gouvernance compte, parmi ses attributions, la fixation des prix des produits et services réglementés, conformément aux dispositions de la loi 06-99 et à l’Arrêté N°1309-0620, ainsi que la présidence et le secrétariat de la Commission Interministérielle des Prix.

Ce Département a traité à deux reprises de la problématique de libération des prix. En 2006, l’Association Nationale des Sociétés Pharmaceutiques Vétérinaires, partie saisissante dans la présente demande d’avis, avait saisi ce Département quant à la libération des prix de ces produits conformément aux dispositions de la Loi 06-99 qui prévoyait la suppression de la liste en 200621. Les services en charge de la question avaient alors réuni les principaux acteurs concernés qui s’étaient montrés favorables à la libération, et ont demandé au Département de tutelle fixant les prix, à savoir le Ministère de la Santé, de formaliser leur position mais aucune suite n’a été donnée.

En 2010, le Ministère de l’Agriculture a une nouvelle fois fait une demande de libération des prix des médicaments vétérinaires auprès de la Commission Interministérielle des Prix. Cette demande est toujours en cours d’examen.

20 Arrêté du Ministre Délégué auprès du Premier Ministre chargé des Affaires Economiques et Générales N°1309-06 du 8 joumada II 1427 (4 juillet 2006) publié dans le Bulletin Officiel N°5436 du 6 juillet 2006. 21 Le compte rendu de la réunion organisée par le Ministère des Affaires Générales en 2006 sur cette question a été fourni par la partie saisissante.

22

V. Analyse concurrentielle

1. La concurrence sur le marché des médicaments vétérinaires

Le marché du médicament vétérinaire est composé de 22 sociétés de fabrication et / ou d’importation, et le réseau de distribution compte les vétérinaires du secteur privé (environ 800), les grossistes et les pharmaciens d’officine, couvrant ainsi l’ensemble du territoire national.

Par ailleurs, les médicaments vétérinaires, selon les départements de tutelle, sont des médicaments génériques qui, hormis pour les vaccins, sont généralement produits ou distribués par la plupart des sociétés pharmaceutiques vétérinaires présentes sur le marché. Ainsi, pour chaque principe actif, il existe entre 4 et 30 spécialités pharmaceutiques similaires auprès des 22 laboratoires opérant sur le marché. Selon l’ONSSA, les 22 sociétés pharmaceutiques vétérinaires commercialisent, à plus de 80% les mêmes gammes de médicaments, ce qui constitue une offre diversifiée de produits substituables pour l’éleveur, consommateur principal.

Concernant les vaccins, la production et la distribution nécessitent des investissements et des équipements spécifiques. La production de vaccins est restée longtemps un monopole de fait de Biopharma, entreprise publique développée pour produire les vaccins destinés à la lutte contre les maladies réputées légalement contagieuses (campagnes de vaccination menées par les pouvoirs publics), mais qui produit également en sous traitance pour d’autres laboratoires. Le développement de la demande a favorisé l’entrée sur le marché de nouveaux opérateurs sur ce segment.

Ainsi, il y a une maturité du marché qui justifierait la libération des prix : • Le nombre important d’opérateurs sur le marché • La diversité des produits et leur substituabilité • La couverture de l’ensemble du territoire national par le réseau de distribution • Une amélioration de la compétitivité de l’industrie pharmaceutique vétérinaire

nationale qui apparait à travers la tendance à la hausse des exportations.

2. Le prix du médicament vétérinaire sur le marché

Avant de développer le système de formation des prix des médicaments vétérinaires sur le marché marocain, il est important de noter que, selon l’étude réalisée par l’ONSSA, les prix de ces produits sont libres dans la plupart des pays occidentaux, notamment européens. En Belgique, le Ministère des Affaires Economiques fixe un prix maximum après avis de la commission des prix des spécialités pharmaceutiques, mais les prix de vente sont libres en deçà.

Quant au Canada, les éleveurs adhérents au programme de santé animale achètent les médicaments à des prix fixes et bénéficient d’une subvention de l’ordre de 40% du prix des médicaments, alors que les grands éleveurs dont le volume de consommation plus important favorise le pouvoir de négociation, ils préfèrent acquérir les médicaments par le biais des vétérinaires à des prix plus intéressants.

23

2.1. Le non respect du prix réglementé sur le marché

Légalement, le prix du médicament vétérinaire est fixé, à l’instar de celui du médicament à usage humain, par l’administration, conformément aux dispositions de la Loi 17-04.

Cependant, d’après les affirmations des différentes parties consultées, ce Prix Public Marocain (PPM) n’est nullement respecté sur le marché. En effet, le médicament vétérinaire constituant essentiellement un intrant dans les élevages qui absorbent plus de 80% de la consommation globale, son prix obéit à la loi du marché.

Comme développé précédemment, l’offre est caractérisée par une forte diversité et substituabilité, permettant aux vétérinaires un choix large de produits pour chaque type d’utilisation (par pathologies, par type de production…).

Sur le plan de la demande, le médicament étant un facteur de production, son prix est intégré dans les coûts de production, et les éleveurs tentent de le réduire à travers des négociations avec les vétérinaires, à l’instar des autres intrants.

Cette concurrence sur le marché incite les sociétés pharmaceutiques à accorder des réductions sur le PPM par le biais de gratuités pour maintenir ou développer leurs parts de marché.

2.2. Les réductions sur les PPM

Selon les dispositions réglementaires, les marges de distribution des grossistes sont de 10% et celles des détaillants de 30%. Donc pour un PPM fixé, le prix de vente par la société pharmaceutique vétérinaire (SPV) est de 63% pour le grossiste ou pour le vétérinaire22. Afin de contourner la réglementation sur les prix, des remises sont octroyées, selon les déclarations de la partie saisissante, par l’accord de gratuités, essentiellement aux vétérinaires qui assurent la distribution de 70% des médicaments vétérinaires.

Le volume des unités gratuites accordées est variable selon la provenance des médicaments considérés :

• pour les médicaments issus de la production locale, 100 à 150 unités sont accordées gratuitement pour 100 unités facturées. Ce qui ramène le coût unitaire à 31,5% ou 25,2% du PPM au lieu de 63%.

• Pour les médicaments importés, 20 à 40 unités gratuites sont accordées pour 100 facturées, ramenant le coût unitaire à 52,5% ou à 45% au lieu de 63%.

Ces réductions sont répercutées auprès des éleveurs qui bénéficient d’un prix d’achat, auprès des vétérinaires, variant entre 60% et 90% du PPM selon la zone géographique et le type de production.

Les marges de distribution ainsi réalisées par les vétérinaires varient entre 7,5% du PPM (sur les produits importés vendus à 60% du PPM aux éleveurs) et 64,8% (pour les produits fabriqués localement vendus aux éleveurs à 90% du PPM, comme indiqué sur le tableau suivant. Il est à noter que souvent ces marges incluent l’ensemble des frais des vétérinaires praticiens (actes médicaux, déplacements…).

Quant aux éleveurs, ils réalisent une réduction des coûts des médicaments entre 10 et 40%.

22 Sur le PPM, il y a une marge de 30% pour la vente au détail, ce qui ramène le prix de gros à 70% du PPM. Si l’on en déduit les 10% de marge des grossistes, le prix de cession par les sociétés pharmaceutiques est de 63% du PPM.

24

Ainsi, le PPM n’est globalement pas respecté. Il représente davantage un prix de référence ou une base de négociation entre d’une part, les sociétés pharmaceutiques vétérinaires et les vétérinaires praticiens, et d’autre part, entre ces praticiens et les éleveurs.

D’autre part, le mode utilisé par les sociétés pharmaceutiques pour effectuer des remises sur les prix réglementés, et qui est d’octroyer des volumes parfois conséquents de produits à titre gracieux, induit une sous déclaration des ventes.

Coûts réels par rapport aux PPM pour les médicaments vétérinaires selon leur origine et marges des vétérinaires

Prix de cession légal par les SPV/PPM

Nombre de gratuités accordées pour 100 unités facturées

Coût unitaire réel de cession par les SPV aux vétérinaires

Marges vétérinaires/PPM selon prix de cession à l’éleveur

Cession à l’éleveur à 60% du PPM

Cession à l’éleveur à 90% du PPM

Produits fabriqués localement

63% 100 31,5% 28,5% 58,5% 150 25,2% 34,8% 64,8%

Produits importés

63% 20 52,5% 7,5% 37,5% 40 45% 15% 45%

Source : ANPV

2.3. Les limites du système de fixation des prix des médicaments vétérinaires

Selon la réglementation, pour obtenir le prix d’un nouveau médicament ou pour la révision du prix d’un médicament déjà sur le marché, la société pharmaceutique dépose auprès de l’administration une demande de cadre de prix qui détaille les coûts de revient et fixe les marges, que ce soit pour les médicaments fabriqués localement ou importés.

Ce système est caractérisé par des limites qui favorisent le non respect des prix fixés par l’administration.

En premier lieu, les procédures administratives de fixation des cadres de prix, ou de PPM, nécessitent des délais de 6 à 8 mois, qu’il faut cumuler au délai d’obtention de l’autorisation de mise sur le marché, qui dure jusqu’à deux ans. De plus, une demande de révision à la hausse du PPM, en cas d’augmentation des cours mondiaux de certaines matières, peuvent prendre plusieurs mois pour être approuvées.

Selon certains professionnels du secteur, la lenteur de ces procédures amène certaines sociétés pharmaceutiques vétérinaires à surestimer volontairement les prix proposés pour leurs produits, afin de maintenir une marge de rentabilité en cas de hausse des prix de revient.

Cette surestimation des prix, démontrée par l’ampleur des réductions accordées sur les prix légaux, constitue ainsi une opportunité pour le marché parallèle et permet le développement de la contrebande de médicaments vétérinaires, essentiellement à partir des frontières Est et Sud du pays, et pose ainsi le problème du contrôle de la qualité et de l’utilisation de ces produits commercialisés sur les marchés. Selon un praticien, certains médicaments sont vendus 6 à 7 fois moins chers sur le marché parallèle, et la disponibilité libre de ces produits constituerait un risque tant pour le cheptel que pour les consommateurs de produits animaux.

D’autre part, l’établissement des PPM par l’administration se fait sur des bases théoriques ou comparatives (souvent les produits similaires sont alignés sur les mêmes PPM), ce qui limite l’innovation et limite la diversification de l’offre, et donc la concurrence.

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Enfin, le Décret N°2-10-41223 portant délégation de pouvoir au Ministre de la Santé « à l’effet de fixer les prix des produits pharmaceutiques et actes et services médicaux réalisés dans le secteur médical privé (…) » ne faisant pas mention des médicaments vétérinaires, un vide juridique a été créé depuis 2010 en matière de fixation de PPM pour les médicaments vétérinaires. Ceci constitue un frein à la mise sur le marché de nouveaux médicaments vétérinaires depuis cette date selon le Département de l’Agriculture.

VI. Conclusions

L’analyse des données du marché permet de dégager les conclusions suivantes :

Le marché des médicaments vétérinaires est concurrentiel :

• Le nombre d’opérateurs est important et tend vers la hausse en lien avec le développement de la demande ;

• L’offre en médicaments est diversifiée et fortement substituable ; • Le développement des systèmes de production animale représente un potentiel de

croissance pour le secteur ; • La compétitivité de l’industrie pharmaceutique est perceptible à travers la hausse des

exportations, même si elles restent encore faibles ; • Le niveau de la concurrence actuelle entre les opérateurs et la substituabilité des

produits sur le marché font que la suppression du système de fixation des prix ne devrait pas se traduire par une hausse.

Le prix des médicaments vétérinaires est en réalité libre sur le marché :

• Le prix du médicament vétérinaire, réglementé par l’administration, obéit en réalité à la loi de l’offre et de la demande. Le PPM est rarement respecté et constitue davantage un prix de référence pour les négociations entre les laboratoires et les vétérinaires d’une part, et entre les vétérinaires et les éleveurs d’autre part et ce, grâce à un système de rabais et de remise en nature ;

• Le système de remise repose sur des gratuités accordées par les sociétés pharmaceutiques aux vétérinaires, permettant de réduire les coûts unitaires des médicaments, mais qui représente également des sous déclarations fiscales, les gratuités n’étant pas facturées ;

• Les réductions sur les PPM sont en partie répercutées sur les éleveurs, en fonction du volume des achats, de la nature des produits et des élevages et de leur localisation ;

• De fait, le prix des médicaments vétérinaires est libre, obéissant aux règles de l’offre et de la demande.

Le mode de fixation des prix a des impacts négatifs sur l’offre :

• Le système de fixation du PPM est établi par l’administration sur la base d’estimation de la structure des prix de revient ou sur des bases comparatives. Il aboutit en général à des prix surestimés par rapport aux prix internationaux, ce qui favorise le marché parallèle qui échappe à tout contrôle ;

23 Décret N°2-10-412 du 21 chaoual 1431 (30 septembre 2010) publié dans le Bulletin Officiel N°5884 du 12 kaada 1431 (21-10-2010)

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• De plus, ces procédés pour la fixation des prix n’incitent pas les sociétés à mettre sur le marché des produits innovants ou plus efficients, dans la mesure où leur prix seraient alignés sur ceux sur le marché destinés au même usage ;

• La lourdeur des procédures administratives pour l’obtention des P.P.M pour les médicaments vétérinaires réduit la propension des sociétés pharmaceutiques à diversifier davantage l’offre de médicaments vétérinaires.

La libération des prix est indépendante des systèmes de contrôle sanitaire et de qualité des médicaments vétérinaires :

• Le dispositif de contrôle de la qualité, de l’efficacité et de l’innocuité des médicaments, vétérinaires ou à usage humain, est d’ordre réglementaire et organisationnel. Il est totalement indépendant du prix des produits. Des services spécialisés interviennent à chaque niveau, des autorisations de mise sur le marché, à celles de fabrication ou de distribution, et des contrôles sont opérés quant aux prescriptions, modes de stockage ou d’administration des médicaments vétérinaires, sans lien avec les prix ;

• Une libération des prix ne devrait pas se traduire par une réduction de la qualité des médicaments ou des abus dans leur utilisation, qui sont régies par un ensemble de dispositions réglementaires.

VII. Recommandation

Vu que la libération des prix serait favorable à la concurrence :

• L’alignement des prix sur les cours internationaux aura comme conséquence l’instauration d’une flexibilité qui favorisera l’éleveur et le consommateur ;

• La suppression des délais et des procédures d’obtention des cadres de prix améliorerait l’offre disponible et inciterait les sociétés pharmaceutiques à l’innovation ;

• La libération de la marge commerciale serait favorable à l'éleveur et au consommateur marocain in fine.

Vu que la libération des prix ne devrait pas se répercuter sur la qualité des médicaments, leur innocuité ou leur disponibilité :

• La demande d’avis concerne uniquement la libération des prix, avec le maintien voire le renforcement de tous les dispositifs de contrôle de qualité de toute la chaine de production, de distribution, de stockage et d’administration des médicaments vétérinaires ;

• La suppression du système de fixation des prix sur des bases comparatives pourrait se traduire par la mise sur le marché de produits plus performants et efficaces dans un marché concurrentiel ;

• La libération des prix et leur baisse par rapport au PPM ne peut pas se traduire par une surconsommation dangereuse des médicaments vétérinaires. En effet, selon les professionnels, le recours aux médicaments représente un coût supplémentaire, et certaines productions sont encadrées par des réglementations strictes quant à la consommation des médicaments, au regard des conséquences possibles sur le consommateur final et sur l’environnement ;

• La libération des prix devrait rendre légale la situation effective du marché où les PPM ne sont pas respectés.

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ANNEXE 1 : ACTES D’INSTRUCTION

Date Contacts Date Réunion Personnes

Association Nationale des Sociétés Pharmaceutiques Vétérinaires

- 02/07/2012 - 03/07/2012 - 20/07/2012 - 29/10/2012

06/07/2012

Dr Lamraoui (Président) Dr Hamdoun

Ministère des Affaires Générales et de la Gouvernance

- 17/09/2012 - 15/10/2012 - 22/10/2012

21/09/2012

M. Riach Mme Benali

Ministère de la Santé

- 17/09/2012 24/10/2012

Dr Bouazza, Directeur du Médicament et de la Pharmacie

Ministère de l’Agriculture et de la Pêche Maritime

- 17/09/2012 31/10/2012 : réception de la position du Département de l’Agriculture par courrier

ONSSA - 25/10/2012 - 27/11/2012

19/12/2012 Dr Id Sidi Yahia, Division de l Pharmacie et des Intrants Vétérinaires Dr Grini, Service de l’Enregistrement et des Inspections

IAV Hassan II

- 05/11/2012 - 12/11/2012 - 26/11/2012 - 06/12/2012

IPV

- 30/10/2012 22/11/2012 Dr Deddi, Vétérinaire Responsable

Ordre National des Vétérinaires

- 02-11/2012 - 27/11/2012 - 29/11/2012

14/12/2012 24/12/2012 : réception de la position de cette instance par courreir

Dr Amaqdouf (Vice Président), Dr Mouahid

Association Nationale Ovine et Caprine

- 02/11/2012 - 27/11/2012

10/12/2012 Dr Abidi

Association Nationale des Elevages Bovins

- 02/11/2012 - 27/11/2012

Fédération Interprofessionnelle du Secteur Avicole

- 02/11/2012 - 06/12/2012

20/12/2012 Dr Assimi, Vice Président M. Jerrari, Directeur Dr Zerouali, Conseiller, M. Fadil, Secrétaire Général

BIOPHARMA - 24/10/2012 01/11/2012

Dr Zahi, Dr Hammouchi

Vétérinaire 24/07/2012 Commercial dans société pharmaceutique vétérinaire

22/12/2012

ANNEXE 2 : DEMANDE D’AVIS ET POSITION DE L’ANPV

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: DEMANDE D’AVIS ET POSITION DE L’ANPV

: DEMANDE D’AVIS ET POSITION DE L’ANPV

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31

32

33

34

ANNEXE 3 : POSITION DU DEPARTEMENT DE

L’AGRICULTURE

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36

ANNEXE 4 : POSITION DU CONSEIL NATIONAL DE

L’ORDRE NATIONAL DES VETERINAIRES

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