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Thèse de doctorat de l’Université Paris-Est Spécialité Sciences de l’éducation Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche sur les Transformations des pratiques Éducatives et des pratiques sociales (LIRTES) Max BUDOWSKI Apprentissage coopératif et formation des médecins : entre le “formel” et “l’informel” Expérimentation de trois dispositifs pédagogiques utilisés en sciences médicales. Thèse dirigée par Madame Hélène BÉZILLE, Professeure à l’UPEC Soutenue publiquement le 16 décembre 2015 JURY : Claude ATTALI, Professeur – Université Paris Est Créteil Val de Marne Hélène BÉZILLE, Professeure – Université Paris Est Créteil Val de Marne José GOMES, Professeur – Université de Poitiers Marie-Anne HUGON, Professeure – Université Paris Ouest Nanterre La Défense

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Thèse de doctorat de l’Université Paris-Est

Spécialité Sciences de l’éducation

Laboratoire Interdisciplinaire de Recherche sur les Transformations des pratiques Éducatives et des pratiques sociales (LIRTES)

Max BUDOWSKI

Apprentissagecoopératifetformationdesmédecins:entrele“formel”et“l’informel”

Expérimentationdetroisdispositifspédagogiquesutilisésensciencesmédicales.

Thèse dirigée par Madame Hélène BÉZILLE, Professeure à l’UPEC

Soutenue publiquement le 16 décembre 2015

JURY :

Claude ATTALI, Professeur – Université Paris Est Créteil Val de Marne

Hélène BÉZILLE, Professeure – Université Paris Est Créteil Val de Marne

José GOMES, Professeur – Université de Poitiers Marie-Anne HUGON, Professeure – Université Paris Ouest Nanterre La Défense

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Résumé

L’objectif de la thèse estdeparvenir à élaborerunmodèled’acquisitionde la compé-

tence dumédecin. La question de recherche a été libellée ainsi: quelles implications

peuvent avoir les expériences professionnelles, la vie quotidienne, les échanges entre

pairs,enfin,toutcequipeutcorrespondreàdesressourcespédagogiquesdites«infor-

melles»dans l’améliorationdescompétencesprofessionnellesdesétudiantsenméde-

cine et desmédecins. J’ai fait l’hypothèse suivante: dans tout apprentissage, il y a du

formeletde l’informel.Etcet informelpourraitêtrerepérédansundispositifpédago-

gique de type coopératif, expérientiel et réflexif; le contexte d’apprentissage «infor-

mel»et «non formel»a certainementun rôledans l’acquisitiondes connaissanceset

descompétencesdesprofessionnelsdesanté.

Troisdispositifspédagogiquesfréquemmentutilisésaucoursdu3ecycledelaformation

initiale des médecins et en formationmédicale continue ont été proposés à des étu-

diantsenmédecineetdesmédecins installésenmilieuambulatoire.Detelsdispositifs

baséssurlamobilisationdel’expérience,laréflexionetlacoopérationentrelespartici-

pants seraient susceptibles de contribuer à l’amélioration de la compétence des étu-

diantsenmédecineetdesmédecins.

Ilexiste,danschacundesdispositifsd’apprentissageséprouvés,etentenantcomptedes

cadres de références et des connaissances propres à chaque participant, des savoirs

formelset informels.Ces savoirsont contribuédans leurglobalitéà la transformation

des apprenants. Cependant, la distinction entre ces deuxmodes d’apprentissages for-

mels,informelsestsurtoutthéorique.Elleestnotammentfonctiondeslieuxetdesmo-

ments où ces apprentissages ont été dispensés. Il existe en réalité un véritable conti-

nuumentrecesdifférentsapprentissages.

Motsclés: Apprentissagecoopératif,pédagogiemédicale,Formationmédicaleinitiale,formationmédicalecontinue,compétence.

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Abstract Thisthesisattemptstoofferamodelfortheacquisitionofknowledgeandskillsamong

physicians.Theresearchundertooktoexploretheroleofprofessionalexperiences,daily

life,exchangesbetweenpeers,andallother formsof so-called«informal» learning in

enhancingtheprofessionalskillsofmedicalstudentsandphysicians.Theauthorlabored

underthefollowinghypothesis:alllearninginvolvesbothformalandinformalaspects,

and the informal aspects can be found in cooperative, experiential and reflexive type

pedagogical constructs. Finally, «informal» and «non-formal» learning opportunities

certainlyplayaroleintheacquisitionofknowledgeandskillsamonghealthcareprofes-

sionals.

Threeteachingmechanismsfrequentlyusedduringthe3rdcycleofinitialmedicaltrai-

ningaswellasinmedicalcontinuingeducationprogramsweremadeavailabletomedi-

cal students andphysiciansworking in ambulatory setting. These tools,which encou-

rageparticipantstomarshaltheirownexperiences,toreflectthoughtfullyandtocoope-

ratewitheachother,canimprovetheskillsofmedicalstudentsandphysicians.

Each of the three teaching mechanisms studied herein, factoring in individual back-

groundsandproficiencies,containbothformalandinformalknowledgeandskillswhich,

asawhole,contributedtothetransformationoftheparticipants.However,itisimpor-

tanttonotethatthedistinctionbetweenformalandinformallearningisprimarilytheo-

retical, andmay simply depend on context or location. Therefore, rather than oppose

them,itmaybemoreappropriatetoconsiderthatthesetypesoflearninglieonaconti-

nuum.

Keywords: cooperative learning,medical pedagogy,medical education, initialmedical

training,continuingmedicaleducation,skills

Title:Cooperativelearningandmedicaltraining:betweenformalandinformalaspects.

Experimentationofthreeteachingdevicesusedinmedicalsciences.

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Remerciements

Je remercie chaleureusement les professeursmembres du jury et rapporteurs d’avoir

acceptéderapporteretd’évaluercetravail.Jetienségalementàtémoignermagratitude

à toutes lespersonnesquim’ont soutenuouaidédans la réalisationdece travail,no-

tammentmonentourageprofessionnel,leprofesseurJean-JacquesGuilbertdel’OMSet

legroupedecollèguesdoctorantssousladirectiond’HélèneBézille.

J’aieubeaucoupdeplaisiràtravailleravecHélèneBézillequim’aencouragéetdonné

d’excellentsconseilspourmeneràbiencettethèse.Jelaremerciepoursonécoute,son

encadrement, son expertise et sa persévérance à rechercher la substantifique moelle

lorsdenombreuxéchanges.GrâceàHélène,j’aiapprisenquatreanssurlessciencesde

l’éducationbeaucoupplusquecej’avaispuassimileren20ans.Cetteremiseenquestion

m’a été très bénéfique. Toutema gratitude etmes remerciements pour son accompa-

gnement.

J’aiégalementunepenséetouteparticulièrepourmesparents,mesenfants:Maud,Clara

etPauletsurtoutpourmonépouseColettequim’asoutenusansfaillesetaprisbeau-

coupdesontempspourrelirecetravail.

Enfin, jevoudraisexprimertoutemagratitudeàtoutes lespersonnesquim’ontaidéà

développermesconnaissancesenpédagogiemédicale,notammentPierreAtlan,Pierre

Gallois, Claude Rougeron, Claude Attali, Bernard Gay, Pierre-Louis Druais, Jean-Pierre

Voilquin,mes collègues de l’École de Riom,mes collègues enseignants de l’Université

Paris7DenisDiderot,mescollèguesdesdifférentesassociationsdeformationmédicale

continue,lesInternesenmédecinegénéraleetlesmédecinsquiontparticipéàcetravail

derecherche.

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Tabledesmatières

REMERCIEMENTS 1

TABLEDESMATIERES 4

RESUME 1

ABSTRACT 2

AVANT-PROPOS 6

INTRODUCTION 13

PREMIEREPARTIE:CONTEXTEETENJEUX-LESMODELESPEDAGOGIQUESDEREFERENCESETLEURHISTOIRE. 19

1.1.LESMODELESD’APPRENTISSAGESDEVELOPPESAUXIX°ETAUDEBUTDUXX°SIECLE. 191.1.1.Laremiseenquestiondumodèled’apprentissagecentrésurlesavoir 191.1.2.Lespropositionspourallerau-delàdeslimitesdelaPPO 311.1.3.Quelavenirpourlathéoried’apprentissageparobjectifs(PPO)? 371.1.4.Lapédagogieparobjectifdanslaperspectivedel’apprentissagedumétierdemédecin 39

1.2.LESMODELESD’APPRENTISSAGESDEVELOPPESDANSLASECONDEMOITIEDUXX°SIECLE 641.2.1.L’évaluationdescompétencesdanslecadredel’apprentissage:l’approcheparcompétences 641.2.2.Sélectiondedifférentesdéclinaisonsdel’approcheparcompétences 721.2.3.Remiseenquestiondel’approcheparcompétences 81

1.3.LESMODELESACTUELSDEL’APPRENTISSAGEENMEDECINE 1001.3.1.Décalageentrel’approcheparcompétenceetladémarchedeprofessionnalisation:nécessitédechangerdeparadigmed’apprentissage 1001.3.2.Deuxpionniersdel’apprentissageexpérientielréflexif:JohnDeweyetKurtLewin 1051.3.3.Lesapprochesrécentesdel’apprentissageexpérientielréflexif:ChrisArgyrisetDanielSchönpuisDavidKolb 1081.3.4.Latransformationdel’expérience(Mezirow) 1151.3.5.Réflexionsetnouvellesconceptionsd’enseignementdanslesFacultésdemédecine 120

DEUXIEMEPARTIE:PROBLEMATIQUEDENOTRETRAVAILDERECHERCHE-APPROCHEPEDAGOGIQUECOOPERATIVEETAPPRENTISSAGESFORMELSETINFORMELS 126

2.1.DESCRIPTIONDUSUPPORTTHEORIQUEDENOTRETRAVAILDERECHERCHE 1272.1.1.Leparadigmepédagogiqueduconstructivismeencontextesocial 1282.1.2.L’approchesocioconstructiviste 1302.1.3.Leseffetsduconflitsociocognitifsurlegroupe 1322.1.4.Analysedelacomplexitédel’approchesocioconstructiviste:lesdifférentsprocessusmentauxmisenexerguedanslesgroupessociaux. 1352.1.5.L’apprentissagecoopératif 145

2.2.APPROFONDISSEMENTSURL’APPRENTISSAGECOOPERATIFETLAMEDIATION–LESTHEORIESHUMANISTES 1512.2.1.Lamédiation 1512.2.2.Environnementsociocognitifetapprentissagecoopératif 1542.2.3.Pourquelleraisonfaut-ilintégrerl’apprentissagecoopératifdansl’acquisitiondescompétences? 1552.2.4.Quelquesélémentsinhérentsaufonctionnementdespetitsgroupes 156

2.3.LESOCIOCONSTRUCTIVISMEENCONTEXTEOULACOGNITIONSITUEE 1672.4.UNECATEGORISATIONPERSONNELLEDESGROUPESD’APPRENTISSAGE 1702.5.LESPROCESSUSD’APPRENTISSAGESSELONLAPERSPECTIVEDUCOURANTTHEORIQUEDELACONNAISSANCETACITEETDEL’EXPLICITATION 179

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2.6.APPROFONDISSEMENTSURLESAPPRENTISSAGES«FORMEL»,«INFORMEL»,«NONFORMEL» 1932.6.1.L’apprentissageformel 1962.6.2.L’apprentissagenonformel 1972.6.3.L’apprentissageinformel 2002.6.4.Approfondissementsurlesliensentrel’apprentissageimpliciteetl’apprentissagenonformel 2052.6.5.Lesentravesàl’apprentissage:lecurriculumcaché 214

TROISIEMEPARTIE:EXPERIMENTATION-DESCRIPTIONETEVALUATIONDETROISDEMARCHESPEDAGOGIQUESEXPLORATOIRESENPETITSGROUPES 218

3.1.PREMIEREDEMARCHEPEDAGOGIQUEEXPLOREE:LECASCLINIQUEADEVELOPPEMENTPROGRESSIF. 2223.2.DEUXIEMEDEMARCHEPEDAGOGIQUEEXPLOREE:LEGROUPED’ECHANGEDEPRATIQUES 2333.3.TROISIEMEDEMARCHEPEDAGOGIQUEEXPLOREE:LEJEUDEROLE 2423.4.CONCLUSIONDELA3EPARTIE 280

QUATRIEMEPARTIE:DISCUSSION 2824.1.LESPROCESSUSD’APPRENTISSAGESELONLAPERSPECTIVEDESSCIENCESCOGNITIVES 288

4.1.1.1erdispositifétudié:cascliniqueàdéveloppementprogressif 2894.1.2.2edispositifd’apprentissage:legrouped’échangedepratique 2924.1.3.3edispositifd’apprentissage:lejeuderôle 296

4.2.LESPROCESSUSD’APPRENTISSAGESSELONLAPERSPECTIVEDUCOURANTTHEORIQUEDELACONNAISSANCETACITEETDEL’APPRENTISSAGEIMPLICITE 301

4.2.1.1erdispositifd’apprentissage:lecascliniqueàdéveloppementprogressif 3044.2.2.2edispositifd’apprentissage:legrouped’échangedepratiques 3074.2.3.3edispositifd’apprentissage:lejeuderôle 310

4.3.LESPROCESSUSD’APPRENTISSAGESELONLESCOURANTSTHEORIQUESDELACOGNITIONSITUEEETDELACOOPERATION. 311

4.3.1.1erdispositifd’apprentissage:lecascliniqueàdéveloppementprogressif 3154.3.2.2edispositifd’apprentissage:legrouped’échangedepratiques 3164.3.3.3edispositifd’apprentissage:lejeuderôle 318

CONCLUSIONGENERALE 322

REFERENCESBIBLIOGRAPHIQUES 333ARTICLESETOUVRAGES 333SITOGRAPHIE 364

LISTEDESABREVIATIONSUTILISEES 370

LISTEDESFIGURES 371

TABLEDESAUTEURS 372

ANNEXES 376Ordonnancen°58-1373du30décembre1958 Erreur!Signetnondéfini.Conseildel’Europe Erreur!Signetnondéfini.Adventureinpedagogy Erreur!Signetnondéfini.Disasterinpedagogy Erreur!Signetnondéfini.RecommandationsdeGeorgeMillerpourlesenseignants Erreur!Signetnondéfini.Guidingprinciplesforteachers Erreur!Signetnondéfini.OnTrainingMedicalTeachers Erreur!Signetnondéfini.Enseigner,unetâchenobleetcomplexe Erreur!Signetnondéfini.TheLewisA.ConnerMemorialLecture:PrideandPrejudiceinProfessionalEducation Erreur!Signetnondéfini.Thecontinuingeducationofphysician Erreur!Signetnondéfini.TheAssessmentofClinicalSkills/Competence/Performance Erreur!Signetnondéfini.LapyramidedeGeorgeE.Milleren2015 Erreur!Signetnondéfini.

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Versuneméthoded’éducationnouvellepourlesécolespopulaires Erreur!Signetnondéfini.

Avant-propos

Quandjesuissortidel’hôpital,j’ensavaisénormément.Leproblème,c’estquelespatientsn’avaientrienquejeconnaisse.DrMartinBass1.

J’aidébutél’exercicedelamédecineambulatoireen1982dansunquartierpopulaireau

centredeParis.Dans ce cabinetmédical créé en1937, j’étais le quatrièmemédecin à

m’installer en association avec un kinésithérapeute. Deux ans de remplacements en

Seine etMarne, des gardes au SAMU de Créteil avec un diplôme d’oxyologie2dans la

poche(l’ancêtredelaCapacitéMédicaled’Urgence),etunpeumoinsd’unandepratique

médicalesalariéeessentiellementdenuitàl’AUMP(AssociationdesUrgencesmédicales

deParis)ontprécédécetteinstallation.Aveccesdifférentesexpériences,j’estimaisêtre

capabledesoignercorrectementlespatientsquimeconsultaient.J’étaisaudébutindif-

férentaveccetteconceptiondel’exercicemédicalbasésurunpermisdesoignerdespa-

tients,délivréuneseule foispour toutesà la findenosétudes. Il n’yavaitpasàcette

époquedesrecommandationsdepratiquecliniqueetthérapeutique.

Rapidement, cependant, jemesuis renducomptedes insuffisancesdessavoirs3acquis

pendant mes études pour exercer convenablement ce métier. Car dans le serment

d’Hippocrate que tout futurmédecin doit prêter à la fin de la soutenance de sa thèse

d’exercice, ilestpréciséque« lemédecinn’entreprendrarienquidépassesescompé-

tences.Illesentretiendraetlesperfectionnerapourassureraumieuxlesservicesquilui

serontdemandés».Lesmédecinsdiplômésdanslesannées1970-80sesontbienvite

aperçuquedenombreusesconnaissancesacquisesdurantleursétudesdevenaientrapi-

dementobsolètes:letroisièmecycle,appeléstageinterné,nécessairepouracquérirdes

compétencesdansledomainedelaprofession,étaitréduitàunepeaudechagrinpour

lesmédecinsgénéralistes(uneannéecontretroisactuellementdepuislesannées2000).

1CitéparKAMIENM.(2004).EducatingthegoodGP—the33rdWilliamArnoldConollyOration.Aust.Fam.Physician,33,pp.1027-9.2Médecined’urgence,dugrec:oxusquisignifieaiguetlogos,discours.3Leterme«savoirs»comprendnonseulementlesconnaissances,maisaussilessavoir-faire,lesattitudesetlessa-voiragir.

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Pendant ce cycle, les futurs praticiens devaient effectuer des stages dansdes services

hospitaliersquicorrespondaientrarementàleursfuturesactivitésprofessionnelles.Ce

stageinternéétaitbasésurunelogiquedefonctionnementplutôtquedeformation,et

l’absencedesupervisiondelapartd’unséniorétaittropsouventflagrante.

La formation laissait à désirer et pourtant, nous avions la possibilité d’effectuer des

remplacements,doncdesoignerlespatients,dèslafindusecondcycle.Heureusement

pour ces patients, nous pouvions compléter nos connaissances en assistant à des

séancesdeformationmédicalecontinue(FMC).Malencontreusement, laplupartdeces

séancesdeFMCétaientorganiséesàcetteépoqueparl’industriepharmaceutique,dont

lebutétaitd’amenerlespraticiensquiassistaientàcesséancesàbienprescrire,c’est-à-

direànotercorrectementsurnosordonnanceslesbonsmédicaments...enfin,préféren-

tiellementceuxquiétaientfabriquésparlelaboratoirepharmaceutiquequinousinvitait.

Cesséancesdeformationcontinueavaientlieuenfindejournée, lorsquelesmédecins

sont bien las et peu enclins à écouter des notions trop spécialisées et inadaptées à

l’exercicedelamédecinegénérale.Pourcetteraison,avectroismédecinsgénéralisteset

quatremédecinshospitaliers4, nous avons fondé en1987unorganismedeFMC indé-

pendantdel’industriepharmaceutique(AssociationFMC-CHU,FacultédeMédecineLa-

riboisère-Saint-Louis).J’aipriségalementen1986ladirectionduCollègedesmédecins

généralistesdu9e,10eet20earrondissementsdeParis,fondéaudébutdesannées1980

par les Docteurs Saya et Brunet. C’était (c’est toujours) un modèle particulièrement

adaptéàl’améliorationdesconnaissancesetcompétencesdesmédecinsdefamille.Une

douzainedemédecinsparticipentàcetteassociationdeformation.Cegroupedepairs,

fondémaintenantilyaplusde35ans,seréunitunefoisparmoisensoiréechezundes

membres,sansaucunfinancementdeslaboratoirespharmaceutiques.

UnerencontreavecJean-PierreWoilquin,undespremiersprofesseursdemédecinegé-

néralenommésen1991àNancyquim’a faitnotammentdécouvrirGuyScharf, etdes

discussionsamicalesavecPierreAtlan,quidirigeaitlui-mêmeunautrecollègedeméde-

4Alain Liwerant,Martine Gomez,Michel Tondowski, Max Budowski pour les généralistes, Philippe Passa, ThomasBardin,JacquesModaïetRobertSlamapourleshospitaliers,avecl’aideefficaced’AlainBrouillot.

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cinsgénéralistes5àParisontétédécisives:pouranimeretenseigner, ilestnécessaire

deseformeràlapédagogie.C’estalorsladécouvertedel’ÉcoledeRiom6,crééed’abord

parl’UnionNationaledesAssociationsdeFormationmédicalecontinue(UNAFORMEC),

puisenassociationavecleCollègeNationaldesGénéralistesEnseignants(CNGE)quia

assurédès1985desformationsdeformateurspourlesenseignantsetlesanimateursde

FMC.C’était lorsdesesséminairesquiduraient3 joursenmilieupratiquementfermé,

maisdansuneambiancetrèsconviviale,loindetoute«civilisation»,quej’aidécouvert

Mager et ses objectifs pédagogiques, Bloomet ses taxonomies, et les différentes tech-

niquespédagogiquespouranimeretconcevoirnospropresformations.Cesséminaires

étaientaniméspardesmédecinsgénéralistes,quiavaientdéjàdesresponsabilitésdans

desorganismesdeFMC;certainsmêmesenseignaientdéjàdanslesFacultésdeMéde-

cine.

C’est ainsi qu’à partir de 1989, avec d’autresmédecins qui s’investissaient dans cette

activité bénévole, nous avons assisté régulièrement à des stages de formation à

l’animationetàl’expertise.C’estladécouverted’uneméthoded’apprentissagequel’on

pourraitqualifierdebase,etquiétaitjugéesuffisanteaudébutdesannées90pourdé-

velopperetanimerdesséancesdeformation.Lesexercicesproposésprovenaientpour

laplupartdesouvragessuivants:commentdéfinirdesobjectifspédagogiques?deRobert

Mager, le guide de formationdes personnels de santé de Jean-Jacques Guilbert, les ou-

vragesdelacollection«formationpermanenteenscienceshumaines»notammentceux

de RogerMuchielli (lesméthodesactivesdans lapédagogiedesadultes, la conduitedes

réunions,ladynamiquedesgroupesetl'analyseducontenu)ainsiqueleguidepratiquedu

formateurdeDidierNoyéet JacquesPiveteau.Cesexercicesportaient sur ladétection

desbesoinsdeformation,surl’élaborationdesobjectifs,surl’utilisationdesmoyenset

outils pédagogiques, les principes de l’évaluation et la gestion des petits groupes. Les

notionsdepédagogieenseignéesàcetteépoque,reposantsurlapédagogieparobjectifs,

étaientlimitées,simplesetfacilesàappliquerpourlesactionsdeformationsmédicales

continuesquenousavionsàmanager.

5CollègedesMédecinsdel’EstParisien6LalogistiquedelapremièreécoledepédagogiemédicalepourformerlesmédecinsgénéralistesenformationinitialeetcontinueétaitassuréeparlelaboratoireMSDChibret,dontlesiègeétaitàRiom(PuydeDome).

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Pourmapart,enseignerétaitunehistoiredefamille.Ungrand-père,docteurensciences,

professeurdechimieàl’UniversitédeCaracasetancienDoyendelaFacultédeSciences,

unoncleprofesseurdebiochimieàl’UniversitédeJérusalemetdirecteurderecherches

à l’institut Weizmann à Rehovot en Israel, un autre oncle, docteur en agronomie de

l’UniversitédeYale(USA)etprofesseurémérited’agronomieàl’UniversitédeTurrialba

(Costa-Rica)etungrandoncleprofesseurdepsychologieàl’UniversitédePoitiers,quia

publiéplusieursouvragessurl’apprentissage7.Maisiln’estpaspossibledes’improviser

enseignant sans connaîtredes règlesélémentairesdepédagogie, cequi anécessitéde

suivretoutuncycledeformationdebaseàlapédagogie.Parlasuite,jesuisdevenufor-

mateurpourd’autresmédecinsdésirants’initierà lapédagogieà l’écoledeRiompuis

celleducollègeNationaldesGénéralistesEnseignants(CNGE).En1994,j’aiéténommé

maîtredeconférencesassociépuisprofesseurassociédemédecinegénéraleàlaFaculté

deMédecineLariboisièreSaint-Louis (actuellementFacultédeMédecineParis7Denis

Diderot). Dès le début des années 1990, j’ai été responsable de plusieurs dossiers de

formationmédicale continue,auniveaurégionalavec l’associationFMC-CHU,etauni-

veaunationalavecl’associationFormUnofdontj’étaisleréférentpédagogiquepourles

dossiers «sevrage tabagique», «obésité infantile» et «prise en charge de lamaladie

d’Alzheimer».

Jemesuisintéresséégalementàlalégislationconcernantl’apprentissagedelamédecine.

J’aieude lachancedefairepartiedesquatrenégociateursgénéralistesquiontmisen

placeavecbeaucoupdedifficultés, lorsdecommissions interministérielles, lestageen

milieulibéralditdeniveau1.C’estlapremièrefoisquelesétudiantsquittaientlesser-

vices hospitaliers pour effectuer un stage chez unmédecin généraliste. Les difficultés

étaient d’ordre pédagogique (il était nécessaire de former les médecins afin

d’accompagnercesétudiantspendantunsemestredansleurdémarched’apprentissage),

mais aussi d’ordre socioculturel, les patients ayant l’habitude d’un colloque singulier

avecleurmédecintraitantsanslaprésenced’untiers.J’aiparticipéégalementàlamise

enplaced’unsecondstageenmilieulibéralditdeniveau2appelégénéralementSASPAS

(StageAmbulatoireenSoinsPrimairesenAutonomieSupervisée).De1996à2004,j’ai

éténomméparleministèredel’enseignementsupérieur,membredelacommissionna-

7EHRLICHStéphane(1972).Lacapacitéd’appréhensionverbale.P.U.F.,216p.etEHRLICHStéphane(1975).Appren-tissageetmémoirechezl’homme.P.U.F.168p.(Psychologied’aujourd’hui).-EHRLICHS.,MAILLARDP.(2004).Unepolitiquepourl’écoleetlecollège,versunenouvellecohérenceéducative.MichelY.Eds,318p.(Société).

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tionale pédagogique des études médicales pour mettre en place la réforme de

l’enseignementmédicaldans ladeuxièmepartiedusecondcycle,puisdansunsecond

tempspourlaréformedelapremièreannéedupremiercycle.J’aiétéenfinmembredu

conseilrégionaldelaFMCpendant11ans(ParisetensuiteIledeFrance),puisduCon-

seilNationalScientifiquedelaFormationProfessionnelleContinuede2005à2012.Les

sciencespédagogiquesm’intéressaientdepuis longtempsetdès1992, j’avaisentrepris

desrecherchessurlesauteursquiontinfluésurlesdifférentsparadigmespédagogiques

duvingtièmesiècle(présentationàNantesen1999)8.J’étaisainsiprêtàréaliseruntra-

vailderechercheafindeàcomplétermaformationenpédagogiemédicale.

Lorsque nous avons entrepris ce travail de thèse sur l’apprentissage de lamédecine en

France,nosenquêtesbibliographiquesontétédécevantes.Seulstroisouvragestraitantde

lapédagogiemédicaleen langue françaiseavaientété identifiés:un livrede JeanGosset

paru en 1969 (Élémentsdepédagogiemédicale), un livre sur la pédagogie en formation

médicale continue (Manuel pratique de la formationmédicale continue) de Guy Scharf

éditéen1977etunguidedepédagogiepourlespersonnelsdesanté,d’uneplusgrandedif-

fusion,parJean-JacquesGuilbertéditéparl’OMSen1976etdontladernièreéditiondatait

de1990.Aucunlivrerécent,spécifiqueàlapédagogieuniversitairemédicaleetprenanten

compte les derniers paradigmes pédagogiques, n’était disponible au début des années

2010!Heureusement,dèslesannées60,desarticlesrelatantlesévolutionsdelarecherche

enpédagogieétaientdisponiblesdansdesrevuesspécialiséescommeAdvancesinHealth

SciencesEducation,AcademicMedicineJournaletc.,etplusrécemment:Pédagogiemédicale,

Medicalteachers.L’UNESCOainsiquel’OMS(spécialementaveclesPrs.Jean-JacquesGuil-

bertetGeorgeE.Millerétaientpartieprenantedansledéveloppementdescentresderes-

sourcesenpédagogiemédicaleuniversitaire.Toutescesressourcesbibliographiquesnous

ontpermisd’entreprendreun travailde synthèse sur lesdifférentsdéveloppementsdes

connaissances enpédagogie, pouvant intéresser les enseignantsuniversitaires enméde-

cine.

8BUDOWSKI Max (1999). Une histoire de l’apprentissage: du comportement à la compétence et de la tâche àl’objectif.XIIIeJournéesUniversitairesFrancophonesdePédagogieMédicale(CIDMEF).UniversitédeNantes(France)FacultédeMédecine.

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Le champde la pédagogie universitaire s’est élargi depuis les années 1990, notamment

dansledomainedenotreétude:lamédecinegénérale.Unenouvellefilièreuniversitaire,

reconnueparleministèredel’Éducation,aétéinauguréeaveclanominationen1991des

premiers professeurs associés demédecine générale. Cette reconnaissance a amené les

membresdesdifférentessociétéssavantesenmédecinegénérale,particulièrementleCol-

lègeNationaldesGénéralistesEnseignants9àproposerdesmodesd’apprentissagesadap-

tésàcettenouvelledisciplineuniversitaire.

Ilétaitnécessairedes’écarterdumodèledepédagogieuniversitaireprivilégiéenpremier

etsecondcycleetbasésurundispositiflinéairedetransmissiondesavoir:«présentation-

réception-restitutiondesmatières;lesétudiantssontspectateursausenspropreduterme,

assisdansdegrandsamphithéâtres». (Dupont&Ossandon,1994,p. 30).Àpartirde ce

constat,desdépartementsdepédagogieontétécréésdansplusieursfacultésdemédecine.

Cependant,lesresponsablesdecesdépartementsbutaientsurcesdeuxinterrogations:1-

commentlimiterlescontenusàapprendre,quidepuisle19esiècle,augmentaientrapide-

mentselonuneprogressiongéométrique,et2-quelssont lesmoyenspédagogiquesqui

permettraientàcesétudiantsdedevenirdesmédecinsexpertsdansleursfutursexercices.

Pourcetteraison,ildevenaitnécessaired’innoverdanslesformesd’apprentissages:spé-

cialementenincluantlacomplexiténécessaireàl’acquisitiondescompétences.

Quand j’avaisdébutémesétudesdemédecineàToulouseen1972,annéede lamiseen

placepourlapremièrefoisduconcoursentrelapremièreetdeuxièmeannéedesétudes

médicales,lanotiond’objectifspédagogiquesn’existaitpas;etencoremoinsleconceptde

compétence.Laquasi-totalitédesenseignementssedéroulaitsouslaformedecoursma-

gistrauxenamphithéâtre.Leplanducoursétaitrarementdévoilé,lesoutilspédagogiques

tropsouventrudimentaires(tableauxnoirs,parfoisdestransparentsoudesprojecteursde

diapositives). Quelques exceptionnels enseignements au lit du malade étaient proposés

danslesserviceshospitaliersdanslesecondcycledesétudesmédicales.Lesprofesseursse

plaignaientd’unfaiblenombred’étudiantspourécouterleurscours,maisnefaisaientau-

cun effort pour améliorer leurpédagogie. Ils accédaient le plus souvent à cette fonction

grâceàleurstravauxderechercheetleurpratiqueclinique.Maiscelanesuffisaitpasàles

9LeCNGErassembletouslesenseignantsuniversitairesdemédecinegénérale(professeursetmaîtresdeconférencestitulairesetassociés,chargésdecoursetsurtoutprèsde6000desmaîtresdestageuniversitaires).Créeen1983,sonrôleestprégnantdanstouteslesréformesconcernantlamédecinegénérale.

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rendre compétents en pédagogie. Ces enseignants tenaient rarement compte des deux

conditionssuivantes(Ehrlich,1977,p.810):«L’activitéorganisatriced’unsujetaucoursd’unapprentissagedépendàlafoisdesescapacitésac-tuelles et de la nature de la tâche à effectuer. Elle est facilitée lorsqu’il y a compatibilité entrel’organisationdesconnaissancesqu’ilpossèdedéjàetl’organisationdesconnaissancesnouvellesquel’onveutluifaireacquérir».

Afindenepasreproduirecetteimagenégative,jem’étaisintéresséàl’enseignementdela

pédagogie dès que les autorités facultairesm’avaient demandé d’assurer des cours aux

étudiantsdu3ecycleàlaFacultédeMédecineLariboisièreSaint-Louis.C’estégalementune

desraisonspourlesquellesj’aientrepriscetravaildethèseensciencesdel’éducationafin

deparfairecetapprentissageéducatif.

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Introduction

«Tumedis,j'oublie.Tum'enseignes,jemesouviens.Tum'impliques,j'apprends.10»

BenjaminFranklin(1750)

"Ilestpossiblederésoudretouslesproblèmes",s’exclamaitDavidHilbertlorsd'uncon-

grèsinternationaldemathématicienstenuen1900àParisoùilavaitproposéuneliste

de23problèmesàrésoudre.Avecunetelleaffirmation,jemesuisengagédanscetravail

de recherche sur l’apprentissage enmédecine avec un objectifprincipal : reconnaître,

danstroisdispositifsd'apprentissageproposésàdesétudiantsenmédecineencyclede

professionnalisationetàdesmédecinsexerçantenambulatoire,cequipeutreleverdu

«formel»etde«l'informel»11.Qu’allais-je fairedanscettegalère?Carunetellediffé-

renciationestplutôtde l'ordrede laquadratureducercle.Dans la réalité, il estprati-

quementimpossiblededécidersitellephased'apprentissagerelevaitd'unecatégorisa-

tion formelleou informelle.Lesdonnéesquinouspermettentdesituercesdifférentes

formesd'apprentissagenesontnirécursivesniprécises;ellessontresponsablesd'une

indécidabilité pour partager ces apprentissages en formel et informel. Cela peut nous

amenerànousinterrogersurlacohérenceetlapertinencedesdéfinitionsdecesformes

d'apprentissageproposéesnotammentparl'UNESCOouparleConseildel'Europe.Se-

lonHilbert,unproblèmetropfacilen’estpas intéressant,maissiceproblèmeesttrop

difficile,ilnesertàrien.Lorsquej’aidébutécetravailderecherche,j’avaisl'espoirque

ceproblèmepouvaitêtrenonseulementabordé,maisj’avaisaussilaconvictiondepou-

voirlerésoudre.Lacatégorisationdesapprentissagesen«formel»et«informel»étant

chimérique directement,mon but a été de démontrer que cette catégorisation est ce-

pendant possibledans une dimension coopérative grâce à trois dispositions pédago-

giques:uncascliniqueàdéveloppementprogressif,ungrouped’échangesdepratique

etunjeuderôle.

Aprèsavoir introduit lebutde cette thèse, intéressons-nousà l’apprentissagepropre-

mentdit.Tous lesêtreshumainsontbesoind’apprendre,quellesquesoient leurs rai-

sons.Pourlesuns,c’estlarecherchedelavérité,pourd’autres,c’estpouvoirselibérer

10«TellmeandIforget,TeachmeandIremember,InvolvemeandIwilllearn»,[notretraduction].11Voirci-aprèslesdéfinitionsd’apprentissageformel,informeletnonformel

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de leurs propres préjugés et/ou croyances, pour d’autres enfin, c’est réduire

l’incertitudedansleurspropressavoirs.L’acquisitiondesconnaissancesestréaliséese-

lon différents types d’apprentissages en fonction des besoins définis individuellement

oucollectivement:individuellement,pourobtenirunematuritéintellectuellenécessaire

àuneautonomiedevie,àl’exerciced’unmétier;collectivement,pourvivreenharmonie

avec lesautres,pourapportersaproprecontributionà lasociétédans laquelleonvit.

Selon l’UNESCO 12 , cette acquisition de savoirs peut se faire selon trois types

d’apprentissages: «formel», «non formel» et «informel». «L’apprentissage formel»,

définipardesfinalités,desobjectifs,descontenus,desmoyenspédagogiquesetdeséva-

luationssommatives,réaliséen institution(école,collège, lycée,université,etc.)nere-

présenteraitqu’environ20%delatotalitédenossavoirs(AllenTough,2002).Cesont

desapprentissagesprogrammésdéveloppésauseindesorganisationshabilitéesàdéli-

vrer lesdiplômes(établissementsscolaires,Universités,diplômesde la formationpro-

fessionnelle).

Lamajeurepartiedenos savoirs (environ70%) sont acquispardes«apprentissages

informels» qui se développent grâce à des interactions avec d’autres personnes, dans

desactivitésquotidiennes liéesàunecommunautédepratiques,à la lecture journaux,

télévision,livres,internetetautresmédias,loisirs.Cetteformed’apprentissagequipeut

avoir un caractère intentionnel ou non (Bezille, 2008), «n’obéit pas à une logique de

structurationexplicitée,etn’estengénéralvalidéeparaucuntitre».

Entrelesapprentissagesformelsetinformels,ilestpossiblededistinguerdesapprentis-

sagesnonformels(environ10%detouslesapprentissages,Tough,2002),quisedéve-

loppent à travers d’autres formes de socialisationmoins formalisées au sein de diffé-

rentsdispositifs sansviséecertificative.Cesontdesapprentissages fréquemmentren-

contrésdanslasphèreassociative,etquipeuventavoir lieusousformedediscussions

ou d’échange de pratiques en groupe. Les notions de «formel» et «d’informel» sont

assezbienadmisesactuellementparlesacteursdessciencesdel’éducation;cen’estpas

encore le casde l’apprentissage«non formel»qui soulèvemoultdébatsdans la com-

munautééducative.Cetteformed’apprentissageaétécependantdécriteilyaplusde45

12UNESCO / HADAMACHE Ali (1993) p 10 et UNESCO (1997 b). Classification Internationale Type de l’éducation(CITE).

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ansparPhilipCoombs(1968),anciendirecteurde l’Institut Internationaldeplanifica-

tion de l’éducation à l’UNESCO. Toutes ces notions d’apprentissage «formel», «infor-

mel»et«nonformel»ontétéreprisesparlasuitepardesinstitutionsinternationales:

l’UNESCO(1997)etleConseildel’Europe(StratégiedeLisbonne,2000).

Nousavonsétéétonnésdedécouvriraudébutdenotreexercicemédicalquelesrègles

de formation traditionnelles en vigueur à l’Université n’étaient pas oupeu appliquées

danslaformationcontinuedesmédecins,notammentchezlesmédecinsgénéralistes13.

Pourunmêmeobjectifpédagogique,unedurée30minutesétaitparexemplesuffisante

pour l’enseigner sous forme d’un cours magistral à l’Université, alors qu’une demi-

journéeenFMCétait attendue.Qu’est-cequipouvait justifierunedifférenceaussi im-

portante dans le tempsd’apprentissage? Certes, il fallait rajouter à ces 30minutes le

tempsdetravailpersonnelquel’étudiantdevaitfournirpourcomprendreetapprendre

cequiluiaétéenseignéàl’Université.Enseignerdansunamphithéâtren’obligepasles

étudiantsàapprendre.Untelenseignementengrandgroupeneprenaitpasencompte

les différences de niveau des étudiants, leur motivation à apprendre et la quasi-

impossibilitédediscuteravecl’orateur(Leclercq,GibbsetJenkins,1998,pp.140-141).

Lesétudiantspeuventavoirdesdomainesd’intérêtvariables.

Monparcoursprofessionneldans la formationmédicale initialeetcontinueetmonex-

périenced’enseignantm’ontaidéàcomprendrepourquoiilestnécessairedeconsacrer

beaucoupplusde tempspouratteindreunobjectifpédagogique.Lorsqu’ilproposeun

enseignement magistral, l’enseignant s’intéresse au contenu à transmettre: c’est une

intention pédagogique. Son enseignement n’est pas axé sur un objectif pédagogique à

réaliser.Leprofesseurparle,ilsait;l’étudiant,quinesaitpasouestcensénepassavoir,

peut écouter, essayer de comprendre ce qui est dit, mais n’a pas les moyens de

s’exprimer.Dansl’enseignementenpetitgroupe,l’apprentissagen’estpluscentrésurle

savoir,maissurl’apprenant;ilestdemandéàcedernierdeprendreuntempspersonnel

deréflexionsur lasituationpédagogiqueproposée,demettreencommunsespropres

réflexionsaveclesautresapprenants,dediscuterensemble,etd’agirencommun.Lors-

que l’enseignement se déroule en amphithéâtre, sous la forme de cours magistraux,

l’apprentissageformelestpratiquementleseulauquelseréfèrel’enseignant.Àl’inverse,

13Celaétaitbeaucoupmoinsvraipourlesautresspécialitésjusquedanslesannées2000.

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l’enseignement en petit groupe se réfère aux trois types d’apprentissages définis ci-

dessus:«formel»,«nonformel»et«informel»14.

Notre recherche postule une complémentarité des apprentissages «formels» et «infor-

mels» dans la professionnalisation des étudiants enmédecine et desmédecins généra-

listes;cecidanslebutdedonnerauxpatientsdessoinsdequalité.Cetravailsestructure

autourdequatreparties.

1. Nousproposonsdansunepremièrepartiededécrire laformationmédicale initiale

etcontinueauxUSAetenFrance.Dèsledébutduvingtièmesiècle,despédagogues

célèbres (Dewey, Cousinet, etc.) avaient dénoncé des principes pédagogiques en

vogue qu’ils jugeaient inadaptés à l’éducation des écoliers, collégiens et lycéens.

Leurs réflexions ne semblaient pas concerner les enseignements dispensés à

l’Université.DesmédecinsdontGeorgeEdwardMiller(1956)etsescollaborateurs

auxUSA,Jean-JacquesGuilbert(1967)15,JeanGosset(1968)etGuyScharf(1977)en

France,ontcaractérisélestraversdelaformationmédicaleetontproposédessolu-

tions.Maislapédagogieàl’Universitén’évoluaitpas.Lescritiquesétaientassezrares

etmalacceptées:pourquoiremettreencausecesrèglesdediffusiondusavoirpar

ceuxquisaventàceuxquisontcensésêtreignorants?Jusqu’àlamoitiéduvingtième

siècle, les règlesde l’apprentissage étaient simples: le professeur enseignait et les

étudiantsétaientcensésapprendreparcœuretrestituer toutcequ’ilsavaientmé-

morisélorsdesexamens.Sil’étudiantn’apprenaitpas,cen’étaitpasleproblèmede

l’enseignant, mais celui de l’étudiant uniquement. L’apprentissage proprement dit

consistaitàacquérirdenouveauxcomportements.Pourcela,l’enseignantdevaitdé-

montrercommentfaire:«cetteconceptiondel’apprentissageparl’observationetla

répétitionesttrèsenracinéedansnotresenscommun».(FairstenetGyssels,2003,p.

13), Une telle façon de voir n’est plus adaptée de nos jours à l’apprentissage de

l’exercicemédicalactuel:ellenepermetpasderépondrecorrectementauxattentes

14Selonnotreexpérience, lesapprenantsquisontréunisdansunpetitgroupedans lecadred’unenseignementouuneformationontpourtâchederéfléchiretdeproduireàpartirdethèmesdéfinisparlesenseignants(apprentissageformel).Cesapprenantsontégalementlapossibilitédediscuterentreeuxàproposd’autressituationspouvantêtrerencontrées dans leur exercice, indépendamment des objectifs de la formation (apprentissage non formel), Enfin,pendant les pauses, les discussions entre apprenants peuvent également porter sur d’autres domaines de savoirs,favorisantainsil’acquisitiond’autresconnaissances(apprentissageinformel).15Jean-JacquesGuilbert est le co-auteur avecChristineRousse-Lacordaired’uneétude commandéepar leMinistèredel’Éducationnationalepubliéeen1967intitulée:opinionsdesenseignantssur lesexamensenfacultédemédecine-en-quêtedelasectionmédicale,Directiondesenseignementssupérieurs.

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despatients. Cependant, les réformes se font attendre.Nous avons fait le choixde

rapporterlesdifficultésetlesproblèmesrencontrésenformationmédicaleinitialeet

continuedansdeuxpays:laFrance(notammentaveclePr.JeanGossetpourlafor-

mationinitialedumédecinetleDrGuyScharfpourlaformationcontinue)etlecon-

tinentnord-américain, essentiellement lesUSA.Le choixdesUSA,où lePr.George

Milleraexercé,estdictéparlefaitquecepaysestàl’originedenombreusesinnova-

tionspédagogiquesdocumentées.

2. Ladeuxièmepartieexposelaproblématiquedelarecherche.Nousdébuteronscette

description en répertoriant les différents modes d’acquisition des savoirs dans le

cadrede l’apprentissagecoopératifetdusocioconstructivisme.Denombreuxcher-

cheurs16ont démontré qu’il est possible de provoquer des changements dans les

comportements, lesreprésentations, lesattitudes, lesactions, lessavoir-faireet les

connaissancesdesapprenantsgrâceà l’apprentissagecoopératif.Appeléégalement

apprentissage en groupe, apprentissage collaboratif, coactif, ce mode

d’apprentissage sous-tend un travail efficient de la part des membres du groupe.

Nousnousattarderonsenpremierlieusurleconflitsociocognitifpuisnousferonsle

pointsurlesmultiplesfacettesdelacomplexitédusocioconstructivisme.Nouspro-

poserons ensuite une description succincte de quatre variétés de groupe

d’apprentissage. Nous ferons ensuite le point sur les apprentissages «formels»,

«nonformels»et«informels».Noustermineronsenfinparlaremiseencausedes

définitions «formel», «informel» et «non formel» de l’apprentissage et une ré-

flexionsurlecontinuumdesapprentissages.

3. La troisième partie porte sur l’expérimentation de trois démarches pédagogiques

fréquemmentutiliséesenFormationmédicaleinitiale(FMI)ouenFormationmédi-

calecontinue(FMC)danslecadredel’apprentissagecoopératif.Cestroisdispositifs

d’apprentissages sont distincts au niveau de leur conceptualisation, aussi bien par

leurs déclinaisons pédagogiques que par le public d’apprenants auxquels ils

s’adressentetdontleniveaudesacquisdesavoirsmédicauxpeutêtredisparate.Ce-

pendant, ces démarches d’apprentissage intéressent toutes les trois des individus

quirecherchentàconstruire leur identitésocialeetprofessionnelleà travers le jeu

16NotammentJohnDewey,EltonMayo,KurtLewin,WilfriedBion,JacobMoreno,RogerCousinet.

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des transactions relationnelles(socialisation professionnelle). Ces trois démarches

pédagogiquessontlessuivantes:uneétudedecascomplexeàdéveloppementpro-

gressifpourlapremière,ungrouped’échangedepratiquespourladeuxièmeetpour

la troisièmedémarche,un jeuderôle.Cesdémarchespédagogiquesontétépropo-

séesàdespraticiensmédicaux,qu’ilssoientInternesenmédecineoubieninstallés

enmilieuambulatoire.Touscestroisdispositifsd’apprentissagefontappelaupara-

digmesocioconstructivistedansuncontexted’apprentissagebasésuruneapproche

pédagogiqueexpérientielleetréflexive.

4. Noustermineronscetravailderechercheparunediscussionquiconstitueralaqua-

trièmepartie.Cettediscussionporterasurlesdispositifspédagogiqueséprouvésen

considérantlestypesd’apprentissagesauxquelsilaétéfaitappel.Monobjectifprin-

cipalaétéderepérercequipourraitreleverdesapprentissagesformels,nonformels

et informelsdanslecadred’uncycledeprofessionnalisationoud’unapprentissage

toutaulongd’unevieprofessionnelle. J’aiainsisélectionnépourladiscussiontrois

courants théoriques d’apprentissage qui ont été décrits dans la première et deu-

xièmepartiedecettethèseetquinousservirontdefilconducteurpournotrediscus-

sion:

• la perspective d’apprentissage selon le courant théorique du cogni-

tivisme:constructivisme,socioconstructivisme,théoriedel’activitéet

dethéoriedel’énaction.

• la perspective d’apprentissage selon le courant théorique de la con-

naissancetaciteetdel’explicitation;

• laperspectived’apprentissageselon lecourantthéoriquede lacogni-

tionsituéeetlacoopération.

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1ère partie: Contexte et enjeux- les modèles pédagogiques de réfé-rencesetleurhistoire.

Lebutdecettepremièrepartieestderetracerlecheminpédagogiquequivapermettre

àunétudiantenmédecinededevenirunprofessionneldesantécompétent. J’ai fait le

choixderapporterlesdifficultésetlesproblèmesrencontrésenformationmédicaleini-

tialeetcontinuedansdeuxpays:laFrance(notammentaveclePr.JeanGossetpourla

formationinitialedumédecinetleDrGuyScharfpourlaformationcontinue)etlecon-

tinentnord-américain,essentiellementlesUSA.Lechoixdecepays,oùlePr.GeorgeMil-

leraexercé,estdictépar le faitquecepaysestà l’originedenombreusesinnovations

pédagogiquesdocumentées.Nousdécrironsainsil’évolutiondeschoixpédagogiquesde

la fin du 19e siècle à nos jours. Nous sommes particulièrement intéressés aux fonde-

mentsdel’apprentissagemédical.Eneffet,audébutdu20esiècle, lesbasesthéoriques

del’apprentissagevontêtrebouleversées,avecl’avènementdelapsychologiecompor-

tementaliste (béhaviorisme), d’une importante transformation des méthodes

d’apprentissagedansl’industrie(del’atelieràl’usine,ducontremaitreauchronomètre,

du simple compagnonnage à l’éducation de masse afin d’assurer un rendement opti-

mum),enfindelapriseencompted’uneréflexionplusglobalesurlespratiqueséduca-

tivesportantnotammentsurlesprogrammesd’études(curriculum)etleurscontenus.

1.1. Les modèles d’apprentissages développés au XIX° et au début du XX°siècle.

1.1.1.Laremiseenquestiondumodèled’apprentissagecentrésurlesavoir

Jusqu’àlaPremièreGuerremondiale, l’essentieldel’enseignementmédical,quecesoit

enEuropeoùenAmérique,consistaitàapporterauxapprenantsdesconnaissances.Peu

importait l’utilité de ce qui était enseignépour son futurmétier, l’essentiel était pour

l’apprenant de restituer ces connaissances au moment des examens. Le mode

d’enseignement dans les établissements facultaires était essentiellement magistral,

l’enseignantpossédaitlesavoir,l’apprenantdevaitapprendreleplussouventparcœur

s’ildésiraitpasserdansuneannéesupérieure.L’enseignementprofessionnelétaitlimité

aucompagnonnageetpourchaquemaître,ilétaitdifficiledeformerplusd’unapprenti.

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Troisévénementsvontmarquerl’enseignementnotammentdanslesFacultésdeméde-

cineaudébutdu20esiècle:l’avènementdelapsychologiecomportementaliste,letaylo-

rismeetlaPremièreGuerremondiale.Lesapprentissagesprofessionnelssontmodifiés

pourrépondreàdescritèresderendement.La formationdesouvriersdoitêtrebeau-

coupplusrapidequ’auparavant(longcompagnonnage).Ilfautrentabiliseraumaximum

l’outil industriel,et ilestnécessairedecontrôlerdésormaistouteslesactivités.Cepen-

dant,enseigneren1950,c’estencoretropsouventtransmettredesconnaissancessous

forme de coursmagistral. C’est privilégier le rapport au savoir. Les finalités des pro-

grammes d’éducation sont basées uniquement sur des connaissances livresques. Elles

sontinopérantesentermesd’apprentissage.Lesenseignantsprennentconsciencedela

nécessité de mettre en place une organisation scientifique de l’éducation. Comment

peut-on savoir si les étudiants en formation initiale sont correctement formés pour

exercerleurmétieravectouteslescompétencesrequisespourlefaire?L’enseignement

dispenséest-ilutileetefficaceentermesdeperformanceetdecompétencespourpren-

dreenchargelespatients?Cesinterrogationsportenticisurledomainemédical,mais

ellessontégalementrecevablespourd’autresprofessions17.Cesontces interrogations

qui ont interpellé Ralph Tyler. Cet auteur a axé ses travaux de recherche sur une ré-

flexionglobalede l’éducationdès les années1930.Tyler s’est inspirédesouvragesde

WerrettCharters(1923)dontilaétésonélève,etdeFranklinBobbit(1918):cesdeux

auteurs ont proposé chacun une théorie de l’éducation appelée programme d’étude

(curriculum),fortementinfluencéeparlesthéoriesd’organisationscientifiquedutravail

(OST)deTaylor(1909).

Tyler jugealorsnécessairedemettreenplaceuneorganisation scientifiqueet ration-

nelledel’éducationenproposantdesobjectifsentermesdecomportementsattendus18.

Laformulationdecesobjectifsdoitêtrecentréesurl’activitédel’apprenantetnonsim-

plementsurdescontenuscommeauparavant.Lafinalitédecesobjectifsestdedécrirele

résultat attendu dans des termes précis et observables pour une évaluation transpa-

renteetunivoque,permettantainsiuncontrôleefficacedel’apprentissage.

17Parexemple:Ingénieurs,cadres,enseignants,pilotesd’avion,pharmaciens,etc.18TYLERR.W.:Lapremièredescriptionaétépubliéeen1934dans«Constructingachievementtests».

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«Lafaçonlaplusutiledeformulerdesobjectifsestdelesexprimerendestermesquiidentifientàlafoislecomportementqu'ilconvientd'observeretlechampdanslequelcecomportementdoitsemanifester19(Hameline,1979,p80).

C’estlanaissanced’unnouveauparadigmeappelé«pédagogieparobjectifs»ouPPOqui

sera résumédansun livredeTyleréditéen1949: "BasicPrinciplesofCurriculumand

Instruction". Ce petit livre est basé sur une proposition fondamentale qui a profondé-

ment influencé le coursde lapédagogie : avant touteprisededécisionconcernantun

enseignement,etpourrépondrecorrectementauxfinalitésdel'éducation, ilestnéces-

sairedelisterenpremierlesobjectifs.Toutlerestesuivra.LegéniedeRalphTylerest

d’avoir associé, pour définir son modèle de pédagogie par objectifs, trois modèles

d’apprentissage.Ceux-ciontétéproposésdans lesannéesprécédantetsuivant laPre-

mièreGuerremondiale:1-lemodèleduprogrammed’étude,2-lemodèlebasésurla

rationalisationdutravail,et3-lemodèledel’apprentissagebéhavioristeoucomporte-

mentaliste.CestroismodèlesontétéprédominantsauxÉtats-Unispendantlapremière

moitiédu20esiècle.

1. Pour les trois auteursnord-américainsassociésaumodèleduprogrammed’étude,

Franklin Bobbitt20, Werret Charters et Charles Allen, l’analyse de la démarche

d’apprentissageest plus importante que la réflexion qui portait jusqu’alors sur les

contenus à enseigner. Cespionniersde lapédagogieontproposéd’élaborer, avant

d’effectuertoutenseignement,unprogrammed’étudeappeléaussicurriculumdont

leprincipalrôleestdepréciserlesbutséducatifs.(Pourquellesraisonsva-t-onréali-

sercetenseignementetdesobjectifsrelatifsàceprogrammed’étude?)Cescurricula

avaientessentiellementpourfinalitédemodifierlescomportementsdesapprenants

enleurtransmettantdescontenus,desfaitsetdesvaleursreconnusparl'ensemble

19TraductionparDanielHamelineduparagraphesuivant:«Thepurposeofastatementofobjectives is to indicatethekindsofchangesinthestudenttobebroughtaboutsothattheinstructionalactivitiescanbeplannedanddevel-opedinawaylikelytoattaintheseobjectives;that is, tobringaboutthischangesinstudents…Thepurposeofthechartistoshowhowthechartcanmorecompactlyindicatetheobjectivesthatarebeingsoughtandhoweachobjec-tiveisdefinedbythechartintermbothofthebehavioralaspectandthecontentaspect-TYLER(1949).Basicprinci-plesofcurriculumandinstruction,pp.47-48.20SelonFranklinBobbitt,laréflexionsurlebesoind’éducationestplusimportantequelaréflexionsurlescontenusdéjàenseignés.Celajustifiedeconcevoirunprogrammed’étudeappeléaussicurriculumetdeproposerainsidesbutséducatifs (pourquelles raisons va t’on réaliser cet enseignement et desobjectifs relatifs à ceprogrammed’étude).Bobbitcitaitletravaildeséducateursprofessionnelsqui«vontparleraveclesouvriersexpertsetobserverleurfaçonde travailler.Chaquemétieranalyséabénéficiéd'unrapportdont lesélémentscommunssont lessuivants : (1)uninventairedesoutilsetdemachinesavec lesquelsunouvrierdoitmontrersonhabileté ; (2)une listedesmatièrespremièresquiserontutiliséesparlesouvriersquiserontainsihabituésàleurutilisation;(3)uncataloguedescon-naissancesnécessairespourréaliserlestravauxexigés…»,[notretraduction].

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de la communauté. L'enseignement devait être structuré, magistral et

l’expérimentationétaitécartée:«Lecurriculumdoitêtreélaboréenvuedesurmon-

terdesdifficultéspouratteindredesobjectifs,etnonenvued'atteindredesobjectifs21

»(Charters,1923,p80).

2. Lemodèlebasésurlarationalisationdutravail,secondtrépieddelaPPO,aétédéve-

loppédansuncontextesocio-économiqued’optimisationdesprocessusdeproduc-

tion industrielle. Il s’appuyait sur la théorie des organisations établie au début du

vingtièmesièclenotammentparHenriFayol(France)etFrederikTaylor(USA).Se-

loncette théoriedesorganisations, il fautspécialiseraumaximumla tâcheàeffec-

tuer(travailàlachaine).Lesrèglesdel’apprentissagesontcalquéessurcetteorga-

nisationnormaliséedutravail:auparavantuniquementthéorique,leprocessusédu-

catif devaitmaintenant devenir le pluspratiquepossible afin de répondre auxbe-

soinsdesnationsindustrielles.Cesnouveauxéducateursdelaformationprofession-

nelleavaientpourprincipalbutdepréparerlesindividusàleursfutursemplois.Les

contenusdecequ’ilsdevaientenseignerétaientdécomposésenunesériedetâches

précises qui devaient correspondre à ce que le professionnel devait exécuter lors-

qu’ilexerceraitsonmétier.PourTaylor(1909,p.37):

«Leprincipalélémentd'unegestionscientifiquemoderneestl'idéedetâche.Letravaildechaqueouvrierestplanifiéunjouràl'avance,etchaquehommereçoitparécritunelistecomplèted'instructions,décrivantendétaillatâchequ'ildoitaccomplir…Cettetâchein-diquenonseulement cequidoit être fait, commentdoit être fait cequiestprévu, et lemomentdéterminépourlefaire22».

LetravaildeTayloraportéessentiellementsurl’analysedestâchessimples.Ilproposait

derationaliserlesméthodesdetravailpourenaccroîtrel'efficacité.Commel’ontsouli-

gnéLouisNotetChristianAmiel(1979,p.4),

«Ilyparvientparunedéfinitionclairedesbutsàatteindre,etendécomposantchaqueopérationnouvelleenactesélémentairesordonnésàcesbuts».

21“Itwouldthereforeseemonlynaturalthatthecurriculumshouldbeconstructedwiththepurposesofovercomingdifficultiesinachievingobjectivesratherthanwiththepurposeofachievingobjectives,”[notretraduction].22“Perhapsthemostprominentsingleelementinmodernscientificmanagementisthetaskidea.Theworkofeveryworkmanisfullyplannedoutbythemanagementatleastonedayinadvance,andeachmanreceivesinmostcasescompletewritteninstructions,describingindetailthetaskwhichheistoaccomplish,aswellasthemeanstobeusedindoingthework.Andtheworkplannedinadvanceinthiswayconstitutesataskwhichistobesolved,asexplainedabove,notbytheworkmanalone,butinalmostallcasesbythejointeffortoftheworkmanandthemanagement.Thistaskspecifiesnotonlywhatistobedonebuthowitistobedoneandtheexacttimeallowedfordoingit”,[notretra-duction].

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3. LetroisièmesupportdelaPPOestbasésurlapsychologieducomportementdé-

veloppéeaudébutdu20esiècleàpartirdestravauxduphysiologisteIvanPavlov

et des psychologues JohnWatson (USA) et Henri Pieron (France). Le postulat

fondamentaldubehaviorisme(deBehavour:conscience)stipulequelesproces-

sus mentaux sont opaques et non accessibles à la conscience. Dans

l’apprentissage behavioriste, l’environnement contraint l’apprenant à

l’association stimulus réponse. Un individu se développe en fonction des expé-

riencesaccumulées.L'apprentissages’effectuegrâceàdesassociations:associa-

tionsparanalogie,associationsparcontiguïté(quelquechosevarappelerautre

chose)etassociationsparcausalité:ilyaunerelationentreunévénementetla

causeàl'originedecetévénement.Notrecomportementdépenddenotrecondi-

tionnement, processus inconscient. L'apprentissage est une modification du

comportement provoqué par des stimuli. Ce comportement correspond à une

manifestationexterned’uneactivitéinterne.Ilpeutêtreévaluéparunobserva-

teurquipeutainsiattesterdelaréalisationdececomportement.

ÀlasuitedeJohnWatson,denombreuxpsychologuesdel’apprentissagesesontintéres-

sésàlapsychologieducomportementenproposantdesthéoriesnonpassurlecondi-

tionnementclassiquedePavlov,maissurleconditionnementopérant.Cinqauteursont

particulièrement marqué le béhaviorisme: Edward Thorndike23, Clark Hull, Edwin

Guthrie,EdwardTolman24etsurtoutBurrhusSkinner.

23Apartirdedifférentstravauxsurlecomportementdesanimaux,Thorndikeaformuléen1913deuxlois:• laloidel’exercice.Seloncetteloi,larépétitiond'uneréponseconditionnéerenforcelelienentrelestimulusetlaréponse.Les liaisonsentre lesstimuliet lesréponsessontrenforcéespar l'exerciceetsontaffaiblies lorsque l'oncessecetteactivité.Laprobabilitéd'obteniruneréponsecorrecteaugmenteaveclenombred'essaiseffectués.

• laloidel’effet:uneépreuveestinefficacesiellenes'accompagnepasd'unesanction.Laconnexionestrenforcéeouaffaiblieparl'effetdesesconséquences:lesépreuvesquimènentàun"étatd'ennui"serontrejetées.Danslecascontraire,ellesserontrépétéesetdoncretenuespuisqu'ellespermettentd'obtenirun"étatdesatisfaction".Laréponseattenduedépenddesesconséquencesennuyeusesousatisfaisantes.Lorsquelaréponseestcorrecte,elleprovoqueunétatplussatisfaisantoubienelleestassociéeàunereconnaissancedelaréussiteparlesautres.Danscecas,ilyarenforcementd'uncomportementquipourraêtrereproduitfacilement

24EdwardTolmanneremettaitpasencauselesprincipesfondamentauxdubehaviorisme,maisprenaitencomptel’existence certaine phénomènesmentaux internes : la "boite noire" intervient dans les processus d'apprentissage,l'environnementn'estpasseulencause.Ilprenaitcomptedel'existant,durôledecequiaétéacquisprécédemmentetquiserautilisépour lenouvelapprentissage :c'est lanotion"d'apprentissagelatent".L’apprenantvaacquérirunsavoiràproposdescomportementsetdeleursconséquences.Pourcetauteur,lerenforcementn'expliquepastout,ilestpossibled'apprendresansrenforcement.Dansuneexpériencedelabyrinthe,ildémontraitque«l'orientationdesratsn'estpasuniquementdéterminéepardes réactionsmotricesautomatiques ; le rat se repèreaussi grâceàdesindices fournispar l'environnement, et construitainsiunereprésentationglobaledu lieuoù il se trouve. Il élaboreainsiunecartecognitive.Laréponsederatsnepeutpasêtreexpliquéeparunsimpleconditionnement.Pourchaqueapprentissage,ilexistedesmécanismesinternes:chaqueapprenantprocèdeenintégrantdesstimuliutilesetsignifi-catifs:ilagitsurlasituation,ilneselaissepasconduireparcettesituation.

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Àpartir des années1930,RalphTyler a alors jugénécessairedemettre enplaceune

organisation scientifique et rationnelle de l’éducation en proposant des objectifs en

termesdecomportementsattendus.C’est l’actedenaissanced’unnouveauparadigme

pédagogiquecentrédésormaissurl’étudiantetnonpluslesavoir:lapédagogieparob-

jectifs(PPO).Cenouveaumodèlepédagogiqueaétéadoptéparlesinstitutionsscolaires

etuniversitairesàpartirdesannées1950surlecontinentnord-américain,nonsansdif-

ficultés.Lesenseignantsenmédecinededifférentspayseuropéenssesontappropriéce

paradigmebienplustard,audébutdesannées1980,d’aborddanslecadredelaforma-

tionmédicalecontinue,puisdixansaprèsenformationmédicaleinitiale.

Oùildevientnécessairedeneplusaxerl’apprentissagesurlesavoir,maisdésormaissurl’apprenant:

Nouspostulonsque lesréflexionssurlesprocessusd’évaluationsontàl’originedetousles

changementsdeparadigmesd’apprentissage. C’est le cas ici avecRalphTyler qui avait

défini une approche comportementaliste de l'évaluation25dès 1930: évaluer ne signi-

fiaitpasjugerunproduitfini.L’évaluationnedoitpasconsisteràunecomparaisonentre

lesrésultatsdesélèvesd’uneclasseetêtreuniquementcentréesurunemesuredeleurs

succèsauxdifférentsexamens. Il fautenpremier lieudéfinir leniveaudesapprenants

audébutdelaséquenced'apprentissage.C’estuneétapenécessairepourdéterminerles

changementsdecomportementà la finde l'apprentissage.Ensecondlieu, ilestnéces-

saire de relier cette évaluation avec les éléments d’unprogrammed’apprentissage ou

curriculum. Ce dernier est constitué d’un ensemble demoyens humains etmatériels,

d’uneplanificationbiendéfinie(tempsnécessairepourréaliserl’apprentissage);cecur-

riculuminclutégalementlescontenusdeprogramme,lestâchesprofessionnellesàréa-

liseretlesobjectifsàatteindre.L'évaluationnedoitpasêtredissociéedesobjectifspé-

dagogiques : ils formentuntout.RalphTylerrefuse leconceptd’uneévaluationtermi-

naleunique.Pourcetauteur,sil’évaluationapourobjectifderechercherunemodifica-

tion du comportement des apprenants, elle a également pour but d’apprécier, pour

chaque apprenant, tout au longde l’apprentissage, l’évolutionde ces changements at-

25WAPLESD., TYLERR.W. (1930). ResearchMethodes andTeacher Problems, amanual for systematic studies ofclassroomprocedure.NewYork,MacMillan;TYLERR.W.(1942).GeneralStatementonEvaluation.JournalofEduca-tionResearch,35,pp.492-501,[notretraduction].

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tendus. Pour cette raison, il est nécessaire de connaître dès le début du cycle

d’apprentissage le niveau des apprenants. Cet auteur (1949), a établi ainsi les bases

d'une véritable évaluation que l'on pourrait qualifier de continue: le processus de

l’évaluationdoitessentiellementdéterminerjusqu'àquelpointleprogrammeetl'ensei-

gnementpermettentl'atteintedesobjectifséducationnels:«Lesobjectifspédagogiquescorrespondentessentiellementàdesmodificationssouhaitablesdemodèlesdecomportementdel'étudiant.L'évaluationestdoncunprocédépourdéterminerlede-gréréeldeceschangementsdecomportements.Cetteconceptiondel'évaluationsoulèvecepen-dantdeuxaspectsprimordiaux(Tyler,1949,p.105)

• Enpremierlieu,l'évaluationdoitévaluerlecomportementdesétudiants,puisquecesontceschangementsquisontrecherchés.

• Secundo, l'évaluationn'estpasuniquementunsimpleprocessuspermettantdesavoirsi lechangementaeulieu.C'estaussiunprocessusdecomparaisonentreleproduitfinietl'ap-préciationdescomportementsdesétudiantsnonseulementaudébutduprogrammed'étude,maisaussi à certainsmoments toutau longde ceprogramme, afind'identifier les change-mentsattendus. Iln'estpaspossibled'évaluerunprogrammed'instructionparunesimpleévaluationterminale.Sionneconnaîtpasleniveaudesétudiantsaudébut,ilseradifficilededéfiniràquelmomentleschangementsespérésont-ilseulieu26».

Les progrès rapides constatés dans les réflexions sur l’évaluation à partir des an-

nées1950 vontmodifier profondément l’approche comportementaliste. La science de

l'évaluation(docimologie)adébutéverslesannées1920.Avantcettedate,lesexamens

étaientoraux:ilsétaientcentréssurlacapacitéàrestituerdefaçonlaplusparfaite(par

cœur)lesconnaissancesenseignées.Entre1920et1930,destestsstandardisésétaient

proposésauxapprenants; ces testsétaientélaboréssous formedequestions fermées,

censéesdiminuerlasubjectivitédescorrecteursetl'hétérogénéitédesinformationsre-

cueillies. Après 1930, l'évaluation n’était plus axée sur le seul travail des apprenants.

Sousl'impulsiondeRalphTyler,lesprogrammes,lescontenusetlesméthodespédago-

giquessontévalués(Smith,Tyler,1942).L'évaluationnedoitpasêtreseulementconsi-

dérée commeun simple instrument demesure. Elle devait être plus critique vis-à-vis

destests.D’autresoutilsd’évaluationsontétéainsiproposés:interview,questionnaires,

listesdevérification.RalphTyleravaitposédès1934leprincipedehiérarchisationdes

objectifs.

26TYLERR.W.(1949)p.105–106,[notretraduction].

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Cet auteur a proposéles exigences d’une bonne évaluation.Celle-ci doit comporter les

élémentssuivants27:

1 -proposerunedéfinition claireetunivoquedesobjectifsquidoiventpréciser ceque lesétu-diantsserontcapablesdefaireoudeproduiresicesobjectifssontatteints;2-spécifierlessituationsoulesépreuvesdignesd’intérêtpourl’étudiant;3-déterminerlescritèresd’évaluation;4-utiliserplusieursméthodesdemesure;5-évaluertouslestypesdecomportementssignificatifspourl’apprentissage;6-tenirunregistredesuividesprogrèsdel’étudiant;7. élaborerdeséchellesetun systèmedenotationdestinéà renseignerutilement (l’étudiantetl’enseignant).

L'évaluation,avantTyler,étaitsurtoutunjugementsurlesactivitésdesapprenants.Ty-

ler a forgéunnouveau conceptdynamiquede l'évaluation : sonmodèle correspondà

une importanterestructurationduprocessusd'évaluation : siellesertàmesurer l'im-

pact de l'enseignement, l'évaluation est aussi destinée à améliorer les programmes

d'études.Maiscetteconceptioncomportementalistehonnittouteréférenceauxproces-

susmentaux.Elle se centreuniquement surdes comportementsobservablesetmesu-

rables.PourTyler,cequiaétéapprisdoitêtrevérifié.Pourquelecontrôlesoitefficace,

il est nécessaire d’établir une formulation claire d’objectifs pédagogiques définis en

termes de comportements attendus. Ce changement de comportement de l’apprenant

quel’onpeutévaluerpeutêtrerésuméparleschémasuivant:

Figure 1 : le processus d'apprentissage selon la PPO

ToussignantetMorisette(1990,p.18)

27“Requirementsofsoundevaluationbyinstructorsincludes:(1)workingfromunambiguousdefinitionsofstudentbehaviorsthatspecifywhatastudentwhohasattainedtheobjectivecandoorproduct;(2)specifyingthesituationswhere,orwaysinwhich,Studentscandemonstratethebehaviorsofinterest;(3)determiningappropriatestandards;(4)usingmultipleapproachestomeasurement;(5)assessingalltypesofbehaviorsthataresignificantintheeduca-tional development of students; (6) keeping records of student progress; and (7) developing scales and scoringschemesthatconveyusefulinformation”,[notretraduction].

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Unpremiermodèled’apprentissagederéférence:lapédagogieparobjectif(PPO)

RalphTylerestlepremierauteurreconnupouravoirdéfinilesprincipesgénérauxdela

pédagogieparobjectif.Cependant,RobertMagerestlepédagogueleplusrenommépour

avoircontribuéàladiffusionmondialedecemodèlepédagogiqueenprécisantlesrègles

d’élaboration des objectifs pédagogiques spécifiques. À partir d’une réflexion inspirée

d’unproverbetouareg28:«Sivousn’êtespassûrdel’endroitoùvousvoulezaller,vous

risquezdevousretrouverailleursetdenepaslesavoir29»,Mageraposélestroisques-

tionsquenousreformulonsainsi:

1. Quedoitêtrecapabled'accomplirl'apprenant?(Nécessiteunverbed’actionpour

déterminerlecomportementfinal).

2. Dansquellesconditionssaperformancesedéroule-t-elle?

3. Quelniveauattend-ondelui(critèred’acceptabilitédelaperformance)?

Comme le souligne Jean-Jacques Guilbert, «ce qui importe, c’est donc moins ce que

l’enseignant donne, c’est ce que l’enseigné reçoit». Mager a ainsi distingué deux types

d’objectifs: les objectifs généraux et opérationnels. Il a défini les objectifs généraux

commedes énoncésd’intentionpédagogique relativement largesquidécrivent ceque

les apprenants devraient posséder au termed’un enseignement donné, non évaluable

directement. Ils sous-tendentdes savoirs, savoir-faireet attitudes. Ils correspondentà

une séquence plus oumoins longue d'apprentissage. Ils intègrent le plus souvent les

acquis de plusieurs matières ou disciplines. Jean-Jacques Guilbert (1974, p. 1.3830) a

proposé,danssonGuidepédagogiquepourlespersonnelsdesanté,publiéparl’OMS,les

objectifsgénérauxenmédecinesuivants:

28«Si tu ne sais pas où tu vas, tu risques demettre longtemps à y arriver»(If you'renot surewhere, you'regoingyou'reliabletoendupsomeplaceelse).29LacitationoriginaledeMagerétaitlasuivante«Sivousn’êtespassûrdel’endroitoùvousvoulezaller,vousris-quezdevousretrouverailleurs».NousavonscitécellequifiguraitdansleGuidePédagogiquedel’OMS.Eneffet,Jean-JacquesGuilbertarajouté«etdenepaslesavoir»parceque(vers1975)iltenaitdéjààfaireressortirl’absenceduconceptd’évaluationvalide.(Informationdonnéeenmars2013parJean-JacquesGuilbertlorsd’unerelecturedecettethèse).30Volume1,page38.Parlasuite, lesdifférentespublicationsconcernantceguideontétéregroupéesenunseulvo-lume;maislapaginationoriginaleaétéconservée.

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«Àlafindesesétudesuniversitaires,lemédecindoitêtrecapablede:

1. servir,danslecadredesservicespublicset/ouprivés,lapopulationpoursesbesoinssanitairesdanslesdomainespréventifetcuratifauseindesétablissementsrurauxet/ouurbainsconfor-mémentaucodededéontologiedelaprofessionetàlalégislationdupays;

2. établir unpland'action sanitairepour la collectivité à laquelle il doit s'intégrer et définir lespriorités dans l'exécution de ce plan en tenant compte des conditions d'environnement phy-sique,cultureletsocioéconomiquedecettecollectivité;

3. éduqueret inciter lesmembresde la collectivité à collaborerà l'améliorationde leurétatdesantéetdeleursconditionsdevie;

4. coopéreraveclesresponsablesdesautressecteursdudéveloppementnational;

5. former, organiser et superviser une équipemédico-sociale intégrée d'auxiliaires capables deréaliserharmonieusementunprogrammed'actionconformémentauxprioritésdéfiniesetse-lonlescompétencesdechacun;

6. évaluerpériodiquementlerésultatdesesactivitésenrelationavecleniveaudesantédesacol-lectivitépouryapporterlesaméliorationsnécessaires;

7. mainteniretétendresesconnaissancesetcompétencesprofessionnellesets'orienteréventuel-lementversl'enseignement,larechercheetlaspécialisation».

Lesobjectifs spécifiques ouobjectifs opérationnelsqueMager décrivait comme des

objectifscomportementaux,énoncentàcourttermelesactionsàréaliserparl'étudiant,

quidoitmontrerainsiqu'ilacomprisetappris.Prenonsparexempleungestetechnique

médical : faireune infiltration.La tâcheprofessionnelleà effectuerest composéed’un

acte,d’uncontenuetdesconditionsderéalisation.Leschémasuivantdécritlarelation

entre une tâche professionnelle médicale (faire une infiltration sans provoquer

d’hématome,chezunadultesouffrantd’uneimpotencefonctionnelledouloureused’une

épaule–deuxtentativesautorisées)etunobjectifpédagogiquespécifique:

Unacte(verbed’action)

Uncontenu Desconditions Descritèresdeperformances

Capabled’effectuer Uneinfiltration Auniveauépaulechezunadulte

Pashématomes2tentatives

ß------------------Tâche professionnelle simple -----------------à

ß---------------------------- objectif pédagogique spécifique ----------------------------à

Figure 2 : rapport entre une tâche professionnelle et un objectif spécifique

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Unobjectifspécifiqueoupédagogiquecorresponddoncàunetâchesimpletellequ’ellea

étédécriteparTaylor,associéeàdescritèresdeperformancequipermettentd’évaluer

correctementl’apprenant.Ilpeutêtreencoreutiledeformaliseractuellementuntelob-

jectifpourapprendreungestetechniquemédical.Cependant,l’étudiantenmédecineou

le médecin ne pourra pas être considéré comme un praticien ayant une compétence

uniquement sur le plan du savoir-faire que s’il a pu réaliser correctement un certain

nombredecesinfiltrationsauniveaudecettearticulation.Lesobjectifsspécifiquesin-

diquent la conception, les moyens et les évaluations des séquences d'apprentissage.

C'est leniveaude l'apprentissageproprementdit.Ce typed’objectifdoit être formulé,

selonMager,demanièreprécisepourpermettreuneévaluationsansambiguïtépardes

évaluateursdifférents.PierreGillet(1992,p65),reprenantlesproposdeDeLandshere

(1975)surladéfinitiondel’objectifprécis,écriten1991:

«Sijeveuxobtenirtelcomportementd'étudiant,ilfautquej'engagetelleactiond'enseignement,mettantenœuvretellestratégiedeprésentation,telsmoyens...etlaréalisationducomportementattendufournitnonseulementl'évaluationdelamaîtriseparl'étudiant,maisaussilastratégieduformateur».

Cemodèlepédagogiqueaétéadoptéparlesinstitutionsscolairesetuniversitairesàpar-

tirdesannées1950surlecontinentnord-américain.Lesenseignantsdedifférentspays

européens se sont approprié ce paradigme bien plus tard, au début des années1970.

Cependant,pourunbonnombred’enseignants,cetteréflexionsurlecurriculumn’était

pas toujours compriseet acceptée.Certains ignoraient sciemment lesdirectivesoune

désiraient pas utiliser les techniques permettant d'élaborer des objectifs de façon ra-

tionnelleetsystématique.Poureux,c’étaitunepertedetempsetilsétaientpeuenclinsà

consacrer le temps nécessaire à cette tâche. Il était plus facile d’organiser les pro-

grammes d'études et les contenus des cours à réaliser. Ces enseignants suivaient à la

lettrel’adagesuivant:«debonsétudiantsguidéspardebonsprofesseursdeviendront

debonsmédecins».

LeslimitesetlesremisesenquestiondelapédagogieparobjectifsSavoir élaborerdesobjectifspédagogiquesétaitunbonmoyende sedégagerde l’axe

alorsprégnantdansl’enseignement:enseignant-savoirs.Lesenseignementsn’étaient

plus centrés sur les contenus,mais sur les apprenants.Ainsi, expliciter les buts d’une

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formationproposéeavaitpourfinalitédefaciliterl’adhésiondesapprenantsauxconte-

nusetauxobjectifsdecetteformation.Danscetteoptiqued’apprentissage,seulecomp-

taitlaréalisationcorrectedesobjectifsproposésauxapprenants.Parlasuite,ilserare-

prochéàMagerd’avoirnonseulementdiviséàoutrancelescontenusenpetitesunités

qui ne généraient qu’un faible investissement intellectuel de la part des apprenants;

mais d’avoir eu également une vision uniquement comportementaliste et rationnelle,

oubliantlesvaleurshumainesetsocialesquidevraientaccompagnertoutapprentissage.

D’autrescritiquespeuventêtresignifiées.Ilestencoreretrouvétropsouventdesinco-

hérencesauniveaudelaformulationetdel’évaluationdesobjectifs.Touslesobjectifs

nesontpascorrectementetclairementformulés.(SelonJ-J.Guilbert,«quandilyamau-

vaise formulationdesobjectifs, c’estplus la fautedes formulateursquedesbasescon-

ceptuellesdelaPPO31»).Lasimpleformulationdesobjectifspédagogiquesnegarantit

pas leurpertinence.Nonseulement, la formulationdoitêtrepréciseetpertinente,mais

elledoitêtrecohérenteavec ledérouléde l’apprentissage,notammentaupassagepro-

gressifàdesniveauxsupérieurs.Outrecettemauvaiseformulationpossibledesobjectifs,

ilyaleproblèmedescritèresdejugementsquinesontpastoujoursadaptésauxappre-

nants.

Ladémarched’apprentissagedanslaPPOestlinéaire:elleconsisteàvérifiersilecom-

portement attenduest atteint selondes critèresdeperformances imposés. Lorsque la

procédured'exécutiondécriteci-dessusestaltérée,lecycledel'évaluationdevrait,selon

Tyler,êtrerépétéenintégrantlesmodificationsnécessaires,autantdefoisquecelaest

nécessaire.Généralement,cetteconceptionestnégligéeparlesévaluateursquiontten-

danceàjugerlesactivitésdel’apprenantsansremettreencauseleprogrammed’étude

régissant l’activité évaluée.Unedémarche cyclique serait plus intéressante: pour une

mêmetâcheprofessionnelleàréaliser, leresponsablede l’apprentissagepeutmodifier

lescritèresdeperformancesenfonctiondesconnaissancesetdespossibilitésdechaque

apprenant.Danscecas,l’évaluationdelaséquenced’apprentissagen’auraitpluslesca-

ractèresdejugementnécessairesdefiabilité,devalidité,dereproductibilitéetdeperti-

nence.

31GUILBERTJean-Jacques:notederelecture(2013).Cemédecins’estproposéspontanémentàmedonnerdesinfor-mationssurcetravailderecherche.

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Laformulationdesobjectifspédagogiquesgénéraux,souventambiguë,peuclaireetsu-

jetteà interprétation,étaitaxéesur lerendement:cesobjectifsétaientcommunément

destinésàévaluer lescapacitésdesapprenantsàmémoriseruniquementdesconnais-

sances.L’évaluationproposéedanslaPPOestplusauservicedelasélection(capableou

non de réussir) que de l’apprentissage proprement dit. Cronbach et Meehl (1955)

avaientposé leproblèmede lavaliditédes testsd'évaluation.L’évaluationnedoitpas

être un concept vague d’inférences inductives de jugements, basées sur l’observation

d’unesériedecomportementsetdeperformances:lavaliditéd’untestd’évaluationne

doitpasêtreconfondueavecunespéculationsurlesfacteursayantprovoquélecompor-

tementobservéàl’issuedelaséquencepédagogique.

1.1.2.Lespropositionspourallerau-delàdeslimitesdelaPPO La pédagogie par objectif devait transformer l’apprentissage par contenus, destiné à

transmettre uniquement des savoirs. Dans ce modèle d’apprentissage, la pratique de

l’évaluationestplusintéressante,carellenebaseplussurlaseulemémorisationdesa-

voirs censés être appris. Cependant, laméthode consistant à observer un échantillon

d’objectifs opérationnels n’est pas toujours fiable et pertinente. Ce sont les difficultés

liées à l’évaluation des apprenants qui a amené les pédagogues comportementalistes

(notammentHildaTaba32,1962)àproposerdessolutionspouraméliorerlapertinence,

lavaliditéetlafiabilitédel’évaluationdesapprentissages.Deuxsolutionsontétéainsi

proposéespouraméliorer lemodèled’apprentissagepar laPPO: lestaxonomies(pro-

posées dans le but de hiérarchiser l’évaluation des différents savoirs), et l’évaluation

formative(afind’assurerunsuivipersonnalisédesapprenants).

Lestaxonomies

En constatant des limites sérieuses dans le paradigme de la PPO, les enseignants en

science de l’éducation en Amérique du Nord ont été amenés à réfléchir sur d’autres

modesd’apprentissage,sanstoutefoisabandonnerlemodèlecomportementaliste.C'est

encorepardesréflexionssurlesprocessusd’évaluationquedenouvellessolutionsont 32TABAHilda(1962).Curriculumdevelopment,theoryandpractice–DiscipledeRalphTyler,cetteauteureanotam-ment défini les critères des contenus d'une action de formation: validité, pertinence, intérêt, utilité, applicabilité,exactitudeetpraticabilité.

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puêtreproposées.DiscipledeRalphTyleràl’UniversitédeChicagodansledépartement

dessciencesd’éducation,BenjaminBloom,audébutdesannées1950,avaitétéconfron-

té à ladiversitédesquestionsd’examen.Certainesde cesquestionsportaient surdes

activitésintellectuellessimples(mémorisationdeconnaissances),d’autresfaisaientap-

pel à des niveaux d’analyse ou de synthèse (activités intellectuelles complexes). Cette

réflexionavaitamenéBloomàproposertroisaxes:

1 -Améliorer l’évaluationendéfinissantdes limitesà l’interprétationdesvaleursdon-

néesauxnotes:ilfauttoujoursreplacerlesstatistiquesdansleurcontexte.Lafinalitéde

l’enseignementn’estpasdecomparerlesrésultatsdesapprenants,maisd’aidercesder-

niersàatteindrelesobjectifsproposéspourlaséquenced’apprentissage.

«Lamanièredontchacuninterprèteunensembledechiffresdépendnonseulementdesmesureselles-mêmes,maiségalementdescaractéristiquesdelasituationdanslaquelleellesontétéprises»(Bloom,citéparEisner,2000).

2-Proposerl’opérationnalisationdesobjectifsdel’éducation,c’est-à-direconcevoirun

certainnombredecritèresdestinésàclasserlesobjectifsdel’éducationenfonctionde

leurcomplexitécognitive.Ceprocessusrendplusfiablel’évaluationdestravauxdesap-

prenants.

3 - Créer une classification (taxonomie) des objectifs pédagogiques en trois domaines

d’activité.Ondistingueainsi(subdivisionuniquementdidactique)ledomainecognitif,le

domaineaffectifet ledomainepsychomoteur.À l’intérieurdechaquedomaine,classer

lesquestionsd’examenparniveaudedifficultés,c’est-à-direparhiérarchiedesniveaux

intellectuelssouhaités.Lestaxonomiessontéquivalentesàunconceptpyramidaloùles

objectifs de niveaux supérieurs ne peuvent être atteints seulement si les objectifs de

niveaux inférieursont été atteints.Avec cemodèledehiérarchisationdesobjectifsou

taxonomie, l’enseignantdisposederepèrespourencourager l'apprenantàfranchirces

différentsniveauxafind'acquérirundegrédequalificationélevée.Carlesinformations

nesontpastoutesdemêmevaleur;aussiletraitementsefaitàdifférentsniveaux,des

plussimplesauxpluscomplexes.

Cesniveauxontfaitl'objetdenombreusesrecherches,notammentendocimologie.Les

taxonomiesontalorspermisdepréciserlesniveauxdecestestsd'évaluationetlescir-

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constancesdeleurutilisation.Lespremierstravauxpourclassifierlesbutsetlesobjec-

tifs d'éducation ont débuté en 1948, sous l'égide d'un groupe d'enseignants réunis à

Boston lorsducongrèsde l'AmericanPsychologicalAssociation.Pourcesenseignants,

leschoixdes itemsd'examenshabituellementproposésnesontpasassezrigoureuxet

nepermettentpasuneévaluationfiable.Ilsontanalyséetclasséplusieurscentainesde

sujetsd'examensquiontétéexaminéesaveccesquatreinterrogations:

1.Qu'est-cequ'onattenddel'apprenant?(Quelssontlesbutsàatteindre?)

2.Quelapprentissagepeutêtreenvisagépouratteindrelesbutsproposés?

3.Àquelleaptitudeintellectuelleest-ilfaitappelpourchaquequestiond'examen

envisagée?

4. Comment mesurer l’efficacité de ce qui a été proposé pendant la séquence

d’apprentissage.

Lasynthèsedestravauxconcernantledomainecognitifaétéréaliséeen1956.Elleest

connuesousladénominationsuivante:"taxonomiedeBloom"outaxonomiedudomaine

cognitif.Ilexisteunehiérarchisationdesprocessusintellectuels:ilestpossibleainside

passerd'unniveausimple,mais fondamental (mémorisation)àdesniveauxpluscom-

plexes (analyse, synthèse et évaluation). Avec ce modèle de hiérarchisation, le péda-

goguedisposederepèrespourencouragerl'apprenantàfranchirlesdifférentsniveaux

hiérarchisésafind'acquérirundegrédequalificationélevée.Lataxonomiedesobjectifs

pédagogiquesdudomaineaffectifaétépubliéeplustardivementen1962sousladirec-

tiond'undiscipledeBloom,DavidKrathwohl.Enfin,plusieursauteurs,dontAnitaHar-

rowetElisabethSimpsonontproposédanslesannées1970destaxonomiesconcernant

lesobjectifspsychomoteurs.

Lataxonomiecognitivereposesurunerépartitiondesopérationscognitivesenniveaux

decomplexitécroissante.L’étudiantnepeutaccéderàunniveaudonnéques’ilestca-

pabled’exécuter les opérations correspondant auxniveaux inférieurs. Par exemple, la

capacitédesynthétiser(6eniveaudelataxonomie)n’estpossiblequesil’étudiantesten

mesurededétenirlesinformationsnécessaires,delescomprendre,delesappliqueret

delesanalyser.CommelesouligneEisner(2000),«cettetaxonomien’étaitdoncpasun

simple schémade classification. Elle constituait un effort visant à ordonnerhiérarchi-

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quementlesprocessuscognitifs».Lerôledestaxonomiesestd’améliorerlesprocessus

d’évaluationàchaqueniveau.

Ainsi, YvanAbernot (1994, p 238) a proposé des tests d’évaluation adaptés à chaque

niveaudelataxonomiedesobjectifscognitifs:

Niveaux : du simple au plus

complexe

TAXONOMIE DU DOMAINE COGNITIF

Évaluation Choix adapté des méthodes

d’évaluations en fonction des niveaux

SAVOIRS Niveau 1 ............... Q.C.M.33

COMPRÉHENSION Niveau 2 ................ QUESTION CLASSIQUE

APPLICATION Niveau 3 .................... EXERCICE

ANALYSE Niveau 4 .................... PROBLÈME

SYNTHÈSE Niveau 5 .................... SUJET DE SYNTHÈSE

ÉVALUATION Niveau 6

................. MÉMOIRE, DISSERTATION THÈSE, CRÉATION

Figure 3 : relations entre niveaux taxonomiques et dispositifs d'évaluation

Cetteclassificationhiérarchiséeclaireetexhaustiveestvouéeàpréparerefficacement

un programme d’enseignement ou de formation, par la définition d’objectifs pédago-

giques à partir des niveaux de base pour atteindre progressivement des niveaux plus

élevés.Avantlapublicationdecestaxonomies,lestransformationscognitivescomplexes

sontpeurecherchées,l’essentieldel’enseignementportaitsurtoutsurdessimplespro-

cessusdemémorisation.Cestaxonomiesontégalementpourbutdefaciliterlacommu-

nication des objectifs et des résultats entre les enseignants, grâce à l’utilisation d’une

grillecommunecomportantcesdifférentsniveauxd’évaluation.Certes,leconceptétait

intéressantsurleplanthéorique,maisl’appropriationparlesenseignantsaétédifficile.

Cesderniersontleplussouventformulédesobjectifspédagogiquesenseréférantaux

premiers niveaux de cette taxonomie, favorisant ainsi l’acquisition de connaissances

élémentaires.

33LesQCM(questionsàchoixmultiples)ontétéinventésauxUSAparJ.F.KELLYen1915.Ilsétaientproposéscommetestdecon-naissancesélémentairesafinderecrutermassivementdesouvriersparmilesimmigrantspourparticiperàl’effortdeguerredesUSA.CesMCQ(MultipleChoicesQuestions)ontétérapidementreniéesparl’auteurquijugeaitleurniveaucognitiftrèsfaible:“Thisisatestoflowerorderthinkingforthelowerorders.”.QUINTONAndré(2005).LesQuestionsàChoixMultiples(QCM):outilsd'investiga-tiondesconnaissancesetduraisonnement.

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L’évaluationformative

La taxonomiedeBloomavaitpourobjectifd’améliorer lesévaluationsdesapprenants

commedes enseignants. Cependant,même en utilisant correctement cette taxonomie,

les conditions d’apprentissage proposées alors limitaient les progrès d’acquisition de

savoirspournombred’apprenants. S’il est possibled’apprendre seul ou en groupe, le

processus d’acquisition et d’actualisations des savoirs est cependant propre à chaque

individu.L’apprentissagedoitêtrecentrésurl’apprenant.Certes,l’intelligenceetlamo-

tivationpeuventfaciliteretamenerlesapprenantsàsuivredesapprentissages.Bloom,

s’inspirant des travaux de Ralph Tyler, considérait que l’atteinte des objectifs prévus

dansleprogrammeàsuivrepar lesétudiantsétaitplus importantequeleursrésultats

auxexamens.Toutapprenantpeutatteindrelesobjectifsprévussil’enseignantluilaisse

suffisamment de temps et lui donne lesmoyens adéquats pour réussir. Car l’aptitude

d’apprendrevaried’unétudiantàl’autreetdépenddutempsconsacréàl’apprentissage.

C’estl’atteinteréussied’unniveaudemaîtrised’unapprentissagequiestleplusdéter-

minantpourunapprenantpourcontinueràapprendre.Pourcetteraison, l’évaluation

sommativenepeutêtred’aucuneaide.

C’estencoreuneinnovationpédagogiqueconcernantl’évaluation,quivaamenerBloom

etsescollèguesàproposerunenouvelleapproched’apprentissage,l’approcheparmaî-

trise. Cette innovation, c’est l’évaluation formative, concept formulé pour la première

foisparMichaelScriven,quiaintroduiten1967unedistinctioncapitaledansleconcept

del’évaluation.Cetauteuradifférenciél’évaluationformativedel’évaluationsommative.

Cettedernièreest toujoursutiliséepour faire lebilandecequiestacquisetdecequi

resteàapprendre.Scrivenaproposél’évaluationformativeenfonctiondel’objectifsui-

vant:concevoiretaméliorerlecontenud’unprogrammed’étudesoucurriculumaufur

etàmesuredesonsuivi.

«L’évaluation formative a pour objectif de donner des renseignements aux responsables d’unprogrammed’étudeafinde l’adapterdèsquebesoinpendant lesphasesdesondéveloppementpuislorsdesamiseenœuvre34.»(Scriven,1967).

34“Formativeevaluationaimsatprovidingdatathatpermitsuccessiveadaptationsofanewprogrammeduringthephasesofitsdevelopmentanditsimplementation”,[notretraduction]

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ScrivenaétéprobablementinspiréparlestravauxdeKennettCraiketdeNorbertWie-

ner.Dèslesannées1940, leprocessusd'apprentissagen’estplustotalementconsidéré

parcertainspédagoguescommeunmécanismepassifetinconscient.L'apprenantprend

connaissancedelarelationentrelestimulusetsaréponse,etpeutcontrôlerainsiplus

oumoinssoncomportement.Lesrecherchesdelanouvellegénérationdepenseurssur

l’éducationont reprisainsidespropositionsdeKennethCraik,psychologueaméricain

(Craick,1967,p.61)quiaffirmaitquelamachineetlapersonnequil'utiliseformentun

systèmedecontrôleinteractif.

«Si l’organisme se réfère dans son cerveau à unmodèle réduit de la réalité externe et de sespropres possibilités d’actions, il est capable de sélectionner diverses alternatives possibles, dechoisirlameilleured’entreelles,deprévoiruneréponseadaptéelorsquedenouvellessituationssurgissent, d’utiliser les connaissances des événements passés pour faire face au présent et àl'avenir,etdans tous lescaspourréagirpleinementetsûrementà toutesituation imprévue.Laplupartdesgrandesavancéesdansledomainedesnouvellestechnologiesontportésurdesins-trumentsdestinésàétendrelechampdenosorganessensoriels,denotrefonctionnementcéré-braletdenosmembres35».

MaiscesontsurtoutlestravauxdeNorbertWiener(1948,1950)surlarétroactionou

cybernétique (du grec Kubernêsis: diriger, gouverner) qui sont à l'origine de cette

transformationdes théoriesdu comportement. C'est le conceptde feed-back informa-

tionnelquiassocie«lesconceptsdeboitenoire(uncomportementdansunenvironne-

ment)etde feed-back intentionnel(uncomportementparrapportàunefinalité),puis

desous-systèmesdecommandefinalisés(controlsystem)36».

Lemodèlebéhavioristeayantmontrédenombreusesinsuffisancesdansl’étudedespro-

cessus d’apprentissage, la disparition de ce paradigmequi a été prégnant pendant de

longuesannéesaétéprogramméedèslaparutiondenombreuxtravauxsurlesappren-

tissages dérivés des sciences cognitives. Ces travaux ont d’abord été adoptés par les

communautés scientifiquespuisbienplus tardensuitepardenombreuxresponsables

del’éducation.Lecognitivismeconsidèrequelaresponsabilitédel’enseignantestenga-

géedansunautreprocessusd’apprentissagequeceluidesimpletransmetteurdecon-

naissances.Ilaidel’apprenantàacquérirdesconnaissances.Plusieursthéories,notam- 35Ladernièrephrasedecetextraitn’estpratiquementjamaiscitéedanslesdifférentespublicationsquenousavonsconsul-tées.Pourtant,elledonnetoutsonsensàlapropositiondeCraik.“Iftheorganismcarriesa‘small-scalemodel’ofexternalreali-tyandofitsownpossibleactionswithinitshead,itisabletotryoutvariousalternatives,concludewhichisthebestofthem,reacttofuturesituationsbeforetheyarise,utilisetheknowledgeofpasteventsindealingwhichthepresentandfuture,andineverywaytoreactinamuchfuller,safer,andmorecompetentmannertotheemergencieswhichfaceit.Mostofthegreatestadvancesofmoderntechnologyhavebeeninstrumentswhichextendedthescopeofoursense-organs,ourbrainsorourlimbs”,[notretraduction]36LADRIEREJean(Louvain):Articlesurlasciencedessystèmesin«EncyclopaediaUniversalis»1998.

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mentleconstructivisme,lesocioconstructivisme,lathéoriedel’activité,letraitementde

l’information,lathéoriepsychosocialedel’apprentissagesontdérivésducognitivisme.

1.1.3.Quelavenirpourlathéoried’apprentissageparobjectifs(PPO)?LaPPOarévolutionnélespratiquesd’enseignementenorientant lesprocessusdefor-

mation sur l’apprenant. Fortement inspirée du behaviorisme, la PPO avait défini

l’apprentissageenfonctiondecomportementsobservablesetmesurables.Maiscepara-

digmepédagogique,malgré l’apportdes taxonomiesetde l’évaluation formative,a ce-

pendantmontrérapidementseslimites.Carl’apprentissagecomportementalisteestune

approche transmissive, passive, principalement orientée et contrôlée par l’enseignant.

C’est la transmissiondes connaissancespar celui qui connaît à celui qui ignore. Selon

Louis Not (1987, pp. 14 - 15), les informations transmisesdoivent être valides : si

l’apprenant ne sait pas ce qu’il doit apprendre, cela peut conduire à une impasse.

L’enseignantestcensétransmettredesinformationssûres,vérifiéesdepuis longtemps.

Cependant,enmédecine,cedogmenedevraitsurtoutpasêtreprisencompte,cardes

donnéesreconnuescertainesàunmomentdonné,peuventêtrerapidementremisesen

questionparlasuite;selonKarlPopper37,unénoncépeutêtretoujoursréfutable.

LaPPOauraitpermiségalementdegagnerdu temps : laisser l’initiativeà l’apprenant

pourrechercherl’informationpartâtonnementpeutêtreutile,maisprendbeaucoupde

temps. Les coursmagistraux sont proposés après un long cheminement de la pensée

humaine;enuneheure,uncoursapportelesnotionsindispensablesquedoitconnaître

toutapprenantdansunedisciplinedonnée.Maiscetteapprochecomportementalisteest

insatisfaisante : il n’est pas possible transmettre des savoirs comme on transvase un

contenud’unrécipientàunautre.Descontenussimplesdécoupésenpetitesunités,ré-

pétés,maisrarementassociés,onttendanceàeffacerlesrepèresgénérauxetenfermer

l’apprenant dans des situations insuffisamment complexes, dépouillées d’obstacles et

tropraresdans laviecourante.Cetteconceptionpédagogiqueaétécertainementutile

pourrecentrerl’enseignementsurlesenseignés.Maisfractionneruneséancedeforma-

tion ou d’apprentissage en objectif simple à atteindre ne permet pas de savoir si

37POPPERKarl(1973).Lalogiquedeladécouvertescientifique.

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l’apprenantseracompétentàlafindelaséquence.MêmesiBhurrusSkinner(1953),un

despluscélèbrespédagoguescomportementalistes,s’estprononcésurcesujetainsi38:

«Toutleprocessuspouracquérirlacompétencedansundomainedonnédoitêtrediviséenuntrèsgrandnombredepastrèspetits,etlerenforcementdoitdécoulerdel’accomplissementdechaquepas.Enrendantchaquepassuccessifaussipetitquepossible,onaugmentelafréquencederenfor-cementàsonmaximum,tandisque leséventuellesconséquencesadversesdécoulantdufaitdesetrompersontréduitesauminimum.»

Lesavoirn’estpasunsaucissonquel’ondécoupeentranchesfines:«vouspouvezran-

gersoigneusementtouteslestrancheslesunesàcôtédesautres,dansl’ordre,vousne

reconstituerezjamaislesaucissond’origine»(AnnieDiMartinoetAnne-MarieSanchez,

2011, p. 18). Ce découpage artificiel fait perdre une grande partie de son sens à

l’apprentissage; une véritable évaluation des capacités d’un individu à résoudre des

tâches complexes ne peut pas se résumer à une approche binairequi caractérise

l’objectif: atteinteounonde l’objectif. LaPPOest une «usine à cases39» qui confond

performance avec compétence: l’évaluation porte essentiellement sur les résultats et

nonsurleprocessusintellectuelquiamènentlesapprenantsàcetteconclusion.Lafonc-

tiondetransfertdecettedémarcheintellectuelleversd’autressituations,dansd’autres

contextes,esttotalementignorée.

PierreGillet(1997,p.130)faitdeuxconstatsàproposdelapédagogieparobjectifs:1.

l’enseignantpeutproposerdes"pseudoobjectifs"enajoutantàdessimplescontenusde

programmedes"êtrecapablesde",sansmodifiersesméthodesd’enseignementsacadé-

miques;2.iln’ajamaisétépossibledegarantirl’exécutioncorrected’unetâcheparad-

dition de comportements acquis isolément.Pierre Gillet (1991, p. 27) rapporte cette

phrasedeNinaTalyzina40(1968):

« La définition des objectifs qui décrit seulement le produit final, le résultat extérieur que doitfournirl'élève,nerévèlepaslestransformationsqu'opèrel'activitépsychiqueimpliquée41».

38SKINNER,B.F.(1953).ScienceandHumanBehavior,MacMillanCo(NewYork),p.153traduitparLEBRUNMarcel,courantspédagogiquesdel’éducation.Disponiblesur:http://www.european-mediaculture.org/fileadmin/bibliothek/francais/lebrun_courants/lebrun_courants.pdf 39DiMARTINOA.,SANCHEZA-M.(2011)p.20.40Voirchapitresurlathéoriedel’activité41Traduction très “libre”de laconclusionde l’articledeTALYZINAparuen1968 :«Thisgivesusreason tobelievethatthecourseofassimilationtypicaloftheusuallearning,processdoesnotreflecttheinternallogicoftheprocessofassimilation,andisevenlesscapableofservingasindicatorofintellectualdevelopmentasawhole».

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Enfin, l’évaluation telle qu’elle est pratiquée dans la PPO n’est possible que sur

l’acquisitiondesimplessavoirsousurlaréalisationd’habilitéssimples,enaucuncassur

destâchescomplexes.Lepartagedessavoirs(taxonomies)entroisdomaines(connais-

sances, attitudes, capacités) a permis certes de mieux cerner les difficultés de

l’évaluation, notamment dans la mesure des progrès de l’apprenant. Mais ce partage

isolechaquedomaine,amplifiantunphénomènededéconnexionquin’estpasadaptéà

l’apprentissagedesituationscomplexes.Lapertedesensparlemorcellementdescon-

tenus, un travail mâché transformant l’apprenant à un rôle de simple exécutant de

tâchessimples,nouspermettentdecomprendrelesproposdeJeanPiagetdanssonépis-

témologiegénétique:«l’organisationde lapenséeet la structurationdusavoirprocè-

dentfondamentalementdel’activitédusujet»(Not,1987,p.16).Bloometsescollabo-

rateursontproposéd’améliorer laPPOavec les taxonomies et l’approcheparmaîtrise

(APM) : il faut laisserdu temps etdonnerdesmoyens adéquats aux apprenantspour

qu’ils maîtrisent correctement les savoirs à retenir. Et pendant leur séquence

d’apprentissage,lesapprenantsdoiventconnaîtreleursprogressionsetleursmanques,

grâce à l’évaluation formative. Il devenait nécessaire de quitter ce paradigme de

l’apprentissageparobjectifsquin’étaitpascapablederépondreauxattentesdesensei-

gnantsetdesapprenants.CarlaPPOesttropcentréesurlamorcellisationdescontenus

etl’accumulationdesconnaissances;ellefavorisedavantagelescapacitésdebasniveau

intellectuel (mémorisation,définition,exécution)auxdépensd’habiletés intellectuelles

dehautniveau(résolutiondeproblème,argumentation,analysecritique,etc.).Enfin,la

PPOestaxéeessentiellementsur l’évaluationd’acquisitionssimples,négligeant totale-

mentlesprocessusd’apprentissagecomplexesetleursévaluations.

1.1.4.Lapédagogieparobjectifdanslaperspectivedel’apprentissagedumétierdemédecin

RappelhistoriquedelaformationmédicaleauxU.S.A. LaformationmédicaleinitialeL’enseignementdessciencesmédicalesavaitintégréuneapprochedeplusenplusscien-

tifiquedanslaplupartdespaysoccidentaux.Cen’étaitpaslecasaudébutduvingtième

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siècle,auxUSA,oùlasituationn’étaitguèrebrillante.Jusqu’en1847,datedelacréation

de l’American Medical Association (AMA), les enseignements théoriques et pratiques

proposésdanslesécolesdemédecineétaienttrèssuccinctsetincomplets.L’AMAapro-

posédès1847unepremièrestandardisationdesdiplômesdedocteurenmédecine.Les

premières recommandations pour lesmatières à enseigner dans ces écoles deméde-

cinesdatentde1904(ElisabethChamorand,1996).Maislesécolesdemédecinetardent

àmettreenapplicationcesrecommandations.

AbrahamFlexner,aprèsavoirétudié lesproblèmes liésà l’éducationmédicaleà lade-

mandedelaFondationCarnegiepourlarechercheéducative,arédigéunrapportintitu-

lé:éducationmédicaleauxUSAetauCanada.Dansce rapportpubliéen1910,Flexner

avait comparé les enseignements prodigués auRoyaume-Uni, en France et surtout en

Allemagne par rapport à ce qui était réalisé aux U.S.A. Il constate un net échec aux

USAoù laquasi-totalitédes écolesdemédecine américaines était très loind'être con-

formeauxnormesscientifiquesdesuniversitésmédicaleseuropéennes(Flexner,1910,p

XI):«Ces vingt-cinq dernières années, les collèges et les universités américains n’ont pas pris enmarcheletraindelamodernité;avecpourconséquenceunretardimportantdansledomainedel’enseignementmédical etdans laprise en comptede l’investissement financiernécessaire à lamodernisationdesinstitutions.Denombreusesuniversitésdésireusesd’offrirunepaletteexhaus-tiveetlargedediversesdisciplinesontannexésimplementdesécolesmédicalessansleurappor-terlesmoyenspourévolueretsedévelopper.Cesécolesmédicales,leplussouventpeuefficacesetinadaptéesàl’offredesoins,ouvertesauxétudiantsnedisposantquepeuderevenus,étaientlesparentspauvresdesUniversités42».

Ce rapport a fait prendre conscience aux autorités éducatives gouvernementales des

États Unis, de la nécessité de prendre en compte toutes les nouvelles connaissances

scientifiques en les intégrant aux programmes des facultés médicales. C’est l’acte de

naissancedumodèlebiomédical,delamédecinemoderne.Parlasuite,cemodèlescien-

tifiqueaétédeplusenplusprégnantdans lesprogrammesd’étudesenmédecine,ou-

bliantl’êtrehumainmaladeauseulprofitdel’étudeetlapriseenchargedesmaladies43.

42“Collegesanduniversitieshaveinlargemeasurefailedinthepasttwenty-fiveyearstoappreciatethegreatadvanceinmedicaleducationandtheincreasedcostofteachingitalongmodemlines.Manyuniversitiesdesirousofapparenteducationalcompletenesshaveannexedmedicalschoolswithoutmakingthemselvesresponsibleeitherforthestand-ards of the professional schools or for their support. The existence ofmany of these unnecessary and inadequatemedicalschoolshasbeendefendedbytheargumentthatapoormedicalschoolisjustifiedintheinterestofthepoorboy”,[notretraduction].43GeorgeLibmanEngelproposaen1977sonmodèlebiopsychosocial.C’estuneapprocheholistiquequitientcomptedes facteurspsychologiques, sociauxetbiologiquesdespathologies.Cetteapproche,quiprenddu temps lorsd’une

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Il va être le paradigme dominant de la médecine moderne pendant près d’un siècle.

Abraham Flexner a proposé non seulement d’introduire l’étude des sciences dans les

programmesd’étudesmédicales,maisaussid’associerleshôpitauxàl’éducationmédi-

cale. Cette décision d'agréger l’enseignement dispensé dans les Facultés demédecine

avec les soins prodigués dans les hôpitaux sera reprise près de 50 ans plus tard en

France(cf.infra).

«Leshôpitauxprivésetpublicsproposantunenseignementdehautniveauscientifiqueauxétu-diantsenmédecinedoiventêtreétroitementassociésauxFacultésdeMédecineafind’assureruneformationd’excellence. L’administrationdesUniversitésdoit exiger cetteouvertureà conditiondefournir lesfondsnécessairespourengagerdesenseignantscliniciensdequalité44».(Flexner,1910,p.XI).

Cetteapprochepédagogiqueaxéesurledomaineexclusivementbiomédicalétaitnéces-

saire au début du vingtième siècle. Malheureusement, elle n’évoluera plus guère aux

U.S.A. et fera l’objet des premières critiques dans les années 1950, notamment par

George Edward Miller. Ce médecin a été nommé professeur associé de médecine en

1954à l’universitédeBuffalodans l’ÉtatdeNewYork.Docteurenmédecineaudébut

desannées50,ilaéténommédansunservicedemédecineinterneàl’hôpitalgénéralde

Buffalo.Ilapubliéouaparticipéàlarédactiondenombreuxarticlesmédicaux.George

Millerquiavaitétéforméàl’exercicemédical,s’intéressaitàlarechercheenmédecine,

maisressentaitunmanquedecompétencepourlapédagogie.Ilauraitpupenserceci:ce

n’est pas simple d’enseigner, encore faut-il savoir ce qu’il faut enseigner! Pourquoi cet

empilementdeconnaissancesàapprendre leplussouventparcœurpour lesrestituer

auxexamens?Ilestvrai,lesprogrammesd’étudesproposésauxétudiantsétaientrare-

mentremisenquestion.Lesenseignantssont frileuxauxchangements.Assurément, il

étaitunjeuneprofesseuretn’avaitpasl’expériencedesesmaîtres.

Ilfallaittrouverunesolution,etGeorgeMillersavaitqu’ilseraitdifficiledeproposerdes

modifications des programmes à ses collègues médecins. Au centre de recherche en

éducation,aucoursderencontreshabituellesavecdesenseignantsd’autrescollègesde

l’Université, ila faitpartdesesdoutessur lescontenuset lesméthodespédagogiques

utiliséesenmédecineàunenseignantenpédagogie,StephenAbrahamson.Cedernier, consultation,estbaséesurunepriseenchargepluridisciplinaire.44“Trustees of hospitals, public and private, should therefore go to the limit of their authority in opening hospitalwardstoteaching,providedonlythattheuniversitiessecuresufficientfundsontheirsidetoemployasteachersmenwhoaredevotedtoclinicalscience”,[notretraduction].

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professeur associé de sciences de l’éducation et directeur du centre de recherche en

éducationl’ainvitéàprolongerladiscussiondansseslocaux.Millerluiafaitpartdeses

interrogations45:(JAMA-JournalAmericanMedicalAssociation,1956)

• Pourquoilesétudiantsenmédecinedoivent-ilsassimilerautantdeconnaissances?• Toutes ces connaissances sont-elles réellement utiles pour soigner nos patients? Ilme semble

qu’onlesengraissecommelesoiespourenfairedupâtédefoiegras46.• Quelle est la validité de ces connaissances enseignéespour former des professionnels de santé

conformesauxbesoinsdesanté?• PourquoilaFacultéprivilégieautantlesconnaissances,biendavantagequelesaptitudes,lesatti-

tudesetlessavoirsagir?• Pourquoilesmédecinsquienseignentsont-ilssimalpréparésàleurrôled’enseignant?• Pourquoi la plupart des enseignements qui ont lieu en amphithéâtre sont-ils menés par

de”grands”professeursalorsquede”simpleschargésdecours”,moinsbienforméssurleplanpé-dagogique,dirigent les raresenseignementspratiquesetpourtantutiles,qui sontproposésauxétudiants?

• Pourquoil’enseignementenpetitgroupeest-ilplusperformantqu’engrandgroupe,avecdemeil-leuresévaluationsenfindeséquenced’apprentissage?

• Pourquoilessystèmesd’évaluationmisenplacedepuisdesdécenniessont-ilsbasésuniquementsurlecontrôledesconnaissancesàmémoriser?

GeorgeMilleravaitfaitpartàStephenAbrahamsondesessuggestions:

«Enmédecine,noussommeshabituésàfaireappelauxspécialistes;lespersonnesspécialistesenpédagogie pourraient être utiles pour nous aider à résoudre nos problèmes d’éducationmédi-cale»47(Abrahamson,2003,p378).

StephenAbrahamsonaacceptédel’aider,maisiln’avaitaucuneidéedestechniquespé-

dagogiquesutilisées enFacultédeMédecine.À la demandedeGeorgeMiller, Stephen

Abrahamsonaobservé laplupartdesenseignementsréalisésà laFacultéà l’exception

decequiaétéréaliséensalled'anatomieetensalled'opération.Pendantsixmois,cet

enseignant a questionné des étudiants et des enseignants; il a assisté également aux

nombreusesréunionspédagogiquesentreenseignants. IlapuenfindireàGeorgeMil-

ler : «Ithinkwecanbeofhelp » (Abrahamson,2003,p378).Sous ladirectiondeSte-

phenAbrahamsonetGeorgeMiller,ungroupederéflexionestalorscréé,comprenant

quatreenseignantsdemédecine :HaroldPGraser, IraCohen,PhillipsWelsetunétu-

diant en fin d’études demédecine: Hilliard Jason. Ce groupe est également composé

45CequestionnaireestuncondenséderéflexionspubliéesdansplusieursarticlesdeGeorgeEMiller(1956,1963)46 Cette phrase est attribuée à Jay TEPPERMAN, professeur demédecine expérimentale, dans le département depharmacologiedel’UniversitédeSyracuse(ÉtatdeNewYork),auteurd’unlivre«Physiologieendocrineetmétabo-lique»traduitetéditéenFranceparl’éditeurMasson.47“Inmedicine,weareaccustomedtousingspecialists;perhapsyoupeopleineducationcanbeofhelpwithourprob-lemsinmedicaleducation”,[notretraduction].

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d’enseignants en science de l’éducation:Robert Harnack, Nathaniel Cantor et Adelle

LandquiremplaçaCantordécédéfin1958.Uneannéeaéténécessairepourobtenirla

synthèsesuivante:(MillerG.E.JAMA,1956)

• Lesprofesseurspeuventêtreeux-mêmesdesobstaclesauxétudesmédicales:cen’estpasparce

qu’onestunbonchercheurquel’onseraunpédagoguedequalité.Onagitcommesiunenseignantnommésurlabasedesescompétencesscientifiquesetpro-fessionnelles était automatiquement un bon éducateur qui peut communiquer sans pro-blèmeavecautrui.

• Lesétudiantsapprennentcequ’ilsveulentapprendre,etdoncmémorisentcequ’ilsveulentmé-

moriser.Ceconstatpeutsoulagerl’enseignantsursesresponsabilitésconcernantl’acquisitiondessavoirs;maisn’est-cepaslerôledel’enseignantdefaireacquériràl’étudiantdessavoirsindis-pensablesàsonfuturexerciceprofessionnel?

• Laloidel’inerties’appliqueégalementàl’enseignementuniversitaire.Lesenseignantsdéfendent

leursproprespositionssurl’éducation.Ilssontparticulièrementrésistantsàtoutenouvellemé-thodeéducative.

• Lescorpsprofessorauxdesdifférentesuniversitésencouragenttropsouvent l’accumulationdesinformations dans le but d’évaluer ces acquisitions par des examens. L’apprentissage n’est passeulementunprocessusintellectuel,maiségalementuneexpérienceémotive:

«Cequenoussommescensésreteniraprèsuneheured’enseignementdisparaîtgénéra-lementaucoursde lanuit suivante.Cequenousmémorisons, c’est cequiéveillenotrecuriosité,oubieninciteàunaccordouundésaccord.Etcelaestdifférentd’unindividuàl’autre,carleprocessusd’apprentissageesttotalementpersonnel48»(Miller,1956).

Cetteannée-là,GeorgeMilleravaitsoutenul’hypothèsesuivanteauDoyendesaFaculté:

l’enseignementeffectuédansuneécoledemédecinepourraitêtreclairementamélioré

s’ilétaitpermisauxenseignantsmédecinsd’avoirunemeilleureconnaissancedesprin-

cipesfondamentauxdel’apprentissagedel’exercicemédical.GrâceausoutienduDoyen

Robert Fisk, le groupe deMiller a pu disposer d’une subvention provenant des fonds

communautairesdel’ÉtatdeNewYorkpouruneduréedetroisans.Chaqueréuniona

été animée par un binôme comprenant un médecin et un enseignant en sciences de

l’éducation.Ainsi,commelesouligneAbrahamson(2003,p379),«nousdisposionsdes

usages et de l’expertise des enseignants, associées à l’expérience et le savoir-faire du

mondedelaformationmédicale49».Dèsquelesfondspourlarechercheontétélibérés,

Milleretsonéquipeontessayéderépondreàcesdeuxinterrogations:quepeuventap-

porterlesprofessionnelsdel’éducationauxenseignantsdemédecine?Cetteinteraction 48Ils’agitd’unrésumédespropositionsdeG.E.MillerpubliédanslarevueJAMAen1956.49“Wehadthedepthandexpertiseoftheeducationpeopleandtheexperienceandcultureofthemedicaleducationworld”,[notretraduction].

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monde éducatif –mondemédical peut-elle réellement améliorer les compétences des

médecinsnouvellementformés?Lestravauxdugroupeontdurétroisansetontdébuté

enseptembre1956sousformederencontreshebdomadaires.

Entre1957et1959,Milleretsonéquipeontinvitélorsdeséminairesannuels,desen-

seignantsenmédecineetenéducation.Lesdiscussionssontparfoisardues,lesautorités

administrativeset lesresponsablesde l’enseignementnesontpastoujoursconvaincus

desbienfaitsdeschangementsproposés.Ilseraitbonquecesexpériencessoientgénéra-

lisées, souhaitaitMiller en 1956. L’enthousiasme de l’équipe déclina hélas au bout de

deuxans,etMillerlequalifiedemoribondtroisansaprès(Miller,1980,p.77).L’avenir

prouvahélasl’importancedesoppositionsauchangement.Carlesrésistancesdesauto-

ritésuniversitairesàmodifierlesprogrammesetleurscontenus,ainsiquecelleducorps

professoral sont fortes. Lorsque Miller quitta l’université de Buffalo pour celle de

l’IllinoisàChicagoen1959,ilditlui-mêmedansuntextepubliéparl’OMS(Miller&Fu-

lop,1975b):

« Malgré l'influence exercée par les premiers travaux de ce groupe embryonnaire, ces effortsd'avant-gardenedevaientguèrelaisserdetracedansl'établissementlorsquelesprincipauxini-tiateurspartirentpourallertravaillerailleurs».

Etprèsde20ansaprès cetappelpour l’applicationdenouvelles règlespédagogiques

danslesétudesmédicales,Millerconstatequelarechercheetledéveloppementdansle

domainedel’enseignementmédicalsontencoretropsouventnégligés.Cetauteursou-

lignecettedualité:

«D'uncôté,ontriompheparcequedeshommesontréussilagreffed'organesrécemmentencoreirremplaçables ; de l'autre, il faut avouerque lesméthodesd'enseignement les plus employéesn'ont guère changédepuis deux siècles, endépit d'un arsenal croissant de stratégies et de tac-tiquespédagogiques».

Pour les autorités universitaires, la formation professionnelle est essentiellement une

affaired'enseignement.Maiscechoixdemodèlepédagogiqueestimparfait:leplusim-

portantest letempsconsacréà l’apprentissage. (Miller,1974a,p.10).Lestravauxde

GeorgeMiller etde sonéquipeont séduitd’autres enseignantsdesFacultésdeméde-

cine,américainescommecanadiennes.Pourcetteraison,unpremierséminaireréunis-

santenviron30enseignantsestorganiséavecl’aided’EdwinF.Rosinskidèsl’été1958.

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Rosinskiaétélecréateurdupremiercentrederechercheenpédagogiemédicale,situéà

Richmond(Va)au‘MedicalCollegeofVirginia’etdontlerôlen’apasétéassezreconnu.

Desséminairesdecetypesurdesréflexions,portantsurlapédagogiedanslesétablis-

sements formant les futursmédecins, ont été proposés les années suivantes avec un

grand succès (155 participants représentant 56 facultés de médecine en 1961). Fin

1959,alorsqueSteveAbrahamsoncréeuncentrederechercheenpédagogiemédicaleà

l’University of Southern California (USC), George Miller a aussi conçu le sien à

l’Universitéd’IllinoisàChicago(ULC).L’ULCnedoitpasêtreconfondueavecuneautre

UniversitésituéeenIllinois,maisprivée,appeléeUniversitédeChicago,célèbreparson

départementdesciencesdel’éducation.Cedernieraétédirigéentre1938et1953par

RalphTyler50,discipledeWerrettCharters51. Lespersonnalitésquiontparticipéàces

différentes réunionspédagogiquesontdéfini ainsi le rôled’uncentrede rechercheen

pédagogiemédicale: identifier tous les problèmes liés à l’apprentissageen Faculté de

médecine. Toute réflexion sur l’apprentissage sous-tend les trois interrogations sui-

vantes:

«Quedoitfairelecorpsenseignant?Commentdoit-ils'yprendre?Commentpeut-ilvérifierqu'ils'estbienacquittédesatâche?Lapremièrecatégorieconcernelesobjectifsdel'enseignement,ladeuxièmeleprogrammed'étudesoucurriculum(notiondéveloppéeci-dessous)etlemoded'en-seignement,latroisième,l'évaluationdesrésultats».

Décriredesobjectifspédagogiquesest,selonMiller,uneétapeindispensablepourélabo-

rerunprogrammed’étude.Millerclasselesobjectifsgénérauxdelaformationmédicale

initialeentroisgrandsconcepts:lesconnaissances,lacompétenceetlejugement(Mil-

ler,1974a,p.14).Unprogrammed’étudeestunecombinaisond’unitésde formation,

axéesuruneidéedirectricecommelessoinsauxmalades.Ceprogrammed’étudeest:

«Agencédefaçonàcequechaqueunitésoitétablieenfonctiondecellequilaprécèdeetdecellequilasuit,comprenantuncalendrierapproprié(tempsnécessaireàl'étuded'unequestiondon-néeentenantcomptedesdifférencesindividuellesdanslerythmedetravail)ettirantpartidesconnaissancesquel'onpossèdesurlesmoyensdefaciliterl'apprentissage.Ilfautaxerlesétudessurlesproblèmesàrésoudreplutôtquesurlesmatièresàenseigner».

50cf.p.3951cf.p.40

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L'évaluation correspondà la troisièmepartied’unprogrammed’étude.Elle consiste à

déterminersietcommentlesétudiantsontreçulaformationvoulue.L’évaluationtelle

qu’elle estpratiquéedansnosuniversités est centrée essentiellement sur les connais-

sances,«Commesi le faitdedéterminerque l'étudiantpossède lesconnaissancesvouluessuffità indi-querqu'ilestcapabled'utiliserenpratiquelesconnaissancesemmagasinéesetqu'ilsauralesap-pliqueràbonescient».

Ilestbeaucoupplusdifficiled’évaluer lacompétenceet le jugementdesétudiants.Car

cesdernierscomprennenttrèsrapidementcequ'ilsdoiventfairepourréussirdansleurs

études.Eneffet,écritMiller,

«Si laréussitedépendde la facultéd'absorberetderestituerunesommedeconnaissances, ilsorienterontleurseffortsdanscettevoie.Lesexamens,quioccupentlapremièreplacedansl'arse-nal des méthodes pédagogiques, sont rarement utilisés de façon à faciliter systématiquementl'apprentissageparunajustementinstinctif,parunmécanismedefeed-backnefaisantpasinter-venirlejugement».

Certes, s’il est indispensable de contrôler les résultats de l’enseignement, il est aussi

souhaitabled’apprécierl’efficiencedelalongueformationdesmédecins.Miller(1974a,

p.14)constateque:

«L'évaluationestgénéralementaxéesurlerésultatfinaldel'enseignementetnonsurleproces-susdeformation.S'ilestsouhaitableetnécessairedecontrôlerlesrésultatsdel'enseignement,iln'estpasmoinsimportantd'apprécierl'efficacitéetl'efficienced'uneactivitéaussiintense,aussilongueetaussicoûteusequelaformationauxprofessionsmédico-sanitaires.Lesprofesseursnesontpastoujoursfavorablesàcetyped'évaluationetilestraredelesvoirentreprendreavecen-thousiasmedesrecherchessystématiquessurlerégimedeprestationssanitaires,parcequel'ana-lysecritiquefaitsouventapparaîtredesdéfautsquiappellentdesmodificationsetquelesensei-gnantssontcommetoutlemonde:ilstrouventdavantagedeconfortetdesécuritédanslastabili-téquedanslechangement».

SelonMiller,«uneévaluationobjectiveducoûtetdel'efficacitédesméthodespédago-

giques ainsi quedes compétencesde ceuxqui les utilisent est la condition essentielle

d'unenseignementdynamique»(Miller,1974a,pp.14-15).

«Modifierunprogrammeoudes techniquesd'enseignement sans changer le systèmed'évalua-tiona toutes chancesdenemener à rien ! Changer lesystèmed'évaluationsansmodifier lepro-grammed'enseignementaeuunplusgrandretentissementsurlanatureetlaqualitédel'apprentis-sagequesil'onavaitmodifiéleprogrammesanstoucherauxexamens»52.

52MILLERG.E. (1977).Symposiummédical internationalN°2,Rome,23-26mars1977.Dans Jean JacquesGuilbert(1990),p.2.03.

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En1959,GeorgeMillerquittel’universitédeBuffalopourcréeravecunpsychologuede

l’éducation,auseindel’Universitéd’IllinoisàChicago,unbureaupourledéveloppement

etlarechercheenpédagogie.GeorgeMillerraconte(Miller1975c):

«LesprofesseursdemédecinedecetteUniversiténousontaccueillisavecunenthousiasmepru-dent:quevenaientfairecesdeuxpersonnes,qu’allaient-ellessurtoutfaire?Laplupartdesensei-gnantsétaientouvertsàunremaniementrationneldesprogrammes,pourvuquel’onnetouchepasàleurpropreprogramme».

L’enquêteaétémenéependantunanauprèsdesenseignantsetdesétudiants.Elleavait

pourobjectifderepérerlesproblèmesliésauxchoixpédagogiquesdelaFaculté,defaire

prendre conscience aux enseignants de l’existence de ces problèmes et de proposer

d’éventuelles solutions à ces difficultés recensées. La définition des objectifs,

l’adéquationdecesobjectifsauxprogrammesd’enseignement,lafiabilitéetlavaleurdes

procéduresd’évaluationsontétéméticuleusementobservées.Milleret sonéquipeont

effectuéégalementuneenquêtesurleterrain,quiaprovoquéunprofondmalaisedans

lecorpsenseignantdecetteFaculté.Pourlapremièrefois, lescoursenamphithéâtres,

lesenseignementsdirigésetmêmedans lesserviceshospitaliersontétéobservés.Les

enseignantsétaientsurprisquenousdemandionsauxétudiantsleuravissurcesdiffé-

rentsenseignements.Ilsontétéencoredavantageétonnés,engendrantuneimportante

incompréhension,lorsqueMilleretsonéquipeontsollicitécesenseignantsàfournirdes

informationsdétailléessurleurschoixpédagogiques(contenus,objectifsetméthodes).

Miller53(1975c)poursuit:

«Nousportionsunfortintérêtauxperceptionsetauxvaleursressentiesparlesenseignantsetlesétudiantsàlafind’uncoursoud’unenseignementdirigé.Nousrecherchionscequeretenaientlesétudiantsdescoursdesciencesfondamentales.Nousétudionségalementl’aptitudedesétudiantsàrésoudredesproblèmesetl’influencedecetteaptitudesurlesrésultats».

Verslafindel’enquêteentreprisedanscetteuniversité,Millerconstateunegrandein-

compréhensiondelapartdesenseignantsquis’attendaientplutôtàdessuggestionset

recommandations.Lesprofesseursdemédecineattendaientdesmesuresconcrètesqui

tardaientàvenir.Lasurprisedesenseignantsfutgrandequandilsontdécouvertqueles

conclusionsetlespropositionsnecorrespondaientpasdutoutàleursattentes.(Miller,

1975c,p.106).

53MILLER(1975c)-Cetexteaétépubliéparl’OMSenfrançais.

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[Car une] «des idées-forces ressenties lors de ces enquêtes était que le système des examens,bien plus que les objectifs de l’enseignement, la structure du programme ou les méthodesd’enseignement,exerçait l’influence laplusprofondesur lemoded’apprentissagedesétudiants.En effet, siattrayantquefut l’énoncédesobjectifs,si logique lastructuredesprogrammes,sibril-lantes lesméthodespédagogiques, c’étaient lesexamensquidonnaientauxétudiants l’idée laplusnettedecequ’onattendaitd’eux»

Tantque lecurriculumdesuniversitésmédicalesseragouvernépar lesexamens(eva-

luation drives curriculum54), les étudiants ne s’intéresseront qu’aux matières suscep-

tiblesde«tomber»lorsdesexamens,laissantdecôtéd’autrescontenuspourtantutiles

àleurfuturexercice,etdoncaubien-êtredespatients.Millerconstataitunedysharmo-

nie importante entre l’organisation des programmes avec les examens facultaires. À

quoiserventlesétudesmédicales?Apprendreàcomprendre,analyseretrésoudredes

problèmes? Ou bien être capable de se rappeler des fragments isolés d’informations,

appréciésparticulièrementparceluiquiétaitresponsabledel’enseignement,maissou-

ventpeuutilespar la suite, et aussitôt oubliés après les examens?Malheureusement,

c’est la seconde possibilité qui est choisie par les autorités facultaires. La plupart des

examensproposésauxétudiantsenmédecineaméricainssontbaséssur lesprocessus

demémorisationetnonderéflexion.Ceprincipeestégalement tropsouventretrouvé

dansd’autresdisciplines.

Lesconcepts-clésàproposdesméthodesetdispositifspédagogiques,établisparMiller

etsonéquipeonteudumalàs’implanterdanslescursusdesuniversitésmédicales.50

ans après, les enseignants ont encore beaucoup de difficultés à intégrer ces concepts

pédagogiques innovants. Les examens sont encore trop souvent axés sur les connais-

sances,mêmesidepuisunedizained’années,desdispositifspédagogiquespourévaluer

lesaptitudes,lesattitudesetlessavoirsagirontétémisenplacedansquelquesuniver-

sitésmédicalesaméricaines.LespropositionsdeMilleretAbrahamsonpourmodifierle

cursusdesétudesmédicalesseheurtentàdesviolentesréactionsducorpsenseignant

universitaire.LePr.AshleyR.Lyman Jr.,quienseignait la zoologiedansunCollègede

l’Étatd’Idaho,aainsiattaquéviolemmentGeorgeMillerdansunarticlepubliédans la

revueNewEnglandJournalofMédecine(NEJM)du12septembre1957.Cetenseignant,

égalementdirecteurduservicedesantédesétudiantsfait,sansjamaisciterMiller,une

critiqueacerbedesréformesproposéesauniveaudelaFacultédemédecinedeBuffalo. 54MILLERG.(1961).Teachingandlearninginmedicalschool

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Ilmélange lespropositionsd’améliorationdesétudesmédicalesavec les réformesqui

ont été réalisées dans de nombreux états américains au niveau de l’enseignement se-

condaire.Pourcetauteur,sansexamen,lesétudiantsnepeuventconnaîtreleursvaleurs

parrapportàcequ’onattenddeluietparrapportauxautres,etonttouteslesraisons

d’êtredécouragés.

Lyman s’oppose au «nivellement par le bas, qui consiste à abaisser les normes

d’éducationpourcompenserleslacunesduniveauprécédent.Cettedégradationestdue

auxadeptesd’uneéducationprogressistequel’auteurfustigesousletermed’éducateurs

progressistesou pédagogues. Lyman s’appuie sur un pourfendeur de l’éducation pro-

gressiste: Arthur Bestor Jr. qui a écrit un livre paru en 1956: «la restauration de

l’apprentissage».Pourcetauteur, il fautprivilégier la formation intellectuelledans les

disciplinesfondamentalespouruniquementlesélèvessérieuxayantdesbonnescapaci-

tésintellectuelles!Bestorappelaitlespédagoguesprogressistesdemédecinsducurricu-

lumoudesingénieurspédagoguesetl’éducationprogressistel’éducationrégressive.

Danssonarticle,Lyman(1957,p.505),précise:

«L’apprentissageneconsistepasàréfléchirsurdesmodèlesbiologiquescommelecycledeKrebspourcomprendred’autresmodèles.Ildoitapprendretoutcequiconcernececyclebiochimique,parcec’estunetâcheprofessionnellequetoutétudiantdoitconnaître.Seullesavoirformalisépardesgénérationsdeprofesseursdemédecinedoit êtrepris en compte.Une foisqu’il a appris, ilpourraoublierlesdétails,maisauraaumoinslasatisfactiond’avoirsu55».

Lyman (1957, p.507) concluait son article par cette réflexion: arrêtons demettre en

causelesétudesmédicales.

«Les enseignants en médecine doivent agir rationnellement et rétablir la disciplined’apprentissagedusystèmeéducatifquiavaitcours.Ilsnedoiventpasencouragerlesmêmespra-tiquespédagogiques,envigueurdansnosétablissementssecondaires,etconsidéréescommeunehontenationale56».

LesconceptionspédagogiquesdeLymansontuniquementcentréessurlescontenuset

les savoirs à apprendrepar cœur. Elles correspondent à une formedepédagogie que 55“lwillnottrytoconvinceamedicalstudentthat"thereisarelationshipbetweenlearningtheKrebscycleandbe-comingaphysician,"asthearticleadvises,becausethereisnone.Hewilllearnitbecauseitisapartofthejobhehastodo.Oncehehas learned it, hemay forget itsdetails, but laterhe canhave the satisfactionof saying tohimself”.[notretraductioncondensée].56“Aremedicaleducatorsgoingtosetabout it inarational fashionwitheffortstorestorethedisciplineof learningthroughouttheentireeducationalsystem?Orwilltheyattemptitbyencouraginginmedicaleducationthesameprac-ticesandphilosophythathavemadethehighschoolsofthecountryanationaldisgrace?”[notretraduction].

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l’onpourraitqualifierderégressive.L’apprentissagedoitplutôtêtrecentrésurl’étudiant

commelesouhaitaitHelenParkhurstavecsonplanDalton57.

Millerreprend:

«Commepourlaréformedesexamens,lesbonnesvolontésindividuellesnesuffisaientpas;ilfal-laitcréerdansl’établissementunsystèmedecontrôlesetdecontrepoidsdanslaplanificationetlamiseenœuvredesprogrammesd’enseignement»(Miller,1975c,p.108).

Pour cette raison, il a proposé des transformations radicales sur le plan pédagogique

notammentauniveaudestechniquesd’enseignement.GrâceausoutienduDoyendela

Facultédemédecinede l’Illinoisetde l’administration facultaire, la francherésistance

observéeaudébutdelamiseenplacedelaréformes’esttransforméeprogressivement

aucoursdesannéesenunconsentementréticent.Maiscombienderéformesontréel-

lement abouti et répondu totalement aux objectifs initiaux? Au bout d’une dizaine

d’années,Millerracontequ’ilaétébiendéçu.Lemédecinpédagoguedoitêtrepatient,

carlesquerellesdeclocherprimentsouventsurl’intérêtgénéral.

Dansunarticleparudanslarevue«Circulation»,Millerinsistaitsurlesdeuxpointssui-

vants:(Miller,1963a)

1. Lecoursmagistralnedoitpasêtrelemodèled’instructiondominant.Ilfautaccepter

quel’étudiantnesoitpasinactif.Uneexpérienceestencoursdepuis3ansavecdes

étudiantsenpremièreannéedemédecine.Ceux-ciontretravailléleurscoursmagis-

trauxensemble.Auboutde3ans,leurspenséescritiquesetleurscompétencesdans

tous lesdomaines enseignés étaientnettementmeilleuresque cellesdes étudiants

qui ont suivi uniquement des cours magistraux. Il ne faut pas cependant écarter

l’exposémagistral.Ilatoutesaplacepourapporteruneinformationnouvelleetdes

informationsplusanciennesréévaluéesavecdesdonnéesrécentes.

2. Tous les enseignements ne nécessitent pas la présence d’un enseignant. «Toute

étude ne nécessite pas un professeur» dit Georges Miller. Quand un besoin

57PARKHUSTHélènes’est inspiréedelapenséedeJohnDewey: il fautfourniruncontenuvivantà l’instruction,enévitant d’imposerdes contenusdont l’apprenantne comprendni le but ni l’utilité. Elle proposadansune écoledeDaltondans leMassachusetts,unenouvelle techniquepédagogique:pourunapprentissageprescrit, l’élèvea toutelibertépourorganisercetapprentissage. Iln’yaplusdecoursmagistrauxnideclassements.Seulecontraintepourtouslesélèves, l’apprentissagedoitêtreterminéaprèsuntempsdéfinipourtous.L’enseignantestunmédiateur: ilaidemaiscontrôleletravailencours.Maisonneparlepasencoredel’évaluationformative.

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d’enseignementestidentifié,nousavonstendanceàtoujoursproposeruncours.Et

dans l’enseignement supérieur, cela amène à recruter un orateur de talent, de

l’Université oud’ailleurs, afind’attirer leplus grandnombred’étudiants. Pourtant,

certainsdirigeantsd’universitésontprisconsciencedelanécessitédepartagerdes

responsabilités avec les étudiants dans la conduite de leurs cursus universitaires;

cecibiensûr,enayantprissoind’identifierlesobjectifset lesmoyenspourréussir

uncycled’études.

Ainsi, deux chirurgiens enseignant de l’Universitémédicale du Kansas, Jack Zimmer-

man et ThomasKing (Miller, 1963 a, p.954) ont réaliséuneétude intéressante. Ils ont

partagéleursétudiantsendeuxgroupes:ungroupequiasuiviunprogrammerégulierde

conférences, et un second groupe dont les études étaient autodirigées avec la présence

d’unenseignantexpertentantqueressourceetnonpasentantqu’instructeur.Unexamen

identiqueaétéproposéauxdeuxgroupesauboutdedouzesemaines.Lesrésultatsontété

supérieursdans legroupede travailautodirigéparrapportà l’autregroupe.Cetteexpé-

rience a été renouvelée par deux fois, avec des conclusions identiques. Certains ensei-

gnantsontrejetécesétudesparcraintedemenacesurleurutilitéetdoncleuremploi.Mil-

lerpenseaucontrairequelerôledel’enseignantesttoujoursprimordialenexerçantd’une

manièredifférentecetteprofession.GeorgeMiller(1963a,p.955)conclutsonarticlede

cettefaçon:

«Si certains enseignants craignent pour une remise en question de leur utilité en tantqu’enseignant et la sécurité de leur emploi, ces données au contraire peuvent aider les ensei-gnants dans la réalisation de leurmétier: leur rôle est valorisé ; ils n’ont plus la fonction d’unesimplefontaineoùlesétudiantspeuventboire58».

Nousdevonsmontrerplusd’objectivité,ditMiller,etnousméfierd’uncercled’étudiants

«charmés» par notre talent, qui peut tromper notre propre enthousiasme à enseigner.

«Desméthodesd’enseignementquimettentl’étudiantdansunesituationactivepourap-

prendreontplusdechanced’êtreefficacesquecellesquinelefontpas».Ainsi,unensei-

gnantqui fait correctement son travail nedoit pas être, pourMiller, «celui qui sait, qui

donneàceluiquinesaitpas».Outresesqualitésd’expert,l’enseignantdoitêtreégalement

58Enconclusiondel’expérienceréaliséeparZimmermanetKing,Miller(1963a)avaitécrit:«Whilethefearfulmightseeinsuchstudiesathreattotheteachers'securityandusefulness,Iprefertothinkthatthesedatacangiveteach-ersconfidencetoallowstudentsgreaterfreedomforindependentlearning,andthemselvesgreateropportunitytoserveassomethingmorethanafountainatwhichstudentsdrink”.

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unmédiateur,unfacilitateur.Certes,onnepeutpasignorerlecourantpédagogiquemagis-

tralcentriste59dontlebutestd’amenerl’apprenantàaccumulerdessavoirs,sansvraiment

tenir comptedespossibilités intellectuellesde l’apprenant.Ce courantpédagogique cor-

respondàunedélivrancerationaliséedusavoir:donnerunmaximumd’informationenun

minimumdetemps.C’estunepédagogiedérivéedutaylorismeetdubéhaviorisme.

Lescoursmagistrauxpeuventêtreutiles,selonMiller,pendantlespremièresannéesdes

étudesmédicales,mais ilsdoiventêtreproposésavecparcimoniedans lesannées supé-

rieures.Àl’inverse,lecourantpédagogiquecentrésurl’apprenantdoitêtresoutenudèsle

débutdesétudesetdevenirprépondérantaufuretàmesuredesonavancementdansles

études.Untelapprentissagecentrésurl’apprenantapourobjectifd’amenerl’apprenantà

construiresonsavoiretnonsubir.

AlaFacultédemédecinedeBuffalo,GeorgeMilleretsonéquipeontainsidemandéaux

enseignantsdeconstruireleurprogrammed’étudeselonlesmodalitéssuivantes:1.dé-

finir les contenus à enseigner, 2. décrire les objectifs, 3. élaborer le parcours

d’apprentissage,4.organiserd’unemanièreséquentiellel'apprentissage,5.découperles

étapes d'apprentissage, 6. définir les prérequis et 7. vérifier les acquis. Mais qui doit

fixerlesobjectifs?Cesontlesprofesseursdesuniversitésresponsablesd’unediscipline

médicaleouchirurgicalequi fixent lescontenus,afindecommuniquerdessavoirsaux

étudiants.(MillerG.E.,1974b).

Cetteconception,ditMiller,étaitfréquemmentcritiquéeparlesétudiants,car«lesob-

jectifsdesprogrammesétaientplus souvent fixés en fonctionde cequi intéressait les

professeursquedesbesoinsdesétudiants» (MillerG.E.,1974b).Cesobjectifsétaient

trop axés sur des connaissances universitaires et n’étaient pas ou peu utiles pour les

différentespratiquesmédicales:celapouvaitengendrerdescarencesauniveaudesbe-

soins sanitaires. Certes, les professeurs d’université revendiquaient le maintien d’un

niveauscientifiqueélevépour l’enseignementmédical.Mais ilétaiteneffetdeplusen

plusmanifesteque lesprogrammesdont lesobjectifsétaient fixéspar les seulsensei-

gnantsneréussissentguèreàpréparerdespraticienscapablesderépondreauxbesoins

sanitairesdesétats.Entrelesenseignants,lespraticiensenexercice,lesétudiantsetle

59DéfinitiondonnéeparMargueriteAltet(1997,p.17)

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public, les désaccords étaient fréquents. George Miller a proposé alors une méthode

d’élaborationdesobjectifsbaséssurl'analysecritiqueducomportementdansunesitua-

tiondonnée.Celapermettaitd’élaborerdesobjectifsavecunedéfinitionclaireetspéci-

fique,d’accroitrelaprécisionetderéduirelasubjectivité.

«Cetteméthodeestaxéesurlesrésultatsàobtenirenmatièredecomportement,c'est-à-diresurlesélémentsdelacompétence,plutôtquesurlecontenudescoursoulesméthodespédagogiques.Soussaformelaplussimple,elleconsisteàdemanderàunobservateurdedécrireunesituationdans laquelle il estimeque lapersonneobservée s'estprofessionnellement comportéede façonadmirable,ouaucontrairedéplorable,toutenindiquantlesraisonsquimotiventsonappréciation.Àmesure que s'accumulent les descriptions dues à un grand nombre d'observateurs indépen-dants, lessituationsencauserentrenttoutnaturellementdansuncertainnombredecatégoriesquifinissentparenglobertoutelagammedesélémentsdelacompétenceprofessionnelle»(Mil-lerG.E.,1974b).

Cependant, raconte Miller (1956), je m’insurgeais lorsque des programmes

d’enseignementparfoiscontradictoiresétaientproposésauxétudiants:

«Commentlesétudiantspeuvent-ilsnouscroirequandenbiochimie,onleurditquelediabèteestlerésultatd’unesurproductiondeglucosetandisqu’enphysiologie,ilestdûàlasous-utilisationduglucose60?»

Si lesétudiantsosent interroger leursenseignants sur les raisonsquiamènentà cette

contradiction,onleurrépond:«puisquejevousledis,c’estcommecela».Certes,reprend

Miller,leurréponsen’estpasgénéralementaussidirecte.Maissions’intéresseautonde

laréponse,auxmotsutilisés,ons’aperçoitque lesenseignantsrejettentsystématique-

mentlacontradiction.Lesétudiantsdoiventrespecterlesenseignants,etnepasémettre

desdoutes sur la validitédes contenus enseignés. Ils sont làpourvaloriser l’aurades

enseignants, lesadmirer, lesencourageret lesrespecter,mêmes’ilsexploitent lesétu-

diants.Pourtant,affirmeMiller(1956),laresponsabilitédesenseignantsdesfacultésde

médecine est indiscutable dans la formationdesmédecins. Lemédecin est unprofes-

sionneldesantéauservicedespatients.Ilessayedecomprendreleursproblèmesetde

leurêtreutile.Iln’apasledroitdejugerlepatientpoursesproblèmesdesanté,etne

doit pas se sentir offensé ou avoir le sentiment d’une perte de prestige si le patient

ignoresesconseilsounemontrepasuneobservancecorrecteauxtraitementsprescrits.

60“Howcantheybelieveweencourageindependence,wheninbiochemistrytheyaretaughttoreplythatdiabetesistheresultofanoverproductionofglucosewhileinphysiologyitisduetounderutilization”,[notretraduction].

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Pourquoi les enseignants, continue Miller (1956), ne supportent-ils pas la remise en

causedeleurprestation?Sont-ilsau-dessusdesautres?Leurmétierestd’aiderlesétu-

diantsàacquérirdessavoirs,nonpasimposeràcesétudiantsdessavoirspastoujours

nécessairesouvalidesquilesrenforcentdansleurautorité.Sil’enseignantnefaitpasce

travail,ilnerépondpasauxdemandesdelasociété.Assurément,ceconstatneconcerne

pas tous lesenseignants.D’autresenseignantsaimeraientmodifier leurpratique,mais

ne peuvent le faire à cause de la rigidité de la politique des dirigeants universitaires.

Nousdevonsrechercheruncompromis,carnousdevonsfairefaceàdesréalités.Ilfaut

d’abordidentifier les limitesqu’iln’estpasraisonnablededépasser :«nousfaisonsce

quenouspouvonsquandnouspouvonsle faire61»(MillerG.E.,1956).Lesenseignants

quiontcherchéàmodifierleurpratiquehabituelleonttrouvéquelatâcheétaitplusar-

duequ’auparavant,maisleurapportaitdavantagedesatisfaction.Etceuxquionttenté

l’expériencen’ontpasétéconsidéréscommedeshérétiquesparleurscollègues.Ilserait

bonquecesexpériencessoientgénéralisées.

Unétudiantquifaitetrestituecequiaétéditesttoujoursconsidérécommeunbonétu-

diant.Alorsque lesétudiantsqui remettentencauseet contestent lesenseignements,

ceuxquin’acceptentpasderecevoirdesinformationsdénuéesdepreuvessontétique-

tés«étudiantsennuyeuxnécessitantparfoisunavispsychologique».Assurerunensei-

gnementtraditionnelestchoseaisée,maisaidervéritablementunétudiantàapprendre

estunechargerelativementimportanteetépuisante.Miller(1956)conclutainsi:

«Ilest indispensablede laisserunespacede libertéauxétudiantspour leschoixdesméthodesd’apprentissage. Malheureusement, ce mot liberté signifie anarchie pour de nombreux ensei-gnants. Notre système d’éducation a toujours été beaucoup trop autoritaire et les enseignantssontencoretroprésistantsauxchangementsdeparadigmespédagogiques.CommelesouhaitaitNoahWebster62au20esiècle,ilestnécessairederejetertoutesces«vociférationsdepédantisme» exprimées par les élites intellectuelles. La tendance habituelle d’un corps enseignant estd’encouragerlerenforcementdesapropreimage63».

61“Wedowhatwecanwhenwecandoit”,[notretraduction].62WEBSTERNoah(1758-1843)écrivainetréformateuraméricain.«Toutcequiestéducatifdoitêtrecontrôléparlepeupleaméricainetnonparl’aristocratieanglaise.Apprenonsd’abordlalangueanglaiseavantd’apprendrelegrecetlelatinquinesontpasnécessairespourvivreauquotidien».63«Wheneverfreedomineducationisdiscussed,however,thereisimmediatelyanoutcryfromthosewhoequatefreedomwithanarchy.Lestwefailtounderstandhowmenwhohavelivedinademocracycancompletesuchanequation,wemightrecallthatoureducationalsystemhasusuallybeenauthoritarian(evenintheheydayoffreeelectives)andthatteachers,too,resistchange.FreedomisusedhereintheWebsteriansenseasthestateofnotbeingsubjecttoanarbi-traryexternalpower.Butwhowoulddenythatmedicalfacultiesingeneralandphysiciansinparticular,areoftenarbi-traryintheirexerciseofpower?”[Notretraduction].

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LaformationmédicalecontinueauxU.S.A.LerapportFlexneravaitdénoncélamédiocritédesétudesproposéesjusqu’en1910par

les différentes écoles demédecine américaines. Lesmédecins en activité,mal formés,

ontalorsétéobligésdesuivredesformationsderemiseàniveau:c’est letempsde la

FMCréparatrice(Josseran&Chaperon,2001,p.493.).Laformationcontinuedesméde-

cinsaméricainsestréellementnéevers1927aveclacréationdupremierdépartement

de FMC à l’Université de Michigan, suivie rapidement par d’autres Universités. Cette

FMCavaitsurtoutpourbutdecomblerleslacunesdelaFMI.CetteFMCcomportaitune

évaluationdespratiquesaucabinetdesmédecins.Dès1932,cesystèmedeFMCditré-

parateurdisparaitaufuretàmesurequelesenseignementsdispensésenformationini-

tiale atteignentunniveau scientifiquedequalité.Dès1934,une coopérationentre les

associationsdemédecinsetlesuniversitéssemettentenplace.Lesmots«FMCobliga-

toire etrecertification» sontdéjàprononcés,maisc’esten1947que l’obligationdese

formertoutaulongdesavieprofessionnelleestdécrétéepourlesUrologues.Cetteobli-

gationseraétendueauxautresspécialitésseulementàpartirde1967.Surleplanpéda-

gogique,deuxpointsdevues’affrontent:faut-iluneFMCdetypeuniversitaireoubien

comme lesouhaitait l’associationmédicaleaméricaine (AMA),uneFMCsous formede

dispositifssouplesdeformation,disponiblespourlesmédecinsenfonctiondeleursbe-

soins.(Josseran&Chaperon,2001,p.496).

RenouonsaveclesréflexionsdeGeorgeMillersurlaFMCauxUSA.Cetauteuravaitre-

péréunedifficulté importantedans l’organisationdesprogrammes.Lamassedescon-

naissancesbiomédicalesesténormeetsujetteàdesévolutionsrapides.Ilestimpossible

pourlesétudiantsd’appréhenderentotalitétoutescesconnaissances.LaFacultédevait

enseignerauxétudiantsàsélectionneretàapprendrepareux-mêmescequileuraété

ouleurserautilepourleurexerciceprofessionneletnonàaccumulerlesconnaissances.

Or, pour chaque responsable de discipline biomédicale, il y avait un minimum à ap-

prendre: sionmetboutàboutcesminima, leprogrammeétait si chargéque lesétu-

diantsn’avaientplus le tempsd’apprendre!CommecelaaétéargumentéparMiller64

(1963b),

64“Despitesuchlongstanding,faithfulanddeterminedeffortsbyaprofessionkeenlyawareoftheneedforunceasinglearning,itisstillgenerallyagreedtodaythatcontinuingeducationinmedicineisfailingtokeeppacewiththetimesandneedsdesperatelythekindofrejuvenationthatcharacterizedundergraduateinstructionaftertheexcitementof1910. Inexploring this troublesomequestion,manydistinguished figures inmedicine,sagaciousscientists,devoted

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«Puisqu’onaapprisénormémentdechoses,ilestinutiledemettreàjournosconnaissanceslors-qu’onexerceparlasuite,d’oùladésaffectationpourlaformationmédicalecontinue»(ContinuingMedicalEducation).

La formationmédicale continueétait soumiseàdes intérêtsdivergentsentre lesdeux

parties:lesprofesseursexpertsquidésiraientenseignerdesmatièrestropspécialisées

et théoriques; et lesmédecins qui espéraient un enseignement plus pratique sur les

problèmesdesantérencontrésquotidiennement.Millers’insurgeaitsurladiscordance

entrecesdeuxpointsdevueetprenaitlepartidesmédecinsexerçantsenproposantde

remettreencause lacapacitédecesprofesseursàenseignersansseformeràdesmé-

thodes éducatives adaptées à ce type de formation. Avec Williamson, Miller insistait

pour que cet enseignement porte sur les maladies les plus fréquentes, qui affectent

l’équilibredupatientetpeuvententraînerdesconséquencessociofamilialesetprofes-

sionnelles importantes,sur lesquellesonpourraitmieuxagir65. (WilliamsonJ.W.etal,

1968).

Ildevenaitnécessairededéfinirdesprioritésdeformationréalistesbaséessur lesbe-

soinsdespatients;maiscen’estpassuffisant,lesformationsdevaientsurtoutcompléter

lesdéficitsdesmédecinssurleplandeleursconnaissancesthéoriquesetpratiques.Car

la formation continue traditionnelle des années60 ne remplissait pas son rôle

d’amélioration des compétences: elle était trop centrée sur l’enseignant et non sur

l’apprenant. Miller prônait une réévaluation continue des pratiques médicales pour

chaquemédecin.Commepourlaformationinitiale,lesenseignantsenformationconti-

nuedoiventposséderunbagagepédagogiqueconséquent.«Nilacompétencecliniqueni

le sens inné de la recherche ne peuvent plus être aujourd'hui considérés comme des

atoutssuffisantspourjouerlerôledeprofesseurenmédecine»ditencoreMiller.

publicservantsandthoughtfulexecutiveshaveconcludedthattherealissueisthe"informationexplosion,"whichhasextendedbeyondtolerancethelagbetweentheoutpouringofinformationfromtheresearchlaboratoriesoftheworldanditsincorporationintothehealthcarerenderedbypractitionerstowhomanailingpopulaceturnsforhelp”,[notretraductioncondensed’unextraitd’articledeMILLERG.E.(1963b,p.296)].65SelonMiller, Alexander etWilliamson, la formationmédicale continue doit porter sur les affections les plus fré-quentes,cellesquiposentleplusdeproblèmesetcellesquirépondentauxbesoinsetattentesdespatients.Silafré-quence de ces affections et leurs potentiels évolutifs (complications, mortalité) sont des éléments à prendre encomptepourdéfinirlesobjectifsdeformation,ilnefautpasnégligerégalementladuréeetlafréquencedeshospitali-sationsnilesperturbationssocialesengendréesparcesaffectionsnilesaméliorationspossiblesàconsidérercommelaprévention.Sixgroupesd’affectionsnotammentlediabète,lesinfectionsdesvoiesurinaires,lesproblèmesgynécoobstétriques,lescoronaropathies,ontétérelevéspardifférentsmoyens(classificationsOMSportéessurlesdossiersmédicaux,avisdesmédecins,d’expertsmédicauxetdepatients.)Notedel’auteurdelathèse:ils’agitd’untravailderecherchenord-américaindanslesannées1960,d’unedurée3ans,etdontlaprégnancehospitalièreétaittrèsforte.

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«Pourqu'ilsoit jugécompétent, l’enseignantmédicalmodernedoitpossédernonseulementlesnotionsdesciencespédagogiquesnécessairesà lamisesurpiedd'unestratégieadéquate,maisencore être assez versé dans les techniques d'enseignementmodernes pour en choisir les tac-tiquesappropriées.Ildevraseprépareràjouercerôleconformémentàunplanpréétablietnonpassporadiquement66»(Miller,1965,p.708).

Leproblèmedusuividelaformationmédicalecontinueétaitconséquentauxméthodes

pédagogiques inadaptées, pratiquées en formation initiale. Avant de modifier

l’enseignement post universitaire, il était indispensable de revoir le curriculum facul-

tairedesétudesmédicales.Etlapremièredeschosesétaitd’encourager,deprivilégierle

travailpersonnelde l’étudiant.Celanécessitede supprimerdenombreusesheuresde

cours. Combien d’enseignants accepteraient cette baisse de leurs heures consacrées à

leursenseignements?Certainsdiront:«pourmapart,cen’estpaspossible,maisvoyez

plutôtmescollègues, certainspeuventdiminuer leurnombred’heures». (Miller,1963

b).Cettesimpleréflexionréussitàtransformerlescepticismedenombreuxenseignants

envers les experts en pédagogie en une véritable hostilité. Ces problèmes ne concer-

naientpasuniquementlesUSA.

RappelhistoriquedelaformationmédicaleenFrance

LaformationmédicaleinitialeenFrance

SinousavionsdûréaliserunétatdesenseignementsproposésdanslesFacultésdemé-

decineenFranceavant1970,voilàcequenousaurionspuécrire:depuisle18esiècle,

l’enseignementdelamédecines’étaittransforméassezrapidement.Maiscetteévolution

portaitquasiexclusivementsurlaquantitédenotionsàmémoriser,passurlesmoyens

d’apprendre:laréflexionsurl’apprentissageétaittrèspauvre:c’étaitledésertpédago-

gique.Unephraseétaitsouventprononcéeparlesenseignantsattachésàleurhabituel

exercice:nosgénérationsantérieuresontapprisdecettefaçon,pourquoimodifiercequi

marche. Les enseignants considéraient commedes futursbonsmédecins les étudiants

capablesderestituerunmaximumdeconnaissancesaumomentdesexamens.Lapéda-

66«Ifhe is tobe judgedwellprepared, the contemporarymedical educator shouldbenotonly sufficiently familialwith educational science to planwise educational strategy but sufficiently skilled in the use of instructional tech-niquestoselectandusesoundeducationaltactics.Hispreparationforthisroleshouldbeamatterofplanratherthanaccident.TraductionassuréeparlarevueCanadianMedicalAssociationJournal.

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gogieduparcœurrégnaitenmaître.Laréflexiondesétudiantssurlesnotionsàacquérir

étaitdéficiente.Pourtant,depuisplusd’unsiècle,denombreusesexpériencespouramé-

liorerl’apprentissageontétéproposées,maislemondemédicaldanssonensembletoi-

saitcesexpériencesquinesemblaientpaslesconcerner.

Cedécalage entre l’apprentissagede lamédecine et la pratiquemédicale pouvait être

expliquédelafaçonsuivante.Jusqu’au18esiècle,etdepuisHippocrate,lesmédecinsse

sontintéressésuniquementàl’êtrevivant.Ilsécoutaientetobservaientlespatientsma-

lades, posaient un diagnostic et prescrivaient un traitement généralement à base de

plantes.Lesavoirmédicalneprogressaitpratiquementpas,lamaladieétaitconsidérée

comme un aléa accepté par tous. Les règles de la pédagogie n’avaient quasiment pas

évoluédepuis20siècles;ellesétaientsimples:apprendreparcœur, restituer le texte

apprislorsdesexamens.Pourtant,dèsle17esiècle,unenseignantd'originetchèquepo-

sait lesprincipesde lapédagogiemoderneoù l'onenseignerait essentiellementpar la

pratique.JeanAmosKomenskyditComeniusécrivaitdansunlivrepubliéen1632(La

grandedidactique),cettecélèbrediatribe67:Ceuxquienseignentlesartsmécaniquesneretiennentpaslesdébutantsavecdesthéories,maislesmettentd’embléeautravail.Onapprendàforgerenforgeant,àtaillerlapierreleciseauàlamain,àpeindreenpeignant,àdanserendansant,etc.Parconséquent,danslesécoles,lesélèvesdoiventapprendreàécrireenécrivant,àparlerenparlant,àchanterenchantant,àraisonnerenraisonnant,etc.Lesécolesnedoiventpasêtreautrechosequedesateliersdébordantd’ardenteactivité.Ainsi,par lapratique,onpourravérifier lavéritéduproverbe: «c’est en faisantqu’onapprendàfaire68».

AprèslaRévolutionfrançaise,lapratiquemédicaleasubidegrandsbouleversements:

lesmédecinss’intéressaientnonseulementauxvivants,maisaussiauxmorts.Desdis-

sectionsétaientpratiquéessurdescadavresavecpourobjectifladécouvertedeslésions

pouvantêtrerapportéesàunemaladiedonnée.C’étaitletempsdespremièresclassifica-

tionsmodernesdesmaladies.Àpartirdudébutdu19esiècle,denombreuxtravauxde

recherchesontpubliés:parexemple,Bichatetlestissus,ClaudeBernard,FrançoisMa-

gendieet laphysiologie,Pasteuret lamicrobiologie.Lecorpsmédicalprenaitconnais-

67Unepremièretraductiondel’œuvredeComenius,effectuéeparPiobettaetrepriseparPiaget,donnaitletextesui-vant:Lesartisansneretiennentpas leursapprentissurdes théories, ils lesmettentbientôtà l'ouvragepourqu'ilsapprennent à forger en forgeant, à sculpter en sculptant, à peindre en peignant, à sauter en sautant. Que dans lesécolesonapprennedoncàécrireenécrivant,àparlerenparlant,àchanterenchantant,àraisonnerenraisonnant,etc.Detellesortequelesécolesnesoientquedesateliersoùl'onbesogneavecardeur.Ainsi,touséprouventenfinparunepratiqueheureuselavéritédeceproverbe:Fabricandofabricamur.Enfabriquant,nousnousfabriquonsnous-mêmes.68COMENIUS,lagrandedidactique-laméthodepourl’enseignementdesmétiers(chapitreXXI)p.184

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sancededécouvertesmajeurescommeparexemplelacelluleetsonnoyaucontenantles

chromosomes,lesphagocytes,lesanticorps,etc.

Lesconséquencesd’untelbouleversementsurlesétudesmédicalesserontimportantes.

Entre1750et1950,lesconnaissancesenflentquasimentselonuneprogressiongéomé-

trique;desnouvellessciencescommelachimie,laphysiqueetlesmathématiquessont

incorporéesausavoirmédical,l’hommeestdécoupéenorganeset/oufonctions;enfin

laduréedesétudesnécessairespouringérertoutescesconnaissancesaugmenterégu-

lièrement. Mais l’enseignement s’effectue toujours de façon magistrale à la Faculté.

Pourtant,despédagoguesdès le19e siècleont cependantproposédenouvelles règles

d’éducation, notamment Johann Pestalozzi69. Cet auteur a formulé que la manière

d’enseignerdoitstimulernonseulementl’activitéetl’intérêtdesapprenants,maisaussi

leurdonner le goûtde la rechercheetde ladécouverte. Il estnécessairede lier toute

connaissanceàl'expérience(principedel'Anschauung)70.

Cetypedepédagogietransmissive,orientéeverslesavoirn’étaitguèresatisfaisantpour

unpetitnombred’enseignantsexerçantdanslesFacultésdemédecine.EnFrance,c’est

dans les années1950 que les gouvernants ont réellement commencé à prendre cons-

cience de lamédiocrité des enseignements réalisés en Faculté deMédecine. Jusqu’en

1958, les règles pédagogiques pour devenir médecin étaient les suivantes: un faible

pourcentaged’étudiantsenmédecine,admisauxconcoursdel’internatetdel’externat,

bénéficiaitd’unenseignementdehautniveau.Cetenseignementdequalitéétaitréservé

pourlaformationd’uneélite(10à15%desétudiants).Cesétudiantsassistaientàdescon-

férencesprivéesetrépugnaientàsuivrelescoursassurésàlaFacultéoudanslesservices

hospitaliers.Touslesautresétudiants,c’est-à-direlagrandemajorité,suivaientdesen-

seignementsdispensésdanslesfacultéssousformedecoursmagistraux.Ilétaitdemandé

aux étudiants de restituer les savoirs dispensés lors de sessions d’examen: les lacunes

69PESTALOZZIJohann(1801).CommentGertrudeinstruisitsesenfants.Editionfrançaise1898.RésumédeslettresIVàVI.

Principede l'expérience sensible :L'apprentissage se fait sur du concret. La théorie doit être complétée par desstagesdeformationprofessionnelle.Ilfautéviterl'abstrait,leverbiage.Ilfaututiliserunlangagedumonderéel.Principedesignificationélémentaire :Ilestnécessairederevenirrégulièrementàdeschosessimplespourseré-approprierlesavoir.Principedel'accomplissementachevé:L'objectifdupédagogueestdeconsolidersessavoirsdansunephased'ins-tructionbiendéfinie,etnond'accumulerdestasdeconnaissances.Principed'activité:Onapprendmieuxenpositiond'action,decréation.

70Noustraduisons«anschauung»par:«pédagogieréalistedifférente»

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dansleuréducationmédicaleétaientcriantes,carlesprocessusd’apprentissagen’étaient

seulementbasésquesurlescapacitésdemémorisationsdesavoirs.

Pouraméliorerlaformationdetouslesmédecins,legouvernementfrançaispromulguaen

1958unenouvelleréforme(laloiDebré–voirannexe1)baséesurunefusiondeshôpitaux

avec les Facultés (création des Centres Hospitaliers Universitaires ou CHU). Lamise en

placedecetteréformeaétécependantlaborieuse.Dixansplustard,en1968,lesobjectifs

prévusparlaloisontloind’êtreatteints.Lesenseignementsfacultairesetaulitdumalade

étaienttoujourspeusuivis,lesétudiantsprivilégiantlesconférencesprivées(Gosset,1969,

p.19).Pourtant,dès1964,desenseignantsontfondé,sousl’impulsionduPr.Jean-Jacques

Guilbert71,laSociétéd’InformationetdeRecherchessurl’ÉducationMédicale(SIREM).Un

desobjectifsdecettesociétéétaitd’éviterlebachotagedesétudiantspourlesconcoursen

modifiantnotammentladocimologie.LePr.JeanGossetproposadecréerdanschaqueFa-

cultédemédecineundépartementdepédagogie.Commeilaécritdanssonlivrepédago-

giemédicale(1969,p.15):

«Tous lesenseignantssaventcequ’ilsdoiventenseigner.Certains, lesplus jeunessurtout, lesplussavants,nesaventpastoujourscommentenseigner».

GuyScharf(1977,p.73),arapportélesproposduDrMazerpubliésen1975danslaNou-

vellePresseMédicalesurlesenseignantsdesFacultésdeMédecine:

«CommeM.Jourdainfaisaitdelaprose,l’enseignantdelamédecinefaitdelapédagogie…puisqu’ilenseigne très bien, dumoins en est-il souvent persuadé: si, d’aventure, les résultats d’un examensontcatastrophiques,ilsaitque,seule,laparessedelajeunesseactuelleenestresponsable».

Pourlaplupartdesenseignantsdecetteépoque,enseigner,c’esttransmettredessavoirs.

C’étaituneconceptiontrèslimitéedel’enseignementdontl’efficacitéréellesurlescom-

pétencesdufuturprofessionneldesantéàdonnerdessoinsn’étaitpasévaluée.Laseule

évaluationportaituniquement sur la restitutiondes connaissancesenseignéesaumo-

mentdessessionsd’examens.Et laconcurrenceétaitrudeentre lesmédecinsquipro-

fessaientàlaFacultéetceuxquienseignaientaulitdumaladedansleshôpitaux.Lacon-

ceptualisationd’unapprentissageintégré,defaçonàéliminertouteredondancedescon-

71Jean-JacquesGuilbert est le co-auteuravecChristineRousse-Lacordaired’uneétudecommandéepar leministèredel'Éducationnationalepubliéeen1967intitulée:opinionsdesenseignantssur lesexamensenfacultédemédecine-en-quêtedelasectionmédicale,Directiondesenseignementssupérieurs.

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tenusenseignéssur lesbancsde laFaculté commeau litdumalade,était très rarement

abordéeparlesautoritésuniversitairesdesanté,etsic’étaitlecas,trèsviteoubliée.C’est

bienplustard,verslesannées1970,queleconceptd’apprentissageacommencéàprendre

formedansnosUniversitésmédicales:enseigner,cen'estpasseulementtransmettredes

connaissances, mais c'est surtout faciliter ou organiser un apprentissage afin de ré-

pondreefficacementauxdemandesdesoindelasociété.Teachingisnottelling:enseigner,

cen’estpasseulementdire!

La loi d’orientation de l’enseignement supérieur dite loi Faure, promulguée après les

événementsde1968,asupprimél’annéepropédeutiqueauxétudesmédicales(certificat

PCB pour physique, chimie et biologie, uniquement organisée par les Facultés de

Sciences).CetteannéedepropédeutiqueaétéremplacéeparlapremièreannéeduPre-

mierCycledesÉtudesMédicales(P.C.E.M.1).En1971, lesimpleexamenenfindepre-

mièreannéeest transforméparunesélectionrigoureuse: c’est leNumerusClausus. Il

s’agit d’un véritable concours. Cette réforme, en s’appuyant majoritairement sur

l’enseignement des matières scientifiques, a démédicalisé les premières années des

étudesmédicales; les étudiants enmédecine dans les années1970 étaient au contact

desmaladesseulementen4eannéedemédecine!(Actuellementen3eannée).Heureu-

sement,touslesétudiantsontlapossibilitéd’allerenstageàl’hôpitaldepuislasuppres-

siondu concours de l’Externat. Les connaissances théoriques et pratiques qui se sont

amplifiées très rapidement depuis la secondemoitié du vingtième siècle ont littérale-

mentatomisélapratiquemédicale,favorisantl’émergencedetrèsnombreusesspéciali-

tés;avecpourcorollairelamisedecôtéd’unedesprincipalescaractéristiquesdelamé-

decinegénérale:lapriseenchargeglobale.

LaformationmédicalecontinueenFrance

EnFrance,avant1958,environ15à20%desétudiantsenmédecineavaientpubénéfi-

cierd’une formationmédicaledehautniveau. Jusqu’en1984, la formation initialedes

médecins généralistes était loin d’être idéale. Heureusement, grâce à l’investissement

d’uncertainnombredeprofessionnelsdelasantédansledomainedelaformationcon-

tinue,lamédiocritédecetteformationinitialeaétéplusoumoinscompenséepourles

médecinsassistantsauxdifférentesréunionsdeFMC.Cependant,laréalitéaétéparfois

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bienéloignéede l’idéal.Lesdifficultésrencontréespar lesresponsablesde laFMCaux

USAsontmalheureusementprésenteségalementenFranceetnesesontguèreamélio-

réesmêmedepuislamiseenplaced’uneFMCobligatoire.

La notion de FMC est probablement antérieure aux extraordinaires progrès de la re-

cherchemédicale au dix-neuvième siècle.Mais c’est au cours de ce siècle qu’elle s’est

développée progressivement avec lamise à la disposition du corpsmédical, des pre-

miersnumérosdelapressemédicale,qu’ellesoitnationaleourégionale.Lesmédecins

ontpu lireainsi lepremiernumérode laGazettemédicaledeParis en1830.Lesdiffé-

rentsexemplairesduBulletingénéraldethérapeutiquemédicaleetchirurgicale ont été

édités entre 1831 et 1939. Plus tard, le 5 juillet 1879, paraît le premier numérod'un

nouvelhebdomadaireàl’attentiondesmédecins,intituléLeConcoursmédical,journalde

médecineetdechirurgie72.Enprovince, laGazetteMédicaledeStrasbourgaétépubliée

pour la première fois en 184073, celle de Toulouse en 1851; le premier numéro de

Montpelliermédicalestsortidepresseen1858.

Les premiers rassemblements desmédecins en sociétés locales se sont formés égale-

ment au cours du dix-neuvième siècle. Leurs objectifs étaient déjà d’échanger des sa-

voirs pour compléter leur formation. Créées le plus souvent à l’initiativedemédecins

hospitaliers,ellesétaientplusaxéessurdestransmissionsdesavoirs(lesmédecinsve-

naientécouterunconférencierréputé),laissantuneportioninsignifianteauxéchanges

d’informations.

C’estaprèslaSecondeGuerremondialequelaFMCaprissonessor.LesUniversitésmé-

dicales ont participé plusmassivement à des enseignements post universitaire (EPU).

CesEPUavaientgénéralementlieusousformedeconférencespourinformerlespartici-

pantsdesnouveautésenmédecineouréactualiserdesnotionsapprisessurlesbancsde

laFaculté.MaiscommelepréciseGuyScharf(1977,p.17),

Ilestnotoirequecesinitiatives,malgrédeseffortsconsidérablesdelapartdespromoteursetdesinformateurs, se sont soldéesparunéchec.Àpeine10 -12%desgénéralistes concernésassis-

72LÉONARD Jacques(1980). Les débuts du « Concours médical». Communication présentée à la séance du 13décembre1980delaSociétéfrançaised'histoiredelamédecine.73CORDONNIERPauline(2011).p27.

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taientàcesconférences.Et lesunset lesautresdese lamenter:onnepeutmenerleschevauxàboires’ilsneveulentpasboire!».

Plusieursraisonsdecedésintéressementpour lesEPUontétérepérées(Scharf,1977,

pp.18–19).CesmanifestationsavaientlieuleplussouventdanslesFacultés,pastou-

joursprochesdescabinetsmédicaux,leplussouventenhiveroùlapathologieétaitcon-

séquenteetlesmédecinspeudisponibles,avecunrythmeirrégulier.Surleplanpédago-

gique,lesEPUétaientdestinéessurtoutàfairepasserdesconnaissancessousformede

coursmagistraux,négligeantlessavoir-faireetsavoir-être.LouisJustin-BesançonetGuy

Laroche,professeursàlaFacultédeMédecineBichatClaudeBernard,ontcrééen1947

lesentretiensdeBichat,largementinspirépardesexpériencesdeFMCauxUSA.Accueil-

lantaudébut lesmédecinsdesquartiersvoisinsde l’hôpitalBichat, ilsprirent rapide-

mentunedimensionnationale.Pendantplusieursdizainesd’années,lesdifférentesfor-

mationsontétéproposéessousformedetablesrondessuiviesd’undébatentrelesin-

tervenantsetlesparticipants.Tropsouvent,letempsréservéàcesdébatsétaitréduità

laportioncongrueetl’onretrouvaitainsilestraversquel’onreprochaitauxEPU.C’est

seulement à partir des années1970 que les principes de la PPO sont enfin pris en

comptedanslaformationmédicalecontinue:l’enseignementestcentrésurl’apprenant

et non sur le savoir. Cette prise en considérationde la PPOest certainement liée à la

créationdespremièresassociationsdeFMCdontlesmembresn’acceptaientpluslesys-

tèmedesconférencesmagistrales. En1976,GuyScharf,médecingénéralisteàWoippy

(Lorraine)déclaraitdanslarevuemédicaleLeGénéraliste74:

«J’estimequemesétudesnem’ontabsolumentpaspréparéàceterriblemétierdemédecingéné-raliste.Laformationmédicalecontinueestdoncindispensable,jelaconsidèrecommeundroitdumaladeetcommel’affaireexclusivedesgénéralistes,àtouslesniveaux:conception,organisation,méthodologie. Avec la collaboration de l’Université, mais pas avec n’importe quels universi-taires.»

GuyScharfaalorsformulécommealternativeàunenseignementpostuniversitairetrop

éloignédesmédecinsetlimitéauseulsavoir,uneformationdécentralisée,véritablement

continueetpersonnalisée.LeseulenjeudelaFMCestl’améliorationdessoins,enaucun

cas d’apporter auxmédecins des connaissances qui ne lui seront de peu d’utilité. Il a

proposédecréerunePPU(perfectionnementpostuniversitaire),qu’ilaopposéeàl’EPU

«d’essence académique, aux relents paternalistes et d’une inefficacité démontrée». 74LalonguemarcheduDrGuyScharf(1976).LeGénéraliste,25septembre1976.

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(Scharf, 1977, p.21). La FMC des médecins généralistes doit être gérée par ceux qui

connaissent lemieux leursbesoinset leursmanques, c’est-à-dire les généralistes eux-

mêmes.Beaucoupd’organisateurs de séances de FMCdemandaient auxuniversitaires

ouspécialisteslibérauxd’assurerl’expertiseetauxgénéralistesd’animerlessessionsde

formation75.Orcesdernierssedevaientdeparticiperdudébutàlafin,delaconception

à la réalisation, de l’animation à une expertise adaptée à sa pratique. Guy Scharf a

écrit(1977,p.32):

«Jamais lesCongolaisnepeuventaccepterque lesEsquimaux leurenseignent lamanièredeseprotégerdelachaleur.MêmepassicesEsquimauxsefontnaturaliserCongolaisetontvécusouviventparmieux».

1.2.Lesmodèlesd’apprentissagesdéveloppésdanslasecondemoitiéduXX°siècle

«Quandj’embaucheunmaçon,ilestqualifiéaupieddumur,maisilestcompétentenhaut.»Cettephraseestunemanièredenousrappelerquela compétencese jugeaposterioribeaucoupplusqu’apriori. Celane signifiepasque l’onnepuissepasparlerde compétences requisespourunposte.Néanmoins,lacompétencenepeutêtreséparéedurésultat».(Desprez,2000,p.4).

1.2.1. L’évaluationdes compétencesdans le cadrede l’apprentissage: l’approcheparcompétences

Pouvions-nouscontinuer,danslasecondepartiedu20esiècle,àconsidérerlecerveaucommeunesimpleboitenoire?

Intrainingachildtoactivityofthought,aboveallthingswemustbewareofwhatIwillcall"inertideas"–thatistosay,ideasthataremerelyreceivedintothemindwithoutbeinguti-lised,ortested,orthrownintofreshcombinations76.

AlfredNorthWhitehead–theAimsofEducation(1929,p.13)

Ladéclinaisond’unprogrammed’enseignementoudeformationsousformed’objectifs

disparaîtpeuàpeudepuis lesannées1990auprofitd’uneascension irrésistibled’un

nouveau paradigme d’apprentissage: l’approche par compétence dans les processus

75C’estencorehélasvraien2013,prèsde40ansaprès(notedel’auteur).76«Lorsquenousproposonsunetâchecognitiveauxenfants,nousdevonsêtreconscientsdudangerquereprésentece que j’appelle les idées inertes, c’est-à-dire les idées qui sont reçues par le cerveau sans être utilisées, mises àl’épreuveouemployéesdansdenouvellescombinaisons»,[notretraduction].

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d’apprentissage77. Auparavant, le but de la PPO était de privilégier le rôle central de

l’évaluation des acquis pendant un processus d’apprentissage.Mais cemodèle totale-

mentcomportementalistenepermettaitpasd’évaluercorrectementlacompétencedes

futursprofessionnels.Cetteévaluationétait indigente,car limitéeàdesobjectifspéda-

gogiquessimples:ilétaitdifficiledesefaireunevéritableidéedescapacitésréellesdes

apprenantsàrépondreefficacementlorsqu’unetâchecomplexeleurétaitproposée.

LaPPOfavorisaitainsilemorcellementdesapprentissagesetnepermettaitpasd’avoir

unevisionglobalenonseulementsurlessavoirsacquis,maisaussisurlamiseenœuvre

deprocessusintellectuelsutilisésetlestransfertsdecessavoirsd’uncontexteàl’autre.

Ildevenaitnécessairedequittercemodèled’apprentissageparobjectifsquin’apportait

pas de réponse satisfaisante aux attentes des enseignants et des apprenants. Enfin, la

PPO était axée essentiellement sur l’évaluation d’acquisitions simples, privilégiant les

capacitésdebasniveau intellectuel(mémorisation,définition,exécution)etnégligeant

totalement les processus d’apprentissage complexes et les habiletés intellectuelles de

hautniveau(résolutiondeproblème,argumentation,analysecritique,etc.).Danslase-

condepartieduXX°siècle,denouveauxconceptssurledéveloppementintellectueldes

individus,notammentdesenfants,sesontessentiellementdéveloppésaveclestravaux

sur l’intelligence et lamémoire entrepris enEuropepar JeanPiaget, enURSSparLev

VygotskietenAmériqueparJeromeBruner.Cettepremièreprisedeconsciencesurles

processusmentaux internes décrits par ces auteurs a été renforcée par le développe-

mentdestechniquesdel’informationetdel’intelligenceartificielle,s’appuyantsurdes

travaux sur l’attentionet lamémoire.Toutes ces recherchesont abouti à ladéfinition

d’unnouveauparadigmed’apprentissage:lecognitivisme.Selonceparadigme,nospro-

cessusmentauxinternesutilisentdesstratégiesmentalesafind’intégreretassimilerdes

informations:cesactivitésintellectuellessontnécessairespourapprendre,sesouvenir

etcréerdesreprésentationsdumondegrâceàuntraitementdel’informationparlecer-

veau. C’est par raisonnement et en réfléchissant sur ses expériences que l’apprenant

construitsaproprevisiondumondedanslequelilvitdanslebutdecomprendrelaplu-

partdesréalitésquil’entourent.

77ROMAINVILLEMarc(1996).L’irrésistibleascensiondutermecompétenceenéducation.Enjeux,pp.37-38.

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Quedéfinit-onparlevocable«compétence»?

EnFrance,lemotcompétenceexistedepuislongtemps,maisdansuncontextejuridique.

Cetermeétaitassociéàuneinstitutioncapabled’accomplirunacteoudeprendreune

décision:parexemple,cetribunalestcompétentpouragir.Verslafindudix-huitième

siècle,ladéfinitiondelacompétenceserapporteàunepersonnecapabledefairegrâceà

sessavoirsetsonexpérience.Peuàpeu,letermeestdevenudésuet.Ilaétéreprispar

NoamChomskyen1959quiadéfinilacompétencecommeunconceptintellectuelinné.

Cedernierrésultededifférentsmécanismesmentaux(attention,perception,mémoire)

nécessairespourtraiterl’information,malgrédeslimitationsduesauxinsuffisancesde

lamémoirehumaineetdesprocessuscognitifs78.Dansunlivreéditéen1965:aspectsof

theTheoryof Syntax, Chomsky avait proposé de définir la compétence comme un en-

semblededispositions,capacités,aptitudesspécifiquesquipermettentàtoutsujetpar-

lantunelanguedelamaîtriserdanstoutessituationsconcrètes.Celasous-tenddesca-

pacitésàs’adapter,àêtreréactif,àapprendreetàcommuniquer.Lacompétence,écri-

vaitPhilippeMeirieuen1987danssonouvrageApprendre...oui,maiscomment?,estun

«savoiridentifiémettantenjeuuneoudescapacitésdansunchampnotionneloudisci-

plinairedéterminé.Plusprécisément,onpeutnommercompétence la capacitéd'asso-

cieruneclassedeproblèmesprécisémentidentifiéeavecunprogrammedetraitement

déterminé».

Mais ce modèle devenu référence universitaire n’est pas exempt de critiques. Pour

ChristianBelisson(2012,p.10),

Leschémadelacompétence,telqu’ilestconçuparN.Chomskyetquis’estgénéralisédanslesmi-lieuxdel’enseignementnereflètedoncpaslacomplexitédesprocessusquisontmisenplaceaucoursdel’évaluation.Ilyalàuneillusiondesexpertssurleursproprescapacités,ausensdéfinici-dessus,c'est-à-diresurlespossibilitésqu’ilsauraientd’inférerlescapacitésducandidatàpartirdesfairequ’ilmetenscène.

Ainsi,GuyLeBoterf (1989)proposeunedéfinitiondifférentedecelledeChomsky: la

compétencenerésidepasdanslesressources(connaissances,habilités,attitudes)àmo-

78Cette limitation physiologique de lamémoire humaine a été notamment décrite par George ArmitageMiller en1956dansunarticlepubliédansPsychologicalReview:TheMagicalNumberSeven,PlusorMinusTwo,SomeLimitsonourCapacityforProcessingInformation–Lenombremagiqueseptplusoumoinsdeux:surquelqueslimitesdenotrecapacitéàtraiterl’information(textetraduitparYvonneNoizetinJ.MEHLER,G.NOIZETG.(1974).Textespourunepsycholinguistiquepp.337-364.

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biliser,maisdanslamobilisationmêmedecesressources.Lacompétenceestdel’ordre

dusavoir-mobiliser.PhilippePerrenoud(1997)estencoreplusprécis:

«Lacompétenceestunecapacitéd’actionefficace faceàune familledesituations,qu’onarriveàmaîtriserparcequ’ondisposeàlafoisdesconnaissancesnécessairesetdelacapacitédelesmobili-seràbonescient,entempsopportun,pouridentifieretrésoudredevraisproblèmes».

PierreGillet(1991,p.69)adéfinilacompétencecommeunsystèmedeconnaissances,

conceptuellesetprocédurales,organiséesenschémasopératoiresetquipermettent,à

l’intentiond’unefamilledesituations,l’identificationd’unetâcheproblèmeetsarésolu-

tionparuneactionefficace.LindaAllalattribueunéclaircissementdifférent:(2002,p.

78) «une compétence comprend plusieurs connaissances mises en relation, elle

s’appliqueàunefamilledesituations,elleestorientéeversunefinalité.Elleaffirmeéga-

lement(2002,pp.81-82):

«Une compétence est formée de ressources cognitives etmétacognitives, ainsi que de compo-santes affectives, sociales et sensorimotrices qui jouent un rôle parfois déterminant dansl’activationdesconnaissances…Unecompétencecorrespondàuncontinuumconstituédediversniveauxdecomplexitéetd’efficacitéplutôtqu’àunpalierd’excellencequin’estatteintoupasat-teint… La compétence se construit toujours par un apprentissage en situation, ce qui impliquel’appropriation non seulement de savoirs et savoir-faire, mais aussi de modes d’interaction etd’outilsvalorisésdanslecontexteenquestion».

Lacompétencecorrespondraitdoncàunensembled’aptitudesetdecapacitésàaccom-

plir une tâche complexe déterminée, articulé sur des savoirs et des savoir-faire. Elle

sous-tendunensemblededispositionsquirendl’apprenantapteàréalisercettetâche

selontroisaxes:

• unaxecognitifbasésurlessavoirsetlesstratégiesquel’apprenantdoitmobili-

serpourréaliserlatâchecomplexe.

• un axe socioaffectif destiné à motiver l’apprenant pour s’engager dans la dé-

marchederésolutiondecettetâche.

• un axede transfert, établi sur les capacitésà extrairede lamémoiredes situa-

tionsrésoluesdéjàrencontréesnécessairepoursélectionner,adapteretutiliser

des stratégies de résolution déjà connues, nécessaires pour la résolution de la

tâcheprésente.

Si nous effectuons une synthèse de ces différentes définitions, la compétence devrait

êtreconsidéréecommeunecapacitévirtuelledestinéeàmettreenœuvredessavoirs,des

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attitudes et des habilitésmobilisés, afin d’exécuter etmener à bonnes fins une nouvelle

tâchecomplexe.Êtrecompétent,cen’estpasseulementunecapacitéd’agiravecdiscer-

nementetdefaçonappropriée;c’estaussiêtrecapabled’activerdesprocessusmentaux

et de mobiliser des savoirs mémorisés, en tenant compte du contexte où se déroule

l’action,afinderéussircequiaétéentrepris.Acquérirdescompétences,c’estconstruire

unensembledesavoirspourrépondreefficacementàunesituationproblème.Maisêtre

compétent,c’estaussiinterpréter,transformeretmodifiercessavoirs,puislescombiner

afin d’être performant dans la réponse. La compétence s’exerce en situation. Elle doit

êtrereproductible.Ellen’est jamaisacquisedéfinitivement: laremiseenquestiondoit

êtrepossibleenfonctiondel’évolutiondesconnaissances.Ellepeutêtredécriteaprio-

ri:c’estunecompétencepotentielledel’ordreduvœu.Elleestreconnueetévaluablea

posterioriensituationdetravailàpartird’unréférentiel.

Lacompétencefaitappelàlanotiondecapacitéd’adaptationdel’apprenantfaceàune

situationcomplexe,quivasélectionner lesstratégiesmémoriséesutilesà larésolution

decettesituation.Elles’observetoujoursdansuncontexteopératoireutilisantlescapa-

cités cognitives et socioaffectives de l’apprenant. Le contexte d’apprentissage joue un

rôle fondamental dans le développement et l’utilisation des compétences. La

«compétence»(ausingulier)doitêtredifférenciéedes«compétences»(aupluriel)qui

désignent les objectifs généraux de formation. Ces deux termes sont utilisés

indifféremment dans le modèle d’apprentissage suivant, déclinaison pédagogique du

constructivisme,etquenousallonsdécouvrirmaintenant.

Ladoublegenèsedutermecompétenceestàl’origined’unecertaineindéterminationde

sa définitionqui nepeut être unique; cette définitiondiffère selon les instancesdont

elleémane:universitaireset chercheurs,oubienmondedesentreprises.Dans lesan-

nées60, ce sont lesuniversitaires, notamment les linguistes,quiontproposéunepre-

mière définition de la compétence, notammentNoamChomsky (cf.§ 1.7.3.). Au début

desannées1980,lemondeprofessionneldéfinissaitlacompétenceparlesdifférentsas-

pects qu’elles représentent. Les compétences peuvent être techniques, organisation-

nelles,stratégiques,sociales,relationnelles.C’estpourcetteraisonqu’ilsubsisteencore

denosjoursungrandnombrededéfinitions.Cesdernièressontsouventéquivoques,et

mêmeparfoisambigües.Iln’yapasdedéfinitionconsensuelledelacompétence:capa-

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cité?Aptitude?Performance?Qualification?Potentiel?Cettemosaïquededéfinitions

estàl’originedenombreusesdifficultésrencontréesparlesenseignantscommeparles

apprenants;notammentàproposdesmoyensproposéspouratteindreleniveauexigé

de lacompétenceattendueet lesprocessusd’évaluationnécessairesà lamesuredece

niveau.Lacompétencerelève-t-elledavantagedudiscoursetdel’idéologieplusquedes

pratiques?

Cetteconfusiondans lesdéfinitionsasoulevéetprovoquetoujoursdesdébatscontra-

dictoiresàl’origined’uneremiseenquestiondececoncept.Pourcertainspédagogues,

être compétent signifie qualification, c’est-à-dire être capable d’exécuter un certain

nombre de tâches. Cette qualification ou habilitation est obtenue à la fin d’un cycle

d’apprentissage où l’expérience et l’ancienneté de l’apprenant sont partie prenante.

Pourd’autres,êtrecompétentcorrespondaupotentield’unapprenantàdévelopperdes

capacitéset lavalidationdecescapacitésacquisestoutau longd’unapprentissage.La

qualificationestdéfiniecommeunensembledecapacitésouderessourcesnécessaires

pourexercerunmétier. Lepassagedu conceptdequalificationau conceptde compé-

tenceestmanifeste:dupotentieldefaireàlaréalisationbienmenéedecequidoitêtre

fait.

SelonSylvieMonchatre79,

«Lacompétencetenddésormaisàêtreappréhendéeentermesdepotentielàdévelopperetsare-connaissance tend à être conditionnée par des résultats (primat de lamatière dont les perfor-mancesfuturessontàdévelopperetàmesurer)».

Lacompétenceestainsi identifiéecommeunconceptàdoubleconnotation:elleest le

refletd’unepart,depouvoirfaireetlareconnaissancedecettecapacitéàfaire,etd’autre

part,de l’aptitudeetledroit(puisquecertifiéd’avoirlacompétence)d’exercercetteca-

pacité.MarcelleStroobantsaécriten2007(p.90):

«Lacompétencen’ad’existencequesielleestjugéecommetelle,cequin’exclutpasl’éventualitédedeuxautrescasde figure inachevés, celuide la reconnaissanceprésomptueuseetceluide lacapacitéméconnue»

79MONCHATRESylvie (2010).Déconstruire lacompétencepourcomprendre laproductiondesqualifications.DansrevueInterrogations,Lacompétence,10.Disponiblesur:http://www.revue-interrogations.org/Deconstruire-la-competence-pour.

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Ilestpossiblealorsdedéfinirlacompétencecommelerésultatd’uneopérationàlafin

de laquelles’estproduitunchangementdans lerapportauxfaitsde lavie.Cechange-

mentpeutaffecterautantlessavoirsmobilisésquel’individuquilesdéveloppe.Dansle

mondeprofessionnel,plusieursdéfinitionsdelacompétencesontproposées.L’AFNORa

définilacompétencecomme«lamiseenœuvre,ensituationprofessionnelle,decapaci-

tés qui permettent d’exercer convenablement une fonction ou une activité80». Pour

l’Organisationinternationaledutravail81,lacompétenceprofessionnelleestl’aptitudeà

exercerefficacementunmétier,unefonctionoucertainestâchesspécifiques,avectoutes

lesqualificationsrequisesàceteffet».Leministèredel’Éducationnationaleadéfiniles

compétences comme un ensemble de savoir-faire et de connaissancesmobilisés dans

uneactionetadaptésauxexigencesd’unesituationdonnée.RichardWittorski(1998,p.

60)proposeladéfinitionsuivante:

«Lacompétencecorrespondàlamobilisationdansl’actiond’uncertainnombredesavoirscombi-nésdefaçonspécifiqueenfonctionducadredeperceptionqueseconstruitl’auteurdelasituation».

Nousallonsmaintenantnousintéresseràl’approcheparcompétencebaséesurunedé-

finition«idoine»delacompétence:c’estlapossibilitédemobiliserspontanémentetde

manièrepertinente,desressourcesdiversesafinderépondreàunesituationcomplexe.

Ces ressources sont de l’ordre du savoir, savoir-faire, savoir-être et savoir agir.

L’apprenantpeutrecouriraussibienàsesressourcespropresqu’àd’autresrecoursex-

térieurs.

Unsecondmodèled’apprentissagederéférence:l’approcheparcompétences(APC).L’approcheparcompétence(APC)estcentréesurl’acquisitiondeprocessusintellectuels

qui vont aider l’apprenant à acquérir ces savoirs. L’APC est basée sur les possibilités

d’actionsdel’apprenant(sonpotentield’agir)pourfairefaceàunesituationproblème.

Cette dernière est définie par PhilippeMeirieu (1987, p. 190) comme «une situation

didactiquedanslaquelleilestproposéausujetunetâchequ'ilnepeutmeneràbiensans

effectuer un apprentissage précis». Le but de l’APC n’est pas d’acquérir de nouveaux

80Association française de la normalisation (AFNOR): Formationprofessionnelle. Terminologie.Normes françaises,juillet1996.81DéfinitionduBureauInternationalduTravailàGenève(BIT)reproduitedans AFPA,Formationprofessionnelle:vocabulairedesformateursMontreuil1992p.47.

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comportements,maisdefavoriserlacapacitéd’unapprenantàtransféreretintégrerses

différents savoirs dansdes contextes divers. Les ressources sont de l’ordredu savoir,

savoir-faire, savoir-être et savoir agir. L’apprenant peut recourir aussi bien à ses res-

sourcespropresqu’àd’autresrecoursextérieurs.L’APCapourbutd’amenerlesappre-

nants à résoudre des situations complexes. Selon Léto&VanderBerghe (2003), dans

l’APC, les situations présentées doivent être proches de situations sociales ou profes-

sionnelles. Ce n’est pas les réponses de type scolaire qui importent, mais les aspects

pragmatiquesetpertinentsdecesréponses.

L’APCestdoncunprocessuspédagogiquecaractériséparuneparticipationactive,une

production effective de l’apprenant qui devient responsable de son apprentissage: il

apprendmieuxdansl’action.L’apprenantestmisdansunesituationd’inconfortquiva

l’obliger à décontextualiser une partie de son savoir. Il va ainsi pouvoir identifier ses

besoins,maisaussileslimitesdesonsavoir,cequivalemotiveràacquérirunnouveau

savoirpertinentpourrésoudrelatâcheauquelilestconfronté.Pourquecetteréflexion

etcettemobilisationdessavoirspuissents’effectuercorrectement,latâcheàréaliserne

doitpasêtresimple.L’apprentissageselonl’APCestunprocessusactifdeconstruction

desavoirsquivatransformerenprofondeurlesprocessusintellectuelsdel’apprenant.

L’apprenantn’aplusàappliquerouàrestituerdesconnaissances,maisdoitréaliserun

travail en profondeur pour développer ses compétences, c’est-à-dire maitriser de

nouvellescapacitésd’actionsquiserontutilespour identifieretrésoudredenouvelles

situations complexes.Dans l’APC, le rôlede l’enseignantest transformé; ilplanifie les

activités d’apprentissages (résoudre des tâches complexes) qui doivent avoir du sens

pourl’apprenant,maissurtoutilconseilleetaccompagnecetapprenant.L’enseignantne

donne plus à l’apprenant les critères de réussiteexigés pour accomplir la tâche

proposée; ilrecherchelescritèresd’efficacitéquel’apprenantamobiliséspourréussir

son activité d’apprentissage. L’enseignant propose aux apprenants de véritables

situations ou de problèmes pouvant être l’objet de plusieurs résolutions.L’apprentissage selon l’APC est un processus actif de construction de savoirs qui va

transformer en profondeur les processus intellectuels de l’apprenant. L’approche par

compétence a été déclinée en plusieurs courants pédagogiques notamment le

constructivisme, le socioconstructivisme, la théorie de l’activité et la théorie de

l’énaction.

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1.2.2.Sélectiondedifférentesdéclinaisonsdel’approcheparcompétences

Leconstructivisme JeanPiagetadéfiniaumilieudu20esiècleunnouveauparadigmed’apprentissageappe-

léconstructivisme.Ceparadigmes’appuiesurunactevolontaire,intentionneletmotivé

d’unêtrehumaindans lebutd’élaboreroudemodifierdesreprésentationsmentales :

cecienfaisantinterveniractivementdesprocessusintellectuels,notammentlamémoire.

L’apprenantvaancrersonnouveausavoiraveccequ’ilsaitdéjàendonnantdusensàcequ’ilaappris.Dans cemodèled'apprentissage, les connaissancesne sontpas transmisesparuneper-sonnequipossèdelesavoirversuneautrequinesaitpas.Ellessontacquisesselonunecertaineorganisation, lorsque l'environnement offre des conditions favorables et stimulantes afind’intégrercessavoirsdansl’action.L’apprenantestincitéàdécouvrirdesnotions,àintégrerdessavoirsetsavoir-faire.Cetteintégrationsefaitdansl’action:ellerépondàunbesoinquiprovoqueundéséquilibrequel’apprenantvarechercherà fairedisparaîtreselon lesdeuxmécanismessuivants: l’assimilationnécessaire pour intégrer les données du monde extérieur à sa propre structure mentale; etl’accommodation pour se conformer aux données de l’environnement. L’apprenant dispose deschèmesbasiquesdeconnaissancesqu’ilvacompléteroureconstruireaufuretàmesuredesonapprentissage afin de résoudre des situations de plus en plus complexes. L’assimilation etl’accommodation comme deux processus mentaux permettant à tout être humain d’interagird’adaptersonintelligenceavecsonmilieudevie.(Piaget,1975,p.177-182)Lesschèmesmentauxetdesconnaissancesacquisesauparavantsontconfrontésaveclesdonnéesde la nouvelle situation problème proposée à l’apprenant: c’est le conflit cognitif. Grâce àl’assimilation, l’apprenant, sans faire appel intentionnellement àdesprocessusmentaux, est ca-pabled’incorporerdirectementouenlestransformant,desélémentsprésentsdesonenvironne-ment.L’assimilationcorrespondàunmécanisme intellectuelquipermetdepasserde l'inconnuauconnu.Lerappeldesinformationsetdesschèmesmentauxmémorisés,acquispardesappren-tissages précédents qui ont eu lieu hors ou dans des institutions, permettent à l’apprenantd’utiliserdesrèglesdestratégiesadaptéesàlarésolutiondelasituationproblème.L’individuenapprentissagepenseavoirlescapacitéspourmaitriserlatâchedemandée.Ceprocessusd’assimilationn’estcependantpastoujourssatisfaisantpourintégrertouteslesin-formationsutilespouréclairciretdémêlerlasituationproblème.Parfois,unautreprocessusin-tellectuelestnécessairepourrestructurertouteslesinformationsdisponibles.Pourmeneràbiencetterestructuration,unesecondeétapementaledited’accommodationestmiseenplacelorsquedesactionspédagogiquesproposéesauxapprenantssontsusceptiblesd’entrainerundéséquilibre,le conflit cognitif. L’apprenant se retrouve dans une phase de déstabilisation qui va l’amener àprendreconsciencedeses insuffisancesetdeses limites.Poursatisfaireà l’exigencede latâchedemandée, l’apprenant cherche des solutions possibles en reconsidérant ses savoirs et sesschèmes. Il rechercheéventuellementà intégrerdenouveauxsavoirs (phased’accommodation)pourobtenirunesolutionadaptéedelasituationproblème.Celaaboutit,parunerestructurationdesesnouveauxsavoirsavecceuxmémorisésauparavant,àunnouveléquilibre.

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La présence d’un conflit cognitif va susciter chez les apprenants un effort

d’apprentissagedontlebutestderécupérerleplusrapidementpossibleunnouveléqui-

libre de leurs structures cognitives grâce à l’élaboration de nouveaux schèmes ou de

modificationd’anciensschèmes.L’accommodationestunprocessusadaptatifd'appren-

tissage destiné à induire l’apprenant àmodifier ses schèmes et ses repèresmentaux.

Avec l’approche constructiviste, l’apprentissage est une construction de savoirs (con-

naissances,aptitudes,attitudeset savoirsagir)qui s’effectueprogressivementàpartir

dessituationscomplexesauxquelles l’apprenantestconfronté.Désormais, ilestpréfé-

rable de situer au niveau de la compétence et d’utiliser avec parcimonie le terme

d’objectif.Maisest-cepossibledanslaréalitédesapprentissages82?Laconstructiondes

connaissancesestunprocessuscontinunonlinéaire;cetteconstructionsedéveloppeà

partird’interactionsentrelesujetetsonenvironnement,selondesprocessusmentaux

d’équilibration et d’autorégulation. Le processus d’accommodation est un processus

majoritairement intentionnel. Or, selon les définitions de la CommunautéEuropéenne

(Cedefop,2002),l’apprentissageformelestintentionneldelapartdel’apprenant.Nous

pouvons ainsi conclure, avec cependant beaucoup de précautions, que la phase

d’accommodationestsurtoutformellealorsquelaphased’assimilationassocieappren-

tissagesformelsetinformels.

Selon Jean Piaget, cette réorganisation des connaissances est réalisée par autorégula-

tionetrecoursàlacybernétique;pourJean-LouisLeMoigne(1977),ils’agitplutôtd’un

processusd’auto-organisationdesprocessusintellectuelsquifaitappelàlathéoriedes

systèmes83.Cependant,cemécanismed’appropriationdesconnaissancesestprofondé-

mentindividuel.Est-ilsuffisantpouraccommoderlesprocessusmentauxdechaqueap-

prenantquivonttraiterdesinformationsissuesdel’environnementdel’apprenant,les

transformerensavoirsafinqu’ilpuisseagirsursonenvironnement?Leconstructivisme

n’est pas la seule perspective pédagogique de l’approche par compétence. D’autres

82DanslecadredenotremissionauseinduConseilNationalScientifiquede laFormationContinueProfessionnelle(CNSFCP), entre 2005 et 2012, de nombreux dossiers pédagogiques de formation médicale continue déposés auCNSFCPafind’obtenirunfinancementpublic,ontsouventétérejetésàcausedecetteconfusionentreunecompétenceàacquériretunobjectifàréaliser.83Un systèmeestunensembleglobal et complexed’élémentsqui sontmis en relationd’unemanièrehiérarchisée.Cettehiérarchisations’effectueselonundegréd’organisationvariableenfonctiondel’environnementetducontexte.SelonLudwigVonBertalanffy(1993),quiapubliéunouvragesurlathéoriedessystèmes,"onnepeutobtenirlecom-portementdel'ensemblecommesommedeceuxdesparties".

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perspectives ont été proposéesnotamment la théorie de l’activité et la théorie de

l’énaction.

Lathéoriedel’activité Cetteapprochepédagogiquedérivedetroisprincipespédagogiques:

• les conceptions sur l’éducationdeLevVygotskidans les années1920–1930 : «il n'y apasdepsychismesanscomportements,maisiln'yapasdecomportementssanspsychisme».Lathéoriedel’activitéétaitcentréeessentiellementautourduconceptdelamédiationsocioculturellefoca-liséesurl’apprenant.

• les théories de l’action développées notamment par des disciples de Vygotski (Leontiev, 1975,1981,1984),Luria,1959etGalpérineetTalyzina,1968,1980):unapprenantdémontreetdéve-loppesescapacitésintellectuelleseninteragissantaveclesautresselonuncanevasbasésurdesprocédures flexibles dans le but d’agir; sans quoi, les interactions avec lemilieu où elles sontmisesenœuvresontlimitéesetvaines.

• Les principes de l’enseignement programméqui ont été développés dès le début du20e siècle

avec une première expérimentationmenée en 1910 et connue sous la dénomination de lamé-thodeWinnetka (dunomd’une ville de la banlieuenorddeChicago). Cette expériencepédago-gique a été conçue par CarletonWashburne, inspecteur - administrateur des Ecoles Publiques(Washburne,1932).Cetteméthodeutilisaitdifférentsmatériauxcommedesfichesdetravail,desfichesdecorrection,destests.Elleétaitbaséesurdesactivitésdegroupesettenaitcomptedesacquisitionsdesélèvesenleurpermettant,commedansleplanDalton,deprogresserselonleurproprerythme.Cetteconceptionpédagogiqueavaitétéd’abordcritiquéepuisadoptéeparCéles-tinFreinetenFrance.

Àpartirdesannées1950,l’enseignementprogrammés’étaitparticulièrementdévelop-

pésousladirectiondeSkinner.Cetteconceptiond’apprentissageétaittotalementcom-

portementaliste. Dans les années 1970, l’apprentissage par enseignement programmé

estconsidérécommeunpossibleprocessusactifdeconstructiondeconnaissance,grâce

notamment au développement de nouveaux concepts pour apprendre, liés à

l’apprentissageconstructivisteetàlathéoriedel’information.

Ce sont des pédagogues soviétiques, disciples de Vygotski, qui ont relancé ce type

d’enseignement, dans une conception comportementaliste et cognitiviste à la fois, en

définissant la théoriede l’activité. Cette théorie est axée sur l’étude des actions inten-

tionnelleset raisonnéesparun individuouungrouped’individus.L’êtrehumainn’est

paspassiffaceaumondequil’entoure:ilaunrôleactifdanssonenvironnement.Agir

estuneréponseàunbesoin.Quandcebesoindevientcognitif, ildoitêtresatisfaitpar

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uneactivitéd’apprentissage.AlexeiLeontiev(1984,pp.111-121),àlafindesannées70

considère l’apprentissage comme une activité humaine sous-tendue par des buts, des

motifspourapprendre(mobiles)etdesmoyensd’action.Lesbutsvontorienterlechoix

desactivités, lesmobilesvont inciter l’apprenantàréalisercetapprentissage.C’estun

système cohérent de processus mentaux internes, d’un comportement externe et de

processusmotivationnelsquisontcombinésetdirigéspourréaliserdesbutsconscients.

L’activitéhumainenepeutêtre isolée :elleest toujourssous influencesociale,définie

parunobjectifàréaliser(Leontiev,1981,pp.13-15).

«L'activitéd'unêtrehumainatoujoursunesignificationconcrète.L’individun’agitpaspoursim-plement réalisern’importequelacte.Chaqueactionest constituéeparune interactionavecdesobjetsextérieurs.Cesdernierspeuventinfluenceroumodifierlesactionsencoursdansunmêmetemps: et ceci peut aller jusqu’à influencer d’autres personnes. Même s’il s’agit d’une activitéexercéeparuneseulepersonne,cetteactivitéesttoujourssousinfluencesociale.Elledevientré-ellenonpasquandelleseraconsidéréecommeunesimplemanipulationd’objet,maislorsqu’elledeviendra socialementnécessairepour se concrétiser, c’est-à-dire lorsque l’êtrehumainpourradémontrerlesconditionssocialespréalablesàsaréalisation.C’estunmotifetunbutquivontdé-terminer l’activitéhumaine.Cemotif et cebutontun caractèrematériel,mêmesi l’activitéhu-maineprévueaunefinalitéabstraite.Ainsi,sicetteactivitéportesurdesbesoinsdebasecommesenourrir et sedésaltérer, ces besoinsdoivent cependant acquérir la formed’unobjet concretpourapporterl’énergienécessaireàlaréalisationd’uneaction84».

Ainsi, une activité est associée àunmotif, une actionàunbut etuneopérationàdes

conditionsnécessairesà sonexécution.L’activitéde soinsestuneactivitépersonnelle

quandils’agirdumédecin,maisellenepeuts’effectuerquedansuncontextesociétal.Si

«lesactionspeuventêtre individuellesoucollectives,ellessont toujoursdirigéesvers

unbut conscient, les opérations sont exécutées inconsciemment et sont orientées par

unebased’orientationnonconsciente»85.SelonLeontiev(1976,p.293),

«Pourquesurgisseuneaction,ilestnécessairequesonobjet(sonbutimmédiat)soitconscientisédanssonrapportaumotifdel'activitédanslaquelleestinséréecetteaction.»

84«Aman’sactivityisalwaysmaterialandsignificant.Mandoesnotsimplybehave,nordoeshesimplyperformab-stractdeeds:anyoneofhisactionsconstitutesatthesametimeaninteractionwithobjectsoutsidehimself,anditcaninfluenceoralter them(weshallseebelowthat thiscansometimesextendtoan influenceonotherpeople).Man’sactivityisprimarilysocialandembodieshissocialrelationships.Itisnevertheactivityofagivenconcreteindividual,consideredseparatelyfromsociety;anditonlyemergesasmaterialandmeaningfullactionratherthanamerema-nipulation of thingswhen its social, objective necessity becomesmanifest, andman shows the socially elaboratedprerequisitesnecessaryforthataction.Man’sactivityhasasystematicstructure–wehaveseenthisintheprecedinganalysis.Letusstartbysayingthatitischaracterizedbymotiveandaim.Bothareprescribedtomanbysociety,andbothhaveamaterialcharacter.Evenwhentheaimofmyactivityisthesatisfactionofmynaturalneeds–hungerofthirst,say–thoseneedshavetoacquiretheformofaconcreteobjectinordertobecomethepropulsiveforceofanaction”,[notretraduction].85BOURGUINGrégory,2000,p.43

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Lathéoried’activitédeLeontievestsystémique.Ellecorrespondàunerégulationper-

manenteàplusieursniveauxdedifférentsélémentsconstammentenrelation:cen’est

pas une simple juxtaposition d’éléments de formation qui s’additionnent petit à petit.

C’estunsystèmecohérentdeprocessusmentauxinternes,d’uncomportementexterne

et de processusmotivationnels qui sont combinés et guidés, en fonction du contexte

d’apprentissage,defaçonàaccomplirdesbutsdontlesapprenantssontconscients.Car

l’actiond’apprentissagenes’appuiepassuruneactionindividuellecaractérisantunseul

apprenant;maisellecorrespondàuneactivitécollectiveincitantplusieursapprenantsà

apprendreensemble.L’analysedel’activitédel’apprenantn’estsignificativequesicette

activité est pratiquée dans un environnement riche en échanges humains, enmoyens

matériels.«Quandelleestmorcelée, l’activitéhumaineperdsonsensetsadynamique

intrinsèque86.D’autresauteursrussesontégalementproposédesinterprétationssurla

théoriedel’activiténotammentPiotrGalperine,LevLanda,NinaTalyzina.

Ainsi,PiotrGalperineadécrit l’apprentissagecommeunetransformationdes informa-

tionsprovenantdel’extérieurpardesactivitésmentalesorientéesparunbut.L’actionà

réaliser doit comporter deuxparties: unepartie orientatrice et unepartie exécutrice.

L’actionestd’abordorientéeselonunbut,desbesoins,desprérequis,puisestréalisée

parlasuite.Cettedéterminationd’unbutn’estpasautomatique.L’enseignantpeutpro-

poserdirectementàl’apprenantunobjectifàréaliser.Maisidéalement,l’apprenantde-

vrait apprendre à prendre progressivement conscience de ses besoins pour décider

d’agir.

Unautrepsychologuerusse,LevLanda,précise(1975,p.459)queladécisiond’agircor-

respondàuneactivitédepensée:c’estuneconstructionhypothétiquedestinéeàmettre

enrelation,enfonctiondescontextesprévuspouragir,desconnaissancesetdesopéra-

tionsmentales.Pourmettreenplaceunenseignementprogrammé,Landa(1975,p.460)

insiste:

«Laconnaissancedel’organisationintérieuredesmécanismeshypothétiquesdel’activitédepen-sée et la construction des modèles correspondants sont les conditions primordiales de la re-chercheetduchoixdesmoyensd’enseignementadéquats».

86TAURISSONAlainp48.

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La théoriede l’activité selon cet auteur considèreque les apprenantsne sontpasdes

récepteursinertesdeconnaissances,maisilspossèdentunrépertoiredeconnaissances

disponibles et des motivations suffisantes pour agir et réaliser des buts conscients.

L’action fait correspondredesprocessusmentaux internesavecun comportement ex-

ternequ’ilserapossibled’évaluer.Autrementdit,l’actionprocèded’unemiseenrelation

dynamiquedessavoirsetdessavoir-faireetd’attitudes,effectuéeparlesindividuscon-

frontésàuneoudessituationsdonnéesafind’atteindreunbutconscientetprécis.Dans

ce cadre, l’apprentissage ne précède pas l’activité, mais se développe avec elle.

L’apprenantdoitconnaîtreavantd’agir.

Enfin, Nina Talyzina (1968), disciple de Leontiev, a pour sa part conçu la théorie de

l’activité commeune résultante du développement de différentsmodes de traitement

cérébraldanslebutd'améliorerleprocessusd’assimilation:

«l’activité intellectuelle est d’abord une activité externe et matérialisée. Cette activité peut setransformerenunprocessusinternemental,façonnantdesidées,etseulementlorsqueseproduitpendantl’apprentissageuncertainnombredemodificationsqualitatives87».

NinaTalyzinapréciseen1980(p.15),«l’activitédusujetrépondtoujoursàunbesoin;

elleestdirigéeversunobjetsusceptibledelasatisfaire».Lathéoriedel’activitéassocie

doncuneconceptioncognitivisteetsocialeavecl’enseignementprogrammé.NinaTaly-

zinaposeleproblèmedelanécessitédefaireintervenirdanslesapprentissagesd’autres

conceptsàacquérir(lesfuturescompétencestransversales).L’enseignementprogram-

méestcertesbasésuruneconceptioncomportementalisteconsidérantl’hommecomme

un simple organismebiologique.Mais pour cette pédagogue soviétique, un apprentis-

sagenepeutêtreréussique lorsqu’il satisfaitunbesoincognitifde l’apprenantquine

l’oublionspas,estaussiunêtresocial(Talyzina,1968).Ainsi,auconceptdeboitenoire

chère aux comportementalistes, Nina Talyzina oppose le concept deboite blanche en

appuyantsonargumentationsurlacybernétique:toutapprentissagedoitêtretranspa-

rent,sous-tendantuncontrôlecycliquepermanent.Ilestimportantdedéfinirlescondi-

tionsassurantlecontrôleefficaceduprocessusd'enseignement.Pourcetteauteure,un

tel contrôlen’estpossibleque si les conditions suivantes sont satisfaites: l’objectifdu

contrôleestspécifié, l'état finalduprocessuscontrôléestétabli, leprogrammedesac- 87«Theinitialformofintellectualactivityisexternal,materializedactivity.Itbecomesmentalandideationalonlyafteranumberofqualitativechangesoccur”,[notretraduction].

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tionsestassuré, lacollectedesdonnéesesteffectuée,desactionscorrectrices(régula-

trices)sontélaboréesetassurées.L’enseignementnedoitpasporteruniquementsurun

savoir,maissurunensembled’habiletésintellectuelles:

«L'effet formateur de l'enseignement dépend également des caractéristiques des orientationsfondamentalesdel'activitécognitiveendéveloppement.Sicescaractéristiquesn'onttraitqu'àuntypeconcretdeconnaissances,alors l'enseignén'assimile lematérielpédagogiquequ'auniveaudel'événement,etlapenséeainsiforméeprésenteuncaractèreempirique.Si,aucontraire,ellesréfléchissent la nature fondamentale de toute une classe d'événements à laquelle appartient laconnaissanceàassimiler,alors lesconnaissancesconcrètesapparaissentcommeuncasparticu-lierde cette classe et serventde support à l'assimilationdes caractères fondamentauxde cetteclasse.Danscesconditions,seformechezlesenseignésuntypedepenséethéorique,permettantun large transfert, et un cheminement autonomepour la résolutionde tous les casparticuliersd'uneclassedonnéed'événements».(Talyzina,1974/75,p.57).

NinaTalyzina insistesur le faitque toutapprentissagedoitcomporteraumoinsces3

typesd’éléments:

1. uncadred'orientationavecladéfinitiondubutàatteindre, l’identificationdela

situationproposée à l’apprentissage et lesdéterminantspermettantd’effectuer

lesdiversesopérationsàexécuter,

2. un cadre comportant les éléments d'exécution proprement dits en fonction du

but,

3. desélémentsdecontrôleavecvérificationdelaconformitédel’apprentissageau

niveaudesondéroulementetduproduitfinal.

Cettenotiond’orientation,d’exécutionetdecontrôlepermetàTalyzinadefaireladis-

tinction entreun expert et un apprenantnovice : l’expert prend en compte toutes les

donnéesrelativesàunapprentissage,c’est-à-direl'ensembledesinformationsdusujetà

proposdel'actionetdel'environnementdanslequelestaccompliecetteaction,notam-

mentlavitessed’exécutionetl’anticipation,alorsquel’apprenantnovicefonctionnesur

desbasesd'orientationincomplètesetlimitéeseninformations.Lathéoriedel’activité

ne s’intéresse pas uniquement à l’action visible. Cette action est basée sur l’existence

d’unereprésentationdurésultatàatteindre(lebut)etdeconditionspouratteindrece

but.Laconstructiondessavoirssefaitgrâceàdesopérationsd’orientation,d’exécution

oudecontrôle:l’enseignementprogramméestuneopérationd’exécutionetdecontrôle.

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PierrePastré(2007)a,par lasuite,proposéunedéfinitiondivergentede la théoriede

l’activité:«L’apprentissageestuneactivitéquicombineunactivitéproductiveetuneactivitéconstructive.Par activité productive, un acteur transforme le réel, que cette transformation soit matérielle,symboliqueousociale.Paractivitéconstructive,lemêmeacteursetransformelui-mêmeentrans-formantleréel».

Seloncetauteur88,l’activitéconstructiveestlebutetl’activitéproductivelemoyen.Ilest

importantdedistinguerl’activitévisée,àapprendre,etl’activitéeffectuéeaumomentde

l’apprentissage.Laplupartdesêtreshumainssontenclinsàapprendreparplaisir,par

désir de connaître, parfois par pulsions, mais le plus avec l’objectif suivant : celui

d’améliorer leurs connaissances afin d’être davantage efficace et performant dans le

quotidien.L’apprentissageestencouragélorsqu’ilyasuscitationdesattentes,création

d’occasionsàapprendreetmiseàdispositionderessourcesadéquatespourencourager

ainsil’apprentissagenonformeletinformel.Lesindividusquidésirentapprendreont-ils

besoind’êtreconscientsdeleurspossibilitéspourmaîtriserdenouvellesconnaissances

ou acquérir ou améliorer leurs compétences ? En résumé, quelle que soit l’action, lafonctiond’orientationestnécessairepourlaréussitedel’apprentissage.C’estunefonc-

tion qui fait appel aux processus cognitifs. Toute activité répond à un besoin.

L’apprentissage est une activité qui répond à unbesoin d’acquisitionde compétence;

cetteactivitéestorientéeparcebesoin.

LestravauxdepsychologuessoviétiquesontétépeudiffuséssaufceuxdeVygotski:sila

théoriedel’activitéestbeaucoupmoinsconnue,elleesttoutàfaitcomplémentairedes

théories socioconstructivistes de l’apprentissage. Nous allons nous intéressermainte-

nant à une troisième perspective pédagogique dans l’approche par compétence:

l’apprentissageénactifquireposeraitsurcettedoubleinterrogation:unindividupeut-il

ressentir inconsciemment les changements dans ses processus intellectuels internes

personnels (mémoire, perception, attention, création, etc.) en fonction de ses expé-

riencesvécuesparcesujet?Oubiencet individudoit-ilacquériruneexpertiseafinde

rendreaccessiblesapropreperceptionauxchangementsinduitsparsesdifférentesex-

périences ? En conclusion, la théorie de l’activitédécrit d’unemanière symbolique la

88Pastré(2007),p.83

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dynamique des interactions de l’apprenant avec son environnement. Jacques Thereau

(2004,p.21)résumecettethéorieparlesdeuxpropositionssuivantes:

(1) l’activitéhumaineàtoutinstantestaccompagnéechezl’acteurconsidérédeconsciencepréré-flexiveouexpériencequiinclutenellecequ’onentendusuellementparconscience,maisaussitoutunimplicitedel’activitéàchaqueinstant;

(2) cetteconsciencepréréflexiveouexpérienceestl’effetdesurfacedeladynamiqueducouplagestructureldel’acteuravecsonenvironnement(ycomprissocial).

L’apprentissageénactif

L’apprentissageénactifest la troisième formed’apprentissagecognitifquenousallons

exposer maintenant. Il a été décrit d’abord par Jerome Bruner comme un des trois

modesd’acquisitiondesavoirsparlesenfants:lemode«enactif»,lemode«iconique»

et lemode«symbolique»89.C’est lepremier tempsde l’apprentissage: l’êtrehumain,

grâceàsesorganessensori-moteurs, apprendpar l’actionet lamanipulation.C’estun

apprentissagedetypepsychomoteur.

«L’information passe par l’action. Connaître, c’est d’abord agir. On connaît quelque chose parcequ’on“saitlefaire”.Pourapprendre,onabesoindemanipulerlesdonnées,delespercevoirparlesens».(BARTHBritt-Mari,op.cité,p.51)

L’apprenantperçoitdefaçonnonintentionnelledesinformationsprovenantdesonen-

vironnement, informations qui seront couplées sans intervention de sa part avec les

donnéesenregistréesdanssoncerveau : c’estunapprentissage fondamentalement in-

formel90.C’estàpartirdecettecitationduphilosopheJulesLequier(1814-1862)qui

parlaitde« faireet,en faisant, se faire»,etreprispar Jean-PaulSartreau20esiècle91

quelanotiond’apprentissageénactifaétédéveloppénotammentparFranciscoVarela.

Cetauteurdéfinitl’énactioncomme«l'étudedelamanièredontlesujetpercevantpar-

vientàguidersesactionsdanssasituationlocale»(Varela,1993[traductionfrançaise],

p235).

L’êtrehumainformeuntoutavecsonenvironnement;ilintègretoutcequil’entoureà

chaquesituationrencontréeafindeguidersesactionspouraccomplirlestâchesatten-

dues.SelonMasciotraetal (2008,p.27),«unesituationémergedurapportentredes

89BARTHBritt-Mari(1985),p.5190C’estl’apprentissagesurletas,apprentissageinvisiblemaissouventefficace.91SARTREJean-Paul(1943).«Faire,etenfaisantsefaireetn'êtrerienquecequ'onfait».L'EtreetleNéant.

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conditionspersonnellesetdesconditionsenvironnementales».Car l’apprenantestune

personneenactionetensituation:connaître,c’estagir.Cesconditionspersonnellessont

l’étatouladispositionpsychiquedel’individu,sesattitudes,saconditionphysique,ses

ressourcesinternes,sescompétences,etc.Lesconditionsenvironnementalessontmul-

tiples:lelieu,l’espace,letemps,lesévénementsnaturelsousociaux,lemilieusocial,les

ressources matérielles et humaines, les contraintes. Chaque être humain organise le

mondeàsonimage.Ilesteninteractionavecdesreprésentationsdelui-mêmequ’ilmo-

difieselonsesexpériences.Maisl’êtrehumainn’estpascapabledes’enrendrecompte,

car ce processus mental est essentiellement inconscient92. C’est l’environnement de

l’apprenantquiluipermetd’apprendreetdeconnaître,etcesontcesconnaissancesac-

quisesainsiquiluipermettrontd’agirsursonenvironnement.C’estunprocessusglobal

d’apprentissage,actif,établisurduconcret,évitantaupossibletoutcequiestabstrait.

Ce sont les conditionsd’apprentissage, notamment ladisponibilité et l’engagementde

l’apprenant,quivontfavoriserl’acquisitiondessavoirs.

1.2.3.Remiseenquestiondel’approcheparcompétences

Theultimatetestoftheknowledgeandskillsisusuallynotintheknowingbutintheabilitytouseknowledgeandskillsetsappropriately–inthetranslationofknowledgeintobehav-ior.(RubenBrent,1999,p.502).93

Pédagogiedel’incompétenceoupédagogiedelacompétence?L’approcheparcompétence(APC),commel’avaitétélapédagogieparobjectifsauxdé-

butsdesannées1980,n’apaséchappéauxcritiquesdesenseignantsetdesapprenants,

notammentsurleplandel’évaluation.GeorgeMilleraprobablementprisconnaissance

decesnouvellesthéories,maisn’apaseuletempsdelesintégrerdansdenouvellespu-

blications.Ilestdécédéen1998.Nombredepédagoguesetderesponsablespolitiques

de l’éducationavaient fondéleursespoirssurcetteapprochepourdévelopperetamé-

liorer les savoirs des élèves, étudiants et professionnels. Malheureusement, ces espé-

rancesontétédéçues: autant lesétudiantsappréciaient lesobjectifsqui leurpermet-

taientdesavoircequileurétaitdemandé(apprendreoufaire),autantlescompétences 92MATURANAHumbertoR,VARELAFranciscoJ.(1994).L'Arbredelaconnaissance93Lameilleurepreuved'acquisitiondelaconnaissanceetdelacompétencenerésidepasdanslefaitdesavoir,maisdansl'habilitéd'utiliserlesavoiretdanslacapacitédetransformerlesconnaissancesencomportements.

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étaient un concept vague peu motivant pour apprendre en l’absence de critères

d’évaluation.Orlamajoritédesétudiantsapprennentenfonctiondesévaluations.

Ceproblèmede l’évaluationdescompétencesestaussirécurrentchez lesenseignants.

C’estlaraisonquenombred’entreeuxcontinuentàsubdivisernaturellementlescom-

pétencesendifférentsobjectifsspécifiques,retrouvantainsi leursmarqueshabituelles

qu’ils jugentnécessairespourévaluer.NicoHirt94, enseignant enBelgique,parlede la

pédagogie de l’incompétence. A-t-il raison? L’approche par compétence n’est pas une

panacéepourl’apprentissage,maisellepeutêtreamélioréeenincorporantdesmesures

plusadaptéesauterraind’apprentissagecommelaréflexion, l’expérience.D’autresau-

teurs sont opposés à l’association approche par compétence – constructivisme. Dans

l’APC,lesavoirestunoutilutilisépourréaliserunetâche;alorsquedansladémarche

constructiviste,l’objectifdel’apprentissageestacquérirouaméliorerunoudessavoirs.

Ainsi,selonFrancisTolman(2004),

«lesavoirn’estpasauservicedelacompétence...cesontlescompétences,c’est-à-direl’usageetlamanipulationdusavoirquisontauservicedel’appropriationdecelui-ci.».

Quereproche-t-onréellementàl’approcheparcompétences?Existe-t-ildessolutionspouraméliorercetteapproche?Ainsi,l’APCaccentuel’implicationdesapprenantssurleurspropresprocessusmentaux

supérieurs d’identification, de mobilisation, de transfert, de métacognition 95 et

d’intégrationdesressources.Cesprocessusdoiventêtreutiliséssystématiquementalors

qu’ilsétaientimplicitesdanslapédagogieparobjectifs.Lessituationsproblèmes,pour

avoirdusensetêtreutilesauxapprenants,doiventêtreproposéesenfonctiondesfina-

litésducurriculumdéfiniendébutd’apprentissage.Plusieursmodesderésolutionsont

possibles devant une situation problème complexe. Chaque apprenant peut donc ré-

soudrecettesituationselondesdémarchesquiluisontpropres:c’estlerespectdesdif- 94HIRTTNico:Pédagogiedel’incompétence– lesnouveauxprogrammesdephysiquesdansl’enseignementcatholiquefrancophonebelge;l’écoledémocratique,2005.http://www.sauvonsluniversite.com/spip.php?article3028.95LeconceptaétédécritparJohnFlavell(1976,p232):«Lamétacognitionfaitréférenceàlaconnaissancequ’onadesespropresprocessuscognitifsetdeleursproduitsoudecequileurestrelié,lespropriétésdifférentesdesinformationsoudesdonnéespertinentespourleurapprentissage.Lamétacognitionserapporte,entreautreschoses,aucontrôleactif,àlarégulationetàl’orchestrationdecesprocessusenfonctiondesobjetscognitifsetdesdonnéessurlesquellesilspor-tent,habituellementpourservirunobjectifouunbutconcret»

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férences.Lacomplexitédessituationsimpliqueégalementl’intégrationdesdimensions

affectivesetcognitives;celanécessiteunengagementetuninvestissementdesappre-

nantsdansleprocessusdeleurpropreconstructiond’apprentissageetpourenamélio-

rer laqualité: lamotivationdesapprenantsestnécessairedans l’APC.LétoetVander-

bergueontinsistéégalementsurlanécessitédesinteractionsentrelesdifférentsappre-

nants:c’estlanotiondepartagedessavoirs.L’APCestunsystèmepédagogiqueadaptéà

l’évaluationformative.Maisparcontre,cesystèmepédagogiquen’estpastoujourscom-

prislorsqu’ils’agitd’articulerlescompétencesaveclesprogrammes.Cemodèlepédago-

giqueposeproblèmeégalementdèsquel’évaluationcertificativeestenvisagée:

«Ilestplusfaciled’évaluerlesconnaissancesd’unélèvequesescompétences,carpoursaisircesdernières, on doit l’observer aux prises avec des tâches complexes, ce qui prend du temps etouvrelavoieàunecontestation»(Perrenoud,1997,pp.20-21).

CettedifficultéaéténotammentsoulignéeparMarcelCrahay(2006,p.101):

«Lapédagogieparcompétenceestunecaverned’AliBabaconceptuelledanslaquelleilestpos-siblederencontrer juxtaposéstous lescourantsthéoriquesde lapsychologiequandbienmêmeceux-cisontenfaitopposés».

Lanotiondecompétencesparl’actionvientdumondedel’entreprise:elleoublieladi-

mensionhumanistenécessaireàtoutenseignement.Certes,cetteapprochea lemérite

«d’avoirremisau-devantdelascènepédagogiquelaproblématiquedelamobilisation

desressourcescognitivesensituationderésolutiondeproblèmes».Maiselleactuelle-

mentgalvaudéepardenombreuxpédagoguesqui«laconçoiventcommelacapacitéà

mobiliserdesressourcescognitivesdiversespouraffronterdesproblèmescomplexeset

inédits».Cettenouvellenormeexclutlessituationshabituellesetcourantes.Ainsi,selon

cetteapprochedelacomplexité:

«Un chirurgien qui réussit pour la quarantième fois une transplantation cardiaque ne fait paspreuvedecompétence(...)Danslaviecourante,noussommesleplussouvent–etfortheureuse-mentpournous–tenusdegérerdessituationscoutumières.Ànouveau,cecinesignifiepasquelemondeestimmuable,maisquelavariabilitédessituationsexigeseulementdesmicroadaptationsdenosschèmespratiqueset/ouconceptuels.Certes,ilnousarrivededevoiraffronterdessitua-tionsextrêmes(crise,accident,deuil,conflit,violence,etc.),maiscessituationssortentpardéfini-tiondel’ordinaireetnesereproduisentpasnécessairement.Onnecomprendpasdèslorspour-quoil’évaluationdescompétencesdevraitseconcentrersurlessituationsàlafoiscomplexesetinéditespourl’individu.Lacompétenceest-elleuniquementdueaufaitderéalisercorrectementunetâcheexceptionnelle?Alorspourquoirechercheràévaluerlesapprenantssurdessituationsrarementreproductibles?».(Crahay,2006,pp.99et102).

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MarcelCrahayinsistesurlanécessitédeproposeràl’apprenantdesprocéduresetdes

opérationsprofessionnellespourdonnertoutesapertinenceàl’apprentissagedetâches

professionnellescomplexes. Cetauteurcitel’exempledupatientquidoitsubirunein-

terventionchirurgicale.Lepatientserad’autantplusrassurédesavoirquelechirurgien

a l’habitude de réaliser cette tâche régulièrement. Cet auteur souhaite revenir à des

principessimples:apprentissageencontexte, transpositiondansd’autrescontexteset

retourréflexifsur lesapprentissages.Dansl’approcheparcompétences, iln’yapasde

modèlestructurantd’évaluationcommelestaxonomiesdanslaPPO:(Crahay,2006,p.

22),«Danslaplupartdesprogrammesdeformationaxéssurledéveloppementdecompétencesetpourlamajoritédescompétencesciblées,iln’existeaucunmodèlecognitifdel’apprentissage».

Cette situation expose à demultiples dérives, y compris à unedénaturation complète

desorientationsconceptuellesquifondentlesensdel’approcheparcompétences:for-

mulationdescompétencessousformed’unelonguelistedenaturecomportementaliste,

évaluation des ressources pour elles-mêmes, pérennisation de procédures évaluatives

essentiellementàpartirdedonnéesquantitatives,manquedepertinenceetraretédes

activitésdefeedbackdelapartdesenseignants,etc.

Pourquoi la notion de compétence professionnelle soulève autant d’avis divergentsdanslemondedel’éducation? Ilestdifficilede listertous lessenspossiblesde lacompétence,unetelleénumération

aurait toutede l’allured’uneaubergeespagnole.Lacompétenceest-elle,commel’écrit

Jean-Pierre le Goff (2004, p. 30), générale ou spécifique, professionnelle, technique,

transversale,individuelleoucollective?«Lacompétencecomporte-t-elleunepartiepotentielle(ensembledesconnaissances,habilitésetperceptionset attitudes)etunepartieopérationnelle (réalisationde la tâcheoude l’activité)etmêmeuneintersectiondecesparties»?96

LeGoff(2004,p.31)précise:

«Lesspécialistesdelacompétenceprocèdentenfaitdelapenséegigognepropreàlasous-culturedesmilieuxdeformationetdumanagement:surlabased’unepremièredéfinitiond’unegrandegénéralité, on découpe ensuite la notion en catégories et sous-catégoriesmultiples qui se ren-

96NousavonsmissousformeinterrogativecetélémentdetextedeLeGoff.

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voientlesunesauxautresdansunelogomachiequiembrouillelesenscommun.Transforméeenobjectifsdeformation(êtrecapablede),lacompétenceestdécoupéeetsousdécoupéeencatégo-riesqui s’emboitent les unesdans les autres commedespoupéesrusses. Une telle formalisationaboutitàdeslistesd’itemsplusoumoinscohérentsavecdenombreusesinteractions,àl’origined’un imbroglionepouvantqu’embarrasser les évaluateursdans leurdémarchede certification.Ceslistessontégalementdiviséesenuncadredeclassementtypiquedescompétencesselonlesconnaissancesthéoriques,leshabilitésetlesattitudesetcomportement(ousavoir,savoir-faireetsavoir-être).Cetassemblagetrilogiquedessavoirsestcatégorisélui-mêmeenconnaissancesob-jectives,connaissancesprocédurales,connaissancesdéclaratives,etc.,sansoublierlescroyances,lesreprésentationsetlesperceptsdesapprenants».

Dansce«brouhahapédagogique»provoquéparcettemosaïquededéfinitions,lesavoir-

êtreestselonleGoff(2004,p.32)lanotionlaplusconfusequi«renvoiepêle-mêleaux

comportements, valeurs, sentiments et se prête à des multiples usages et manipula-

tions». Sommes-nous capables de proposer des évaluations fiables et globales sur

l’acquisitiondes compétencespour certifierun futurprofessionnel?Nous retrouvons,

danscetteconfusionsurlesdéfinitionsdelacompétence,ladémarchedeFrederikTay-

lorquiinsistaitsurlarationalisation,c’est-à-direledécoupagedel’activitédutravail.

«Au-delàdudiscourspseudo-savantetdelaconfusiondudiscourssurlescompétences,sedéve-loppe en effet une approche bien particulière du travail humain. Celui-ci est appréhendé entermesdemécanismesetdecomportementsélémentairesquel’ondécomposeàl’extrêmeetins-trumentalise en vue d’objectifs à atteindre.Découpée etmiseàplat en termes de compétencesparcellisées, codifiées dans demultiples catégories et schémas, l’activité professionnelle est ré-duiteàunemachineriequ’onprétendmaîtriseretperfectionnerenvued’enaméliorer lesper-formances»(LeGoff,2004,p.33).

L’activitéprofessionnelleesttropsouventréduiteàdeslistesd’objectifs,decapacitésou

decomportementsquidéshumanisentl’approcheparcompétenceetrendentvainstous

lesprocessusd’évaluation.LediscoursdeLeGoff(2004,p.35)esttotalementadéquat

aveccettedisparitionprogramméedeladimensionhumaine.

«L’expérienceprofessionnelleestréduiteàunprocessusd’acquisitiond’informations, lesavoir-faireàdesstocksd’énoncésetdeprocéduresquelesspécialistesvonts’empresserdeformaliser.Lesmotsetlesreprésentationssontramenésàdessignesvidésdesignificationqueleurdonnentceuxquitravaillent…Commelemodèledelaperformanceseveuttotal,etcommetelpratique-ment impossibleàatteindre, l’évaluationet ladéterminationdenouveauxobjectifsn’ontpasdefin».

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Cettenotiondevacarmepédagogiqueestégalementmanifestepourdesspécialistesde

la compétence commeBernardRey. Cet auteur témoigne sur ce sujet dans une inter-

view97:«Unecompétence,c’estlapossibilitéqu’aunindividud’accompliruncertaintypedetâche,oudefairefaceàcertainessituations.Ilpeutdoncyavoirdesgrandescompétencesetdescompétencesdétaillées.Lacompétenced’unmédecin,c’estdesavoirsoignerlesmalades.Maisàl’intérieurdecemétier,lemédecindoitposséderdessous-compétences:savoirexaminer,savoirdiagnostiquer,savoir établir un traitement… Chacune de ces sous-compétences est elle-même constituée desous-sous-compétences,plusétroitesencore:opérerunepalpationdufoie…».

Toutescesdéfinitionséludent ladifficulté suivante: lanotionderesponsabilité,pour-

tantmanifestechezlesprofessionnelsdesanté.Lacompétenceestlepouvoird’assumer

desresponsabilités:(PhilippeZarifian,2001,p.77),«Lacompétenceestlaprised’initiativeetderesponsabilitédel’individusurdessituationspro-fessionnellesauxquellesilestconfronté».

CitantMichel Foucault, Zarifian insiste: «assumer une responsabilité professionnelle,

c’estmanifesterlesoucid’autrui».Prendresoindel’autre,c’estavanttout,leprincipal

objectif qui doit guider tout professionnel de santé pour agir efficacement. Cela sous-

entendquel’autrepuissenous jugeretseprononcersur lerésultatdenotreaction.Si

l’évaluationdanslecadredel’APCpermetd’évaluerplusoumoinscorrectementlaprise

deresponsabilitédel’apprenantpouraboutiruneréponsecorrecte,ellenepermetpas

demesurerlesconséquencesdecetteréponse;notammentquandils’agitd’uneaction

visantàrépondreàunedemandespécifiéeparunêtrehumain.Lemédecinestrespon-

sabledesactionsqu’ilamisesenplace.Lacompétence,c’estprendresesresponsabilités

pourréaliseruneaction,c’estaussiêtrecapabled’êtrereconnuresponsables’ilyaune

erreur.

L’approche par compétences dans la perspective de l’apprentissage dumétier demédecin Jusqu’auxannées1990,enmédecine,lacompétenceétaitréduiteauxconnaissancesac-

quisesenformationmédicaleinitiale(FMI)etcontinue(FMC).Lediplômesanctionnant

la findesétudesétaitbasésurunprincipesimple: la réussiteauxdifférentsexamens 97 REY Bernard (2009). Les compétences, oui, mais ce qui compte, c'est de faire apprendre... Disponiblesur:http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/lenseignant/primaire/elementaire/pages/2009/103elemrey.aspx

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portantsurcetteacquisitiondeconnaissances.Cetteconceptionnecorrespondaitpasà

unedéfinitionadmisedelacompétenceàlafindu20esiècle:unedispositionassociant

nonseulementdesconnaissances,maisaussidesaptitudesdans l’exercice,associéesà

des attitudes relationnelles adaptées. Nous débuterons ce paragraphe avec des ré-

flexions sur la compétence par GeorgeMiller. Nous présenterons d’unemanière suc-

cinctelecursusactueldesétudesmédicales.LemêmeplanseraproposépourlaFrance

mais nous avons choisi de nous intéresser particulièrement à la médecine générale

puisquec’estlaspécialitéquej’exerce.

CompétencesetétudesmédicalesauxU.S.A Entre1975et1978,GeorgeMilleretsescollègues98dubureaupourledéveloppement

del’éducation(BDE)onttravaillésurundocumentd’unecentainedepagesconcernant

l’enseignement fondé sur l’acquisition de compétences. Ce document a été publié par

l’OMSen1978.Depuis1970, leBDEétait reconnucommecentrerégionalmembredu

réseaumondial de l’OMS99(Fulop, 1975).Miller et ses collègues s’étaient rapidement

renducomptequelaPPO,utiliséedansletyped’enseignementleplusfréquemmentre-

trouvédans lesCollègesetFacultésdemédecine(enseignementmatièreparmatière),

avaitdenombreuseslimites.Certes,unebonnemaîtrisedessciencesfondamentaleset

cliniques était indispensable à l'exercice de la professionmédicale; mais donner aux

étudiantsuneformationtropthéoriquepouvaitgêner l’acquisitiondecompétences in-

dispensablespourrépondreauxbesoinsdesantéréelsdelapopulation.

Pourcetteraison,Milleretsonéquipeproposèrentdeuxautressolutionspédagogiques:

une première solution destinée à adopter un programme intégré d'enseignement et

d'apprentissage regroupantdesdisciplinesmédicalesautourd'un thèmecentral : sys-

tème organique ou problèmemédical. Dans la seconde proposition, l’enseignement et

l’apprentissagesontorganisésautourdesélémentsfonctionnelsdelapratiquemédicale.

L’étudiantn’accumuleplusdestasdeconnaissancesquiserévèlerontsouventpeuutiles 98Ils’agitdeWilliamMcGaghie,AbdulSagidetThomasTelder.99UnProtocoled'Accordaétésignéle30septembre1970parl'OMSetl'Universitédel'Illinois,àChicago(États-Unisd'Amérique).Ilestditdanslepréambuledecetaccordque:«lespartiesontl'intentiondemettreenœuvreunpro-grammede formationcompletetcoordonnéà l'intentiondesenseignantsenmédecineet sciencesapparentéesquipermettra auxRégions de l'OMSqui y participent de créer à l'échelon régional et local (interpays et national) desCentresdeformationpédagogiquepourlespersonnelsdesanté,afindecontribuerainsinonseulementàreleverleniveaudel'enseignementdanslesétablissementspourpersonnelsdesanté,maisàfairefaceàlacrisedeseffectifs,c'est-à-direàplanifiercesderniersenfonctionducorpsenseignant».

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parlasuite;ilapprendàexercersafutureprofession:c’estl’enseignementdescompé-

tences.Lechoixdepréférerunenseignementintégréestguidéparleprincipesuivant:

regrouper des disciplines distinctes en un ensemble harmonieux associant théorie et

pratique. L'apprentissagede lamédecine estplus efficace si les cours théoriques sont

associés à l'expérience clinique. L’enseignement théorique est valorisé si l’étudiant en

médecinepeutenmêmetempsacquériruneexpérienceaucontactdesmalades.Cetype

d’enseignementestavantageux:onallège les coursmagistrauxensupprimant tout ce

quiestrépétitif(lescoursàlafacultéserecoupentsouventavecceuxdonnésauxlitsdu

maladeetparfoislesinformationsdonnéespouvaientêtrecontradictoires).

L’enseignementfondésurl’acquisitiondescompétencesreposesurleprincipesuivant:

enseignement et apprentissage sont organisés autour des éléments fonctionnels de la

pratiquemédicale.L'étudiantapprendàexercersaprofessionau lieud'accumulerdes

connaissancesmédicales.Celasous-tendquelestâchesetfonctionsdumédecindoivent

êtredéfiniesetexpriméespourélaborerunprogrammed’étudeadhoc.L’objectifd’un

tel enseignementestde formerdesprofessionnels compétents.PourMiller et ses col-

lègues, la compétence est un ensemble de connaissances, d'attitudes et de comporte-

mentsqui,réunischezunindividu,lerendentapteàexercertelleoutelleactivitépro-

fessionnelle.Unmédecincompétentdoitpouvoiraccomplir lemieuxpossibledenom-

breusestâchescliniques(maispasnécessairementtoutes).

Miller et ses collaborateurs s’expriment sur la nécessité d’abandonner l’enseignement

par matière et donc la PPO qui dérive de la psychologie comportementaliste pour

l’approcheparcompétences (APC)quis’inspire largementde lapsychologiecognitive.

Dans la PPO, les objectifs d’enseignement sont trop souvent mal écrits: ils sont de

l’ordredecontenus(savoirs,aptitudes,capacités)àtransférer.L’évaluationestoubliée

oubientrèsmaldésignée.Lesverbesd’actionutiliséspourdéfinirlesobjectifssonten-

core trop fréquemmentduniveaudebase (savoir, connaître). Le savoir agirn’estpas

indiqué. L’APC est basée sur des capacités d’action à atteindre par l’apprenant. Une

compétencenepeutseréduireseulementàdessavoirs,savoir-faireoucomportements.

Dans l’APC, les savoirs, les aptitudes, les capacités sont considérées comme des res-

sources.L’apprenantpeutnepasposséder toutescesressources,maisparcontredoit

êtrecapabledelesmobiliserpourréaliserunetâchecomplexe.

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L’APCestcentréesurlacapacitédel’apprenantàutiliserconcrètementcequ’ilaappris,

dansdestâchesetsituationsnouvellesetcomplexes.Cetteapprocheapourbutdecons-

truiredessoclesdecompétencesregroupantdesconnaissancesetdescapacités.L’APC,

commelaPPO,estcentréesurl’apprenant.Maisilexisteunedifférencedetaille.LaPPO

estaxéeuniquementsurdessavoirstransmissiblesetcodifiésàacquérir.Elleselimite

auxacquisitionsréaliséesdansunenvironnementunique(enseignementouformation),

parfoissanctionnéesparuneévaluationnormative(examen,concours,tests,etc.).L’APC

estégalementaxéesurlesmêmessavoirsàacquérir,maiscessavoirspeuventêtreutili-

sés dans plusieurs contextes afin d’assurer un développement de la personnalité de

l’apprenantdansdifférentsdomaines (cognitif, social, professionnel, etc.). L’apprenant

nesubitpluslesinformationscommedanslaPPO,maisagitsurcesinformations.Illes

sélectionneenutilisantdesstratégies(métaconnaissances)permettantdehiérarchiser

lesconnaissancesnécessairesàlarésolutiond’unproblèmeetd’écarterlesinformations

inutiles.Uneévaluationdanslecadredel’APCnerechercheraitpasàmesurerunique-

ment lessavoirsacquisdans lasituationoù lessavoirsontétéappris,maiségalement

dansd’autressituationsdifférentes.

Cetyped’évaluationestgénéralementtrèsmalacceptéparlesapprenantsetplusdiffi-

cileàmettreenœuvreparlesenseignants.Pourcetteraison,l’APCétaitetesttoujours

troprarementproposéeenmilieuscolaireouuniversitaire.Ilestplusfaciledemesurer

desobjectifssimplesquedesobjectifsgénéraux.Alors,quandils’agitd’évaluerdesob-

jectifs générauxdansdes situationsdifférentes du contexte d’apprentissage (transfert

desavoir),lamiseenœuvredecettemesuredécourageplusd’unenseignant:comment

évaluer les ressourcesde l’apprenantmobiliséesparce transfertdesavoirs ?Lesétu-

diants ont normalement acquis un socle bien établi de connaissances et il n’est plus

question de les évaluer demanière normative. Ils doivent être capables d’utiliser ces

connaissancesdansdifférentessituationsetenvironnementsdistincts.Lerôledel’APC

estd’aider l’apprenantàconstruireuneoudescompétencespermanentesqui luiper-

mettrontdeseconfronteràdessituationsqu’ilpourrait rencontrerdanssaviequoti-

dienne et notamment professionnelle. L’APC offre les moyens à l’apprenant de

s’approprier des ressources nécessaires à l’action, de construire, d’intégrer différents

schèmes (perception, évaluation, anticipation, action, décision, etc.), de constituer des

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capacitésquipourrontêtremobiliséesquandillefautetàbonescient,d’améliorerpro-

gressivementsesréponsesfaceàdessituationsinédites.

Dans lescyclesdeprofessionnalisation, commeun troisièmecycled’étudesmédicales,

cetyped’approcheestencouragé.Lesétudiantsontnormalementacquisunsoclebien

établideconnaissancesetiln’estplusquestiondelesévaluerdemanièrenormative.Ils

doiventêtrecapablesd’utilisercesconnaissancesdansdesdifférentessituations,dans

desenvironnementsdistincts.Lerôledel’APCestd’aiderl’apprenantàconstruireune

oudescompétencespermanentesquiluipermettrontdeseconfronteràdessituations

qu’ilpourraitrencontrerdanssaviequotidienneetnotammentprofessionnelle.

Cecigrâceàcesquatrecapacitésquivontdonnerlapossibilitéàl’apprenant:

• des’approprierdesressourcesnécessairesàl’action;

• deconstruire,d’intégrerdifférentsschèmes(perception,évaluation,anticipa-

tion,action,décision,etc.);

• deconstituerdescapacitésquipourrontêtremobiliséesquandil lefautetà

bonescient;

• d’améliorerprogressivementsesréponsesfaceàdessituationsinédites.

Dès 1975, trois types d’enseignement étaient proposés dans les facultés de méde-

cineauxUSA : l’enseignement parmatière, le plus fréquent, l’enseignement intégré et

l’enseignementdescompétences.Cestroistypesd’enseignementpouvaientcoexisterau

seind’unemême facultéouécoledemédecine,mais leplus souvent, les commissions

pédagogiquesmédicaleschoisissaientuneseuleoptionpédagogique.(Milleretal,1978)

L’enseignementparmatière,facileàévaluerlorsqu’ilfaitappelàdesimpleprocessusde

mémorisation100, est encore actuellement la solution pédagogique la plus rencontrée

danslesuniversitésmédicales.Certes,cetyped’enseignementalargementévolué,avec

denombreusesréformesquiontportéessentiellementsurlescontenus.Pourlesdéfen-

seursdece typed’enseignement, lesmédecinsdoiventrecevoirune formationscienti-

fiqueetposséderdesconnaissancesétenduesdansledomainedessciencesbiologiques

etphysiques. La cliniqueviendraaprès. L'enseignementmagistral est axépar les exa-

100Jean-Jacques Guilbert souligne dans une note de relecture que les processus mentaux de compréhension etd’interprétationsontbeaucoupplusdifficilesàévaluerquelesprocessusdemémorisation)

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mensetnonsur l'applicationconcrètedesconnaissances.Lespromoteursd’un telen-

seignementpartentduprincipequelesétudiantsapprennentdelamêmefaçonetà la

mêmecadence.Lesétudiantsvoientlesmaladesuniquementdansleshôpitauxuniversi-

tairesoùlessoinssontgénéralementdegrandequalité.Maislesmaladessonthospitali-

sés pour des problèmesmédicaux complexes. «L'enseignement clinique a tendance à

mettre l'accent sur le diagnostic et le traitement de troubles rares, plutôt que de

troublesfréquents»(Milleretal,1978,p.14).

L’approcheparcompétenceestconsidéréecommeunmoyenefficacepouraméliorerle

développement intellectuel. Elle soulève cependant de nombreuses difficultés notam-

mentauniveaudel’évaluation.

«J’étaisrécemmentinvité,écritMiller(1990),àprésiderlaséanceinauguraledela8econférenceannuelledelarechercheenéducationmédicale(RIME)en1990.Depuisunedizained’années,jem’étaismisenretraitdetoutcequiavaittraitàl’éducationetlapédagogie.Ladernièrefoisquej’avais assisté à une telle conférence, c’était en 1970, dont le titre était: perspective de la re-chercheenéducationmédicale.L’invitationm’enchantait,maisquevenais-jefairedanscettega-lèrealorsquedespersonnalitésprestigieuses connuespour leurs travaux sur lepatient simuléauraientpuprendremaplace:DavidSwanson101,GeoffreyNorman102,HowardBarrows103.Bienquelethèmedecetteconférencesoitlepatientsimuléstandardisé,j’avaispréciséaupublicassis-tantàlaconférencequ’aucuneméthoded’évaluationisoléenepouvaitfournirtouteslesdonnéesnécessairespourcertifierunmédecin.Pourcela,jeleuraiprésentéuncadrepermettantderéali-seruneévaluationdescompétencesrecherchées.Leprocessusd’évaluationdoitêtrepluriel.Jeledessineraisouslaformed’unepyramidesériéeenquatreniveaux»:

• Leniveau1estl’évaluationdessavoirs:c’estleniveauleplusbas,labase,quicorrespondàcequetoutétudiantoutoutmédecindoitconnaîtrepoureffectueravecmaîtrisesesfuturesfonctions.Nousdevonsavoir l’assurancequ’ilspossèdent les savoirsutilesà l’exercicepro-fessionnel.Maiscessavoirsévaluésnesontpassuffisantspourdéclarerqu’unmédecinouunétudiantsoitcompétentpourexercer.Malheureusement,lesévaluationsportentleplussou-ventsurcesconnaissances.Commel’aécritAlfredNorthWhitehead104ilyadenombreusesannées,«iln’yariendeplusinutilequ’unhommebieninformé».

101Médecinpédagogue,ilautilisédès1981,despatientsstandardiséspourl’évaluationdescompétencescliniques,ainsiquepourlamesuredescompétencesenmatièredecommunicationetdeprofessionnalisme–notedel’auteur.102Lestravauxderecherchedeceprofesseurdemédecineontrévéléquelesmédecinsexpérimentésutilisentdeuxtypesdeconnaissancespoureffectuerundiagnostic:1-uneanalyseformaliséedesconnaissances,dessignesetdessymptômes et desmécanismes physiologiques, et 2 – l’utilisation de connaissances expérientielles basées sur descentainesoudesmilliersdepatientsqu'ilsontpurencontrer–notedel’auteurdelathèse.103 BARROWS Howard & ABRAHAMSON Stephen (1964). "The Programmed Patient : A technique for appraisingstudentperformance in clinical neurology," JournalofMedicalEducation, 39, pp. 802 - 5. LeDrHowardBarrows aproposéen1963alorsqu’ilenseignaitàl'UniversitédeCalifornieduSud(USC),l’utilisationpourlapremièrefoisd’unpatientstandardisépourévaluer lesétudiantsenmédecine–notede l’auteur. Jean-JacquesGuilbertprécisecepen-dantquec’estSteveAbrahamsonquiacommencéen1963laconstructiondufameuxmannequinSIMONEquiservaitdepatientstandardisé.HilliardJasonaétéfortementimpressionnéparcetteexpérienceetarapidementmisenplacecettetechniquepédagogiquelorsqu’ilétaitledirecteurduDirecteurdudépartementd’éducationmédicaleàlaFacultédemédecinedeMichiganStateUniversity.104AlfredNorthWhitehead(1861-1947):philosophe,logicienetmathématicienbritannique.

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• Leniveau2decetteévaluation,au-dessusduniveaudebaseestceluidusavoircomment:Avoir des connaissances, c’est important,mais pas suffisant. Pour éviter que les processusd’évaluation laissent un gout d’inachevé, il ne faut pas se contenter desmesures réaliséesuniquementàceniveau.Lesétudiantsetlesmédecinsdoiventégalementsavoircommentuti-lisercesconnaissancespournepasêtreconsidéréscommedes«sots inaptes». Ilsdoiventsavoircommentutilisercesconnaissancespourgérer les informationsprogressivementac-quisesafindeproduireundiagnosticraisonné.C’estcettequalitéquifaitappelàuneutilisa-tionraisonnéeetadéquatededifférentsprocessusmentaux,que ledictionnaireWebster105définitcommecompétence.

• Autroisièmeniveau,noustrouvonslafonctiond’évaluation:montrercomment.Carpourlesenseignantsseptiques,lesdeuxpremiersniveauxsontinsuffisantspourdémontrerlacapaci-tédesétudiantsàrésoudrelesproblèmesauxquelsilsserontconfrontés.Cependant,cetyped’évaluationnedocumentepassuffisammentsurcequesaventlesétudiants,commentfont-ilsetcommentilsledémontrent.Pourcetteraison,ilseraitutiledeconfronterlesétudiantsavecunpatientstandardisésimulé.(mannequin)

• Lequatrièmeniveau,enhautdelapyramide,évaluecequel’étudiantfait.Maisunetelleéva-luationestcependant limitée,carelleestbaséeuniquementsuruneobservationdirectedeproblèmescliniquessouventtropsimples.Lesjugementsréalisésàceniveausontconnexesauproduitdel’interactiondel’étudiantaveclepatient,c’est-à-direàl’exactitudedudiagnos-ticetàlanaturedelapriseenchargeréalisée,plutôtqu’àl’évaluationdesprocessusmentauxquiontpermiscesconclusions.

Leconceptd’approcheparcompétencepeutséduirelesenseignantsetlesétudiants,car

elleprenden compte lesprocessusmentauxde l’apprentissage.Cependant, cette con-

ceptionachoppesur lesdifficultésàévaluerces compétences.L’évaluationétait etest

encore trop souvent centrée sur la performance, qui ne représente pas toutes les fa-

cettesde la compétence.Leprocessusd’évaluation, imaginéparGeorgeMiller, estné-

cessairement pluriel. Pour cette raison, il avait proposé de schématiser ce processus

sousformed’unepyramide(pyramidedeMiller)sériéeenquatreniveaux:niveau1des

savoirs (l’apprenant montre qu’il sait)– niveau 2 des savoirs comment (l’apprenant

montre qu’il sait comment faire)– niveau 3des démonstrations (l’apprenant montre

commentilagit lorsd’unesituationprofessionnellesimulée)etniveau4delamiseen

situationprofessionnelleréelle(commentl’apprenantagitdanslaréalité).

CursusactueldesétudesmédicalesauxU.S.A.Actuellement, en 2014, les études demédecine aux USA sont réservées aux titulaires

d’unbachelorobtenudansuneUniversitéagrééeà l’issued’uncursusdeprémédecine 105SelonledictionnaireWebster,lacompétenceestdéfiniecommeunequalification,unecapacitéenadéquationavecl’objectifprévu.

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(Pre-med).Pourêtreadmisdansunedes126écolesdemédecineauxUSA,lefuturétu-

diantenmédecinedoitobtenirunscoreélevéàunexamennationalditMCAT(Medical

CollegeAdmissionsTest).Ildoitêtreégalementrecommandéparuncomitédeconseils

enmédecine, s’entretenir avecun comitéd’admissionet avoir réalisédes stagesbéné-

volesdansl’humanitaireoudansdesorganismesmédicaux.(18000placessontoffertes

pour40000candidatures).Lesétudesdemédecineproprementditesdurentquatreans.

Lesdeuxpremièresannéessontplutôtthéoriquesetdestinéesàl’apprentissagedema-

tières fondamentales (anatomie, pharmacologie, histologie, les différentespathologies,

etc.).Lesdeuxdernièresannées sont consacréesà lapratiquemédicale; lesétudiants

doivent effectuerdes stages enmédecine interne, en chirurgie, enneurologie, enpsy-

chiatrieetaussienpédiatrie,gynéco-obstétriqueetenmédecinedefamille.Pouravoir

un diplôme d’état, ils doivent également réussir deux examens. (La titularisation est

uniquementvalabledansl’étatoùlesétudiantsontpasséleursexamens).

Àl’issuedesdeuxpremièresannées,lesétudiantspeuventconcouriràl’USMLE(United

StatesMedicalLicensingExamination)deniveau1;l’étudiantestévaluésursescapaci-

tésàappliquerdesconceptsimportantsdessciencesfondamentalesàlapratiquedela

médecine.L’USMLEdeniveau2estproposéauxétudiantsàl’issuedes4ansd’étudesen

écolesmédicales.Lesétudiantsdoiventdémontrerqu’ils sontcapablesd’appliquer les

connaissancesmédicales etmontrer leurs compétences à prodiguerdes soins auxpa-

tientssoussupervision.Lesconnaissancessontévaluéesparuntrèsgrandnombrede

questionsàchoixmultiples(QCM):9groupescomportantchacun44QCM.Depuis2004,

les autoritésuniversitairesmédicalesontdécidéégalementd’évaluer les compétences

desétudiantsenmédecinepourexercerleurfutureprofession.Cetteévaluationsefait

avec l’aide d’examens standards objectifs structurés (ECOS): 12 patients normalisés

(c’est-à-direjouantunrôleidentiqueàchaquepassaged’unétudiant)sontproposésaux

étudiants. Ces derniers disposent de 15minutes par patient. Cet examenpratique est

peudiffuséetproposéseulementdans5universitésaméricainesen2012.

Aprèscesquatreannéesenécoledemédecine, l’étudiantnedisposepasencored’une

licence complète pour exercer lamédecine sans supervision. Il doit alors réaliser une

annéederésidanatensupervision(internship).Àlafindecetteannéedestage,ilpos-

tulepoursoutenirleniveau3del’USMLE.S’ilréussitcetteétape,ilpeutdevenirméde-

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cin généraliste. La plupart des étudiants cependant terminent leurs études en

s’inscrivantdansdescyclesdespécialitésdont laduréeestvariable(de2à7ans).La

formationdesmédecinsenEuropeestcependantbiendifférente.Lasuccessionpropo-

séeauxétudiants:suivid’unenseignementdansdescollèges,aboutissantauboutde4

ansàundiplômedebachelor,puis enseignement spécialisédans les écolesmédicales

auxUSA(postgraduate),n’apascoursenEuropeoccidentale.

CompétencesetétudesmédicalesenFranceDanslesannées1980,enFrance,lesrèglesd’apprentissagen’évoluentguère.Lesautori-

tés ministérielles publient des arrêtés concernant la médecine générale, donnant de

simplesindicationssurlesthèmesàenseigner106,sansprécisernilesméthodespédago-

giques ni les procédures d’évaluation. Cette liste de thèmes est d’ailleurs un copier-

coller d’une proposition faite par les syndicats représentatifs de médecins et

l’Unaformec,àpartirdetravauxderéflexioncentréesurlesactivitésprofessionnellesdu

médecin généraliste, réaliséspar le groupedeLeeuwenhorst107en1974. Lamédecine

générale est considérée uniquement comme une discipline d’exercice, les principes

scientifiquesdeladisciplinesonttotalementnégligés.

Danslesdeuxpremierscyclesdesétudesmédicales,laPPOestencorel’approchepéda-

gogiquelaplusfréquemmentrencontrée(lesétudiantsdoivent«absorber»unemulti-

tudedeconnaissancesplusoumoinsutiles,maiscertainementnécessairespourréussir

lesépreuvesauxnombreuxexamensproposés).Àl’inverse,lesenseignantsenmédecine

générale,regroupésauseinduCNGEencouragentl’APCdansletroisièmecycled’études

médicales.Dès lesannées1980, les limitesde l’enseignementparobjectifsdevenaient

deplusenpluscriantes.LeCollègeNationaldesMédecinsgénéralistes(CNGE),crééen

1983,s’estengagéalorsdansl’explorationd’unnouveauparadigme:lapédagogiecons-

tructiviste. Il ne s’agissait plus de faire apprendre des savoirs, mais de faciliter

l’appropriationparlesétudiantsdesdifférentssavoirsnécessairesàleurfuturexercice.

Pourcetteraison,ilétaitindispensabledepréciserlesrôlesetfonctionsdumédecingé-

néralisteafindepouvoirlesenseigner.Ungroupedemédecinsgénéralistes,souslahou-

106ChevènementJ-P,DufoixG.,arrêtédu6septembre1985.107Leeuwenhorst group “The General practitioner in Europe. A statement by theworking party appointed by theEuropeanConferenceontheTeachingofGeneralpractice.”Netherlands.1974.

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letteduPr.Jean-PierreWainsteindudépartementdemédecinegénéraledeCréteilont

faitdespropositionsen1992108pourl’écritureetlaformalisationducontenudeladis-

ciplineMédecineGénéraleafindel’enseigneràl’université.Cestravauxn’envisageaient

pasencorededéfinirlescompétencesnécessairespourexercerlafonctiondemédecin

généraliste.LorsdelacréationdelaSociétéEuropéennedeMédecineGénéraleàStras-

bourgen1995,lamédecinegénéraleaétédéfiniecomme«unedisciplineuniversitaire

quis’appuiesurunepratique,unerechercheetunenseignement109»,avecdesobjectifs

etdescontenusàenseigner.Dansunouvragecollectif110éditéparleCNGE(1996,p.29),

lesauteursontproposédedéfinirl’actiondumédecingénéralisteainsi:gérerauquoti-

dien,dansunsoucidecontinuité,delasantédespatientsquis’adressentàeux;cecien

tenantcomptedestroispréoccupationssuivantes:

«Favoriserlaguérisondesmaladies,soulagerlesmauxqu’ellesentraînentetmaintenirlasantémalgrélesrisquesindividuelset/oucollectifsquilamenacent».

Lemot compétence n’était pas encore prononcé,mais les auteurs insistaient sur une

approchethéoriquedelamédecinegénéralereposantsurdixprincipescliniques,àpar-

tirdesquelsserontdéfiniesplustardlescompétencesnécessairesàl’exercicedelamé-

decinegénérale.D’ailleurs,cemotdecompétence,dèsledébutdesonappropriationpar

lesmédecinsgénéralistes,aposédesdifficultés,carilestcaractériséparplusieurssens,

àl’origined’uneforteambiguïté.ThierryVeret(2013)aposéceproblèmedepolysémie

quandilaécritdanssonmémoiredeD.E.S.:

«La compétence d’un médecin semble indispensable à une pratique clinique quotidienne afind’amélioreraumieuxl’étatdesantédesespatients.Maisunmédecincompétentest-ilunmédecinayantdescompétences?Dequellescompétencesparle-t-on?Pourfairequoi?Pourqui?Etavecqui?»

C’est dansun autre livre collectif éditépar leCNGEet les éditionsMasson et paru en

2003(Gay,LeGoaziou,Budowski,Druais,Gilberg,2003,p.7),qu’unepremièrelistede

compétencespourexercer lamédecinegénéraleestdécrite.Cette liste reproduit inté-

gralement les compétences tellesqu’ellesont étédéfiniespar laWONCA111Europeen

108WAINSTENJPetal.(1992).Introductionauxfonctionsdumédecingénéraliste.Exercer16,pp.4-6.109GAYBernard.(1995)“Whatarethebasicprinciplestodefinegeneralpractice?PresentationtoinauguralMeetingofEuropeanSocietyofGeneralPractice/FamilyMedecine.Strasbourg.110POUCHAIND.,ATTALIC.,DEBUTLERJ.,CLEMENTG.,GAYB.,MOLINAJ.,OLOMBELP.,ROUYJ-L.(1996).MédecineGénérale,Concepts&Pratique.111AcronymedeTheWorldOrganizationofNationalColleges,AcademiesandAcademicAssociationsofGeneralPrac-titioners/FamilyPhysicians.

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2002112.C’estlefruitd’untravailcollectifproposépardenombreuxenseignantsenmé-

decinegénéraleeuropéensquiontdistinguéonzecaractéristiquescentralesdeladisci-

pline. Ces dernières correspondent à onze capacités que chaque médecin généraliste

doitmaitriser.

Cescapacitésontétéregroupéesensixcompétencesprincipalesquisont:

• gestiondessoinsdesantéprimaires;

• ladémarchecentréesurlapersonne;

• lescapacitésspécifiquespourlarésolutiondesproblèmes;

• l’approcheglobale;

• l’orientationcommunautaire;

• lemodèleholistique.

Enfin, en 2012, les enseignants universitaires de médecine de famille au Canada ont

proposécettedéfinitiondelacompétence(DanielleSaucieretal,2012):

«Lacompétenceestlacapacitédefairelabonnechose,aubonmoment,delabonnefaçon,dansuncontexteprofessionnelcomplexeparticulier.Ellerequiertlacapacitédefairedeschoixetd'utili-ser à bon escient ses connaissances, ses habiletés, ses attitudes, son jugement et ses valeursdansuncontexteactuel.Ellesous-entendégalementunecertaineautoévaluationquipermetdepui-seràmêmelesressourcesexternesrequises,dontlepatientousafamille,unautreprofessionneloudesressourcesd'apprentissage.Lacompétence,c'estaussilacapacitéderésoudredesproblèmesetdeprendredesdécisionsavecrigueur,c'estl'analysecritique,lacréativitéetl'autonomie.Elleestmultidimensionnelleetdynamique.Elleévolueaufildutemps,selonl'expérienceetlecontexte.Elledé-penddel'adoptiond'uneattituderéflexive,estliéeaudéveloppementd'uneidentitéprofessionnelleets'accompagned'unengagementàl'égarddel'apprentissagecontinu».

Quecesoitdanslaformationmédicaleinitialeoucontinue,lemédecinagitpourlebien-

êtredesonpatient,ensélectionnantparmi lesprisesenchargepossibles, cellequiva

satisfaire ce patient notamment en réduisant au maximum le risque de tracas ou de

complications chez cepatient. La compétencepeut êtredoncdéfiniepar rapport àun

savoirréduireunrisque,ensachantquelerisquezéronepeutêtrepratiquementjamais

atteint.Carlerisquen’estpasseulementunematièrequantifiable,ilestégalementsub-

jectif,liéàsaperceptionpropreparlepraticienetsonpatient.Lacompétence,réponse

112AllenJ,GayB,CrebolderH,HeyrmannJ,SvabI,RamP(2002).TheEuropeanDefinitionsoftheKeyFeaturesoftheDisciplineofGeneralPractice:theroleoftheGPandcorecompetencies.BrJGenPract,52,pp.526-527.

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adéquateàuneattenteformulée113,estunenotioncontextualiséequipeutsedéfiniréga-

lementparrapportauxattentesdesautoritésdesantéetdespatients:c’estunsavoir

agirensituation,permettant,commelesouligneGuyLeBoterf(2000,p.54),

«desavoirgérerdessituationscomplexesetévénementiellesetdesavoirprendredesinitiativespertinentesdanslecontextedesituationscliniques».

Cetétatdeslieuxsurlaformationmédicaleinitialeetcontinue,ainsiquedesdeuxprin-

cipaux paradigmes d’apprentissage du 20e siècle (pédagogie par objectif – PPO et ap-

procheparcompétence–APC)nousamèneàprécisermaintenant laproblématisation

denotretravailderecherche;notammentaveclestroisinterrogationssuivantes:

• Quels sont les rapports possibles entre l’approche socioconstructiviste,

l’apprentissagecoopératifencontexte(situé)etlesapprentissagesnonformels.

• Quels rôlespeuventavoir lesapprentissagesnon formelsdansuneperspective

de transformation des étudiants enmédecine et desmédecins afin d’améliorer

leurscompétencesprofessionnellesmédicales?

• Qu’est-ce une compétenceprofessionnelle médicale: s’agit-il d’un art de faire,

(basésurdesapprentissages formels, informelsetnonformels),commelesou-

haitaitHippocrate,maisavecuneévaluationdifficile,carréaliséedirectementsur

lemalade?Oubiend’unsavoirrationaliseruneactivitédesoins,nécessitantseu-

lementunsavoirnormalisé(faisantsuiteàunapprentissageformel),répondant

ainsiàlalogiquedel’évaluationnonseulementdenospairsetdesmalades,mais

aussidesinstancesdesanté;aveccependantlerisqued’unappauvrissementdu

conceptdecompétence.

Dans le cadre de la formation médicale initiale, dans les deux premiers cycles,

l’apprentissageestessentiellementintentionnel:c’estl’uniquepossibilitéderéussirles

examenspermettantdepasserdansuneannéesupérieure.Parcontre, lorsdu3ecycle

desétudesmédicales,ditcycledeprofessionnalisation,puistoutaulongdelapratique

de l’exercicemédical, l’apprentissage peut être intentionnel,mais également implicite

correspondantàdesapprentissages informelsetnon formels.Danscederniercas, les

113EWALDFrançois(2000).Gestiondurisquedesantéetenjeuxdelacompétence,p.45.

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acquis,appeléssavoirsnonformalisés,sefontparhasardlorsderencontresprogram-

méesounon,aufild’activitésdiverses,desituationscliniquesrencontrées,deréflexions

oralesouécrites,etc.Cependant,sidansl’apprentissageintentionnell’effortdemémori-

sationestnécessaire,ceteffortestencoreplusjustifiédanslecadredel’apprentissage

implicite:ilestpossibled’écouteretvoirsansporteruneattentionparticulière,etlais-

ser ainsi s’envoler peut être des informations essentielles à la pratiquemédicale. Les

processusdemémorisationsdépendentdesdifférentscontextesdans lesquelssontef-

fectuéslesapprentissages.

CursusactueldesétudesmédicalesenFranceDepuis2010,lapremièreannéedemédecineestdevenuecommuneavecd’autrescur-

sus (sage-femmeoumaïeutique, odontologie, pharmacie, et dans certaines facultésde

masso-kinésithérapie).CettepremièreannéeestappeléePACESpour"premièreannée

communedesétudesdesanté".Ellesetermineparquatreconcoursetclassementsdif-

férents. Cette réforme sera suivie en 2012 d’une réorganisation des deux premiers

cycles en trois ans chacun (auparavant un cycle de deux ans appelé PCEM suivi d’un

cycle de 4 ans appeléDCEM). Le 1er et 2e cycle constituent le tronc commun afin de

formerdesétudiantsenmédecineindifférenciés.

• Lepremier cycle, essentiellement théorique,d’uneduréede troisans, est sanc-

tionnéparleDiplômedeFormationGénéraleenSciencesMédicales(DFGSM)au

coursduquelsontacquiseslesconnaissancesscientifiquesdebaseetlaséméio-

logie.Pendantcestroisans,lesétudiantsdoiventassimilerungrandnombrede

connaissances.

• Ledeuxièmecyclealternethéorieetpratique(lesétudiantssontà laFacultéet

danslesserviceshospitaliers).Ilapourobjectifd’acquérirdesconnaissancesre-

lativesauxprocessusphysiopathologiques,à lapathologie,auxbases thérapeu-

tiquesetàlapréventionainsiquelescompétencespréparantauxfutursInternes

(3ecycle).Ce2ecycleestsanctionnéparleDiplômedeFormationApprofondie

enSciencesMédicales(DFASM).LesétudiantstitulairesduDFASMpeuventalors

s’inscrireauxépreuvesclassantesnationales(ECN)etchoisirenfonctiondeleur

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rang de classement une spécialité et une subdivision (régions françaises où il

existeunCHU)

• Letroisièmecycledemédecinegénéraleavant1984avaituneduréed’unanet

n’étaitpasréellementadaptéà l’exerciceambulatoire.Dès1975, lacommission

Fougère a proposé de créer un troisième cycle demédecine générale. Ce cycle

devrait être théorique (150 heures d’enseignement) et pratique; notamment

avecuneformationhospitalièrede18moisetunstageextrahospitalierdequa-

rantedemi-journéesaumaximumàréaliserchezunmédecingénéralistependant

3à6mois.Maisc’estseulementen1984quelaformationspécifiqueàlaméde-

cinegénéraleaétédécrétée.Laduréedutroisièmecycleaétéfixéeàdeuxans114.

De1984à1996, lesétudiantsdoivent toujourseffectuerunstage itératifd’une

quarantainededemi-journéeschezunmaîtredestageagrée. Ila falluattendre

1997pourqu’unstagedesixmoisenmilieuambulatoirechezunmédecingéné-

ralistedevienneobligatoire.Le3ecycle,appelé«résidanat»aétéallongéà2ans

etdemiàpartirde1996,puisà3ansen2001.Depuis2004,touslesétudiantsen

médecine,mêmeceuxquisedestinentàlamédecinegénéraledoiventseprésen-

ter aux épreuves classantes nationales (ECN) qui remplacent le concours de

l’Internat(décretdu16Janvier2004).Lamédecinegénéraledevientunespécia-

litéàpartentière.Le3ecycledemédecinegénéraleestalorstotalementréorga-

nisé pour devenir une spécialitémédicale, sanctionnée par l’obtention d’un di-

plômed’étudesspécialisées(DES),conférantaumédecindiplôméletitredepra-

ticienspécialisteenmédecinegénérale.

D’unemanièreplusprécise, lesétudiantsdu3ecycledesétudesmédicales,appelésIn-

ternes enmédecine, ont des responsabilités professionnelles de soins et de prescrip-

tions, mais sous la supervision d’un sénior à l’hôpital comme en milieu ambulatoire.

Pendant les trois ansde ce cycle dénommé cycle deprofessionnalisation, les Internes

font validerparun tuteurdédié leursdifférents travaux en fonctiondes compétences

exigées, avantde les insérerdansunportfolio. Lorsque l’interne a rempli ses engage-

ments, ilpeutprésentersonportfoliodevantun jurydediplômed’étudesspécialisées

114Décretn°84-586du9juillet1984fixantàtitretransitoirel'organisationdutroisièmecycledesétudesmédicales;complétéparl’Arrêtédu6septembre1985portantsurl’organisationdutroisièmeCycledeMédecineGénérale

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(D.E.S.). S’il est reçu, il est qualifié «spécialiste enmédecine générale». L’internedoit

égalementsoutenirunethèsed’exercicepourobtenirletitrededocteurenmédecine.Le

D.E.S.demédecinegénéraledatedesannées2000.Auparavant,toutmédecingénéraliste

étaitdiplôméaprèsavoirsoutenusathèse.Maisdepuisplusieursannées,lapopulation

etlesorganismesresponsablesdelagestiondelasanté(Sécuritésociale,Mutuelles,Mi-

nistèredelaSanté,etc.)ontdenouvellesexigencesconcernantlaformationdesméde-

cinsquinedoiventplusêtrequalifiésuniquementparunsimplediplôme.

Cettecertificationestunenécessité: l’Interneenmédecinegénéraledoitprouverqu’il

estcapablederépondredanssondomainedespécialitéàlamajoritédessituationsren-

contréessurleterrain,qu’ils’agissedeprendreenchargelui-mêmeoudesavoirpasser

lamainàunmédecinspécialistedesecondrecours.Maiscettecertificationnedoitpas

êtreunacteunique.Toutmédecindoitmettreà jourrégulièrementsesconnaissances

toutaulongdesavieprofessionnelle.Celaatoujoursétéuneobligationdéontologique

(art.11ducodededéontologiedel’OrdreNationaldesMédecins).Cetteobligationest

devenuelégaleaveclesOrdonnances«ditesJuppé»de1995).Lesmédecinsdevraient

maintenantaccepterd’êtrerecertifiésrégulièrement,cequin’estpasencore lecasac-

tuellementaudébutde2014.Carlesrésistancesducorpsmédicalsontencoretropsou-

vent démesurées par rapport à l’enjeu d’amélioration de la compétence profession-

nelle115.

1.3.Lesmodèlesactuelsdel’apprentissageenmédecine

1.3.1.Décalageentrel’approcheparcompétenceetladémarchedeprofessionnali-sation:nécessitédechangerdeparadigmed’apprentissage

Revenonsaumétierdemédecin.Pour chaquespécialitémédicale, il existeunnombre

croissant de recommandations produites pour réguler l’exercice médical. Ces recom-

mandationsdoiventêtresuiviesparlesprofessionnelsdesanté:c’estlarationalisation, 115Cependant,depuis le26mai2014,desmédecinschez lesquels ilaétéconstatéuneinsuffisanceprofessionnelledans le cadre de leurs exercices peuvent être convoqués par les Conseils Régionaux de l’Ordre desmédecins. Cesderniers désignent un comité d’experts composés de trois médecins, dont un universitaire de la discipline) selonl’articleR4124-3ducodedelaSantépublique.Cesexpertsvérifientlescompétencesdumédecinqualifiéeninsuffi-sanceprofessionnelleetsontencouragésàluiproposerdessolutionspourretrouverunniveaudecompétencecon-formepourexercerlamédecine.

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destinéeàaméliorerlessoins,etégalementàéconomiserlesdeniersdel’État.Maisles

êtreshumainsnesontpasdesclonesd’unseulmodèledepatientidéal.Leursréponses

aux prises en charge proposées peuvent être parfois imprévisibles et générer ainsi

l’aléa:c’estl’incomplétudeàcesystèmederégulationmisenplacequivapermettreau

professionnelde santédemontrer sa compétenceà soigner cepatient.Lemédecinva

rechercheruneréponsesatisfaisanteauproblèmeposéparlepatient,etnonpaspropo-

serunesolutionautomatiqueprescriteparlesrecommandations.

L’exercicemédicaln’estpasunepratiqueroutinièreoùchaqueréponseestplanifiée.Les

attitudes imprévisibles de certains patients, l’absence de règles (il n’existe pas de re-

commandationssurtoutelapratiquemédicale),nécessitentunemobilisationconstante

dessavoirsduprofessionneldesanté.Cedernier,contrecetteexpositionréelleàl’aléa,

vamobiliser des processusmentaux qui vont permettre de définir une solution adé-

quate.C’estd’ailleurslaseulepartievisibledelacompétence;toutlereste,leplusim-

portant,estinvisible,maisessentiel,carestàl’origineduraisonnementquivaapporter

une réponse adéquate à la situation du patient. Nous insistons: être compétent, c’est

avanttoutêtrecapabled’agird’unemanièrestratégiqueavantd’êtresimplementperfor-

mant.Commel’aindiquéZarifian(2001),

«La compétence doit se distinguer alors des savoirs d’attribution, liés au parcours de formationinstitutionneletdoncàlaqualification».

Lemodèle de l’approche par compétence doit être conservé,mais amélioré. Et ce, en

réfléchissantnotammentsur sespropresexpériencessurcequiaété faitetauraitdû

être fait. Dans les années 2000, un groupe d’enseignants généralistes français, dirigé

notamment par Claude Attali 116 , vont compléter le paradigme constructiviste

d’apprentissage avec l’apprentissage réflexif expérientiel. Auparavant, les étudiants

étaientévaluésdanslesstageseffectuésenmilieuhospitalierouambulatoire(endehors

deshôpitaux).Cetteévaluationétaitbaséesurunegrillecomportantunnombrelimité

decritères,peudiscriminatifs,avecdesréponsessouventsubjectives.Lesétudiantsde-

vaientégalementfaireactedeprésenceàdesenseignementsthéoriques.Lediplômede

docteurenmédecineleurétaitremisquandtouslesstagespratiquesétaientvalidésetla

thèsed’exerciceétaitsoutenueetacceptéeparunjury.

116ProfesseurdeMédecineGénérale,UPEC.

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Orletroisièmecycleestdésormaisconsidérécommeunephasedeprofessionnalisation.

Ildoitêtrepluspratiquequethéoriqueafindeformerdefutursprofessionnelsefficaces

etrépondantsauxbesoinsdelapopulation.C’estapprendreparexpérience.Laprofes-

sionnalisationpourlesétudiantsenmédecinecorrespondàunemiseenœuvre,enré-

ellesituationd’exercicemédical,desavoirsetcapacitésacquispendantlesdeuxcycles

d’étudesprécédents, avecunencadrementprofessionnel adapté.Être reconnucomme

unprofessionnelqualifiépourexercerunmétier,c’estêtrecapabled’apporterunesolu-

tionàdesproblèmessimpleset/oucomplexes;autrementdit,dansl’exercicedecemé-

tier,êtreapteàrépondred’unemanièreefficaceàtoutedemanded’untiers.C’estaussi

maitriserdes savoirs théoriquesetpratiques,des savoir-être, etdes schémasd’action

patiemmentconstruitsaugrédesdiversesexpériencesprofessionnelles.Agirenprofes-

sionnel,c’estenfinsélectionneretcombinerdesressourcesnécessairespouratteindre

unobjectifattendu.

Dansun cycle deprofessionnalisation, grâce à une réflexiondans l’action, l’apprenant

peutconceptualisersessavoirsetréaliserl’actionprofessionnelledemandée.«Laréso-

lution de situations problèmes en contexte interactionnel asymétrique (tutorat, gui-

dage...)vadéclencherdesdynamiquessociocognitivessusceptiblesdefavoriserledéve-

loppementdes connaissances et des compétences cognitives individuelles117». Cepen-

dant,ildoitfaireappeldevantlemoindredouteàunprofessionnelaguerripouréviter

l’erreurquiporteraitconséquenceàlaviedupatient.GuyleBoterf(2000)s’estexprimé

surcesujet:«ilnesertàriend’avoirdescompétencessionnesaitpasagiraveccompé-

tence». Un médecin compétent est une personne à qui l’on peut faire confiance, qui

prendletempsd’écouter,d’examinerlepatient,maisquidoitégalement118:

• prendredesinitiativespertinentesdansdessituationscomplexes,évolutives,inédites;

• seformerrégulièrementenévitantd’êtrefigésursesconnaissances;

• s’adapterenpermanence;

• anticiperlesproblèmesliésàlasituationproblématiqueoudelademandedupatient;

117ROUXJean-Paul,Analysedynamiquesinteractivesetétudedesmécanismesdesprogrèscognitifsensituationasymétriquederésolutiondeproblèmesp475118LeBOTERFGuy(2000)disponiblesur:www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/actescompetence.pdf

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• prendreencomptedesdétailsetrepérertousceuxquipeuventêtreimportantsmêmes’ilsnepeuventpasêtreperçuscommetelsparlesautres;

• mettreenœuvredespratiquesprofessionnellespertinentesetreconnues;

• mobiliserdesressourcesappropriées;

• coopérerdefaçonefficaceavecd’autresprofessionnels;

• faireappelàdesressourcesexternessinécessaire;

• êtrecapabledefaireappelauxsavoiretsavoir-fairedesautres;

• tirerlesleçonsdel’expériencevécuepourlestransposeretlestransmettresibesoin;

• agiravecéthiqueetdéontologie.

Leprofessionneldesantéestunepersonneàqui ilestdemandéd’exerceruneactivité

avecsérieuxetcompétence.Pourcetteraison,ildoits’adapteretproposerunesolution

à toutes les situations pouvant être rencontrées dans son exercice. Cela sous-tend un

savoirexpérientieletunedémarcherigoureusepourrésoudreleoulesproblèmesren-

contrés,avoir lescompétencespouragir,connaîtreses limites,êtredisponibleet faire

preuved’uneattitudedéontologiqueetéthiqueparrapportauxsituationsrencontrées.

Pour vérifier l’atteinte des compétences, le Collège National des Généralistes ensei-

gnants (CNGE)a fait le choixd’utiliserun témoinde l’acquisition régulièrede compé-

tencesacquisesaucoursd’uncycled’apprentissage: leportfolio119aétédéfininotam-

mentparBaronetBruillard(2003,p.42)comme«unecollectionfinaliséeetraisonnée

dedocumentstémoignantdelaqualitéetdelaprogressiondutravaild’unétudiantau

traversdecertainesdesesréalisations».Cen’estdoncpasundossiercumulatifdedo-

cuments,mais une collection structurée de différents travaux réalisés dans différents

contextes, et se rapportant le plus possible à des situations authentiques

d’apprentissages.Lestravauxinclusdanscettecollectionsontsélectionnésenfonction

des critères établis par l’apprenant et l’enseignant ou tuteur. C’est un outil formel de

communication interactive entre l’apprenant et l’enseignant ou tuteur, dans le cadre

d’une démarche d’évaluation formative. Ce portfolio est destiné à être jugé en fin de

cycle, car son objectif est de renseigner sur la globalité du travail effectué par

119Danslecadredu3èmecycledesétudesmédicales,leportfolioaétémisenplacedanslesannées2000.Ilcorrespondàundossierd'apprentissagecomprenantdestravauxdetoutessortesetdesréflexionssurcestravauxquiattestentdesprogrèsdel’étudiantpendanttouteladuréeducycle.Maisl’utilisationd’unportfolioestbeaucoupplusancienne,depuislesannées60,pourprésenterdesœuvresdephotographesoudepeintres

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l’apprenantpendanttouteladuréedesoncycled’apprentissage.Ilpeutêtresousforme

depapieroumieuxélectronique,permettantunemeilleurecirculationdel’information.

Demanderàl’apprenantd’insérerunegammedeproductionsvariéesdanssonportfolio

apourobjectifprincipal:uneévaluationplusjusteetréalistedescompétencesacquises.

Lesévaluateursduportfolio120doiventégalementconsidérerdansleurjugement,letra-

vaileffectué,lesprocessusd’élaborationetd’acquisitiondesdifférentesproductions,sa

progressiondansl’écriture,sesréflexionsetlesexplicationsdeschoixainsiquelacoor-

dinationqu’ilaétabliepourtouslestravauxinsérésdansceportfolio121.Unetelleéva-

luation permet d’apprécier les compétences acquises par l’apprenant. Elle est censée

nousfournirdesinformationspartiellessurlespossibilitésdemobilisationdecescom-

pétences et leurs consolidations, ainsi que sur lesprocessusmétacognitifsmis en jeu.

Jugerlescompétencesd’unapprenantavecl’aided’unportfolionécessitedes’appuyer

sur les principes de la pratique réflexive. Le portfolio doit inclure les réflexions de

l’apprenant sur la signification de ces différentes productions. Pour cette raison,

l’apprentissage est actuellement assis sur un nouveau paradigme d’apprentissage:

l’expérienceetlaréflexion.Jeprésenteraicemodèleselonleplansuivant:

- unabordhistoriqueavecdeuxauteurs:JohnDeweyetKurtLewin;

- une approche «moderne» avecDaniel Schön et Chris Argyris, puis avecDavid

Kolb;

- enfin une proposition demodèle réflexif centré sur la réflexionmédicale avec

GrahamGibbs.

120Dans le département demédecine générale de Paris 7, les productionsmises sur le portfolio sont l’objet d’unediscussionentrel’étudiantetsontuteurpendantles3annéesducycledeprofessionnalisation(évaluationformative)et par le rapporteur désigné en fin de cycle pour juger le travail fourni (jury du D.E.S. - évaluation certificative).L’étudiantnepeutpasseprésenteràcejurys’iln’apasl’avaldesontuteur.121Dans laplupartdesdépartementsdemédecinegénérale, les internesenmédecinegénéraledoiventproduireaumoins une production écrite par semestre dite RSCA: récit d’une situation complexe authentique. Ce récit appeléégalementtracedecompétencedoitcomporterauminimumlesinformationssuivantes:1-descriptioncomplèteetchronologiqued’unesituationcliniquerencontréeaucoursdustagedel’Ìnterne,etayantposédesdifficultés,2-unrésumédesproblèmesposés,3- larésolutionproposée(réflexiondansl’action),puis4-uneréflexionsurl’action:ais-jebienfait,aurais-jedufaireautrechose,queferais-jelaprochainefoisdansunesituationproche,5–cequejeretienset6–conclusion(devenirdupatient),

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1.3.2.Deuxpionniersdel’apprentissageexpérientielréflexif122:JohnDeweyetKurtLewin

«Reflection is an important human activity in which people recapture their experience,thinkaboutit,mulloverandevaluateit.Itisthisworkingwithexperiencethatisimportantinlearning123»

Boud,D.,Keogh,R.&Walker,D.(1985,p.43)124

«J’écouteetj’oublie.Jevoisetjemesouviens.Jefaisetjeretiens».Proverbechinois

Humanbeings,whoarealmostuniqueinhavingtheabilitytolearnfromtheexperienceofothers,arealsoremarkablefortheirapparentdisinclinationtodoso125.

DouglasAdam,LastChancetoSee(1990)

Produire des connaissances, c’est construire intentionnellement des représentations

réaliséespuisvérifiéespar l’expérience.C’estunprocessusactif impliquant fortement

l’apprenant au niveau de sa motivation notamment pour la recherche de ressources,

maisaussipoursespossibilitésd’anticipationafinderéussircettetransformation.Selon

GastonPineau(1991,p.29):«laformationexpérientielleestuneformationparcontact

direct,maisréfléchi».CettedéfinitionaétécomplétéeparHélèneBézilleetBernadette

Courtois (2006, p. 92) : «la formation par l’expérience est une formation par contact

direct,maisréfléchieavecsoi,aveclesautresetavecl’environnement».

Cette formation expérientielle, toujours selon Bézille et Courtois, peut être aussi un

complémentàdesformationsdehautniveau(université,grandesécoles)etpromuainsi

commeuneformationdesubstitutiondanslespaysoùl’éducationscolaireetuniversi-

taire est défaillante. L’apprentissage par l’expérience peut en effet s’effectuer à

l’intérieuret/ouàl’extérieurdusystèmeformeléducatif.Lesêtreshumains,notamment

dans lespaysoccidentaux, sontenvahisd’informations;notresystèmescolaireactuel,

basésurlaculturegénéralepourtousetlapromotiondel’abstrait,estmaintenantina- 122L’apprentissage réflexif a été envisagé dès la fin des années 1930 par Émile Durkheim: « Il est impossibled’apprendreàunespritàréfléchirsansquecesoitsurunobjetdéterminé.Onneréfléchitpasàvide.L’espritn’estpasuneformecreusequel’onpeutfaçonnerdirectement,commeonfaçonneunverrequel’onrempliraensuite.L’espritestfaitpourpenserdeschoses,etc’estenluifaisantpenserdeschosesqu’onleforme.Penserjustement,c’estsefairedeschosesdesnotionsjustes.C’estenmettantl’intelligenceenfacedelaréalitéqu’elledoitréfléchirqu’ilestpossibledeluimontrercommentelledoits’yprendre,pours’enfairedesnotionsjustes.L’objetestdoncunfacteuressentieldel’éducationintellectuelle.»DurkheimE.,L’évolutionpédagogiqueenFrance,Paris,PUF,pp.364-365.123«Laréflexionestuneactivitéhumaineessentiellequipermetauxindividusdeseréapproprierleurexpériencederéfléchir,d’approfondiretévaluerleurssavoirs.Cetteactivitécombinéeavecl'expérienceestunélémentessentieldanstoutapprentissage”,[notretraduction].124Boud,D.,Keogh,R.&Walker,D.(1985)Reflection:TurningExperienceintoLearning.London:Kogan.125Lesêtreshumains,quisontpratiquementlesseulsàdisposerdelacapacitéd'apprendreàpartirdel'expériencedesautres,sontégalementremarquablespourleurréticenceapparenteàlefaire,[notretraduction]

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dapté.«Ildevientimportantderetrouveruneexpérienceconcrète,corporelle,existen-

tiellepourproduiredusensetnepasseperdredanslesreprésentationsmédiatiques:

lequestionnements’inversedonc.Ilnes’agitplusuniquementdesortirl’êtrehumainde

sonexpérienceconcrèteparl’éducation,maisderéinstallerlesujetdanssonexpérience,

pourqu’ilpuisse,dansununiverstrèsricheeninformationsproduiredusenspertinent

pour lui et pour les différents niveaux collectifs dans lesquels il s’inscrit» (Bézille et

Courtois,2006,p.14).Laformationparl’expérienceestnonseulementutilepouracqué-

rirdessavoirsetdescompétences,maisaussinécessairepourconstruiresapersonnali-

té,aussibiensurleplanprofessionnelquepersonnel.

ExpérienceetréflexionavecJohnDewey

Lapratiqueréflexiveestunprocessuscognitifréaliséaucoursd’unapprentissage.Ellea

pourbutd’intégrerlesréflexionsàproposd’unesituationproblèmeproposéeetnonde

reproduirelemodederésolutiondecettesituation.JohnDewey(1938)estundespre-

miers auteurs à l’origine de cette approche réflexive avec sa formule du «continuum

expérimental»:lavien’estqu’unesuited’expériences;l’expérienceactuelleapuisédes

ressourcesdanslesexpériencesantérieuresetmodifieracertainementlaqualitédefu-

turesexpériences.Cependant,pourDewey,ceprincipedecontinuiténepouvaitseréali-

serquedansuncontextescolaireetneconcernaitquel’apprentissagedecontenusfor-

malisés.SelonDewey(1938),l’apprentissageproposédanslesétablissementsscolaires

esttropsouventdéconnectédel’expérience.Orapprendre,pourcetauteur,c’estréflé-

chirsur l’expérience,enapprenantenfaisant(learningbydoing).Toutapprenantdoit

vivredesexpériencesconcrètespourdécouvriretcomprendredenouveauxsavoirs;et

enretour, ilabesoindeconnaissancessur lui-mêmeetsur lemilieudans lequel ilvit

pouraméliorersescompétences.LemodèledeDeweyestunmodèlelinéaire,maissans

unvéritableretourd’informationpour l’apprenant. Ilestbasésurundéroulementra-

tionneldetroisétapessous-estimantlerôleetl’influencedel’émotionetdel’affectdans

leprocessusréflexif(Collin,2010,p.28)126:

126Proposrapportéd’aprèsValli,L.(1997).Listeningtoothervoices:adescriptionofteacherreflectionintheUnitedStates.PeabodyJournalofEducation,72,pp.67-88.

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Base de la réflexion Réflexion proprement dite Action finale

Situation problématique Première hypothèse Raisonnement

(choix de conjectures) Questionnement sur la validité des conjectures

Tests

Résolution de la situation

Figure 4 : l'approche réflexive linéaire selon John Dewey

ExpérienceetréflexionavecKurtLewin Kurt Lewin a proposé dès 1935 un cycle d’expérience-réflexion en quatre étapes qui

serareprisetcomplétéundemi-siècleaprèsparDavidKolb.Pourunapprentissageeffi-

cace,ilfautsebaser,selonLewin,surdesexpériencesafind’entameruneréflexionsur

cequimarcheetcequinemarchepas.«Lespersonnescroientplusenlesconnaissances

qu’ellesontdécouvertesparelles-mêmesqu’encellesquisontprésentéespard’autres»

(Lewin,1947). KurtLewinaétéàl’origined’unnouveaumodèled’apprentissage,qu’ila

dénommé «concept d’action-recherche» : pour apprendre, il faut que la réflexions’inscrivedansl’action.

«Touteexpérienceprovoquechezunepersonneunemodificationvis-à-visd’elle-même,sursonenvironnement ouunemodificationdes rapports entre cette personne et son environnement»(Lewin,1935,p.269).

Unepersonneprogresselorsqu’elledébuteparuneexpériencepersonnellesuivied’une

phasederéflexionetd’unecollectededonnéesissuesdecetteexpérience.Cesdonnées

sontalorsanalyséesparcettepersonne;lesconclusionsdecetteanalysesontportéesà

la connaissance de l’apprenant pourmodifier son comportement en vue de nouvelles

expériences.

Cecycleàquatreétapespeutêtrereprésentéainsi:

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Figure 5 : le cycle réflexif de Kurt Lewin

Àpartirdecetteexpérienceconcrète,l’étapedelaréflexionetdelacompréhensionsur

ce qui a été observé va permettre de théoriser plutôt que d’apprendre par cœur une

règle.Cettethéorisationserautilepourdefuturesexpériencesetpourramêmeêtrevé-

rifiéelorsdenouvellesobservations.Pourvalideretutiliserdenouvellesinformations,

Kurt Lewin utilise la rétroaction pour délivrer à l’apprenant des informations sur

l’aboutissementdecetteexpérience,vérifiersicetteactivitérépondaitauxobjectifsdela

formationquel’apprenants’était fixés,etmontrerd’éventuelleserreurs.Unapprentis-

sagepeutêtre inefficacesi la rétroactionest insuffisante: l’apprenantnepeutêtre in-

formédel’existencepossibled’undéséquilibreentrel’actionet lesdonnéesobservées.

CemodèledecycleserareprisparlasuiteparJeromeBruner(«Theprocessofeduca-

tion»–1960),BerniceMcCarty(«Teaching to learningstyles»–1980)etDavidKolb

(«Experimentallearning»–1984).

1.3.3.Lesapprochesrécentesdel’apprentissageexpérientielréflexif:ChrisArgyrisetDanielSchönpuisDavidKolb

L’expérienceetlaréflexionselonChrisArgyrisetDanielSchönPrèsdequaranteansplustard,ChrisArgyrisetDanielSchönsesontinspirésdelade-

visedu continuum expérimental pour proposer de nouvelles bases pour la pédagogie

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réflexive; laconnaissanceadeuxorigines: laconnaissancedansl’actionet laconnais-

sancede l’action.Lorsqu’ilestdemandéàunepersonnecommentellesecomporterait

dansune situationprécise, la réponseque cettepersonneproposehabituellement est

filtréeparsespropresconvictionsthéoriquespouragir.Cettepersonneresteattachéeà

desprincipes théoriques,qu’ellea l’habituded’utilisernotammentpourcommuniquer

aveclesautres.CettethéorieducontinuumexpérimentalaétécritiquéeparArgyriset

Schön(1974,pp.6-7).Pourcesauteurs, la théoriequirégenteréellement lesactions

d’unindividuestdifférente;cequel’individudécritcorrespondàladescriptiondeson

intentionpouragir(théorieprofessée–cequel’onditvouloirfaire)etnonàladescrip-

tiondel’actionqu’ilvaréaliser(théoried’usage–cequel’onfaitenréalité).Ilpeutdire

qu’ilpensefairedetellefaçon,etfaireautrementquandilagit.Intentiond’agiretagirne

sontpaséquivalents.Les intentionspeuventmasquer levéritablecomportementde la

personne.Laréflexiondansl’actionetsurl’actionvapermettreàcetindividuderecti-

fieréventuellementsadémarchevis-à-visdel’actionqu’ilvientderéaliser.

Pourétayersathéoriesurlepraticienréflexif,DonaldSchönareprisuneassertioncé-

lèbredeMichaelPolanyi127enaffirmantqu’unprofessionnelcompétentensaittoujours

plusqu’ilneveutbienledire.«Legestehabilerévèlesouventunsavoirplusconsidérable

qu'onnelecroit».Sessavoirspratiquesimplicitesetsessavoirsintuitifsluidonnentdes

capacités de réflexion qu’il peut utiliser sans problème dans certaines situations cri-

tiquesouconflictuelles.Lessavoirsformaliséslorsdesstagesd’apprentissagesoudans

leslieuxd’étudecommel’universiténesontpassuffisantspourdevenirunprofession-

neldignedecenom,c’est-à-direreconnucompétentparlasociété.

Schönaainsiproposéunnouveaucadredusavoirquiassocieraitlesconnaissancesfor-

mellesavecdesconnaissancesissuesdelapratique.Ilaffirmeainsi:«pourdevenirun

praticien réflexif, le professionnel devra faire preuve à la fois de connaissances théo-

riques et d’une expériencedu terrain». Face à l’incertitude, à l’imprévisibilité, parfois

mêmeauconflitdevaleur, leprofessionneldesantépeutseretrouverdansdessitua-

tionsdifficiles.C’estgrâceàsonexpérienceacquiseparsapratiquequelemédecinpeut

proposeraupatientuneapprochedesolutionconformeauxattentesdecepatientetà

127Danssonouvrage«ladimensiontacite»,MichaelPolanyi(1967,p.4)aécrit:«lorsqu’onconsidèrenotreconnais-sancehumaine,nousconnaissonsplusquecequenouspouvonsexprimer».(«Ishallreconsiderhumanknowledgebystartingfromthefactthatwecanknowmorethanwecantell»).

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l’exercicemédical.Maislaformalisationdessavoirsacquisparl’expériencen’estpasune

activitéaiséeselonSchön.

Cessavoirssontpropresàl’apprenantetpeut-êtreentachésd’incertitude.Lesavoirgé-

nérédansuneexpérienceprécédentepeut-ilêtreréutilisésansdangerlorsqueleprati-

cienvarencontrerunesituationplusoumoinssimilaireenapparence?Commentdé-

crire,expliqueretdonnerdusensàunsavoirquiaétégénéréparunesituationquia

poséproblème?Lesactesréalisésparunprofessionnelsont-ilssuffisantspourlequali-

fier de professionnel compétent et habile? Selon Schön, c’est le processus de réflexion

pendantl’actionetsurl’actionquivapermettreauprofessionneldelimiterlesproblèmes

d’incertitudeetlessituationsinstables.

Lorsqu’unprofessionnelrechercheàrésoudreunproblème,ilnedoitpasconsidérerce

problème de manière isolée. Une première étape consiste à restructurer la situation

problématique; cela amène le professionnel à s’interroger sur un certain nombre

d’hypothèsesappropriéesaveclasituation;notammentens’aidantdecequ’ilsaitdéjà

et/ouencherchantdusavoirauprèsdepersonnescompétentessurlesujet:c’estlaré-

flexion dans l’action. Cette réflexion dans l’action conduit à transformer une situation

problématiqueetimpréciseaudébutdelaréflexion,enunesituationquiprendtoutson

sens,donccontrôlable.

Il est possible de résumer les propositions de Schön ainsi: réfléchirsursapratiqueet

réinvestirlesrésultatsdesaréflexiondansl’action.Lapratiqueréflexiveestundialogue

entrelepraticienetlasituationproblèmeauquelilfaitface:c’estunesuitedeprocessus

de construction-déconstruction-reconstruction qui amène le professionnel à être ca-

pabled’expliqueretd’agir,etaboutiràunerésolutionefficaceduproblème.

Cettedifférentiationentrelaréflexiondansl’actionetsurl’actionn’estpasidentifiéepar

d’autresauteurs(JenniferMoon,1999,p.44):

«Cettedifférenceentrelaréflexiondansl’actionetlaréflexionsurl’actionestplusoumoinsarti-ficielle. Ces deux réflexions constituent deux mécanismes cognitifs d’un même continuum :d’aborddansl’actionpouragirrapidement(leprocessusestplusoumoinsconscient),puisaprès

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l’action, afin de disposer de plus de temps pour réfléchir, et ce de manière davantage cons-ciente128».

SimonCollin(2010,p.10)insistesurlesfonctionsdemédiationdelapratiqueréflexive,

entre la théorie et la pratique, entre l’identité de l’apprenant et l’identité profession-

nelle;maisaussimédiationentrelespratiqueséducativesacquisesetlespratiquesédu-

catives à acquérir, entre la formation initiale et la formation continue, et enfin entre

l’éducationetlasociété.Laréflexionsurl’actionestunprocessusrétroactif:ellepermet

deprendredureculsurunproblème,surunélémentdupassésurlequelelleporteun

regarddistancié(Schön,1983).Elleestbaséesurdenombreuses interrogations inspi-

réesiciparJenniferMoon(2007)129comme:

«Ques’est-ilpasséouqu’est-ilarrivé?Qu’avez-vousressenti?Qu’avez-vousapprisdecetteexpé-rience?Quellessontlesmodificationsàapporterpourvotrepratique?Commentallez-vousréali-ser les changementséventuels?Quel impact les changementspourraient avoir survotre futurepratique?

Autotal,êtreunpraticienréflexif,c’estavoirunepostureparticulièreparrapportavec

lesautresetsoi-même.C’est,selonPhilippePerrenoud(2005),une identitéetunrap-

portaumonde,ausavoir,àlacomplexitéquinécessited’abordd’avoir«nonseulement

undésirdecomprendrecequisepassedanssontravail,maisaussilaforcederefuserla

fatalité,etenfinlecouraged’affrontersespropresambivalencesaussibienquelesrésis-

tancesdesautres».

L’expérienceetlaréflexionselonDavidKolb

LenomdeDavidKolbestsouventcitédèsquel’onparled’apprentissageexpérientiel;

maisiln’estpaslepremieràavoirmédiatiséceconcept.OutreJohnDeweyetKurtLe-

win,JeromeBruner,JeanPiagetetCarlRogersontdécrit l’apprentissageselonunpro-

cessus cyclique où chaque expérience vécue pouvait amener à une expérience ulté-

rieuresilesconditionssuivantesétaientprésentes:l’expérienceaprécédélathéorie,et

unprocessusréflexifaétémisenplaceàlasuitedel’expériencevécue.Danssonlivre

128“Reflection-in-actionandreflection-on-actionarepartofacontinuum,thesameprocessesbeinginvolvedthatactquicklyandusuallyunconsciouslyduringactionor,furtheralongthecontinuum,actmoreslowlyandprobablymoreconsciously”,[notretraduction].129“Whathappened?•Howdidyou (andothers involved) feel? •Whatdidyou learn fromtheexperience?•Whatchangesneedtomade?•Howcanyoumakethosechanges•Whatimpactmightchangeshave?»,[notretraduction].

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«psychologie de l’intelligence», Piaget (1967) a écrit: «l’expérience est nécessaire au

développementintellectuel.»L’expérimentationdeconceptsdansl’actionestretrouvée

dansleprocessusd’accommodation,etl’assimilationportesurlesexpériencesquiamè-

nentàl’élaborationdeconcepts.CarlRogersaproposéégalementunmodèleconstruc-

tivisteetexpérientieldel'apprentissage.C’estlepremierauteurconnuàutiliserlafor-

mule«apprentissageexpérientiel»(Rogers,1972,p.2).Pourcetauteur,l'apprentissage

quiestexpérientielestunapprentissage,ancrédansl'expérience,quisefaitenprofon-

deuretaffecteobligatoirementlecomportementetlesattitudesdel'apprenant.

«Aulieudeconsacrerdelonguespériodesdetempsàorganisersoncoursetàpréparersesleçons,leprofesseurs'efforcederéunirlesdifférentsmoyensquipermettrontàsesétudiantsdefaireunapprentissage expérientiel approprié à leurs besoins. Il consacre également tous ses efforts àmettrecesmoyensàlaportéedecesétudiants,enrepensantetensimplifiantlesdifférentesétapesparlesquellesceux-cidoiventpasserpourutilisercesmoyens».(Rogers,1972,pp.130-131).

David Kolb (1984, p. 38) a défini l’apprentissage expérientiel (experiential learning)

comme«le processus par lequel la connaissance est créée par la transformation de

l’expérience.Cesconnaissancesnouvellesrésultentde lasaisie (préhension)de l'expé-

rienceetdesatransformation».Danssonouvragepubliéen1984130,Kolbinsistesurla

nécessitédeproposeràl’apprenantuneexpériencesousformedeproblèmeàrésoudre

en relation étroite avec la réalité quotidienne. Ainsi, l’apprenant est stimulé et

s’implique davantage dans l’action à réaliser. Kolb propose ainsi un cycle

d’apprentissage selon les quatre temps successifs, ordonnés de cette manière: après

avoirparticipéàuneexpérienceconcrète,l’apprenantobservelesrésultatsdecetteex-

périenceetréfléchitsursesconséquences.(Àpartirdel’action,quellessontlesobserva-

tions,quellessontlesréflexionspossiblesàpartirdecetteaction?)Ilpeutainsiréorga-

nisersespropresreprésentationsmentales:c’estletempsdelaconceptualisationabs-

traitequivagénérerdenouveauxsavoirs. (Quelsenseignementscetteactionpeut-elle

apporter à l’apprenant, à quels concepts, à quelles théories se réfère cette action -

quelleshypothèsesd’améliorationpeut-onfairepourlesactionssuivantes?).

Ces nouveaux savoirs pourront être testés ainsi dans une nouvelle phase

d’expérimentation, achevant le cycle. Le passage par ces quatre étapes est nécessaire

pour lesapprenants,mêmesiunapprenantpeutprivilégierunedecesquatreétapes.

130KOLBDavid(1984).ExperientialLearning,experienceasthesourceoflearninganddevelopment.

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Lorsqu’unapprenantestplusattiréparl’expérienceconcrète,ilnepeutsedispenserde

la réflexion pour agir et théoriser. Pour cette raison, l’évaluation devrait davantage

s’intéresserauconflitaction-réflexionquicaractériseceprocessusd’apprentissageplu-

tôtqu’aurésultatobtenuàl’issuedecetapprentissage.

David Kolb s’est inspiré non seulement de Kurt Lewin (1935) et JohnDewey (1938),

maisaussideBerniceMccarthy(1980)quiavaitdéfiniunautresystèmeà4temps131.

SelonKolb,l’apprentissagenepeutêtregénéréuniquementparlaseuleexpérience.Afin

que cet apprentissage soit complet, il est nécessaire d’ajouter à cette expérience des

élémentsderéflexionetuntempsdematuration(la transformation)afind’obtenirun

résultat(quecesoitunacquisouuneremiseencaused’acquis).«Laconnaissanceré-

sulte de la combinaisonde la saisie de l’expérience et de sa transformation » écrivait

Kolb(1984,p.41).Lecycled’apprentissageexpérientielseratotalementcomplet lors-

que l’apprenant aura analysé et évalué les résultats de l’expérience. L’apprenant peut

alorsentrerdansunnouveaucycled’apprentissage.

Figure 6 : le cycle d'apprentissage réflexif de David Kolb

131BerniceMcCARTHYareprislecycled’apprentissagedeKurtLewinendécrivantunsystèmeselonles4étapesdeLewin(le4-Mat)afinderépondreàcettequestionfondamentale:commentapprenons-nous?L’expérienceconcrèteest destinée à déclencher lamotivation (pourquoi?). L’observation réfléchie est l’étape d’explicitation du contenu(quoi?). La conceptualisation abstraite est la phase nécessaire pour faciliter la pratique (comment?). Enfin,l’expérimentationactiveapourobjectifdeconseillerdesapplicationspourdonnerlesmoyensd’intégreretgénérali-serl’apprentissage(etaprès?).

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1–L’expérienceconcrète:L’apprenantestimpliquédansunesituationconcrètequilemetfaceàunproblèmeréeletsérieux.Pourrésoudrecettesituation,ildoitêtremotivé.

2–L’observationréfléchie:C’est la phase ou l’'apprenant recueille les données afin de comprendre la situation.CommelesoulignentVanessaLortoetMarie-JoséeMoquet(2009,p.27),

«Àmesurequ'il s'imprègnede sonexpérience, l'apprenant se forgeune imageperson-nelledecequ'ilvitenéchangeantavecsonentourage,enexplorantdansdesdomainesvoisins, en rassemblant des données, en expliquant certains faits. Ainsi, l’expérience sefaçonneetmodélisel’analysedel'apprenant.Celui-cis'engagealorsdansuneobservationréfléchie».

3–Laconceptualisationabstraite:Chaqueexpérienceamèneàproposeruneouplusieurshypothèsesprovisoiresdestinéesàrésoudrelasituationproposée.Uneréflexionapprofondieconduitàidentifierunconceptplusvraisemblabledestinéeàs’incorporerdanslesschèmesderaisonnementutilisésha-bituellementpar l’apprenant.Lesprocessusderésolutiondeproblèmedecetapprenantpeuventêtreainsiconfortésoumodifiés.

4–L’expérimentationactive:

L'apprenant testeet vérifie ce conceptprovisoiredansdenouvelles situations rencon-tréesaucoursdesoncycled’apprentissage.Lorsdenouvellesexpériences,ilpourrava-liderounonceconcept.Sicedernierestvalidé,ildevientunacquisjusqu’àlarencontred’unnouveaudéfid’apprentissage.

La descriptionde l’apprentissage parKolb est intéressante, car elle correspond à une

opérationnalisationduprocessusd’apprentissagebeaucouppluslargequecellepropo-

sée par les socioconstructivistes.L’apprentissageest«unprocessuspar lequel le savoir

est crééà travers la transformationde l’expérience » (Kolb, 1984, p. 155). Il est conçu

commeunprocessuscontinueld’adaptationàl’environnementdel’apprenantetnonen

vue d’obtenir seulement un résultat. Ce processus tient compte non seulement de

l’expériencevécueparl’apprenantdansunesituationparticulière,maisaussidesefforts

del’apprenantpourcomprendrelasituationetdériverdessavoirsàpartirdecontexte

d’apprentissage.Cependant,pourIsabelleOlryLouis(1995,p.326), leprincipalincon-

vénientdecetteconceptionrésidedanslechoixdesdimensions:«Ellessemblentrelativementabstraites,tropglobalespourbiendifférencierlessujets,etnepren-nentpasencomptelesaspectssociauxdel’apprentissage.Parailleurs,ilnousestdifficilededisso-cierlesitemsqualifiantlestypesconcretsetactifs,ouencoreabstraitsetréflexifs».

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L’apprentissage semble réduit uniquement à l’acquisition ou la création de savoirs. Si

l’adaptationde cemodèle à l’apprentissagededisciplines académiques estpossible, il

estmoinsutilepourladescriptiondesapprentissagesprofessionnelssouventbiencon-

textualisés et peu théoriques. D’autant que lemodèle de Kolb ne laisse pratiquement

aucuneplaceàl’intuitionetàlacognitionsociale.SelonDenzinetLincoln(1994),ilest

nécessairedeprendreencomptelamanièredontsontvécueslesexpériencesetlescon-

textesdespersonnesquiviventcetapprentissage.Lemodèleexpérientielproposépar

DavidKolbaouvertunnouveauchampderecherchesurl’apprentissage.

1.3.4.Latransformationdel’expérience(Mezirow)

Adefiningconditionofbeinghumanisthatwehavetounderstandthemeaningofourexperience…Butincontemporarysocietieswemustlearntomakeourowninterpretationsratherthanactonthepurposes,beliefs, judgments,and feelingsofothers.Facilitatingsuchunderstanding is thecardinalgoalofadulteducation.Transformativelearningdevelopsautonomousthinking.(MezirowJ.,1997,p.5)132

PaoloFreireestconnupoursesnombreuxtravauxsurl’alphabétisationdespauvresen

Amérique latine. Ilaproposédès1970,une théoriede l’apprentissage transformateur

qu’ilaqualifiédepédagogiedelaprisedeconscience,cecienvuedeluttercontrelesiné-

galitésetlesoppressions.Pourcetauteur,l'éducationtransformativedesadultesviseà

favoriseruneprisedeconsciencecritiquesurcequ’ilsapprennent.Cetexercicederé-

flexionseréfère,pourJohnDirkx(1998,p.3),

«Àunprocessusdanslequellesapprenantsàdévelopperlacapacitéàanalyser,àposerdesques-tionset àprendredesmesurespourmodifier leurenvironnement socioprofessionnel, culturel etéconomiquequiinfluencentetfaçonnentleurvie133».

Selon Freire, l’apprentissage transformateur a pour objectif de développer chez les

adultesunecompréhensionplusprofondedesinfluencessocialesquiagissentsureux.Il

estbasésurunecombinaisond’actionsetderéflexionsinterpersonnelleset/oudialec-

tiques avec d’autres individus. L’éducation par transformation des rapports sociaux 132Toutêtrehumaindoitcomprendrelessignificationsdesesexpériencespourévoluer…Dansnotresociétéactuelle,nousdevonsapprendreàréfléchir,àréalisernospropresinterprétationsplutôtqued’agirsurdesbuts,descroyances,desjugementsetdesattitudesdéfiniespard’autrespersonnes.L’apprentissagetransformateurdéveloppelapenséeautonome,[notretraduction].133“Critical consciousness refers to a process inwhich learnersdevelop the ability to analyze, posequestions, andtakeactiononthesocial,political,cultural,andeconomiccontextsthatinfluenceandshapetheirlives”,[notretraduc-tion].

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(praxis)devraitfavoriserlapossibilitépourlesadultesdeselibérerafinderéfléchirsur

lemondeetsipossiblelemodifier.(Dirkx,1998,p.3)134.L’influencedeFreiresurJack

Mezirowestcertaine.Maiscetauteuradéveloppésaproprethéoriedel’apprentissage

transformateurnotammentàpartirdesécritsde JürgenHabermas,DanielGolemanet

KarlPopper.

Pourcedernierauteur, l’expérience joueunrôledans leprocessusde l’acquisitionde

connaissances,maisnedoitpasfaireautoritésurcenouveausavoir:

«C'estàtraverslafalsificationdenossuppositionsquenousentronsencontacteffectifaveclaréa-lité.Ladécouverteetl'éliminationdenoserreurssontleseulmoyendeconstituercetteexpériencepositivequenousretironsdelaréalité135».

L’individuquiagitdoitaccepterderemettreencausesontravail.Lathéoriedelatrans-

formationdeMezirow (2001,p. 24) estbasée sur leprincipe suivant: «leshabitudes

d’anticipation, ou perspectives de sens, assimilées en dehors de tout examen critique,

serventdeschèmesetdecodesdeperceptionetd’interprétationdansledécryptagedu

sens».Desschèmesdeconnaissances inclusdansnosperspectivesdesensvontdonner

dusensauxcontenusperçuslorsdenosexpériences.Lorsquecesperspectivesdesens

sontdépassées,nous sommes incapablesdepercevoirnide comprendredenouvelles

informations,générantdel’angoissed’êtredansunesituationoùiln’existepasdesolu-

tion.

C’estgrâceàl’expériencequenouspouvonsrenforcernosperspectivesdesensetdimi-

nuercesentimentd’angoisse.Eneffet,cesschèmesdesensquireposent,selonDaniel

Goleman,surdesconnaissancesspécifiques,descroyances,desjugementsdevaleur,des

interprétations,peuventévoluersousl’effetdelaréflexion(Mezirow,2001,p.25).Cette

évolution s’effectue sous forme de différenciation, d’intégration et de transformation

grâceàdesprocessusd’autoréflexion.Mezirowaajouté,àlathéoriedel’agircommuni-

cationnelde Jürgen Habermas, cette dimension d’autoréflexion de l’être humain pour

touslessavoirsissusdesdifférentschampsdelaconnaissanceacquisparapprentissage

134“Learning helps adults develop a deeper understanding of theways inwhich these social structures shape andinfluencethewaystheythinkaboutthemselvesandtheworld.Thisprocessconsistsofactionandreflectionintrans-actionalordialecticalrelationshipwitheachother(praxis).Freirearguesthateducation,throughpraxis,shouldfosterfreedomamongthelearnersbyenablingthemtoreflectontheirworldand,thereby,changeit”,[notretraduction].135POPPERKarl(1979)Laconnaissanceobjective,appendice1,p.525.

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instrumental et communicationnel. L’apprentissage est «un processus qui renouvelle

l’interprétationdesensouréviselesanciennesinterprétationsdusensdel’expérience».

Balleux insiste: apprendre est un processus qui correspond à un ensemble interrelié

incluantl’expérience,l’apprentissageetlarecherchedesens.

«Quandnotreexpériencedevieestenharmonieavecnotrestructuredesens,elleestassimiléeàl’intérieurdecettestructure.Quandellen’estpasconforme,l’expérienceesttellementpuissantequ’elleprovoquedeschangementsdanslastructuredesensouconduitàlaformationd’unenou-vellestructure»(Balleux,2000).

Le concept d'apprentissage transformateur repose ainsi sur des processus critiques à

traverslesquelsunapprenantouungrouped’apprenantss’interrogentsurlalégitimité

descadresderéférenceacquisouélaborésavecplusoumoinsderéflexionpendantun

cycled’études.Cette transformationviseàélaborerdenouveauxcadresde références

quivontguiderlesprochainesexpériencesdefaçonplusrationnelle,plusautonomeet

plusréfléchie.Lathéoriedel’apprentissagetransformateurest fondéesur lamodifica-

tionconscienteparunindividudecequ’ilestetdecequ’ilsait.Cetyped’apprentissage

vaaidercet individuàdéveloppersapenséecritiqueetréflexive,à lavalideretàagir

selonsespointsdevue,sesvaleurs,sescroyancesetseshabitudes.

L’apprentissage transformateur concerne plus particulièrement les étudiants et les

adultes, car il exige des dispositions intellectuelles de haut niveau. Le plus souvent,

l’adulte prend conscience de la transformation non pas au moment où le processus

s’effectue,maisaprèsqu’ilaiteulieulorsqu’ilconstatelechangementprofondquis’est

réellement produit136. L’apprentissage expérientiel est un processus intellectuel actif:

l’apprenantutiliselesconclusionsdelasituationd’expériencevécuepourtransformer,

enmobilisantsescapacitésintellectuelles,cetteexpérienceennouvellesconnaissances.

SelonBernadetteCourtois(2006,p.93),

«Parlerdetransformationdel’expérienceindiquequ’untravails’effectuesurunvécu:toutvécuest potentiellement expérience, mais il n’est pas automatiquement et systématiquement expé-rience: c’est le rapport de la personne avec la situation vécue qui permettra de parlerd’expérience».

136DIRKXJ.M.,MEZIROWJ.,&CRANTONP.(2006).Musingsandreflectionsonthemeaning,context,andprocessoftransformativelearning:AdialoguebetweenJohnM.DirkxandJackMezirow.JournalofTransformativeEducation,4,pp.123-139.

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En2006également,ClaudeDebon(p.202)écrit:«Toutnefaitpasexpérience:cequifaitl’expérience,c’estl’associationentrelecontactdirectetglobalàdessituationsévènementiellesounouvellesnousaffrontantàl’incertitudeetlerétablis-sementdelacontinuité».

(Cequicorrespondaudésapprentissageouflottement,puisréparationdelaruptureouréorga-nisation (décrit par Gaston Pineau en 1991). On retrouve les deux principales phases del’apprentissage constructiviste (décontextualisation, recontextualisation) en soulignant cepen-dant que ce processus d’apprentissage prend en compte également la personnalité del’apprenant; il n’est pas seulement cognitif. Ce travail de transformation de l’expérience peutêtrespontanéouréfléchi.

PatriciaCranton(2002,p.66)aproposéuncheminementdecettetransformationselon

lesseptétapessuivantes:

1. unévénementdéclencheurprovoqueunbouleversementdescroyances,valeurs,jugementsousentimentsélaborésparunindividu;

2. cet individu prend alors conscience des présupposés, habituellement inconscients et qui luisontpropres,quiontétéébranlésouremisenquestionparlasituation;

3. il examine ces présupposés par une réflexion critique et essaie de découvrir l’origine de cesderniers,leurimportanceetlesconséquencesdeleurmaintien;

4. ildécouvredenouvellesperspectives;

5. il explore, confronte et évalue ces nouvelles perspectives; c’est à partir de ce stade quel’individupeutélaborerdenouvellesconnaissances;

6. il révisesesprésupposés initiauxà la lumièredecesnouvellesperspectivesafindes’assurerquecelles-ci sontbienadaptéesetqu’elles répondentadéquatementà la situationprobléma-tique;

7. iladoptedesopinions,uneattitudeetundiscourscohérentparrapportauxprésupposésquiontététransformésoudesnouvellesperspectivesquiontétéproposées.

Ceprocessusdetransformationexigeunedémarcheréflexivecritiqueefficacequin’est

pastoujourspartagéepartouslesadultesapprenants.Outreuneintelligenceémotion-

nelle, une ouverture critique et une écoute empathique, cette démarche implique les

troissujetsderéflexionsuivants(Merriam,2004):

1. uneréflexioncentréesurlecontenu,quiportesurl’expériencevécueentantquetelle;

2. uneréflexioncentréesurleprocessus,quiportesurlafaçondegérer,detraiteretdecomprendrel’expériencevécue;

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3. uneréflexioncentréesurlesfondementsdel’expérience,quiportesurl’examendescroyances,desvaleursetdesprésupposésassociésàl’expériencevécueouauproblèmerencontré.

Àsonorigine,troisélémentsfondamentauxcaractérisaientl’apprentissageexpérientiel

(EdwardTaylorinMezirow,Tayloretal.2009,p.4):

«uneexpérienceindividuellesuivied’uneréflexioncritique,etseterminantparunediscussion.Parlasuite,d’autresélémentssignificatifsàce typed’apprentissageontétéprisencomptecommeuneorientationholistiquedecetyped’apprentissage,laprisedeconscienceducontexte,etdessituationsauthentiques.D’autrepart, la conceptualisationde certains des éléments originaux a évolué. La ré-flexion critique était considérée comme une approche rationnelle de l’apprentissage,mais de nou-veauxtravauxderechercheontdémontréquecesontlessavoirsaffectifsmisàcontributionaucoursdel’expériencequisontlesplussignificatifspourcetteréflexion.»

Touscesélémentsontdesrelationsinterdépendantes.Considérésseuls,ilssontinutiles.

Sans expérience individuelle, il n’y apasde raisonà s’engagerdansune réflexion cri-

tique. Proposer des situations authentiques augmente la relation de confiance appre-

nants-enseignantsetstimulecesapprenantsàparticiperàcetteréflexioncritique.

Maisattention,poursuiventTayloretal,(2009,p.4):Aucundecesélémentscitésci-dessusnedoitêtreconsidérécommedesélémentssimplesd’unesériedetechniquesoudestratégiesd’enseignementsdécontextualisés,appliquésarbitrairementsansleursconnexionsàuncadrethéoriqueglobal,celuidel’apprentissagetransformatif.Cesontles relations réciproques entre tous ces éléments, en fonction des objectifs théoriques del’enseignementoudelaformationquidonnenttoutesignificationàcetapprentissagetransforma-tif.Sionneprendpasconsciencedecetteréalité,l’apprentissageestinefficace,commeunnaviresansgouvernail,errantsansbutdéfini».

LathéorietransformativedeMezirowestintéressantepourcomprendrel’appropriation

de la formation par les apprenants; mais comme le souligne Edward Taylor (2000),

cettethéorieestcentréeessentiellementsurl’aspectcognitifengardantuneplacebeau-

coup trop faibleauxaspectssocioaffectifsetémotionnelsducontexted’apprentissage.

L’apprentissage est doncun concept complexe, englobant denombreuses théories, en

fonction:

• desprocessusintellectuelsmisenjeu(comportementalisme,constructivisme,ré-

flexionsurexpérience);

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• selonqu’il s’adresseàun individuouunecollectivité(apprentissage individuel,

coopératif;

• des situations où se produisent ces apprentissages. Dans ce dernier cas,

l’approche éducativene se résumepas uniquement à des situations éducatives

formaliséesenétablissementscolaireetuniversitaire.L’apprentissagen’estpas

seulement «des moments construits pour cela, à la présence d’une intention

d’apprendre,voireàlaconscienced’apprendre».(GillesBrougères,2007,p.5)

1.3.5.Réflexionsetnouvellesconceptionsd’enseignementdanslesFacultésdemé-decine

Depuis le début des années 2000, dans les départements de médecine générale,

l’apprentissagethéoriquesousformed’enseignementdirigéestengrandepartiedélais-

sé137pourfavoriserl’émergenced’untutorat.Maiscetteformed’enseignementnepeut

être totalement explicitée par les modèles de Lewin et Kolb qui comportent chacun

quatreétapes.Certes, il estnécessairedeconcevoirdesexpériencesappropriéespour

faciliterlaréflexion;cetteconceptionpeutêtreréaliséeparl’enseignantouparlesap-

prenants.Cependant,laconceptiondecesexpériencesparlesapprenantsnécessite,se-

lonGrahamGibbs, laprésenced’unenseignantconfirmé.Cecidans lebutde favoriser

l’élaborationd’idées,deconceptsetd’hypothèsesafind’amenerchaqueapprenantàune

réflexionindividuelleetcollectivesurleursproductions.PourGibbs,lapratiqueestné-

cessaire,mais elle peut être également augmentée par la réflexion.Mais cette simple

réflexionn’est suffisante. Seuleune réflexion critique va apporter aux apprenantsdes

informationssupplémentairesnécessairespouraméliorersescompétencesoufavoriser

l’élaborationdenouvellescompétences.

GrahamGibbss’estinspirédesmodèlesdeDewey,Lewin,Kolbpourproposeren1988

unmodèlede réflexionparticulièrementmis enpratiquepar les professionsde santé

dans les pays anglo-saxons. Sonmodèle, en six étapes, est centré sur une rétroaction

critiquedecequiaétéfaitpourmieuxagirensuite.Ilapourbutdedonnerauxprati-

137Lapartdecoursthéoriquesquiétaitégalàplusde60%enl’an2000nedépassepasactuellementles20%àlaFacultédeMédecineParis7.

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ciensréflexifsdusensauxexpériencesréaliséesetderemettreenquestion leurspra-

tiqueshabituelles.SelonGibbs, lestadederéflexionest insuffisantenlui-même, il faut

mettreaussitôtenpratiquelesapportsdel’apprentissage,permettantauprocessusré-

flexifd’informerleprofessionnelsursapratiqueetsursonautonomieàagir.

«Uneexpérienceseulen’estpassuffisantepoursatisfaireunapprentissage.En l’absencederé-flexionsurcetteexpérience,soitlesconnaissancesdégagéesàl’issuedel’expériencepeuventêtrerapidementoubliées, soit lepotentield’apprentissagedisparait.C’estàpartirdes sentimentsetdesidéesémergeantdecetteréflexionquedesgénéralisationsoudesconceptspeuventêtrepro-duits.Cesontcesgénéralisationsquipermettentàdenouvellessituationsd’êtreabordéeseffecti-vement138».(Gibbs,1988,p.14).

LecycleréflexifproposéparGibbscomporteles6étapessuivantes:

Figure 7 : Le cycle d'apprentissage réflexif de Graham Gibbs (1988, pp. 49 – 50)

Nousallonsdécriredefaçonsynthétiqueles6étapesducycleréflexifdeGibbs

138“Itisnotsufficientsimplytohaveanexperienceinordertolearn.Withoutreflectinguponthisexperienceitmayquicklybeforgotten,or its learningpotential lost. It is fromthefeelingsandthoughtsemergingfromthisreflectionthatgeneralisationsor concepts canbegenerated.And it isgeneralisations thatallownewsituations tobe tackledeffectively”,[notretraduction].

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Ladescriptiondelasituationexpérientielle:

C’estlecontextedel’événement.Quelétaitlefait?Quiétaitconcerné?Qu’est-cequis’estréelle-mentpassé?Àquelendroit?Qu’est-cequevousavezmanqué?Avez-vousl'intentiondemettrel'accent de votre réflexion sur la structure, sur le processus et/ou sur les résultats des soins ?C’estunesimpledescription,ilnes’agitpasdejugercequiaétéfaitnidetirerdesconclusions.

Leressenti:

Quelétaitvotreressentiavant?Après?Quelétait leressentidespersonnesquitravaillentavecvousouàproximité?Quelsontétévossentiments,vosémotionssurlemoment?Parlasuite?

L’évaluation:

Quelle opinion avez-vous de vos propres jugements? De ce qui s’est bien passé? Mal passé?Qu’est-cequiétaitbienoumal?Quellesontétélesconséquencespourlespersonnesconcernées?Leproblèmeposéa-t-ilétérésoludefaçonsatisfaisante?Cetteévaluationsebasesurdes juge-mentsdevaleur.

L’analyse:

Elleapourbutdedécomposerplusfinementlesdifférentsélémentsdelaréflexion:cecidanslebutdepositifsrepérerdesélémentsounégatifsquin’ontpuêtrediscernésquandleprocessusderéflexionétaiteffectuédanssaglobaliténotammentlessuivants:quelssontlesfacteurscapablesd’influerlerésultatdecetteexpérience?Quelssontceuxquiontpuentraverlaréflexion?Lafa-voriser?Pourquelle(s)raison(s)ceproblèmes’étaitproduit?D’autrespersonnesmisesdanslamême situation ont-elles réagi d’une manière différente? Que se passait-il tout autour del’expérience?

Synthèse(conclusiondel’expérience):

Elle a pour objectif d’explorer tout ce qui aurait pu être fait différemment. Pouvait-il y avoird’autresalternativesdepriseenchargeoud’approcheduproblème?Auriez-vousdûfaireautre-ment,mêmesidanscecasprésent,celas’étaitbienpassé?Existe-t-ildesélémentsnégatifsquiauraientpuêtreévités?Desélémentspositifsplusefficacesauraient-ilspuêtreprisencompte?Queconcluez-voussurvotrefaçond’agir?

Pland'actionfuture:

Commentallez-vousvouscomportersilasituationexpérimentéesereproduitunenouvellefois?Agirez-vousdelamêmefaçonoudifféremment?Qu’allez-vousfaireàl’avenirafinderéduirelesélémentsnégatifsrencontrésdansunetellesituationetaccroitreaucontrairelesélémentsposi-tifs? Quelles nouvelles mesures allez-vous prendre sur la base de ce que vous avez appris?Qu’avez-vousencorebesoind’apprendre?Parquel(s)moyen(s)?

Miseenpratique ÀlaFacultédeMédecineParis7, lesoutilsd’apprentissageproposésactuellementaux

Internesenmédecinedécoulentengrandepartiedescyclesexpérientielsréflexifs,no-

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tammentceluideGibbs,aveclamiseenplacededeuxformesdetutorat:untutoratin-

dividuel et un tutorat collectif avec des petits groupes d’étudiants (4 personnes en

moyenne).Nousprésentonsci-dessousunexempledetutoratcollectiftelqu’ilestprati-

quéen1reet2eannéedutroisièmecycledemédecinegénérale.Ilsedérouleselondeux

séancessuccessivesaveclesmodalitéssuivantes:

1eséance:laréflexiondansl’action:atelierdeproductionnarratifetcoopératif:

Les apprenants racontent leurs expériences et leurs vécus dans chaque sous-

groupeselonunedes6thématiquessélectionnéespar les Internes(unethéma-

tiquepargroupede4).Ilestdemandéàdesparticipantsderaconterlesprisesen

chargequ’ilsontréellementeffectuées,etderelaterlesdifficultésrencontréeset

commentilslesontrésolues.

Un rapporteur par sous-groupe collecte d’abord les remarques de son propre

groupe. Ilnoteégalementpendant laplénière les remarquesdesautrespartici-

pantsconcernantlathématiquesélectionnéeparlegroupe(20’pargroupe).

L’enseignant est un tuteur: il n’enseigne pas, il a un rôle de médiateur,

d’animateur,demodérateur.Ilrepèrelesélémentssurlesquelslesétudiantsde-

vront insistersur le travailà fournirpour laséanceretour. Il repèreégalement

lesinsuffisancespossiblesdesapprenantspourlapriseenchargedeceproblème

en soins primaires en dehors de l’hôpital. Il demande aux participants qui ont

présenté une situation clinique d’expliciter cette situation. Il repère dans les

échanges qui ont eu lieu, les différentes expériences qui peuvent se prêter à

l’élaborationdetracesécritesquiserontévaluéesselonlescritèressuivant: les

données actuelles de la science, la dimension psychosociale des situations cli-

niqueschoisies,lesuivi,letravailenéquipe,lapriseenchargedupatientdansle

cadredupremierrecours,lapréventionetlasantépublique.

2eséance:laréflexionsurl’action

Cettesecondeséancealieuplusieurssemainesaprèslapremièreséance,afinde

laisser le temps auxmembresdesdifférents sous-groupes, après avoir effectué

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leur tâched’écriture, de semettred’accord surun compte-rendu final qui con-

vient à tous lesmembresdu sous-groupe.Chaque sous-groupeassureunepré-

sentationselonletempsqui luiaétéfixé.Danschaquesous-groupe, lespartici-

pantss’exprimentsurleurproductionenexplicitantleurschoix,leurspropresré-

flexionset lesréférencessélectionnées.Quandlesmembresdusous-groupeont

terminé leursprésentations, undébat s’engage avec les participants des autres

sous-groupes.L’enseignantfaitalorslasynthèsedecesproductions,etpeutpro-

diguerdesremarquesetdesrecommandations. L’apprentissageexpérientielréflexifestl’ultimeétaped’unlongprocessusd’acquisition

de compétences afin d’agir en professionnel efficient. Il ne suffit plus se baser sur

l’acquisitiondesavoir,savoirfaire,savoirêtre,savoiragir,ilfautaussiengageràchaque

expériencevécue,uneréflexionsurcequiaétéfaitetcequidevraitêtrefait.

Nousavonsdistingué troisprincipauxparadigmesd’apprentissage (pédagogieparob-

jectifs,approcheparcompétencesetmodèleexpérientielréflexif).Lapédagogieparob-

jectifs a bouleversé le monde de l’apprentissage dans les facultés de médecine. Mais

cettepriseenconsidérationdel’apprenantprivilégiéparrapportausavoirn’apasres-

sembléàunlongfleuvetranquille.Cesontd’abordlesdépartementsdemédecinegéné-

raleetlesassociationsdeformationmédicalecontinuequisesontappropriéceconcept

dès ledébutdesannées1980.Dixansplustard, lesenseignantsdesautresspécialités

médicalesontadoptéleprincipedelapédagogieparobjectifs.Àcettemêmepériode,les

enseignantsgénéralistesqui,depuisplusieursannées,s’étaientrenducomptedesinsuf-

fisancesde ceparadigmeontproposédans leursdépartementsuniversitairesdenou-

vellesrèglespédagogiquesaxéessurleconceptdelacompétence.Commejel’aiprécisé

dansledéveloppementdecettepremièrepartie,cesontlesproblèmesd’évaluationqui

ontamenélesgénéralistesenseignantsàévaluerdescompétencesetnondesobjectifs.

Malheureusement,cetteconceptionplusglobaledel’évaluations’estheurtéeàdespro-

blèmes d'appréciation de la compétence des étudiants enmédecine. Ne sachant trop

fairepourévaluerlescompétences,lesenseignantsontfavoriséundécoupagedescom-

pétencesenobjectifsplus facilesàévaluer.Constatantque l’approcheparcompétence

n’apportaitpasune réponse satisfaisanteà l’évaluationde la compétenced’unprofes-

sionneldesanté, lesenseignantsdemédecinegénéraleontmodifié leurapprocheéva-

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luativeenciblantunnouveauparadigmed’apprentissagebasésurl’expérienceetlaré-

flexion.

Nousallonsaborderdansunesecondepartielaproblématiquedenotrerecherche,cen-

tréesuruneapprochepédagogiquecoopérativeetsurlesapprentissagesformelsetin-

formels.Carnousdésironsrépondreauxinterrogationssuivantes:

• Queltypedeprofessionneldesantéidéalest-ilnécessairedeformerpourré-

pondreauxdemandesdespatients?

• L’approche par compétence, dérivée du constructivisme, est-elle capable

d’apportertouslesélémentsnécessairespourformerceprofessionnelidéal?

• Existe-t-ild’autresmodèlespédagogiquesplusadaptésetpertinentsauxbe-

soinsdesantéd’unesociétéenperpétuelleévolution?

• Commentrendreopérationnelleslescompétencesacquises?

• Quelles sont les implications des apprentissages formels, informels et non

formelsdanslaconstructiondescompétences?

• Lesenvironnementssociofamiliaux,éducatifsetprofessionnelssont-ilsréel-

lementimpliquésdansl’acquisitionetl’entretiendessavoirsutilesauprofes-

sionneldesanté?

• Laréflexionetl’expériencesont-ellessuffisantespourdévelopperuneidenti-

téprofessionnelleadaptéeàlasociétéactuelle?

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2èmepartie:Problématiquedenotretravailderecherche-approchepé-dagogiquecoopérativeetapprentissagesformelsetinformels.

Nous avons constaté dans la première partie de cette thèse, les difficultés des ensei-

gnantsdesfacultésdemédecineàadhérerauxnouveauxparadigmespédagogiques.Les

méthodes d’apprentissage, alors couramment pratiquées dans le 3e cycle des études

médicales, n’étaient plus adaptées pour former des professionnels de santé compé-

tentscapablesrépondrede façonsatisfaisanteauxattentesdespatients.Car jusqu’à la

findes années1990, l’enseignementmédical avait encoreune fâcheuse tendance à se

limiterauxcontenusformalisésdeprogramme;lesenseignantsnetenaientpasoupeu

en compte le contexte, l’environnement, les expériences des apprenants. Si cette dé-

marcheaétéacceptabledanslesdeuxpremierscyclesoùilétaitnécessaired’accumuler

desconnaissances,ellen’estplusconformeàuncycledeprofessionnalisationaxéprin-

cipalementsurlapratique.Lacompétencedesmédecinsnepeutserésumeràlaseule

accumulation d’apprentissages formels acquis de façon individuelle dans un amphi-

théâtre.Cependant, ilaétérepérépardesenseignantsenmédecinegénérale,undéca-

lageréelentreunenseignementfacultaireformelimposé,plutôtindividueletunespace

d’éducation moins formel, plutôt collectif, utilisant des méthodes récentes

d’apprentissagesplusadaptéespourdevenirunprofessionnelcompétent.Danscenou-

veaucadrepédagogique,lesdifférentsenseignementssontproposéssousformedepe-

tits groupes. Ce choixn’exclut en aucunemanière les contenus formalisésnécessaires

pourdevenirunprofessionnel.Mais il laisseégalementun lieu réservéplusoumoins

importantpouracquérird’autressavoirsqualifiésdenon formelset informelsdans le

cadred’unecoopérationactiveentrelesparticipants.Celasous-tendunlieud’échanges

de réflexions entre les participants à propos de thème ou d’expérience dans le cadre

d’unapprentissageditcoopératif.Lesfondementsdecetapprentissagesontaxéssurla

rechercheetlemaintiend’unconflitsociocognitifdansuneatmosphèrecourtoiseetdes

relations affables entre participants (nécessité d’une médiation adaptée). Ce lieu

d’échanges interactifs est sous-tendu par une approche complexe de plusieurs con-

ceptsmentauxnotamment lacréativité l’intelligencecollective, lapenséedivergenteet

laflexibilitécognitive.

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En1968,lerapportdelaconférencedeWilliamsburgrédigéparPhilippeCoombsapro-

poséunesegmentationdel’apprentissageenformel,nonformel,etinformel.Jevaisdé-

crireces3 formesd’apprentissagedanscette secondepartieen tenantcomptecepen-

dantdecette interrogation:s’agit-ilde3conceptsdistinctsousimplementd’unconti-

nuumentreces3formes?(JayCross).

Notreobjectifestdeproposerunmodèledeconstructiondelacompétencedumédecin.

Notrequestionderechercheestaxéesur lesimplicationspossiblesdesexpériencespro-

fessionnelles,delaviequotidienne,deséchangesentrepairs,enfin,toutcequipeutcorres-

pondreàdesressourcespédagogiquesdites«informelles»pouracquériret/ouaméliorer

les compétences professionnelles des étudiants enmédecine et desmédecins. Je formule

ainsimonhypothèse:danstoutapprentissage,ilyaduformeletdel’informel.Etcetin-

formelpourraitêtrerepérédansundispositifpédagogiquedetypecoopératif,expérientiel

et réflexif. Bien que non formalisé par des objectifs de formation, le contexte

d’apprentissage«informel»et«nonformel»acertainementunrôledansl’acquisitiondes

connaissancesetdescompétencesdesprofessionnelsdesanté.

2.1.Descriptiondusupportthéoriquedenotretravailderecherche Notreétudeportesur l’apportde l’apprentissagenonformelet informeldans lecadre

d’unepédagogiecoopérativeafind’améliorerlescompétencesd’unprofessionneldesan-

té.Pourquelle(s) raison(s)avons-nousdécidéde faire ce choix?Notre réflexionpour

nousengagerdanscetravailadébutélorsquenousavonsétéinterpellésparlesinterro-

gationssuivantes:

• Quel type de professionnel de santé idéal est-il nécessaire de former pour répondre

aux demandes des patients ?

• L’approche par compétence, dérivée du constructivisme, est-elle capable

d’apporter tous les éléments nécessaires pour former ce professionnel idéal ?

• Existe-t-il d’autres modèles pédagogiques plus adaptés et pertinents aux besoins de

santé d’une société en perpétuelle évolution ?

• Comment rendre opérationnelles les compétences acquises ?

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• Quelles sont les implications des apprentissages formels, informels et non formels

dans la construction des compétences ?

• Les environnements sociofamiliaux, éducatifs et professionnels sont-ils réellement

impliqués dans l’acquisition et l’entretien des savoirs utiles au professionnel de

santé ?

• La réflexion et l’expérience sont-elles suffisantes pour développer une identité

professionnelle adaptée à la société actuelle ?

Nousavonsainsiréaliséunerevuedelalittératureàproposdel’apprentissagecoopéra-

tifetdestypesd’apprentissagesintéressantlesthèmessuivants:

• l’apprentissagecoopératifetleparadigmedusocioconstructivisme;

• lerôleduconflitsociocognitifdansl’acquisitiondescompétences;

• lacomplexitédel’approchesocioconstructiviste;

• leslimitesdel’approcheconstructivisteparcompétencesetlessolutionspro-

poséespouraméliorercetteapproche;

• lerôledesgroupesd’apprentissagedanslaformationprofessionnelle.

• la contribution des apprentissages formels, informels et non formels, et les

conséquencesducurriculumcachédansl’élaborationdescompétences;

2.1.1.Leparadigmepédagogiqueduconstructivismeencontextesocial Que ce soit dans les établissements d’enseignement élémentaire, secondaire ou supé-

rieur,lesenseignementssonteffectuésleplussouventdansunlieuregroupantdesap-

prenants(classe,salledecours,amphithéâtre).Desinformationssontdonnéesauxap-

prenantslorsdecesenseignementscollectifs,etchaqueindividupeuttraitercesinfor-

mations comme il ledésire. Lebutde cesenseignementsestde faireacquérirdes sa-

voirsenmodifiantdescomportements.Cemodèledescendantdusavoiraétérejetépar

JeanPiaget(cf.§.1.6.2.)quiaproposéunmodèlepédagogique(constructivisme)adapté

surtout auxmécanismesd’apprentissage individuels. Centré sur la construction active

despropresconnaissancesde l’apprenant, ils’opposeà la transmissiond’informations

d’enseignantàapprenant.Cemodèleaapportédeséclaircissementsaufonctionnement

ducerveaud’unapprenantpouracquérirdescompétences.Cependant,l’apprenantn’est

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pastoujourscapablederésoudreseulunetâchecomplexenotammentlorsqueletemps

derésolutionestlimité.

Pourd’autrespsychologuesd’inspirationcognitiviste,cetactedeconstructiondescon-

naissances ne doit pas être seulement individuel,mais nécessite une interaction avec

d’autresapprenantsafindemieuxrésoudrecestâchescomplexes.Eneffet, ledévelop-

pementintellectuelindividuelestgénéralementinsuffisantsansl’existencederelations

socialespossiblesavecd’autresapprenants.Pourquecedéveloppementsoitencoreplus

satisfaisant, l’apprenant doit confronter ses savoirs et expériences avec d’autres per-

sonnes.LapédagogiedegroupeaintroduitunenouvelledimensionàlapenséedePia-

get:ladimensiondeséchangesetdeco-constructionentreapprenants.

Plusieurs auteurs, notamment JohnDewey, Célestin Freinet etRogerCousinet ontdé-

montréparleurstravauxqu’unapprentissageencontextesocialpeutapporterplusaux

apprenants.Cesdernierspeuventainsis’engagerdansl’apprentissageenpartageant,en

confrontantleursidéestoutenrespectantleursindividualités.C’estladéfinitiondumo-

dèle d’apprentissage socioconstructiviste. La pertinence d’un apprentissage collectif a

été notamment étudiée parMontmollin et Perlmutter (1951, p. 359). Ces auteurs ont

comparéuneproductioncollectivedesmembresd’ungroupeparrapportàuneproduc-

tionindividuelledechacundesesmembres.Ilsontconcluàuneplusgrandeefficacité

decemoded’apprentissageinteractif.Lesrésultatsdeleurstravauxontmontré,autant

surleplanquantitatifquequalitatif,lasupérioritédugroupesurl’individu;etdoncdu

modèle socioconstructiviste sur lemodèle constructiviste.Cependant, ilsn’ontpasété

totalementsûrsdel’efficacitéd’untelenseignementcollectif:

«Maiss’est-onassuréauparavantqueletravailcollectifestensoiplusefficacequeletravailindi-viduel,etquel’individuapprendmieuxquandiltravailleengroupe?Ilnemesemblepasqu’onaitcherchéunecertitudeauthentique,maisplutôtqu’ons’ensoittenuàunecroyancegénérale-mentrépandue,expriméedansdesaffirmationstellesquel’unionfaitlaforce».

Pourrésumerceparagraphe,l’intérêtpourleurtâche,l’atmosphèredetravail,lesinter-

relationsaffectivesonteuunretentissementpositifsurletravailintellectueldesparti-

cipantsdesgroupes.Lesinteractionsentrelesparticipantsd’ungroupesontàl’origine

d’unconflitsociocognitifquiseproduitentrelesdifférentsmembresdugroupe.Cecon-

flitappelésociocognitiffavoriselesprocessusmentauxdedéconstructionetreconstruc-

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tiondesreprésentationsdetouslesparticipantsàcetapprentissagecollectif.Grâceàce

conflit,plusieursperspectivesderésolutiondeproblèmesontoffertesauxparticipants,

favorisantladiscussionetl’émergencedenouveauxsavoirsetcompétences.Siunseul

individu,membredugroupe,peut influencer legroupedans leprocessusdeconstruc-

tiondesesconnaissances,legroupepeutaussiinfluerleprocessusdeconstructiondes

connaissancesd’unouplusieursindividusappartenantaugroupe.

2.1.2.L’approchesocioconstructiviste Laconstructiondeconnaissancespeutêtreeffectivegrâceàlacoopération,laconfronta-

tionetlarecherchedeconsensus.Leconflitsociocognitifestunenotiondatantdudébut

du 20e siècle. Lev Vygotski et l’apprentissage interactif social, Jerome Bruner et

l’apprentissagepardécouverte,HenriWallonetl’approcheconstructivisteaffectivesont

les principaux représentants du paradigme socioconstructiviste. Des travaux de re-

cherche plus récents sur le socioconstructivisme ont été publiés par d’autres auteurs

notammentAnne-NellyPerret-Clermontquiaétudiél’impactdesinteractionsobservées

chezlesenfantsd’uneclassesurlesrésultatsd’unraisonnement.Cesontlesenfantsqui

étaientenretardsur lesplusavancésquiprofitaientdecetravailengroupe.Cetteau-

teure en déduit que ce déséquilibre constaté sur l’état d’avancement des enfants est

sourcedeprogrès.Lorsqu’ils confrontentdespointsdevuedifférents, les interactions

entrepairssontplusefficacesàlasuited’uneactioncollectiveparrapportàunappren-

tissageindividuel.

Dansplusieursouvrages, JeromeBruner(1964,1966,1980),asignaléque ledévelop-

pement de tout être humain et notamment son intelligence ne peut être uniquement

explicité par la théorie du constructivisme de Piaget. Bruner s’est notamment inspiré

desrecherchespédagogiquesd’unpsychologuerusse,LevVygotski(1933,éd.1997)eta

publié plusieurs travaux de recherche en psychologiemontrant l’importance d’un ap-

prentissageengroupepourledéveloppementcognitifdechaquemembredecegroupe.

Bruneraainsiproposéen1966deuxconceptionsdel’apprentissageconstructiviste139:

139BRUNERJerome(1966).TowardaTheoryofInstruction.Résuméduchapitre“Educationasasocialinventionpp.22-38.

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• Laconstructiondesconnaissancesestunprocessusdynamiquequis’adapteàun

environnement non statique, et qui modifie constamment la structure des

schèmesmentaux.Cesschèmes,quidépendentduvécudechacun,vontpermettre

àl’apprenant,lorsqu’ilestenfaced’unesituationproblème,desélectionnerlesin-

formationsnécessaires,deproposerdeshypothèsesadéquatesetdeprendredes

décisionsappropriées.Cesschémasmentauxsontégalementutilespourcatégori-

serlesdifférentesinformationssélectionnéesdestinéesàêtremémorisées.

• L’apprenantnereçoitpasd’unemanièrepassivedesconnaissances:ilconstruit

sessavoirsens’appuyantsursespropresexpériences.Ilutilisesonproprevécu

antérieurcommeunéchafaudage(scaffolding)afind’acquérirdesconnaissances

inédites;maisaussipourobtenirdenouvellesreprésentationsmentalesdavan-

tageélaboréesafinderépondreàdessituationsdeplusenpluscomplexes.Ap-

prendredépenddecenoussavonsdéjà.Plusunapprenantconnait,plusilpeutet

pourraapprendre140.

Quand je propose à un apprenant une situation problème complexe, mais réalisable,

monobjectifestdedévelopperchezcettepersonneunepenséecritiqueetréflexivesur

la transformationde ses anciennes informations. Cette transformation suscite généra-

lementchezcettepersonneapprenanteunconflitcognitif.C’estuneremiseenquestion

desprocessus intellectuels, unbesoinde reconstruire ounon ses propres schèmesde

connaissancesetsesproprescadresderéférences.End’autres termes,cettepersonne

doit-elle tenircomptedecequ’ellevientd’apprendreouva-t-ellecontinueràvivreou

exercersursesacquisantérieursnonmodifiés?Lorsquecettepersonneparticipeàune

formationengroupe,laremiseenquestionsetransformeenconflitsociocognitif.

Bourgeois etNizet (1997,p.160) considère le conflit sociocognitif commeune source

d’apprentissage,carl’oppositiond’unepersonnequipossèdesespropresconvictionsà

uneouplusieurspersonnesdugroupequipeuventavoird’autresconvictions:

«favoriseraitunedécentrationdel’individuparrapportàsonproprepointdevue,parlaprisedeconsciencederéponsespossiblesautresquelasienne.Unetelleprisedeconscienceseraiteneffet

140Exemple:Itisparticularlysowhentheleanerrecognizesthecumulativepoweroflearning,thatlearningonethingpermitshimtogoontosomethingthatbeforewasoutofreach,andsoontowardsuchperfectionasonemayreach(JeromeBruner,1966,p.30).

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moinsprobable si le sujet était livré à lui-même faceuneobservationpotentiellement contradic-toire».

Ainsi, l’apprentissageest«unprocessus interactifdans lequel lesgensapprennent les

unsdesautres»(Bruner(1996,p.38).Enseconfrontantspontanémentavecsonenvi-

ronnement,l’êtrehumaindonnedusensàdesinformationsquiluiparviennentsponta-

némentsanseffortintellectuel:c’estlecasdel’apprentissagecoopératifquiréunitplu-

sieursapprenantssous lahouletted’unenseignant,d’un formateuroud’unanimateur

pourfairefaceàdenouvellessituations.Cetypedecollaborationactiveresponsabilise

l’apprenant en lui donnant la possibilité d’être acteur de ses propres apprentissages,

toutencoopérantavecsespairset lesenseignants.L’acquisitiondesdifférentssavoirs

utilespourdévelopperlescompétencesdecetapprenant,etdonccelledesautresper-

sonnes constituant un groupe d’apprentissage, résulte d’un partage de connaissances

avecsescollèguesetaveclesenseignantspourrépondred’unemanièreadaptéeàlasi-

tuationproblèmeàlaquelleilestconfronté.

D’autres travaux que ceux qui ont été cités supra ont démontré qu’un apprentissage

coopératif peut améliorer cette remise en question propre à chaque individu: Lewin

(1939), Perret-Clermont (1979, 1988, 2000), Doise et Mugny (1978, 1981), Meirieu

(1984,éd.1996).Danstoutgroupedeformation,ilyaconfrontationdespropresidées

etdescadresderéférenced’un individuavec les idéeset lescadresderéférencesdes

autresparticipantsàcegroupe.Laréflexionàproposdel’expériencequ’ilvientdevivre

et la confrontation avec les autres membres du groupe est un facteur favorisant du

changement.L’individuentrevoitainsidesnouvellesperspectivesdontilauraitpuigno-

rer l’existence et apporter des nouvelles données pour résoudre son conflit cognitif.

C’estgrâceauxinteractionsentreparticipantsentreeuxetparticipantetenseignantque

lesavoirseconstruit.

2.1.3.Leseffetsduconflitsociocognitifsurlegroupe

Considérons un grouped’apprenants auxquels il leur a été demandéde résoudre une

situationproblème.Cen’estpasunesolutionproposéeparchacundesapprenantsqui

estrecherchée,maisunesolutioncommunedugroupe,nécessitantcoopérationetcon-

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frontationdespointsdevuedesparticipants:cetteconfrontationcorrespondauconflit

sociocognitif.Ledésaccordconséquentdel’affrontemententrelesdiversespropositions

desolutionsdesapprenantsdoitêtredépassépourobtenirunesolutioncommune.Cette

confrontationintroduitundéséquilibreauseindugroupe:cettedivergenceinterindivi-

duellefaitprendreconscienceàchaqueapprenantdesonpropreraisonnementparrap-

portàceluidesautres.

Doise etMugny (1981, pp. 117 - 131) ont formulé que toute interaction suscitant un

conflit sociocognitif est source de développement cognitif. Ces auteurs ont posé

l’hypothèse suivantelors d’une expérience sur la transformation spatiale d’un village

par60enfantsde5à6ansdontlesdeuxtiersontréalisécettetâcheensituationcollec-

tive : faceàunproblèmeàrésoudre, lesperformancescollectivesserontsupérieuresaux

performances individuelles. Ce bénéfice demeurera pour chacun des partenaires de la

tâche s’ils doivent ensuite refaire une tâche similaire individuellement. Les résultats

montrent que les solutions collectives l’emportent sur les solutions individuelles. Et

l’avantagepersistequandlesenfantssontensuiteréinterrogésseuls.Ilsgardentlebéné-

fice des solutions trouvées en interaction et qu’ils n’auraient pas trouvées seuls. Ces

deuxauteursontinsistésurlesconceptssuivants:

1–lamédiationsocialeestunmoyenpourl’apprenantdeconstruireengroupeses

propresconnaissances,etced’unemanièreactive;

2–latransformationduconflitcognitifenconflitsociocognitif:cedernierfaitpren-

dre conscience à l’apprenant, pour une situation complexe, de l’existence de plu-

sieurs solutions possibles en dehors de la réponse qu’il a lui-même proposée.

Chaqueapprenantestconfrontéàdespointsdevuedivergents.«En agissant sur lemilieu environnant, l’individu élaboredes systèmesd’organisationde cetteactionsurleréel.Danslaplupartdescas,iln’agitpasseulsurleréel:encoordonnantsespropresactionsaveccellesd’autrui, ilélaborelessystèmesdecoordinationdecesactionsetarriveàlesreproduireseulparlasuite».(Doise&Mugny,1981,p.35).

Cetavantage,suscitéparl’interactionsociale,amélioreledéveloppementintellectuelde

chacun par la prise de conscience de points de vue différents (la pensée divergente),

d’apportsd’informationsnouvellesparlesautres,letoutcontrôléparunfeed-backdes

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comportementsdechacun.MichelGilly(1988,p.27)insistecependantsurlaqualitéde

latâcheàproposeraugroupe:«Letypedefonctionnementsociocognitifmisenœuvredansl’interactionderésolution,etquesonefficacitéentermesdebénéficesindividuelsdépendenttousdeuxdutypedefonctionnementcognitifinduitparlasituationproblème.Cequiveutdirequepourobte-nir des progrès individuels par interaction de résolution il faut se demander, pourchaquetypedeprogrèscognitif recherché,quelleest lamanièredeconstruire lasitua-tionproblèmede telle sortequ’elle favorise conjointement lamiseenœuvredes fonc-tionnementscognitifsmodifiablesparl’interactionetlefonctionnementsociocognitif leplussusceptiblederemplircetoffice».

Selon Gilly141et al, la construction des compétences cognitives est conséquente d’un

processusdenégociationetd’échanged’opinions,deréflexionsentrepairs.Ceproces-

susamènelesapprenantsàpréciseretjustifierleursidées,àprendredureculetcontrô-

lerleurspointsdevue.Leconflitsociocognitifainsicrééestàl’originededoutes,deper-

turbationsdansleurcheminementintellectuel.Grâceauxpairs,lesapprenantspeuvent

luttercontrecesdéséquilibresetmêmelesprévenir.

«Chaquepartenaire,encoordonnantsespointsdevue,contribueactivementàlaréalisa-tioncommuneettentedeparveniràunaccordavecsonpair.Lesconnaissancessepréci-sent et s’objectivent, car sansarrêt remises enquestionpar les résistancesd’autrui. Lescapacités de raisonnement s’aiguisent, les notions se construisent, les connaissances seprécisent142».

L’apprenant prend ainsi conscience de ses propres réflexions par rapport à celle des

autresapprenants,entraînantunautredéséquilibrequivaamenerl'apprenantàrecon-

sidérersespropresreprésentationsaveccellesdesautresafindereconstruireunnou-

veausavoir.Eninsistantsurlamiseeninteractivitédesapprenants,l’apprentissageso-cioconstructivistefavorisenonseulementl’acquisitiondenouvellesconnaissancesoula

restructurationdeconnaissancesexistantes,maisaussiparticipeaudéveloppementde

lacapacitéderéaliserlestâchesintellectuellessuivantes:apprendre,comprendre,ana-

lyser. Cette interactivité, ces échanges entre enseignants-apprenants et apprenants-

141GILLYM.,ROUX J.P.,&TROGNONA. (1999).Apprendredans l’interaction:pouruneanalysedynamiquedessé-quencesinteractives.DansM.Gilly,J.P.Roux&A.Trognon(dir.),Apprendredansl'interaction.Analysedesmédiationssémiotiques(pp.9-39).Nancy&Aix:PressesUniversitairesdeNancy&Publicationsdel'UniversitédeProvence.142LE MENAHEZE François (2002). Coopérer ... pour apprendre ! La coopération entre élèves, la médiation del’enseignant : un processus de co-construction des savoirs: étudeexploratoireencycle3–mémoire de recherche-UniversitédeNantes:DépartementdeSciencesdel’Educationp.16.http://www.masterscontributions.fr/sites/www.masterscontributions.fr/files/memoire/le_menaheze/memoire_master_1_flm.pdf

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apprenantsaméliorentégalementledéveloppementetlamaitrisedesrègles(métacon-

naissances)pourexécuterdenouvellestâches.Cependant,cetteactivitécognitivecom-

plexemetenjeuuncertainnombredeprocessusmentauxquenousallonsdécriremain-

tenant.

2.1.4. Analyse de la complexité de l’approche socioconstructiviste: les différentsprocessusmentauxmisenexerguedanslesgroupessociaux. L’approchesocioconstructivisteestlerésultatd’unecombinaisondeprocessuscognitifs,

tousutilesetayantchacununrôlebiendéfinidanslamiseenœuvred’unapprentissage.

Eneffet,cetyped’approchesociocognitivereposesurplusieursconcepts:unesituation

problèmecomplexedont larésolutiondoit-êtrepossiblepar legroupe,unedécouverte

desolutionsprobablesprocédantdelamiseenœuvred’unconflitsociocognitif.Ceder-

nier est basé sur un processus intellectuel de créativité, qui fait notamment appel à

l’intelligencecollective,àlapenséedivergenteetàlaflexibilitémentale.

Développementsocialdelacréativité

Legroupeencouragelacréativité: HenriPieron(1951)adéfinilacréativitéainsi:

«C’estune fonction inventive,d’imaginationcréatrice,dissociéede l'intelligence,que l'onexploreavecdiverstestsspéciaux(commedetrouverleplusdesolutionspossibleàcertainsproblèmes)etquin'aaveclesquotientsintellectuelsclassiquesquedefaiblescorrélations».

La créativité est une aptitude humaine qui permet à un individu ou à un groupe

d’individudeproduireenpeudetempsdesidées,desconcepts,oudedécouvrirdesso-

lutionsoriginalesàunproblème.C’estunemanièredemodifier laperceptionparnos

sensdelaréalitéà laquellenoussommesconfrontés.Lacréativitédoitêtredistinguée

de la sérendipité, qui correspondà l’aptitudeà trouver autre choseque cequi est re-

cherché.AlexOsborn(1964,p.294),quiainventélatechniquepédagogiquedubrains-

torming,définitlacréativitécommeuneimaginationconstructive:«c’estunecapacitéà

créerdesidéesgrâceàl’imagination».

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Lacréativitén’estpasunesimplecapacitéintellectuelledestinéeàrecombinerdescon-

naissancesniunecomposantedel’intelligence.C’estplutôtunemotivationàpuiserdes

informationsdanslamémoire,etdelesréorganiserselonnotreimagination,notreins-

tinct, notre inspiration, notre sensibilité à percevoir les choses, parfois avec l’aide de

substancesagissantsurnotrecerveau,afind’avoiruncomportementdifférent,depen-

serd’uneautremanière.Lacréativitésous-tendnonseulementdesprocessusmentaux,

maiselleestégalementfonctiondelapersonnalitédeceluiquicrée,etd’unenvironne-

ment favorableà laproductiond’idée.Lacréativitépeutainsiconcourirà trouverune

pistepourune solutionàpriori impossible, de répondreàundéfi. C’estunmoyende

surmonterdesdifficultésetnondesubircesdernières.Lacréativitéestsouventindivi-

duelle,maisellepeutégalementêtremiseenœuvredefaçoncollectiveparunensemble

d’individus. Iln’yapasdecréativitésansproduction.Dans lecascontraire, ils’agitde

l’imagination. La créativité est un acte concret, réel, qui peut être évalué lorsqu’il est

possibled’accéderàlaproduction.Ensachant(Michel-LouisRouquette,2007,p.20),

«queleproduit,quellequesoitl’attentionqu’onluiporte,nelivrejamaisquedesindicespartielssurleprocessusquil’aengendré;ilnepermetpasunereconstitutioncomplèteetfidèledecelui-ci.Unepartéventuellementconsidérabled’opacitédemeure».

SelonJean-ClaudeAbric(1984,p.193),lacréativitéestun«processusparlequelunin-

dividu,ouungroupe,placédansunesituationdonnée,élaboreunproduitnouveauou

originaladaptéauxcontraintesetaux finalitésde la situation».Abricdonne trois rai-

sonspour favoriser la créativité (1984,pp. 194 - 195): Le groupe favorise le change-

ment, le groupe favorise la prise de risque et plus le groupe sera hétérogène, plus la

créativitéserafavorisée.

Legroupefavoriselechangement: C’estKurtLewinquil’adémontrédansunecélèbreexpériencesurlesdispositionsd’un

individu à changeroubien conserver certainesde ces règles. «Commentmodifierun

comportementdegroupedetellesortequ’ilneseproduisepasbientôtunretouràl’état

initial…Ladécisiondegroupedoitêtreconsidéréecommeunetechniquedechangement

social !» (Lewin,1947),dans(Levy,1962,p.498).Legroupeestundispositifnotable

pourmodifierun comportement. Lewinavaitposé l’hypothèse suivante: unedécision

prisepar lesparticipantsd’un groupe réuni lorsd’une séancede travail est plusopé-

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rantesurlesprochainesactionsàréaliserparcesparticipants,quederetenirdesinfor-

mationsdonnéeslorsd’unexposé.

L’objectifdel’expériencedécriteétaitd’encouragerlaconsommationd’abatspendantla

dernièreguerremondiale.Troisgroupes,chacuncomposéd’unequinzainedepersonnes,

avaient acceptéd’écouterdes exposés intéressants sur lamanièred’utiliser ces abats.

Cesexposésmettaientnotammentl’accentsurlavaleurenvitamineetenminérauxde

cesviandesetdétaillaientlemodedepréparationdecesabats.Àlafindel’exposé,des

recettespourcuisinercesviandesétaientdistribuées.Danstroisautresgroupes(même

nombredepersonnes),lesparticipantsparlèrentenpremierdesobstaclespourutiliser

detellesnourritures.C’estaprèss’êtres’assurerqu’ilexistaitdesmoyenspoursurmon-

tercesobstaclesquelesgroupesontenvisagélestechniquesdepréparation.Lesrésul-

tatsfurentsignificatifs:3%desfemmesquiavaientassistéauxexposésontadmiscui-

sinercesabats.Danslestroisautresgroupes,unefemmesurtrois(soitdixfoisplus)a

reconnupréparercetyped’aliment.Larésistanceauchangementestprobablementdue

auxdiversesinteractionssocialesetcognitivesentrelesparticipants.

KurtLewinproposed’associerdeuxméthodespourintroduireunchangementdansun

petitgroupe.Lapremièreméthodeconsisteàdiscouriraveclesparticipantsdugroupe

sur lanécessitédemodifiernospratiqueshabituelles, c’est-à-dire à faire admettre au

groupe lanécessitéde remettre enquestionsdes croyances et desopinions, etmême

parfoisdesnormes.Unetelleméthodepeutêtreà l’originedeconflitsoudetensions;

elledoitêtreassociéeàunesecondeméthodedestinéeàdiminuerlesrésistancesenvers

le changement proposé notamment en recherchant en premier lieu tous les obstacles

possiblesàcechangement.Chaqueparticipantdoitainsipouvoirs’exprimer,fairepart

de ses craintes, de ses réticences et de ses attentes avant d’entamerundébat avec le

groupe.

Legroupefavoriselaprisederisque: Prendre une bonne décision pour un individu nécessite de prendre en considération

plusieursfacteurs.Kogan&Wallach(1964)ontdémontréquelaprisederisqueestplus

marquanteparunensembled’individusréunisengroupe,parrapportàunseulindividu.

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Dépassantlesfrontièrestraditionnellesdelapsychologie,cesdeuxauteursonttentéde

démontrer commentune conceptualisationdeprisede risquespeut intégrerdes con-

ceptsetdesrésultatsprécédemmentclassifiéssousdesétiquettesdistinctestellesquela

motivation, la personnalité, la psychologie sociale, la connaissance et le jugement, la

penséeetl'intelligence.KoganetWallachontproposélesexplicationssuivantes:1-une

dilutionderesponsabilitédesmembresdugroupedueauxrelationssocialesdévelop-

péesentrelesmembresdugroupequivontdiminuerlesinquiétudesnotammentcelles

despersonnesémotiveset2 -unrisqueperçucommepartagé.SelonAbric, cetteaug-

mentationde laprisederisque favorise lacréativitépar lechoixdeconclusionsorigi-

nales.

Toute discussion dans un groupe amène-t-elle les membres de ce groupe à une plus

grande prise de risque dans la décision? Pour James Stoner (1968), ce n’est pas uni-

quementladiscussionquiamèneàcetteprisederisquepluslarge.Sonhypothèseestla

suivante: les décisions prises par les individus sont généralement conformes aux va-

leurs lesplus largementpartagéesde lasociétédans laquelle ilsvivent.Cespersonnes

considèrentleurspropresdécisionsplusconformesàcesvaleursparrapportàd’autres

personnesappartenantaumêmegroupesocial.Généralement, ladiscussionet laprise

dedécisionmènerontleplussouventàcesvaleurslargementpartagées.Pourcertaines

personnes, avoir une très bonne image de soi joue un rôle certain dans une prise de

risqueplus importantepar rapport à leurspairs. Lorsqu’elles sont réunies engroupe,

cespersonnespeuventêtresurprisespardespropositionsd’autresmembresdugroupe,

encoreplusrisquées.Stonerendéduitquelaprisederisqueparungroupen’estpasdue

uniquement au fait de ladiscussion; cettedernièrepeut être trop cadréepar les opi-

nionsbienaffirméesdecertainsmembresdecegroupe.

Lespersonnalitésdesmembresd’ungroupe sont rarementuniformeset c’est au con-

traireungaged’efficacitépourlesdécisionsprisesparlegroupe.Quanddansungroupe,

desindividusamènentd’autrespersonnesàuneprisederisquepluslarge,cetteaction

peutêtreprofitableà tout legroupe.Larecherched’unpointcritiquepeutamener les

apprenantsàremettreenquestionleursconnaissancesetleurscompétences.

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Ungroupeconstituépardespersonnalitésdifférentes(groupehétérogène)favoriselacréati-vité: Lesindividuscommuniquentd’autantmieuxlorsqu’ilexistedesdissemblancesdansun

groupe,notammentsurlesmotivations,lesacquis,lesdésirs,lesstylesd’apprentissages,

lesaptitudescognitivesdechacundesmembresdugroupe.Maiscesdissemblancesne

doiventpasêtretropfortes.Ilest indispensablederéunirdesparticipantsquiontdes

savoirs assez proches, mais pas trop, afin d’éviter une «glaciation» des interactions,

toutenévitantcependantunehétérogénéitétropfortedesparticipantsquipourraient

déséquilibrercesinteractions.(BourgeoisetNizet,2005),

Ceteffetd’hétérogénéitéaétémisenévidenceparHallJayetWatsonWilfredHarveyen

1970quiontproposéàplusieursgroupesl’exercicesuivant143:LesAméricainsetlesRussessesontmisd'accordpourenvoyerànouveaudeshumainssurlaLune.L'objectif est atteint et les membres de l'équipage participent à des missions d'exploration. Vousfaitespartiede l'équipaged'un vaisseauprogramméà l'originepour rejoindreune fuséemèreaucentredelafaceéclairéedelalune.Àlasuited'ennuismécaniques,vousavezdûalunirà320kmen-virondurendez-vousfixé.Aucoursde l'alunissage, laplupartdeséquipementsdebordontétéen-dommagésà l'exclusiondesquinzeobjets(cf.note). Ilestvitalpourvotreéquipagederejoindrelafuséemèreetvousdevezchoisirl'équipementindispensablepourcelongvoyage.

Lebutdel'exerciceestpourchaqueapprenant(doncdemanièreindividuelle)declasser

par ordre de première nécessité, ces 15 objets144. Cette phase individuelle est suivie

d'une phase de classement collectif ou les membres du groupe doivent se mettre

d’accordsurunesolutioncommune.Dansunetroisièmeetdernièrephase,oncompare

lesclassementsobtenusavecceluiétabliparlaNASA.LeclassementdelaNASAestbasé

surl'utilisationalternéededeuxcritères:celuiquiassurelaviebiologiqueetceluiqui

garantit lapossibilitéderejoindrelafuséemère.Lebutdelaséquenceestdemontrer

143D'aprèsunetraductiondeJayHallparueen1972danslen°27delarevuePsychologie,reprisparDePeretti&Al.DansTechniquespourcommuniquer,p.236-241.Texteoriginal:Youaremembersofthecrewofaspaceshiporigi-nallyplannedtojoinaparentrocketonthelightsideofthemoon.Technical incidentsoccuranddashboardinstru-mentshavebeendamaged.Thelistgiventoparticipantsonlyshowsthosethatarestillinworkingcondition.Thetaskistoclassifyalltheobjectsinaccordancewiththeirusefulnesstojointhemotherrocketanditscrewonfoot.144Uneboited'allumettes;desalimentsconcentrés;cinquantemètresdecordedenylon;unparachuteensoie;unappareildechauffagefonctionnantàl'énergiesolaire;deuxpistoletscalibre45;unecaissedelaitenpoudre;deuxréservoirs de 50 kg d'Oxygène chacun; une carte céleste des constellations lunaires; un canot de sauvetage autogonflable; un compasmagnétique; 25 litresd'eau; une troussemédicale etdes seringueshypodermiques; des si-gnauxlumineux;unémetteur-récepteurfonctionnantsurl'énergiesolaire(fréquencemoyenne).

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lesprobablesdivergencesd'opinionslorsdelalecturedesdifférentesgrillesdesparti-

cipants,mêmesicesdernierspeuventconstituerungroupeassezhomogène(étudiants

enmédecineoumédecins).

Ilestpossibled'expliquerdetellesdifférencesparlerôleducadrederéférencepropreà

chaqueapprenant.Quelqu'unquis'intéresseàdesconditionsdevieextrêmes, comme

un étudiant pratiquant l'alpinisme ou la spéléologie, n'aura probablement pas les

mêmes réponses qu'une personne guère passionnée par ce genre de problème. Nous

avonsproposéàdenombreusesfoiscetexerciceàdesétudiantsdanslecadred’unmo-

dule d’enseignement «mieux communiquer pour améliorer la relation médecin-

malade».Plusd’unefoissurdeux,lesparticipantsdesdifférentsgroupesdetravailont

eu beaucoup de difficultés pour semettre d’accord sur une solution acceptable pour

tous.Ledébatétaitégalementhouleuxlorsquelasolution«brute»proposéeparlaNA-

SAétaitcomparéeàleurspropositions;lecalmerevenaitlorsquel’enseignantdonnait

lesraisonsayantamenélaNASAàproposercettehiérarchisationdesitems.

Applicationspratiques: Dansnotre travailde recherche,nousavonsutilisédeux techniquespédagogiques fai-

santappelàcréativité:lebrainstormingetlemétaplan®.

Lebrainstormingouremue-méningesestunetechniquederésolutioncréativedepro-

blèmesous ladirectiond'unanimateur.Cedispositifpédagogique,qui faitnotamment

appelà lapenséedivergente,estconçupourrecueillirungrandnombred’idéesorigi-

nales.C’estunmoyendeproductionoù le jugementdoitêtreécarté: lacritiqued’une

propositionn’estpasadmise,touteidéeémisedoitestpriseencompteetdéveloppée;

lesparticipantsnepeuventpasimposerleursidées.Parcontreilssontencouragésàse

laisseralleretàrebondirsurdesidéesdéjàexprimées.Cettetechnique,conçueen1940

parundirigeantd’uneagencedepublicité(AlexeOsborne)permetd’augmenternette-

mentlesprocessusdecréativitédanslegroupe.Lebrainstormingconsisteainsiàmettre

encommundesconnaissancesdeplusieursparticipantsàungroupepour répondreà

unesollicitation.Cedispositifpédagogiquechercheà supprimerdepossiblesblocages

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psychologiquesquipourraientlimiterunediversitédesolutions.Lebrainstormingévite

leslonguesdiscussionsinutilesetpermetàtouslesparticipantsdes’exprimer.

Lemétaplan®estunautreoutildecréativitéfaisantappelàlapenséedivergente.Plus

structuréquelebrainstorming, ilnécessiteuneforteimplicationdesparticipantsdans

lesgroupesdetravail.Commelebrainstorming,cettetechniquesuscitelaparticipation

etl’interactiondesparticipantsd’ungroupedetravail145.

L’intelligencecollective L'intelligencecollectiveestdéfinieparlescapacitéscognitivesd'ungrouperésultantdes

interactions multiples entre ses membres. Pour Ludwig Von Bertalanffy et les cher-

cheursdel’écoledePaloAlto,leplusimportantdansungroupe,cenesontpaslesper-

sonnes qui constituent ce groupe, mais la façon dont les interactions entre ces per-

sonnesfonctionnentdanscetensemblefonctionnantd’unemanièreglobale,etdénom-

méesystème.

Quatreconceptscaractérisentcetypedesystème:

1. L’interactivité:c’estlanécessitéd’interagirentrelesdifférentsélémentsdusys-

tème.Cesinteractionssous-tendentégalementlapossibilitédemodifierdesatti-

tudesetdesidéesdechacunetdel’ensembledesparticipantsparuneinteraction

spécifique:larétroaction.

2. Laglobalité:letoutestplusquelasommedesesparties.SelonVonBertalanffy,il

n’estpaspossibledeconsidérerlecomportementglobaldel'ensemblecommela

sommedeceuxdetouteslespartiesquicomposentcetensemble.

3. La complémentarité: c’est la présence de différences entre les apprenants qui

permetd’atteindrece«plus»nécessairepourrépondreàl’objectifprévu.

4. L’homéostasie:c’estunerégulationinternepermettantausystèmed’êtredavan-

tagesolideafind’assurerlacréativitédugroupe.

145Cedispositifpédagogiqueseraparticulièrementdéveloppédansle§3.3.2.

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L’intelligencecollectiveestbénéfiquepourchaquemembredugroupe.Laperformance

intellectuelle d’un groupe (Pierre Levy, 1997), peut être supérieure à la performance

individuelleauniveaudelaréactivité,del’adaptationauxdifférentessituations.Cepen-

dant, la prépondérancede l’intelligence collective sur l’intelligence individuellenéces-

siteuneexcellente interactivitéquidépendde lavolontédechaquemembrequicom-

pose ce groupe. L’être humainnepossèdequ'une connaissancepartielle de l'environ-

nement; ilararementconsciencede latotalitédesélémentsqui influencent legroupe

auquelilappartient.Dutravailinteractifengroupe,ilenretireuncertainavantagepour

l’acquisitiondesavoirsetdecompétences.Sapropreperformanceauseindugroupeest

probablementmeilleureques'ilavaitagiseul.

Cependant, cette intelligence collective peut être également limitéepar un ou des

membres du groupe: ressembler et faire comme les autres (conformisme), ne pas

s’exprimerdepeurdenepasêtreàlahauteur,ouaucontraireparprésenced’unsenti-

ment de supériorité par rapport aux autresmembres du groupe. D’autres limitations

sontduesàlarésignationdesmembresdugroupeàgénérerunesolutionpeusatisfai-

sante au problème posé, mais qui convient à la majorité, à des débats confus qui

n’apportent que peu d’éléments positifs au groupe, à des discours pompeux

n’intéressantuniquementqueceluiquiparle,aurefusparcertainsmembresdugroupe

d’agréer des propositions adaptées à la situation. Si le groupe a prouvé qu’il pouvait

améliorerlescompétencesdechacundesmembresquilecomposent,ilpeuthélaspar-

foisnepasrépondreauxobjectifsdéclinésendébitdesession.Lefonctionnementd’un

groupeexigelaprésenced’unanimateuret/ouunmédiateurconfirmé.

Legroupesocialfavoriselapenséedivergenteetconvergente Les processus d’apprentissages correspondent rarement à une suite linéaire d’étapes

d’activitésmentales (algorithmes). Ils sont leplus souvent conséquentsàuneproduc-

tionmultiforme qui va générer de nombreuses connaissances (heuristique) grâce no-

tamment à la pensée divergente. Cette divergence correspond (Joy Paul Guilford146,

1950),àuneactivitémentalealternativedestratégiederésolutiondeproblèmespour

lesquelsunedémarchelogiqueetrationnelle(selonleconceptdepenséeconvergente),

146GUILFORDJ.P.(1950).Creativity.AmericanPsychologist,5,pp.444-454.

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n’apuaboutiràlarésolutiond’unproblème.Lapenséedivergenteestlacapacitéàdé-

couvrirungrandnombredesuggestionsàpartird’unstimulusunique.C’estuneconfi-

gurationdepenséeutiliséepourproposerdemultiplessolutionsàunproblèmedonné.

Elleconsistedoncàexaminerunproblèmesousunautreangle,enproposantdespoints

devueplusoumoinsrationnels,parfoisdécalésaveclesraisonnementshabituels,afin

deproposerplusieurspistesàexplorer.PourGuilford, lapenséedivergenteestlacon-

séquencechezunapprenantd’uneactivitémentalerationnelleconfrontéeàdesabstrac-

tions de l’imaginaire. Cette capacité d’explorer, à partir d’un simple événement, plu-

sieurséventualitésoupistesàexplorerestessentielleàlaperformancecréative.«Commel’intelligence,lepotentielcréatifestcomplexeetnecorrespondpasàunesimplevaleur.Il existe une grande échelle de variabilité dans les représentations créatives dans la vie quoti-diennequiexigentdenombreuses ressources intellectuelles.Les représentations, sélectionnéesenfonctiondeleurpotentielcréatifévidentcommelanouveauté,l’ingéniosité,l’espritd’invention,nécessitentunegrandecapacitédeproductiondivergentepouvantêtreassociéeounonàdespo-tentialitésdetransformationdecesreprésentations».(Guilford,1971,p.166).147

CettepenséedivergenteaétéappeléeégalementparEdwarddeBono148,penséelatérale,

carelleapportederéponsesnouvellesàdesproblèmesconnus.Enutilisantdesstraté-

giespeuorthodoxesquanddesobstaclesauxprocessusderaisonnementsontprésents

(manquededonnéesutilespourlarésolutiondeproblème,blocageintellectuel,absence

dediscernementpourunesolutionévidente),lapenséedivergentepermetdesurmon-

tercesobstaclesdansuncertainnombredecas.Quandnousdésironsproposeruneré-

ponse correcte àunproblèmeou àdes interrogations standardnenécessitantpasde

créativité particulière, il suffit de faire appel à la pensée convergente. C’est d’ailleurs

cetteconceptionderaisonnementquiestattenduelorsqu’onattenduneseulesolutionà

unproblèmecomme la constructiond’unpuzzle:plusieurs choixdepossibilités,mais

uneseulesolution.Lespossibilitésderecherchesdesolutionssontlimitéesetsontgui-

déespardecritèresrestrictifsderéussiteàsuivreabsolument.Parcontre,leconceptde

pensée divergente estmobilisé lorsque le raisonnement nécessite d’explorer de nom-

breusesvoies.

«Performancesindailylife,areenormouslyvariedinthedemandsthattheymakeonintellectualresources.Theper-formancessingledoutfortheirmoreobvioussignsofcreativity–novelty,ingenuity,inventiveness–probablyinvolveone of more divergent-production abilities as key aspects, or transformation abilities, outside the divergent-production-operationcategoryaswellaswithinit”,[notretraduction].148DEBONOEdward(1972).Lapenséelatérale,Stock,309p.

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Laflexibilitécognitivedanslesgroupes Construiresespropresconnaissancescaractérisel’approcheconstructiviste.Cettecons-

tructionestfonctiondel’expériencedel’individuetdesonactivitémentale.Danslavie

réelle, lesdomainescomplexesdeconnaissancesontpeuoumalstructurés : les infor-

mationsneseprésententpasde façon linéaireouhiérarchiqueet lesmêmes informa-

tionspeuventprendreunsensdifférentselonlessituationsoulescontextes.(Spiro149et

al,citéparHélèneBilodeau150).Pourabordercesdomainesmalstructurés,l’apprenant

doitdévelopperune«flexibilitécognitive.Cetteflexibilitécognitiveestnotammentsous

la dépendance de l’état émotionnel de l’individu et des conditions contextuelles dans

lequelsedéroulel’apprentissage.Elleestprésentedanslesdomainesdesconnaissances,

deshabilitésetsurtout(pourlesfacteursémotifs)dansledomainedesattitudes(affec-

tif).Une réactionémotive chezun individu faceàune situationproblèmenepeutpas

existersansuneévaluationcognitiveducontexteetdel’environnement.Laconstruction

desreprésentationsnécessairesàcetteévaluationvadépendredel’étatdecongruence

oud’incongruenceentrel’émotionetlacognition.Carl’étatémotionnelinteragitavecla

construction des représentations mentales et les processus de traitement de

l’information.SelonSteinN.L.etal(1990)151,«Les données empiriques suggèrent que l'état affectif positif conduit à une flexibilité cognitiveplusélevéedansdestâchesdecatégorisationconceptuelleetdansdesjugementsdetypicalité.Enrevanche, les états émotionnels négatifs conduiraient à un rétrécissement important des res-sourcesattentionnelles».

Lemodèled’apprentissagesocioconstructivistesedifférenciedumodèleconstructiviste

par laprésenced’unedimensionsociale:onapprendgrâceauxéchangesentreappre-

nants et entre apprenants et enseignants. Ces différentes interactions permettent aux

apprenants de construire leurs savoirs. Ces interactions sont favorisées lorsque

l’apprentissageconcerneungrouped’apprenantsdansuncontextedonné,motivéspour

atteindreunbutcommun:c’est l’apprentissagecoopératif.Danscecadre, lesrôles, les

responsabilités et les compétences de chaque apprenant peuvent être mutuellement 149 SPIRO, R.J., et al. (1992). Cognitive Flexibility, Constructivism, and Hypertext : Random Access Instruction forKnowledgeAcquisitioninIll-StructuredDomains,InD.H.JonassenetT.M.Duffy(Eds.).ConstructivismandtheTech-nologyofInstruction:AConversation.(pp.57-75).Hillsdale,NewJersey:LawrenceErlbaumAssociates.150 BILODEAUH, PROVENCHERM,BOURDAGESL, et al.(Documentnondaté) Les objectifs pédagogiquesdans lesactivitésd’apprentissagedecoursuniversitairesàdistance.Disponiblesur:http://tecfaetu.unige.ch/staf/staf-k/cadillo/staf17/(LES%20OBJECTIFS_PEDAGOGIQUES_DANS_LES_ACTIVITES).pdf151STEINN.L.,LEVENTHALB.etTRABASSOT.[Coord.](1990)Psychologicalandbiologicalapproachestoemotion,Londres,LawrenceErlbaum,454p.

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complémentaires.Aprèsavoiranalysélacomplexitédel’approchesocioconstructiviste,

nousallonsnousintéresseràunedéclinaisondecetteapproche:l’apprentissagecoopé-

ratif.

2.1.5.L’apprentissagecoopératif Ilyaapprentissagecoopératifquandparexemple,plusieursapprenantsseréunissent

souslahouletted’unenseignant,d’unformateuroud’unanimateurpourfairefaceàde

nouvelles situations. Ce type de collaboration active responsabilise l’apprenant en lui

donnant la possibilité d’être acteur de ses propres apprentissages, tout en coopérant

avec sespairset lesenseignants.L’acquisitiondesdifférents savoirsutilespourdéve-

lopperlescompétencesdecetapprenant,etdonccelledesautrespersonnesconstituant

ungrouped’apprentissage,résulted’unpartagedeconnaissancesavecsescollègueset

avec les enseignants pour répondre d’unemanière adaptée à la situation problème à

laquelleilestconfronté.Cetteapprochepédagogiquedoitamenerl’apprenantàcoopé-

reraveclesautresetàcoopérerpourapprendre.

Deux actions caractérisentl’apprentissage coopératif : c’est apprendre à coopérer et

coopérerpourapprendre.Cetyped’apprentissageestappeléaussicollaboratif,coactif,

apprentissageengroupeouencoopération:ilsous-tendunapprentissageàréaliserpar

un groupe d’apprenants. Cette notion de groupe est essentielle: pas d’apprentissage

coopératifsansgrouped’apprenants.Cetyped’apprentissagereposesurlecourantdes

relationshumainesinitiéparEltonMayo(1890-1949).PourceprofesseurauMassachu-

settsInstitutofTechnology(MIT),

«ledésird'êtrebienavecsescollèguesdetravail,cequel'onappellel'instincthumaind'associa-tion,l'emportefacilementsurlesimpleintérêtindividuel152».(Mayo,1945).

Leclimatpsychologiqueestinfluentsurlecomportementautravail.Mayoconstateque

l’ouvrierseretrouverarementseuletvaformerungroupeavecd’autresouvriers.Ces

regroupementsseformentspontanément.Ilsdonnentàl’ouvrierunsentimentdesécu-

ritéet luipermettentdemieuxgérer lesdifficultésnotamment les interventionsexté-

rieuresdessupérieurshiérarchiques.Unpetitgroupeougrouperestreintestcomposé 152MAYOElton (1945).Thehumanproblemof an industrial civilization.DansSciencesHumaines, Comprendre lesorganisations.HorsSérien°20,p.6.

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deplusieurspersonnespouvants'autogérerautourd'unbutoud'unetâche.Cen'estpas

unesimplejuxtapositiond'individus,maisunlieud'interactionsmultiplespouvantmo-

difier les relations d'un individu avec son environnement, notamment ses savoirs. Le

groupeestbasé surun tissu complexede relationsplutôthorizontalesentre lesdiffé-

rentsapprenants.

Cesrelationsnesontplusaxéessurlesrèglesdedualitéenseignant-apprenant(relation

verticale).L'enseignantestprésentpourfaciliterlaproductiondugroupe:c'estuncon-

seiller,unmédiateur.Cependant,legroupeapourobjectifdecréeretmainteniruncer-

taindegrédecohésion.Cetterecherchedelacohésionpeutparfoisimposerdesnormes

pastoujoursacceptéesparlesdifférentsmembresdugroupe.L’apprentissageencoopé-

rationdansungroupeadémontrédeseffetspositifssurledéveloppementdenouvelles

compétencescognitivespourchaqueapprenant.Jean-PaulRouxaécriten2003(p.475),

«Onsaitque le travailen interactionadeseffetsdynamisantchez lessujets, facilitéunebonnereprésentationdelatâche...etadeseffetspositifssurlecontrôledel’activitéetsurlesactivitésmétacognitivesdespartenaires».

Danscecadred’interactions,lemécanismemisenjeudansleprocessusdeconstruction

dessavoirsestbasésurleconflitsociocognitifàl’origined’undoubledéséquilibreinter

et intra personnel. Cette confrontation entre les différents apprenants oblige ces der-

niers à reconsidérer leurs opinions en communiquant avec les autres, et de justifier

leursargumentations.DavidJohnsonetal(1994,pp.9-11)ontproposécinqprincipes

debasepourréussirunapprentissagecoopératif153:

• «avoirdesrelationsefficaces,pragmatiquesetpositivesentrelesapprenants(ilfautrejetertoutcequipeutlesdécourager;touteactiond’unparticipantd’ungrouped’apprentissagecoopératifprofiteàlui-mêmeetauxautresmembresdecegroupe);

• procéderàdes interactions constructives (tout fairepouratteindre l’objectif); il estnécessaired’insistersurlaresponsabilitécollectivedugroupepouratteindrelesobjectifsfixés.Cependant,chaqueparticipantdugroupeestindividuellementresponsabledelaperformanceglobaleatten-dueenparticipantéquitablementautravaildemandé;

153“TheFirstandmostimportantelementofcooperativelearningispositiveinterdependence.Groupmembersmustrealizethateachperson’seffortsbenefitnotonlythat individualbutallothergroupmembersaswell…Thesecondessentialelementofcooperativelearningisindividualandgroupaccountability.Thegroupmustbeaccountableforachievingitsgoals,andeachmembermustbeaccountableforcontributingafairshareofthework…Thethirdessen-tialelementofcooperativelearningispromotiveinteraction,preferablyface-to-face…Thefourthessentialelementofcooperative learning is teaching students somenecessary interpersonal and small-group skills…The fifth essentialcomponentof cooperative learning is groupprocessing.Groupsneed todescribewhatmemberactions arehelpfulandunhelpfulandmakedecisionsaboutwhatbehaviorstocontinueorchange”,[notretraduction].

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• désirer la réussite de cet apprentissage en encourageant les interactions entre les différents

membresdugroupe;

• maitriser les règles de base pour communiquer efficacement (gestion de la parole, respect del’autre…);

• pratiqueretaccepterl’évaluationduprocessuspédagogiquecoopératif.Portezàlaconnaissancedesparticipants lesopérationsréaliséespar legroupe.Quellesontété lesactionsutilesou inu-tiles?Commentont-ilsagifaceàcertainscomportements?»

Lesthéoriciensdel’apprentissagecoopératif Leschercheursenpédagogiedegroupesontnombreux.Danslecadredenotrerevuede

littérature,ilnousaapparuintéressantdefaireunesynthèsedetravauxdecinqauteurs

àl’originedel’apprentissagecoopératif.

NousdébutonscettesynthèseavecJohnDeweydontladeviseestsimple:c’estapprendre

enfaisant(learningbydoing).L’expériencedoitêtrelabasedetouteéducation:c’estle

principede continuité. L’expérience en cours, empruntant des informations aux expé-

riencesantérieures,vamodifierlaqualitédesexpériencesultérieures.Deweyestundes

premiersauteursà insérer ladémarcheréflexiveàréaliser lorsd’uneexpérience:«la

pensée ou réflexion…est le discernement des rapports entre ce quenous essayonsde

faireetlesconséquencesquienrésultent»(Dewey,2001,p.228).C’estleconceptprin-

ceps de la pédagogie expérientielle réflexive décrite à la fin du vingtième siècle par

SchönetKolb.JohnDeweyarecommandél'activitécoopérativedesélèvesauseind’un

groupe.L’apprentissageestd’autantplusefficacelorsquel’élèveseretrouveensituation

deproductionréelleetdécouvre lesobstaclesà la réalisationde la tâche.Legroupea

pour but de mobiliser des apprenants sur des situations problèmes difficiles afin

d’obtenirdessolutionsappropriéesqu’ilseraitutopiqued’obteniravecunseulindividu.

Cecinotammentgrâceà lapossibilitédediscuteretdeconfronterdifférentspointsde

vueentrelesapprenants.

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Àl’originedumouvementdesrelationshumaines,EltonMayoaréaliséunelongueétude

(5ans)surlecomportementdegroupeschezlesouvriersd’uneusinedefabricationde

téléphones(WesternElectric)situéeprèsdeChicagoàHawthorne: lorsqu’unêtrehu-

mainagitàdessein,c’estavanttoutpourpréserversesintérêtspersonnels.Lesactivités

sociales réaliséesengroupedoivent compenser cette réalité (Mayo,1945,p.40).Tra-

vaillerengroupenécessited’apporterplusàl’individu.EltonMayoamontréquelebe-

soin socialde relationetd'intégrationdansungroupeaméliore lesproductionsde ce

groupe.Auseind'ungroupedont lesparticipantss’apprécientetaiment travailleren-

semble,lamotivationindividuelleautravailvaêtresoutenueetamplifiée.

Les travauxdeKurtLewin ont porté sur plusieurs domainesnotamment lemodèle ré-

flexifquenousavonsdécritdanslapremièrepartiedecettethèse(§1.3.2.)etlesinte-

ractionsd’ungroupedepersonnesavecleurenvironnementnatureletpsychologique:

le champde vie. On ne peut comprendre un groupe si on ne prend pas en compte le

cadre dans lequel il fonctionne. Lewin a défini un petit groupe comme un ensemble

d’individus qui partagent un objectif commun et qui sont interdépendants quant à sa

réalisation.Lesmembresdugroupeinteragissentsurtouslessujetsproposés.Cesinte-

ractions sont observables. Le groupe est donc un tout dont les propriétés sont diffé-

rentesdelasommedesparties;legroupeetsonenvironnementconstituentunchamp

socialdynamique.Lamodificationd’unélémentdugroupepeuttransformerlastructure

d’ensembledugroupe.L'actiondanslegroupetransformelesstructurescognitivesdesmembresdecegroupe,modifieleursattitudesetaugmenteleursqualificationsdansle

savoir-faire. «L’intelligence se forme en se confrontant au raisonnement des autres»

(Martin&Savary,1996,p.316).Legroupeestunensembledynamique,quiaquelque

chosedeplusquelespartiesquilecomposentetquiobéissentàdesloisspécifiques.Le

comportementdugroupeestunensemblecomplexed’interactionsetde forcesquiaf-

fectent la structure du groupe et les comportements individuels. Tout comportement

individuelestfonctiondel’activitédugroupe.Toutchangementdecomportementpro-

vientdemodificationsminimesougrandesduchampdeforcesprésentesdanslegroupe.

JohnsonetJohnson154, (1987,p.18-20)ontdécritdansleurlivre«Joiningtogether/

154DansuneprésentationproposéelorsdesjournéespédagogiquesdeNantesen1999,nousavionsrelevé10carac-téristiquesdelathéoried’actiondeLewinselonJohnson&Johnson,3èmeéd.1987)

• Principe1–Touteexpérienced'apprentissageefficaceagitsurlesstructurescognitivesdel'apprenant,sesattitudes,sesvaleurs,sesperceptionsetsescomportements.

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Group theory and group skills» [Se réunir ensemble – théoriedes groupes et compé-

tencesdegroupes]lesprincipesdela"théoried'action"selonKurtLewin:

«Touteexpérienced'apprentissageefficaceagitsurlesstructurescognitivesdel'apprenant,sesat-titudes,sesvaleurs,sesperceptionsetsescomportements.Lorsquelesconnaissancessontdécou-vertesparlesindividuseux-mêmes,ellessontpluscrédiblesquelorsqu'ellessontprésentéespard'autrespersonnes.L'apprentissageestbienplusperformantlorsqu'ilestplusactifquepassif155».

Lesmodificationsdecomportementd'unindividuseréalisenttoujoursaprèsunetrans-

formation de la perception de sa propre image et de son environnement socioprofes-

sionnel.Plusl'individutiendracomptedecetenvironnementsocioprofessionnel,plusil

luiserafaciled'expérimenterdenouvellesattitudes,denouveauxsavoir-faireetd'adhé-

reràdesnouvellesthéories.Ilestplusfaciledemodifierlecomportementd'unindividu

lorsqu'onagitdansungroupequedansuncontexteindividuel

WilfriedBionauneapprochedifférentede la formationd’ungroupe: les individusqui

vont constituer un groupe le font parce qu'ils espèrent en tirer des satisfactions. «Le

groupe est plus que la somme des individus qui le composent, car un individu dans un

groupeestplusqu’unindividuisolé»(Bion,1965,p.58).

«Noussommesconstammentinfluencésparcequenouscroyonsêtrel'attituded'ungroupeen-versnous,etnotrecomportementenestconsciemmentouinconsciemmentaffecté»(Bion,1965,pp.116-117).

• Principe2 –Lorsque les connaissancessontdécouvertespar les individuseux-mêmes,elles sontpluscré-

diblesquelorsqu'ellessontprésentéespard'autrespersonnes.• Principe3–L'apprentissageestbienplusperformantlorsqu'ilestplusactifquepassif.• Principe4–Lathéoried'actionsous-tenduneapprocheglobalepourmodifierlesystèmecognitifetaffectif

ducomportement.• Principe 5 – Avec cette approche globale, l'individu retire beaucoup plus d'informations que dans le cas

d'uneapprochefragmentaire.• Principe6 –Dans l'action,uneexpérienceeffectuéeparun individuvaaffermir lavaliditéde ses connais-

sances. Cette validité sera renforcée lorsqu'il existe non seulement une réflexion interne (par lui-même),maisaussiexternesurlasignificationdecetteexpérience.

• Principe7–Toutemodificationdecomportementdoitêtreconsidéréecommeprovisoire.Cependant,cettemodification peut être considérée comme définitive lorsqu'il y a aussi transformation des connaissancesthéoriquesetdesattitudesdansl'action.

• Principe8–Lesmodificationsdecomportementd'un individuseréalisenttoujoursaprèsunetransforma-tiondelaperceptiondesapropreimageetdesonenvironnementsocioprofessionnel.

• Principe9 –Plus l'individu tiendra comptede cetenvironnement socioprofessionnel,plus il lui sera faciled'expérimenterdenouvellesattitudes,denouveauxsavoir-faireetd'adhéreràdesnouvellesthéories.

• Principe10–Ilestplusfaciledemodifierlecomportementd'unindividulorsqu'onagitdansungroupequedansuncontexteindividuel.

155 Traduction libre: Effective experiential learningwill affect the learner's cognitive structures (action theories),attitudesandvalues,perceptionsandbehavioralpatterns-Peoplewillbelievemoreinknowledgetheyhavediscov-eredthemselvesthaninknowledgepresentedbyothers-Learningismoreeffectivewhenitisanactiveratherthanapassiveprocess.

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WilfriedBiondistinguecinqbarrièresaufonctionnementd'ungroupe:

1-Undésaccordsurlesobjectifs(butspeuexplicites, imprécisiondesobjectifs,

mauvaiseutilisationdesniveaux).

2-Unfâcheuxusagedesressources(dumatériel,dutemps…).

3-Uneconcrétisationdutravaildeproductionnonachevée(absencededécision

nonformalisée).

4 - Leproblèmedu leadershipdugroupe (sur leplande l'autorité, sur sonab-

sence,oubienleproblèmedelaconcurrencedesmembresdugroupepourassu-

rercerôledeleader).

5 -L'absencedecommunication(interactionpauvre,dialoguesdifficiles,écoute

insuffisante,proposambigus).

Psychologue et médecin roumain émigré aux USA, Jacob Moreno a proposé des expé-

riences d'improvisation de scène à partir d'une situation précise dans le cadre de

groupe : ce sont lespsychodrames. Participer à un psychodrame permet à l'acteur de

prendreconsciencedeseséventuelsproblèmes,derepérersesinsuffisancesenjouant

desattitudesetdescomportements.L'individupeutainsiselibérerdecertainesappré-

hensionsetallerau-delàdeslimitesqu'ils'étaitfixéeslui-même.Moreno(1987,p.81)a

définilerôle:

«commelamanièred'êtreetagirquel'individuassumeaumomentprécisoùilréagitàunesolu-tiondonnée,dans laquelled'autrespersonnesouobjetssontengagés ; lerôledépendde lama-nièred'êtreaumonded'unindividu,desasituationetdelapositionpriseparluidansungroupedonnéouunesituationdonnée,etdeleursrelationsréciproques…Toutrôleestunefusiond'élé-mentsprivéspersonnels,individuelsetunaspectsocial,degroupecollectif».

Lewin,MorenoetBionontunabord,certesnondivergent,maiscependantchacunbien

distinct, sur la problématique des petits groupes restreints. Plusieurs fondements dé-

terminentlaréalitéd’ungroupe:cedernierestconstituépourunprojetcollectif;cela

nécessitepourlesparticipantsàadhérerauprinciped’uneidentitécommune,envuede

réaliseruneproductionconsensuelle;pourcetteraison,lesmembresdugroupedoivent

fournirchacununedosededéterminationphysiqueetaffectivepourassurerlaproduc-

tion(énergiedeproduction)etlacohésiondugroupe(énergiedesolidarisation).Pour

cestroisauteurs,ilexistecependantunerelationcertaineentreleursdifférentstravaux

derecherches: c’est ladynamiquedegroupe.C’estunensembledephénomènesetde

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processus psychiques et sociologiques qui peuvent être rencontrés dans des petits

groupes comportant5 à15 individusagissant en commun.Cependant, le groupepeut

êtreincapabledesemanagerseul:laprésenced’unenseignantestsouventnécessaire;

maisdansunrôleparticulier,celuide lamédiation,afinde faciliter la librecirculation

des informations et donner un temps équivalent de parole à tous les apprenants afin

d’évitercertainesfrustrations.

2.2.Approfondissement sur l’apprentissage coopératif et lamédiation – lesthéorieshumanistes

Unedesréellesdifficultésrencontréespartoutmédecinpendantsavieprofessionnelle

estd’essayerderépondrecorrectementàtouteslesdemandesdesespatients.Lepro-

fessionneldesantéserendcompterapidementdèsledébutdesonexercice,d’unsenti-

mentd’incomplétudedanssesconnaissancesetdoncdanssescompétences,à l’origine

d’un déséquilibre cognitif. Selon Anne-Nelly Perret-Clermont (1979) et Willem Doise

avecGabrielMugny(1981),ilestpossiblederemédieràcedéséquilibresidesinterac-

tionssontfavoriséesentrelesapprenantsd’unmêmegroupe.Eneffet,cesinteractions

peuventêtreàl’origined’unconflitsociocognitifquivastimulerledéveloppementintel-

lectueldechaqueapprenant.Cependant,pourêtreefficace,cesinteractionsdoiventêtre

géréesparunepersonneappeléemédiateur,dont l’objectifestde faciliter lequestion-

nement, laproductioncollective,enamplifiantouendiminuant lesapportsdechaque

membredugroupe.

2.2.1.LamédiationLa plupart des travaux en groupe, organisés en formationmédicale initiale ou conti-

nue,156sefontavecl’aided’unenseignantoud’unformateur.Lespostures,enseignerou

former,peuventêtreverticales,hiérarchiques,correspondantàunenseignementmagis-

tral. Une relation horizontale, plus empathique est également possible pour ces deux

postures.Lamédiationestuneinterfacequifait le lienentrelesapprenantset lesres-

ponsablesdel’enseignementoudelaformation.Undesprincipauxobjectifsdumédia- 156En FMI, dans le 3ème cycle demédecine générale, les enseignements en groupes sont et ont le plus souvent étésupervisésparunseulenseignant.EnFMC,c’étaitplutôtdeuxpersonnesquiparticipentaumanagementdelaforma-tion:l’animateurgèrelegroupe(c’estlemédiateur)etl’expertorganiselesavoir.

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teur est de permettre aux apprenants de produire du sens; ceci en facilitant le ques-

tionnement,enapportantdesaidespédagogiques,enorganisantlaproduction,ename-

nantlesapprenantsàserendrecomptedeleurspropresprocessusmétacognitifsmisen

œuvreafind’apporteruneréponsesatisfaisanteautravailproposé.

Lemédiateuragitadeuxniveaux:entrelesapprenants(gestiondelaparole),etentrele

savoir et les apprenants (réalisation de la tâche). Le concept de médiation dans

l’apprentissage coopérative dérive des théories humanistes qui replacent la personne

humaineaucentredesactivitésd’apprentissage.L’approchehumanistemetenavantla

liberté,lesdésirsetlavolontédesapprenantsàapprendre,letoutdansuneperspective

interactive.Lesthéoriesinspiréesparcetteapprocheajoutentauxsavoirsetsavoir-faire

les concepts suivants: le savoir-être et le savoir-devenir. L’élaboration de nouvelles

connaissances chezunapprenant est favoriséepar les échanges entre cettepersonne,

sespairsetsonenvironnement.Pourfaciliterceséchangesengroupe,laprésenced’un

médiateur est indispensable. En 1969, Carl Rogers (1996, p. 100), écrivait «le but de

l’éducationdoitêtrelafacilitationdel’apprentissageetlerôledel’enseignantestd‘être

facilitateurdel’apprentissage».Cettemédiationpossèdeaumoinsdeuxcomposantes:

unecomposanterelationnelleouaffective,etunecomposantecognitive.

Lemédiateur,selonRaynaletReunier(1997,p.220),apourobjectifd’apporterunen-

sembled’aideetdesupportsàdespersonnesafindeleurrendreplusaccessibleunsa-

voirquelconque(connaissances,habilités,procéduresd’actions,solutions).AnnickWeil-

BaraisetMarcelaResta-Schweitzer(2008)insistentsurlacomposantecognitive,carla

médiationn’apaspourenjeudefaireapprendre:

«desconnaissancesparticulières,maisdestimulerdesfonctionscognitivesnonspécifiques.Lesinterventionsdumédiateurreposentsuruncertainnombredeprincipestelsqueceluidetrans-cendanceou l’empathie. La transcendance se caractérisepar l’intentiondumédiateurd’allerau-delà des exigences immédiates de la situation et des besoins immédiats des sujets.L’empathieconsiste à comprendre les difficultés de l’apprenant et à manifester de l’intérêt pour les dé-marchesqu’iltente.S’ajoutentàcesprincipesdesrèglesd’interventiondontlesplusimportantessontlessuivantes:faireréfléchircollectivementavanttouttravailindividuel,inciteràlaréflexivi-té(naturedelatâche,modesdecontrôleinternedel’activité,originedeserreurs,etc.)etaideràlagénéralisation».

Enrésumé,lemédiateurguidelesapprenantsenlesincitantsàexpliquerleursfaçonsde

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faire.Sibesoin,ilpeutlesinterpeller,susciterledoute,déstabiliserlesreprésentations

initialesetdemanderdereformulerleurcompréhensiond'unconceptoud'unproblème.

Ainsi,AnnieCardinet(1995)définitlamédiationpédagogiquecommeuneméthodepé-

dagogiquepourdévelopperchezlesapprenantsdesattitudesactives(notammentréflé-

chir, communiquer), des compétences cognitives (classer, organiser, planifier, etc.) et

descompétencessociales(rapportshumains,sentimentd’empathie).

«La médiation pédagogique peut être considérée non seulement comme une "thérapie del’apprentissage",maisaussicommel’attitudepédagogiquelapluscréatriceetlaplusefficacedanstoutacted’apprentissage,quidevraitêtredecréerunlienentreceluiquiapprendetl’objetdesonapprentissage,etluipermettred’entisserentrelesdifférentsélémentsdecequidevientsonsa-voir157».

Unepersonneapprendréellementquandelleperçoit lanécessitédecetapprentissage

pourlamaintenanceouauprogrèsdesoi(Rogers,1996).L’êtrehumaindisposed’une

capacité latente pour se comprendre lui-même et prendre en charge ses problèmes.

Cettepotentialitéd’actualisercescapacitésnepeutsefairequedansunclimatadéquat,

uncontextederelationshumainespositives.L’apprentissageseréalisepleinementdans

unclimatdeconfiance.Touteslessourcesdeconflitsontnécessairementécartées.Ilfaut

favoriser l’empathie dans relation formateur-apprenant. Ce n’est pas au formateur de

dire la solution, c’està l’apprenantà la trouver. L'enseignant doit aider les étudiants à

devenir des individus capables d'initiatives et pouvant en assumer la responsabilité,

capable aussi de choisir intelligemment, de s'adapter lorsqu'il ymodificationdespro-

blèmesàrésoudre(Bertrand,Valois,1994).

«Leseulapprentissagequiinfluenceréellementlecomportementd'unindividuestceluiqu'ildé-couvrelui-mêmeetqu'ils'approprie.»

Cesméthodesnondirectives,inspiréessurl'approchecentréesurlapersonne,sontun

excellentmoyenpourdévelopperlaparticipationdesétudiantsetdiminuerlesrisques

depassivité.Leformateurenseignantestunepersonneressourcedontlepremierrôle

estd'instaurerundialogueaveclesparticipants,etd'aiderlesapprenantsàseprendre

rapidementenchargeeux-mêmes.L'enseignantestunfacilitateur.Ilproposeàl'appre-

nantuncadrepédagogiquepertinentpour l'accompagnerdanssadémarched'acquisi-

157CARDINETAnnie:Pratiquerlamédiationenpédagogie.

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tionde savoirs. Lorsqu’il existeun conflit dansun groupe, c’est le groupequidoit ré-

soudrececonflitetnonl’animateur.

2.2.2.Environnementsociocognitifetapprentissagecoopératif

Chaqueêtrehumain,pourunproblèmecliniqueidentique,nécessiteunepriseencharge

spécifiquemettant en jeudes capacitésusuelles comme l’attention,des connaissances

généralesetdescapacitéscognitivesspécifiquesafinderépondred’unemanièreprécise

auxattentesdecetindividu.Dansunpetitgroupe,lesparticipantssemblentdavantage

pouvoir mettre en évidence ces capacités cognitives. Cette progression est intra-

individuelleparactivationd’unconflitsociocognitifpropreàchaqueindividulorsdela

rencontre avec une situation complexe; cette progression est également interindivi-

duelle grâce à ladynamiquedes confrontations sociocognitives individuelles entre les

différentsmembresdugroupe.

«Legroupestimule l’action,soutient l’effortetaugmente lacréativité ... legroupeest l’occasiond’uneconcertation,d’unecorrectionmutuellequiaméliorelesperformancesdel’individu»(Noyé,Piveteau,1987pp.135-36).

Le travail en groupe constitueun« environnement » sociocognitif capablede générer

desprogrèsindividuelsnotammentlorsquecetravailsuitlesquatrerèglesdebasesui-

vantes(d’aprèsBeauté,2008,pp.64-66):

• Faireprendreconscienceauxmembresdugroupequechacunaunmanquede

savoirs: c’est éveiller le désir d’apprendre, de connaître, c’est motiver

l’apprenant. Il ne suffit pas de présenter auxmembres du groupe dumatériel

d’apprentissage,maisdeleurfairecomprendrequegrâceàcematériel, ilsvont

pouvoir acquérir de nouveaux savoirs, développer de nouvelles compétences,

êtreplusperformant.

• Proposerunesituationproblèmeplutôtcomplexe,maispouvantêtrerésoluepar

legroupe.Cettesituationproblèmedoitéveillerledésirdesapprenantsàlaré-

soudre. L’animateur peut donner des indications au groupe,mais elles doivent

être limitées. Comme l’a écrit PhilippeMeirieu (1987, p. 92), «enpédagogie, il

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fautparfoisleveruncoinduvoile,maisuncoinseulementpournepasdémobili-

serlesujet».

• Expliciter la raisonpour laquelle cette situationproblèmeaétéproposée. Il ne

fautpasque lesmembresdugroupepuissentdire: àquoi ça sert. Il estnéces-

sairederappeleraugroupelafinalitédel’exercice.

• Pouraboutiràunesolution,legroupedoitagiretproposerensemble,etsurtout

nepassebasersurlescompétencesdetelettelapprenant,carcelavalorisel’égo

dechacunetcasseladynamiquedugroupe.Certes,unmembredugroupepeut

être plus compétent dans un domaine, mais il doit partager cette compétence

pendant le travaildeproduction. Il faututiliseràbonescient les ressourcesde

chacun.SelonPhilippeMeirieu(1984),

«Letravailengroupenesejustifiequesilatâcheaunniveaudecomplexitétellequ’ellenepourraitêtreaccompliepardesindividus.Onneseréunitpaspourleplaisird’êtreen-semble,maisparcequecelaapporteréellementunplus!»

• Leplusimportantdansungroupe,c’estlaprogressiondechacundesapprenants

quilecomposentetnonpaslaproductionproprementditedugroupe.

2.2.3. Pour quelle raison faut-il intégrer l’apprentissage coopératif dans l’acquisi-tiondescompétences? Denombreuxtravauxontdémontrélasupérioritédessituationsd’apprentissagecoopé-

ratifauniveaudelaperformanceetdesrelationsentreapprenantsparrapportàunap-

prentissage réalisé sur le plan individuel (notamment Lewin, 1947; De Montmollin,

1965; Doïse, 1984; Johnson & Johnson, 1987; Hugon, 2011). Philippe Meirieu

s’interroge158: «commentunemiseengroupepeut-elle contribueraudéveloppement

dechacundesesmembres?»Pourcetauteur,ceparadigmed’apprentissageengroupe

estrécent:«L’idée que l’on puisse regrouper des individus en formation pour leur confier la réalisationautonomed’unetâche-oumême,toutsimplement, leurpermettredecommuniquerentreeux-estuneidéequin’appartenaitnullementauchampdelaformation.Afortiori,nulnepensaitqu’ilsoitpossibled’envisagerquedespersonnesnon forméespuissent, simplementparunéchange,produirelemoindresavoir».

158PhilippeMeirieu.Connexions,68Disponiblesur:http://www.meirieu.com/ARTICLES/groupesetapprentissages.pdf.

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L’apprentissageengroupenécessitedefavoriseruneprisedeconscience,pourchaque

participantdecegroupe,del’existencechezautruid’opinionsdiverses,convergentesou

divergentes:c’estl’apparitiond’unconflitsociocognitifquinepeutsefairequedansun

groupeayantunehétérogénéitésuffisanteàproposdesidéesetdesopinions.Celasup-

poseégalementquetouslesparticipantsdecegroupepossèdentunlangagecommunet

unprérequisdemêmeniveau.

2.2.4.Quelquesélémentsinhérentsaufonctionnementdespetitsgroupes Lespremierstravauxconcernantlespetitsgroupesontportésurlacomparaisondela

performanced’unindividuparrapportàcelled’unpetitgrouped’individus.Commel’a

décritGermainedeMontmollin(1969,p.2),«lepetitgroupeesttraitécommeuneva-

riable indépendantedontonétudie l’influencesur le comportementd’un individu».À

partirdesannées30,c’estlaperformancecollectivequifait l’objetdeplusieursétudes

parrapportàlaperformanceindividuelle.En1947,KurtLewins’opposeàlaconception

d’ungroupecommeunagentd’exécution,maisproposedeconsidérercegroupe:

«comme une unité organique qui détermine le comportement des individus qui en sontmembres…Latâchedonnéeausujetn’estqu’unprétextepourdonnerunebaseréalisteàunesi-tuationdelaboratoireetauxinteractions,l’occasiondesemanifester».(Montmollin,1969,p.3).

RappelonsladéfinitiondeKurtLewinàproposdugroupe159:

«Legroupeestuntoutdontlespropriétéssontdifférentesdelasommedesparties;legroupeetsonenvironnementconstituentunchampsocialdynamique,dontlesprincipauxélémentssontlessous-groupes,lesmembres,lescanauxdecommunication,lesbarrières».

Unemodificationd’undecesélémentspeuttransformerlastructured'ensemble.Nous

distingueronsainsi(ennousinspirantenpartied’untextedeGermainedeMontmollin

(1969,pp.4-5)plusieursélémentsquipeuventinfluencerlavied’ungroupe.Cesélé-

ments doivent être pris en compte pour réaliser une évaluation appropriée de la sé-

quencedeformation.Ils’agit:

• desopinionsdesparticipants;

• dunombredemessagespendantlesinteractions; 159DéfinitioncitéedansANZIEUetMARTIN(1997,p.84):

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• del’évolutiondesinteractions;

• delacohésiondugroupe;

• deladivergencedesprisesdepositiondecertainsmembresdugroupe;

• desmotivationsdesapprenants;

• imagesmentales,dissonancecognitiveetimagesopératives;

• desreprésentationssocialesdesparticipantsd’ungroupe.

Lesopinionsdesparticipantsàungroupe Ellesconditionnentlescomportementsetlesfaitsdechaqueparticipantdanslesdiffé-

rentes interactions qui ont lieu dans le groupe. L’opinion, illusion du savoir160est de

l’ordrede l'affectif;«c’estunecroyancesans fondementvéritable»selonPascal.Pour

notrepart,nousestimonsquecesopinionssontleplussouventélaboréesprogressive-

ment sous l’influence de l’environnement, du contexte familial et socioprofessionnel

danslesquelsnousvivons,etquinesontpasavaresenpréjugésetprésupposés.L’être

humainpeut transformer cette croyance en certitude. Cette transformationpeut alors

faussersonjugementetmodifierainsilaréalitédelasituationétudiée.Carcertainsin-

dividussontcapablesdepersuaderd’autrespersonnesafindelesameneràconsidérer

commevraiescesopinions.Danslaplupartdesgroupesd’apprentissagequenousavons

étudiésdepuisplusde20ans,nousavonsnotéfréquemmentdesdivergencesd’opinions

et la volonté de certains d’imposer leurs vues. Cependant, à chaque fois l’animation a

permisdelimitercephénomène.Ilnefautcependantpasoublierqu’uneminoritépeut

avoir une influence forte sur l’évolution des attitudes et des prises de décisions de

l’ensembledugroupe.Ainsi,SergeMoscoviciécriten1979161:

«Toutdépenddel'implicationdesgens,del'intensitéduconflit,ducontexteoùiléclateetdelamanièredontonletraite.Tantôtonchercheàéviterleconflitouàl'étoufferenimposantl'auto-censureouenfaisanttairelesdissidents;tantôtondonneàchacunlapossibilitédes'exprimeretd'interagir.Plus legroupeest formel,plus leconflitestatténuéetplusoncultive lecompromis.Inversementdans lesdiscussions informelles, lespositionsextrêmessontprisesencompteet ilarrivequelegroupes'orienteverslessolutionsdelaminorité».

Lenombredemessagespendantlesinteractionsentreparticipantsd’unmêmegroupe

160MUCCHIELLIRoger(1988).Opinionsetchangementd'opinion,Paris,ESFéditeur.161CitéinMAISONNEUVEJean:Ladynamiquedesgroupes,pp.47-48.

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C’est un indicateur essentiel de l’activité d’un groupe. Ces échanges écrits ou verbaux

peuventêtreévaluésdeplusieursfaçons:notéssurfeuillesbristolsoupost’ Itcomme

dans ledispositifpédagogiquedumétaplan®,ouexprimésdemanièreoraleetnotés

suruntableaulorsd’untourdetableoud’unbrainstorming,ouencorerelevésparécrit

pardesobservateursdésignéslorsd’unjeuderôle.Danslaplupartdesséancesdefor-

mation que nous avons gérées, la production orale a été abondante démontrant

l’implicationde la plupart desparticipants à ces formations. Cela peut être interprété

aussidifféremment:l’implicationconstatéepeutaussiindiquerunessaidemainmisede

certainssurlesautres.GermainedeMontmollin(1969,p.6),précise:

«lenombredemessagesestconsidérécommeunemesuredel’influencequelessujetsessaientd’exercerlesunssurlesautres».

L’évolutiondesinteractionspendantlasessiond’apprentissage L’interactionestunmodedecommunicationinterpersonnelle,essentielpourlavitalité

dugroupe.C’estunprocessussocialbasésurunéchangeentremembresd’ungroupeou

entreunmembreetlegroupeentier(RogerMucchielli,1996,pp.18-19):«c’estl’unité

demesure de la participation… la nourriture du groupe». Ainsi, lorsque le climat de

coopérationentrelesdifférentsparticipantsestdetypebienveillant,

«l’interactionaboutitàuneévolutiondes idéesdechacunsous l’effetdes idéesdesautres, soitdans le sensd’une stimulation, soit dans le sensd’une synthèse, d’un réajustement oud’un ac-croissementd’informationimmédiatementintégrée».

Cesinteractionspeuventêtreparfoispeunombreuses,sourcesdefrustrationpourcer-

tainsmembresdugroupe,oubienselimiteràdeuxmembresdugroupe,véritablejoute

oratoire,nesatisfaisantpaslesautresparticipantsquideviennenttotalementpassifset

n’ontpaslapossibilitédes’exprimeretfontledeuildeleurformation.Touteinteraction

estsourcedetension.Cettetensionpeutêtrepositiveetcréatrice,s’effectuantdansun

climatsympathiquedecoopérationresponsable.Ilexisteégalementdestensionsnéga-

tives,quivontinhiberlesinteractionsouobligerlesparticipantsàrechercherunaccord

àminimaetàtoutprixpourdiminuerl’impactnégatif:cen’estenaucuncaslebutd’un

groupedetravail.

Lacohésiondugroupe

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Elleestunfacteurdéterminantpourl’atteintedesobjectifsd’uneformation.Deuxtypes

degroupespeuventêtredistingués:lesgroupescohésifsdontlesmembresontdesopi-

nions,despersonnalitésetdesgoutscommunsquivontfavoriserletravaild’équipe,et

desgroupesditspeucohésifsquiaurontdesdifficultésàtravaillerensemble.En1950,

Festingeretal162définissaitlacohésionobservéedansungroupecommeun«ensemble

des forcesqui agissent sur lesmembrespour les fairedemeurer au seindu groupe».

Deux types de forces peuvent être distinguées: 1 - le souhait de participer avec les

autresauxactivitésdugroupeet2–lebénéficepersonnelpossibledesmembresàlavie

dugroupe.

Butonetal, (2006)décriventdeuxcomposantes indépendantesà lacohésion, lacohé-

sionopératoireetlacohésionsociale(attiranceentrelesdifférentsmembresdugroupe).

Lacohésionopératoireestmesuréeparl’atteintedesobjectifs,ellecorrespondàlaréa-

lisationeffectivedesdifférentesphasesd’exécutiondestâchesprévuesàlagrandesatis-

factiondesmembresdugroupe.SelonBourgeoisetNizet(1997),unetropgrandediffé-

rencedeniveaudedéveloppementoudeconnaissancesentrelesapprenantsn'estpas

favorableàl'apprentissage.Enmêmetemps,unetropgrandesymétrieproduitdeseffets

decomplaisance,cequin'estguèreplusefficace.LestravauxdeWebb(p.ex.1989)etla

synthèse deWebb et Palincsar (1996) souligne que les groupes à hétérogénéité res-

treinte(faibleetmoyenoumoyenetfort)sontfavorablespourtouslesélèves.

La divergence des prises de position de quelques participants par rapport à ce que pense la majorité des membres du groupe. Iln’estpassouhaitablequedesmembresdugrouperecherchentàimposerleuravisetà

fairepasser leurspropresopinionsavantderechercherunesolution idéaleàd’autres

membresdugroupe ; cesdernierspeuvent inhiber leurspenséesparmanquede con-

fiance en eux, par incapacité à argumenter leurs idées. Irving Janis (1972) a décrit ce

problème psychosociologique d’autocensure en reprenant le terme de «pensée de

groupe» proposé parWilliamHWhyte en 1952163. Les individus qui pensent être en

positiond’inférioritéonttendanceàrechercherunconsensus.Cettedifficulté,selonJa-

nis,correspondà:

162FESTINGER, L., SCHACHTER, S., & BACK, K. (1950). Social pressure in informal groups. New-York, Harper andBrothers.163WHYTE,WilliamH.(1952).Groupthink.Fortunemagazine,Mars1952,pp.114-117.

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«Unmodedepenséedontlesgensusentlorsqu'ilssontprofondémentimpliquésdansungroupeuni,quandledésird'unanimitédesmembresoutrepasseleurmotivationàjugerréalistementdessolutionsalternatives.»

Lesobjectifsdugroupedéfinisendébutdeséquencesserontatteints,maisavecunsen-

timentdedéceptionprégnantpour certainsmembresdu groupequi auraient agi per-

sonnellementd’uneautre façon : lesbesoinset attentesde cespersonnesne sontpas

satisfaits.Consensusetréalismene fontpas toujoursbonménage.Unepersonnedans

ungroupepeutémettreunavisdivergentargumentésansqu’ilsoitconsidérécommeun

individuopposantàtout.Legroupedoittenircomptedesonavisetdialoguerpourcon-

naîtrelesraisonsquil’ontamenéàs’exprimerainsi.Ilfautéviteràtoutprixlapression

delaconformitéquipeutempêchertoutdialogueetmêmeécarterdetoutdébattoute

personneayantunepenséedivergentedansungroupe.Celaamèneàunconformisme

bridanttouteindividualitéetminorantl’attraitd’untravailengroupe.

Cephénomènedeconformismeaétédécriten1951parSolomonAsch164.JeanPaulCo-

dol165adonnéladéfinitionsuivanteen1973:

«Leconformismesemanifesteparlefaitqu’unindividumodifiesescomportements,sesattitudes,sesopinions,pourlesmettreenharmonieaveccequ’ilperçoitêtrelescomportements, lesatti-tudes,lesopinionsdugroupedanslequelilestinséréoùilsouhaiteêtreaccepté»

Nousavonstendanceàévaluernosopinionspersonnellesetestimernosproprescapaci-

tés etperformances, leplus souventpar rapport auxautres.Celapermetdediminuer

l’incertitudedenos jugementsvis-à-visdenous-mêmes.Quandnousnousdonnonsun

avissurquelquechose,nousavonsplustendanceàdonnerunavisconforme,prochedes

autresavis:maislerisqueestdeseretrouverdansunétatd’uneuniformitéquivacon-

duire au conformisme. Dans le cas contraire, si nous donnons un avis différent, nous

pouvonspasserpourdesoriginaux:c’estladifférenciationsocialequipeutameneràla

créativité, à l’innovation. Lorsque nous sommes les seuls à donner un avis divergent,

donc opposé aux autres, l’écart de la comparaison avec ces derniers devient sérieux:

nouspouvonsêtreconsidérésparlesautrescommedespersonnesayantdesraisonne-

ments et des comportements déviants. Le consensus social prime sur la situation 164ASCH,S.E. (1951).Effectsofgrouppressureupon themodificationanddistortionof judgments. InH.Guetzkow(ed.)Groups,leadershipandmen.Pittsburgh,PA:CarnegiePress.165CODOLJean-Paul (1973).Lephénomènedelaconformitésupérieuredesoidansunesituationd’estimationper-ceptivedestimulusphysiques,Cahiersdepsychologie,16,pp.11-24.

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d’incertitude que nous avons tous tendance à réduire. Notre motivation à garder les

meilleuresrelationspossiblesavec lesautres l’emportesurnosprocessus intellectuels

derecherchedevérité.

Laprésenced’unanimateurdansungroupeestindispensablepourtenterd’évitertoute

autocensure.Lesparticipantsdoiventavoirainsi lapossibilitédes’exprimerquand ils

ontdesidéesoudesopinionsdivergentesparrapportàcellesdesgardiensdelapensée

dugroupequiveulentdissimulertoutedissension;cecidanslebutdegarderl’illusion

del’unanimité,cequipeutêtrerésuméparleproverbe:«quiseressemble,s’assemble».

Lesmotivationsdesapprenantsdansungroupe Lamotivation,quicorrespondàunensembledefacteursirrationnelsetinconscientsdes

conduiteshumaines,estunfacteurpsychologiquedéterminantpourapprendre.Eneffet,

dans n’importe quelle séquence d’apprentissage, on dénombrera des apprenants qui

vontsimplementsubirunenseignementalorsqued’autresvonts’engagerà fonddans

l’apprentissageproposé?

Jean-PierreChangeux(2002,p.40etp.53),décritlecerveaucomme:

«Un producteur de représentations qu'il projette sur lemonde extérieur…qui poussel'organisme à continuellement explorer et à tester l'environnement physique, social etculturel, à se saisir des réponses et à les confronter à ce qu'il possède en mé-moire…Systèmeouvertetmotivé, lecerveaufonctionneenpermanencesurlemodedel’explorationorganisée.L’êtrehumainabesoindeconnaîtreetd’êtrereconnu:c’estunbesoinetnousdevonsêtremotivéspourcomblercebesoin».

Cesreprésentationsvontagirsurlesperceptionsdesapprenantsetinfluencerainsileur

motivation.L’apprenantélaboreunsystèmementalpersonnelbasésurdesreprésenta-

tionsderéussitesoud’échecsrencontrésauparavant.Lacroyancedel’apprenantenvers

unecapacitéàproduiredesrésultatsadaptésauxobjectifsenfonctiondesonsystème

mentalpersonnelvadétermineretinfluencerlamotivation.Maiscommel’aécritJean-

FrançoisleNy(1974,p.116),

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«L’hypothèsede l’existencedevéritablesbesoinscognitifsdumêmetypeque lesprincipauxbe-soinsbiologiquesesttoutefoispeuplausible,etentoutcasnondémontrée».

Chez l’être humain cependant, des stimuli vont au-delà de la simple satisfaction d’un

besoin physiologique et peuvent rendre les individus plus attentifs et perceptifs à un

plusgrandnombred’informations.Lamotivationpouraugmentersespropressavoirsse

retrouvedansdeuxcas(LeNy,1974,p.117): lesapprentissagesinformelsquisepro-

duisentendehorsdetouteintentiond’apprendre,etlesapprentissagesnonformelsqui

sontretrouvéslorsdeséquencesavecdesactivitéspeuouprouintentionnelleslorsde

séquences d’apprentissage non formalisées. Ces activités peuvent être notamment

l’écoute,ladiscussion,laréflexion,etc.

Lamotivationestbaséesurdeuxprocessus:1-unprocessusdedécisionpourchoisir

parmi un ensemble d’alternatives, un comportement adapté pour l’apprentissage en

cours et 2 - un processus d'allocation de ressources intellectuellesque l’apprenant va

sélectionnerpour réaliser cetapprentissage.Mais lamotivationn’estpas l’unique fac-

teurd’apprentissageetnerelèvepasseulementdel’apprenant.Pourmotivercedernier

à apprendre le contenu formalisé,mais égalementà rechercherd’autres informations,

l’enseignant doit proposer une formation didactique, c’est-à-dire, en menant une ré-

flexionpédagogiqueadaptéeàlaformationetauniveaudesapprenants,choisirlesélé-

mentsdel’enseignementàproposeretorganisercesélémentsdetellefaçonàcequ‘ils

soientplusaisésàcomprendreetapprendreparlesapprenants.

Imagesmentales,dissonancecognitiveetcompétencesdesparticipantsàungroupe L’ensemble des propositions énoncées par les participants des différentes formations

proposées aprobablementpermisdedécouvrir àpeuprès tous les aspectsdes situa-

tionscliniquescomplexesà résoudre.Mais ilnesuffitpasde fairedespropositionset

partagerdesinformations,ilfautquechaqueparticipantpuisseêtrecapabled’intégrer

cespropositionsetcesinformationspourlesutiliserdansd’autressituationscomplexes.

Comment intégrer l'assemblagedecessavoirspouragirefficacement?Autrementdit,

commentmanifesterdescompétencesprofessionnelles?

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La compétence réelle desmédecins assistants à ces formations pouvait cependant ne

pascorrespondreauxcompétencesrequisespourrésoudre lasituationproblèmepro-

posée.Comme le souligneGuy leBoterf (2000,p. 80), «le conceptde compétenceest

décrit comme si lamêmedéfinition s’appliquait au prescrit et au réel». LeBoterf ex-

plique cetteméprise par l’impossibilité de percevoir directement les compétences ré-

ellesd’unindividu:ellessontprésentesprobablement,maisilestdifficiledelesforma-

liser. Commentpouvons-nous évaluer ces compétences réelles? Certes, nouspouvons

nousréféreràcequenouspouvonsobserver:latâchedemandéeaétébienréalisée–et

cetteobservationn’estpasillégitime.C’estlaraisonpourlaquellelapédagogieparob-

jectifavaittantdesuccèsauprèsdesenseignants.

L’apprenant devait exécuter une tâche simple selon un processus de réalisation bien

défini,sansmargedemanœuvrepossible.Pourlestenantsdel’approchecognitiviste,ce

n’estpaslarépétitiond’exécutionsdetâchessimplesparunapprenantquivapermettre

deconnaître laréellecompétencedecetapprenant.Êtreprofessionnel,cen’estpasseu-

lement être capable d’exécuter des tâches répétitives,mais aussi résoudre des situations

professionnellescomplexes.Seuleunemiseenœuvrededécisionsetd’actionspourfaire

faceàuneactivitéréelleetencontexteadaptéeàl’apprenantpeutdonneràl’évaluateur

desindicationssurlescompétencesréellesdel’apprenant.Cetteactivitéréelleproposée

auxapprenantsdanslebutd’uneévaluationdoitserapprocherdelaviecouranteetin-

tégrerplusieursmatièresoudisciplines.Larésolutiondecetteactivitéauthentiquedoit

tenircomptedesintérêtsdel’apprenant.

LeBoterf(2000,p.82)proposed’évaluerlescompétencesréellesens’aidantduconcept

deschèmesopératoiresquioriententetguidentl’actiondel’apprenantdanssadémarche

derésolution.CesschèmesontnotammentétédécritsparGérardVergnaud(1996,pp.

283-285):

«Unschèmeestunetotalitédynamiquefonctionnelleidentifiantl’activitéquelesujetapprenantdoitréaliserselonunobjectifdéfini.C’estégalement«uneorganisationinvariantedelaconduitepouruneclassedonnéedesituations…cequiest invariant, c’est l’organisationde laconduiteetnonlaconduiteelle-même.End’autrestermes,unschèmen’estpasunstéréotype».

Pour cet auteur, «un schèmeest formédeplusieurs catégoriesd’éléments tous indis-

pensables:desbutsetanticipations,desrèglesd’action,despossibilitésd’inférenceen

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situation,etdesinvariantsopératoires–lesbutsdonnantauxschèmesleurfonctionnali-

té».Danscetyped’apprentissageparl’action,touteactivitéorganisée,reproductibleet

quiamontrésonefficacité,estlacombinaisondedeuxparties:«unepartd’invariance,

c’est sa dimension conceptuelle, et une part d’adaptation aux circonstances». (Pierre

Pastré&GérardVergnaud,2011,pp.403-404).Carnosprocessusmentauxnepeuvent

pastraitertoutes les informationsenmêmetemps.Laréactualisationrégulièredenos

connaissancesvamodifiernoscomportementsetattitudes,maisaussinoscroyances.

Parfois,lorsqu’ildoitagir,descirconstancesvontamenerunindividuàréagirendésac-

cordavecsescroyances.Cedésaccordestàl’origined’unetensioninconfortable:ladis-

sonancecognitive(LeonFestinger,HenryRiecken&StanleySchachter,1956).Cettedis-

sonancecognitiveestprésentelorsqu’unindividuseretrouvemalgréluidansunesitua-

tiond’inconfortimpliquantdesattitudesetdescomportementscontradictoires.

«Lessourcesdedissonancecognitivesontprincipalementcauséesnotammentsoitpardenou-veaux événements ou informationsqui viennentperturber les connaissances, croyances et opi-nions jusque-là établies dans une relation de cohérence chez un individu ; soit la nécessité dechoisir entre plusieurs éléments qu’une situationparticulière rend incompatibles ou contradic-toiresalorsqu’ilsétaientjusque-làsoitdansunerelationdeconsonance,soitdansunerelationdenon-pertinence»?(Collin,2010,p.13)166».

Cettedissonancepeutêtreréduitenotammentenmodifiantlescroyancesetlescompor-

tements de l’individu dans le sens de l’action prévue afin de réduire cette situation

d’inconfortetderétabliruncertainéquilibre.Unpsychologuerusse,DimitriOchanine,a

proposéunehypothèsepourdonneruneexplicationrationnelledecettedissonance.Il

s’estinspirédestravauxd’autresauteursrussessurl’apprentissage,danslecadredela

théoriedel’activité(Galpérine,Leontiev,Talyzina),notamment.Lestravauxd’Ochanine

s’inspirentde la théoriedu reflet: les sensationset les conceptsde l'hommesontdes

refletsplusoumoinscorrectsdesobjetsetdesprocessusdelanature.Unemultitudede

stimuli nous parviennent,mais nous ne voyons que ceux qui correspondent à ce que

nous sommes. Pour qu’un individu agisse sur un processus ou un objet, un reflet de

l’actionouduprocessusàréaliserdoitsedévelopperdanssoncerveau.

166SimonCollin, dans une thèse soutenue auQuébec en 2010, s’est intéressé au livre de Léon Festinger publié en1957 (voir bibliographie) qui donne cette définition de la dissonance cognitive « two elements are in a dissonantrelationif,consideringthesetwoalone,theobverseofoneelementwouldfollowfromtheother»(p.13).TraductionlibredeCollin:ilyadissonancelorsquedeuxélémentsentretiennentunerelationdecontradictionl’unparrapportàl’autre.

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«Le reflet subjectifdesphénomènes sous formede sensations,perceptionsetpensées, luipro-cure l’information indispensable pour commander, c’est-à-dire, agir activement sur un phéno-mène,unprocessus,defaçonàparveniràunbutprécis167»

PourOchanine(1971),touteperceptiond’unobjetoud’unfaitprovientdel’interaction

entredeuximages:uneimagecognitiveetuneimageopérative.Ladescriptiondespro-

priétésd’unobjetestréaliséeparl’imagecognitive.L’imageopérativeapourbutdere-

tenirseulementlespropriétésutilespourl’actionquidoitêtreréaliséesurcetobjet.Ce

typed’imagesertàagirdansunesituationconcrèteetspécifique.Ochanineadémontré

l’existencedecetteimagequandilademandéàunouvrierrussetravaillantdanslasalle

de contrôle d’une centrale thermique de dessiner l’usine dans laquelle il travaille.

L’ouvriern’avaitpasreproduitcorrectementlesinstallationsautomatiquesouquifonc-

tionnentcorrectementdontilnes’occupaitpas.Parcontre,ilavaitdessinéàfortgros-

sissement les objets parfois défectueux dont il était responsable. Selon Andreù Sole

(1995,p.415),

«L’imageopérativeestdéfiniecommelareprésentationdanslaconsciencedusujetdelastruc-tureopérativedel’objetsurlequelilagit,lastructureopérativeétantunsous-ensembledesrela-tionsquicaractérisentl’objetd’intervention…L’opérativité,définiecommel’activitémentalequirégitl’actiondutravailestfortementsynonymed’heuristique,d’inventivité,decréativité:l’imageopérativeaideàfairefaceàdessituationsimprévues,nonapprises,déroutantes».

Ochanineaégalementmenéuneexpériencedanslesannées1980surlaprisededéci-

sionmédicale.Ilarecherché,chezunéchantillondemédecinsspécialistesdelathyroïde,

ungroupededébutantsetungrouped’experts,commentcesmédecinspercevaient la

thyroïdedeleurspatients.Ilademandéàcesmédecinsexpertsetdébutantsd'examiner

unpatientmalade,puisdedessineroumoulerl'organeenquestion.Lesdébutantsont

donnéune représentationobjectivement fidèle de l’organe, tandis que les experts ont

proposéuneversiondéformée,avecunehypertrophiedecertaineszonesparrapportà

d’autreszonesbienminorées.Carlesmédecinsexpertsontdéforméleszonessignifica-

tivespour leurexamen,etminimisé leszonesnonpertinentes.Lesexperts,ensecon-

centrantsurl’essentielpouragir,prenaientsurtoutencomptelesymptômeetlesdon-

néesdiagnostiquesquiprévalaientsurlesdonnéesphysiques.

167Leontiev,Lerner,&Ochanine,1961,p.4

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Enfonctiondesobjectifsdelatâcheàréaliser,l’apprenantconstruitunereprésentation

déformée et succincte de l’objet à traiter. «Il s'agit d'une représentation qui est plus

adaptéeàlatâchequ'unereprésentationvraieetobjective»(WillemienWisser&Pierre

Falzon,1992,p.38).Ochanine(1978)acependantsoulignélesdangersd’unetelleap-

proched’expert:

«Imaginezunopérateurquitravailleainsipendant20ans.Ilauneimagehautementopérativedel'objet, ilnecommetpasd'erreur,seulement,hélas,cette imageestsclérosée,c'estunemanièreuniquedevoirleschosesàl'exclusiondetouteslesautres.Cetteincapacitédel'opérateurdepen-serlesystèmedanstoutesacomplexitécomptetenudelavariabilitédel'environnement,dessi-tuationsvaentraînerdeserreursoudeséchecsdanssoncomportement».

Lesreprésentationssocialesdesparticipantsàungroupe Undesbutsde toute formationestde laisser lesparticipants s’exprimer librementen

fonctiondesobjectifsàatteindredanslesdifférentsdispositifsd’apprentissagesétudiés.

Ens’inspirantdeNinaTalyzina(1981,p.133)quiénonçaitquele«développementdes

actions et des concepts mentaux n'est pas une fin en soi168», Jean-François Richard

(1996,p.18)donneunedéfinitionplusprécisedesactivitésmentalesdéterminéespar

l’objectifàréaliser:

«Les activitésmentales se caractérisent par le fait qu’elles sont finalisées, c’est-à-dire qu’ellessontorientéesetréguléespardesobjectifs.Cesderniersserventàlafoisàdéfinirdesbutsetdessous-butspoursuivisetàévaluerlesrésultatsdel’activité».

Leconceptdereprésentationssociales,développénotammentparSergeMoscovici,est

présent dans toutes les relations humaines. Elles facilitent, pour les membres d'un

mêmegroupe,d’unemêmecommunautéprofessionnelleoucivile,lacommunicationet

lacompréhension.Elles formentununiversd’opinionsquiévolueavec le temps.Cette

évolutionestparticulièrementvisiblepour lemédecin,dont l’exerciceautrefois libéral

estdevenu fermementencadrépar lesagencesdesantéet lesorganismessociauxno-

tammentpourlesprescriptions.Ainsi,dansundesdispositifspédagogiquesétudiés, le

jeuderôle,dontnousavonsorganiséetassurél’expertisependantplusieursannées,les

animateursavaientpourmissiondeposerlaquestionsuivante:«quereprésentepour

168“Thedevelopmentofmentalactionsandconceptsisnotanendinitself”[notretraduction]

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vous l’obésitéde l’enfant?Celanousapermisdedéfinir,quelquesoit la composition

des groupes, sept catégories de réponses: l’image vis-à-vis des autres, le ressenti par

l’enfantetparsa famille, lescomplications, lesproblèmespsychologiques, lesorigines

métaboliques,lesmodesdevieetlafaçondes’alimenter.Nousavionsdoncàfaireàune

mêmecommunautéprofessionnelle.

Par contre, les origines socioculturellesdesparticipants au jeude rôlepouvaient être

différentes,suscitantparfoisdesdésaccordsimportants.Nousn’avionspastoujoursno-

téparécritcesdifférencesd’interprétation,carellesn’interféraientpas,noussemblait-il,

danslemoded’acquisitiondescompétences.Pourtant,certainesréponses(ellen’aqu’à

moinsmanger-c’esttoujourscommeçapourlesfamillesd’AfriqueduNord,elledevrait

faire davantage de sport, etc.) pouvaient être dépendantes de l’origine socioculturelle

desparticipants.Cesdifférencesétaientégalementperceptibleslorsquenousavonsde-

mandéauxparticipantsderépondreàlaquestionsuivante:quelssontlesmotsoupro-

positionsquevousaimeriezentendreparlesdeuxacteursdujeuderôle?Lesreprésen-

tationssocialescoexistentaveclesreprésentationsindividuelles.

Mêmesilesystèmed’exercicemédicalestdeplusenplusencadré,ladiversitéculturelle

permetde limitercette impressionde«médecin formaté».Cettediversitéaétémani-

festementutilepour legroupe;notammentsurdesopinionset jugementsdecertains

médecins:nousespéronsquelesdiscussionsquionteulieulorsdecetteformationont

purendrecesprofessionnelspluscompréhensifsetpluscompétentssurleproblèmede

l’obésitéinfantile.Enconclusion,dansungroupedeformation,ilestnécessairedelais-

sers’exprimerchaqueparticipantsursespropresreprésentationssociales.L’apprenant

doit être capable de les identifier lui-même puis de les dépasser afin d’obtenir une

moindrerésistanceàagir,participeretapprendre.

2.3.Lesocioconstructivismeencontexteoulacognitionsituée

Humanbeings,whoarealmostuniqueinhavingtheabilityto learnfromtheexperienceofothers,arealsoremarkablefortheirapparentdisinclinationtodoso169.

169«Lesêtreshumains,quisontpratiquementlesseulsàdisposerdelacapacitéd'apprendreàpartirdel'expériencedesautres,sontégalementremarquablespourleurréticenceapparenteàlefaire»,[notretraduction].

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DouglasAdam,LastChancetoSee(1990)

Lecourantsocioconstructivistesitué, initiépar JeromeBruner(cf.§2.1.2.),s’estdéve-

loppéensuiteavecdenombreuxchercheursensciencesdel’éducation,notammentJohn

SeelyBrown,AllanCollins,PaulDuguid,JeanLave,EtienneVengeretHaroldGarfinkel.

Nousavonsproposécesdifférentesformationsdanslebutd’aiderlesapprenantsàac-

quérir une posture intellectuelle efficace, par une mobilisation efficace de leurs res-

sources cognitives et de leurs stratégiesmentales; l’objectif est de permettre aux ap-

prenantsdes’adapteràdifférentessituationsproblèmesauxquelsilsaurontàfaireface.

SiLevVygotskiétaitreconnucommeundespremiersauteursàavoirdéveloppélecon-

ceptd’interactionsociale, JeromeBruneravait insistésur lanécessitédecette interac-

tiondanslebutd’assurerundéveloppementintellectuelcorrectdesenfants.Cependant,

cetteinteractionétaitasymétrique,del’adulteversl’enfant,deceluiquiconnaitàcelui

qui va apprendre, afinque cedernier réussisse son apprentissagedes concepts. Cette

interaction de tutelle était destinée à amener l’enfant à résoudre une situation qu’il

n’était pas capable de résoudre seul. Pourquoi ne pas appliquer ces notions

d’interactionsdanslecadredesapprentissagesdesadultes?C’estàpartirdecetteinter-

rogationquesesontdéveloppéeslesthéoriesdeJeanLave(1988)etdeBrown,Collins,

Duguid (1989): apprendre est le résultat de l’interprétation d'une expérience, d’une

interaction,d’unemanifestationoud'unévénementsaisisdansleurcontexte.

L’apprentissageestunprocessus continuquiproduitdes savoirsgrâceàdesactivités

effectuéesdansdescontextesdifférentstoutau longd’unevie;cependant,cessavoirs

acquis par les apprenants dépendent également des interactions sociales. Pour John

SeelyBrown,AllanCollins et PaulDuguid (1989, p. 32), les activités d’apprentissages

doiventêtre réaliséesdansuncontexte réalisteet explicite.Pour cesauteurs, les con-

naissancesqu’ellessoientthéoriquesoupratiquessontfondamentalementliéesauxsi-

tuations matérielles et sociales dans lesquelles se sont développées ces activités

d’apprentissageauthentiques.Lesavoirnedoitpasêtreséparédel’action.

«Ilestindiscutablequel'activitédanslaquellelesavoirestacquisetutilisénepeutêtreséparéede–ousubordonnéeà–l’acted'apprendreetlacognition.Pasplusqu'ellen'estneutre.Aucon-traire,elleestpartieintégrantedecequiestappris.Ondoitconsidérerquelessituationscopro-

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duisentdusavoiràtraversuneactivité.L'apprentissageet lacognition,nouspouvonsdoncl'af-firmer,sontfondamentalementcontextualisés»170(Brown,Duguid,1989).

Les premiers psychologues cognitivistes de l’apprentissage, selon Jean Lave171(1988),

s’étaientdavantageintéressésauxprocessuscognitifsinternes,auxreprésentations,àla

mémoire,età la résolutiondeproblème.Or, chaqueapprenantmanipuledesconnais-

sancesaveccellesqu’iladéjàmémorisées;cecienfonctiondumilieusocialdanslequel

ilseréfère.JohnBrownetal(1989)commeJeanLave(1991,p.65)insistent:lanotion

d’apprentissagesocioconstructivisteestincomplètesi lecontexted’apprentissagen’est

pasprisencompte.Cetteauteuredécritl’apprentissageencontexteousitué«commeun

processus social d’intelligence partagé, dans le but de permettre à chaque apprenant

d’accumuler des connaissances personnelles». Mais cet apprentissage serait d’autant

plus efficace si la participation de l’apprenant était active au sein d’une communauté

d’apprentissage.Acquérirdenouveaux savoirs etdévelopperune identité en tantque

membred’unecommunautésontlefaitd’unmêmeprocessus,l’acquisitionmotivantle

partageetréciproquement».

Leconceptd’activitésituéeesttoutsaufquelquechosedesimple.C’estuneperspectivethéoriquegénéraleàl’originedenombreusesinterrelationsentredifférentssystèmesconceptuelscommelaperception,lelangage,lacognition,l’apprentissageetlemondesociétal.(Lave,1991,p.66)172.

Cetapprentissageserad’autantplusefficacelorsquecetapprenantparticipeactivement

àunecommunautéd’apprentissage:

«Acquérirdenouveauxsavoirsetdévelopperuneidentitéentantquemembred’unecommunau-tésontinclusdansunmêmeprocessus,l’acquisitionmotivantlepartageetréciproquement173».

Autrementdit,apprendrec’estparticiperàunecommunautédepratiquesetseconstruire

uneidentité;l’unnevapassansl’autre174.Cetapprentissagesituéavaitétédéjàégale-

170Traductionde: “The activity inwhichknowledge is developed anddeployed, it is nowargued, is not separablefromorancillarytolearningandcognition.Norisitneutral.Rather,itisanintegralpartofwhatislearned.Situationsmightbesaidtoco-produceknowledgethroughactivity.Learningandcognition,itisnowpossibletoargue,arefun-damentallysituated”.(traduitdel'anglaisparG.Fritsch).171Thecultureofacquisitionandthepracticeofunderstanding.172“However,situatedactivityisanythingbutasimpleconcept;itisageneraltheoreticalperspectivethatgeneratesinterconnectedtheoriesofperception,cognition,language,learning,agency,thesocialworld,andtheirinterrelations”,[notretraduction]173“Iproposetoconsiderlearningnotasaprocessofsociallysharedcognitionthatresultsintheendintheinternali-zationof knowledgeby individuals, but as aprocessof becoming amemberof a sustained communityof practice.Developinganidentityasamemberofacommunityandbecomingknowledgeablyskilfularepartofthesameprocess,withtheformermotivating,shaping,andgivingmeaningtothelatter,whichitsubsumes”,[notretraduction]174Mottier-Lopez&Allal(2004).p77.

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mentdéveloppéparHaroldGarfinkel (1967)quis’était interrogésurcesdeuxsujets :

comment faisons-nouspour agir en commun ? Les individus ont-ils des compétencessuffisantespourinterpréterlasituationdanslaquelleilssetrouventetyagirconvena-

blement?Pourcetauteurquiapubliéen1967 les conclusionsdeces travauxsous le

titre deStudies inEthnomethodology175, l’activité cognitive dépend étroitement des si-

tuationsmatériellesetsocialesoùelles’esteffectuée.Pouragiretrendrecomptedeleur

action, les êtres humains s’appuient sur des stocks de connaissances (qualifiés de

normes par Garfinkel) qui sont incorporées progressivement tout au long de leur vie

socialeetqu’ilsappliquentsansmêmeavoirlanécessitéd’yréfléchir..Garfinkeladéve-

loppéleconceptderéflexivitéselonleprincipesuivant:(XavierMolenat,2008).

«Toutenparlant,nousconstruisonsenmêmetemps,aufuretàmesuredenosénoncés,lesens,l’ordre,larationalitédecequenoussommesentraindefaireàcemoment-là…Lemondesocialest,pourchaquemembre, intelligibleetrapportable,cohérentetsensé.Etdans lecoursde leuraction, lesmembresproduisentdes« comptesrendus »(accounts)à travers lesquels ilsdécri-vent,interprètentlasituation,contribuantparlàmêmeàlaconstituer».

L’approche socioconstructiviste est centrée notamment sur les interactions et les

échangesentredifférentsapprenantsayantunmêmebutouunemêmeraisondeseré-

unirensemblepouracquérirouapprofondirdessavoirsetdescompétences.Celanous

amène maintenant à présenter succinctement différents types de groupes

d’apprentissage.

2.4.Unecatégorisationpersonnelledesgroupesd’apprentissage

Nousnousintéresseronsuniquementàdespetitsgroupescomposésgénéralementpar6

à 15 personnes. Plusieurs dispositifs pédagogiques d’apprentissage coopératif seront

décrits ci-dessous. Leurs buts sont de créer des interactions entre apprenants afin

d’accroitre lesdynamiques interactivespourréaliser les tâchesdemandées; le touten

maintenant des relations correctes et satisfaisantes entre les différents apprenants.

Nousavonsainsidistinguéquatremodèlesdegrouped’apprentissage:

§ lescommunautésd’apprentissageougroupesdetravail;

§ lesgroupesBalint; 175Publiéenfrançaisen2007sousletitre:Recherchesenethnométhodologie.Trad.fr.MichelBarthélémy,BaudouinDupret,Jean-ManueldeQueirozetLouisQuéré,P.U.F.

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§ Lesgroupesdepairsetd’échangesdepratiques;

§ Lescommunautésdepratique.

Les communautés d’apprentissage ou groupes de travail Unecommunautéd’apprentissageestunregroupementdepersonnesengagéesdansla

productionetlepartaged’idées,deréflexionsetdeconnaissancesafindefaireprogres-

sercettecommunauté,leplussouventsousformedegroupedetravailinteractif.Cette

interactionsocialenécessiteuneconvergencedeseffortsdechacunpour laréalisation

collective de cette tâche et le développement intellectuel de chacun.Dans le cadre de

l’apprentissage, l’objectif de ce groupe est de favoriser le conflit sociocognitif afin de

provoquer chez chacun des participants un déséquilibre dans ses représenta-

tionspersonnelles ; ce déséquilibre est nécessaire pour l’émergence d’une nouvelle

structurationdesespropressavoirsetcompétences.Lesprocessusmétacognitifssont

totalement prégnants et permettent aux participants de s’approprier de nouvelles re-

présentations: c’est faire à travers le regard des autres et en se regardant faire. Un

groupede travailnese justifiequesi la tâchecomplexed’apprentissageproposéeaux

apprenantsnepeutfairequel’objetd’unerésolutioncollective.(PhilippeMeirieu,1996

b),«Onneseréunitpaspourleplaisird’êtreensemble,maisparcequecelaapporteréellementunplus!).Celasous-tendlarésolutiond’unconflitsociocognitifavecnotammentuneconfrontationde points de vue (divergents ou convergents), un recours de chacun à ses possibilités intellec-tuelles,toutenrespectantlespropositionsd’autrui».

Cescommunautésd’apprentissagespeuventêtresouslaformesoitdegroupesdepro-

duction, soitdegroupesde réflexion.Cesdeux formesdegroupeontpourobjectif de

communiquer à l’ensemble des participants du groupe une véritable impulsion pour

améliorerleurscapacitéscognitives;notammentparlaparticipationdechacunàlaré-

solutiondelatâcheàeffectuer,parlepartagedesinformations,parl’écouteactive,par

laformulationetlareformulationdepropositions.Cesgroupesdetravailsontdestinés

égalementàimpliquertouslesparticipantsàlaréussitedelatâcheàeffectuerenren-

forçant leur motivation et leurs désirs, dans le cadre d’une approche globale, afin

d’apprendre,dedécouvrir,d’exploreretdecréer.

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LesgroupesBalint Michael Balint, alors psychanalyste en Hongrie avant le conflit de la Seconde Guerre

mondiale, s’était particulièrement passionné pour l’exercice de la médecine générale.

Cetauteuravaitconstatéque:

«Lemédicamentdebeaucoupleplusfréquemmentutiliséenmédecinegénéraleétait lemé-decinlui-même.Autrementdit,cen’estpasuniquementlafioledemédicamentoulaboitedecachets qui importent, mais la manière dont le médecin les prescrit à son malade; en faitl’ensembledel’atmosphèredanslaquellelemédicamentestdonnéetpris»(Balint,1960,p.9).

Danslesannées1950,Balint,exerçantenAngleterre,s’intéressaauxétudesmédicaleset

remarquaqu’ellesétaientsurtoutcentréessurlesconnaissancesscientifiques;lespra-

tiques d’enseignement étaient essentiellementmagistrales, il était difficile d’enseigner

des aptitudes pratiques et encoremoins relationnelles. Pourtant, la relationmédecin-

patient est aussi importante dans la prise en charge du patient que les éléments cli-

niques. D’autre part, le professionnel de santé pouvait rencontrer des difficultés qui

pouvaient perturber la relation médecin-patient, mais ces professionnels n’avaient

guère l’occasiondepouvoir les exprimer.Pour répondre à cebesoin,MichaelBalint a

misenplacedesoutilsdesupervisionetderéflexionsurlarelationmédecin-patient:les

groupesBalint,àl’originedumodèledeformationbasésurl’analysedespratiques.Ces

groupessontcomposésdedixàquinzemédecinsquiseréunissentrégulièrementavec

unanimateur.Cedernierpeutêtreunmédecinanalyste,unpsychiatreouunmédecin

quipossèdeunebonneexpériencedugroupeBalint.

UngroupeBalintapourobjectifl’étudedelarelationsoignant-patient:ils’agitdecom-

prendreladimensiondusoinstsoninteractionaveclemilieusocialetfamilialparrap-

port au symptômeet à lamaladie; le tout dansunedynamiquede groupeoù chacun

peuts’exprimernotammentselonlepointdevuedumédecin.L’inconscientfait l’objet

d’étudecommemoyend’élucidationdecertainsproblèmesrencontrésparlesmédecins.

La dynamique de groupe joue également un rôle important dans ces réunions : il est

possiblede concevoirunparallélismeentre la relationque le soignantaeueavec son

patientetcellequ’ilamaintenantaveclegroupe,cequifaitqu’iln’estpasimportantque

lemaladesoitprésentphysiquementdanscesdiscussions.

LegroupeBalintestbasésurdeux idéesgénéreuses: l’expériencedechaquesoignant

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peutprofiterauxautresetlaseulefaçondetransmettreuneexpérienceestdedonnerla

paroleetque lesautresécoutent.Toutmédecinpeuts’engagerdansungroupeBalint,

maisleplussouvent,ils’agitdeprofessionnelsdesantéquiseremettentenquestion.Ils

ontrencontréunjourdesdifficultésàcomprendreleurspatients.Leplussouvent,ilsont

dumalàmaitriserleurssentimentsouencoreontessayédesaisirlaraisondeleursatti-

tudesà l’égardde leurspatients176.Cependant, legroupen’apas fonctionà soigner le

médecinetsurtoutsesproblèmespersonnels,niàprendreenchargemédicalementson

patient.L’accentestmissurl’étudedelarelationdusoignantetsonpatient:comment

le professionnel de santé peut aider son patientà surmonter un cap difficile par

exemple?Undesmomentsessentielsdugroupeestderepérerlesfacteursémotifsdu

médecinressentisvis-à-visdesonpatientetréciproquement,maisaussilesnon-ditset

lestermesutilisésdansl’interactionquipeuventperturberlarelation.Enrésumé,quand

lemédecinadespréoccupations,ilpeutlesdénouerlui-mêmeafinderetrouversoneffi-

cacité; cependant, cedénouement seraplus rapidement réaliséavec l’aidedepairset

l’analyste.LegroupeBalintn’apaspourobjetderéaliserunesupervisionengroupeni

dedevenirungrouped’échangedepratiqueoudepairs.LegroupeBalintn’estcepen-

dantniungroupethérapeutiqueniungrouped’étudesurlacliniquedespatientsetde

leurmaladie.

Lesgroupesdepairsetd’échangesdepratiques

«J’écoutemalunsotquiveutquejelecraigne,Etjesaisbeaucoupmieuxcequ’unamim’enseigne».

Victor Hugo (1820). Discours sur les avantages de l’Enseignement mutuel. LeConservateurlittéraire.

Dérivés des méthodes d’enseignement mutuel assez courantes dans l’Europe du 19e

siècle, les groupes d’échange de pratiques et les groupes de pairs sont des modes

d’apprentissages qui souscrivent au concept de communauté d’apprentissage. Un

groupedepairscorrespondàunecollectivitédontlesmembresprésententdescaracté-

ristiquescommunes,commel’exerciced’unespécialitémédicale.Cetteapprochepéda-

gogique,lorsqu’elleestbienplanifiée,peutinfluerpositivementsurlesattitudes,savoirs

176BACHMANNJ-P.,NACCACHEH.(2000).L’évaluationdelaformationBalint.Résultatd’uneenquête.EnquêtedelaSociétémédicale Balint (SMB) et de l’Association de Recherche, d'Etude et de Formation pour la Fonction Soignante(AREFFS)Disponiblesur:http://www.psychodrame-balint.com/aipb.7.1-eval.html.

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ethabilité,quecesoitdansdescadreséducatifsformelsounonformels.Cettepédagogie

activeetcoopérativeaétédiffuséepourlapremièrefoisparl'écossaisAndrewBellvers

1795.Elleétaitappliquéedanslesécolesprimaires.Cemoded’apprentissageaétére-

misaugoûtdujouren1980.Ilestbasésurleprincipequechaqueindividuestrespon-

sabledudéveloppementdesesproprescompétences.Ilaétéainsidemandéauxensei-

gnantsenmédecinegénéraleduRoyaume-Unideparticiperàdesréflexionsengroupe

surtous lesenseignementsqu’ilsproposaientà leursétudiants. Ilsontappelécesren-

contres, inspirésde laphilosophiedeBalint, groupesdepairs (Peer group).Deuxans

plustard,lesmédecinsnéerlandaisontreprisceconcept,maisdansuncadrepluslimi-

té:l’audit.KeithTopping(2005,p.631)aproposéladéfinitionsuivante:

«L’apprentissageengroupedepairspeutêtredéfinicommeunecoopérationactiveentrediffé-rentspartenairesdestatutintellectueléquivalentafind’acquérirdesconnaissancesetdescompé-tences. Ce typed’apprentissage impliquedes personnes appartenant à unmême groupe social,maisquinesontpasdesenseignantsprofessionnels.Lebutestd’aiderlesautresàapprendreetd’apprendresoi-mêmetouteneffectuantlestâchesproposées177.

Sous l’impulsionde laSociétéFrançaisedeMédecineGénérale (SFMG), lesgroupesde

pairsontétéproposésauxmédecinsgénéralistesfrançaispourfavoriserl'étudecritique

de la pratique professionnelle. Ces groupes de pairs sont un lieu de libre parole et

d'étudedelapratiquemédicaletellequ'elleseprésenteréellementauxmédecinsgéné-

ralistes.PourPascaleArnould(2008,p.7),delaSFMG,lesgroupesdepairspermettent

nonseulementd’acquérirdenouveauxsavoirsetdenouvellescompétences;maisaussi

deconfronterlapratiqued’unmédecinàcelledesespairsetauxdonnéesprobantesde

lascience.Cesréunionsdegroupeontégalementpourbutderenforcerl’identitéprofes-

sionnelle,d’améliorerleconfortd’exerciceetlaqualitédessoins.

Les«communautésdepratique» Unecommunautédepratiquesedéveloppelorsqu’ungroupedepersonnes,reliéesentre

elles demanière informelle, ont en commun une pratique professionnelle, un champ

d’expertise,ouencoreunintérêtpourunsujetdonné(Wenger,1998).Plusprécisément,

lacommunautédepratiqueestconstituéeparungrouped’individusquiontpourobjec-

177Notretraductionde:“Peerlearningcanbedefinedastheacquisitionofknowledgeandskillthroughactivehelpingandsupportingamongstatusequalsormatchedcompanions.Itinvolvespeoplefromsimilarsocialgroupingswhoarenotprofessionalteachershelpingeachothertolearnandlearningthemselvesbysodoing”.

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tifdepartagerdesconnaissancesetd’apprendre lesunsdesautres.C’estàpartird’un

constat observé chez des réparateurs de photocopieuses d’une même société que ce

conceptdecommunautéaétédérivé.Sileurformationdebasedonnaitlesélémentsné-

cessaires pour effectuer des réparations, ces techniciens amélioraient leurs savoirs et

développaientleurefficacitégrâceàdeséchangesinformelsquiavaientlieupendantdes

momentsconviviaux.Ilséchangeaientleurexpertisepourréparerlespannes,cequileur

permettait de le faire plus rapidement, sans perdre du temps à consulter desmodes

d’emploi pas toujours accessibles. Le travail de ces techniciens était individuel, mais

grâceàlamiseencommundeprocéduresderéparation,ilsfaisaientpartied’unecom-

munautédepratique.

Cependant, et nous insistons, la communauté de pratique n’est pas une communauté

d’apprentissage, c’est-à-direuneréuniond’ungrouped’apprenantsquiapourobjectif

deréussirunetâcheourésoudreunproblèmedansuntempsplusoumoinsimparti.Ce

n’estpasnonplusunecommunautéd’intérêts,composéedepersonnesquiontdespré-

occupationsidentiquescommepartagerdesexpériences.C'estungroupequi,entissant

desrelationsentretoussesmembrespourdévelopperunsentimentd’appartenance,va

développer un engagementmutuel pour interagir et apprendre ensemble. Ce type de

communautés’articuleleplussouventautourd’unepratiquecommune,parexemplela

professiondemédecin.

Basé sur des interactions, des coopérations et des discussions entre ses différents

membres, ceconceptpeutêtreutilisédansdesséquencesd’apprentissagenotamment

pouracquérirdes savoirs, aptitudes, savoir être et savoir agir.Dans ce cas, la compé-

tence peut être définie comme une construction sociale qui va progressivement

s’échafauder, à l’occasion de séances d’apprentissages collectifs, en interaction avec

d’autres apprenants. Grâce à l’analyse de sa pratique, le participant à un groupe

d’analysedepratiquepeutprendreconsciencedesonvécusocioprofessionnel.Notam-

ment ce qu’il fait habituellement sans l’exprimer verbalement, car cela ne correspond

pasàcequiaétéprévuouordonné;maisaussicequ’ilsouhaitefairesansavoirlacapa-

citéde faire (parmanquede temps,par insuffisancedesavoirs,à causedeproblèmes

personnels,éthiques...);enfincequ’ilréaliseouproduitalorsqu’iln’envoitpasl’intérêt

ni l’utilité.Enconfrontantletravaildeverbalisationdesesexpériencesaveclesautres

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participants,leparticipantdevraitêtrecapabled’identifierlesdifférentescomposantes

affectives, subjectives, objectives et émotionnelles qui caractérisent ses actions.

L’objectifdecette interactionavec lesautresestdefavorisersaproprerechercheper-

sonnelled’explicationsetdesolutionsadaptéesauxsituationsproblèmesrencontrées.

EtienneWengerpréciselerôledecescommunautés:(2005,p.2),

«La théorie des communautés de pratique propose de concevoir l’apprentissage sous l’angled’uneparticipationsociale.Encesensprécis, laparticipationnese limitepasàunengagementdans certaines activités courantes avec d’autres personnes, elle réfère également au processusplusenglobantde “collaborationactiveauxpratiques d’une communauté sociale” etde la cons-tructiond’identitésenlienavecelles».

C’estlecaslorsqueplusieursindividusparticipentàuneéquipedetravailpendantune

périodedéfinie.PourWenger178,

«Apprendrec’estprogresserdanslaparticipation,quel’onsoitguidéounon,qu’ilyaitounonunenseignant,celaauseind’unecommunautédepratiquesquiconduitàvoirl’apprentissageautantcommeunetransformationidentitairequecommelamaîtrisedesavoir-faireousavoir-être»

Enfin,JeanLaveetEtienneWengerontécriten1995(p.95),«l’apprentissageestdisso-

ciédel’enseignement,detouteintentionpédagogique».Lesmembresd’unecommunau-

té de pratique interagissent continuellement pendant toute la durée de cette commu-

nauté; ceci envued’amélioreretmaitriser leurs connaissances, aptitudeset attitudes

dans leurdomained’intérêt. L’objectifprincipalde la communautéestdepartagerun

répertoire communde savoirs (mutualisationdes connaissances) dans des conditions

d’apprentissages bien plus proches de l’informel et du non formel que du formel. Les

interactionsquiontlieudansunecommunautédepratiquesontàl’originedelaproduc-

tiondesavoirsditstacites.Cesderniersvontaideràrésoudreplustard,d’unemanière

plus aisée, les futures difficultés qui seront susceptibles de rencontrer. Lorsque les

membres d’un groupe en situation professionnelle produisent ces savoirs tacites, ces

membresontremarquéquecessavoirssontplusfacilementmobilisablespourréaliser

d’autres tâches.Cetapprentissageencontexted’exercice favorisenotamment cespré-

cieuxsavoir-faire, lesficellesdumétier,sidifficileàformaliserparlesapprenantseux-

mêmes.

178CitéparBROUGEREetBEZILLE(2007,p.152).

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Lacommunautédepratiquemetàladispositiondesesmembresdesoutilsetdesrègles

decommunicationafind’intensifierleséchangesinterpersonnelsetdedécloisonnerles

différentes structurespartiesprenantesde cette communauté. Il y a transfert de con-

naissancenonplus d’un individuqui sait à celui qui apprend (compagnonnage),mais

des transfertsd’informations entreunplus grandnombredepersonnes, et ceci grâce

notamment au développement de nouveaux moyens de communication. En effet, la

communautédepratiqueneselimitepasàungrouped’individusréunisensemblephy-

siquement. La communicationpeut se faireainsipardes réseaux intranetouextranet

(c’estlecasdepersonnestravaillantsurlesversionsbêtadelogicielsquipeuventparti-

ciperàlaréflexion).Maiscen’estpasnonplusunesimplebasededonnéesouchacun

viendraitpicoterlesonnécessaireàsasurvieintellectuelle;touterequêtedoitêtresui-

vied’undialogueconstructifnécessitantlaprésenced’unmédiateurafindegérereffica-

cementceséchanges.Autotal,cescommunautésdepratiquescorrespondentàdesré-

seaux sociaux non formels ou informels qui fonctionnent à l’intérieur ou à l’extérieur

d’entreprises ou d’institutions. Elles sont destinées à promouvoir et favoriser les

échangesdesavoirsentrelesmembresdelacommunautéayantdesintérêtscommuns.

Lafinalitédecescommunautésestdefavoriserdelacréationdenouveauxdocuments

commedesréférentiels,denouvellestechniquesetdenouveauxoutilspourapprendre,

décideretagir.

Quellessontlesdifférencesentreunecommunautéd’apprentissageetunecommunautédepratique?

Toute communauté, qu’elle soit d’apprentissage ou de pratique, correspond à un en-

semble de personnes souhaitant appartenir à un même groupe, utilisant les mêmes

moyensdecommunicationmisàladispositiondetous,ayantundomained’intérêtmu-

tueletunobjectif commun(partageetmutualisationdesconnaissances, résolutionde

tâches).Laprésencephysiqueestindispensabledanslescommunautésd’apprentissages,

lesgroupesdepairsetd’échangesdepratiques,cequin’estpasobligatoirementlecas

danslescommunautésdepratiquequipeuventserencontrerpouréchangeretpartager

égalementd’unemanièrevirtuelle àdistanceavecdesmédias comme leWeb.C’est la

principaledifférenceentrecesdeuxtypesdecommunautés;uneautredifférenceestla

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taille du groupe qui est peut-être plus importante dans la communauté de pratique.

Touteslescommunautés,d’apprentissageoudepratique,sontbaséessurunregroupe-

mentdepersonnesquisesontassociéesvolontairementàceconcept.

À l’origine, Lave etWenger considéraient les communautésdepratique comme infor-

melles,légèrementstructuréesetpeuorganisées.Parlasuite,ceconceptaévoluévers

une organisation et une structuration beaucoup plus marquées, où des individus

membresd’uneorganisationoud’uneinstitutionsontfortementinvitésàparticiper.Ces

communautés structurées sont davantage axées vers le développement des connais-

sances et des compétences. Enfin,Davel et Tremblay (2011) proposent une troisième

catégorie très structurée, orientée vers des impératifs stratégiques avec pour objectif

unemeilleureperformanceorganisationnelle.Pourcesauteurs, lacréationd’unecom-

munautédepratiquedoitse faireessentiellementsur les lieuxde travail.Leurbutest

d’explorerlafaçondontl’apprentissageetlaformationseproduisentdanslespratiques

quotidiennesdetravail.Maiscommecesauteursleprécisent:

«Ilnes’agitpasdetransformerlesactivitésdetravailendesoccasionsd’apprentissageetdedé-veloppement des compétences puisqu’elles le sont de toutemanière,mais plutôt de voir et decomprendre comment l’actede travailler constitueen soiuneoccasiond’apprendrepar lapra-tique.(Davel&Tremblay,2011,p.1).

L’engagement dans une communauté d’apprentissage est volontaire et généralement

limitédansletemps,dépendantdesobjectifsproposésendébutdel’apprentissage.C’est

unlieudediscussion,deproduction,derésolutiondeproblème.Lacommunautédepra-

tiquen’a jamaisétéun lieudeproduction,mais seulementun lieudepartagede con-

naissances.Laduréedevied’unecommunautédepratiqueestlimitéeuniquementpar

laparticipationdesesmembresauxobjectifsdecettecommunauté.Eneffet,lesrisques

derestreindrelefonctionnementcorrectdecescommunautésdepratiquespeuventêtre

fréquents.Touslesmembresdecettecommunautédoiventparticiperàcettemutualisa-

tion.Sidesmembresrésistentàcettemiseencommundessavoirsetdespratiques,ils

refusentdes’engagerets’excluentd’eux-mêmesdecettecommunauté.Etplusieursmo-

tifsdenon-engagementpeuventcoexisternotammentquanddesmembresn’acceptent

pas des critiques, développent un sentiment de supériorité et veulent tout régenter

jusqu’àinstrumentaliserlacommunauté.

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Desobjectifsprécisdoiventtoujoursêtreproposésainsiqu’unplanningderéunion:une

communautédepratiquen’estpasuniquementuneréuniondepersonnesquiontplaisir

à se rencontrer. Le partage des savoirs doit être conséquent, des échanges de qualité

médiocrequin’apportentrienauxmembresvontamenercesderniersàrechercherail-

leurslesidéesetinformationsquileursontnécessaires.Enfinlesoutilsdecommunica-

tiondoiventêtresimplesàutiliserpourtous.Sansoublierquetropd’informationstuent

l’information.Lesautresfinalitésentrecesdeuxtypesdecommunautéssontpratique-

mentcommunes:mutualiserlesressourcesdechacunpourtous.Celapermetdefacili-

terunapprentissagequand cela estnécessaire,mais aussidemaitriserdes aptitudes,

approfondir un domaine d’expertise, susciter des nouvelles idées de travail ou de re-

cherche,etfaciliterlarésolutiondeproblèmes.

Nousnoussommesparticulièrementintéressés jusqu’àmaintenantàcinqdéclinaisons

de l’apprentissage selon la théorie de la cognition. (Constructivisme, socioconstructi-

visme,théoriedel’activité,théoriedel’énactionetsocioconstructivismeencontexteou

cognition située). D’autres théories d’apprentissages ont été également décrites, qui

considèrent l’apprenant comme un acteur de ses propres connaissances. Nous distin-

gueronsainsidanslechapitresuivantleprocessusd’apprentissageselonlaperspective

du courant théorique de la connaissance tacite et de l’explicitation. Cette perspective

tient comptenotammentdes savoirs et des représentationsdes apprenants qui pour-

raientbloquerouaucontraireaideràacquérirdenouvellesconnaissances.Nousallons

maintenantexposercesthéoriesd’apprentissage.

2.5.Lesprocessusd’apprentissagesselonlaperspectiveducourantthéoriquedelaconnaissancetaciteetdel’explicitation

Ilexisteunniveaudeculturesous-jacent,caché,ettrèsstructuré,unensemblederèglesdecomportement et de pensée non dites, implicites, qui contrôlent tout ce que nous faisons.Cettegrammaireculturellecachéedéterminelamanièredontlesindividusperçoiventleurenvironnement,définissentleursvaleurs,etétablissentleurcadenceetleursrythmesdeviefondamentaux.Noussommes,pourlaplupart,totalementinconscientsouseulementsuper-ficiellementconscientsdeceprocessus.»

(EdwardHall,1984,pp.14-15).

Introduction:

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Nousallonsnousintéresseràdesdémarchesspécifiquesdelacognitionpouracquérir

dessavoirs,notamment:

• L’apprentissageexpliciteversusapprentissageimplicite

• L’acquisition de savoirs d’action et de savoirs procéduraux pour produire ou

améliorerdescompétencesprofessionnelles

• Lessavoirs»formels»etlessavoirs«informels»

Lesapprentissagesexplicitesetimplicites Commepourleraisonnement,ilexistedeuxdémarchesdifférentes,maissouventcom-

munes,pouracquérirdusavoir:

• L’apprentissageexpliciteconsisteàacquérirdesconnaissancesselonundéroulépla-

nifié par les autorités éducatives. Cet apprentissage est totalement intentionnel et

conscient. Il nécessite de la part de l’apprenant d’être réellement attentif, afin de

mémoriseret/oud’exprimerdesconnaissancesquandil le jugenécessaireou lors-

qu’illuiestdemandédelefaire.Cetteactiond’apprendredemanièreconscienteest

leplussouventdécontextualisée,pouvantseréaliserdansdenombreusessituations.

Cetyped’apprentissagecorrespondàl’apprentissageformel.

• L’apprentissageimplicite permet à l’êtrehumaind’acquérir spontanémentdes con-

naissances et des aptitudes sans aucune planification ni d’effort d’attention de

l’apprenant.Cetapprentissageestgénéralementnonintentionnel,ilsefaitdefaçon

inconscienteet n’est pas axé sur l’acquisition directe d’un résultat. L’attention de

l’apprenant dans cette phase implicite n’est pas attirée par ce qu’il apprend.

L’apprenant utilise ses propres connaissances disponibles, mais ne s’en rend pas

compte.Ilagitsanslesavoir.Cetteactioninconscientes’effectuegénéralementdans

uncontextespécifique,unesituationparticulièrefavorisantcetyped’apprentissage.

Lesconnaissancesacquisesàl’issued’unapprentissageimplicitesontditestacites.Il

s’agitdeconnaissancespersonnelles,propresàl’apprenant, liéesfortementaucon-

texte,etdifficilementformalisablespourlescommuniqueràautrui.

Ces connaissances tacites sont difficilement modifiables même si parfois l’apprenant peut serendrecomptequ’ellespeuventêtreerronéesouinutiles.Ellespeuventmêmemeneràdesidéesmalpréconçuesdelaréalité,àdespréjugés.Nepasreconnaîtrecesconnaissancestacitesfaussescontribue fortementpour l’apprenant à la reproductiondemauvaisespratiqueshabituelles.Untelapprentissagerentredanslacatégoriedesapprentissagesinformels.

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L’apprentissageimpliciteestunenotiondatantdumilieudu20esiècle.En1955,James

GibsonetEleanorGibsonontcaractériséunapprentissagedifférentde l’apprentissage

académique habituellement reconnu comme le seul capable de rendre plus savant un

êtrehumain. Ils ont dénommé cettenouvelle façond’apprendreapprentissagepercep-

tuel ou perceptif. Pour ces auteurs, l’apprentissage perceptuel relève d’un processus

mentalsimple,n’exigeantpasderaisonnementintellectuelavéré.Ceprocessusestsup-

posésedévelopperparuneexpositionconstanteàunenvironnementvarié179.

Maisc’estArthurReber,en1967,quiautilisépour lapremière fois le terme implicite

afindedésignercetyped’apprentissagepassifetautomatiqueàproposdetravauxsur

l’apprentissage des grammaires artificielles. Il a démontré notamment une relation

étroiteentrel’intuitionetlesapprentissagesimplicites.Seloncetauteur,l’intuition«est

lerésultatdirectd’unapprentissageimplicite,détectantlescomposantessous-jacentes

d’une sollicitation extérieure complexe180 ». Reber définit l’apprentissage implicite

commeuneacquisitionpassiveetautomatiquededifférentssavoirs.C’estunprocessus

indépendantdel’âgeetduniveauintellectueldel’êtrehumain.L’intuitionestessentielle

auprocessusderaisonnement.Elleinduitdeshabiletéssupplémentairesquin’auraient

pu être obtenues uniquement sur des déductions réalisées à partir de données d’une

situationclinique.Àl’inversedel’instinctquiestinné,l’intuitionestunprocessusmen-

talinconscientquivasedéveloppertoutaulongdelaviedel’individugrâcesurtoutà

des apprentissages non formels et/ou informels; le rôle de l’environnement social et

l’histoire personnelle de l’être humain priment dans l’acquisition de l’intuition,même

s’iln’estpaspossibled’écartertotalementl’apprentissageformeldansledéveloppement

deceprocessusmental.

Plus tard, DianneBerry et ZoltanDienes (1991) ont redéfini l’apprentissage implicite

commel’acquisitiondenouvelles informationsrésultantdenotreenvironnement,sans

êtreconscientd’êtredansunesituationd’apprentissage.Cesinformationsacquisessont

difficilementverbalisables.Cependant,l’êtrehumainestincapabled’expliquerlanature

deceprocédéquiapportel’information;cequiexpliqueladifficultéàlatransmettreà 179GIBSONJ.J.,GIBSONE.(1955).Perceptuallearning:differentiationorenrichment?pp.34–35.180«Thetermimplicitlearningwasfirstusedtocharacterizehowonedevelopsintuitiveknowledgeabouttheunder-lyingstructureofacomplexstimulusenvironment»

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d’autrespersonnes.Cetteintimeconvictionestrenforcéepardessignauxperceptifsin-

ternesquioriententetfiltrentlesinformationsutilesàlarésolutiond’unproblème.An-

tonioDamasio(1994)aainsidémontrédanssonlivre«l’erreurdeDescartes»queles

émotionsjouentunrôleimportantdansdesprocessusintellectuelsrationnelsderésolu-

tionde tâche.Cetapprentissageperceptif,par lespropresémotionsd’un individu, ses

convictions et sa perception de l’environnement, peut apporter une réponse satisfai-

santeàune situationdifficile caractériséeparunmanqueutiled’informationpour les

résoudre.Parcetapprentissageperceptif, l’êtrehumainestcapabledereconstituerun

visage,unescènealorsqu’iln’endistinguequ’unepetitepartie.Lafacultédepercevoir

estprobablementliéeàuneintimeconviction(cf.§4.21:gutfeeling)del’individuqui

permetuncheminementdes informations jusqu’àunemémoire implicite181.Les infor-

mationsacquisesparunapprentissageformelpeuventêtreplusoumoinsretenuesdans

la mémoire explicite et donc plus facilement oubliées; les informations enregistrées

danslamémoireimpliciteseraientplusstablesetpermanentes,etseraientplusfacile-

mentmobilisables.Celaaéténotammentdémontrépardes chercheursaméricainsde

l’UniversitéWashingtonàStLouis: les informationsenregistréesdans lamémoire im-

plicitepersistentalorsqu’ildevientdifficiled’extrairedesdonnéesenregistréesdansla

mémoireexplicitechezlespatientsatteintsdelamaladied’Alzheimer182.

Nousapprenonsconstamment,sanseffortapparentetnousdisposonsdeconnaissances

enregistrées inconsciemment dans la mémoire implicite, bien plus que nous sommes

capablesde les rapporteràautrui.Cette formed’apprentissagequi sedérouleànotre

insu, naturellement, sans effort, est appelée apprentissage implicite (cf. § 2.4.1.).Mais

danscecadred’apprentissage,lesinformationsimplicitesmémoriséessontplusdépen-

dantes du contexte dans lequel elles ont été produites; avec pour conséquence de

grandes difficultés pour transférer ces informations à autrui par rapport à celles ac-

quiseslorsd’apprentissagesexplicites.

Lesdifférentesdimensionsdelaconnaissance:ébauched’unetypologiedessavoirs

181Lamémoire implicite est une forme inconsciente demémoire où l’individun’est pas capable de se souvenir del'expériencequiaapportédesinformationencodéedanscetypedemémoire.Serappelerd'uneinformationencodéedanslamémoireimplicitesefaitautomatiquement,sansleseffortsderappelnécessaireàlamémoireexplicite.182LUSTIGC.,BUCKNERR.L.(2004).Preservedneuralcorrelatesofpriminginoldageanddementia.Neuron,42,pp.865-875.

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Notretravailderechercheaportésurlesrôlesdessavoirsd’actionetdessavoirsprocé-

duraux dans la production et/ou l’amélioration des compétences professionnelles. À

quelprocessuspouvons-nousnousréférerpouracquérircesdifférentssavoirs?S’agit-il

d’unprocessusmentalconscientou inconscient?Oubien lesdeuxd’unemanièrecon-

comitante?End’autrestermes,pouvons-nousapprendreinconsciemmentàagir?

Pouvons-nouscomparerlessavoirsd’actionetlessavoirsprocédurauxaveclesassocia-

tionssuivantes183:

- “Savoircomment”versus“savoirque”;

- “Savoirtacite”versus“savoirexplicite”;

- “Savoirprocédural”versus“savoirdéclaratif”;

- “Savoiradhésif”versus“savoirperméable”;

- “Savoirformel”versus“savoirinformel”.

• lessavoirscomment (knowinghow)et lessavoirsque(knowingthat)ontétédécrits

en1949parGilbertRyle184(Theconceptofmind),danslecadredel’apprentissage

comportementaliste. Considérons la proposition suivante: l’interne sait comment

prendre en charge la demande d’une patiente pour son problème de poids. Cette

propositionfaitappelauxdomainesdusavoir,aptitude,attitudeetsavoiragir(c’est

unecompétencepouvantêtrereproductibledanslaplupartdessituationsoùunpa-

tient désire perdre du poids). Cette proposition ne peut être réduite àcelle-ci:

l’internesaitquecettepatienteveutperdredupoids.Savoirqueneveutpasdiresa-

voircomment:danslepremiercas,ilestfaitappeluniquementàlaconnaissancede

la situationquiaété formaliséepar lapatiente;dans la secondeéventualité, il est

faitappelàdessavoirsformelsapprisàlaFaculté,maisaussiàdesraisonnements,

desmodes de pensée intuitifs, des connaissances acquises auprès d’autres profes-

sionnelsdesantéetdesexpériencescumuléesduprofessionneldesanté.

• lessavoirstacitesàopposerauxsavoirsexplicitesontétéproposésparMichaelPola-

nyien1966(TheTacitDimension)danslecontexted’apprentissagecognitiviste;ces

savoirs tacites correspondent à un patrimoine intellectuel acquis par chaque être 183SelonBernardDelvaux(2007,p253)184GilbertRyle:Lanotiond’esprit.2005,p.93.

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humain,etquis’estconstituéprogressivementaufildesexpériencesvécues,desap-

prentissagessuivisetdesactionsréalisées. Ilestpossiblede faire faceàunesitua-

tion complexe et inconnue grâce à des connaissances, des aptitudes, des habilités,

desschèmesderésolution,desraisonnementsdéductifs,inductifs,abductifs185et/ou

analogiques.Cessavoirstacitessontpropresàchacunetdoncdifficilementtransfé-

rables. Ils sont générés chaque fois qu’il est nécessaire d’être performantpour ré-

soudreunesituationproblèmerencontréedanslapratiquequotidienne.Cessavoirs

tacitesontpourobjectifdecadrer,destabiliseretdecirconscriretoutouenpartiele

problème. Dans la plupart des situations rencontrées dans la vie socioprofession-

nelle,lessavoirsexplicitescôtoientlessavoirstacites.

• Les savoirsprocéduraux et savoirsdéclaratifs correspondent classiquement aux

définitions suivantes: le savoir déclaratif est constitué d’un assemblage

d’informationsindispensablespourgénéreruneaction;lesavoirprocéduralest

constituédeprocéduresnécessairespourmettreenœuvreuneaction.JohnAn-

dersonen1976aproposéunethéoriesurlessavoirspourcomprendreetsimu-

ler la cognition humaine. Pour construire son modèle de mémoire (ACT-R), il

s’estbasésurunedichotomieopposantlessavoirsprocédurauxetlessavoirsdé-

claratifs. Selon cet auteur, la connaissance procédurale se distingue de la con-

naissancedéclarativeparlefaitqu'ellen'estpasmesurable:elleestsusceptible

d’être acquise uniquement dans un contexte spécifique particulier. Anderson

écriten1987(p.206):

«Notresystèmedesavoirdéclaratifalacapacitéd’emmagasinersousuneformerelatived’ébauchenosexpériencesdansn’importequeldomaine,ycomprislesenseignements(sidisponibles),unmodèledecomportementcorrect,lessuccèsetleséchecsdenosproprestentatives,etc.Unedescaractéristiquesdebasedusystèmedéclaratifetqu’iln’exigepasdesavoircommentlaconnaissanceserautiliséeavantdelastocker.Celasignifiequ’ilestpossibled’introduire facilementuneconnaissanceappropriéedansnotresystème,maisqu’uneffortconsidérableserademandéquandilseranécessairedeconvertircettecon-naissanceencomportement.186»

185Raisonnement particulier décrit par Charles Sanders Pierce à la fin du 19è siècle, permettant d’expliquer unphénomèneouuneobservationàpartirdecertains faits,événementou lois.Exemplederaisonnementabductif: leraisonnementhypothético-déductifdesprofessionnelsdesantéàlarecherchedescausesdessituations.L’abductionestuneprocéduredenormalisationd'unfaitsurprenant.C’estunraisonnementparticulierquel'onentreprendlors-qu'il y a une rupture dans ce qui étaiet attendu. C’est un raisonnement imaginatif qui fait notamment appel àl’ensembledenosconnaissances.186Notretraductionde«Ourdéclarativeknowledgesystemhasthecapacitytostoreinrelativityunanalyzedformourexperiencesinanydomain,includinginstruction(ifitisavailable),modelsofcorrectbehavior,successesandfailuresofourattempts,andsoon.Abasiccharacteristicofthedeclarativesystemitthatitdoesnotrequireonetoknowhow

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• Lessavoirsadhésifsopposésauxsavoirsperméablessontdeuxconceptsopposés

proposésd’abordparVonHippel(1994),etensuiteparBrownetDuguid(2001)

dans lecadrede l’apprentissageorganisationnel: lessavoirsadhésifs, statiques,

correspondant à des données fortement rattachées au contexte de l’utilisateur

(stickly information)seraientéquivalentsàdessavoirs tacites,etenopposition

aveclessavoirsperméables,accessiblesàtouslesutilisateurs(leakyinformation).

En2001,BrownetDuguidontprécisé:lessavoirsadhésifscorrespondentàdes

connaissances personnelles, difficilement transférables et donc peu accessibles

auxautrespersonnes.Cessavoirsdoiventêtredistinguésdelaconnaissancepu-

blique, potentiellement perméable et accessible à tous les individus intéressés.

Lessavoirsadhésifssontdifficilesàextrairespontanément.Maisilspeuventêtre

transmisdanscertainesconditions,enprésencedesignauxostensiblesdansdes

contextesfavorisantl’apprentissage.Noscomportementsetnosactionspeuvent-

ilsêtreinfluencéspardessavoirsinaccessiblesdefaçonconsciente.

• Ladistinctionentre savoirs formels et savoirs informels estdifficile. Il estpréfé-

rabledeparlerplutôtdesacquisd’apprentissagesformelsetinformels.Eneffet,

chaque individu peut acquérir consciemment des savoirs, savoir-faire et

compétencesdansdescontextesformelsd’enseignementnotammentpourexer-

cerunmétier;maisilestpossibled’acquérirquotidiennementd’autressavoirs

pouvant être également utiles, soit intentionnellement, soit de manière infor-

melle.CettedichotomieaéténotammentdéveloppéeparJeffreyConklin(1997)

dans le cadre de l’organisation des entreprises pour capitaliser et diffuser les

connaissances. Conklinafaitainsiremarquerquelesentreprisesontdumalàgé-

rerleursconnaissances.Ellesseconcentrenttropsouventsurlesproduitsdedif-

férents travauxdiffusés (documents, rapports) et nonpas sur le processuspar

lequelcestravauxontétéréalisés,cequinefavorisepaslesusagescréatifsdes

personnelsdecesentreprises.«Afindecomblerlalacuned’unemémoirepauvre

theknowledgewillbeusedinordertostoreit.Thismeansthatwecaneasilygetrelevantknowledgeintooursystembutthatconsiderableeffortmayhavetobeexpendedwhenitcomestimetoconvertthisknowledgetobehavior».

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encontexte,l’auteurpréconisedemémorisertoutcequipeutconstituerlecon-

texteetl’arrière-plandesartefacts187».

JeffreyConklin188(1997,p.6),adécritcettedichotomiedessavoirsformelsetinformels

ainsi:«Lesavoirformelcorrespondauxcontenusdeslivres,manuelsetdiversouvragesdeformation.C’est le produit de base du travailleur intellectuel, qui se retrouve sous forme de rapports, delivresblancs,deplans,defeuillesdecalcul,deconcepts,denotes.Parroutineetparfacilité, lesinstitutionssesontemparéesdecetteconceptionformelledusavoir;etce,particulièrementpouruneorganisationoptimaledelamémoiredecesinstitutions.Cependant,ilexisteunautretypedesavoirquiestdéveloppéetutiliséenvuedecréerdesconclusionsformelles.Eneffet,silessavoirsformels sont au premier plan, les savoirs informels constituent l’arrière-plan. Ces derniers in-cluentnotammentdesidées,desfaits,deshypothèses,dessignifications,desinterrogations,desdécisions,desconjectures,deshistoiresetdespointsdevue.Cessavoirsinformelssontaussiim-portantspourlaréalisationdetâchedutravailleurintellectuelquelessavoirsformels,maissontpluséphémèresettransitoires.Cesontdessavoirs‘sauvages’qu’ilestdifficiledecaptureretgar-der».

RevenonsàladichotomiedePolanyi:savoirsexplicitesetsavoirsimplicites.Est-ilpos-

sibled’authentifierdessavoirsexplicites? Ilnousestdifficilederépondreaffirmative-

ment à cette interrogation. Cependant, j’aimerais vous faire part de deux expériences

dontunepersonnelle, toutes lesdeuxrelatéesci-dessousetdestinéesàenrichirnotre

discussion.

Ily25ans,dansuncontextede travail typiquementaméricain, JulianOrraétudié les

pratiquesindividuellesdesréparateursdephotocopieursRankXerox.Cesderniersutili-

saientdavantage les informationsglanéesaucoursderéunionscollectives informelles

plutôtqueseréférerauxdocumentsofficiels lorsqu’ilssedéplaçaientpourunepanne.

Secontenteruniquementd’une information formaliséedansdesmanuelspouvaitdes-

servir laqualitéd’unserviceaprès-vente.C’estcequ’avaitdémontréOrrdanslecadre

187ClaudeParaponaris,GildaSimoni.Gestiondesconnaissancesdesfirmesglobales:entrepratiquesdecodificationetpratiquesdediffusion.DocumentdetravailLEST.29p.2004.<halshs-00085986>188Notretraductionde:«Formalknowledgeisthestuffofbooks,manuals,documents,andtrainingcourses.Itistheprimaryworkproductof theknowledgeworker, in the formofreports,whitepapers,plans,spreadsheets,designs,memos,etc.Knowledgeorganizationseasilyandroutinelycaptureformalknowledge;indeed,theyrelyonit—withoutmuchsuccess—astheirorganizationalmemory.Butthereisanotherkindofknowledgeaswell. It istheknowledgethat is created and used in the process of creating the formal results. If formal knowledge is the foreground, thisknowledge is thebackground. It includes ideas, facts,assumptions,meanings,questions,decisions,guesses, stories,andpointsof view. It is as important in theworkof theknowledgeworker as formalknowledge is, but it ismoreephemeralandtransitory.Thiskindofknowledgeis“wild”—itishardtocaptureandtokeep».Conklin(1997,p.6).

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d’untravailderechercheenanthropologie.Relatéepar JohnBrownetPaulDuguid189,

cetteexpérienceamontréquedessavoirsnonformalisésendehorsdesdocumentations

pouvaientnettementaméliorerlescompétencesprofessionnellesdecestechniciens.

Laquestionsur lesoriginesdessavoirsavaitétéexposéeen1990parOrr lorsdeson

récitd’expériencecitéci-dessus.Ils’agissaitd’unprojetderechercheenanthropologie.

Cechercheurs’étaitalorsintéresséauxtechnicienschargésdelamaintenancedespho-

tocopieursd’unemarqueaméricaine.Officiellement,lestechniciens,quitravaillaientde

façonsolitaire,suivaientàlalettrelesdifférentesdocumentationsmisesàleurdisposi-

tionpour réparer lapanne.Dans la réalité, les techniciensse référaient souventàdes

savoirsnonformalisésdanslesdocumentationspoureffectuercesréparations.Cessa-

voirsrésultaientdediscussionsinformellesetd’échangesd’informationparlestechni-

ciens lorsde rencontres improviséesnotamment autourd’un café. Cette collaboration

nonprogramméeaboutissaitàunpartagedeconnaissancesetpratiqueafinderemédier

àcesdysfonctionnements.Orradémontréainsiqu’unmétierenapparenceplutôtindi-

viduel peut s’exercer dans la réalité de façon collective.190Ces savoirs utilisés par les

réparateurssont-ilsdel’ordredu«nonformel»oude«l’informel»?Touslesdeuxont

étéacquisendehorsdesnormesformellesqu’ellessoientdudomaineéducatifoupro-

fessionnel.Laconfusionestsifréquentequenouspourrionsnousdemandersicesdeux

formesdesavoirnecorrespondentqu’àunetuniquesavoirdetypenonformel(UNES-

CO,OCDE,DéclarationdeLisbonne).Pournotrepart,nousdésironsgardercettesubdi-

visiondessavoirsentrois types,ennousrapprochantdesdéfinitionsde l’OCDE.Nous

considéronslessavoirsnonformelscommedesacquisitionsréaliséesdanslecadrede

nosétudesoudenotrevieprofessionnelle,endehorsdesenseignementsoudesrègles

d’usages formalisées.C’était lecasdenotreexpériencesur l’apnéedusommeilrelatée 189BROWNJ.S.,DUGUIDP.(1991).Organizationallearningandcommunities-of-practice.Towardaunifiedviewofworking,learning,andinnovation.p.41190 Dansunautrecontexted’apprentissage,nousrelatonscetteexpérience:Ils’agitd’unediscussionàbâtonsrom-puslorsdelaréunionfestivedefindestagedansmoncabinetmédical.Cetéchangeinteractifavecmesdeuxinternesenmédecinegénéraledontl’uneétaitaccompagnéedesonami,lui-mêmeInterneenneurologie,n’étaitenaucuncasprévu.Nousdiscutionsàproposd’unproblèmedefatiguechezunenfantdetroisansquenousavonschacunvuenconsultation,etquis’endormaittouteslesaprès-midipourunesiestedeplusdetroisheures(duréeanormale).Tousles examens complémentaires prescrits dans le cadre d’une asthénie étaient revenus normaux. C’est alors quel’interneenneurologienousademandésinousavionspenséausyndromed’apnéedusommeil.Aucunedemes in-ternesetmoi-mêmen’étionsaucourantdelapossibilitéd’unteldiagnosticàcetâgesiprécoce,diagnosticquis’estrévélécorrectpar lasuite.C’estunnouveausavoir,acquisdansun lieude formation,en l’absencede formalisationd’uncontenuprévudeformationoud’unprogrammed’enseignement.Acquisdemanièrenonformelle,cesavoirapuêtreintégréparlasuiteànossavoirsmédicauxpersonnels.LesconnaissancesformaliséesdansleslivresdemédecineetlesrecommandationsdelaHauteAutoritédeSantésontloindeconstituerlatotalitédenosconnaissancesmédi-calespratiques!

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danslanote187quiaffectaitl’enfantde3ans.Ilestplusraisonnablededéfinircessa-

voirsnonformelsennousréférantaucadrepédagogiqueoùilsontétéacquis;etnon

pasparexclusioncommecelaest souvent retrouvédans la littérature :ni savoirs for-

melsnisavoirsinformels.Parcontre,ilexistecertainementuncontinuumdecessavoirs

commecelaestdécritdansleschémasuivant:

Figure 8 : Les glissements des savoirs formels vers les savoirs informels et vice-versa Toutêtrehumainpossèdeunbagagedeconnaissancesthéoriquesetpratiquesquipeut

êtredifférentd’un individuà l’autre.Leproblèmeestdesavoircequenousconnaissons

nous-mêmes.Nousavonsoptépourunetechniquesimplequiconsisteàmettreencom-

mundesrépertoiresdeconnaissancedechaquemembredugroupe;danslebutdere-

chercherunesynergiedespropositionsfaitesparlesparticipantsafindeproduireune

réponsecommune,acceptablepourtousetadaptéeàlasituation.Commentdifférencier

les données recueillies: s’agit-il des données formelles ou non formelles? Cléopâtre

Montandon(2002),BrougèreetBézille(2007),JayCross(2007)s’opposentàcetteno-

tiondefrontièreentrecesdeuxtypesdesavoirsetproposentuncontinuumdessavoirs

quenousqualifionsdeprotéiformes.

Ces cinq dichotomies du savoir que nous venons de décrire doivent être considérées

dans leurdualitécommecomplémentaires,maisnonsubstituables. (BrownetDuguid,

Ryle, Delvaux, 2007). BernardDelvaux précise que ces savoirs sont complémentaires,

cariln’existepasdesavoirexplicitesanssavoirtacite.Maislesavoirexplicite«nepeut

être transféréetapprisquesi ledestinataireou l’apprenantdisposedecertainscodes

implicites.[Cessavoirssont]nonsubstituables,parcequ’ilyadeslimitesàlacodifica-

tion».

Deux courants d’apprentissage peuvent être ainsi particularisés, l’un préférablement

formeletl’autreplutôtinformel.LepremiercourantcorrespondselonDelvaux(2007,p.

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260)àunapprentissageefficientafinde«traiter,interpréteretaméliorerdesreprésen-

tationsdelaréalité».Lesavoirestuneressourceuniversellequenousintégronsgrâceà

nosexpériencessensorielles.Danslesecondcourant, lesavoirestunprocessusdeso-

cialisation:

«L’apprentissage est vu comme un processus de construction sociale des significations etcroyancespartagées,oùlecontextesocial,culturel,lesactionsdegroupeetlaparticipationjouentunrôleessentiel.L’apprentissageprovientdès lorsdes interactionssociales,et il fautdece faits’intéresseràlamanièredontlesindividusinterprètentoudonnentsensàleursexpériences.Lesindividussontdesêtressociauxquiconstruisentensembleunecompréhensiondecequ’ilyaau-tourd’euxetquiapprennentàpartirdesinteractionssocialesquisestructurentdansunsystèmesocial».(Delvaux,2007,p.260).

SuivantlaformulecélèbredeMichaelPolanyi(1966),«noussavonsplusdechosesque

cequenouspouvonsdire»,apprendreinconsciemmentestcertainementpossiblelors-

qu’on aborde l’apprentissage informel. Grâce à ce dernier, nous pouvons construire

consciemmentetinconsciemmentunsystèmedevaleursetd’attitudeàtoutmoment,à

l’extérieur des organismes éducatifs officiels ou non officiels, tout en pratiquant une

autreactivité.Cetapprentissageditinformelestauxantipodesdel’apprentissageformel,

systèmeéducatifhiérarchique,dépendantdesfinalitésdel’éducationpropreàunorga-

nisme,unenation.Danscederniercas, l’activitéprogramméeseréalised’unemanière

totalementconsciente.Maisentrelesdeux,ilestdifficilededémontrerquel’acquisition

deconnaissancespuisseseréaliserdemanièreàlafoisconscienteetinconsciente.Ar-

thurReber (1989, p. 219), décrit un lien possible entre apprentissage implicite et sa-

voirstacites:«L’apprentissageimpliciteproduitunebaseconceptuelledeconnaissancestacitesquidépenddel’environnement où cet apprentissage se déroule. Ces connaissances sont acquises inconsciem-ment,indépendammentdeseffortspourapprendre.Cesconnaissancespeuventêtreutiliséesim-plicitement pour résoudre des problèmes et prendre des décisions correctes dans d’autres cir-constancesquecelledel’apprentissage191».

Uneconnaissancetacitecorrespondàuneactionbiendélimitée:savoircommentfaire.

Ce savoir qui conditionne nos faits et nos gestes, souvent inconsciemment, peut être

qualifié de procédural. (Mais un savoir procédural n’est pas obligatoirement tacite!).

Chaquesavoirtacitepossèdeunsensquipeutêtredifférentd’unindividuàl’autre,selon

191«Implicitlearningproducesatacitknowledgebasethatisabstractandrepresentativeofthestructureoftheenvi-ronment;suchknowledgeisoptimallyacquiredindependentlyofconsciouseffortstolearn;anditcanbeusedimplic-itlytosolveproblemsandmakeaccuratedecisionsaboutnovelstimuluscircumstances»,[notretraduction].

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safaçondepercevoirlemonde.Lessavoirstacitessontdesélémentsessentielsàpren-

dre en comptepour réussir une tâcheou faire face à une situation complexe. Ils sont

acquis progressivement, au décours de nombreuses expérimentations. Dans un livre,

publié en1993 "TheReflectivePractitioner.HowProfessionalThink inAction ", Donald

Schön distinguait, lorsqu’il s’agit de résoudre une tâche complexe, deux catégories de

savoirs : les connaissances (recouvrant les savoirs, habilités et attitudes), nécessaires

afindecomprendrelasituationpuislarésoudre;etd’autrepart,dessavoirsinféréspar

l’action:commentlesprofessionnelspensent-ilsdansl’action?Cesontdessavoirsré-

sultantd’une réflexiondans l’actionappelésparPhilippePerrenoud (2001,p.42)des

savoirsd’expérience.Seloncetauteur,cessavoirs:

«résultentde laréflexionsur l’actionquisurvientdans l’après-coup.L’expérience,analysée,estenquelquesortecapitaliséeetréinvestiedansdenouveauxépisodes».

Cessavoirsinférésàpartirdel’actionderésolutiondelatâche,quipeuventêtreexplici-

tésetverbalisables,nesont-ilspasenréalitédessavoirscachés,dessavoirsdontladis-

ponibilité serait quasi-automatique ? Toute recherche d’hypothèse diagnostique plau-

siblepeutêtrebaséesurdeuxprocessusderaisonnement:

• Un raisonnement structuré, précis, intelligent, générant rapidement par déduc-

tiond’unnombrelimitéd’hypothèsesquiserontparlasuitevérifiéesuneàune.

C’est un raisonnement conscient, dit hypothético-déductif, et qui part des don-

néesd’unesituationcomplexepourobtenirunesolutionplausible.

• Unraisonnementintuitif,nonanalytique,utilisantinconsciemmentdesinforma-

tions et des schèmes d’action rencontrés auparavant lors de la résolution

d’autressituationsproblèmespuisenregistrésdanslamémoiredesindividus.

Cesdeuxprocessusnes’excluentpas: ilssontutilisésdemanièredifférenteselonque

l’individusoitunnoviceouunexpert.Àpartirdesdonnéesdelasituation,lenovicere-

chercheavanttoutàconfirmerunepremièreconjectureparunraisonnementhypothé-

tico-déductif.L’expertvacombinerlarecherched’unesimilaritéparunevueglobalede

lasituation,avecunprocessusanalytiquederaisonnementafindeconfirmerunecon-

jecture.

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Cettethéoriedudoubleprocessus,selonPelacciaetal(2011),

«metégalementenévidence le faitque,àdesdegrésdivers, l'intuitionest constamment impli-quéedansleraisonnement.C'estunecaractéristiquetrèsimportante,puisquedepuisdessiècles,l’intuitionprofessionnelleaétéconsidéréeenmédecinecommeunecompétence‘mystérieuse’quin'estpasaccessibleàlaconscienceetnedevraitpasl'emportersurlejugementrationneletscien-tifique».

SeymourEpstein et al (1992, p. 320)distingue ainsi deux autresprocessusde raison-

nementpossibles : unmode de raisonnement rationnel et unmode de raisonnement

expérientiel.

• Lemoderationnelestlogique,basésuruneanalyseobjectivedecequiestcon-

cret, conscient (cequi est réellement visible) et orientéune appréciation réflé-

chiedesévénements constatés.L’activitéde raisonnementest consciente.Dans

cemode,ilestpossibledechangerrapidementd’avisetdeproposerd’autreshy-

pothèses selon une conception logique, et qui seront toujours basées sur des

preuvesconcrètes.C’estlabaseduraisonnementbiomédical.

• Lemodeexpérientielestbasésur leressentiperçu,danslecadred’unenviron-

nementémotifprégnant.Cemodetientcomptedereprésentationsinconscientes

élaboréesrégulièrementavecdesexpériencesvécuesauparavant.Lechangement

d’avis est plus lent, et intervient surtout quand l’expérience actuelle est réelle-

ment intenseousurvientà lasuited’expériences itératives.Cemodederaison-

nementestaxédavantagesurlebiopsychosocialetdoitêtreréalisédansuncon-

texteémotionneletuneambiancepositive.

Toutesrésolutionsdesituationscliniques,qu’ellessoientsimplesoucomplexes,nécessi-

tentunprocessusmental imposé : laperception,quiest indispensableà l’êtrehumain

pourintégrerlesdifférentesinformationsutilesàlarésolution.Cetteperceptionestas-

suréegrâceàlapossibilitéd’utiliserindifféremmentnoscinqsensphysiologiques192.Ce

stadedeperceptionestprésentdans les trois catégoriesd’apprentissage: formel,non

formeletinformel.Ilexistecependantunsixièmesensquiestrencontréplusfréquem-

192Perception visuelle (observer le malade dans ses déplacements, dans sa façon de s’asseoir, de communiquer),perception auditive à l’écoute des plaintes du patient, des réponses à vos questions, perception olfactive (haleine,odeur des pieds etmycoses, etc.), perception tactile (palpation, recherche de point douloureux, etc.) et perceptiongustativepeuutiliséeactuellement(maisavantle18esiècle,lediabèteétaitdiagnostiquéquandlesurinesavaientle«goutdumiel»

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192

mentchez lesmédecinsexpérimentés.Cesensest l’intuition.Elleaétédécritenotam-

mentparlepsychiatresuisseCarlGustavJung.Ellepermetàl’êtrehumaindepercevoir

desinformationsenutilisantlavoiedel’inconscient.SelonJung,l’intuitionsertàglaner

del’informationsansutilisernoscinqsensoupasserparleraisonnementetlaréflexion.

Jung(1987)écrit:

«Entantquefonctionirrationnelle,l’intuitionn’estpasfacileàdéfinir(…)elleparaîtcheminerlelongdemultiplesvoies,etpermet,parsonjaillissement,devoir,pourainsidire ‘cequisepasseau-delàd’untournant.Jem’entienslà,etavouenepassavoiraufondcommentl’intuitionopère;jenesaispascequis’estpassélorsqu’unhommesaittoutàcoupunechose,que,pardéfinition,ilnedevraitpas savoir ; jene saispas comment il estparvenuà cette connaissance,mais je saisqu’elleestréelleetpeutservirdebaseàsonaction».

Le raisonnement intuitif joue un rôle important dans la démarche diagnostique et la

prisededécision.L'intuitionestlacapacitéderésoudreunesituationquines'estjamais

posée, sans discussion préalable de conjectures. C’est une conception irréfléchie qui

permetauxêtreshumainsdecomprendreunproblème,depressentirunehypothèseen

faisant abstractiondes étapesmentales explicites du raisonnement et de la démarche

réflexive.Lesstructuresmentalesquioriententnosconduitesdanslarésolutiondepro-

blème n’ont pas fait l'objet d'une prise de conscience explicite. L’intuition est un des

fondements de l’apprentissage implicite (Perruchet, 1988, p. 97). Intuition et insight

sont parfois considérés comme équivalents; il existe cependant une nette différence.

L’insight estdéfiniparunecompréhensionclaire, inattendueetconsciented’unesolu-

tionàunproblème.Lephénomèned’insightintervientlorsquel’individuàl’intentionde

résoudreunproblème, cequin’estpas le cas avec l’intuitionqui sembleune réaction

spontanée. Il a été décrit par les psychologues de la gestalt. Ces derniers ont défini

l'intuitioncommeunerestructurationduchampperceptif.L’intuitionestdifférenteéga-

lementdel’instinctquipermetàtoutindividuderéagirrapidementàuneagression.Les

instincts sont innés et contrairement à l’intuition, ils ne nécessitent aucun apprentis-

sage.L’intuitionestdoncunecomposantenotabledel’apprentissageimplicite.

Ainsi, dans le second cycle, les étudiants enmédecine apprennent à raisonner sur les

savoirsquisontdispensésàlaFaculté(apprentissageformel).Lesexercicesderaison-

nement proposés lors des enseignements dirigés ont pour objectif d’apprendre à rai-

sonnersurdessavoirsformalisésselonlesrèglesdelalogiquedéductive.Lesétudiants

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partentdedifférentsélémentsà leurdispositionourecherchésafind’opérerunesyn-

thèse grâce au traitementascendant des données de type «bottomup». C’est unmo-

mentfortdel’apprentissageformel.Larésolutiondescascliniquescomplexesestgéné-

ralementbaséesurcemodederaisonnementchezlesétudiantsenquientrentenpre-

mièreannéed’Internat. Les étudiantsont eneffet appris à raisonnerde façon scienti-

fiqueetstructurée,grâceàunapprentissageexplicite.

À l’inverse,cesétudiantspourrontacquérir toutau longde leurvie,parunapprentis-

sage implicite,dessavoirsquiserontsusceptiblesde lesaiderà raisonnerdemanière

intuitive.Cetapprentissageimplicite,inconscient,seproduitleplussouventàl’insude

l’apprenant.Dansl’apprentissageexplicite,lesujetapprenantrechercheàaméliorersa

capacité à mémoriser des savoirs et à les extraire en cas de besoin. À l’opposé,

l’apprentissageimpliciteestattachéàunindividuquifaitappelàdesmécanismesmen-

taux personnels afin de créer des liens, de proposer des explications, à identifier des

schèmesderésolutionqu’ilpeutmettreenœuvrenotammentfaceàunesituationcom-

plexe.Nousconstatonsque les fonctionsde lamémoire(mémorisation,distributionet

extractiondes informations), qui sont àbasede l’apprentissageexplicite, semblent en

grandepartieinefficaceschezlespatientsamnésiques.Cependant,cesmêmesfonctions

sont encore en réalité bien présentes chez ces patients et peuvent être utilisées pour

améliorerleurapprentissageimplicite.(LarrySquireetMaryFrambach,1990).

2.6. Approfondissement sur les apprentissages «formel», «informel»,«nonformel»

L’apprentissageinformelestbeaucoupplusdiscretqueleformel.Ilpeutseproduireinten-tionnellementouinvolontairement.Iln’yapasdecontrôledeprésence,puisqu’aucunensei-gnementofficieln’estprévu.Personnen’évalueleniveaud’apprentissageatteint,c’estlaré-ussitesocioprofessionnellequimesurel’efficacité del’apprentissage.Iln’yapasderemisedediplôme,carcetyped’apprentissageestsansfin.

JayCross193(2006,InformalLearning,p16).

193«Informal learningoftenfliesundertheofficialradar. Itcanhappenintentionallyor inadvertently.Noonetakesattendance, for therearenoclasses.Nooneassignsgrades, forsuccess in lifeandwork is themeasureof itseffec-tiveness.Noonegraduates,becauselearningneverends»,[notretraduction].

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Pendant de nombreux siècles, une seule forme d’apprentissage dite formelle était ad-

miseparlesautoritéséducatives;àcetyped’apprentissageétaientassociéesdesforma-

tionsquiétaientdispenséesdansuncadreofficieletreconnu,de lamaternelle jusqu'à

l'enseignementsupérieur,etréservéleplussouventàuneélite.Progressivement,cette

activité éducative s’est élargie à une plus grande frange de la population à partir du

vingtièmesiècle.Ceteffetdemassification,dûàunedémocratisationdel’accèsaupri-

maire et secondaire, est devenu réellement sérieux avec le baby-boom qui a eu lieu

aprèslaSecondeGuerremondiale.Lamassificationafaitperdrerapidementauxsavoirs

traditionnels, c’est-à-dire formels, leurprimautédans l’acquisitiondescompétences. Il

est vrai que les institutions scolaires proposaient un enseignement qui s’écartait pro-

gressivementdelaréalité.Lefonctionnementdecesinstitutionsdevenaitinadaptépar

lefaitdesmutationsdelapopulation,beaucoupplusmobileetdemultiplesorigines.

Lesparadigmesd’apprentissagesnonformelsetinformelsdériventenpartied’uneno-

tionancienne,celledel’apprentissageincidentdécritpourlapremièrefoisen1935par

WilliamLepley.Cetauteuradéfinicetyped’apprentissageparrapportàl’apprentissage

volontaire,paruneabsencedemotivationspécifiquedel’apprenantpourapprendre194.

Cettedéfinitionde l’apprentissage incidentaétépréciséedenouveauen1942parMc

Geogh195

«commeunapprentissagequia lieusansconsigne formellede lapartde l’expérimentateur,etsansattitudeàapprendrenimotifspécifiqueapparentdelapartdusujet».

SelonMurrayAborn196(1953), l’absenced’attitudepourapprendre limiterait leseffets

de l’apprentissage incident. L’apprentissage incident peut apporter des informations

utilesàl’apprenantpouraméliorersescompétences.SaltzmanetAtkinson197(1954)ont

démontréquece typed’apprentissageétaitcependantmoinsefficacequ’unapprentis-

sagevolontaire,notammentlorsquecesdeuxformessontréaliséespendantunecourte

durée. Cependant, l’apprentissage incident peut compléter les connaissances acquises

lorsd’unepériodedonnée,puisqu’ilpeutavoir lieutoutaulongdelaviedel’individu.

194LEPLEYW.M(1935).Agradientinincidentallearning.J.ofExperimentalPsychology,18,pp.195-201.195McGEOCHJohnAlexander(1952).Psychologyofthehumanlearning.Longmans,Green,2eed.,596p.196ABORN Murray (1953). The influence of exprimentally induced failure on the retention of material acquiredthroughsetandincidentallearning.JournalofExperimentalPsychology,45,pp.225-231.197SALTZMANL.&ATKINSONR.(1954).Comparisonsofincidentalantintentionallearningafterdifferentnumbersofstimuluspresentations.Amer.J.Psychol.,67,pp.521-524.

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Pourd’autresauteurs(Postman&Senders198,1946),ilfautoublierladéfinitionnégative

de l’apprentissage incident (pas de consigne nimotivation ni attitude). C’est sur cette

fonctionmentaledel’attitudequ’ildéveloppeleurhypothèse:«l’attitudeestunétatde

préparation à répondre sélectivement à certains stimuli». Bacher et Flores (1955, p.

437)précisentque«l’attitudeestundesdéterminantsdel’apprentissage,maisellepeut

être aussi la conséquence d’un apprentissage». Les attitudes des apprenants peuvent

êtreexplicitessuiteàuneconsignedonnée,oubienimplicitesquandellesrésultentdela

généralisation d’une attitude à apprendre. Donc l’attitude est présente dans

l’apprentissageincident,mêmes’iln’yapasdeconsignesaprioripourapprendre.Tou-

joursselonPostmanetSanders, certainesattitudes incontrôléespeuventêtre la cause

del’apprentissageetl’apprentissageneseraitpeut-êtrepassiincidentquecela.

Dansunrapportpubliéen1968(lacrisemondialedel’éducation)àlasuitedelaconfé-

rence deWilliamsburg199, Philippe Coombs avait constaté que les systèmes éducatifs,

loind’évolueravecleprogrès,s’enfonçaientdansunrigorismeprofondémenttradition-

nelavecunsystèmeprofessoraletadministratifbeaucouptropattachéàleursprivilèges.

Les nombreux spécialistes en éducation qui s’étaient réunis à Williamsburg, avaient

constatéuneinégalitédeplusenpluscrianteentrelesbesoinsenéducationetlespossi-

bilitésd’apprentissageproposéesparlesinstitutionsscolairesetuniversitaires.Lesmo-

dèleséducatifsantérieursétanttoujoursprédominants, lesinnovationsn’étaientguère

encouragéesni par lesÉtats, ni les corpsprofessoraux et administratifs.Denouveaux

modèles éducatifs, plus globaux, systémiques, vont permettre l’émergence, au côté de

l’apprentissage traditionnelen institution (apprentissage formel),denouvelles formes

d’apprentissageditesnonformellesetinformelles.

Dans les années 70, L’UNESCO comme l’OCDE considèrent l’éducation commeun sys-

tèmeglobalquidoitprendreencompteaussibienlesparentsqueleursenfants.«L’éducationdesadultesrevêtune importanceparticulièredans lamesureoùelleconstitueunfacteur déterminant dans la réussite scolaire des non-adultes : on ne peut, en effet, dissocierl’enseignementprimairedesenfantsduniveauéducatifdesparents:cen’estpasdansunmilieuanalphabètequepourrontêtrepréparéeslesgénérationsnouvelles...Ilimportedoncdenejamais

198SALTZMANL.&ATKINSONR.(1954).Op.cité199Conférenceinternationalesurlacrisemondialedel'éducation,tenueàWilliamsburg(Virginie),du5au9octobre1967.

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opposerl’éducationdesadultesàl’éducationdesenfantsetdesjeunes: leconceptd’uneéduca-tionglobale.(RapportFaure,UNESCO,1972,p.232)200.

Laplanificationd’undéveloppementcoordonnédel’éducationscolaireetextrascolaire

doitêtreintégréedansuncontexted’éducationpermanente.Dansnospaysoccidentaux,

lesystèmescolaireserévèledeplusenplusinadaptésurleplanquantitatifetqualitatif

auxbesoinssocio-économiqueset socioculturels.Caruncontenuambitieuxdesavoirs

académiquesn’amènerapasobligatoirement l’apprenantàvivreavecplénitudedeson

travail.C’estlaréalitédécevantedesrésultatsobtenusdanslecadredesinstitutions,son

insuffisancepourrépondreauxnouvellesdemandessocio-économiquesquivontame-

ner les États à prendre en considération des apports extrascolaires sous forme

d’apprentissagesnonformelsetinformels.

Chacund’entrenouspeutapprendresanss’enrendrecompte,endehorsducadresco-

laire:nousleconstatonsquotidiennement,lechampdenosconnaissancesthéoriqueset

pratiquesestbeaucoupplusvasteques’ilavaitétélimitéauxseulsenseignementsinsti-

tutionnels.Nousdisposonstousd’opportunitéspourapprendregrâceànotreentourage,

qu’il soit familial ouprofessionnel. Et dans ce cas, le champdes savoirs théoriques et

pratiquesn’est plus limité par les institutions officielles.Deux formesd’apprentissage

non institutionnel, longtemps ignorées,mais qui existaient bien avant leurs prises en

compte par les organismes internationaux, interviennent dans ce processus

d’acquisitiondes savoirs. Il s’agitdesapprentissages informeletnon formel.Cesdeux

typesd’apprentissagessejuxtaposentetcomplètentl’apprentissageformel.

2.6.1.L’apprentissageformel L’apprentissage formel est un processus organisé à visée éducative, centrée sur

l’apprenantetsaparticipationvolontaireàcesactivités.Ilviseàacquérirdescapacités

préparant à une vie socioprofessionnelle active, dansune approche collective intéres-

santaussibienl’individuquelegroupe.L’apprentissageformelcorrespondauxforma-

tions dispensées par le système éducatif, dans un cadre officiel, organisé et structuré

commedesétablissementsd'enseignement,deslieuxdeformationoudestage.Lesob-

200UNESCO(1971/72).Commissioninternationalesurledéveloppementdel’éducation.

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jectifs,moyensettechniquespédagogiques,duréeetressourcessontexplicitementdé-

crites.L’apprentissageformelestbasésurunmodeplanifiéquinécessitedelapartde

l’apprenant un effort d’attention axé sur les contenus à apprendre. Ce type

d’apprentissageestdispensédansuncontexteorganiséetstructuré,généralementsous

formedecoursmagistrauxoud’enseignementdirigés.Ilrépondàunobjectifclairetà

une intentionbiendéterminéede lapartde l’apprenant :acquérirdessavoirs, savoir-

faire et/ou compétencesdont l’acquisition est généralement contrôléeparun examen

ouunconcours.C’estunapprentissageintentionneldelapartdel'apprenantavecpour

objectif une certification. Dans l’enseignement supérieur, cette forme d’apprentissage

estréservéeàunepartieseulementde lapopulation.Sielleest justifiéepouracquérir

dessavoirsetdescompétences,elleestmarquéecommemécanismedesélection(éva-

luation normative des étudiants pour accéder en année supérieure). Cette forme

d’apprentissageformelestdeplusenplusremiseencause,carelleestcenséeaboutirà

ladélivranced’undiplômeconsidéréparlapopulationcommeobligatoirepouraccéder

àunemploi,malheureusementtropsouventhypothétiqueencedébutdu21esiècle.Ce

diplômeestcependanttoujoursnécessairepourl’exercicedenombreusesprofessions.

2.6.2.L’apprentissagenonformel Leconceptd’éducationnonformelles’estdéveloppéàpartirde1968lorsdelaremise

enquestiondesapprentissagesdanslemondeoccidentaletlespaysenvoiededévelop-

pement.Pourlesétudiantsetlesenseignantsdecetteépoque,quiserévoltaientcontre

lesmodèlesd’apprentissagequ’ilsestimaienttotalementdépassés,l’éducationnonfor-

melle est un remède efficace, une panacée. Elle se situe entre l’éducation formelle et

l’éducation informelle, mais les frontières entre ces trois entités ne sont pas hermé-

tiques.

L’UNESCO(1997,p.47)aainsidécritl’éducationnonformelleparrapportàl’éducation

formellecomme:«Touteactivitééducativeorganiséeetdurablequinecorrespondpasexactementàladéfinitiondel'enseignementformel)».

En 1998, le Thésaurus européen de l’éducation donne un nouvel éclairage: il s’agit

«d’activités ou de programmes organisés en dehors du système scolaire établi, mais

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dirigésnéanmoinsversdesobjectifsprécisd’éducation201».Leconceptd’éducationnon

formelle a été ensuite redéfini par les dirigeants européens au Portugal en 2000. Un

cadred’actionsàréaliserdansles10ansaétépubliésousl’appellationdeStratégiede

Lisbonne.Ils’agitdedonnertouslesmoyenspourdévelopperune:

«Économiedelaconnaissancelapluscompétitiveetlaplusdynamiquedumonded'icià2010,ca-pabled'unecroissanceéconomiquedurableaccompagnéed'uneaméliorationquantitativeetquali-tativedel'emploietd'uneplusgrandecohésionsociale,danslerespectdel'environnement».

L’apprentissagenonformelestmarquéégalementparuncontenustructuréetorganisé,

maislesobjectifsd’apprentissagessontautodéterminésparl’apprenant;ilsnesontpas

définisparleprogrammed’étude.Cetapprentissagenonformelestleplussouventin-

tentionnel,parfoisfortuit,etn’apasvocationnormalementàêtrecontrôlé.Coombsetal

(1973)avaientdéfinil’apprentissagenonformelcommeune«activitééducativeorgani-

sée,structuréeendehorsdusystèmed’éducationformel»,instaurépourungroupede

personnes identifiables, activité destinée à atteindre un ensemble d’objectifs

d’instructionspécifiques.Cetyped’apprentissagesedérouleleplussouventsurunlieu

misenplacepar lesorganismesreconnuspar laprofession(commepour laFMC),sur

les lieux de l’activité professionnelle (stages par exemple) ou d’enseignement institu-

tionnel(Université...).Cettestratégieinsistesurlerenforcementdelasociétédelacon-

naissanceavecnotamment:

1. la promotion de la recherche et du développement et la généralisation de l'usage destechnologiesdel'informationetdelacommunication;

2. uneélévationduniveaugénérald'étudespourpermettreàchacundefairefaceauxmuta-tionsdelasociété;

3. ledéveloppementd'opportunitésd'apprentissage.

Certes, l’apprentissage de nouvelles connaissances ou l’amélioration des acquis pour

tousrépondàunobjectiféconomique:l’éducationtoutaulongdelaviepromueparles

dirigeantseuropéensapourobjectifdepermettre:

«Àchacund'améliorersesconnaissancesetcompétencesenlesadaptantauxévolutionsdelaso-ciété,etsurlemarchédutravail,enœuvrantàl'améliorationcontinuedel'employabilitédecha-cunselonlesbesoinsdumarchédutravail».

Lepacteeuropéende2005pourlajeunessedécouledirectementdelastratégiedeLis-

201RapportéparPoizatDenis.2003,p.35.

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bonne.Ilapourbut:

«D’améliorerl'instruction,laformation,lamobilité,l'insertionprofessionnelleetl'inclusionsocialedesjeuneseuropéensenincluantdesmesurespourl'éducation,laformation,lamobilitéetlapour-suited'uneréflexionsurlavalidationdel'apprentissagenonformel».

Àpartirdecetteréflexionsurlavalidationdesacquisd’apprentissagenonformels,des

outilsderéférencesontétédéveloppés,afind’identifieretfairevaloirlescompétences

acquisesparcesystème.Neufcompétencesclefs,transversales,ontétédéfiniesnotam-

mentencommunicationenlanguematernelleetenlangueétrangère,descompétences

debaseensciencesettechnologie,etdescompétencessurl’apprentissage(apprendreà

apprendre,laprised’initiativeetl’espritd’entreprise).Autotal,l’éducationnonformelle

contribueutilementàlaformationdetous,carelleprendencompteledéveloppement

globaldel'individuet,dansunelargemesure, l'expériencepersonnelledel'apprenant.

L’éducationnonformelleinviteàune:

«Autrefaçond'apprendre»,liéeàdesobjectifsd'intégrationetdeparticipationactivedesappre-nantsenproposantuncadreappropriépourrépondreauxaspirationsindividuellesetauxbesoinspourdévelopperdescompétencescréativesetsociales202».

L’apprentissagenonformelestleplussouventintégrépendantuntempsdéfinidansdes

activitésplanifiéesnonexplicitementdésignéescommeactivitésd'apprentissage203(en

termed'objectifsetderessources) 204.C’estunactevolontairequin’apaspourobjectif

principald’êtreévalué.Cemoded’apprentissageaétémisparticulièrementenévidence

lorsqu’ilyadesinteractionssociales,notammentlorsqu’ils’effectueengroupelorsd’un

apprentissagecoopératif.Ilestbasésurl’expérience,l’actionetlesbesoinsdespartici-

pants.L’apprentissagenonformelestaxésurl’identificationdecompétencesplutôtque

de savoirs et connaissancesbrutes.Accessible à tous lesmembresd’un groupede ré-

flexionoudeformation,ilcomplèteleprocessusd’apprentissageorganiséavecdesob-

jectifséducatifs.Danscecadre,lesapprenantsd’ungrouped’apprentissagepeuventpar

exempleutiliser immédiatementdessavoirsempiriquesobtenuspar leurspropresex-

périences, qu’ils vont essayer de contextualiser en fonction des objectifs et du lieu

202DuBOIS-REYMONDM.(2003).Étudesurlesliensentrel'éducationformelleetnon-formelle;DirectiondelaJeu-nesseetduSport,Strasbourg.203Lanotiond’apprentissagenon-formelestambiguë;elleestdéfinieleplussouventdefaçonnégative:unappren-tissagequin’estpasdispenséparunétablissementd’enseignementoude formation. Ilestcependantstructuré(entermesd’objectifs,detempsouderessources).UnionEuropéenne,2001,p.4).204COOMBSP.H.(1968)WorldEducationalCrisis:asystemsapproach,NewYork:OxfordUniversityPress.

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d’apprentissage.Cessavoirsdevrontcependantêtrejustifiésparuneévaluationréalisée

partouslesmembresdugroupeafinêtreacceptésetintégrésparlesautresapprenants.

Cechoixdemoded’apprentissagecorrespondàunevolontédesapprenantsd’acquérir

davantage de savoirs ou de compétence en échangeant, en effectuant des recherches,

dans un cadre d’autodétermination, notamment dans le cadre d’un groupe de travail.

Touslesparticipantsd’ungroupepeuventainsicontribueractivementauxéchanges.Ce

tempsd’apprentissagen’estpassoumisàunevalidation.Cetteformed’apprentissagese

déroule dans un contexte totalement ouvert en favorisant l’esprit d’initiative et

l’autonomie. L’apprentissage non formel est un processus éducatif susceptible d'être

poursuiviàtoutmoment,contribuantàlapromotiondel’apprenanttoutaulongdesa

viesocialeetprofessionnelle.Pourcetteraison,saplaceestimportantedansleproces-susd’acquisitiondesconnaissances,carilestcomplémentairedel’apprentissageformel

et contribue audéveloppementdes compétences. L’apprentissagenon formel est trop

souventdéfiniparrapportauxautrescatégoriesd’apprentissage:niformel,niinformel.HélèneBezille(2012)rappelleàproposdelaconnotationnégativedunonformel :

«Cettedénomination,etlesconceptionsdelaformationtoutaulongdelaviequ’ellevéhicule,nefont pas l’unanimité et sont l’objet dedébat. La critiqueporte sur la connotationnégatived’unmot,qui,dans la langue française, induitunehiérarchisation impliciteentre formelet informel.Elleporteégalementsurlecontresensinduitparlaformeprivativequisuggèrequel’informelse-raitsansforme.Or, comme lerappellentnombrede travauxderecherches,notammentavec lesapportsde lasociologieetde l’anthropologiede laviequotidienne, lesapprentissagesde laviequotidiennesontsocialementetculturellementorganiséspardesrèglesimplicites,desnormesetdesvaleursaveclesquelleslapersonnenégocieenpermanence».

2.6.3.L’apprentissageinformel

«Le terme apprentissage informel est souvent utilisé pour désigner l’acquisition de connais-sances qui ne sont de nature ni formelle (se produisant dans le cadre du systèmed’enseignementofficiel)ninonformelle(seproduisantdanslecadred’uneformationstructuréeetplanifiée,maishorsdusystèmed’enseignementofficiel)205».Ilyaunevieendehorsetaprèsl’école!Etonyapprendbeaucoupdechoses,parfoispeut-êtreplusqu’àl’école.

PierreR.Dasen(2002,p.112).

205WIHAKCh.,HALLG.(2011).L’apprentissageinformelliéautravail.Centrepourlescompétencesenmilieudutravail,p.6.

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Commepourl’apprentissageformel,lesconditionsinitialesdechaqueapprenant:con-

naissances, capacités intellectuelles, influent sur les apprentissages informels.

L’apprentissage informel est un concept qui a été proposé pour la première fois par

Coombsen1968sousletermed’éducationinformelle:«Personneoupresquenecontestequecesystèmeparallèled’éducationnesoit importantetnemérite davantage d’attention. […] c’est que devant l’ordre relatif et la cohérence caractérisantl’enseignement scolaire, lesactivitéséducativesnonscolaires formentunensembleconfusqu’ilest impossiblededécrire simplementoude soumettre à l’analyse et à l’évaluationquantitativepouruneplanificationméthodique206».

Maisexiste-t-iluneréelleinterdépendanceentrel’apprentissageinformeletleformel?

Coombsaessayéderépondreen1985àcetteinterrogationenproposantdevaliderdes

acquisdel’expérience,àpartird’unenouvelledéfinitiondel’éducationinformelle:

«C’estunprocessusaulongdelavieparlequelchaquepersonneacquiertetaccumuleconnais-sances,capacitésattitudes;desexpériencesquotidiennes…généralementcetteéducationinfor-mellen’estpasorganisée,passystématiséeetmêmequelquefoisnonintentionnelle,jusqu’àpré-sentelleconstitueleplusgrandmorceaudel’apprentissagetotaldurantlavied’unepersonne–mêmepourcelles«hautementscolarisées207.»

Nousamélioronsnos connaissancesounousacquérionsd’autres connaissancesquoti-

diennement,sansnousenrendrecompte,commeaudécoursd’uneconversation,dans

unediscussiondecouloir,etc. Ilexistedenombreusesopportunitésainsid’apprendre,

et dans tous les domaines et pas seulement dans le domaine professionnel. Cemode

d’acquisitiond’informationsglanéesetassimiléespar les individusdans laviede tous

les jours, hors des institutions d’enseignement ou de formation, est appelé apprentis-

sageinformel.Ildécouledesactivitésdelaviequotidienneliéesautravail,àlafamilleou

auxloisirs.Ilpeutêtreintentionnel,maisdanslaplupartdescas,l’apprentissageinfor-

mel est accessoire, non intentionnel et aléatoire. Gilles Brougère et Hélène Bézille

(2007) insistent: seulement une petite partie de nos connaissances proviennent de

notrefréquentationd’établissementsscolaires.

«Il suffiraitde sepencher surnosactivitésquotidiennes, à commencerpar l’usaged’uneouplu-sieurslangues,lesmodalitésderelationauxautres,nosfaçonsderésoudrelesmultiplesproblèmesde la viequotidienne,nos activitésprofessionnelles en constante évolution,pour saisir commenttoutcelaseraitéloignédeceàquoinousavonsétéexposésdurantnotreparcoursscolaire».

206COOMBS,1968,traduitparAbrahamPain,1990,p.126.207COOMBS,ibid.

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Laissonss’exprimerleCanadienAllenTough(2002):«L’éducationinformelleestuneactivitéhumainenormale,jediraismêmetoutàfaitnormale.Maiselleestinvisible,nousnesommespascapablesdediscernernous-mêmescetteéducation.Etc’estlamêmechosepourlesautresapprenants,pourlesenseignantsetainsidesuite.Nousluiconsacrons15heuresenmoyenneparsemaine,maislesujetesttabou,iln’estpasidentifié,ilestensorteigno-réetinvisible208».

WihaketHall(2011,p.6)définissentl’apprentissageinformelcommeunapprentissage

résultant«d’activitéscourantesserapportantautravail,àlafamilleouauxloisirs.Les

objectifs,laduréeetlesoutienquiluisontconsacrésnesontpasstructurés;engénéral,

il n’aboutit pas à l’obtention d’un certificat. L’apprentissage informel peut être inten-

tionnel,maisdanslaplupartdescas,ilestnonintentionnel,accessoireoualéatoire.

SelonSchugurensky(2007,p.14):

«C’est dans la sphère “informelle”, source de si peu d’intérêt et de travail de recherche, ques’acquièrentlaplupartdesapprentissagessignificatifsdontonsesertdanslaviedetouslesjours.»

L’apprentissageformelcouvrantaussibienlesenseignementsprofessionnelsetacadé-

miques correspond à un cinquième de tout ce que nous avons appris. (Allen Tough

1978).Leresteestinvisible,d’oùlamétaphoredel’iceberg.Seulelapartieimmergéede

ceticebergrelèvedel’éducationformelle.Laplusgrandepartiedenossavoirsprovient

d’interactionsavecnotreenvironnement,principalementsousconfigurationinformelle,

associéeàdesacquisitionsdeconnaissancesnonformelles:

«Unicebergestunmodèleanalogiqueadéquat. Imaginonsquel’éventailcompletdeseffortsd’unadultepourapprendresoitreprésentéparuniceberg.Depuislongtemps,nousnoussommesfocali-sésuniquementsurlapartievisibledel'icebergsituéeau-dessusdelasurfacedel'eau.Nousavonsconcentré notre attention sur l’apprentissage professionnel dirigé par des instructeurs. Ces der-niersontassurédescours,desclasses,desateliers, etmanagerdesgroupesd’apprentissage,ontproposédesétudesparcorrespondance,ontconseillédesprogrammesdetélévisionéducative,etc.Nous pouvons convenir que cet apprentissage professionnel dirigé est un phénomène importantdans le monde aujourd'hui: mais il correspond à seulement 20% de l’ensemble des situationsd’apprentissage, c’est-à-direà lapartieémergéede l'icebergvisible.Car lamajeurepartiedesef-fortsd’unadultepourapprendre,soit80%sesituentdans laplusgrandepartiede l'iceberg,ca-chée sous la surfacede lamer. Elle correspond à l’apprentissagepar autoéducation, bienqu'unepartdecettepartieimmergéepeutêtreégalementorganiséeavecd’autrescollèguesoudespairs.

208«Informallearningjustseemstobeaverynormal,verynaturalhumanactivity.Butit issoinvisible;peoplejustdon’tseemtobeawareof theirown learning.They’renotawareofotherpeople’s learning;educatorsdon’t take itintoaccountandsoon.Peoplearespending15hoursaweekat itonaverage,andyet it’snottalkedabout, it’snotrecognized,it’ssortofignoredorinvisible”,[notretraduction].

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203

Analyserleseffortspouraméliorerlespratiquesprofessionnellesdanscecontexteglobalestessen-tiel : cela permet d’améliorer les compétences et les pratiques professionnelles actuelles de cha-cun209.»(ToughA.,1978,p.7)

Cemodèle informel est facile àmettre enœuvre parce qu’il est flexible, sans les con-

traintesd’uneéducationdansunlieudeformationdéfini.Nousavonstoussubidesen-

seignements formelsdont le sensparfoisnouséchappaitpartiellementou totalement.

Plustard,audécoursd’uneinteractionavecd’autrespersonnes,oulorsd’unenouvelle

circonstanceendehorsdetoutenvironnementéducatifformalisé,nouspercevonsenfin

lanécessitéd’avoir suivi cetenseignementquinoussemblait tant inutile.C’est larési-

liencepédagogique.Cetterésilience,lorsqu’ellesurvientdansdesconditionshorsdetout

apprentissageconventionnel,horsinstitution,estd’ordreinformel.Danslesautrescas,

ellecorrespondàuneformed’apprentissageditnonformel.

L’apprentissageinformelcouvreundomainetrèslargeetilpeutêtredéfinideplusieurs

manières. Ainsi Daniel Schugurensky (2007, p 16), distingue trois formes

d’apprentissage informel en fonction de l’intentionnalité et de la conscience de

l’apprenant,carleconceptd’apprentissageinformelenlui-mêmecouvreunepalettede

caractérisationsbeaucouptroplarge.

Cetauteuridentifieainsi:lesapprentissagesautodirigés,lesapprentissagesfortuitsetla

socialisationselonletableaudelapagesuivante:

Intentionnel Conscient

Autodirigés oui oui

Fortuit non oui

Socialisation non non

Figure 9 : les 3 formes d'apprentissages informels de Schugurensky 209«Anicebergisanaptanalogy.Let'simaginethattheentirerangeoftheadult’slearningeffortsisrepresentedbyaniceberg.Formanyyearswepaidattentiononlytothehighlyvisibleportionoftheicebergshowingabovethesurfaceofthewater.Wefocusedourattentiononprofessionally-guidedlearning.Weprovidedcourses,classes,workshops,andother learning groups, plus apprenticeship, tutorials, correspondence study, educational television, programedinstruction, and soon. Virtually everyone still agrees that all of this professionally-guided learning is an incrediblyimportantphenomenonintheworldtoday.Atthesametime,though,itturnsouttobeonly20%ofthetotalpicture,onlythehighlyvisibletipoftheiceberg.Themassivebulkoftheicebergthatislessvisible,hiddenbelowthesurface,turnsouttobe80%oftheadult'slearningefforts.Itconsistslargelyofself-plannedlearning,thoughsomeisplanedbyotheramateurssuchasfriendsandpeers.Seeingourprofessionaleffortswithinthistotalcontextisuseful:impli-cationsariseforfreshservicesandforourpresentprofessionalpractices”,[notretraduction].

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• L’apprentissageinformelquiprivilégie lasocialisationcorrespondàun «appren-

tissage presque naturel des valeurs, attitudes, comportements, savoir-faire et

connaissancequiseproduisentdanslaviequotidienne210».

• L’apprentissagefortuitestégalementunapprentissagenonintentionnellementre-

cherché,maisconscient:l’apprenantserendcomptequ’ilaapprisquelquechose

àlafind’uneexpériencequ’ilavécueouentrepriseinconsciemment.

• L’apprentissageautodirigéestbasésurunprojetéducatifentreprissansl’aided’un

professeur,d’unformateur,d’untuteur,d’unpair.

Le modèle conceptuel d’apprentissage de Schugurensky a été complété en 2012 par

Elisabeth Bennett qui propose une quatrième forme dénommée processus

d’apprentissage intégratif. Cette forme d’apprentissage paradoxal, intentionnel et in-

conscient associerait«un traitementnonconscientde la connaissance taciteavecun

accèsconscientàl’apprentissage,lequelseraitconstituéd’unmixteproduitetd’images

mentales211».

MmeBennetareformuléde«tacite»laformed’apprentissageappelée«socialisation»

parSchugurensky.Toutendéveloppantdesconnaissancestacitesetpersonnellesparla

pratique,lesapprenantsréalisentdesajustementsmineurspourétablirunecompétence

sanspleineconnaissanceconscientedesactions212.

Figure 10 : les 4 parties du modèle d'apprentissage informel selon Elisabeth Nebbet (p. 27). 210SCHUGURENSKY(2007)p.16.211«Alearningprocessthatcombinesintentionalnonconsciousprocessingoftacitknowledgewithconsciousaccesstolearningproductsandmentalimages»p28(BENNET,2012),[notretraduction].212«Skilldevelopmentthroughpracticebuildstacitandembodiedknowledgeaspeoplemakeminoradjustmentstobuildexpertisewithoutfullconsciousknowledgeoftheaction»ibidp27,[notretraduction].

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Nousavonsrésumédans le tableausuivant lesspécificitésquiexistententrecesdeux

formesd’apprentissage:

Apprentissageformel Apprentissagenonformel

Auseind’uneinstitution Leplussouventauseind’uneinstitution

Intégrationrarementsimultanéedelapenséeetdel’action

Penséeetactionintégréesleplussouventsimulta-nément

Raisonnementsurdel’abstrait(symboles) Raisonnementsurduconcret(ensituation)

Nécessiteprincipalementdesaptitudesetdescon-naissancesgénérales

Nécessitesurtoutdescompétencesliéesàlasitua-tion

Connaissancesplutôtexplicites Connaissancesplutôtimplicites

Figure 11 : apprentissage formel versus apprentissage non formel.

2.6.4. Approfondissement sur les liens entre l’apprentissage implicite etl’apprentissagenonformel

Lesrecherchesdocumentairessurcesujetontétélaborieuses.HélèneBézille(2004)a

bienabordécesujet,maisavecl’apprentissageinformel:

«Ledéveloppementactueldedispositifsvalorisant lesdémarchesd’explicitationet lamobilisa-tionde laréflexivité,montrecombien«l’informel»constitue lamatièrepremière, leproduitdebaserichedel’épaisseurdessavoirsenprisedirecteavecle«vécu»,sous-terrain,richedespro-messesetdessurprisesdunon-dit,del’insu,del’implicite,del’indifférencié.C’estlemagmacons-titutifdenotrerapportausavoiretàl’apprentissage,fondédansunéthosdegroupe,quirelèved’unecultured’imprégnation.Maisc’estaussi,possiblementlaforcepropulsive,surlaquellenousnousappuyonsdanscertainescirconstancesdetransitiondelaviedesindividusetdescollectifs,dansunepratiquede«hors-piste»del’actionetdelaréflexion».

Commenousl’avonssignalésupra,ladifférenceentreinformeletnonformelestdavan-

tageuneconstructionthéoriquequeréellementeffective: ilexisteuncontinuumentre

ces différentes formes d’apprentissage (cf. théorie du curseur de Jay Cross 2006)213.

Toutescesformesd’apprentissagesviventlesunesàcôtédesautres.S’ilestpossiblede

modéliser une forme, c’est parce que les deux autres formes décrites coexistent avec

213Cf.§2.6.6.

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cetteforme.PourreprendrelesproposdeMmeAilincai(2012),ilyaun«métissagedes

formesd’apprentissage».

Cetteauteuresuggère:

« Il n’y a pas de situationéducative formellepure, l’informel étant constitutif de toute situationéducative,uningrédientnon«décantable»,lesdeuxformesétantinséparables».

DanielJacobi(2001)définitplutôtl’apprentissagenonformelàpartirduformel.

«Lanotiond’éducationnonformellenepeutêtredéfinieprécisément,oumieuxconstruite,quepar contraste avec ledéroulementdes apprentissagesvisant à favoriser l’appropriationdes sa-voirsformels,c’est-à-diredessavoirsscolaires.Toutehypothèseconcernantlessavoirsnonfor-melsreposedoncsurcetteopposition».

L’apprentissagenonformelcorrespondàdes interventionsàcaractèreéducatifende-

horsdesenseignementsscolairesetuniversitairesofficiels.Lessavoirsformelscorres-

pondent à des connaissances transmises d’une façon didactique aux apprenants. Une

telle formulationnecorrespondpastotalementauxdeuxmodesd’acquisitiondescon-

naissances:parl’étude(apprentissageformel)etparl’expérience.Maisdelàendéduire

que l’apprentissage non formel se base uniquement sur l’expérience est un raccourci

hasardeux.Lesobjectifsdessavoirsnon formelssontsouventdéterminésà l’occasion,

lorsd’unediscussionopportunesurunsujetpouvantintéresserplusieurspersonnesà

unmêmemoment.

L’apprentissagenonformelestunactespontané,nenécessitantpasd’uneprogramma-

tionformalisée,sansdélimitationdescontenusetdesmoyenspédagogiquesetsedérou-

lantdansuncontextetrèsfluctuant:lelieudelaformation,ladurée,lenombredeparti-

cipants,peuventêtrevariablesetsouventimpromptus.Cependant,ledouteexistequant

à l’acquisition réelle par les participants de ces communautés d’apprentissages im-

promptus,desavoirstacites;mêmesiundesparticipants,enfindelaréunionnonfor-

melle,effectueunesynthèseécriteouoralesousformederésumédespropositionspour

touslesparticipantsetlespositionsdechacunsurleoulessujetsenvisagés.

Tamir (1990) a émis l’hypothèse suivante: «il existe des possibles corrélations entre

apprentissagenonformeletactivitésextrascolaires,attitudes,idéesdeperformanceset

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futureprofession214».Dansuneétudepratiquéedansdesdifférentsétablissementssco-

lairesen Israël, il adémontréainsique lesactivitésextra scolairespratiquéesdans le

cadreoùendehorsdesétablissementsscolairesinfluaientdavantagelesélèvessurleurs

futurschoixdecarrièreparrapportauxseulsenseignementsdescurriculaofficiels.Cet

apprentissagenonformelesteneffetcomplémentairedel’enseignementconventionnel.

Ilestaccessibleàtouslesindividusetpeutsedéroulerdansunlargeéventaildesitua-

tions.Ilreposesurl'expérienceetl'actionetsedéveloppeàpartirdesbesoinsdesparti-

cipants.Cetapprentissagenonformels’effectuedansuntempsdeformationlimité.Car

laraisonprincepsdel’apprentissagenonformel,c’estlalibertédesindividusquidécide

departiciperounonàcesmomentsinteractifsd’échangesd’informationsselonunfor-

mat ouvert à tous ceux qui sont intéressés. Le participant à ces situations

d’apprentissageinformelpeutainsiavoirunemeilleureconnaissancedelui-même,faire

lepointsursesaptitudesetsescompétencesetmesurerl’impactdecequ’ilaacquis.

Grâceàuneparticipationvolontaireetactive,chaqueapprenantpeutacquérirdenou-

vellesqualificationsoulesaméliorerafindemieuxgérerlaviesocialeetprofessionnelle.

Carcetyped’apprentissagefavoriselatransmissiondesavoirs,desavoir-faireetdesa-

voir-être.Maiscesacquisitionsnepeuventdonnerlieuàdesévaluationsfiables:iln’est

pas possible de délivrer des attestations certifiant l’acquisition des savoirs enseignés.

L’évaluation et la qualification sont également difficiles, car les échanges concernent

souventdesdonnéespratiquesutilespour laviesocialeetprofessionnelledespartici-

pants.Cesacquisitionsdedonnéespratiquescorrespondentmajoritairementàdessa-

voirsimplicites.

Pourcetteraison,nousdemandonsauxétudiantsdu3ecycledemédecinegénéralenon

seulementdereconsidérersurtouslesaspects,touteslesactionsqu’ilsviennentderéa-

liser,maissurtoutderéfléchirparlasuiteàcesactionsendehorsducontextederéalisa-

tion.Cecidanslebutdediscerner,decomprendreetd’expliquerdesraisonnementser-

ronésetderepérerdessavoirsinexacts.Àl’inverse,cesconnaissancestacitessontréel-

lementutilespourélaborerdesreprésentationsadhoc,àpartirdeconnaissances,expé-

riencesetschèmesmémorisés,afind’apprendreoutransmettredessavoirsd’unema-

214“Ihypothesizedthatpositivecorrelationswouldbefoundamongscience-relatedbackground,out-of-schoolactivi-ties,attitudes,self-conceptasachievers,andcareeraspirations”,[notretraduction].

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nièreplusaisée,ouderésoudrerapidementdessituationscomplexesdontleséléments

constitutifs,étaientinconnusdel’apprenant.

Au lieu de résoudre un problème d’unemanière algorithmique selon le processus de

raisonnement hypothético-déductif, la formulation des hypothèses de résolution peut

s’effectuer de manière heuristique. C’est une opération qui semble intuitive vue de

l’extérieur,maisquinepeutexistersans laprésencedecesconnaissances tacitespré-

sentesdanslamémoiredechaqueêtrevivant.Ceprocessusmentalheuristiquepermet

ainsi de dégager un nombre limité de règles de production adaptées pour résoudre

beaucoupplusrapidementlasituationcomplexe.

Perruchet(1998,p.97)définitl’apprentissageimpliciteainsi:«L’apprentissage implicite repose sur l'intuition selon laquelle les structures qui orientent nosconduiteslespluscomplexesn'ontjamaisfaitl'objetd'uneprisedeconscienceexplicite»

Selon Peter Ewell (1997), n’importe quelles situations ou événements peuvent faire

l’objetd’apprentissages.Dansl’apprentissageimplicite,ilexistedeuxpossibilités:dans

l’une, il n’existe aucun contrôle. En fonction des circonstances de l’apprentissage,

l’apprenant n’est pas capable de discerner des notions erronées à apprendre. Il s’agit

d’apprentissageinformel.Danslasecondepossibilité,Ewellsignalaitque:

«lamajeure partie des apprentissages découle d’interactions directes entre un environnementcomplexeetdesdiscussionsavecdespairsoudestuteurs(nonenseignants).Celacorrespondàunapprentissagenonformelquivabienau-delàdecequiestexplicitementenseigné215

L’apprentissage non formel débute le plus souvent par un choix délibératif de

l’apprenant qui désire augmenter ses compétences; grâce à une planification de sé-

quences d’étude intégrant prise de décision et résolution de problème. (Eraut, 2000).

Parcontre,pendantlaséquenceproprementdite,l’apprentissagenonformelestclaire-

ment réactif puisque les apprenants utilisent opportunément les dispositifs pédago-

215«Anobvious,butoften-overlooked,implicationofthiscapacityistorecognizeallsituationsandeventsaslearningopportunities—whetherornotweexplicitlyconstructthemassuch—andtoharnessthemwherevertheyoccur.Anequally obvious downside is that studentsmay frequently be learning “wrong” things naturally, based on the cir-cumstancesinwhichtheyfindthemselves,andoverwhichwehavelittleornocontrol.Animportantrelatedpointisthatmuch(andperhapsmost)oflearningis implicit,derivingfromdirectinteractionwithacomplexlocalenviron-mentanda rangeof cuesgivenbypeersandmentors thatgowellbeyondwhat is explicitlybeing taught», [notretraductionpartielle].

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giquesproposéspourrechercheràaméliorerleurssavoirs.

DansuneétudeprésentéeparAllenToughàproposdel’idéeconçueparunapprenant

surledéroulementd’uneséquenced’apprentissage(1971,p.87),19%descandidatsà

cetapprentissageontaffirméavoirsuivisanséquivoqueledérouléprévu.81%avaient

uneidéedecequ’ilsallaientapprendreetfaire,maisreconnaissentavoirtiréprofitdes

opportunitéspédagogiquesoffertespendantcetapprentissage.Enclair,nonobstantdes

objectifs bien posés, il est toujours possible d’accroitre ses savoirs grâce à

l’apprentissagenonformel.Cependant,untelapprentissagenepeutsedévelopperque

dans certaines conditions favorisantes, parmi lesquelles nous distinguerons

l’apprentissageenpetitsgroupes,letempsdisponibleconsacréàcetapprentissage,les

techniquespédagogiquesproposéesetacceptéespar lesapprenants, lamédiationcor-

rectementassuréeetsurtoutlesréflexionsdéveloppéesparlesapprenantssurlevécu

decetapprentissage.

Aproposdelavalidationdesacquisnonformels

«Onpeutregarderenarrière,maisonnepeutplusrevenirenarrière,onnepeutévaluerqu’àpartirdesonnouveaustatut216».

AnselmStrauss,1992,p.99

Silescyclesd’apprentissagessontbienstructurésetformalisésenformationinitiale,le

contexte d’apprentissage dans la formation permanente ou continue est beaucoup

moins rigide. La formationpermanenteapourambitiond’améliorernos compétences

toutaulongdelavieprofessionnelledesindividus:sastructurationestbeaucoupmoins

formelle, car les individus doivent concilier le temps passé à exercer leur profession

avec le tempsnécessaireà leurs formations.Mais il est importantpoureuxdenepas

rendre invisibles leurs acquis! Ils doivent être identifiés, évalués et reconnus avant

d’êtrevalidés.Noussommesaucœurdelavalidationdesacquisqui:(Cedefop,2000)

«estunprocessusd’identification,d’évaluationetdereconnaissanced’unegammedequalifica-tionsetdecompétences,développéeparlesindividustoutaulongdeleurvieetdansdifférentscontextes(lieuxconventionnelsd’enseignement,lieuxdetravail,etc.)»217

216STRAUSS,A.(1992).Miroirsetmasques,uneintroductionàl'interactionnisme.Paris,Métailié.194p217Notretraduction.

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Toutevalidationnécessitedeseréféreràunenorme,cellequistructurenormalement

l’apprentissageformel.Carsicesapprentissagesnonformelsontsouventlieuensitua-

tiond’autonomie,enl’absenced’enseignant,ilsdoiventêtrenécessairementliésaupro-

cessusd’apprentissageformelpourbénéficierd’unevalidation.Eneffet,lavalidationdel’apprentissagenonformelestliéeàlaréussited’unapprentissageformel.Nousretrou-

vons toujourscettenotiondecontinuumentrecesdifférentes formesd’apprentissage.

En l’absence d’attestation de succès ou de diplôme, les acquis par apprentissage non

formel,authentifiésetévalués,risquentdenepasêtrecrédiblesetdoncnonreconnus.

Cependant, lesprocessusdevalidation sont indépendantsdesprocessusdevalidation

del’enseignementformelmêmesilacompétenceterminalecorrespondàunecombinai-

sond’apprentissagesformeletnonformel.L’apprentissagenonformel,commeleformel,estunprocessusd’acquisitiondesavoirs,habilitésetattitudes.Ilestfondésurl’actionet

l’expérienceindividuelleoulorsderéunionengroupedanslecadredel’apprentissage

coopératif.Souventsous-estimé,doncpeuévalué,cetapprentissagenonformelrenforce

les acquis formels. Chacun apprend de l’autre en interagissant. C’est un processus

d’apprentissagemutuel àdouble sens, horizontal, ou ladualitéhabituelle, enseignant-

apprenantn’aquepeud’importance.

C’est aussi un processus d’apprentissage permanent, le plus souvent inconscient,mal

perçuparlesapprenants,etdoncdifficilementrepérablepourêtreévalué.Lesnormes

objectives,habituellementenusagedanslesprocessusd’évaluationformelle,danslebut

dequalifierunapprenant,nepeuventêtreutiliséesdanslecadredunonformel.Cette

validation doit être réalisée par un observateur compétent sur des lieux habituels de

l’exercice professionnel (évaluation authentique - pour lesmédecins, dans un cabinet

médical ou dans un service hospitalier) ou simulée, c’est-à-dire dans un contexte qui

présente toutes les caractéristiquesde la situation réelle du travail où les apprenants

peuventdémontrerleurscompétences218.

218L’idéalestdepouvoirévaluersurplusieurssitesdesimulationpourlégitimerl’acquisitiondescompétences.C’estcequenousréalisonsaucoursdu3ecycledemédecinegénéraleàParisDiderot.Dans lecontexted’uneévaluationformative,lesétudiantsensecondeannéede3ecyclesontévaluéssurleurscompétencespratiquesetthéoriquessurplusieurssites(ExamencliniqueobjectifstructuréouECOS).Leprocessusdevalidationpourlesapprentissagesnonformels concerne surtout la pratique, alors que la validation des apprentissages formels est axée aussi bien sur lathéoriequesurlapratique.

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Lareconnaissanceetlavalorisationdecetapprentissagepeuvents’appuyersurlepar-

courseffectuéparl’apprenant,àcôtédesactionsréaliséesselonunmodeformel,dansle

cadreparexempled’unportfolio.Nousrappelonsqu’ils’agitd’unrecueildes informa-

tionssurdesélémentsducurriculumvitaedel’apprenant,lesstagesréalisés,lesensei-

gnementsetlesformationssuivis,lerécitdeplusieursexpériencesquiontnécessitéune

réflexionapprofondieetdesrecherchesd’informationsauprèsd’autresprofessionnels;

cerecueilestcomposéégalementdescomptesrendusd’activitésréaliséesaucoursdu

cycle d’apprentissage, qui peuvent concourir à l’amélioration des compétences de

l’apprenant.Leportfolioestunesynthèsedesexpériencespersonnelles,socialesetpro-

fessionnelles pour démontrer l’atteinte au plus haut niveau des compétences atten-

dues219.

L’évaluation du processus non formel est surtout personnelle. L’apprenant doit ap-

prendreàidentifiernotammentlesprocessusmétacognitifsquil’ontamenéàagirainsi:

c’est l’identificationdecompétencestransversales,quecetapprenantpourramobiliser

toutaulongdesaviesocioprofessionnelle.Ilnes’agitpasdemesurerdessavoirs,mais

de témoignerde l’acquisitionde compétences.Ceprocessusd’évaluationpeut se faire

danslecadred’uneauto-évaluationoubiend’uneappréciationdecetteacquisitionpar

despairs.Leportfolioestunoutildesuivietdemesurequirelate leparcours formel,

maisaussilenonformeldel’apprenant(danscecas,unétudiantenmédecine)avecla

narration de ses différentes expériences, de ses travaux effectués tout au long de ses

apprentissagesetdesrencontresparexempleavecsescollègues,despatients,despro-

fessionnelsdesantéetdestravailleurssociaux.

Enrésumé,lesprogrammesd’apprentissagenonformelsecaractérisentparleurvariété,

leursouplesseetleurcapacitéàrépondrerapidementauxbesoinséducatifsdesappre-

nants.Toutefois,nouslerépétons,l’apprentissagenonformelnedoitpasêtreconsidéré

commeunsubstitutdel’apprentissageformel:c’estuncomplémentàl’acquisitiondes

compétencesprofessionnelles. 219Combiendefoisavons-nousagiennousservantd’expériencesréaliséesparnous-mêmesoupard’autresennousdisant:«dansunetelleexpérience,uncollègueavaitagidecette façon,endehorsdecequiestprescrithabituelle-mentd’unemanièreformelledanslesrecommandationsoulesouvragesderéférence,etcelaavaitmarché?Nousenavionsdiscutéavecd’autrescollègues,tousn’étaientpasd’accordsurcemoyenutilisé,maispourmapart, jepensequejepourraisfairedemêmesijedevaisagirprochainementdansunesituationanalogue!»Ilsuffitderelaterora-lementouparécritcetteexpérience,d’endiscuteravecd’autrespairs,ouavecunséniorouuntuteur;ilestrecom-mandéd’effectuerégalementdesrecherchessur les limiteséthiqueset légalesànepasdépasser(lorsqu’ils’agitdetraiterunmalade);enfin,untravaild’autoréflexionestessentielafindecomprendrepourquoicequiaétéproposéetfaitamarché.

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Lenonformel,médiateurducontinuumdel’apprentissage? Lesapprentissagesinformelsetnonformelsoffrentauxapprenantsdesmoyensetdes

aidesutilespourunemeilleurecompréhensiondeleursactivitésactuellesetfutures.Ce

sontdesprocédéspédagogiquesjudicieuxpouraméliorerleurexpertisenotammentpar

l’apportfréquentd’informations.Cetapportcontribueàadhérerlesétudiantsauxcon-

tenus formalisés qu’ils doivent suivre. Si un tel apport n’existe pas, le programme

d’apprentissage peut être dévalorisé oumême rejeté par les apprenants. Ce genre de

manifestation de rejet estmalheureusement trop souvent rencontré lors de séquence

d’enseignementmagistral.Lesapprentissagesinformelsetnonformelsassurentégale-

ment une certaine flexibilité concernant les programmes formalisés: ils permettent à

l’enseignantderéagirrapidementenmodifiantobjectifsetcontenustoutenmaintenant

lesfinalitésdel’apprentissage.Ladiversitédessituationsrencontréeslorsdesappren-

tissages informels et non formels est importante et contribue, comme l’apprentissage

formel,àl’acquisitiondescompétences.

Lesactivitésquipermettentlesapprentissagesnonformelspeuventnepasêtreexplici-

tement définies ou désignées comme des activités d’apprentissages par exemple sans

pourautantêtredesapprentissagesinformels.L’intérêtdececoncept,parsonposition-

nement même, est qu’il donne toute latitude pour satisfaire un éventuel besoin d’un

conceptintermédiaireentreapprentissagesformelsetapprentissagesinformels.

Processus formelet informelne sontquedesattributsaumotapprentissage (Colley -

2003,Montandon-2003,BezilleetBrougère-2007,Cross-2007).Danstoutesituation

d’apprentissage,leformeletl’informelsontgraduésenfonctiondessituationsrencon-

trées en fonction de quatre aspects de l’apprentissage: le processus, le cadre et

l’emplacement,lebutetlecontenu.(Wihak&Hall,2011,p.7).

• L’aspectprocessusconcerne lesoutienet lecontrôlede l’apprentissage.Quandce

dernier est formel, l’enseignant aun rôle important et il estnotammentmaîtrede

l’évaluation sommative; à l’opposé, l’apprenant contrôle davantage son apprentis-

sagegrâceàuneauto-évaluationetpeuts’aiderdepersonnesressources(expertou

collègue).

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• L’aspect cadre et emplacement s’intéresse au lieu même d’apprentissage: salle

d’enseignementouamphithéâtreplutôtpourleformel,lieudepauseautravailpour

l’informel.MaiscommelesouligneWihak&Hall,unesalledeformationenmilieude

travailseraitconsidéréecommeplusformellequelecouloird’uneuniversité.

• L’aspectbut introduit lanotiondemiseenplacedecetapprentissage:est-ceune

autoritéextérieurepolitique,universitaireoupatronale:danscecas,l’apprentissage

seraqualifiédeformel,ouaucontraireest-ceunedécisionpriseparl’apprenantlui-

même?

• L’aspectcontenus’intéresseàcequiaétéappris:savoirthéoriqueoucompétence

dehautniveauseraitdu formel,acquisitiond’unepratiquecouranteseraitplus in-

formelle.Qu’est-cel’apprenantcompteretirerdel’apprentissage?Lasituationserait

jugéeinformellesilesrésultatsdel’apprentissagenesontpasclairementénoncés.

Remiseencausedelanotiond’apprentissagenonformel

Plusieurs auteurs, dont Denis Poizat, ont refusé de reconnaître un quelconque statut

éducatifréelàcetenseignementnonformel:ceneseraitqu’unconceptsansréalitéju-

ridique (Poizat, 2003, p. 212). L’éducation non formelle ne doit pas être considérée

commeunremèdeauxdéfaillancesdel’éducationformelle.Poizatinsiste:laclassifica-

tion en éducation formelle, non formelle et informelle était justifiée dans les années

1970,carelleétaitlerefletd’unevéritablepriseencompteglobaledufaitéducatif.Mais

cen’estpluslecasactuellement.Cetauteurdéfinitcetteéducationnonformellecomme

une:

«Véritable auberge espagnole de l’éducation, symptomatique de son existence sans épaisseur,voiredesoninexistence».(Poizat,2003,p.205).

Ilestvraiquecettepositionbancaleentrecesdeuxconceptspédagogiques(informelet

non formel)estdifficileàmaintenir.Cristol etMuller (2013,p.15)décrivent ces con-

cepts commedes processus intellectuels équivalents, notamment par le foisonnement

sémantiquedesformulationsutiliséespourlesdésigner:

«apprentissages accidentels, intentionnels, incidents, implicites, nomades, expérientiels, émer-gents, actifs (ou apprentissages par l’action), autodirigés, autonomes, entre pairs, non formels,pratiques…Cetteénumérationn’estpasexhaustive;ellepourraitêtrepoursuivieaveclestermes

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214

dedéveloppement,perfectionnementprofessionnel,éducationpermanente, formationsurplace,ouformationenmilieudetravail…».

Faut-ilabandonnercetteoptiondunonformel?Pournotrepart,nousavonschoiside

conservercettedistinctionentreleformel,nonformeletinformelpournotretravailde

recherche; ennous restreignant cependant à la définition suivante de l’apprentissage

nonformel:lorsd’unapprentissageformel,toutcequipeutaméliorerlesconnaissanceset

les compétences des apprenants ou des professionnels pendant une séquence

d’apprentissageenétablissementsuniversitairesouprofessionnels sansquecela soit for-

malisé par des objectifs de formation. Cependant, quelle que soit la conception

d’apprentissage, formel, non formel ou informel, tout apprenant peut rencontrer au

coursdesesdifférentsapprentissagesdesobstaclespourintégrerdesdifférentssavoirs

nécessaires à sa profession. Ces obstacles sont de l’ordre du temps disponible pour

suivrelesformations,delapossibilitéd’êtreprésentsauxenseignementsouauxstages

pratiques,delavolontédel’apprenantdes’engagerdansunprocessusd’apprentissage.

Lesobstaclespeuventégalementdécoulerdetroubles,decontraintesoudedéceptions

rencontréslorsd’unapprentissagequivontlimiterlespossibilitésd’apprendreetdonc

nepaspermettre à l’apprenantdedevenir compétent.Dans cette catégoried’obstacle

figure enbonneplace, plus souvent dans l’enseignement formel, puisqu’obligatoire, le

curriculumcaché.

2.6.5.Lesentravesàl’apprentissage:lecurriculumcaché Revenonsàlanotiondecurriculum,définiparBobbitt(1918)audébutduXX°siècleet

quenouspouvons traduirepar cursusouparcourséducatifouparcoursde formation

(Perrenoud,1994,p.61).C’estunparcoursprogrammé,organisé,pas toujours totale-

menteffectuéparlesapprenants(d’oùlanécessitéd’évaluations).Ilyauratoujoursun

écartentrecequiestprévuparcecurriculumformalisé(lecurriculumformeloupres-

crit)etcequiseraréaliséréellementparl’apprenant(lecurriculumréelouréalisé)220.

Cetécart,selonPerrenoud(1994,p.61),

«Est à la fois creusépar la complexitéde l'esprit et l'autonomiedes éducables, et limitépar lapossibilitécontinued'adapterl'actionéducative,deréorganiserleparcoursenfonctiondesrésis-tancesdusujetoudelaréalité».

220PERRENOUDPhilippe(1984).Lafabricationdel'excellencescolaire:ducurriculumauxpratiquesd'évaluation.

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Lecurriculumcachéestenpartieresponsabledecetécart.Ilcorrespondàdesprocessus,

à des pressions et à des contraintes provenant de l’extérieur, sans lien avec

l’enseignementformeletrarementprisenconsidérationdansuncursusd’apprentissage.

LesociologuePhilipJackson221aproposépourlapremièrefoisen1968letermedecur-

riculumcachépourdéfinirlesinfluencescertainesdesinstituteursetdesautoritéssco-

lairessurlesécoliersafinqu’ilsapprennentàbienretenirleursleçons,àterminerleurs

devoirs,àêtreobéissantsetàrespecterleursprofesseurs,àêtreordonnésetponctuels.

Despenseursdel’éducationcommePaoloFreire,IvanIllichontmisenévidencelana-

tureinsidieusedececurriculumcachédanslesapprentissagesscolairesquiestsource

d’inégalité sociale. Les étudiants issus de familles de la classe ouvrière, ou d’origine

étrangère,sonttoujourspeuconsidérésdenosjours,véhiculanttropsouventuneimage

négative:lesystèmescolaireatendanceàlimiterleurautonomieetleurindépendance;

ces étudiants ont alors unmanquede confiance sur leurs capacités et sont prêts à se

soumettreà l’autorité.C’est la facecachéedelaformation222.PierreDominicé(1990,p.

23)soumetces interrogationssuivantes:dansunenseignementsuivipardesadultes,

quelleestlapartdupasséscolairemobilisédansl’apprentissage?Lesdifficultésrencon-

tréesdansl’acquisitiondetechniquesoudecompétencesnouvellesproviennent-ellesde

difficultéscognitives,derésistancesaffectivesoudelacunesplusculturelles?Cesinter-

rogations, souligne Philippe Perrenoud, «mettent en évidence un aspect essentiel du

curriculumcaché:toutcequelaformationdéclencheàl'insuduformateur,au-delàdu

temps,del'espace,ducontratqu'ilmaîtrise».

Le curriculumcachécorrespondàdesmessages (croyances,normes, idéesetvaleurs)

communiqués aux apprenants sans être explicitement enseignés. Ainsi des concepts

éducatifs,desmanièresd’approcherdesituationsproblématiques,desnormessociocul-

turelles peuvent être communiqués aux étudiants sans être formalisés par les ensei-

gnants.Parexemple, lesétablissementsscolairesetuniversitairesnetransmettentpas

uniquementdescontenusdeprogrammesdéfinispourunematièredonnée,maiséga-

lementdesvaleursetdescroyancescommelaconformité,lacompétitivité,ladéférence

àl’autorité.SelonuneétuderéaliséeparLemppetSeale(2004,p.770),lesétudiantsen

médecine sont nombreux à reprocher aux enseignants de reproduire des stéréotypes

221JACKSONPhilipWesley(1968).LifeInClassrooms.TeachersCollegePress,183p.222D’aprèsl’intituléduchapitreIdulivredeDOMINICEPierre(1990):lesfacescachéesdelaformationp.11in«L’histoiredeviecommeprocessusdeformation».

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traditionnels,denepasévoluerdansleurscontenusàenseigneretdanslechoixdesmé-

thodespédagogiques. Lapesanteurhiérarchique, l’atmosphère concurrentielle, leshu-

miliations,lescritiquessontencoretropsouventprésentes.Cesdeuxauteursontdistin-

gué ainsi plusieurs processus conséquents au curriculum caché comme lemanque de

vocation,undéficitdel’intégritééthiqueetunemauvaisepriseencomptedelaneutrali-

téaffective.Lesdeuxauteursproposentd’identifieretdemodifiercesprocessuscachés

pourunrenouveaudel’apprentissagemédical.

Autotal, lecurriculumcachécorrespondàdesnormessocialesetprofessionnellesqui

ontuneinfluencecertainesurlacapacitédesapprenantsàs’épanouirounonaussibien

dansl’étudequedanslapenséecréativeetréflexive.D’autresapprochesducurriculum

caché ont été proposées. Le curriculum caché est défini par Philippe Perrenoud223

commelapartiedesapprentissagesnonprogramméeexplicitementparlesinstitutions

universitaires.Définiràquoicorresponduncurriculumcachén’estpasunetâcheaisée;

ilyasouventconfusionavecl’apprentissagenonformelcommelemontreladéfinition

proposéeparMichaelHaralambosetRobinHeald224en1980:

«Lecurriculumcachéconsisteàdesnotionsquelesélèvesapprennentparexpérienceencontactaveclesautrestoutaulongdeleursétudesplutôtquedanslescontenusformalisésindiquésdanslesprogrammesofficiels».

Leshabitudestenaces,lesrituels,desacquisaccordés,maisnonremisencauseparles

institutionssontsourced’influencesnéfastespourledéroulementd’unapprentissage.

CeconceptdecurriculumcachéestpourHafferty(1998,p.404):

«undéfipourlesautoritésdesFacultésdemédecinequidoiventprendreencomptelesentitésculturelles etmorales des enseignants et des étudiants avant de définir sur ce qui relève de labonneoumauvaisemédecine.Finalement,etc’estleplusimportant,lecurriculumcachéobligelesenseignantsdeconsidérer l’apprentissagemédical commeunprocessus socioculturel, constam-mentballotéentredesforcesexternes(duesàladiversitédesenseignantsetdesétudiants225)etdesdifficultésd’intégration226».

223PERRENOUDPhilippe(1993).Curriculum:leformel,leréel,lecaché.224HARALAMBOSM.,HEALDR.(1980)SociologyThemesandPerspectives.OxfordUniversityPress,594p.225Ajouterparnous.226«Thisconceptalsochallengesmedicaleducatorstoacknowledgetheirtraininginstitutionsasbothculturalentitiesandmoral communities intimately involved in constructing definitions about what is "good" and "bad" medicine.Finally,andperhapsmostimportant,thisconceptaskseducatorstorecognizemedicaleducationasaculturalprocessand therefore as something that is constantly buffeted by external forces and by problems of internal integration»,[notretraduction].

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Nousinsistonssurl’importancedecettenotiondecurriculumcaché,carelleestparfois

confondue avec la notion d’apprentissage non formel. L’apprentissage formel est sou-

ventconsidéréparlesapprenantscommeparlesenseignantscommeleseuldispensa-

teur de savoirs réels à apprendre. La présence d’un décalage entre le contenu formel

enseignéetlaréalitédecequiaétéretenuparl’apprenantpeutamenerlesenseignants

àlaconclusionsuivante:ladifférenceconstatéepeutêtredueàdesnotionsprovenant

del’apprentissagenonformel.Maiscettedifférencepeutêtreégalementconséquenteà

laprésenced’uncurriculumcachéquipeutagirsur lesreprésentationset lespréjugés

desapprenantsvis-à-visdescontenusenseignésetdesobjectifsdel’apprentissage.Ce-

pendant,cesdeuxnotionsnesontenaucuncaséquivalentes.

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3ème partie: Expérimentation - description et évaluation de trois dé-marchespédagogiquesexploratoiresenpetitsgroupes

Introduction Audébutdenotretravailderecherche,nousavonssouhaitédémontrerquelaconfigu-

rationd’apprentissagedite«coopérative», c’est-à-dire«apprendreàcoopéreret coo-

pérerpourapprendre227»,estsusceptibledesusciterdesapprentissagesplusproductifs

d’apportergrâceàl’apportdenouvellesdonnéesdontcertainespeuventcorrespondreà

dessavoirsinstitutionnelsouformels.D’autressavoirs,nonthéorisésdanslescontenus

àapprendre,maisexprimésparlesapprenants,sontdel’ordredessavoirsnonformels

et informels (AllenTough,2002).Notrepremieraxede rechercheadoncporté sur la

différenciationdecessavoirsinformelsetnonformelsparrapportauxautressavoirset

leursutilitésdansl’acquisitiondecompétencespourl’exercicemédical.

Nousavonsainsiproposéàdesétudiantsen3ecycledemédecine,desmédecinsgénéra-

listesetdespédiatresenexercicelibéral,troisdispositifsd’apprentissagequirépondent

àlaneuvièmerecommandationduConseilPédagogiquedelaCIDMEF228:«développer

desméthodespédagogiquesadaptées(ycomprisinnovantes)auxcompétencesàcons-

truire229».

• uncascliniqueàdéveloppementprogressif(Internesenmédecineen1reannée

de3ecycle;

• ungrouped’échangedepratiques(Internesentroisièmeannéede3ecycle);

• unjeuderôlemodifiéproposéàplusieursgroupesdemédecinsenexercice.

Moncheminementdanscetaxederecherchem’aconduitàrecadrerprogressivementce

choix230pourrecentrermontravailsurlesacquisd’apprentissageémanant:

227Cf.§2.4.3.228ConférenceInternationaledesDoyensdesFacultésdemédecined’Expressionfrançaise.229BARRIERJ.H.(2004).Laformationauprofessionnalismedesfutursmédecins.RecommandationsduConseilPéda-gogiquedelaCIDMEF,p.79.230Ladistinctionentre lessavoirs formels, informelsetnon formelsestactuellement loinde faireconsensuset faitsystématiquementdébat.PatrickVerquin(2010,p.8)parleplutôtd’unereconnaissancedesacquisd’apprentissagesnonformelsetinformels.

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• desapprentissages formels, intentionnels,dispensésparune institutioncomme

uneUniversité,dansuncontexteorganiséetstructuré231.

• desapprentissagesinformels,nonorganisésquiseconstruisentpardesrelations

avecdiversesexpériencesetactivitésquotidiennes232.

• desapprentissagesnonformels,définisparleCentreeuropéenpourledévelop-

pementdelaformationprofessionnelle(Cedefop)233commedes«activitésoude

programmesorganisésendehorsdusystèmescolaireétabli,maisdirigésnéan-

moinsversdesobjectifsprécisd’éducation234.

Les trois dispositifs d’apprentissage proposés font appel aux principes de

l’apprentissage coopératif. Le premier dispositif pédagogique est basé sur un cas cli-

niqueàdéveloppementprogressif.Ledeuxièmedispositifs’appuiesurleprinciped’une

communautéd’apprentissagelimitéedansletemps: legrouped’échangedepratiques.

Enfinletroisièmedispositifestaxésurunjeuderôledontlesdifférentstempsontété

modifiés.Chaquedispositifd’apprentissageaétédéveloppéselonleplansuivant:

- présentationdeladémarchepédagogique;

- raisonsduchoixdecettedémarche;

- présentationdelasituation;

- résultats;

- analysedecettedémarcheetdiscussion(particulièrementdéveloppéepourle3e

dispositifpédagogique–jeuderôle)

- apportdecettedémarchedansnotreréflexionsurl’apprentissagecoopératif;

- conclusion.

Ces troisdispositifs pédagogiquesont été sélectionnés afind’explorer lamulti dimen-

siondesdifférentesconnaissancesetcompétencesnécessairespourrésoudreunesitua-

tionproblèmeauthentiqueetcomplexe.

231Cf.§2.8.1.232cf.§2.8.2.233CEDEFOP: validation de l’apprentissage non-formel en Europe – Etat des lieux en 2007. Disponible à l’adressesuivante:http://www.cedefop.europa.eu/EN/Files/4073_fr.pdf234cf.§2.8.3.

Page 221: Apprentissage coopératif et formation des médecins : … participants to marshal their own experiences, to reflect thoughtfully and to coope-rate with each other, can improve the

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Nousavonsainsifaitappelàdesmodèlesd’apprentissaged’adulteproposésdepuisplus

de20ansauxmédecinsdanslecadredelaformationmédicalecontinue(FMC).LaFMC

réaliséeparlesmédecinsgénéralistesétaitjusqu’àmaintenantleplussouventproposée

selonunelogiqued’apprentissageprésentiel,enpetitsgroupes(apprentissagecoopéra-

tif),sedéroulantsousformed’ateliersderéflexionoudeproduction.Cesatelierspou-

vaientavoirlieuensoirée,oubiensouslaformedeséminairesdeladuréed’unejour-

néeoudedeuxjours.

Laplupartdesdépartementsdemédecinegénérale(DMG)enFranceontadaptécetype

deformationenpetitsgroupesdanslecadredelaformationmédicaleinitiale.Maisavec

une différence notable par rapport à la FMC : les étudiants ont peu d’expérience de

l’exercicemédicalenautonomie235,notammentenpremièreannéeduDiplômed’Etudes

spécialisées (D.E.S.) demédecine généraleet les enseignants doivent en tenir compte

pouradapterlesméthodespédagogiquesdéveloppéesenformationmédicalecontinue.

Eneffet,lesformateursenFMCs’appuientdavantagesurl’expériencedesmédecinsque

surlesconnaissancesthéoriques.Dansnotretravailderecherche,nousavonsdistingué

3catégoriesdeparticipantsàces formationsen fonctiondesdémarchespédagogiques

exploratoires:desInternesen1reannéedeD.E.S.demédecinegénérale(possédantde

nombreusesconnaissancesthéoriques),desInternesen3eannée(doncavecunpeuplus

d’expériencespratiques)etdesmédecinsinstallésdepuisplusde15ansenmilieulibé-

raletsupposésbienexpérimentés.

L’objectif de la formation continuedesmédecins estde construiredes compétences à

partirderéflexionssurdesexpériencesvécues236.Maispourlesétudiantsde1reannée

duD.E.Sdemédecinegénérale,nous leuravonsproposédenepas travaillersur leurs

propres expériences beaucoup trop limitées, mais sur un cas clinique authentique et

complexe vécu réellement par unmédecin généraliste. Par contre, nous avons eu re- 235En1èreannéeduD.E.Sdemédecinegénérale,lesétudiantssontdéjàconsidéréscommedesmédecins,autonomesmaispouvantfaireappelàtoutmomentàunsénior(supervisionpédagogique).236Le3èmecycledemédecineapourprincipalobjectifdetransformerunétudiantenunprofessionnelcompétent.Enmédecinegénérale,lesenseignantslesenseignantsgénéralistesréunisauseind’uncollègenational(CNGE)ontpro-gressivementmisenplace,enaccordaveclesautoritésdesFacultésdemédecineet leMinistèredel’EnseignementSupérieuretdelaRecherche,uncycledeprofessionnalisationessentiellementbasésurlesstagespratiquesàl’hôpitalet chez les médecins de ville. Cette professionnalisation correspond à une mise en œuvre, en réelle situationd’exercicemédical,deconnaissancesetcapacitésacquisespendantlesdeuxcyclesd’étudesprécédents,avecunenca-drementprofessionneladapté.Nousdemandonsainsiauxétudiantsdu3èmecyclederéfléchirauxexpériencesquilesontmarquéspendantcesdifférentsstagespratiquesetdelesrelaterparécrit;ceciafind’aidercesfutursmédecinsàconstruireprogressivementdescompétencesutilesàleurfuturexercice.

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coursàunprocessusréflexifdesparticipantsàproposdeleursvécuspourlesInternes

de3eannéedeD.E.S.ainsiquepourlesmédecinslibéraux.

Nousavonsrecherchéàconnaître,grâceàces3dispositifs, lesconséquencesdes inte-

ractionssurledéveloppementdesdifférentstypesdesavoirsetcompétencesdesparti-

cipants.Carnous formulonsque les interactions entre lesdifférentsparticipantsquiont

lieupendantlesséquencespédagogiquesainsiqueleséchangesinformelsréaliséspendant

lespauseslorsdesenseignementsoudesformations,favorisentl’acquisitiondesavoirset

améliorentlescompétencesdesapprenants.

Nousprésentonsd’unemanièresynthétiquecestroisdémarchespédagogiquesavantde

lesdévelopperdansleschapitressuivants:

Typedeproduction

Destinataire

Nombredegroupes

Objectif(s)

Lecascliniqueàdéveloppement

progressif

Internesen1reannéedu3ecycledeméde-

cinegénérale

1groupede13Internes,2sousgroupes(6et7

personnes)

Comparerdeuxsous-groupespartici-pantàuneformationdanslecadrecoopératifetreleverlesdifférencesentermesdehiérarchisationselon

deuxtypesdeproduction:-productionindividuelle;-productioncollective.

Legrouped’échangedepratiques

Internesen3eannéedu3ecycledeméde-

cinegénérale

1groupede12internesquieffectuentleur2e

stagehorsdel’hôpitalenmédecinegénérale.

Testerqueleséchangesinteractifsd’informationssurunthèmeprécispeuventaméliorerlessavoirsthéo-riques,pratiquesetd’actiondanslecadred’unapprentissagecoopératif.

Lejeuderôle Médecinsenexercicedepuisaumoins15

ans.

54médecins,dont47généralisteset7pé-

diatres.

4groupessurunthèmemédicalidentique.

Compareruneproductionindivi-duelleàuneproductioncollectiveettesterlasupérioritédecetteproduc-tioncollectivepourobtenirdesac-quisd’apprentissagesurleplanqua-

litatifetquantitatif.

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3.1.Premièredémarchepédagogiqueexplorée: lecascliniqueàdéveloppe-mentprogressif.

Lesmédecins font occasionnellement unemauvaise estimation du diagnostic demaladie,suspectant trop fréquemmentdesaffectionsrares, surestimant lerésultatpositifd’unexa-men,concluanttroprapidementsansintégrertouteslesinformationsdisponibles,etétablis-santprématurémentunehypothèsediagnostiquedéfinitive237.

JeromeKassirer,2010,p.1120.

Présentationdeladémarchepédagogique Cettedémarchepédagogiqueestunemodélisationrationnelleduparcourseffectuépar

leprofessionneldesantédansleschampsdiagnostiquesetthérapeutiques.GérardDu-

roux,undesresponsablesde la formationmédicalecontinueà l’UNAFORMECdans les

années1980,aproposécettedémarchepédagogiquesousladénominationde«cascli-

niqueencascade».«Lesparticipantsvontutiliser toutes les informationsprovenantde l'interrogatoireetde l'exa-mencliniquepourhiérarchiseretclassercesinformationsdanslecadredeladémarchehypothé-tico-déductive238».

Cette approche pédagogique consiste à recueillir les informations concernant les

plaintesetsymptômesdupatientetconfronterl’ensembledecesdonnéesavecdeshy-

pothèsesdiagnostiques.L’exerciceestprogressif, enpalier.Audébut, les informations

donnéessontpeunombreusesetgénérales,etlalistedeshypothèsesdiagnostiquespos-

sibles est étendue.À chaquepalier, les informations sontplusprécisesdans lebutde

réduirecenombred’hypothèses.La finalitédecetexerciceestdediminuerprogressi-

vementl’incertitude.

Cettedémarchefaitappelauraisonnementcliniquehabituellementpratiquéparlesmé-

decinsetquicomportelesétapessuivantes239(EvaKewin,2005):

237Traductionlibre:Physiciansoccasionallymisjudgetheapriorilikelihoodofdiseases,suspectrarediseasesmoreoftenthanisappropriate,overemphasizethesignificanceofapositivetest, jumptoconclusionswith little informa-tion,andjudgeprematurelythattheyhaveaworking(orfinal)diagnosis.238DUROUXGérard (1992). Techniqued’animation: le cas en cascade – simulation de la démarchemédicale.Una-formec.Disponiblesur:http://www.unaformec.org/publications/fichestech/casencascade/cascade.htm239«1.Obtainandfilterinformation–2.Formulateaninitialsmallsetofhypotheses–3.Obtainadditionalinforma-tionasdirectedbyinitialhypotheses–4.Useareasoningstrategy(deductivev.inductive)toprocesstheinformationintheclinicalcontextofthecase–5.Performananalysisofhypothesesbyprobabilisticandcause-effectmeans–6.Employabstractideasandconceptsthatareinterpretedandusedeffectively–7.Formulateafinaldiagnosis–8.Testthefinaldiagnosis–9.Considerotherpossiblediagnoses–10.Evaluatetheprocess.(Stop,Think,Act,Review)–11.Communicatethediagnosis–12.Followup»,[notretraduction]

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1. Récupéreretsélectionnerlesinformations.

2. Formulerunelisteinitialelimitéed’hypothèsesplausibles.

3. Rechercherdesinformationssupplémentairesaxéessurleshypothèsesinitiales.

4. Faire appel à des stratégies de raisonnement (déductif, inductif ou abductif240)

pouradapterlesinformationscollectéesaucontexteclinique.

5. Effectuer une analyse des différentes hypothèses selon une démarche probabi-

listeetlogique.

6. Utilisersespropresconnaissancesetconceptsadaptésauproblèmeétudié.

7. Formulerunehypothèsediagnostiquequisemblelapluscrédible.

8. Testercettehypothèse.

9. Prendreencomptelesautresdiagnosticspossibles

10. Évaluerlesprocessusderaisonnementquiontamenéaudiagnosticretenu.

11. Communiquercediagnosticaupatient

12. Assurerunsuivi.

Raisonsduchoixdecettedémarchepédagogique Nousavonssélectionnécettedémarchepédagogiquediteheuristique,241carellecorres-

pond à notre cheminement intellectuel afin de parvenir à un diagnostic plausible.

L’heuristiqueapourobjectifderéduirelesespacesdesolutionsenprivilégiantcertaines

voiesderésolution.Lamiseenrelationdesinformationsprovenantdel’interrogatoire

etde l’examencliniqueavec lescaractéristiquesd’unemaladiepeutcontribuerainsià

élaborer une heuristique. Il s’agit d’une solution possible qui sera vérifiée. Si elle ne

permetpasd’obteniràtouslescoupslasolution,l’heuristiquecontribueausuccèsdela

démarche.Lemédecinraisonnehabituellementenplusieursétapes.Àchaqueétape,afin

de limiteruneexplosioncombinatoired’hypothèsesdiagnostiquespossibles, ilassocie

lesinformationsdisponiblesrecueillieslorsdesinteractionsprécédentesaveclepatient

240L’abductionou rétroductionaétédéfinieà la finduXIXèmesièclepar lephilosopheaméricainCharlesSandersPeircecomme«lacapacitédel’espritàdevinerl’hypothèseàsoumettreàl’expérience,enlaissantdecôtésansmêmelesexaminer, lagrandemajoritédeshypothèsespossibles».UmbertoEco(1988)décrit l’abductionainsi:«C’est laformelaplusimmédiateetaléatoirederaisonnementparinférence;ils’agitd’unehypothèseconstruitesurlabasedeprémissesincertaines,quidemandentàêtrevérifiéepardesinductionssuccessivesetpardescontrôlesdéductifs»241NotionancienneremiseaugoûtdujourparGeorgePolya(1965p.93).Seloncetauteur«l’heuristiques’efforcedecomprendrelaméthodequiconduitàlasolutiondesproblèmes,enparticulierlesopérationsmentalesquis’avèrenttypiquementutilesàl’applicationdecetteméthode.Sessourcesd’informationsontdiversesetl’onnedoitennégligeraucune.Uneétudesérieusedel’heuristiquedoittenircomptedel’arrièreplanaussibienlogiquequepsychologique».Nousdéfinissonsl’heuristiquecommeuneopérationmentale,rapideetintuitive,unraccourcidepenséequipermetdelimiterleshypothèses,gagnerdutempspourproposerunrésultatvraisemblableetacceptable.

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avec les résultats issus d’une précédente réflexion; ceci dans le but de concevoir de

nouveauxapprofondissementsplusciblés.Cedispositifestexpérimentérégulièrement

depuis près de 20 ans en formation médicale continue: cette démarche heuristique

permetauxenseignantsdedébuterunséminaireàpartirdesplaintesetsymptômesdes

patients.Dansunpremiertemps,nousprésentonsauxparticipantsuncascliniquecon-

cis avec au moins un symptôme et un nombre limité d’informations. À la suite d’un

tempsderéflexion, lesapprenantsproposentune listehiérarchiséedediagnosticspo-

tentiels; ils nous demandent ensuite si telles ou telles informations ont été relevées

(autres plaintes, résultats de l’examen clinique, propositions d’examens complémen-

tairesetrésultats,etc.).Àchaqueétapedecetteapprochehypothético-déductive,nous

débutonsuncourtdébatdestinéàlimiterlesdifférenteshypothèses.Lafinalitédecette

démarcheestd’explorerleraisonnementcliniquedesapprenantsetdeleurapprendreà

réduirel’incertitudeavecdesdiagnosticscliniques,desrésultatsd’examencomplémen-

taires,etc.

Lepremierthèmequenousavonsabordédanslesannées1990aveccecadrepédago-

gique avait porté sur unefièvre prolongée survenue chez une patiente de 42 ans qui

n’avait jamaisquitté leterritoirefrançais.Lorsdecetteapprochepédagogique,chaque

participant, aprèsavoirdécouvert le cas cliniquedécrit succinctement,devaitdansun

premiertempsraisonnerindividuellementpuisnotersurunefeuilledepapiersesdiffé-

rentes hypothèses hiérarchisées ; dans un second temps, l’enseignant a demandé à

chaqueapprenantdepartageraveclegroupesesréflexionsetlesraisonsquil’ontame-

né à obtenir de telles propositions. À chaque temps de résolution de ce cas clinique,

l’enseignantapportedesinformationspouvantêtreutilesounonàl’élaborationdudia-

gnostic.

Dans lecadredenotretravailderechercheactuel,nousavonsdésirécomparer lesré-

flexions et les productionsdedeux sous-groupesd’Internes enmédecine (unpremier

sous-groupede7 étudiants, un secondde6) inscrits enpremière annéedu troisième

cycle de médecine générale. Ces internes ont un bagage théorique très conséquent

puisqu’ils viennentde se soumettre aux épreuves classantesnationales (ECN)afinde

choisir leur future discipline d’exercice en fonction du rang de classement obtenu à

l’issuedecesépreuves;maisilsontpeud’expériencedumétierdemédecinenautono-

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225

mie.C’est la raisonpour laquellenousavonsproposéun cas clinique complexeet au-

thentiquepourrépondreànotreobjectif.Nousavonsélaboréundispositifpédagogique

selonleschémasuivant:

• Un premier temps de réflexion individuelle, commun aux deux sous-groupes.

Chacundesparticipantsdoitclasserparordredeprobabilité(delaplusforteàla

moinsforte)leshypothèsesdiagnostiquesplausibles(entre8et10propositions)

relativesaucascliniqueproposé.Cettedémarchedans lecadredenotretravail

derecherches’estdérouléeendeuxétapes:unepremièreétapeavecunnombre

limitée d’informations qui a pour but de lister plusieurs hypothèses diagnos-

tiquesplausiblesaveclecasclinique;puisunesecondeétapeoùl’enseignantap-

porte aux apprenants des informations complémentaires nécessaires pour dé-

couvrirlediagnosticidentifiécommeleplusprobableparl’enseignant.Lebutde

cepremiertempsestd’étudierladémarcheréflexiveindividuelledesinternes.

• Dansunsecondtemps,chaquesous-groupeaœuvrédefaçondifférente:

o Dans le premier sous-groupe (dénommé sous-grouperéflexion), l’objectif

estd’obteniràpartirdelaproductionindividuelledechaqueparticipant,

unelistehiérarchiséecommuneissued’unediscussionetd’uneréflexion

collective.

o Danslesecondsous-groupe(dénommésous-groupeaddition),l’enseignant

a demandé à chaqueparticipant depondérer les 5premiersdiagnostics

qu’ilavaitchacunclassésduplusprobableaumoinsprobable:lediagnos-

tic leplusprobableestaffectéduchiffre5, le2eavec lechiffre4,etceci

jusqu’au5e(chiffre1).Cependant,troisinternesontpondéréseulement2

ou3hypothèsesdiagnostiques,n’étantpasd’accordaveclesautreshypo-

thèses.Dans ce cas, nous avons affecté la note zéro auxdiagnostics non

pondérés, ce qui explique les totaux obtenus (cf. 3.1.4., § résultats). Les

participantsontproposéàl’enseignant,chacunàleurtour,lesdiagnostics

sélectionnésaveclespondérationsaffectéesàcesdiagnostics.Ils’agituni-

quement d’une additiondepropositions individuelles. Il n’y a pas eude

discussion ni de réflexion de l’ensemble des participants, à l’inverse du

premiersous-groupe.

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PrésentationdelasituationLecascliniqueaétédéclinéendeuxblocsdedonnéessuccessifs: Premierblocdedonnées

MédecinexerçantdanslesuddeParis,vousêtesappeléaudomiciled’unepatienteenceintede6moisetdemi,âgéede29ans,quiseplaintd’unedouleurthoraciquenonconstrictiveetnonsoulagéeparlaprisedeparacétamol.Cettepatientetoussedepuis 3 semaines,mais ne prend pas de sirop, car elle sait que c’est déconseillépendantlagrossesse.Elleestemployéedansuneagencebancairesituéeenbanlieueàenvironuneheureetdemiedesondomicile.Ellefumaitenviron5cigarettesparjouravantsagrossesse,maisastoppénetlorsqu’elleaapprisqu’elleétaitenceinte.Ellen’ajamaisvraimentfaitd’abusdeboissonsalcooliséesetapuboireunecoupedechampagnedepuisqu’elleestenceintelorsd’unanniversaire.Ellenefumepasducannabis. C’est son second enfant. Le premier est âgé de 18 mois et met del’animationdanslesalonoùellevousreçoit. Elles’estréveilléeenpleineforme.Ladouleurs’estmanifestéeaprèslepetitdéjeu-ner.Elleaprisuncomprimédeparacétamol.Lapatienteestalorsdescenduecher-chersoncourrieravecsonenfant(3étagessansascenseur).Elleadiscutéavec lagardiennequivoulaitprendredesesnouvelles.Lorsqu’elleestremontée(enportantsonenfant),elleressent toujourscettedouleurquin’apasétécalméepar lecom-primé pris une heure auparavant. Lorsque vous l’interrogez, la douleur n’a pasaugmentélorsqu’elleaquittélehalld’entréepourrejoindresondomicile.

Cecascliniqueàdéveloppementprogressifapporteauxétudiantslorsdela1reétapeun

minimumd’informations. La description du cas à cette étape était incomplète et a pu

embarrasserlesinternespourrépondrecorrectement:denombreuseshypothèsesdia-

gnostiquessontenvisageables.L’étapesuivanteapportedesinformationsplusprécises

permettantd’affinerlalistedeshypothèsespossibles.Chaqueétapesuivantevaappor-

ter des informations de plus en plus précises qui vont permettre de garder les hypo-

thèsesplausiblesetderejeterlesautres.Ilestpossibled’arrêterl’exerciceencoursafin

d’avoirunelisted’hypothèsesquelesInternesdevrontexpliciter;oubieneffectuerune

àunetouteslesétapesprévuesafind’obteniràlafindel’exerciceuneseulehypothèse

diagnostique.

Lebutde cettepremièreétapeestd’envisager toutes les conjecturespossibles liées à

cettesituationcliniquecomplexe.LesInternesdoiventrépondreàcestroisquestions:

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• Quellessontleshypothèsesdiagnostiquespossibles?

• Quellessontlesquestionslespluspertinentesàposeràcettepatiente?

• Quelssontlesindicesetconstatsqu’ilseraitraisonnablederechercher?

Secondblocdedonnées:

Commeelles’étaitplainted’unedouleurauniveaudesonthorax,vousavezamenéàsondomicile un électrocardiographe portable. Un tracé est rapidement réalisé: il existe undiscretsus-décalagedusegmentSTdans3dérivationsprécordialesde2mm,sansimageenmiroir; le rythmeest sinusal, iln’yapasde troubledu rythme.Lapression sanguineartérielleestmesuréeà115/70mnHg.L’auscultationneretrouveaucuneanomalie,au-cun souffle cardiaque n’est constaté. À l’auscultation pulmonaire, quelques ronchi sontperçus,mais aucun râlesni de sibilants. Il n’existepasde zonedematité. Les vibrationsvocales sont perçues dans les 2 champs. Vous lui demandez de mettre un doigt dansl’oxymètre: lasaturationenoxygèneestde97%etunpoulsà84cyclesparminutes.Lapatienten’apasvomietnesouffrepasdetroubledutransit(elleestcependantfréquem-ment constipée). Vous examinez ses jambes. Il existe un discretœdème bilatéral, qui estprésentdepuisplusieurssemaines.Avantledébutdesagrossesse,lapatienteseplaignaitd’unesurchargepondérale;elleapris12kgdepuis(sonpoidslasemainedernièrelorsdesaconsultationaveclasage-femmeétaitde87kgpourunetaillede161cm.

• Quellehypothèsediagnostiquepouvez-vousproposeràcestade?

• Quellesquestionsallez-vousposeràcettepatiente?

• Quelssontlesindicesetconstatsàrechercher?

• Quelséventuelsexamensallez-vousluiprescrire(ilest11hdumatin)?

Résultats

Lediagnosticposéet retenupar lapersonnequiaécrit cette situationauthentiqueet

complexe est celui d’unepéricarditeaigüe sans critèrede gravité. Cediagnostic sera

confirméparunécho-dopplercardiaque(examenpossiblechez la femmeenceinte).Si

nousretenionslescinqpremièrespropositionseffectuéesparlesInternesdanslepre-

miertempsdel’exercice,delaplusprobableàlamoinsvraisemblable,lediagnosticat-

tenduaétéévoquéparenvironlamoitiédesinternes(6/13);lediagnosticproposépar

l’enseignantn’a jamaisétépostuléenpremier,maisfiguraitdansdeuxcas,unefoisen

secondepositionetuneautrefoisentroisièmeposition(2/13).Sinousétendonsnotre

sélectiondediagnosticsdecinqàhuitpropositions,toujoursdanslepremiertempsde

l’exercice,lediagnosticattenduaétéproposéparonzeinternessurtreize(11/13).Les

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diagnosticspossiblesproposésparlesinternesetclassésparordrealphabétiqueétaient

les suivants : angor, bronchite, coqueluche, dissection aortique, embolie pulmonaire,

névralgieintercostale,œsophagite,péricardite,pleurésie,pneumopathie,pneumothorax,

reflux gastro-œsophagien, ulcère de l’estomac, zona242. À l’issue de ce premier temps,

nous n’avons pas demandé aux étudiants de reprendre chaque proposition selon le

schémasuivant:quelssont lessignespositifspouraffirmerteldiagnostic?Quelssont

lessignesnégatifs243?Eneffet,nousnevoulionsàaucunprixinterférerdanslesecond

tempsdel’exerciceetmodifierainsilesavisdesparticipants.

Lorsdu second tempsde l’exercice, la classificationhiérarchiqueproposéedans le1er

tempsdel’exerciceaétébouleversée.Notreobjectifétaitdetesterlasupérioritéd’une

réflexioncollectiveparrapportàuneréflexionindividuelle.Lerésultatn’estpasréelle-

ment significatif. Certes, la péricardite est un diagnostic encore présent dans le sous-

grouperéflexion (toujoursen4eplace). Iln’amêmepasété retenupar le secondsous-

groupeaddition.

Nousproposonsci-dessousuntableauélaboréaveclesrésultatsobtenusàl’issuedela

secondephasedel’exercice.Cetableaucomporte3colonnesderésultat.Dansla1reco-

lonnefigurentleshypothèsesdiagnostiqueshiérarchiséesparordredeplausibilité,dé-

terminéeslorsdupremiertempsdel’exercice.Nousavonsrecueillidansune2ecolonne,

selonuneéchelleduplusvraisemblableaumoinsvraisemblable, lesrésultatsdusous-

grouperéflexion (6 internes);dansune3ecolonne, lesrésultatsproposéspar les7 in-

ternesdusous-groupeadditionontétécolligésselonleprincipedehiérarchisationutili-

sédansle1ertempsdel’exercice.

Danscegroupe,les5diagnosticsproposésduplusaumoinsvraisemblableontétéaffec-

tésd’unnombre.Cederniercorrespondà lasommedespondérationsproposéespour

242Diagnosticsduplus fréquentsaumoins fréquents (8 hypothèses diagnostiques possibles–entreparenthèses,nombredecitations):emboliepulmonaire(13),pneumopathie(12),pneumothorax(12),péricardite(11),névralgieintercostale(10),refluxgastro-œsophagien(8),ulcèregastroduodénal(5),pleurésie(4),zona(4),angor(3),coque-luche(3),œsophagite(2),bronchite(2),dissectionaortique(1).Certainsparticipantssesontlimitésà5ou6hypo-thèsesdiagnostiques–Listeobtenueavecunehiérarchisationde5diagnosticspossibles:emboliepulmonaire(11),pneumothorax (11), pneumopathie (10), névralgie intercostale (8), péricardite (6), reflux gastro-œsophagien (5),ulcèregastroduodénal(4),zona(3),angor(3),coqueluche(2),bronchite(1),œsophagite(1).Ladissectionaortiquen’estpluscitée.243Quandunsigneestprésentetsignificatifpourunehypothèsediagnostique,ilestditpositif.Siunsignecliniqueestabsent,doncnonsignificatif,ilestditnégatif.

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chaquediagnosticparchacundesmembresdecesous-groupeselonlaventilationnotée

enbasdepage244:

1re partie de l’exercice 2e partie de l’exercice Classement proposé du plus fréquent au

moins fréquent

Classement collectif obtenu à l’issue du 1er temps de

l’exercice

Classement 1er sous-groupe dit « réflexion » Production collective

Classement 2e groupe « ad-dition » Dossiers colligés

(nombre de points relevés)

1 Embolie pulmonaire Névralgies intercostales Embolie pulmonaire (27)

2 Pneumopathie Embolie pulmonaire Pneumothorax (22)

3 Pneumothorax Pneumopathie Pneumopathie (21)

4 Péricardite* Péricardite* Zona (9)

5 Névralgie intercostale Ulcère de l’estomac Angor (6)

*correspondàlabonneréponse

Figure 12 : Hiérarchisation des diagnostics proposés à l'issue du second temps du dispositif de recherche n° 1

Analysedecettedémarchepédagogique

Il n’y apas eud’échanges interactifsdans le sous-groupeaddition. Les étudiantsde ce

sous-groupe n’ont pas recherché à débattre sur les différences constatées entre leurs

propreshiérarchisations.Seulunétudiantainsistésurlapossibilitéd’angor,carilavait

rencontrécettesituationunefoischezunefemmeenceintedansunservicehospitalier

lorsqu’ilétaiten5eannéedemédecine.Ilavaitmislanote5.UnautreInterneavaitpon-

dérécetitemdelanote1.Iln’apasétécitéparles5autresétudiants.Uneanalyseplus

finedesdiagnosticsproposésmontreunedémarchediagnostiquedelapartdecesétu-

diants qui s’appuie essentiellement sur le biomédical et qui prend peu en compte les

donnéesducascliniqueetl’aspectpsychosocial.

244Lapondérationproposéeparles7membresdusous-groupeadditionpourlediagnosticd’emboliepulmonaireestlasuivante:5;5;4;5;3;3;4soituntotalde27.Pourlepneumothorax,leschiffresnotéssontlessuivants:2;3;4;3;4;2;3correspondantàuntotalde22.Pourlediagnosticdepneumopathie,lespondérationssontlessuivantes:4;2;5;3;2;3;2soituntotalde21etc.Lanote0,signifiantundésaccordouunenonpriseencomptedesdiagnosticsproposés,aétéutiliséeàplusieursreprisesparlesparticipantsdusous-groupeaddition).

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L’animationdusous-grouperéflexionaétéréaliséeaudébutparunInterne,cequ’ilafait

correctementmême s’il n’avait pas l’expérience d’un animateur confirméde FMC. Ce-

pendant,lesous-groupeadditiondontj’aiassurél’animation,aterminéassezrapidement

son travailet j’ai pu participé activement aux discussions interactives du sous-groupe

réflexion. Comme les propositions étaient focalisées surtout sur la clinique et négli-

geaientlecontextesocialethumain,j’aidemandéauxmembresdusous-grouperéflexion

dementionner les signes positifs et les signes négatifs en faveur des hypothèses dia-

gnostiques choisies. Les 6 participants ont surtout insisté sur les signes négatifs tels

qu’ilssontdécritsdanslanote245ci-dessous:

Nousavonsdemandéensuiteausous-groupeadditiondesejoindreàladiscussionpour

undébatinteractifaveclesautreshypothèsesdiagnostiques.Ledébats’estfocalisésur-

toutsur laclinique(biomédical)etanégligéengrandepartie lecontextesocialethu-

main(psychosocial).Lesparticipantsdecesous-groupeontdesidéesassezarrêtéessur

certainsdiagnosticsdéfendusparleurscamaradesetnesontpastoujoursd’accordavec

leurs tentatives d’explications. Ils sont cependant sensibles à ces argumentations:

l’auscultationdespoumonsétaitclaire.Ladouleurétaitressentieparfoisàl’inspiration

par lapatientequines’est jamaissentieréellement fébrile(mais lemédecinauraitpu

vérifierlatempérature).Iln’yavaitaucunsigneenfaveurd’unethromboseveineuse.Le

tracé ECG nemontrait pas d’anomalie évoquant un angor ou un infarctus, la douleur

n’étaitpas réellementconstrictiveniangoissanteetnegênaitpas lapatientedansses

actesquotidiens.Lepoulsetlapressionartérielleétaientnormaux.Enconsidérantson

âgeetenl’absenced’antécédentscardiovasculairesfamiliaux,lediagnosticd’angoretde

245La névralgie intercostale: il n’y a pas de symptômes en faveur d’une affection cardiaque, pleuropulmonaire nidigestive(pasdetoux,dedyspnéenidepyrosis).Maisaprèsdiscussionavec lemodérateur, lesparticipantsrecon-naissentqueladouleurauraitpuêtredanscecascalméeparlaprisedeparacétamol.L’emboliepulmonaire:estretrouvéeunpeuplusfréquemmentchezlafemmeenceinte;eneffet,lerisquedephlébiteestpossibleetpeutpasserinaperçucarilyasouventdesœdèmesdesmembresinférieursencasdegrossesse.Encasd’œdèmessouventliésàlaprisedepoids,l’examencliniqueestplusdélicatàlarecherched’uneabsencedeballotte-mentetd’unedouleurprovoquéedumolletàladorsiflexiondupied(signedeHomans).Lapneumopathie:lapatientenes’estpasplaintedetoux;l’auscultationpulmonaireestdifficileetcontribuepeuàlarecherched’uneétiologiepleuro-pulmonairecaraveclebruitambiant(signalédansletexteducasclinique),ilétaitdifficilederéaliseruneauscultationcorrecte.La péricardite est un diagnostic possible;mais à l’auscultation, il n’a pas été perçupar lemédecin de frottementspéricardiques:ilétaitpréciséquel’enfantde18moisétaitbruyantetpouvaitembarrasserlemédecinlorsqu’ilaus-cultait lapatiente.Aucun internen’ademandés’ilexistaitdesmodificationsde l'intensitédecettedouleur lorsdeschangementsdeposition.Le diagnostic d’ulcère gastroduodénal a été posé par trois internes dont deux ont effectué un stage en gastro-entérologie,cequipeutmodifierlanotiondeprévalencedecetteaffectionenmédecinedepremierrecours.

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dissectionaortiqueétaitpeuvraisemblable.Ladouleurn’étaitpasdetypebrûlure,selon

unterritoiremétamérique,sanséruption,etlediagnosticdezonaétaitpeuplausible.

Nousavonssollicitéles13participants,àlafindupremiertempsdel’exercice,pouréla-

borerune listehiérarchiséedehuithypothèsesdiagnostiques,de laplusplausibleà la

moinsplausible.L’emboliepulmonaireétait lediagnostic leplus fréquemmentcité(cf.

note 186), puis à égalité la pneumopathie et le pneumothorax, la péricardite en qua-

trièmeposition,lanévralgiecostaleensuite,lerefluxgastro-œsophagien,l’ulcèregastro-

duodénal,enfinlapleurésieetlezonaàégalité.

Nous avons demandé aux deux sous-groupes, lors de la seconde partie de cette dé-

marche pédagogique, de limiter à 5 le nombre d’hypothèses diagnostiques; en effet,

nousavonsdûprendreenconsidérationletempslimitéquinousrestaitdisponiblepour

ce travail. Il existe une différence nette entre la classification proposée par le sous-

grouperéflexionet lesous-groupeaddition.Deuxdiagnosticssur5sontcommunsàces

deuxsous-groupes.Seulelapneumopathiefigureau3erangdanscesdeuxsous-groupes

(2e rang lors de la réflexion à 13 participants). La liste des hypothèses diagnostiques

proposéeparlesous-grouperéflexionestplusprochedecequiétaitattenduparrapport

à la situationclinique,quecelledu sous-groupeaddition. Cettedernièreestbaséeuni-

quement sur cequiaétéproposéenplénièredans lepremier tempsdece travail.En

effet,lesinteractionsquionteulieudanslesous-grouperéflexionontpermisdemodifier

la liste des hypothèses diagnostiquées par l’ensemble des Internes dans le premier

tempsdel’exercice.

LesInternesdusous-grouperéflexionontd’embléeéliminélediagnosticd’angorquiétait

horssujet(pasdedouleurconstrictive,jeuneâge,douleurnonmodifiéeparl’effort,sans

signespatentsde souffrance cardiaque à l’électrocardiogramme). Les cinqhypothèses

diagnostiques proposées par ce sous-groupe réflexion sont plus vraisemblables que

cellesproposéesparlesous-groupeaddition.S’iln’apasétépossiblededémontrerune

acquisitiondeconnaissances,nousavonsmontréquegrâceauxinteractions,lalistede

diagnosticspossiblesestplusadaptéeàlaréalitéducascliniquediscuté.

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Conclusion Autotal,lesreprésentationsdesInternesvis-à-visdececascliniquesesontsurtoutex-

priméessurlecôtéclinique(biomédical)ainsiquesurledegréd’urgencepourinterve-

nir. Pour certains, cette situation n’était plus l’affaire dumédecin généraliste traitant,

maisdesservicesd’urgences.Laplupartdesinternesexerçaientsoitdansdesservices

d’urgences, soit dans des services de médecine adulte avec l’obligation fréquente de

prendredesgardesauxurgences ;cequipourraità larigueurexpliquer leurchoixde

diagnosticsplausibles:emboliepulmonaire,pneumothoraxetpneumopathie.Silama-

mansouffraitd’untelproblème,ellen’auraitpasprobablementpuportersonenfantde

la loge jusqu’àsonappartement.Les internesn’ontvuqu’unaspectde lasituationcli-

niqueproposée,à l’origined’undéfautpossibledans leur jugementglobal.Statistique-

ment,cetravailnepeutêtresignificatif,carlenombredeparticipantsestnettementin-

suffisant. Cependant, nous avonsmontré quemême avec un petit effectif, nous avons

uneproductionavecunehiérarchisationdeshypothèsesdiagnostiquesplusconformea

cequiétaitattendulorsquelesparticipantss’engagentdansundébatinteractif.

Nousn’avonspas recherché ensuite à analyser et discuter les résultatsd’une telle re-

chercheeffectuéeavecungroupede30étudiantsenpremièreannéedeD.E.S.;celaaété

déjàassezdifficileavecunpetitéchantillon.Lechoixdetravailleravecdesétudiantsen

1reannéedeD.E.S.n’étaitpeut-êtrepasunchoix judicieux.Eneffet, lesétudiantsvien-

nent de quitter le modèle hospitalo-universitaire du second cycle depuis moins de 3

mois,oùseulslessavoirsformalisésdansleslivresouàl’hôpitalontdroitdecité.Aucun

decesétudiantsn’avaitune idéedecequipouvaitsepasser«dans lavraievie»d’un

médecingénéraliste,mêmesicertainsavaienteulachancedefairedanslesecondcycle

unstagechezunpraticienambulatoire(centredesantéoucabinetdeville).LesInternes,

habituésàdessituationslivresquestypes,souventfigées,onteubeaucoupdemalàac-

cepterlediagnosticproposéparl’enseignant.Cettepremièreexpérimentationatrouvé

sesprolongementsdansuneautredémarche,maisavecdesInternesplusexpérimentés

(3eannéedu3ecycledemédecinegénérale)

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3.2.Deuxièmedémarchepédagogiqueexplorée:legrouped’échangedepra-tiques

Présentationdeladémarchepédagogique Lesgroupesd’échangesdepratiquessontbaséssurleprincipequechaqueindividuest

responsabledudéveloppementdesesproprescompétences.Ilsontpourbutdefavori-

ser l’acquisition de savoirs grâce à des échanges interactifs entre différents appre-

nants246. Selon Pierre Bourdieu (2012), les humains sont certes des êtres conscients,

maissurtoutdessujetsagissantsetdotésd’unsenspratique,ayantacquistoutaulong

de leurviedespréférencesetdescapacitésdeperceptionspersonnelles; le toutagis-

sant sur le monde grâce à fonctionnement de leur structure cognitive. Le groupe

d’échangedepratiquesconcerneunpetitgrouped’individus,del’ordrede10à20per-

sonnes (toujours lesmêmes), qui se réunit une fois parmois surun thème rencontré

dans lavieprofessionnelleàchaquefoisdifférent.Pendant laduréed’unsemestre, les

participantsdoiventêtreprésentsphysiquementàcesréunions.Cecicontrairementaux

communautésdepratiquedontladuréeestvariableetsouventbeaucouppluslongue,et

dontlaprésencephysiquedesparticipantsn’estpasnécessaire:ilspeuventcommuni-

querpard’autresmoyens(vidéoconférences,Internet,etc.)247.

Dansletroisièmecycledesétudesmédicales,cettedémarchepédagogiqueestproposée

auxinternesenmédecinequiontdéjàunecertaineexpérienceprofessionnelle.Ilspeu-

ventainsianalyserensembleetrésoudreplusaisémentunoudesproblèmesrencontrés

aucoursdeleurstagepratique.Généralement,undesparticipantsproposeaudébutde

larencontreunesituationproblématiquerencontréeaucoursdesonstageetexposeles

donnéesduproblème.Lesautresparticipantscontribuentaudébatinduitdansuneto-

246FRANCOISPatriceetal. (2013).Groupesd’échangedepratiqueentrepairs :unmodèlepour ledéveloppe-mentprofessionnelcontinuenmédecinegénérale,LaPresseMédicale,42,pp.e21-e27;BEYERM,GERLACHF,ELIESU,etal. (2003) The development of quality circles/peer review groups as amethod of quality improvement in europe:resultsofasurveyin26Europeancountries.FamPract.,20,pp.443–451;RIOUFrançoiseetal.(2007).Resultsofa12-monthquality-circleprescribingimprovementprogrammeforGPs.BrJGenPract,57,574–576;DeGROOTE.etal. (2013).Developmentof critically reflectivedialogues incommunitiesofhealthprofessionals,AdvancesinHealthSciencesEducation18,pp627–643; SCHAUBde JONGM. et al. (2009).The roleofpeermeetings forprofessionaldevelopmentinhealthscienceeducation:aqualitativeanalysisofreflectiveessays.AdvancesinHealthSciencesEduca-tion,14pp503–513;PARBOOSINGHJ.T. (2002).Physiciancommunitiesofpractice:Where learningandpracticeareinseparable.TheJournalofContinuingEducationintheHealthProfessions,22,pp.230–236;HAS-HauteAutoritédeSanté(2006).Lesgroupesd’analysedepratiquesentrepairs.HAS.247SelonWenger (2005), les communautésdepratique sont forméesparungroupenondélimitédans le tempsetdanslenombredeparticipants.Cesderniersrecherchentetproposentdessolutionsauxproblèmesrencontrésdansleursexercicesprofessionnels.

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tale interactivité. Cela nécessite beaucoup d’attention et de méthodes de la part de

l’enseignant.Cedernierjoueunrôledemédiateuretderégulateurefficaceafinquetous

lesparticipantspuissents’exprimer.Larecherched’unesolutionacceptabledoitprove-

nir essentiellement des participants. Parfois, l’enseignant, qui a un rôle également de

mémoiredugroupe(ilessaiederapporterparécritlesdifférentesinterventions),peut

donnerdesinformationsutileslorsqu’ellessontinconnuesdesparticipants.

LorsdesstagesenSASPAS248(StageAmbulatoireenSoinsPrimairesenAutonomieSu-

pervisée),nousavonsproposéauxInternesen3eannéedudiplômed’étudespécialisée

enmédecinegénérale(D.E.S.),desréunionsmensuellesensoiréed’uneduréededeux

heuresdans les locauxde laFacultédeMédecinedeParisDiderot. Les étudiantspré-

sentssélectionnentunoudeuxsujetsleplussouvent,àtraiterpendantlaréunion.Nous

avonsainsianiméuneséanceavec12Internes.Lorsdecettesoirée,lesujetaportésur

lecasd’unenfantquiaétégifléparsonpèredevantl’interne.Ilauraitétéintéressantde

réaliserunauditsurlesconnaissancesdesInternessurcesujetaprèslaprésentationdu

cas.Maislebutdecettedémarcheestdefavoriserlaspontanéitédesparticipants,etil

estdifficiledecasserladynamiqueinteractivequifaitsuiteàl’énoncédececas.Aussi,il

n’a pas été possible de comparer ce que les étudiants connaissaient sur ce thème au

momentdel’énonciationduproblèmeaveclesinformationsretenuessuiteàladiscus-

sion.À l’issuede laprésentationde l’Interne, l’enseignantanimeundébat interactifet

prendsoindenoter(et/ouenregistrer)lanaturedesdifférentesinteractions.

Raisonsduchoixdecettedémarchepédagogique

Cettedémarched’apprentissageapourobjectifnonseulementdefavoriserundévelop-

pementdessavoirspratiquesetdessavoirsd’actions,maisaussiinduiredestransforma-

tions chez les participants afin d’améliorer leurs compétences professionnelles. Cette

approchepédagogiquenécessitedelapartdesmembresdugrouped’adopterunepos-

tureréflexivequivaagirsurlacognition,maiségalementsurlesprocessusmétacogni-

tifs.Leparticipantquiprésentesonproblèmeestsouventdansunesituationd’inconfort.

Ledialoguequis’instaureàlasuitedelaprésentationestdestinéàaiderceparticipantà

248Lorsdecestagequialieugénéralementen3èmeannéeduD.E.S.demédecinegénérale,l’Internetravailleentotaleautonomiedanslescabinetsmédicauxdetroismédecinsgénéralistesmaîtredestageuniversitaire(MSU)aumoinsunjourchacun.Cestagepeutêtrecomplétépardesjournéesenprotectionmaternelleinfantile(PMI),enhospitalisa-tionàdomicile(HAD),enréseaudesoins,etc.ChaqueMSUdoitobligatoirementréaliserunesupervisiondetouslesacteseffectuésparlesInternesàlafindechaquejournéedestage.

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«sortir»decettesituationinconfortableetl’aideràprendreàpostérioridesdécisions

adaptées.Cette réflexionest égalementutilepour tous les autresmembresdugroupe

afin d’intégrer des nouveaux savoirs, notamment des attitudes et des savoirs d’action

dansleurspratiquesprofessionnelles.Celanécessiteunevolontédesmembresàparti-

ciperactivementauxdébatsdansuneambiancedeconfianceréciproque.

Présentationdelasituation

Audébutdelaséance,uneInterneaprésentéunesituationdélicate,vécuelema-tin même. Elle a recherché auprès des autres participants des réponses à denombreusesinterrogationssurlecomportementsurprenantdupèred’unejeunepatiente qui avait demandé à consulter dans lamatinée. Ce père venait récem-mentdeseséparerdesonépouseetvivaitmallaprocédurededivorceencours.Lemédecinmaîtredestagedecetteinterneétaithorsducabinetmédicalpouref-fectuerdesvisitesdepatientsàdomicile, l’Internes’estretrouvéeseuledans lecabinetmédicalavec la secrétaire.Lapetite fille, âgéede4ans, seplaignantdemalde gorge, lepère très irrité, n’apas supportéque sa fille refused’ouvrir laboucheafind’examinersagorge.Contretouteattente,aulieudelaréconforter,illuiadonnéunegifle.Lepèreestalorssortiàlademandedel’interne.Cetteder-nière demande aux participants du groupe quelle aurait été leur attitude à lasuited’untelgeste.Ellesouhaitequelegroupel’aideàrépondreauxinterroga-tionssuivantes:

• Est-ceunactedeviolence?

• S’agit-ild’unactedemaltraitance?

• Peut-onparlerdenégligencesdupèrevis-à-visdesafille?

• Faut-ilrédigerunedéclarationdemaltraitance?

• Quelssontlestermesnécessairesàlarédactiondecetacte?

• Àquifaut-iladressercetacte(autoritésadministrativesoujudiciaires)?

Résultats Lesinternesquiontparticipéàcetteréuniondegrouped’échangesdepratiquesétaient

en troisième année du D.E.S. demédecine générale. Contrairement à la première dé-

marchepédagogiqueétudiéeoùlesInternesn’avaientpasencorefaitdestageenméde-

cineambulatoire,danscettedeuxièmedémarchepédagogique,lesétudiantsonteffectué

auminimumunsemestreenmilieuambulatoireetdébutentpourcegroupeunsecond

stageenmédecineambulatoire.Ilsontdoncacquisunecertaineexpériencedel’exercice

delamédecinehorsdesmurshospitaliers.Touslesétudiantsontsuiviunenseignement

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obligatoiresurlesmaltraitanceschezl’enfant,maisquialieuen1reannéedetroisième

cycle,deuxansauparavant.Plusdelamoitiédesétudiantsontétéconfrontésàunesi-

tuationdemaltraitance,maissousd’autresformes,jamaisaucabinetdumédecinpour

cettesituationheureusementtrèsrare.

Lasituationétantoriginaleetinconnue,lesparticipantsontessayédefairedesproposi-

tionsenfonctiondeleurspropresexpériencesetsavoirs.Untourdetableaétéeffectué

pour savoir comment chacun des internes aurait réagi dans cette situation. Tous au-

raientfaitsortirlepèreetsolliciterautéléphoneleurmaîtredestage;deuxdesInternes

auraientmêmesaisil’opportunitéd’êtreseulsavecl’enfantpourappelerlapolice!Trois

autres Internesauraient reconnunepassavoirque faireetauraientétéparalyséspar

cette situation. Si ladiscussionaété confuseaudébut,peuàpeu s’estdessinéunaxe

contributifpourdéciderréellementcequidevraitêtre faitsi tellesituationserencon-

traitdenouveau.

Touslesparticipantsontconvenuquelesujetétaittrèsintéressant:cetteréflexioncol-

lectiveétaitcontributivepourleurfuturexercice.Lesproposn’ontpastoujoursmodéré

vis-à-vis du père. Certains internes ont fait part de leurs propres expériences. Pour

d’autres,leursréflexionssontconstruitesàpartird’expériencesracontéesetvécuespar

d’autresprofessionnelsde santéou travailleurs sociaux.Un tel sujetdesdomainesdu

savoir-êtreetsavoiragiraplutôtmotivélesInternespuisquetousontparticipéactive-

mentàladiscussion.Lagestiondelaparoleaétédifficile.Touslessujetsontétéabor-

dés,mêmelafesséequecertainsInternesauraientreçuedeleursparents.PlusieursIn-

ternesontcependantdit:«certainement,jen’auraisjamaisfaitcelaoualorspeut-être

unepetitetapesurlesfesses,maispasd’insultes,dumoinsnousl’espérons,caronnese

reconnaît pas toujours dans la colère ». La situation du père a probablementmodéré

notamment les propos des Internes hommes (au nombre de 4) : « entre ce que nous

souhaitonsfaireetcequel’onfaitvraiment,ilyaparfoisdefortesdifférences».Pourles

Internesfemmes,laréactiondupèreétaittotalementanormale:«jecomprendspour-

quoisafemmel’aquitté».Mettrelesmotsimportantssurla lettreàadresserauxser-

vicesadministratifsanécessitébeaucoupdetemps.Ilétaitnécessairederédigerunacte

toutenpréservantlemédecinsurleplandesaresponsabilité.Notammentendécrivant

defaçonpréciseetobjectivelesélémentsconstatés,sansomissionquipourraitdénatu-

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rer les faitsni révélationexcessive ; limiter lesproposà cequi concerne lepatient et

enfingarderundoubleducertificat.

Nousprésentonsci-dessouslesréponsesproposéesparlegroupeauxinterrogationsde

l’Internequiaprésentélethèmederéflexionselonlerapportécritdel’enseignant:(en

italique,lesinformationsdonnéesparl’enseignantauxparticipants).

S’agit-ild’unactedeviolence?

Iln’yapaseuréellementdedébat, lesInternesreconnaissenttousquelegestedupèreesttotalementinadaptéetsurprenant:ilagiflésafilledevanttémoin.C’estré-ellementunactedeviolencedéplacéeetpourreprendre l’expressiond’unInterne,«intolérable».

Un acte de violence recouvre tout événement, agression, parole, comportementblessantquiporteatteinteàl’intégritéphysiqueet/oupsychiqued’unêtrevivant.

S’agit-ild’unemaltraitance?

Touslesinternessontd’accordsurlaréactiondisproportionnéedupère:lagifleestdetrop.Direquel’enfantestmaltraitéastimuléunlongdébat.Denombreusesde-mandesprisesdeparolesontétéréclamées,chacunayantunavisasseztranchésurlaquestion.Pourcertains,lamaltraitanceestavérée,etmêmes’iln’aeulieuqu’uneseulefois,cegestedevaitêtreconsidérécommemaltraitance:unedéclarationdoitêtreobligatoire.Pourd’autresparticipants,ilestnécessairedetempérerlaréponse:faut-ilcondamnercethommeàneplusavoirlagardedesafille(siladéclarationestréalisée, le risque est grand), alors qu’il peut s’agir simplement que d’un gested’énervement–touslesinternessontcependantd’accord,lagiflen’estenaucuncasuneréponseadaptéeaurefusdel’enfantd’ouvrirsabouche.

Cegestedeviolenceest-il isoléouassociéàdesviolencespsychologiquesvoiredesné-gligenceslourdes?

Ledébataétéégalementhouleux.Selonl’internequiaprésentécecas,lapetitefilleétait bien habillée, parlait correctement pour son âge. Était-elle capable de com-prendrelesparolesdésagréablesdesonpère.Probablement,carellepouvaitasso-ciercesinsultesaveclescris.Pourlaplupartdesinternes,ilnesemblaitpasavoirdenégligences lourdes vis-à-vis de l’enfant, mais le débat manquait cruellementd’argumentsenfaveuroucontrelaprésencedecespossiblesnégligences. Lesviolencespsychologiques(synonymedecruautémentale)correspondentàuneexposition répétée d’un enfant à des situations dont l’impact émotionnel peut dé-passersescapacitésd’intégrationpsychologique

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Faut-ilfaireunedéclaration?

Onzeinternessur12étaientd’accordpourfairecependantunedéclaration.Leurar-gument:l’actedupèreestunactedelâchetéetdeméchanceté.Mêmes’ilétaitfati-guéetusépar lesproblèmesliésaudivorce, iln’aurait jamaisdûtapersursafille,surtoutauniveaudelatête.Ledouzièmeinterneproposaitdefaireunsignalementauxassistantessociales. Onnedoitpasparlerdedéclaration,maisdesignalement.Lemodérateurdonnedes informationssurcesujetenseréférantà l’article45ducodede déontologiemédical qui précise: «Lorsqu’unmédecindiscernequ’unmi-neur auprès duquel il est appelé soit victime de sévices ou de privation, il doitmettreenœuvrelesmoyenslesplusadéquatspourleprotégerenfaisantpreuvedeprudenceet circonspection,maisenn’hésitantpas, si celaestnécessaireàalerterlesautoritéscompétentess’ils’agitd’unmineurdemoinsdequinzeans».

Lesignalementdoit-ilêtreadministratifoujudiciaire?

Il existait avant2007deuxpossibilitésde signalement, en fonction leplus sou-ventdel’urgenceoudelagravitédesfaitsconstatés.Lesignalementd’unenfanten danger pouvait se fairesoit au niveau administratif auprès des services duprésidentduConseilGénéral,soitauniveaujudiciaireauprèsd’unjuged’enfantsouduprocureur.Laloidu5mars2007réformantlaprotectiondel’enfanceains-tituéauniveaudechaquedépartementuneCelluledépartementaledeRecueil,detraitement et d’évaluation des Informations Préoccupantes (CRIP) qui recueilletouslessignalementsetmetenplaceunrapportd’évaluationquipeutêtreéven-tuellementtransmisàlajustice.

Danscettesituation,lesInternesquiprônaientderévélerlamaltraitancesouhai-taientrédigerunsignalementuniquementadministratif.Ladiscussions’est ter-minéeparlarédactiondececertificat,lesinternesinsistantssurtoutsurlesmotsànepasmettredanslecertificatquipourraitmettreencauseledéclarant.

Analysedecettedémarchepédagogique Enprincipe,ladiscussionquialieudansungrouped’échangedepratiquesdoitêtreto-

talementlibre,spontanée;lemodérateurapourrôlededonnerlaparoleàtouslespar-

ticipants,enlimitantletempsdeparoleaubavardetàceluiquisaittout,etenessayant

de faireparler letimideou lemuet.Cependant, l’Internequiaprésentécettesituation

inhabituelle et difficile, a posé plusieurs questions à l’assemblée et attendait des ré-

ponsesàses interrogations.Aprèsun tempsd’échange libred’environ30minutes, les

participants ont essayé de donner des éléments de réponse aux interrogations de

l’Interne.Ledébatgénéralendébutdeséanceaportésurtoutsurlesréactionsàchaud

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et les expériences déjà vécues par chaqueparticipant. Par contre, lorsque les interac-

tionsentreparticipantssesontaxéessurlesréponsesàproposeràl’Interne,deuxclans

semblaients’affronter,dont l’un,représentépar leshommes,unpeuplus favorableau

pèredelapetitefillequeleclandesfemmes.Ceschampsdeforcesquiontétédénom-

més et décrits par Kurt Lewin (1939, 1943, 1947), sont présents dans la plupart des

groupesdeproductionoud’apprentissage.Cetauteuraaffirméqu’il estplus facilede

changerleshabitudes,lesopinionsoulesattitudesd'ungroupequecellesdesindividus

isolés.

"Si l'on utilise les procédures individuelles, le champ de force qui correspond à la dépendanced'unindividuparrapportàunenormevaloriséeagitcommeunerésistanceauchangement.Sice-pendantonréussitàchangerlesnormesdugroupe,lemêmechampdeforcestendraàfaciliterlechangementdel'individu,ettendraàstabiliserlaconduiteindividuelleauniveaudugroupenou-veau249»

Legroupeest"unchampdeforce"enéquilibre.C’estaumodérateurd’assurercetéqui-

libre entre les jeux d'influences, de rapport entre les différents membres afin

d’améliorer la communication interpersonnelle et inciter ainsi les participants à une

meilleureproduction.Lerôledumodérateurestfondamentalpourlabonnemarchedu

groupe.Ildoitêtreàlafoisdirectif(pourtenircomptedutempsprévupourlaréunion,

desobjectifsetpourobtenirunedécision).Ildoitêtreaussipeudirectifselonlaconcep-

tualisationdeCarlRogersafinde favoriser ledialogue interactifetalimenter ledébat.

C’estcequenousavonstentédefairelorsdecettesoirée.Lesparticipantsontdonnéà

l’Interneconcernéparleproblèmedelamaltraitancedesélémentssuffisantspourrédi-

geruncertificatconformeàleursattentes.Ilsétaientpratiquementd’accordpouradres-

sercecertificatauxautoritésadministrativesetnonjudiciaires.Parcontre,enraisondu

tempspasséà la rédactionducertificat, Iln’aplusétépossibled’obtenirune réponse

communeauxdeux interrogationssuivantescitéesci-dessus: faut-ilprévenir lepère?

Faut-ilprévenirlamère?

Toutediscussiondansungroupepeut être également à l’origined’un conflit entreun

systèmederéférencesociétal,institutionnel,légal,quenouspouvonsqualifiédeformel

(ce que nous devons faire) et un systèmede référence personnel, informel, acquis au

contactdetoutcequinousentouredepuisnotrenaissance,etcaractériséparunpropre

249LewinKurt,(1975).Psychologiedynamique,p.278.

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dispositif de valeurs qui peut varier d’un individu à l’autre. Dans le groupe que nous

avonsmodéré,chaqueparticipantaessayédedéfendresonpointdevuepersonnelqui

lui a semblé conforme à la situation présente. Cependant, pour préserver l’unité du

groupeetnepaspasserpourunepersonnalitéhorscadreinstitutionnel,aupirepourne

pasêtreconsidérécommeunêtredéviant,chacundesmembresdugroupevarecher-

cherà s’adapterà cequi estditdans le groupe, à ajusterplusoumoins sesdiresaux

autrespropositionsdesparticipants.

Cetterechercheduconformismepeutexisterdans toutgroupeetpeutêtreparfoisun

écueilà lacréativitédugroupe.Lorsdecetteréunion, chacuna faituneffortpourre-

chercherunconsensusafinderédigeruncertificat.Eneffet,touslesInternessesontmis

rapidementd’accord,dès ledébutdudébat,pour rédigerun tel certificat.Desconflits

entrelesdifférentsparticipantsontétécependantprésents.Ilsontporténonseulement

surlesmotsàécrireet ledestinatairedececertificat(administrationoujustice),mais

aussisurtroisactionsqu’ilsontjugéindispensablesàprendreencompte:faut-ilpréve-

nir lepèrequelemédecinarédigéuntelcertificatet latransmissiondececertificatà

l’autoritéadministrativeoujudiciaire?Est-ilnécessairedeluifaireparvenircecertificat

si le père le demande (avec des possibles conséquences juridiques)? Faut-il prévenir

obligatoirement lamèrede l’enfantsur l’attitudedupèreetde la rédactionducertifi-

cat?

Conclusion Quelle(s) réflexion(s) pouvons-nous effectuer sur cette action. Le groupe a fait diffé-

rentes propositions pour aider notamment l’interne à rédiger le certificat. Cependant,

cetteréflexionsurl’actionamontrélesdifficultésàgérerunetellesituation.Comment

vasecomporterlepèreàlasuitedececertificat?S’ildemandeàvoirlemédecin,com-

mentcedernierdoit réagir?Nousapprenonsàdépister l’enfantmaltraitéouàrisque

d’êtremaltraité(parentsetalcool/toxicomanie–maisaussiparentisolédépressif,etc.).

Nousavonsapprisqu’iln’existepasdeconduiteàtenirbiendéfiniefaceàcefléausocial.

Danscefloudedécisionsutilesàprendre,nousavonstendanceàutilisersoitdesproto-

coles recommandés, mais pas toujours adaptables à la situation, soit des «recettes»

glanées ci et là, pouvantnotamment releverde savoirsnon formels.Nousdéfinissons

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ces derniers comme des informations que l’apprenant trouve intéressantes pour un

usageprofessionnel oupersonnel, à l’occasiondediscussions informelles à proposde

sujets divers. Ces discussions ont généralement lieu dans des lieux institutionnels de

formation,notammentaumomentdespausesoudesrepasprisencollectivité.Dansles

couloirs, il est possibledeprendre connaissanced’informations essentielles, parfoisaussi

intéressantes pournos conduites à tenir, que celles qui peuvent être enseignées dans les

sallesdecours250.

Legrouped’échangedepratiquesestunlieud’échangeetnonundispositifdidactique

destinéàtransmettreuncontenudéfini.Avantlaséance, lemodérateurneconnaissait

paslethèmequiaétéproposénilesattentesdelapersonnequiaproposélesujetàdé-

battre.Cetravaileffectuédansunetotalespontanéitéestglobalementintéressantsurle

planpédagogique: lesétudiantsontétéencontactavecdes informations importantes

pourleurexerciceprofessionnel;ilsontdébattuàproposdecesinformations,entreeux.

Cette forme d’apprentissage est plus intéressante qu’un enseignement magistral où

l’informationvadansunseulsens,deceluiquisaitàceluiquinesaitpas.Danslecasde

l’échangedepratiques, iln’yad’interlocuteurprécisà l’originede toutes les informa-

tionsquicirculentd’unemanièreinteractive.

Cependant,cedispositifpédagogiquenepeutfonctionnercorrectementquesilesparti-

cipantsontacquisunbagagesatisfaisantensavoirsetenexpériences;ceciafindedé-

battrecorrectementlesunsaveclesautres.Cedispositifestégalementproposéauxmé-

decins qui assistent à des séances de formationmédicale continue. Lorsqu’il est bien

conduitpar l’animateur,cedispositifpédagogiquepeutapporterauxmédecinspartici-

pantsdesconnaissancesutilesàleurexerciceprofessionnel.Nousdésirionscependant,

toujoursdanslecadredel’apprentissagecoopératif,montrereffectivementquelesinte-

ractionsentrelesparticipantspeuventaugmenterlenombred’informationsdisponibles

pourtouslesparticipants,quecesoitsurleplanqualitatifouquantitatif.Pourcetterai-

son,nousavonssélectionnéunetroisièmedémarchepédagogiqueafind’atteindrenotre

objectif: l’apprentissagecoopératif permetdedégagerunnombred’informationsplus

conséquentes pour les participants à cette troisième démarche d’apprentissage que

nousprésentonsmaintenant.

250Avispersonneldel’auteur

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3.3.Troisièmedémarchepédagogiqueexplorée:lejeuderôle

Présentationdeladémarchepédagogique LejeuderôleestundispositifpédagogiquedérivédespsychodramescréésparJ-L.Mo-

reno251.Ilreposenotammentsuruneanalysed’unesituationcomplexeréelleoufictive

miseenactionparaumoinsdeuxacteursquiinteragissentàunmomentprécis.Aulieu

d'assisteràunspectacle,leparticipantestinvitéàjouerunrôledanscespectacle.Parti-

ciper à un psychodrame permet à chacun des acteurs de prendre conscience de ses

éventuelsproblèmes,derepérersesinsuffisancesenjouantdesattitudesetdescompor-

tements.L'individupeutainsiselibérerdecertainesappréhensionsetallerau-delàdes

limitesqu'ils'étaitfixéeslui-même.Lejeuderôleestadaptéàl’explorationdesattitudes

etdes comportements.Deuxparticipants aumoinsvont s'impliquerdans l'interpréta-

tionderôlesdepersonnagessetrouvantdansunesituationprécise.Cetteinterprétation

estsuivied'uneanalysedesreprésentations,dessentimentsetdesattitudesliésàcette

situation.Tous lesparticipantsautresque lesacteursobservent laphased'interpréta-

tiondesrôles.Àlafindelascènejouée,lesparticipantsprennentpart,aveclesacteurs,

àuneétaped'analysemenéesousladirectiondel'animateur.

Pendantde longuesannées, j’aiétéamenéàanimerdes formations facultairesdans le

secondcycleavecd’autresmédecinsgénéralistesenseignantsdelaFacultédeMédecine

Lariboisière Saint-Louis avant la fusion avec la Faculté Beaujon-Bichat. Nous devions

assurerunenseignementdanslecadred’uncertificatoptionnelintitulé«médecinegé-

néraleetprévention».L’équiped’enseignantsgénéralistesayantrejetéleprinciped’un

enseignementmagistral, nous avions opté pour un enseignement interactif en faisant

notammentparticiperlesétudiantsàdesjeuxderôles.Nousavionsétérapidementdé-

çus par le comportement des étudiants lors de ces séquences. Non seulement nous

avionsdesdifficultésàrecruterdesacteurs(leplussouventvolontairesdésignés),mais

égalementnousavons constatéque lamajeurepartiedesparticipantsà cesenseigne-

mentsétaientbeaucoupplus intéresséspar la lecturede leursSMSoupar lesnotions

essentiellesàretenirpour l’examenclassantvalidant(ECN)quiavait lieudansunpeu

plusd’unanplutôtqued’écouterattentivementlesdeuxacteursdujeuderôle.

251Entre1932-34

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Pourcetteraison, j’aiproposédesmodificationsaudéroulementdece jeuderôleafin

d’amenerlesétudiantsàsuivred’unemanièreplusassiduecedispositifpédagogique.Ce

certificatétaitdécoupéenhuitséances,avecaumoinsunjeuderôleparséance.Cette

techniquepédagogiqueamendéedelasorteaétépratiquementàchaquefoisbienéva-

luéeparlesétudiantsetelleaétéprésentéebienplustarden2009àuncongrèsdemé-

decinegénéraleàToulouse.J’aiutiliséparlasuitecettetechniqueenformationmédicale

continue,notammentsurletabacetlamaladied’Alzheimer:lesparticipantsontétégé-

néralementsatisfaitsdecetteséquence.Jem’étaisaperçud’autrepartquelaproduction

collective(touslesparticipantsmoinslesacteurs)étaitnettementsupérieureàlapro-

ductionbinairedesdeuxacteurs,quecesoitsurleplanqualitatifquequantitatif.

Ledébatenfindejeuderôleétaitsouventstérileparmanquedemotivationàparticiper

efficacementà ladiscussion.Pourcetteraison,nousavonsexpérimentéun jeuderôle

remaniédans sondéroulementafind’intéresserdavantage lesparticipantsà cettedé-

marchepédagogique.Nousavonsainsicomplétéledérouléhabitueldujeuderôleavec

trois étapes supplémentaires (en italiques) selon le scénario suivant252: (nous avons

appelécettedémarchepédagogiquemodifiée:lejeuderôleamendé)

1. Distributiondesrôlesparl’animateurdelasessionàdeux«acteurs»àquiilestdeman-dé de sortir; il désigne les observateurs, mais ne leur donne pas encore les grillesd’évaluation.

2. Dansundeuxièmetemps,touslesparticipantsnonacteursquisontrestésdanslasalle,prennentconnaissanceduscénariocommunetdesscénariospropresàchaqueacteur.

3. L’animateurengageunpremierdébat.Ilnotesuruntableaulesinformationsetlesquestions émises par les participants à propos de ce jeu de rôle et notamment cequ’ilsaimeraiententendredireounepasdireparles2acteurs.Cecipeutêtreréaliséparunbrainstormingouparlatechniquedumétaplan.

4. L’animateur demande au groupe, dans un second temps, de hiérarchiser en 3 catégoriestoutcequiaéténoté:cequ’ilestindispensablededire,cequipeutêtreutiledeprononceretcequinedevraitêtreditaucoursde laconsultation?L’animateurcache letableauetdistribuelesfichesd’observationsauxparticipantsdésignésaudébutdelasession(obser-vateurs).

252BUDOWSKIM.,EDDIA.,LEPOUTREB.,NOUGAIREDEM.(2009).Propositiond’améliorationd’unetechniquepéda-gogique(jeuderôle)afindesusciterl’intérêtdenosétudiantslorsdenosenseignementsfacultaires.Toulouse,CongrèsduCollègeNationaldesMédecinsGénéralistes.Postercommenté.26et27novembre2009.

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5. Après le déroulement du jeu de rôle, puis l’écoute du ressenti des acteurs et des re-marquesdesobservateurs,l’enseignantmontreàlasallelesinformationscolligéesavantledébutdujeuderôleproprementditsurletableau.

6. Ilengageundébatavec lesparticipantsen leurdemandant,pourchaqueinforma-tioninscritesurletableaulesquestionssuivantes:cetteinformationa-t-elleétéen-visagéelorsdujeuderôle?Était-ellenécessairepourcejeuderôle?Envisagez-vousdegarderoudemodifierlacatégoriequevousaviezchoisieauparavant(indispen-sable,utileetpeut-êtredangereux)pourchaqueinformationnotée.

Raisonsduchoixdecettedémarchepédagogique Lejeuderôleestunedémarchepédagogiquedontlebutestdemettrelesparticipants

en situationde simulerdansunenvironnement fictif uneactionouune réactiondans

descirconstancesréellessinonréalistes.Ilpeutêtrecourt,comportantunnombrelimité

dedonnées:ilestdénommévignette.Ilpeutêtreégalementpluslongensachantquele

nombred’informationsproposéesauxacteursnedoitpasêtretropimportant.Eneffet,

ilestnécessairedelaisserauxacteursunespaced’improvisationquiserautileaudébat.

Grâce au jeu de rôle, les apprenants ont l’opportunité d’avoir un regard différent sur

leurspréjugés,surleursvaleursetdesreprésentationsmentalesquipeuventgénérerun

changement dans leurs comportements et attitudes habituels vis-à-vis des problèmes

rencontrésdans la vie réelle. Le jeude rôle estundispositif pédagogiqueutilisépour

expliciter d’unemanièreplus approfondiedes situations complexes et difficiles, affec-

tantprincipalementledomainedesattitudes.Ilpeutêtreégalementunfacteurdeten-

sion cognitive et affective (effet miroir 253 ), utile à leur propre questionnement:

qu’aurais-jefaitdanscecas?Ledébatquisuitlejeuderôleproprementditestnéces-

saire pour réduire cette tension. Les différentes interactions sociales denatureplutôt

informelle254vontenrichir lescompétencesdesapprenants,grâceàdesapportsdesa-

voirsformelsetnonformels.

Souventutiliséeenformationmédicalecontinue(FMC),cettedémarchepédagogiqueest

plusdifficileàmettreenplaceenformationmédicaleinitiale(FMI),carlesétudiantsse

253Dansun jeuderôle, l’effetmiroir favorisechezunacteur,par leretourd’expérience,unerestructurationdesesdifférentssavoirsenfonctiondecequiestfaitetditparl’autreparticipant.Celaencouragecetacteuràmieuxidenti-fiersapropreimageetàs’autocorriger.254La discussion se fait généralement à bâtons rompus, sans une réelle organisation rigide afin que chacunpuissesansrisquedejugements’exprimersurlesujet.

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connaissentbien,parfoismêmetropbien,etontsouventdumalàêtrevolontairespour

êtreacteurs.C’estlaraisonpourlaquellenousavonsproposécettedémarcheàdesmé-

decins exerçant en milieu ambulatoire, venus assister à un séminaire de FMC sur

l’obésité infantile.Audébutde lasessionconsacréeau jeuderôle, le formateurdonne

desexplicationsdétailléessurlefonctionnementdeladémarchepédagogique.Ilremetà

chacundesacteursunefichederôlequidécritlespersonnages(caractères,histoires).

Cettedescriptiondoit être facilementmémorisée.Elledoit être assez courte : cen'est

pasunroman(del'ordredequelqueslignespourunevignette–formeraccourcied'un

jeuderôle–àunepageengénéral).Chacundesacteursdisposed'unefichequ'ilnedoit

pasmontrerà l'autre.Généralement, lesacteurssortentde lapièceoùse trouvent les

participants. Ilsdoiventdisposerd'un lapsde tempssuffisantpourassimiler leur rôle

(de10minutespourunevignetteà20à30minutespourunjeuderôlecomplet).Pen-

dantce temps, le formateurdispose lasallede façonàrendreplusréaliste lascène. Il

peutnepasdivulguerlescénarioauxautresparticipantsoubiendécidedeleurprésen-

terdefaçonclaire:cedernierchoixestsouventeffectuélorsqu’ils’agitd’unjeuderôle

court(vignette).Aumoinsdeuxobservateurs(afind’animerledébat)sontdésignés.Des

grilles d’observation leur sont remises, qu’ils doivent remplir pendant la durée de

l’actionsimulée.

Le formateur devra veiller à ce que la situation proposée nemène pas à un psycho-

drame.Cen'estpaslebutdecettedémarchepédagogique.Cependant,pluslasituation

est proche du réel, plus elle est profitable pour les apprenants. À la fin de l’action, le

formateurquestionnechaqueacteursurcequ’ilavouluexprimer. Ildemandeensuite

auxobservateursdésignéscequiapuretenirleurattention.Ilréaliseunepremièresyn-

thèsedesargumentairesdesacteursetdesobservateurs.Puisilanimeundébatàpartir

de cette synthèse avec l’ensemble des participants. Enfin, il conclut en reprenant les

principalespropositionsexpriméesparlesparticipants.

Nousavonsréaliséuneétudeenobservationdesituationréaliséeauprèsde54profes-

sionnels de santé, médecins généralistes essentiellement et quelques pédiatres. Nous

avonsproposécettedémarchepédagogiquedujeuderôleamendéàquatregroupesde

médecinsquiontassistéàdesséminairesdeformationmédicalecontinuededeuxjours.

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246

Cesséminairessesontdéroulésentre2010et2012.Ilsonteulieudanstroisendroits

différents(iledelaRéunion–ungroupedemédecins,unevillemoyenneduSud-Ouest–

un groupe demédecins également, et une ville de la banlieue parisienne – avec deux

groupes de médecins). Le thème de ces formations (dont nous étions le concepteur)

étaitcommunàcesquatreséminaires:dépisteretprendreenchargel’obésitéinfantile.

L’objectifprincipaldecetteséquenceaétédecomparerlesproductionsqualitativesdu

groupe avec celle des acteurs participant au jeu de rôle.Nous avions la possibilité de

comparerlesproductionssurleplanquantitatif,maiscelan’étaitguèreintéressant:ce

n’estpaslenombred’informationsquicomptelorsd’uneséanced’enseignementoude

formation, mais la qualité de ces informations. Cette séquence s’est déroulée en pré-

sencededeuxexperts (l’auteurde la thèseen tantqu’expertgénéraliste, etunexpert

spécialistemédical:pédiatreouendocrinologue).

Lejeuderôleamendécomporte,commenousl’avonsdécritsupra,troisphasessupplé-

mentairesaujeuderôlehabituel.Lapremièrephaseaeulieuavantlejeuderôle,lors-

quelesprotagonistesquivontjouerlejeuderôlesortentdelasallepourprendrecon-

naissance chacunde leur côtédes instructionspropresà chacundesacteurs.Pendant

cette phase, les apprenants restés dans la salle prennent connaissance de toutes les

donnéesconcernantcejeuderôle.Aprèsuntempsdelecture,l’animateurdemandeaux

apprenants de s’exprimer oralement à l’aide préférentiellement du dispositif pédago-

giquemétaplan®décritinfra,oubiendelatechniquepédagogiquedubrainstorming.Il

estdemandéauxparticipantsdediretouslesmotsetexpressionsqu’ilsaimeraienten-

tendre lorsdu jeuderôle.L’animateurécritsuruntableaudepapiertoutcequiaété

exprimé.Dansunesecondephase, lesparticipantssontsollicitéspourclasser lesmots

écritssurletableaudepapierentroiscolonnes:

1 - lesmots et expressions notés, jugés indispensables par le groupe pour les

prononcerlorsd’unerencontrepatient-médecin;

2-cequipeutêtreutileàénoncer;

3-enfincequ’ilestdangereuxdedirelorsd’unteléchange.

Latechniquedumétaplan®étaitprescritepourtouslesgroupessaufsurleslieuxd’une

formationoùlesparticipantsontétédivisésendeuxgroupes;nousavonsdemandéàun

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247

desdeuxanimateursdenepasutiliserlemétaplan®,maisd’utiliserledispositifpéda-

gogiquedubrainstorming.

Le brainstorming traduit en français par remue-méninges est une technique adaptée

pourdémarrerunesessiondeformationavecunnouveaugroupe.Lesparticipants,dès

quelethèmeesténoncéclairementparl’animateur,peuventexprimersansaucuneres-

trictiontouteslesidées,réflexions,ressentisquiconcernentdeprèsoudeloinlethème

étudié.Aucuneidée,aucunénoncénedoiventêtrecritiquésoucensurés.Toutestnoté

suruntableau.Dansunsecondtemps,lesidéessontregroupéesparsous-thèmesdont

lechoixest réalisépar legroupe.Toutcequiaéténotéest lupar l’animateurquide-

mandel’avisdugroupe.C’estàcestadequecertainesidéesjugéesirrationnellesouuto-

piquespeuventêtreàlarigueuréliminéesaprèsaccorddugroupe.

LeMétaplan®estunetechniquepédagogiquequiapourbutdefairedépasserlesblo-

cagesetlesinhibitionsdansungroupe.Cettetechniquenécessited’êtreréaliséenpré-

sencedemodérateursexpérimentésdans l’artdegérerungroupe.Elleapourobjectif

de:

1 -développer dans un premier temps des avis et des plans d'action à propos

d’unesituationproblème;

2-sefocalisersurlessolutionspossiblesduproblèmeposé.

Cettetechnique,lorsqu’elleestcorrectementréalisée(rôleimportantdumodérateur255)

va amener le groupe à répondred’unemanière satisfaisante auxquestionsposées. Le

découpage de la situation problème en des composants plus courts a pour objectif

d’optimiserlaparticipationdetouslesmembresdugroupe.LatechniqueduMétaplan®

peut être proposée dans différentes situations notamment pour recueillir, structurer,

établirdesprioritéscommec’estlecasavecl’exercicequenousavonsproposé.Cedispo-

sitifpédagogiqueestbienadaptéaudomainedel’affectif.Maisilestmodérateurdépen-

dantetnécessitequecederniersoitbienforméàsonutilisation.

LeMétaplan®sedérouleentroisphases:1–Lemodérateurprésentel'objectifetpré-

cise le travailàréaliser.2–Chaqueparticipantréfléchitpuisécritunà3motssurun

bristolouunpost’it.Ilpeutécriresurd'autantdebristolsqu'illedésire.L'affichages'ef-

255Celapeutêtreaussibienunenseignant,unformateurouunanimateur.

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248

fectuequandlegroupeestprêt.L'expertpeutêtreprésent,maisdoitrestersilencieux.3

-Chaquebristolaffichéestd’abordclarifiéparsonauteurpuiscommentéparlesparti-

cipants.C’estseulementenfindeséanceque l’expertpeutéventuellementdonnerson

avis.Danslecasdecetteformation,ilétaitdemandéauxparticipantsdetravaillersurle

thèmesuivant:identificationdesdifficultésrencontréeslorsdelaconsultationavecun

adolescentsusceptiblededevenirobèseouquiestensurpoidsmanifeste.Unelistede5

items à traiter a été définie pour cette séance: 1 – raison de la consultation; 2 – re-

cherched’autresmotifs,desnon-dits;3–cadredevie,notammentrepas,télévisionou

ordinateurs;4–comportementalimentaire,comportementvis-à-visdesautresetvis-à-

vis de sa famille, comportement scolaire, état psychologique, troubles du sommeil; 5

débuteretmaintenirledialogueavecl’adolescent.

À l’issuedecetteséquence(brainstormingoumétaplan®), letableaupapierestcaché,

carlesacteursdujeuderôlenedoiventpasprendreconnaissancedecequiaétéformu-

léauparavantparlesapprenants.Lejeuderôleproposélorsdesséminairesdeforma-

tionaétéjouépardeuxacteursjouantl’unlerôledemédecinetl’autreceluid’unecollé-

giennede14ansavecunlégerembonpoint(1m67et69kg)quiconsulteunmédecin

pour perdre du poids et demander un certificat médical de dispense de sports (mur

d’escalade).Immédiatementaprèslejeuderôle,l’assistanceprendconnaissancedures-

sentidesacteurspuislesobservateurss’exprimentoralementsurlesdonnéesqu’ilsde-

vaientrecueillir.Àlasuitedecetteséquence,l’animateurdécouvreletableaudepapier

où ont été colligées toutes les données des apprenants. Cela permet aux acteurs de

prendreconnaissancedesinformationsregroupéessurletableauparleurscollègueset

auxparticipantsdecompareraveccequiaétéditpendant le jeuderôle.Àpartirdes

informationsrecueilliespendantcedébatetinscritessurletableau,l’animateurengage

unseconddébatavecl’ensembledesparticipantsenleurproposantcestroisinterroga-

tions:

• Êtes-voustoujoursd’accordaveclacatégoriechoisie(élémentsindispensablesà

dire,utilesounocifs)?

• Touteslesdonnéesexpriméesparlesparticipantsautresquelesacteursont-elles

étéprononcéeslorsdujeuderôle?

• Lesacteursont-ilsajoutédesélémentssupplémentaires?

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249

Pendantlatenuedecesjeuxderôle,nousavionsététotalementenretrait,ayantseule-

ment un rôle d’observateur à l’écart. Nous avions décidé de n’utiliser aucune grille

d’observation.Nous avions également essayéd’avoirun statutd’observateur lemoins

sélectifpossible,nouscontentantseulementdenoteret/ouenregistrerlesinformations

émisesparlesacteurspuisparlesparticipants.Enfind’atelier,nousavionsrecueilliles

grillesquelesobservateursdevaientremplir(grillespastoujourscomplètes)et lesta-

bleauxdepapieroùontétéconsignéesetclasséesentroisgroupeslesdonnéesémises

parlesparticipants.Àlafindelaséquence,leoulesanimateursontdemandéauxparti-

cipantssitelsmotsouexpressionslistésparlesparticipantsavaientétéprononcéspar

lesacteurs:quandlaréponseétaitpositive,cesélémentsétaientsoulignéssurletableau

depapier.Celanousapermisderéagirsurcesréponseslorsquenousavonsentrepris

defairel’analysedecetteséquence.Lasoumissionderésultatsdecetteanalysedevant

tous les participants avait pour but de renforcer la validité du recueil des données;

chaqueparticipantpouvaitexprimersonaccordousondésaccordsurlesdonnéesque

nousavionsretenudecetteséquence.Lorsqu’ilétaitnotéundésaccord,ilétaitdemandé

l’avisdesautresparticipantsquipouvaientconfirmerouinfirmercedésaccord.Enau-

cuncas,lesgroupesn’étaientaucourantdenotretravailderechercheàproposdecette

techniquepédagogique.Nousdisposionsainsidenosnotes,d’enregistrements,des ta-

bleauxpapierpourréaliserunesynthèsedesrésultats.

Présentationdelasituation Textecommunauxdeuxacteurs

Mariema14ans.Ellemesure1m67etpèse69kg.Ellevientvousconsulter,carelleveutmaigrir.«Jesuismaldansmapeau,mamèremedittoujours«mangeauxrepas»,maisjen’aimepassacuisine,elle est trop grasse».MaisMariemavoue aussimanger beaucoup de gâteaux secs et souvent desviennoiserieslematinàlarécréationde10heures.Elleachèteunpainauchocolatàlaboulangeriedevant l’école : «c’est génial docteur, et les sandwiches sont très bons». CarMariem ne veut pasmanger à la cantine. Elle veut faire comme ses copines, mais qui sont «hélas dit-elle» bien plusmincesqu’elle.Elleaimeraitbienquelesgarçonsquiregardentsescopinesjettentdetempsentempsunregardsurelle.Ellevoudraitbienquesamèreluifassedescarottesrâpéesoudescruditéslesoir,maiscen’estpasdansleshabitudesdesonpaysd’origine(leMaroc).LamèredeMariemestbienportante.Vouslasoignezaussidepuis3ans,commetoutelafamille,pourunehypertensionartérielleetundiabète;sonpoidsestde75kgpourunetaillede1m61.LepèredeMariemestnéàRennes.Ilpratiquebeau-coup de sports notamment du vélo chaque dimanche après-midi dans le bois de Vincennes. Il estcadreAdanslafonctionpublique(Éducationnationale).Mariemvitdansle12earrondissementde

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Paris.Elleaégalement2frèresplusâgés,maisassezmincesetunesœurde8ansqu’elletrouvebou-lotte.Lafamilledisposed’unrevenucorrect.

Informationscomplémentairesdestinéesàl’acteurjouantlerôledeMariem

Vous êtes une collégienne dans un établissement qui est éloigné du domicile de 900m,mais vousprenez lemétropouryaller (2stations), carvousêtes toujours«à labourre».D’ailleurs,vousneprenezpasletempsdedéjeunerlematin.Leréveilsonnetoujourstroptôt.Parcontrelesoir,voustraînez,carvousn’avezpasenviededormir.Lemidi,vousmangerunsandwichouparfoisaveclescopines,vousallezdansunétablissementderestaurationrapide.Enrevenantducollège,vousallezdirectementaufrigoouleplacardàgâteaux.Etvousattendezavecimpatiencelerepasdusoir.Sou-vent,vousprenezunmorceaudefromageavecdupainavantdevousmettreàtable.Vousbuvezsur-toutdessodasouducocalight.Lesrésultatsscolairessontbons.Actuellement,vousnepratiquezpasd’activités physiques endehors du collège. Par contre, duCPà la 6e, vous avez suivi des cours dedanseauconservatoire.Vousavezarrêté,carvouspréfériezregarderlessériesàlatélé.Vousn’avezjamaisprisdetraitementpendantunelonguepériode. Jusqu’à13ans,vousnevouspréoccupiezpasdevotrepoids.Lesremarquesdevotrepèresurvotrefaçondemangervouspassaientau-dessusdesatête.Maisenclassede4e,vousfaitesbeaucoupplusattentionàvotrepersonne.Vousvousrendezcomptedel’importanceduregarddesautres:«ilyenaquepourlesmaigres,Docteur.Certes,jenesuispasClaudiaSchiffer,ninonplusunmonstre».Vousne faites pas de sport et vous venez également demander une dispense, car c’est lemois dumurd’escaladeetvousavezpeurd’êtreridicule.

Résultats: Nousavonsfaitlechoixdeciblernotretravailderecherchesurtoutcequiaétépronon-

cé,quecesoitparlesdeuxacteursouparl’assistance.Nousavonsvolontairementmis

decôtél’analysedesattitudesdechaqueacteurrésultantesdel’interaction,carcesatti-

tudes sont difficilement quantifiables. Cependant, nous étions conscients que ces atti-

tudespouvaientagirsurlecomportementverbaldesdeuxprotagonistesdujeuderôle;

cesattitudesontopéréprobablement sur le choixdesmotsutilisésdans l’interaction.

Cette réflexion sera reprise dans la discussion. De nombreux items sont comparables

dans chacun des quatre groupes (saturation de 100%des données après études des

trois premiers groupes). Sur le plan qualitatif, nous avons choisi de lister cesmots et

expressionsselon les troiscatégoriesdéfinies (cequi indispensablededire, cequiest

utilededire,cequiestdangereuxdedire).Certainsitemsontpucependantfigurerdans

lacatégorie«indispensable»oudanslacatégorie«utile»,selonlesdonnéesémisespar

les participants et recueillies par l’animateur. Expert dans cette formation, je n’ai pas

toujoursétéd’accordaveclesclassificationsproposées.Enfin,untestdeFishereffectué

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surlaquantitédesitemsrelevésdanslesquatregroupesamontréunecohérencedans

laproductiondecesgroupespourchacunedestroiscatégoriesétudiées.

Nousavonsdemandéauxanimateursdebiennotertoutcequiavaitétéprononcépar

lesparticipants.Cesderniersontétéinvitésàvérifiercequiaétéécritsurlesdifférents

tableauxdepapier.Maisnousnesommespascertainsd’avoirnotél’intégralitédecequi

aétédit:desmotsproposésontpunepasêtrereprispar lesanimateurs.Nousavons

regroupéleplussouventlesitemsdontlesdéfinitionsétaientproches,afind’éviterde

longueslistesd’énumérationfastidieusesetrépétitivesàlire.Maisceregroupementest

propreàl’auteuretpeutêtresusceptibledetransformer,certesmodérémentlesrésul-

tatsdenoscomparaisons.Nousavonscependanteffectuépourlapremièresession,une

comparaisonavectoutcequiavaitprononcépourlesmotsindispensablesàdireentre

lesacteursetparticipants.Ilyavaità3,64foisplusdemotsindispensableschezlespar-

ticipants lorsqu’oncomparait tous les itemset3,56 lorsque lacomparaisonconcernait

lesitemsregroupés.Ladifférencen’estpassignificativeetc’est laraisonpourlaquelle

nousavonseffectuéletravaildecomparaisonuniquementaveclesitemsregroupés.

Relevé des éléments exprimés, dans la catégorie « indispensable à dire » Nousrappelonsquecesitemsontétéregroupés(termesexprimésdefaçonhétéroclite,

mais ayant tous la même signification). Nous avons fait le choix de rassembler

l’ensembledesitemsexpriméparlesparticipantsdesquatregroupesétudiés.Latech-

niquedumétaplanpourrecueillirlesdonnéesaétéréaliséeuniquementaveclegroupe

2.Unecourbedecorpulenceetunecourbedepoids/tailleontétéremisesau«médecin

acteur»dans3groupessur4.

Motsetexpressionscommunsauxparticipantsetauxacteursdujeuderôle

– Demandersilapatienteconnaîtsonpoids(P)–peserlapatiente– Demandersilapatienteconnaîtsataille(T)–mesurerlapatiente– Calculerl’indicedemassecorporelle(P/T2)– Réaliseruneenquêtealimentaire(ajoutsdugroupe:mange-t-ellegras?consomme-t-elle

desboissonssucrées?)– Pourquoidésire-t-ellemaigrir? (Ajoutsdugroupe:parrapportàqui?Parrapportàsa

santé?– A-t-elleuneactivitésportive?– Serenseignersurlesantécédentsmédicauxpersonnels(ajoutsdugroupe:etfamiliaux–

uneseulefoiscitéparunacteursurles4jeuxderôle)

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– Propose à la patienteune enquête alimentaire (ajoutsdugroupe:recherche leserreursalimentaires–grignotage–repaséquilibrés?

Motsetexpressionsprécisésparlesparticipantsuniquement

– Le remplissagedes courbesdepoids, de taille et de l’IMCont-elles été vérifiées sur lecarnetdesanté

– Prendre connaissance du poids de naissance sur le carnet de santé – recherche d’unecassuredupoids,d’unchangementdecouloir?

– Rechercherdesplaintessur leplanpsychologiquecomme l’anxiété,despleurs,unétatdetristesse,uneabsencedemotivationpourallerencours.

– Se renseigner sur d’autres problèmes de santé: migraines, douleurs articulaires, dou-leursabdominales,troublesdutransit,dyspepsie,asthénie?

– Son rythme de vie a-t-il étémodifié ces derniers temps: changement d’établissementscolaire?Divorce?Déménagement?

– Commentressent-elleleregarddesautres?Souffre-t-elledesonimagecorporelle?– Quellessontlesrelationsavecsesparents-sesfrères–sesami(e)s?– Lemédecin propose-t-il à la fin de la consultation un suivi? A-t-il donné un rendez-

vous?

Relevé quantitatif des mots et expressions indispensables selon les quatre groupes :

Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4

Les participants 32 23 35 34

Les acteurs 9 12 15 10

Figure 13 : comparaison entre les productions des acteurs et des participants (items jugés indispensables)

Nombre de données fournies

!

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Relevé des mots et expressions classés dans la catégorie « utiles à dire »

Élémentscommunsauxparticipantsetauxacteursdujeuderôle

Cesélémentsontétéégalementregroupés:

• Pourquoicettedemandemaintenant–pourquoiest-ellevenueseule?• Combiendekilosveut-elleperdre–objectifpondéral?• Connaissanced’addiction?• A-t-elledescopains,descopines?Lesrencontre-t-ellesouvent?• Commentétait-elleà10ans?• Lemédecina-t-ildonnédesconseilsalimentaires?A-t-ilrecherchésigrignotage?(3ac-

teursmédecinssur4)• Bilancaloriquequotidien?• Quelestlepoidsdesparents?–desfrèresetsœurs?• Fait-elledusport?–Est-elledispenséedesporthabituellement?• Quellessontsesboissonspréférées?• A-t-elleunhobby?• Fume-t-elle?(ajoutdugroupe:cannabis,alcool?)• A-t-elledéjàfaitunrégime?• A-t-elleeudesproblèmesdethyroïde?• Secouche-t-elletard?• Passe-t-ellesontempsdevantunordinateur?latélévision?• Grignote-t-elledevantlatélé?• Grignote-t-ellequandellefaitsesdevoirs?• Unbilanthyroïdiena-t-ilétéprescrit?• Lemédecina-t-ilproposéàlapatientedel’adresseràunendocrinologue?(proposition

faiteparunacteurmédecin)• Donner des encouragements pour lamotiver àmaigrir (fait dans 2 jeux de rôle,mais

proposéparlesparticipantsdes4groupes)• Proposerdesaliments• Abordsdelaconsultationavectactetmesure?(Celan’apasdutoutétéfaitdansunjeu

derôle–àlagrandesurprisedel’animateuretdel’expert!)• Mange-t-ellevite?-Mâche-t-ellecorrectement?• Souffre-t-elledetroublesdutransitintestinal?• Seressert-ellesouvent?

Motsetexpressionsprécisésparlesparticipantsuniquement

• Rechercheoriginepatiente:ethnie,famille?• Lemédecin a-t-il pris sa tension? – lui a-t-il demandé si elle prendune contraception

orale?–luia-t-ilprescritunbilan?-Quelbilan?• Quelleéducationdanslafamille?–Quelestsoncomportementàtable?• Est-elleenrébellionavecsamère?Sonpère?• A-t-elleeusesrègles?Datedelaménarche?

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• Fait-ellel’écolebuissonnière?• Est-elleaddicteàsonportable?• A-t-elleunescolariténormale?–Est-elleenretard?–plutôtenavance?• Connaîtrelemorphotype–aspectmorphologique• Lemédecina-t-ilproposéàlapatientedel’adresseràunediététicienne?• Apprendreàrééduquerletempspourmanger• Pertedepoidspourbénéficeesthétique?Bénéficesanté?(Itemclassésoitindispensable

soitutile,etcemêmedansunmêmegroupe)• Connaît-onl’avisdesparents?• A-t-elledesproblèmesdentaires• Lemédecinpropose-t-ilderéduirelatailledesassiettes?• Lapatientea-t-elleconscienced’unepartdesaresponsabilitédanssaprisedepoids?• Boissonssucréesoualcoolisées?• Fume-t-elleducannabis?

Relevé quantitatif des éléments utiles selon les quatre groupes :

Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4

Les participants 36 30 43 42

Les acteurs 14 12 17 14

Figure 14 : comparaison entre les productions des acteurs

et des participants (mots utiles à dire)

051015202530354045

Groupe1 Groupe2 Groupe3 Groupe4

Lesparticipants

Lesacteurs

Nombre de données fournies

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Relevédesmotsetexpressionsclassésparlesapprenantsdanslacatégorie«dangereuxdedire»

Touscesélémentsontétéencoreregroupés:Éléments communs aux participants et aux acteurs du jeu de rôle

• Direquec’estsafaute(prononcédansunjeuderôle)etparplusieursparticipants;• Proposerdesmédicaments(propositionfaitedansunautrejeuderôle);• Proposerunrégimeprotéiné(lemêmeacteurquiarenduresponsablelapatiente);• Énoncerdesassertionserronées:«tuesbienportanteettuleresterastoujours!»• Direquesonpoidsestnormal;• Nepasl’aiderenluidisantqu’onnepeutrienfaire;• Faireunebatteried’examensinutilesendisantquesoncorpsfonctionnemal;• Déshabillerlapatiente(grosdésaccord,undesacteursjouantlerôledemédecindansun

jeuderôleademandé(virtuellement)àlapatientedesedéshabiller;plusieurspartici-pantsontrecommandécedéshabillagetoutenconservantcependantlesdessous,afindebienexaminerl’embonpointetleshanches.D’autresparticipantsétaienttotalementop-poséspourtenircompted’unevéritabledifficultéliéeàlapudeur,rencontréefréquem-mentàcetâge;cesparticipantsproposaientuniquementdemesurerlepérimètreombi-licaletceluideshanches.

• Nepasprendrederendez-vousàlafindelaconsultation(aucundes4médecinsacteursdujeuderôlen’aproposéunnouveaurendez-vous)

Élémentsprécisésparlesparticipantsuniquement

Etheureusementnonproposésparlesmédecinsacteursdesjeuxderôle!

• Proposeràlapatienteunrégimetropstrict• Luiconseillerdesrégimesdangereuxàlamode• Nepasmesurersataillenisonpoids• Culpabiliserlapatientesursongrignotage• Laculpabilisersursonabsenced’activitésportive• Oublierderegarderlecarnetdesanté(poidsdenaissance,courbed’IMC)• Direquesisesparentssontobèses,illuiseradifficiledemaigrir• Rapportersonsurpoidsàsonfonctionnementbiologique• Luidirequevousêtesincompétentpourlasuivre• Demanderdesexamensinutiles:cortisol,insulinémie

Relevé quantitatif des éléments « dangereux à dire » selon les quatre groupes :

Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4

12 11 17 15

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Nousavonsfait lechoixderéaliserl’analysedecedispositifpédagogiqueselonl’ordre

suivant:

• d’abordsurleplanmédical(objectifdel’action)

• puissurleplanpédagogique(objectifdenotretravailderecherche)

Analysedecettedémarchesurleplanmédical Caractéristiquesdelapopulationétudiée Nousavonsprisréellementencomptequ’uneseulecaractéristiquecommuneauxdiffé-

rentsgroupesobservés:l’exercicepratiquedelamédecineenmilieulibérale.Ilyavait

unecertaineuniformitédupublicconcernantl’âge(tousavaientaumoins15ansdepra-

tique,donnéesrecueilliespar lesanimateursdegroupe),et lesexe(autantde femmes

qued’hommes).L’exercices’estdérouléavecunpublicquin’avait jamaisétécorrecte-

ment ou insuffisamment formé à l’obésité infantile lors de leurs étudesmédicales. La

catégoriesocialeet leniveausociocultureln’ontpasétéprisencomptedans l’analyse

des résultats, car nous avons pris le parti de considérer que ces deux indicateurs de-

vaientêtrepeudissemblablesd’unmédecinàl’autre.

AnalysesurleplanmédicalL’analyseestlimitéesurleplanmédical,carlebutdenotretravailestessentiellement

pédagogique. Cependant, nous avons ainsi noté des éléments indispensables pour les

participantsquin’ontpasétéprisencompteparlesdifférentsacteursdesjeuxderôle:

- lepoidsdenaissance(citéparlesparticipants);

- antécédentmaternel,avecrecherched’undiabètedelamère,notammentgravi-

dique(nonciténiparlesacteursnilesparticipantsde3groupes);

- lesproblèmespsychologiquesliésàlasurchargepondéraleetréciproquement;

- larecherched’affectionspsychiatriques(anorexie,boulimie,etc.)

- uneréflexionsurlanormalitédupoids(lepoidsidéalderéférence).

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Plusieursétudesontmisenévidenceunerelationentreunpoidsdenaissanceélevéet

uneobésitéàl'âgeadulte,notammentl’étudeWhitaker256.Lebutdecetteétudeétaitde

déterminersil’obésitéd’unemèreendébutdegrossessefavorisaitunesurchargepon-

dérale importante pour leur enfant entre 2 et 4 ans.Une étude rétrospective sur une

cohortede8494enfantsdefamillesàfaiblerevenuaétéréaliséedansl’Ohioentre1992

et1996.Lesmèresetenfantsontétésuivisàpartirdupremiertrimestredelagestation

jusqu'àunâgecomprisentre24à59mois.Laprévalencedel'obésitéinfantileétaitde

respectivementde9,5%,12,5%,et14,8%auxâgesde2,3et4ans.30,3%desenfants

avaientlesmèresobèses.Àl’âgede4ans,24,1%desenfantsétaientobèsesquandleurs

mèresavaientétéobèsesaucoursdupremier trimestrede lagrossesseparrapportà

9,0%desenfantsdontlesmèresavaientétédepoidsnormal(IMC18,5et<25kg/m2).

Pourlesenfantsdefamillesàfaiblerevenu,l'obésitématernelleendébutdegrossesse

peutplusquedoublerlerisqued'obésitéentre2à4ans.Uneattentionparticulièrede-

vrait être adoptée pour prévenir l’obésité infantile chez les nouveau-nés de mères

obèses.

L’obésité infantileestégalementrencontréeplus fréquemmentchez lesenfantsnésde

mèresdiabétiques (EtudeSilvermanetal.257).Cetteétudeprospectivequia lieuentre

1977et1983concernaitdes femmesenceintes,diabétiquesavant leurgrossesse.Une

évaluationde la concentrationde l’insulinedans le liquide amniotique a été effectuée

entre les32eset38essemainesdegestation.Par lasuite, lesdéveloppementspsycho-

moteuretanthropométriquesontobservésrégulièrement.Untestdetoléranceauglu-

coseaétéeffectuécheztoussesenfantsentre10et16ans.Lestroublesdumétabolisme

les plus graves constatés chez lesmères enceintes étaient associés à une dégradation

des performances intellectuelles et de développement psychomoteur. La macrosomie

fœtale258observéechezlesenfantsnésdemèresdiabétiquesdisparaissaitversl’âgede

unan.Entre14anset17ans,l’IMCmoyenestde24,6enmoyennechezlesenfantsnés

demèresdiabétiquespar rapportàun IMCmoyende20,9 chez lesmèresnondiabé-

tiques.Une sécrétionexcessived’insuline inutéroestprédictived’uneobésité etd’un

troubledelatoléranceauglucoseàl’adolescence.

256WHITAKERR.C. (2004).Predictingpreschoolerobesityatbirth: theroleofmaternalobesity inearlypregnancy.Pediatrics,114,pp.29-36.257SILVERMAN B.L et al (1998). Long-term effects of the intrauterine environment. The Northwestern UniversityDiabetesinPregnancyCenter.DiabetesCare,21,pp.142-149.258Onconsidèrecommemacrosometoutenfantdeplusde4000gnaissantàterme.

Page 259: Apprentissage coopératif et formation des médecins : … participants to marshal their own experiences, to reflect thoughtfully and to coope-rate with each other, can improve the

258

Dansaucundesjeuxderôles(ceuxdel’étudeetceluidugroupetémoin),iln’aétéabor-

dél’existencedeproblèmespsychologiques(troublesanxieux,stress,étatdépressif,as-

thénietroublesdusommeil).Lafatigueaétécitéeparlesacteursdansdeuxjeuxderôle

surquatre,cetitemn’apasétéd’ailleursmentionnéparlesmédecinsassistantaujeude

rôle.Parcontre,lesparticipantsontassezbiencirconscritlesproblèmespsychologiques

commel’étatanxieux,latristesse,lesrelationsavecl’entourage(parents,fratrie,amies).

Ilsontsouhaitéégalementquel’entretienportesurlesévénementsdeviepouvantpo-

serproblèmecommeunchangementd’établissementscolaire,undivorce.

Silesparticipantssesontintéressésàlapropreimagedelapatienteetàsonressentidu

regard porté par les autres, rien sur le plan psychiatrique, notamment au niveau des

troublesducomportementalimentairecommelaboulimieetl’anorexiementalen’aété

évoqué.Àlasuitedecetteséquence,nousavonsalorsdemandéàl’assistancederéflé-

chiràcetteinterrogation:l’obésitéest-ellelacausedetroublespsychologiquesoubien

est-elle responsable de manifestations psychologiques? Nous avons rencontré deux

«classes»departicipants:unepourlesquelsl’obésitéétaitresponsabledesouffrances

psychologiquesetl’autrequiprenaitpositionsurlesconséquencesdediversproblèmes

psychologiquesfamiliauxleplussouventsurlaprisedepoids.Nousn’avonsmalheureu-

sement pas décompté le nombre de participants avant et après la présentation orale

(obésitéinfantileettroublespsychologiques-Causeouconséquence?259)danslesdeux

groupeséphémères:celuidescausesetceluidesconséquences.Notreconclusionétait

simple: toutest intriqué.Laséparationthéoriqueentrecauseetconséquenceestseu-

lementdidactique.L’originedel’obésitéinfantileestmultifactorielleetnepeutselimi-

teràuneseulecauseouconséquence.

Enfin, aucunediscussionn’aporté sur lepoids idéalde cette jeune fille: faut-il à tout

prix de se rapprocher d’une norme? Comment cette norme a été établie: tient-elle

comptedesantécédentsdecettejeunefille,desoncontextedevie,desonétatdebien-

être? Faut-il agir uniquement en fonction de chiffres de l’indice demasse corporelle

(IMC)?260

259BUDOWSKIM.,ARENE-GAUTREAUL.(2007).260BUDOWSKIM.,FRARIERM.(2012).Fluctuationsdelafrontièreentrelenormaletlepathologique:quellesensontlesconséquencesbiomédicales,psychologiques,économiques,éthiquesetsocialessurlesindividus?Aproposdelaprévention. Atelier de réflexion. Congrès de la recherche en Médecine Générale, Nice et également BUDOWSKI M.,ARENEGAUTREAUL.(2006).Préventionetdépistage:quandlenormaldevient-ilpathologique?RevueduPraticien

Page 260: Apprentissage coopératif et formation des médecins : … participants to marshal their own experiences, to reflect thoughtfully and to coope-rate with each other, can improve the

259

Analysesurleplanpédagogique Nousavons choisipour ce jeude rôleun synopsis consacré à l’obésité infantile, car il

permet d’agir sur toutes les facettes de la compétence: les connaissances, les savoir-

faire, lesattitudeset lessavoiragir.Laréalisationdece jeuderôles’est faiteendeux

étapes:unepremièreétapepoursélectionnerlesressourcesdidactiquesetlestranspo-

serensituationdeformation;unesecondeétapeafindecouplerleprojetdeformation

aveclesréférentielsdecompétencesetdefonctions(listed’indicateursdecompétences

dans ce casprésent). Lebutn’estpasdeproposerune solution toute faite afinde ré-

soudre une situation clinique complexe; mais d’aider les participants, grâce à des

échanges interactifs, à structurer une réflexion appropriée à la demande de

l’adolescente.

Ungrouped’apprenants,grâceunteldispositifpédagogiquequisedérouledanslecadre

d’un apprentissage coopératif, peut prendre connaissance d’une plus grande quantité

d’informationsutilesàsonmétier.Lesparticipantsetacteurssesontexprimésenfonc-

tiondel’objectifde laséquence:prendreenchargeuneadolescenteenlégersurpoids

quiveutperdredeskilos.L’ensembledespropositionsénoncéesparlesparticipantslors

desséancesdebrainstormingoudemétaplanasemblécouvriràpeuprèstous lesas-

pectsde lasituationcomplexejouéepar lesacteurs.Mais ilnesuffitpasdeprononcer

desmotsdanslefeudel’action,ilfautêtrecapabledereproduirecequiaétédit.Com-

mentintégrerl'assemblagedecessavoirspouragirefficacement?Autrementdit,com-

mentmanifesterdescompétencesprofessionnelles?Cejeuderôleavaitpourobjectifde

faireprendreconscienceauxacteurscommeauxparticipants,despossiblesproblèmes

relatifsàlasituationcliniqueétudiée.Cetteactionderéflexionétaitdestinéeàaméliorer

lescompétencesdetous,maisn’étaitpassuffisantepourdirequecesapprenantspuis-

sentdevenircompétentsdansledomaineétudié.Loindelà,ilestévidentquesilesor-

ganisateursdecetteformationontproposécedispositifpédagogiqueavecdestempsde

réflexion et deproduction alternant avecdes tempsdepartage et dediscussion, c’est

pouraiderlesapprenantsàarticulercessavoirsavecleurpratiqueprofessionnellequo-

tidienne.Chaqueapprenantdoitcependantfaireuneffortpersonnelpourmémoriserce

quiaétédit.Danslecasdece jeuderôle, lefaitdeprononceràplusieursreprises les

MédecineGénérale,704-705,pp.1076-7.

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260

items peur rendre plus facile l’utilité et l’intégration de ces différentes données dans

leurspropresschèmesd’actionfuture.

Nousn’avionspasassez insistéauprèsdesanimateurssur l’utilisationde la technique

dumétaplan®quenousavionsprivilégiéenpremierlieu.Maiscechoixdenepasutili-

sercettetechniquepédagogiqueaétéunebonnechosepournotredémonstration.Lors-

quelatechniquedumétaplan®estutilisée,lesparticipantsnesontpasaucourantdece

quiestécritparchacun.Parcontre,danslebrainstorming,chaqueparticipantpeutre-

bondir sur ce qui a été dit précédemment. Le nombre d’items recueillis à l’issue du

brainstormingestbiensupérieuràceuxglanésaveclemétaplan®.Nousn’aborderons

pasdansceparagrapheleproblèmedel’évaluationdanssaglobalité(auditdessavoirs

desparticipantsavantet justeaprès la formation,évaluationàdistancedecessavoirs

plusieursmoisaprèslafindelaformation).Notreobjectifestdeporteruniquementun

jugementsurledispositifpédagogiquequenousavonsproposéauxdifférentsmédecins

venusseformersurl’obésitédel’enfant.

L’approcheparcompétence261apourobjectif,chezunsujetapprenant,detransformer

enprofondeuroud’élaborerdesconnaissances,desattitudesetdefuturesactions.Pour

répondreàcetobjectif, ilestnécessairedeproposeràcetapprenantunapprentissage

ditconstructivistecomportantuneoudestâchesprofessionnellescomplexesqu’ildevra

résoudre;cecienagissantetenfaisantappelàsespropresschèmesmentauxdéjàmé-

morisés.Lebutestdemobiliserdifférentssavoirsacquisetdefavoriserleursinférences,

afin de réfléchir pour agirefficacement ; l’apprenant a ainsi la possibilité d’accomplir

d’unemanièresatisfaisanteetconformelesactionsactuellesetfutures.

Rédigerdessituationscomplexesdanslebutd’acquériruneoudescompétencesnéces-

sitelamiseenplaced’uneévaluationfiableetobjective.Pendantlongtemps,l’évaluation

a consisté à découper la compétence à acquérir en unités plus petites (tâches profes-

sionnelles simples), plus facile à évaluer. Or cette décomposition en tâches simples

n’évalueenrienlacompétenceetfaitperdretoutefinalitéettoutsensàl’apprentissage.

Pourévaluerunecompétence,GérardScallon262(2005)proposed’utiliserdesoutilsde

261Cf.§1.2.1.262SCALLONGérard(2005).Approcheparcompétencesetévaluation.Disponiblesur:http://www.fse.ulaval.ca/gerard.scallon/valise_BEP2/formeval.pdf

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261

jugement basés sur des listes de vérification, des grilles d’évaluation, et des échelles

d’appréciation.Carpourcetauteur,

«lacompétencesedéfinitparlacapacitépourunindividud’utiliseràbonescientcequ’ilsaitetcequ’ilsaitfaire:savoirs,savoir-faire,stratégiesetsavoir-êtredeviennentdesobjetsdevérificationqu’ilfautdistinguerlesunsdesautres».

Il est impossible de «voir directement» une compétence. L’évaluateur ne peut

qu’observerleseffetsdel’acquisitionpossibledecettecompétencesurlapersonneéva-

luée.Pourtant,lesenseignantsdanslesuniversitésmédicalesontcrulongtempspouvoir

évaluer (et certains le font encore) les compétences par l’utilisation d’une évaluation

fractionnée,baséesurdescomparaisonsavecdesindicateurs.Orl’évaluationdescom-

pétencesdoitêtreunprocessusglobal.Noussommesdevantunparadoxetotal : juger

uneapprocheconstructivisteavecdesélémentsdelapédagogieparobjectifs!C’estce

quipouvaitexpliquernotamment laréticencedesenseignantsàproposerdesappren-

tissagesselonl’approcheparcompétences.GrâceauxtravauxdeGrantWiggins,lepro-

blèmedel’évaluationrencontrédansl’approcheparcompétencescommenceàêtreen

partie résolu.Wiggins a été peut-être inspiré par le second théorème de Gödel263qui

précisait qu’aucun système n’est capable de résoudre tous les problèmes rencontrés

danscesystème.Ensortantdusystèmedel’évaluationhabituellementréaliséedansles

apprentissages,enécartanttouteslesthéoriesclassiquesdel’évaluationfortementins-

piréeparleparadigmecomportementaliste,Wigginsnousinviteàutiliserunprocessus

d’évaluationdestinéànouspermettrenonseulementdeporterunjugementglobalnon

seulementsurleprocessusfinal(évaluationdudegréestimédecompétencedesappre-

nants);maisaussid’argumenterunavissurlesprocessuspédagogiquesmisàdisposi-

tiondesapprenantspouratteindreleniveaudecompétenceexigé.

Pourréalisercorrectementunetelleévaluation,ilestnécessairedelefaireselonuncon-

texted’approche réflexive et expérientielle, et dans le cadreduparadigme constructi-

viste de l’approche par compétence264. En premier lieu, la situation professionnelle

263Selonlesecondthéorèmed'incomplétudedeKurtGödel,iln’estpaspossibledesortirdudilemmed'uneaffirma-tionvraieetfausseàlafoiscommedansunparadoxe.Seloncetauteur,ilestvaindepensertrouverunesolutionsurlemêmeplanderaisonnement.Ilestnécessairedequittercedomaineduparadoxecarsinousraisonnonsàceniveau,ilyablocage.Lasolutionestderéfléchirsurlesdonnéesdecedomaine,sansêtredanscedomaine.Pourcela,ilfautenvisagerdeporterlesélémentsutilespourleraisonnementdansunsystèmepluslargecommelesystèmedesméta-connaissancesdécritparFlavell.264Cf.§1.2.1.

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262

soumiseauxquatregroupesdemédecinsàformersurl’obésitéinfantiledoitêtrecom-

plexeetsignificativepourchaqueapprenant;elles’approcheidéalementdelaréalitéde

cequ’ilauraàrésoudredurantsavieprofessionnelle.Cettesituationauthentiqueper-

metégalementd’évaluer l’apprenantdanssescapacitésàmobiliser toutunrépertoire

de ressources cognitives adaptées, notammentdes connaissances, des habilités et des

attitudes, et les interactionsentrecesdifférentes composantesde la compétenceainsi

contextualiséepourprendredesdécisions justifiées.Cetteapprochede la compétence

peutêtrerapprochéeavecladéfinitionproposéeparGeorgeE.Miller.Seloncetauteur,

lacompétenceestunensembledeconnaissances,d'attitudesetdecomportementsqui,

réunis chez un individu, le rendent apte à exercer telle ou telle activité profession-

nelle265. Ledispositif pédagogiquequenous avons choisi intéresse essentiellement le

domainedel’affectif(toutcequitoucheausavoir-être,aurelationnel–voirtaxonomies

deBloom266).Eneffet,laséquenceaétéélaboréepourfaireréfléchirlesparticipantssur

leslienspossiblesentrelesproblèmespsychologiquesetlesurpoids(causesouconsé-

quences!).

Nousavonsdemandéauxparticipants,pendantque lesacteursétaientsortis,deréflé-

chir audéroulementd’une telle consultation: c’estune séquenceessentiellementpra-

tique.Lesparticipantsontécoutéattentivementles2acteurspendantlejeuderôle,puis

ontdébattusurlesdifférencesperçuesentrecequ’ilsontproposéeux-mêmesetcequia

été dit par les deux acteurs. Enfin, ils ont effectué des corrections dans le classement

effectué au début du dispositif pédagogique. Ces différentes phases d’attention,

d’anticipations, de réflexions, d’interactions et de corrections sont des actions qui ne

peuventqueconcouriràl’améliorationdelapratiquedesparticipants.Lastimulationde

lapensée réflexive est efficace sur l’acquisitionde compétences (Lewin -1947,Kolb -

1984,Gibbs–1988,etc.).

Cen’estpaslaréponsefinalequiestlaplusintéressantedansunapprentissage,maisla

connaissancedesdifférentesétapesdelarésolutionduproblèmeparl’apprenant,réali-

séenotammentgrâceunerétroactionsurlesprocessusmentauxutiliséspourélucider

leproblème.CetterétroactionestnécessairepourJacquesRodet(2000,p.49),carellea

pourfinaliténonseulementdeciblerlespointsàamélioreretrépertorierlesstratégies 265cf.§1.2.1.266cf.§1.1.2.

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intellectuellesutilisées,maisaussiderecadrersibesoinledéroulementdelaformation.

La rétroaction peut faire ressortir desmanques ou des difficultés, parfois en relation

avecdesvaleurspropresàchaqueapprenant.Pourcetteraison, larétroactionnedoit

surtoutpasêtreconsidéréecommeunactedejugement.Ils’agitavanttoutd’établirune

liste de différentes observations sur le processus de résolution du problème afin

d’établirunesortederemèdedestinéàaméliorerlescompétencesprofessionnellesde

l’apprenant. La rétroaction n’est aucun cas unemesure de la performance des appre-

nants:cen’estpasunecorrection.

Laformationafaitappelàuneapprochesocioconstructivistecentréesurlesapprenants.

Enthéorie,sinousavionsdûréellementévaluerlesapprenants,nousnousserionsseu-

lementintéressésauprocessusdeconstructiondessavoirs.Certes,évaluerlesconnais-

sancesacquisespeutêtreintéressant.Maisnouspensonsquecetyped’évaluationdoit

êtrespontanémenteffectuépar toutapprenant,sous la formed’uneévaluation forma-

tivepersonnelle,ens’appropriantnotammentdesdonnéesémisesparlesautresparti-

cipants.Eneffet,lepolymorphismeintellectueldesindividus,observédanslaformation

initialeetcontinuedesapprenants,estinadaptéàunenormeuniquedesavoirs.Cetype

d’évaluationdesprocessusde constructiondes savoirsn’apas cependantétéproposé

parlesresponsablesdelaformation.Ilauraitpossibleégalementd’effectueruneévalua-

tiondetypecollectivedansuneapprochedynamiquequitientcomptedespotentielset

descomplémentaritésdesapprenants.

Laplupartdesévaluationsréaliséesdanslesdifférentesformationssontdel’ordresta-

tique,c’est-à-direfocalisésurlaqualitéetlaquantitédessavoirsissuesdelaformationà

untempsdonné.Lebutdelaformationproposéeétaitd’amenerlesapprenantsàacqué-

rird’unemanièrecollectivedessavoirsdynamiques,susceptiblesd’évoluerenfonction

dessituationscliniquesrencontréesdansun futurproche.Quecesoitparrétroaction,

réflexion,évaluationdeproduitsdérivés (performancedumédecincomme lapriseen

chargeefficace,maisdemoindrescoûtsouplusrapide,etc.),cetteévaluationn’apaseu

lieu. La séquence pédagogique était unique. Pour cette raison, il a été impossible de

mettre aupointune telle évaluationpuisqu’il n’était pasprévuune seconde sessionà

distance.

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264

S’ilétait intéressantdecomparer laproductiondesacteursetdesparticipants, ilétait

cependantimportantdedéfinirauparavantunelisted’itemsdestinésauxobservateurs

afin de les aider à structurer leurs évaluations. En effet, un des principaux reproches

enversl’approcheparcompétenceestleproblèmedel’évaluationdescompétences(cf.§

1.2.1.).SelonLindaAllal267(2000,p.80),

«une compétence est formée de ressources cognitives et métacognitives, ainsi que de compo-santesaffectives, socialeset sensorimotricessusceptiblesd’êtremobiliséesenactions finaliséesfaceàunefamilledesituations».

Unecompétenceseconstruit toujoursparunapprentissageensituation (cf.discussion

supra,Lave,1988;Brown,Collins&Duguid,1989268).Le jeuderôleestunapprentis-

sageensituation.Commelaplupartdesapprentissagescoopératifs,undesesobjectifs

estde favoriseruneévaluationmutuelle : des apprenants ayantunmêmestatutdans

une situation de formation vont évaluer d’unemanière interactive leurs productions.

Cette évaluation peut être réalisée notamment avec l’aide d’un référentiel de compé-

tences.Leréférentieldescompétencesestunoutilquiapourobjectifd’identifieretde

décrirelescompétencesquisontnécessairespourlebonexercicedesfonctionsconfiées

àunprofessionnel.Cetoutildonnelapossibilitéauxapprenantsdesesituerparrapport

auxactivitésetauxcompétencesattenduesdansleurfonctionprofessionnelle.Ilpermet

également aux responsables de l’enseignement une démarche homogène d’évaluation

desacquis.

Unréférentieldecompétenceestciblésuruncertainnombredesituations.Iln’estpas

possibleparexemplededécrirelatotalitédumétierdemédecingénéraliste.Unréféren-

tiel doit comprendre les situations qui sont les plusmarquantes de l’exercice profes-

sionnel. Dans un référentiel de compétences, il n’est pas nécessaire de prendre en

comptetouteslessituationsprofessionnelles,seulementunéchantillondecessituations.

Cependant, l’échantillondesituationscomplexessélectionnéesest-il réellement repré-

sentatif de l’universde référence (itemsetniveaux) correspondant à la compétence à

acquérir? Certes, cette «représentativité» sera probablement supérieure à celle des

questions élaborées à en fonctiondesobjectifs pédagogiques spécifiques.Mais ellene

267Texteégalementdisponiblesur:http://www.unige.ch/fapse/publications-ssed/files/7714/1572/5501/Pages_de_77_ENCOED.pdf268Cf.§2.1.3.

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sera jamais globale: il est difficile d’inférer lamaitrise d’une compétence à partir de

quelquessituationscomplexes.

Nousn’avonspasretrouvédanslalittératureunréférentieldecompétencesproprement

ditsurlethèmedel’obésitédel’enfant.Nousavonsélaboréunelisted’indicateursdes-

tinéeàaiderlesobservateursdujeuderôle.Cettelistecontient19indicateursquiont

étérépartisen3 feuillets.Maiscerecueild’indicateursproposéci-dessousnedoitpas

êtreconsidérécommeunréférentielglobalconcernantleproblèmedel’obésitéinfantile,

le diagnostic, la prise en charge, le suivi. Ce recueil est adapté essentiellement à

l’entretienavecunenfantetsesparentsouun(e)adolescent(e)bienportant(e)ouqui

s’estimeensurchargepondérale.Pourélaborercedocument,nousavonseffectuédiffé-

rentesrecherchessurlamiseàdispositionpourlesmédecins,dedocumentsrepèressur

lesujetdel’obésitéinfantile.Troisdocumentsontétéainsisélectionnés:

• Unréférentield’auto-évaluationdespratiquesprofessionnellesenmédecinegé-

néralede9pages,paruen2004.Ceréférentielestaxésurlapriseenchargede

l’obésité de l’enfant, notamment le diagnostic et l’identification des facteurs de

risque. Ce document a été édité par le service d’évaluation des pratiques de

l’ANAES269.

• Unerecommandationdebonnepratiquepubliéepar laHauteAutoritédeSanté

en2011surlesurpoidsetl’obésitédel’enfantetdel’adolescent270.Cedocument

estdestinéàactualiserdesrecommandationssurcesujetpubliéesen2003(218

pages).

• UndocumentduMinistèreduTravail271,del’EmploietdelaSantéde46pages,

paruen2011,et traitantduPlanobésité2010–2013avecplusieursmesures;

notamment lamesure1 -4: reconnaîtredeséquipes spécialiséesenéducation

thérapeutiquedans ledomainede l’obésitéen s’appuyant surun référentielde

269Référentiel d’auto-évaluation des pratiques professionnelles en médecine générale (2004). Prise en charge del’obésitéde l’enfant :diagnosticet identificationdesfacteursderisque.Paris,Serviced’Evaluationdespratiquesdel’ANAES,9p.Disponiblesur:http://www.unaformec.org/gep/docs1/Obesite/referentiel_obesite.pdf270HAS(2011).RecommandationdebonnepratiqueSurpoidsetobésitédel’enfantetdel’adolescent(Actualisationdes recommandations 2003). St Denis, Haute Autorité de Santé, 218 p. Disponible sur: http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2011-10/reco2clics_obesite_enfant_adolescent.pdf271Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Santé (2011): Plan obésité 2010 – 2013. 46 p. disponible sur:http://www.sante.gouv.fr/IMG/pdf/Plan_Obesite_2010_2013.pdf

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compétences intégrant ladimensionpsychologique,diététiqueetd’activitéphy-

sique.

Nous proposons ci-dessous cette liste d’indicateurs sous la forme d’un tableau. Nous

avons intégré les propositions regroupées des deux acteurs et des participants aux 4

jeuxderôlesàces19items.

Propositionsattendues Propositionsregroupéesdesacteursmédecins Propositionsregroupéesdesparticipants

L’acteurmédecina-t-ilpeséMariemous’est-ilsatisfaitdel’énoncédesonpoids?

Les4acteursmédecinsn’ontpasme-suréeux-mêmeslepoidsetontseule-mentdemandéàlapatientesonpoids.

Lesparticipantsontinsistésurlanécessitédemesurerlepoids.

L’acteurmédecina-t-ilmesuréMariemoubienluiasimplementdemandésataille?

Touslesacteursmédecinsontseule-mentprisencomptel’énoncédelatailleenhauteurparlapatiente.

Pourles4groupes,ilfautmesurerlatailleenhauteuretnepassesatisfaireuniquementdesonénon-céparlapatiente.

L’acteurmédecina-t-ildemandésoncarnetdesantéetregardésacourbe

decorpulence?

Aucundesacteursmédecinsn’arécla-mélecarnetdesanté,notammentpouravoiruneidéesursacourbedecorpu-

lence.

Touslesparticipantsdes4groupesontsouhaitélirelecarnetdesantéetvérifierlacourbedecorpulence

delapatiente.L’acteurmédecina-t-ilcalculéson

IMC?Lesacteursmédecinsdes4groupesontcalculél’IMC,maisseulementàpartirdeschiffresdonnésparlapa-tiente.

Dansles4groupes,lesparticipantsontproposédecalculerl’IMCenfonctiondespoidsetdelataille.

L’acteurmédecina-t-ilreportésursacourbedecorpulence?

Lereportdel’IMCn’apuêtreréalisépuisquelesmédecinsacteursn’ontpasdemandélecarnetdesantédelapa-tiente.

Lesparticipantsdes4groupesonttousproposédereporterlechiffredel’IMCsurlecarnetdesantédelapatiente.

L’acteurmédecina-t-ilrecherchéàconnaîtrelastructureetlemodedefonctionnementfamilial?

Aucundesacteursmédecinsnes’estintéresséàlafamilledelapatiente.ԓ

Dansles4groupes,ilyaeuunintérêtportésurlastructureetlemodedefonctionnementfamilial,maisdemanièreinégale,parfoisdefaçon.

L’acteurmédecina-t-ilrecherchédeséventuelleserreursdiététiques?

Les4acteursmédecinsontquestionnélapatientesursonalimentationhabi-tuelle.

Cetterecherched’éventuelleser-reursdiététiquesaétéproposéeparlesparticipantsdes4groupes.

L’acteurmédecina-t-ilréaliséuneévaluationqualitativedesapportsalimentaires,absencedepetitdé-jeuner,grignotage,plusieurscolla-tions,boissonssucrées...?

Unacteurmédecinatentédeconnaîtrelesapportsalimentairesquotidiens.Maisn’apasquestionnélapatientesurlesboissonssucrées.

Touslesparticipantsdes4groupesontproposédes’informersurlafréquencedesrepas,l’existenceéventuelledegrignotageetlaquan-titédeboissonssucréesingéréesquotidiennement.

L’acteurmédecina-t-ilinterrogéMariemsurseshabitudesdevie?

Leshabitudesdeviedelapatienteontétérecherchéespartouslesacteursmédecins.

Touslesparticipantsontsouhaitéconnaîtreleshabitudesdeviedelapatiente

L’acteurmédecina-t-ilrecherchéàconnaîtrelastructureetlemodedefonctionnementfamilial?

Aucundesacteursmédecinsnes’estintéresséàlafamilledelapatiente.ԓ

Dansles4groupes,ilyaeuunintérêtportésurlastructureetlemodedefonctionnementfamilial,maisdemanièreinégale,parfoisdefaçonsommaire;dansdeuxgroupesilaétéproposerd’effectuerunerechercheplusapprofondie.

L’acteurmédecina-t-ilintéresséaumodedeviedesparentsdeMa-riem?

Touslesacteursmédecinsontinterro-gélapatientesurlemodedeviefami-liale,notammentdesparents.

Larecherchedumodedeviedelafamille,notammentdelamèremarocaineetdupèrebreton,aétédéclinéedansles4groupesdeparticipants

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Propositionsattendues Propositionsregroupéesdesacteursmédecins

Propositionsregroupéesdesparti-cipants

L’acteurmédecina-t-ilévaluéleshabitudesalimentairesdesafa-mille?

Les4acteursmédecinsontinterrogélapatientesurseshabitudesalimentairesetcellesdesafamille.

Lacuisinemarocaine(couscous,tajine)afaitbaverplusd’undesparticipants,beaucoupquelecidreoulecalvados.Touslesgroupesontinsistésurleshabitudesalimen-tairesfamiliales.

L’acteurmédecina-t-ilrecherchédestroublesducomportementalimentaire(TCA)chezl’adolescenteetdanssafamille?

C’estassezsurprenant,maisaucundesacteursmédecinsnes’estintéresséàd’éventuelsTCAchezl’adolescenteoudanssafamille.

LesTCAontétéévoquésdansles4groupes.

L’acteurmédecina-t-ilrecherchédessignesfonctionnelsévoquantunecomorbiditéouunecomplica-tion(dyspnée,troubledusommeil,douleurarticulaire,migraines,dyspepsie,troubledutransitintesti-nal)?

Aucunsymptômeévoquantuneco-morbiditéoudessignesdigestifsn’aétérecherchéparlesacteursmédecins

Touslesparticipantssesontinté-ressésauxproblèmesdigestifsnotammentlesvomissements,lestroublesdutransit.Dans2groupes,ilaétéévoquéleproblèmedelathyroïde.

L’acteurmédecina-t-ilrecherchédessignesfonctionnelsévoquantunecomorbiditéouunecomplica-tion(dyspnée,troubledusommeil,douleurarticulaire,migraines,dyspepsie,troubledutransitintesti-nal)?

Aucunsymptômeévoquantuneco-morbiditéoudessignesdigestifsn’aétérecherchéparlesacteursmédecins

Touslesparticipantssesontinté-ressésauxproblèmesdigestifsnotammentlesvomissements,lestroublesdutransit.Dans2groupes,ilaétéévoquéleproblèmedelathyroïde.

L’acteurmédecina-t-ilévaluélecomportementpsychologiquedel’adolescente(immaturité,intolé-ranceàlafrustration,capacitéd’autonomisation,etc.),sonanxié-té?

Aucundesacteursmédecinsnes’estintéresséréellementaucomportementpsychologiquedelapatiente.

Dansles4groupes,lesparticipantsontenvisagéunerelationpossibleentreleproblèmedepoidsetdesdifficultéspsychologiques.Certainsdecestroublesontmêmeétéavan-césdans3groupes.

L’acteurmédecina-t-ilévaluélesmotivationsetlademanderéelledel’adolescente?

Deuxdesacteursmédecinsontrecher-chéchezlapatientelesraisonsdesademande,quecesoitpourladispensedesportoupourperdredupoids.

Touslesparticipantsontsouhaitéconnaîtrelesmotivationsdelapatienteàperdredupoidsouàêtredispensédesportd’escalade.

L’acteurmédecina-t-ilproposédesexamenscomplémentaires?

Dansunjeuderôle,unacteurmédecinaprescritunexamensanguin,notam-mentledosagedelaT.S.H.

Seulungroupearejetélanécessitédeprescriredesexamensbiolo-giques.

L’acteurmédecina-t-ilrecherchéd’éventuelsproblèmesendocrinienspersonnelsouhéréditaires?(dia-bète,dysthyroïdienotamment)

Unacteurmédecinainterrogélapa-tientesurdesproblèmesfamiliauxdediabèteetthyroïde.

Dans3jeuxderôlesur4,lesparti-cipantsontdemandéàconnaîtrelesantécédentsmédicauxetmêmechirurgicaux.

L’acteurmédecina-t-ilutilisédesmotssimples,compréhensiblesparl’adolescente?

Àpartunou2motspeut-êtretroptechniques,lelangageétaitadaptéàlapersonne(quiétaitcependantunmé-decin!)

Lesparticipantsnesontpascon-cernésparcetitem.

Figure 15 : Tableau comparatif des indicateurs mis à la disposition des observateurs et les

réponses de l’acteur médecin et des participants

Pourlesacteursmédecins,ilexistedescarencesimportantes:secontenteruniquement

desdiresdel’adolescentesursesmesures(tailleetpoids),nepasdemanderlecarnetde

santéetvérifierlacourbedepoids.Danslaréalité,laplupartdesadolescentsamènent

rarementleurcarnetdesanté.Maislesmédecinsauraientpuproposerunautrerendez-

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vous pour le suivi et demander que l’adolescente revienne avec son carnet de santé:

celan’aétéfaitdansaucundes4jeuxderôle.Lesacteursmédecinsnesontpasintéres-

séségalementàlastructurefamiliale,àlarecherchedetroublesdecomportementali-

mentaire,desouffranceorganiqueetdeproblèmespsychologiques.Unacteurmédecina

fait une prescription d’examens complémentaires notamment concernant la thyroïde

danslebutdel’adresseràunspécialisteenendocrinologie.

Par contre, la comparaison entre les items de cette grille et ceux des participants ne

montrepasunedifférence significative. Lesparticipants ontmêmeproposédes items

supplémentairesquipourrontêtreprisencomptepour l’écritured’unréférentielplus

adaptésurcesujet.

Cesitemssupplémentairessontlessuivants:

1. Assurerlesuivienfixantnotammentladated’unprochainrendez-vous.

2. Rechercherunecassuredelacourbedepoidsetdurebondd’adipositésurlacourbede

corpulence(lejeuderôleayanteulieuunefoisen2edemi-journée,etlesautresfoislors

dela3edemi-journée,lesparticipantsontpuintégrerlesdiversesinformationsdélivrées

lorsdela1redemi-journéesurledépistagedel’obésitéinfantile).

3. Recherchersielleadéjàtentédefaireunrégime(nombredefoisetrésultats).

4. Demanders’ilexisteuneobésitéfamiliale?

5. Connaître la date de la ménarche. (première période de menstruationsqui a une in-

fluencesurledéveloppementdelacroissance).

6. Recherche l’existenced’éventuellesmodificationsdans seshabitudesde vie (déménage-

ment,divorce,décès,changementd’établissementscolaire.

7. Commentressent-ellel’impactdesregardsdesautressurelle-même?

8. Quelleimportancedonne-t-elleàsonimagecorporelle?

9. Désire-t-ellemaigriruniquementpourunbénéficeesthétique?

10. Rechercherdesintempérances:tabac,alcool,cannabis,etc.?

11. Connaître sa pratique sportive: aucun acteurmédecin n’a demandé à la personne qui

jouaitlerôledeMariemsicettedernièrepratiquaitunsportoul’avaitarrêté(commece-

laestindiquédanslesynopsispropreàMariem).

12. Quel est le temps passé devant un ordinateur, la télévision? (Cela correspondait à un

itemàtraiterdumétaplan®.

13. Comment se passe la scolarité: normalement? Avec des difficultés? Redoublement ré-

cent?

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14. Proposerdel’adresseràunediététicienne.

15. Rechercherlapossibilitédel’adresseràunréseaudepriseenchargedel’obésitéinfantile

(REPOP).Cettepropositionaétéfortementdiscutéedans3groupessur4.Laplupartdes

participantsontjugéqueleproblèmedupoidsdeMariemnedevaitpasêtretropmédi-

caliséetlasurchargepondéralediscrètenejustifiaitpasdefaireappelàuntelréseau.

16. A-t-elledesproblèmesdentaires?(d’oùdesdifficultéspourmanger).

17. Luidemandercequepeuventpensersesparentsàproposdecettedémarche?Lesavent-

ils?Faut-illeurenparler?

Au total,17 indicateursauraientpuêtreajoutésau19prévus initialement, soit36au

total.Sur leplanpédagogique,seulsdeuxgroupesontbénéficiéd’unerelecturedeces

indicateursafinderenforcerlesmessagesscientifiquesimportantsdecetteformation

Surleplandel’animation,nousavonsrencontrédesimprévus.Pourtant,avantderéali-

ser chaque action de formation sur l’obésité infantile, nous avons réuni organisateur,

experts et animateurs afin de préciser le programme et éventuellement l’amender en

fonctiondessituations locales.Cette formationétantanimateurdépendant,nousdési-

rionsconnaîtrelapersonnalité,lamotivationetlescompétencesdesanimateursprévus.

Auxquatreanimateursdésignésparlesorganisateurslocaux,ilaétéproposéunsynop-

sis de l’action à réaliser, avec des indications précises pour animer chaque séance de

travail engroupe. La légitimitédes animateurs et leurs compétencespour l’animation

n’ontpasétéremisesencause,maisleurspersonnalitéssontsouventdifférentes.Nous

leur avons demandé de ne pas être trop dirigistes ni au contraire trop non directifs.

Danslaréalité,leclimataétébienveillant,maislestechniquesd’animationontétésoit

plutôt autoritaires (tous les participants ont dû prendre la parole), soit un peu trop

laxistes.Cependant,l’analysequantitativeetqualitativedesrésultatsn’apasmontréde

réelles divergences entre les différents ateliers. Bien que le dispositif dumétaplan®

devaitêtreproposépréférentiellementauxparticipants,deuxanimateursn’ontpassuivi

lesconsignesetontproposéauxparticipantsderecueillirlesdonnéesaveclatechnique

du brainstorming. Lors de la réunion précédant les deux premières formations, nous

n’avonspasrecherchéàsavoirsilesanimateursmaitrisaientcorrectementledispositif

pédagogiquemétaplan®.Cedispositifpermetpourtantunedémarcheplusrigoureuse

dans le recueil des informations. Lorsde la3e formationqui a réunideux groupesde

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médecins,nousnoussommesrenseignéssurlescapacitésdesdeuxanimateursàutiliser

cettetechniqueetund’entreeuxnousarépondupositivement.Nousluiavonsdemandé

d’animerl’atelieraveclemétaplan®.

Le but de la séquence que nous avons proposée aux différents groupes de formation

était relativement simple: faire face à la demande d’une adolescente pour perdre du

poids.Lemédecinn’avaitpasàdécidersicettedemandeétaitraisonnableoupas,illui

était seulement demandé de répondre à cette demande. Pourtant, lors du débat, des

propositions de la part des participants étaient parfois surprenantes: pourquoi était-

ellevenueseule?Était-ellepousséeparunmembredesafamillepourmaigrir?Sespa-

rentsétaient-ilsaucourantdecettedémarche?Avait-ellevraimentbesoindemaigrir?

Ilvautmieuxqu’elleseconsacreàsesétudes,etc.Lesmédecinsparticipantsàcesforma-

tionssontdesmédecinsgénéralisteset ces réponsesétonnantespeuventparfoisnous

fairedouterdeleurcapacitéàprendreenchargecettedemandedepremierrecours.Nousn’avionspasassez insistéauprèsdesanimateurssur l’utilisationde la technique

dumétaplan®quenousavionsprivilégiéenpremierlieu.Maiscechoixdenepasutili-

sercettetechniquepédagogiqueaétéunebonnechosepournotredémonstration.Lors-

quelatechniquedumétaplan®estutilisée,lesparticipantsnesontpasaucourantdece

quiestécritparchacun.Parcontre,danslebrainstorming,chaqueparticipantpeutre-

bondir sur cequiaétéditprécédemment.Lenombred’itemsénoncéspar lespartici-

pantsaveclatechniquedubrainstormingestnettementsupérieuràceuxrecueillisavec

lemétaplan®.Nousn’aborderonspasdansceparagrapheleproblèmedel’évaluation

dans saglobalité (auditdes savoirsdesparticipants avant et justeaprès la formation,

évaluationàdistancedecessavoirsplusieursmoisaprèslafindelaformation).Notre

objectifestdeporteruniquementun jugementsur ledispositifpédagogiquequenous

avonsproposéauxdifférentsmédecinsvenusseformersurl’obésitédel’enfant.

L’approcheparcompétenceapourobjectif,chezunsujetapprenant,detransformeren

profondeur ou de développer des connaissances, des attitudes et de futures actions.

Pourrépondreàcetobjectif,ilestnécessairedeproposeràcetapprenantunapprentis-

sageditconstructivistecomportantuneoudestâchesprofessionnellescomplexesqu’il

devrarésoudre;cecienagissantetenfaisantappelàsespropresschèmesmentauxdéjà

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mémorisés.Lebutestdemobiliserdifférentssavoirsacquisetde favoriser leurs infé-

rences, afin de réfléchir pour agirefficacement ; l’apprenant a ainsi la possibilité

d’accomplird’unemanièresatisfaisanteetconformelesactionsactuellesetfutures.Ré-

digerdessituationscomplexesdanslebutd’acquériruneoudescompétencesnécessite

lamiseenplaced’uneévaluationfiableetobjective.Sinousavionsdûréellementéva-

luerlesapprenants,nousnousserionsseulementintéressésauprocessusdeconstruc-

tiondessavoirs.Certes,évaluer lesconnaissancesacquisespeutêtre intéressant.Mais

nouspensonsquecetyped’évaluationdoitêtrespontanémenteffectuépartoutappre-

nant,souslaformed’uneévaluationformativepersonnelle,ens’appropriantnotamment

desdonnéesémisespar lesautresparticipants.Eneffet, lepolymorphismeintellectuel

desindividus,observédanslaformationinitialeetcontinuedesapprenants,estinadap-

téàunenormeuniquedesavoirs.Ce typed’évaluationdesprocessusdeconstruction

dessavoirsn’apascependantétéproposéparlesresponsablesdelaformation.Ilaurait

possibleégalementd’effectueruneévaluationdetypecollectivedansuneapprochedy-

namiquequitientcomptedespotentielsetdescomplémentaritésdesapprenants.

J’airecherchésiledispositifsélectionnépouvaitentrerdanslecadredel’évaluationau-

thentiquetellequ’elleaétédéfinieparGrantWiggins.Seloncetauteur(1993,pp.22-

24):«L’évaluationauthentiqueestunprocessusformeletinformelquiconsisteàrecueillirdesinfor-mations, soitquantitatives soitqualitatives, sur les compétencesenvoiededéveloppementdesétudiants,àpartird’instrumentsbaséssurdessituationsréelles,proposantdestâchescomplexes,exigeantdestandardsdeperformanceetdecritèresprécisdanslebutderétroagirafind’aideraudéveloppementdescompétenceschezlesétudiantsetdecertifierleniveaud’atteintedescompé-tences».

Monobjectif estdeporteruniquementun jugement sur ledispositif pédagogiqueque

nousavonsproposéauxdifférentsmédecinsvenusse formersur l’obésitéde l’enfant.

Afind’avoirunavisargumentésurl’évaluationdelaséquenced’apprentissageétudiée,

nousavonsreprislescritèresdeWigginspouruneévaluationauthentiqued’unappren-

tissagequidoitnotammentcomporterlessixcaractéristiquessuivantes:

1-elleestréaliste;

2-ellefavoriselejugementetl’innovation;

3-elledemandeauxapprenantsde«faire»etnondedire,répéteroureproduire;

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4-ellesimulelecontexted’unesituationdetravail;

5-elleproposedestâchescomplexes;

6-ellefavoriselapratique,larétroaction,l’améliorationdescompétences.

Ledispositifpédagogique«jeuderôle»est-ilréaliste?

Lejeuderôleproposéestinspiréd’unedemanderéelle,pouvantêtrerencontrépartout

professionnelde santé exerçant en soinsprimaires.Certes, cettedemanden’estqu’un

instantanédeviedelapatiente.Pouréviterlecôtéartificieldetoutesituationrelatéeà

unmomentprécis,nousavonsarrangécetinstantanéenajoutantdesinformationspor-

tantsurlecontextedelademande,l’environnementfamilial,amicaletscolaire,afinde

colleràlaréalité.Lesadolescentsconsultentleplussouventleurmédecintraitantpour

rédiger un certificat de non-contre-indication à la pratique sportive. Cette rencontre

troprareàcettepériodedevieavecunprofessionneldesantédoitêtremiseàprofitpar

ce dernier pour rechercher d’autresmaux possibles pouvant affecter ces adolescents

(trouble du sommeil, addictions diverses, dépressions, troubles du comportement ali-

mentaires,etc.).Parfois,l’adolescentconsulteaucontrairepouruncertificatdedispense

d’uneactivité sportive; celademandeauprofessionneldesantéde rechercherdevant

cettedemandebanale,nonseulementlenon-dit,maisaussid’éventuelsproblèmespsy-

chologiquesetscolaires.Danslejeuderôleproposé,lebutdel’exerciceestd’écouterles

argumentsdelapatiente,deréfléchirsurlescausesinvoquées,maisaussiderechercher

desraisonspas toujoursoudifficilementexprimées,enfinaider lapatienteàrésoudre

sonproblèmevis-à-visdesonimagecorporelleetsonpoids.

Ledispositifpédagogiqueéprouvéestessentiellementcentrésurlerelationnel,lesatti-

tudes, le savoir-êtrequi sontdeshabilitésdifficilesàmesurer. Il estmalaiséd’évaluer

d’unemanière fiableetpertinente, l’ouvertured’espritde l’acteurmédecin,sonempa-

thie,sonrespectdesdemandesdel’adolescent,savolontédeconnaîtresespointsdevue

surleproblèmedéclaré.Lemédecinestjugéégalementsurcesréponses,lesmotsqu’il

doitdireetsurtoutnepasdire:c’estleprincipalaxedenotrerecherche.Cequinousa

permis de montrer une différence significative, aussi bien sur le plan qualitatif que

quantitatif,entreuneproductiond’ungroupeetuneproductionindividuelle.

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Le dispositif pédagogique « jeu de rôle » favorise-t-il le jugement et l’innovation ?

Ce jeu de rôle, en nous référant au paradigmede l’apprentissage coopératif, donne la

possibilitéauxparticipantsdes’exprimeroralement,dedireàvoixhautecequ’ilspen-

sent.Aulieudeselivreruniquementàunepenséeindividuellegardéepoursoi,chaque

participant peut proposer ses propres réflexions à voix haute devant d’autres per-

sonnes; celapermetdecontribuerpoursoi-mêmeàunemeilleurecompréhensiondu

problème,maiségalementpourlesautresetparlàmême,agirsurlesjugementsdecha-

cun.Piaget(1969,p.260),précisait:

«Qu’avantd’avoirhabituésonespritàcetteréciprocitégrâceauxéchangesinterindividuelsetàlacoopération, l’individudemeureprisonnierde sonpointdevuepropre,qu’il considèrenaturelle-mentcommeabsolu»

Pourcetteraison,nousavonsconstruitcetteséquencepédagogiquedanslebutdefavo-

riserleséchangesverbaux,formelsetnonformelsafindepartageretaméliorerdessa-

voirs, voire en créer desnouveaux grâce à un travail en équipe. Cet apprentissage en

groupe encourage l’efficacité de chacun des participants en utilisant le concept

d’intelligencecollectivepartagée.Grâceàceconcept,unparticipantàuneformationde

groupepeutavoiruneperceptionpluscomplètedudomaineà traiteren interagissant

avec les autres apprenants de ce groupe. Dans le cas contraire, la perception du pro-

blèmeparceparticipantseraincomplèteetpeutêtreàl’originedemanquesdesavoirs

oudecomportementsinadaptés.

Silejeuderôleestbiendéfini,leproblèmeproposén’estpascependantcomplètement

structuré,carilestdépendantdesinteractionsdesdeuxacteurssurledéroulementde

l’action pédagogique. Les deux acteurs ont certes un synopsis,mais ils ont également

une certaine autonomie pour leurs choix de questions et de réponses. Tous les deux,

maissurtoutceluiquijouelerôledemédecin,doiventutiliseravecefficacité,maisaussi

circonspection leurs connaissances et leurs aptitudes pour amener les autres partici-

pantsàécouter,às’intéresser,àsequestionner.Lecaractèreinnovantdujeuderôleque

nousavonsproposérésidedanslacomparaisonentrelerecueildedonnéesémisespar

l’ensembledesparticipantsnonacteursaveccequiaétéditparlesacteurs.

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Ledispositifpédagogique«jeuderôle»demande-t-ilauxapprenantsde«faire»etnondedire,répéteroureproduire? L’efficacitédel’apprentissagedépenddelavolontédesparticipantspourfairevivrece

jeuderôledanslebutd’améliorerleurspotentielspouragirefficacementlorsquecela

sera nécessaire. Dans ce type de jeu rôle amendé, les concepteurs d’un tel dispositif

s’attendentà ceque lesparticipants soient réellementactifs. Il leuraétédemandéde

réfléchirsur lesujet,puisdeproposerunmaximumd’itemsconcernant lesujet traité.

Par la suite, nous avons sollicité les participants pour classer tout ce qu’ils venaient

d’énumérer. C’était également un travail collectif de réflexion, car les animateurs ont

souhaité l’accord de tous les participants non acteurs avant de proposer un premier

classement.Nousleuravonsdemandéaussid’avoiruneécouteattentiveetdenoterce

quileursemblaitêtredestermesadaptésoudesmotsinadéquats.Enfin,àlafindujeu

de rôle,nousavons sollicité lesparticipants surd’éventuellesmodificationsau classe-

mentproposéendébutdeséquence.Cetteefficacitéétaitcependantfonctiondescondi-

tionsdel’animation.Sil’attentedesanimateurspourlaréussitedecetapprentissageest

élevée, le travail desparticipants estplus efficace, enrichissant le contenudes savoirs

pourtouslesparticipants.Lorsqu’unanimateurauneattentefortederéussitevis-à-vis

d’un groupe d’apprentissage, il augmente l’efficacité de la production du groupe: les

participants désirent agir demanière conforme à cette attente. C’est une sorte d’effet

Pygmalion272.C’estuneprédictionpositivesurunapprenantdelapartd’unenseignant

quianticipesurlespossibilités intellectuellesdecetapprenantafindel’ameneràévo-

luerfavorablementdanssond’apprentissage273.Plusl’animateurattenduneplusgrande

efficacité des participants d’un groupe d’apprentissage dans leurs interactions, plus il

seraitpossibled’obtenirdesinformationsutilespourlegroupe.

Le dispositif pédagogique « jeu de rôle » simule-t-il le contexte d’une situation de travail ? Unjeuderôlecorrespondàunetranspositiond’unesituationréelleauthentiquesuscep-

tibled’être rencontréepar leprofessionnel concerné.C’estune représentation subjec-

tiveetsimplifiéed’uneréalitésusceptiblederévéleretrésoudredesproblèmes.Cedis-

272Pygmalion, roi de Chypre, sculpta une statue dont il tomba amoureux ; la déesse de l'amour la transforma enfemme.Selonl'interprétationtraditionnelle,c'estleregarddel'amourquiafaitd'unestatueunefemmedésirable.273ROSENTHALRobert,JACOBSONLenore(1968).PygmalionintheClassroom.Holt,Rinehart&Winston,.

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positifpédagogiqueestnotammentadaptéà l’acquisitiond’attitudes,d’aptitudesetde

savoir agir. À condition que la situation simulée soit pertinente et cohérente avec

l’apprentissage prévu: dans notre cas, il s’agissait de traiter les problèmes psycholo-

giquesliésàunesurchargepondérale.

Le scénario tel qu’il a été conçu responsabilisaitnon seulement lesdeuxacteursdans

leursinteractionsetprisesdedécision,maisaussilesautresparticipantsdugroupequi

coopéraientactivementausuccèsdecetteséquenced’apprentissage.L’exercicepédago-

giqueproposéétaitbasésurunesituationauthentiquetransposéedansununiverspé-

dagogiqueafindefaireressortirtouslestenantsdecettehistoirequipourraitparaître

simpleaupremierabord;maisquisous-tendaittoutcequel’onpeutretrouverdansla

vieréelle.Lesdeuxacteursdisposantd’unetable faisantofficedebureau,nousavions

demandé aumédecin de faire exactement ce qu’il aurait fait dans son propre cabinet

médical.Commeiln’étaitpaspossibled’effectuerunexamencliniquecorrectement,cer-

tainesdonnéescliniquesétaientàladispositiondel’acteurmédecin;cedernierpouvait

réclamer à l’animateur d’autres précisions utiles au déroulement de l’action pédago-

gique.Le jeuderôleamendé telqu’ilaétéconçu favorisait l’initiativedechacunpour

s’exprimer. Il était basé sur un travail d’équipe, permettant à chaque participant

d’actualiser des concepts et des connaissances ou bien découvrir et intégrer de nou-

veauxsavoirs.

Le dispositif pédagogique « jeu de rôle » est-il basé sur la résolution d’une tâche complexe ? Une tâche pédagogique complexe correspond à une situation problématique réaliste

ancréedans lequotidien,proposéeàdesapprenants faisantappelàdescombinaisons

decapacités intellectuellesmultiplesetdiverses.Latâchecomplexeestunmodèlepé-

dagogiqueholistiquequinepeutêtredécoupéenunesommedetâchesplussimplesà

accomplir les unes après les autres. Cemode d’enseignement nécessite, pour chaque

apprenant,uneacquisitiondedifférentssavoirs,puisquecesdernierssontnécessaires

pourrésoudrelatâchecomplexe.Elleneremplacepaslestâchessimples,automatisées,

leplussouventprocédurales,quisontgénéralementenseignéesdanslesdeuxpremiers

cyclesdesétudesmédicales.Parcontre, lorsquel’apprenantdisposed’unbagagesuffi-

sant,ellesonttoutesleurplacenotammenten3ecycledeformationinitialeouenforma-

tion continue.Dans le cadre duDESdemédecine générale, nous demandons aux étu-

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diantsdenarrersousformedetracesécritesdessituationscomplexes(quinedoitpas

êtrepassynonymedetâchecompliquée)selonleplanderédaction:pourquelle(s)rai-

son(s) j’ai choisi cette situation, puis exposé de l’observation (motif, plaintes, examen

cliniquedupatient,développementchronologiquedesonhistoirecliniqueactuelle,état

desantécédentsetconnaissancede l’environnementsocio familialetprofessionneldu

patient).Cettephaseestponctuéeparunrésuméincluantlespointslesplusimportants

relevésparl’Interne,etlesproblèmesàrésoudre.C’estlaphaseexpérientielle.Dansune

secondephasediteréflexive,latraceécritedoitd’abordrapportercequiaétéproposé

etréaliséchezlepatient(réflexiondansl’action:commentj’airésoluleproblème,ai-je

eubesoind’aide,àquiai-jedûfaireappel?etc.Dansunautretempscorrespondantàla

réflexionsur l’action, l’étudiantdoitsignalersespointsfortset faibles,sesmanqueset

sesréussites.Larédactiondeces tracesécritesàproposde tâchescomplexesauthen-

tiques (qui sont réelles)estunmoyend’évaluer leniveaudemaitrisede l’Internepar

rapport à un niveau attendu d’exigence professionnelle. Selon les niveaux de compé-

tencedeGeorgeMiller,ils’agitdel’atteinteduniveau2(savoircommentfaire),duni-

veau3(montrercommentfaire)etduniveau4(faire).Autotal,unetâchepédagogique

complexefaitappelàdemultiplescompétencesdisciplinairesettransversales.Ensolli-

citantdiversescapacitésintellectuelles,ellerenforcelesensdecequiestappris.Lejeu

de rôle proposé dans notre travail de recherche correspond à une véritable situation

complexe authentique. Cette dernière fait appel à différentes compétences, de l’ordre

des connaissances, des habilités, des attitudes et du savoir agir. Différentes étapes de

résolutiondoiventêtrefranchies:connaîtrelaraisonetlesmotivationsdelademande

de la patiente, rechercher d’éventuels motifs cachés (image de son corps, relationnel

aveclesautres…),réaliseruneanamnèsecorrectepourconnaitresesantécédentsper-

sonnelsetfamiliaux,lecontexte.Celanécessiteuneplanificationdiscrète,maisformelle

delatâcheàréaliser,afindenepasoublierdesindicesoudesconstatsutilesàlarésolu-

tionsatisfaisantedelatâchepourlesdeuxparties,lapatienteetlemédecin.

Le dispositif pédagogique « jeu de rôle » favorise-t-il la pratique, la rétroaction, l’amélioration des compétences ? Ledispositif pédagogiqueproposé fait appel à l’apprentissagepar la pratique, c’est-à-

dire un apprentissage par l’action (learning by doing, cf. 1.9.2.). Dans ce type

d’apprentissagedébutantparune situation clinique typique, l’apprenantest le témoin

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d’unerelationàdoublesens.Illuiestdemandéd’êtreavanttoutparticipatifetactifavec

lesautresapprenants;ildoitégalementassumerlesconséquencesdesespropresdéci-

sions et actions selon ses convictions et ses priorités pour acquérir ou améliorer ses

compétences, en fonction des objectifs de la séquence d’apprentissage. Cette dernière

avait pour but de favoriser non seulement la construction de différents savoirs,mais

aussidepermettreàchaqueapprenantderecevoirdesacquisetdesvaleursd’uneexpé-

rienceconcrète.Touslesapprenantsontétéalorsimpliquéspourréaliseruneactivité.

Cettephased’apprentissagenepeutêtreréussiesiuneétapeessentiellen’avaitpasété

prescriteauxapprenants:réaliserunecritiquedecequechaqueapprenantaproposé

puisanalysersapropreparticipationauxactivitésdugroupe.Ceprocessusréflexifest

nécessairepourmodifiersescomportements,améliorersessavoirs.

Ledispositifpédagogiquequenousavonschoisimobiliselesfacteursrelationnels,sen-

siblesetaffectifs.Eneffet,laséquenceportesurleslienspossiblesentrelesproblèmes

psychologiquesetlesurpoids(causesouconséquences!).Nousavonsdemandéauxpar-

ticipants,pendantquelesacteursétaientsortis,deréfléchiraudéroulementd’unetelle

consultation: c’estuneséquenceessentiellementpratique.Lesparticipantsontécouté

attentivement les2acteurspendant le jeuderôle,puisontdébattusur lesdifférences

perçuesentrecequ’ilsontproposéeux-mêmesetcequiaétéditparlesdeuxacteurs.

Enfin,ilsonteffectuédescorrectionsdansleclassementeffectuéaudébutdudispositif

pédagogique. Ces différentes phases d’attention, d’anticipations, de réflexions,

d’interactions et de corrections sont des actions qui ne peuvent que concourir à

l’améliorationdelapratiquedesparticipants.

Lastimulationde lapenséeréflexiveestefficacesur l’acquisitiondecompétences(Le-

win,Kolb,Gibbsetc.).Connaîtrelesdifférentesétapesdelarésolutionduproblème,no-

tammentgrâceunerétroactionsurlesprocessusmentauxutiliséspouréluciderlepro-

blème,estplus importantque laréponse finale.Cetterétroaction,selonJacquesRodet

(2000,p.49),apourbutnonseulementdeciblerlespointsàamélioreretrépertorierles

stratégiesintellectuellesutilisées,maisaussiderecadrersibesoinledéroulementdela

formation.Larétroactionpeutfaireressortirdesmanquesoudesdifficultés,parfoisen

relationavecdesvaleurspropresàchaqueapprenant.Pourcetteraison,larétroaction

ne doit surtout pas être considérée comme un acte de jugement. Il s’agit avant tout

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d’établir une liste de différentes observations sur le processus de résolution du pro-

blèmeafind’établirune sortede remèdedestiné à améliorer les compétencesprofes-

sionnellesdel’apprenant.Larétroactionn’estaucuncasunemesuredelaperformance

desapprenants: cen’estpasunecorrection.La formationnesedéroulepasdansune

démarcheacadémique,maisselonuneapprocheconstructiviste.

Enthéorie,sinousavionsdûréellementévaluerlesapprenants,nousnousserionsseu-

lementintéressésauprocessusdeconstructiondessavoirs.Certes,évaluerlesconnais-

sancesacquisespeutêtreintéressant.Maisnouspensonsquecetyped’évaluationdoit

êtrespontanémenteffectuépar toutapprenant,sous la formed’uneévaluation forma-

tivepersonnelle,ens’appropriantnotammentdesdonnéesémisesparlesautresparti-

cipants.Eneffet,lepolymorphismeintellectueldesindividus,observédanslaformation

initialeetcontinuedesapprenants,estinadaptéàunenormeuniquedesavoirs.Cetype

d’évaluationdesprocessusde constructiondes savoirsn’apas cependantétéproposé

parlesresponsablesdelaformation.Ilauraitpossibleégalementd’effectueruneévalua-

tiondetypecollectivedansuneapprochedynamiquequitientcomptedespotentielset

descomplémentaritésdesapprenants.

Laplupartdesévaluationsréaliséesdanslesdifférentesformationssontdel’ordresta-

tique,c’est-à-direfocalisésurlaqualitéetlaquantitédessavoirsissuesdelaformationà

untempsdonné.Lebutdelaformationproposéeétaitd’amenerlesapprenantsàacqué-

rird’unemanièrecollectivedessavoirsdynamiques,susceptiblesd’évoluerenfonction

dessituationscliniquesrencontréesdansun futurproche.Quecesoitparrétroaction,

réflexion,évaluationdeproduitsdérivés (performancedumédecincomme lapriseen

chargeefficace,maisdemoindrescoûtsouplusrapide,etc.),cetteévaluationn’apaseu

lieu.Cetteséquencepédagogiqueétaitunique.Unesecondesessionauraitétébienvenue

pourmeneràbienunetelleévaluation.

Conclusion Cette formation sur l’obésité infantile qui a eu lieu dans le cadre d’une démarche

d’apprentissagedetypecoopératifaétéproposéeàdesmédecinsexerçantdepuisplus

de15ansenmilieuambulatoire.Ellea favorisé les interactionsentreparticipantsqui

onteulieusousformed’échanges:écritsouverbauxnotéssurfeuillesbristolsoupost’

Itcommedansledispositifpédagogiquedumétaplan®,ouexprimésdemanièreorale

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etnotéssuruntableaulorsd’untourdetableoud’unbrainstorming,ouencorerelevés

parécritpardesobservateursdésignéslorsd’unjeuderôle.

Nousavonscomparélesrelevésdecequiaétéprononcéparlesacteursdejeuderôle

avectouteslesinformationsrecueilliesparlesparticipants.Lerésultatestsurprenant:

nonseulementlesobservateursn’ontpuremplircorrectement,parmanquededonnées

fourniespar lesacteurs, lesgrillescomportant les19 indicateursprévus;maisencore

les participants non-acteurs ont fourni un grandnombre de données suffisantes pour

élaborer 17 indicateurs supplémentaires. Notre hypothèse était basée sur une plus

grande présence d’informations à l’issue d’une séquence d’apprentissage coopératif.

Aveclatechniquepédagogiquedujeuderôlemodifié,nousavonsmontréquelesenga-

gements interactifsdansunedémarcheconstructiveet réflexiveont favoriséuneaug-

mentationd’informationsdisponiblespourlesparticipants.

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3.4.Conclusiondela3epartie La première démarche pédagogique a montré qu’en l’absence de débat interactif, il

existeunpossiblesentimentdefrustrationdesapprenants,sentimentquipeutgênerla

réflexion et la résolution du problème proposé. L’absence d’une rétroaction entre les

différentsparticipants et l’animateur apris audépourvu les Internesqui ont travaillé

surcettesituationclinique.Larétroactionefficacepermetàchaqueparticipantdecon-

naitre la production des autres puis de comparer ses propres propositions. Cette ré-

troaction porte également sur des émotions qui peuvent entraîner des réactions per-

sonnellespouvantdémotiverlesparticipants.Lorsqu’unéchangeinteractifestpossible,

nousobtenonsunelistehiérarchiséed’hypothèsesdiagnostiquesplusprochedelaliste

hiérarchiséerecommandéeparl’organisateur.

Dans ladeuxièmedémarchepédagogique, leséchangesquionteu lieuentre les12 in-

ternesàpartird’uneexpérienceontfavorisélaréflexionsurunsujettrèssensiblesou-

ventmalcirconscritpar lesprofessionnelsdesanté.Chaqueparticipantapurebondir

surcequiétaitprononcéparlesautresgrâceàlarétroaction.Cettedernièrepeutaffec-

ter chaque participant en agissant sur son comportement et ses réflexions d’unema-

nièrepositive(diteconstructive)ounégative(n’apportantrienaudébat).Larétroaction

lorsdecetteexerciceaéténettementpositive,efficace,etapermisainsidelimiterdes

débordementsnotamment sur leplanémotif entre lesdifférentsacteursde l’exercice.

Cesdifférentesinteractionsontaboutitàlaproductiond’uncourrierquiasemblépour

touslesparticipantsbienadaptéàlasituationvécueparl’Interne.

Latroisièmedémarchepédagogiquearéunitlesparticipantssurunexercicebienparti-

culier,lejeuderôle.Maispasn’importequeljeuderôle:nousavonsajoutédesphases

supplémentairesafindefaireparticiperd’unemanièreactivetouslesapprenants.Lebut

étaitnon seulementd’augmenter leur intérêt à la résolutionde cette situationpar les

deuxacteursdésignés;maisausside favoriseruneplusgrandeproductiondechacun.

Les interactionsplusnombreuseontpermis laproductiond’uneplus grandequantité

d’informationsmisesà ladispositiondesapprenants.Cependant,quellequesoit ladé-

marche,lesparticipantsdoiventfairel’effortdemémoriserlesdonnéesquileurseront

utilesdansleurexerciceprofessionnel.Quecesoitladémarchepédagogiqueproposéeà

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des apprenants, une expérience non suivie d’une analyse réflexive n’est que ruine de

l’apprentissage274.

SelonRogerMucchielli(1991,p.56),«onretient10%decequ'onlit,20%decequ'on

entend,30%decequ'onvoit,50%decequ'onvoitetentend,80%decequ'onditet

90%decequ'onfait».Cespourcentagescorrespondentauxsavoirsformels(20%),non

formels (10%) et informels (70%) d’Alan Tough (2002): l’essentiel de nos connais-

sances provient donc de l’apprentissage informel. Nous pouvons aussi confronter ces

chiffres avec ceux proposés parMorganMc Call,Michael Lombardo et Robert Eichin-

ger275:70%decequ’onsaitontpouroriginenotreexpérienceet20%denossavoirs

proviennentseloncesauteurs,del’entourageprofessionnel(modèle70:20:10).10%

sont acquis par des enseignements ou des formations en institution. Cette formation

formelleesttoujoursopérantedansl’acquisitiondessavoirs.Ellecorrespondàunepe-

titepartied’unsystèmed’acquisitiondeconnaissances;elleestinsuffisantepouracqué-

rir les compétencesnécessairespourunexerciceprofessionnel serein et efficient. Les

trois modèles décrits ci-dessus confortent notre hypothèse: nous devons favoriser

l’apprentissageinteractifafind’acquérirdescompétencessignificativesenrapportavec

lemétierexercépourêtreefficacesur leplanprofessionnel.Cetteargumentationsera

développéedansnotrediscussion.

274Opinion personnelle un peu (beaucoup) inspirée de Rabelais(1964) : Pantagruel (1542), Rabelais, chap. VIII, «CommentPantagruel,estantàParis,receultletresdesonpèreGargantua,etlacopied'icelles».Paris,éd.Gallimard,p.137.275Lemodèle70:20:10aétédéveloppédanslesannées1960parMorganMcCall,RobertEichingeretMichaelLom-bardoauCentredeLeadershipCréatifauxUSA.

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4èmepartie:Discussion

«Leschosesnesemblentpastoujourscequ’ellessemblentêtre;laplupartdeshommesju-gentmalsurlafoidesapparences;etbienpeud’espritssaventdécouvrircequ’onacaché,nonsansintention,àdesprofondeursplusreculées».

Phèdre.Fables,livreII:labeletteetlesrats

Lorsque j’ai entrepris ce travailde recherche, jem’étais interrogé sur les implications

possibles des expériences professionnelles, de la vie quotidienne, des échanges entre

pairs,enfin,toutcequipeutcorrespondreàdesressourcespédagogiquesdites«infor-

melles»dans l’acquisitionet l’améliorationdescompétencesprofessionnellesdesétu-

diants en médecine et des médecins. A la suite de cette interrogation, j’ai posé

l’hypothèse suivante : pour devenir un professionnel de santé capable de prendre en

chargecorrectementdespatients,lesapprentissagesformelssontnécessaires,maisnon

suffisants.Lesapprentissagesensituationnonformelleetinformelle,bienquenonfor-

maliséspardesobjectifsetdescontenusdeformation,ontégalementtouteleurimpor-

tancedansceprocessusdeprofessionnalisation.Pouréprouvercettehypothèse,j’avais

proposéàdesétudiantsetdesmédecinsinstallésenmilieuambulatoirecestroisdispo-

sitifs pédagogiques fréquemment utilisés au cours du 3e cycle de la formation initiale

des médecins et en formation médicale continue. De tels dispositifs basés sur

l’expérience, la réflexion et la coopération entre les participants sont susceptibles en

effetdecontribueràl’améliorationdelacompétencedesprofessionnelsdesanté.

Pourquoi s’intéresser aux formes d’apprentissages informels et non formels dans le

cycledeprofessionnalisationd’unmédecin?Cen’estpasdanslebutdevaliderdessa-

voirsnonformelsetinformelsdanslecadredelareconnaissancedesacquis.Le3ecycle

demédecinegénéraleestuncycledestinéàrendreopérationneldansleurexercicede

professionneldesantédesétudiants.Cesderniersnesontplusévaluéssurdescontenus

formaliséspourvalider leursannéesd’étudeetpasseràunniveausupérieur.C’estun

cyclede3ansoùchaqueétudianta lapossibilitéd’acquérirdessavoirsetdescompé-

tenceseneffectuantdesstagespratiquesetensuivantdesenseignementsetdessémi-

nairesdeformationoùlapartdetravailpersonnelestimportante.

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Nousavonspris leparti d’associer les troisdispositifspédagogiques éprouvés avec la

recherchedes apprentissages formels, non formels et informels.Même sidans lapra-

tiquequotidienne,cestroisprocessussontmétissés,lesdistinguerlesunsdesautresest

incontestablementunetâchedifficile.Touteactivitéd’apprentissageestsous-tenduepar

unentrecroisementcontinuvariableselon ladiversitédessituationséducatives,entre

troiscatégorisationsd’apprentissage:formel,nonformeletinformelquipeuventservir

de repères pour les responsables éducatifs. Ces trois catégories d’apprentissages sont

habituellementdéfiniesselonlecontextedanslesquelsilssurviennent276.

DanielSchugurensky(2007,p.13)aproposéunedéfinitionmultipledel’apprentissage

informel selon quatre axes d’éclaircissement : conceptuel, méthodologique, de recon-

naissance,etpédagogique.L’axeconceptuels’intéresseauxmanifestationsperceptibles

descaractéristiquesinternesdecetapprentissage.L’axeméthodologiquenousintéresse

particulièrement : comment particulariser les apprentissages informels? Quels sont

leurs rapports avec la connaissance tacite?Nousdévelopperons cet axede recherche

dansnotrediscussion.L’axedereconnaissanceestcentrésurl’évaluationdecesappren-

tissages informels.Enfin, c’estàpartird’une réflexionsur l’axepédagogiquequenous

avonscréédessituationscliniquespertinentespourtenterdemettreenvaleurcesap-

prentissagesinformels.

Lecontextedessituationscliniquesprétextesauxformations, leslieuxoùsedéroulent

lesformations,lesniveauxdecompétenceetdeconnaissancesdesparticipants,lesqua-

litéset lesactivitéspédagogiquesdesexperts, lesconsignesdesanimateurssur ledé-

roulement des formations, les interactions entre les différents participants, l’activité

réflexivedugroupesontautantdefaitsetd’actionssusceptiblesdegénérerdesphases

d’apprentissages informels et non formels. Les situations cliniques rencontrées dans

chacundes trois dispositifs d’apprentissage expérimentés sont perçuespar les appre-

nantsenfonctiondeleursconnaissancesetleurscompétences.Chaqueparticipantpeut

avoirdesbesoinsdifférentspouradaptersespropresraisonnementslorsdelarésolu-

tiondecessituationscliniques.

276Cf.§2.6.

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Nousavonscependant relevéplusieursobstacles.Comment identifier cequi relèvede

l’informellorsquelesséquencesd’apprentissagesproposéesauxapprenantssontréali-

sées dans un cadre institutionnel? Comment est-il possible d’évoquer des apprentis-

sagesinformelsalorsquedeuxdestroisdispositifsprésentésdanslatroisièmepartiede

cetravail(cascliniqueàdéveloppementprogressifetjeuderôle)ontétéconstruitsavec

desobjectifsetdescontenusbiendéfinis?Mêmebienformalisé,ledéroulementdeces

apprentissagespeutêtrel’occasiondefaitsoud’actesnonprévusparl’organisateurde

laformationouengendrésspontanémentparlesparticipants:cesincidentspeuvent-ils

induiredesséquencesd’apprentissagesinformelsetnonformels?Quelle(s)représenta-

tion(s)ontlesparticipantsdelasituationàtraiter?

Lesparticipantspeuventfaireainsiappelàdesconnaissancesetdesstratégiesmétaco-

gnitivesqu’ilsontacquisesimplicitementlorsdediversesexpériencesvécueseninstitu-

tionouendehorslorsdeséquencesd’apprentissagenonformeletinformel.Enfonction

ducontexte,cesconnaissancesetcesstratégiessouventimplicitementmémoriséesse-

ront utilisées lors d’une étape essentielle de l’apprentissage actuel: la réflexion effec-

tuéepar le groupedeparticipants, dans l’action comme sur l’action. Les capacités ré-

flexivesetlescomportementsréflexifspropresàchaqueparticipantsontprobablement

davantageliésauxdifférentesexpériencesvécues,initiéesoubienguidéesdanslaviede

tous les jours, endehorsd’un contexte institutionnel (Barrette, 2011, p. 246). Chacun

d’entrenouspeutrencontrerquotidiennementdessituationsd’apprentissagepeusigni-

fiantes,danslecontextedelavieréelle,etenretirerdessavoirsquipeuventêtredécon-

textualisésourecontextualiséssurlemoment.Cessavoirssontcependantsusceptibles

plus tardd’apporterun soutien sérieux àunedémarche réflexive lorsd’unapprentis-

sageinstitutionnel.

Danstoutgroupedeformation, ilyaconfrontationdespropresidéesetdescadresde

référenced’unindividuaveclesidéesetlescadresderéférencesdesautresparticipants

àcegroupe.Laréflexionàproposdel’expériencequ’ilvientdevivreetlaconfrontation

aveclesautresmembresdugroupeestunfacteurfavorisantlechangement.L’individu

entrevoitainsidesnouvellesperspectivesdontilauraitpuignorerl’existenceetappor-

terdesnouvellesdonnéespour résoudre sonconflit cognitif.Toutapprentissagen’est

cependant pas transformateur! Un enseignement magistral apportant des connais-

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sances inéditesounouvellesà cellesdéjàmémoriséespeutêtreparfois suffisantpour

modifier des perspectives d’action. Lorsque l’enseignement estmagistral, deuxmodes

peuventêtredistinguées:lepremierestdestinéàapporterdenombreusesinformations

destinéesàêtreintégréesparl’apprenantpourconstruireunsavoirjugénécessairepar

les autorités éducatives ; c’estunvéritable coursoù celuiqui saitdonnedenouvelles

connaissancesàceluiquinesaitpas.Lesecondmodecorrespondàunecommunication

orale brève dont la finalité est de rappeler des notions en corrélation avec l’activité

d’apprentissageeffectué:ils’agitdereformulerlesdifférentssavoirsacquisaucoursde

l’apprentissage.

Laplupartdesenseignementsréalisésenformationinitialedansle3ecycledemédecine

généraleouenséminairesdedéveloppementpersonnelcontinu(DPC)fontappelàcette

alternanced’ateliersderéflexionetdecourtesséquencesdedélivranced’informations

adaptéesàlaformation.Lestroisdispositifspédagogiquesdécritsdanslatroisièmepar-

tiedecettethèseontétéélaborésselonunelogiquepédagogiquedecoopérationetde

réflexiondansuncadred’apprentissagecognitifparticulier: le socioconstructivismeen

contexte(ousitué277).Cesdispositifsfontappel,parl’utilisationd’unétayagesimple278,à

desactivitéscognitivesquidonnentunsensàl’apprentissage. Ilsontétéproposésdansunbutbiendéfini:décloisonnerlessavoirsuniversitairesacquisrégulièrementparles

participantsensebasantsurleursexpériencesvécues,aussibiendansleurcadredevie

professionnelle que dans la vie sociétale de tous les jours; ceci en vue de repérer à

l’issuedesformationscequicorrespondauxsavoirsthéoriquesouacadémiques,auxsa-

voirs pratiquesouprocéduraux et aux savoirs d’action279. En effet, ces derniers corres-

pondentàunetransformationdesavoirsthéoriquesetpratiquespouropérerefficace-

mentdansunecirconstancedonnée.

277Apprentissagesituéetapprentissageencontextedoiventêtrecependant,etc’estnotreavis,différenciéssurleplandeladéfinition.(cf.infra).278Termedésignantuneorganisationpédagogiqueinteractiveadaptée,proposéeàunecommunautéd’apprentissagepouraiderlesapprenantsàréussirdesapprentissagesdesavoirsetdeconcepts.Cettedéfinitiondérivedecellefor-muléeparJeromeBRUNERetinspiréeparleszonesdedéveloppementdeVYGOTSKI:systèmedesupport,fourniparl’adulte à travers le discours ou la communication afin de restreindre la complexité de la tâche, et permettant àl’enfantderésoudredesproblèmesqu’ilnepeutaccomplirseul.279SelonPerrenoud(1994),ilestpossible«d’imaginerqu’unindividuintelligentsacheautantdebiologie,d’anatomie,dephysiologieetdepathologiequ’unmédecinsansêtrepourautantcapabledeposerundiagnosticouuneindicationthérapeutiqueunpeusophistiquée.Mêmeens’appropriant lessavoirsprocédurauxdisponibles, ilneseraitpasca-pabledetraiterdespatientsaussiviteetsûrementqu’unpraticienrompuàlaclinique.Précisémentparcequecettecliniqueadéveloppédesschèmesdepensée,dedécisionetd’actionpermettantd’orchestrerentempsréell’ensembledesinformations(surl’étatdupatient,lesmoyensdisponibles,leséchéances),dessavoirsthéoriquesetdessavoirsprocédurauxpertinents».(PerrenoudPh.:L’ambiguïtédessavoirsetdurapportausavoirdanslemétierd’enseignant)

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Ladiscussionporteranotammentsurlesactivitésmentalesdestinéesàaiderlesappre-

nants non seulement à construire des savoirs d’actions280et à améliorer leur exercice

professionnel281;maisaussiàélaborerdesactivitésdepenséesoudeconceptualisation

dans le but de favoriser la transformation des représentations des apprenants et

d’introduire de nouvelles significations dans les schèmes déjàmémorisés. Nous nous

sommesainsi inspirésde JacquelineBecker (2004,p.67)pourélaborerune typologie

desactivitésdanslebutdedistinguercequirelèveduformeletdecequiestsusceptible

dedériverdesapprentissagesinformels.

Nousdistinguonsainsi:

• des activités opératives destinées à aider les apprenants à construire des sa-

voirsd’actions et à améliorer leur exerciceprofessionnel; ce sontdes connais-

sancesmobilisées dans l’actionqui permettent de faire face particulièrement à

l’inédit et à l’aléa souvent présent dans situations problématiques. Ces savoirs

opératifs s’enrichissent au fur et à mesure de la résolution de différents pro-

blèmesrencontrésafindediminuerledegréd’incertitudeprésentlorsdelacon-

frontation avec de nouvelles situations. Jean-Marie Barbier (2009, p. 122) in-

siste:«L’activitéd’unsujethumainestàlafoisetdansunmêmetempsproces-

susdetransformationdumondeetprocessusdetransformationdesoitransfor-

mantlemonde».

• des activités de pensées ou de conceptualisation dans le but de favoriser la

transformationdesreprésentationsdesapprenantsetd’introduiredenouvelles

significationsdanslesschèmesdéjàmémorisés;WilfredBion(1979,p.75)adé-

finil’activitédepenséecommeuneactivitémentale«quelesexigencesdelaréa-

litéimposentàunappareilquin’estpasadaptéàcettefin282».Cespenséescor-

respondent à des préconceptions, des conceptions et des concepts qui vont se

créergrâceaudéveloppementprogressifd’undispositif intellectuel; cedernier

s’enrichit au furet àmesurede cespenséesainsi crééesafindedévelopperde

280Ce sont des savoirs mobilisés dans une action, correspondant à des compétences, des métaconnaissances, desastucesdemétierquisontutilesàl’exerciceprofessionnel.281«lessavoirsd’actionsontdessavoirs(déclaratifsouprocéduraux)misauserviced’une"logiqued’action".MonicaGatherThurler(1998).Savoirsd’action,savoirsd’innovationdeschefsd’établissementDansPELLETIERG. (coord.)Formerdesdirigeantsdel’éducation.Apprentissagedansl’action.DeBoeck,pp.101-131.282BIONWilfredR.(1979).Auxsourcesdel’expérience

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nouvellespensées.C’estleprincipederécursivitéquiprendenconsidérationles

causesetleseffetsproduitsparcesactivités.Ainsiunprofessionneldesantépeut

seretrouverdevantunesituationcliniqueprésentéeparunpatientqu’ilnepeut

résoudre,niparraisonnementhypothético-déductifniparanalogie.Ilperçoitun

sentiment de frustration qu’il cherche à dépasser en proposant par exemple

d’autres axesde réflexions (recherched’autres éléments dans l’entretien, pres-

cription d’examens complémentaires, etc.) pour répondre de manière satisfai-

santeàlademandedupatient.Cetteactivitédepenséeestmémoriséesousforme

deschèmeetpourraêtreutiliséedansuneautresituationcliniquedifficile.

• des activités de communication entre les différents apprenants et les ensei-

gnants en vue d’influencer autrui et de permettre d’élaborer aux apprenants

leurspropresimagesidentitaires.Particularitéfréquentedesleadersdugroupe,

ces activités de communication doivent être crédibles pour susciter un intérêt

certainpourlesautresmembresdugroupe.Cesdernierspartagentl’avisdeces

leadersetaccordentainsiducréditàleursopinions

Cestroisactivitésmentalesdépendentdelacontributiondedeuxcatégoriesdeschèmes

opératoires(Alamargot,2001,p.12):

«desschèmesconcrets,quiontnotammentpourobjectifdeclasser,desérier,dedénombrer,demesurer,decomparerdes faits,desobjets,etdesschèmesopératoires formels,dont lamiseenœuvrepluscomplexe,apourbutdedéduire,d’induireetdeprocéderàdesraisonnementshypo-thético-déductifs».

Iln’estpaspossibled’évaluerunapprentissagesansanalyserl’activitédesparticipantsà

cet apprentissage. «Si onprend au sérieuxuneperspective de développement, il faut

reconnaîtreune continuitéprofondeentreagir et apprendredeetdans sonactivité».

Pastré,Mayen,Vergnaud(2006,pp.145-146.).Cesschèmes,qu’ilssoientconcretsou

opératoires,sontconstruitslorsdeséquencesapprentissagequipeuventseproduireà

deuxniveaux.Lepremierniveaud’apprentissageestcontextuel:c’estceluides interac-

tionsdel’apprenantavecsonmilieudevie(énaction).Lesecondniveaud’apprentissage

est intentionnel, conscient pour développer oumodifier des connaissances et/ou des

schèmesmentaux.Ladistinctionentrecesdifférentstypesd’apprentissagesnedoitpas

être«interprétéeentanttypologiedesprocessusd’apprentissage,mais[doitêtre]rap-

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portéeaux structureset auxcadresdes contextesd’apprentissagequi leur correspon-

dent»(Alheit&Dausien,2005p.68).

Danscettediscussion,nousproposons:

1-derepérercequipeutreleverdesapprentissagesformels,nonformelsetin-

formels dans le cadre d’un cycle de professionnalisation ou d’un apprentissage

toutaulongd’unevie;

2-dansuneviséed’efficacitédeformation,d’explorerlerôledesapprentissages

informelsdanscettedynamiqueàtroispôles.

J’ai ainsi sélectionné pour la discussion trois courants théoriques d’apprentissage qui

ontétédécritsdansladeuxièmepartiedecettethèse.Pourréalisercettesélection,jeme

suisinspiréd’untravaildeJohanneBarretteàproposdel’apprentissageinformel(2011,

p231).Lestroisperspectivesd’apprentissagesuivantesnousservirontdefilconducteur

pournotrediscussion:

• laperspectived’apprentissageselonlecourantthéoriqueducognitivisme283;

• la perspective d’apprentissage selon le courant théorique de la connaissance

taciteetdel’explicitation;

• laperspectived’apprentissageselonlecourantthéoriquedelacognitionsituée

etlacoopération.

Nousenvisageronssuccessivementdeconfronterlesdispositifsd’apprentissageéprou-

vésaveclestroiscatégoriesdeprocessusd’apprentissagesquionttoutesétéprésentées

dansladeuxièmepartiedenotrethèse.

4.1. Les processus d’apprentissage selon la perspective des sciences cogni-tives

Nousavonsexposé,dans lapremièrepartiede lathèse, l’approchecognitivisteavec la

descriptionquatrecourantsderéflexionpédagogique:leconstructivisme(cf.§1.6.2.),le

socioconstructivisme (cf. § 1.6.3.), la théorie de l’activité (cf. § 1.6.4.), et la théorie 283JohanneBarretteavaitproposéletermedeconstructivisme,jel’airemplacéparceluidecognitivismepuisquej’aiincluségalementlathéoriedel’activitéetl’énaction.

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289

énaction(cf.§1.6.5.).Nousallonsnousréférerpourladiscussionàcesquatrecourants

pouranalyserlestroisdispositifspédagogiqueséprouvés.

4.1.1.1erdispositifétudié:cascliniqueàdéveloppementprogressif

Conditionsinitiales(rappel)

Cepremierdispositifd’apprentissagea intéresséunpublicd’Internesenmédecineen

débutdetroisièmecycledemédecinegénérale,quelquesmoisaprèsunexamenclassant

sévèrequileuranécessitéentredeuxettroisannéesdepréparation(lechoixdelaspé-

cialitéetdelavilleuniversitaireoùlesétudiantsvontseperfectionnerdanslaspécialité

choisieouimposée,dépenddelaplaceobtenueàceclassement).

Surleplanquantitatif,lesinternesdisposentd’unpotentieldeconnaissancesthéoriques

considérable, souvent trop élevémême pour une seule spécialité comme lamédecine

générale.Carcettequantitédeconnaissancesthéoriquepeutêtremêmeinopéranteen

pouvantinduirel’Internedansdesfaussespisteslorsqu’ildevraraisonnersurdessitua-

tionscliniquescomplexes.

Nousrappelonslesgrandeslignesdecedispositif.Uncascliniqueàdéveloppementpro-

gressif sur une douleur thoracique (c’est potentiellement une urgence) est décliné en

deuxétapes(cf.§3.1.2.).

• Dansunpremiertemps,nousavonsdemandéauxInternesderéfléchirpuisétablir

individuellementunelisted’hypothèsesdiagnostiques,delaplusprobableàlamoins

probable.

• Dansunsecondtemps,lesparticipantspartagésendeuxsous-groupesontœuvréde

façondifférente:

o Avecunpremiersous-groupe(dénommésous-grouperéflexion)pourproduire

collectivementunelistehiérarchiséed’hypothèsesdiagnostiques;

o Danslesecondsous-groupe(dénommésous-groupeaddition),chaquepartici-

pant devait pondérer d’un poids différent les 5 premiers diagnostics qu’il

Page 291: Apprentissage coopératif et formation des médecins : … participants to marshal their own experiences, to reflect thoughtfully and to coope-rate with each other, can improve the

290

avait classésduplusprobable aumoinsprobabledans lepremier tempsde

l’exercice.Lebutaétéd’établirune listehiérarchiséed’hypothèsesdiagnos-

tiquessansdiscussionniréflexioncollectivepréalable.

Recherchedel’informeletdunonformel

Ledéroulédecetexerciceeststrictementformalisé:ilexisteuniquementdeuxespaces

dediscussionetréflexiondanslesecondtempsdelaformation:unpremierespaceuni-

quementpour les Internesdupremier sous-groupeditderéflexion etunespace com-

munàl’ensembledesparticipantsenfind’exercice.

Analyseselonlaperspectivedel’apprentissageconstructiviste

Il est caractérisé par deux mécanismes complémentaires: l’assimilation et

l’accommodation.Larésolutiondececascliniqueàdéveloppementprogressifestbasée

uniquementsurunprocessusderaisonnement.Pendanttouteladuréedel’exercice, il

n’estpas fait appel àdesprocessusmentauxpour incorporerou transformerdes élé-

mentsprésentsdesonenvironnement.Lemécanismed’assimilationestquasimentoc-

cultéetlapartpossibled’apprentissagenonformelestpratiquementexcluequecesoit

danslepremiercommedanslesecondtempsdel’exercice.Leprocessusdeconstruction

par accommodation a été remarqué notamment chez un étudiant qui insistait sur un

diagnosticparticulier(l’angor),carilavaitétéconfrontéavecunesituationparticulière

chezunefemmeenceintelorsqu’ilétaitenstagedansunservicehospitalierdegynéco-

obstétrique.

Analyseselonlaperspectivedel’apprentissagesocioconstructiviste

L’analysedecedispositifaveccetteperspectiveaétédécevante.Leconflitsociocognitif

n’a pas permis réellement d’offrir plusieurs approches de résolution de problème ca-

pabled’apporterdenouveauxsavoirs.Toutauplus,faireressentirauxparticipantsque

leurhypothèse initialeauraitpuêtre réfutableafinde rechercherd’autresdiagnostics

possibles.Iln’apasétépossibledeprouverquelesparticipantsaientpuretirerdema-

nièrenonintentionnelledesbénéficeslorsdelaséanceinteractiveenfind’exerciceetde

démontrer ainsi l’existenced’un apprentissagenon formel. Par contre, les apprenants

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291

ont été conscients des actions à accomplir selon les objectifs précisés en début

d’exercice(apprentissageformel).

C.Analyseselonlaperspectivedelathéoriedel’activité

La résolution du cas clinique à développement progressif semble parfaitement être

adaptéeau cadrede cette théorie : l’activitédemandéeaux Internesest associéeàun

motif (prendre en charge une douleur thoracique chez une femme enceinte); l’action

desInternesestliéeàunbut(soulagerlapatiente)selonunmodeopératoirecombinéà

desconditionsnécessairesàsonexécution.Maisl’analysedel’activitédel’apprenantest

uniquement significative seulement si le temps disponible pour les interactions entre

participants est conséquent, ce qui n’a pas été malheureusement le cas, vu les con-

traintes horaires. Le non formel a été pratiquement absent, car le processus

d’assimilationinclusdanscettethéorien’apuêtrecorrectementdéveloppé.Parcontre,

les Internes ont été totalement conscients des actions à accomplir dans ce cadre

d’apprentissageformel.

Analyseselonlaperspectivedel’apprentissageénactif

Sinousjugeonsuneactivitéinformelleselonlepointdevuedel’apprentissageénactif,il

estnécessairedeprendreenconsidérationlesconditionspersonnellesavecdescondi-

tionsenvironnementales;or laplanificationdesdifférentesséquencesdecedispositif

d’apprentissageestsirigoureusequelesconditionsenvironnementalessonttotalement

figées (aucune liberté pourmodifier le déroulé, les conditions, le lieu, etc.) Seules les

conditions personnelles pourraient être variables d’un individu à l’autre.Mais les In-

ternesontdisposéenréalitédepeudelibertéetdetempspourjoueravecleurscondi-

tionspersonnellesdanslecadredel’exercice.Ilsontétébientropconditionnésparplu-

sieurs années d’enseignement théorique et de stages pratiques hospitaliers, peu adé-

quats à ce qui est attendu d’un exercice de médecin généraliste. Dans cet exercice,

l’apprentissage énactif a été insuffisamment valorisé, et n’a pas permis de repérer

l’informeletlenonformel.

Page 293: Apprentissage coopératif et formation des médecins : … participants to marshal their own experiences, to reflect thoughtfully and to coope-rate with each other, can improve the

292

Conclusion

Lesconditionsdéfiniespourrésoudrececascliniqueàdéveloppementprogressifn’ont

paspermisde rechercher raisonnablementunequelconqueactivité informelleounon

formelle. La formulationde ce cas clinique était correcte. Si ce dispositif pédagogique

n’étaitpasconcrètementadaptéànotreobjectifderecherche,ilnesemblepasavoireu

deconséquencessurlesobjectifsprévusd’apprentissage.

4.1.2.2edispositifd’apprentissage:legrouped’échangedepratique

Conditionsinitiales(rappel)

Les12Internesquiontparticipéàcegrouped’échangedepratiquequiavaitlieuensoi-

réeàlaFacultéétaientdansleur3eannéedeD.E.S.demédecinegénérale.Ilsontpuac-

quérir ainsi des compétencespour exercer lamédecine générale. Ils ont suivi unpre-

miersemestredestageditdeniveauIauprèsd’unmaîtredestagegénéralistedansleur

2eannéedeD.E.S;lesInternesprésentsàcetteséanceeffectuaientunsecondstageap-

peléniveauIIou«SASPAS»oùilsexercentlemétierdemédecinseulsenmilieuambu-

latoire(médecinegénérale,médecinedePMI,soinspalliatifs,etc.),maissouslasupervi-

siond’unmaîtredestage.

Laréunionsedéroulenormalementendeuxtempspourchaquecasprésenté:untemps

pourprendreconnaissanced’unesituationclinique(ellepeutêtresimpleoucomplexe)

qui a posé problème à un participant du groupe. Dans un second temps, les Internes

s’engagentdansunediscussioninteractivesurcecasafinde listeréventuellementdes

propositionsderésolutionenfonctiondebesoin.Lorsdecettesoirée,lesujetaportésur

le casd’un enfant qui a été giflé par sonpèredevantune Interne. Celle-ci a demandé

l’avisdesautresparticipantsafindel’aideràrédigercorrectementuncertificatdesigna-

lementpourmaltraitance.Lasoirées’estdérouléeexceptionnellemententroisétapes:

unepremièreétapeoùchaqueparticipantapus’exprimer librement surce sujet,une

secondeétapeconsistantàproposerdesréponsesauxinterrogationsdel’Internequia

présenté le cas, suivied’une troisièmeétapeoù les Internesontpu fairedesproposi-

tions afin d’aider la personne qui a présenté la situation à rédiger un signalement de

maltraitanceauxautorités.

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293

Recherchedesapprentissagesinformelsetnonformels

Ledéroulédecetexerciceestdéterminéparlechoixet lesdemandesdecelleoucelui

quiprésente,avecunchoixduthèmetotalementlibre.Lorsdeladiscussion,ilestnéces-

sairecependantderecouriràunemédiationafinquetouslesparticipantspuissentavoir

lapossibilitéd’exprimerleursavis.

Analyseselonlaperspectivedel’apprentissageconstructiviste

Lesdeuxmécanismesdel’apprentissageconstructiviste(assimilationetaccommoda-

tion) sont égalementprésentsdans cedispositif pédagogique. Comme il a été indiqué

dansleparagraphe3.2.4.,lesInternesontassistéàunenseignementsurlamaltraitance

d’uneduréed’uneheureen1reannéedeD.E.S.Cetenseignementétant totalementdé-

connectéde la pratiquede ville (tous les Internes étaient en stage à l’hôpital).Quand

nous avons interrogé les Internes après la présentationdu cas et avant dedébuter le

débat, tous reconnaissaient avoir oublié en grande partie le contenu de cet enseigne-

ment.Pendantlapremièreétapedelaformation,lesInternessesontexpriméchacunà

leurtourselonleursressentis,leursexpériencesdiversesrencontréesaussibiensurdes

terrainsdestagesambulatoiresouhospitaliers,maisaussidanslaviedetouslesjours.Il

estpossiblededirequecequiaétéexpriméparlesInternesaétéintégréaussibienpar

assimilation que par accommodation. Le conflit cognitif était probablement présent,

maispeusingulariséchezlesparticipants,carcesderniersavaientdesidéesbienarrê-

téessurceproblème.

Analyseselonlaperspectivedel’apprentissagesocioconstructiviste

Le conflit sociocognitif, dans ce cadre de l’apprentissage socioconstructiviste, et dé-

clenchéparlesnombreusesinteractionsentrelesInternes,aproduitundébatriche,fort

animéetintéressant.Outrelespositionsdechacundesparticipants,nousavonsassisté

àunvéritableclivagedesavisselonlegenremasculinouféminin, lesétudiantesétant

beaucoupplussévèresqueleurscollèguesmasculinsvis-à-visducomportementdupère.

Nousfaisonsl’hypothèsequelaplupartdesparticipantsaienteulapossibilitéd’intégrer

consciemmentet/ou inconsciemmentdes connaissancespar les contactsdesunsavec

lesautresouavecleurenvironnementsociofamilialouprofessionnel.Maisqu’est-cequi

apurelevéduformeletdel’informel?Nousnesommespascapablesdelepréciser,car

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294

nousfaisonsl’hypothèsed’uncontinuumd’apprentissage(BrougèreetBézille,2007,p.

119)etnonpasdansunetrilogieduformel,nonformeletinformel.

Analyseselonlaperspectivedelathéoriedel’activité

C’estunmotifdudomaineaffectifquivagénérerl’activitéetlesactionsdesInternes.Le

butestd’apporterdesréponsesauxinterrogationsproposéesparl’internequiaexposé

lethèmeàdiscuteretl’aideràrédigerunsignalement.Cetteséquenced’apprentissage

(grouped’échangesdepratiques)aconcernédesactionsàaccompliravecdesobjectifs

dontlesapprenantsontététotalementconscients.Cetapprentissageavaitpourfinalité

nonseulementdepermettreauxapprenantsdemémoriserdesfaitsetdesprocédures

afin d’assurer une réussite professionnelle,mais aussi deporter un jugement critique

surleursfuturesactivités,qu’ellessoientprofessionnellesouautres.Carcommel’asou-

lignéKeithSawyer(2008,p.11),

«Ilestessentield’assimilerdesconnaissancesinterdépendantesetcohérentes,plutôtquedessa-voirscompartimentésetrépartisentredifférentesmatièresetdifférentscours.L’assimilationdesavoirs authentiques dans leur contexte propre prime sur les exercices scolaires sortis de leurcontexte».

Analyseselonlaperspectivedel’apprentissageénactif

Les conditions personnelles comme les conditions environnementales sont bien pré-

sentesdanscedispositifd’apprentissage.Ilestpossibledefaireetenfaisant,desefaire.

Danscetexercice,lesdispositionspsychiquesdesapprenants,leursressourcesintellec-

tuelles, leursconnaissanceset leurscompétencesacquisesnotammentdepuis ledébut

du3e cycle sontprisesencompte.Mêmesi le tempsde l’exerciceaété limitépardes

contrainteshorairesetdelassitude(laséanceadébutéà20heures),l’espacedeladis-

cussionaététotalementouvert.Chaqueparticipantapus’exprimerenfonctiondeson

image du monde où il vit, de son ressenti, de ses préoccupations. Cette démarche

d’apprentissageapourobjectifdefavoriserundéveloppementdessavoirspratiqueset

dessavoirsd’actionspourchaque Interne; cettedémarchepeutégalement induiredes

transformationschezcesInternesafind’améliorerleurscompétencesprofessionnelles.

Cestransformationspeuventseproduiredefaçonintentionnelleounonintentionnelle.

Nonintentionnelle,carcesujetdelamaltraitanceestsouventtraitédansdifférentsmé-

dias,parfoismalheureusementlorsdeladécouvertedesituationsdramatiques,avecdes

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295

promessesdelapartdesautoritésdemieuxformerlesprofessionnelsmédicauxetso-

ciaux.Promesseshélasrarementtenues.

Conclusion

Les contenus et les objectifs de cette séquenceont étéproposéspar les Internes eux-

mêmesàlasuitedel’expositionducasquiposaitproblèmeàl’unedesInternes.Iln’ya

pas eu d’intervention de l’enseignant médiateur sur ces contenus et objectifs ni sur

l’élaborationdesquestionsàtraiter.Lalistedecesinterrogationsn’apasétéproposée

d’aprèsdes contenus formalisésdans les enseignements facultaires. Il a étéprobable-

mentfaitappelàdesconnaissancesacquisesdemanièreinformelle(lecturedejournaux,

revues,etc.),maisaussidesavoirsnonformelsglanésdanslescouloirsdesFacultésou

deshôpitaux.Nouspouvonscependantnousinspirerd’unetypologieproposéeparDa-

nielSchugurensky(2007,p.16)quidistingueenfonctiondedeuxcatégoriesmentales

(intentionnalité et conscience), trois formes d’apprentissage informel: les apprentis-

sagesautodirigés,lesapprentissagesfortuitsetlasocialisation.

L’apprentissage autodirigé concerne un groupe d’individus qui mènent une réflexion

pédagogique sans l’aide d’un enseignant actif, considéré uniquement commeune per-

sonneressource.Danscecadre, lesapprentissagessontà la fois intentionnelsetcons-

cients. Les participants à ce groupe d’échange sont venus à cette soirée de formation

pourdécouvrirdenouveauxsavoirs.Ilsontl’intentiond’apprendre,maisnesaventpas

ce qu’ils vont apprendre. A la fin de la séance de formation, desmembres du groupe

peuventêtreconscientsd’avoirapprisàgérerunesituationdifficile,commelapriseen

chargedelamaltraitanceinfantile.C’estégalementunapprentissagefortuitpuisqueces

apprenants ont ainsi conscience d’avoir acquis des savoirs même s’ils n’avaient pas

l’intentiondelefaireavantledébutdelaséance.Danscertainscas,desapprenantsn’ont

pasréellementconscienced’avoirapprisdeschosesutilespourleurexerciceactuel.Plus

tard,dansunenvironnementsocialdifférent,ilspeuventprendreconsciencerétrospec-

tivementdessavoirsacquis,maisnondisponibleslorsdecetterencontreetlesmettre

enapplicationdansunenouvelleexpérience.C’estl’apprentissageparsocialisation.

Cette réunion s’est déroulée en trois temps. Un premier temps où la présence de

l’enseignant a été fortementprégnante, afindedonner laparole à chacundespartici-

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296

pants.Lesdeuxautrestemps(prisedeconscienceetdébat)ontétéautodirigésetnous

pouvonsfairel’hypothèsedel’existencepossibled’unapprentissageinformelpourcer-

tainsapprenants.Parcontre, ilnousest impossibledenousprononcersurlaprésence

d’un apprentissage fortuit ou par socialisation dans ce groupe d’échange de pratique.

Nouspouvonsainsiqu’approuveràlalecturedelasituationproblème,lapropositionde

JayCross284(2006)quiadécritlanotiondecurseurpouvantsemodifierenfonctiondes

choixetdescontextesd’apprentissages.Cardanscedispositifd’apprentissage,lesdeux

catégories d’apprentissage formel et informel coexistent probablement. Cependant, si

nous sommes pratiquement certains que ces apprentissages non formels et informels

sontréels,nousnesommespascapablesdedirecequ’ilsontpuapporteràchaqueap-

prenant.

4.1.3.3edispositifd’apprentissage:lejeuderôle

Conditionsinitiales(rappel)

Cinqgroupesdemédecinsgénéralistes,dontungroupeavecdespédiatres,ontparticipé

àundispositifd’apprentissagebasésurunjeuderôle,proposélorsd’unséminairede

formationquis’estdéroulésurdeuxjours,àproposdudépistageetdelapriseencharge

del’obésitéinfantile.Lejeuderôlequenousavonsappelé«jeuderôleamendé»com-

portesixétapesaulieudetroisoriginellement.Lapremièreétapesupplémentairecon-

sisteundébatavec lesparticipantsnonacteurs,enutilisant la techniquepédagogique

du brainstorming ou du métaplan. Cette étape est suivie immédiatement d’un temps

pédagogiqueoùilestdemandéàcesparticipantsdehiérarchisertouteslesinformations

fourniesparledébatentroiscatégories:indispensableàdire,peutêtreditàlarigueur,

etcequipeutêtredangereuxoudéconseillédedire.Letroisièmetempsajoutésesitue

enfind’exercice:lesacteursdécouvrentlaproductiondesparticipants,comparentavec

cequ’ilsontexprimé.Enfin,touslesparticipantsdiscutentàlafindelaséquencepéda-

gogiquepourgarderoureclasserdesinformationsdanslestroiscatégoriesdéfinies.Les

résultatsontmontréuneimportantedifférenceentrelaproductiondesacteursetcelle

desparticipantsdanslescinqsessions.

284Cf.§2.6.

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297

Recherchedel’informeletdunonformel

Analyseselonlaperspectivedel’apprentissageconstructiviste

Cedispositifd’apprentissageestcertainementconstructiviste.Carlesconnaissanceset

lesschèmesmentauxdesapprenants,acquisprécédemment,ontétéconfrontésavecles

donnéessituationproblèmeselonlesdeuxprocessusd’assimilationetd’accommodation.

Considéronslejeuderôlemodifiéquenousavonsconstruitàpartird’unesituationcli-

niquecomplexe.Lesacteursquivontjouerlejeuderôleontprisconnaissancedesins-

tructionsetducontextedanslequeldoitsedéroulerl’exercice.Ilsvontpouvoirextraire

desinformationsdéjàmémorisées,nécessairesàl’élaborationdesreprésentationsdela

situationen rapport avec l'objectifpoursuivi.C’est l’étapede lacontextualisation. Puis

chaqueacteurvaéchafaudersonrôletoutenayantdéjàuneidéesurcequipeutêtredit.

Cette élaboration intellectuelle des différentes combinaisons possibles de questions-

réponsesestpropreà chaqueacteur,qui,nous le rappelons,n’apasconnaissancedes

instructionsoctroyéesàl’autreprotagoniste.Pourrendrelejeuderôleefficace,lecon-

cepteuraélaboré le scénariode telle façonque l’undesacteurs, ici lemédecin, se re-

trouveconfrontéàunesituationdifficileetcomplexe:derrièreunedemandelapriseen

chargedelasurchargepondéralechezuneadolescentemaldanssapeau,ilyaunesolli-

citationpourunedispensed’uneactivitésportivequipourraitmettrecetteadolescente

endifficulté.

Lebutdesparticipantsetdel’expertétaitdecommenteretanalyserlesréponsesetles

attitudesde l’acteurqui joue lerôledumédecin.Cedernieresteneffetévaluésurses

attitudes vis-à-vis de la patiente, sur ses possibilités de communication, et sur

l’utilisationadaptéedesessavoirs.Afind’avoirdepouvoirrépondreauxinterrogations

possibles de l’acteur médecin, la personne qui joue le rôle de la patiente dispose

d’instructionssupplémentairesinconnuesparl’autre.

Le scénario a été construitde telle façonque la confrontationdumédecin avec lapa-

tientechercheàoccasionnerchezlemédecinunephasededéséquilibreditededécon-

textualisation.C’estàlafindecettephasequelejeuderôlesetermine.Laphasedere-

construction dite de recontextualisation débute alors lorsqu’il est demandé aux deux

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298

acteursleursavisetleursressentissurcequ’ilsviennentdevivre.Enprenantconnais-

sancedesnotesprisesparlesobservateurs,lesopinionsdesautresparticipantsetcelui

de l’expert, cette phase de recontextualisation s’achèvera avec la maîtrise (il faut

l’espérer)denouveaux savoirs (connaissances, savoir agir, attitudes, et qualifications)

pourl’acteurmédecinetlestouslesautresparticipants.Nouspouvonsrésumerparun

«modèleidéal»cesdifférentesphasesselonleschémasuivant:

Figure 16 : la résolution d'une tâche complexe selon une approche constructiviste Selonunschémaadaptéparnous-mêmesdeMartinetSavaryp11

Analyseselonlaperspectivedel’apprentissagesocioconstructiviste

Dansl’approchesocioconstructiviste,c’estlaprésenced’unconflitsociocognitif,comme

l’ont démontré Willem Doise, Gabriel Mugny (1978) et Anne-Nelly Perret-Clermont

(2000)quipeutpermettreà tout individuappartenant àungroupedeprogresser.Ce

conflitsociocognitifestlaconséquenced’uneconjonctionentreunconflitcognitifintra

personneletunconflitdecommunicationinterpersonnel.Chercheràconnaître,àcom-

prendre,àanalyserlepointdevuedesautresavecsespropresreprésentationsvafavo-

riserlaconstructiond’uneinteractionsocialefavorableàl’apprentissage.

Maiscelasupposedeprendreenconsidérationplusieursparamètres:

1. lamotivationdechaqueindividupourparticiperactivementauxéchanges;

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299

2.l’utilisationd’unlangagecommunindispensablepoursecomprendre(homogé-

néitédugroupe);

3.unecompositionsubtiledugroupeunissantdesparticipantsauxcontextesso-

cioculturelsdifférents(hétérogénéitédugroupe)danslebutdemainteniruncer-

taindegrédetensionauxdifférentséchanges;

4.unmodérateurefficacedanssonrôledemédiateur,maisquiveilleànepaspro-

voquerdesdébordementsdanslesdébatsetnepasse laisserentraînerdansdes

impassesnéfastespourlegroupe.

Lesinteractionssocialesdansungrouped’apprentissage,parledéclenchementdecon-

flitssociocognitifs,vontfavoriser ledéveloppementcognitifdechaqueparticipantàce

grouped’apprentissage, et donc l’appropriationou le développementde savoirs et de

compétences.Cequisembleavoirétélecasdanscedispositifd’apprentissage.Lesparti-

cipantsàcejeuderôleontfaitappelàdescompétencestransversalespourcomprendre,

arbitrer,résoudre,raisonnerlorsqu’ilsontpus’exprimerlorsdesséquencesinteractives.

L’informelestcertainementprésentdanscesinteractions,maisilestdifficiled’enpréci-

sersonimportanceetsaplacedansledéroulementdecetteaction.

Analyseselonlaperspectivedelathéoriedel’activité

Lesparticipants,maisencorepluslesacteursvontraisonneràpartird’unereprésenta-

tion mentale (un schème285) centrée sur une adolescente avec son problème de

l’acceptationdesonimagecorporelle.Aveccedispositifd’apprentissage,lesapprenants

ontfaitappelàdesmomentsdeleurspratiquesquotidiennes.Chaqueacteurdujeude

rôlegénère sapropre représentationde la situationafinde s’adapterauxdonnéesdu

problème et organiser son raisonnement pour une résolution efficiente du problème

posé.Laconstructiondecettereprésentationestréaliséenotammentavecdessavoirs

acquisprécédemment,quecesoitparapprentissageformel,nonformeletinformel.

285Cf.définitionduschèmeparGérardVergnaud:§2.2.4.7.

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300

Analyseselonlaperspectivedel’apprentissageénactif

Sommes-nouscapablesd’affirmersicedispositifd’apprentissagerépondàladéfinition

de l’apprentissageénactifoù lesapprenantssontensituation etenaction286.Dansce

dispositif d’apprentissage, les participants sont en situation, car le scénario du jeu de

rôlemetcespersonnesfaceàunesituationréelle,pouvantêtrerencontréàmaintesre-

prises dans la vie de tout professionnel de santé de soins primaires. Les participants

sontégalementenaction,car ilsconcourentactivementàcetteséquencepédagogique.

Lacontributionestàlaconvenancedesapprenants(saufpourlesdeuxacteurs)etdonc

dépenddelamotivation,del’environnementetdessavoirsdechacun.

Cetteséquenced’apprentissagepeutainsiconcorderavecdescritèresdel’apprentissage

énactif. Commenousavons classé l’apprentissageénactifdans la sphèrede l’informel,

nousavonslapossibilitédedirequecejeuderôleafaitappelàl’apprentissageinformel.

Cependant,mêmeuneévaluationàdistancen’auraitpunousrenseignercorrectement

surl’acquisitioninformelledesavoirs,carceprocessusintellectueld’acquisitiondansce

cadre informel est essentiellement inconscient287 . Il est donc illusoire de soutenir

l’hypothèsed’undispositifd’apprentissageuniquementinformel.Parcontre,nouspou-

vonsaffirmerquel’apprentissageinformelaprobablementcontribuéàenrichirlesap-

prenantssurleplandesconnaissancesetdescompétences.Nousproposonsderésumer

cechapitresouslaformed’untableau:(pagesuivante)

286MASCIOTRAetal,2008,p.15287MATURANAHumbertoR,VARELAFranciscoJ.(1994).L'Arbredelaconnaissance.

Page 302: Apprentissage coopératif et formation des médecins : … participants to marshal their own experiences, to reflect thoughtfully and to coope-rate with each other, can improve the

301

Typed’apprentissage Informel Nonformel Formel

Apprentissageconstructiviste:

processusd’assimilation

Peutêtrenonintentionneldansunenvironnement

nonformalisé288

Peutêtreégalementnonintentionnellorsd’une

interactionendehorsd’uncadrepédagogiquepeu

formalisé.

Choixd’apprentissageparfoisdélibéréetcons-

cient.

Apprentissageconstructiviste:

processusd’accommodation

L’apprentissageestgloba-lementintentionnel.

Apprentissagesocioconstructiviste

Estprésentlorsquel’individuaugmentenatu-rellementsesconnais-sancesaucontactdes

autresetdesonenviron-nementparlemoyendela

culture.

L’individupeutretirerdesbénéficesd’uneconfron-tationavecd’autresindi-vidussansquecelasoit

intentionneldesapartlorsdedébatsquiontlieuen

institution.

Sicollectifdanslecadred’uneséquence

d’apprentissageformalisé(contenus,objectifsetmoyens),ilestessentiel-lementintentionnelet

réfléchi.

Apprentissageselonlathéoriede

l’activité

Peutpermettreledéve-loppementd’unprocessusd’assimilationlorsd’uneinteractionendehorsd’uncadrepédagogiqueforma-

lisé.

Concernedesactionsàaccompliravecdesobjec-tifsdontlesapprenantssonttotalementcons-

cients.

Apprentissageénactif

Lesinformationsprove-nantdel’environnementd’unindividusontcou-

pléessansinterventiondelapartdecetindividuaveclesdonnéesenregistréesdanssoncerveau:c’estun

apprentissagequiestfondamentalementinfor-

mel

Acquisitionpossibledeconnaissancesetcompé-tencesdansuncadrepé-dagogiquepeuformalisé.

Figure 17 : de l'informel au formel selon le type d'apprentissage

4.2.Lesprocessusd’apprentissagesselonlaperspectiveducourantthéoriquedelaconnaissancetaciteetdel’apprentissageimplicite

Ilexisteunniveaudeculturesous-jacent,caché,ettrèsstructuré,unensemblederèglesdecomporte-mentetdepenséenondites,implicites,quicontrôlenttoutcequenousfaisons.Cettegrammairecultu-rellecachéedéterminelamanièredontlesindividusperçoiventleurenvironnement,définissentleursvaleurs,etétablissentleurcadenceetleursrythmesdeviefondamentaux.Noussommes,pourlaplu-part,totalementinconscientsouseulementsuperficiellementconscientsdeceprocessus.»

EdwardHall,1984.

288C’est-à-direselonunedispositiond'espritparlequeluneindividusepropose,plusoumoinsconsciemment,d'at-teindre oud'essayer d'atteindreunbut déterminé, indépendammentde sa réalisation, qui peut être incertaine, ouavecdesconditionsquipeuventnepasêtreprécisées.

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Nousavonscatégorisé trois typesd’apprentissages: le formel, l’informelet lenon for-

mel. SelonPeterEwell (1997), n’importequelles situationsoun’importequels événe-

ments peuvent faire l’objet d’apprentissages. Dans l’apprentissage implicite, il existe

deuxpossibilités:dansl’une,iln’existeaucuncontrôle.Enfonctiondescirconstancesde

l’apprentissage, l’apprenantn’est pas capabledediscernerdesnotions erronées à ap-

prendre. Il s’agit d’apprentissage informel.Dans la secondepossibilité, Ewell signalait

que:«la majeure partie des apprentissages découle d’interactions directes entre un environnementcomplexeetdesdiscussionsavecdespairsoudestuteurs(nonenseignants).Celacorrespondàunapprentissagenonformelquivabienau-delàdecequiestexplicitementenseigné289».

C’est pour cette raisonquenous avons ainsi demandé, à l'acteurqui joue le rôled’un

professionnel de santé, de livrer sa propre analyse sur sa propre action lors des

échanges avec le patient. Cette étape d'auto-analyse est nécessaire pour l'acteur lui-

même,mais encore plus utile pour les participants qui ont assisté à cette interaction.

Celadoitsusciterchezcesderniersuneréflexion"enmiroir":commentauraient-ilsagi

eux-mêmes?Lesparticipantsdoiventconsidérerl'interactioncommeunexempleetnon

pasunedémonstrationdecequidoitêtrefait:lesacteursdujeuderôlenesontpasdes

experts!Lebutestdefavoriserlaréflexionetnond'appliquerautomatiquementcequi

a étéobservé lorsquecette situationestdenouveau rencontrée.Un tel jeude rôle tel

quenousl'avonsproposénedoitenaucuncasêtreunmodèlenormatif,maisunebase

depropositionspourdenouvellesactions.

Chaque foisqu'unêtrehumainorganiseouréorganisesonrapportà lui-même,à ses semblables,auxchoses,auxsignes,aucosmos,ilestengagédansuneactivitédeconnaissance,d'apprentissage.Lesavoir,ausensoùnousl'entendonsici,estunsavoir-vivre,unvivre-savoir,unsavoircoextensifàlavie.Ilrelèvedoncd'unespacecosmopoliteetsansfrontièresdesrelationsetdesqualités;d'unespacedelamétamorphosedesrapportsetdel'émergencedesmanièresd’être;d'unespaceoùserejoignentlesprocessusdesubjectivationindividuelsetcollectifs.»(Levy,1997,p.138)

Ainsi,danschaquedispositifpédagogiqueétudié, lesparticipantsont formulé,à lade-

mandedel’animateur,ungrandnombrededonnéesqu’ilsontconsidéréescommeadap-

téesausujetproposé.Cesdonnéesontétéconstruitesparchacuntoutaulongdesan- 289«Anobvious,butoften-overlooked,implicationofthiscapacityistorecognizeallsituationsandeventsaslearningopportunities—whetherornotweexplicitlyconstructthemassuch—andtoharnessthemwherevertheyoccur.Anequally obvious downside is that studentsmay frequently be learning “wrong” things naturally, based on the cir-cumstancesinwhichtheyfindthemselves,andoverwhichwehavelittleornocontrol.Animportantrelatedpointisthatmuch(andperhapsmost)oflearningis implicit,derivingfromdirectinteractionwithacomplexlocalenviron-mentanda rangeof cuesgivenbypeersandmentors thatgowellbeyondwhat is explicitlybeing taught», [notretraductionpartielle].

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nées de formation et de pratique. En effet, les apprenants ont partagé un répertoire

commun, l’exercice de l’art médical, même si leurs pratiques professionnelles ont pu

êtredifférentesd’unmédecinàl’autre.

Existe-t-ilunerelationentreapprentissageimpliciteetapprentissageinformel?Lerac-

courcipeutêtretentant:apprentissageexpliciteavecapprentissageformel,etappren-

tissage implicite avec apprentissage informel. Cependant, l’apprentissage implicite est

permanentetconstant,quecesoitpendantlesenseignementsinstitutionnels(formels)

ou dans la vie quotidienne (informelle).Dans un cadre institutionnel, l’absence ou un

mauvaisguidagedesétudiantspourproduiredestravauxpersonnelsvontamenerces

étudiants à faire appel à l’apprentissage implicite; ils fondent leurs travaux sur leurs

intuitions,leursémotions,leursconvictions,leurperceptiondel’environnement,maisle

résultatn’estpastoujoursàlahauteurdecequiestattendu.

Lesétudiantsapprennentàraisonnerdefaçonscientifiqueetstructurée,grâceàunap-

prentissageexplicite.Àl’inverse,cesétudiantspeuventacquérirtoutaulongdeleurvie,

selonunapprentissageimplicite,dessavoirsquisontsusceptiblesdelesaideràraison-

nerdemanièreintuitive.Cetapprentissageimplicite,inconscient,seproduitleplussou-

ventàl’insudel’apprenant.Dansl’apprentissageexplicite,lesujetapprenantrecherche

à améliorer sa capacité àmémoriser des savoirs et à les extraire en cas de besoin. À

l’opposé, l’apprentissage implicite est attachéàun individuqui fait appel àdesméca-

nismesmentauxpersonnelsafindecréerdesliens,deproposerdesexplications,àiden-

tifierdesschèmesderésolutionqu’ilpeutmettreenœuvrenotammentfaceàunesitua-

tioncomplexe.Nousconstatonsquelesfonctionsdelamémoire(mémorisation,distri-

butionetextractiondesinformations),quisontàbasedel’apprentissageexplicite,sem-

blentengrandepartieinefficaceschezlespatientsamnésiques.Cependant,cesmêmes

fonctionssontencoreenréalitébienprésenteschezcespatientsetpeuventêtreutili-

sées pour améliorer leur apprentissage implicite. (Larry Squire et Mary Frambach,

1990).

GérardStraka (2009,p.132)aposé laquestionsuivante: «l'informelest-ilunsimple

élément d’un apprentissage? L’apprentissage implicite est-elle seulement liée à l'ab-

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sence de formalité290» ? Pour cet auteur, l’apprentissage implicite se conjugue avec

l’informel.C’estl’environnementetlecontexted’apprentissagequipermetdedistinguer

unapprentissage formelou informel.Lescaractéristiques«formel»et«informel»ne

doiventenaucuncasêtredéfiniesparrapportàl’apprenantdontleprincipalobjectifest

d’acquérir des compétences afin d’être certifié par un diplôme et exercer dans de

bonnes conditions saprofession.Nousallonsessayerde répondreà l’interrogationde

Strakaavecl’analysedes3dispositifsd’apprentissagesétudiés.

4.2.1.1erdispositifd’apprentissage:lecascliniqueàdéveloppementprogressif

Lecascliniqueàdéveloppementprogressifadeuxprincipauxobjectifs:1 - listerpuis

hiérarchiser toutes les hypothèses possibles en relation avec des données présentées

lorsd’unpremier tempsde ladémarchepédagogique.2 -Puisau furetàmesuredes

étapessuivantes,réduire la listedesconjecturesretenuesàuneseulehypothèseplau-

sible.Cetypededispositifestproposédanslebutd’amenerleprofessionneldesantéà

réduirelasituationd’incertitude291d’origine.

Rappelons un des principaux rôles dumédecin généraliste: c’est assurer les soins de

premierrecoursetdeproximité,leconduisantàgérerdestroublesdesantéàdesstades

précocesd’évolution.L'éventaildespathologiesqu'ilprendenchargeest large. Ildoit

prendre ses décisions dans un délai court, celui de la consultation, avec des moyens

techniques diagnostiques limités. La plupart des actesmédicaux réalisés enmédecine

ambulatoiresontconséquents:

«d’unesériededécisionsfondéessurdesdonnéesincertaines:interrogatoireetexamencliniquesouventimprécisetincomplets,voiretrompeurs,dontlesconclusionssontsouventsubjectives;examenscomplémentairesd’interprétationdifficile,n’apportantsouventpasunecertitudeabso-lue;pronosticetrisquesévolutifsdifficilesàapprécier,alorsqu’ilsvont justifier lescontraintesdutraitementetdusuiviultérieur;résultatsàattendredutraitementchoisi,avantagesescomp-

290Isinformalityafeatureoflearning?Isimplicitlearningsolelyrelatedtoinformality?291PourEdgarMorin(1999,p.46)l’éducationdufuturdoitrevenirsurlesincertitudesliéesàlaconnaissance,carilya:

• Un principe d’incertitude cérébro-mental, qui découle du processus de traduction/reconstruction propre àtouteconnaissance;

• Unprinciped’incertitudelogique.CommeledisaitPascalsiclairement:«nilacontradictionn’estmarquedefausseté,nil’incontradictionn’estmarquedevérité».

• Unprinciped’incertitude rationnel, car la rationalité, si ellen’entretientpas sa vigilance autocritique, versedanslarationalisation;

• Unprinciped’incertitudepsychologique : ilya l’impossibilitéd’être totalementconscientdecequisepassedans lamachineriedenotre esprit, lequel conserve toujoursquelque chosede fondamentalement incons-cient.Ilyadoncladifficultéd’unauto-examencritiquepourlequelnotresincéritén’estpasgarantiedecer-titude,etilyaleslimitesàtouteauto-connaissance.

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tésetrisquespotentiels,appréciésàpartirdesdonnéesstatistiquesdesétudesfaitessurdespo-pulationssélectionnées,différentesdupatientactuel292».

Ilestdemandéauprofessionneldesantédeporterundiagnosticadaptéà lasituation

clinique. Mais avant de proposer éventuellement un diagnostic, il est préférable qu’il

puisse s’assurer que les troubles de santé présentés par son malade ne sont pas les

symptômesd’unemaladiegravedontl’évolutionpéjorativepourraitêtreévitéeparune

intervention médicale urgente et adaptée : le risque évitable. C’était la finalité de ce

premier dispositif pédagogiqueque nous avons éprouvé : reconnaître le degré de

l’urgencemalgré l’incertitude de la situation clinique afin d’avoir une prise en charge

adaptée.

Cependant,répondreauxdemandesdespatientsneserésumepasauseulactederai-

sonner.Eneffet,toutpraticiendesantédoitdonccomprendred’abordlescausesquiont

motivé cette consultation, puis réfléchir sur les faits provenant de l’entretien et de

l’examenclinique,etenfin,àpartirdel’ensembledesinformationsquisontàsadisposi-

tion,proposeruneréponseàcepatient.Cetteréponsen’estpasinstantanée.Elledébute

paruntempsd’anamnèse293.Cetempsderecueildel’informationsepoursuitselonun

cheminementcomplexe,nécessitanttroistempssuccessifs:

1-uneanalysedelasituationaxéesurlesrésultatsdel’anamnèseetdel’examen

clinique;

2 –unedeuxièmeétapedénommée tempsde raisonnement, à l’issueduquel le

médecinpourraproposerunepremièresynthèse,appeléehypothèse:diagnostic,

décisiond’acte,ouréponsetemporairedansl’attented’informationscomplémen-

taires;

3-cettesecondeétapeestenfinsuivied’unedécisionetd’uneévaluationparle

médecindecequiaétéproposéouréalisé.

292GALLOISPierre(2010).Gérerl'incertitudedelapratiquemédicale.RevueMédecine,6,pp.124-126.293Lemédecinnevisepasàconnaîtreaveccertitudelesfaitsrecueillisàl’issuedel’anamnèse;ilchercheàsoignerenréduisantaumaximuml’incertitudedecesfaitspourprendrelameilleuredécision.Lorsqu’ilestdevantunpatient,ilrechercheunesolutionsatisfaisanteetacceptablepourlepatientetpourlui-même.Cettesolutionn’estpasobligatoi-rementlasolution,cellequiestqualifiée"certaine".L’efficacitédumédecindépenddelavaliditéetnonpasdelacerti-tudedesonhypothèse.

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Revenons à la gestion de la démarche diagnostique. Dans le cas d’une situation

d’incertitude,ladécisionmédicaleestletermed’unesuitedeprobabilitésensebasant

sur sapropreexpérience,dedegrésde croyanceenunehypothèsediagnostique,d’un

instinct,d’une intuitionetd‘une intimeconviction (gutfeelingenanglais).Cequenous

pouvonsdécrireavecleschémaci-dessous:

Figure 18 : schéma du raisonnement médical294

Lesétudiantsquionteuàrésoudrececascliniqueàdéveloppementprogressifontutili-

sé des connaissances livresques et ont intégré dans leurmécanismede raisonnement

despratiquesrepéréespendantleursstageshospitaliersentantqu’Externes295.Laréso-

lutiondececascliniqueparlesInternesen1reannéedespécialisationafaitappelessen-

tiellementauraisonnementstructuréhypothético-déductif,selonunprocessuspédago-

giqueexplicite.Leraisonnementintuitif,empiriqueaétémisdecôtéparl’ensembledes

Internes. Aussi, le dispositif pédagogique tel qu’il a été proposé appréhende plutôt le

cadred’unapprentissage formel.Sicecascliniqueavaitproposéàdesétudiantsen3e

annéede spécialisation enmédecine générale (D.E.S. 3), les résultats auraientpu être

différents.

Enconclusion,lecascliniqueàdéveloppementprogressifaétéproposépourmontrerla

place de l’incertitude du raisonnementmédical afin d’élaborer un choix d’hypothèses

adaptéesà lasituationcliniqueproposée.Cette incertitudeestprovoquéepardesmé-

connaissances(absencedeconnaissanceousavoirserronésoubienmalutilisés),etles

294Adaptéd’unschémaduraisonnementmédicalproposéparErikStolper(2010,p.200)295ÀladifférencesdesInternesquisonten3ecycledesétudesmédicalesquisontconsidéréscommedesmédecinsayantlapossibilitédeprendreenchargeunpatientetprescrire,lesExternessontdesétudiantsenDFASMquisontenstageàl’hôpital,ontunemoindreexpériencepratiqueetn’ontpasledroitdeprescrire.

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comportementsintuitifsetpastoujoursrationnelsdesêtreshumains.L’incertitudequi

enrésulteestliéeauxsavoirssurlesmaladiesetnotammentleursévolutions,auxcom-

pétencesdesmédecinsportantsurlediagnostic,lepronosticetàlapriseenchargethé-

rapeutique,auxpatients(contextesetantécédents,environnementetmodedevie,suivi

etévolutionduproblèmedesanté),àunerelationmédecin-patientquipeutêtredifficile

ouinadaptéeetenfinauxmédiaslorsqu’ilsdiffusentuneinnovationmédicalepeutpro-

voquer des risques potentiels de dommage pas toujours identifiés ou identifiables.

Chaque moment de la décision médicale contient sa part d’incertitude et de doute,

sourcedevariabilitédanslesjugementssurl’identificationdel’actionlaplusappropriée.

Ilexisteunliencertainentreledéveloppementdel’intuitionetlesapprentissagesnon

formelsetinformels.Ilauraitétéintéressantdeprésentercecascliniqueàdéveloppe-

mentprogressifàdesprofessionnelsdesantéayantune longuepratiquede leurexer-

cice.Maisàl’origine,nousnousétionsarrêtéssurlesnotionsdesavoirsformels,infor-

melsetnonformels,etnonsurlescatégoriesd’apprentissage.Ilestcertainquecedis-

positifpédagogiqueproposéàdesétudiantsenpremièreannéedediplômedespécialité

enmédecinegénéralen’étaitpasvraimentadaptéànotretravailderecherche.Lesétu-

diants,quiontdûapprendresouventparcœurdesquantitésdecontenusformalisés,ont

surtoutraisonnédemanièreanalytique.L’apprentissagedanscedispositiftelqu’ilaété

décritestquasimentdutypeformel.

4.2.2.2edispositifd’apprentissage:legrouped’échangedepratiques

Pourrappel, legrouped’échangedepratiquespermetàdespersonnesintéresséespar

un thème commun d’échanger sur ce thème. Ces personnes sontmotivées à partager

leurs différents savoirs en s’aidant de leurs compétences, de leurs vécus et de leurs

propresexpériences.L’apprentissage fondésurungroupedepratiquedébuteparune

histoireracontéeparundesmembresdugroupe,ici,unrécitdemaltraitanceinfantile.

C’estunesituationproblèmeexemplairedont larésolutionpeutêtreprofitableà tous.

Cerécitestsuivid’undébatafindepartagerlesavisdesautresmembresdugroupe,et

leurréactionvis-à-visdel’actedemaltraitance.Ilestnotéainsiunfluxetrefluxentreles

différentesprisesdepositiondesparticipantsdugroupequicorrespondàunpartagede

diverses connaissances. Lesmembres du grouped’échangede pratiques sontmotivés

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pour comprendre le problème et adapter leurs remarques et leurs propositions afin

d’apporteruneréponsecommunesatisfaisanteàlapersonnequiaintroduitl’histoire.

L’activitédugrouped’échangedepratiqueestbaséesuruntravailcollaboratifdestinéà

confronterdifférentspointsdevueafindeproduireunaboutissementutilepourtousles

membresdugroupe.Cetravailcollaboratifvafaciliterl’intégrationdenouveauxsavoirs,

qu’ilssoientsoutenusparl’enseignantmédiateurouqu’ilsproviennentd’échangesinte-

ractifsentrelespairs(icilesétudiantsen3eannéeducycledeprofessionnalisation).Les

savoirs sontproduits à partir dedonnéesperçuespar les organes sensoriels de l’être

humain. Ces données sont de natures variées, provenant d’expériences, de connais-

sances livresques, d’apprentissages diversifiés et de pratiques diverses. Ces données

deviennent alors des informations lorsqu’elles sont alors triées et organisées; ces in-

formationssetransformentensavoirslorsquel’êtrehumainlesinterprèteraafindeleur

assigner du sens et de la signification. C’est en fonction du contexte de production et

d’utilisationquelessavoirsdeviendrontsoittacitessoitexplicites.

Nous rappelons égalementque les savoirs tacites sontnécessairespour résoudre, par

desaptitudes,dessavoir-faire,deshabiletés,desintuitions,desproblèmespratiquesqui

n’ontéténiprévusniformalisésparl’institution,etdanscecadrelaFacultédemédecine.Lessavoirstacitessontnaturellementpersonnels,carc’estlapersonnehumainequileur

attribuedusensselonsonintuition,sesvaleurs,sesémotionsetsescroyances.Maisces

savoirstacitespeuventêtreégalementcollectifs,car ilspeuventsemanifesterdansun

groupefavorisantdeséchangesd’idées,deprocédés,despropositionsdesolutions,des

astucespour l’exerciceprofessionnel.Cepartage socialpeut ainsi favoriserune trans-

missiondessavoirstacites.Dansdeuxdestroisphasesdecetexercice(débat,proposi-

tions pour élaborer un signalement), j’ai constaté en effet un grand nombre

d’interactionsentrelesparticipantsquipouvaientreleverd’échangedesavoirtacite.

Jean-FrançoisBallay(2002,p.18)aproposéuntableaucomparatifentrelesavoirtacite

etlesavoirexplicite.Pourcetauteur,lesavoirtaciteestassociéàl’expérience,ausavoir-

faire,àl’intuition,àlamémoire,ausavoiroral,auprocessusdesocialisation,àlasubjec-

tivité, et également à «l’informel». Le savoir explicite est lié à la connaissance, à

l’information,auxconcepts,auxdocumentsécrits,auprocessusd’extériorisation,etest

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surtoutdel’ordredu«formel».Associésavoirtaciteetsavoirinformelestdoncadmis-

sible.S’ilestpossibledetransformerdessavoirstacitesensavoirsexplicites,laconver-

sion de savoirs informels en savoirs formels est également permise. Et la réciproque

peutégalementêtrevraie.

Mais comment pouvons-nous relier les savoirs informels à l’apprentissage informel?

JohanneBarrette(2011,pp.242-243),caractérisel’apprentissageinformel«sousson

aspectsituéetexpérientieletsousl’angledurôle,danssaréalisation,del’explicitationet

delaréflexionsurl’action».Sonargumentationestbaséesurdeuxprincipesderaison-

nement:

«Unva-et-viententrelesavoirimpliciteetlesavoirexplicite,traduisantlemouvementdelaré-flexion/explicitation de la connaissance en acte (pré réfléchie) ; la réalisation d’un va-et-viententre le savoir d’expérience et la connaissance théorique, indiquant un processusd’intégration/intériorisationdesconnaissancesparlapratique,durantl’activitéetensituation».

Nouspouvonsreprendrel’argumentationdeJohanneBarrettepourformulerquedans

ledispositifd’apprentissaged’échangesdepratique,ilexistecertainementunepartim-

portanted’apprentissageinformelpourlesapprenantsàdeuxniveaux:1-avantledé-

bat,lorsqu’ilsexprimentleursargumentsacquisauparavantsoitd’unemanièreformelle,

soitdefaçonnonformelleetinformelle,et2-enfindeséance,aprèslaconclusionfaite

parl’enseignantmédiateuràlasuitedesdifférentséchangesentreparticipants.

Cependant, l’estimation quantitative et qualitative de cette part dans ce dispositif

d’apprentissagenepeutêtreconcrètementprécisée.Carlapartdel’informeldanscette

activitéd’apprentissageestsouventspontanée,parfoisimprévueetimproviséeselonla

qualité des interactions entre lesmembresdu grouped’échangedepratiques. Les sa-

voirstacitesdesapprenantsdirigentenpartienoscomportements.Certainsdesappre-

nantssesontprobablementexprimésinstinctivement,sanstoujoursêtreconscientsde

l’étenduedeleurssavoirs.

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4.2.3.3edispositifd’apprentissage:lejeuderôle

Apprendresansconsciencen’estpasruinedel’âme

Lorsquenousproposonsà chaquegroupedemédecinsunbrainstormingsur l’obésité

infantile,ilyaunemiseenjeudedeuxprocessusintellectuels:unprocessusindividuel

pourextrairesespropresdonnéesmémorisées,provenantaussibiendelamémoireex-

pliciteetimplicite,etunprocessusd’automatisation,basésurl’artderebondirsurdes

donnéesémisespar lesautresparticipantspourproposerd’autres informations.Cette

miseenjeud’unprocessusindividueletcollectifestdépendantedel’environnementoù

sedéroulel’actionetleniveaudesconnaissancesdechacundesparticipants.Leproces-

susd’automatisationdevientuneactivitémachinaleaufuretàmesuredesformationsà

cetteactivité.Autant ceprocessusest certainement impliciteaudébut,dépendantdes

convictionsetdes émotionsde chaquemembredugroupe; autant il devient explicite

lorsqu’il est utilisé à plusieurs reprises. Cette automatisation permet de produire des

informationstoutengardantdisponiblelacapacitéd’attentiondechaqueparticipant.Ce

qui aurait été plus intéressant de réaliser dans ce troisième dispositif pédagogique,

c’étaitdedemanderàchacundesapprenantsd’expliciterlesraisonsquilesontamenés

àproposerchaque termeénoncé.Lesparticipantsàces formationsont-ilsproposé tel

termeparcequ’ilsl’avaientapprislorsdeséquencesd’apprentissageformel,àlaFacul-

té?Oubienont-ils faitappelàdesréminiscencesdesituationsenregistréesspontané-

ment et sans effort dans leur mémoire implicite? (Apprentissage informel). Nous ne

sommespascapablesderépondreàcetteinterrogation.

Nousavonsprévu,danscejeuderôle,deconfronterdeuxcatégoriesdeproduction.Une

productionformaliséeselonunsynopsisbiendéfini,oùlesdeuxacteursdujeuderôle

pouvaients’exprimerchacunenfonctiondesesconnaissancessurlesujet.Touslesdeux

ontunefonctionbiendéterminée,l’unceluid’uneadolescentequidésire,etl’autrecelui

d’un médecin qui doit être à l’écoute et répondre ou ne pas répondre aux désirs de

l’adolescente.Lasecondecatégoriedeproductionétudiée(comparaisonentrecequia

étéditparlesacteursetl’ensembledeparticipants,etremiseencausepossibledesca-

tégorisations antérieures) était plus autonome, puisqu’elle n’était plus affectée par le

carcan du jeu de rôle. Les participants avaient la possibilité de s’exprimer sans con-

traintesurlesujetproposé,aveccependantunelimitationdansletempscommepourle

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jeuderôle.J’aimontréquelaproductiond’informationsparlesgroupesd’apprenantsa

ététroissupérieuresenmoyenneauxinformationsdélivréesparlesacteursdesjeuxde

rôle.Maisilestdifficiledediresicessavoirssupplémentairesétaientdel’ordredufor-

meloudunonformel.Laplupartdestravauxpubliésseréfèrentauxsavoirsinformels

et formels.Les savoirs informels sont souventdéfinis commedescompétences tacites

acquisesparlaforcedel’habitudeaucoursd’uneviesocioprofessionnellesouventd’une

manièreautomatique.Ilssontainsiobtenusàlasuited’expérienceparachevantdesno-

tionsthéoriquesformelles.Toutestlié:expériencesetsavoirsthéoriquessontcomplé-

mentaires : l’un révèle l’autre et vice-versa comme l’ontmontré Lewin, Kolb et Gibbs

pourneciterquecesauteurs.Aulieud’évoquerladichotomiesavoirsformelsetsavoirs

informels,ilestprobablementplusintéressantdemodifiernotreconceptionduformelà

l’informelenévoquantlesconceptsdesavoirsacadémiques,savoirsprocédurauxetsa-

voirs d’actions. Ces trois types de savoirs peuvent être acquis par des apprentissages

implicitesetexplicites.Aveccependantunelimite,commepourlessavoirs,ilexistepro-

bablementuncontinuumentrecesdifférentsmoyensd’acquisitiondeconnaissances.

4.3.Lesprocessusd’apprentissageselonlescourantsthéoriquesdelacogni-tionsituéeetdelacoopération.

«Alors que les concepts spontanés sont construits dans les situations informellesd’apprentissage, il est par contre nécessaire d’instaurer des situations formelles pourrendrepossiblelatransmission-appropriationdesconceptsscientifiques».(MichelBros-sard,2001,p.423)

Nous avons recherché ainsi les rapports potentiels entre l’apprentissage coopératif et

l’apprentissagesituéouencontexte.Eneffet,nousavonsconstatéque lesexpériences

des participants et le contexte dans lequel se déroule l’enseignement ou la formation

peuventagirsurlacapacitéd’apprendre.Nousavonsainsidéveloppéuneréflexionsur

l’apprentissageréflexifexpérientielencontexteetsur lechoixdessituationscliniques

sélectionnéespournotreargumentation.Nousavonségalementinsistésurlaplaceetle

rôlepossibledes apprentissages informels etnon formelsdans le l’élaborationde ces

trois démarches pédagogiques. Selon Eraut296(2004, p. 247), l’apprentissage informel

296«The term `informal learning' canalsobe consideredas a complementarypartner to learning fromexperience,whichisusuallyconstruedmoreintermsofpersonalthaninterpersonallearning»

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peut être considéré comme un procédé complémentaire à l’apprentissage par expé-

rience.Les interactionsquiont lieupendantunapprentissage informelounon formel

ontpourbutd’interpréterencommuncequiaétédit,desemettred’accordsurlapro-

ductioneffectuéepar legroupeetvalidercetteproduction.Mais ilnousestdifficilede

repérercesapprentissagesnonformelslorsquenousnousplaçonsdanslaperspective

delacognitionsituée.

La théoriede lacognitionsituéemet l’accentnotammentsur lessavoirsconçusenac-

tion.Ainsi,chaqueparticipantalapossibilitédereconfigurersessavoirsenfonctiondes

informations produite tout au long du jeu de rôle. Ces informations peuvent être ac-

quisesparapprentissageinformel, maisnousenavonspeuconscience.Or,avoircons-

cience d’acquérir ces informations peut, comme l’a écrit Glasersfeld en 2004 (p. 14),

«nousaideràlefairedifféremmentetpeut-êtremieux».Repérerl’informeletlerecon-

naîtreétait un des buts de ce dispositif d’apprentissage. Selon Céline Gibert et Pierre

Carrolaggidansunguidepourvaloriserlesapprentissagesinformels,éditéen2009,«si

l’ona apprisquelque chose sans le vouloir, commentdireparquelleprocédureon l’a

acquis»?Ilestpossiblederéaliseruneactiond’apprentissagepouracquérirunenou-

vellecompétencesansenavoireul’intentiondelefaire.Danslemodèleconstructiviste,

l’actionestprescritepar la cognition.Dans laperspectivede la cognition située, il y a

absence d’une hiérarchie entre cognition et action (Saury, 2006): «Toute action est

donc toujours dans une certainemesure, une improvisation en situation – y compris

celles minutieusement préparées et planifiées, comme par exemple, les séquences

d’enseignement».Leparticipantinterprètelasituationd’apprentissageaveclerésultat

de ses actions actuelles et passées. Ces actionspasséesontpourune grandepart une

origineinformelle.

Lestroisdispositifspédagogiquesdécritsdanslatroisièmepartiedecettethèseontété

construitsselonunelogiquepédagogiquedecoopérationetderéflexion.Cesdispositifs

fontappel,parl’utilisationd’unétayagesimple297,àdesactivitéscognitivesquidonnent

297Termedésignantuneorganisationpédagogiqueinteractiveadaptée,proposéeàunecommunautéd’apprentissagepouraiderlesapprenantsàréussirdesapprentissagesdesavoirsetdeconcepts.Cettedéfinitiondérivedecellefor-muléeparJeromeBRUNERetinspiréeparleszonesdedéveloppementdeVYGOTSKI:systèmedesupport,fourniparl’adulte à travers le discours ou la communication afin de restreindre la complexité de la tâche, et permettant àl’enfantderésoudredesproblèmesqu’ilnepeutaccomplirseul.CetétayageselonJeromeBruner(1983)estréaliséleplussouventparuntuteurpouraiderunnoviceàréaliserunetâcheouàrésoudreunproblème:1–susciterl’intérêtetfavoriserl’adhésiondel’apprenant.2–simplifierlacomplexitédelatâche:ilfautéviterd’excéderlescapacitésde

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unsensàl’apprentissage. Ilsontétéélaborésdansunbutbiendéfini:décloisonnerlessavoirsuniversitaires acquis régulièrement par les participants en se basant sur leurs

expériences vécues, aussi bien dans leur cadre de vie professionnelle que dans la vie

sociétaledetouslesjours;cecienvuederepéreràl’issuedesformationscequicorres-

pondauxsavoirsthéoriquesouacadémiques,auxsavoirspratiquesouprocédurauxetaux

savoirsd’action298.Eneffet,cesdernierscorrespondentàunetransformationdesavoirs

théoriques et pratiques pour opérer efficacement dans une circonstance donnée. Ces

savoirsd’actions sontmobiliséspouragir leplusefficacementen tenant comptede la

complexitéetdel’incertitudedelasituationrencontrée.Ilspeuventêtredérivésdecon-

naissancesmobiliséesparl’êtrehumainafind’effectuervolontairementdeschoixdans

la vie quotidienne. Ces savoirs d’action correspondent le plus souvent à des routines

(MonicaGatherThurler,1998)quidéclenchentdeschoixautomatiques,leplussouvent

inconsciemment.Cesautomatismessontnécessairespourseconcentrersur l’essentiel

enéconomisantnotrefonctionnementmental(notammentlaperception,laréflexionet

leraisonnement).Ilexistedoncunerelationpossibleentresavoirsd’actionsetsavoirs

implicites.Cesdernierssavoirssontsouventacquisparapprentissageinformel.Larela-

tionentresavoirsd’actionetsavoirsinformelsestprobable,maisdifficilementdémon-

trable.

Unapprentissageencontextecorrespondàunesituationd’apprentissageconcrète,au-

thentique, avec ses activités connexes. Une telle situation peut agir efficacement sur

l’acquisitionde savoirs. Les trois situationsd’apprentissageproposéesaux Interneset

auxmédecinssontsusceptiblesd’êtreplusoumoinsfréquemmentrencontréesdansla

vieprofessionnelledesmédecinsgénéralistes.Lecontexted’apprentissagedépenddela

situationoù il s’effectue.Lasituationcorrespondàunensemble intégrant le lieude la

formation,lesdifférentestâchesàeffectuer,ladynamiquedesparticipantspouradhérer

l’apprenant.3–aider l’apprenantàpoursuivresonobjectifnotammentenencourageantsamotivationàréaliser latâche.4–favoriserl’évaluationformativeendonnantuneinformationconcrètesurunéventuelécartentrelaproduc-tionréaliséeetcellequiestattendue.5–reconnaîtreleserreurspourlesdédramatiserimmédiatement.6–silatâchen’a pu être réalisée correctement, proposer un modèle de solution adapté aux objectifs d’apprentissage del’apprenant.298SelonPerrenoud(1994),ilestpossible«d’imaginerqu’unindividuintelligentsacheautantdebiologie,d’anatomie,dephysiologieetdepathologiequ’unmédecinsansêtrepourautantcapabledeposerundiagnosticouuneindicationthérapeutiqueunpeusophistiquée.Mêmeens’appropriant lessavoirsprocédurauxdisponibles, ilneseraitpasca-pabledetraiterdespatientsaussiviteetsûrementqu’unpraticienrompuàlaclinique.Précisémentparcequecettecliniqueadéveloppédesschèmesdepensée,dedécisionetd’actionpermettantd’orchestrerentempsréell’ensembledesinformations(surl’étatdupatient,lesmoyensdisponibles,leséchéances),dessavoirsthéoriquesetdessavoirsprocédurauxpertinents».(PERRENOUDPh.,1994b).

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àcetteformation,etl’environnementprofessionnelauxquellescetteformationseréfère.

C’estunétatdes lieuxquidonnedes indicationspour l’actionà réaliser.C’est lorsque

l’actionestproduitedanscettesituation,enfonctionlesinstructionsdonnées,qu’ilest

possibledeparlerd’apprentissageencontexte.

Lathéoriedelacognitionsituéeprendenconsidérationlerôledel’environnementdans

lequel l’apprentissage intervient. Certes, tout ne peut pas être appris en contexte (Cf.

citation supradeMichelBrossard).Ainsi les étudiants enmédecinedoivent suivreun

premieretsecondcycle.Pendant6anscesétudiantsontdûabsorberungrandnombre

deconnaissancesetapprendreàtransférerdesconnaissancesd’undomaineàunautre

domaine. Grâce à l’accumulation des connaissances, les apprenants sont capables de

suivredesapprentissagesen contextede situation complexe. Ilne faut cependantpas

oublier qu’il est illusoire, comme l’a précisé William Clancey en 1994, de croire que

l’ensemble des connaissancesmémorisées dans la tête d’un étudiant enmédecine ou

d’unmédecinvafairedecesindividusunepersonneexpertedansl’artmédical.Cesont

lesinteractionsaveclecontexteetd’autrespersonnesquivontfairesortirdesdonnées

présentesdansnotrecerveauafindenousrendrecapablesderépondred’unemanière

satisfaisante aux demandes des patients. Clancey (1994) précise: il est nécessaire

d’accorderdavantageattentionauxchoses concrètes réaliséespar les individusplutôt

que de se focaliser sur les représentations, ici des professionnels de santé, que l’on a

jamais vue. Nous pouvons ainsi considérer l’apprentissage informel comme un type

d’apprentissageautoinitiéparunapprenant,commelepréciseJohanneBarrette(2011,

p.244),enfonctiondelaperceptionparapprenant,delasituationàrésoudreetdeses

besoinsdeconnaître.Cetteexpérienced’apprentissagevécuparl’apprenantval’amener

àréfléchiretexpliciterl’actionqu’ilvientderéaliser.Ainsi,danstoutapprentissageex-

périentiel, en considérant le plan qualitatif, il y a certainement de l’informel.Mais les

apprenantscommelesenseignantsontdumalàprendreconsciencedecettecarencede

formalisation, car ils sont encore trop attachés aux contextes légaux et aux systèmes

administratifs pourtant souvent considérés comme trop rigides. Par craintedenepas

êtreenconformitéauxattentesdel’institution,lamajoritédesapprenantsonttendance

à apprendre avec contrainte, c’est-à-dire à suivre à la virgule près les contenus et les

objectifsdeprogrammedéfinispourexercerlemétierdemédecin.

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4.3.1.1erdispositifd’apprentissage:lecascliniqueàdéveloppementprogressif

Dès le secondcycle, lesétudiantsenmédecineapprennentà raisonner sur les savoirs

qui sontdispensésà laFaculté (apprentissage formel). Lesexercicesde raisonnement

proposéslorsdesenseignementsdirigésontpourobjectifd’apprendreàraisonnersur

dessavoirsformalisésselonlesrèglesdelalogiquedéductive.Lesétudiantspartentde

différentsélémentsàleurdispositionourecherchésafind’opérerunesynthèsegrâceau

traitement ascendant des données de type «bottom up». C’est un moment fort de

l’apprentissageformel.Larésolutiondescascliniquescomplexesestgénéralementba-

séesurcemodederaisonnementchezlesmédecinsnovices(icilesétudiantsen1rean-

néedeD.E.S.).

Lorsdecetteréunionengroupe,nousavonsrencontréunedémarcheraisonnéeatten-

duebeaucoupplussommaireetlimitéedelapartdesparticipants;cecipeutêtredûà

uneréductiondel’intelligencecollectivedugroupe(définieparlescapacitéscognitives

d'ungrouperésultantdes interactionsmultiplesentresesmembres)299.Cettesortede

restrictionintellectuellepeutêtreégalementconséquenteàlaprésenced’idéesperson-

nelles souventbienarrêtées sur le sujetd’apprentissage, appelébiaisde confirmation

(les participants ont tendance à s’intéresser uniquement aux informations qui confir-

mentleuropinion)età l’absenced’unehétérogénéitédelacompositiondugroupe(ce

sonttousdesInternesdelamêmeFaculté).

Legroupes’estcontentédesolutionsconsensuelles,enrapportavecleurspropresexpé-

riencesetaveccequ’ilsontapprisauparavantdansdesserviceshospitaliersetàlaFa-

culté,maisnetenantpascomptedelaréalitédepratiquemédicaleendehorsdeshôpi-

taux.Certes,troisparticipantsontfaitpartd’undoutesurcertainsdesdiagnosticspos-

sibles.Ilsontfaitpartdeleurintuitionpourrejetercesdiagnosticsenquestion.Maisle

groupearefusécesconvictionsintimes:ilnefautpastenircomptedesopinionsetsen-

timentspersonnelsdesparticipants; ilestnécessairedesecontenteruniquementdes

faits etdespreuvesargumentées.Lesparticipantsà cet exerciceont euuneapproche

trop normativedu problème posé300. Selon Johnson, Johnson et Smith (Cooperative

299Cf.§2.1.4.300Lesmodalités de réflexion pour prendre une décision puis agir ont des valeurs très proches d’un participant àl’autre

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learning,1991,p.34),ilnefautpasconfondreungroupedetravailetunapprentissage

engroupe.L'apprentissageenéquipedépasselanotiondetravaildegroupe.Enintera-

gissant,lesmembresdugroupesontcoresponsablesdelarépartitiondestâchesetdela

convergence des efforts de chacun pour que l’apprentissage soit efficace pour tous.

L’apprentissage coopératif est un processus structuré dont les participants œuvrent

pourunobjectif commundansune totale interdépendance.End’autres termes,un tel

apprentissage nécessite la présence de réciprocités mutuelles entre les participants,

chacuncontribuantàl'apprentissagedesautres.

Grâce aux nombreuses interactions, tous les apprenants sont motivés pour atteindre

correctement l’objectifprévu.C’est leproduitd’untravaild’équipe,bienque laqualité

de ce résultat dépende en partie de la qualité du travail réalisé individuellement par

chaquemembredugroupe.Chaqueparticipantdugroupepeutêtreainsiuneressource

pour lesautres.C’est laraisonpour laquelle lesrésultatsdusous-grouperéflexionsont

différentsde laproductionglobaledugroupeetdusous-groupeaddition.Lesrésultats

de lahiérarchisationproposéepar lesous-grouperéflexionsontplusprochesdecequi

étaitattenduparrapportàcelleproposéepar lesous-groupeaddition.Danscedernier

sous-groupe, il n’y a eu aucune interaction et lesparticipants ontmêmemanifestéun

certainagacementetdefrustrationdevantl’impossibilitéd’interagir.

4.3.2.2edispositifd’apprentissage:legrouped’échangedepratiques

Legrouped’échangedepratiquesapourbutdeconfronterdesavis individuelssur le

sujetàtraiter.Cespointsdevuepeuventêtreconvergentsoudifférents.Danstous les

cas, les échanges interactifs entre participants ont pour but d’infléchir des opinions

prochesouopposéesafind’établirsipossibleunconsensusdestinéàaméliorerlessa-

voirssurlesujetdébattu.Cesopinionsdivergentespeuventêtreparfoissourcedecon-

flit.Lesrivalitéssouventperçuesentrelesdifférentsparticipantsd’unpetitgroupesont-

ellesnécessaires?Dansunpetitgroupe,toutapprenantfondesonsentimentdesécurité

surcegroupe.Prisindividuellement,l’apprenantararementenviedemodifierlestrois

variables suivantes: sespropresnormes, attitudeset valeurs,qui lui apporte satisfac-

tion.Ilexistemêmeunecertainerésistanceàmodifiercestroisentitésquipeuventce-

pendantêtre transforméesgrâceaux interactionsavec lesautresmembresdugroupe.

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Cecidansunbutd’augmenterunsentimentdesécuritéqu’ilpeutpercevoiretressentir

lorsqu’ilestdanscegroupe.Leprincipalobjectifd’ungrouped’apprentissagecoopératif

est de diminuer ces résistances à remettre en question ses propres points de vue.

CommelesouligneRogerMucchielli,

«lesmembresd'ungroupe,lorsqu'ilssontconfrontésobjectivementaveclesdonnéesconcernantleurpropre comportementet seseffets, et lorsqu'ilsparticipentd'unemanièrenondéfensiveàuneréflexioncommunesurcesdonnées,peuventcomplétertrèssignificativementleurformationsurlaconnaissancedesoi,surlesattitudesderéponsedesautresàleurégard,surlecomporte-mentdugroupeetledéveloppementdugroupeetledéveloppementdesgroupesengénéral».

En fin de séance, un tour de table a été réalisé pour connaître l’avis des Internes sur

cetteséance.Cesderniersontétéravisd’avoirpudiscutersuruntelsujetquelaplupart

ontreconnuméconnaîtremalgréunenseignementthéoriquesuivideuxansauparavant.

Cetteséanceaétéefficace,ont-ilsdit,pourmettreàjourleursconnaissancessurcesujet

(il s’agit d’une évaluation d’opinions, donc subjective). Cependant, Gaston Lanneau

(1988,p258)insiste:cetteinfluencedugroupesurlatransformationdenormes,atti-

tudesetvaleursdechaqueparticipantpeutconcernerégalementl’acquisitionetl'inté-

gration des connaissances. Pour cet auteur, travailler en petit groupe favorise

l’acquisitiondesconnaissances.Pourétayercetteaffirmation,Lanneauintroduitdansle

processus d’apprentissage coopératif trois autres variables: l’activité des apprenants

pour la recherche des informations, le processus psychologique de transformation de

l’individu,quiintervientdanslagenèsedesmotivations,etlaperceptiondel'évolution

desnormesdanslegroupe:

« la résistance au changement diminue lorsque la distance psychologique diminue et lorsquel'évolutiondesnormesdugroupeestperceptible».

Legrouped’échangesdepratiquesestunestructurecoopérative:c’estunlieudesou-

tien,debienveillance,oulejugementn’apascours.Dansuntelgroupe,cequisedéroule

entre les participants est nettement plus important que les contenus enseignés. Des

élémentsauxquelsl’internequiaprésentéledossiern’avaitpaspenséontétéprécisés

pard’autresparticipants.Enprincipe,ungrouped’échangedepratiquesnesedéroule

passelonunestructurepédagogiquerigide.Ildoitfavoriserleséchangesd’informations

entrelesdifférentsparticipantsdecegroupe.Maisiln’estpaspossibled’affirmeravec

certitudequecetteactiondugroupevaamenerl’individuàprogresserdanssesidées,à

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modifiersesreprésentationsetacquérirdenouveauxsavoirs.Ainsi,PhilippeMeirieu301

(1997)écrit:

«Lefaitqu'ilyait,dansungroupe,diversesexpériences,effectuéeschacuneparl'undesmembres,n'impliquepasquetousenopèrentpoureux-mêmeslasynthèse,oumêmelesmettentenrelation».

Touteladifficultépourlesenseignantsetlesformateursestdefairelapartentreletra-

vail produit par chacun des participants d’un groupe afin favoriser une production

communeet la formationet/ou l’acquisitiondesavoirsetdecompétencesparchaque

participant. Il ne faut pas confondre logique de production et logique de formation

commel’ontsoulignéJohnson,JohnsonetSmithdansCooperativelearningen1991(cf.§

3.2.6).Danscecas,nousavonsengagélegroupedansunelogiquedeproduction:appor-

terdesélémentsderéponsesauxinterrogationsdel’internequiaprésentéleproblème.

Maisilestdifficiled’affirmerquecettelogiquedeproductionvaamenerchaquepartici-

pantàextrairedusavoirdecequiaétéproduitpar legroupe.Cequipeutamener le

participant d’un groupe à modifier ses opinions et sa façon d’agir, c’est la remise en

questionde ses acquis socioculturels etde ses savoirspar le groupe; cette remise en

question est l’aboutissement d’un conflit sociocognitif avec les autres membres du

groupe.

Laperformancecollective,quiconsisteàavoirnégociédesréponsesafindesatisfaireles

demandes de l’Interne, peut-elle se transformer en bénéfice individuelpour tous les

autres participants ? Certes, le débat a été centré par le vécude chaqueparticipant à

propos de ce problème demaltraitance. Le principal objectif du groupe d’échange de

pratiquesn’estpasdeproduiredesréponses,maisd’acquérirdescompétencesfutures

pourfairefaceàceproblèmesociocultureldifficilepourlesprofessionnelsdesanté.

4.3.3.3edispositifd’apprentissage:lejeuderôle

Danslesquatregroupesétudiés,j’aimodifiéledispositifpédagogiquedujeuderôleafin

quelepartagedeconnaissancessoitleplusefficacepossible.Dansunjeuderôlesimple,

seulslesdeuxacteursetlesdeuxoutroisobservateursdésignésparl’animateurpartici-

301PhilippeMeirieu(1997).Groupesetapprentissages.RevueConnexionsn°68.Disponiblesur:http://www.meirieu.com/ARTICLES/groupesetapprentissages.pdf

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pentactivementau travaildemandé.Lerestedupublicrestesouventdésœuvréetn’a

pastoujoursenviedes’investir.Cettesollicitationdesapprenantspassifspourparticiper

activement à l’élaboration d’un répertoire de connaissances (énumération orale par

brainstormingouécriteparmétaplandenombreuxitems),apermisd’augmentersensi-

blement et d’une façon globale pour tous, l’étenduedes connaissances sur la prise en

charged’unedemanded’amaigrissement. J’aiainsirecueilli tousles itemsproduitspar

lesacteurscommelesparticipantsdanslebutdelesclasserentroiscatégories(indis-

pensablesàdire,àlarigueur,etplusoumoinsutile,nedevraientsurtoutpasêtrepro-

noncé). Cette classificationétait logiqueet adaptée à la séquencepédagogiqueprévue

(obésitéetpsychologie).Maisnousaurionspuégalementordonnancertouscesitemsen

deuxclasses:lessavoirsimplicitesoutacites(ouencore,savoircomment)etlessavoirs

explicites(ousavoirque).

Monobjectifvisaitàcomparerdeuxcatégoriesdeproduction.Uneproductionformali-

sée selon un synopsis bien défini, où les deux acteurs du jeu de rôle pouvaient

s’exprimerchacunenfonctiondesesconnaissancessurlesujet.Touslesdeuxontune

fonction bien déterminée, l’un celui d’une adolescente qui désire un certificat de dis-

pensedesportsetunedemandepourperdredupoids,etl’autreceluid’unmédecinqui

doitêtreà l’écouteetrépondreounepasrépondreauxdésirsde l’adolescente.Lase-

conde catégoriedeproductionétudiée (comparaisonentre cequi a étédit par les ac-

teursetl’ensembledeparticipants,etremiseencausepossibledescatégorisationsanté-

rieures)étaitpluslibre,puisqu’ellen’étaitplusaffectéeparlecarcandujeuderôle.Les

participants avaient la possibilité de s’exprimer sans contrainte sur le sujet proposé,

aveccependantunelimitationdansletempscommepourlejeuderôle.Certes,j’aidé-

montréquelaproductiond’informationsparlesgroupesd’apprenantsaététroissupé-

rieuresenmoyenneauxinformationsdélivréesparlesacteursdesjeuxderôle.Maisil

m’aétéimpossibledediresilerecueildecessavoirssupplémentairesétaitdel’ordredu

formeloudunonformel

Cejeuderôle«amendé»quenousavonsproposéaétéconçuselonunesuccessionde

phase d’actions et de réflexions, chaque phase faisant appel à des contextes

d’apprentissages formels,non formels et informels. La séquenced’apprentissagea été

formalisée (les apprenants disposaient d’un programme détaillé donnant des indica-

tionssurledispositifpédagogiqueutiliséetlesobjectifsdecetteséquence.Ils’agitbien

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d’un apprentissage formel.Mais que ce soit lorsdubrainstormingoudumétaplan®,

lorsde la comparaisonde laproduction acteurs/participants et lorsdes tentativesde

catégorisations des items proposés, le débat était totalement ouvert, certains faisant

partd’expériencesvécues,d’autresde connaissancesassez spécifiques connuesd’eux-

mêmes, le tout dans un brouhaha pédagogique généralement assez bienmaitrisé par

l’animateur.Celaainfluésurlesrésultatsdescatégorisationsquiétaientdifférentesd’un

groupeà l’autre. Il estpossiblealorsdeparlerd’apprentissagenon formelet informel

inclus dans une séquence pédagogique formelle. Chacun des participants disposait de

savoirs,attitudesethabilitésacquistoutaulongdeleurviesocialeentrantdanslacaté-

goriedel’informel.

Lescontextesdanslesquelslesformationsproposéessurl’obésitéinfantileontétéeffec-

tuéessonthétérogènes,avecdeslimitesfloues,appartenantaussibienàuncadreuni-

versitaire/institutionnelqu’àuncadresocioprofessionnel.Lesinstructionsbienstruc-

turéesontlaissécependantlapossibilitéauxparticipantsdes’exprimerlibrement.Ces

paroles libres, leplussouventenrelationavec le thèmeproposé,ont favoriséchez les

participants lapriseencomptedenouvellesdonnéesprononcées lorsdesdiscussions.

Ilsontalorslechoixd’intégrercesnouvellesinformationsdansleursschèmesd’action

lorsqu’ilsrencontrerontdenouvellessituationsconcernantl’obésitéinfantileoumême

d’autressituationsrelativesàunerelationmédecin-patientdifficile.Lorsdesdifférentes

séquencesdu jeude rôleoù lesparticipantsdevaient catégoriser les itemsaffichésau

tableau,nousavons remarquéqued’ungroupeà l’autre, ces catégorisationsn’ontpas

toujours été identiques, notamment entre ce qui est indispensable de dire et pouvant

êtreditàlarigueur.Ilestcertainementnécessairedeprendreencomptelesinfluences

dechacunsur lesautresmembresdugroupe,notammentsur leursmanièresd’agiret

d’être.Eneffet, lesconclusionsdecescatégorisationsrésultaientplusd’uncompromis

d’unemajoritédesparticipantsqued’unconsensusunanime.

Danscedispositifd’apprentissage, lesparticipantsont surtoutétémisen situationde

faire:simulerunentretienentreunmédecinetuneadolescenteets’exprimersurcequi

estbonàdireounon.L’expertacommentéleschoixdesapprenantsenproposantdes

moyens d’agir; notamment en recommandant en fin de séquence et sous forme d’un

court exposé, des interventions efficaces et acceptables par l’adolescente. Cette trans-

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missiondesavoirs,d’aptitudesetd’attitudesn’estguèreévidente,car lespropositions

de l’expert comportentunepart certained’implicite. Les apprenantsont agi dansune

situation qui n’était pas totalement figée, car l’action et la situation sont interdépen-

dantes. Les apprenants doivent s’engager dans l’action pour mobiliser leurs connais-

sances et agir sur la situation. À chaque séance, le déroulement de l’action

d’apprentissage,bienqueformalisé,n’apasétéidentique,carilexisteuncouplageentre

l’actionetlasituation.Lesparticipantsàcesdifférentesséquencesd’apprentissagepeu-

ventavoirdesidées,desopinions,desintérêtspoursonexerciceetdespréoccupations

différentesquivontagirà la foissur lasituationetsur l’actionmalgréunpartage fré-

quentdessignificationsentrelesmembresd’unmêmegroupe.L’actionagitsurlasitua-

tion et réciproquement. Le collectif agit sur l’individuel, mais le système cognitif de

chaque individu, construit à partir de données provenant d’apprentissage informel et

formel,agitsurleconflitsocioconstructiviste,doncsurlegroupe.

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Conclusiongénérale

«Lesactionshumainesapparaissentcommeunesuitedeséquencesoùlespersonnesenga-géesdansdesmomentssuccessifsdoiventmobiliserenellesdescompétencesdiversespourréaliser,aufuretàmesuredesrencontresaveclescirconstances,uneadéquationàlasitua-tionprésente.Unsavoircommunseconstruitprogressivementàpartirdesavoirspluriels».

NicolasDodier(1991)

«Commentfaireémergercequiestimmergé»?GillesBrougère(2007,p.7)

«Dèslors,onpeutseposerlaquestiondesavoirsilesdistinctionsformelles/informelles/nonformel,tellesquelles,employéesdemanièregénérale,sontasseznuancéespourcapterlacomplexitédesformesdel’éducationets’ilnefallaitpas,inventerdenouvellesfigures».

CléopatreMantandon(2003)p.232

Les trois dispositifs pédagogiques que nous avons éprouvés avaient pour objectif

d’amenerlesparticipantsàapprendreensemble,àpartagerleursconnaissancesetleurs

expertisesafind’acquérirdenouvellescompétencesouaméliorercellesexistantes.Cette

notion de partage est essentielle : elle permet de bénéficier, grâce aux nombreux

échangesquiontlieupendantlasession,deconseilsetd’avisutilesàleurexercicepro-

fessionnel;quecesderniersproviennentdel’expertoud’apprenantsparfoisplusexpé-

rimentéssurlesujet.Touslesparticipantspeuventpartagerainsileursidées,maistous

peuventêtreégalemententendus.Cepartagecontribueainsiàcréerunclimatdecon-

fiancedanslegroupe.Lebutprincipaldecestroisséquencespédagogiquesn’étaitpas

decréerunrapportformaliséenfindesession,maisdeproduirecollectivementdessa-

voirs, parfois de nouvelles solutions que les participants pourront utiliser immédiate-

ment.

Rappelonsnotrequestionderecherchequiavaitété libelléeainsi:quellesimplications

peuventavoirlesexpériencesprofessionnelles,laviequotidienne,leséchangesentrepairs,

enfin, tout ce qui peut correspondre à des ressources pédagogiques dites «informelles»

dansl’améliorationdescompétencesprofessionnellesdesétudiantsenmédecineetdesmé-

decins?Nous en avions déduit l’hypothèse suivante: dans toutapprentissage, il yadu

formeletdel’informel.Etcetinformelpourraitêtrerepérédansundispositifpédagogique

detypecoopératif,expérientieletréflexif.

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Continuellementencontactavecunemultituded’informations, tous les individussont

capablesd’accumulerdenombreuxsavoirstoutaulongdeleurvie.Certainsdecessa-

voirssontacquisnaturellement,enl’absenced’apprentissage:cesontlessavoirsinfor-

mels,quipeuventconcernertous lesdomainesde laconnaissance.Cessavoirsne font

pas toujours l’objet d’une reconnaissance et sont rarement suffisants pour obtenir un

diplômeprofessionneldansdenombreusesdisciplines.D’autressavoirssontenseignés

dansdesétablissementsscolairesetsupérieursselondescontenusbiendéfinispardes

finalitésetdesobjectifsgénérauxde formation.Ainsi,pourdevenirmédecins, lesétu-

diants doivent suivre pendant de nombreuses années un apprentissage structuré à

l’universitéoùilspourrontaccumulerets’approprierdessavoirsthéorisésbiendéfinis,

nécessaires pour leur exercice professionnel et pour l’obtention d’un diplôme. Un tel

cycled’apprentissageestévaluérégulièrementpendantetàlafindeleursétudesafinde

garantirlaqualitédudiplôme.Aucoursdecesséquencesd’apprentissagesformalisées,

les apprenants ont la possibilité d’être en contact avec des informations non prévues

danslesprogrammes,maisayantunlienaveclaformation:cesontlessavoirsnonfor-

mels.Detelssavoirssontnonvisiblespuisquenonreconnusdanslesobjectifs,etdonc

nonévaluables.Pourtant,ilsaidentcertainementàvaloriserlesacquisd’apprentissages

réalisésdansuncontexteformelgrâceàunprocessusdetransformationdel’individu.

Activerchezlesapprenantsunprocessusdetransformationdel’ordrecognitifnécessite,

pour les responsables d’un apprentissage, d’accompagner ces apprenants dans leurs

quêtesdesavoirsetdeconcepts,d’agirsur leurscapacitésàfaireetdefavoriser leurs

réflexions; ceci afin qu’ils puissent combiner de nouveaux savoirs avec des connais-

sancesdéjàmémoriséesdanslebutdeconstruiredenouvellesreprésentationslorsque

ces apprenants devront faire face à de nouvelles situations. Cette transformation

s’effectue selonun filtre cognitif, un cadrede référencepropreà chaqueêtrehumain,

composé de présupposés, de jugement de valeur, de normes, de stéréotypes et

d’habitudes.Cecadrederéférenceorienteleschoixdel’apprenantpourdonnerdenou-

veauxsens,pouroctroyerdenouvellessignificationsetaccorderdenouvellesconsidé-

rationsauxdifférentssavoirsetconceptsformuléspendantlaséquenced’apprentissage.

Ceprocessusdetransformationnécessiteégalementdefaireappelàlaréflexion.Carles

nouvelles interprétations peuvent parfois devenir problématiques ou inappropriées,

entraînant un conflit cognitif chez l’individu qui peut rejeter l’apprentissage qui vient

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d’êtreeffectué.Grâceàunprocessusderéflexioncritique,l’apprenantpeutainsimodi-

fier ses croyanceset ses supposéset admettredenouveaux savoirs et concepts.Nous

avionssupposéqueceprocessusdetransformationaffectaittouslesnouveauxsavoirs

etconceptsacquislorsdeséquencesd’apprentissageformel,nonformeletinformel.

Existe-t-il, comme l’aécritGillesBrougère (2007,p.8)unmythede l’apprentissage in-

formelquipourraitavoirdeseffetssurl’éducationformelle?Pournotrepart,nouspen-

sons comme les auteurs qui ont publiés sur ce sujet que la distinction entre ces trois

modesd’apprentissagesformels,informelsetnonformelsestsurtoutthéorique.Elleest

notammentfonctiondeslieuxetdesmomentsoùcesapprentissagesontétédispensés.

Ilexisteenréalitéunvéritablecontinuumentrecesdifférentsapprentissagesqui font

tousappelàdescompétencescognitives.J’airelatéladiscussionentredeuxInternesde

médecinegénérale,un Internedeneurologieetmoi-mêmedansmoncabinetmédical,

quiadonnélieuàunenouvelleproductiondeconnaissances(note190p.184).Quelle

qualificationest-ilpossiblededonneràcetapprentissage?Est-ildel’ordredunonfor-

mel,del’informeloumêmeduformel?Pournotrepart,nousl’aurionsqualifiédenon

formel,carlecontenun’étaitnidéfininimêmeprévu,l’apprentissageayanteulieuchez

unmaîtredestageuniversitaire;ladiscussionsurcesujetadébutélorsqu’unedemes

Internesm’avaitdemandédesnouvellesd’unenfant.Maiscette interprétationperson-

nellepeutêtrepolémique.Parcontre,nouspouvonscertainementproposerlaréponse

suivante:cetapprentissageapermisl’acquisitiondenouvellesconnaissances.Cesder-

nièresontcontribuéà latransformationdesopinionsdechacundesprotagonistessur

unproblèmedesantéinconnu.Qu’importelaqualificationdecetapprentissageenfor-

mel,informeletnonformel.

Eneffet,uneséquenced’apprentissageréaliséesurlelieud’unexercicemédicalestaus-

sipertinentequesiellealieusurlesbancsdelaFacultéoulorsd’unstaffàl’hôpital.Une

séquenced’apprentissageformelproduit-elleuniquementdessavoirsformels?Laques-

tionmérited’êtreposéeégalementpour les apprentissagesnon formelsou informels.

Pournotrepart,nousestimonsquecestroistypesd’apprentissagesontproduitdessa-

voirsformels,nonformelsetinformelsquivontinteragirsurlatransformationd’unin-

dividuetmodifiersespratiquesprofessionnelles.Ainsi,dans ledispositifpédagogique

du jeuderôle, ilest impossibledeprouverque lesurplusd’informationsdégagéde la

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comparaisonentrelaproductionbinairedesdeuxacteursetcelledel’ensembledespar-

ticipants(productioncollective)aitpuaméliorerlapratiquedesapprenants.Jemesuis

retrouvéenfacededeuxdifficultésquejen’avaispasprisesencomptedansleprojetde

recherche:

• faire ladistinctionentresavoirs formels, informelsetnon formelsdansunesé-

quenced’apprentissageformaliséeétaitunetâcheutopique.

• Iln’apasétéprévud’effectueruneévaluationàdistance,notammentsousforme

d’un audit afin d’évaluer d’éventuelles modifications de pratiques des partici-

pants aux différents apprentissages proposés. (Cela pourrait faire l’objet d’un

autretravailderecherche).

Ilexiste,danschacundesdispositifsd’apprentissageséprouvés,etentenantcomptedes

cadres de références et des connaissances propres à chaque participant, des savoirs

formelset informels.Ces savoirsont contribuédans leurglobalitéà la transformation

des apprenants. Cependant, la distinction entre ces deuxmodes d’apprentissages for-

mels,informelsestsurtoutthéorique.Elleestnotammentfonctiondeslieuxetdesmo-

ments où ces apprentissages ont été dispensés. Il existe en réalité un véritable conti-

nuumentrecesdifférentsapprentissagesquifonttousappelàdescompétencescogni-

tives.Ilyaprobablementunentrelacementconstantentreleformeletl’informel.Dans

ladynamiquedel’apprentissage,lessavoirsinformelsetnonformelssesontprobable-

ment transformésensavoirs formels.Cette transformationauraitpuêtremiseenévi-

denceparuneévaluationàdistancecommeunaudit,évaluationquin’apasétéprévue

dansnotrecas.Mais l’apprenantpeutégalementprendreconsciencedecettetransfor-

mationenébauchantunephaseréflexive.Cettephasederéflexioncollectiveaétéfavo-

riséelorsdudébriefingdujeuderôleet lorsdudébatquiasuivi.L’idéalauraitétéde

proposerunephaseréflexiveauniveau individuel,selonune interactiondualeetréci-

proqueentredeuxparticipants.Nousn’avionsàaucunmomentpenséàajouterunetelle

phasederéflexionànotreséquenced’apprentissage.

Ces troisdispositifsd’apprentissagepossèdent tousuncaractèresituéetcontextuelet

unedimensiontaciteetimplicitelesrendantdifficilesàcirconscrirepourcequiestde

l’ordreduformel,nonformelouinformel.Cesapprentissagessontcependantisolésdes

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contextes réels de la pratique médicale avec les évènements perturbateurs habituels

(téléphone,secrétaire,enfantsturbulents,etc.,),lesproblèmesàrésoudrequotidiens,les

habitudesdumédecinetdespatients,etc.Cependant,misàpartlecascliniqueàdéve-

loppement progressif, tous les membres des groupes d’apprentissage (groupes

d’échangedepratiquesetdejeuderôle)ontparticipéactivementàlaréflexionetàla

production.SandraCoulombe(2012,p.50)abienprécisé:

«La nature sociale de l’individu, sa capacité à s’engager de manière dynamique, son désird’efficienceetdecompréhensiondelasituationdetravailpermettentdegénérerdesapprentis-sagesliésàcettesituation».

Lebutdetoutapprentissageestd’apprendre,c’est-à-dires’approprierdessavoirspour

essayerdedevenirautonomeetinteragirefficacementavecsonenvironnement.Suivre

unapprentissage,c’est,pourunapprenant,agirpourproduireetconstruiredessavoirs

afind’accroitresescompétenceset/oud’intégrerdenouvellesconnaissancesutilisables

dansd’autressituations ;c’estaussi interagirenéchangeant,encoopérantetenréflé-

chissant avec d’autres apprenants; c’est encoredévelopperune réflexioncritique pour

évaluer ses propres progrès dans l’acquisitionde compétences et en faire profiter les

autresparticipants;c’estenfintransformerlesconnaissancesacquisesdansunbutper-

sonnelafindeprogresseretd’évoluer.L’apprentissagecomportemental,modèlepéda-

gogiqueprédominantdansunegrandepartieduvingtièmesiècle,n’apasétécapablede

proposerunesolutionconvenablepourréaliseridéalementcesquatreprocessus:agir,

interagir,réfléchirettransformer;etceciàl’opposédel’approchecognitivequiconsti-

tueunebaseappropriéeetautoadaptablepourletraitementdesinformationsqu’elles

soientdenaturescognitiveset/ouaffectives.L’apprentissagecognitifestliéauconcept

dereprésentationetàl’organisationpermanentedesconnaissances;ilapourprincipal

objectifd’éduquerl’intelligencehumaine,soitparaction,soitparmédiation,avecl’aide

de processusmentauxmétacognitifs utilisés pour construire un répertoire ad hoc de

connaissances procédurales, déclaratives et conditionnelles. Grâce au concept de

l’approcheréflexivequicomplètelapédagogiecognitive,l’apprenantpeutprendrecons-

ciencedesespropresprocessusmétacognitifs;cesdernierssontnotammentaffectésau

contrôledesstratégiescognitivesauxquellesa faitappel l’apprenantpour l’aideràré-

pondre efficacement à lamajorité des problèmes rencontrés dans sa vie socioprofes-

sionnelle.

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L’expérienceest,pourdenombreuxpédagogues,unpointdedépartnécessairepourla

majoritédesapprentissages.Seréfèrent-ilsàlathéoriedel’empirismedontundesprin-

cipaux représentants, John Locke302, affirmait l'expérience comme un fondement de

touteslesconnaissances.Cettethéorie,critiquéeparKant303,peutnousameneràdouter

de nos choix pédagogiques: l’expérience est-elle toujours la base de nos apprentis-

sages?Ceschoixdoiventêtremodulésenfonctiondesfinalitéséducatives.Deceschoix

découlent les pratiques éducatives, et donc la sélection de techniques pédagogiques

adaptées.

Sil’expérienceestcertainementunebased’apprentissage,lesfaitsdéduitsetsurtoutles

lois induitesparcesexpériencesnesontpastoujourssourcedevérité. Ilest indispen-

sabledeprogrammer,àlasuited’uneexpérience,uneactionréflexivepourrétablirune

valeurdevéritéplusadaptéeauxcirconstances.Cetteactionderéflexionpeutsedérou-

ler ainsi sous forme d’un entretien d’explicitation avec une personnalité plus experte

dansledomaineconsidéré,commeuntuteur.C’estlechoixdesenseignantsenmédecine

généraleenFrance.Lecycledeprofessionnalisationproposéauxétudiantsdu3ecycle

desdifférentesspécialitésmédicalesapourbutdeconstruiredescompétences.Entrer

danscecyclesignifiequel’étudiantdisposed’unsavoiracadémiquesuffisantpourexer-

cerlaprofessionmédicaledanssaspécialitéaprèsavoirpasséunexamenclassantvali-

dant (ECN)304. Il est en situationde responsabilité (décisions et soins)dès son entrée

danscecycle,notammentaveclaprisedegardelanuit.Cecycledeprofessionnalisation

estuntempsd’acquisitiond’unsavoirpratique(plusdu4/5èmedutempsestconsacré

auxstagesenmilieuhospitalieroulibéraldanslaspécialitémédecinegénérale).Lesa-

voir académique est toujours présent,mais n’est plus prégnant. Pour êtremédecin, a

écritPhilippePerrenoud(1999b),

«ilnesuffitpasd’avoirassimiléunensembledesavoirsdéclaratifs,procédurauxouconditionnels,delesavoirentêteoud’êtrecapabledelesretrouverrapidement.Ilfautencorelesconnecterau

302L'expérienceestlefondementdetoutesnosconnaissances,etc'estdelàqu'ellestirentleurpremièreorigine.Lesobservationsquenousfaisonssur lesobjetsextérieursetsensibles,ousur lesopérationsintérieuresdenotreâme,quenous apercevons et sur lesquellesnous réfléchissonsnous-mêmes, fournissent ànotre esprit lesmatériauxdetoutessespensées-JohnLocke(1690).Essaisurl'entendementhumain.303«Sitoutnotreconnaissancedébuteavecl’expérience,celaneprouvepasqu’elledérivetoutedel’expérience,carilsepourraitbienquemêmenotreconnaissanceparexpériencefutuncomposédecequenousrecevonsdesimpres-sionssensiblesetdecequenotrepouvoirdeconnaître…produitluimême»Kant,PréfacedelaCritiquedelaRaisonpure.304EpreuvesClassantesNationalesquipermettentauxétudiantsayantvalidéleursecondcycle,dechoisirunespécia-litémédicaleouchirurgicaleenfonctiondeleurrangdeclassement.

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tableaucliniqueettranchertouslesdilemmesqueproposenttantl’interprétationdessymptômesquelechoixd’unestratégiethérapeutique».

Enadoptantuncomportementréflexifnotammentsurdessituationsdifficiles,maliden-

tifiées,lepraticienvautilisersessavoirs;maissurtoutilvaallerau-delàdecessavoirs

académiquesafind’agirefficacement.Celapermet,comme lesignalentMichelCarnon-

neau et Jean-Claude Hétu (2001, p. 79), d’obtenir un savoir «issu de la réflexion sur

l’action de laquelle sont dégagés lois et principes, donc savoir étroitement associé à

l’intervention». Ces deux auteurs précisent: «L’expertise professionnelle n’est pas

l’additiond’uneéruditionspécifiqueetd’uneintelligencegénérale»;lesformationsdis-

penséesdans le3e cycleontpourobjectifdeconstruireuneintelligenceprofessionnelle

spécifique.

L’apprentissagenécessitedelapartdel’apprenantunengagementactifpourlemenerà

bien.Meneràbienunapprentissagenécessiteun traitementenplusieursétapes:dis-

crimination, assimilation, traitement et transformationdes informations. Leprocessus

transformateur est l’élément essentiel de la réussite d’un apprentissage. Lorsque

l’apprentissage est coopératif, c’est-à-dire avec une participation active d’un groupe

d’apprenants,lesdifférencesindividuellesdechaqueparticipantàcegroupeconcourent

àlarichessedesinteractions,desréflexionsetduprocessusdetransformationdecha-

cun.C’estpourcetteraisonquenousavonsinsistésurcemodecoopératif.Lelecteura

puêtresurprisdenepasretrouverdansletextedelathèsedeuxélémentsimportants

de lapédagogiecognitive: lamémoireet l’attention.Nousn’avonspasécartédenotre

travaillesdifférentsprocessusdemémorisationetleurimplicationdansl’apprentissage.

Lamémoireestunélémentobligatoirepourtoutapprentissagequecesoitpourlamodi-

ficationdes représentationsde l’apprenant, la réactivationd’informationsmémorisées

cognitives,affectivesetmétacognitivesafindelesutiliserdansdenouvellessituations,

oupourmémoriser lesnouvelles informationsobtenuespar l’apprentissage. Carnous

noussommessurtoutintéressésaumoded’acquisitiondessavoirsselonlaqualification

delaséquenced’apprentissageenformel,nonformelouinformel.

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Faut-ilabandonnerladichotomieapprentissageformel–apprentissageinformel?

Pouvons-nousencorenousréféreràcettedistinctionentreformel,nonformeletinfor-

meloubienabandonnercettevoiecommeleproposeCléopatreMontandonetproposer

unenouvelleclassificationdesapprentissages?

LeCEDEFOPdanssontétatdes lieuxpubliésen2007àproposde l’apprentissagenon

formel et informel en Europe insistait pourmaintenir cette catégorisation en formel,

nonformeletinformeldansl’objectifdelavalidationdesacquis.Cependant,cettecaté-

gorisationestmaldéfinieetfloue.Lesapprentissagesnonformelset informelscorres-

pondent à des réalités non formalisées, invisibles, car sous la ligne de flottaison de

l’icebergde l’apprentissage.Toughévaluait les savoirs informels à70%de la totalité

desconnaissancesacquisesparunindividu.Mais l’informelrépondàunfoisonnement

dedéfinitions: apprentissages accidentels, intentionnels, fortuits, incidents, implicites,

expérientiels, autodirigés, autonomes, entre pairs, non formels, apprentissage par

l’action(CristoletMuller,2013,p.15).

BrougèreetBezille(2007),citantPoizat(2003),insistent: Dèsquel’onaffineleregard,onperçoitunesituationcomplexequinepermetpasd’isoleraussisimplementapprentissagesinformelsetformels.Ilestsansdouteimpossibledemettreunefron-tièrelàoùils’agitd’uncontinuum,d’unevariétédeformes,d’unediversitédontladistinctionma-ladroiteentreformel,nonformeletinformelessaiederendrecompte.

Poursuivredanscettevoiecesdifférentesdénominationsestpluslefaitdenosgouver-

nants qui font de la validationdes acquis tout au longde la vie unepriorité. C’est un

choixpolitique fermed’ouvrirà laqualificationetparfoisde lacertificationàdesper-

sonnesquin’ontpubénéficierd’unenseignementinstitutionnel.D’autresfacteurssont

également pris en compte pour garder l’appellation informelle, notamment facteurs

économiques, sociaux et démographiques. Montandon (2003, p. 234) souligne que la

dichotomieformelle–informellen’apporteriendesignificatifactuellement.Lescritères

définissantcesdeuxtypesd’apprentissagesnesontpastoujourspertinentsetlapolari-

sationdecesdeux formesn’estguère satisfaisante: «elles sontbiensouventutilisées

aujourd’huiparconventionou idéologieplutôtqueparconviction théoriqueouutilité

empirique (p. 238). Montandon insiste davantage sur la façon dont ces deux formes

s’interagissentousecombinentenfonctiondessituationsd’apprentissage.

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En nous inspirant de l’analyse de Cléopatre Montandon (dans Maulini et Montandon, 2005,

pp. 223-43), nousprésentonsunenouvellecatégorisationdesapprentissages,dévelop-

pée surplusieurs axes: deux axeshorizontaux, l’un appelé «degrédestructurationde

l’apprentissage», lui-mêmesubdiviséenquatreprincipesexclusifs:structurationaléa-

toireouflexibleourèglementéeourigide;l’autredénommé«contexted’apprentissage,

partagéendeuxconceptualisationde l’apprentissage:cequirelèvede l’informeletce

qui est lié au formel.Cet axepermetd’êtrebeaucoupplusprécisdans lesdimensions

d’apprentissage que l’axe informel – formel. Ces deux axes horizontaux (contextes

d’étudeetapprentissage informel– formel),combinésàdeuxaxesverticaux(pratique

versus théoriqueetqualificationversuscertification)mènentà ladéfinitiondequatre

dimensionsd’apprentissages:(cf.figure22).

1. Au concept dudegréde l’étudealéatoire correspond lespossibilitésd’apprendreen

dehors des institutions universitaires susceptibles d’enrichir ou de développer des

connaissances et/ou des compétences. Par exemple, en regardant unmagazine de

santéàlatélévision.Essentiellementpratique,c’estunedimensionpédagogiquepos-

siblepouruneéventuellequalification.

2. Ledegréd’étudeflexibleestplusthéorique;ilestcentrésurl’apprentissageparauto-

formation.C’est leconceptd'autodidaxie(Bézille2002,2003,2008),quipermetde

se former à son rythme à travers l'exploitation de ressources spécifiques ou non.

Cettedimensiond’apprentissageestunélémentdelacertification.Cesdeuxdegréde

structurationdel’apprentissagealéatoiresetflexiblespeuventêtreassociésàunap-

prentissageplutôtinformel.

3. Letroisièmedegréproposéestundegréd’apprentissageréglementé,axésurlapra-

tique,quienglobenotammentledéveloppementpersonnelcontinu.C’estundispositif

indispensablepouraméliorer lapriseenchargedespatientsetpouraccompagner

lesévolutionsdusystèmedesanté. Ilaboutitégalementà laqualificationd’unpro-

fessionneldesanté.

4. Enfinlequatrièmedegréd’apprentissageestditrigide.Lescontenusdecettedimen-

siond’apprentissagesonttotalementdéterminésparlesinstitutions(Ministèredela

Santé,EducationNationale et corpsprofessoraluniversitaire)pour exercer lapro-

fessiondemédecin.Ce contexte, essentiellement théorique correspondà la forma-

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tionmédicale initiale et estnécessairepourcertifier le professionnelde santé. Le

troisièmeet lequatrièmecontextepeuventêtreassociésàunapprentissageplutôt

formelselonleschémasuivant:

Figure 19 : proposition pour une nouvelle classification des apprentissages dans le cadre de la formation des professionnels de santé.

Maisceschéma,s’ilestréellementintéressantsurleplanconceptueldel’apprentissage,

ne répond pas à la question suivante : la complémentarité des acquis informels, non

formelsetinformelsdansl’apprentissagedelamédecine.Laconceptiondeladiversité

desapprentissagesdeCléopatreMontandonselonleurcontexten’estpassuffisamment

adaptéepourvalidernotrehypothèse.Bienaucontraire,cetteconceptionfaitpencher

totalementlabalanceducôtédesapprentissagesformelspuisquelejeuderôleappar-

tientaucontexted’étuderéglementéinstitutionnel(formationmédicaleinitialeetconti-

nue). Lesdeuxautresdispositifspédagogiques se sontdéroulés à laFaculté (contexte

d’apprentissagerigide).Cependant,DanielSchugurensky(2007,p.14)abienpréciséla

définitiondel’apprentissageinformel:

«Onentendcommunémentparapprentissageinformeltoutapprentissageacquisendehorsdesorganismeséducatifsofficielsounonofficiels».

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Pourconclurenotreproposdefaçonpluspersonnelle,nousconsidéronsque:«latransmissiondusavoirnedoitpasêtreconsidéréecommeunefontaineremplissantunvase.Unetêtebienfaiteestunetêtebienpleine,maisquisaitaussiremettreencausecequ’onluiaen-seigné. Assimilation de connaissances, certes,mais assimilation critique par l’apprentissage dudébatetlaprisederesponsabilités305».

C’estpeut-êtreàceniveaudel’assimilationcritiquequelesapprentissagesinformelset

nonformelsonttouteleurplace.Laformationmédicaleinitialen’estpasprobablement

suffisantepour formerunprofessionnel compétent.Lapratiqued’unexercicemédical

constant,renforcéparuneformationmédicalecontinuerégulièrevaaméliorerlescom-

pétencesduprofessionneldesanté.Etlà, ilestpossibled’énoncer,commeGillesBrou-

gère(2007,p.8)que«l’éducationformelleseconstruit,aumoinsenpartie,surfondde

formalisationdel’informel.»Pourparaphrasercetauteur,unlieud’exercicemédicalest

l’objetd’unjeucroiséentreleformeletl’informel.Sil’apprentissageformelgardetoute

sonimportancedanslaformationetlemaintiendescompétencesdesprofessionnelsde

santé,ilnepeutassureràluiseulcettetâchedifficile.Pourcetteraison,etennousinspi-

rantdeGillesBrougère(2007,p.8),lesmédecinsauronttoujourstendance«àformali-

ser,pours’assurerdeleurprésence, lesapprentissagesinformelsquiapparaissent im-

portants».

305GRETRYStéphane,RENAVILLEBenjamin-Discoursdesco-présidentsdelafédérationdesétudiants-UniversitédeLiège1998

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TOUGHAllen.(1999).ReflectionsontheStudyofAdultLearning.Abrieftalkatthe3rdNewApproachestoLifelongLearning(NALL)Conference.WorkingPaperNo. 8,University ofToronto :Ontario Institute forStudiesinEducation.13p.Disponiblesur:https://tspace.library.utoronto.ca/retrieve/4449/08reflections.pdf

TOUGH Allen. (2002). The Iceberg of Informal Learning. NALL- New Approaches to Lifelong Learning,WorkingPapern°49.UniversityofToronto:OntarioInstituteforStudiesinEducation.7p.Disponiblesur:http://nall.oise.utoronto.ca/res/49AllenTough.pdfUNIONEUROPEENNE(2007).Lescompétencescléspourl’éducationetlaformationtoutaulongdelavie-Uncadrederéférenceeuropéen.Cadrederéférenceeuropéenconstituentl’annexed’unerecommanda-tionduParlementeuropéenetduConseildu18décembre2006surlescompétencescléspourl’éducationetlaformationtoutaulongdelavie.Journalofficieldel’UnionEuropéenne,L394,12p.http://afip.velay.greta.fr/sites/default/files/keycomp_fr.pdfVanRENS,J.(2005).Preface.InCEDEFOP,COLADRYND.,BJØRNÅVOLDJ.Thelearningcontinuity:Euro-peaninventoryonvalidatingnon-formalandinformallearning.Luxembourg:PublicationsOffice,161p.Disponiblesur:www.cedefop.europa.eu/files/5164_en.pdfVONHIPPELEric(1994).StickyInformationandtheLocusofProblemSolving:ImplicationsforInnova-tion.ManagementScience,40,pp.429-439.Disponiblesur:http://web.mit.edu/people/evhippel/papers/stickyinfo.pdfWEIL-BARAISA.,RESTA-SCHWEITZERM.(2008).Approchecognitiveetdéveloppementalede lamédia-tionencontexted’enseignementapprentissage.Lanouvellerevuedel’adaptationetdelascolarisation,42,pp.83-98.Disponiblesur:http://laboutique.inshea.fr/site/Nras/n42/Weil_Barais.pdfWIHAKCh.,HALLG.(2011).L’apprentissageinformelliéautravail,rechercheetpratiquedanslecontextecanadien.RapportpourleConseilcanadiensurl’apprentissageetleCentredusavoirsurl’apprentissage.Ottawa,Centrepourlescompétencesenmilieudutravail,56p.Disponiblesur:www.workplaceskills.ca/download.php?id=46

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Listedesabréviationsutilisées

AMA : American Medical Association ANF : Apprentissage Non Formel APC : Approche Par Compétence B.D.E. : Bureau pour le développement de l’éducation C.H.U. : Centres Hospitaliers Universitaires CdP : Communauté de Pratique (CoP en anglais) CME : Continuing Medical Education CNGE : Collège National des Généralistes Enseignants D.E.S. : Diplôme d’Étude Spécialisé D.F.A.S.M. Diplôme de Formation Approfondie en Sciences Médicales D.F.G.S.M. Diplôme de Formation Générale en Sciences Médicales DPC : Développement Professionnel Continu ECG : Electrocardiogramme EPU : Enseignement Post Universitaire FMC : Formation Médicale Continue FPC : Formation Professionnelle Continue HAD : Hospitalisation à domicile MCAT : Medical College Admission Test MCT : Mémoire à Court Terme MLT : Mémoire à Long Terme OMS : Organisation Mondiale de la Santé (WHO en anglais) P.E.I. : Programme d'Enrichissement Instrumental) PMI : Protection Maternelle infantile PPM : Pédagogie Par Maîtrise PPO : Pédagogie Par Objectifs QCM : Questions à Choix Multiples SASPAS : Stage Ambulatoire en Soins Primaires en Autonomie Supervisée SFMG : Société Française de Médecine générale SMB : Société Médicale Balint UNAFORMEC : Union Nationale des Associations de FORmation MEdicale Continue USMLE : United States Medical Licensing Examination

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Listedesfigures

Figure1:leprocessusd'apprentissageselonlaPPO_____________________________________________________________26Figure2:rapportentreunetâcheprofessionnelleetunobjectifspécifique____________________________________28Figure3:relationsentreniveauxtaxonomiquesetdispositifsd'évaluation____________________________________34Figure4:l'approcheréflexivelinéaireselonJohnDewey______________________________________________________107Figure5:lecycleréflexifdeKurtLewin_________________________________________________________________________108Figure6:lecycled'apprentissageréflexifdeDavidKolb______________________________________________________113Figure7:Lecycled'apprentissageréflexifdeGrahamGibbs(1988,pp.49–50) ____________________________121Figure8:Lesglissementsdessavoirsformelsverslessavoirsinformelsetvice-versa_______________________188Figure9:les3formesd'apprentissagesinformelsdeSchugurensky__________________________________________203Figure10:les4partiesdumodèled'apprentissageinformelselonElisabethNebbet(p.27)._______________204Figure11:apprentissageformelversusapprentissagenonformel.___________________________________________205Figure12:Hiérarchisationdesdiagnosticsproposés__________________________________________________________229Figure13:comparaisonentrelesproductionsdesacteurs____________________________________________________252Figure14:comparaisonentrelesproductionsdesacteurs____________________________________________________254Figure15:Tableaucomparatifdesindicateursmisàladispositiondesobservateursetlesréponsesde

l’acteurmédecinetdesparticipants_____________________________________________________________________________267Figure16:larésolutiond'unetâchecomplexeselonuneapprocheconstructiviste__________________________298Figure17:del'informelauformelselonletyped'apprentissage_____________________________________________301Figure18:schémaduraisonnementmédical___________________________________________________________________306Figure19:propositionpourunenouvelleclassificationdesapprentissagesdanslecadredelaformationdes

professionnelsdesanté.__________________________________________________________________________________________331

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Tabledesauteurs

AAbernot,65Aborn,204Abrahamson,20,23,47,96Abric,140,141Adam,173Ailincai,215Alamargot,304Alheit,300Allal,75,175,279Allen,39,99Amiel,40Argyris,114,232Arnould,183Asch,165Atkinson,204Attali,2,110

BBacher,204Bachmann,181Balint,180Ballay,325Balleux,127Barbier,303Baron,112Barrette,224,300,325Barrows,96Beauté,159Becker,303Belisson,74Bell,182Bennett,213Berbaum,72Berry,326Bertalanffy,81Bertrand,158Bestor,48Bézille,2,11,75,118,185,209,211,215,310,347Bilodeau,148Bion,154,303Bloom,63,67,72Bobbitt,38,39,226Boud,113Bourgeois,82,164Bourguin,86Brent,101Brougère,185,211,310,347Brougères,131Brown,173,192,194,279Bruillard,112Bruner,73,81,118,137,173,329Budowski,99,258,273Buton,164

CCardinet,158

Carnonneau,346Cedefop,80,219,231Chamorand,18Changeux,167Chaperon,51Charters,25,38,39Chomsky,74,105CNGE,8,97,98Codol,165Colley,224Collin,114,116,170Collins,173,279Comenius,31Coombs,12,133,204,207Coulombe,344Courtois,118,128Cousinet,13,135Crahay,104Craik,68Cranton,129Cristol,226,347Cronbach,62Cross,203,215,223,312

DDamasio,326Dausien,300Davel,187deBono,147DeLandshere,60DeMontmollin,160DePeretti,143Debon,128Denzin,122Desprez,73Dewey,13,114,119,135,151DiMartino,70Dienes,326Dirkx,126Dodier,340Doise,83,136,138,156,315Doïse,160Dominicé,227DuBois-Reymond,208Duguid,173,192,194,279Dupont,8Durkheim,113Duroux,235

EEhrlich,6,8Eichinger,297Eisner,63Engel,19Epstein,200Eraut,196,218,339Ewald,100Ewell,217,318

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FFairsten,14Falzon,171Faure,205Fayol,39Festinger,164,170Flavell,103Flexner,19Flores,204Foucault,109Frambach,202,331Freinet,85,135Freire,126,227Fulop,24,91

GGallois,320Galperine,87Galpérine,84,170Garfinkel,173,175GatherThurler,302,330Gay,2,99Gibbs,12,123,329Gibson,326Gillet,60,71,75Gilly,136Goleman,126,127Gosset,7,13,14,17,33Guilbert,2,7,13,33,58,59,61Guilford,146Guthrie,41Gyssels,14

HHabermas,126Hadamache,11Hafferty,229Hall,188,211,224,318Hameline,38Haralambos,228Harrow,65Harvey,143Heald,228Hétu,346Hilbert,10Hirt,102Hull,41

IIllich,227

JJackson,227Jacobi,215Jacobson,291Janis,165Jarvis,122Jason,22Jay,143

Jenkins,12JohnsonetJohnson,150,152,160,332,335Josseran,51Jung,201Justin-Besançon,55

KKamien,4Kant,345KELLY,66Kewin,236King,50Knowles,231Kogan,141Kolb,117,119,120,122,151,154,329Krathwohl,65

LLanda,87Lanneau,334Laroche,55Lave,173,175,185,186,279LeBoterf,75,100,111,168,169leGoff,107LeMenahèzeF.,137LeMoigne,81leNy,167Leclercq,12Leeuwenhorst,97Lempp,228Léonard,55Leontiev,85,86,170Lepley,203Lequier,90Lerner,170Léto,102Levy,140,145,318Lewin,83,118,119,140,141,152,153,160,161,253,329Lincoln,122Lindeman,231Locke,345Lombardo,297Lorto,121Luria,84Lyman,47,48

MMager,58,60Maisonneuve,162Mantandon,340Martin,152,314Masciotra,91,316Maturana,91,316Mayo,149,152McCall,297McGeogh,203

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Mccarthy,120McCarty,154Meehl,62Meirieu,74,77,83,159,160,178,335Merriam,129Mezirow,18,126,127,130,341Miller,7,13,14,17,20,23,25,26,27,44,45,46,49,50,52,53,54,91,92,95,101Molenat,176Monchatre,106Montandon,347Montmollin,135,161,163Moon,116Moquet,121Moreno,155,256Morin,319Morisette,43Moscovici,162,172Mottier-Lopez,175Mucchielli,58,162,163,297,333Mugny,83,136,138,156,315Muller,226,347

NNaccache,181Niet,82Nizet,164Noizet,74Norman,96Not,40,69,71Noyé,58,159

OOCDE,205Ochanine,170,171OlryLouis,122Orr,194Osborn,139Osborne,144Ossandon,8

PPain,210Palincsar,164Parkhurst,49Pascal,162Pastré,89,169Pelaccia,200Perlmutter,135Perrenoud,75,103,117,199,226,227,330,345Perret-Clermont,83,137,156,315Perruchet,201,217Pestalozzi,32Piaget,73,79,81,118,119,134,289Pieron,40,139Pineau,118,128

Piveteau,58,159Poizat,207,225,347Polanyi,115,191,198,324Polya,237Popper,70,126Postman,204Pouchain,98

QQuinton,66

RRabelais,297Raynal,157Reber,189,198,326Resta-Schweitzer,157Reunier,157Rey,108Richard,172Riecken,170Rogers,118,119,157,158,179,254Romainville,77Rosenthal,291Rosinski,24Rouquette,140Rousseau,72Roux,111,150Ryle,190

SSaltzman,204Sanchez,70Sartre,90Saucier,99Savary,152,314Sawyer,310Scallon,287Schachter,170Scharf,7,13,14,17,33,55,56,57Schön,114,116,117,151,199,232Schugurensky,212,213,214,298,299,311,228Senders,204Silverman,272Simpson,65Skinner,41,70,85Smith,42,332,335Sole,171Spiro,148Squire,202,331Stein,148Stolper,321Stoner,142Straka,319Strauss,219Stroobants,106

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TTaba,63Talyzina,71,84,88,89,172Talyzina,170Tamir,216,218Taurisson,87Taylor,39,108TaylorE,130Thereau,83Thorndike,41Tolman,41,102Topping,182Touch,11,212,219,297Tough,11,211,212,219,230,297Toussignant,43Tremblay,187Tyler,17,25,37,38,41,42,58,62,63

UUNESCO,10,11,12,205,207

VValois,158VanderBerghe,102Varela,90,316Venger,173Veret,98Vergnaud,169,315

Verquin,218,219,223,230VonBertalanffy,145VonHippel,192Vygotski,73,81,84,85,90,137,174

WWainstein,98Wallach,141Wallon,137Washburne,85Watson,40Webb,164Webster,96Weil-Barais,157Wenger,183,184,186,247Whitaker,271Whitehead,69,96Whyte,165Wiener,68Wiggins,288Wihak,211,224Williamson,53Wisser,171Wittorski,107Woilquin,57

ZZarifian,108,110Zimmerman,50

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Annexes

Nousproposonsdanscesannexesdestextesfondamentauxquiontétéutilespournotre

travailderecherche.Certainstextes,qu’ilssoientenanglaisouenfrançais,sontprécé-

désd’unecourteintroduction.

Sommaire :

Ordonnancen°58-1373relativeàlacréationdesCHUp.377Conseildel’Europe:Résolution(77)30p.380MILLERG.E.:Adventureinpedagogy(1956)p.388 LYMANJr.R.A.:Disasterinpedagogy(1957)p.392 MILLERG.E.:Guidingprinciplesforteachers(1961)p.397 MILLERG.E.:OnTrainingMedicalTeachers(1965)p.401 MILLERG.E.:Enseigner,unetâchenobleetcomplexe(1977)p.406 MILLERG.E.:PrideandPrejudiceinProfessionalEducation(1963)p.412MILLERG.E.:Thecontinuingeducationofphysician(1963)p.419 MILLERG.E.:TheAssessmentofClinicalSkills/Competence/Performancep.424MILLERG.E.:LapyramidedeGeorgeE.Milleren2015p.430FREINETCélestin:Versuneméthoded’éducationnouvelle (1928)p.434

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