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UNIVERSITE D'ANGERS FACULTE DE MEDECINE ANNEE 2006 MEMOIRE pour l'obtention du DIPLOME D'ETUDES SPECIALISES EN OTO RHINO LARYNGOLOGIE Présenté le 13 octobre 2006 à Rennes par Anne-Sophie HUE Apport de la voie trans-mandibulaire latérale dans les chordomes du clivus A propos de deux cas Président: Monsieur le Professeur BEUTTER (Tours) Membres du jury: Monsieur le Professeur BEAUVILLAIN DE MONTREUIL (Nantes) Monsieur le Professeur BORDURE (Nantes) Monsieur le Professeur DUBIN (Angers) Monsieur le Professeur FONTANEL (Poitiers) Monsieur le Professeur GODEY (Rennes) Monsieur le Professeur KLOSSEK (Poitiers) Monsieur le Professeur LECLECH (Rennes) Monsieur le Professeur MARIANOWSKI (Brest) Monsieur le Professeur ROBIER (Tours)

Apport de la voie trans-mandibulaire dans les … · 2012-06-22 · 6.5.2- Chondrosarcome 6.5.3- Plasmocytome 7- Traitement habituel ... squelettique médian et se développent à

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UNIVERSITE D'ANGERS

FACULTE DE MEDECINE

ANNEE 2006

MEMOIRE pour l'obtention duDIPLOME D'ETUDES SPECIALISESEN OTO RHINO LARYNGOLOGIE

Présenté le 13 octobre 2006 à Rennes parAnne-Sophie HUE

Apport de la voie trans-mandibulaire latérale dans les chordomes du clivus

A propos de deux cas

Président: Monsieur le Professeur BEUTTER (Tours)

Membres du jury:Monsieur le Professeur BEAUVILLAIN DE MONTREUIL (Nantes)Monsieur le Professeur BORDURE (Nantes)Monsieur le Professeur DUBIN (Angers)Monsieur le Professeur FONTANEL (Poitiers)Monsieur le Professeur GODEY (Rennes)Monsieur le Professeur KLOSSEK (Poitiers)Monsieur le Professeur LECLECH (Rennes)Monsieur le Professeur MARIANOWSKI (Brest)Monsieur le Professeur ROBIER (Tours)

PLAN

I- Introduction

II- Présentation de 2 cas cliniques

III- Les chordomes du clivus

1- Anatomie2- Epidémiologie3- Histoire naturelle4- Histologie5- Génétique6- Imagerie

6.1- Radiographies conventionnelles6.2- TDM6.3- IRM6.4- Angiographie6.5- Diagnostic différentiel en imagerie

6.5.1- Macroadénome pituitaire géant6.5.2- Chondrosarcome6.5.3- Plasmocytome

7- Traitement habituel7.1- Traitement chirurgical

7.1.1- La voie rhino-septale transsphénoïdale de Segura7.1.2- La voie ptérygo-maxillaire7.1.3- La voie trans-oro-pharyngée7.1.4- La voie transcervicale transclivale7.1.5- La voie trans-naso-orbito-maxillaire7.1.6- La voie sous frontale trans-basale de Derome7.1.7- La voie transnasale endoscopique

7.2- Traitement radiothérapeutique7.2.1- Protonthérapie

IV- La voie trans-mandibulaire

1- La voie trans-mandibulaire de Trotter2- La voie trans-mandibulaire latérale

V- Discussion

1- Avantages de la voie trans-mandibulaire latérale2- Inconvénients de la voie trans-mandibulaire latérale3- Complications de la voie trans-mandibulaire latérale4- Contre-indications de la voie trans-mandibulaire

latérale

VI- Conclusion

I- Introduction

Les chordomes du clivus sont des tumeurs dysembryoplasiques rares de l'adulte jeune. Ils dérivent de la notochorde autour de laquelle s'organise l'axe squelettique médian et se développent à son extrémité craniale. Le point de départ des chordomes du clivus est le basi-occipital et le basi-sphénoïde. Les chordomes se développent soit vers le haut dans la citerne interpédonculaire, soit vers l'arrière dans la fosse postérieure en repoussant le tronc cérébral, soit plus rarement vers l'avant et le cavum1.

Les chordomes du clivus se révèlent par une symptomatologie peu spécifique à type de céphalées avec une atteinte unilatérale de la sixième paire crânienne. Ils se traduisent par des poussées régressives suivies de périodes de rémission, causes de retard diagnostic. L'imagerie trouve alors une place prépondérante dans le diagnostic avec des images tumorales d'ostéolyse et de calcifications, ainsi que dans le choix des possibilités thérapeutiques et des voies d'abord chirurgical.

Les chordomes du clivus sont des tumeurs bénignes avec une malignité loco-régionale de part leur situation anatomique. La récidive est la règle du fait de leur caractère invasif et de la difficulté de l'exérèse chirurgicale complète dans la région clivale.

L'exérèse des chordomes du clivus pose un vrai problème de voie d'abord chirurgical. Le principe est d'obtenir l'exérèse la plus complète possible en limitant au maximum les séquelles fonctionnelles. En complément du geste chirurgical, la radiothérapie est fréquemment associée.

Pendant une grande partie de son évolution, le chordome du clivus reste une tumeur extra-durale médiane. La zone à risque chirurgical se situe en arrière et en dehors du fait des rapports avec le névraxe et non en avant. Ces données anatomiques suggèrent la logique et les avantages de l'abord chirurgical antérieur.

Nous proposons aux travers de deux cas cliniques d'étudier les avantages et les limites de la voie d'abord trans-mandibulaire latérale de la région clivale.

II- Présentation des deux cas cliniques

1- Mme O., cas clinique N°1

Cette patiente, âgée de 50 ans, sans antécédent, se plaint depuis un an d'une rhinolalie et d'une dyspnée. Un syndrome d'apnée du sommeil est traité. Onze mois plus tard, devant une majoration de la symptomatologie, un bombement dans l'oropharynx est alors constaté.

Un scanner cervical met en évidence une lésion expansive de l'étage moyen de la base du crâne avec une extension intracrânienne postérieure et rétro-pharyngée majeure, évoquant un chordome du clivus.Une artériographie cérébrale élimine un envahissement vasculaire de l'axe vertébro-basilaire mais montre un refoulement de celui-ci et des deux axes carotidiens.Une imagerie par résonance magnétique montre un syndrome de masse se développant sur la ligne médiane à la jonction crânio-cervicale. La lésion apparaît en hyposignal hétérogène en pondération T1, en hypersignal hétérogène en séquence T2. On observe un rehaussement hétérogène après injection de Gadolinium.Le complément tomodensitométrique en fenêtre osseuse montre une lyse du clivus mais aussi des deux condyles occipitaux.

Figure 1: IRM cérébrale séquence T1 coupe sagittale, lésion hypodense hétérogène du clivus bombant dans le rhinopharynx et comprimant le bulbe en arrière.

Figure 2: IRM cérébrale séquence T2 coupe axiale, hypersignal hétérogène de la lésion.

Il est alors décidé une intervention chirurgicale pour le premier temps opératoire avec exérèse par voie trans-mandibulaire latérale du chordome du clivus. Un deuxième temps comportera l'arthrodèse occipito-cervicale par voie postérieure, afin d'éviter un déplacement secondaire progressif.

Le 1er temps opératoire a lieu deux ans après l'apparition des premiers symptômes. Il comporte l'exérèse par voie d'abord trans-mandibulaire du chordome développé au dépend de C1 et étendu à la fosse infra-temporale gauche et para-pharyngée droite.Une trachéotomie est réalisée transitoirement pour la protection des voies aéro-digestives supérieures.

Figure 3: Voie d'abord trans-mandibulaire latérale gauche, exposition du chordome du clivus.

Figure 4: Exérèse du chordome, visualisation de l'arc antérieur de C1

Les suites opératoires sont marquées par l’atteinte de plusieurs paires crâniennes: XII, IX et V3 du côté gauche. A J5, une méningite est diagnostiquée et traitée. Le scanner montre un abcès sub-mandibulaire qui s'évacuera spontanément. Une minerve cervicale est posée dans la crainte d’une instabilité de la charnière crânio-cervicale.

Figure 5: TDM cérébral coupes axiales, lyse du clivus, reliquat tumoral à gauche du clivus

Figure 6: TDM cérébro-cervical coupe sagittale, résidu tumoral en avant du bulbe.

Le 2ème temps opératoire est réalisé à J90, comportant une arthrodèse occipito-cervicale. Les suites sont simples.

Figure 7: Radiographie standard de rachis cervical, arthrodèse occipito-cervicale.

Quatre mois après le premier temps opératoire, la RCP (réunion de cancérologie pluridisciplinaire) de neuro-oncologie propose un traitement adjuvant par protonthérapie.

Neuf mois après le premier temps opératoire, Mme O. bénéficie d'une irradiation de 71 Gray, 45Gy par photons et 26 Gy par protons. La patiente présente dans les suites une dysgueusie avec mycose. L'atteinte des paires crâniennes XII, IX et V3 du côté gauche persiste. On note l'absence de trouble visuel, auditif et de céphalées.Il est décidé une surveillance clinique et IRM tous les trois mois pendant 2 ans, puis tous les 6 mois jusqu'à 5 ans, puis annuellement.

Un an après le premier temps opératoire, Mme O. se porte bien. On note une parésie du XII gauche ainsi qu'une paralysie du IX gauche secondaire à la

voie d'abord trans-mandibulaire latérale gauche et parfaitement compensée par le côté controlatéral.

Sur les imageries à 10 mois, à un an et à seize mois, l'IRM cérébrale montre la persistance d'un résidu tumoral stable sur la partie gauche du clivus, en avant et à gauche du bulbe.

Le recul actuel est de 20 mois.

Mlle R., cas clinique N°2

Cette patiente, âgée de 15 ans, présente depuis l'âge de sept ans des céphalées évocatrices de migraines, cédant sous traitement anti-migraineux, sans autre antécédent. A l'âge de quatorze ans, mlle R. se plaint de céphalées irradiant vers l'occiput et le front, associées à une obstruction nasale et un ronflement nocturne.

Un tableau de rhinopharyngite et de rhinolalie est mis en évidence un mois après le début des symptômes. Une tuméfaction sous-muqueuse du cavum de 3 cm entraîne une déformation vélaire. Il est noté une parésie de la XII ème paire crânienne du côté gauche.

L'IRM et le TDM cérébral confirment cette masse tumorale qui siège à la partie inférieure du corps du sphénoïde avec un développement antérieur au niveau du cavum et un développement postérieur vers la fosse cérébrale. Il est noté un effet de masse sur le bulbe et le pont. L'arc antérieur de C1 est lysé. Les radiologues évoquent un rhabdomyosarcome ou un chordome même si l'évolution rapide est atypique.

Figure 8: IRM cérébrale séquence T2 coupe sagittale, lésion en hypersignal hétérogène du clivus, limitée en périphérie, se développant au niveau du cavum et de la fosse cérébrale postérieure, effet de masse sur

le bulbe et la moelle

Figure 9: IRM cérébrale séquence T1, coupe axiale, rehaussement hétérogène après injection de Gadolinium

Une biopsie sous anesthésie locale est réalisée et confirme le diagnostic de chordome du clivus. L'angiographie montre un système vertébro-basilaire indemne.

Devant la survenue de céphalées matinales violentes ainsi que de vomissements itératifs deux mois après le début des symptômes, l'intervention chirurgicale est avancée.

Une exérèse du chordome du clivus par voie trans-mandibulaire latérale gauche est réalisée avec une trachéotomie de protection.

Figure 10: Voie trans-mandibulaire latérale gauche permettant un contrôle de la fosse infra-temporale gauche, pharynx récliné à droite.

Les suites opératoires sont simples avec décanulation et retour à domicile à J8.

A J15 post-opératoire, l'état de mlle R. se dégrade de façon régulière avec des céphalées tenaces, vomissements itératifs avec altération de l'état général et dysphonie à type de voix nasonnée. L'examen clinique montre à nouveau une voussure du cavum.

L' IRM de contrôle à deux mois post-opératoire met en évidence une exérèse incomplète intéressant la région prévertébrale et rétropharyngée, et également la région située en arrière du clivus moyen. On note aussi un nodule tumoral en arrière du muscle long du cou droit, probablement responsable de sa voix nasonnée.

Figure 11: IRM cérébrale, séquence T1 avec Gadolinium, coupes axiales, lésion tumorale en regard du clivus moyen.

Figure 12: IRM cérébrale, coupes sagittales avec Gadolinium, rehaussement de la lésion avec compression bulbaire.

Après décision collégiale, à trois mois du premier temps opératoire, il est convenu de réaliser une seconde intervention avec double abord chirurgical crânio-cervical, de type postéro-latéral puis antéro-latéral. Dans un premier temps opératoire, il est prévu l'exérèse de la tumeur extra-durale du foramen magnum, du clivus moyen et inférieur. Un deuxième temps est prévu pour le clivus supérieur.

Devant l'aggravation de l'état de mlle R., une voie postéro-latérale gauche crânio-cervicale en position assise est réalisée dans un premier temps avec une

exérèse partielle aux vues des difficultés hémorragiques per-opératoires. Les suites sont simples.L'IRM de contrôle de la seconde intervention montre une nouvelle évolution en arrière du cavum, avec de nouveau une volumineuse tumeur développée du côté droit. La volumineuse tranchée trans-clivale réalisée par la première intervention en arrière du clivus moyen est comblée par la tumeur.

Figure 13: IRM coupe axiale séquence T2 lésion en hypersignal

Figure 14: IRM coupe sagittale séquence T2,récidive tumorale en arrière du rhinopharynx

A quatre mois de la première intervention, un troisième temps opératoire par voie antéro-latérale droite est réalisé avec une ostéosynthèse occipito-cervicale. Les suites sont simples.L'IRM de contrôle met en évidence un reliquat tumoral rétrosellaire et rétroclival pour lequel un abord chirurgical transfacial est décidé.

A cinq mois de la première intervention, un quatrième temps opératoire est réalisé, associant un degloving facial permettant une voie ptérygo-maxillaire et une ostéotomie maxillaire de type Le Fort I permettant d'abaisser le bloc maxillaire afin d' optimiser l'exposition du clivus inférieur.Les suites opératoires sont marquées par une atteinte des VI et VII gauches et un arrêt cardio-respiratoire à J3 post-opératoire. Une tétraplégie flasque est alors mise en évidence avec paralysie faciale centrale gauche et une atteinte diaphragmatique.L'IRM confirme alors le diagnostic d'accident vasculaire ischémique du tronc cérébral.

A 7 mois de la première intervention, et à 2 mois du quatrième temps opératoire, l'IRM montre des séquelles de l'AVC ischémique du tronc et l'existence d'une récidive tumorale majeure avec une importante compression ponto-bulbo-médullaire. Mlle R. est alors en soins palliatifs.

Mlle R. décède 10 mois après la première intervention.

III- Les chordomes du clivus

1- Anatomie

Le clivus sépare le rhinopharynx de la fosse cérébrale postérieure. Il correspond à la face supérieure du sphénoïde qui est constituée par une surface osseuse régulière fuyant vers le bas et l'arrière. Il est formé par l'apophyse basilaire de l'occipital et le corps du sphénoïde. L'un et l'autre fusionnent pendant la puberté, jusque là réunis par la synchondrose sphéno-occipitale.

Figure 15: Vue sagittale du nasopharynx, du clivus et de la jonction crânio-occipitale, clivus formé par le basi-sphénoïde et le basi-occipital 3.

Le clivus s'étend en haut et en avant du foramen magnum et se termine au niveau de la lame quadrilatère du sphénoïde par les apophyses clinoïdes postérieures.

Figure 16: Vue endocrânienne par Rockefeller.

1- sinus frontal 11- protubérance occipitale interne2- apophyse crista galli 12- foramen magnum3- lame criblée de l'ethmoïde 13- canal de l'hypoglosse4- canal optique 14- clivus5- foramen rotundum 15-foramen lacerum6- foramen ovale 16- apophyses clinoïdes postérieures7- foramen spinosum 17- selle turcique8- méat auditif interne 18- apophyses clinoïdes antérieures9- foramen jugulaire 19- portion orbitaire du frontal10- gouttière latérale de l'occipital

Classiquement dans la littérature neurochirurgicale, le clivus est divisé en trois régions:

- la région supérieure formée de la lame quadrilatère jusqu'au mur postérieur du sinus sphénoïde.

- la région moyenne s'étend de la partie inférieure du sinus sphénoïdal jusqu'au tubercule occipital qui borde vers l'avant l'échancrure jugulaire de l'occipital.

- la région inférieure part des tubercules occipitaux jusqu'au foramen magnum et jusqu' à l'apophyse basilaire de l'occipital.

Les limites latérales du clivus sont les fissures pétro-occipitales.

Figure 17: Coupe sagittale crânio-faciale2.

1- clivus 6- bulbe2- sinus sphénoïdal 7- nerf optique3- glande hypophysaire 8- lobe frontal4- artère basilaire 9- sinus frontal5- pont

Sa taille varie de 37 à52 mm de long, 11 mm de large pour sa région antérieure et 14.3mm pour sa région postérieure 4.A la surface extra-crânienne du clivus, la trompe auditive est à la jonction du clivus moyen et inférieur. Le clivus supérieur forme le toit du rhinopharynx qui descend vers le clivus moyen en regard de la trompe auditive.

On comprend alors qu'une tumeur clivale supérieure entraîne une endocrinopathie hypophysaire et une compression des paires crâniennes III à VI. Une tumeur de la région moyenne entraîne une compression du pont et une compression des nerfs crâniens V à VIII. Une lésion du clivus inférieur entraîne une compression de la moelle et des nerfs crâniens IX à XII 5.

2- Epidémiologie

Les chordomes du clivus se développent aux dépens des vestiges de l'extrémité crâniale de la notochorde primitive.

Leur incidence est de 0.08 patients pour 100 000, avec une prévalence chez les hommes de 0.10 comparée à 0.06.6 pour les femmes. La population de race noire est moins touchée avec 0.02 patients pour 100 000.

L âge du diagnostic est compris entre 7 mois 7 et 95 ans, cependant il se fait essentiellement entre 30 et 40 ans.

Les chordomes intracrâniens représentent 15 à 20 % de l'ensemble des tumeurs intracrâniennes. Trente-cinq à 40 % des chordomes sont intracrâniens et la moitié d'entre eux siègent dans le clivus. Les autres sont des chordomes du sacrum et du coccyx (29%) et du corps vertébral (33%) 4.

Les chordomes chondroïdes représentent 15% des chordomes de l'adulte et 41% des chordomes du sujet de moins de 20 ans. Il faut sans doute les considérer comme étant des chondrosarcomes de la fissure pétro-occipitale de bas grade 8 .

Approximativement 50% des patients porteurs d'un chordome du clivus ont une exérèse chirurgicale totale. Suivant les équipes, 16 à 50% d'entre eux auront eu plusieurs interventions avec un taux de mortalité de l'ordre de 5% 9.

Les chordomes du clivus sont donc des tumeurs osseuses rares à malignité locale et de pronostic réservé, car lors de l'apparition d'une rechute, les taux de survie à 5 ans ne dépassent pas 5%.

3- Histoire Naturelle

Les chordomes du clivus sont des tumeurs dysembryoplasiques développées à partir des vestiges de la notochorde. Celle-ci joue un rôle primordial dans l'induction de l'ectoblaste sus-jacent qui se différencie en neuro-ectoblaste formant la plaque neurale, ainsi que dans l'induction de la formation des corps vertébraux 10. La notochorde définit l'axe longitudinal primordial de l'embryon en indiquant l'emplacement des futurs corps vertébraux et joue le rôle d'inducteur de l'ectoblaste dans la différenciation de la plaque neurale.

Les chordomes peuvent apparaître tout le long de la colonne vertébrale, on en retrouve 33% au niveau de l'axe nerveux, 29% dans la région sacrococcygienne, 32% dans la fosse postérieure et 6% en extra-axial 11.

Ces tumeurs sont primitivement extra-durales et encapsulées, elles envahissent et détruisent les structures osseuses, refoulent la dure-mère puis la perforent pour se développer dans l'espace sous-arachnoïdien. Progressivement, ils étirent puis englobent les vaisseaux et les nerfs crâniens avant de comprimer le tronc cérébral.

Figure 18: Vue exocrânienne du clivus3.

Au niveau du crâne, les chordomes se développent à partir de la synchondrose sphéno-occipitale et s'étendent:

-soit vers le haut dans la citerne interpédonculaire et dans la région sellaire après avoir détruit la lame quadrilatère et le dorsum sellae.

- soit vers l'arrière dans la fosse postérieure en repoussant le pont et le bulbe, en comprimant le tronc cérébral et l'artère basilaire.

- soit plus rarement vers l'avant dans la région nasopharyngée en détruisant le basi-sphénoïde (grande aile du sphénoïde) et le plancher osseux de la selle turcique pour bomber dans le sinus sphénoïdal et déboucher sous la muqueuse du cavum.

- soit vers le bas à travers le foramen magnum.

- soit latéralement dans les angles ponto-cérébelleux, en comprimant les nerfs crâniens et en lysant l'apex pétreux.

Un certain temps, la dure-mère protège les éléments vasculo-nerveux comprimés ou étirés par la tumeur. Ensuite, la dure-mère est détruite par la capsule tumorale et des prolongements chordaux se produisent en tout sens 12.Les chordomes peuvent donc se retrouver de proche en proche au niveau des sinus maxillaires, ethmoïdaux ou frontaux 13.

Cliniquement, les symptômes initiaux sont essentiellement des céphalées occipitales (75%) 4, des troubles visuels unilatéraux, une ophtalmoplégie avec une diplopie (paralysie du VI dans 50% des cas) 4, un ptôsis, et une baisse de l'acuité visuelle. L'ophtalmoplégie résulte de la proximité de la tumeur et des nerfs crâniens:

- - le nerf crânien VI dans le canal de Dorello.- - les nerfs crâniens III, IV et VI dans le sinus caverneux.

Les troubles visuels témoignent d'une atteinte du nerf optique. Les chordomes volumineux peuvent atteindre le foramen jugulaire en bas et en dehors et comprinmer les nerfs crâniens IX à XII. L'extension latérale des chordomes peut léser les nerfs crâniens VII ou VIII dans la citerne de l'angle ponto-cérébelleux.

L'évolution de ces symptômes est progressive et fluctuante, expliquant un retard diagnostic fréquent.

Lors de la période d'état, le tableau clinique est dominé par des céphalées et l'atteinte des nerfs crâniens oculomoteurs, par ordre de fréquence décroissante: VI, III et IV 14. L'atteinte des autres paires crâniennes est plus tardive: V, VII, VIII, nerfs mixtes et XII. La souffrance des voies longues du tronc cérébral se voit surtout en fin d'évolution. Les troubles endocriniens traduisent l'extension intrasellaire de la tumeur. L'exophtalmie uni ou bilatérale témoigne de sa prolongation dans l'orbite ou de la compression du sinus caverneux. L'hypertension intracrânienne est tardive et les signes cérébelleux peu fréquents.

Le traitement de choix consiste en l'exérèse chirurgicale totale suivie de l'irradiation de la zone tumorale par des faisceaux de protons.

4- Histologie

Les chordomes sont des tumeurs histologiquement bénignes, mais considérées comme malignes localement car elles sont invasives, et récidivent fréquemment. Elles sont généralement extradurales et ostéolytiques. Dans la littérature, peu de métastases ont été retrouvées.

Les chordomes se caractérisent par une masse gélatineuse, translucide, grisâtre et encapsulée 14. Ses cellules ont des petits noyaux sombres à vacuoles (cellules physaliphores) contenant une substance myxoïde. L'architecture de la tumeur est lobulée avec des cellules éosinophiles en amas, du glycogène intracytoplasmique. La coloration au bleu alcian de la substance myxoïde, même après action de la hyaluronidase est très en faveur du diagnostic. Le stroma est constitué de cloisons fibro-vasculaires qui circonscrivent les alvéoles. Il présente des infiltrations lymphocytaires localisées et denses 12 .

A côté du chordome typique, on distingue le chordome chondroïde, de meilleur pronostic, associant à la fois un tissu chordal et un contingent cartilagineux 15 .

Figure 20: Cellules physaliphores Figure21: nucleus petits et foncés

Figure 19: les cellules physaliphores contiennent de larges vacuoles intracellulaires avec mucine et glycogène16.

Un immunomarquage est pratiquement toujours décisif en cas de doute diagnostic avec un chondrosarcome 17. L'expression de marqueurs épithéliaux permet de différencier ces deux types tumoraux très proche histologiquement, voire similaire en cas de plages de cartilage immature 16.Il montre la positivité conjointe des cellules tumorales pour les anti-vimentine, protéine S100, cytokératine et EMA (ces deux derniers sont présents dans les chordomes).

Figure 20: Immunomarquage des cellules tumorales

Cytokératine EMA.

Figure 21: Immunomarquage au S100.

Le diagnostic différentiel se fait avec les chondromes myxoïdes, les chordomes chondroïdes et les chondrosarcomes myxoïdes 18. La mise en

évidence histologique de cellules physaliphores au sein d'une matrice myxoïde signe le diagnostic de chordome du clivus. La distinction est nécessaire car le traitement et le pronostic sont différents 19.

5- Génétique

Dans la littérature, la moitié des chordomes ont un caryotype normal. Par contre, les récidives locales montrent des aberrations chromosomiques. Il est actuellement pressenti que les aberrations chromosomiques arriveraient plus tard dans le développement du chordome, prédominant dans les récidives 20.Les tumeurs avec un caryotype normal ont un meilleur pronostic si un traitement chirurgical est possible. Par contre, les chordomes au caryotype modifié (surtout translocation et délétion) sont souvent associés à des récidives majeures et un pronostic sombre 20.

Figure 22: Caryotype d'un chordome du clivus récidivant montrant une translocation t(6;11)(q12;q23)16.

Les données cytogénétiques ont montré l'origine vertébrale des chordomes. Les études génétiques cherchent actuellement à mettre en valeur un modèle génétique spécifique des chordomes du clivus 16.Certaines équipes ont montré dans des cas de chordomes familiaux 21(3 cas, avec chordome du clivus et astrocytome cérébral), un réarrangement chromosomique sur un locus commun 1p36.31. Une étude récente a montré un isochromosome 1q récurrent dans une série de 22 patients porteur d'un chordome du clivus 21.

6- Imagerie

6.1- Radiographies conventionnelles

Les radiographies standards du crâne peuvent révéler une ballonisation de la selle turcique, une érosion ou une destruction du dorsum sellae et des clinoïdes postérieures, des calcifications au sein d'une zone d'ostéolyse, une hyperostose du tubercule de la selle 22.

6.2- TDM

Le chordome du clivus apparaît comme une masse destructive médiane envahissant la base du sphénoïde et de l'occipital avec des foyers de forte atténuation dans sa matrice.

Le scanner montre une ostéolyse hétérogène dans 95% des cas avec une masse hyperdense dans les citernes opto-chiasmatiques, interpédonculaires ou prépontiques 14. On observe des signes indirects dépendant de la masse tumorale avec un comblement des citernes et un refoulement des structures adjacentes.Des foyers hyperdenses représentent des fragments osseux d'os clival détruit, flottant dans la matrice du chordome, présents dans 50 % des cas. 23

Après injection de produit de contraste, le scanner montre une masse de densité mixte avec des zones de nécrose kystique au sein de tissus mous en rehaussement.

La loge sellaire est respectée sauf envahissement tumoral.

Le scanner est utile pour une bonne visualisation de l'ostéolyse et des calcifications intra lésionnelles 15.

Figure 23: TDM coupes sagittales, ostéolyse du clivus et de l'arc antérieur de C1.

La reconstruction TDM en 3 dimensions permet d'objectiver une lyse osseuse vertébrale.

Figure 24: TDM en 3 dimensions, Arc antérieur de C1.

Il est recommandé de faire un scanner sans injection de produit de contraste axial et coronal en fenêtre osseuse seulement de la base du crâne.

6.3- IRM

Le chordome du clivus à l'imagerie par résonance magnétique se révèle par une masse en hyposignal T1, un signal hyperintense hétérogène T2, et une prise de contraste modéré hétérogène après injection de Gadolinium.En T1, le signal peut parfois être variable avec des zones en hypersignal visibles dans la tumeur, conséquence d'hémorragie focalisée ou de matériel mucoïde 15.L'extension est bien visualisée par l'IRM pratiquée dans les trois plans. Les rapports avec le tronc cérébral sont bien précisés grâce aux coupes sagittales.Le bilan anatomique est donc mieux réalisé par l'IRM qui montre une masse hétérogène refoulant le tronc cérébral et prenant le contraste.

Figure 25: IRM séquence T1, chordome hypointense bien limité, les coupes sagittales montrent le "pouce" de la tumeur s'enclavant dans la partie antérieure du pont.

Figure 26: IRM séquence T2, lésion en hypersignal.

Il est recommandé de faire une IRM avec rehaussement focalisé sur la base du crâne, y compris une angiographie par résonance magnétique pour une atteinte particulière aux artères et aux veines de la base du crâne.

6.4- Angiographie

Le bilan angiographique est indiqué en raison de la fréquence des malformations vasculaires de cette région qui peuvent se comporter comme des processus expansifs, (anévrisme de la bifurcation de l'artère basilaire, mégadolicho-artère basilaire) et de la fréquence des tumeurs vascularisées par des branches méningées du réseau carotidien externe pour lesquelles une embolisation hypersélective pré-opératoire est parfois réalisable.

Le chordome apparaît alors comme une masse avasculaire avec un déplacement et un englobement de l'artère carotide interne.

Figure 27: Anévrisme de la pointe de l'artère basilaire 24

Il est recommandé de faire une angiographie avec un test d'occlusion.

6.5- Diagnostic différentiel en imagerie

6.5.1- Macroadénome pituitaire géant

Le prolongement d'un macroadénome pituitaire depuis la selle turcique sus-jacente différencie cette lésion du chordome.

6.5.2- Chondrosarcome

Il est centré le long du bord externe du clivus dans la fissure pétro-occipitale et présente des calcifications chondroïdes dans plus de 50% des cas.

6.5.3- Plasmocytome

Il peut être une masse destructive médiane du clivus. Le signal IRM T2 varie habituellement d'intermédiaire à bas.23

7- Traitement

L'exérèse chirurgicale totale des chordomes du clivus est difficile à cause de leur situation anatomique. Elle est souvent incomplète 24 et suivie d'un traitement radiothérapeutique complémentaire.

7.1- Traitement chirurgical

Diverses voies d'abord sont utilisées en fonction de la taille et de l'extension du chordome du clivus.

La voie neurochirurgicale sous temporale de Fisch avec section de la tente du cervelet est étroite et ne permet l'exérèse que des lésions du tiers supérieur du clivus 9. Elle est incompatible avec l'exérèse d'un prolongement dans le sinus sphénoïdal 25.

Les voies antérieures sont plus adaptées et ce d'autant que l'on intervient à un stade où la tumeur est encore extradurale 26:

Figure29: Voies d'abord antérieur du sphénoïde et du clivusPossibilités d'exérèse des voies d'abord antérieur schématisées par des zones hachurées 27.

7.1.1- La voie rhino-septale trans-sphénoïdale de Segura

La voie rhino-septale trans-sphénoïdale de Segura est de réalisation assez simple et peu traumatisante27. Elle permet une biopsie ou bien l'exérèse des petites tumeurs médianes du clivus. Cette voie est limitée latéralement par les murs latéraux du sinus sphénoïdal, par les nerfs optiques et l'artère carotide interne. Elle n'offre donc qu'un champ opératoire limité au clivus supérieur et à la selle turcique.

Figure 30: Voie d'abord rhino-septale trans-sphénoïdale 28

7.1.2- La voie ptérygo-maxillaire

La voie ptérygo-maxillaire est une bonne voie d'abord pour exposer le clivus supérieur et moyen. Un degloving de la partie moyenne de la face est nécessaire, puis les murs latéral et postérieur sont abaissés pour accéder à la fosse infra-temporale.

Figure31: Degloving de la partie moyenne de la face et accès à la fosse infra-temporale 28

Les muscles ptérygoïdiens sont écartés latéralement en suivant la lame médiale du processus ptérygoïde. Le clivus, le canal du XII et le sinus sphénoïdal sont alors exposés. Avec cette voie, les clivus moyen et inférieur sont accessibles après avoir enlevé le processus ptérygoïde. Le sinus sphénoïdal est alors médian avec le canal ptérygoïdien, et le canal hypoglosse est latéral. Le clivus est alors exposé sous le sinus sphénoïdal. Cette voie s'utilise pour les chordomes du clivus moyen et inférieur. Ses limites sont l'extension inférieure à C1 et latérale de la fosse infra-temporale.

Figure 32: Vue axiale de la voie ptérygo-maxillaire 28

7.1.3- La voie trans-oro-pharyngée

La voie trans-oro-pharyngée transclivale avec ouverture du palais mou et résection partielle du palais osseux si nécessaire offre un large accès à tout le clivus et au rachis cervical supérieur jusqu'en C2 29. Il faut noter la réalisation d'un lambeau mucopériosté avec de larges incisions latérales antérieures.

Figure 33: Le clivus inférieur et C1 peuvent être exposés sans incision palatine

L'abord du clivus moyen nécessite une résection du palais dur 28.

Cette voie d'abord est bien adaptée pour l'exérèse des chordomes volumineux envahissant l'arc antérieur de C1. C'est une excellente approche pour une odontoïdectomie.

Figure 34: Voie d'abord trans-oro-pharyngée 28

7.1.4- La voie transcervicale transclivale

La voie transcervicale transclivale permet l'approche des chordomes du clivus inférieur, de C1, et C2.

Figure 35: Incision cutanée de la voie transcervicale 30

La tête doit être installée en rotation controlatérale et hyper extension pour pouvoir permettre de dégager le clivus inférieur et C1.

Figure 36: Traction latérale de l'axe carotidien et jugulaire afin d'accéder au rachis cervical 30

Cette voie d'abord convient à des tumeurs limitées au clivus inférieur, au foramen magnum et à C1 avec une extension antérieure 31. Cette voie diminue le risque d'infection per-opératoire mais est contre-indiquée en cas de compression bulbo-pontique car elle n'en permet pas l'accès.

7.1.5- La voie trans-naso-orbito-maxillaire

La voie trans naso-orbito-maxillaire avec un Lefort I d'abaissement 32 est une voie d'abord pour la base du crâne de l'étage antérieur et moyen. Elle s'adresse au chordome du clivus avec une extension antérieure importante 33.

Figure 37: Pour accéder à la région ptérygoïdienne, un Lefort I et une mandibulotomie sont réalisés 34.

Il s'agit d'une voie d'abord lourde et délabrante avec des séquelles esthétiques importantes qui lui font préférer souvent d'autres alternatives.

7.1.6- La voie sous-frontale trans-basale de Derome

La voie sous-frontale trans-basale décrite par Derome s'effectue par un abord bicoronal avec un volet bifrontal et un passage extradural jusqu'au corps du sphénoïde. Elle donne accès en sous-muqueux à tout le clivus, exceptée la région sous et rétrosellaire. Cependant elle nécessite un abord intracrânien, le sacrifice de l'olfaction et la reconstruction de l'étage antérieur de la base du crâne 27.

7.1.7- La voie transnasale endoscopique

La voie transnasale endoscopique est une technique récente utilisée pour les chordomes du clivus supérieur peu étendus. Cette voie est non délabrante, peu traumatisante, rapide, avec des suites opératoires simples et courtes. Cette technique diminue le risque d'infection iatrogène, l'œdème cérébral post-opératoire, et une atteinte per-opératoire des nerfs mixtes. Cependant, cette technique impose un champ opératoire très étroit limité par des structures vasculo-nerveuses nobles: l'artère carotide interne, le nerf optique, le sinus caverneux, l'artère basilaire.

Figure 38: Une longue pièce à main avec une fraise diamantée est utilisée pour fraiser le clivus supérieur 2

Le risque principal de cette technique développée depuis 1995 est le saignement intradural qui peut être létal car non contrôlable. Cette technique est intéressante pour des petits chordomes du clivus supérieur, dans les mains d'une équipe chirurgicale et anesthésique entraînée 2.

7.2- Traitement radiothérapeutique

La radiothérapie est quasi systématique dans les chordomes du clivus en complément du geste chirurgical 35.

7.2.1- Protonthérapie

Il s'agit du traitement de référence dans les chordomes du clivus. La protonthérapie nécessite d'être connectée à un cyclotron. Elle exploite deux propriétés dosimétriques liées à l'interaction de faisceaux de protons avec la matière:

- une faible dispersion latérale, conséquence de la diffusion limitée des protons au cours de leur trajectoire.

- un dépôt d'énergie en forme de pic ( pic de Bragg), la chute distale de dose étant là aussi importante et la profondeur du pic étant parfaitement contrôlable puisque liée à l'énergie des particules incidentes 36.

Figure 39: Rendement en profondeur des différents rayonnements utilisés en radiothérapie 36

Cette précision permet d'adapter chaque faisceau de protons pour conformer en 3 dimensions la distribution de dose à la forme du volume cible à irradier 37. Grâce à cela, il est possible d'augmenter les doses dans les volumes traités tout en minimisant la dose totale. On diminue donc les complications dans les tissus sains avoisinants 9.

IMXT 9 aisceaux IMPT 4 faisceaux

Figure 40: Comparaison dosimétrique entre un traitement par modulation d'intensité de photons (IMXT) et par modulation d'intensité de protons (IMPT) 36

La protonthérapie est donc une technique de choix dans la radiothérapie conformationnelle. Elle est utile dans les cas où la tumeur traitée est au voisinage de structures radiosensibles, afin de minimiser la dose résiduelle dans les tissus sains environnants, comme les nerfs optiques, le tronc cérébral, l'oreille interne, la moelle épinière.

Figure 41: Technique d'irradiation d'un chordome avec protection du tronc cérébral 36

Il est difficile de démontrer la diminution de complications sévères liées à la radiothérapie conventionnelle comparée à la protonthérapie, car dans les séries, la majorité des patients récidivent de leur chordome du clivus avant de pouvoir exprimer certains effets secondaires 6.

Le potentiel de développement de la protonthérapie est élevé et son rôle thérapeutique demande à être encore affiné, en complément avec les autres techniques de radiothérapie de conformation, telles que la modulation d'intensité par photons, la neutronthérapie, et la radiothérapie par ions 37.

Actuellement, la protonthérapie est considérée comme le traitement de référence inscrit à la nomenclature américaine et à la classification des actes médicaux en France. Il n'existe qu'un centre de protonthérapie en France, à Orsay.

IV- La voie d'abord trans-mandibulaire

1- La voie transmandibulaire médiane de Trotter

Une trachéotomie est tout d'abord réalisée. Cela évite d'avoir la sonde d'intubation dans l'oropharynx et élimine tout problème de ventilation post-opératoire au niveau des voies aériennes supérieures.

On commence par inciser la muqueuse du palais dur à 5 mm de l'arcade dentaire puis le palais mou jusqu'à la ligne médiane et on finit par la luette séparée en deux. S'il s'agit d'une lésion du clivus inférieur, inciser le palais mou sera suffisant. Le trait se prolonge jusqu'à la première molaire controlatérale. Le lambeau mucopériosté est alors levé, afin d'exposer l'os du palais dur.

Figure 42: Tracé d'incision du palais dur et du palais mou 1.

On découvre le pédicule vasculaire grand palatin que l'on lie. On libère les insertions musculaires du palais mou. Le palais dur est fraisé en fonction de l'exposition souhaitée 38.

Figure 43: Levée du lambeau mucopériosté et ligature du pédicule grand palatin au niveau du foramen grand palatin 3.

Pour accéder au clivus supérieur, il faut fraiser le palais dur jusqu'au septum nasal 32. A ce stade, le rhinopharynx, le clivus et l'oropharynx sont visualisés.Les chordomes du clivus envahissent rarement la muqueuse du rhinopharynx 39. Dans la plupart des cas, la muqueuse pharyngée et les muscles constricteurs peuvent être préservés. Pour exposer le clivus et la jonction cranio-cervicale, on réalise un lambeau vertical pharyngé inférieur en arrière des piliers postérieurs. La dissection du lambeau dans le bon plan est facile et peu sanglante. On dissèque le tendon du muscle constricteur supérieur jusqu'à la trompe auditive. Lorsque le lambeau est levé, on l'enroule sur lui même et on le place dans l'hypopharynx 40.

Figure 44: Réalisation d'un lambeau vertical pharyngé inférieur 3.

On réalise ensuite une incision verticale sur le rostrum du sphénoïde jusqu'à l'aponévrose prévertébrale. Les muscles longs du cou sont visualisés et bombent sous la tumeur. La zone tumorale est alors exposée.

Figure 45: Exposition de la zone tumorale et fraisage du clivus 3.

Chez des patients présentant un trismus, une ankylose temporo-mandibulaire ou une rétrognathie, on réalise une mandibulo-glossotomie médiane afin de mieux s'exposer jusqu'en C4.L'incision cutanée comprend le vermillon, le menton, le vestibule et s'arrête sous la symphyse mandibulaire. Les séquelles esthétiques sont acceptables. La symphyse mandibulaire est alors ruginée jusqu'aux deux foramens mandibulaires. On réalise une mandibulotomie entre les deux incisives 31 et41.

Figure 46: Mandibulotomie médiane 41.

Les extractions dentaires sont rarement nécessaires. Le plancher antérieur est alors incisé. On réalise une glossotomie médiane en passant par le V lingual jusqu'à l'os hyoïde et les vallécules. Cette voie minimise les risques pour le nerf lingual et le nerf hypoglosse 42.

Figure 47: Mandibulectomie et Glossectomie médiane 3

A, Exposition du nasopharynx, du clivus et des vertèbres cervicales jusqu'à C5B, Fermeture.

Le muscle mylo-hyoïdien est désuni lors de la distraction latérale de l'hémi-mandibule. Cette voie d'abord permet d'exposer le nasopharynx, le clivus et les vertèbres cervicales jusqu'en C4. Cette voie d'abord offre une bonne exposition pour les chordomes du clivus médian ayant une extension cervicale.

Les chordomes du clivus sont souvent multilobés et s'étendent latéralement vers la base du crâne. La tumeur est réséquée en un bloc si cela est possible. Dans la plupart des cas, la tumeur est pelée comme un oignon de l'intérieur vers l'extérieur. Des recoupes per-opératoires sont nécessaires pour savoir si l'exérèse est complète.

- La voie trans-mandibulaire latérale

Une trachéotomie est réalisée dans un premier temps pour les mêmes raisons que ci-dessus.

L'incision est labio-cervicale, contourne la houppe du menton, descend jusqu'en regard de l'os hyoïde puis remonte jusqu'à la pointe du rocher à une distance de 4 cm du rebord mandibulaire.

Figure 48: Tracé de l'incision cutanée 43.

Le muscle peaucier est sectionné. Le lambeau cutanéo-peaucier est décollé jusqu'au bord inférieur de la mandibule. Le muscle digastrique est ensuite repéré au pôle inférieur de la parotide. Les veines jugulaire externe et faciale sont liées. Le muscle digastrique est disséqué jusqu'à la grande corne de l'os hyoïde où il est sectionné puis remonté avec la glande submandibulaire sous la mandibule. Le nerf spinal est repéré. Le nerf hypoglosse est disséqué et libéré après avoir ligaturé les veines pharyngées à sa naissance.

Figure 49: Libération du nerf hypoglosse, glande sudmandibulaire sous l'écarteur

Les artères carotide interne et carotide externe sont alors repérées. L'artère faciale est liée. Le sillon gingivolabial et gingivojugal est incisé jusqu' en regard de la dent 32. La fibromuqueuse gingivale est incisée entre les dents 32 et 33. Un lambeau de fibromuqueuse gingivale d'avancement est décollé jusqu'à la dent 34. Le nerf dentaire inférieur est repéré à sa sortie entre la 34 et 35 au niveau du foramen mandibulaire après décollement des tissus mous. La face antérieure de la mandibule est alors ruginée en sous-périosté.

Figure 50: Mandibule ruginée en regard de la 32 à la 35

La mandibulotomie est réalisée à la scie oscillante entre les dents 33 et 34. Le plancher est sectionné jusqu'à la ligne médiane menée en avant de la caroncule ce qui permet d'écarter partiellement la mandibule.

Figure 51: Section du muscle mylo-hyoïdien 44.

Le muscle mylo-hyoïdien est sectionné ainsi que le plancher buccal entre les deux caroncules, puis section du sillon pelvi-lingual jusqu'à la base du pilier antérieur.

Figure 52: Incision de la muqueuse 41 Dissection du nerf lingual et du XII 43

1- Muscle mylo-hyoïdien

2- N. Lingual3- Muscle ptérygoïdien médial

4- Muscle styloglosse5- Artère carotide externe

6- N. XII

Le nerf lingual est alors sectionné, ce qui permet d'écarter la mandibule en dehors avec la glande submandibulaire en passant le long du nerf hypoglosse.

Figure 53: Fosse infra-temporale avec l'artère carotide interne montant vers la base du crâne, section du nerf lingual 44.

L'incision muqueuse est alors prolongée à la face externe du pilier antérieur de l'amygdale jusqu'à l'aile interne de l'apophyse ptérygoïde. L'espace parapharyngé s'ouvre avec en dehors la mandibule et le muscle ptérygoïdien médial, et en dedans la paroi pharyngée avec le constricteur supérieur. Il est important de ne pas blesser l'artère carotide interne dans ce plan.La mandibule est alors écartée en dehors. Les muscles styloglosse et stylopharyngien sont sectionnés ainsi que des branches viscérosensitives du nerf glossopharyngien qui court le long du muscle styloglosse jusqu'à la base de langue.

Le pharynx est disséqué à distance de l'aponévrose prévertébrale, en passant à la face externe du muscle constricteur supérieur. La partie distale de la trompe

auditive est séparée du muscle tenseur du voile du palais afin de mieux exposer le clivus. Le pharynx avec l'amygdale est récliné alors latéralement. Les incisions du palais dur et mou peuvent être requises pour une meilleure exposition du clivus et du rhinopharynx dans sa partie supérieure.

L'espace prévertébral est alors visualisé. Il apparaît bombé par le chordome sous les muscles longs du cou. L'aponévrose prévertébrale ainsi que les muscles longs du cou sont incisés horizontalement à la partie haute de la tumeur puis dégagés de cette dernière jusqu'en regard de C3.

Figure 54: Pharynx récliné vers la droite, FIT exposée et tumeur visualisée après incision de l'aponévrose prévertébrale

. La fosse infra-temporale est très bien exposée du côté de l'ouverture. La tumeur peut alors être libérée des tissus environnants. Un fraisage du clivus, de l'arc antérieur de C1 permet d'élargir la voie d'abord 45.

Figure 55: Exérèse de l'extension antérieure rhinopharyngée du chordome du clivus

Le temps d'exérèse du chordome est confié aux neurochirurgiens. Un fraisage du clivus, de l'arc antérieur de C1 permet d'élargir la voie d'abord.

Figure 56: Exérèse du chordome après fraisage du clivus

La fermeture comprend la réfection des muscles longs du cou, des muscles stylopharyngien et styloglosse. Les muscles constricteurs sont réamarrés. La muqueuse est fermée depuis le pilier antérieur jusqu'à la section mandibulaire par des points séparés de Vicryl 2/0.

Figure 57: Fermeture

Une ostéosynthèse mandibulaire est réalisée par deux plaques préformées 4 trous. La zone d'ostéosynthèse est calfeutrée par les lambeaux de fibromuqueuse gingivale précédemment réalisés. Le muscle digastrique est réammaré à la grande corne de l'os hyoïde. Le muscle mylo-hyoïdien est suturé à sa partie antérieure. Deux drains de redon de Jost sont placés dans l'espace parapharyngé et cervical. Une fermeture cutanée est réalisée en trois plans, un plan musculaire, un plan sous-cutané, et un surjet intradermique pour la partie cervicale. La région mentonnière est fermée par un surjet de Flexocrin 4/0.

Discussion

1- Avantages de la voie d'abord trans-mandibulaire latérale

La voie trans-mandibulaire latérale dans les chordomes du clivus permet une exposition parfaite de la partie basse du clivus, de C1 et de C2. Elle permet également d'avoir une bonne exposition de la fosse infra-temporale homolatérale à la maxillotomie. Il faut donc débuter l'exérèse du chordome par le côté où son extension latérale est la plus importante dans la FIT comme dans le cas clinique 1. Cette voie d'abord offre un bon contrôle des vaisseaux de la région, comme l'artère carotide interne, l'artère faciale, l'artère maxillaire qui sont exposées facilement. La voie trans-mandibulaire permet de ne pas être gêné par le processus ptérygoïde pour exposer le clivus moyen et inférieur.

Le principal intérêt de cette voie d'abord est la largeur d'exposition pour le temps neurochirurgical avec un excellent contrôle de l'arc antérieur de C1et des masses latérales de l'atlas lorsqu'ils sont envahis comme dans nos deux cas cliniques.Son avantage est de pouvoir être étendue en per-opératoire en cas d'extension chordale supérieure avec des limites de résection insuffisante. Dans notre cas clinique n°2, le premier temps opératoire par voie trans-mandibulaire latérale n'a pas permis d'extraire la tumeur au niveau du clivus supérieur, la poursuite évolutive est alors rapide. Il est donc important dans les extensions clivales supérieures d'associer à la voie trans-mandibulaire latérale, une voie trans palatine en incisant le palais mou et en fraisant le palais dur, ce qui permet alors une exposition de tout le clivus supérieur. L'inconvénient peut être une insuffisance vélopalatine résiduelle46. Cette possibilité d'extension est intéressante car elle permet de traiter par cette voie d'abord les chordomes du

clivus étendus aux 3 étages, avec une extension possible dans la FIT homolatérale.

La voie d'abord trans-mandibulaire est intéressante car elle s'adresse à des tumeurs inférieures du clivus de toute taille, avec des extensions cervicales jusqu'à C3 possibles, et des extensions latérales dans la région ptérygoïdienne. Chez l'enfant, elle est aussi réalisable sans morbidité supérieure 10.La voie trans-mandibulaire latérale est plus intéressante que la voie médiane de Trotter pour des chordomes qui s'étendent latéralement, car elle donne une meilleure exposition de la fosse infra-temporale.

Pour des petites tumeurs sellaires médianes et des petits chordomes du clivus supérieur, la voie transnasale trans-sphénoïdale est plus adaptée car elle offre une meilleure exposition et est moins délabrante.Pour des chordomes larges développés dans le clivus moyen et supérieur, un degloving suivi d'une ptérygomaxillotomie est plus adapté comme le quatrième temps opératoire de notre cas clinique 2.Pour des chordomes étendus en antéro-supérieur, la voie trans-naso-orbito-maxillaire est recommandée.

Devant une tumeur mal placée anatomiquement car entourées de structures nobles, cette voie offre des séquelles opératoires acceptables, quelles soient esthétiques, nerveuses comme la paralysie du nerf lingual et du IX, ou otologiques avec une otite séreuse lors de la section de la trompe auditive. Les résultats fonctionnels de la voie trans-mandibulaire latérale sont bons, avec une ouverture buccale conservée, une phonation normale après décanulation, et une déglutition normale 45. L'anatomie et la physiologie nasale sont conservées 46.

Ainsi les indications de la voie d'abord trans-mandibulaire latérale ne sont pas spécifiques de pathologie, mais d'accès à des espaces anatomiques qui sont le clivus inférieur, la fosse infra-temporale homolatérale, la partie antérieure du foramen magnum et les premières vertèbres cervicales jusqu'à C3 47.

2- Inconvénients de la voie d'abord trans-mandibulaire latérale

La voie d'abord trans-mandibulaire latérale présente des inconvénients qui tiennent à la longueur du temps de l'abord, de la reconstruction et à la traversée de la cavité buccale faisant courir un risque septique en cas d'ouverture

méningée. Ce risque est relatif car la fermeture des plans vertébraux est facilitée par la largeur du champ opératoire, et l'étanchéité peut être rétablie par greffe de fascia lata ou de tissu adipeux collée 27.Cette voie d'abord propose une exposition restreinte concernant la FIT controlatérale, rendant difficile le contrôle local d'une extension chordale bilatérale importante. Il apparaît assez facile de laisser de la tumeur étendue en arrière comme dans le premier temps opératoire du cas clinique 1.Cette voie d'abord seule ne permet pas l'accès direct au clivus supérieur 48.Les sinus caverneux ne sont pas accessibles et donc non contrôlables.Devant une symptomatologie ophtalmique au premier plan, un examen ophtamologique doit être systématiquement réalisé car en cas de baisse de l'acuité visuelle liée à une compression du nerf optique, cette voie d'abord n'en permet pas la décompression. Il faut alors réaliser une approche intradurale pour accéder aux nerfs optiques.Les inconvénients de cette voie d'abord sont la section obligatoire du nerf lingual et du nerf glossopharyngien, il faut donc prévenir le patient d'une dysgueusie et d'une anesthésie mentonnière post-opératoire définitive. Il existe aussi un risque pour le nerf hypoglosse lors de la dissection. Une paralysie unilatérale du XII est peu symptomatique grâce à la compensation controlatérale. L'otite séreuse liée à la section ou à l'obstruction de la trompe auditive est fréquente et facilement contrôlable.La voie trans-mandibulaire occasionne un œdème lingual important qui nécessite une trachéotomie dans un premier temps opératoire, trachéotomie transitoire.Définir le meilleur traitement est difficile, car ce sont des tumeurs rares, qui évoluent lentement. Les séries dans la littérature sur les chordomes du clivus sont peu nombreuses. Le recul est insuffisant pour définir un traitement de référence. Les équipes s'accordent sur l'intérêt d'une voie d'abord permettant l'exérèse chirurgicale tumorale la plus exhaustive possible en fonction de sa localisation, sans morbidité substantielle.

3- Complications de la voie d'abord trans-mandibulaire latérale

La principale complication est la méningite (cas clinique 1) en cas de plaie dure-mérienne. Une surveillance post-opératoire rapprochée est recommandée. Certaines équipes instaurent une antibiothérapie prophylactique en pré-opératoire jusqu'à 72 heures post-opératoires 47.Les complications par atteinte nerveuse sont fréquentes avec une atteinte du nerf lingual, des nerfs mixtes, du XII et plus rarement du VII 6. Le patient doit être

informé des risques de gastrostomie, de troubles sensitifs de la face, gustatifs, et de paralysie faciale transitoire.Une otite séreuse permanente doit être traitée par la pose d'un aérateur en cas de section de la trompe auditive.Les risques hémorragiques sont importants malgré une voie d'abord permettant un contrôle local (cas clinique 2). La possibilité d'une transfusion doit être évoquée avec le patient.

4- Contre-indications de la voie d'abord trans-mandibulaire latérale

Cette voie est contre-indiquée en cas d'extension tumorale supérieure avec envahissement du sinus caverneux, en cas d'envahissement de l'artère carotide interne intra-pétreuse, et en cas d'extension durale invasive.

5- Applications de la voie d'abord trans-mandibulaire latérale

Cette voie d'abord est donc très intéressante pour les chordomes du clivus inférieur, mais elle trouve aussi d'autres applications aux vues des possibilités d'exposition du rhinopharynx, de la fosse infra-temporale, et de la base du crâne.La voie trans-mandibulaire permet d'accéder facilement aux tumeurs vasculo-nerveuses et aux lésions médianes de ces espaces.Elle peut être utilisée également pour les pathologies suivantes (liste non exhaustive): paragangliome du foramen jugulaire, paragangliome du glomus vagal, anévrisme de l'artère carotide interne, tumeurs des plexus choroïdes, schwannome vagal.

VI- Conclusion

Les chordomes du clivus sont des tumeurs de la base du crâne localement malignes, qui sont difficiles à contrôler et à extraire de part leur situation anatomique. Leur prise en charge est multidisciplinaire associant les ophtalmologues, les neurochirurgiens et les ORL. Le traitement consiste en une exérèse chirurgicale la plus complète possible en un ou plusieurs temps opératoires afin de diminuer le risque de récidive. La plupart des patients ont un traitement radiothérapeutique adjuvant par protonthérapie.

La voie trans-mandibulaire latérale dans les chordomes du clivus permet une très bonne exposition du clivus inférieur, du foramen magnum dans sa partie antérieure, de la fosse infra-temporale homolatérale à la maxillotomie et des premières vertèbres cervicales jusqu'en C3. Il s'agit d'une voie d'abord pour un chordome volumineux développé à partir du clivus inférieur avec une extension possible antérieure, postérieure, latérale et inférieure avec lyse des premières vertèbres cervicales. Cette voie d'abord impose le sacrifice du nerf lingual et du nerf glossopharyngien. Il existe un risque opératoire également pour le nerf hypoglosse, les nerfs mixtes (X et XI) et le nerf facial. Une otite séreuse est fréquente liée à la section de la trompe auditive. En passant par la cavité buccale, le risque septique de méningite augmente en cas de plaie dure-mérienne. Cette voie d'abord provoque également un œdème lingual nécessitant une trachéotomie transitoire.

La voie trans-mandibulaire est une voie d'abord intéressante pour des lésions de la base du crâne. Elle présente plusieurs avantages, un résultat esthétique correct, une préservation anatomique et physiologique nasale, un champ opératoire large pour le temps neurochirurgical, des séquelles nerveuses acceptables, la possibilité d'être associée à une deuxième voie d'abord pour des tumeurs étendues au clivus supérieur. La voie trans-mandibulaire associée à la voie trans-palatine s'adresse alors aux chordomes du clivus étendus aux trois étages avec une extension latérale possible.

La voie trans-mandibulaire latérale est une voie d'abord innovante et intéressante pour les chordomes du clivus mais aussi pour toutes les tumeurs intéressant les régions anatomiques du clivus inférieur, du foramen magnum, des premières vertèbres cervicales et de la fosse infra-temporale.

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