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Photo : Roger HASCOËT
Affaire : Pauline Picard
« est-ce que le docteur Gouriou, médecin légiste à Pleyben, examinant, en vertu d'une
commission rogatoire, la petite Pauline qui déjà sous la chaude tendresse de ses parents
revenait à la gaieté et à la vie, est-ce que ce praticien n'affirmait point que l'enfant, ni
sourde, ni muette, se reprenait à réentendre le breton et que de plus elle portait à
l'oreille droite une marque semblable celle de l'oreille droite paternelle ? »
Généalogie. Source : Georges FITAMANT (Pleyben)
Goas-al-Ludu et en arrière-plan : les villages de Penarguer et Bodingar au nord (maisons groupées).
http://dictionnaire.sensagent.leparisien.fr/saint%20rivoal/fr-fr/
Un fait divers tragique, la disparition longtemps inexpliquée d'une fillette de
Goas-al-Ludu dans la commune que l'on crut un temps avoir retrouvée à
Cherbourg et ramenée un temps dans « sa » famille avant que l'on
s'aperçoive qu'il s'agissait d'une erreur car son cadavre fut finalement
retrouvé provoqua beaucoup d'émotion à Saint-Rivoal et dans la région en
1922.
Beaucoup de rumeurs courraient autour de sa mort, mais d'après la fille de
Monsieur Le Meur qui a découvert le corps, il pensait que la jeune fille, qui
gardait des chevaux sur la montagne du Leuré, avait sans doute reçu un coup
de sabot.
1922/04/10 (Numéro 7463) L'Ouest-Éclair (Rennes)
1922/04/13 (Numéro 7466).
Chronologie :
- Disparition de Pauline Picard le 6 avril 1922
- Découverte d’un enfant à Cherbourg le 26 avril 1922
- Découverte du cadavre de Pauline Picard le 26 mai 1922
- Le 23 juin 1923 l’enfant de Cherbourg devient Louise Marcelle
Pauline
- Le premier janvier 1924 à l’hospice de Cherbourg décès de
Louise Marcelle Pauline
-
1922/05/08 (Numéro 7491). L'Ouest-Éclair (Rennes)
Le Matin (Paris.) 1922/05/08 (Numéro 13928).
L'Ouest-Éclair (Éd. de Caen) 1922/05/14 (Numéro 7497).
-
-
LA LANDE TRAGIQUE DE GOAS-AL-LUDU
Une enfant disparue.
Une enfant retrouvée.
Un cadavre d'enfant à tête d'homme
Est. Ce Pauline Picard qui a été tuée ou est-ce elle qui a été recueillie par tes
fermiers bretons?
[DE NOTRE ENVOYÉ
SPÉCIAL] http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k573982t.item
CHATEAUUN, 27 mai. Par téléphone.
Si le soleil a percé la brume qui depuis deux jours recouvrait l'admirable
paysage des montagnes d'Arrée, aucune lumière n'a encore filtré au travers des
ténèbres mystérieuses de l'affaire Goas-al-Ludu.
C'est, on s'en souvient, le 6 avril, qu'à quelques centaines de mètres de la ferme
de ses parente, à Goas-al-Ludu, disparaissait une petite fille de deux arts et demi
Pauline, Picard.
Les recherches les plus minutieuses, les battues les plus consciencieuses,
n'avaient permis de retrouver, aucune trace de l'enfant mystérieusement arrachée
à la tendresse des siens, lorsque, l'annonce d'une enfant abandonnée à Cherbourg
vint subitement redonner espoir et joie aux époux Picard et au village entier,
profondément ému par la disparition de la petite fille au joli sourire. La
reconnaissance de l'enfant, malgré des dissemblances alarmantes, fut faite
formellement à Cherbourg par les parents, puis au village breton par ses frères
et sœurs ainsi que par tous les voisins.
Le drame prenait fin, ne laissant derrière lui dans un mystérieux brouillard, que
la question de savoir par qui et pourquoi avait été enlevée la petite Pauline, si
heureusement retrouvée. Sans doute, celle qui était la gaillarde petite fille
bretonne, avait bien aujourd'hui un aspect fâcheusement débile.
Mais ne pouvait-on le mettre sur le compte des privations et 'de l'inexplicable
randonnée ?
Le signe l'oreille
D'ailleurs, est-ce que le docteur Gouriou, médecin légiste à Pleyben, examinant,
en vertu d'une commission rogatoire, la petite Pauline qui déjà sous la chaude
tendresse de ses parents revenait à la gaieté et à la vie, est-ce que ce praticien
n'affirmait point que l'enfant, ni sourde, ni muette, se reprenait à réentendre le
breton et que de plus elle portait à l'oreille droite une marque semblable celle de
l'oreille droite paternelle ?
Le petit village semblait donc, malgré de constantes recherches de la police
mobile devoir retourner au calme et disparaître du rôle des affaires judiciaires,
lorsqu'une découverte aussi macabre qu'abracadabrante venait replonger la
famille Picard dans la douleur et envelopper à nouveau l'affaire d'un voile
d'impénétrable mystère.
Le Matin a raconté la découverte, 500 mètres de l'endroit où se dresse la ferme
des Picard, du cadavre affreusement, mutilé et décomposé d'un enfant
paraissant avoir deux ans et demi. Auprès du petit corps martyrisé, les .débris de
vêtements que les époux Picard, appelés- en hâte, devaient, effondrés de
douleur, reconnaître formellement pour ceux que portait leur, enfant. Comment
jusqu'à présent, les recherches, les battues, n'avaient-elles point permis de
retrouver le petit cadavre dont la macabre présentation a je ne sais quoi d'une
mise en scène On sait l'affreux état dans lequel il se trouvait. M Hamery en
a fait dans son rapport une saisissante description.
Les premières constatations qui permettent d'ores et déjà de présumer le crime
plutôt que l'accident portent en elles-mêmes un élément de trouble et de mystère
qui n'est pas le moins étrange dans cette étrange affaire.
Et tout de suite la justice a pensé, devant la difficulté de trouver une piste
criminelle, à mettre l'affaire au compte d'un accident la petite Pauline, égarée,
perdue, tombant épuisée, puis étranglée et entraînée par quelque bête sauvage.
Un crâne énorme
Mais alors, comment expliquer la réapparition soudaine du cadavre et surtout
des vêtements, alors qu'il n'est pas un buisson par la qui n'ait été fouillé ? Et
puis, si c'est aux bêtes carnassières qu'est due la mise en pièce du petit cadavre,
comment ne se sont-elles point attaquées, comme tous les chasseurs, vous diront
qu'elles en ont l'habitude, au ventre, qui seul, au contraire, reste intact, si l’on, en
excepte la seule et abominable blessure que le docteur Gouriou croit déjà
pouvoir mettre au compte d'un sadique ?
Mais voici alors l'étrange, l’incompréhensible. Si les mesures prises, il est vrai,
assez superficiellement, dans le but de per- mettre les opérations médico-légales,
permettent d'affirmer que le corps est celui d'une enfant de moins de trois ans,
le crâne, au contraire, offre des dimensions qui rendent, difficile d'admettre qu'il
ait jamais appartenu au petit tronc, à quelques mètres duquel on l'a trouvé.
Alors ? Un enfant qui disparaît, un enfant qu'on retrouve, un cadavre qui vient
se mettre en travers de la joie revenue au hameau de Goas-al-Ludu, enfin un
cadavre qui a peut-être, par-dessus le marché, une tôle à laquelle il n'a aucun
droit. N'y a-t-il point là de quoi placer dans la plus terrible perplexité M. le juge
Hamery ainsi que le commissaire Dedouet et l'inspecteur Chelin,
les fins limiers de la police mobile qui s'efforcent vers une solution dont ils
murmurent déjà qu'elle ne manquera point d'une certaine grandeur tragique.
Et les parents doutent toujours .Une enfant de deux ans et demi a non
seulement des traits marqués, mais aussi des habitudes, des manies, de petits
gestes qui font toute sa jeune personnalité. Comment une mère aussi tendre que
cette femme qui en était à son neuvième enfant a-t-elle pu s'égarer à ce point ?
Et cependant, lorsque aujourd'hui encore, on leur pose à tous deux cette question
angoissante lequel des deux petits est le vôtre ? Ils s'effarent, ils hésitent, ils ne
savent que dire. Hier, on pensait que celle de Cherbourg était la notre.
Aujourd'hui, on ne sait plus.
Mais le commissaire Bedouet presse les époux Picard et s'étonne de leur impuis-
sance à se prononcer. S'il comprend les sentiments qui les pousse garder sa
place au petit être que leur cœur a adopté, il ne peut cependant admettre leur
thèse, d'un romantique par trop macabre, d'après laquelle c'est un petit cadavre
quelconque, déterré quelque part, qui aurait été revêtu des vêtements de Pauline
par un ravisseur désireux de faire croire à sa mort. Comment ce ravisseur peu au
courant de l'actualité aurait-il profité du moment où toute la presse annonçait le
retour de Pauline, au Goas-al-Ludu, pour mettre si inopportunément au jour le
petit cadavre ainsi travesti ?
Et puis il y a eu des battues sans nombre exécutées souvent par plus de 150 habi-
tants à la fois. M. le curé et M. Favennec, secrétaire de la mairie de Brasparts,
en tête, il y a aussi l'inspecteur Chelin qui a la certitude d'avoir à maintes
reprises passé à l'endroit exact où l'on devait retrouver le cadavre et qui, alors,
n'a jamais rien vu.
Les enquêteurs ont fait avec conscience et rapidité leur enquête. La justice, qui
ne possède pas les meilleurs moyens de transport et d'information, ne pourra se
rendre que demain sur les lieux du drame, et l'autopsie qui sera pratiquée dira
sans doute, avec une assurance plus formelle encore que celle du docteur
Gourioux en son rapport, s'il y a eu violence ou non et c'est ce qu'attend la police
mobile pour écarter définitivement telle hypothèse et adopter telle autre qui
devient possible seulement si le petit corps a été profané par un sadique.
Cette thèse serait la seule à subsister depuis que les alibis minutieusement
contrôlés du raccommodeur de parapluies Kerhamon, condamné déjà à cinq ans
de réclusion pour violences, ont détourné les soupçons qui pesaient sur cet
individu. L'histoire, à la, vérité, est troublante, encore que
la justice ne puisse apporter les investigations nécessaires la version telle qu'on
raconte à Saint-Rivoal.
Une étrange histoire
C'est le 12 mai que les Picard ramenaient à Goas-al-Ludu la petite filleretrouvée
Cherbourg.
Le lendemain, un cultivateur de Penarmaot, veuf, figé d'une cinquantaine d'an-
nées, nommé Yves Martin, pénétrait à la ferme. Il s'assit et demanda à Mme Pi-
card : Alors, votre fille est revenue ?
Heureuse, Mme Picard lui dit sa joie. L'homme demanda à voir l'enfant. Quand
on l'eut présentée, il dit: Vous êtes sûr que c'est elle ?
Mais comme un commissaire enquêteur, qui se trouvait justement là, lui deman-
dait : Qu'est-ce que vous venez faire ici ?
Martin se leva, puis, en breton, langue que ne comprenait pas le commissaire, il
s'écria Dieu est juste. C'est moi le coupable
Personne ne vous accuse, père Martin, affirma Mme Picard, tout à sa joie.
Mais dehors, grandes enjambées, l'homme s'enfuyait, faisant retentir les échos
de la montagne d'Arrée des éclats de son rire inextinguible. Il était fou.
Le 17 mai, on l'enfermait à l'hospice de Quimper.
Le Petit Breton 1922 juin 1922
Le Matin (Paris.) 1922/05/13 (Numéro 13933).
1922/05/26 (Numéro 13946). Le Matin (Paris.)
Le Journal (Paris.) 1922/05/28 (N10815).
1922/05/27 (Numéro 16524) Le Petit Parisien (Paris)
1922/05/28 (Numéro 13948). Le Matin (Paris.)
Le Matin (Paris.) 1922/05/28 (Numéro 13948).
1922/05/27 (Numéro 6636). L'Humanité (Paris)
Le Temps (Paris) 1922/05/28 (Numéro 22211)
Le Temps 1922/05/29 (Numéro 22212)
Le Temps 1922/05/30 (Numéro 22213).
1922/05/30 (Numéro 6639) L'Humanité (Paris)
1922/05/30 (Numéro 7513)
Journal des débats politiques et littéraires 1922/06/14 (Numéro 164)
1922/06/27 (Numéro 16555). Le Petit Parisien (Paris)
1922/06/12 (Numéro 7526). L'Ouest-Éclair (Rennes)
1922/06/20 (Numéro 7534). L'Ouest-Éclair (Rennes)
Le Journal (Paris.) 1922/07/09 (N10857)
Le Petit Parisien 1922/07/14 (Numéro 16572).
1922/08/12 (Numéro 7587). L'Ouest-Éclair (Éd. de Caen)
24 /06/1923
L'Ouest-Éclair (Éd. de Caen) 1924/01/02 (Numéro 8145).
Sources :
http://www.archives-finistere.fr/la-presse-ancienne
http://gallica.bnf.fr/html/und/presse-et-revues/les-principaux-quotidiens