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280 Correspondances A propos du reportage sur I’attentat du RER* Lettre adressee au professeur Hugue- nard. Mon cher confrere, Ayant personnellement ete I’un des pre- miers intervenants medicaux lors de I’at- tentat du RER a la station Saint-Michel, la lecture de I’article du docteur Richter et collaborateurs sur I’organisation de se- tours me parait reveler une vision par- tielle des evenements. Je souhaite apporter quelques preci- sions, particulierement utrles pour les medecins interesses par la medecine de catastrophe. Concernant I’organisation des secours, la mise en place de deux PMA n’a pas ete le fruit dune reflexion entre le comman- dant des operations de secours et le di- recteur des secours medicaux, mais s’est imposee d’emblee au premier medecin sur place (medecin directeur des secours Samu) du fait de la localisation de I’atten- tat et de la dispersion des victimes. En effet, d&s la premiere evaluation, il est apparu que 14 victimes restees sur le quai, a 25 m sous terre, etaient trop gra- vement bless&es pour etre evacuees saris reanimation prealable ; d’ou le PMA no 1. Une fois ces blesses stabilises, leur eva- cuation vers le PMA no 2 n’a pas ete lice a des raisons de securite mais a I’ab- sence de moyens de commumcation en- tre le quai et la surface. Un telephone de campagne n’a pu Btre installe que plus d’une heure apres I’explosion, trop tardi- vement pour etre utile aux secours medi- caux. II s’agit la d’une lacune grave dans I’organisation des secours. Concernant les moyens medicaux enga- ges : le Samu de Paris et les Samu 92. 93 et 94 appeles en renfort conforme- ment au plan blanc ont mobilise un total de 12 UMH, un helicoptere et 18 mede- tins, tous docteurs en medecine diplo- mes de la capacite de medecine de cata- strophe ou anesthesistes-reanimateurs, dont un professeur des universites. Dix infirm&es anesthesistes completaient ces effectifs auxquels il faut ajouter le personnel des UMH. Enfin, un pharma- cien assurait la gestion du PSM no 2. La regulation, assume exclusivement a I’hopital Necker par le Samu de Paris, a mobilise trois medecins, le directeur de cabinet du directeur general de I’Assi- stance publique et six PARM. Leur action etait menee sur la base des renseigne- ments fournis par le directeur des se- tours Samu present au PMA. Le nombre, le niveau de competence et I’experience de ces medecins Samu ren- dent difficile leur assimilation a une seule force d’appoint de la BSPP. Ils ont realise une prise en charge specialisee des pa- tients dans des conditions difficiles et leur evacuation dans des delais tout a fait courts. Enfin, a aucun moment dans cet article il nest fait reference au plan blanc qui a permis une mobilisation exceptionnelle de I’ensemble des Samu et hbpitaux de I’Assistance publique. En presence de victimes, le plan rouge de la BSPP, qui organise les secours sur les lieux dune catastrophe, est a l’evi- dence insuffisant. La necessite d’etablir un lien entre ce lieu et les structures hospitalieres est apparue des 1986, date a laquelle fut tree le plan blanc de I’Assi- stance publique. Ainsi, 20 minutes apres I’explosion, le Samu de Paris et I’Assistance publique ont declenche celui-ci, en compl&ment indispensable du plan rouge. La regulation a pu alors renforcer les secours medicaux sur les lieux memes de I’attentat et organiser l’evacuation des victimes vers des services hospitaliers prealablement alert& ; ceci a permis, tant sur les lieux de I’explosion qu’a I’hB- pital, de dispenser des soins d’une quali- te identique a celle realisee en dehors de tout afflux de victimes. De plus ce plan, evolutif, a permis de faire debuter sur place, grace a la presence d’un psychia- tre, une prise en charge psychologique des victimes. Le plan blanc constitue done un element fondamental, mais combien peu specta- culaire, d’un dispositif de secours dont I’objectif final reste, il faut le souligner, I’accueil des victimes par des services hospitaliers adapt& et disponibles, et non la promotion de telle ou telle struc- ture. Dans cette situation, on ne peut admettre que le Samu soit presente comme un suppletif de la BSPP. II n’existe aucun lien de subordination entre la BSPP et I’Assistance publique (Samu et hopi- taux), mais une collaboration dont I’ob- jectif est d’apporter les meilleurs soins possibles aux victimes, dans le respect des regles deontologiques et ethiques. En souhaitant que ces precisions pour- ront etre portees a la connaissance de vos lecteurs, je vous prie de croire, mon cher confrere, r?r I’expression de ma consideration distinguee. Dr Philippe Delpech, praticien hospitalier au Samu 75, hopital Necker ‘Urgences Mkd 1995;XIV:231-5. D6but de kponse au docteur Delpech La redaction se felicite de voir la rubrique 11 Correspondance )) de sa revue alimen- tee avec Constance et mbme avec preci- pitation, puisque la lettre du docteur Delpech Iui est par-venue par telecopie immediatement apres la parution du re- portage publie par le medecin en chef Richter, medecin-chef adjoint de la bri- gade des sapeurs-pompiers de Paris. Nous crayons savoir que l’etat-major de la brigade, chefferie Sante, a entrepris avec la direction du Samu 75 une analyse des secours aux victimes d’attentats, no- tamment blastees, a paraitre sous peu et qui sera une autre reponse de caract&re scienfifique aux remarques du docteur Delpech. Dans I’immediat le professeur Hugue- nard, qui a participe a l’elaboration du plan blanc de I’Assistance publique, peut apporter quelques precisions a ce sujet : C’est une instruction ministerielle du 24 de- cembre 1987 sur c( I’afflux de victimes a I’hdpital )) qui a sensibilis& les hopitaux a ce probleme. La premiere application de ces directives par I’Assistance publique- Hopitaux de Paris date de 1988, avec un rappel de la direction generale que c( I’ac- cueil des victimes est une mission perma- nente des hopitaux )). Le premier plan blanc a 816 annexe au reglement interieur de I’hopital Henri- Mondor en 1988. En resume : - /a d&&ion de declenchement du plan blanc revient au directeur de I’hopital, ou a I’administrateur de garde ; - /a mise en c-euwe comporte la reunion dune (c cellule de crise >), autour du di- recteur. avec quatre a huit personnes (le responsable du Samu, le chef de la se- curite, I’infirmiere g&Wale, I’inganieur, le pharmacien) ; - le fonctionnementde la cellule de crise a pour but de :

À propos du reportage sur l'attentat du RER

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280 Correspondances

A propos du reportage sur I’attentat du RER*

Lettre adressee au professeur Hugue- nard. Mon cher confrere, Ayant personnellement ete I’un des pre- miers intervenants medicaux lors de I’at- tentat du RER a la station Saint-Michel, la lecture de I’article du docteur Richter et collaborateurs sur I’organisation de se- tours me parait reveler une vision par- tielle des evenements. Je souhaite apporter quelques preci- sions, particulierement utrles pour les medecins interesses par la medecine de catastrophe. Concernant I’organisation des secours, la mise en place de deux PMA n’a pas ete le fruit dune reflexion entre le comman- dant des operations de secours et le di- recteur des secours medicaux, mais s’est imposee d’emblee au premier medecin sur place (medecin directeur des secours Samu) du fait de la localisation de I’atten- tat et de la dispersion des victimes. En effet, d&s la premiere evaluation, il est apparu que 14 victimes restees sur le quai, a 25 m sous terre, etaient trop gra- vement bless&es pour etre evacuees saris reanimation prealable ; d’ou le PMA no 1. Une fois ces blesses stabilises, leur eva- cuation vers le PMA no 2 n’a pas ete lice a des raisons de securite mais a I’ab- sence de moyens de commumcation en- tre le quai et la surface. Un telephone de campagne n’a pu Btre installe que plus d’une heure apres I’explosion, trop tardi- vement pour etre utile aux secours medi- caux. II s’agit la d’une lacune grave dans I’organisation des secours. Concernant les moyens medicaux enga- ges : le Samu de Paris et les Samu 92. 93 et 94 appeles en renfort conforme- ment au plan blanc ont mobilise un total

de 12 UMH, un helicoptere et 18 mede- tins, tous docteurs en medecine diplo- mes de la capacite de medecine de cata- strophe ou anesthesistes-reanimateurs, dont un professeur des universites. Dix infirm&es anesthesistes completaient ces effectifs auxquels il faut ajouter le personnel des UMH. Enfin, un pharma- cien assurait la gestion du PSM no 2. La regulation, assume exclusivement a I’hopital Necker par le Samu de Paris, a mobilise trois medecins, le directeur de cabinet du directeur general de I’Assi- stance publique et six PARM. Leur action etait menee sur la base des renseigne- ments fournis par le directeur des se- tours Samu present au PMA. Le nombre, le niveau de competence et I’experience de ces medecins Samu ren- dent difficile leur assimilation a une seule force d’appoint de la BSPP. Ils ont realise une prise en charge specialisee des pa- tients dans des conditions difficiles et leur evacuation dans des delais tout a fait courts. Enfin, a aucun moment dans cet article il nest fait reference au plan blanc qui a permis une mobilisation exceptionnelle de I’ensemble des Samu et hbpitaux de I’Assistance publique. En presence de victimes, le plan rouge de la BSPP, qui organise les secours sur les lieux dune catastrophe, est a l’evi- dence insuffisant. La necessite d’etablir un lien entre ce lieu et les structures hospitalieres est apparue des 1986, date a laquelle fut tree le plan blanc de I’Assi- stance publique. Ainsi, 20 minutes apres I’explosion, le Samu de Paris et I’Assistance publique ont declenche celui-ci, en compl&ment indispensable du plan rouge.

La regulation a pu alors renforcer les secours medicaux sur les lieux memes de I’attentat et organiser l’evacuation des victimes vers des services hospitaliers prealablement alert& ; ceci a permis, tant sur les lieux de I’explosion qu’a I’hB- pital, de dispenser des soins d’une quali- te identique a celle realisee en dehors de tout afflux de victimes. De plus ce plan, evolutif, a permis de faire debuter sur place, grace a la presence d’un psychia- tre, une prise en charge psychologique des victimes. Le plan blanc constitue done un element fondamental, mais combien peu specta- culaire, d’un dispositif de secours dont I’objectif final reste, il faut le souligner, I’accueil des victimes par des services hospitaliers adapt& et disponibles, et non la promotion de telle ou telle struc- ture. Dans cette situation, on ne peut admettre que le Samu soit presente comme un suppletif de la BSPP. II n’existe aucun lien de subordination entre la BSPP et I’Assistance publique (Samu et hopi- taux), mais une collaboration dont I’ob- jectif est d’apporter les meilleurs soins possibles aux victimes, dans le respect des regles deontologiques et ethiques. En souhaitant que ces precisions pour- ront etre portees a la connaissance de vos lecteurs, je vous prie de croire, mon cher confrere, r?r I’expression de ma consideration distinguee.

Dr Philippe Delpech, praticien hospitalier au Samu 75,

hopital Necker

‘Urgences Mkd 1995;XIV:231-5.

D6but de kponse au docteur Delpech

La redaction se felicite de voir la rubrique 11 Correspondance )) de sa revue alimen- tee avec Constance et mbme avec preci- pitation, puisque la lettre du docteur Delpech Iui est par-venue par telecopie immediatement apres la parution du re- portage publie par le medecin en chef Richter, medecin-chef adjoint de la bri- gade des sapeurs-pompiers de Paris. Nous crayons savoir que l’etat-major de la brigade, chefferie Sante, a entrepris avec la direction du Samu 75 une analyse des secours aux victimes d’attentats, no- tamment blastees, a paraitre sous peu et qui sera une autre reponse de caract&re

scienfifique aux remarques du docteur Delpech. Dans I’immediat le professeur Hugue- nard, qui a participe a l’elaboration du plan blanc de I’Assistance publique, peut apporter quelques precisions a ce sujet : C’est une instruction ministerielle du 24 de- cembre 1987 sur c( I’afflux de victimes a I’hdpital )) qui a sensibilis& les hopitaux a ce probleme. La premiere application de ces directives par I’Assistance publique- Hopitaux de Paris date de 1988, avec un rappel de la direction generale que c( I’ac- cueil des victimes est une mission perma- nente des hopitaux )).

Le premier plan blanc a 816 annexe au reglement interieur de I’hopital Henri- Mondor en 1988. En resume : - /a d&&ion de declenchement du plan blanc revient au directeur de I’hopital, ou a I’administrateur de garde ; - /a mise en c-euwe comporte la reunion dune (c cellule de crise >), autour du di- recteur. avec quatre a huit personnes (le responsable du Samu, le chef de la se- curite, I’infirmiere g&Wale, I’inganieur, le pharmacien) ; - le fonctionnementde la cellule de crise a pour but de :