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COLLOQUE LES FOYERS ARTISTIQUES À LA FIN DU RÈGNE DE LOUIS XIV (1682-1715) Musique et formes spectaculaires Organisateurs : Rémy CAMPOS, Anne-Madeleine GOULET et Mathieu DA VINHA 5, 6 et 7 novembre 2015 Château de Versailles - Grande Écurie Salle des Colonnes

Livret accompagnant le colloque «Les foyers artistiques à la fin du règne de Louis XIV (1682-1715). Musique et formes spectaculaires», co-organisé avec Rémy Campos et Mathieu

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COLLOQUE

LES FOYERS ARTISTIQUES À LA FIN DU RÈGNE DE LOUIS XIV

(1682-1715)

Musique et formes spectaculaires

Organisateurs : Rémy CAMPOS, Anne-Madeleine GOULET et Mathieu DA VINHA

5, 6 et 7 novembre 2015

Château de Versailles - Grande Écurie Salle des Colonnes

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Illustration : François de Troy, Didon et Énée, 1704, huile sur toile, 160 202 cm. Sceaux, musée de l’Île de France, inv. 2008.2.1 Scène tirée de l’Énéide de Virgile. En réalité, le peintre met en scène le duc et la duchesse du Maine entourés par les familiers de la cour de Sceaux. Au centre : le duc du Maine, représenté sous les traits d’Énée. À droite, étendue sur un lit : la duchesse du Maine représentée sous les traits de Didon. Sont présents également les enfants du couple, le dame d’honneur de la duchesse, ainsi que de Troy lui-même, portant un carton à dessin.

© CG 92 / Musée du Domaine départemental de Sceaux / photographie : P. Lemaître

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NOTE D’INTENTION

Ce colloque s’attachera à repérer l’émergence de foyers artistiques ouverts au théâtre et à

la musique à Versailles et à Paris entre 1682 et 1715 et à analyser les mutations du goût qui en découlèrent. Il s’appuiera sur la notion de « foyer », à une époque où la prépondérance du goût du souverain était remise en cause, en la déclinant selon trois axes : les lieux dévolus à la musique et au théâtre (villes de Versailles et de Paris, château royal, hôtels particuliers, résidences non urbaines, académies), les acteurs et les pratiques, enfin le goût.

Les dispositifs de la pratique musicale à la fin du règne de Louis XIV n’ont pas encore été étudiés dans leur globalité. Les tenir pour un ensemble de lieux à la fois complé-mentaires et concurrents conduit à décrire leur disposition dans l’espace, leur hiérarchie, les relations qu’ils entretiennent entre eux ou avec la Cour ainsi que leur fonctionnement concret.

Le riche vocabulaire de l’être ensemble à une époque où l’on rencontre des termes aussi variés et polysémiques que « compagnie », « assemblée », « ruelle » ou « société », dénote une pluralité de formes et d’usages que seule une approche pluridisciplinaire devrait permettre de cerner.

Les foyers à analyser vont du quartier du Marais, où dominaient les sociabilités fémi-nines, aux pavillons de plaisance bâtis entre Versailles et Paris, en passant par les résidences de Philippe d’Orléans au Palais-Royal et aux Tuileries, celles du duc et de la duchesse du Maine à Sceaux, du Grand Dauphin à Meudon ou du roi d’Angleterre en exil à Saint-Germain-en-Laye.

Ces lieux artistiques particulièrement dynamiques à la fin du règne de Louis XIV soulèvent un ensemble de questions qui concernent la figure de l’amateur, l’économie de la commande et de la protection, la nature des publics ou encore la naissance d’un espace public : autant de thèmes susceptibles de donner lieu à plusieurs études comparées.

Enfin ce colloque permettra d’évaluer la capacité du modèle versaillais à imposer une norme artistique ou à laisser la place au développement de nouveaux foyers, de mesurer la faculté des musiciens provinciaux à s’insérer dans les divers foyers présents en Île-de-France, de cerner l’identité des médiateurs du goût et d’apprécier la perméabilité des foyers que nous aurons repérés aux courants théâtraux et musicaux venus des autres grandes métropoles européennes.

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PROGRAMME

JEUDI 5 NOVEMBRE

9h30 Accueil 9h45 Ouverture 10h Rémy CAMPOS et Anne-Madeleine GOULET : « De la pertinence de la

notion de foyer pour l’étude de la musique et des formes spectaculaires à Paris et à Versailles (1682-1715) »

10h30 Christian BIET : « Pouvoir et contre-pouvoirs artistiques à la fin du règne de Louis XIV »

11h Pause

PREMIÈRE SESSION :

LES LIEUX

Un modèle curial ?

Discutant : Natacha COQUERY

11h30 Tarek BERRADA, « La musique dans les appartements » 12h00 Don FADER, « Monsieur et Philippe II d’Orléans : une influence culturelle

par-delà leurs résidences »

Si loin, si proche

Discutant : Boris BOVE

14h Franck DEVEDJIAN, « Le règne de Monseigneur sur les fêtes : inviter et être invité par le fils de Louis XIV »

14h30 Catherine CESSAC, « Les Nuits de Sceaux : derniers feux du Grand Siècle ? » 15h Pause

Topographies

Discutant : Manuel COUVREUR

15h30 Thomas VERNET, « La princesse de Conti en ses demeures » 16h Fabrice PREYAT, « Foyers ou essaims ? Essai de topographie chrétienne du

plaisir à la fin du règne de Louis XIV »

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VENDREDI 6 NOVEMBRE

DEUXIÈME SESSION :

ACTEURS, RÉPERTOIRES ET PRATIQUES

Les acteurs

Discutant : Martial POIRSON

9.30 Catherine MASSIP, « Amateurs, professionnels : foyers et profession-nalisation progressive des artistes »

10h Jean DURON, « Composer pour les nouveaux foyers : la “fureur” des musiciens d’église au crépuscule du Grand Siècle »

10h30 Thomas LECONTE, « De la cour à la ville : les musiciens du roi face à l’émergence de nouveaux foyers »

11h Pause

Les répertoires

Discutant : Pierre FRANTZ

11h30 Anne PIÉJUS et Nathalie BERTON, « Les lieux musicaux du Mercure galant » 12h Guy SPIELMANN, « Le théâtre de société, foyer artistique ? »

Les pratiques

Discutant : Guy SPIELMANN

14h Olivier BAUMONT, « Les lieux de musique dans les Mémoires du duc de Saint-Simon », communication illustrée au clavecin

15h Barbara NESTOLA, « L’art d’assembler, le choix de partager : la collection de musique italienne des Stuart en France (1689-1718) »

15h30 Pause 16h Mathieu DA VINHA, « Fêtes privées entre Versailles et Paris. Éléments pour

une typologie » 16h30 David HENNEBELLE, « “La grande dépense et le fracas”. Recherches sur

l’économie matérielle des patronages artistiques de l’aristocratie au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles »

17h Laurent LEMARCHAND, « Les arts entre Paris et Versailles : le Palais-Royal de Philippe II d’Orléans comme rénovateur de l’absolutisme louis-quatorzien »

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SAMEDI 7 NOVEMBRE

TROISIÈME SESSION :

GOÛT(S), ÉCHANGES ET NORMES NOUVELLES

Des goûts nouveaux

Discutant : Gérard SABATIER 9.30 Tatiana SENKEVITCH, « Qui gouverne l’empire des sens ? Les évolutions du

goût à la charnière du XVIIe et du XVIIIe siècle » 10h Jörn STEIGERWALD, « La reconfiguration de la vraisemblance morale ou la

naissance d’une deuxième galanterie : l’exemple de Thomas Corneille » 10h30 Rebekah AHRENDT, « Perméabilité ou étanchéité des foyers artistiques ?

Paris et l’étranger » 11h Pause

Vers une nouvelle redistribution des pouvoirs ?

11h30 Laura NAUDEIX, « Foyer et territoire dans la Comparaison de la musique italienne et de la musique française de Le Cerf de la Viéville »

12h Thierry FAVIER, « Genres et lieux de musique à la fin du règne de Louis XIV »

12h30 Jean BOUTIER, Conclusions

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RÉSUMÉS DES INTERVENTIONS

Rebekah AHRENDT (Yale University) « Perméabilité ou étanchéité des foyers artistiques ? Paris et l’étranger »

Le colloque a notamment pour objectif d’étudier les espaces de performance dans toute leur diversité, de découvrir leurs hiérarchies, les liens qui les unissent, leurs besoins et leurs exigences. Je souhaite mettre l’accent sur le fait que l’on rencontrait souvent les mêmes artistes dans ces différents foyers. Cette prise de conscience prend tout son sens lorsque l’on considère les relations entre ces espaces à Paris et à l’étranger, puisque l’on y retrouve les mêmes artistes.

Tandis que les lieux de départ et d’arrivée du voyage sont fréquemment étudiés par les historiens de la musique, les parcours réels sont souvent négligés. Dans quelle mesure le fait de considérer les chemins empruntés, les personnes rencontrées tout au long du voyage et la possibilité qu’il n’y ait pas de destination finale peut-il modifier notre conception du travail des musiciens ou des changements stylistiques ?

Jusqu’à présent nous n’avons qu’une piètre compréhension des relations entre les agents d’échange, lesquels étaient, pour la plupart, des musiciens itinérants. La connaissance des liens entre les acteurs sur le terrain, qui cherchaient à gagner leur vie par tous les moyens, a longtemps été freinée par l’absence de preuves. Les documents officiels, incluant les actes notariés et les mandats de paiement, peuvent nous dire qui était où et quand, mais il est rare d’obtenir une vision plus individuelle de la vie quotidienne d’un interprète, de ses amitiés et de ses relations.

Du moins jusqu’à maintenant. Car la découverte à La Haye d’un fonds d’archives épistolaires inédites révèle les relations à distance entretenues par des artistes. Encore conservées dans leur coffre recouvert de peau de phoque, les lettres n’ont pas fait l’objet d’une censure et sont restées inédites, certaines, jamais remises à leur destinataire, n’ayant parfois même pas été décachetées. Sur les deux mille trois cents lettres que contient la collection, plus de cent sont adressées à des artistes, écrites par des artistes ou rédigées au sujet d’artistes. Ces lettres révèlent un aspect méconnu de la vie musicale : la vie courante de l’artiste ordinaire. De Paris à La Haye, de la Lettonie à Londres, comédiens et musiciens travaillaient ensemble, jouaient ensemble et s’entraidaient. Ils partageaient souvenirs, espoirs et… fromages. Leurs parents déploraient l’état de leur âme, leurs épouses restées « au pays », en France, s’inquiétaient au sujet de leur situation financière. Les rumeurs concernant les succès rencontrés par des opéras à Paris, Madrid ou Venise contrastent avec les récits d’amants abandonnés et de troupes disloquées.

Comment subsister revenait souvent à se demander comment se déplacer. Quoique les limites aient pu être poreuses, ce n’est pas pour autant qu’il n’y avait pas de hiérarchie. Un emploi régulier à la cour restait un rêve et un objectif pour beaucoup de musiciens. Mais je crois important de considérer sur quoi reposait cette hiérarchie : certainement pas sur un concept de loyauté envers un patron particulier, ni sur une hiérarchie des genres. Un musicien qui avait joué à la cour pouvait tout aussi bien jouer dans un opéra, dans un théâtre ou pour un dîner. Ce à quoi on aspirait manifestement le plus était la promesse d’un emploi stable. Adopter une approche fondée sur les pratiques – c’est-à-dire centrée sur les expériences et les désirs des acteurs – peut en effet remettre en cause nos certitudes en matière de divisions génériques.

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Rebekah Ahrendt est Assistant Professeur dans le département de musique de l’université de Yale. Ses travaux sur la musique, la migration et les processus identitaires autour de 1700 sont internationalement reconnus : elle a notamment été professeure invitée au St John’s College à Oxford et artiste-chercheure en résidence au festival de musique ancienne d’Utrecht. La plupart de ses travaux récents concernent les interactions entre la musique et les relations internationales. Elle a co-édité l’ouvrage Music and Diplomacy from the Early Modern Era to the Present, Palgrave Macmillan, 2014. Elle rédige actuellement une monographie intitulée The Republic of Music, laquelle éclaire les réseaux musicaux entretenus par les réfugiés, les exilés et les migrants qui parcouraient le paysage des Provinces-Unies.

Tarek BERRADA (Centre André Chastel) « La musique dans les appartements »

Sous l’effet vraisemblable de la sédentarisation de la cour, la distribution des logis prend un véritable essor sous le règne de Louis XIV. Les espaces de réception évoluent et se diversifient pour accueillir les divertissements d’une société qui se réorganise autour du roi. Dans ce contexte, la pratique musicale trouve évidemment sa place, en retrait des espaces publics pour la pratique intime ou dans une pièce de réception qu’elle s’approprie au sein de l’appartement de parade. Des soirs d’appartement à Versailles aux appartements du prince de Condé à Chantilly, nous suivrons l’exemple royal.

Après un travail de maîtrise sur le château de Cormatin, puis un DEA consacré aux dessins

français à sujets musicaux XVIIe-XVIIIe siècles de l’École nationale supérieure des Beaux-Arts, Tarek Berrada achève actuellement sa thèse de doctorat en histoire de l’architecture à l’université de Paris-Sorbonne (Paris-IV) sous la direction de Claude Mignot. Elle est consacrée aux lieux de la musique dans l’architecture privée aux XVIIe et XVIIIe siècles. Il a publié plusieurs articles sur cette thématique.

Nathalie BERTON-BLIVET et Anne PIÉJUS (IReMus) « Les lieux musicaux du Mercure galant »

Nous nous proposons, à partir de la matière ample et variée du Mercure galant et des divers articles consacrés à la musique (poésie chantée, musique imprimée, actualité édito-riale, comptes rendus de cérémonies ou de spectacles, dissertations) de dégager une géogra-phie musicale du périodique sur un laps de temps d’environ quinze ans (1672-1682 ca). Il s’agira de mettre en évidence non seulement les réseaux d’information artistique du journal mais aussi des lieux et des milieux de sociabilité musicale encore mal documentés (tels que les salons provinciaux). Nous collaborons actuellement avec une cartographe et souhaitons, en utilisant différentes formes de visualisation de notre corpus (géographie, cartographie des échanges, cartographie des lieux de sociabilité), développer une nouvelle approche du fait musical dans le Mercure galant.

Nathalie Berton-Blivet, ingénieur d’études au CNRS, est docteur en musicologie

(université François-Rabelais de Tours) et titulaire d’un prix de traverso au CNSMDP. Après un doctorat consacré au petit opéra en France sous le règne de Louis XIV et la Régence, elle s’attache désormais à l’étude de la musique religieuse en France et a publié le Catalogue du motet imprimé en France (1647-1789) (éd. de la SFM, 2011). Elle collabore au sein de l’IReMus à trois programmes de recherche : le Mercure Galant (responsable des bases de données et co-responsable de l’édition numérique des textes), Jean-Philippe Rameau opera omnia (secrétaire de rédaction scientifique), l’axe Musique et religion(s) et plus particulièrement la base de données

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Sequentia. La plupart de ses travaux de recherche s’inscrivent dans le réseau Muséfrem, qui fédère les travaux concernant la création des musiques d’église aux XVIIe et XVIIIe siècles.

Directrice de recherches au CNRS, agrégée, premiers prix du CNSMDP, ancienne pensionnaire de la Fondation Thiers, de l’Académie de France à Rome et ancienne Guest Scholar à la Villa I Tatti, Anne Piéjus est l’auteur d’ouvrages sur la musique et le théâtre en France à l’époque moderne : Le Théâtre des Demoiselles (2000), Esther (2003), Athalie (2005). Elle a co-édité Figures de la Passion (2001) et les comédies-ballets de Molière (Pléiade, 2010), dirigé Plaire et instruire (2007), Archéologie d’un spectacle jésuite (2008) et Le Mercure galant, témoin et acteur de la vie musicale (2010). Ses recherches portent sur les liens entre musique, littérature et presse (programme Mercure galant, IReMus/CNRS), et sur la musique spirituelle italienne (Musique et dévotion à Rome à la fin de la Renaissance).

Olivier BAUMONT (Conservatoire national supérieur de musique et de danse de Paris) « Les lieux de musique dans les Mémoires du duc de Saint-Simon », communication illustrée au clavecin

Cette communication se propose d’établir une sorte d’inventaire des lieux en France et à l’étranger qui, dans les Mémoires du duc de Saint-Simon, sont associés à la musique. Il y a ainsi une sorte de géographie musicale chez Saint-Simon ; suivant les différents endroits évoqués dans le texte, la musique ne reçoit pas les mêmes faveurs de l’auteur.

Chez Louis XIV jusqu’en 1715, puis chez Philippe V en Espagne, lors de l’ambassade extraordinaire du mémorialiste en 1721-1722, la musique est au service de Dieu, elle glorifie la monarchie, elle est l’un des plus beaux ornements d’un règne. Saint-Simon en approuve donc toutes les manifestations, ordinaires, extraordinaires ou privées. À Versailles, à Trianon, à Marly ou à Fontainebleau, puis à Madrid ou à Lerma, dans les récits qui men-tionnent des opéras, des bals et des mascarades, des messes ou des moments de « particulier » chez les souverains, la musique est toujours présentée favorablement. Si quelques dérègle-ments surviennent, il s’agit plutôt d’anecdotes de cour plaisantes à conter mais qui ne remettent absolument pas en cause sa légitimité comme son utilité.

En revanche, sortie de chez le roi, cette même musique a tôt fait de subir les foudres de l’auteur ; elle est vite associée à des attitudes totalement déplacées et répréhensibles. À Sceaux, chez le duc et la duchesse du Maine, Saint-Simon pressent le danger des fameuses Nuits qui y sont organisées et qui créent une sorte de cour parallèle à celle du roi. Et surtout, à Paris, pendant la Régence, il déplore constamment la proximité du Palais-royal, résidence de son ami le duc d’Orléans, avec l’Opéra, lieu payant, ouvert à tous et propice à toutes les dérives.

Saint-Simon aime que le spectacle se rapproche de la royauté afin de la célébrer mais – il est en cela particulièrement visionnaire – il met en garde contre l’inverse.

Le mémorialiste le dit lui-même, il n’est pas « un homme de spectacles et de musique », et pourtant… les multiples échos musicaux qui nous parviennent des Mémoires ne laissent d’être passionnants, surprenants, et riches de perceptions nouvelles tant sur la période que sur l’auteur lui-même.

Claveciniste de renommée internationale, Olivier Baumont s’est produit sur les plus

grandes scènes et a réalisé quelque soixante enregistrements consacrés notamment à d’Angle-bert, Bach, Balbastre, Corrette, Couperin, Chambonnières, Dandrieu, Daquin, Haendel, Le Roux, Mozart, Purcell, Rameau et Telemann. Professeur de clavecin au Conservatoire

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national supérieur de musique et de danse de Paris, il est l’un des spécialistes de la musique française du Grand Siècle et des Lumières ; il est l’auteur de Couperin, le musicien des rois, Gallimard, Découvertes, 1998, et de La Musique à Versailles, Actes Sud/Château de Versailles/Centre de Musique baroque de Versailles, 2007.

Il vient de publier « A l’Opéra, monsieur ! », la musique dans les Mémoires de Saint-Simon, Gallimard, L’Infini, 2015.

Christian BIET (université Paris-Ouest Nanterre La Défense) « Pouvoirs et contre-pouvoirs artistiques à la fin du règne de Louis XIV »

Face à la mise en place réglée et surveillée d’ordres sociaux et esthétiques au service de la monarchie, la ville, de fait, résiste. Non nécessairement par action concertée ou décla-ration tonitruante, mais par sa simple pratique esthétique, culturelle, spectaculaire. À l’encomiastique persistante sur laquelle le régime, en fin de règne (une fin de règne catastrophique à tous égards) s’accroche, la ville – dont Paris est l’un des exemples – reste ouverte aux entrées culturelles venues, entre autres lieux, du Refuge (Provinces-Unies, Angleterre). Si bien que les assemblées, quelles qu’elles soient, et en particulier les lieux de spectacle, proposent du jeu avec l’ordre imposé, un jeu qui n’est pas seulement une soupape sociale et politique endurée ou tolérée par le régime absolu, mais un fait structurel qui ne peut être supprimé, ni totalement réprimé. Dès lors, on pourra se demander si la fin du règne de Louis XIV n’est pas marquée par l’oscillation, la porosité, la circulation et le jeu entre une sorte de dynamique de cohésion, parfois coercitive, et une dynamique d’oppo-sition, de désordre citadin, d’hétéronomie.

Si bien que face au « modèle » (aux modèles ?) versaillais, les nouveaux foyers culturels citadins ne correspondent pas forcément à la mise en place de contre-modèles (qu’il nous est bien difficile de formuler ou de théoriser, même a posteriori), mais à la prise en compte de cette hétéronomie, parfois résistante ou transgressive (les ouvrages, libelles, journaux imprimés ou supposément imprimés dans les refuges, les publications anti-régime, les pasquinades et autres livres venus du refuge ou supposément venus du refuge, s’arrachent et se discutent dans les nouveaux cafés), mais le plus souvent désordonnée, hors de l’ordre, hors des ordres, signalant seulement l’impossibilité ou la non-volonté de se conformer à un système esthético-monarchique ombrageux, souvent arbitraire ou lui-même hétérogène...

C’est donc une réflexion sur l’art comme hétéronomie nécessaire, comme hétérogénéité constitutive et non comme élément régulateur ou réglé des affaires humaines et sociales que je proposerai ici. L’art, et en l’espèce l’art vivant, parce qu’il suppose une assistance, un jeu de regards et de rapports entre les regardés et les regardants contribuant à la production d’un moment éphémère, d’une performance à plusieurs, trouble les ordonnances théoriques que les pouvoirs politiques, esthétiques, culturels lui proposent ou lui ordonnent. Si bien que les lieux culturels et artistiques, les « foyers » dont on parlera dans ce colloque, pourront être pensés comme des hétérotopies, des lieux de jeu avec les normes à même de fournir autant d’autres pouvoirs (plus que de contre-pouvoirs) plus diffus, mais aussi plus difficiles à réprimer, à calmer ou à éteindre.

Christian Biet est professeur d’histoire et esthétique du théâtre à l’université de Paris-Ouest Nanterre La Défense, membre de l’Institut universitaire de France. Il dirige une équipe de recherche portant sur l’Histoire des Arts et des Représentations (histoire de l’art, théâtre, cinéma, esthétique). Spécialiste du théâtre du XVIIe siècle, de l’histoire des idées et des questions relatives au spectacle, en particulier de l’Ancien Régime, il est l’auteur de nombreux

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articles et ouvrages. Ses principaux travaux portent sur l’esthétique du théâtre et sur les questions juridiques et économiques et leur réfraction dans la littérature, enfin sur l’histoire et l’esthétique du théâtre. Il fait partie du comité de rédaction de la revue Théâtre/Public et a dirigé ou co-dirigé plusieurs numéros (L’impact de l’avant-garde américaine en Europe ; La vague flamande ; Scènes chinoises contemporaines…).

Quelques publications : Droit et littérature sous l’Ancien Régime, le jeu de la valeur et de la loi, Champion, 2002 ; Qu’est-ce que le théâtre ?, avec Christophe Triau, Gallimard, coll. « Folio essais inédit », 2006. Direction : Théâtre de la cruauté et récits sanglants (France XVIe-XVIIe siècle), coll. « Bouquins », Laffont, 2006 ; Tragédies et récits de martyre (France, fin XVIe-début XVIIe siècle), avec Marie-Madeleine Fragonard, Classiques Garnier, 2009 ; « Pour une extension du domaine de la performance (XVIIe-XXIe siècles) », in Communications, numéro spécial « Performance », avec Sylvie Roques, no 92, Seuil, 2013.

Catherine CESSAC (CNRS - Centre d’Études Supérieures de la Renaissance) « Les Nuits de Sceaux : derniers feux du Grand Siècle ? »

Durant l’automne 1714, alors que la cour de France demeure en proie aux afflictions les plus inconsolables depuis la disparition de tous les prétendants à la couronne, la fête bat son plein au château de Sceaux, situé à quelques lieues de Versailles et de Paris. Depuis 1700, la reine du lieu est Louise-Bénédicte de Bourbon, petite-fille du grand Condé, princesse du sang mariée en 1692 à Louis-Auguste de Bourbon, duc du Maine, fils bâtard légitimé de Louis XIV. Ressentant cette alliance comme un affront infligé à son sang et son rang, la duchesse du Maine crée sa propre cour modelée par son goût pour les arts et pour les sciences. Elle s’entoure d’une société savante et lettrée, développe une intense activité mondaine, tout en donnant des bals et des fêtes qui atteignent leur zénith lors des fameuses Grandes Nuits de Sceaux données de l’été 1714 au printemps 1715. Cette absence de frontière entre privé et public est une composante forte du monde de la duchesse du Maine qui sera vertement critiquée par Saint-Simon.

Après une première partie consacrée à la sociabilité particulière mise en œuvre au château de Sceaux (réseaux, productions mondaines et artistiques), c’est essentiellement autour des Grandes Nuits que nous centrerons notre réflexion d’un point de vue à la fois politique et esthétique. Très clairement inspirées de celles données par le jeune Louis XIV pour asseoir son pouvoir, les fêtes de Sceaux ont pour principal objet d’attirer l’attention sur la duchesse du Maine afin d’en donner une image publique forte, à la veille de la question de la succession à la couronne de France. Nous nous interrogerons ensuite sur l’origine et la spécificité de l’inspiration nocturne de ces spectacles, ainsi que sur leurs acteurs (ordonnateurs, poètes, musiciens, artistes). Malgré un état lacunaire des sources (poétiques, musicales, visuelles), nous tenterons d’apprécier enfin les grandes lignes esthé-tiques de ces Nuits au carrefour des goûts anciens et des courants nouveaux.

Directrice de recherche au CNRS (Centre d’Études Supérieures de la Renaissance), Catherine Cessac est spécialiste de la musique française des XVIIe et XVIIIe siècles. Elle s’intéresse plus particulièrement au compositeur Marc-Antoine Charpentier auquel elle a consacré un ouvrage (Fayard, 2e éd. 2004), un site www.charpentier.culture.fr et de nombreuses études (articles, éditions critiques…). Elle est également l’auteur de Élisabeth Jacquet de La Guerre, Actes Sud, 1995 ; Nicolas Clérambault, Fayard, 1998 ; L’œuvre de Daniel Danielis (1635-1696) Catalogue thématique ; CNRS Éditions, 2003 ; Jean-Féry Rebel, musicien des Éléments, CNRS Éditions, 2007. Son livre La duchesse du Maine (1676-1753), entre rêve politique et réalité poétique est à paraître aux éditions Classiques Garnier en 2015.

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Mathieu DA VINHA (Centre de recherche du château de Versailles) « Fêtes privées entre Versailles et Paris : éléments pour une typologie »

Les mémoires, les correspondances, les chroniques mais aussi les différentes gazettes regorgent de récits de fêtes. Ceux-ci se réfèrent cependant souvent à des fêtes organisées par et pour la monarchie. En tentant d’appréhender les fêtes privées, on se heurte à diver-ses difficultés. La principale est celle de la terminologie pour définir la frontière entre la sphère publique et la sphère privée. Si les fêtes qui se tiennent en ville dans le cadre d’hôtels particuliers d’aristocrates ou de parlementaires, à l’occasion de mariages notamment, sont clairement privées, comment qualifier par exemple celles qu’organisent les courtisans à Versailles ou à Paris (dans leur hôtel en ville, dans leur appartement du château voire dans l’appartement même du roi) dès lors que le roi ou sa famille y sont conviés ? En effet, cette question sous-tend à elle seule plusieurs autres interrogations relatives au lieu, au comman-ditaire, à l’organisateur, à l’ordonnateur, au destinataire et aux « artisans » de la fête. On se propose donc dans cette communication, à travers quelques exemples précis de festivités versaillaises et parisiennes, d’esquisser une typologie des fêtes privées et, dans le meilleur des cas, de saisir leur organisation, leur fonctionnement et leur raison d’être. On s’aperçoit rapidement qu’elles revêtent, à plusieurs occasions, un caractère semi-public ou semi-privé suivant le filtre des interrogations mentionnées plus haut…

Voir biographie page 30.

Frank DEVEDJIAN (chercheur indépendant) « Le règne de Monseigneur sur les fêtes : inviter et être invité par le fils de Louis XIV »

Monseigneur (1661-1711), dit le Grand Dauphin, fut sans conteste, toute sa vie durant, un prince des fêtes. S’il ne régna jamais sur la France, il régna néanmoins sur toutes les plus grandes réceptions et fêtes de la fin du règne de Louis XIV. N’était-il pas un double du roi ? Toute l’iconographie de la fin du règne ne cesse de célébrer la présence du prince, juste derrière celle de son père. Aussi, quand le roi-soleil vieillissant souhaitait vivre de plus en plus reclus à Versailles ou Marly, son fils, que tout le monde considérait alors comme le futur roi, incarnait physiquement l’avenir de la monarchie. Par ses fréquents déplacements à Paris, à l’Opéra, et dans les résidences princières d’Ile-de-France, le Dauphin entretenait un lien privilégié avec la ville, quand son père régnait sans partage sur la cour. Cette répartition des rôles entre le père et le fils était manifeste, et la délégation de représentation acceptée et même voulue par le roi. Aussi, quand un seigneur de la cour avait l’insigne privilège de recevoir l’héritier de la Couronne, c’est tout un faste de l’éphémère qui se devait d’être déployé, comme si l’on recevait le roi en personne. De nombreuses fêtes et réceptions furent ainsi organisées pour le fils de Louis XIV, dont le Mercure Galant nous relate de nombreux témoignages, d’une étonnante précision. Paris, Chantilly, Saint-Maur, Le Raincy, déployèrent tour à tour un faste dont il est difficile de se représenter l’exubérance, du fait de la rareté des sources iconographiques. Il faudra donc s’interroger sur l’organisation de ces cérémonies : quels artistes, musiciens et décorateurs prirent part à ces fêtes ? Comment se déroulaient ces festivités offertes à Monseigneur ? Ces réceptions pouvaient-elles rivaliser avec celles de Versailles ? Quelles en étaient les spécificités ? On s’attachera également à comparer ces invitations offertes au prince avec celles proposées par le Grand Dauphin

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pour ses propres invités, en son château de Meudon. Le domaine chéri de l’héritier de la Couronne fut-il un lieu de réceptions fastueuses, et d’évènements musicaux d’importance ? À l’évidence, oui, mais sans doute moins que l’on pourrait l’espérer. Comme si Monseigneur avait voulu faire de Meudon un lieu hors d’atteinte, espace inaccessible à la foule des courtisans, et donc à leurs critiques.

Franck Devedjian est un jeune chercheur indépendant. Notaire de formation, et diplômé

d’un master en histoire de l’art de l’université Paris-Sorbonne (Paris IV), il étudie l’architecture, l’art des jardins, ainsi que l’art de l’éphémère des châteaux disparus d’Ile-de-France, aux XVIIe et XVIIIe siècles. Spécialiste du domaine de Meudon, et adepte des restitutions graphiques en 3D, ses recherches ont conduit à l’édition d’un ouvrage, la Manière de montrer Meudon (2013), ainsi qu’à des publications sur internet, concernant les châteaux de Meudon, Chaville et Bellevue. Il publie régulièrement des articles scientifiques dans différentes revues, comme Versalia. Son engagement pour la protection du patrimoine l’a amené à créer en 2010 l’Asso-ciation pour la restauration du château de Meudon, dont il est le président.

Jean DURON (Centre de musique baroque de Versailles) « Composer pour les nouveaux foyers : la “fureur” des musiciens d’église au crépuscule du Grand Siècle »

S’émanciper du goût du roi induit l’émergence de styles nouveaux et, par là, d’artistes nouveaux, peu enclins à suivre les modèles des maîtres officiels de la cour. Déjà avant 1688, le contrepoint de Charpentier, si différent de celui de Lully, avait séduit Mlle de Guise, mais aussi le dauphin et les révérends pères Jésuites ; plus tard, il charma le duc de Chartres. En 1688, c’est à Lorenzani, alors maître de chapelle des Théatins à Paris, que le prince de Condé commanda l’opéra d’Oronthée pour les fêtes de Chantilly. En 1683, ces deux compo-siteurs avaient eu en commun de ne point plaire suffisamment au monarque. C’est égale-ment à Charpentier mais aussi à Brossard que le duc de Richelieu fit appel pour sa fête de Rueil en 1685. Tous étaient musiciens d’église.

Pour faire naître des musiques neuves dans les foyers qu’ils animèrent à l’extrême fin du XVIIe siècle, c’est là, dans les églises du royaume, qu’une jeune génération de mécènes, pour animer fêtes et divertissements publics ou privés, recruta ses artistes parmi les jeunes maîtres de chapelle et organistes. C’est là, à l’ombre des cathédrales, que ces musiciens avaient su inventer, bien avant cette période, des formes, des genres et des écritures inouïes en France. Campra arrivait tout juste d’Aix et de Toulouse, Bernier de Rouen, Brossard de Strasbourg, Pierre Bouteiller de Troyes, Morin d’Orléans, Montéclair de Langres… L’engagement de ces musiciens d’église pour composer de la musique profane créa un appel d’air considérable et plusieurs d’entre eux saisirent cette opportunité pour se démettre de leurs fonctions pérennes au service du culte et tenter (situation nouvelle) une carrière d’artiste indépendant.

Fondateur et directeur (1989-2007) de l’Atelier d’études sur la musique française des XVIIe &

XVIIIe siècles du Centre de musique baroque de Versailles (UMR du CNRS), Jean DURON est actuellement chercheur au Centre de musique baroque de Versailles et directeur des collections de livres. Il travaille sur la musique à l’époque de Louis XIV, principalement aux moyens de son interprétation : effectifs, contrepoint, composition, structures, affects et théorie. Ses travaux concernent notamment les grandes formes (grand motet, tragédie en musique), la musique de la cour, celle des grandes cathédrales du royaume et, dans tous ces domaines, la question du statut des sources. Ses recherches l’ont conduit également à publier plusieurs

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textes sur la poésie néo-latine contemporaine (Jean Santeul, Pierre Perrin, Pierre Portes). Il a plus particulièrement travaillé sur les compositeurs suivants : Moulinié, Lully, Du Mont, Brossard, Desmarest, Lalande, Campra, D. Scarlatti et Grétry. Hors cette période, sur Obouhow et Ravel.

Don FADER (université d’Alabama) « Monsieur et Philippe II d’Orléans : une influence culturelle par-delà leurs résidences »

Les résidences des Orléans jouèrent un rôle central dans leurs stratégies de cour et dans la décentralisation de mécénat qui caractérisa la fin du règne de Louis XIV.

Politiquement marginalisés, Philippe I (« Monsieur ») et Philippe II canalisèrent leurs ambitions tout en développant une résistance à la domination culturelle royale, et ils surent combiner leurs ressources avec celles d’autres mécènes afin de cultiver des formes artisti-ques novatrices. Du temps de Monsieur, le Palais-Royal et le château de Saint-Cloud devin-rent des refuges face à un Versailles de plus en plus dominé par l’aversion que Mme de Maintenon éprouvait pour le théâtre. Installé dans le rôle choisi d’ordonnateur des fêtes, Monsieur maintint un corps de trente-sept musiciens, qui formait la Musique la plus conséquente après celle du roi, et il organisa des pièces de théâtre et de musique, jouées (et parfois, composées) par ses musiciens et par les troupes des théâtres parisiens.

Philippe II fit du Palais-Royal un foyer d’innovations artistiques. Mû par le souhait de trouver un compromis entre les débats importants de cette période (anciens vs. modernes, trait vs. couleur en peinture, style italien vs. français en musique), Philippe conversait avec une large gamme d’intellectuels et d’artistes, parmi lesquels figuraient Fontenelle, Antoine Coypel, et Marc-Antoine Charpentier. Sous leur influence, il devint amateur de littérature, de peinture et de musique.

Le soutien que Philippe accorda aux écrivains épicuriens tels Jean-Baptiste Rousseau ou le marquis de La Fare – tous deux employés par le futur régent, associé à d’autres mécè-nes – trouve son origine dans l’intérêt qu’il portait au libertinage. Ces écrivains, qui se tinrent à l’écart de l’esthétique prônée par les académies royales, exercèrent une grande influence sur l’intérêt que Philippe manifestait pour des techniques artistiques qui permet-taient l’expression des passions fortes, comme la couleur en peinture, et la dissonance ainsi que le chromatisme en musique. Sa curiosité pour les nouvelles techniques de la musique italienne le poussa à composer ses propres opéras, à fonder un ensemble de musiciens italiens, et à favoriser la création d’un style franco-italien en commandant des œuvres à ses musiciens. Philippe collabora et, dans le même temps, rivalisa avec d’autres mécènes à la cour. Ce mécénat composite joua un grand rôle dans le changement du goût à cette époque.

Don Fader est professeur de musicologie à l’université d’Alabama, aux États-Unis. Ses

recherches concernent les questions relatives à la musique italienne en France et l’histoire culturelle de la musique baroque française. Il est auteur de nombreux articles, en particulier, «The ‘Cabale du Dauphin,’ Campra and Italian Comedy: The Courtly Politics of French Musical Patronage Around 1700», in Music and Letters no 86, août 2005, qui a reçu le prix Jack Westrup en 2005. Il a publié deux éditions musicales, dont le Miserere d’Antonio Biffi, qui fut interprété pour la première fois au Festival d’Utrecht en 2013. Présentement, il travaille sur un livre, The Goûts-réunis in French Court Culture : Italian Music, Noble Patronage Networks, and the Roots of the Musical Enlightenment (1661-1723).

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Thierry FAVIER (université de Poitiers) « Genres et lieux de musique à la fin du règne de Louis XIV »

Associée d’abord à la poétique et à l’esthétique, l’étude des genres a connu de nouveaux développements à partir des années 1960 quand la perspective critique est passée de la nature de l’œuvre à celle de l’expérience esthétique. Les musicologues qui se sont alors penchés sur la théorie des genres musicaux (C. Dahlaus, L. Schrade) ont mis en évidence, parallèlement à la dynamique stylistique et formelle de tout art, le rôle joué par les contextes sociaux et institutionnels dans l’émergence et la cristallisation des genres musicaux. Plus récemment, les études littéraires sur la dimension communicative du genre (H. Dubrow, 1982), qui l’assimile à un contrat entre l’auteur et le lecteur, ont commencé à imprégner certains travaux musicologiques consacrés à l’époque moderne (S. Mauser, 2005 ; A. R. DelDonna, 2008).

Le lieu tient une part importante dans ces différentes perspectives. En tant qu’espace physique, il conditionne matériellement l’expérience musicale. En tant qu’espace social, il détermine les conditions de validation et de réception de l’œuvre. Si les années 1660 se caractérisent par l’établissement d’un système pyramidal des genres, établi sur une forte conformité entre la cour comme lieu et comme entité sociale, la fin du règne de Louis XIV est marquée par une circulation des genres, transposés ou adaptés à des lieux pour lesquels ils n’avaient pas été initialement conçus, phénomène dont la création du Concert spirituel en 1725 marque une forme d’aboutissement (Favier, 2008, 2009).

Cette communication voudrait éclairer les conséquences de ces circulations, moins du point de vue des mutations stylistiques et formelles, que du point de vue culturel et idéo-logique. Trois pistes seront privilégiées :

• Que devient le potentiel programmatique et communicatif des genres lorsqu’ils circulent d’un lieu à l’autre ? Dans quelle mesure restent-ils porteurs d’une identité liée à leurs institutions et leurs sociabilités d’origine ou se chargent-ils de significations nouvelles ?

• En quoi, inversement, leur intégration à des lieux et des espaces nouveaux et la validation dont ils font l’objet modifient-elles les valeurs culturelles de ces sociabilités ?

• Comment ces mutations ont affecté le système des genres, compris comme configu-ration cohérente et hiérarchisée qui organise le champ musical et conditionne le rapport de l’ensemble des acteurs à l’expérience musicale ?

Plus largement, il s’agira de comprendre dans quelle mesure la dynamique des genres a participé à la reconfiguration des espaces et des lieux à la charnière des règnes de Louis XIV et Louis XV.

Thierry Favier est professeur à l’université de Poitiers, membre du Centre de Recherches Interdisciplinaires Histoire, Histoire de l’Art et Musicologie (CRIHAM), EA 4270, et cher-cheur associé au Centre de musique baroque de Versailles. Ses travaux portent sur la musique religieuse française des XVIIe et XVIIIe siècles et concernent particulièrement le grand motet (Le motet à grand chœur (1660-1792) : Gloria in Gallia Deo, Fayard, 2009) et les cantiques spirituels, (Le chant des muses chrétiennes, Société française de Musicologie, 2008). Il s’est également intéressé à la question du plaisir musical (Le Plaisir musical en France au XVIIe siècle, codirigé avec Manuel Couvreur, Mardaga, 2006) et à celle du sublime (À la croisée des arts : sublime et musique sacrée en Europe aux XVIIe et XVIIIe siècles, codirigé avec Sophie Hache, Classiques Garnier, 2015). Ses recherches récentes portent sur les collections musicales privées, le concert et la question des genres musicaux.

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David HENNEBELLE (université d’Artois) « La grande dépense e t l e f racas . Recherches sur l’économie matérielle des patro-nages artistiques de l’aristocratie au tournant des XVIIe et XVIIIe siècles »

Si jamais, rappelons-le, il n’y eut de désaffection de Louis XIV pour les arts, on ne peut cependant nier qu’entre la fin des années 1680 et les premières années du XVIIIe siècle on assista, sous l’impulsion de l’entourage familial du roi, à la floraison de nouveaux foyers artistiques, initiant ainsi une évolution allant s’intensifiant sous les règnes de Louis XV et de Louis XVI. Cette transition complexe, parce que sans véritables ruptures, et diverse dans ses modalités, temporalités et ancrages géographiques, est le plus souvent analysée par le moyen des articles du Mercure Galant ou des témoignages des contemporains (correspon-dances, mémoires), elle l’est plus rarement à partir des sources comptables des maisons aristocratiques. Organiser des fêtes, pensionner des musiciens ou une troupe de théâtre, commanditer des œuvres nécessitaient des moyens financiers considérables, des ressources matérielles et un nom capable de soutenir des dépenses souvent faites à crédit. Le montant de ces dernières était d’ailleurs fréquemment invoqué, soit pour se louer du bon goût et de la munificence de ceux qui en étaient les ordonnateurs, soit pour nourrir les accusations de superfluité, de frivolité ou d’immoralité qui trouvaient un grand écho dans un temps d’épreuves et de tourments spirituels. À l’aune des renouvellements historiographiques dans le champ du luxe, de la consommation et de l’hospitalité aristocratiques, la présente communication se propose donc de faire état de résultats de recherches relativement à l’économie matérielle des foyers et patronages artistiques de quelques grandes maisons (Condé, Orléans…) et de mesurer son incidence sur leurs formes et leurs contenus.

Professeur agrégé et docteur en histoire, David Hennebelle est chercheur associé au

Centre de recherche et d’études Histoire et sociétés – université d’Artois (CREHS). Ses travaux portent essentiellement sur l’histoire sociale et culturelle de la musique en Europe, et plus particulièrement en France aux XVIIe et XVIIIe siècles. Il a publié De Lully à Mozart. Aristocratie, musique et musiciens à Paris XVIIe-XVIIIe siècles, Champ Vallon, 2009. Il est l’auteur d’une vingtaine d’articles et travaille à l’édition prochaine, chez Symétrie, d’une étude sur les Concerts de la Reine (1725-1768) dans le cadre du programme RPCF (Répertoire des programmes de concerts en France).

Thomas LECONTE (Centre de musique baroque de Versailles) « De la cour à la ville : les musiciens du roi face à l’émergence de nouveaux foyers »

Élite musicale du royaume, garants d’une tradition monarchique et dépositaires de la dignité de leur corps ancestral, les musiciens du roi eurent à soutenir un poids institutionnel important, qui a toujours rendu a priori difficile et lente toute évolution structurelle et artistique. À la fin du règne de Louis XIV, au moment où émergent de nouveaux foyers qui concourent à décentraliser l’activité culturelle, cet héritage semble lourd face aux évolutions qui bouleversent la vie artistique. Face à ces changements, quel fut le positionnement de ces musiciens du roi, notamment ceux de la Musique de la Chambre ? Quelles furent leur réaction et leurs stratégies face aux nouveautés et au développement des pratiques ama-teurs ? Comment participèrent-ils à cette évolution ? En furent-ils moteurs ou au contraire en subirent-ils les effets ?

À la fin du XVIIe siècle, la Musique du roi, et notamment celle de la Chambre, connaît elle-même d’importantes évolutions : nouveaux musiciens – tels Couperin, Buterne, Marais, Visée, Forqueray, Matho, Duval, La Barre, les Hotteterre et Philidor, etc. –, nouveaux

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instruments, sous-tendant de nouveaux répertoires et de nouvelles pratiques. Rappelons en même temps que les musiciens du roi ne servent généralement qu’une partie de l’année, le plus souvent par semestre, encourageant ainsi une première émulation. En dehors de leur service, tous doivent donc, ou du moins ont la possibilité, de gérer le reste de leur temps et donc leur activité de musicien, développant différentes stratégies de « carrière » : pratique musicale, stratégies dédicatoires, éditoriales, pédagogiques même, notamment auprès des amateurs, etc. La plupart d’entre eux tissent également des liens avec des personnalités plus ou moins influentes, à travers les dédicaces de leurs œuvres bien sûr, mais aussi par leur activité même et les milieux qu’ils côtoient, tant sur le plan professionnel que personnel. Beaucoup se tournent vers les cercles connus, les « foyers » culturels et artistiques du moment, tels ceux de la duchesse du Maine ou de Philippe II d’Orléans, mais pas unique-ment : en cherchant à identifier les contacts qu’ils jugent importants, on tentera de déter-miner s’ils cherchent à se créer des « réseaux », si ces contacts révèlent de véritables stratégies ou résultent de démarches plus ponctuelles. À travers ces contacts, ces musiciens du roi suivent-ils la « mode », ou cherchent-ils au contraire à conserver, voire revendiquer une certaine indépendance, en se prévalant par exemple de leur notoriété ? Cette question de la notoriété de ces musiciens du roi, de leur « dignité », de leur appartenance à l’élite musicale du royaume sera également abordée : quelle conscience en ont-ils ? se servent-ils de cette notoriété de musicien d’élite – mais aussi, d’une certaine manière, de courtisan – pour se placer auprès de nouveaux mécènes ou amateurs ? la mettent-ils en avant pour influer sur l’évolution musicale du temps, et dans quelles mesures sont-ils acteurs de cette évolution ? L’observation de ces phénomènes et de ces stratégies invitera enfin à s’inter-roger sur la notion même de « foyer », et l’idée que pouvaient s’en faire ces musiciens du roi.

Thomas Leconte est chercheur au sein du pôle Recherche du Centre de musique baroque

de Versailles (CESR, UMR 7323 du CNRS), où il est responsable éditorial des Éditions critiques. Ses travaux de recherche se concentrent essentiellement sur l’étude historique, musi-cale et l’interprétation (Performance Practice) des musiques de société du XVIIe siècle français (air de cour, ballet de cour, musique spirituelle en français, musique instrumentale), ainsi que sur la genèse du premier grand motet louis-quatorzien (1643-1682), répertoires auxquels il a consacré de nombreuses publications. Parallèlement, il s’intéresse à la musique religieuse des provinces de France aux XVIIe et XVIIIe siècles, et aux pratiques musicales ordinaires et extraordinaires des cathédrales sous l’ancien régime. Également flûtiste diplômé du Conservatoire royal de Bruxelles, où il a étudié auprès de Barthold Kuijken, il se produit régulièrement en concert.

Laurent LEMARCHAND (université de Rouen) « Les arts entre Paris et Versailles : le Palais-Royal de Philippe II d’Orléans comme rénovateur de l’absolutisme louisquatorzien »

Longtemps le Versailles du « roi de gloire » a occulté l’existence de foyers artistiques autres : comme il le prétendait, l’absolutisme louisquatorzien était synonyme de monopole exclusif. Une des traductions majeures en était, à côté de l’affirmation et de la diffusion des académies royales, l’essor nouveau de l’opéra, vu comme le spectacle-type de ce régime. Mais avec la fin du XXe siècle l’historiographie s’est mise à douter de toute cette construc-tion ; la thèse de Katia Béguin, notamment, a révélé le maintien solide d’une cour princière divergente sinon dissidente, celle des Condés à Chantilly. Mais celle des Orléans à Paris même, au Palais-Royal, est restée, tout comme la capitale encore écrasée par le magistère de Versailles, très ignorée. Il faut noter que si elle bénéficie d’un intérêt bien plus anecdotique

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et légendaire que réel, c’est aussi la conséquence du manque ou du type de sources restantes.

La cour du Palais-Royal acquiert pourtant, avec les années 1700, une place excep-tionnelle tout comme Paris dépossède déjà Versailles de son magistère intellectuel et artistique. Au demeurant, il faut se rappeler que Versailles n’a pas, sous Louis XIV, de salle de spectacle véritable, que les académies ou l’Opéra sont parisiens, au Louvre ou même au Palais-Royal. Celui-ci apparaît ainsi comme un foyer majeur. S’y concentrent à peu près toutes les activités artistiques et leurs acteurs : opéra et théâtre bien sûr, mais aussi musique et danse avec l’étoffé orchestre des Orléans, l’architecture et les arts décoratifs avec les aménagements multiples du palais, la peinture avec le développement des collections du prince… Tout semble d’ailleurs tenir à celui-ci, qui dépasse souvent Louis XIV lui-même sur les plans artistiques : il peint, il compose, il joue, il philosophe, il dirige… S’explique alors la faculté du Palais à reprendre, avec 1715, la première place perdue par une cour versaillaise abandonnée et décriée, et son étoffement, par exemple avec le retour des Comédiens-Italiens devenus la Compagnie du Régent.

Mais les rapprochements et les coïncidences simples peuvent être simplistes et ils n’expliquent pas le mode de fonctionnement du sujet. Le duc d’Orléans reste un Bourbon, largement configuré par Louis XIV (éducation, fonctions). De même, tant pour la musique que pour les arts décoratifs, le goût du roi joue de façon certaine pour déterminer le transfert du Versailles royal au Paris aristocratique et du coup l’influence essentielle du premier tout comme la continuité entre les deux. Quant à l’Opéra, sa localisation dans les murs mêmes du Palais-Royal n’en fait pas une institution orléaniste, alors que le vieux roi cherche à en reprendre la direction défaillante dans les années 1710.

Subsistent donc de nombreuses interrogations sur ce Palais-Royal pour en comprendre notamment le mode de fonctionnement : s’agit-il d’une cour princière véritable ou d’un simple palais doté de quelques moyens afférant au style de vie de la haute aristocratie parisienne vers 1700 ? Quelles sont les influences de Versailles et de la cour royale sur les activités et les positions développées par ce foyer ? Quelles sont les influences parisiennes et urbaines divergentes ou même quels sont les rapports entre ces activités artistiques ou intellectuelles qui font corps ou système pour transformer le Palais-Royal en foyer ? Quels sont les rapports entre les artistes et intellectuels logés ou employés au Palais et les admi-nistrations royales, les autres foyers parisiens ? Quels styles ? etc.

Laurent Lemarchand est maître de conférences en histoire moderne et directeur du

département d’histoire de l’université de Rouen. Après des années de service de professeur agrégé en histoire moderne et contemporaine au sein de la même université, et une thèse sur le régime politique de la Régence de Louis XV (La monarchie absolue entre deux âges : épreuves, expériences et réalisations de la Régence (1715-1723), Rouen, 2007), Laurent Lemarchand mène des recherches surtout en histoire politique et sociale, notamment sur l’absolutisme français et l’histoire de l’État monarchique, et sur l’histoire comparative des expériences absolutistes en Europe.

Catherine MASSIP (École pratique des hautes études) « Amateurs, professionnels : foyers et professionnalisation progressive des artistes (1680-1715) »

L’exercice de la profession de musicien fut encadré dès le XIVe siècle grâce à la consti-tution de corps de métiers et jurandes régis par des règles précises. À Paris, la communauté

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des joueurs d’instruments de Saint-Julien-des-Ménétriers représente un point d’ancrage de la professionnalisation pour certaines catégories de musiciens et, sous le règne de Louis XIV, une source de recrutement pour des corps de musiciens attachés à la cour comme les Vingt-quatre Violons du roi ou les petits violons du Cabinet. En outre, les corps de musiciens attachés aux maisons des princes du sang sont connus grâce aux États de la France entre autres. Pourtant, les tensions qui affectent cette communauté à la fin du XVIIe siècle sont révélatrices d’évolutions importantes : concurrence de structures royales comme l’Académie de danse (1662), incapacité à intégrer de nouvelles formes d’exercice de la musique, conflits d’autorité. Parmi les publications qui permettent de mesurer la margi-nalisation de ces nouveaux « professionnels » et de cerner qui sont les vrais acteurs de la vie musicale à Paris, le Livre commode des adresses de Paris de Nicolas de Blégny (Abraham du Pradel) offre pour l’année 1692 un tableau ordonné qui se double d’une cartographie. D’autres sources comme les listes d’imposition de la taille ou bien les factums qui jalonnent les actions en justice confirment que se construit à l’orée du XVIIIe siècle une conception différente du métier de musicien. Peut-on dans l’état actuel des connaissances faire le lien entre ces sources et le rôle qu’ont pu jouer les foyers aristocratiques ou non dans cette évolution? Ceux-ci ont-ils joué un rôle de tremplin ? Pouvait-on remarquer des phéno-mènes de cooptation d’un foyer à l’autre ? Dans le cas des foyers aristocratiques, les musi-ciens faisaient-ils partie du personnel des maisons ou faisait-on appel à eux de manière ponctuelle et sous quelle forme ?

Archiviste-paléographe, docteur ès lettres et sciences humaines, Catherine Massip a été

directeur du département de la Musique de la Bibliothèque nationale de France de 1988 à 2010 et directeur d’études puis émérite à l’École pratique des hautes études (IVe section) de 2004 à 2014. Elle a publié plusieurs ouvrages sur la musique française des XVIIe et XVIIIe siècles : La vie des musiciens de Paris au temps de Mazarin, Picard, 1976 ; L’art de bien chanter : Michel Lambert (1610-1696), Société française de musicologie, 1999 ; Michel-Richard Delalande ou le Lully latin, Société française de musicologie, 2006, sur les sources musicales : Le livre de musique, Éditions de la Bibliothèque nationale de France, 2008, et dirigé ou contribué à des ouvrages collectifs : Portraits d’Olivier Messiaen, Éditions de la Bibliothèque nationale de France, 1996, Portraits de Darius Milhaud, Éditions de la Bibliothèque nationale de France, 1998, Elsa Barraine, Delatour, 2010, 3 volumes « Collectionner la musique » avec Denis Herlin, Jean Duron, Dinko Fabris et Valérie de Wispelaere, Brepols, 2010, 2012, 2014 ; des catalogues d’exposition : Don Juan, Éditions de la Bibliothèque nationale de France, 1991, Hector Berlioz, la voix du romantisme, Éditions de la Bibliothèque nationale de France, 2003, etc. Elle est actuellement chercheur associé à l’IReMus, au sein duquel elle participe à divers programmes (écrits sur la musique, éditions musicales, histoire des collections musicales).

Laura NAUDEIX (université Rennes 2) « Foyer et territoire dans la Comparaison de la musique italienne et de la musique française de Le Cerf de la Viéville »

L’œuvre de Jean-Laurent Le Cerf de la Viéville, publiée au tout début du XVIIIe siècle, est souvent utilisée comme l’un des textes indicateurs d’un « goût français », car s’y exprime le plus longuement une valorisation de la musique lulliste et, au-delà, d’un style simple, clair, aisé à retenir et à chanter, à l’encontre de la sophistication italienne. Cette musique prouve justement sa valeur par le fait qu’elle est unanimement appréciée par les auditeurs que convoque Le Cerf dans son livre.

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En effet, afin de construire son propos, il élabore une stratégie d’écriture imitant toujours la prise de parole orale, inventant à cette fin un cercle d’amateurs de musique assez précisément ancré dans la ville de Rouen. Ce cercle est mis en scène dans les dialogues qui composent les deux premières parties de la Comparaison de la musique italienne et de la musique française publiée en 1704 et 1706. Mais ce groupe s’élargit bientôt aux destinataires des lettres qui les accompagnent, ainsi qu’au commanditaire affiché de la troisième partie de la Comparaison, constituée essentiellement d’un discours sur la musique d’église. Dans tous les cas, les habitants de Rouen, la ville elle-même et ses pratiques musicales affleurent constamment dans le texte.

Toutefois, afin de pouvoir prouver le caractère proprement français de la musique de Lully, Le Cerf « finit » par revenir à Paris, évoquant la ville au travers de son opéra, de ses églises et de son célèbre Pont-Neuf, caisse de résonance idéale. Paris et, idéalement la cour, semblent ainsi rester à l’horizon d’un propos sur le goût national. Cette hésitation entre différents espaces sociaux, géographiques et symboliques, tous effectivement traversés par l’auteur, permet de mettre en perspective la notion de foyer à une époque où les rapports de force entre les cercles d’appréciation de la musique semblent s’exacerber.

Maître de conférences en arts du spectacle à l’université Rennes 2, Laura Naudeix est

spécialiste du théâtre musical des XVIIe et XVIIIe siècles. Elle a notamment publié La Drama-turgie de la tragédie en musique, Champion, 2004 ; une édition critique de Louis de Cahusac, La Danse ancienne et moderne en collaboration avec Jean-Noël Laurenti et Nathalie Lecomte, Desjonquères-Centre national de la danse, 2004, et Les Amants magnifiques, Psyché et La Comtesse d’Escarbagnas : notice et annotation des pièces et des livrets, Œuvres complètes de Molière en collaboration avec Anne Piéjus, Gallimard, bibliothèque de la Pléiade, 2010. Elle prépare actuellement l’édition des textes de la première querelle sur la musique italienne (Raguenet, 1702, Le Cerf de la Viéville, 1704-1706).

Barbara NESTOLA (CNRS - Centre d’Études Supérieures de la Renaissance) « L’art d’assembler, le choix de partager : la collection de musique italienne des Stuart en France (1689-1718) »

La pratique musicale à la cour des Stuart reçut une nouvelle impulsion avec l’arrivée à Londres en 1685 de Marie d’Este, la seconde femme de Jacques II d’Angleterre. Elle était originaire de la cour de Modène, où la musique avait toujours occupé une place de choix : son frère, le duc François II, avait réuni l’une des collections de musique les plus imposantes de l’Italie du XVIIe siècle, laquelle témoignait entre autres de l’activité artistique qui se déroulait dans sa maison. Si pendant la période londonienne le champ d’action de Marie était resté circonscrit, les années d’exil à Saint-Germain-en-Laye lui offrirent, d’une manière paradoxale, l’occasion de s’affirmer davantage comme mécène. La pratique de la musique italienne chez les Stuart se démarquait ainsi par son originalité et venait se juxtaposer au goût français, officiellement promu par Louis XIV.

À l’instar de son frère, Marie souhaita conserver une trace de la musique qu’on entendait dans les salons du château de Saint-Germain, en confiant à Innocenzo Fede, le maître de musique de sa cour, le soin de choisir et d’assembler les pages emblématiques de ce répertoire. Sept volumes réalisés par les copistes de la bibliothèque royale, aujourd’hui conservés à la Bibliothèque nationale de France, renferment des airs italiens, mais aussi des cantates et des sonates pour flûte ou pour violon. Nous sommes aujourd’hui en mesure d’affirmer que cette série de manuscrits a été recopiée à l’identique, à l’exclusion des œuvres

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instrumentales, pour le comte Alexandre de Toulouse, prince appartenant à la cabale du Dauphin et amateur, comme les autres membres de ce groupe, de musique italienne.

Mon intervention envisagera deux éléments liés à la collection de musique italienne des Stuart : la reconstitution du réseau à l’origine de la transmission des œuvres, reconstitution qui sera possible grâce à l’identification de ces dernières, et la question des modalités du “partage” du goût nouveau par les élites. En éclairant une dynamique en partie encore inédite des voies de transmission du répertoire, ces réflexions contribueront à enrichir la connaissance de la réception de la musique italienne en France au tournant du siècle.

Barbara Nestola a fait ses études à l’université de Pise, où elle a obtenu sa Laurea en

Lettres modernes, avec spécialisation en histoire de la musique, et parallèlement au conser-vatoire supérieur de Lucca, où elle est diplômée en piano. En 1999-2000, elle a été assistante de recherche à l’université de Pise. Elle est ingénieur d’études au CNRS depuis 2001 et travaille au Centre de musique baroque de Versailles. Elle est membre du « Francesco Cavalli Study Group » de l’IMS qui édite les opéras de Cavalli avec Bärenreiter sous la direction d’Ellen Rosand (université de Yale). Ses travaux portent sur la réception de la musique italienne en France et sur la représentation des œuvres lyriques à l’Académie royale de musique de Paris. Elle collabore régulièrement avec des interprètes professionnels dans le cadre de stages, master-class, productions d’opéras et pour la réalisation de programmes de concert et d’enre-gistrements discographiques.

Fabrice PREYAT (université libre de Bruxelles – Fonds National de la Recherche Scientifique) « Foyers ou essaims ? Essai de topographie chrétienne du plaisir à la fin du règne de Louis XIV »

À Turin, Marie-Adélaïde de Savoie reçut une éducation qui était le fruit du cynisme politique de Victor-Amédée II. Dès la naissance de la jeune-fille, le duc de Savoie avait en effet souhaité en faire une « princesse française ». Aussi, lorsqu’elle arriva à Versailles, la duchesse de Bourgogne dut-elle moins se détacher du goût italien qu’elle n’eut à s’accli-mater à la géographie des coteries versaillaises et à la rivalité entretenue entre des foyers artistiques plus ou moins éloignés de la cour.

L’éducation de Marie-Adélaïde devait se poursuivre dans le prolongement de celle du duc de Bourgogne et selon les perspectives tracées par le Petit Concile de Bossuet depuis l’aube des années 1670, à partir du préceptorat du grand dauphin. Sous l’égide de l’évêque de Meaux s’était progressivement déployé un réseau de pédagogues qui encadraient l’éduca-tion stricto-sensu mais aussi, pour partie, les divertissements, tant des héritiers directs du roi que des légitimés : Genest et Malézieu œuvraient à Sceaux, Châtenay ou Clagny dans l’entourage du duc et de la duchesse du Maine ; Valincour était attaché au comte de Toulouse ; Fénelon et l’abbé Fleury veillaient sur l’apprentissage du duc de Bourgogne et de la duchesse…

Une part de ce réseau, entre les membres duquel s’échangeaient méthodes et manuels, eut également pour tâche de parfaire l’éducation des ludoviciennes de Saint-Cyr (Fénelon, Guyon) et d’orchestrer non seulement leur apprentissage religieux mais aussi leur initiation au théâtre, à la déclamation et à la musique.

Entre les cours et les préceptorats se dessinent ainsi des situations de connivences – par la parenté des goûts – mais aussi de concurrences par la force de rivalités politiques (duchesse du Maine vs. duchesse de Bourgogne), qui tantôt relaient les ambitions du roi

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(promotion de la robe et des personnes non titrées), tantôt les contrecarrent (réformes élaborées par le clan des ducs) ou rompent ouvertement avec l’étiquette de Versailles.

Une topographie complexe se dessine alors. Sous l’égide de Madame de Maintenon notamment, il s’agira, un temps, de favoriser la perméabilité des différents foyers et d’assurer la circulation des auteurs ou des pièces (e.a. les tragédies bibliques légitimistes de Racine), selon un mécénat diffus qui en appelle à l’autorité de Noailles (Choisy, Duché). La duchesse de Bourgogne poursuivra une part également de son apprentissage au sein de la fondation royale dédiée à saint Louis.

En éclairant le déploiement réticulaire d’une part des dévots de la cour et leurs respon-sabilités dans l’orchestration de divertissements dispendieux, il s’agira d’interroger les notions de « foyer » et d’« essaim ». Cet examen aura pour ambition de comprendre une géographie relationnelle complexe et mouvante qui varie au gré des querelles politiques et des controverses religieuses mais aussi de saisir les conséquences relatives à l’instrumen-talisation de ces concepts en sciences humaines.

Fabrice Preyat est professeur à l’université libre de Bruxelles et chercheur qualifié hono-

raire auprès du Fonds National de la Recherche Scientifique. Ses recherches concernent notamment les rapports entre mécénat religieux, littérature et théologie aux XVIIe et XVIIIe siècles. Après une thèse consacrée au Petit concile de Bossuet et à la christianisation des mœurs et des pratiques littéraires sous Louis XIV (Münster-Berlin, Lit Verlag, 2007), il a co-édité, entre autres, l’ouvrage intitulé : La duchesse du Maine (1676-1753). Une mécène à la croisée des arts et des siècles, avec Catherine Cessac et Manuel Couvreur, Éditions de l’université de Bruxelles, 2003. Il a dirigé le volume La croix et la bannière. L’écrivain catholique en francophonie (XVIIe-XXIe siècles) avec Frédéric Gugelot et Cécile Vanderpelen-Diagre, Éditions de l’université de Bruxelles, 2010, un ouvrage consacré au mécénat de Marie-Adélaïde de Savoie (1685-1712). Duchesse de Bourgogne, enfant terrible de Versailles, Éditions de l’université de Bruxelles, 2014 et Fortunes d’Érasme. Réception et traduction de la Renaissance à nos jours (sous presse, 2015). Ses travaux portent également sur les mouvements antiphilosophiques à l’époque des Lumières : L’apologétique littéraire et les anti-Lumières féminines, numéro thématique et collectif d’Œuvres et critiques, 2013, 38, no 1, et Femmes des anti-Lumières, femmes apologistes (à paraître en 2016). Il a récemment contribué à l’édition du Dictionnaire des femmes des Lumières, coédition Huguette Krief, Valérie André, Champion, 2015 et a participé au Dictionnaire des anti-Lumières, Champion, 2015. Il prépare actuellement un ouvrage consacré à L’abbé de Choisy, pédagogue et historien à la cour de Versailles ainsi qu’une édition critique de ses œuvres littéraires.

Tatiana SENKEVITCH (Musée des Beaux-Arts de Houston) « Qui gouverne l’empire des sens ? Les évolutions du goût à la charnière du XVIIe et du XVIIIe siècle »

Selon l’abbé Dubos, « la vue a plus d’empire sur l’âme que les autres sens ». Ses Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture (1719), l’un des plus importants traités esthétiques du XVIIIe siècle, traitent en profondeur du développement des arts plastiques, de la littérature et de la musique au crépuscule de l’âge classique. Je voudrais montrer que l’idée de Dubos selon laquelle le sens de la vue susciterait la confiance et l’assurance dans l’expérience émo-tionnelle pourrait correspondre à une privatisation de cette expérience esthétique entraînée par le développement des collections privées qui favorisaient des formes de goût diffé-rentes de celles de la cour.

Plus précisément on cherchera à savoir en quoi la mise en relation de la critique de la peinture avec les autres arts telle que la préconise Dubos est le signe d’une autonomie de la

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critique d’art naissante par rapport aux normes véhiculées par les académies royales, en particulier l’Académie de peinture et de sculpture. L’idée de Dubos selon laquelle une bonne intelligence de la peinture dépend d’une étude comparée des œuvres de l’art ancien et de l’art nouveau, celles des peintres reconnus et inconnus, plutôt que de la simple vérification des règles académiques, n’annoncerait-elle pas la confrontation entre les artistes et les « gens de lettres » qui allait se développer dans l’Académie de peinture et de sculpture au XVIIIe siècle ?

Après un Master d’histoire de l’art à l’Académie des Beaux-Arts de Saint-Pétersbourg (Russie), Tatiana Senkevitch a écrit une thèse intitulée «The Printmaker’s Perspectives : Abraham Bosse and the Pedagogical Debates at the Académie de Peinture et de Sculpture, 1648-1661» à l’université du Michigan. Elle a enseigné l’histoire de l’art et de l’architecture à l’université de Toronto, l’université de Cornell, et plus récemment à l’université de Rice à Houston, où elle travaille aussi comme associée de recherches à la Fondation Sarah Blaffer au musée des Beaux-Arts. Elle a publié plusieurs articles sur Philipe de Champaigne, Colbert, et sur des sujets liant l’art de l’époque baroque à l’art récent (Velazquez et Eve Sussman). Elle est en train d’achever un ouvrage sur l’Académie de peinture et de sculpture et d’en commencer un autre sur Callot et la culture de la danse et des spectacles.

Guy SPIELMANN (Georgetown University, Washington, DC) « Le théâtre de société, foyer artistique (?) »

Le théâtre de société sous l’Ancien Régime n’a jamais constitué un phénomène homo-gène, quels que soient les critères retenus : taille de la scène, types de spectacles, statut des interprètes, moyens engagés, etc. Si certaines formes dramatiques (comme la parade) furent exclusivement pratiquées en société, elles ne représentent qu’une partie du répertoire, et même le caractère « privé » des lieux et des représentations apparaît parfois discutable. Il faut donc repenser les activités théâtrales en société comme une « forme de convivialité distinctive » (Lilti) et sortir des oppositions binaires telles que privé / public ou intimité / publicité, afin de dégager une cartographie des lieux et un système des pratiques à partir d’une analyse conceptuelle et sémantique dissipant ambiguïtés et contradictions.

Assister à un « événement-spectacle » (spectacle event), c’est d’abord être physiquement présent dans le lieu et au moment où se déroule une performance ; c’est aussi y prêter attention, ainsi qu’aux autres membres de l’assistance. Le théâtre de société permet de mieux problématiser la pluralité de ces modes d’attention, et de s’interroger sur la perti-nence de la distinction entre « sphère publique » et « sphère privée ». Or, récuser cette axiologie conventionnelle exige de dégager une structure axiologique propre à réorganiser les divisions conceptuelles à un niveau plus général, pour rendre compte de la spécificité irréductible du théâtre de société, et d’évaluer son statut éventuel de foyer de création.

On ne peut alors faire l’économie d’une interrogation sur le rapport entre le lieu physi-que et la nature du spectacle qui s’y déroule, souvent perçus comme inextricablement liés. Étant donné les différences entre un théâtre aménagé à grands frais dans une résidence princière, et le coin de salon bourgeois qui sert de scène improvisée, il est inutile de vouloir définir un type de lieu propre au théâtre de société, et il faut plutôt postuler des types de relation – entre spectateurs, et entre spectateurs et performeurs –, qui fondent une « société ». Dans quelle mesure ces relations sont-elles influencées par le lieu où elles se réalisent ? Au tout début du XVIIIe siècle, les lieux de spectacle se multiplient et se diver-sifient ; mais ces lieux nouveaux ont-ils engendré de nouvelles formes de sociabilité (et donc aussi de nouvelles manières d’assister à un spectacle), ou bien ont-ils été au contraire

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choisis ou créés pour répondre à de nouvelles formes de sociabilité et de « spectation » ? En d’autres termes, les « mutations du goût » découlent-elles de l’apparition de ces nouveaux « foyers », ou l’apparition de ces foyers résulte-t-elle des mutations du goût ?

Guy Spielmann est depuis 1994 enseignant-chercheur à Georgetown University

(Washington, DC), et a également enseigné en France (Paris, Strasbourg et récemment à l’uni-versité Stendhal-Grenoble 3). Son domaine de prédilection recouvre tout ce qui touche aux arts du spectacle à l’aube des temps modernes, avec un penchant particulier pour la scéno-graphie et les genres non-littéraires tels que le théâtre de foire et la commedia dell’arte. Il travaille souvent sur les rapports entre connaissance savante et diffusion de masse, notamment sur les représentations des XVIIe-XVIIIe siècles au cinéma et dans la bande dessinée. Une soixantaine d’articles a paru sous son nom (Revue d’Histoire littéraire de la France, Revue d’Histoire du Théâtre, Dix-Septième Siècle, Littératures classiques, Studies on Voltaire and the Eighteenth Century [Oxford], Texte [Toronto], Le Nouveau Moliériste [Glasgow], Communications, etc.) et il a publié Le Jeu de l’Ordre et du Chaos : Comédie et pouvoirs à la Fin de règne, 1673-1715, Honoré Champion, 2002, ainsi qu’un livre sur les « parades » du XVIIIe siècle, Éditions Lampsaque, 2006, comédies foraines réinventées par le théâtre de société. Cet ouvrage reflète un travail de recherche mais aussi de production dramatique avec la Compagnie SapassoussakasS, fondée en 2002. Depuis 2005, il donne régulièrement des ateliers sur la parade, dans le cadre de résidences artistiques d’une dizaine de jours en milieu universitaire. Guy Spielmann a également créé un centre virtuel de ressources sur les arts du spectacle aux XVIe-XVIIIe siècles, OPSIS - Spectacles du Grand Siècle. (http://opsis.georgetown.edu).

Jörn STEIGERWALD (université de Paderborn) « La reconfiguration de la vraisemblance morale ou la naissance d’une deuxième galanterie : l’exemple de Thomas Corneille »

Du Plaisir modélise dans ses Sentiments sur l’histoire (1685) le concept-clé de la « vraisem-blance » d’une manière nouvelle en affirmant qu’une histoire qui paraît être moralement incroyable peut non seulement être vraisemblable mais attirer d’autant mieux l’attention du lecteur. En donnant l’exemple « d’une jeune personne qui refuse d’épouser son amant parce qu’elle s’imagine l’aimer trop » l’auteur met en relief trois points importants : 1. il s’intéresse aux conflits immanents de la tendresse ainsi qu’aux transgressions de la tendresse ; 2. il focalise le propos spécifiquement sur la dimension psychologique de la tendresse et sur celle des passions en général sans avoir un point de vue moraliste ; 3. il se concentre sur les sentiments intimes, voire la sensibilité des protagonistes et non plus sur leurs actions morales.

Cette « évolution » de la poétique ainsi que de la pratique romanesque après 1685 est bien connue, mais la question de savoir si, et si oui, de quelle manière elle va de pair avec une reconfiguration de la conception du théâtre de la même période, reste ouverte. La communication traite de ces questions en analysant des pièces choisies de Thomas Corneille des années 1690.

Jörn Steigerwald est professeur de littérature comparée à l’université de Paderborn. Son

habilitation a porté sur « Galanterie. Die Fabrikation einer natürlichen Ethik der höfischen Gesellschaft » (Galanterie. La Fabrication d’une éthique naturelle de la société de cour). Soutenue à Bochum en 2007, elle a été publiée à Heidelberg en 2011. Jörn Steigerwald a été professeur invité à Cologne, à Berlin (université libre), à Tübingen et à Clermont-Ferrand, ainsi que chercheur invité à Florence (Kunsthistorisches Institut, Max-Planck-Institut), à Oxford (Maison française d’Oxford, Lady Margarete Hall) et à Columbia University. Il est également

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membre du Projet AGÔN (Paris-Sorbonne, Oxford) et du CELIS (Clermont-Ferrand). Il a dirigé plusieurs volumes sur la littérature française du XVIIe siècle et sur la littérature italienne du XVIe siècle.

Thomas Vernet (Fondation Royaumont - Bibliothèque musicale François-Lang) « Musique et théâtre dans la “maison de ville” de Marie-Anne de Bourbon Conti à Versailles »

Née à Vincennes le 2 octobre 1666 des amours de Louis XVI et de Louise de La Vallière, Marie-Anne de Bourbon porta le nom de demoiselle de Blois jusqu’à son mariage, célébré le 16 janvier 1680 à Saint-Germain-en-Laye, avec son cousin, Louis-Armand de Conti (1661-1685). Cinq ans plus tard, elle devait ajouter à son titre la qualité de douairière après que son époux eut été emporté par la petite vérole, le 9 novembre 1685. À dix-neuf ans, Marie-Anne fut une « veuve aussi riche que belle [mais qui] eut de quoi se consoler ». En effet, telle Célimène, le temps du deuil passé, elle devait négocier, en veuve ni tragique ni dévote, l’espace de liberté que lui accordait son statut. Outre sa beauté éloquente vantée par tous les mémorialistes, son goût et ses aptitudes pour la danse, le théâtre lyrique et la musique contribuent à faire de cette princesse l’une des figures des plus attachantes de la Cour de la fin du règne de Louis XIV.

À partir des spectacles d’opéra, concerts et tragédies bibliques donnés dans sa « maison de ville » de Versailles à partir de décembre 1699, on interrogera les pratiques artistiques soutenues par la princesse de Conti. Sans posséder l’ampleur du mécénat de son cousin Philippe d’Orléans ni la singularité de celui de sa demi-sœur la duchesse du Maine, le patronage musical de Marie-Anne de Conti compta pourtant dans le mouvement de redéfinition des goûts face au modèle royal dans les dernières décennies du règne de Louis XIV. Si la princesse n’imposa pas un modèle personnel, elle contribua par sa seule présence à de nombreuses fêtes données dans l’ombre de son père, à conforter les mécènes princiers dans la nécessité de leur action. Elle trouva dans l’entourage de son demi-frère le Dauphin, puis dans celui du futur Régent, les conditions favorables à l’épanouissement et à l’expression de ses passions. Son patronage se situe à mi-chemin dans le processus d’éman-cipation, entre la Cour et la Ville. Tout en contribuant à l’émergence d’une nouvelle sensi-bilité nourrie par les nouveaux foyers musicaux de la capitale, elle ne se coupa jamais complètement de la vie musicale versaillaise et parvint même d’une certaine manière à y imposer les propres références artistiques de son clan.

Thomas Vernet est docteur en musicologie. Ses travaux publiés portent essentiellement

sur la réception et la pratique de la musique dans les milieux aristocratiques en France aux XVIIe et XVIIIe siècles, ainsi que sur la presse musicale, l’histoire des bibliothèques et des collections musicales. Il travaille actuellement sur le fonds musical de la bibliothèque de l’Arsenal et prépare un ouvrage sur Marie-Anne de Bourbon-Conti (1666-1739) et les arts. Il a été enseignant-responsable du département de musique ancienne du Conservatoire à rayon-nement régional de Paris (2008-2014) et du Pôle Supérieur d’enseignement artistique Paris-Boulogne-Billancourt (2010-2014) ; depuis le printemps 2014, il est responsable de la Biblio-thèque musicale François Lang à la Fondation Royaumont.

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BIOGRAPHIES DES DISCUTANTS

Directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (pôle de Marseille), Jean BOUTIER a consacré de nombreux travaux à l’histoire sociale et politique de l’Europe moderne ; les dossiers qu’il a successivement mobilisés concernent l’État monarchique, les aristocraties ou les milieux intellectuels et culturels. Ses différents terrains d’enquête (France, Italie, monde britannique) l’ont conduit à développer des études comparatives concernant les formes de la sociabilité politique, les cultures aristocratiques ou les pro-cessus de la communication savante, inséparables d’une pratique réflexive mêlant épisté-mologie pratique et historiographie critique.

Il a notamment publié : – avec Sandro Landi et Olivier Rouchon (éd.), Florence et la Toscane, XIVe-XIXe siècle. Les

dynamiques d’un état italien, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2004. – avec Brigitte Marin et Antonella Romano (éd.), Rome, Naples, Florence. Les milieux

intellectuels italiens aux XVIIe et XVIIIe siècles, Rome, collection de l’École française de Rome (no 355), 2005.

– Étienne Baluze (1630-1718). Érudition et pouvoirs dans l’Europe classique. Actes du colloque de Tulle, octobre 2006, Limoges, Presses de l’université de Limoges, 2008.

– avec Sandro Landi et Olivier Rouchon (éd.), La politique par correspondance. Les pratiques de la lettre dans l’espace italien, XIV

e-XVIII

e siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2009.

– Grand Atlas de l’Histoire de France, Paris, Autrement, 2011. – avec Caroline zum Kolk, Bernd Klessmann et François Moureau (éd.), Voyageurs

étrangers à la cour de France, 1589-1789 : regards croisés, Centre de recherche du château de Versailles/Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014.

Docteur en histoire, ancien élève de l’École normale supérieure de Fontenay-Saint-

Cloud et agrégé d’histoire, Boris BOVE est maître de conférences en histoire médiévale à l’université de Paris 8 Vincennes-Saint-Denis et spécialiste de l’histoire socio-économique de Paris. Ses travaux ont d’abord porté sur la grande bourgeoisie parisienne au XIIIe-XIVe siècle, dans une thèse publiée sous le titre Dominer la ville. Prévôts des marchands et échevins parisiens de 1260 à 1350, CTHS, 2004. Après les élites parisiennes (bourgeoisie, noblesse), il s’est intéressé à la structuration de l’espace urbain, tel qu’on peut le modéliser dans les Systèmes d’information géographiques, en collaborant au programme ANR ALPAGE dont il a édité les actes avec Hélène Noizet et Laurent Costa (Paris de parcelles en pixels. Analyse géomatique de l’espace parisien médiéval et moderne, Paris, Presses universitaires de Vincennes-CHVP, 2013). Il est actuellement engagé dans une HDR sur la noblesse de cour dans la capitale au XIVe siècle, ce qui l’a conduit à s’intéresser aux résidences et aux itinéraires des rois et des princes médiévaux et à leur rapport à l’espace urbain. Dans cette perspective, il a dirigé en 2014 avec Murielle Gaude-Ferragu et Cédric Michon un colloque sur Paris, ville de cour, XIII

e-XVIII e siècle, à paraître aux Presses universitaires de Rennes. Il est aussi l’auteur de

La France de la Guerre de Cent Ans, Paris, Belin, 2009.

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Natacha COQUERY, ancienne élève de l’École normale supérieure de Fontenay-Saint-Cloud, agrégée d’histoire, est professeure d’histoire moderne à l’université Lyon 2, directrice adjointe du LARHRA (Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes, UMR 5190), membre senior de l’Institut universitaire de France. Spécialiste de la consommation, du crédit et du commerce de détail à Paris au XVIIIe siècle (Tenir boutique à Paris au XVIII

e siècle. Luxe et demi-luxe, Paris, Éditions du Comité historique et scientifique, 2011), elle mène actuellement des recherches sur le marché du luxe sous la Révolution française.

Dernièrement, elle a dirigé avec Isabelle Parésys Se vêtir à la cour en Europe (1400-1815), Paris, Centre de recherche du château de Versailles / Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 2011, et avec Alain Bonnet Le commerce du luxe. Production et circulation des objets précieux du Moyen Âge à nos jours, Paris, Éditions Mare et Martin, 2015.

Manuel COUVREUR est docteur en Philosophie et Lettres, chercheur qualifié honoraire

du Fonds National de la Recherche Scientifique et membre de la Classe des arts de l’Académie royale des sciences, lettres et beaux-arts de Belgique. Professeur ordinaire à l’université libre de Bruxelles, il y enseigne l’histoire de la littérature française, l’histoire comparée des arts aux XVIIe et XVIIIe siècles, l’histoire du genre lyrique, ainsi que celle de la musique enregistrée. Sa thèse consacrée à la tragédie en musique française a été publiée sous le titre Jean-Baptiste Lully : musique et dramaturgie au service du prince (1992). Il est l’auteur de nombreux articles et études sur les rapports entre musique et littérature en France aux XVIIe et XVIIIe siècles, en particulier sur la cantate française et l’opéra-comique. L’ouvrage collectif Le plaisir musical en France au XVII

e siècle qu’il a dirigé avec Thierry Favier a été couronné du Prix des Muses de la SABAM (2006). Il a dirigé une série de cinq volumes consacrée à l’histoire du théâtre royal de la Monnaie à Bruxelles (1996-2010). Une étude portant sur le mécénat musical de Maximilien-Emmanuel et de Joseph-Clément de Bavière, ainsi qu’une édition critique des Mille et une nuit dans la traduction d’Antoine Galland sont actuellement sous presse.

– « Marie de Louvencourt, librettiste des Cantates françaises de Bourgeois et de Clérambault », Revue belge de musicologie, 1990, vol. XLIV, p. 25-40.

– « D’Aucassin et Nicolette au Chevalier du soleil : Grétry, Philidor et le roman en romances », dans Peter DAMIAN-GRINT (éd.), Medievalism and manière gothique in Enlightenment France, Studies on Voltaire and the Eighteenth Century, mai 2006, p. 124-151.

– « Le prince de Ligne (1735-1814) à Versailles : courtisan, impresario ou agent secret ? », dans Carole CARPEAUX (dir.), Les Wallons à Versailles, actes du colloque de Versailles, décembre 2007, Bruxelles, Commission royale des monuments, sites et fouilles-La renaissance du livre, 2007, p. 98-126.

– « Joseph-Clément de Bavière, Pietro Torri et le développement de l’oratorio drama-tique en France (1707-1714), dans Cécile REYNAUD et Herbert SCHNEIDER (éds), Noter, annoter, éditer la musique. Mélanges en l’honneur de Catherine Massip, Genève, Droz (coll. « Hautes études médiévales et modernes »), 2011, p. 69-86.

– « Cherchez les femmes… : La duchesse de Bourgogne, la marquise d’O et la traduction des Mille et une nuit par Antoine Galland », Études sur le XVIII

e siècle, 2013, 41, p. 107-125. Pierre FRANTZ est professeur de littérature française du XVIIIe siècle à l’université Paris-

Sorbonne (Paris IV). Il est spécialiste de l’esthétique du théâtre et de l’histoire des idées

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esthétiques. Il est l’auteur notamment de Beaumarchais, en collaboration avec Florence Balique (Éditions Atlande, 2004), de l’ouvrage Le Siècle des théâtres, Salles et scènes en France, 1748-1807, en collaboration avec Michèle Sajous d’Oria (ouvrage accompagnant l’expo-sition « Le Siècle des théâtres » à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, mai-juillet 1999) et de L’Esthétique du tableau dans le théâtre du XVIII

e siècle, (Paris, 1998). Il travaille actuellement à l’édition des Œuvres esthétiques et théâtre de Diderot et du théâtre de Voltaire.

Ancien élève de l’École normale supérieure de Fontenay-Saint-Cloud et agrégé en

sciences économiques et sociales, Martial POIRSON est professeur de l’UFR Arts-Philosophie-Esthétique de l’université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis, dont il dirige le département Théâtre, l’équipe « Politique et socio-économie des arts, de la culture et de la création » (E. A. 1573) et le master Coopération artistique internationale. Membre associé de l’UMR LIRE-CNRS de Lyon, il est également visiting professor de la New York University et intervenant dans plusieurs grandes écoles (Institut d’Études Politiques de Paris, ESSEC, Audencia) ainsi qu’au Conservatoire national supérieur d’art dramatique (CNSAD) et à la Comédie-Française. Il est éditeur de pièces du répertoire (Voltaire, Neufchâteau, Boissy, Allainval, Chamfort, Mercier, Destouches, Dufresny), dramaturge, commissaire d’expo-sition et consultant en administration des institutions et entreprises culturelles. Spécialiste d’histoire et d’esthétique théâtrale, il travaille principalement sur la socio-économie des arts, la politique de la culture, la philosophie et l’économie politiques et l’anthropologie de la représentation sur une période allant du XVIIe siècle au XXIe siècle. Il a publié plusieurs ouvrages personnels dont Spectacle et économie à l’âge classique, Classiques Garnier, 2011, Les Audiences de Thalie, Classiques Garnier, 2013, Politique de la représentation, Champion, 2014, Économie du spectacle vivant, Presses universitaires de France, « QSJ », 2013 (en collaboration avec I. Barbéris), Comédie et économie du classicisme aux Lumières, Classiques Garnier, à paraître en 2015, et Théâtres en temps de crise, Classiques Garnier, à paraître en 2016. Il a dirigé une quinzaine d’ouvrages collectifs consacrés aux discours de savoir, imaginaires politiques et économiques qui travaillent les arts et publié une centaine d’articles. Il prépare actuellement un programme de recherche en histoire culturelle sur le « théâtre en ses dehors », autrement dit les pratiques spectaculaires autour du plateau (coulisses, foyer, cafés, souffleurs, claques) et en-dehors de la scène théâtrale qui leur est dédiée. Il travaille également à un ouvrage théorique sur la « Théâtrocratie », autrement dit sur l’utilisation sociale, économique, médiatique et culturelle de procédés relevant du théâtre à des fins politiques.

Gérard SABATIER est professeur émérite des universités (Histoire moderne, XVIe-

XVIIIe siècle, université Pierre-Mendes-France – Grenoble 2). Il s’est spécialisé dans l’étude de la représentation du pouvoir et des rituels monarchiques en Europe, particulièrement dans la France du XVIIe siècle. Il a participé à l’enquête internationale sur la genèse de l’état moderne (CNRS 1985-1986, Fondation Européenne de la Science, 1989-1992) Genèse de l’État moderne. Iconographie, propagande et légitimation, Allan Ellenius, dir. Oxford University Press, 1998, Presses universitaires de France, 2001. Il a enseigné, organisé des séminaires et des colloques en Italie, Espagne, Angleterre, Suisse, Allemagne, Autriche, Pologne, Russie. Il est président du comité scientifique du Centre de recherche du château de Versailles. Il est commissaire, avec Béatrix Saule, de l’exposition Le roi est mort ! (Versailles, octobre 2015-février 2016).

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Il est l’auteur d’environ soixante-dix comptes rendus, articles et présentations sur les portraits, les allégories, les médailles, les programmes iconographiques, les résidences prin-cières, la statuaire, les rituels religieux, les entrées royales… Ses principaux ouvrages : Versailles ou la figure du roi, Albin Michel, 1999. Le prince et les arts. Stratégies figuratives de la monarchie française de la Renaissance aux Lumières, Champ Vallon, 2010. En collaboration : Les monarchies de France et d’Espagne, 1556-1715, rituels et pratiques, Armand Colin, 2001. Direction : Lugares de poder/lieux de pouvoir/places of power, Europe, XV

e-XX e, Lisbonne,

Fondation Gulbenkian, 1998. Claude-François Ménestrier. Les jésuites et le monde des images, Presses universitaires de Grenoble, 2009. Louis XIV espagnol ? Madrid et Versailles, images et modèles, Centre de recherche du château de Versailles/Éditions de la Fondation de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 2009. Les funérailles princières en Europe XVI

e-XVIIIe siècle, vol. 1, Le grand théâtre de la mort, Centre de recherche du château de Versailles/Éditions de la Fondation de la Maison des sciences de l’homme, 2012, vol. 2, Apothéoses monumentales, Centre de recherche du château de Versailles/Presses universitaires de Rennes, vol. 3, Le deuil, la mémoire, la politique, Centre de recherche du château de Versailles/Presses universitaires de Rennes, 2015.

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ORGANISATEURS

Rémy CAMPOS est professeur d’histoire de la musique au Conservatoire national

supérieur de musique et de danse de Paris et coordinateur de la recherche à la Haute école de musique de Genève. Ses recherches ont porté sur la redécouverte des musiques anciennes (La Renaissance introuvable ? Entre curiosité et militantisme : la Société des concerts de musique vocale, religieuse et classique du prince de la Moskowa (1843-1847), 2000), sur les conser-vatoires (Instituer la musique. Les débuts du Conservatoire de Genève (1835-1859), 2003) et sur les questions d’historiographie (avec Nicolas Donin, dir., L’Analyse musicale, une pratique et son histoire, 2009 ; François-Joseph Fétis musicographe, 2013). Il travaille actuellement sur l’histoire des pratiques musicales aux XIXe et XXe siècles (avec Aurélien Poidevin, La Scène lyrique autour de 1900, 2012.)

Anne-Madeleine GOULET est chargée de recherche au CNRS (Centre d’Études Supé-

rieures de la Renaissance, UMR 7323). Après avoir consacré plusieurs livres à la poésie et à la musique en France au XVIIe siècle (Poésie, musique et sociabilité au XVIIe siècle, 2004; Paroles de musique. Catalogue des Livres d’airs de différents auteurs publiés chez Ballard, 1658-1694, 2007; en coll. avec Laura Naudeix, La Fabrique des paroles de musique en France à l’âge classique, 2010), elle s’intéresse à présent au théâtre, à la musique et à la danse dans les milieux aristocratiques parisiens et romains du XVIIe siècle (transferts culturels, histoire du goût et sociabilité). De 2009 à 2012 elle a été « mise à disposition » de l’École française de Rome afin de co-diriger le programme ANR-DFG MUSICI (http://www.musici.eu), dédié à l’étude des musiciens européens qui sont allés à Venise, à Rome et à Naples entre 1650 et 1750. Ce programme a donné lieu à la publication de deux ouvrages : La Musique à Rome au XVII

e siècle. Études et perspectives de recherche (en collaboration avec C. Giron-Panel, École française de Rome, 2012) et Europäische Musiker in Venedig, Rom und Neapel (1650-1750) : Musik, Identität der Nationen und kultureller Austausch (en collaboration avec G. Zur Nieden, Bärenreiter, 2015, coll. Analecta musicologica, no 52).

Mathieu DA VINHA est docteur en histoire moderne après la soutenance d’une thèse

publiée sous le titre Les Valets de chambre de Louis XIV (Perrin, 2004). Ingénieur de recherche de l’université de Versailles - Saint-Quentin-en-Yvelines, il est directeur scientifique du Centre de recherche du château de Versailles depuis 2010. Auteur de plusieurs études et articles, il travaille aujourd’hui plus spécifiquement sur les usages de la cour de France et sur le fonctionnement quotidien du château de Versailles sous l’Ancien Régime. Parmi ses livres, on peut mentionner : Le Versailles de Louis XIV (Perrin, 2009) ; Alexandre Bontemps, premier valet de chambre de Louis XIV (Perrin, 2011) ; Au service du roi : dans les coulisses de Versailles (Tallandier, 2015) ; Versailles : histoire, dictionnaire et anthologie, (dir. avec Raphaël Masson, Robert Laffont, coll. « Bouquins », 2015).