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La reconversion des industries du complexe militaro-industriel russe 33 LA RECONVERSION DES INDUSTRIES DU COMPLEXE MILITARO-INDUSTRIEL RUSSE : LE CAS DE L’OUDMOURTIE Marie CASEN Doctorante à l’INALCO Professeur à l’ESCE La République d’Oudmourtie, située à plus de 1 000 km à l’est de Moscou dans la région Volga-Oural 1 , a vu le jour sous sa forme politique et juridique actuelle le 20 septembre 1990 2 . Approximativement de la taille du Danemark, la population de ce sujet de la Fédération de Russie est d’environ 1,6 millions d’habitants 3 . Une centaine de nationalités 4 s’y côtoie parmi lesquelles les Russes (environ 60% de la population), les Oudmourtes (30% de la population) et les Tatares (7% de la population) 5 . Selon la constitution de 1994, le russe et l’oudmourte sont les langues officielles de la République. Dans les faits, le russe est la langue (1) L’Oudmourtie est située dans le district fédéral de la Volga mais dans la région économique de l’Oural. (2) L’autonomie de ce territoire est acquise depuis 1920 avec la création alors de l'Oblast autonome Votjak, renommé Oblast autonome oudmourte en 1932 et RSS oudmourte en 1934. Le statut de République date de 1990, et la première constitution du 7 décembre 1994. (3) Selon le recensement de 2010, soit moins que Paris intra-muros (2,2 millions en 2009). (Q 5XVVLH RQ GLVWLQJXH OD QDWLRQDOLWp QDWVLRQDO·QRVW· GH OD FLWR\HQQHWp JUDçGDQVWYR (5) Selon le recensement de 2002 ; les chiffres des nationalités du recensement 2010 n’ont pas encore paru.

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LA RECONVERSION DES INDUSTRIES DUCOMPLEXE MILITARO-INDUSTRIEL RUSSE :

LE CAS DE L’OUDMOURTIE

Marie CASENDoctorante à l’INALCO

Professeur à l’ESCE

La République d’Oudmourtie, située à plus de 1 000 km à l’est de Moscou dans la région Volga-Oural1, a vu le jour sous sa forme politique et juridique actuelle le 20 septembre 19902. Approximativement de la taille du Danemark, la population de ce sujet de la Fédération de Russie est d’environ 1,6 millions d’habitants3. Une centaine de nationalités4 s’y côtoie parmi lesquelles les Russes (environ 60% de la population), les Oudmourtes (30% de la population) et les Tatares (7% de la population)5. Selon la constitution de 1994, le russe et l’oudmourte sont les langues officielles de la République. Dans les faits, le russe est la langue

(1) L’Oudmourtie est située dans le district fédéral de la Volga mais dans la région économique de l’Oural.(2) L’autonomie de ce territoire est acquise depuis 1920 avec la création alors de l'Oblast autonome Votjak, renommé Oblast autonome oudmourte en 1932 et RSS oudmourte en 1934. Le statut de République date de 1990, et la première constitution du 7 décembre 1994. (3) Selon le recensement de 2010, soit moins que Paris intra-muros (2,2 millions en 2009).����(Q�5XVVLH��RQ�GLVWLQJXH�OD�QDWLRQDOLWp��QDWVLRQDO·QRVW·��GH�OD�FLWR\HQQHWp��JUDçGDQVWYR��(5) Selon le recensement de 2002 ; les chiffres des nationalités du recensement 2010 n’ont pas encore paru.

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véhiculaire et l’oudmourte6, au même titre que le tatare7 et les autres langues des peuples de la République, reste cantonné à une utilisation dans la sphère familiale. Avant et pendant la période soviétique, de nombreuses familles oudmourtes furent assimilées linguistiquement et culturellement. Depuis les années 1990, on assiste à un renouveau de la conscience identitaire des minorités nationales de Russie. En Oudmourtie, ce mouvement s’est traduit par la création d’un ministère de la politique des nationalités chargé de promouvoir la langue et la culture de toutes les nationalités de la République, et par la création d’associations culturelles nationales comme Keneš8 qui a une fonction de représentation politique (l’association a présenté un candidat aux élections présidentielles en 2005), et Šundy9 qui a pour objectif de former de jeunes Oudmourtes au défis politiques ou économiques de demain tout en favorisant le développement de la culture oudmourte. En effet, les Russes occupent toutes les fonctions économiques et politiques déterminantes, tandis que l’élite oudmourte vieillissante occupe des fonctions culturelles. L’éducation en Oudmourtie se fait en russe ; la seule possibilité pour étudier l’oudmourte est d’intégrer une des huit écoles qui forment à des carrières littéraires (interprétariat/traduction) ou du spectacle. Si un étudiant veut étudier l’économie, la politique, ou toute autre discipline qui lui permettrait d’occuper un poste décisionnel, il doit le faire en russe. Les discriminations relatives à la nationalité sont d’ailleurs sensibles dans la plupart des domaines et des types de relations sociales.En somme, les questions d’identité des minorités sont encore plus accrues dans la région qu’en Russie en général, puisqu’une mosaïque de peuples, de langues, de cultures et de religions10 compose l’Oudmourtie, et plus largement la région de la Moyenne Volga.

(6) L’oudmourte est une langue finno-ougrienne, voisine du finnois, du hongrois ou encore de l’estonien. (7) Le tatare est une langue turque. (8) En oudmourte, Keneš désignait le conseil du village qui prenait des décisions pour la communauté.(9) « Soleil » en oudmourte.(10) Culturellement, les Russes sont catholiques orthodoxes, les Tatares sont musulmans et les Oudmourtes sont animistes. Il faut ajouter à ces religions les nombreux vieux-croyants (othodoxes schismatiques) déportés en masse dans la région dans les années 1930, et les témoins de jéhova qui semblent y rencontrer un franc succès de nos jours.

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Carte des Républiques de la région de la Moyenne Volga 11

C’est au cœur de ce melting-pot finno-ougrien, turc et slave, au sein de ce territoire multiethnique et des tensions qui le traversent, que se trouve l’une des villes les plus importantes du complexe militaro-industriel �&0,��UXVVH��,çHYVN�La capitale de l’Oudmourtie regroupe un tiers de la population de la République. Fondée sous l’impulsion de Catherine II en 1760, elle fut d’emblée dédiée à la production métallurgique et d’armement, secteur qui reste jusqu’à aujourd’hui le moteur économique de la région. Les usines ,çPDå12 constituent le fleuron de l’économie militaire de la ville, avec à

(11) Source : Novoe Vremija, numéro 37, octobre 2009. En ligne : http://newtimes.ru/articles/detail/8067/ (12) Le site internet des industries militaires : http://www.izhmash.ru/rus/

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son palmarès la création et la production de nombreuses armes de poing et des fusils d’assaut très répandus comme le fusil mitrailleur AK-47 plus connu sous le nom de son inventeur, M. Kalašnikov.Considérant ces facteurs ethnique et économique, quelles ont été les conséquences de la transition politique et économique pour l’Oudmourtie dans les années 1990 ? Dans le contexte actuel de remilitarisation de la Russie, quelles sont les SHUVSHFWLYHV�SRXU�OD�YLOOH�TXDVLPHQW�PRQR�LQGXVWULHOOH�G·,çHYVN�"

I. L’ABANDON DES INVESTISSEMENTS MILITAIRES FÉDÉRAUX ET L’ÉCHEC DU PROGRAMME DE RECONVERSION INDUSTRIELLE EN OUDMOURTIE.

/·LQGXVWULH� GH� O·DUPHPHQW� G·,çHYVN� V·HVW� FRQVLGpUDEOHPHQW� GpYHORSSpH�pendant la période soviétique jusqu’à devenir un complexe militaro-industriel majeur de l’URSS pendant la guerre froide, ce qui a valu à la ville son statut de ville fermée aux étrangers jusqu’en 1992.Depuis 1985, une série de mesures économiques et politiques ont eu pour conséquence une diminution drastique des investissements et des activités du CMI. Les exportations militaires russes sont passées de 20 milliards de dollars en 1980 à 3 milliards de dollars en 199613.Issue du contexte de détente entre les deux grandes puissances de la guerre froide, la politique de normalisation du budget initiée par M. Gorbatchev et poursuivie par B. Eltsine et V. Poutine jusqu’en 2008, passait en partie par une politique de désarmement, notamment avec la signature des traités START14 qui prévoient15 une limitation des arsenaux stratégiques russe et américain. Les mesures économiques fédérales des années 1990, qui visent à introduire une économie de marché en Russie, participent aussi de cet abandon de l’activité du CMI.

(13) Gicquiau H., (1996), « Aspects industriels de la reconversion du CMI russe », Le courrier des Pays de l’Est numéro 414, éd. La documentation française, Paris.(14) Strategic Arms Reduction Treaty (START I: 1991 et START II: 1993). (15 ) Ils ne sont toujours pas appliqués dans leur intégralité.

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La « thérapie de choc », initiée par I. Gaïdar16, qui introduit le libre-échange en Russie de façon radicale, a réduit de 2/3 les commandes du pays en équipement militaire.En outre, sur le plan politique, la désintégration du bloc soviétique a privé la Russie de ses réseaux économiques fondés sur la « fraternité socialiste », de sorte que la production industrielle et en conséquence, l’économie des villes mono-industrielles du CMI, se sont effondrées.La reconversion de l’activité militaire vers des activités civiles est alors apparue comme le remède à la crise d’un secteur industriel majeur du pays, et s’est effectuée dans les années 1990 sur les bases de la transition d’une économie socialiste vers une économie de marché17. Le programme fédéral de conversion initié en 1993 visait à compenser la perte des commandes étatiques par le développement des exportations, et par la réorientation des infrastructures du secteur militaire vers la production de biens civils notamment l’équipement énergétique, agricole et médical. ­� ,çHYVN�� RQ� D� HVVD\p� G·XWLOLVHU� OHV� XVLQHV� GH� FRQVWUXFWLRQ� GH�PLVVLOHV�pour produire des radios et des ambulances ; l’échec était prévisible. En effet, ce programme ne tenait pas compte de la réalité des infrastructures, massives et difficilement reconvertibles, ni de la formation à dispenser aux ouvriers et aux ingénieurs. De plus, ces mesures n’ont pas bénéficié des moyens financiers nécessaires. Le coût de la conversion industrielle du CMI a été évalué à environ 160 milliards de dollars alors que le nouvel état russe avait alloué seulement 60 milliards de roubles à cette entreprise entre 1991 et 199518.En conséquence, les biens civils produits se sont avérés moins concur-rentiels que leurs équivalents importés, et les exportations d’armement

(16) Premier ministre de B. Eltsine en 1992, puis de 1993 à 1994.(17) Gonchar K., Kuznetsov Y., Ozhegov A. (1995), Conversion of the Post-Soviet defence industry: implications for Russian economic development, documentation du Centre International de Bonn pour la Conversion Economique, février.(18) Fontanel J., Coulomb S. (2000), « Régions russes et industries d’armement », Ares volume XVIII-fascicule 3, décembre, p.69-83.

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ont subi des revers importants qui sont venus s’ajouter à la perte des marchés des pays de l’ex-URSS. L’Oudmourtie a rencontré une difficulté supplémentaire : le problème, persistant jusqu’à aujourd’hui, de la contrefaçon des armes de poing et d’assaut19. En effet, 90 % des fusils mitrailleurs kalašnikov vendus dans le monde, l’AK-47 ou le plus récent AK-7420, sont des « faux » en provenance de Chine ou d’Europe de l’est.La crise du CMI, principal secteur d’activité de l’Oudmourtie, a eu pour conséquence la désintégration des structures économiques de la République, la suppression de nombreux emplois, et une importante crise sociale.En 1990, alors que le CMI représentait encore un tiers de l’investissement fédéral et employait près de 25 % de la population active en Russie21, en Oudmourtie, plus de la moitié de la population active occupait des postes liés à l’activité du complexe militaro-industriel (ingénierie, main d’œuvre, design, logistique, aspects commerciaux,…)22. L’abandon des investissements étatiques et l’échec du programme de conversion ont été d’autant plus douloureux que près de la moitié de la population active oudmourte s’est retrouvée au chômage technique. $� WLWUH� LQGLFDWLI�� HQ� ����� j� ,çHYVN�� OHV� VDODLUHV� GHV� HQVHLJQDQWV�� GHV�personnels de santé et des ouvriers de l’industrie n’ont pas été versés pendant plusieurs mois. Cette même année, les prix ont été multipliés par 16. En 1993, le volume de la production industrielle a diminué de 35 % par rapport à l’année 199123. En 1995, ceux qu’on nomme aujourd’hui les oligarques consolidaient leur fortune en accordant des prêts à l’Etat (dirigé alors par B. Eltsine) en échange de parts d’entreprises nationales stratégiques (Gazprom, Rosneft). En 1998, la crise monétaire24 s’ajoutant

(19) Selon le site d’information russe Ria Novosti (juillet 2007) : http://fr.rian.ru/business/20070705/68416508.html(20) Ce fusil mitrailleur a été élaboré peu après le coup d’Etat en Afghanistan (1973) qui a engendré une perte d’influence de la Russie sur place, et peu avant l’intervention militaire russe de 1979.(21) Fontanel J., Coulomb S. (2000), « Régions russes et industries d’armement », Ares volume XVIII-fascicule 3, décembre, p.71.�����6RXUFH���DUFKLYHV�GH�OD�YLOOH�G·,çHYVN�(23) Ibid.(24) Inflation de 84% et dévaluation du rouble.

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à la crise structurelle, l’achat de produits de base est devenu difficile pour la plus grande partie de la population25.

II. LES PERSPECTIVES POUR L’OUDMOURTIE

Dans ce contexte industriel sinistré depuis plus de 20 ans, l’Oudmourtie a exploré plusieurs pistes pour relancer sa croissance : la recherche d’investissements étrangers et l’exploitation des ressources naturelles de son territoire.La vocation mono-industrielle de la République ne favorise pas la pénétration d’investissements étrangers ni l’ouverture vers de nouveaux VHFWHXUV� G·DFWLYLWp�� 3DU� H[HPSOH�� OHV� XVLQHV� ,çDYWR� TXL� SURGXLVHQW�des pièces pour des automobiles ont pu bénéficier brièvement d’une coopération avec le fabricant coréen Kia, avant que celui-ci ne fasse faillite en 1997. En 2009, une participation de l’entreprise à la fabrication des automobiles du français Renault a été évoquée mais n’a pas abouti.Par ailleurs, la République possède des atouts énergétiques importants : ses sous-sols sont riches en pétrole, et de nombreux oléoducs et gazoducs traversent sont territoire en direction de l’Europe orientale et occidentale. Ces éléments devraient pouvoir bénéficier à l’Oudmourtie et lui permettre de financer sa reconversion industrielle. Pourtant, elle n’en a pas le droit. Contrairement au Tatarstan26, l’Oudmourtie a particulièrement mal géré sa transition politico-juridique et n’a pas su défendre ses intérêts économiques. C’est en effet l’état fédéral qui est propriétaire du pétrole de la région et qui en assure l’exploitation. Seules les catastrophes écologiques, malheureusement fréquentes, relèvent de la gestion du territoire et sont donc à charge de l’Etat oudmourte. Cette situation a été rendue possible par la non-représentation chronique des minorités nationales à des postes de responsables : les enjeux économiques de

(25) Favarel-Garrigues J., Rousselet K. (2010), La Russie contemporaine, éd.Fayard et le Centre d’études et de recherches internationales, Paris, p.11.(26) Le Tatarstan a su conserver une partie de la propriété de ses sous-sols, de sorte que la République tatare est alimentée par les bénéfices du gaz et du pétrole.

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la transition ont été menés par l’intelligentsia russe au pouvoir en Oudmourtie27. En conséquence, la crise économique commencée dans les années 1990 dure encore aujourd’hui malgré les plans de remilitarisation du territoire dont l’objet affiché est pourtant de rétablir l’activité du secteur de la Défense. Les premiers signaux d’un réinvestissement étatique dans le CMI datent de 2007, avec un premier programme de remilitarisation lancé par le ministre de la Défense A. Saltukov, pour la période 2008-2015. Au mois de février 2011, V. Poutine a annoncé l’octroi de 583 milliards d’euros au plan de remilitarisation, répartis sur 12 ans (2008-2020)28. Au-delà de l’effet d’annonce29 qui a des conséquences en politique intérieure (l’espoir d’une relance de l’activité économique), et extérieure (l’affirmation d’une puissance à l’international), on peut remarquer que le budget annuel dédié à ce programme ne représente que 48 milliards d’euros, soit presque l’équivalent des dépenses que la France consacre chaque année à la Défense30. Concrètement, ce budget sera à peine suffisant pour renouveler les infrastructures actuelles tombées en désuétude.L’obsolescence des matériels et des centres de productions d’armements constitue un des principaux obstacles à une revitalisation de l’activité militaire. Une grande partie des infrastructures militaires oudmourtes est restée en friche après la fin de la période soviétique et s’avère dangereuse aujourd’hui. Le dernier accident notable, la gigantesque explosion d’un dépôt de munitions, a eu lieu au mois de juin 2011 à la frontière avec le Tatarstan : plus de 30 localités ont été touchées par les déflagrations, une

(27) Depuis la désintégration de l’État soviétique, l’Oudmourtie n’a connu qu’un président, A. Volkov. Comme la plupart des hommes de pouvoir en Russie post-soviétique, il occupait déjà des fonctions politiques au sein du parti communiste de l’URSS.(28) Le Monde, 29 février 2012. (29) Il faut aussi remarquer que cette annonce, qui laisse présager une reprise de l’activité industrielle pour les villes du CMI russe, a été faite en début d’année, peu avant les élections présidentielles, et est de nature à influencer les électeurs en faveur du parti au pouvoir.(30) Près de 47 milliards d’euros en 2010.

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centaine de personnes a été blessée, 28.000 ont dû être évacuées à cause des incendies31.Enfin, la reconversion ou l’éventuelle remise en activité des industries du CMI en Oudmourtie constituerait une option probablement peu souhaitable du point de vue du pouvoir central dont la politique et les choix économiques depuis 1990 ont été de nature à conserver la mainmise sur ce territoire stratégique aux niveaux militaire, énergétique et ethnique. En effet, les initiatives susceptibles d’enrichir la république auraient inévitablement pour effet de favoriser son autonomie et la visibilité des peuples autochtones, comme c’est le cas au Tatarstan32 voisin. C’est sans doute la raison pour laquelle les crédits alloués au programme de remilitarisation, ne devraient pas bénéficier à l’ensemble du CMI G·,çHYVN��PDLV�VHXOHPHQW�j�VRQ�V\PEROH�� OH� IXVLO�PLWUDLOOHXU�NDODåQLNRY�qui devrait avoir droit à une nouvelle version modernisée, l’AK-12, redessiné et doté d’une visée optique et d’une lampe détachable33.En somme, la question de la reconversion et, depuis les années 2000, de la revitalisation du CMI en Russie représentent un enjeu économique intérieur important pour la Fédération et est en passe de modifier la carte géostratégique internationale. Les informations plus précises concernant les industries des villes du CMI sont par nature difficiles à obtenir, néanmoins, il semblerait que les crédits promis par Moscou ne bénéficient TXH� WUqV� SDUWLHOOHPHQW� j� ,çHYVN�� HQ� SDUWLH� j� FDXVH� GH� OD� FRPSRVLWLRQ�ethnique et de la relative autonomie politique de l’Oudmourtie. Il n’en reste pas moins que le remplacement du matériel militaire actuel paraît incontournable pour un pays perpétuellement en guerre (en Tchétchénie34

(31) Informations complémentaires sur la page en français du site d’information russe Ria Novosti : http://www.fr.rian.ru/photolents/20110608/189762647_2.html(32) Musina R. N. (1996), "La République du Tatarstan: relations interethniques, ethnicité et administration" ��5HVSXEOLND� 7DWDUVWDQ�� 0HMHWQLĀHVNLH� RWQRVHQLD�� HWQLĀQRVW� X� JRVXGDUVWYHQQRVW� ���� 6XYHUQLWHW� L� HWQLĀHVNRH�samosoznanie - ideologia i praktika, Moscou, 1996.(33) Pour plus de détails : http://www.izhmash.ru/rus/news/210212.shtml (en russe) ou http://www.thefirearmblog.com/blog/2012/01/26/kalashnikov-ak-12-unveiled/ (en français).(34) La première guerre : 1994-1996 ; la seconde guerre : 1999-2009.

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et en Géorgie35 pour la période post-soviétique) et actuellement vigilant à la situation en Afghanistan où le régime d’H. Karzaï36 est déstabilisé par le retrait des troupes internationales.

(35) 2008.(36) Hamid Karzaï, président de la République islamique d’Afghanistan.