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Discrimination et identité Examen de la recherche théorique et empirique Violet Kaspar Professeur adjoint, Département de psychiatrie Université de Toronto Toronto (Ontario) Canada Samuel Noh Professeur, Département de sociologie Université d’Akron Akron (Ohio), États-Unis Travail commandé par le ministère du Patrimoine canadien pour le séminaire d'identité et de diversité ethnoculturelles, raciales, religieuses et linguistiques Halifax (Nouvelle-Écosse) 1-2 novembre 2001 Vous pouvez consulter ce document en ligne en anglais et en français à l'adresse www.metropolis.net Les points de vue exprimés dans ce document ne sont pas nécessairement ceux du ministère du Patrimoine canadien.

Discrimination et identité–Examen de la recherche théorique et empirique

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Discrimination et identitéExamen de la recherche théorique et empirique

Violet KasparProfesseur adjoint, Département de psychiatrie

Université de TorontoToronto (Ontario) Canada

Samuel NohProfesseur, Département de sociologie

Université d’AkronAkron (Ohio), États-Unis

Travail commandé par le ministère du Patrimoine canadien pour le séminaire d'identitéet de diversité ethnoculturelles, raciales, religieuses et linguistiques

Halifax (Nouvelle-Écosse)1-2 novembre 2001

Vous pouvez consulter ce document en ligne en anglais et en français àl'adresse

www.metropolis.net

Les points de vue exprimés dans ce document ne sont pas nécessairement ceuxdu ministère du Patrimoine canadien.

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Table des matières

Résumé ......................................................................................................................................................... 3

Introduction.................................................................................................................................................... 4

Identité........................................................................................................................................................... 6

Théories et définitions de l’identité ...................................................................................................... 6

Fonctions psychologiques de l’identité ethnique ................................................................................. 8

Racisme et discrimination ............................................................................................................................. 9

Définitions............................................................................................................................................ 9

Discrimination I : Adultes............................................................................................................................. 10

Discrimination perçue ........................................................................................................................ 10

Discrimination, détresse psychologique et identité............................................................................ 12

Faire face à la discrimination : le rôle de l’identité............................................................................. 14

Discrimination II : Les jeunes ...................................................................................................................... 15

La discrimination et les jeunes .......................................................................................................... 15

La discrimination et l’identité chez les jeunes.................................................................................... 18

Comportements d’adaptation à la discrimination............................................................................... 21

Collectivités à risque ................................................................................................................................... 23

Immigrants et réfugiés ....................................................................................................................... 23

Les femmes ....................................................................................................................................... 25

Les enfants et les adolescents .......................................................................................................... 26

Recommandations de recherches empiriques sur la discrimination et l'identité ......................................... 28

Méthodologie de recherche ............................................................................................................... 29

Enquêtes nationales .......................................................................................................................... 20

Mesures de discrimination et identité ................................................................................................ 30

Résumé, et portée des recherches et des politiques .................................................................................. 32

Documents de référence ............................................................................................................................. 35

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Résumé

Selon les études théoriques, l’exposition aux préjugés raciaux et à la discrimination pourraitavoir de mauvaises répercussions psychologiques, dont la formation d’une identitéstigmatisée et une plus grande détresse psychologique. Toutefois, la nature de ces liensa rarement fait l’objet d’études. La présente communication vise à fournir un aperçu desétudes sur les adultes et les jeunes relativement à l’identité ethnique, qui peut être unerépercussion psychologique de la discrimination perçue, que celle-ci soit raciale ouethnique, et une barrière protectrice contre son impact négatif. En nous fondant surdiverses théories et données de recherche sur l’identité, le processus de stress et ledéveloppement, nous passerons en revue des conclusions empiriques qui vont dans deuxsens. Premièrement, nous examinerons le lien direct qui existe entre la discrimination etl’identité ethnique. Le point de vue des chercheurs dans ce domaine est partagé. Seloncertaines études, la discrimination peut soit nuire à l’identité ethnique chez les minorités,soit favoriser une plus grande identification au groupe ethnique. Selon d’autres études, iln’existerait aucun lien direct entre ces variables, ce qui signifierait que l’identité est stableet ne réagit pas aux effets du racisme et de la discrimination. Deuxièmement, nousexaminerons le rôle de l’identité ethnique comme ressource psychologique permettant depallier les répercussions négatives de la discrimination. Les études sur les adultes,notamment, montre le bien-fondé de ce deuxième point de vue, car elles révèlent quel’identité ethnique est non pas directement touchée par la discrimination, mais sert àmodérer l’impact de la discrimination comme facteur de détresse psychologique. Lesétudes à cet égard sont relativement moins avancées chez les jeunes. Les domaines derecherche qui pourraient permettre de comprendre les répercussions psychologiques del’exposition au racisme et à la discrimination font l’objet d’une analyse.

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Introduction

Selon de récentes statistiques, environ 11,2 p. 100 des Canadiens appartiennent à desminorités visibles (Statistique Canada, 1996). Cela représente plus du double du taux de5 p. 100 obtenu à la suite du recensement de 1981. Selon des estimations fondées sur lestendances canadiennes au chapitre de la fécondité, de la mortalité et de la migration, lesminorités raciales ou ethniques visibles représenteront 20 p. 100 des adultes et 25 p. 100des enfants d’ici 2016; et d’ici 2050, elles seront probablement en majorité au Canada(Badets, 1993; K. Kelly, 1995).

En général, les études soulignent l’importance du statut de minorité raciale ou ethniqued’une personne pour la détermination de son statut social et de ses ressources sociales,de son identité personnelle, ainsi que de son taux de mortalité et de morbidité (p. ex.,Amaro, Russo et Johnson, 1987; Barnes et Ephross, 1994; Essed, 1991; Feagin, 1991;House et Williams, 2000; Jackson, Brown et Kirby, 1998; Jackson, Williams et Torres,1997; Krieger, 1990; Pernice et Brook, 1996; Rumbaut, 1994; Salgado de Snyder, 1987;Williams, Lavizzo-Mourey et Warren, 1994). Au Canada et aux États-Unis, les personnesqui appartiennent à des minorités visibles non blanches sont toujours moins avantagéesque celles qui n’en font pas partie sur le plan de la situation professionnelle, du revenu, dela scolarité et de l’impartialité judiciaire (p. ex., Ornstein, 2000; Williams, 1997). De plus,selon les ouvrages théoriques et les études dans ce domaine, l’inégalité entre les groupessociaux (Aneshensel, 1992; Pearlin, 1989; Thoits, 1995) et le stigmate d’infériorité(Goffman, 1964) constitueraient encore les principaux facteurs déterminant une répartitionnon proportionnelle du bien-être psychologique.

Toutefois, il n’existe jusqu’à ce jour qu’assez peu d’études portant sur les variations del’adaptation psychologique des minorités en fonction des aspects uniques de leurexpérience, dont leur manque de ressources sur les plans social et matériel, et leurexposition au racisme ou à la discrimination (House et Williams, 2000; Kessler, Mickelsonet Williams, 1999; Krieger, 1990; Noh, Beiser, Kaspar et Hou, 1999; Williams, 1997). Mêmesi les études montrent de façon générale que la discrimination raciale ou ethnique constitueune source de stress dans la vie des adultes (Rabkin et Struening, 1976; Moritsugu et Sue,1983; Kessler et Neighbors, 1986; Williams, 1994) et des jeunes (Bath et Farrell, 1996;Kaspar et Noh, 2000; Levinsky et McAleer, 1994; Olsen, 1996; Romero et Roberts, 1998;Rumbaut 1994; Sigel et Hoskin, 1991; Way, 1998), on n’a pas encore pu expliquer lesdifférentes réactions psychologiques de chaque personne face aux stresseurs liés à ladiscrimination, ni comprendre les répercussions de la discrimination sur des aspectscritiques du fonctionnement psychologique comme l’identité et la détresse psychologique.

Le rôle de l’identité ethnique est un concept essentiel à la compréhension descomportements d’adaptation des minorités (p. ex., Erikson, 1963, 1964, 1968, 1980;Phinney, 1990; Thoits, 1995). On souligne l’importance de ce concept dans les étudesthéoriques et empiriques qui, d’une part, examinent la façon dont les individus en viennentà trouver un sens à leur vie (Cross, 1991), éprouvent un sentiment de solidarité etd’appartenance envers la collectivité (Isajiw, 1990) et de bien-être personnel (Reitz, 1980),et qui, d’autre part, traitent l’information sociale (Tajfel, 1981) en fonction du lien qui les

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rattache au groupe de leur culture ou de leur patrimoine. L’engagement canadien depromouvoir et de soutenir la diversité et le multiculturalisme confère à la question del’identité une place de choix dans l’établissement des politiques et l’orientation de desrecherches. Il n’empêche que la diversité favorise parfois les tensions et la discriminationraciales et ethniques, qui peuvent menacer l’identité, la cohésion sociale et la santémentale. Les sentiments de lien ou d’appartenance constituent des facteurs d’estime desoi essentiels au bien-être de chaque membre des différentes cultures (Sheldon, Elliot, Kimet Kasser, 2001).

Selon l’ouvrage classique d’Erving Goffman (1964), les membres des minorités dontl’identité est stigmatisée et qui sont exposés à des préjugés raciaux et à la discriminationpeuvent voir leur santé et leur bien-être compromis. Les recherches théoriques etempiriques révèlent à quel point la discrimination nuit aux processus d’identité etd’autodétermination chez les minorités (p. ex., Abraham, 1986; Cross, 1991; Driedger,1989; Erikson, 1964; Inniss, 1992; Markstrom, 1987; Porter et Washington, 1993; Spenceret Markstrom-Adams, 1990). Toutefois, il existe assez peu d’études empiriques portantdirectement sur les processus d’identité ou sur les fonctions psychologiques de l’identitéchez les minorités raciales ou ethniques qui font face à de la discrimination.

Le présent examen des études sur la discrimination et l’identité porte sur deux thèmescentraux : le lien direct entre la discrimination et l’identité ethnique, et le rôle de l’identitéethnique comme ressource psychologique permettant de pallier les répercussionsnégatives de la discrimination. D’après les principes de diverses théories avancées dansles domaines sociologique et psychologique, ou de celles qui ont été utiles à l’étude dustress et de l’adaptation chez les minorités, la discrimination serait un facteur écologiquequi joue un grand rôle dans la relation entre l’ethnicité et l’adaptation tout au long de la vie.

Selon de nouveaux cadres conceptuels en psychologie du développement, les préjugés,le racisme et la discrimination peuvent réduire les effets négatifs de l’appartenanceethnique, de la race, du statut social ou de la classe sociale sur le plan psychologique(Garcia-Coll, Crnic, Lamberty, Wasik, Jenkins, Vazquez-Garcia et Pipes-McAdoo, 1996;Gonzales et Kim, 1997). Selon les interprétations structurelles qui, comme celle-ci, ont étéprésentées dans des études sociologiques et psychologiques, la discrimination découle defacteurs de stratification sociale (p. ex., la race, la classe sociale, l’ethnie et le sexe)produisant des contextes (p. ex., l’école, le quartier et le réseau de santé) de ségrégation(p. ex., sociale, psychologique, économique et domiciliaire) qui menacent la santé mentaleet l’adaptation (Garcia-Coll et coll., 1996; Krieger, 1990; Williams, 1994). Selon un point devue écologique culturel connexe, les expériences liées à l’ethnicité, telle la discrimination,menacent la santé mentale et le bien-être, car les minorités ethniques courent ainsi lerisque accru de s’exposer à un plus grand nombre d’événements négatifs dans leur vie(p. ex., les événements marquants de la vie, les facteurs de stress chronique et les soucisquotidiens) (Gonzales et Kim, 1997).

Enfin, le paradigme du processus de stress permet de déterminer la mesure dans laquellela réaction psychologique à la discrimination varie en fonction tant de la vulnérabilitédifférentielle aux stresseurs (p. ex., les réactions différentes de chaque personne auxstresseurs sociaux) que de l’accessibilité aux ressources d’adaptation sociales et

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psychologiques. Ces ressources comprennent la capacité d’adaptation personnelle et lesressources sociales dont, par exemple, le soutien social qui permet de réduire ou demodifier les effets du stress sur la santé (Aneshensel, 1992; Avison et Gotlib, 1994; Pearlinet coll., 1981; Pearlin et Schooler, 1978; Thoits, 1995; Turner et Noh, 1983; Turner etLloyd, 1998). Une version modifiée de ce modèle a été appliquée avec succès dans lecadre d’études épidémiologiques canadiennes (Noh, Beiser, Kaspar et Hou, 1999) etaméricaines (Jackson, Williams et Torres, 1997; Williams et Chung, 1997) sur ladiscrimination, la santé et les facteurs qui modifient le lien entre ces deux éléments.

Confirmant les prévisions fondées sur ces points de vue théoriques, les études empiriquesrévèlent un lien dose-réponse entre la discrimination et la détresse psychologique. SelonSanders-Thompson (1996), les symptômes de réaction post-traumatiques (p. ex., rêvestroublants, pensées et images dérangeantes) étaient plus prononcés lorsque la niveau deracisme auquel on était exposé (au cours des derniers six mois) était de moyen à grave.En outre, les diverses théories dans ce domaine montrent que les concepts liés ausentiment d’action personnelle et à un sentiment positif et cohérent de soi constituentd’importantes ressources personnelles qui permettent de protéger la santé mentale(Aneshensel, 1992; Garmezy et Rutter, 1983; Kaplan, 1975; Rosenberg, 1979; Thoits,1995). Le concept selon lequel l’identité personnelle est essentielle pour prévoirl’adaptation psychologique des minorités repose sur de solides fondements théoriques(p. ex., Erikson, 1963, 1964, 1968, 1980; Lewin, 1948).

Identité

Théories et définitions de l’identité

Les théories de l’identité s’inspirent en grande partie des ouvrages d’Erik Erikson (p. ex.,1968, 1980). Même si ses travaux sont principalement fondés sur des observationscliniques et sont axés sur les processus de l’ego, Erikson a élaboré l’une des théories lesplus exhaustives qui soient sur l’identité, qu’il considère comme un aspect crucial dudéveloppement adaptatif de l’humain grâce auquel celui-ci pourra prendre de bonnesdécisions, se constituer un système de valeurs, se fixer des objectifs et faire face au stresstout au long de sa vie. Selon Erikson, le développement d’une identité saine passe par uneauto-définition cohérente et stable sur le plan spatio-temporel qui soit respectée par sesproches et qui soit source de direction et de sens dans l’élaboration d’objectifs et devaleurs personnels. La formation de l’identité, ou la tâche qui consiste à acquérir un sensclair et cohérent de soi et de son développement, est considérée comme étant unprocessus du développement normatif influencé par des facteurs contextuels personnelset sociaux.

Toutefois, la recherche systématique sur l’identité a été ralentie par la difficultéd’opérationnaliser ce concept (Dashefsky, 1975; Marcia, 1966; Waterman, 1988). De plus,même si l’on souligne souvent à quel point le statut de minorité peut jouer sur l’identité despersonnes qui vivent dans des milieux où les valeurs et les croyances dominantes peuventêtre en contradiction avec celles de leur groupe racial, ethnique ou culturel (p. ex., Erikson,1964), peu d’efforts ont été faits en vue d’élaborer des théories et des moyens pourrépondre aux besoins en matière de formation de l’identité. Il y a en fait peu de temps que

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l’on a commencé à tenir compte du rôle de la race ou de l’appartenance ethnique dans lecadre de théories et de recherches sur les processus d’identité et de bien-être (p. ex.,Frable, 1997; Isajiw, 1990; Phinney, 1990; Phinney et Alipuria, 1990).

Les orientations ou perspectives théoriques dans les domaines de la psychologie socialeet du développement ont donné lieu à diverses définitions de l’identité ethnique, ainsi qu’àdifférentes hypothèses sur la nature du lien entre l’identité ethnique et l’adaptationpsychologique (Cross, 1991; Isajiw, 1990; Kwan et Sodowshy, 1997; Parham et Helms,1985; Phinney, 1990, 1992; Pyant et Yanico, 1991; Tajfel, 1981). Jusque-là, on considéraitl’identité ethnique comme étant un phénomène socio-psychologique découlant del’appartenance à un groupe ethnique1 qui permet aux individus d’acquérir un sentimentd’appartenance et, à la collectivité, de se sentir unie par son histoire commune (Isajiw,1990, p. 35).

Selon une perspective de l’identité ethnique axée sur le développement, Phinney (1989,1990, 1991, 1992) a décrit un processus qui reprend la théorie d’Erikson selon laquelle lesgens aspireraient à se trouver une identité (p. ex., Erikson, 1968; Marcia, 1966, 1980,1987) et à acquérir un sentiment de fierté et d’appartenance à un groupe racial ouethnique. Phinney et ses collègues ont ainsi défini l’identité ethnique : le sentimentd’appartenance d’une personne à un groupe ethnique et la part de ses conceptions,perceptions, sentiments et comportements qui est le résultat de cette affiliation (Rotheramet Phinney, 1987, p. 13). On a opérationnalisé le processus en y ajoutant un élémentcognitif de recherche et des composantes affectives d’affirmation, d’appartenance etd’engagement (Phinney, 1992). En outre, on a considéré qu’un sentiment fortementressenti d’identité ethnique s’avérait un facteur d’adaptation (Phinney et Kohatsu, 1997).

Ce point de vue repose sur l’orientation psychologique sociale selon laquelle l’identitéethnique est considérée comme la part de l’image de soi d’une personne qui découle deses connaissances liées à son appartenance à un groupe social (ou à des groupessociaux), ainsi que la valeur et l’importance affective qu’elle accorde à cette affiliation(Tajfel, 1981, p. 255). Tirée de la théorie de l’identité sociale (Tajfel et Turner, 1979), cettedéfinition souligne le lien qui existe entre la catégorisation sociale et les influencesmotivationnelles. La théorie se fonde sur la recherche en ce qui a trait aux stéréotypes par exemple, la perception de faibles différences intragroupes et de grandes différencesintergroupes qui ne peuvent s’expliquer uniquement en fonction de la catégorisationsociale. Selon la théorie de l’identité sociale, les gens ont besoin d’appartenir à un groupepour acquérir une meilleure estime de soi2. Des études sur ce domaine révèlent qu’ilsveulent protéger leur estime de soi et conserver une image favorable au sein de leurgroupe, même si celui-ci est dénigré3.

1 Une organisation sociale, un phénomène objectif qui assure la structure de la collectivité ethnique (p. 35).

2 Le lien qui existe entre l’identité ethnique et l’estime de soi dépasse le cadre de la présente communication. Pour uneanalyse plus approfondie de la question, les lecteurs peuvent consulter les ouvrages de Jean Phinney et de ses collègues (p. ex.,Phinney, 1989, 1991; Phinney et Alipuria, 1990; Phinney et Chavira, 1992; Phinney, Chavira et Tate, 1993; Phinney, Chavira etWiliamson, 1992; Rotheram-Borus et Phinney, 1990).

3 Ils y arrivent en accordant le moins d’importance possible au fait que leur groupe est dénigré (Fiske et Taylor, 1991).

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Malgré l’importante assise théorique qui confirme l’importance de l’identité ethnique pourla santé psychologique, on a encore de la difficulté à appliquer ce concept de façongénérale. Toutefois, il existe plusieurs caractéristiques communes à l’identité ethnique(Isajiw, 1990; Kwan et Sodowshy, 1997; Phinney, 1990, 1992; Tajfel, 1981). Une premièrecaractéristique de l’identification consiste à se désigner en tant que membre d’un groupeethnique. Une autre consiste à ressentir un sentiment d’appartenance et de filiation augroupe ethnique ce qui comprend des sentiments de sécurité et de confort, ainsi quela préférence à s’affilier plutôt à des membres du groupe ethnique qu’à des personnes quin’en font pas partie. L’identité ethnique suppose également un élément comportementalqui peut se révéler positif ou négatif selon le degré de fierté et de satisfaction que l’onéprouve pour le groupe. Ce sont les dimensions internes de l’identité ethnique. Il existeaussi une composante externe à l’identité ethnique, laquelle est composée de paramètrescomme l’affiliation à des organismes ethniques et la langue ethnique.

Fonctions psychologiques de l’identité ethnique

Les études sur la santé mentale reposent la prémisse de l’identité ethnique comme facteuressentiel dans le fonctionnement psychologique et le bien-être des minorités (p. ex., Cross,1991; Lewin, 1948; Phinney et Kohatsu, 1997). Or les modèles théoriques des processuspar lesquels l’identité ethnique affecte le fonctionnement psychologique ne sont pas trèsavancés et il existe peu d’études concernant le rôle direct de l’identité ethnique sur la santémentale (Liebkind, 1996; Nesdale, Rooney et Smith, 1997). Les chercheurs, sansévaluation directe de l’identité ethnique, ont établi un lien entre l’identité ethnique et l’étatpsychologique, lequel est fondé sur des variations du degré d’estime de soi entre lesmembres d’un groupe ethnique et autrui (Cross, 1991; Phinney, 1990).

Les études empiriques visant à mesurer l’identité ethnique (p. ex., Noh, Beiser, Kaspar etHou, 1999; Sanders-Thompson, 1996), n’ont pu établir de lien direct entre l’identitéethnique et la santé mentale (p. ex., dans le cas de la dépression et des symptômes destress post-traumatiques). Par exemple, une étude canadienne sur les Asiatiques du Sud-Est n’a pas permis d’établir un lien entre l’identité ethnique et la dépression (Noh et coll.,1999). Selon des études américaines, on n’a pas non plus établi de lien entre l’identitéraciale et la détresse psychologique chez les Noirs (Sanders-Thompson, 1996). Toutefois,une autre étude américaine a permis d’établir un lien important entre l’adaptationpsychologique et la fierté ethnique et ce, même après vérification des répercussions del’estime de soi (Crocker, Luhtanen, Blaine et Broadnax, 1994).

Plus récemment, les théoriciens et les chercheurs ont souligné l’importance de l’identitéethnique comme ressource personnelle (Pearlin, 1989; Thoits, 1995) assumant unefonction médiatrice (Anderson, 1991) ou modératrice (Cross, 1991; Al-Issa, 1997) sur leseffets psychologiques du stress. Sur le plan de la fonction médiatrice de l’identité ethnique,les résultats de nos recherches entreprises au Canada chez les Chinois, les Vietnamiens,

Selon Crocker et Major (1989), les personnes qui s’identifiaient fortement à un groupe dénigré étaient celles qui faisaient le plusd’efforts pour protéger ou conserver leur estime de soi.

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les Laotiens et les Coréens (Noh, 1999; Noh et coll., 1999) étaient les mêmes que ceuxobtenus aux États-Unis pour les Noirs, les Asiatiques et les Hispaniques (p. ex., Phinney,Chavira et Tate, 1993; Sanders-Thompson, 1996), c’est-à-dire que l’identité ethnique n’apas servi de lien entre la discrimination et la dépression.

Toutefois, bien qu’aucune donnée empirique ne permette de confirmer le rôle de médiateurde l’identité ethnique d’après les études actuelles dans ce domaine et nos propresanalyses il en va peut-être autrement de sa fonction modératrice. Ainsi, nos étudesrévèlent que chez les Asiatiques et les Asiatiques du Sud-Est, par exemple, l’identitéethnique modérait l’impact de la discrimination sur la santé mentale, en plus d’assurerl’efficacité de divers comportements d’adaptation (Noh, 1999; Noh et coll., 1999). Cesconclusions seront précisées plus loin dans la présente étude.

Racisme et discrimination

Définitions

Le racisme désigne la définition sociale négative d’un groupe par ses caractéristiquesphysiques4 (p. ex., [la couleur de la peau]). Le racisme se présente sous différentesformes : individuelle, institutionnelle, structurelle et culturelle (James, 1989, p. 44; voirégalement Essed, 1991; Henry, Tator, Mattis et Rees, 1995). Par conséquent, le racisme,en tant que croyance ou idéologie, est systémique (Henry et coll., 1995). De plus, parl’entremise de contraintes institutionnelles et structurelles, il limite les perspectivesd’éducation, d’emploi et de participation sociale et civique des minorités (Anderson etFrideres, 1981; Hughes et Kallen, 1974; Uba, 1994), en plus de menacer la cohésionsociale (Ignatieff, 1993). En outre, le dénigrement ou la subordination d’un groupe d’uneminorité raciale ou ethnique fournit l’occasion aux groupes non minoritaires de justifier lesinégalités sociétales des ressources financières et du pouvoir, en plus de s’avérer unélément motivationnel important sous-tendant les crimes de haine.

La discrimination, un concept lié au racisme, comprend un élément comportemental etdésigne le fait d’agir dans l’intention de faire des distinctions injustes ou préjudiciables enfonction de l’appartenance ethnique ou de la race, qui ont des répercussions positives surles groupes inclus et des répercussions négatives sur les groupes exclus (Jackson, Brownet Kirby, 1998, p.110). En général, on considère que la discrimination découle de facteursde stratification sociale comme la race, la classe sociale, l’appartenance ethnique et lesexe. La discrimination perçue renvoie aux perceptions subjectives (d’une minorité visible)d’un traitement inéquitable d’un groupe racial ou ethnique ou de ses membres en fonctionde préjugés raciaux5 et de considérations ethnocentriques qui peuvent se manifester sur

4 Même si la race est définie par des distinctions fondées sur les caractéristiques physiques, l’appartenance ethnique

est déterminée par la langue, la nationalité, la religion et d’autres marqueurs culturels.

5 Le préjugé est considéré comme étant une attitude négative injustifiée face à une personne en fonction de sonaffiliation à un certain groupe (Worchel, Cooper et Gœthals, 1988, p. 449), ou comme une prédisposition à réagir de manièredéfavorable face à autrui en raison de son appartenance à un groupe ethnique (Aboud, 1988, p. 4).

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le plan individuel, culturel ou institutionnel (Jackson et coll., 1998). Les actes injustes oupréjudiciables peuvent revêtir la forme de comportements directs et ouverts, ou d’attitudeset de comportements plus subtils et insaisissables.

Dans la plupart des sociétés qui étudient ce phénomène, la discrimination est subtile etdifficile à documenter autrement que par le témoignage par définition subjectif d’individus(Dovidio et Gaertner, 1991, 1998; Gaertner et Dovidio, 1986; Hamberger et Hewstone,1997; Henry et coll., 1995; Meertens et Pettigrew, 1997). Dans le cadre de la présentecommunication, la discrimination renvoie par conséquent à des expériences perçues.

Discrimination I : Adultes

Discrimination perçue

Les minorités visibles sont souvent la cible de préjugés et de stigmates (Angus Reid, 1991;Goffman, 1964; Williams, 1994). Même si les expressions ouvertes de racisme et dediscrimination à l’égard des minorités sont de moins en moins acceptées dans la plupartdes sociétés modernes, elles revêtent maintenant des formes plus subtiles (Dovidio etGaertner, 1991; Hamberger et Hewstone, 1997; Henry, Tator, Mattis et Rees, 1995;Meertens et Pettigrew, 1997; Pettigrew et Meertens, 1995). C’est ce que nous ont amenéà conclure certaines de nos analyses récentes où l’on a constaté que les Asiatiques duSud-Est du Canada (qui habitent à Vancouver) font l’objet d’une discriminationextrêmement subtile, et qu’il est assez rare que celle-ci se fasse ouvertement (p. ex., Noh,Beiser, Kaspar et Hou, 1999). Tous les répondants qui ont perçu au moins une fois de ladiscrimination à leur égard ont déclaré qu’elle s’était manifestée au moins une fois demanière subtile. En outre, plus de 20 p. 100 d’entre eux ont aussi déclaré avoir fait l’objetde discrimination ouverte et de discrimination axée sur leur collectivité. Moins de 7 p. 100des répondants qui ont fait l’objet de discrimination ont déclaré que celle-ci s’étaitmanifestée sous ses trois formes (discrimination subtile6, discrimination ouverte7 etdiscrimination axée sur leur collectivité8).

Des études révèlent également que chaque groupe minoritaire peut faire l’objet dediscrimination à différents taux de fréquence et de diverses manières (Breton, 1978; Head,1981; Robson et Breems, 1985; Wortley, 1996). Ces facteurs expliquent en partie lesvariations liées aux risques psychologiques de la discrimination. Toutefois, la plupart desétudes ne se penchent pas de façon systématique sur les expériences des minorités enfonction des deux dimensions importantes suivantes : position attribuée (p. ex., statutd’immigrant, appartenance ethnique et sexe) et position acquise (niveau de scolarité,

6 P. ex., une attitude dénigrante, un traitement inéquitable, un comportement impoli et des insultes.

7 P. ex., des menaces, des graffitis de nature raciale sur une propriété privée, de la violence physique et des traitementsbrutaux.

8 P. ex., des graffitis dans des lieux publics, des actes de vandalisme contre une collectivité ethnique et des graffitis denature raciale dans un quartier ethnique.

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emploi et revenu). Il s’agit d’une omission grave, car la discrimination et les répercussionspsychologiques qui y sont liées ne sont pas réparties uniformément en fonction des classesraciales, ethniques et socio-économiques.

Par exemple, des études ont révélé que les Noirs du Canada (p. ex., Breton, 1978; Head,1981; Robson et Breems, 1985; Wortley, 1996) et des États-Unis (Williams, 1994, 1997)ont fait le plus souvent l’objet de discrimination et de traitements partiaux, en général sousleurs formes d’expression les plus directes. Cela semble être également le cas desAsiatiques du Sud. Au cours d’une étude menée pendant les années 80, environ 50 p. 100des Asiatiques du Sud qui habitent à Vancouver (Canada) ont signalé qu’ils avaient faitl’objet de discrimination au moins une fois au cours de la période de deux ans précédantl’enquête, et 14 p. 100 d’entre eux auraient subi des dommages matériels ou des actes devandalisme (Robson et Breems, 1985). Dans le cadre d’une étude torontoise, 67 p. 100des Asiatiques du Sud et 64 p. 100 des Noirs ont relaté des expériences personnelles dediscrimination raciale, notamment dans les milieux du logement ou du travail (Head, 1981).Des recherches antérieures menées par Breton (1978) ont également révélé une variationinterethnique des perceptions de la discrimination. Dans le cadre de cette étude, 75 p. 100des Antillais contre 29 p. 100 des Chinois qui habitent à Toronto ont signalé avoir fait l’objetde discrimination dans leur milieu de travail.

Ces résultats sont semblables à ceux obtenus dans des rapports plus récents. Selon uneétude portant sur les Asiatiques du Sud-Est qui habitent à Vancouver (Noh, Beiser, Kasparet Hou, 1999), environ le quart (26 p. 100) des répondants auraient perçu plus d’une foisde la discrimination à leur égard. Ce taux est près de celui obtenu dans d’autres étudeseffectuées auprès d’Asiatiques qui habitent au Canada (p. ex., Breton, 1978; Chan et Helly,1987; Head, 1975, 1981; Ramcharan, 1974). Dans le cadre d’une étude américaine,A. Roberts (1988) a étudié la discrimination perçue chez les Vietnamiens qui habitent dansle Nord de la Californie et dans les États du golfe du Mexique. Au total, 33 p. 100 desrépondants ont déclaré avoir fait l’objet de discrimination sous une forme ou une autre, enraison de leur race, ce qui représente un taux comparable à celui obtenu chez les Chinois,à Seattle (Kuo, 1995) et à Toronto (Breton, 1978), et chez les Asiatiques du Sud-Est, àVancouver (Noh et coll., 1998, 1999).

À la suite de leur analyse des données fournies par une enquête sur l’évolution du modede vie des Américains, Jackson et ses collègues (1995) ont observé des taux constantsde « mauvais traitements » en raison de la race ou de l’appartenance ethnique auxquelsdoivent faire face divers groupes de minorité raciale aux États-Unis. Les taux étaientrespectivement de 47 p. 100, de 45 p. 100, et de 34 p. 100 chez les Noirs, les Asiatiqueset les Autochtones. Ils étaient respectivement de 16 p. 100 et de 10 p. 100 chez lesPolonais et les Italiens. Ces données sont comparables à celles obtenues dans le cadrede nombreuses autres études; elles révèlent que les perceptions de discrimination varientde façon substantielle entre les divers groupes ethno-raciaux visibles et non visibles.

Toujours selon Jackson et ses collègues (1995), les taux de discrimination perçue variaientnon seulement en fonction des groupes ethno-raciaux, mais aussi en fonction de la raceà laquelle une personne s’identifie. Les répondants ont déclaré leur identité ethnique etraciale. Chez ceux qui se sont identifiés comme étant Asiatiques (tant au niveau de

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l’appartenance ethnique que de la race), le taux de discrimination perçue était de 13 p. 100;chez les Asiatiques qui se sont identifiés comme tels sur le plan ethnique et comme« Blancs » sur le plan racial, il se situait à 45 p. 100. On a observé la même tendance chezles Hispaniques qui faisaient partie de l’échantillon étudié. Chez les répondants qui se sontidentifiés comme Hispaniques (au niveau tant de l’appartenance ethnique que de la race),le taux de discrimination perçue était de 12 p. 100; chez les Hispaniques qui se sontidentifiés comme tels sur le plan ethnique et comme « Blancs » sur le plan racial, il sesituait à 23 p. 100. Ces résultats ont d’importantes ramifications en recherche. Jusqu’à cejour, peu d’études empiriques se sont penchées sur ce qui relie les perceptions dediscrimination à divers facteurs d’identité personnelle. Il importe de tenir compte del’interaction entre la discrimination et les processus d’identité pour déterminer plusprécisément de quelle manière le statut de minorité raciale ou ethnique d’une personne estlié à sa santé et à son bien-être.

Discrimination, détresse psychologique et identité

L’hypothèse selon laquelle la discrimination raciale perçue aurait des répercussionspsychologiques et physiques néfastes est bien étayée par les résultats obtenus à partird’enquêtes nationales (Jackson, Williams et Torres, 1997; Pernice et Brook, 1996; Williamset coll., 1997, 1997) et communautaires (Amaro, Russo et Johnson, 1987; Salgado deSnyder, 1987), ainsi qu’à partir d’études qualitatives (Essed, 1991; Barnes et Ephross,1994; Feagin, 1991) et expérimentales (Dion et Earn, 1975; Dion, Dion et Pak, 1992; Pak,Dion et Dion, 1991). Selon des études canadiennes et américaines portant principalementsur les Asiatiques, les Noirs et les Hispaniques (Amaro, Russo et Johnson, 1987; Kessler,Mickelson et Williams, 1999; Krieger, 1990; Pernice et Brook, 1996; Salgado de Snyder,1987; Sanders-Thompson, 1996; Williams, 1994), la discrimination aurait des effetsnégatifs sur la santé mentale des répondants.

Même si de nombreuses études fondées sur diverses méthodes de recherche prouvent que la discrimination a des effets psychologiques négatifs, peu d’entre elles sesont penchées sur les mécanismes par lesquels se produit ce phénomène. Fernando(1983, 1986) a défini un processus par lequel la discrimination raciale a un effet sur lasanté mentale en ayant des répercussions sur les ressources psychologiques, dont l’estimeet la maîtrise de soi. Dans ce contexte, le racisme est non seulement une source de stresssupplémentaire pour les minorités noires et ethniques, mais aussi un agent pathogène quiengendre la dépression. Le racisme diminue l’estime de soi, produit des pertes(psychologiques) et entraîne un état de détresse (Fernando, 1986, p. 130).

Dans cette optique, la discrimination mine la perception de soi en tant qu’être bon etproductif, et mène à la détresse psychologique. Les recherches sur l’impact direct de ladiscrimination sur l’identité se penchent sur cette question, mais les conclusions sontpartagées. Selon Dion et ses collègues, la discrimination raciale et ethnique a amené desétudiants universitaires de Toronto à se sentir encore plus sûrs et plus fiers de leur identitéethnique (Dion et Earn, 1975; Dion, Dion et Pak, 1992). Les résultats de nos propresrecherches portant sur des Asiatiques du Sud-Est (à Vancouver) et des Coréens (àToronto) adultes ne nous permettent pas de tirer les mêmes conclusions. Aucun de cesensembles de données n’a révélé qu’il existerait un lien important entre la discrimination

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raciale perçue et l’identité ethnique. Enfin, les recherches menées au Canada et aux États-Unis n’ont pas permis de prouver que l’identité pouvait avoir un effet médiateur sur le lienentre la discrimination et la santé mentale (p. ex., voir Noh, Beiser, Kaspar et Hou, 1999;Sanders-Thompson, 1996).

Toutefois, il semble que l’identité ethnique ait un effet modérateur. Par exemple, nousavons montré que le lien entre la discrimination et la dépression était modéré par le degréd’identification ethnique d’une personne (Noh, Beiser, Kaspar et Hou, 1999). Plusprécisément, plus l’identité ethnique était bien ancrée (p. ex., en fonction de l’importanceaccordée à l’appartenance ethnique, des attitudes face aux contacts intergroupes, et durespect de la langue, des valeurs et des traditions ethniques), plus le lien entre ladiscrimination et la dépression s’intensifiait. Il se peut que les répercussionspsychologiques soient plus négatives chez ces personnes lorsqu’elles perçoivent de ladiscrimination raciale à leur égard parce qu’elles sont plus affectées par le dénigrement deleur identité.

Nos résultats ont également fait ressortir l’effet modérateur de l’adaptation à ladiscrimination. Nous avons constaté que l’identité ethnique modifiait l’effet de protectiondes comportements d’adaptation à la discrimination perçue. Ces conclusions, préciséesci-dessous, soulignent l’importance de l’identité ethnique pour s’adapter à la discrimination.

Faire face à la discrimination : le rôle de l’identité

Dans le cadre de nos recherches, nous avons cerné deux types de comportementsd’adaptation à la discrimination, que nous avons désignés comme étant la confrontationet l’abstention (Noh, Beiser, Kaspar et Hou, 1999). Après un examen des répercussionsde ces types de comportement sur la santé mentale, nous avons constaté que l’adaptationpar la confrontation ne modifiait en rien le lien entre la discrimination et la dépression dansle cas de notre échantillon d’Asiatiques du Sud-Est qui habitent Vancouver (Canada)9.Toutefois, nous avons constaté que l’abstention avait un important effet modérateur. Plusprécisément, chez les personnes qui se sont déclarées victimes de discrimination, on aconstaté que l’accroissement des symptômes de dépression, si on les compare à ceux desrépondants qui ne se sont pas sentis discriminés, était plus marqué chez celles qui neréagissaient pas à la discrimination par l’abstention. Le degré de dépression de ce groupeétait sensiblement modéré dès qu’il réagissait davantage par l’abstention.

9 Nous nous attendions à ce que la confrontation, par exemple le fait de se plaindre directement à la personneoffensante ou d’avertir les autorités, réduise le degré de détresse psychologique d’une personne qui se considère victime dediscrimination, car on peut ainsi modifier la situation et réduire son état de détresse et de victimisation. Toutefois, nous avonségalement tenu compte du fait que la confrontation peut empirer l’état de détresse lié à la discrimination, car une réaction directepeut engendrer davantage de conflits et entraîner des échanges hostiles. De plus, il se peut que les groupes stigmatisés nepuissent recourir à la confrontation. Ils auront tendance à éviter de réagir ainsi à la discrimination en raison de situationsprécaires telles la peur de perdre un emploi, le manque de ressources ou de soutien sur le plan social, un appui inadéquat de lapart des autorités en cas de plainte directe, et des doutes quant à l’efficacité des procédures officielles de rapport (p. ex., Head,1975; Henry et coll., 1995; Kuo, 1995; Muszynski, 1983). En raison du caractère subtil et ambigu de certains traitementsdiscriminatoires, il peut s’avérer difficile de réagir par la confrontation. L’abstention, soit le fait d’accepter passivement ladiscrimination ou de l’éviter, ou encore de ne pas du tout y réagir, pourrait bien être la meilleure méthode à laquelle les minoritéspuissent avoir recours, car elle pourrait permettre de réduire le lien entre la discrimination et la dépression. Par ailleurs, ellepourrait causer davantage de tort, car si la situation n’est pas modifiée, cela peut amplifier l’état de détresse et de victimisation.

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Nous avons interprété ces résultats en fonction des variations culturelles qui ont motivé lechoix du groupe et de l’efficacité des comportements d’adaptation. Par exemple, desétudes menées aux États-Unis ont révélé que la confrontation constituait un comportementefficace d’adaptation chez les Noirs (Krieger, 1990), mais celles effectuées auprès desAsiatiques américains et canadiens ont montré qu’ils préféraient avoir recours àl’abstention ou aux comportements d’évitement pour s’adapter efficacement (ce qui donnelieu, par exemple, à un état de détresse moindre) à la discrimination (Kuo, 1995; Noh etcoll., 1999)10.

Les déterminants situationnels et l’efficacité de l’adaptation ont fait l’objet d’études récentes(p. ex., Aneshensel et Sucoff, 1996; Eckenrode, 1991; Mattlin, Wethington et Kessler,1990). Au cours de notre examen des interprétations culturelles de l’efficacité descomportements d’adaptation, nous avons tenté de déterminer si leurs répercussions étaientconditionnées ou modérées par l’identification ethnique. L’hypothèse selon laquelle ilvaudrait mieux réagir de manière directe pour régler des griefs concorde avec les valeursaméricaines; au contraire, chez les Asiatiques, dont les normes et les valeurs culturellesprônent l’évitement, l’autocontrôle et le maintien de l’harmonie interpersonnelle plutôt quel’action directe, l’abstention ou l’adaptation passive peuvent se révéler préférables (Aldwin,1994; Tietjen, 1989; Triandis, 1994). Soulignant le bien-fondé d’une interprétation culturelleselon laquelle l’adaptation axée sur les émotions aurait pour effet de réduire l’état dedétresse, l’effet de l’abstention s’est fait particulièrement sentir chez les Asiatiques qui sonttrès attachés aux valeurs traditionnelles de leur ethnie et qui s’identifient fortement à leurgroupe. Les minorités qui s’identifiaient de façon marquée à leur ethnie étaient très sujettesaux effets négatifs de la discrimination sur le plan psychologique si elles n’y réagissaientpas par l’abstention. Même si on a pu observer que l’abstention avait aussi une fonctionmodératrice de stress chez les personnes qui ne s’identifiaient pas de façon marquée àleurs valeurs et traditions ethniques, l’effet en était grandement diminué.

Les recherches entreprises dans le domaine montrent qu’il convient d’utiliser une approchecontextuelle pour étudier l’efficacité de l’adaptation (p. ex., Eckenrode, 1991). Le degréd’efficacité de l’adaptation chez les minorités variera probablement non seulement enfonction du degré d’identité ethnique de chaque personne, mais aussi de son niveau desoutien social11, de son stade d’acculturation12 et de l’impact perçu que l’établissement dans

10 Selon certaines études, de nombreux Asiatiques estiment qu’il est préférable de ne « rien faire » face à ladiscrimination (Buchignani, 1982; Kuo, 1995), et il semble que des comportements d’adaptation axés sur la confrontationpourraient entraîner une dysfonction chez les Asiatiques sur le plan de la santé mentale, car cela va à l’encontre de leur mentalitéculturelle (p. ex., Hwang 1979). Nos propres recherches ont révélé que l’abstention réduisait le lien entre la discrimination et ladépression chez les Asiatiques, contrairement à la confrontation. Ces résultats contredisent l’affirmation selon laquellel’adaptation axée sur la résolution de problèmes est plus efficace que l’acceptation passive du stress lié à la discrimination(p. ex., Krieger, 1990; Williams et coll., 1994).

11 Dans une autre étude, nous avons avancé l’hypothèse que le type de comportement d’adaptation qui consiste àaccepter passivement la discrimination ou à en faire abstraction pourrait permettre de réduire (ou au moins de ne pas accroître) leniveau de détresse qui y est lié dans le cas d’immigrants qui sont soutenus par un réseau ethnosocial solide (Noh et coll., 1998).Nous avons constaté que l’adaptation par évitement augmentait sensiblement la détresse psychologique chez les personnes quin’étaient pas bien soutenues sur le plan ethnosocial. Les réseaux sociaux composés de Canadiens de divers milieux ethniquesn’ont pas donné lieu à une meilleure adaptation.

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un nouveau pays aura sur sa qualité de vie13. De toute évidence, ces facteurs fournissentun cadre qui influe sur les comportements d’adaptation que chacun décide d’adopter enlimitant ou en favorisant des réactions appropriées sur le plan culturel.

Discrimination II : Les jeunes

La discrimination et les jeunes

De nos jours, les chercheurs reconnaissent de plus en plus qu’il importe d’élaborer unethéorie du développement et d’entreprendre des études empiriques portant sur les aspectsuniques de l’expérience, de l’adaptation et du développement des jeunes qui font partie deminorités (Betancourt et Lopez, 1993; Entwisle et Astone, 1994; Graham, 1992; McLoydet Steinberg, 1998). Les premières recherches sur la santé et le développement desenfants et des jeunes qui appartiennent à des minorités se fondaient sur un « modèle dedéficience » selon lequel on s’attendait à ce que ces jeunes s’adaptent difficilement sur leplan de l’identité, de la scolarité et de la santé mentale. Selon les cadres établis dans lesétudes récentes sur le développement, le racisme et la discrimination constituentd’importants facteurs écologiques qui modifient le lien entre l’ethnicité et l’adaptation(Garcia-Coll et coll., 1996; Gonzales et Kim, 1997). Toutefois, les recherches sur ledéveloppement de l’enfant ont rarement porté sur l’influence directe du racisme et de ladiscrimination (Garcia-Coll et Magnuson, 1997; Garcia-Coll et coll., 1996; McAdoo, 1992;Spencer, 1988).

Comme on supposait que la discrimination constituait un stresseur que ressentaientuniquement les adultes, ou encore que les enfants et les jeunes ne disposaient pas deressources suffisantes sur le plan social ou cognitif pour comprendre l’importance del’impact de diverses sources de stress auxquelles on est exposé dans la vie (p. ex.,Campos, Campos et Barrett, 1989; Fields et Prinz, 1997), on n’étudiait pas lesrépercussions psychologiques du racisme ou de la discrimination chez les jeunes. De plus,le manque de moyens efficaces pour opérationnaliser et mesurer des stresseurs ethniquescomme la discrimination a limité l’étude du processus de stress chez les jeunes qui fontpartie de minorités. Les instruments de recherche fondés sur le concept d’autodéclarationet visant à évaluer les événements qui touchent la vie des jeunes (p. ex., Coddington,1972; Compas, 1987a; Kohn, Lafreniere et Gurevich, 1990; Kohn et Milrose, 1993) ont étéconçus de manière à tenir compte de divers stresseurs que les chercheurs jugentimportants. En général, ces outils élaborés par les chercheurs ont permis de comprendresurtout les expériences non pas des jeunes qui appartiennent à des minorités, mais plutôt

12 Même si un comportement d’adaptation axé sur la confrontation (p. ex., le fait de se plaindre verbalement à la

personne qui nous a offensé ou de lui signaler notre indignation, et d’avertir les autorités ou les médias si l’on a fait l’objet dediscrimination) peut se révéler un moyen efficace de faire face à la discrimination pour les immigrants qui sont bien acculturés,ce type de comportement peut avoir des conséquences néfastes pour ceux qui le sont moins (Noh, 1999; Noh et coll., 1998).

13 Les comportements d’adaptation axés sur les émotions (c.-à-d. par évitement et autocontrôle) permettent de réduirel’effet de détresse lié à la discrimination chez les personnes dont la qualité de vie a diminué depuis qu’elles ont émigré. Parailleurs, chez les immigrants qui ont vu leur qualité de vie s’améliorer à la suite de leur immigration, ce même type decomportement ne donnait aucun résultat ou avait des effets négatifs (Noh et coll., 1998).

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de ceux qui n’en font pas partie (Hyman, Beiser, Noh et Vu, 2000), et on ne tenait pascompte, dans ces inventaires, des expériences marquantes des jeunes, par exemple le faitd’être exposé tous les jours au racisme et à la discrimination (Kaspar et Noh, 2000).

De récentes études empiriques montrent à l’évidence que la discrimination constitue unesource de stress dans la vie des jeunes, et qu’ils sont en mesure de relater leursexpériences liées aux préjugés raciaux et à la discrimination (Bath et Farrell, 1996;Levinsky et McAleer, 1994; Olsen, 1996; Sigel et Hoskin, 1991; Way, 1998). D’autresrecherches révèlent également que les jeunes font face à la discrimination dans diversmilieux, y compris à l’école, à l’université (Alladin, 1996; J. Kelly, 1998a, 1998b; Landrineet Klonoff, 1996; Thomas et Willinsky, 1997) et dans les milieux juridiques (Wortley, 1996),et qu’elle provient de diverses sources, dont les amis (J. Kelly, 1998a, 1998b), les policiers(Wortley, 1996) et les professeurs (Ogbu, 1991; Solomon et Levine-Rasky, 1996). Dansle cadre d’une étude sur des jeunes de huitième et de neuvième années aux États-Unis(à San Diego et en Floride du Sud), Rumbaut (1994) a constaté que, parmi les 5 127répondants latino-américains, antillais et asiatiques, 55 p. 100 ont déclaré avoir fait l’objetde discrimination, et il a conclu que celle-ci était directement liée à l’accroissement de ladépression chez les jeunes interrogés.

Dans le cadre de nos recherches effectuées à Toronto (Canada), nous avons utilisé uneapproche plus systématique pour évaluer la discrimination : nous avons demandé à 585adolescents (âgés de 12 à 24 ans) appartenant à des minorités visibles (surtout des Noirs,des Asiatiques et des Asiatiques du Sud-Est) et non visibles (des Anglais et desEuropéens) de préciser s’ils avaient « déjà » fait l’objet de discrimination en raison de leurrace ou de leur appartenance ethnique dans huit circonstances précises et, le cas échéant,combien de fois (Kaspar et Noh, 2000). Environ 77 p. 100 des jeunes ont répondu qu’ilsavaient vécu au moins une expérience de discrimination raciale ou ethnique chez lesjeunes appartenant à des minorités visibles, ce taux se situait à 88 p. 100, et chez ceux quifont partie de minorités non visibles, à 44 p. 10014. D’après cette étude, la discriminationaurait des effets négatifs importants sur les plans psychologique et comportemental enfavorisant la dépression, l’anxiété, les comportements antisociaux, ainsi que les problèmesde compétences sociale et instrumentale et d’estime de soi. En outre, l’expérience d’unediscrimination a une incidence directe sur l’écart des résultats entre les jeunes appartenantà des minorités visibles et ceux qui n’en font pas partie.

Comme dans le cas des adultes, et conformément aux résultats de nos propres recherchessur les jeunes appartenant à des minorités, les études empiriques révèlent que les jeunesfont face à de la discrimination à différents taux de fréquence en fonction du groupeethnoracial auquel ils appartiennent. Dans le cadre d’une enquête effectuée à Houston(Texas) auprès de 3 071 jeunes de la sixième à la huitième année scolaire, on a constatéque ceux d’origine africaine, mexicaine et vietnamienne se sentaient plus souvent victimes

14 Les expériences les plus communes étaient les suivantes : faire l’objet d’un traitement inéquitable (49 p. 100), fairel’objet d’un manque de respect (63 p. 100), faire l’objet d’insultes (67 p. 100), ou faire face à la discrimination visant ’unmembre de sa famille (55 p. 100). Les expériences de discrimination les moins fréquentes étaient les suivantes : recevoir descoups (25 p. 100), faire l’objet de menaces (16 p. 100), essuyer un refus de se faire servir (20 p. 100) ou l’exclusion sociale(32 p. 100).

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de discrimination que leurs camarades de classe d’origine européenne non hispanique(Romero et Roberts, 1998). De plus, les jeunes Américains d’origine africaine percevaientdavantage de discrimination à leur égard que les jeunes d’origine mexicaine ouvietnamienne. On a opérationnalisé le facteur de discrimination perçue en intégrant lesréponses des jeunes sur le degré de discrimination auquel ont fait face des gens de lamême origine ethnique qu’eux à celles sur le degré de discrimination auquel ils ont eux-mêmes fait face. Là encore, malgré la méthode plutôt primaire d’opérationalisation dufacteur de discrimination, et l’éventuel « bruit » ou d’interférence causé par l’intégration desperceptions de la discrimination orientées vers soi à celles orientées vers les autres15, cesrésultats étayaient les conclusions de l’étude sur les adultes et les jeunes selon lesquellesles perceptions personnelles de discrimination variaient en fonction de l’appartenanceethnique et de la race de chacun.

La discrimination et l’identité chez les jeunes

On a documenté l’importance de la discrimination comme déterminant des comportementsd’adaptation des enfants et des jeunes appartenant à des minorités dans des étudesthéoriques (Garcia-Coll et coll., 1996; Gonzales et Kim, 1997) et empiriques (Romero etRoberts, 1998; Rumbaut, 1994) récentes. En général, la plupart de ces études soulignel’importance des processus d’identité, cette dernière étant essentielle à un développementsain, notamment pendant l’adolescence (Erikson, 1968). La discrimination influerait surl’intensité au moyen d’un processus par lequel le jeune qui est rejeté ou humilié en raisonde sa race fera une crise identitaire qui l’amènera à remettre en question et à juger sonidentité ethnique (Cross, 1991; Spencer et Markstrom-Adams, 1990). En grandissant, lesjeunes s’exposent de plus en plus à une socialisation extrafamiliale (Blos, 1967; Sullivan,1953; Youniss, 1980; Youniss et Smollar, 1985) – entre autres par les contacts avec lesamis, le milieu scolaire et les médias – dans le cadre de laquelle ils risqueront d’être plussujets à la discrimination et donc d’en être davantage conscients.

Les études qui visent à expliquer de quelle manière la discrimination nuit à l’adaptation etau bien-être chez les jeunes qui appartiennent à des minorités décrivent les facteursd’influence suivants : intériorisation de l’attribution et de la dévalorisation d’une certaineposition ou d’un certain statut sur le plan social (DeVos et Suarez-Orozco, 1990),sentiments d’infériorité et haine de soi (Erikson, 1964), sentiments de colère (Stevenson,Reed, Bodison et Bishop, 1997), mauvaise image de soi, manque d’estime de soi etinsécurité face à son auto-efficacité (p. ex., Erikson, 1964; Garcia Coll et coll., 1996; Inniss,1992; Uba, 1994; Williams-Morris, 1996), et formation inadéquate de l’identité (Abraham,1986; Cross, 1991; Markstrom, 1987; Spencer et Markstrom-Adams, 1990). Même siplusieurs de ces études semblent indiquer que la discrimination minerait les ressourcespsychologiques destinées à former l’identité, il demeure encore difficile de faire des

15 Quelques études empiriques révèlent que les membres de minorités visibles auraient tendance à signaler une bien

plus haute fréquence de discrimination ou de racisme perçu à l’égard de leur groupe ou de leur culture qu’à leur propre endroit(Crosby, 1984; Eberhardt et Fiske, 1998; Taylor, Wright, Moghaddam et Lalonde, 1990). Les recherches entreprises jusqu’à cejour ne permettent pas d’expliquer cet écart. D’autre part, on ne sait pas non plus si les membres de groupes minoritaires onttendance à surestimer le degré de discrimination auquel on fait face dans la société, ou s’ils sous-estiment leurs propresexpériences dans ce domaine.

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affirmations définitives à ce sujet16. Les jeunes qui font partie de minorités peuvent réagirà la discrimination en s’identifiant davantage à leur groupe racial ou ethnique (p. ex., Dion,Dion et Pak, 1992). Ils peuvent établir des sous-cultures au sein desquelles leur image desoi ou leur identité est protégée contre les répercussions négatives de forces socialescomme le racisme et la discrimination (p. ex., Garcia-Coll et coll., 1996; Davey, 1982).Selon Cross (1991, 1995), les jeunes qui sont exposés au racisme ou à la discriminationpeuvent même y réagir en se créant une identité « oppositionnelle » ou distincte qui secaractérise par une suridentification à leur groupe, et en rejetant les valeurs et les normes« courantes »17. Les jeunes peuvent aussi réagir en s’éloignant de leur groupe et en sefaisant une conception stéréotypée et négative de celui-ci, ou en minimisant l’importancede leur race ou de leur ethnicité18 (p. ex., Phinney, Chavira et Tate, 1993; Pyant et Yanico,1991).

Les recherches dans ce domaine soulignent à quel point le milieu social influe sur ceprocessus, et des résultats empiriques ont révélé que les jeunes appartenant à desminorités avaient une moins bonne estime de soi et se sentaient insécures sur le plan del’auto-efficacité lorsque leur appartenance ethnique était apparente par exemple, dansles écoles qui ne sont pas très multiculturelles (p. ex., Bagley, Mallick et Verma, 1979;Rosenberg et Simmons, 1972). D’après d’autres études, les jeunes appartenant à desminorités visibles qui vivent dans des sociétés multiraciales et multiculturelles ont une trèsforte estime de soi et retirent beaucoup d’avantages sur le plan psychologique à forger uneidentité à deux cultures (LaFramboise, Hardin et Gerton, 1993; Cross, 1991, 1995).

Toutefois, peu d’études empiriques ont porté directement sur l’identité ou sur la formationde l’identité ethnique chez les jeunes appartenant à une minorité, ainsi que sur le rôle dela discrimination ou du racisme dans ce processus. Selon une étude de Markstrom (1987)sur la discrimination et la formation de l’identité, les adolescents américains d’origineafricaine, hispanique, asiatique et autochtone se forgeaient une identité de façon plusrestreinte que ceux de la culture non minoritaire et n’exploraient pas toutes les possibilités

16 Une recherche dans le domaine de la psychologie sociale révèle que les membres de minorités dénigrées pourraient

conserver une maîtrise adéquate de la situation ainsi que leur estime de soi et leur fierté identitaire en attribuant leurs échecs auxstigmates sociaux dont leur groupe fait l’objet (Crocker et Major, 1989) ou, au contraire, en se percevant le moins possiblecomme des victimes de stigmates raciaux ou de discrimination (Ruggiero et Taylor, 1997).

17 Pour qu’un jeune rejette les valeurs et les normes perçues comme courantes, dont la réussite scolaire (Cross, 1991;Gibbs et Huang, 1989; Ogbu, 1991; Fordham et Ogbu, 1986), il doit en arriver à considérer le racisme comme étant systémique,et à croire que les minorités seront toujours défavorisées sur le plan social, quel que soit leur niveau de scolarité (Rumbaut,1994). La peur du rejet par les pairs c’est-à-dire de se faire classer comme quelqu’un qui essaie d’agir comme un « Blanc »(Ogbu, 1991) peut se révéler un autre facteur important qui inciterait les jeunes appartenant à des minorités à conserver leuridentité oppositionnelle.

18 Ce point de vue corrobore les hypothèses de recherche selon lesquelles les jeunes réagiraient à la discrimination,que ce soit de façon défensive ou offensive, en essayant « d’agir comme des Blancs » ou de se faire « passer » pour des Blancs(Cook et Ludwig, 1998; Gibbs et Huang, 1989), afin d’éviter de se faire traiter de façon discriminatoire, ou pour se faire accepterpar la culture dominante et s’assurer une réussite scolaire et sociale (Cross, 1991, 1995; Spencer et Markstrom-Adams, 1990;Ogbu, 1991). Toutefois, lorsque les jeunes optent pour ce choix, ils sont souvent rejetés par leurs pairs de la même origine racialeou ethnique qu’eux, et ils ne peuvent bénéficier des effets protecteurs que procure la fierté raciale ou ethnique (p. ex., Aboud etDoyle, 1995; Branscombe, Schmitt et Harvey, 1999; Chavira et Phinney, 1991).

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qui s’offrent à eux sur le plan de l’identité c’est-à-dire, par un processus moins sain deformation de l’identité (Marcia, 1966, 1980, 1987; Phinney et Chavira, 1995). On a concluque ces résultats prouvaient que la discrimination avait un impact direct sur l’identité.Toutefois, cette étude était fondée non pas sur de réelles expériences de discrimination,mais plutôt sur des suppositions à ce chapitre.

Les résultats préliminaires (non publiés) de nos recherches semblent révéler qu’il existeraitun lien étroit entre la discrimination et l’identité ethnique chez les adolescents. Dans lecadre de cette étude torontoise, les perceptions des jeunes appartenant à des minoritésvisibles et non visibles concernant la discrimination étaient liées à une forte identitéethnique. Ces résultats sont les mêmes que ceux obtenus auprès d’étudiants de premiercycle de l’Université de Toronto (p. ex., Dion et Earn, 1975; Dion, Dion et Pak, 1992). Faitintéressant, l’impact de la discrimination sur l’identité ethnique des jeunes de divers milieuxculturels de notre étude était plus important lorsque leur statut de minorité ethnique n’étaitpas apparent. Même si l’identité ethnique revêt plus d’importance pour les jeunes desminorités visibles que pour ceux des minorités non visibles (p. ex., Phinney, 1990), lesdifférents degrés d’exposition à la discrimination pourraient se révéler un facteur essentieldont il faut tenir compte dans ce processus. Selon notre étude torontoise, les jeunesappartenant à des minorités non visibles s’étaient moins souvent sentis victimes dediscrimination que ceux appartenant à des minorités visibles, ce qui signifie que leuridentité pouvait être plus facilement ébranlée par leurs expériences de discrimination, soitparce que celles-ci étaient imprévues, soit parce qu’ils avaient moins l’habitude de faireface à ce genre de situation. Des travaux visant à préciser ce phénomène chez les jeunesreprésenteraient un important sujet de recherche futur qui nous permettrait de mieuxcomprendre de quelle manière le racisme et la discrimination influent sur l’identité enfonction du statut ethnique ou racial d’une personne.

D’autres conclusions tirées des données de notre étude effectuée à Toronto ouvrent la voievers d’autres orientations importantes de recherche pour l’avenir. Selon ces données, ladiscrimination perçue est liée à un faible sens d’identité canadienne, et nous avons obtenules mêmes résultats lorsque nous avons examiné cette corrélation chez les jeunes qui fontpartie de minorités visibles. Même s’ils sont corrélationnels, ces résultats montrent à quelpoint la discrimination peut empêcher les jeunes d’éprouver un sentiment positif d’identitécanadienne, ce qui peut avoir d’importantes répercussions sur les relations interracialesau Canada et les politiques dans ce domaine. En outre, le maintien d’une forte identitécanadienne semble essentiel au bon développement psychologique des jeunes. Parexemple, notre étude nous a permis de constater qu’un sentiment d’attache etd’appartenance au Canada était lié à des niveaux plus faibles de dépression et decomportements antisociaux; l’identité ethnique, quant à elle, ne jouait pas un rôle importantdans ce domaine. Enfin, l’identité, tant canadienne qu’ethnique, était liée à une meilleurecompétence instrumentale et sociale, ainsi qu’à une bonne estime de soi.

Ces résultats montrent l’importance d’examiner l’identité aussi bien canadiennequ’ethnique, ainsi que l’influence des divers éléments de l’identité ethnique, afin de mieuxcomprendre les répercussions sociales et psychologiques de la discrimination sur l’identitédes jeunes. Les recherches futures devraient servir à examiner les fonctions médiatricesou modératrices de l’identité sur l’impact qu’a la discrimination sur le développement

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psychologique des jeunes. Très peu d’études se penchent sur le rôle protecteur del’identité. Des travaux de recherche révèlent qu’une image de soi reposant sur unengagement idéologique a un effet protecteur sur la santé mentale de l’adolescent(Kostelny et Garbarino, 1994; Marcia, 1980, 1987), et qu’un sentiment d’attache et de fiertéenvers les idéologies de sa culture ethnique est essentiel pour que l’intéressé acquière,pendant l’adolescence, une image positive de lui-même et un sentiment de bien-êtrepsychologique (Phinney, 1991, 1992). Au cours de l’adolescence, on commence égalementà saisir dans quelle mesure l’engagement idéologique peut servir de ressource protectrice(Adelson, 1983). Une étude a révélé qu’une forte attache raciale chez les jeunes Noirsaméricains avait permis de réduire l’impact de la discrimination sur leur rendement scolaire(Wong, 1998). Quoi qu’il en soit, les recherches sur le développement entreprises jusqu’àce jour n’ont pas permis de prouver que l’identité servait systématiquement à atténuerl’impact négatif de la discrimination sur le plan psychologique. Nous prévoyons analyserles données que nous avons recueillies sur la discrimination et la santé mentale chez lesjeunes qui appartiennent à des minorités au Canada (à Toronto, à Vancouver et àMontréal) de manière à vérifier l’importance des divers aspects de l’identité en fonction desvariables de médiation ou de modération.

Enfin, un sujet lié tant à l’identité ethnique qu’à la discrimination chez les jeunes leseffets protecteurs de la socialisation raciale et ethnique des jeunes au sein de la famille a récemment été le point de mire de bon nombre de recherches sur la discrimination dansle domaine du développement de l’enfant (p. ex., Cross, 1991, 1995; Fischer et Shaw,1999; Garcia-Coll, Meyer et Brillon, 1995; Graham, 1992; Harrison, Wilson, Pine, Chan etBuriel, 1990; Marshall, 1995; McAdoo, 1992; Phinney et Chavira, 1995; Quintana et Vera,1999; Thornton, Chatter, Taylor et Allen, 1990). Une facette importante de l’éducationparentale prodiguée aux jeunes qui appartiennent à des minorités en vue de leur apprendreà s’adapter sur le plan social consiste à leur montrer comment prévoir les gestesdiscriminatoires et d’autres obstacles sociaux auxquels ils peuvent être confrontés, ainsique la manière d’y faire face (Boykin et Toms, 1985; Demo et Hughes, 1990).

Les jeunes qui apprennent, par leur éducation sociale, à reconnaître les réalités négativesdu racisme et de la discrimination dans la société, et à y faire face, peuvent ainsi seprotéger contre les répercussions psychologiques négatives qui y sont liées; de plus, cetteméthode de socialisation s’est révélée utile pour assurer aux jeunes qui appartiennent àdes minorités visibles une plus grande estime de soi (Phinney et Chavira, 1995), demeilleures notes à l’école et un sentiment d’auto-efficacité (Bowman et Howard, 1985;Quintana et Vera, 1999), ainsi que pour réduire la détresse psychologique (Fischer etShaw, 1999). Nous nous proposons maintenant de discuter brièvement d’un sujet derecherche connexe : les comportements d’adaptation à la discrimination chez les jeunes.

Comportements d’adaptation à la discrimination

Des chercheurs ont tenté de déterminer en quoi consistent les stratégies d’adaptationraciale des jeunes au moyen de vignettes à contenu racial (p. ex., Johnson, 1999) grâceauxquelles ils ont classé les comportements en deux catégories : les comportements axés

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sur la résolution des problèmes19 et les comportements axés sur les émotions20 (Kim etJohnson, 1999). Toutefois, on ne dispose pas encore de suffisamment de donnéesempiriques pour prouver l’efficacité des efforts personnels des jeunes qui font partie deminorités au moment de faire face à ce qu’ils perçoivent comme étant de la discrimination.Même si l’étude des comportements d’adaptation des enfants et des adolescents auxfacteurs de stress de la vie commence à reposer sur de solides assises théoriques etempiriques (Band et Weisz, 1988; Compas, 1987b; Compas, Worsham et Ey, 1992;Garmezy et Rutter, 1983; Rutter, 1990), nous en connaissons encore très peu sur ce sujetrelativement à la discrimination.

On peut supposer que les enfants âgés sont mieux outillés pour faire face à ladiscrimination car, en grandissant, ils acquièrent des comportements d’adaptation à desstresseurs précis (Band & Weisz, 1988). Les jeunes enfants disposent probablement demoins de moyens pour s’adapter, car leurs capacités cognitives et sociales ne sont pasencore suffisamment développées (p. ex., Compas, 1987b; Fields et Prinz, 1997); parconséquent, ils ne sont probablement pas en mesure de réagir de la meilleure manière quisoit pour réduire l’état de détresse psychologique causé par un stresseur précis. Toutefois,selon les conclusions d’études sur les comportements d’adaptation des enfants au stress« quotidien », même à l’âge de six ans, les enfants sont déjà en mesure de déterminer cequi les stresse et de s’adapter en conséquence, ce qui leur permet de signaler lessituations et les événements qu’ils trouvent stressants, et de décrire leurs efforts pour yfaire face et d’en évaluer l’efficacité (Band et Weisz, 1988). De plus, on juge que lesdifférentes stratégies auxquelles ils ont recours selon les situations qui se présentent jouentun rôle essentiel pour qui veut prévoir leur ajustement social et émotionnel (p. ex., Campos,Campos et Barrett, 1989; Fields et Prinz, 1997).

Néanmoins, les recherches entreprises jusqu’à ce jour n’ont pas permis de préciser lanature des comportements des jeunes appartenant à des minorités face à la discrimination,ni celle du lien qui existe chez eux entre l’adaptation, l’identité et la santé. Dans le cadred’analyses préliminaires des données recueillies auprès de jeunes appartenant à desminorités visibles et non visibles à Toronto, on a délimité cinq types de comportementsauxquels ont recours les adolescents pour faire face à la discrimination (Kaspar et Noh,2000). Ces réactions comportementales et cognitives étaient les suivantes : confronter lapersonne offensante; exprimer son indignation ou avertir les autorités; ne pas réagir;modifier son point de vue au sujet de soi-même; et modifier son point de vue au sujet dela personne offensante. Les réactions les plus communes consistaient à modifier son pointde vue21. Ces réactions étaient aussi fréquentes que la confrontation22, la verbalisation23 ou

19 Par exemple, recourir aux autorités, procéder à une confrontation physique ou verbale et demander du soutien.

20 Faire la morale, ignorer le problème ou n’avoir aucune réaction, reculer devant l’adversaire, montrer de la fiertéraciale, et projeter une image de supériorité ou d’infériorité.

21 Je me suis dit… la personne qui m’a offensé a agi de façon ridicule; seuls les ratés se défoulent sur les gens de cettefaçon; c’est sans importance tant que je suis meilleur ou plus fort qu’eux; mes expériences ne sont pas aussi terribles que cellesd’autres personnes; les souffrances forgent le caractère.

22 J’ai riposté par des coups; je lui ai rendu la monnaie de sa pièce; j’ai riposté verbalement.

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l’acceptation24. Toutefois, les comportements d’adaptation des jeunes face à ladiscrimination n’ont pas permis d’en réduire sensiblement l’impact psychologique etcomportemental chez eux.

Il importe d’analyser ce processus de façon plus systématique et de tenir compte du rôleque jouent des facteurs comme l’âge, le sexe, la race ou l’appartenance ethnique, l’identité,et la situation sociale et familiale pour déterminer dans quelle mesure une personne seraexposée à la discrimination et comment elle y réagira. Il faut aussi tenir compte des effetsdu stress liés au développement de comportements normatifs y compris ceux liés auxchangements sur le plan des rôles, de l’école et de l’apparence physique, et aux influencesde la socialisation à l’extérieur du noyau familial sur la santé et le développement desjeunes appartenant à des minorités, car ils peuvent faire face à un degré plus élevé destress en raison de la discrimination à laquelle ils sont confrontés.

Collectivités à risque

Les études théoriques et empiriques que l’on a examinées dans le cadre de la présentecommunication portent surtout sur la nature des liens entre la discrimination, l’identité etl’état psychologique. On y analyse la discrimination liée au statut de minorité raciale ouethnique visible d’une personne. De plus, même si la « visibilité » est un facteur qui accroîtsensiblement le risque qu’une personne ou un groupe soit exposé à la discrimination,d’autres facteurs s’ajoutent à celui-ci et augmentent ainsi les risques d’exposition à ladiscrimination et d’augmentation des symptômes psychologiques négatifs liés à celle-ci.Par exemple, il pourrait se produire une interaction entre le facteur de « statut de minoritévisible » et les variables de « statut d’immigrant » et « de réfugié », de « sexe », etd’« âge », qui modifiera le taux d’exposition et de vulnérabilité psychologique à ladiscrimination. Toutefois, les recherches entreprises jusqu’à ce jour n’ont pas permis derésoudre la question empirique de la nature des interactions entre ces facteurs ousituations socio-démographiques qui peuvent être liées à un accroissement du risque.Nous discuterons, ci-dessous, de quelques questions connexes et, dans la mesure dupossible, des recherches effectuées en la matière.

Immigrants et réfugiés

L’augmentation du nombre d’immigrants qui proviennent de pays sources « nontraditionnels » est un des facteurs qui ont contribué à établir une importante représentationdes minorités visibles au Canada. Chaque année, environ 200 000 immigrants et réfugiéssont acceptés au Canada. Avant les années 60, on y admettait surtout des immigrants duRoyaume-Uni, de l’Europe et des États-Unis. Mais depuis que le gouvernement fédéral aaboli en 1962 les restrictions relatives aux pays sources et mis en place en 1967 un

23 J’ai averti les autorités de l’incident; j’en ai parlé aux médias; j’ai demandé conseil à des amis; j’ai demandé conseil

à ma famille; j’ai tenté de discuter avec la personne qui m’a offensé ou de la raisonner.

24 Je n’ai pas réagi; je me suis dit « c’est la vie »; j’ai fait abstraction de la situation; j’ai fait comme si on ne m’avaitpas offensé.

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système de points d’appréciation, les taux d’immigration de pays sources non traditionnelscomme l’Asie, le Moyen-Orient, les Îles du Pacifique, l’Amérique du Sud, l’Amériquecentrale et l’Afrique se sont accrus sensiblement. Par exemple, rien que dans les années1990, 60 p. 100 des immigrants canadiens provenaient de pays asiatiques (Emploi etImmigration Canada, 1999). De plus, entre 1986 et 1991, environ 19 p. 100 des 819 000immigrants et réfugiés au Canada étaient des enfants âgés de moins de 12 ans (Beiser etcoll., 1995). Au Canada et aux États-Unis, une personne sur cinq âgée de moins de 18 ansest un immigrant ou un enfant d’immigrant, et ce taux est en augmentation croissante(Beiser, Dion, Gotowiec, Hyman et Vu, 1995; Hicks, Lalonde et Pepler, 1993; Zhou, 1997).On prévoit que, d’ici l’année 2016, un enfant canadien sur quatre sera né à l’étranger, ousera l’enfant de parents nés à l’étranger (K. Kelly, 1995).

Selon un groupe de travail canadien, les préjugés et les stigmates posent des risquesimportants pour la santé des immigrants et des réfugiés, notamment pour ceux qui fontpartie de minorités visibles (Beiser et coll., 1988a, 1988b). Selon les conclusionsempiriques d’une enquête, il existe un lien entre la discrimination et la dépression chez lesréfugiés de l’Asie du Sud-Est qui habitent à Vancouver (Canada) depuis dix ans (Noh,Beiser, Kaspar et Hou, 1999). D’autres études soulignent le rôle que joue le statut deminorité visible dans ce processus. Une récente enquête effectuée en Nouvelle-Zélandeauprès de réfugiés de l’Asie du Sud-Est et des immigrants des Îles du Pacifique (surtoutdes Samoans) et britanniques a révélé que les réfugiés asiatiques et les immigrants desÎles du Pacifique — mais non ceux du Royaume-Uni — faisaient quotidiennement face àde la discrimination, et que celle-ci constituait le facteur le plus important lié à dessymptômes graves d’anxiété et de dépression (Pernice et Brook, 1996, p. 516).

Même si peu d’études se sont penchées sur l’effet modérateur de l’adaptation sur le stressau cours de ce processus (Noh, Beiser, Kaspar et Hou, 1999), il importe tout de même detenir compte de ce facteur en vue d’évaluer le niveau d’adaptation des nouveauxCanadiens qui ne prévoyaient probablement pas affronter des problèmes de racisme et dediscrimination à leur arrivée. Il faut entreprendre des études comparatives longitudinalessur l’immigration (p. ex., en comparant l’immigrant au réfugié) et le statut de « visibilité »(p. ex., en comparant les minorités visibles aux minorités non visibles) pour être en mesurede déterminer les facteurs suivants : la nature et la portée des expériences qui suivent lamigration; le rôle que jouent les réactions à la discrimination sur l’établissement etl’adaptation réussies des immigrants au cours des générations à venir en fonction de leurgroupe racial ou ethnique; et les groupes qui sont les plus sujets à la détressepsychologique en raison des expériences traumatiques auxquelles ils ont fait face avantla migration (p. ex., les réfugiés). En outre, cette approche peut permettre d’expliquer dequelle manière le racisme et la discrimination sont susceptibles d’entraîner unedétérioration graduelle de la santé chez les immigrants,

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une tendance importante qu’ont relevée de nombreuses études entreprises au Canada etaux États-Unis.

Enfin, l'étude de l'identité et de ses répercussions sur la santé mentale ou de ses effetsprotecteurs chez les immigrants et les réfugiés s’avère un domaine de recherche sur ladiscrimination fort important. On peut s'attendre à ce que le sentiment d'identité d'unepersonne ou son attachement aux valeurs traditionnelles de son pays ou de sa culture semodifient en fonction de son nouveau milieu socioculturel, notamment dans le cas desjeunes qui s'assimileront probablement plus rapidement à la société canadienne que leursparents. Le racisme ou la discrimination nuisent-ils à l'identité ethnique? Cela demeure unequestion empirique. L'impact du racisme ou de la discrimination sur l'identité canadiennechez les immigrants et les réfugiés est une autre question importante. Si l'identitécanadienne représente un grand indice de l'adaptation des immigrants et qu'elle permetde vérifier l'efficacité des politiques d'immigration canadiennes, on étudie encore très peula question sur le plan de l'adaptation.

Les femmes

Le sexe d'une personne (c.-à-d. le fait d’être une femme) constitue un facteur qui, enlui-même ou combiné à d'autres variables comme le statut de minorité visible oud'immigrant, peut avoir des répercussions sur son adaptation psychologique. Dans le casdes femmes appartenant à des minorités visibles, l'exposition à la discrimination raciale ouethnique peut être liée à la discrimination sexuelle. Qui plus est, ces femmes sontdavantage exposées à un étirement excessif de leur rôle car à leur emploi s’ajoutentsouvent les responsabilités supplémentaires de l’entretien domestique et des soins àprodiguer aux enfants. Les recherches effectuées jusqu'à ce jour ne permettent pas encored'établir dans quelle mesure ces conditions augmentent les risques de détresse chez lesfemmes appartenant à des minorités visibles.

Les situations et les expériences des immigrantes sont moins bien comprises, maiscommencent à faire l’objet d’études approfondies (p. ex., Kelson et Delaet, 1999; Schwartz-Seller, 1994; Sweetman, 1998; Weatherford, 1996). Des résultats empiriques ont révéléque les immigrantes de minorité visible sont davantage sujettes à la discrimination, à lamarginalisation (Agnew, 1996; Moller-Okin, Cohen, Howard et Nussbaum, 1999) et auxtroubles émotionnels (Carpenter et Brockington, 1980; Halldin, 1985; Noh, Avison etKaspar, 1992). On a déterminé que cette situation était causée par les changements derôle et la surcharge de travail chez les femmes. Selon des statistiques sur l'immigration,les nouvelles Canadiennes proviennent en grande partie de pays non européens où lesnormes sociales dictent que les femmes assument un rôle domestique et soient exclueesdu milieu professionnel, ou qu'elles y participent très peu. L'immigration modifiesensiblement la structure des rôles féminins — sur le plan des attentes, des pratiques etde l'identité directe, par rapport à ce qu'elles avaient connu avant la migration (Kinnon,1999). Aussi cette expérience sera-t-elle déterminante dans l'établissement et dansl’acquisition d’un sentiment de bien-être25.

25 D'une part, on suppose que les immigrantes et les réfugiées peuvent s'intégrer et s'adapter plus facilement à leurnouveau milieu que les hommes, et qu'elles souffrent moins sur le plan psychologique qu'eux à cet égard (p. ex., Tracy-Wortley

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Quoi qu'il en soit, les recherches ont davantage porté sur la manière dont les stresseursd'acculturation comme le racisme ou la discrimination ont des effets psychologiques surl'adaptation des immigrantes. Une des premières études sur les femmes hispaniqueshabitant aux États-Unis a permis d'établir que des expériences de discrimination peuventprovoquer un important état de détresse sur le plan psychologique (Amaro, Russo etJohnson, 1987). D'après une étude des immigrantes mexicaines à Los Angeles, ladiscrimination fondée sur l'identité ethnique constituait le facteur d'acculturation le plusimportant pouvant entraîner chez ces femmes des troubles dépressifs (Salgado de Snyder,1987).

Les problématiques liées au développement pourraient s’avérer ici des pistes de rechercheintéressantes mais s’avèrent à l’heure actuelle sous-étudiées. C'est surtout en observantles jeunes, dont les niveaux d'autonomie et de scolarité seraient, par exemple, plusrestreints dans leur pays d'origine, que nous pouvons constater à quel point l’immigrationau Canada ouvre aux femmes les portes de nombreuses possibilités. Le fait de vivre dansune société plus égalitaire et plus variée sur le plan socioculturel peut avoir desrépercussions importantes sur le développement des rôles identitaires sur les plansethnique et sexuel. Or même si le racisme et la discrimination sont d'importants facteursdont il faut tenir compte en ce qui a trait à ce processus, nous en savons très peu au sujetde leur impact sur les processus d'identité et d'autres aspects du développementpsychologique.

Les enfants et les adolescents

Selon des études empiriques, l'adaptation psychosociale des enfants et des adolescentsest en outre tributaire du statut d'immigrant et de minorité, des contextes écologique etculturel liés à l'après-migration (comme la discrimination ethnique ou raciale) et d'autressources de stress de la vie quotidienne (Kaspar et Noh, 2000; Romero et Roberts, 1998;Rumbaut, 1994). L'échantillon de jeunes utilisé dans ces études était surtout constituéd'enfants nés de parents immigrants. Dans le cadre de recherches récentes, on a constatéque les perceptions de discrimination variaient en fonction du statut générationnel. Gil,Vega et Dimas (1994) ont montré que, abstraction faite du niveau d'acculturation, lesadolescents nés à l'étranger avaient moins tendance à percevoir de discrimination à leurégard et à s’en plaindre que les jeunes hispaniques nés aux États-Unis. Ces résultatsmontrent qu'il importe d'entreprendre des recherches longitudinales qui tiennent nonseulement compte des expériences des enfants de deuxième et troisième générations,mais aussi de celles des nouveaux immigrants et réfugiés, quant à l'impact immédiat del'établissement sur leur développement.

Il faudrait entreprendre des recherches plus systématiques dans ce domaine en vue

et Wheaton, 1997). On affirme que les immigrantes sont davantage en mesure de devenir autonomes et d'assumer de nouveauxrôles dans leur pays d'accueil — par exemple, en raison du fait qu'elles peuvent détenir un emploi et vivre dans une société quiconsidère les femmes sur un pied d'égalité avec les hommes — que dans leur pays d'origine, alors que les hommes peuvent avoirl'impression que leur rôle et leur statut sont réduits. D'autre part, on suppose que les immigrantes n'arrivent pas à bien s'adapter,en raison des conflits familiaux suscités par un changement de rôle, et du poids excessif des responsabilités liées au fait de devoirtravailler tout en s'occupant de la maison et des enfants.

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d'analyser les changements de perception de la discrimination et le niveau d'adaptationpsychologique selon les générations. Au Canada et aux États-Unis, les enfantsd'immigrants auront plus tard à s'occuper du bien-être de leurs citoyens aînés. La mesuredans laquelle ils auront réussi à s'adapter, qui se traduira entre autres choses par le succèssur les plans scolaire et professionnel, ainsi que par l'acquisition d'un sentiment positifd'identité et de citoyenneté, aura d'importantes répercussions sociales et politiques sur leplan de la solidarité nationale, de la morale publique, de l'économie et des politiquesd'immigration. Toutefois, le racisme et la discrimination peuvent compromettre, sur le plande leur adaptation, le développement des enfants et des adolescents immigrants qui fontpartie de minorités visibles. Ceux-ci peuvent manquer de ressources sur le plan personnelou social pour gérer efficacement des forces sociales aussi négatives que le racisme et ladiscrimination. De plus, la perception, pendant l'enfance ou l'adolescence, de la prévalencedu racisme et de la discrimination, peut nuire à des phases critiques du développement,dont la formation d'un sentiment positif d'identité, la mise en place de relations et deréseaux sociaux ayant une influence positive et, enfin, l'établissement d'objectifs scolaireset professionnels.

Par exemple, les jeunes auront très probablement à faire face à de la discrimination àl'école et à en souffrir sur les plans psychologique et scolaire. Selon de récentes études,la société s'attend à ce que les jeunes qui font partie de minorités réussissent moins biensur le plan professionnel, et les professeurs s'attendent à la même chose sur le planscolaire; effectivement, ces jeunes-là réussissent moins bien à l'école et ont desaspirations professionnelles moins hautes que leurs compagnons qui n'appartiennent pasà des minorités (Ogbu, 1991; James, 1990). Ces observations confirment l'opinion selonlaquelle le racisme endiguerait la réussite scolaire et réduirait les débouchés des jeunesde minorités. De plus, comme les études universitaires favorisent l'entrée dans lesmeilleures sphères du marché du travail, les jeunes appartenant à des minorités visiblesqui font des études universitaires risquent d’être plus souvent que leurs pairs qui ne fontpas d’études post-secondaires confrontés à de la discrimination (Castles, Booth et Wallace,1984).

Les résultats d'une étude américaine effectuée (au Michigan) auprès de jeunes Afro-Américains sont sans équivoque : tous ont rapporté avoir été victimes de racisme dans leurvie, avec un incident de discrimination au cours de la dernière année dans 98 p. 100 descas (Landrine et Klonoff, 1996). Des taux aussi élevés montrent du doigt la naturesystémique et institutionnelle des attitudes et pratiques du racisme et de la discrimination,qui contribuent au maintien des inégalités sociales. Malgré ce constat que les jeunes et lesétudiants font en effet souvent face, comme ils le signalent, à des formes graves dediscrimination raciale, il n’existe pas encore suffisamment de données empiriques pour tirerdes conclusions définitives sur la nature, la portée et les effets psychologiques de ladiscrimination en fonction des milieux sociaux et institutionnels.

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Recommandations de recherches empiriques sur la discrimination et l'identité

Méthodologie de recherche

Diverses approches méthodologiques permettraient d'expliquer plus précisément lefonctionnement des processus psychologiques et sociaux par lesquels la discriminationraciale et ethnique joue sur l'identité et le bien-être général d'une personne. Celles-cicomprennent des études expérimentales, des enquêtes, des études transversales etprospectives par cohortes, des études longitudinales, des études cas-témoin, et des étudesinternationales ou transculturelles.

Toutefois, même si elles seraient échelonnées dans le temps et onéreuses, les recherchessur la discrimination et l'identité seraient le mieux servies par des études longitudinales quitiendraient compte de données s'échelonnant sur toute une vie. Il est essentiel que cesétudes portent sur de larges échantillons comprenant divers groupes ethniques pour quel'on puisse examiner les expériences de discrimination et les réactions au stress ainsicausé en fonction des multiples groupes ethnoculturels. Dans le cadre de ces recherches,il importe également d'analyser les effets de l'interaction entre les stresseurs (événementsgraves de la vie, stresseurs chroniques, et stresseurs liés à la race : préjugés etdiscrimination), ainsi que l'impact des ressources psychologiques et sociales (adaptation,estime de soi, maîtrise de la situation et soutien social) sur l'identité et l'adaptationpsychologique des minorités et des migrants pendant toute leur vie. Enfin, des étudeslongitudinales qui comprendraient des échantillons de parents et d'enfants permettraientd'obtenir des renseignements importants sur l'impact intergénérationnel. Il seraitnotamment essentiel d'obtenir des données sur la période de développement des enfantset des adolescents, qui est caractérisée par une forte influence de la famille sur le plan dela socialisation, ce qui signifie que les expériences des parents ou leur façon d'éduquerleurs enfants peut influer sur le genre d'expériences auxquelles ces derniers auront à faireface et la manière dont ils y réagiront.

Outre les informations recueillies par des recherches longitudinales, des études sur lesjeunes à l'école permettraient d'obtenir des données transversales importantes sur le typede discrimination auquel les jeunes font face à l'école et la façon dont ils y réagissent, ainsique l'impact psychologique qu’ont ces expériences ont en fonction de l'âge et du contextemulticulturel de l'école sur, entre autre choses, le développement sain de l'identité. Bienque transversales, ces données fourniraient des renseignements importants sur lesprocessus intergroupes, ainsi qu’au sujet de leur impact sur l'adaptation des enfants et desadolescents. De plus, des études en milieu scolaire permettraient de préciser lesperceptions des pairs et des professeurs sur les jeunes, au moyen d'échellessociométriques fondées, par exemple, sur l'acceptation ou le rejet des pairs et l'adaptationpsychologique.

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Enquêtes nationales

La plupart des conclusions tirées dans la présente communication sont fondées sur lesrésultats publiés d'enquêtes communautaires et d'études nationales et expérimentalesentreprises au Canada et aux États-Unis. Dans le cadre de ces enquêtes et études, onavait en général opté pour une méthodologie de recherche transversale visant à examinerla santé psychologique ou physique des minorités, des immigrants et des réfugiés. Mêmesi en général les études montrent que le racisme et la discrimination ont des répercussionssur divers aspects de la santé psychologique et physique des adultes et des jeunes, il estencore trop tôt pour tirer des conclusions définitives, notamment en ce qui concerne lecontexte canadien. La plupart des études sur la discrimination portent sur les Noirs et lesHispaniques des États-Unis et, bien qu'on en ait entrepris quelques-unes au Canada, cedomaine de recherche n'y est pas encore bien établi.

Vu la diversité croissante de la société canadienne, il importe que les recherches sur ladiscrimination et l'identité se fassent au niveau gouvernemental et à l'échelle nationale.C'est ce que l'on a tenté de faire, dans une certaine mesure, par l'entremise de l'Enquêtesur la diversité ethnique effectuée conjointement par Statistique Canada et le ministère duPatrimoine canadien. Une initiative nationale de recherche dans ce domaine devrait tenircompte des variations régionales de l'exposition à la discrimination, ainsi que de l'impactde l'opinion publique sur les minorités et les immigrants dans ces régions. La plupart desdonnées nationales obtenues par sondage sont trop anciennes ou n'ont pas été recueilliesde façon systématique sur une assez longue période de temps. Par conséquent, on peutdifficilement effectuer des recherches en vue de déterminer de quelle manière l'opinionpublique influe sur les perceptions de discrimination des minorités ou des immigrants, ainsique sur leur santé et leur sentiment d'identité.

En outre, il faut tenir compte des immigrants et des réfugiés qui habitent dans les régionssi l'on veut s'assurer que les échantillons d'une étude soient bien représentatifs. Commela plupart des nouveaux immigrants sont surtout regroupés dans quelques grands centresurbains du Canada, ils risquent d'être sous-représentés dans les enquêtes nationales. Afind'assurer une représentation suffisante des répondants qui habitent dans de petites régionsrurales, des échantillons d'enquête nationale comprennent souvent une plus petiteproportion de répondants des grands centres urbains. Bien que cette approche soit trèsefficace à diverses fins, la plupart des immigrants, notamment ceux qui appartiennent à desminorités visibles, habitent dans les centres urbains. De plus, on exclut souvent desenquêtes nationales les immigrants les plus marginalisés qui ne parlent ni l'anglais ni lefrançais, ou qui ne veulent pas y participer.

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Mesures de discrimination et identité

Les recherches sur le racisme et la discrimination sont surtout limitées par le manqued'instruments de mesure appropriées pour ces concepts (Sigelman et Welch, 1991;Williams et coll. 1994; Utsey, 1998), ce qui comprend leurs formes les plus subtilesd'interaction (Williams et coll., 1997). Le manque de définitions conceptuelles etopérationnelles précises du racisme et de la discrimination peut en partie expliquer lesrésultats contradictoires que l’on a obtenus sur les liens qui existent entre la discriminationet l'identité.

La plupart des recherches effectuées jusqu'à maintenant sont fondées sur les expériencesde discrimination perçues par un groupe unique, ce qui signifie que l'on a peut-êtresous-estimé le taux véritable de discrimination raciale (Sigelman et Welch, 1991). Lestravaux entrepris en vue d'établir des échelles d'évaluation de la discrimination n'en sontencore qu'à un stade fort rudimentaire (Utsey, 1998), et la plupart de ces instruments sontunidimensionnels et validés surtout en fonction des étudiants universitaires. Il imported'élaborer des mesures multidimensionnelles détaillées en vue d'évaluer la fréquence, lanature, les sources et les contextes des expériences de discrimination.

Ces mesures doivent fournir une évaluation fiable et objective du degré de discriminationdans des dimensions ou domaines précis. D'après les études que l'on a passées en revue,la discrimination se présente dans différents milieux et sous diverses formes (p. ex.,subtiles et ouvertes), et à différents taux de fréquence selon le groupe ethnoracial auquelappartient une personne. Toutefois, la plupart des résultats obtenus dans ce domaine derecherche ne traduisent pas de façon adéquate la complexité des expériences liées à ladiscrimination en fonction des divers contextes personnels et sociaux.

Il importe que les instruments de mesure soient conçus de manière à évaluer de façonprécise les expériences des minorités dans des contextes importants. Par exemple, lesrésultats empiriques d'études sur les expériences de discrimination des immigrants et desréfugiés d'origine chinoise, coréenne, laotienne et vietnamienne au Canada révèlent quela culture et le contexte social (p. ex., le respect de sa culture d'origine, l'acculturation,l'importance de la collectivité ethnique et le statut d'immigrant ou de réfugié) influe demanière significative sur les perceptions de discrimination et les réactions psychologiquesqui s'ensuivent.

Les changements qui se produisent au cours du développement des jeunes pendant laphase intermédiaire de l'enfance et de l'adolescence, y compris les nouveaux rôles, leschangements d'école et l'exposition accrue à des influences sociales extrafamiliales,doivent faire l'objet d'études si l'on veut bien documenter les expériences de discriminationchez les jeunes dans divers contextes sociaux. Toutefois, les instruments de mesure dela discrimination sont encore moins avancés pour la recherche sur les jeunes que pourcelle sur les adultes. Il importe également de mesurer les expériences de discriminationque perçoivent les jeunes en fonction du milieu (p. ex., de l'école ou du voisinage) et dessources de discrimination (p. ex., les professeurs, les pairs et les policiers).

L'opérationalisation du racisme et de la discrimination doit permettre d'obtenir non

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seulement une documentation descriptive de la nature et de la portée des expériencesperçues, mais aussi une évaluation de l'efficacité des comportements d'adaptation dechacun à ces expériences. Le rôle de l'adaptation est relativement peu étudié dans cedomaine, entre autres raisons parce que les théories actuelles sur la discrimination sontfondées sur l'évaluation des déterminants plutôt que sur des mécanismes permettant auxressources personnelles et sociales d'avoir un effet médiateur ou modérateur sur lesrépercussions psychologiques de la discrimination.

Les études que nous avons passées en revue dans le cadre de la présente communicationrévèlent qu'il importe d'examiner les répercussions psychologiques des comportementsd'adaptation liés à la discrimination, surtout si l'on tient compte du rôle que joue l'identitéethnique dans ce processus. Il faudrait évaluer différentes méthodes ou formesd'adaptation afin de déterminer de quelle manière chaque personne fait face au racismeet à la discrimination et comment ces réactions changent en fonction de l'appartenanceethnique ou culturelle, du sexe, du développement et du statut social de chacun. Denombreux instruments normalisés destinés à l’évaluation des principaux comportementsd'adaptation ne permettent pas de déterminer comment les minorités ou les immigrantsarrivent à composer avec les effets négatifs de la discrimination. Toutefois, les théoriesactuelles sur l'adaptation sont assez bien établies pour que l'on puisse les appliquer auracisme ou à la discrimination.

Il serait temps d'entreprendre des recherches en vue d'évaluer les différentscomportements d'adaptation au moyen d'études qualitatives visant à cerner et à décrire :1) les contextes et les principaux types de discrimination qui touchent une personne, ainsique les divers groupes ethnoculturels, à différentes étapes; et 2) les stratégies élaboréesen vue de s'adapter à la discrimination dans différents contextes. Ces résultats pourraientservir à élaborer une échelle quantitative sur la discrimination et les comportementsd'adaptation qui y sont liés.

Enfin, il est essentiel d'orienter les recherches en vue de définir et d'opérationnaliserl’identité de manière uniforme, de même que pour obtenir une mesure fiable et exacte dece concept. Le manque de cohérence dans ce domaine de recherche est probablementlié au fait que les chercheurs ont tendance à utiliser des mesures indirectes de l'identité.Un certain nombre de ces études se fonde sur des facteurs comme l'acculturation ou lerespect des pratiques culturelles chez les minorités ethniques ou immigrantes, y comprisl'utilisation de la langue maternelle, les attitudes relatives aux mariages mixtes,l'appartenance à des organismes ethniques ou culturels, et un intérêt marqué pour l'histoirede sa culture d'origine. Comme l'identité ethnique a été mesurée de différentes façons dansla plupart des études citées dans la présente communication, on n'est pas en mesure detirer des conclusions définitives concernant l'impact du racisme et de la discrimination surl’identité, ainsi que le rôle de protection et d'adaptation de l'identité.

Résumé, et portée des recherches et des politiques

Les recherches et les politiques doivent tenir compte des facteurs qui favorisent ou quimenacent la cohésion sociale, l'identité et l'adaptation au Canada, un pays qui s'est engagéà promouvoir et à soutenir la diversité et le multiculturalisme. À cet égard, les tensions

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raciales et ethniques sont un facteur incontournable étant donné l'accroissement de ladiversité culturelle. Le racisme ou la discrimination qui en découlent contribuent autraitement inéquitable des minorités visibles, ce qui réduit leurs possibilités, ébranle lacohésion sociale et nuit à leur identité nationale et personnelle ainsi qu’à leur adaptationpsychologique. Afin de formuler des politiques et des objectifs de recherche adéquats, ilimporte que les chercheurs et les responsables de l'élaboration des politiques cernent lescollectivités vulnérables, les méthodes de lutte contre le racisme et la discrimination et lessujets de recherche pertinents.

Les études passées en revue dans la présente communication recommandent depoursuivre les recherches sur la discrimination et l'adaptation psychologique auprès degroupes précis, dont les minorités visibles, les immigrants, les réfugiés, les femmes, ainsique les enfants et les adolescents. Ces segments de la population sont particulièrementvulnérables, en raison d'une surexposition au racisme et à la discrimination ou du manquede ressources personnelles et sociales dont ils disposent pour y faire face. Il n'empêcheque le statut socio-économique d'une personne joue un rôle crucial à cet égard. Engénéral, le racisme et la discrimination entraînent et encouragent la privation sociale etéconomique des minorités et d'autres groupes vulnérables, ce qui nuit à leur succèsfinancier et à leur avancement professionnel. Des recherches destinées à comprendre dequelle manière l'interaction de ces facteurs détermine l'exposition et les réactions auracisme et à la discrimination peuvent permettre d'établir des politiques visant à déterminerles besoins des personnes qui risquent le plus de souffrir de cette exposition sur le planpsychologique.

Les recherches et les politiques dans ce domaine devraient viser non seulement àdéterminer les répercussions psychologiques de la discrimination, mais aussi à lutter contrele racisme et la discrimination dans la société en vue de promouvoir la cohésion sociale etla santé de la population. Il importe d'établir des politiques et des programmes visant àsensibiliser la société au sujet des effets négatifs du racisme, sur le plan tant individuel quenational. Des campagnes d'éducation et des interventions visant à toucher l'opinionpublique peuvent permettre de réduire le racisme et la discrimination dans la société.Comme une importante « distance sociale » se traduit par un traitement inéquitable desminorités visibles (Angus Reid, 1991), les campagnes de promotion pourraient viser àréduire les perceptions de différences entre les groupes. Par exemple, on pourrait soulignerque « tous » ont une identité « canadienne » ou faire connaître les coutumes et lespratiques de différents groupes culturels. Toutefois, il faudra tout d'abord déterminer dansquels domaines les recherches et les politiques pourront permettre de concevoir etd'appliquer efficacement des campagnes ou des interventions d'éducation publique ou desensibilisation à la tolérance, et de promouvoir les relations interraciales ainsi quel'intégration réussie des immigrants et des réfugiés dans la société canadienne.

La Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale (21 mars),organisée par le ministère du Patrimoine canadien (Programme du multiculturalisme),constitue une étape importante du processus visant à promouvoir l'équité raciale etethnique et le respect de la diversité. Il s'agit d'un programme axé sur les jeunes et visantà sensibiliser la nation aux effets négatifs du racisme. On ne connaît pas encore l'impactde tels programmes sur l'opinion publique. Même si ces campagnes représentent un

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moyen viable de sensibiliser le public aux inégalités sociales en fonction de la race et del'appartenance ethnique, il importe d'entreprendre des études systématiques (p. ex., dessondages à l'échelle nationale) au sujet de leur impact sur l'opinion et le comportementpublics.

Indépendamment des mérites de campagnes d'éducation publique, il importe que lesrecherches et les politiques visent à renforcer les capacités des minorités, des immigrants,des femmes, des enfants et des adolescents de faire face au racisme et à la discrimination.Des comportements d'adaptation déterminés en fonction d'un stresseur précis et adaptésà la mentalité culturelle d'une personne peuvent permettre de réduire de façon significativeles effets psychologiques négatifs de la discrimination. Il importe d'entreprendre desrecherches en vue de déterminer les meilleurs moyens de réagir à la discrimination etd'utiliser cette information pour l'élaboration de programmes d'intervention à l'intention desvictimes de haine ou de racisme. De plus, il faut établir les meilleures méthodesd'exécution de ces programmes — par exemple, il faut déterminer à qui ils s'adressent, demême que où et quand les déployer.

Outre les campagnes publiques et les campagnes d'intervention, des lois sur les crimesmotivés par la haine doivent être adoptées en vue de renforcer la normalisation socialedestinée à lutter contre le racisme et la discrimination. Par exemple, les systèmesjuridiques devraient servir à montrer que les traitements discriminatoires en fonction de larace ou motivés par la haine ne seront pas acceptés ni tolérés et ce, en imposant, commemoyen de dissuasion, des peines plus sévères aux personnes qui commettent des crimeshainaux (J. Roberts, 1995).

Enfin, en se penchant sur l'identité ethnique, on est amené à se demander quel rôle jouela collectivité ethnique pour réduire le stress lié à la discrimination, et ces informationspeuvent servir à formuler des politiques d'immigration visant à renforcer des liens avec lacollectivité. Un certain nombre d'études ont révélé que l'inclusion ethnique (Brody, 1990;Fernandez-Kelly et Schauffler, 1994; Garcia-Coll et coll., 1996) et l'appui de la collectivitéethnique (Beiser et coll., 1988b; Burnam et coll., 1987; Chen et coll., 1996; Escobar, 1998;Escobar et Randolph, 1982; Kuo et Tsai, 1986; Noh et Avison, 1996; Noh et coll., 1994;Rodriguez, 1975; Swanson et al., 1992; Vega et coll., 1998) peuvent protéger unepersonne contre la détresse psychologique liée à la discrimination. Toutefois, il faudraitveiller à ce que ces résultats ne servent pas à favoriser la ségrégation dans les quartiersen fonction de la race ou de l'appartenance ethnique. Les chercheurs ont établi les effetsnégatifs des enclaves ethniques, qui intensifient l'intériorisation des identités stigmatiséesou marginalisées, ainsi que la méfiance

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culturelle et les facteurs économiques négatifs qui menacent l'intégration des minoritésdans la société canadienne (Athey et Ahearn, 1991; Cross, 1991, 1995; Garcia-Coll etMagnuson, 1997).

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