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L'abus de boissons énergisantes présente-t-il un risque ? Aymeric Petit 1,3 , Laurent Karila 2 , Michel Lejoyeux 3 1. Cabinet médical Carnot, 26, avenue Carnot, 75017 Paris, France 2. APHP, hôpital Paul-Brousse, centre d'enseignement, de recherche et de traitement des addictions, 94800 Villejuif, France 3. APHP, hôpital Bichat, service de psychiatrie, addictologie, et tabacologie, 75018 Paris, France Correspondance : Aymeric Petit, Cabinet médical Carnot, 26, avenue Carnot, 75017 Paris, France. [email protected] Résumé Introduction > Les boissons énergisantes désignent « tout produit se présentant sous la forme d'une boisson ou d'un concentré liquide, contenant un mélange d'ingrédients ayant la propriété de rehausser le niveau d'énergie et de vivacité ». Leur introduction a suscité de nombreuses réticences et réserves, suite à de nombreux accidents cardiovasculaires et neurologiques chez des sujets consommateurs réguliers. Matériels et méthodes > Une revue de la littérature a été réalisée afin de définir avec précision le rôle des boissons énergisantes dans ces complications. Nous avons sélectionné les articles scientifiques de langue anglaise et française publiés entre 2001 et 2014 en consultant les bases de données Medline, Embase, Psycinfo et Google Scholar. Les mots utilisés seuls ou en association sont les suivants : « energy drinks », « cafeine », « taurine », « toxicity », « dependence », « complications ». Résultats > La consommation occasionnelle ou modérée de ces canettes semble présenter peu de risques pour des adultes sains. En revanche, leur consommation répétée dans des proportions qui dépassent largement les recommandations d'utilisation préconisées par les industriels, associée à la prise d'alcool ou de produits illicites, augmente le risque d'apparition de complications somatiques et psychiatriques, en particulier chez les mineurs et les sujets ayant des antécédents cardiovasculaires et neurologiques. Conclusion > L'abus de boissons énergisantes augmente le risque d'apparition de complications somatiques et psychiatriques. Des travaux devront être menés afin d'améliorer notre compré- hension du phénomène et de surveiller l'apparition d'autres complications liées à cet usage nocif. Disponible sur internet le : 23 janvier 2015 tome 44 > n83 > mars 2015 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.07.029 © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 261 Revue de la littérature Presse Med. 2015; 44: 261270 en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/lpm www.sciencedirect.com

[Abuse of energy drinks: Does it pose a risk?]

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Presse Med. 2015; 44: 261–270

en ligne sur / on line onwww.em-consulte.com/revue/lpmwww.sciencedirect.com

Disponible sur internet le :23 janvier 2015

tome 44 > n83 > mars 2015http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2014.07.029© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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L'abus de boissons énergisantes présente-t-ilun risque ?

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Aymeric Petit 1,3, Laurent Karila 2, Michel Lejoyeux 3

1. Cabinet médical Carnot, 26, avenue Carnot, 75017 Paris, France2. AP–HP, hôpital Paul-Brousse, centre d'enseignement, de recherche et de

traitement des addictions, 94800 Villejuif, France3. AP–HP, hôpital Bichat, service de psychiatrie, addictologie, et tabacologie, 75018

Paris, France

Correspondance :Aymeric Petit, Cabinet médical Carnot, 26, avenue Carnot, 75017 Paris, [email protected]

Résumé

Introduction > Les boissons énergisantes désignent « tout produit se présentant sous la formed'une boisson ou d'un concentré liquide, contenant un mélange d'ingrédients ayant la propriétéde rehausser le niveau d'énergie et de vivacité ». Leur introduction a suscité de nombreusesréticences et réserves, suite à de nombreux accidents cardiovasculaires et neurologiques chezdes sujets consommateurs réguliers.Matériels et méthodes > Une revue de la littérature a été réalisée afin de définir avec précision lerôle des boissons énergisantes dans ces complications. Nous avons sélectionné les articlesscientifiques de langue anglaise et française publiés entre 2001 et 2014 en consultant les basesde données Medline, Embase, Psycinfo et Google Scholar. Les mots utilisés seuls ou en associationsont les suivants : « energy drinks », « cafeine », « taurine », « toxicity », « dependence »,« complications ».Résultats > La consommation occasionnelle ou modérée de ces canettes semble présenter peu derisques pour des adultes sains. En revanche, leur consommation répétée dans des proportions quidépassent largement les recommandations d'utilisation préconisées par les industriels, associéeà la prise d'alcool ou de produits illicites, augmente le risque d'apparition de complicationssomatiques et psychiatriques, en particulier chez les mineurs et les sujets ayant des antécédentscardiovasculaires et neurologiques.Conclusion > L'abus de boissons énergisantes augmente le risque d'apparition de complicationssomatiques et psychiatriques. Des travaux devront être menés afin d'améliorer notre compré-hension du phénomène et de surveiller l'apparition d'autres complications liées à cet usagenocif.

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Summary

Abuse of energy drinks: Does it pose a risk?

Background > Energy drinks designate "any product in the form of a drink or concentrated liquidcontaining a mixture of ingredients having the property to raise the level of energy and liveliness''.Their introduction has raised many reluctance and reserves after numerous cardiovascular andneurological injuries among regular consumers.Objective > This article attempts to synthesize the existing literature on energy drinks. The reviewfocuses to show that excessive energy drinks consumption cause many complications.Methods > The literature review was conducted from 2001 to 2014, using PubMed, GoogleScholar, EMBASE, and PsycInfo, using the following keywords alone or combined: energy drinks,caffeine, taurine, toxicity, dependence, complications.Results > Occasional or moderate consumption of these cans seem to present little risk to healthyadults. However, their repeated consumption in proportions that far exceed the recommenda-tions for recommended use by the manufacturers, combined with the use of alcohol or illicit drugsconsumption increases the risk of occurrence of somatic and psychiatric complications, especiallyamong underage, and subjects with cardiovascular and neurological history.Conclusion > Repeated consumption of energy drinks increases the risk of somatic and psychiatriccomplications. Further studies must be controlled to improve our understanding of other possiblenegative consequences on health.

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Bien que récent en France, le phénomène des boissonsénergisantes apparaît en 1987 en Autriche avec la marque RedBull. Ces boissons sucrées, contenant de fortes concentrations decaféine, connaissent une popularité croissante chez les adoles-cents et les jeunes adultes [1,2], avec 5,23 milliards de canettesvendues dans le monde en 2012. Faciles d'accès et présentesdans les supermarchés, les salles de sport, les boîtes de nuit etbars, ainsi que dans les stations-service, elles sont principale-ment consommées par les lycéens, les étudiants et les sportifs[3–5]. Leur arrivée sur le marché a été favorisée par d'impor-tantes campagnes publicitaires vantant les effets de ces bois-sons (maintien de l'éveil, augmentation du tonus et aide à laconcentration) à l'aide slogans accrocheurs (« Red Bull vousdonne des ailes »), et leur association aux sports à risque(ski acrobatique, snow board, surf), aux exploits (saut de FélixBaumgartner dans l'espace) et aux sportifs de renoms (Sebas-tian Vettel, Lindsay Vonn). Ces produits suscitent en France desréticences de la part des autorités de santé en raison de l'inter-diction de commercialisation de Red Bull prononcée dans unpremier temps en 1996, à la suite d'un avis défavorable rendupar le Conseil supérieur d'hygiène publique. Ce refus étaitmotivé par l'adjonction de deux composants présents à forteconcentration : la taurine et le glucuronolactone, qui ont étéfortement suspectés dans l'apparition de troubles cardiaques etneurologiques en Allemagne et au Royaume-Uni. Afin decontourner cette interdiction, la marque Red Bull a lancé unenouvelle formule contenant de l'arginine à la place des deuxsubstances contestées, et des doses moins importantes decaféine en avril 2008. Malgré cela, le ministère de l'Économie

et des Finances a autorisé la commercialisation de la versioninitiale au cours de l'été 2008 suite à la plainte de la firme contrel'État français. Cet accord a été passé outre l'avis de l'Agencefrançaise pour la sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) posantainsi la question de leur utilisation sans risque.Une revue de la littérature a été réalisée afin de définir le rôledes boissons énergisantes dans ces complications. Nous avonssélectionné les articles scientifiques de langue anglaise et fran-çaise publiés entre 2001 et 2014 en consultant les bases dedonnées Medline, Embase, Psycinfo et Google Scholar. Les motsutilisés seuls ou en association sont les suivants : « energydrinks », « cafeine », « taurine », « toxicity », « depen-dence », « complications ».

Définition des boissons énergisantesLe terme boisson énergisante, choisi par l'industrie afin dedévelopper une campagne de publicité autour des propriétésstimulantes de ces boissons, désigne « tout produit se présen-tant sous la forme d'une boisson ou d'un concentré liquide,contenant un mélange d'ingrédients ayant la propriété derehausser le niveau d'énergie et de vivacité » [1]. Les princi-pales marques sont Red Bull, Dark Dog, Rockstar, Burn et Mons-ter, elles sont présentes dans les commerces d'alimentation, lessites sportifs, et les bars au milieu des jus de fruits et autressodas. Ces produits appartiennent à la catégorie des « Energydrinks » ou « Smart drinks », et sont répertoriés en France sousle terme de boissons « tonifiantes ».Une distinction s'opère avec les boissons énergétiques ou dites« de l'effort » (Gatorade, Powerade, Isotar, Aquarius) dont la

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Encadr�e 1Composition d'une canette de 250 mL de Red Bull

Taurine : 1000 mgGlucuronolactone : 600 mgCaféine : 80 mgSaccharose : 21,5 gGlucose : 5,25 gInosite : 50 mgNiacine : 20 mgVitamine B6 : 5 mgAcide pantothénique : 5 mgVitamine B12 : 0,005 mgAdjuvants et additifs :� acide citrique (E 330) ;� arômes naturels et artificiels ;� colorants (caramel et riboflavine).

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composition a été adaptée spécifiquement à l'effort physiqueet à la récupération. Elles sont composées de glucides et de selsminéraux (sodium, potassium, chlore) nécessaires à la recon-stitution des réserves de glycogène musculaire et maintiennentl'équilibre électrolytique en évitant la déshydratation [3]. Lesboissons énergisantes doivent également ne pas être confon-dues avec les Alcopops ou Premix contenant un mélange delimonade ou de jus de fruits et d'alcools forts, les Blasters(préparations de boissons énergisantes mélangées à de l'alcool)ou les Shooters (liqueurs de fruits à forte teneur en alcool,mélangées avec une substance stimulante).

ÉpidémiologieLa boisson Red Bull est aujourd'hui commercialisée dans166 pays, et 5,23 milliards de canettes ont été vendues dansle monde en 2013 [2]. En France, le marché des boissonsénergétiques connaît chaque année une forte croissance, enraison d'une augmentation des ventes de 63 % entre 2006 et2010 [2]. En termes de prévalence, on estime qu'entre un tierset la moitié des adolescents consomment régulièrement desboissons énergisantes [2,6–8], qui constituent la principalesource d'apport de caféine chez les moins de 18 ans auxÉtats-Unis [9]. L'âge de ces consommateurs se situe entre13 et 35 ans [10,11]. Ces usagers sont des hommes [12], étu-diants ou jeunes actifs [9], fumeurs [6,7,9,11], et amateurs desorties nocturnes [12]. Ils fréquentent des personnes égalementconsommatrices de boissons énergisantes, boivent régulière-ment de l'alcool sur un mode binge drinking [6], et pratiquentsouvent une activité sportive [6–14]. Une enquête réalisée en2007 aux États-Unis a montré que le premier contact avec cescanettes se situait en moyenne à l'âge de 12 ans [15]. Destravaux menés en 2013 auprès d'adolescents ont fait état d'uneconsommation quotidienne de boissons énergisantes chez 7 %des garçons et 3 % des filles [16], avec une moyenne se situantentre 1,31 [8] et 2,6 [11] canettes par jour. À titre de compa-raison, 19 % des garçons admettaient une consommation quo-tidienne de Coca Cola contre 8 % des filles dans cette mêmeétude [16]. Une étude nord-américaine, menée chez 8210 col-légiens, a montré que 62 % d'entre eux rapportaient avoirconsommé au moins une fois des boissons énergisantes l'annéeprécédente, et que 20 % déclaraient en avoir consommé aumoins une fois le mois précédant l'étude [17].

CompositionLes boissons énergisantes sont des boissons non-alcooliséesqui contiennent principalement de l'eau, des vitamines, de lacaféine, de la taurine, du glucuronolactone, de la guarana, dusucre (glucose, saccharose) ainsi que d'autres substances tellesque le ginseng, l'inositol, et des vitamines B2, B3, B6, B12(encadré 1). La composition de ces canettes varie en fonctiondes marques, mais la caféine et la taurine sont systématique-ment retrouvées et fortement concentrées.

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CaféineC'est un alcaloïde présent naturellement dans le café, le thé etle cacao. Le dépassement de la dose maximale recommandée(400 mg/j) peut conduire à un état d'intoxication qui se mani-feste par l'apparition d'une agitation psychomotrice, de migrai-nes, de palpitations, de tremblements et de troubles digestifs[18]. Cette dose correspond à 5 canettes de Red Bull, 6 à8 tasses de café et 2 à 3 litres de thé consommés par jour.La dose létale est estimée à 10 grammes par jour, ce quicorrespond à la prise de 125 canettes de Red Bull, ou de100 à 130 tasses de café sur une journée [18].

TaurineCe dérivé soufré d'acide aminé est naturellement présent dansles aliments d'origine animale dont l'apport journalier varieentre 40 et 400 mg [2]. Plus de 35 études de supplémentationen taurine ont été conduites chez des enfants ou des adoles-cents, avec des doses quotidiennes variant de 150 mg à 7 g,sans montrer d'effets secondaires majeurs. L'ensemble desdonnées publiées à ce jour permet d'évaluer à 3 g par jour lalimite supérieure de sécurité pour la supplémentation quoti-dienne en taurine, ce qui représente la consommation journa-lière de trois cannettes de Red Bull. Bien que la question d'effetsneurotoxiques de taurine à forte dose ait été posée, il sembleque le risque de toxicité soit mineur, au moins pour des apportsponctuels. La question concernant le risque d'apparition decomplications pour des quantités journalières supérieuresà 3 g sur une longue durée n'est pas résolue à ce jour [2].

GlucuronolactoneC'est un dérivé du glucose qui participe au bon fonctionnementhépatique et régule la formation de glycogène. Les apportsnaturels de glucuronolactone sont de l'ordre de 1 à 2 mg/j,une canette de Red Bull en contient 600 mg, soit l'équivalent de

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600 jours d'apport alimentaire [2]. La dose toxique de glucuro-nolactone pour l'organisme n'a pas été établie avec certitude.

Guarana et autres substancesLa guarana est un arbuste de la famille des Sapindacées, dont lagraine possède une importante concentration en caféine (plusde 4,5 g pour 100 g). Prise en grande quantité (supérieureà 450 g), elle induit les complications en rapport avec le sur-dosage en caféine.Les autres substances retrouvées dans les boissons énergisantessont la créatine (anabolisant musculaire), le Ma Huang ouéphédrine (produit stimulant et amaigrissant), le ginseng(plante stimulante aphrodisiaque, qui diminue la sensationde fatigue et améliore la résistance au stress), l'échinacée, lemillepertuis et le Kava kava.

Consommations associéesAlcoolLa consommation associée d'alcool s'effectue sur un modebinge [8,13]. L'association boissons énergisantes/alcool est laplus répandue [19,20] et est observée chez 85 à 88 % desconsommateurs de canettes [20,21]. La vodka est l'alcool leplus souvent mélangé aux boissons énergisantes (88 %),devant la téquila et le champagne [19]. Ce mélange est justifiépar l'envie de boire plus d'alcool tout en retardant l'ivresse [22].

TabacUne association a été retrouvée entre le tabac et les boissonsénergisantes [8,23,24]. Le tabac est un puissant inducteur ducytochrome P450 1A2 hépatique, principale voie métaboliquede la caféine [25]. Une étude a montré que la demi-vie d'éli-mination de la caféine des boissons était sensiblement plusrapide chez les fumeurs que chez les non-fumeurs (3 heures vs4,3 heures), impliquant une augmentation de la fréquence et dela quantité de caféine consommée et par conséquent de bois-sons énergisantes chez les fumeurs [26].

Produits illicitesLes usagers réguliers de canettes consomment plus de produitsillicites que les non-usagers [7,17]. Les produits les plus retro-uvés sont la cocaïne, le MDMA (3,4-méthylène-dioxy-métham-phétamine) qui est une forme d'ecstasy, les amphétamines et laméthamphétamine [9]. Une étude réalisée chez 1228 sujetsconsommateurs d'« energy drinks » ayant consulté aux urgen-ces de deux hôpitaux de San Diego a montré que 25 d'entre eux(soit 2,03 %) consommaient régulièrement de la cocaïne et dela méthamphétamine [12]. L'usage de boissons énergisantes etd'amphétamines peut être nocif, en raison du risque de convul-sions et d'hyperthermie [27]. Les comprimés d'ecstasy necontiennent pas que du MDMA pur, mais renferment de lacaféine, de l'éphédrine, de la kétamine, de l'acétaminophènequi potentialisent les effets psychostimulants des différentscomposants actifs des boissons énergisantes [28]. Le NaturalMedecines Comprehensive Database juge l'association boisson

énergisante–amphétamine ou cocaïne à haut risque sur le plancardiovasculaire [29] et neurologique (convulsions, hyperther-mie centrale) [30], compte tenu des effets potentialisateurs desdifférents produits.

Motifs de consommation et effetsrecherchésUne enquête réalisée aux États-Unis s'est intéressée aux motifsde consommation de ces boissons évoqués par les adolescentset les jeunes adultes [31]. Les principales raisons étaient l'amé-lioration de la performance sportive et intellectuelle surtout enpériode de révisions et d'examens (66 %), la recherche del'amusement en soirées ou en discothèque (35 %), l'hydrata-tion (21 %), et le maintien du capital santé (18 %) [31]. Lesautres réponses formulées étaient son utilisation comme sub-stitut aux boissons gazeuses, et son caractère sucré permettantd'améliorer le goût des boissons alcoolisées [31].Une autre étude réalisée chez 1228 consommateurs d'«energy drinks » a montré que 57 % d'entre eux avaientrecours à ce produit dans l'objectif d'avoir plus d'énergie,9,5 % dans le but de pouvoir travailler et étudier plus long-temps, 2,4 % pour conduire plus longtemps, 2 % pour aug-menter leur performance physique et 22,1 % pour d'autresmotifs non rapportés [12].

Recherche de performanceLa principale motivation recherchée dans la prise de ces bois-sons est la recherche de performance physique et intellectuelle[32]. La prise quotidienne de 6 g de taurine permettrait d'amé-liorer la force physique et l'endurance [33–35], sans que cesrésultats n'aient été confirmés [2]. La caféine améliore laperformance sportive [36], mais les résultats des travaux surl'amélioration des performances cognitives (capacité de concen-tration, mémoire) [37,38], de l'endurance [39] ou de l'effort enmilieu anaérobie [40] apparaissent contradictoires [37–40]. Uneétude récente, menée dans l'armée américaine, a montré uneconsommation plus importante de ces canettes que dans lapopulation civile, les soldats rapportaient une recherche deperformance physique grâce aux boissons [41]. Le recoursà ces « energy drinks » s'intègre parfaitement dans le culteactuel de la recherche de performance dans les sociétésoccidentales.

Recherche de sensationDifférents travaux rapportent une recherche de sensation dansla répétition de ces prises de boissons énergisantes [6,17]. Lesconsommateurs d'energy drinks ont des niveaux plus élevés derecherche de sensations et de nouveauté par rapport aux non-usagers [2,17].

Diminuer la sensation de fatigue et recherche del'amusementCes consommateurs recherchent le frisson, l'amusement oula désinhibition, mais n'utilisent pas ces boissons comme un

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antidépresseur ou un anxiolytique. Ces préparations sucrées augoût, colorées, remportent un succès considérable auprès desjeunes. Elles sont considérées comme « branchées », et per-mettent « d'assurer toute la soirée », et d'éviter le « coup depompe ». Elles sont également utilisées par les étudiants à l'ap-proche des examens pour réviser le plus tard possible et retarderl'heure du coucher [42].

Perte de poidsUne étude récente, réalisée chez 856 étudiants, a montré queles boissons énergisantes étaient utilisées afin de perdre dupoids et présenter une silhouette plus avantageuse [43].

Effets indésirablesEn novembre 2012, la FDA (the United States Food and DrugAdministration) a publié un rapport faisant état de 18 décès enrapport avec l'utilisation de 2 marques de boissons énergisantes(Monster et Rockstar), fortement concentrées en caféine, entrejanvier 2004 et octobre 2012 [44]. Au cours de cette période,les boissons énergisantes ont été jugées responsables de187 signalements à la FDA et de 59 hospitalisations [44].Les sujets jeunes sont plus vulnérables aux complications liéesà l'intoxication en raison de leur plus faible tolérance pharma-cologique à la caféine [45]. Des facteurs génétiques semblentégalement impliqués dans la vulnérabilité de certains sujets auxeffets toxiques de la caféine, ainsi que dans l'apparition d'unedépendance et d'un syndrome de sevrage.

SomatiquesTroubles cardiovasculairesCes boissons aux effets inotropes [46] peuvent être responsa-bles de complications cardiovasculaires [47]. Une étude, réaliséechez des sujets jeunes (20–39 ans), consommateurs réguliers deboissons énergisantes fortement concentrées en caféine, amontré une hausse significative de la pression artérielle systo-lique et diastolique de 10 mmHg, ainsi que de la fréquencecardiaque et respiratoire et un allongement du QTc [48], contrai-rement aux boissons énergisantes sans caféine. Cette tendancea été confirmée par plusieurs études récentes [47,49,50].D'autres travaux ont montré une augmentation du risqued'apparition de cardiomyopathie et de décès par arrêt cardiaque[44,51], et rapportent 3 cas de dissection aortique [52]. Lesboissons énergisantes ont également été fortement suspectéesdans un cas de dissection aortique chez un adolescent de 13 anssans antécédents [53].Une méta-analyse récente a fait état de 15 cas de troublescardiaques suite à la prise de boissons énergisantes (6 casd'arythmie auriculaire, 4 cas d'arythmie ventriculaire, 1 casd'allongement du QT, et 4 cas d'élévation du segment ST). Deuxautres cas de décès par arrêt cardiaque ont été rapportés [54].Parmi ces 17 sujets consommateurs de boissons énergisantesayant eu des troubles cardiaques, aucun n'avait d'antécédentsde maladie cardiovasculaire, et tous étaient âgés de moins de

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30 ans. L'anamnèse rapporte une consommation associéed'alcool et de produits illicites, l'étude conclut que cette priseconcomitante entraîne un risque important de complicationscardiovasculaires [54]. Cependant, d'autres études affirmentque la responsabilité des boissons ne peut pas été établieavec certitude [55,56].

Troubles neurologiquesUne étude récente a rapporté 4 cas de crises convulsives audécours d'une forte consommation de boissons [57]. Les auteursont supposé que l'importante concentration de caféine, detaurine et de guarana aurait provoqué ces crises [57]. Cepen-dant, 3 d'entre eux étaient des épileptiques connus et plusieursfacteurs de risque ont été retrouvés (épilepsie non traitée,mauvaise observance médicamenteuse, manque de sommeil).Le quatrième consommateur âgé de 21 ans n'avait pas d'anté-cédent connu, et l'hypothèse de l'abaissement du seuil épilep-togène par le Red Bull a été avancée alors que la priseconcomitante d'alcool et de drogues illicites n'a pas été recher-chée [58,59]. Par ailleurs, quelques cas d'accidents vasculairescérébraux survenus chez des sujets âgés de moins de 30 ans,consommateurs réguliers, ont été rapportés sans qu'aucun cen-tre antipoison européen n'ait pu les imputer à la prise de RedBull [58].Dikici et al. rapportent le cas d'un homme âgé de 37 ans amenéaux urgences pour prise en charge d'une crise tonico-cloniqueaprès avoir consommé 3 canettes de 250 mL de Red Bull,associées à de la vodka à jeun. Le sujet n'avait ni antécédentspersonnels ou familiaux de convulsions ou autre maladie neu-rologique [10]. L'étude précise que le sujet fumait deux paquetspar jour depuis 20 ans et avait une consommation quotidienned'alcool (35 cL chaque soir).

Complications rénalesRiesenhuber et al. ont démontré que les effets diurétiques etnatriurétiques des boissons énergisantes étaient en rapportavec la présence de caféine, alors que la taurine n'aurait pasd'effet sur ces paramètres [60]. La prise de 750 mL d'uneboisson contenant au total 240 mg de caféine chez 12 sujetssains a produit une augmentation moyenne de la diurèse de243 mL et de 27 mmol de sodium urinaire [60]. L'étude préciseque la consommation d'energy drink favorise la fuite urinaired'eau, de sodium, de chlore, de magnésium et de calcium, etpeut ainsi entraîner une importante déshydratation, notam-ment pendant les soirées étudiantes ou en boîte en de nuitsouvent très alcoolisées [60]. De plus, leur mélange à l'alcoolaugmente la diurèse et la natriurèse, majorant ainsi le risque dedéshydratation [61]. Des données de l'AFSSA ont évoqué lerisque important de toxicité rénale en raison de la présencede glucuronolactone.

Troubles métaboliquesL'AFSSA a conclu qu'aucune étude n'avait démontré un apportnutritionnel des boissons énergisantes. Aucun effet concernant

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l'influence des boissons énergisantes sur différents paramètresphysiologiques sanguins comme la glycémie, l'insulinémie, laconcentration en acides gras et en lactates n'a été mis enévidence [40,55,56,62]. Cependant, une étude réalisée chezle rat a montré que l'administration de boissons énergisanteset d'alcool pendant 30 jours consécutifs avait entraîné unemodification significative de certains paramètres biologiques(enzymes hépatiques, volume globulaire moyen, kaliémie, cal-cémie, triglycérides, et créatinémie) [63]. Ces paramètresétaient moins modifiés en cas de prise de boissons sans asso-ciation à l'alcool. Une autre étude rapporte le cas d'un hommeâgé de 28 ans victime d'un malaise pendant une partie debasket faisant suite à la prise de 3 canettes de 250 mL [64].Les résultats du bilan biologique réalisé aux urgences ont mon-tré une augmentation de la glycémie chez ce sujet non diabé-tique, consommateur quotidien de boissons énergisantes, unehypokaliémie et une acidose métabolique [64].Pourtant, tout comme les sodas, les boissons énergisantes sontconstituées de sucre (glucose, fructose) et d'édulcorants artifi-ciels riches en calories (aspartame, sucralose) ; elles constituentun facteur de risque d'obésité [65]. À titre d'exemple, unecanette de 250 mL de Red Bull contient 28 g de sucre (soitl'équivalent de 6 cuillères à thé).

Effets sur la santé buccodentaireEn raison de leur teneur élevée en sucres et de leur niveau élevéd'acidité, les boissons énergétiques favorisent l'érosion et lacarie dentaire [66].

Risques pour des groupes particuliers (femmes enceintes)Aucune étude n'a montré d'effet tératogène des boissons éner-gisantes chez la femme enceinte [67], même si la caféinecontenue dans ces boissons traverse librement le placenta, etexpose le fœtus à de fortes concentrations en caféine et à unrisque accru de retard de croissance.

PsychiatriquesTrouble bipolaireNous rapportons le cas d'un homme de 36 ans suivi pour troublebipolaire de type 1, bien contrôlé depuis 5 ans sous lithium, quia été hospitalisé pour accès maniaque. Les auteurs estiment queles fortes quantités de boissons énergisantes absorbées seraientà l'origine de cet épisode chez ce patient ayant une certainevulnérabilité, en raison de l'absence d'autres étiologies retrou-vées (prise de toxiques, rupture de suivi, mauvaise observancemédicamenteuse) [68]. Cependant, aucun centre de toxicovi-gilance n'a confirmé que la prise de Red bull pouvait constituerun facteur de risque de décompensation du trouble bipolaire.Aucune autre étude sur l'implication des boissons énergisantesdans la décompensation du trouble bipolaire n'a été retrouvéedans la littérature.

Dépression et troubles anxieuxDes travaux récents ont montré que la consommation quoti-dienne de 100 mL de boissons énergisantes était associée à uneaugmentation du risque d'apparition de trouble anxieux, sansqu'aucune corrélation n'ait été établie avec le risque d'appari-tion d'un syndrome dépressif [69]. En revanche, une autre étudea montré que la dépendance à la caféine majorait le risqued'apparition de syndrome dépressif, de trouble panique et detrouble anxieux généralisé [70].

Troubles du comportementLes principales conséquences de l'ivresse chez ces adolescentsou adultes jeunes consommateurs de boissons énergisantessont les conduites à risque (rapports sexuels non protégés,conduites automobiles ou de deux roues en état d'ébriété),et des comportements violents (agressions, bagarres) pouvantavoir lieu même sans prise d'alcool associée [2,6,7,24,71,72].Ces conséquences sont amplifiées à cause de la relative inex-périence de ces jeunes face à l'alcool et du sentiment d'invin-cibilité ou d'invulnérabilité déclenché par l'association boissonsénergisantes/alcool.Le mélange de boissons énergisantes et d'alcool est plus à risqued'entraîner ces troubles du comportement que la prise uniqued'alcool, selon une étude nationale brésilienne réalisée chez12 711 lycéens [73].

AddictologiquesIntoxication éthylique aiguëDes études réalisées chez l'animal soulignent que la prise decaféine peut augmenter l'auto-administration d'alcool [2]. Chezl'homme, des travaux ont démontré que la caféine contenuedans les boissons énergisantes diminuait les effets subjectifs del'ivresse, sans réduire les mesures objectives des effets del'alcool au niveau moteur ou du temps de réaction. Ainsi, lacaféine pourrait non seulement modifier les effets renforçant del'alcool, mais aussi réduire la sensation d'ivresse et donc poten-tialiser les effets de désinhibition, et faciliter ainsi l'abus d'alcoolet les comportements à risque [74]. En effet, un quart desconsommateurs justifie l'ajout de Red Bull ou de Dark Dogpar l'envie de boire plus d'alcool tout en retardant l'ivresse[2]. Une étude récente réalisée chez 508 lycéens confirme cettetendance [75].

Dépendance aux boissons énergisantesLa prise répétée de boissons énergisantes favorise le risqued'apparition d'une addiction à ces boissons en raison d'un ris-que plus grand de dépendance à la caféine présent dans cescanettes. Un syndrome de sevrage à la caféine a été décritdans la littérature chez ces consommateurs comprenant myal-gies, céphalées, asthénie, humeur dysphorique, difficultésà se concentrer, tristesse de l'humeur, irritabilité et nausées.Une étude récente suggère que ces boissons ne doivent plusêtre considérées comme de simples sodas ou compléments

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alimentaires, mais comme des produits susceptibles d'induiredes dépendances [76].

Un facteur de risque d'apparition d'alcoolodépendance etde dépendance aux produits illicites et au tabacDe nombreuses études suggèrent que l'utilisation répétée deboissons énergisantes constituerait un facteur de risque d'appa-rition de comportements addictifs, notamment l'alcoolodépen-dance, l'addiction à la cocaïne et au cannabis [7,70,72]. Destravaux récents, réalisés sur un échantillon de 15 875 adoles-cents représentatif de la population canadienne, ont montré quel'association boissons énergisantes/alcool chez l'adolescentfavorisait le risque d'apparition de dépendance au tabac [77].Une étude menée chez 870 adolescents italiens a conclu quel'utilisation excessive de boissons énergisantes constituait unfacteur de risque d'utilisation de produits illicites [24].

Prévention et prise en chargeRôle des professionnels de santéBien qu'il existe des variations inter-individuelles concernant lesdoses toxiques de caféine, les autorités de santé recommandentde ne pas dépasser 400 à 500 mg de caféine par jour, soitenviron 5 à 6 canettes de Red Bull [78]. Le message de pré-vention doit concerner les plus jeunes, surtout en cas de priseassociée d'alcool et de produits illicites [7,64,79].Les professionnels de santé ont un rôle à jouer, en particulier aumoment d'un accident ou d'une prise en charge aux urgencespour ivresse aiguë avec consommation de boissons énergisan-tes, mais également lors d'une consultation de contrôle. Ilconvient de poser systématiquement aux adolescents la ques-tion de la consommation d'alcool, mais également d'interrogersur la prise de boissons énergisantes [80,81]. L'adolescencereprésente une période à risque au cours de laquelle s'installentet se développent des troubles liés à l'utilisation de substance[81]. Des travaux récents ont étudié la perception qu'avaient lespopulations les plus jeunes de ces boissons [81] ; 779 adoles-cents, âgés de 12 à 17 ans, ont été interrogés sur leurs connais-sances et croyances des boissons énergisantes [82] : 19,5 %affirmaient que ces produits ne présentaient aucun risque, et12,5 % suggéraient qu'elles étaient recommandées pour lapratique sportive. L'étude conclut sur un défaut majeur d'infor-mation des risques encourus chez les adolescents [82]. Uneautre étude menée sur cette même population a montré queseuls 11,5 % des collégiens rapportaient avoir été interrogés surleur consommation de boissons énergisantes par leur médecintraitant ou l'infirmière scolaire, et que 11,1 % avaient reçu uneinformation sur les risques de ces produits. Un adolescent sur9 ayant reçu une information sur les « energy drinks » déclareavoir modifié sa consommation au décours [82]. L'étude rap-porte que les sujets non informés des risques encourus consom-maient 2,46 fois plus de boissons énergisantes que les sujetssensibilisés [82].

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Respect de la législationLes mesures législatives, comme l'interdiction des open bars(entrée gratuite, boissons à volonté) et du parrainage « spon-soring » par les producteurs de boissons énergisantes (Red Bull,Dark Dog, Burn) dans les soirées étudiantes doivent être res-pectées [83]. La question de la libre vente dans les épiceries, lesgrandes surfaces au milieu des jus de fruits, et autres sodas doitêtre discutée.Certains aspects de la loi HPST (Hôpital, Patients, Santé, Terri-toire), promulguée en 2009, pourraient être généralisés auxboissons énergisantes. On pense à la vente de Red Bull auxmineurs, ou à la condamnation de propriétaires de bars ou dediscothèques en cas de violence ou de troubles de l'ordre public.La délivrance de ces boissons devrait s'effectuer dans un cadredéterminé, comme cela est le cas pour les boissons alcoolisées(publicité restreinte et encadrée, pas de distribution gratuite).En effet, des travaux récents montrent la grande accessibilité deces produits pour les plus jeunes, et la sensibilité de ces classesd'âge jeune aux slogans publicitaires accrocheurs « Red Bullvous donne des ailes », « Red Bull repousse les limites »[16]. Une circulaire rédigée par le ministère de l'Éducationnationale, visant à interdire la vente des boissons énergisantesdans les établissements scolaires, a été diffusée en juin 2008[83]. En termes de prévention, il s'agit de favoriser la discussionet d'évaluer leurs connaissances sur les effets de ces canettes,au détriment de messages traumatisants et moralisateurs quiont montré leurs limites. De plus, une demande a été effectuéeauprès de l'Institut de veille sanitaire en vue de mettre en placeune surveillance active (par l'intermédiaire des centres anti-poison et de toxicovigilance) concernant tous les effets indési-rables liés à la consommation de boissons énergisantes, enparticulier de la boisson Red Bull [83].

ConclusionLa consommation de boissons énergisantes est un phénomènerécent et peu documenté. La prise occasionnelle ou modérée deces produits, sans association avec des produits psychotropessemble présenter peu de risques pour des adultes sains. Enrevanche, leur consommation excessive associée à la prised'alcool et/ou de produits illicites, dans des proportions quidépassent largement les recommandations d'utilisation préco-nisées par les industriels, en particulier chez les populationsjeunes et celles ayant des comorbidités cardiaques, neurologi-ques ou rénales, pourrait être à l'origine de complications.Malgré le dispositif de surveillance toxicologique mis en place, iln'existe pas à ce jour de preuves formelles et indiscutablesd'effets indésirables de la consommation de Red Bull [83].Cependant, un avis de l'agence européenne datant du 15 jan-vier 2009 va dans le sens d'une poursuite de la surveillance [83].Bien que sa dangerosité n'ait pas été scientifiquement établie,le débat reste toujours ouvert. L'Académie américaine depédiatrie s'est prononcée en 2011 en faveur du principe de

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précaution quant à l'utilisation de boissons énergisantes chez lesplus jeunes en raison du risque d'apparition d'effets indésirablessur le développement [84]. L'AFSSA a conclu que la sécuritéd'emploi des boissons énergisantes n'était pas assurée. Elle aainsi opté pour le principe de précaution et a exigé de fairefigurer sur les canettes les trois mentions suivantes : déconseilléaux enfants, déconseillé aux femmes enceintes et à consommeravec modération.

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Déclaration d'intérêts : Aymeric Petit a reçu des honoraires deslaboratoires Otsuka et AstraZeneca.Laurent Karila a reçu des honoraires de GM Santé et des laboratoires BMS,Euthérapie, AstraZeneca, Lundbeck, Gilead, Sanofi Aventis, D&A Pharma,Bouchara-Recordati et Reckitt Benckiser.Michel Lejoyeux déclare ne pas avoir de conflits d'intérêts en relation avec cetarticle.

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