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Point sur les innovations majeures de la campagne 2008 de Barack Obama.
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Guide pratique : les 15 ruptures majeures de
la campagne Obama 2008
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Les 15 ruptures majeures d’une campagne historique
Introduction La mode consiste à débattre des raisons du succès de Barack Obama, tenter de transposer les outils de la campagne électorale conduite sur 2007 et 2008. Cette approche nous paraît vouée à l’échec pour deux raisons : ‐ elle confond objectifs et moyens, ‐ dès qu’une campagne sera baptisée comme «Obama bis», elle perdra sa force parce que le propre de la campagne d’Obama est d’avoir reposé sur l’innovation.
Facebook, Twitter, Internet … ont été les moyens, les outils d’une campagne qui reposait sur un objectif considérablement plus ambitieux : répondre au besoin d’idéal de la société Américaine. La campagne d’Obama, c’est d’abord la soif d’idéal. Dans cette soif d’idéal, c’est aussi la rencontre entre le «je» et le «nous». Pour donner un sens à sa vie, il faut assurer la rencontre de soi et des autres. Le développe‐ment personnel passe par un engagement
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social. Ce parti pris d’idéal, c’est l’axe stratégique de la cam‐pagne de Barack Obama. Le choix fort a été ensuite, grâce à des outils, d’offrir de s’associer à cet idéal pour le transformer en idéal commun. Ces outils ont «vendu de la relation». Mais Barack Obama a d’abord «vendu de l’idéal» y compris par la force de son propre cursus personnel mais bien au‐delà par le symbole de tous ses grands projets. Les outils ont permis de bâtir l’adhésion du grand nom‐bre à cet idéal puis de s’affirmer comme une «marque». Parce qu’on adhérait à la campagne de Barack Obama, on montrait que l’on partageait une vision et des enga‐gements. Ce faisant, il a probablement annoncé le renversement d’une tendance qui condamnait l’idéalisme au profit du réalisme. Il a annoncé la «conscientious living», c'est‐à‐dire un style de vie mesuré qui est la recherche de sens. C’est la fin du consumérisme ostentatoire (style de vie «bling bling»). La campagne Obama a démarré comme créatrice de valeur. Par son succès, elle est devenue créatrice de mode. Au moment où elle est devenue créatrice de mode, les «premiers engagés» ont d’ailleurs mal vécu la perte de leur différenciation initiale. Les rencontres avec les acteurs de la première heure étaient très significatives. Ils exprimaient presque une forme de regret d’être désormais suivis par tant de personnes. Ils s’estimaient dilués, dépassés. La marque distinctive initiale était en voie de disparition. Par conséquent, toutes les approches qui consistent à analyser la communication de Barack Obama comme la mobilisation de réseaux communautaires, l’émergence d’un style de «cool attitude» qui rompt avec l’image classique du pouvoir … nous semblent passer à côté de la vraie vague de fond : répondre à la soif d’idéal
comme rencontre entre un engagement personnel et une mobilisation collective. C’est le moment où la politique vient à la rescousse de la vie ; ce qui explique d’abord la mobilisation mili‐tante puis celle civique du vote. Parce que la vague de fond était celle‐là, la crise d’oc‐tobre a amplifié la portée du phénomène Obama. La crise financière devenait la démonstration objective d’un radeau à la dérive. La confrontation entre ce nouveau style (Obama) et l’incarnation de ceux qui avaient failli au point d’ame‐ner le bateau au point de couler (McCain) produisait des effets encore plus implacables. D’où la sévérité de la sanction qui montrait la volonté de tourner une page avec force et détermination. L’ampleur du succès électoral de Barack Obama a été dépendante de cette accélération conjoncturelle qui a d’ailleurs totalement écrasé les dernières semaines de la campagne alors même qu’elles étaient décisives dans des circonstances ordinaires. Avec des techniques nouvelles de communication et dans ce contexte marqué par un particularisme fort, l’originalité de la communication de Barack Obama tient à deux facteurs : ‐ il remet à «la une» le leader de charme, ‐ il restaure la place de l’intérêt général. Sur l’image du leader, Barack Obama marque d’abord le retour en force du leader de charme. Il est en campagne permanente avec de très nombreux déplacements sur le terrain. Ses déplacements produisent toujours le même visuel : le rassemblement, l’action, le dialogue, la mobilisation. Le temps de crise produit une sur‐personnalisation que Barack Obama met en scène avec efficacité et réussite pour l’instant sans innovation particulière. Sur le fond, il restaure la place de l’intérêt général. Son discours repose en permanence sur trois piliers : ‐ il n’est pas possible de résoudre les problèmes avec ceux qui les ont créés,
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‐ il y a un intérêt général qui dépasse la somme des intérêts particuliers, ‐ les solutions passent par la renaissance de la démo‐cratie. C’est ce contenu même du discours qui est le plus novateur. Le premier socle consiste à «tourner la page». La crise provient de comportements qui ne doivent pas se re‐produire. Le système qui a créé la crise non seulement n’est plus crédible mais il est fautif. Il faut donc évoluer vers un autre ensemble de règles porté par de nou‐veaux leaders. Ce nouvel ensemble de règles doit reposer sur une place nouvelle accordée à la notion d’intérêt général. Le discours de Barack Obama n’est pas le «retour de l’Etat», c’est la naissance de l’intérêt général dans la politique Américaine. Jusqu’alors, la politique Améri‐caine reposait sur la notion de l’équilibre consenti en‐tre des intérêts particuliers qui doivent négocier pour dégager un terrain d’entente. La notion même d’inté‐rêt général était très extérieure à la politique Améri‐caine. L’intérêt général fait une entrée fracassante dans la politique Américaine ; d’où l’actuel débat sur la «socialisation» de la politique. Classiquement, deux questions se posent immédiate‐ment : ‐ qu’est ce que l’intérêt général ? ‐ qui en a la charge ? A la première question, Barack Obama répond par des grandes causes nationales comme la défense de l’em‐ploi, la mise en place de la couverture santé … A la seconde question, il a tendance à répondre que sont concernés tous les décideurs politiques mais bien au‐delà. C’est ce dernier volet qui ajoute à la nouveau‐té. Le Président Américain veut faire renaître la démo‐cratie. Il récuse la notion de citoyen spectateur pour évoluer en permanence vers celle de citoyen acteur. Toutes les images vont dans cette direction principale : retrouver le sens d’une communauté où chacun agit.
Cette notion de «citoyen responsable» est la création principale de l’élection de novembre 2008. Elle a expliqué la mobilisation presque sans précédent. Loin de casser ce ressort, le nouveau Président s’ap‐proprie ce creuset conceptuel pour montrer qu’il doit y avoir un nouvel exercice du pouvoir par l’action de chacun. Il redéfinit le «minimum vital» des démocraties moder‐nes en termes d’information, de participation, de mo‐bilisation. C’est le langage quotidien du suffrage universel mo‐derne. C’est probablement ce volet qui va marquer la «révolution Obama» en cas de succès dans sa gestion présidentielle.
1 : Dissocier la campagne principale et les campagnes collatérales Une équipe centrale très légère qui ouvre des espaces aux actions déléguées L’équipe d’état major localisée à Chicago a dissocié les tâches stratégiques gérées par elle et les tâches délé‐guées laissées aux équipes locales. Cette logique d’or‐ganisation a présenté de nombreux avantages dont la capacité pour l’équipe stratégique de ne pas être sub‐mergée dans la dernière ligne droite, l’émulation qui en résulte au niveau des terrains. Sous cet angle, c’est en effet une nouvelle logique d’organisation de campagne. En ce qui concerne l’équipe stratégique, 7 fonctions sont essentielles : ‐ la direction de campagne : en liaison permanente avec le cabinet‐conseil qui constitue la structure exté‐rieure de conception et de définition de stratégie, la direction de campagne est confiée à un professionnel de l’organisation. Cette fonction est conçue comme une tâche de management au sens classique du terme. ‐ la collecte de fonds : le « fund raising » constitue un travail professionnel officiel quotidien. Plus les caisses sont pleines, plus la campagne est assurée de durer.
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C’est l’indicateur de crédibilité. ‐ le suivi d’opinion : une structure déterminante car elle fonctionne en amont de l’annonce et en aval. L’en‐quête par phoning occupe quotidiennement plusieurs personnes qui suivent pas à pas l’évolution de l’opinion sur les messages lancés et sur les sujets d’actualité. ‐ l’équipe « d’oppo research » : suivre pas à pas les concurrents, leurs positions passées et présentes, leurs carrières, leurs votes... La matière pour les publicités négatives sortira de leurs dossiers. ‐ les relations presse : la personne doit avoir un tempé‐rament très énergique et des « nerfs d’acier ». Les rela‐tions sont en effet très différentes de celles connues en France. La « complicité amicale » serait synonyme d’un mauvais professionnalisme. Le représentant du candidat doit donc « en imposer » à la presse par sa connaissance détaillée des dossiers comme de la per‐sonnalité et du cursus du leader qu’il représente. ‐ les « fabriquants de messages » : ce pôle va du « speech writer » au photographe attaché aux basques du candidat ou au caméraman qui animent le visuel du site Internet. Le speech writer coordonnera souvent une cellule sur les argumentaires fonctionnant en liai‐son avec des universitaires pour étoffer les arguments de chiffres. ‐ le secrétariat. Cette organisation présente 4 caractéristiques qui la différencie profondément des traditionnelles équipes françaises. ‐ un professionnalisme à part entière : par le système transparent et officiel des structures électorales, les postes sont revendiqués comme un cursus profession‐nel comme un autre. L’objectif est d’abord l’efficacité bien davantage que le militantisme. ‐ le souci permanent de toucher les indécis : pour leur parler, il faut un message clair, des moyens lourds ré‐pétitifs et une grande cohérence dans le temps pour d’abord franchir le seuil minimal de notoriété puis pour construire son image de marque. ‐ le règne absolu de l’image : le candidat est le message : par sa tenue, par ses formules brèves et incisives, par ses gestes, par ses attitudes.
‐ la reconnaissance de la segmentation du corps élec‐toral : parler ou agir général, c’est parler ou agir en vain. Tout le travail consiste à passer le bon message aux bons récepteurs. Les publicités télévisées sont un moyen privilégié puisque les émissions ont une identi‐fication précise de leur audience. Par conséquent, les ads (vidéos clips payants) assurent le meilleur ciblage possible pour prendre position sur des thèmes qui sont chers aux téléspectateurs de la tranche TV concernée. 2 : Faire vivre des campagnes « extérieures » Se couvrir avec des campagnes multiples La stratégie classique allait à la campagne unique, hié‐rarchisée et organisée sur la base de la démultiplica‐tion. La logique nouvelle vise à faire vivre des multi‐campagnes. Chaque campagne permet d’occuper un créneau dans une logique générale de saine émulation. 3 : Intégrer les finances comme premier acte militant Trois remarques pratiques préalables sont nécessai‐res : ‐ le cadre légal n’est pas comparable. Les Etats‐Unis ne connaissent pas de plafond légal à quelques exceptions près qui dissuadent d’ailleurs les candidats de recourir à cet encadrement, ‐ il n’y a pas de corrélation entre le montant de la dé‐pense et la victoire ou l’échec. L’argent n’achète pas le succès électoral. Toutes les études sérieuses conduites dans ce domaine montrent, à chaque époque, que les candidats disposant des plus gros moyens matériels n’emportaient pas automatiquement la victoire. La vraie question n’est pas tant de savoir si l’argent joue un rôle décisif lors d’une élection mais pourquoi il n’a pas été un facteur déterminant ? Sous ce volet apparaissent deux constats : ‐ l’argent est soumis à la loi des rendements décrois‐sants. L’électorat se fatigue d’être bombardé d’appels
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électoraux trop répétés, ‐ si une vague de rejet du pouvoir en place est forte, aucune cagnotte électorale ne pourra l’endiguer. ‐ la limitation des dépenses de campagnes électorales devraient conduire en France à une accélération des campagnes pour gagner de la notoriété et de l’image de marque avant le seuil des 12 derniers mois. Barack Obama a levé des fonds records parce qu’il a mis en place une technique de levée originale : ‐ il vaut mieux lever 2 dollars par mois sur 12 mois que tenter de collecter 24 dollars d’un coup. Ce lissage dans le temps donne un côté quasi‐indolore à la diffé‐rence du prélèvement « élevé » une fois pour toutes, ‐ la donation n’est qu’une étape de l’aide. L’aide glo‐bale repose sur la donation + l’amorçage d’une chaîne de contacts. Le donateur ne doit pas considérer qu’il a rempli son apport en envoyant sa participation. De façon indissociable, son apport passe par la mise en place d’une véritable chaîne et il en est de même pour chaque autre donateur de cette chaîne, ‐ Internet est le support à privilégier car c’est l’indiscu‐table meilleur retour sur investissement. Le coût de la prospection est très faible par ce canal. 4 : Organiser et assumer la sur‐exposition médiatique Eviter le piège de l’indifférence Le véritable danger réside dans deux travers : ‐ se contenter de l’égalité, ‐ privilégier des supports au détriment d’autres. L’opinion est saturée de communication. Il ne faut donc pas sous‐estimer la rapidité d’obsolescence d’un message. Il importe donc de garder un rythme très soutenu de création de messages pour rester sans le cercle d’attention. A cette fin, l’enjeu n’est pas de pri‐vilégier un ou des supports. C’est de cumuler les pré‐sences tous supports confondus. Dans cette logique, Barack Obama s’est installé comme le « copain du quotidien » tant dans le fond de sa com‐
munication que dans la forme de l’organisation des réunions. C’est la grande clef de la réussite de Barack Obama. Il invite chaque citoyen américain à entrer dans sa vie. Une nouvelle génération de candidats est née : les « copains du quotidien » auxquels il est possible de s’identifier. Ceux qui partagent chaque heure de leur vie sans cérémonial et que l’on souhaite ensuite ren‐contrer lors de la venue dans la géographie de proximi‐té pour les voir « en vrai ». Être et ne plus promettre. C’est la vie au quotidien qui porte les messages et non plus les promesses. 5 : Mettre en place une communication multi‐supports La méthode consiste à identifier l’image qui va porter le message puis à adapter ce message aux divers sup‐ports techniques. Cette priorité à l’image ouvre bien entendu un espace particulier aux vidéos clips. La communication moderne est marquée par deux ca‐ractéristiques : ‐elle est visuelle, ‐elle est émotionnelle. Le vidéo clip, sorte de très court métrage, devient donc un outil majeur de communication. Tout l’enjeu consiste à distinguer le contenu émotion‐nel de la réaction émotionnelle. Ce qui importe, c’est bien entendu la réaction émotionnelle c'est‐à‐dire la conséquence qui résulte du message visuel. Plus la réaction émotionnelle est forte plus l’impact du message est grand, efficace donc persuasif. Cette logique donne naissance à un nouveau parti pris des vidéos clips. Parce qu’elle est émotionnelle, l’écriture visuelle doit être sensuelle, valorisante, liée au plaisir, à l’utilité et au respect de la nature. L’écriture doit chercher l’intérêt mais aussi la curiosité.
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Internet est un support incontournable. Non pas parce qu’Internet est à la mode mais parce qu’Internet est aujourd’hui le premier support de synthèse : écrit + image + son + vidéo. Mais aussi, voire surtout, Internet est un support d’in‐formation sans intermédiaire permettant à un émet‐teur de délivrer un message à des récepteurs libres d’en prendre connaissance avec l’autonomie la plus totale. A côté de tels atouts, la communication via Internet doit respecter des qualités particulières : ‐ La diversité des informations : la « génération du clic » doit pouvoir zapper très rapidement d’une infor‐mation à l’autre. Le site ou le blog doit être conçu comme un portail vers toutes les activités. ‐ La priorité : pour récompenser les internautes fidèles, des informations importantes exclusives doivent vivre leur première parution sur le site ou le blog. Ces der‐niers ne doivent jamais être le seul réceptacle des in‐formations déjà diffusées par les autres supports clas‐siques. ‐ Créer l’évènement : les « maîtres à cliquer » sont ceux qui savent créer régulièrement des évènements autour et par leur site Internet. Chaque fois que vous le rendrez incontournable, vous augmenterez sa cré‐dibilité et sa fréquentation. La réussite c’est d’ame‐ner des médias extérieurs classiques à le citer pour faire état d’une annonce majeure. Ce jour là votre blog aura changé de catégorie. ‐ Pensez au « clic à retardement » : parce que le blog est le support privilégié du maximum d’informations, des mises à jour s’imposent régulièrement. A cette oc‐casion, vous devez vous extraire de la pure approche chronologique pour penser au « clic à retardement ». Chaque jour, à n’importe quel moment, un nouvel in‐ternaute peut découvrir votre blog. Si le passé doit être toiletté pour gagner en clarté, il doit surtout être mis en ordre pour garder l’essentiel. Tout ce qui va mon‐trer votre sérieux dans le temps. Tout ce que le temps écoulé a pu valider depuis votre annonce initiale. Ce toilettage doit donc être très sélectif pour valider tout ce qui mérite de rester dans le blog dans la durée. ‐ Veiller à affirmer une « personnalité » au blog : un
blog efficace est un blog qui dégage en permanence l’enthousiasme des premiers jours de sa création et qui respecte une personnalité spécifique c'est‐à‐dire un style fait du choix d’une écriture comme de l’esprit des remarques. 6 : Conquérir un véritable leadership L’acquisition la plus facile du statut de leader c’est d’ê‐tre le premier. Comment fait‐on pour être leader ? C’est simple. Il faut être le premier. Le premier c’est la légende. La légende vit toujours. Le second est soit un suiveur soit le pre‐mier des … perdants. Dans aucun de ces cas, il n’y a matière à créer un statut de leader. Charles Lindberg, Neil Armstrong, Christophe Colomb, … Lance Armstrong, Bill Gates … ont marqué l’opinion à vie parce qu’ils ont une qualité commune : avoir été des premiers. Une fois arrêté ce constat de bon sens, la véritable dif‐ficulté consiste à identifier l’objet de cette première place. Barack Obama pouvait compter sur un fait discriminant objectif : être le premier Président métis. Comme il n’y avait pas d’autres candidats sur ce cré‐neau, il n’eut même pas de confrontation pour acqué‐rir cette première place sur d’autres candidats à ce statut. Par conséquent, la première exigence consiste à effec‐tuer un survol global des positions pour identifier celle qui est susceptible d’être atteinte en première place. 7 : Partir à la recherche du neuf pour conforter sa place de leader Se faire entendre dans le brouhaha de tous les autres Une fois identifiée la position de leader à conquérir par la place objective de premier, il importe d’organi‐ser la progression dans l’esprit de l’opinion pour que celle‐ci légitime ce statut.
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L’une des méthodes majeures consiste à éviter toute imitation. C’est donc le moment où le candidat conforte son statut par la recherche systématique du neuf. Un premier n’imite pas. Dès qu’il tombe dans l’imitation, il peut rejoindre un statut de suiveur. C’est dans cette cohérence globale que le statut de leader se conquiert et s’affirme. C’est cette cohérence globale qui a été la grande réussite de la campagne 2008 de Barack Obama. 8 : Bâtir une nouvelle relation avec l’opi‐nion Positionner l’opinion par rapport à sa candidature et non pas le candidat par rapport à l’opinion. Si l’opinion Américaine soutenait Obama, elle devenait tolérante, novatrice. Elle modernisait, actualisait, don‐nait une nouvelle vitalité au rêve Américain. Le candidat devient le produit du rendez‐vous de l’opi‐nion avec elle‐même. Là aussi, c’est une technique novatrice car elle respon‐sabilise d’abord l’opinion. Le candidat devient le sym‐bole d’un tempérament collectif. Le candidat ne vit plus en lui‐même. Il devient un pro‐duit de l’opinion. 9 : Faire de son nom une marque Il importe à la fois d’éviter le piège du sans nom et chercher à trop courir d’enjeux. Tout pouvoir d’évocation est élastique. Plus il devient élastique (capacité à susciter des images diverses), plus il devient fragile. Il faut identifier un courant majeur dans l’opinion et le préempter au point de devenir un substitut du nom générique. Plus la position sera solide et plus cette substitution interviendra. Le nom est alors devenu une marque à part entière.
10 : Laisser les nouvelles technologies au rang d’outils Elles sont et demeurent un outil et non pas une fin en soi. En plein été 2006, le Parti Démocrate a lancé son guide des « 100 actions ». Ce guide défendait une logique de « bouquet » d’outils de communication à actionner en permanence. Il exposait la technique d’une action forte par jour avec la démultiplication par tous les supports de communi‐cation. Parmi ces supports, il est certain qu’Internet et les ré‐seaux sociaux occupent une place privilégiée. Cette place est liée à plusieurs facteurs : • ce sont des outils de l’immédiat notamment
dans la réactivité. Ils incarnent la logique « action – réaction » presque à l’excès d’ailleurs,
• ce sont des outils de synthèse. Internet = l’écrit + l’image + la vidéo,
• ce sont des outils de la communication ciblée. 11 : Accepter que l’opinion soit faite d’une foule d’opinons Comme l’opinion est de plus en plus éclatée, il faut communiquer la bonne information à la bonne cible. La bataille logistique réside d’abord dans ce ciblage. Un exemple d’efficacité a été donné par la campagne d’Arnold Schwarzenegger en Californie courant 2006. En novembre 2005 : Arnold Schwarzenegger était don‐né battu de 6 points par son concurrent Démocrate. En février 2006 : il passe à égalité avec son concurrent Démocrate. En avril 2006 : le Gouverneur sortant passe en tête : + 4 points. En Mai, cet écart est porté à + 6 points. En septembre 2006, il passe à + 10 points. Il va gagner avec 16 points d’avance.
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Que cache ce retournement ? Certes, des modifications majeures quant au fond de la politique mise en œuvre : ‐ mesures contre la crise énergétique, ‐ mesures contre la crise climatique, ‐ financement de la recherche sur les cellules‐souches, démarquage total et ostentatoires par raport à la poli‐tique mise en œuvre par le Président Bush. Mais il faut compter aussi avec la plus grosse base de données jamais mise en œuvre pour une élection lo‐cale. Cette base de données à deux originalités : ‐ la quantité de données serait sans précédent dans l’histoire politique des Etats‐Unis, ‐ mais surtout, c’est une base de données commercia‐les donnant lieu à des traductions politiques. A partir des habitudes d’achats, l’équipe du Gouver‐neur Schwarzenegger a établi une grille de lecture poli‐tique. Par exemple, un conducteur de camionnette possédant un permis de chasse et abonné à un maga‐zine « chasse‐pêche » est un conservateur potentiel alors que celui qui est un abonné du « New Yorker » faisant ses courses dans un magasin de produits natu‐rels est supposé ,voter démocrate. Cette logique est la première opération croisant deux données : ‐ une base brute de données privées à caractère com‐mercial, ‐ le profilage politique en raison des caractéristiques de consommation. Cette approche est le fruit d’un long travail conduit par une équipe importante sous la direction de Steve Schmidt, directeur de campagne, et Josh Ginsberg, directeur politique. Aux Etats‐Unis, l’acquisition de ces données est parfai‐tement légale. Ces données sont d’autant plus nom‐breuses que presque chaque segment de marché fiche ses clients : commerces de détail, compagnies aérien‐nes, sociétés de crédit, magazines… C’est la première fois qu’un maillage aussi étroit inter‐vient pour une campagne politique. Mais c’est aussi la première fois qu’une telle action individualisée peut intervenir. Chaque message s’adresse à la bonne cible pour lui parler de ses priorités quotidiennes.
Avec de tels moyens, un micro‐ciblage sans précédent peut être opéré. L’équipe Obama a eu recours à la base de données Ca‐talist. Plus de 30 millions de dollars ont été investis. Cette base a été complétée par les « données militan‐tes ». Ce fut la base de données la plus importante. Il est possible de considérer que 220 millions d’Améri‐cains était répertoriés avec des dizaines d’informations par personne. A partir de ces données, les unités locales pouvaient travailler dans du « sur‐mesure ». Par exemple, des volontaires se présentaient à un local de campagne. Dans un sachet plastique, chaque volontaire trouvait un téléphone portable, une liste de cibles et un mes‐sage à exposer. Les uns s’adressaient ainsi aux jeunes de moins de 25 ans, d’autres aux seniors, puis un autre groupe aux militants démocrates … La bataille de la logistique a connu une nouvelle étape historique avec de telles bases de données. 12 : Créer une mode par le repositionne‐ment global Le positionnement se joue au moins à deux. La campagne 2008 de Barack Obama a rappelé que le positionnement se joue au moins à deux. Sa campagne a mis en scène en permanence deux autres acteurs : Bush et Clinton. Sans ces autres profils, la mode du changement n’au‐rait probablement jamais pris à ce point. Par conséquent, la communication de la campagne doit reposer sur une scénarisation collective qui ne doit jamais oublier les concurrents choisis parce qu’ils permettent de se construire. C’est la méthode du «me no». Sur des dossiers connus du grand public, il s’agit de communiquer par décalage avec les concurrents. Dans la dialectique, cette concurrence est totalement assumée en exposant expressément les divergences assumées ; voire même en les créant.
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13 : Mettre en place un véritable bouquet de supports d’informations Concevoir un véritable bouquet de moyens d’informa‐tions Il ne s’agit pas de choisir un moyen d‘informations mais de compter avec tous les moyens d’informations en respectant des priorités successives. C’est la mé‐thode de la cohabitation. Il faut surtout intégrer que le corps humain est devenu le premier panneau d’affichage. C’est le cas du corps du candidat qui est l’incarnation du style. C’est aussi le cas du corps de tous les soutiens : la mode des maillots avec slogans va se développer considérablement.
14 : Identifier le «main stream» et s’y col‐ler avec la plus grande rigueur Un citoyen a des repères simples qui fondent ses actes civiques : 1) il a besoin de considération. Il sait que la qualité
de citoyen lui donne des droits importants dans un régime démocratique,
2) il se positionne en appartenance à un groupe, 3) il aspire à la satisfaction d’enjeux personnels, 4) si les enjeux personnels sont remplis, il devient
le garant d’enjeux collectifs. Si les enjeux per‐sonnels ne sont pas remplis, il délaissera les en‐jeux collectifs pour tenter de satisfaire d’abord ses enjeux personnels.
La recherche d’appartenance à un groupe a longtemps privilégié une place importante aux partis politiques. Ces derniers modelaient même parfois la vision qu’un citoyen peut avoir de la réalité et guidaient fortement ses intentions de votes. Ce rapport à un parti politique avait des conséquences nombreuses : • il révélait une appartenance forte voire même
militante, • le parti «mettait de l’ordre» dans les préférences
des citoyens concernés et surtout hiérarchisait des priorités.
Le parti politique était donc un simplificateur de comportements. Ce critère d’appartenance a été fragilisé pour deux rai‐sons. D’une part, les partis politiques ont perdu en qualité de référence. Leur statut s’est beaucoup désa‐cralisé sous l’influence de nombreux facteurs. Mais surtout, la désappartenance à un groupe politi‐que est non seulement le résultat de la baisse de l’i‐mage de marque des partis mais l’affirmation d’une culture politique personnelle qui équivaut à la revendi‐cation d’un certain épanouissement intellectuel. Sur le fond, les citoyens ont gagné en connaissance individuelle des dossiers. Ils sont de plus en plus connaisseurs de questions. Ils se constituent donc en conséquence une opinion et ensuite seulement ils cherchent à voter pour un candidat qui partage leur point de vue. Ce dernier volet pose une question majeure : pour les citoyens qui gardent une référence à un parti politique, attendent‐ils du parti que leur soit dictée leur façon de penser ou bien cherchent‐ils une formation et un can‐didat qui répondent à leurs convictions ? Le « citoyen idéologue ou militant » est de moins en moins présent. La fidélité aux partis politiques a fondu comme neige au soleil. Elle est désormais totalement dépendante de l’action du parti tout particulièrement quand celui‐ci est en charge des responsabilités du pouvoir. Cette évolution explique les mouvements importants de blocs de voix passant d’un camp politique à un au‐tre au gré des circonstances. L’étape suivante consiste donc à définir les circonstan‐ces de nature à justifier des modifications de compor‐tement électoral. S’agit‐il de questions de fond ou de sujets d’actualité ? La règle constatée par les études conduites sur ce su‐jet est celle de la primauté des sujets d’actualité. Pour qu’une question de fond prenne plus d’influence qu’un sujet d’actualité, il faut deux critères cumulatifs :
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• d’une part, qu’il s’agisse d’une vague de fond
relative à un réel dossier d’une ampleur considé‐rable (guerre, privations économiques excep‐tionnelles…),
• mais surtout d’autre part que l’un des candidats
ait des positions clivantes éloignées des priorités collectives consensuelles, si elles existent.
En d’autres termes, si la question de fond appelle des réponses assez proches de la part des deux candidats, l’électorat retourne à des sujets d’actualité. Par conséquent, la règle très installée est celle de la primauté des questions d’actualité. Mais ce critère de choix est aujourd’hui mis en diffi‐culté par un autre enjeu : la répartition entre les ci‐toyens qui votent et ceux qui ne votent pas. Cette séparation appelle une question pratique : qu’est ce qui peut réellement conduire un citoyen à ne pas voter ? Les études universitaires conduites sur ce sujet appor‐tent des enseignements qui divergent des réponses traditionnellement admises. La baisse de participation est d’abord liée au senti‐ment que le vote ne changera rien au « système ». Plus un circuit de décisions politiques est perçu comme manifestement « autonome », plus la participation civi‐que chute. Le second facteur d’abstention est lié au sentiment qu’a le citoyen d’exercer une influence décisive sur le vote. Si le choix collectif lui parait acquis d’avance et à l’abri de sa participation individuelle; il sera tenté par l’abstention. Enfin, et seulement en troisième position, apparaît comme facteur le rejet des partis politiques. Tous ces volets montrent bien qu’un nouveau citoyen est né avec des facettes d’une particulière complexité. L’essentiel réside désormais dans la recherche du « courant principal » de la demande d’actualité et d’y apporter une offre claire, simple et cohérente.
Cette logique ouvre l’âge des campagnes à enjeux voire même des campagnes « referendum ». Cette lo‐gique crée une volatilité nouvelle renforcée par le re‐fus assumé des appartenances idéologiques pour l’es‐sentiel des électorats.
15 : L’image est le message La société moderne est celle de l’image. En politique, ce constat s’accompagne d’une autre ré‐alité. La communication est engagée par des passion‐nés de la politique qui s’adressent à des personnes pour lesquelles la vie politique est seulement «un mal nécessaire». En conséquence, il ne faut pas croire que de nombreu‐ses heures seront consacrées aux messages électoraux. Quelques rares minutes seront disponibles. Ce sont ces rares minutes qui comptent. Dans ces minutes, il importe d’abord de capter l’atten‐tion puis bâtir un pouvoir d’évocation cohérent, effi‐cace. Ce pouvoir d’évocation est aujourd’hui marqué par la personnalisation. S’agissant du phénomène de la personnalisation : à un moment précis, une personnalité doit incarner la voie souhaitée par la majorité. Il importe alors de créer et de gérer son « Capital‐Nom ». Un homme politique doit aujourd’hui considérer que son nom est sa principales enseigne. Parmi tous les changements profonds intervenus, trois comportements nouveaux dont les conséquences sont considérables : 1) On vote pour soi, pas pour un candidat. La «nouvelle génération» des électeurs a une approche citoyenne voisine de celle de la consommation cou‐rante. Il s’agit de détecter les mesures qui permettront d’améliorer son sort individuel. 2) On vote pour une star pas pour un responsable po‐litique. Le star système a frappé la vie politique Fran‐
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çaise. Il s’agit de représenter des valeurs au‐delà des fonctions. Les fonctions ramènent à l’action concrète. Les valeurs vont au‐delà. Elles sont le sens d’une desti‐née. 3) On vote pour un gagnant. Pas pour un perdant. D’où l’impact des sondages qui façonnent une partie de l’opinion en donnant des indications de victoires potentielles. Cette réalité est désormais perçue si lar‐gement qu’elle détourne pour partie la vocation des sondages instrumentalisés parfois comme «témoins scientifiques» de la victoire. Le pouvoir n’a appartient pas aux plus apparents. Il appartient aux mieux reconnus. Pour être reconnu, il importe de gérer avec cohérence la multitude d’images données à l’opinion. Hier, l’acteur majeur d’une campagne était souvent le rédacteur des discours ou l’équipe chargée des pro‐grammes. Aujourd’hui, c’est le photographe ou l’é‐quipe de la vidéo ...
Les autres produits publiés par Exprimeo pour la rentrée de septembre 2009 :
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La chasse au neuf est ouverte. Un autre univers émerge porteur de nouveaux défis de contenus, de sup‐ports, d’images. Nos guides pratiques se veulent un outil de réflexions, de connaissances, d’ouverture sur des choix en souhaitant que, pour cette vie publique qui est entre deux âmes, ils permettent d’avoir l’es‐prit clair pour bien décider. Denis BONZY
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Le mot de l’équipe de rédaction
Une nouvelle opinion publique est née. Elle ne remet pas fondamentalement en cause le système. Elle demande au système des adaptations majeures pour : ‐ devenir pilote du changement, ‐ manifester certes une volonté mais surtout une capacité à écouter, à libérer les possibilités, à fonctionner en acteur parmi d’autres d’un changement contrôlé, vou‐lu, pragmatique. Cette culture fait naître des «nouvelles frontières» : • le refus des leurres. Les démarches idéologiques faites de matrices ne corres‐
pondent plus à cette démarche, • le discrédit des responsables dont le bilan a été défaillant. Il n’y a plus d’expert
en dehors de celui qui a prouvé par les actes et par les résultats, • ce qui n’est pas utile doit être absent du débat. Nous avons ainsi assisté à l’émergence d’une nouvelle citoyenneté : le citoyen rationnel. A la différence du citoyen militant qui était a priori acquis ou hostile, le citoyen rationnel ne peut être touché que par une communication persuasive basée sur : ‐ l’identification claire de ses besoins, ‐ l’énoncé de propositions précises, ‐ la présentation de la différenciation avec les propositions des concurrents car l’uni‐vers de ce citoyen est fait de comparaisons permanentes. C’est un nouveau «rapport de séduction» entre le candidat et le citoyen qui prend naissance. Nous espérons que ce guide pratique vous sera utile dans l’identification des arbitrages concrets de votre campagne de communication.
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