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ETAT OU MARCHE : PEUT-ON DETERMINER UNE SOLUTION OPTIMALE ?
Question : quelles relations entre logique marchande et intervention publique ?
Thèse 1 : l’intervention publique perturbe l’équilibre marchand
Thèse 2 : l’Etat peut améliorer le fonctionnement de l’économie, soit en garantissant la concurrence, soit lorsque le marché ne peut répondre à l’ensemble des questions concernant l’allocation des ressources
D’où interrogation : quel est l’impact de l’Etat sur l’équilibre général ?
1Ch. 6 - Etat et marché
Ch. 6 - Etat et marché 2
Question de l’impact de l’intervention de l’Etat sur un marché de concurrence pure et parfaite
1er cas de figure : l’Etat décide de fixer un prix plafond pour un produit
Justification sociale
1- L’Etat et l’équilibre partiel de marché
1.1 L’Etat perturbe l’équilibre marchand1.1 L’Etat perturbe l’équilibre marchand
Prix plafond
Ch. 6 - Etat et marché 3
Prix
Quantités
Offre
Demande
Prix d’équilibre en CPP
Quantité d’équilibre en CPP
Quantité échangée après plafond
Rationnement de la demande
IMPACT D’UN PRIX PLAFOND SUR L’EQUILIBRE DE MARCHE
Ch. 6 - Etat et marché 4
2eme cas de figure : l’Etat décide de fixer un prix plancher pour un produit (prix de marché n’est pas jugé suffisamment rémunérateur)
Prix
Quantités
Offre
Demande
Prix d’équilibre en CPP
Quantité d’équilibre en CPP
Prix plancher
Quantités échangées après prix plancher
Excédent
Ch. 6 - Etat et marché 5
Exemple de marché avec prix plafond : marché du logement
Exemple de marché avec prix plancher :
marchés agricoles (politique agricole commune avant 1992)
Interprétation du chômage comme résultant d’un mauvais fonctionnement du marché du travail suite à l’instauration d’un salaire minimum renvoie à ce raisonnement
Ch. 6 - Etat et marché 6
Analyse microéconomique privilégie la mise en place de taxes forfaitaires pour financer les actions publiques
Taxe forfaitaire pèse directement sur les acteurs économiques sans modifier le système des prix (redevance TV, « poll tax »)
Permet de maintenir l’optimalité au sens de Pareto
Taxe forfaitaire suscite des interrogations en termes de justice sociale
1.2 La question de l’imposition1.2 La question de l’imposition
Ch. 6 - Etat et marché 7
taxes non forfaitaires (TVA) entraînent une perte de surplus social (dissociation entre prix payé par le consommateur et prix perçu par le producteur)
Raisonnement valable également pour les droits de douane
Réflexion moderne porte sur la « fiscalité optimale » : Etat doit prélever un niveau donné de ressources à partir d’un nombre d’outils limités et doit tenir compte d’objectifs en termes d’efficacité mais également de justice sociale
Complexité de la réponse apportée à cette question qui doit, entre autres, tenir compte du degré d’ouverture du pays
Ch. 6 - Etat et marché 8
Politique de la concurrence se met en place historiquement en articulant justifications économiques et justifications politiques
Politique de la concurrence peut s’interpréter
de manière « statique » (mesure du degré de concentration d’un marché) : lutte contre les monopoles, les cartels
ou de manière dynamique (contrôle des fusions, restrictions à la concurrence)
2- L’Etat peut-il se substituer aux acteurs du marché ?
2.1 La politique de la concurrence permet d’améliorer le fonctionnement du marché de concurrence2.1 La politique de la concurrence permet d’améliorer le fonctionnement du marché de concurrence
• Pays « pionnier » : Etats – Unis (Sherman Act – Clayton Act)
Mise en œuvre de la politique de concurrence apparaît « jurisprudentielle » : forte variation selon les périodes (difficulté de définir précisément les termes de la loi)
9Ch. 6 - Etat et marché
Section 2Every person who shall monopolize, or attempt to monopolize, or combine or conspire with any other person or persons, to monopolize any part of the trade or commerce among the several States, or with foreign nations, shall be deemed guilty of a felony (…)
Sherman Act - 1890
Ch. 6 - Etat et marché 10
• Cas de la France est plus complexe
Forte tradition de contrôle administratif (cf. contrôle des prix)
Tournant au milieu des années 80 (abrogation de l’ordonnance de 1945, mise en place du conseil de la concurrence)
Délégation d’une partie de la politique de la concurrence au niveau européen
Article 81Sont incompatibles avec le marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun, et notamment ceux qui consistent à :a) fixer de façon directe ou indirecte les prix d’achat ou de vente ou d’autres conditions de transaction ;b) limiter ou contrôler la production, les débouchés, le développement technique ou les investissements ;c) répartir les marchés ou les sources d’approvisionnement ;d) appliquer, à l’égard de partenaires commerciaux, des conditions inégales à des prestations équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence ; e) subordonner la conclusion de contrats à l’acceptation, par les partenaires, de prestations supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n’ont pas de lien avec l’objet de ces contrats.
Ch. 6 - Etat et marché 11
Toutefois, les dispositions du paragraphe 1 peuvent être déclarées inapplicables :- à tout accord ou catégorie d’accords entre entreprises ;- à toute décision ou catégorie de décisions d’associations d’entreprises, et- à toute pratique concertée ou catégorie de pratiques concertéesqui contribuent à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir leprogrès technique ou économique, tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable duprofit qui en résulte, et sans imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs (…)
Abus de position dominante : condamnation d’Intel (mai 2009)
Cartels : condamnation dans les vitamines (2001), le cuivre (2004), l’électricité (2007), les produits verriers (2007)
Contrôle des concentrations : ne doivent être autorisées que les concentrations qui « n’entravent pas de manière significative une concurrence effective, notamment en créant ou en renforçant une position dominante. »
Article fondateur : Baumol, Panzar et Willig (1980)
Caractère concurrentiel du marché n’est pas lié au nombre de firmes présentes mais à l’absence de barrières à l’entrée et à la sortie
Marché contestable est un marché où la liberté d’entrée est totale et où les firmes qui choisissent de sortir ne risquent pas d’autres coûts que l’amortissement normal des moyens de production utilisés
Monopole sur un marché contestable doit tarifer au minimum de coût moyen (risque de « hit and run entry »)
12Ch. 6 - Etat et marché
2.2 La théorie des marchés contestables2.2 La théorie des marchés contestables
Paradoxe de la théorie des marchés contestables
Remise en cause de la pertinence théorique (existence d’hypothèses héroïques)
Mais très forte influence sur la politique de concurrence dans les années 80 : justifie théoriquement les politiques de déréglementation
13Ch. 6 - Etat et marché
exemple type : déréglementation du transport aérien aux Etats-Unis
Identification de trois domaines dans lesquels le marché ne peut assurer une allocation efficace des ressources
Justifie une intervention de l’Etat
14Ch. 6 - Etat et marché
2.3 L’Etat pallie les limites du marché2.3 L’Etat pallie les limites du marché
1- Les externalités
Définition : activité d’un agent a une conséquence (positive ou négative) sur la fonction de production et/ou la fonction d’utilité d’un autre agent
15Ch. 6 - Etat et marché
Externalités identifiée par Alfred Marshall
Exemple de l’apiculteur et de l’arboriculteur
Application à la localisation des entreprises (effets d’agglomération)
Externalité ne passe pas et ne peut être traitée par le système de prix
Logique marchande conduit à une sous production de biens générant des externalités positives
16Ch. 6 - Etat et marché
Prix
Quantités
Demande
Coût marginal social
Production socialement optimale
Coût marginal privé
Production en CPP
Perte de bien être social
Ch. 6 - Etat et marché 17
Logique marchande conduit à une surproduction de biens générant des externalités négatives
Intervention d’un règlementeur qui détermine le niveau souhaitable de production dans le marché concerné et met en place un mécanisme de contrainte ou d’incitation permettant d’atteindre l’objectif visé
Exemple des taxes « pigoviennes » et des aides publiques à la recherche ou à l’éducation (théories de la croissance endogène)
Traitement public des externalités (Pigou)
2- Les biens collectifs (« public goods »)
Usage non - rival Usage rival
Non exclusion
Absence de prix, droits collectifs ou absence de
droits
Exclusion
Prix, droit de propriété ou droit d'usage
18Ch. 6 - Etat et marché
Biens collectifsabondance, usage
illimité
Biens communsaccès libre, mais usage limité (file d'attente)
Biens de club pas de prix de marché mais un prix d’accès
Biens privés pursconsommation exclusive via un prix de marché et
rivale
Biens collectifs sont marqués par la logique du « passager clandestin » (absence d’incitations à produire le bien)
Prise en charge par l’Etat afin d’assurer la production d’un bien générateur d’utilité collective (cf. Adam Smith)
19Ch. 6 - Etat et marché
Le financement des biens collectifs repose sur le principe classique des révélations de préférence. Il en résulte une possibilité de situation de passager clandestin, encore connue sous le terme théorique anglo-saxon de « free riding ». Le passager clandestin n'est toutefois pas un resquilleur ; c'est au contraire, le plus souvent, l'heureux bénéficiaire de la consommation d'un bien public payé par plusieurs autres consommateurs et dont on ne peut lui interdire l'accès sans pour autant exiger en contrepartie son paiement. Le principe de malhonnêteté doit donc être écarté. Le « free rider » profite de la situation qui lui est offerte, saisit l'opportunité qui se présente : personne ne peut lui reprocher cet état de fait qu'il n'a pas lui-même suscité.Claude Pondaven – Les Echos – 13 janvier 2003
3 – Les monopoles naturels
Caractéristique du monopole naturel : fonction de coût « sous additive » (croissance de la production n’entraîne pas une hausse proportionnelle des coûts)
Logique marchande conduit à une sous production par rapport à l’optimum du monopole naturel et à la possibilité de captation de rente par le producteur
20Ch. 6 - Etat et marché
Monopole naturel peut être géré par un acteur public
Question est celle de la tarification :
tarification au coût marginal induit des pertes pour le producteur donc la nécessité de subvention publique
tarification au coût moyen permet l’équilibre du monopoleur mais entraîne une sous production par rapport à l’optimum social
Mise en place de tarifications « non-linéaires » (méthode de Ramsey (1927) – Boiteux (1956) avec plusieurs combinaisons abonnements – tarifs)
21Ch. 6 - Etat et marché
Monopole naturel peut être assuré par une entreprise privée
Question devient celle du contrôle public (situation d’information imparfaite)
Détermination d’un contrat permettant de limiter les possibilités du monopoleur privé de capter une rente (rate of return ou price cap)
22Ch. 6 - Etat et marché
Développement d’une conception théorique selon laquelle l’Etat est complémentaire au marché pour assurer l’efficacité
Existence d’un « domaine réservé » grâce auquel l’Etat peut dépasser les limites du marché et améliorer l’efficacité globale de l’économie
Débat contemporain porte sur la pertinence de cette vision
23Ch. 6 - Etat et marché
Ch. 6 - Etat et marché 24
Lancaster et Lipsey - 1956
Question : s’il est impossible d’atteindre l’optimum de Pareto suite à l’absence de marchés complets, existe-t-il une « deuxième meilleure solution » (second best) dans le domaine de l’efficacité de l’allocation des ressources ?
3- L’Etat et l’efficacité économique globale
3.1 Le théorème du « second best »3.1 Le théorème du « second best »
Réponse de Lancaster et Lipsey
Si dans un secteur il n’est pas possible d’atteindre un optimum paretien car la CPP ne peut s’appliquer, alors il n’est pas souhaitable d’un point de vue paretien que les autres secteurs cherchent à respecter les conditions de Pareto
Dès lors que l’intervention de l’Etat est nécessaire dans un secteur on ne peut a priori déterminer les limites des conditions d’intervention de l’Etat
25Ch. 6 - Etat et marché
Question : peut-on déterminer une fonction d’utilité collective qui servirait de guide à l’action publique ?
Réponse de K. Arrow : théorème du « no bridge » (reprise du principe de Condorcet)
Sous les hypothèses de base de la théorie néo-classique (en particulier l’indépendance des choix), il n’est pas possible d’assurer la transitivité des préférences en matière de choix collectif
Réponse au problème du « no bridge » suppose de lever l’hypothèse d’indépendance des choix (dictateur, mouvements d’opinion, rôle des partis politiques)
26Ch. 6 - Etat et marché
3.2 L’Etat est-il un « despote bienveillant » ?3.2 L’Etat est-il un « despote bienveillant » ?
Analyse de l’école du Public Choice considère que l’Etat ne peut être assimilé à un acteur autonome mais que les décisions publiques dépendent des choix et des intérêts individuels de ceux qui travaillent dans les structures publiques
27Ch. 6 - Etat et marché
Réflexions critiques sur les visions posant la légitimité de l’intervention de l’Etat comme substitut au marché
1- Questions autour des externalités
En l’absence de coûts de transaction et avec une attribution complète de droits de propriété aux agents concernés, la solution optimale à la question des externalités passe par une négociation directe entre les acteurs
28Ch. 6 - Etat et marché
3.3 Les interrogations sur les domaines d’intervention de l’Etat3.3 Les interrogations sur les domaines d’intervention de l’Etat
Analyse de Coase (The problem of social cost - 1960)
Interprétation libérale (G. Stigler) :
Solution aux problèmes d’externalité passe par l’attribution de droits de propriétés étendus aux agents
Autre lecture du texte de Coase :
Hypothèse d’absence de coûts de transaction ne peut être effectivement vérifiée
Détermination des droits de propriété est très complexe
Réponse libérale apparaît difficilement réalisable
29Ch. 6 - Etat et marché
Question de la possibilité d’une production privée de biens collectifs (exemple du phare – discussion historique)
Réponse de la microéconomie contemporaine est complexe : aucun mode de production ne peut garantir a priori une solution optimale (dépend des types de coûts de transaction, des caractéristiques propres des biens)
30Ch. 6 - Etat et marché
Questions autour du monopole naturel
Débat sur les frontières du monopole naturel
Possibilité de production sans intervention de l’Etat (réintroduction de concurrence : enchères, concurrence multimodale)
Question des modalités du contrat entre l’acteur privé et l’acteur public
31Ch. 6 - Etat et marché
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